Bubu de Montparnasse. Illustrée de 90

Transcription

Bubu de Montparnasse. Illustrée de 90
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MONTPARNASSE
o T
'Ao
Toite droits de reproduction et
de traduction
réservés peur tous pays
y compris la Suède, la Norvège,
le
Manemark
et
les
Pays-Bas
Published the 20 November 1905
Privilège of copyught in »he United States reserved nuder the
Mar;h,
5,
1905
by Charles-Louis PhMippe
act
approved
>,w
PHILIPPE
Charles-Louis
BUBU
=
de =
Montparnasse
NOUVELLE ÉDITION
Illustrée de 90
de
Lithographies
Grandjouan
ALBIN MICHEL
22,
RUE HUYGHENS,
PARIS
22
PQ
N5B9:
1905
CHARLES
-LOUI5-
PniLIPPE
-DE-
MONT
mRNeRANÛJOUAN
'^'ii^ié^^^^'^Ê
^^^f^jl-
&
CHAPITRE
P'
Le boulevard Sébastopol, au
^
lende-
main du Quatorze-Juillet, vivait encore.
Neuf heures
demie du
et
voltaïques,
arcs
parmi
les
d'un
soir.
blanc
Les
criard
rangées d'arbres, découpent
quelques ombres ou sont perdus dans
les feuillages.
Les magasins sont
més
:
Cour
baiave, le Meilleur
Pygmalion, les
et leurs façades
O
Petils
fer-
Agneaux, la
Marché du
inonde,
sombres, en bas des
l
o
PI
c
BUBU
a
grandes maisons noires, leurs façades
qui tantôt l'éclairaient, ont
tenant
d'assombrir
le
l'air
hautes enseignes dorées que
du jour
faisait
second étage
Les
le soleil
aux balcons,
du premier étage,
celles
dans
briller
main-
trottoir.
celles
et les autres, se
du
perdent
noir avec leurs lettres de bois
le
jaune et semblent se reposer,
comme
le
commerce en
le soir,
gros. Fleurs
plumes, vente de fonds de com-
et
merce, produits alimentaires,
tissus,
ont fermé leurs volets et se sont tus,
boulevard Sébastopol.
C'est l'heure où
regarderont plus
vie
les
les
passants ne
devantures.
La
nocturne commence, avec d'au-
tres buts.
ternes
:
brillantes
et les
Les voitures ont des lan-
les fiacres
avec des lumières
comme deux yeux
de plaisir
tramways avec un fanât rouge
ou vert
et
comme une
avec des mugissements
foule pressée.
Ils
se sui-
vent, se croisent, piétinent et roulent.
A
l'horizon, vers les
020
Grands Boule-
'7îjf-*.nrtwi«iï
«;•'''•' '*-*
varJs, l'atmosphère s'éclaire bien
s'élève dans le ciel et semble
plu?;,
animée
d'un esprit lumineux. Le but n'est pas
ici, boulevard
Sébastopol, où les maga-
sins sont fermés.
Les voitures courent.
Celles qui vont aux
Grands Boule-
vards s'en vont à la lumière et se précipitent
comme
des personnes qu'un
spectacle attire.
Le boulevard Sébastopol
entier sur le trottoir.
toir,
au
dans
l'air
lendemain
le
vit
tout
large trot-
bleu d'une nuit d'été,
du
Paris passe et traîne
Les arcs
Sur
Quatorze-Juillet,
un
reste de fête.
voltaïque-s, les feuillages des
c 3 o
•
•
BUBU
o
arbres,
roulent et
qui
voitures
les
toute une excitation des passants for-
ment quelque chose d'aigu
comme
et d'épais
une vie alcoolique et fatiguée.
C'est le spectacle ordinaire de tous les
soirs,
mais
il
y a des coins de
la
rue ou
des façades de maison qui gardent
souvenir des danses d'hier.
ques bruits ou quelques
11
le
y a quel-
cris qui rap-
pellent les chansons des ivrognes.
Il
peaux qui restent aux fenêtres
qui
y
a quelques lanternes ou quelques draet
semblent réclamer une continuation
du
plaisir.
dans
joui
On
devine ce qui se passe
les consciences.
d'hier,
Les uns, qui ont
regardent
s'il
ne vient
pas encore quelque jouissance dont
ils
pourraient s'emparer. C'est parce
que
les
hommes
qui
ont connu le
plaisir l'appellent éternellement.
Les
ceux qui sont pauvres, ceux
autres,
qui sont laids et ceux qui sont timides, se
promènent parmi
la fête et
que
les restes
de
cherchent dans les coins quel-
débris qu'on
leur
040
aura
laissa*
o
de Montparnasse
C'est parce qne les
hommes
pas connu
sont en peine et le
le plaisir
qui n'ont
les
jours jusqu'à ce
qu'ils soient fatigués
de n'avoir rien eu.
cherchent tous
L'air
•
semble se remuer autour d'eux.
Des jeunes gens bien mis passent par
deux ou par
trois, et s'en vont. Ils
ont
des faux-cols neufs, des cravates élé-
gantes
et
brillante
sobres piquées d'une épingle
et
se
précipitent
vers
la
lumière avec de l'argent dans leurs
poches. Des employés de commerce
causent entre eux
:
«
Nous avons
dansé jusqu'à minuit. Elle
s'est
hôtel de la rue Ouincampoix.
elle
en avait envie
boîtent le pas à
et,
quand
elles se
fés.
ils
bien
emmenée dans un
laissé faire. Je l'ai
1
>
deux
Comme
Deux amis empetites
femmes,
leur adressent la parole,
regardent avec des rires étouf-
Des jeunes gens, avec des yeux
phosphorescents, regardent la
quand un couple passe.
De
femme
gros
hommes fument un
cigare av^c satis-
faction et pensent
«
:
Je suis un gros
• 5 •
7
fonctionnau-e qui gagne douze mille
francs par an.
C'est
»
une jeune femme élégante, au
bras d'un jeune
est
Des couples passent.
homme
heureuse d'avoir
élégant
l'air
riche
;
elle
:
il
est
d'être envié. C'est
une jeune
fillemoins élégante, avec son
amoureux
heureux
qui lui parle en pensant à l'amour.
D'autres couples enfin, mari et femme,
regardent chacun de son côté, échan-
gent un mot
:
leur esprit et leurs corps
sont habitués l'un à l'autre.
Ils
passaient.
passés,
on en
Quand
les
vo3'ait
d'autres.
uns étaient
Des
060
[
commerçants
nant de
que
la
la
se promenaient en te*
place dans la rue autant
devanture de leurs magasins.
Un jeune homme
femme
serrait le bras d'une
et la suivait
sentait qu'il l'eût
du monde. La
avec
servilité.
On
suivie jusqu'au bout
vanité,
gaieté, la
la
luxure marchaient dans les lumières.
L'air en était chauffé.
tait la
fées
fatigue d'hier
!
Il
Ah
!
qu'impor-
venait des bouf-
chaudes à cause des souvenirs de
l'orgie et les
cœurs
se contractaient de
désir. Parfs semblait
un chien
court encore après sa chienne.
070
las qui
Les
iîlîes
publiques faÎGaient
leur
métier. Voici la petite Gabrielle qui
vécut deux ans avec Robert, l'assassin
de Constance,
Son amant
vient de
partir
aux travaux
petite
Jeanne qui doit avoir dix-sept
forcés.
Voici
la
ans. Depuis le mois dernier, elle se
promène boulevard Sébastopol.
n'a sur le visage qu'un
de
riz et ses
leux du
yeux
plaisir.
Elle
peu de poudre
brillent des
premiers
Beaucoup de gens
ne laprennent pas pour une prostituée.
Voici les filles publiques en cheveux et
les filles
publiques en chapeau. Les
imes ont une démarche
vache
et
accostent les
6 8 o
lourde
de
hommes avec
impudence.
D'autres
raccrochent du coin de
A
rent leur sourire.
se
tortillent,
l'œil et
l'angle de la rue
Rambuteau un groupe
humides
à gauche,
à des débris de choux.
formé.
est
Elles parlent toutes à la fois.
les Halles
prépa-
On
On
voit
on pense
dirait
des
grenouilles qui coassent auprès d'un
marais.
Les agents
deux.
Il
des
est facile
de
mœurs
les
vont par
reconnaître à
cause de leur regard, de leur mise
malpropre
Ils
sont
et
de leur marche grave.
malpropres
comme
leur
marchent avec raideur,
métier.
Ils
comme
des gens qui
o 9 •
accomplissent
o
BUCU
o
ime fonction.
Ils
regardent
les
femmes
depuis la tête jusqu'aux pieds avec un
regard qui s'appuie. Le regard des
passants regarde, celui des agents des
mœurs surveille. Décoré de la médaille
militaire,
un gros brun, dont
la
mous-
tache forte accentue la gueule, mar-
che en portant ses poings. Les
filles
publiques passent raides, sans tourner
la tête,
sait
que
avec leur âme d'esclave qui
la raison
du plus
fort est tou-
Les boniments des camelots. Quand
un
un came-
serf^ent de ville s'éloigne,
d'une casquette,
le
moustache déteinte,
ils
lot suro-it. Coiffés
visap^eanimé,
avec chaleur, car leurs pas-
parlent
violentes et
sont
sions
la
gagner de quoi manger
ils
veulent
et
de quoi
boire. Celui-ci, qui n'a peut-être pas
dix-huit ans,
casquette
la
enfoncée
jusqu'aux oreilles, chaussé de bottes
collantes, tourne autour
du cercle de
curieux en soulevant ses bottes.
Il
vend pour deux sous un carnet d'imatransparentes
ges
devant
les
sur
un
les
poursuit
dont
ils
promène
:
Et
«
la Ville
si
vous voyez
les
de Paris s'amener
képi, prévenez-moi, messieurs
U dames,
aller
les
yeux avec des mouvements
d'escamoteur
armes de
et
à seule
fin,
attendre.
comme
sont les
»
les
que
La
filles
je
jouisse
police
publiques
amants de cœur.
II
o
les
p*l
'^:ï>i1
Pierre Hardy, ayant travaillé tout
le
jour à son bureau, se promenait au
milieu
des
Sébastopol.
passants
du 'boulevard
Un jeune homme
de vingt
ans, qui n'est à Paris que depuis six
mois, marche avec incertitude parmi
les spectacles parisiens.
Les voitures
qui roulent, les lumières crues, la foule
des rues, la luxure
et le bruit
une confusion de Babel qui
O 12 9
forment
effare et
.Sde Montparnasse
'
TousV'
fait
danser trop d'idées à
les
provinciaux ont senti ce malaise
la fois.
sont deveni.3 gauches et tristes en
et
face de cela. Je vous assure que les
beaux gars des villages qui paradaient
dans
les bals font triste figure sur les
Grands Boulevards.
Un homme
les
qui
marche porte toutes
choses de sa vie
sa tête.
Un
et les
remue dans
spectacle les éveille,
un
autre les excite. Notre chair a gardé
tous nos souvenirs, nous les mêlons à
nos désirs. Nous parcourons
le
temps
présent avec notre bagage, nous allons
et
nous sommes complets à tous
les
instants.
Voici les idées que Pierre Hardy
promenait ce
soir-là
:
Dans une maison d'une
petite ville
où ses parents sont marchands
de
l'Est,
de
bois, Pierre
Hardy se
plaît à retour-
ner en pensée parce qu'il a vingt ans
et qu'il
n'habite Paris que depuis le
mois de janvier. C'est une maison en
haut d'une côte, qui
o 13 o
est
o
un peu en
'^
^
^
^4^
^
r
6
BUBU
o
dehors
de
On
entoure.
Taise pendant
est à
y
qu'un jardin
et
ville
la
les soirs d'été
où l'ombre
de
l'on
brises, et
est pleine
dans
s'assied
le
jardin poui- respirer la nuit. Les étoiles
occupent
la
éclairs
qui
chaleur
»
pensée
on voit quelques
;
sont
des
«
et l'on vit
de
efforts
paisiblement au
milieu des siens en fumant ses pre-
mières cigarettes. Tous
sont charmants.
troD
chaud, au
soupe,
on
Le
du
il
fait
de manger
la
lait
:
rafraîchissement qui vous
jusqu'au
cœur.
sœur mariée
Parfois
et sa petite
passer huit jours.
On
détails
quand
soir,
lieu
boit
les
c'est
un
rafraîchit
sa
grande
nièce venaient
faisait
un peu
plus de cuisine, on était un peu plus
gai.
de
La jeune sœur
jouait à la
la petite Juliette.
lui achetait
manquait
la
Il
des friandises.
rien.
Tous
les
maman
promenait
Il
et
ne leur
membres de
cette famille sentaient bien qu'ils for-
maient un tout dans
reuse.
0140
la
nature heu-
II
pensait encore à ses trois années
d'école professionnelle.
Il
avait appris
à dessiner des ponts et des machines
aux
traits
au
teintes
compliqués
et
à passer des
lavis, nettes et
admirable-
ment fondues. Ses parents avaient
fait
encadrer dans leur chambre un beau
représentant une gare entre
dessin
deux
collines.
l'école,
daille
Il
était sorti
Il
n"
2
de
avec un diplôme et une mé-
en vermeil.
comme
put entrer
dessinateur à
cent cinquante francs par mois dans
une compagnie de chemin de
regrettait
comme
de ne
s'être
fer.
Il
pas présenté,
le lui conseillèrent ses profes-
seurs, à l'Ecole des arts et métiers. Ses
parents se fussent imposé ce sacrifice
et
rapidement
il
serait arrivé
au grade
de chef de bureau.
i
Sur ce boulevard Sébastopol, dont
les globes électriques s'en allaient à la
file, il
se promenait parmi des milliers
de passants. Les lumières perçaient
les feuillages
des arbres et tombaient,
Q
15
O
o
BUB'J
e
dans l'ombre des branclr^s, sur
trottoir. Illui
étaient
foule
plus
brillantes
Les jeunes
milieu
de
se
croient
cent
mille
ne connaissait personne
Il
marchait toujours,
c^
que cette
et
provinciaux
au
/hommes.
semblait que ces lumières
encore plus nombreuse.
était
perdus
le
et
des passants
et
nouveaux passaient, tous semblables,
avec leur indifférence,
et qui
même pas. Leur
comme celui d'une
regardaient
l'entourait
tude dont
il
ne
faisait
pas partie.
ne
le
bruit
multiIl
les
voyait par masses, avec des remous et
des gestes, gais
de
rire
sage
qu'il
comme quelques
et brillants
gards de femmes
Il
éclats
avait entendus au pas-
comme
quelques re-
qu'il avait
vu
briller.
essayait de se raccrocher à quel-
que chose pour n'être pas submergée
Il
avait besoin de descendre
même
et d'y trouver,
en
lui-
en face de ce
qui passait, quelque joie pour n'être
pas perdu au milieu de runiverselie
gaieté,
i6 ©
Avec des
pierres et
du ciment
je
me
dresse et je vous arrête alors que vous
hurlez.
Il
la
»
habitait,
rue de
l'
dans un hôtel meublé de
Arbre-Sec, une chambre
au cinquième étage. Ces chambres
-y
d'hôtel
sont
toujours
o
17
o
maipiopres
à
'%^éS
BUBU
o
'
parce que trop
-
•'
de locntnirc? v ont
vécu. Le lit, Tai moire à glace, les deux
chaises et
à
table
la
emplissent. Elle< sont
roulettes
les
petites
que
si
ces quatre meubles semblent encombrants. Ici l'on vit, à raison" de vingt-
cinq francs par mois, une vie sans
dignité. Les matelas
les
rideaux de
comme un
garçon de
qui
lui
du
lit
sont sales,
fenêtre sont gris
jour de vie pauvre.
l'hôtel a
Le
un passe-partout
permet à tout instant d'en-
trer dans votre
changent tous
les
la
chambre. Vos voisins
les
quinze jours
entendez à travers
et
vous
la cloison.
Les
uns sont des couples alcooliques qui
se disputent, d'autres ont
de prostitution,
sont sages,
fiance.
ils
et,
si
une odeur
quelques-uns
n'inspirent pas
Les pauvres
locataires
condes
hôtels meublés n'ont pas de chez soi.
Pierre Hardy ne pouvait pas se dirf
€
J'ai
un refuse
triste, je
qui
où,
quand
je
',
suis
m'assois parmi des chose:>
me plaisent.
»
..
Son
seul refuge était son
Buisson auquel
il
s'allia
dès
ami Louis
le
premier
jour. Louis Buisson avait vingt-cinq
ans
et
travaillait
©
19
comme
o
dessina-
•
BUBU
o
teur dans le bureau de Pierre Hardy.
C'était
un
iiomme de l^jSS de
petit
hauteur qui avait été refusé au service
militaire
de
cela,
pour défaut de
il
taille.
n'inspirait pas
A cause
beaucoup de
respect à ses camarades, qui le consi-
déraient
comme un bon
garçon, mais
dont l'importance n'avait qu'un mètre
cinquante -trois de hauteur. Ancien
candidat à l'École polytechnique,
avait étudié les
lui
donna
l'habitude de l'analyse et
il
resté interne jusqu'à vingt ans
était
dans un lycée de province, ce qui
avait
il
mathématiques, ce qui
donné l'habitude de
lui
la souffrance.
L'échec de ses beaux rêves d'avenir
rendit modeste.
Il
pensait
;
le
«Je gagne
cent quatre-vingts francs par mois.
Je suis
comme un homme du
pour gagner
et je travaille
je
mange.
littérature
s'être
>
Le
et
soir,
il
peuple
pain que
s'occupait de
de philosophie
promené dans
la
après
rue en regar-
dant les jeunes femmes.
<
le
Il
disait
:
Elles courent après ce qui brille, des
o
jeunes gens riches
et
de Montparnasse
des jeunes gens
beaux. Les jeunes gens riches les for-
ment au hixe
et les
jeunes gens beaux,
qui les trompent, leur apprennent que
l'amour est un simple
nous reviennent plus
Elles
plaisir.
nous
tard. Elles
ruinent en toilettes et en spectacles et
n'ont plus assez de ferveur pour devenir nos
amoureuses et nos compagnes.
Pour moi.
j'entretiens
une correspon-
dance avec une petite bonne. Parce
qu'elle est simple et travailleuse,
nous
nous mettrons en ménage. Je veux
comme un homme du
vivre
avec une
femme du
peuple,
peuple.
D'ail-
leurs, je hais les riches qui nous volent
nos
11
plaisirs.
était
>
dans ses meubles
et habitait,
quai du Louvre, une chambre au cin-
quième étage. Pierre Hardy
le récit
lui faisait
de toutes ses émotions
et
de
toutes ses aventures et Louis Buisson
faisait
telle
les
mêmes
confidences:-
Une
amitié nous encourage à vivre,
en prolongeant nos
plaisirs et
en nous
•
—
A
tSUBU
à
consolant de nos chagrins.
Je
.
On
«
:
Mon
|
y
cher ami, nous soufiVons
M
qui
sommes pauvres
parce que nous
surtout
et
avons
cœur honnête.
»
et
||
que nous
parce
timides,
le
:
me
raconterai cela à Louis,
dira
se dit
Ils
étaient
séparés par une petite différence d'é-
Hardy
ducation. Pierre
de l'Arbre-Sec, qui
habitait la rue
une rue de
est
Paris. Louis Buisson habitait le quai
du Louvre, où
est
l'air
bien
plus
libre.
Mais
suffit
il
y a des soirs où l'amitié ne
pas. Les paroles et les spectacles
ordinaires de l'amitié nous reposent.
Nous avons besoin de nous fatiguer
aussi. Pierre Hardy sentait au milieudu torrent un, peu de joie qui
de son ami
pensant
:
«
en
VousJl!av£z__pii&Jia—amL
»
Mais cela ne
consolait pas et tout le bruit
boulevard disait
:
avoir une femme.
«
venait
et regardait la foule
commeJLouis Cuisson.
le
lui
« Il
» Il
du
vaut bien mieux
pensait encore
J^_m^^prépare^;_passerJ^exame^^
O 22 O
:
.
condnctcnr des ponts
chanssccs.
et
nommé
hommes
J'arriverai certainement â être
chef de bureau. Tant de ces
femmes au bras
qui passent avec des
vont resterpeliis employés!» Mais tou
en passant
la loule
porte!
rions.
lui criai
t
:
«
c
Qu'im-
Nous avons des femmes et nous
répondait:
> Il
«
J'ai
im père
et
une mère qui m'aiment plus que ne
vous aiment vos fenimes.
porte
!
disait la foule.
rions.
Alors
es seul et tu
de coinprendre
fut obligé
il
que toute
d'une
joie
la
ne pouvait rien opposer à
lumières
et
>
mieux que son existence
plaisir.
Qu'im-
Nous avons des femmes
t'ennuies.
nous
Tu
—
-
et
aux
fête
vala't
solitaire.^
l'éclat
Il
des
débordements du
Louis Buisson, passionné pour
deux ou
trois
principes
philosophi-
ques, y trouvait assez de force pour
o 23
o
AiJ^
.-y^
K
BUBU
o
hommes
regarder les
leurs,
cherchait en eux quelques
il
nouveaux
IPierre
en face. D'ail-
principes
Hardy
découvrir.
à
avait vingt ans
et se
trouvait tout seul, avec mille désirs,,
au milieu d'un Paris bien tentant.
Et souvent ses désirs l'avaient mené.
Certains soirs, ayant travaillé jusqu'à
onze heures,
il
fermait ses livres et se
sentait triste à côté de leur science.
Tous
les
diplômes ne valaient pas
bonheur 'de
vivre.
Deux ou
ges de femmes rencontrées
raissaient à l'imagination et
vait,
lui
il
le
ima-
trois
appa-
les sui-
d'abord pour se délasser. Puis
tout le feu de ses vingt ans s'animait,
tous ses sens sentaient ce que contient
une femme qui passe. Alors
sait, la
gorge sèche
éteignait sa
lampe
et le
et
il
se dres-
cœur
serré,
descendait dans
la rue.
Il
marchait. Des prostituées pirouet-
des coins de rue, avec de
taient à
pauvres jupes et des yeux questionneurs
:
il
ne
les regardait
9 24 o
même
pas.
de Montparnasse
*
Il
comme marche
marchait
rance. Quelque jeune
marchait devant
serrée
ralentissait le
Voici qu'elle
Alors
il
l'espé-
lui adressait
le
alors
lui,
un
sourire.
lemme
marchait
parce qu'elles étaient trop
comme
en
faciles. Il
parler aux autres parce
n'osait pas
qu'elles n'avaient pas l'air faciles.
comme marche
Il
l'espérance,
de femme en femme, jusqu'à ce
M
à
ne voulait pas des unes
Il
marchait
il
la voir.
marche l'espérance, de femme
femme.
n'y ait plus d'espérance.
qu'il
__
Parfois une jeune ouvrière attardée
le dépassait,
trer
chez
noire,
marchant
elle.
un corsage simple
qui,
Hardy
une jupe
et
C'était
comme un
travaille et
pour ren-
vite
Elle avait
peau sans ornement.
fille
I
pas pour mieux
parce qu'une autre
la taille serrée... Il
i
à la taille
pas pour mieux
allongeait
la fuir et
P'M-
femme
•»
jeune
un cha-
une jeune
homme,
pense à l'amour. Pierre
se disait ces choses avec naï-
veté et la suivait, bien vite la suivait.
'
c
DU3U
Il
à
rexaminait,
la
quantité
la
lui parler
il
Quand
disait
» Il
la suivait
toutes
ses
grands pas,
idéal.
Il
il
arrivait à
Je ne veux pas
«
:
qu'elle
maintenant parce que nous
sommes dans une
tée.
bonheur
de
pourrait donner.
sa hauteur,
soupesait en pensant
voie trop fréquen-
pas à pas en remuant
pensées
et
l'eût suivie
suivait
la
comme on
à
poursuit un
bien loin dans
la
nuit parce qu'elle portait de la lumière.
Toutes ces aventures avaient
la
même
fin.
Sans que
fille
sonnait à la porte d'une maison.
l'on s'y attendît, la jeune
Elle arrivait chez elle.
une
dernière
fois
Il
la
regardait
continuait
et
sa
route en p)ensant au lendemain et à
tous les lendemains pendant lesquels
il
ne rencontrerait pas ce bonheur
qu'il venait
Et à
la fin
marché,
il
de laisser
fuir.
du compte, fatigué d'avoir
sentait encore
désirs qui le poussaient.
paix
il
sur un
les
Pour
vieux
iivoir la
prenait la première venue,
lit
d'hôtel meublé,
o 26 O
et,
moyennant
'^^^^S'i-^^^^i^^^^
quarante sous, se déversait Jans une
fille
sale
comme un
déversoir
pu-
blic.
Ce
:^^^
soir
du quinze
juillet, le
boulc-
vard Sébastopol vivait bien plus. Les
uns
pas,
et
'amour.
«
Il
par couples, à petits
passaient
semblaient
promener leur
Des ieunes gens
disaient
Elle avait de petits seins
:
fermes.
faudra bien que je la retrouve.
»
Paris marchait avec des voitures qui
roulent, avec des chansons d'ivrognes
et
avec tant de
o
filles
27 o
publiques
qu'il
'^
«
BUBU
o
en
était
quelques-unes qui tentaient.
Les arcs voltaïques s'entouraient d'un
halo
de l'un à
et,
l'autre,
éclairant
entre les maisons, formaient
l'air
un
grand canal lumineux qui débordait
les toitures,
montait jusqu'au
son
lui jetait
ieu.
ciel
et
Cette atmosphère
vous baignait dans un
fluide
dans un bain électrique
et pénétrant.
subtil,
Puis des vents chauds, l'exhalaison
comme
d'une nuit d'été faisaient Paris
une bête hurlante, avec des sueurs
et
des yeux fous, et qui soufflait son haleine jusqu'à
pondait à
un
sur
le
les
cœurs
Un
un passant
lumières
cri ré-
éveillait
l'allumaient
chaque vie se gonflait
fétu,
boulevard
la bête
défaillir.
l'autre,
désir,
comme un
en
et criait aussi,
comme
d'amour, jusqu'au fond des
défaillants.
Et Pierre Hardy se
les rappela, les
courses aux femmes.
honte à se
Il
les rappeler
eut
sous
de
la
les lu-
mières parmi des miUiers de passants,
mais
il
les ressentit ainsi
e 28 »
qu'un
homme
y'jr^
ressent de c^randes idées qui le mènent.
Devant ses 3'eux marchait
la
avec son sexe, son sexe ouvert,
j|'
disait
tut
le
Femme
comme
Louis Buisson., Pierre Hardy ne
plus riem Paris débordé
le roulait,
prenait entre ses grandes eaux et
o
29
2
o
BUC'J o
Hardy,
Pierre
J'entraîiiaitj
marchand de
bois,
fils
d'un
ami de Louis Buis-
son, candidct à l'examen de conducteur des ponts et chaussées, l'entraînait entre ses
l'entraînait
deux
rives perdues, et
jusqu'au bout du monde.
"
Au
r.\m
'^^^;r>'s^i^io&.r-ii^-^^-^
coin de
la
rue Greneta,
il
3'
n
'^
eut
un rassemblement autour de quatre
chanteurs.
heures,
ils
et,
pas encore dix
n'était
Il
à
un dernier coin de
rue,
chantaient peut-être leur dernière
chanson. Le père raclait un violon de
bois rouge, dont la voix
maçante
le
faisait
du
neu\e
et gri-
bruit, et regardait
cercle des badauds avec des
yeux
aigus où l'on voyait passer des étincelles
et
du
sang.
La mère, au
ventre grossi par les couches^
seins
bouffis
de
dans su lace en
bête
débris
o 31
o
usée,
deux
aux
avait
\clix
*
BUBU
o
comme deux
bleus
femme
fleurs sales. Elle
une voix pointue de
Et les deux petits en-
chantait avec
criarde.
fants, qui, tout le soir, avaient chanté,
tremblaient
sur
d'eux tournait
mauvaise
bête
père
;
il
ses
yeux comme une
il
ressemblait à son
;
yeux
le
voulu
plus petit, jaune avec
bleus, aurait voulu,
mère, tomber sur
Raris les avait
L'un
les
était si las qu'il aurait
mordre. Mais
la
jambes.
leurs
p^ris
le
dos
et
comme
dormir.
dans sa main qui
broie et tous quatre, les bons et les
méchants,
les avait broyés.
C'était, t'en souviens-tu, Lison,
Dans
Tu
ta
chambrette
:
enlevais ton petit jupon,
Moi ma
jaquette.
Des mères avec
Trois petites
leur
fille
ouvrières
écoutaient.
qui avaient
acheté la chanson suivaient les paroles.
Des passants
s'étaient
campés
par désœuvrement, d'autres jetaient
un coup d'œil
et partaient.
Il
n'y avait
\
monde autour
pas ^rand
r/onlparnnsC3 «
cl'î
teurs parce qu'il
des chan-
eu trop de
avait
3'
chansons. Pierre Hardy s'arrêta.
regarde cela parce
quelque
Quelques
chose.
On
regarder
qu'il faut
pu-
filles
bliques aussi, sachant que les rassem-
blements sont pleins d'excellentes oc-
Et
casions.
violon
maladroite
voix
la
par-dessus
rouge,
les
du
trois
autres voix, égale, mécanique, sans
délicatesse
Tu me
«
t
:
disais
:
Mon
«
veux
Si tu
Tu mettras quelques
Dans ma
€
<
On
Hardy
coup
pièces d'argent
tirelire. »
vend deux sous.
la
>
Pierre
l'acheta. Il la lisait sans beau-
lorsqu'une
d'attention,
femme, à côté de
aussi,
dit
chanson.
que
cher amant,
rire,
la
:
«
» Il
Ce
jeta
lui,
n'est
qu^.., la
pas
un coup
petite
lisait
la vraie
d'œil et vit
jeune femme avait des ban-
deaux noirs
et
un
air gentil.
»
BU»3U
•
«
fut bien émn
comment est donc la vraie
en
II
Et
son?
;
Elle répondit
«
clian*
>
La
:
chanson
vraie
dit
C'était, t'en souviens-tu,
Un beau
Cela
lui
:
Lîsca
dimanche...
»
parfaitement égal,
était
mais une jeune femme coiffée de ban-
deaux nous rend beaucoup de choses
intéressantes.
Alors Pierre n'écouta
plus les chanteurs.
Il
lui dit
:
<
Vous
devez bien chanter, mademoiselle.
Elle
répondit
:
Pas maintenant, parce
c
suis enrouée.
Dix heures
>
que
je
>
allaient venir et la voix
misérable du violon rouge criait encore, jusqu'à ce qu'il fût défendu de
crier. Ils
rieu.^
n'avait
quittèrent le
et,
pas
comme
l'air
o
la
groupe de cujeune
effarouchée,
31
9
femma
il
lui
offrit
un bock.
qu'elle
C'est
Berthe,
Il
avait grand'peur
ne l'acceptât pas.
ainsi
le
que Pierre rencontra
soir
du quinze
o 35 o
juillet.
Il
*
c
BUBU
o
souriait à cause de sa gentillesse et de
ses bandeaux.
^Vi
k>.
/.
y
i-*-^
j^f'*,«--w
CHAPITRE
A
II
minuit et demi, lorsque Berthe
eténier rentra dans sa
chambre de
Mau-
rue Malebranche, son amant
ce était déjà couché. Par scrupule
conscience
la
ouvrit
il
reconnut.
Elle
bougie brûlait sur
s
la
en approcha pour
bouton qui
la
genou.
elle
Puis
un coin d'œil
se
La
table de nuit,^elle
regarder un
piquait
plongea
î7
déshabilla.
c
au-dessus
la
main
petit
du
àATi^
^
BUBU
o
son bas gauche où
elle avait
l'habi-
tude de mettre son argent, en
les cent sous
de Pierre et les posa au-
près de la bougie. Cette
tout ce que tu as
puis huit heures
Eiie répondit
—
Eh
tu verras
Il
Maurice
fois
yeux pour voir
ouvrit les deux
— C'est
sortit
:
fait
de-
?
:
bien! vas-y donc toi-même,
si c'est facile.
du côté du mur en haus-
se tourna
sant les épaules.
idiot d'avoir
Il
pensait^:
«
^'est
une femme qui ne
pas travailler.
sait
»
Elle se coucha après avoir soufflé la
bougie. Maurice
content tout de
fait
n'étai-t
pas trop mé-
mêm3 parce
qu'il avait
son petit supplément. Chez
chand de
vin,
avec un jeune
mar-
son ami Paul l'attendait
homme
jouer aux cartes
qui accepta de
encore avant la
semaine. Berthe
faire sept irancs
c
chacun
auquel
et
d'eux gagna trente sous.
trois jours
le
Il
y avait
fin
de
la
.ayait_lsL---teii-i-ps--tie
pour
3S
i
la
location de ia
de Montparnasse
o
ambre. Us pouvaient donc dépenser
.feh
dans
six francs cinquante
la
journée
du lendemain.
Il
pas fatigué. Alors
n'était
tourna du côté de Berthe
et lui
il
se
passa
bras autour de l'épaule. Elle l'em-
le
bouche. C'est
brassa à pleine
chose hygiénique
homme et
un
sa
une
bonne entre un
et
femme, qui vous amuse
avant de vous
petit quart d'heure
endormir. Elle
faisait
tous ses efforts
pour goûter du
plaisir
en
que
lui.
Tout
même temps
alla bien. Elle
jamais quand
c'était
Ensuite elle
dit
ne se lavait
avec son
:
— Vous vous imaginez que
comme on
veut.
homme.
Il
l'on fait
y en a plus d'une,
ce soir, qui ne les rapportera pas les
cent sous.
J'ai
rencontré un type qui
ne voulait d'abord
trois francs, et puis
me donner que
il
a consenti à
m'en donner cinq à condition que ce
soit
pour une
mieux
ça.
On
heure.
Moi, j'aime
se iait des clients, et
puis c'est meilleur genre.
o
35
o
c
BUBU
a
Maurice ne répondit pas.
tinua
Elle con-
:
— Oh!
oui, je sais, tu parles de
sœur Blanche, parce
ma
qu'elle fait quinze
francs. Et puis, après ça, elle s'amuse
avec des
petits gars et elle reste trois
jours sans travailler.
Maurice ne répondit
'
— Moi,
aussi, je pourrais faire des
types à quarante sous.
me
qui
le
rien.
Il
y en a assez
proposent. Et puis
il
faudrait
comme Blanche
un peu. Tu trouves
courir toute la nuit
pour ramasser
déjà que je rentre trop tard.
Elle avait
un grand besoin d'appro-
bation. Etant faible, elle avait besoin
d'un soutien; étant douce,
elle avait
besoin de bonnes paroles.
Elle eût
causé longtemps. Il savait qu'en affaires
il
faut toujours se
montrer exigeant.
Les femmg.£.ji£LirâYailleraie nt plus_ si_
_
on voulait
dit
les
entendre.
Il
répon-
:
—
Fous-moi
la
dgnnir,
40
paix
!
Laisse -moi
n
Maurice Bélu naquit
le quartier
tenait
un
l'âge de
parce
vécut dans
de Plaisance où sa mère
commerce.
petit
seize ans,
qu'il
et
il
Jusqu'à
resta à l'école
vaut mieux avoir un peu
plus d'instruction et parce qu'on a le
temps d'envo3-er
tissage
où
ils
les enfants
en appren-
contractent de
vaises habitudes.
Il
mau-
reçut une éduca-
tion soignée, sortit de l'école avec son
9419
«
BUBU
•
brevet simple
et
fréquenta les garçons
donnèrent
de son âge qui
lui
nom de Bubu.
apprit le métier d'ébé-
Il
chez un
niste
Saint-Antoine.
Un
ses
jour
du^ faubourg
patron
On
de
l'atelier,
anciens camarades
l'aperçut
Bubu
s'écria
:
<
un de
qui
d'école
voilà
Tiens,
Ceci ce fut pas perdu, puis-
»
!
Maurice.
l'appelait
qu'il sortait
le sur-
que rien ne se perd. Maurice redevint
Bubu.
un
C'était
petit
homme
dont
le torse
reposait avec force sur des jambes solides.
se
Il
disant
:
«
frappait la
Petit,
poitrine
mais costaud.
tête était osseuse, et ses
deux
»
en
Et sa
3'eux se
cachaient derrière les pommettes, volontaires et
un peu
dissimulés.
Il
avait
surtout deux mâchoires arquées qui,
broyant
ment
les
aliments avec un craque-
d'os et de nerfs et de muscles,
montraient toute leur anatomie. Ceci
ne veut pas dire
tits
qu'il avait
des appé-
énormes, mais simplement
avait le
coup de dent
o 42
décisif,
o
qu'il
•
Au
de Montparnasse
temps où sa mère l'envoyait
l'école par crainte des
3
mauvaises ha-
bitudes que l'on contracte en appren-
Bubu
tissage,
fit
un
certain
nombre
de connaissances. Les unes étaient des
apprentis qui, chaque soir, rôdaient et
riaient
dans toutes
étaient ce
dans
la
que
rue
Les autres
les rues.
l'on
aime à rencontrer
les petites filles
:
de qua-
torze ans, celles de quinze et celles de
seize. Elles sont les filles
de parents
pas trop sévères qui font l'éducation dt
la
jeunesse par
Elles désirent
ceux qui
le
moyen de
la liberté
beaucoup de choses
les voient
prennent
et
la har-
diesse de leur en offrir encore davantage. Vous, rue de Vanves, et vous
aussi, talus des fortifications, par les
beaux
soirs sans lune,
passer Bubu.
rue,
comme
Il
vous avez vu
apprit à connaître la
elle est
pour ceux qui
rôdent, avec des étalages où l'on peut
exercer son adresse, et avec des aventures.
Il
apprit quelque chose de plus
Utile
il
apprit à manier les
'
:
'
© 43 3
femmes.
•
à
cUcU
«
Ce
qui devait arriver arriva, un jour
où ^Libu,
la
alors âgé de dix-neuf ans,
connaissance d'une grosse
la
rue de
la
Comme
Gaîté,
nuit,
la
lait
tude de décision,
Avec
celui
de
sa prompti-
Bubu annonça
à
métier d'ébé-
l'atelier qu'il quittait le
pour
elle travail-
fallait qu'il dis-
il
posât de sa journée.
niste
fit
de
pour que Bubu pût se
son amour,
livrer à
fille
déménageur.
l'annonça avec orgueil parce qu'on
Il
le
plaisantait sur sa petite taille et parce
que ceci montrait à tous que Bubu
était fort
Il
où
fut
la
comme un déménageur.
content de son nouveau métier
journée est bien payée, où
ch_ômage
est abondant et
où un
le
homme
adroit peut se faire des bénéfices sup-
plémentaires.
Il
n'achetait jamais de
souliers, par exemple.
la
femme
s'accrut
Sa science de
au contact de
la
grosse Hortense. Sa mère- n'était pas
toujours approbatrice, mais Bubu, dont
les
convictions étaient fortes, trouva
des paroles solides qui
o 44 Q
la
remirent en
ô de r,7onlpa 'nasse o
même lui montra deux ou trois
qu'il était un homme d'action et
place et
fois
n'aimait pas les contradicteurs,
II
se
fortifia
dans sa voie, lâcha Hortense
chemin
faisant, puis atteif^nit sa
rité.
taire
Il
fut
exempté du service
majomili-
pour un défaut du pied.
Alors Maurice Bélu se prépara.
réalité, ses idées
précises, mais
l'argent et
de
la vie
il
d'avenir n'étaient pas
savait qu'il faut de
une femme. Ces deux forces
présente nous dirigent vers
la vie future. Il se
fît
donnerune somme
de cinq mille francs qui
droit
il
En
lui
de son père. Quant à
s'en charsreait.
revenait de
la
femme,
o
BUBU
o
Le Quatorze
reux jour où
Juillet arriva.
Bienheu-
boutiques des mar-
les
chands devin sont pleines de drapeaux,
où
les
comités socialistes-révolution-
Le
naires
célèbrent leurs victoires.
soir,
y a des bals entourés de lam-
il
pions, les pistons ont des gueules de
cuivre et les tables des cafés envahissent la rue par permiss'on spéciale du
gouvernement. Le peuple, à cause de
.l'anniversaire
ses
filles
de sa délivrance,
danser en
Jerthe
liberté.
Météiiier,
ç
laisse
46 o
petite
ouviicre
do Montparnasse
o
âgée de
fleuriste
un
gardait
de
bal
ans,
dix-sept
la
re-
rue de Vanves
en compagnie de Marthe, sa grande
sœur, et de Blanche, sa petite sœur.
Ses bandeaux noirs, autour de son
donnaient un
visage, lui
air
pâle,
mais ses 3'eux vivaient avec beau-
coup de douceur.
Maurice
à danser une première
firent
lois,
une deuxième danse
l'invita
puis
ils
et ensuite
une troisième.
deux,
même
elle
admirablement tous
dansaient
Ils
les
taille,
prendre
il
très
était
peu près de
étaient à
ils
bien élevé,
était très
douce.
quelque
Il
chose,
l'invita
mais
à
elle
refusa parce qu'elle était avec ses deux
sœurs.
Il
Marthe
et
chapeau
—
se
fit
montrer
la
grande sœur
s'avança en soulevant son
:
Pardon,
mademoiselle,
puisque vous accomplissez
tions
de
mère, je
les
mais
fonc-
m'en vais vous
adresser une demande. Voulez-vous
me
permettre
d'offrir
un verre de limo-
« 47 o
*
•
BUBU
o
nade à mademoîselle votre sœur
faire
le
me
quelque
d'accepter
plaisir
et
chose aussi?
Marthe savait que
aucun danger en acceptant
d'un jeune
sit,
homme bien
on causa.
ne court
l'on
l'invitation
élevé.
On s'aspou-
était ébéniste et
11
vait faire des iournées
de sept à huit
francs.
Marthe
travaillait
faisait
blanchisseuse
'était
dans
l'atelier
son apprentissage.
le disait,
et
où Blanche
Comme
elle
on avait voulu que Blanche
pût blanchir
les autres. Elles
quatre trères.
y en
11
avaient
avait
deux
qui devaient être en train de caurir
par
là.
Leur père
était veuf.
Il
était peintre
en bâtiment, il avait parfoi&i;,|«s coliques
de plomb
mode.
et n'était
pas toujours com-
On donna beaucoup
La gosse Blanche en
et riait
était
de
détails.
heureuse
en buvant son sirop de grena-
dine.
Maurice donna un rendez-vous à
a
48
a
c
CU2U
«
Berthê pour
vintj
mais
snrîendemiîn.
le
elle
F.lle
y
ne pouvait rester long-
temps, par crainte de son père.
Ils
se promenèrent en
s'embrassèrent deux
lois
causant et
dans une rue
sombre.
Au second rendez-vous,
oHrit
Maurice
lui
une bague en doublé avec un
brillant rose.
Au
troisième
rendez-vous,
ils
se
promenèrent bras dessus bras dessous,
consentit à
et elle
entrer
avec
lui
dans un caté de l'avenue du Maine.
Maurice
n'était
pas pressé parce
ne voulait plus des amours
Berthe
filles
lois
était
comme
quM
léjjères.
jeunes
les
des faubourgs qui déjà bien des
ont trouvé l'occasion, mais ne s'y
sont pas précipitées parce que demain
la leur offrira meilleure. Elle
ne vmt
pas au quatricmerendez-vous. Maurice
la
guetta
une
le
lendemain
et lui
carrée.
explication
demanda
Son
Tavâit
empêchée de descendre.
pondit
:
o
50 o
père
Il
ré-
—
Mademoiselle, vous
me
l'aviez
promis. Etant données les relations
qui existent entre nous, vous n'aviez
pas
le droit
messe.
de manquer à votre pro-
Pour ma
part,
aucune force
humaine ne m'empêcherait
devant de vous quand
d'aller au-
je l'ai dit.
Elle baissa la tête avec cet air niais
des pauvres enfants très douces qui ne
savent pas quoi dire parce qu'elles ont
peur de
"faire
de
la peine.
alouette était déjà prise,
o 51
o
La
petite
Maurice semblait un
éloquent
lier
jeunes
en ont
le
cheva-
comme
cordial
et
filles
joL'ine
les
désir et ses
déclarations loyales montraient en lui
profondeurs de loyauté.
des
A
cer-
taines choses qu'il disait, à d'autres
qu'il
y
né
disait pas,
en
avait
ture. Cela
douce
lui
du mystère
même
/
->
qu'il
de l'avenBerthe,
quand Maurice
l'eut
avec douceur.
se plia
prirent l'habitude de se voir tous les
jours.
en
et
était tentant.
et pliante,
prise en main,
Ils
on comprenait
Il
se
oromenait sous
dans
plus profond de
le
les fenêtres
d'une façon particulière
sifflant
comme une
:
son cœur
voix qu'elle espérait de-
puis longtemps entendre. Elle descendait et courait.
Le père
—
finit
par tout apprendre
Je le connais.
Tc-i'.t
un jour
tier.
Te
il
:
Un propre ébéniste
galvaude dans
le
1
quar-
voudrais bien savoir à quels
moments
il
travaille.
TI
ne m'a pas
de ^Tand'chosc de bon.
e
53
o
l'air
e
cl
Montparnasse
3
ne s'en inquiéta pas davantage
Il
parce que, étant père de sept enfants,
il
avait eu
beaucoup de mal
et
il
avait
appris que la vie est plus forte que nos
volontés.
//il
savait
tent
entre
que
les filles
toutes
de Paris
flot-
tentations
les
et
leurs pères, leurs pères les Pauvres,
ne peuvent rien leur
en
préserver.// Il
sommes
et
des
pour
offrir
nous
que
savait
manœuvres
et
des chiens
que nous n'avons pour nous que
misère, dans un
est maudite.
encore
le
malheur et
ser la tête
pensa
Il
—
l'ai
monde où
Après
la
la
misère
malheur vient
le
il
les
n'y a qu'à bais-
en grondant. i\
:
Après
tout, ceci la regarde. Je
prévenue. Si
c'est sa destinée, je
n'y peux rien.
La
petite Berthe,
un
soir, quitta la
maison paternelle pour
aller
vivre,-
avec Maurice. Sa sœur M^irthe
était
La gosse Blanche
avait
alors enceinte,
volé cent sous à sa patronne.
«
^
\
5]^
"Z^im
4
^'^
^^t%'^
Maurice
hôtel
et
Berthe 'vécurent dans un
meublé de
rue de l'Ouest.
la
Au
troisième étage^une chambre de trente
irancs,
donnant sur
tapis bleus et
blait belle
deux
comme
la rue,
avec des
faut,euils, leur
i
t.
,.
sem- f
appartement où
de Niontpcxrnasse
è
Berthe conti-
l'on a toutes ses aîses.
nua à
travcùîler
riste.
Maurice entama ses cinq miUe
de son métier de tieu*
chaque semain©
francs. Elle rapportait
vingt-cinq francs et Maurice ajoutait
pour
assez d'argent
n'eussent
qu'ils
Tous
rien à se refuser.
les soirs ils
prenaient leur café au bar. Ensuite
allaient
«
au calé-concert, ou au bal da
Moulin de
et
les
s'agrandirent.
amis
Vierge
la
»,
ou au
Montparnasse. Les
théâtre
lations
connut
Elle
Maurice
de
re-'
de Berthe
idées
et
les
leurs
femmes. Les amis de Maurice ne
travaillaient pas
beaucoup parce
que leurs femmes
pour
eux
et
travaillaient
parce
connaissaient assez
pour n'avoir pas
travailler.
Elle
le
qu'ils
monde
besoin
vit
da
dans leur
',
vie quotidienne les souteneurs e
les
ils
filous et
comprit
qu'ils n'ai-1
niaient pas le travail parce qu'il
vuiut bien
mieux aimer
le plaisir.
4
.^^J
^y^'
>
•
-'^'"'if
%-t^
./ii^*^'^''^V^ii
\v ^
^
Ils
regardent.la troupe
humaine pas.^î«S.'
^^0w^M
sant et rient d'avoir les coudes sur la _L4
table en la regardant passer. Bertbe
connut leurs
histoires.
bonnes aubaines
elles faisaient
Il
y avait de
pour les femmes
quand
des soirées de vingt ou
vingt-cinq francs.
Le lendemain
riaient davantage, d'abord à cause
l'argent et ensuite en pensant à
qui donnent aux femmes
cinq irancs.
Il
3^
baines pour les
une
lois,
un coupon de
ceux
vingt ou vingt-
avait de
bonnes au-
hommes quand
entreprises étaient exécutées.
Jules,
ils
de
leurs
Le Grand
rapporta d'expédition
soie noire.
tcmmes des amis eurent
Toutes
leur part,
les
La ^^^^^
iif.^
>
if
' '
V
-il)'
robe de Berthe
sembla plus belle
lui
parce qu'elle ne se
l'était
pas procurée
par les moyens ordinaires.
vait,
d'une
avait
dans
la
bonne
fait
rue,
farce.
Il
lui arri-
d'en rire
comme
Le Grand Jules
mois de prison à
huit
Santé pour vol avec effraction.
Il
la
con-
monde et son aboutissement.
qu'au bout du monde il y a la
naissait le
Il
savait
prison de Ja Santé et regardait cette
idée face à face.
Il
selon sa volonté.
agissait
Il
savait briser
serrure et pouvait tuer
simplicité.
d'amour
fermement
une
un homme avec
Les femmes l'entouraient
comme
des oiseaux qui chan-
tent le sole H et la force.
©
57
I)
était
un de
-^
«
BUBU
o
ceux que nul ne peut
car
.-r^^ujrftir,
com-
leur vie, plus noble et plus belle,
porte l'amour du danger.
Berthe
vit
chez son
chose
ces choses en sortant dei
pendant que
père,
illuminée par son
était
pour Maurice. Le premier
ieunes
filles
là qui est
homme
de dix-sept ans,
leur destinée.
toute
amour
des
c'est celui-
Lorsqu'elle
prenait l'omnibus pour aller au travail,
elle fermait les
un peu
lasse, et voyait
Maurice avec
«
yeux, parce qu'elle
dans sa pensée
les plaisirs.
11
lui disait
Je ne veux pas travailler à
»^
alors elle sentait qu'il
bornées
comme deux
quatre sous de café
parce
Il
de sa mère dont les idées étaient
parlait
;
sous de poivre et
il
en parlait ainsi
qu'il avait les idées ouvertes. Il
lui disait
père
mon mé-
supérieur à tous les métiers.
était
:
ne veux plus être
tier d'ébéniste et je
déménageur
était
et
:
«
Quand
tu étais chez ton
que tu t'emmerdais en torchant
tes frères », alors elle lui était recou»
naissante de l'avoir délivrée,
c
5S
y
(
de Montparnasse
o
Au
bout d'nnmois,
il
la battait,
non pas par méchanceté. Voici
:
mais
Mau-
rice, qui avait le caractère résolu, clas-
trop nettement les connaissances
sait
Comme l'empereur
humaines.
magne,
Charle-
avait mis d'un côté les idées
il
qui ne lui plaisaient pas et de l'autre
qui lui plaisaient.
celles
f
Il
pensait
:
Là-bas, c'est Terreur, mais ici, c'est la
vérité.
Comme
»
magne,
n'avait pas le sentiment des
il
nuances.
l'empereur Charle-
Il
ne
comprit jamais, par
exemple, que l'on se lavât
le
visage
avant de se laver
Il
disait à
Berthe
tes
•
«
mains
Tu
les
touches ta figure avec
sales,
c'est
façon pour se laver.
Une
mains.
fois elle préparait
le plat.
une drôle de
»
des œufs sur
Elle mit le sel et le poivre tout
de suite après avoir cassé
Maurice savait
que
les
œufs sont
voix aigre
donc
faire.
homme
qu'il faut le
:
«
»
les
mettre lors-
cuits. Elle dit,
Mais
œufs.
d'une
enfin, laisse-moi
Maurice, qui
était lui
d'action, croyait à la nécessitçj
o
59
o
j
CUDU
o
des châtiments corporels.
la gifla,
Il
persuadé qu'une gifle fortifierait en
le
sentiment de
Il
la vérité.
la battait d'autres fois,
l'avait
elle
mécontenté, parce
parce qu'elle
qu'il était
en
colère ou parce qu'elle était entêtée.
La pauvre
Berthe, avec son caractère
doux, acceptait ces
en
corrections
pleurant. Elle regrettait d'avoir quitté
son père.
Un peu plus
tous
amis de Maurice battaient
les
tard elle vit que
aussi leurs
femmes
avait en ce
monde une
qui était la
loi
comprit
et
d u plus
E lle
forti
ce que contient l'oxpression
homme
»,
Un
«
homme
»
qu'il
y
dirigeante
loi
est
«
sentit
mon
un gou-
vernement qui nous bat pour nous
montrer
saurait
qu'il est le maître,
mais qui
nous défendre au moment du
danger.
Maurice croyait que
l'intelligence a
des rapports avec l'énergie
conséquent sa femme
hgente, puisqu'elle
\e disait
et
n'était
était
que par
pas
douce.
intelIl
ne
à personne. Bien au.contraire,
e
60 Q
\
cla
il
se
par devant les amis,
=
pensait
Il
Il
:
mais
est petit,
elle revenait
monter
petit
était jolie.
du
On
dominer.
est costaud.
il
l'aimait bien_, pourtant.
parce qu'elle
Le
travail,
Il
l'aimait
soir,
quand
l'entendait
il
l'escalier. Il reconnaissait
pas pressé et
se tortillant
11
de leur prouver
vive, afin
était difficile à
qu'elle
plaisait à
de Berthe quelque parole
taire sortir
un peu
Montp-rnnss^
il
lui
son
semblait la voir
un peu pour aller plus
vite.
aimait les yeux souriants et doux qui
approuvaient tous ses désirs. Et
lèvres rouges,
un
les
peu molles, qui se
collaient bien sur les siennes.
Et
les
longs cheveux noirs, et les bandeaux,
et le
chignon au-dessus de
qui lui donnait
autres.
quand
le
Et
sa
un
pas
air
volupté
elle appliquait' son
la
nuque
comme aux
particulière,
corps contre
sien et qu'elle se pliait pour qu'il la
pénétrât.
Il
aimait cela qui la distin-
guait de toutes les
femmes
connues, parce que
parce que
c'était plus
c'était plus fin et
«
01
qu'il avait
©
doux,
parce que
euB'j
o
femme, à
c'était sa
vierge.
lui, qu'il
avait eue
l'aimait parce qu'elle
Il
bien élevée, parce qu'elle était
et qu'elle
(es
en avait
rair,[et poi
était
honnête
m toutes
,-,
raisons qu'on Ues bourgeois d'aim erj
^eur femniej_^arMaurice avait des
-_à.dées
bourgeoisesji
nément
qu'oti est
Ce
n'est pas
nnpu-
venu jusqu'à vingt-
ans sans casier judiciaire.
trois
Le temps passa. Deux ans passèrent
cinq mille francs de Maurice
et les
passaient aussi. Notre destinée ne se
fait
pas en un jour, quand nos cinq
mille francs sont épuisés, après
ans de vie
commune;
elle
deux
se décide
à chacun de nos gestes et â chacune
de nos fréquentations. Depuis long-
temps Berthe savait que
sont
filles
ment
<,
comme
les
autres.
la propriété,
Il
Maurice
aimé faire autrement.
se résigna pourtant et
pas beaucoup.
i'^riétaircs
qui
publiques font tout simple-
aurait bien mieux
Il
celles
ne
souffrit
avait le sentiment de
mais à
la
façon des pro-
qui mc'.(:nt leurs biens en
© Ci
to
J*
''
,.
location,
Berthe ne se regimba.
]xis
amené
à lui
lorsqu'un soir Maurice fut
dire
«
.
te fait
tiras
Ma petite femme,
si
quelqu'un
des propositions quand tu sor-
de
l'atelier, vas-y,
ça nous fera
toujours un peu d'argent.
o 63 o
>
-«
EUCU
»
Et puis
y a
il
le
démon, qui montre
d'abord une face riante. Les premiers
temps Berthe
que pour
francs, rien
ou
dix
faisait
«
vingt
un moment
»,
car Maurice ne voulait pas qu'elle dé-
couchât.
retrouvaient leur ancienne
Ils
abondance d'argent,
pas dur pour
le
métier n'était
elle qui rentrait
vers dix heures et pour
qui ne
lui
toujours
non plus
pas trop longtemps à
restait
î
l'attendre.
Un peu plus
tard elle quitta l'atelier,
ne voulant plus travailler dix heures
pour gagner quatre
tait
chaque
faisait le
francs. Elle sor-
heures et
soir vers huit
boulev^rC*. Sébastopol
et
les
Grands Boulevards.
i
[1
C'est ainsi que Berthe Méténier de-
vint
fille
vint «
publique
que Maurice de-
un individu sans aveu
intelligent,
sirs
et
il
vivait à Paris
hurlent en passant
d'abord, puis
il
;
il
». Il était
où
les plai-
avait travaillé
avait compris que les
travailleurs qui peinent et qui souffrent
sont des
dupes.
Il
C4
devint souteneur
'H
\
p-t
>'.'
parce
.
/- %^
"
v'^^'
''-
%
qu'il vivait
dans une société pleiine
'^"^
de riches qui sont
forts et
déterminent les vocations
Ils
veulent des femmes avec,
leur argent.
Il
faut bien qu'il y ait des
souteneurs pour leur en donner.
• 6s •
J
il:;
r
II
1
H
/i
/
f
CHAPITRE
III
Pierre Hardy, au lendemain de sa
rencontre avecBerthe, se sentit un peu
femme
calmé. Cette petite
eue pour cinq
heure entière
comme
qu'il avait
pendant une
francs
était flexible et
devaient
l'être
les
malléable
femmes
qu'on ne paie pas. Depuis longtemps,
parce
une
qu'il était
pauvre,
il
avait établi
relation entre la jouissance et son
prix de revient.
Il
e
savait
67
o
que les femmes
o
BUBU
•
sont avides
elles
et
qu'en un tour de cuisses
absorbent
Etant
la
journée d'un
homme.
de parents économes,
fils
s'il
n'avait pas toujours assez de volonté
pour se priver de
plaisirs,
regrettait-il ses dépenses.
du moins
Mais lorsqu'il
pensait au corps de Berthe et à une
pression électrique de ses bras, alors
qu'ils
s'épanouissaient ensemble,
souvenir
ce
bon comme un peu de
était
cette volupté qu'on espère à vingt ans.
Puisque nous vivons dans un monde
où
les plaisirs se paient, Pierre
que ce
plaisir valait cinq francs.
donna un rendez-vous pour
jugea
Il
lui
la semaine
suivante. Rendez- vous à huit heures et
demie du
et
soir,
au coin du pont Neut
du quai du Louvre.
Pierre fut
Il la vit
le
premier au rendez-vous.
bientôt venir. Elle était coiffée
d'un canotier blanc,
noirs avec
et
ses
un gros chignon
ressortir
son visage
blanche
et
cheveux
faisaient
comme une
chose
d'une douceur inattendue.
Pierre en ressentit
une
o 68 e
sorte d'orgueil.
Il
aurait bien voulu la
bras et
qu'un ami
— Ma chère
petite amie, je suis bien
heureux que tu
£lle avait
promener à son
les rencontrât.
un
sois
venue.
sourire de pauvre pe«
69 »
•
BUBU
•
tite piitnîn,
ce sourire qu'elles prêtent
à ceux qui paient. Elle répondit
^
Le
:
.
soir étai^~doux et flottant.
long de
le
~
Vraiment^
la
Seine
y avait un peu
il
de vent qui coulait
Tout
comme
l'eau et
semblait suivre les feuilles. Les ombrages, légèrement balancés au-dessus
des passants, parlaient à leur
lui
âme
et
donnaient des balancements légers.
On
aimait
touteo
les
choses parce
qu'elles étaient reposantes.
La Seine,
le ciel et les voitures brillaient
tement
et la ligne
arbres, semblait
promène
où
et
modes-
des quais, avec ses
une
allée
où
l'on se
l'on s'isole.
— Nous allons
faire
une
petite pro-
menade.
-^ Si tu veux, parce que je ne
suis
pas bien pressée.
Ils
prirent le quai de la Mégisserie.
Pierre disait
— Je
t'ai
:
vu venir avec ton petit nas.
Tu remues tes jambes
sous tes jupes,
un peu,
tu souris et tu
tu te tortilles
o 70 o
ri''
as
l'air très
bon
doux.
On
Montparhiiç ss
sent que tu as
Je t'aurais reconnue
caractère.
entre toutes les
femmes
à cause de
cela et pourtant c'est la secondé fois
que nous nous voyons. Mais
semble que je
te
il
me
connais bien.
— C'est gentil ce que tu me
dis là,
répondait-elle. Nous aussi, nous aimons
mieux
aller
avec des personnes que
nous avons déjà vues.
marchaient bras dessus bras des-
Ils
sous, en se parlant dans les yeux, et
Pierre pensait qu'ils avaient
deux amoureux. Cette
mince
et
maniable
petite
l'air
de
femme
était pareille
femmes que l'on rencontre dans
la
aux
rue
hommes qui leur pressent la
Quand le soir tombe et qu'elles
là, il y a dans le monde un grand
avec des
taille.
sont
désir.
petites
Seigneur,
des
femmes comme Berthe pour
que nous
vingt
envoyez-nous
les baisions et pour
ans
ajoutent
Pierre ne se
à
rappelait
que leurs
nos baisers.
plus que
plaisir allait lui coûter cinq francs,
0710
ce
;
'
i
»v -^^«si^"^
iîjjgr
'ij^-'i
-^-:i-«3ii'^'^'«çpç'¥S:«^«}BftiïPs:e:»^^;
^
S!
Un peu
Ville.
les
plus loin que l'Hôtel de
deux bras de
contournent
l'île
Seine qui
la
Saint-Louis
se joi-
gnent en formant un large fleuve.
nappe d'eau
y|Cette
s'écoulait, passait
sur les reflets des lumières et continuait sa route, avec cet aller endorsnant de Peau-^Mais
au-dessus
jusqu'à la
«H«ai
d'elle,
l'air
se berçait
vaporeux
et
vert,
pointe mélancolique
Bo'irbon.
Le monde
o 7» «
du
était,calme
î^-
moiré
et
l'eau.
comme
l'air
comme
Les bateaux, éclairés jusqu'au
la
robe du
geste
précis.
fond de l'âme, fendaient
fleuve,
j^"^^'^
et
grand
d'un
Beaux amoureux transpercés par
les
du monde! Pierre aussi
se
beautés
sentait éclairé jusqu'au fond de lui-
même.
—
petite
U
Que
amie
dit
la
Seine est belle, ô
!
encore
:
* 73 •
ma
•
BUEU
o
— Vois
ou
le cieî.
y a par là-bas deux
Il
trois cents petits
Ça me donne
compliment.
deux ou
envie
de
Qu'est-ce
le
ciel
un
toi.
demanda
Elle sourit et
—
faire
mon cœur
cents petites émotions
qui brûlent à cause de
quand
te
y a dans
Il
trois
nuages rouges.
que
cela
rouge
est
:
signifie,
comme
ce
soir?
Il
répondit
:
— Dans mon pays, on prétend
c'est signe
de guerre. Mais
que nous n'allons pas
je
nous
qu3
pense
battre
tous les deux.
Ils
marchaient lentement sur
de l'Hôtel-de-Ville
le
quai
et se sentaient l'un
à côté de l'autre. Les tramways passaient
en
comme
des bêtes féroces. Mais leur
faisant
:
7ûiiiin_l,._;OuaiLli
bruit n'était rien pour Pierre, parce
que Berthe
faisait
en
lui
une bien
autre rumeur. Les maisons, en contre-
bas semblaient éloignées, et les passants de l'autre trottoir n'étaient pas
o 74 o
de Montparnasse
o
marchait à côté
gênants.
Il
une âme
pleine.
Il
dit
avec
d'elle
:
— Ça me rappelle ma petite
ville.
Ce
il
pas vrai, mais
n'était
femme
auprès d'une
connaître
faire
goûts
et sur sa vie.
Voici
:
cœur
d'ombrages
à
l'attirer
sur
lui
ses
qu'elle pen-
un jeune homme au beau
qui
et
voulait
voulait lui faire
Il
cœur pour
connaître son
sât
et
choses
des
était
lui
province
d'une
vient
d'amour.
et
Il
voulait
par toutes ses confi-
dences.
— Ça
II
j
;
y a
la
^^
ma
rappelle
ne connaissez pas
il
y
fait
Il
bon
.'es
forêt.
vivre.
vous
Paris,
les jardins.
Le
soir,
On boit du lait, on
rivière et
Les arbres de
un ami
comme
la
croirait
que
Ma
A
poulets de sa basse-cour.
y a une petite
J'ai
petite ville.
maison de mes parents entou-
rée d'un grand jardin.
mange
q'*^o^<
me
la forêt
qui dit
jeunesse
c'est
une grande
:
et
Ils
si
sont frais.
sont verts
frais
eux qui font
le
qu'on
vent.
petite Berthe, je t'embrasserais
c 75 o
•
•
BUBU
e
dans
les sentiers.
rions sur la
Nous nous
mousse
et,
assoi-
sans que per-
sonne nous dérangeât, nous jouerions
à tous
tes jeux.
Elle disait
— Je
:
ne connais pas
plus loin qu'à Clamart.
la
campagne
Le médecin
voulait que j'y aille passer trois mois à
cause du bon
air.
Les médecins se
figurent qu'on peut faire tous leurs
remèdes.
Il
dit
encore
:
— Nous nous promenons tous deux
sur ces quais en silence. Je ne
me
sens pas du tout gêné quand je suis
avec
toi
parce que tu te laisses con-
duire et parce que tu te laisses
Tu
n'es pas
vite et
comme
il
faire.
y en a qui vont
même causer.
elles. On voit trop
ne veulent pas
C'est bestial, avec
qu'elles' travaillent et qu'elles
ne
plai-
santent pas avec le travail.
*-
Et
il
répétait
— Je ne
quand
me
je suis
:
sens pas du tout gêné
avec
toi.
e 76 o
Tu ne
causes
o
pas beaucoup ce
suis
bon garçon
femmes
mais moi je
soir,
cause d'être content.
et
de Montparnasse
Tu
verras que je
que pour
les petites
toutes les bonnes
je sais faire
actions que l'on peut faire. Je les
comme
brasse
pour
ceci,
pour
Mais
toij
qu'elles
qu'elles
aimer toute
rient, et je saurais les
vie
em-
ma
soient heureuses.
tu m'as plu tout de suite.
es de la taille de
ma
promenons tous
les
Tu
sœur. Nous nous
deux
et je lui ra-
conte mes histoires. Je voudrais aussi
raconter parce que tu es gen-
te les
tille et
que tu portes à
Te voudrais
te dire
la
confiance.
que
tout ce
je
sais. Je suis tout seul à Paris, mais je
ne suis pas malheureux, au fond. Je
travaille et j'écris
répond. C'est
chez moi et l'on mei
maman
qui
me
répond.
Elle ne sait pas très bien écrire, mais
quand
mon
elle dit
Pierre
èsent
—
>,
comme
Moi,
ma mère
:
<
Je t'aime bien, bien,
je sens que les
mots
des phrases entières.
disait
Berthe,
j'ai
perdu
à seize ans. Elle est mortç
« 77 •
•
.
BUBU
o
quand
On
h l'hôpital.
j'étais
voulu que je
Moi,
la voie.
n'a pas
j'étais
ané-
mie-chlorotique et ce n'est pas ça qui
m'a guérie. Je me disais A présent
que ma mère est morte, je vais avoir
:
de
la peine.
Je n'ai pas pleuré du tout
parce que j'avais trop de mal, mais je
sentais sa
mort dans tous mes mem-
bres. Elle
nous aimait bien. Des
le
samedi,
fants, je
elle disait
paye
:
fois,
Allons, les en-
<
le café. »
Nous descen-
dions au bar avec
ma sœur Marthe
ma sœur Blanche.
Les gosses jouaient
et
à la porte. Moi, j'aimais bien ça parce
qu'il
y avait du monde.
Puis
—
Il
elle dit
Si
tu
faut que
:
veux, nous allons rentrer.
je te quitte
vers dix heures,
sans ça je ne pourrais pas rester assez
longtemps.
o 78 o
ode Montparçiassee
dcml-lour. Pierre
Ils firent
le
bras pour entourer
la taille et
chait en la collant à lui.
comme
de sa chair
chée de son cœur.
Il
il
mûrs des
Il
filles
davantage.
les
doux
han-
qui se
et
déjà
publiques à vingt ans.
qu'il
pouvait tou-
aurait voulu
il
Il
:
la taille flexible
en touchait tout ce
cher, mais
appro-
l'avait
en touchait tout
pèse, les seins
plie et
mar-
l'approchait
Il
ce que l'on pouvait toucher
ches balancées,
lâcha
lui
toucher
aurait voulu qu'elle fût
toute nue, et la sentir, et la baiser
partout, et la goûter.
'
Tous
les flots
Vj
de son sang roulaient pour cela de
:^.
grosses ondes rouges et
ses sens
comme
gonflaient
des fruits débordants.
Tout à l'heure
il
pensait à lui parler
C'V- de Louis Buisson, de sa mère et de
ses
sœurs
fond son
tenant
il
afin
de verser jusqu'au
âme dans
n'y
monde. Face à
la sienne.
Main-
avait plus qu'elle
face,
il
allait la
au
baiser
sur les lèvres et déJX son corps éclatait.
o 79 o
Mais Berthe ne
ne parlait pas,
de "sa vie
et
débutante,
cœur
Il
delà de
c'était tout
ce dont
depuis
mâles après
de toutes
i^
\
K
»
cinq francs parce
elle
il
disposait.
en avait trop
Elle savait de quoi se
l'amour
bon
comme un amoureux.
Quant à l'amour,
usé.
a
impossible de profiter de son
cœur au
que
Ce jeune homme
et parle
était
pensait encore avec
elle
«
:
ne pouvait pas parler
de ses désirs. Elle écouPetite prostituée douce et
tait Pierre.
douceur
et
parlait c;iière. Elle
qu'elle
elle courir,
compose
laissait
les
qui profitent
les faiblesses et satisfont
tous leurs besoins. Elle savait qu'il—-i
faut convertir l'amour en espèces,
'
car l'amour est fatigant, et c'est
gent qui réconforte.
Tout
l'ar-
cela, Ber-
the le savait à vingt ans. Celles qui
ont de quoi vivre cherchent l'amour
parce
qu'il fait
du
bien, mais les
filles
publiques réduisent l'amour de leurs
clients
parce
Pierre, ce
qu'il
fait
du mal. Et
grand garçon ardent,
e 80 @
était
"
Montparnasse
e de
pour Beithe un
homme
de plus à
^
subir.
amant Maurice, à
Elle pensait à son
sa robe, à ses
bottines. Hier soir
il
avait fallu qu'elle payât sa chambre.
Les propriétaires d'hôtels meublés ne
aux femmes qui
se fient pas
noce.
Il
font la
Mais
avait fallu payer.
ne
elle
pouvait pas donner sept francs, puisqu'elle n'en
avait
que cinq. L'autre
accorda un jour de grâce pour
les
quarante sous qui restaient, mais
était
bien entendu qu'en cas de non-
paiement
ils
Comme
conséquence, à
mangèrent quelques
la veille,
pas.
ne rentrerait pas dans
elle
sa chambre.
midi
il
mais
Maurice
le soir elle
disait
«
:
Tu
restes de
ne mangea
es
une im-
bécile qui ne saura jamais travailler.
>
Elle n'avait pas faim parce que dans
les familles
d'enfants
nombreuses
deviennent
les
estomacs
élastiques
et
peuvent se resserrer sans soufïrance.
Elle eût bien
viande, et
mangé
pourtant, et de
des aliments forts,
0810
la
pour
/
•
•
BUBU
•
compenser
l'amour
et
affaiblissement
cet
Voici que Pierre
cours
!
aurait
lui servait
des dis-
Elle ne s'en plaignait pas, car
y a des
il
de
des nuits sans sommeil.
pu
clients grossiers. Certes, elle
lui
confesser la chose, mais
ne déduisît des cinq
elle craignait qu'il
francs le prix de ce dîner. Elle se contenta de penser
:
<
Je n'ai pas
mangé
ce soir, et c'est bien ennuyeux.
Et puis
il
>
y avait sa robe dont la jupe
On
corsage décoloré.
était lasse et le
trouve au Carreau du Temple
des
merveilles qui coûtent vingt francs.
Sa sœur Blanche
avait acheté
robe de soie, que d'ailleurs
tait
Il
et
une
elle por-
mal.
y
avait son chapeau canotier sale
déformé, mais
bottines.
marche,
y avait surtout ses
Dans ce métier où l'on
il
les talons se défoncent,
semelles se trouent,
quent...
Mais
belles bottines
les
c'esv qu'il faudrait
1
les
dessus cla-
de
car l'élégance de la
bottine accentue la forme de la jambe
e 83 o
alors qu'on se retrousse
l'homme. Or
deux jours
il
est
attirer
certain qu'a^-ant
bottines
les
pour
de
Berthe
lâcheront son pied. Et heureusemeiU
que
temps
le
calculs
demain
et
si,
faisait
après
des
avoir
après -demain,
de quoi acheter des
resterait
lui
beau! Elle
pour savoir
mangé
il
est
bottines.
Elle
de
la
ira voir
chez un revendeur
rue des Prêtres-Saint-Germalno Si a
v\
BUBU
PAiTxerroîs, où
Ton trouve des occa-
sions pour trois francs.
Berthe pensait à toutes
choses
les
de sa vie de prostituée. Elle pensait
qu'après avoir travaillé ce soir avec
Pierre
il
lui
faudrait travailler avec
un autre
faire
et que demain il y aurait à
deux hommes encore. Après-
demain
il
faudrait
qu'elle
travaillât
pour sa robe, ensuite pour son cha-
peau
et alors
ses
bottines
seraient
usées.
Aux
les
journées de fatigue succèdent
journées d'épuisement tout
des jours
le
long
où nous marchons.
Le
boulevard Sébastopol
et
les
Grands
Boulevards, avec leurs lignes de
toirs,
sont
quand on
durs
les
comme
trot-
des pierres
a suivis longtemps.
Nulle part on ne rencontre un peu de
Le jeune homme de ce
soir
usera de Berthe au moins deux
fois.
charité.
Les autres en voudront pour leur
argent. Les
hommes
corps
crèvent pour nous donner
et le
abusent de notre
o 84 9
o de Montparnasse o
du
pain. Ei'ces idées tournaient dans
sa tête
comme un monde
de petites
bêtes noires qui bourdonnent, piquent
et font
Ils
du mal aux enfants.
arrivèrent à la porte de Pierre.
'^%m'''n\nt-M.^j''r^'.^''^''
-T)ès le seuil
il
la prenait
pleins bras en disent
— Je t'aime,
ô
ma
à
:
petite
Derthe!
^
Puis
il
corsare.
fouillait
dans son
CHAPITRE
Dans
la
chambre
IV
d'hôtel, rue
Cha-
noinesse, à midi, la fenêtre donnant
sur la cour, avec ses rideaux gris et
ses carreaux sales, envoyait
sale et gris.
jaune,
le
T-in
intérieur de
à fond
mal soigné,
parquet
quatre meubles et
'^'"'S-.Zt^
un jour
Le papier des murs
la
fille
francs la semaine.
les
malle formaient
publique à cinq
La
table en bois
blanc, pénétrée d'humidité, les
deux
chaises éventrées, l'autre table avec la
cuvette ne semblaient pas des choses
o
87
o
•
BUBU
•
mais des choses
vieilles,
moisies que
avait le
le
vice a rongées
où
défait
lit
tristes
les
;
et
et
il
y
deux corps
marquèrent leur place de sueur brune
sur les draps usés, ce
où
d'hôtels,
âmes
les
lit
des chambres
corps sont sales et les
aussi.
Berthe, en chemise, venait de se
Ses épaules
lever.
mise grise
mince
et
étroites,
sa che-
malpropres,
et ses pieds
jaune, elle semblait sans lu-
mière non plus. Par ses yeux bouffis
ses
cheveux
écartés,
et
au milieu du dé-
sordre de la chambre elle
était
en dé-
sordre et ses idées étaient couchées
en
dans sa
tas
tête.
Les réveils de midi
sont lourds et poisseux
de
le
avec l'amour,
la veille
sommeil.
comme
On
la vie
l'alcool et
éprouve un sentiment
de déchéance à cause des réveils d'autrefois
où
qu'on eût
lavées.
les idées étaient si claires
dit
que
Quand
le
sommeil
les avait
tu auras dormi,
mon
frère, tu n'auras rien-oublié. Elle res-
sentit
encore ce poids d'angoisse qui,
e
o
de Montparnasse
depuis hier, l'empêchait de respirer.
Elle se rappela tout, et cela s'appuyait
à deux genoux sur sa poitrine
un monstre en
ses tempes aplaties,
comme
Vraiment avec
colère.
ses
pommettes
décolorées et ses lèvres lâches,
sentait qu'elle avait
de courage,
^
peu d'idées
et l'on sentait
et
on
peu
encore que
a vie_est mauvaise parce qu'elle frjipp
_à_grands—coups—sur
les--
eulants qui
fontJejnaLsajis_.£jiJiiesu4:£ri!étgndu e.
— Tu
que
sais,
Maurice, ça doit être ce
je pensais. J'en ai parlé hier à
ma
sœur Blanche. Elle m'a tout expliqué
comment ça
môme
Il
l'avait prise
et c'est la
chose.
ne répondit pas un mot.
Elle remontait de jour en jour jus-
qu'à l'origine du mal, par besoin d'en
connaître l'auteur.
Il
faut
quarante
jours, lui avait-on dit. Alors elle re-
montait
d'homme en homme,
les circonstances, et
vette.
mots
Tout
et
le défilé
ses
suivant é
de cuvette en cu-
d'amour avec ses
gestes
e $9 o
parcourait
les
_
•
BUBU
•
chambres
d'hôtel,
mais
eût voulu,
elle
se plongeant dans le passé, l'arrêter
de ses deux mains
homme
l'avait
et
et reconnaître
supprimer
le
jour où
un
elle
connu. Elle crut avoir trouvé,
puis elle se dit que cela maintenant
était inutile et
Alors
que tout
couler
elle se plia et se laissa
dans ses
tristes
sentiments,
Maurice rompit
— Je
t'a
était inutile.
le silence.
voudrais connaître celui qui
passé ça pour pouvoir
casser la
lui
tête.
Rapidement
elle
elle
s'habilla,
descendit acheter un
la charcuterie. Ils
ensuite
litre
et
de
mangèrent en face
l'un de l'autre sur la table
humide. La
carafe sale des locataires qui boivent
l'eau
gluante
Maurice,
hôtels
meublés.
baissée,
mangeait
des
la tête
avec force de grosses bouchées qui
grossissaient ses mâchoires.
Il
prit
en
même temps
que sa cas-
quette une pièce de cent sous posée
sur la table de nuit et
sortit,
o 90 o
h
-
M*,^. vJ'x< >/'-.' '-V
.^-f
L'nprts-îTiidî
ciel
bleu,
d'août
tombait
comme un manteau
sur
s'étendan> nu
nos épaule^
lourd.
Il
suivait le
quai aux Fleurs où les fleurs avaient
soif et
où
les
marchandes suaient pa-
cifiquement en regardant les passants.
La chaleur
(t'^^^'^i
'
pesait
sur sa tête et la
chargeait d'un poids informe de pensées qu'il ne pouvait formuler, mais
HfjéA
remuer toutes ensemble.
qu'il sentait
P^ur
la^reriyÊre4ûLs-ile-sa vie41 x^>a-
naissait
Le long des
l'indécision.
quais peu fréquentés,
lui,
qui d'ordi-
naire marchait sans analyse à son but,
il
marchait sans but
ses pas.
marcha
prit le quai
Il
le
et écoutait
sonner
de l'Horloge,
long des murs du Palais de
justice, qui sentent la prison, traversa
Dauphine,
la place
suivit
la
le
pont Neuf
et
des quais parmi les
ligne
arbres et les livrés, avec de grands pas
lourds,
comme
sur ses pensées.
pas
même les
de
la
ne regardait rien,
gare d'Orléans, pas
et les
maçons
même
membres
d'action
fit
qui
ainsi
où
les
les
remorqueurs.
marchait avec énergie dans
de pensées
11
Il
terrassiers et les
bateaux-mauches
Il
eût voulu marcher
s'il
descendait
que chez
les
le flot
en
ses
hommes
pensées se font gestes.
demi-tour au pont de la Con-
corde, reprit la ligne des quais, puis
enfila la rue
Bonaparte pour se diriger
vers Piaisance.
Ù 92
---^
^^^^'^'^^-^
f^'^'^'^^m
Le grand mot
sortit,
grands pas,
nait à
et,
qu'il
prome-
comme un
ton-
nerre, éclata, pendant qu'il marchait,
et
puis
roula,
comme un
Berthe
côtés
battant
sa
noir tambour.
et la vérole
!
Il
La
marche
vérole,
la sentait
à ses
comme un compagnon rouge et
comme un hôte incroyable
sanglant,
et
féroce.
comme on
Il
prit la
rue
se jette à l'eau
flammes nous mangent,
Plaisance.
La
et
Bonaparte
quand des
monta vers
vérole, Berthe et la vé-
o 93 «
«
BUBU
e
\
rôle!
connaissait ses ennemis et les
Il
regardait
homme
à
face
comme un
face
qui n'a pas peur. Puis
vait combattre, puis
il
sa-
dans
allait
il
la
vie sans regrets et sans honte, puis
il
acceptait le hasard tel qu'on le ren-
contre aux chemins de Paris avec le
vol, le
crime
vérole, Berthe et la vérole
voulu
prendre
la
yeux dans
Mais
et les prisons.
les
et
1
II
la
aurait
secouer, le?
la
yeux, jusqu'à
la
mort
et
jusqu'à la victoire.
Il
pensait à des drames, à Roger
la
Honte^ à des hurlements et à des défaites.
nom
se rappela son
Il
la syphilis.
La
tranchante qui
connaît,
il
savant
science implacable
nomme
les
maux et
:
et'-^
les
en dut peur parce qu'elle
nous renverse dans les hôpitaux^ parce
qu'elle
nous regarde
et
nous
voit,
parce qu'elle plonge dans notre vie
ses
mots
et ses
instruments
comme
si
r.ous n'étions rien que de la chair, de
la maladie et
de
Mais ce mot,
la
mort.
la vérole^ était plus tar-
o 94 o
de Montparnasse •
•
Maurice n'avait
rible encore. Certes,
pas peur des mots. Les mots sont les
fantômes des imaginations malades,
au-dessus desquels
un
était
y a
il
souteneur
<
sans aveu
La
«
Et qu'importaient
>,
les mots,
pourvu que
une
aussi.
Mais
individu
«
publique Berthe
fille
Méténier
1
un
»,
Il
bien des fois cela le
>, et
faisait rire.
guise
vie qu'il
la
sans penser aux mots.
faut vivre
l'on vécût à sa
la vérole
1
II
se rappela
son enfance.
histoire de
Il
avait
quatorze ans, lorsqu'un de ses voisins
mourut à vingt-deux
sines disaient
un
«
:
vrai fumier.
Il
On
pourri...
Il
il
Être
>
et
eût dit
:
«
Ce
11
complète-
des idées de
la province,
sont des maladies que
n'a jamais
milles. » Être
com-
n'avait été malade.
Sa mère, qui venait de
l'on
comme
venait d'autres
lui
souvenirs d'enfance
pureté. Jamais
mort
dit qu'il était
plètement pourri.
ment
Les voi-
ans.
est
vues dans nos
complètement
fa-
pourri...
imaginait des plaies rouges et suino
95
o
«
BUBU
•
bandages
tantes, des
et
avec un corps vert
ment
pourri.
niste,
un de
Si jamais
dans
Du
la tête.
Dans
charpie
lit
d'hô-
complète-
et
temps où
il
était ébé-
camarades
ses
disait
:
m'arrivait d'attraper la
il
me
vérole, je
la
étendu dans un
et se voyait
pital
€
de
deux
logerais
balles
»
Plaisance,
il
tout
alla
droit
chez sa mère. Elle vivait dans une
boutique d'épicerie une vie sage
et
encombrée. Elle ne vendait guère que
pour deux sous à cause des
sins d'approvisionnement
»
maga-
«
qui pren-
nent tout l'argent des quartiers. Elle
restait à côté
et
causait, avec l'allure familière et
bavarde du
Une
rf
de son comptoir, servait
Je crois
Il
petit
commerce.
voisine, qui se trouvait là, dit
que voici votre
fils.
:
>
avait cette politesse accentuée qui
ramène
ments
les
gens à de meilleurs juge-
et qui fait
que nos parents
mais ne nous renieront. Puis
dans l'arrière-boutique.
o 96 o
Il
il
jaalla
s'accouda
•
sui* la
cette
de Montparnassa
table et vît danser les objets
de sa tête en vérole. D'habitude
comme on
regardait
il
berté et goûtait
riorité.
li-
un sentiment de supé"
Mais, cette
fois, lui,
Maurice,
qui ne connaissait pas les regrets,
combien
paisible et
l'arrière-boutique
il
était
combien la paix était bonne.
Jependant que sa
dansait
les
regarde une vie
mesquine, pensait à ses idées de
vit
de
chambre aux sons d'une musique
et,
tête toute
remuée
comme une épave
tourbil-
lonnant sans fin, de gouffre en gouffre,
tourbillonnait et dansait.
Il
secoua ce cauchemar
:
— Donne-moi un verre de vin.
Elle craignait d'ailleurs qu'il ne vînt
lui
demander de
— Tu as
Il
but et répondit
— Oui,
Puis
Il
l'argent. Elle dit
il
;
l'air triste.
:
ce soir je m'emmerde.
se leva et partit.
s'enfuyait et marchait
au milieu
des maisons noires et populeuses,
devant les boutiques
et les bars
ô 97 a
de sa
9
«
o
EUBU
o
jeunesse, pendant que les voitures fracassaient les pavés;
il
voyait passer les
depuis
passants des faubourgs,
femmes
camarades
jusqu'aux
piaillent,
bourgeron bleu qu'une
leur femme,
fille
en
publique,
accompagne en
vie s'éveillait et vivait avec
de
les
des ouvriers, qui dans la rue
riant,
La
une sorte
depuis les cris et les courses
fièvre,
des uns, jusqu'à l'alcool et l'amour des
comme
autres. L'atmosphère sentait
à la porte des épiceries en gros et
comme
à
la
dans ce quartier de Plai-
vin. Alors,
sance,
il
porte des marchands de
pensa à son ami
Jules et se sentit
rance.
On
ne
l'espérance.
sait
le
Grand
à
l'espé-
renaître
pas
comment
On marche
dans
renaît
la rue
de Vanves, un après-midi d'août, on
se souvient
vérole,
que
le
Grand Jules a eu
la
on se rappelle que Chariot,
Paul. et d'autres l'ont encore, et l'on
pense qu'à ceux-là jamais
fait
de mal. Ensuite on se
rien ne prouve que j'aie
o
ç'^
o
la vérole n'a
dit
:
«
Mais
moi-même
la
o do Montparnasse o
\^^^^^^^ WÂa
»!<&^^
^^^
Et l'on essaie de se démontrer
vérole.
>
qu'on
ne peut pas
puisque
l'avoir,
Berthe a parlé dès le premier symp-
tome
et qu'alors
on
s'est
abstenu.
C'est ainsi qu'il arriva dans l'ave^
^
t
_-«_=~_—
\
P /'a
.
.^
'^^'^lïi^fjlljlfnî^y*"
t^.'-^^t.^^^-^^^ss
/
^_
f
M-M|^ji nue du
P^^
_
Maine, en pays connu.
^^ '^^^ h<irs
Maurice
pensait
à
regardant
lorsque,
nnerçut
où sont
le
Grand
les
une
y a
Déjà
Il
les amis.
'j,;'
||f''
chercher,
terrasse,
il
Jules,
'fcîïH'
\^
ir"*
%
r>
BUBU
•
— Je pensais S
Le Grand
marc
»
Te
toî.
voilà.
un
Jules buvait
café-
<
à la terrasse d'un bar, tout seul,
en regardant l'avenue. La casquette
d'aplomb sur
droite,
il
la tête, la tête solide et
regardait les choses et les
passants, et ses idées, fermes et calmes
comme
lui-même, occupaient chacune
sa place ordinaire, fermes et calmes, et
Maurice
levant la tête.
côté.
s'assit
Le Grand Jules l'aimait,
à son
quoiqu'il
fût petit, à
cause de sa volonté qui
dissait ses
muscles
et ses
rai-
mâchoires.
Maurice commanda un verre de vin.
Les passants
qui,
les jugeaient d'une
souvent ironique.
jour de
le roi
devant
défilaient
pour s'occuper,
les
phrase brève et
Cela rappelait
la Création, alors
du monde,
eux
regardaient et
qu'Adam,
au pied d'un
assis
chêne, voyant passer
le
les
animaux,
les
examinait et les nommait.
A
la fin,
Maurice n'y
— La vérole,
est-ce
toi
que ça met sur
o
tint plus.
qui as eu la vérole,
le flanc?
100 e
—
de Montparnasse
•
— Tuas vérole?
— Non, mais ça me pend au nez.
— Ha, ha, ha!...
Grand Jules,
la
le
fit
ça n'est pas au nez que ça pend.
La vérole ne
a
fait
deux ans que
pas de mal. Moi,
On m'a
je l'ai.
prendre des pilules quand
la
y
fait
Au fait,
connais, c'est Francine qui m'a-
pu ne pas y
vait passé ça. J'aurais
revenir,
on m'avait prévenu d'avance,
mais on ne
lâche pas une
parce qu'elle a
Il
il
!
à la
j'étais
Santé. Je n'ai jamais rien eu.
tu.
Bah
femme
la vérole.
expliqua ensuite qu'on avait des
taches sur la peau et des plaques dans
la
bouche
et
que ça passait tout
Assis sur sa chaise,
il
expliquait la
vérole avec des mots égaux,
quand
il
eut parlé,
il
seul.
puis,
pensa à autre
chose. Ni la prison ni la vérole jamais
ne
l'avaient
lonté
était
maux.
Il
gêné parce que sa voplus
forte
que tous
les
cheminait d'un pas adroit au
milieu des dangers et luttait sans colère et sans fièvre
..
_
quand
C 101
Ô
il
avait ré-
i
»
e
BUBU
o
soîu de lutter. J'ai dit qu'il était plus
que
lort
lut
Il
ne
la vérole.
étonné d'ailleurs que Maurice
l'eût
tous,
pas encore
mal,
Il
seul
il
trait.
S'il
vida
et
le
sien
n'avait pas son
temps de quitter Berthe.
était
pouvait ne pas l'avoir, puisqu'elle
avait parlé dès
premier symptôme.
le
Les temmes passent, se suivent
si
l'avons
Maurice commandr»
> répétait-il.
deux verres de marc
d'un
Nous
«
:
nombreuses qu'un
homme
et sont
habile ne
risque pas d'en manquer. Ces idées
rampaient
tortueuses
et
semblaient
entourer son cerveau. Mais les idées
du Grand
jet sûr,
Jules, jetées
en avant, d'un
vivaient devant ses yeux, et
les voyait
marchaient.
d'un seul
Il
vida son verre de marc
trait.
Chacun paya
levèrent.
il
debout, côte à côte, qui
Il
sa
tournée,
quatre
était
ils
se
heures.
Ils
descendirent l'avenue du Maine, les
mains derrière
le
dos,
à pas lents,
avec leurs regards assurés de marlous,
o
I02
«a
o
De chaque côté de
de Montparnasse
l'avenue large, les
maisons semblaient basses,
les
éta-
lages semblaient mesquins et les
pas-i
«sii,
,,
oB^.Jaient rares.
Jules et
Le pas
C est pourquoi
Maurice semblaient grandis.
lent
du
propriétaire, le regard
assuré du maître,
ils
étaient dans leur
comme
quartier qu'ils connaissaient
on connaît une
sur lequel
ils
partie de
soi-même
Maurice retrouvait un peu de
Maurice
suis
qu'on
foi
appelle
Bubu de Montparnasse. Dans
tier
et
possédaient des droits.
:
Je
aussi
ce quar-
où marquèrent ses premiers pas,
se sentait agile et libre
mier jour
comme au
et regardait les
il
pre-
choses en
pensant qu'autrefois
il
les connaissait,
mais qu'aujourd'hui
il
les connaissait
encore mieux parce
qu'il avait
plus
d'expérience.
La
foi.
Celui qui
s'examinait lui-
même
en imaginant toutes sortes de
maux
retrouve les forces anciennes
qui l'animaient et sent qu'elles sont
éternelles et combattront les
©
103 9
ruaux*
•:
"\
,
Ils
croisèrent la
inOme
comme
veux, en tablier, qui,
sait
avec aisance dans
quartier.
épaisse,
sait
Cécile, en cne-
Elle
aux
traits
les rues
brune,
était
eux, pas-
de son
un peu
accentués, et
fai-
penser à des coups de couteau
Elle dit:
— Je
plaque Machin.
me décoller.
mon petit!
pattes à
Le
Je
lui ai dit
T'as jamais
Il
:
parle de
Oh!
cassé
là, là,
trois
un canard.
Grand
qu'elle était
souriait
Jules
une de
ses
parce
femmes.
Il
n'en voulait garder aucune auprès de
lui,
mais
il
s'était
©
ménagé dans
104 ©
le
V^g^-"*
VAV»J%
;/.i
cciclc
de
SCS
droits à leur
opcialions
amour.
Il
en
quelques
cueillait
une
cliaque soir en rentrant et couchait
avec
elle
sans phrase.
Maurice
souriait parce qu'il
était
bien supérieur à ceux qu'on plaque.
Alors toute sa
jAïaurice
foi lui revint
qu'on appelle aussi
:
Je suis
Bubu de
IMontparnasse. Use redressait, bombait
la poitrine
en tapant des talons,
et de-
puis la tête jusqu'aux pieds sentait
était
^
Bubu de Montparnasse.
Le Grand Jules, à son côté,
route,
"
*i«'*iKii} V-i
'^u'il
silencieux et
suivait sa
plein de
comir.e une armée en marche,
9
10^
9
Il
gloire
savait
d
,
B'JC'J o
maintenant que
vérole
mais
il
est des
sont pas
partie de
connaissances
gravées profondé-
ment dans nos cœurs.
hommes, Maurice
les
fait
hommes. Depuis longtemps il
la vie des
le savait,
qui ne
la
Comme
tous
arrivait
à
la
science pleine après avoir beaucoup
complètement pourri..
souffert. Etre
Ces' mots l'amusaient maintenant lorsqu'il pensait à Jules et à tous
ceux
qui n'étaient pas complètement pourris.
La
syphilis et la science qui
,
ah
!
nous
pour chercher des maladies,
fouille
la syphilis et la science se buttent
contre nos volontés
comme
des méde-
cins qu'on peut attaquer et piller
coin des rues.(El sa
—
étaient
qvn^p. bai^:
=:
•pjiur
m
èf^^e.f. ]'épiV.at4^.
occj ip^t''^n'y
es
au
nii.séraM^s
pL- ot^ pnnr nni pn dpnv
Pr<-
.
ramas-s^runsQU.
On
appelle cela
des accidents. Les accidents de
role ressemblent à la prison
la vé-
que l'on
peut éviter, ou de laquelle on sort
implacable et
fortifié.
Et dans sa joie nouvelle, il lui venait
o
io6 o
y
des enviCs de boire. JiQire^ji^esrjieJa )
joié^Êt^and_on_estd^jà4jleir^
boire, cela nous^omble et
Ils
s'installèrent
''Montparnasse.
nous enivré.
en face de
Deux
la
gare
absinthes/'/
De
grosses voitures secouées, des nacres
aux
vitres dansantes, des
107
omnibus
et
/
o
BUBU
o
des tramways avec leurs roulements et
les cris
de leur corne, des
sittîets
locomotives, des passants en sueur,
soleil
de
lel
pesant de cinq heures, la pous-|
sière d'un soir d'août, et les départs et
les retours,
cet
et
aller
d'hommes formaient une
de
milliers|-,
vie
infer-i
nale avec des grues à vapeur, avec des
wagons, avec des hommes, des voitures, des bêtes et des caisses, avec la
des usines et des gares,
civilisation
avec tout ce qui roule
temps qui passe en
s'en va, avec le
hurlant.
On
dit
et tout ce qui
Ce sont deux
:
soute-
neurs qui prennent leur absinthe, et
l'on croit
que l'absinthe reste calme
au cerveau des souteneurs. Maurice
avait retrouvé, auprès
du Grand Jules,
en descendant l'avenue du Maine, sa
foi
d'homme
et
marchait en savourant
dans sa conscience tout
le
mal.
La
comme un bon
et
le
bien et tout
science du mal est bonne
fruit
sur la route sèche
nous aide à marcher, entre
role et la prison,
9
comme
lOS
9
la vé-
de grands
J
de Montparnasse
o
voyageurs
sans
hypocrisie
•
sans
et
peur. L'absinthe la remuait, la roulait
dans leur cerveau avec de
du bonheur. Je
et
est
sa
prend Berthe
sit
Maurice qu'on
suis
un homme
femmes dans
Il
main
puis
il
qui prend les
en
il
lui,
pour
les
fait
son
Il
comprend
pour
les
et
étalages,
ses
comme un coup
doigts sont rapides
d'œil.
la choi- -n
les
choses d'un seul regard,
bicyclettes, et
il
en
son métier.
fait
regarde autour de
façonne.
et les
la fleuriste,
belle et vierge, puis
plaisir,
fièvre
Bubu de Montparnasse.
appelle aussi
Maurice
la
connaît la science plus com-
Il
pliquée des serrures, qui se compose
d'un coup de doigté avec un coup de
nous
hommes
muscle
et qui
comme
comme
des enfants et les coffres-forts
des jouets.
livre les
Il
connaît les pas
silencieux qu'on appelle des pas de
loup et
sait
yeux de
regarder l'ombre avec des
braise.
Il
connaît les coups
qui font mal et ceux qui tuent,
taque
et
la
'
l'at-
défense, et les lamea de
e 109
j
.
v
/
v.
\ ^
^
"^xj
^v^az-^*^
^
^
,jcl'^^\
"^
w
i
c
BUS'J
o
couteau qui peuvent ouvrir un chemin
quand l'homme
en
est
danger.
marche sans un souci dans
11
les rues
des villes pendant que les uns souffrent
et
pendant que
les autres
peut conquérir ce
marche
et
semble un
dans sa maison.
Il
peinent;
qui l'entoure;
il
il
homme marchant
se sentait libre et
plein dans ses idées, dans ses organes,
dans sa vie pensée, dans sa vie vécue...
Le Grand Jules
— Hé,
Il
lui
frappa l'épaule
:
Maurice, faut pas dormir!
répondit
:
— Ça m'amuse,
je
Le Grand Jules
éclata de rire
— Tu penses à
ta vérole
ma vérole.
pense à
:
!
commanda deux autres absinthes.
y La seconde absinthe emplit Maurice
de murmures et coulait comme une
Jl
onde
et
venait entourer son cœur.
la sentait
7
^
Il
bourdonner dans sa tête avec
mille pensées éveillées qui roulaient,
riaient et
—
chantaient.]
^v
Les échos du
W-
bien répondaient aux échos du mal
comme
des voix qui s'appellent et
o
iio o
4*
>.
/
""
ie
comme
des pas qui s'en vonti Berthe
pour l'aimer
se penchait
ayant
à un
Montparnasse
la
et riait
en
vérole^Le monde ressemblait
homme
terrasses,
qui boit des absinthes aux
innocent
De
véroléJ
et
grands sentiments se promenaient en
criant,
dans
près des gares,
les rues,
comme l'Amour, comme la Foi, comme
la Science. On vo3^ait de la joie, les
mouvements semblaient des danses,
les
hommes
celui qui
étaient petits auprès de
songeait,
et
comme une femme que
que
Vie
riait
l'on connaît et
l'on sait conduire.
Tout à coup
son.
la
il
se rappela la chan-
Chanson qui consoles, ô
chanson des véroles, qui
musique sur
rends doux
les
et
malades,
poétiques
souffrance des blessés
De
fais
tu
vieille
de la
nous
comme
la
:
l'hôpital, vieille pratique...
Tu contiens une grande part d'amour
et
de résignation
et tu
contiens encore
plus que de la résignation.
Tu nous
mets en croix sur nos calvaires, tu
O
III
o
~
?-'
—
•
•
BUBU
«
nous montres nos
les
remèdes
pTaies,
et tu
des maux, tu
ris
danses à cause de nous
glorieuses.
Oh
!
bénie
sois
l'hôpital
où tu naquis, tu chantais de
les
mourants
<
frir
en
les
des ailes sur
le
chanson des
il
a été
davantage, c'est
davantage.
*
donné de souf-
qu'il est
Tu
digne de
fais
penser à
cette belle parole. Es-tu la science
bien, es-tu la science
ton
lit
!
Celui à qui
souffrir
lit
cœurs, tu divinisais
et tu battais
front des véroles, vieille
véroles
Vieille
!
dans
des véroles,
dans tous
nous
et tu
que nos souffrances sont
fais croire
chanson
tu chantes
du
du mal ? Tu mets
vieux corps près
du
tu
nôtre,
parles de mercure et tu parles d'amour.
Tu
dis
:
«
Mon
frère,
qui s'assoit sur ton
lit
c'est ta
et qui
deux mains sur ton cœur guéri.
Lorsque Maurice
prit la rue
trer
chez
sœur
met
ses
>
eut quitté Jules,
il
de Rennes et pensait à ren-
lui.
L'air plus frais de sept
heures circulait entre les maisons
e
lia o
et,
'Il
o
ir
- I
K
^^
rafraîchissant les fronts, adoucissait les
T'"!^
idées après le travail q.uotidien. Les ^y«t^^^^>
un peu
passants,
sentaient
lourds,
leurs épaules dégagées de besognes
et
montaient vers leurs maisons
femmes avec de
vers leurs
timents
Maurice
d'été.
clairs sen-
valait
Un
et
bien
sang alcoo-
mieux qu'à
l'ordinaire.
lisé coulait
dans ses membres avec des
moments
d'entrain, puis avec des
mo-
ments de bonté. Pourquoi
le
hommes
Je suis tout
est-il si
o
grand?
113 o
«
creur des
ri
-^^^^^^
'
"
""
b^
i'-i?k\y:
1
o
BUBU
o
drôle, ce soir,
>
se disait-il.
II
passa
devant un grand magasin d'épicerie
et,
regardant l'étalage,
il
vit
des boîtes
de mandarines. Petites mandarines,
petits riens
faites
pour
avec dujus, vous n'êtes pas
les
gueules des marlous.
Il
passa devant un autre magasin d'épicerie et cette fois-ci regarda
s'il
y avait
encore des boîtes de mandarines.
croit la
que
le
chose
coup
difficile. Il faut
d'œil
«îoit
On
d'abord
décisif. ppr<5on'-^
o
ne voit.
Il
que
faut alors
de Montparnasse
le
geste soit
rapide et dégagé. Maurice mit
de mandarines
arrêter
sa
la boîte
sous sa veste
marche. Faire
sans
à
plaisir
Berthe, avoir des mains ouvertes pour
donner un souvenir, un peu de son
un peu de son amour, quelques
travail,
mandarines pour une bouche
Il
Eh!
fine.
eut ensuite une idée de vérole
pas
n'avait
s'il
n'avait pas la vérole
!
vérole!
la
Alors
lui
il
!
s'il
sem-
bla que ce serait retrancher quelque
chose à sa gloire.
Il
marchait avec
tant de passion que ses
jambes sem-
blaient soulevées. S'il n'avait pas la
vérole,
Il
il
l'âme élargie, avec une voix
forte qu'il
jeter
ne pensait
un regard en
le
faisait
repas.
une
Il dit
même
pas à
arrière.
Lorsqu'il entra dans
Berthe
'
l'avoir.
à son but, ses mandarines sôus
allait
le bras,
si
grand temps de
était
petite
sa
chambre,
cuisme pour
:
— Vois donc. Je t'apporte une
de mandarines.
o
115
9
boîte
o
•
BUBU
o
Elle sourit
'—
Oh!
doucement
î
mais
Maurice!
chose pour que
quelque
y
a
tu sois
si
il
aimable.
— Viens m'embrasser.
Elle s'approcha, et
comme
elle
lui
donnait son baiser franc sur les lèvres,
il
posa
lui
les
deux bras autour des
épaules et la retint.
bouche à son
une
tour. Puis
une
fois très fort,
puis très
fort,
baisa sur la
Il la
il
fois
continua
puis moins légèrement...
Pendant ce temps
il
l'approchait de lui,
se la collait au ventre. Elle dit
— Lâche-moi, tu vas me
ler
:
légèrement,
:
faire brû-
mon fricot.
'
Il rit.
— Ça m'est égal.
Il
la prenait
à tour de bras,
un peu, la pliait en arrière,
levait
tachait à la peau. D'habitude
pas
pressé.
si
lée,
vers
dait
dans
triste
le
les
Il
il
la sou-
se
l'at-
n'était
l'entraîna, tout habil-
lit.
Berthe
yeux,
:
Q Il6 9
le
regar-
avec son
air
///
//.
''
'\;h'i
?"*x'^,%-'^'W-'Y>\C
L''<'
1
'Jf
\4$
/fj
'
>
,
i
Ji
i^-^ï..
—
Il
ne faut pas, Maurice.
que...
Il
*î
Tu
sais
'
,
répoijdit
:
— Je m'en fous,
l-vi-*'*^ ^^à'^-'S^
1
Lorsqu'il la pénétra,
cœur
•^
"
^
^
—
^
petite
fondre, se
fit
très
il
sentit soa
doux
et dit
Est-ce que je te fais mal,
femme?
o
117 o
:
ma
oc -^r^i
'Te
H
d
«^;
I
II
-I
ivn
V
L-in^ri
i
^*-
^i
Louis Buisson habitait au cinquième
étage,
quai du
chambre
fer
Louvre,
carrée.
On
une
y voyait un
petits
lit
de
avec quatre boules de cuivre, une
bibliothèque en bcis léger, une commode-toilette,
une
table
recouverte
d'un tapis rouge, une chaise
«
fauteuils
arméniens
»
et
deux
qui avaient
coûté douze francs au bazar de l'Hôtel
de
Ville.
vrait
le
Un
tapis
de linoléum recou-
plancher,
deux
affiches et
quelques gravures ornaient
C'était la vie bien
qui
fait
sa
les
murs.
rangée d'un garçon
chambre lui-même
et la
revêt simplement, à l'image de son
o
119 o
v*Vf>:
->i%
A/à-^^
La
e'îîpnt
fenêtre ouvrait «;n
bras de fleuve, à côté
de son petit square où
et l'eau
un grand
du pont Neuf et
l'air, la
lumière
formaient un spectacle mobile
et rafraîchissant.
Sommes-nous à Pa-
Nous sommes en haut des
airs,
dans un pays d'eau, mais dont
l'air
ris?
gronde
comme
de.s
voitures
qui
roulent.
JiCe
soir-là,
son café
'^^"U;,
À>^
:
Louis Buisson
faisait
Ce sont ces besognes sim-
*mri
?
rir^^'4-4
^^if"
£^
pies
:
fane sa chambre ou préparer son
calment notre esprit
café, qui
ordonnent nos idées
bles bien
en
Il
pour
n'utilisait
la
pas
sait l'eau bouillante
et qui
des
place... D'ailleurs,
ses principes
café.
comme
meu-
il
avait
préparation du
le
marc
et ver-
m
s^-i:"
goutte à goutte
sur le café fraîchement moulu. L'opération est
un peu plus longue, mais
pour avoir de bonnes choses
il
faut
prendre beaucoup de peine.
m^t^éM^.
aS'fi-
>^,^ft.-5
'^t
O
EUEU
o
Quand
porte,
verser
on
que
n'attendait plus
le café.
'— Je
Hardy frappa à
Pierre
lui
Louis Buisson
pour
disait
désorienté. Je
suis
parlé d'une petite
t'avais
mes
j'espérais en elle arrêter
femmes sont
toutes les
façonner à
Je
me
les
le
mon
disais
:
«
et
malléables. Je
pour
quelques livres
prêtais
et
désirs.
Les femmes du peuple sont simples
lui
:
bonne avec laquelle
une correspondance
j'entretenais
la
gré. Elle aimait
Elle saura
la
lire.
comprendre
choses délicates qui sont l'ordre et
bonheur d'une maison. Le
travaillerai
chez nous.
Ell'e
se reposant et je la sentirai à
comme une
petite
flamme
Voici ce qui est arrivé
hier nous
sommes
mon
côté
qui brûle.
>
:
avant-hier et
sortis
ensemble, sa
patronne étant en voyage.
bonne aime tous
soir, je
coudra en
Ma
petite
les plaisirs et souffre
parce qu'elle ne va pas s'amuser au
café-concertj danser au bal ou voir les
lumières des rues.
îaiène
Il
a fallu que je la
un peu partout
e 122 9
et ensuite elle
ae Montparnasse
o
voulait aller
au bal BuUier. Alors
moi qui voulais
compris,
homme du peuple,
que
le
j'ai
un
être
peuple aimait
trop les plaisirs mauvais. Je ne dois
pas être du même peuple que les autres,
c'est
pourquoi personne ne saurait
comprendre
ma
vivant
me
goûter du plaisir en
et
rompu. Moi qui
vie. J'ai
croyais avoir trouvé la femme, je suis
tout seul à^présent.
Louis Buisson
un peu dogma-
était
On
tique et causait longuement.
au bureau
disait
«
:
Oh
!
vous, vous
voulez toujours avoir raison.
des discours.
faites
Ils
Vous
>
,.
buvaient leur café en fumant un
mauvais cigare
dans un
blait
lui
«
et
chacun d'eux,
fauteuil
arménien
>,
assis
sem-
un jeune bureaucrate timide
maladroit.
Ils
l'un ni l'autre
remue~
les
n'étaient
heureux
;
et
ni
-^
à cause de l'amour qui
hommes à
vingt
ans,,.pt.
à
,
cause de Paris, quiest dur aux pauvre?,
Pier re
Hardy
— Je
dirait
-J
:
commençais à m'habilucr à
o
123
o
'
o
BUBU
•
ma
petite
amie Berthe
à ses cent
et
sous. Voici qu'elle est malade à l'hôpital.
Louis Buisson
—
dit
:
connu des
J'ai
publiques
filles
quand j'habitais en hôtel meublé. Leur
gaieté a des éclats
comme
des enfants
qui crient pour ne pas avoir peur.
Pierre
Hardy chez son ami
beaucoup à apprendre.
d'une vie
était
avait
vivaient
Ils
commune dont Louis Buisson
l'interprète.
II
événements
-lorce les
découvrait
ou quelque
analysait
avec
et parfois,
s'il
quelque erreur ancienne
nouvelle,
vérité
il
était
désorienté lorsqu'il voulait mettre sa
conduite d'accord avec ses idées. L'analyse n'est pas une science
elle
froide,
qui passe par nos cœurs et les
trouble. Les émotions de Louis éveillaient des émotions chez Pierre parce
que leur
que
commune
vie. était
leurs
âmes
Pierre se disait
:
«
a toujours raison
étaient
C'est drôle
!
»
Il
o 124 o
et
parce
sincères.
comme il
comme
pensait
e
son ami, mais
de Montparnasse •
beaucoup
pensait
il
plus bas.
Pierre
Hardy ajouta
-
:
'
— Je l'aime bien plus depuis qu'elle
est
malade. Elle m'écrit des lettres mal-
mais où l'on devine qu'elle
habiles,
souffre et qu'elle devient délicate. Elle
dit
Je t'embrasse de tout
«
:
cœur
d'enfant malade.
un peu
d'argent.
qu'elle
sera
Il
>
me
mon petit
envoie
lui
Je
semble, lors-
nous nous
guérie, que
serons rapprochés l'un de l'autre.
Louis Buisson partait dans ses grandes histoires.
Il
souriait
en pensant
Je rais faire un discours. Puis
—
Il
il
dit
:
:
faut aimer les filles qui souf-
frent. J'ai toujours
pouvions pas
les
cru que,
sauver,
si
nous ne
c'est
parce
que nous ne savions pas assez
les
aimer. J'ai connu autrefois une débutante.
A
quatorze ans, chez sa mère,
qui était remariée, et dont le second
mari tenait un commerce de marchand
de
vin,
elle
fit
garçon aux yeux
Q
connaissance d'un
violents.
125
9
Son regard
'
•
BUBU
•
comme une force puîssantft.
dominait
la
un jour à
l'hôtel
meublé
où, docilement, elle devint sa
femme.
Elle m'a raconté que,
nue,
il
dans ses bras
et
Elle le suivit
l'avait prise ensuite
l'avait
Elle
toute
posée au milieu de l'édredon.
était
que l'édredon
petite
si
la
bougea plus et, toute
débordait, elle ne
lasse, s'endormit là
avec sa virginité
perdue. J'ignore pourquoi ses parents
ne
la firent
pas rechercher.
Ils
quatre mois sans qu'elle
vécurent
travaillât,
mais peu à peu
il
l'honnêteté.
mena lui-même
Il la
détournait de
la
les
Grands Boulevards
son
client. Elle
fît
et
lui choisit
quinze francs
et elle
en éprouva une sorte de bonheur
Quand je
la
connus,
aussi courageuse.
naïf.
elle n'avait
seize ans. Je n'ai jamais
sur
pas
vu de femme
Elle avait
fini
par
trouver du travail et cousait des paillettes.
Mon
cher ami,
le jour, puis elle
elle
en cousait
en cousait
la nuit.
Elle n'avait pas seize ans. Elle ne put
jamais
gagner
cinquante
126 o
sous par
r
joui
.
Et l'Autre
était là, derrière elle,
avec ses deux poings
mâchoires.
îl fallait
descendît
dans
et
avec
ses
bien parfois qu'elle
lorsqu'elle
rue,
la
devait payer sa chambi'e. Je la connus.
Il
y avait des matins où
elle venait
me
demander deux sous.
Le temps passa pour
elle
en
lui
appc-tant d'autres misères. Sa mère
finit
fit
par s'inquiéter, la découvrit
et la
enfermer pendant un an au couvent
des Dames-Saint-Michel, où l'on met
des jeunes
filles
dispositions.
ayant de mauvaises
Quand
o
127
elle
O
en
sortit,
son
•
BUBU
amant
demanda en mariage
la
mère donna son consentement.
folie qui
règne sur
le
il
la
semble dans
ils
jour
se promenaient en-
lorsque passa
foule,
la
le
trom-
Un
s'amusait à la tromper.
de Carnaval,
C'est la
monde. Alors
passé recommença. Et puis il
pait,
et sa
une femme à suivre.
Il
suivit et
la
resta trois jours sans rentrer.
Plus tard
ils
se séparèrent, mais
venait de temps à autre la voir et
il
il
avait besoin d'argent. C'est alors qu'elle
eut pour ami
neuf ans
bien
:
un jeune homme de
Quand
«
vieille,
me
je
devrais devenir
disait-elle,
jamais je
n'oublierai ce garçon-là.
Ce
parce
mais
qu'il
cause de ce
l'aimait
cent.
dix-
était riche,
qu'il faisait
n'est pas
c'est
pour moi.
à
> Il
avec un bon cœur d'adoles-
Une
nuit qu'elle était fatiguée,
la porta dans ses bras depuis
la
il
place
de la Bastille jusqu'au bout de l'avenue
Daumesnil.
lorsqu'elle
Il
aimait aller chez
était
absente
elle
parce qu'il
mettait sur la table quelque jolie sur9
138 9
,
-
«de
.
Montparnasse
prise et qu'il pouvait entendre son cri
de joie quand
Mon
elle rentrait.
cher
ami, ce garçon, servi chez lui par des
domestiques, et dont
temme de chambre,
la mère avait
allait
amie, et lorsqu'elle n'était pas
sait sa
Leur
que
chambre
le
mari
une
battit le
le
lit
là, fai-
et cirait ses souliers.
histoire eut
dut garder
une
voir sa petite
triste fin
jeune
pendant
parce
homme
qui
six semaines.
n'y a pas longtemps que je con-
11
nais ces choses, mais chaque jour je
ies
y eut un
d'amour qu'il
comprends davantage.
homme
jeune
entra dans le
de tant
Il
cœur d'une pauvre
fille.
Et moi aussi, j'aurais dû entrer dans
ce cœur.
il
était
Quand
tir
dû
homme,
bien trop tard, mais moi
été temps.
n'était
vint le jeune
Il
il
eût
y a trois ans déjà. Elle
pas mariée
et j'aurais
pu
la sor-
des bras d'un souteneur. J'aurais
la
prendre
et la
mettre Chez moi et
combattre. J'aurais dû la sauver.
prends-tu cela
:
AhT pourquoi ne
e
Com-
J'aurais 'pu la sauver!
139
l'ai-je
o
pas
assez
i
•
BUBU
•
aimée
?
dû
J'aurais
faire sa
à garder le
tir
que
lit
pendant
Une femme
j'aurais
existe
et
il
il
six
se-
au monde,
pu sauver!
Quand Louis Buisson
histoire,
et
dû consen-
cirer ses souliers, j'aurais
maines.
chambre
eut
iini
son
mit sa tête entre ses mains
y eut un silence pendant lequel
chacun s'aperçut
qu'il
n'y avait plus
de café dans sa tasse.
rouler
les voitures
quième.
On
entendit
en bas du cin-
Louis Buisson revint à
conversation
la
:
— Tu me parlais de ton amie Berthe,
mais tu ne m'as pas
dit
dans quel
hôpital...
\
Pierre répondit
— C'est à
:
l'hôpital
Broca.
Louis Buisson eut un mouvement.
— Mais, mon
cher ami, tu ne con-
nais pas l'hôpital Broca. J'ai
vu tout
cela et je te dis qu'à l'hôpital
l'on voit
des
malades,
elles
filles.
Elles
Broca
sont bien
ont la syphilis.
Alors Pierre Hardy sentit
«
130
c>
riilitolre
<^^
de Louis Buisson
comme im
son cœur. Véritablement
choses
choses, mille
monter
semble,
il
feu dans
sentit des
noyer
et
en-
frapper
le
comme un débordement
sa;,
voix
de maux.
eut la sensation du bonheur
Puis
il
dans
la paix^
parce
qu'il avait fait
un
pas d'amour, une pauvre danse, un
soir, qui,
maintenant, avait des airs
de syphilis
d'hôpital Broca.
et
cette sensation
,11
du bonheur dans
eut
la
paix, revit la façade de sa petite mai-
son de province
seuil
.
T.h
et la syphilis à
son
compril^qiia_Ja-^v4^-4wT-aytttt"
_sem ^é jus qii'
i
c i J r op
[;;
c
;
1
g»
,
,
;
Louis Buisson
—
où
faisait ses discoiirs
J'allais autrefois
l'un de
:
à l'hôpital Bi'oca
mes anciens camarades de
lycée était externe en médecine. J'ai
vu passer au spéculum toutes
avec leurs maladies.
petites
vu passer
les
femmes du Quartier qui ont
un chancre
leur a dit
Pendant
pilules.
J'ai
les filles,
La vérole
«
trois
»
parce qu'on
et qui rient
:
J'ai
ont dix-huit
ans
n'est
on
vu passer
rien.
prend
des
femmes qui
les
mois de vérole
et
qui
pleurent. Elles mettent leur tête sous
leur
€
bras
et
pleurent
en
Jamais je ne guérirai.
disant
:
Les méde-
»
cins les consolent en éclatant de rire.
J'ai
vu passer
les vieilles.
Comme
des
bêtes elles écartent les jambes. Elles
sont un pauvre gibier que l'on blesse
et qui se laisse faire
sans une plainte,
ayant l'habitude des blessures.
C'est ainsi que parlait Louis Buis-
son, ne pensant pas à Pierre. Puis
lui vint
comme un
éclair
the, Pierre et BertheL..
:
il
mais Ber11
regarda
• de
son ami qui,
les
Montparnasse
deux mains jointes
sur ses genoux, ne pensait pas,
lui,
à faire des discours. Cette pauvre
fille
à la vérole,
avec
les
il
la
voyait toute en larmes,
larmes des véroles, et
si triste qu'il
ne pouvait pas
c'était
lui adres-
ser un reproche. Le caractère des
hommes, à vingt ans, se compose des
paroles de leurs amis autant que des
mouvements de
pensait à
toutes
cœur.
leur
idées
les
qu'exprimait Louis
Pierre
d'amour
sa générosité
et,
naturelle s'y mêlant, avait pitié de la
vérole de Berthe en
même
avait peur de la sienne.
bien peur.
Il
ne
la
temps
Mais
qu'il
avait
il
connaissait pas
assez pour oser la regarder en face,
en cause
savait qu'on
Honte
et
comme
de
il
la
du Mal.
Alors Louis Buisson se leva, s'ap-
procha de Pierre
deux mains,
il
il
était discret
i'ai fait
cours.
et,
lui
prenant les
les pressait. D'ordinaire
dans sa tendresse. Mais
mal, Seigneur, avec
Il
mes
dis-
se révoltait contre lui-même,
• 113 o
BUBU
»
contre ses paroles, contre la vérité,
contre l'hôpital Broca. Cela ne peut
mal
que
pas être, puisque cela
fait
mon cœur
se leva, vint à
—
bon.
est
Pierre et djt
Il
et
:
Mais non,
Mais non, Pierre.
mais non...
Il
criait et
dessus
il
avait envie de crier par-
les toits
:
— Mais non, mais
ron, mais non...
Rentré
Pierre écrivit
Berthe
clicz
lui,
:
Ma chère
J'ai
petite
A>:in:,
bien de la peine en t'écrivant
cette lettre parce
peine
'la
à
malade,
que tu auras bien de
quand
ma
tu
la
liras.
petite Berthe,
moi
Tu
es
je vou-
drais être à ton côté pour té consoler
et te
montrer que je souffre à cause de
Pourtant
tes souffrances.
choses que je dois
Avant ce
riiôpital
['
-
-
il
y a des
te dire.
soir je
ne connaissais pas
Broca. Je sais maintenant
'.
-
o
134 o
de Montparnasse
o
pour quelle maladie
Tu
l'on
t'y
soigne.
dois être bien triste, niais ne va
pas croire que je t'abandonne. Je n'a-
bandonne jamais
les
miens
et tu fais
,
miens, puisqu'il y a déjà
mois que nous nous connais-
partie des
trois
sons. Je t'envoie
un mandat-poste de
trois francs.
Voici ce que je voulais te dire
relations doivent
ne
veux pas
:
nos
changer parce que je
ton mal.
attraper
Je
n'hésite jamais à faire le sacrifice de
moi-même, mais, ici, ce sacrifice me
du mal sans te faire du bien.
Nous continuerons à nous voir, n'estce pas? Nous nous promènerons ensemble quand tu le voudras et nous
serons deux amis, l'ami Pierre et l'amie
ferait
Derthc,
Tu comprends
bien que je ne puis
pas courir après ta maladie. Je crois y
avoir échappé, puisque je n'en vois
pas
les signes,
encore
,
mais je ne suis pas
Un de mes
me l'a dit. Il
hors de danger.
amis, qui est médecin,
faut attendre
Berthe,
si
une quinzaine de jours.
j'étais
malade,
o 135 ©
je te
par-
'
•
BUBU
©
donnerais. Je suis d'une famille où l'on
n'a jamais eu ces maladies-là. Je ne
voudrais pas la donner
D'ailleurs,
à d'autres.
nous
nous allons
écrire
comme par le passé. J'espère bien ne
me repentir de t'avoir connue.
quitte, ma chère petite amie,
te
Je
iamais
en pensant bien à
toi.
J'attends
ta
réponse avec une grande impatience
pour savoir
si
tu n'es pas trop triste à
cause de ce que je
t'écris.
Je t'aime
toujours et je t'aime davantage parce
que tu es malade.
Ton ami
qui t'embrasse,
-^
'
PIERRE.
i
Deux
suivante
jours après,
il
reçut la lettre
:
PIERRE4
^
i
J'ai reçu ta lettre qui m'a rendu
malade il fallait que je m'y attende à
cette audace que tu ferais passé cela
mon dos mais tu croyais peut-être
que case passerai comme cela mais tu
sur
o 136 O
trompe je n'ai jamais sesser de
croire que c'était toi qui m'avait donné
te,
cette affreuse maladie.
son je
n'ai
Mais tu as
rai-
jamais rien dis parce que
tu m'aidais mais maintenant tu trouve
que j'en
ai
assez
comme
cela mais je
un chagrin a mourir
heureux de ce que tu as fait
souffre et j'ai
toi tu es
bien d'autres encore des jeunes
et
et
filles
a
qui tu donne quelques francs et que
pour
la
peine quelle se sont donné a
toi tu les pourris.
Peut être ses
© 137 «
-
filles
se
BUBU
«
sont-clIcs lue car
songé à
ma
mon père
•
la
si
je n'avais pas
lamille et j'ai
penssé que
avait bien assez souffert avec
ma mère
mort de
ma
mol
sans apprendre
mort suivante. Puis je ne croyait
pas qu'un jour je rencontrerai
bourreau
boulevard
mon
Sébastopol
15 juillet. Que j'ai
jour pourtant il est trop tard
le
pleurer depuis ce
il
faut
bien que je m'y résigne aussi je te
cause
comme
sûr que c'est
qui aura
Puis
fait
cela parce
que je suis
toi qu'il me l'a donné et
mon -malheur pour la vie.
des jours de souftransse vont
sécoulés encore pour moi et encore
pour d'autre qui souffriront que je les
plains ses gens doivent souffrir à cause
de
toi
car
moi
les
gens qui savent que
tu m'as causer ce mal t'en veulent plus
que moi encore mais je n'écoute le
conseil de personne et c'est pourquoi
je souffre en silence.
que je ne
si
suis pas
Tu
une
dois savoir
salle fille car
je voulait je pourrai aussi
rnon tour pourrir d'autres
mais je préfère
quand je
me
moi a
hommes
faire soigner puis
serai guéri je verrai ce
o 138 o
que
de Montparnasse
à faire mais je ne te pardonnerai
j'ai
Tu ne le mérite pas un homme
ma fait tant de mal que je ne méritai
jamais.
qui
pas non plus
et je
ne matendai pas un
jour de passer au suplice car tu sais
pour
la
l'instant je soutfre
beaucoup de
gorge de se moment. Je
sais bien
que tu ten moque mais cela
lage puis tu dois
moi ce que
que
ne
l'on
en cette
tête
j'ai
me
sou-
mieux que
ressent pour avoir la
le
état
savoir
puis la charpie
et
ramasser un jour par terre tu
te lave
pas
les
pieds avec et puis
l'onguent qui est sur la table toilette
en dessous
cuvette tu te fais des
la
/rixtions avec
pour
bien pas pour
mais
c'est
la
la vérole
ça
chose
autre
fait.
du
aussi...
maladie qui l'exsige ou
tu aurais plus d'accident que tu as et
alors la
femme
qui irais avec toi
le
chaufferai tout de suite mais ce qui
est
embêtant
c'est
que
quand on
on le donne
un accident vient et
aux autres alors on la plaque
excite
et
puis
au tour à une autre puis tu es jaloux
de savoir que
autant,
que
toi.
les autres n'en ai pas
Mais Pierre
o
139 o
je t'en prie
•
•
BUBU
•
soingne
toi
comme moi
et
comme
cela
tu ne la donnera plus ou quelque iois
du
tu pourrais tombé pire et te faire
mal
c'est
un
Tant qua
qu'une pure
petit conseil.
ton ami médecin ce n'est
blague car tu en as assez de moi
et
pas
davantage.
J'espère que tu ne m'en voudra pas
de trop mais remarque que je ne suis
pas trop méchante je ne désire qune
seule chose c'est de ne jamais te ren-
un ami comme
pour moi moin que rien
ou je marche tous les
contré car tu n'est pas
tu le dis tu es
ou
le trotoir
jours mais tu garderas
dans
le
ta
tien
mon
mémoire comme
souvenir
je garderai
homme pas
une iille comme moi
mais en
d'avoir eu
suis ententu la meilleure
fille
digne
car je
que
l'on
puisse trouvé à Paris et c'est toujours
comme
ça. Enfin je
dre à ta lettre
de
toi
daigne
te
répon-
que je pense
haine que j'ai pour
et te dire ce
malgré
la
toi.
Mademoiselle Berthe.
la
pauvre malhexireuse qui
n'a que de lé haine pour celui
quil la pourri,
fille et
9
140 o
I
Quinze jours
y^lus
tard,
reconnut que Pierre avait
e
I4Î
s
le
mce'ccin
la syphilis.
^-^^
/ xX
CHAPITRE VT
Berthe resta à
mois
l'hôpital penJ.
demi.
et
Maurice
l'attendait
voir. Elle disait
lent
me
«
«
Que
guérisse.
sais, tu
Dans
veux-tu,
»
Il
»,
la
chambre
:
—
me
que je
faut
il
»
Maurice.
disait
répondait
veux toujours
dait assis,
la
Les médecins veu-
garder encore un mois.
Le temps me dure
—
Il
:
allait,
dimanches, pour
les jeudis et les
«
comme on attend
pain de chaque jour et s'en
le
«
Oh
je
!
faire à ta tête.
ci'hôtel,
il
»
l'attefî-
en buvant l'eau des carafes.
mangea souvent du
o 143 o
from-vire
de
Pour
Brie.
son parapluie
et
il
vendit
pendant deux jours
avec quelque
attendit
Puis
francs,
trois
assurance.^
y eut un camarade à
il
la
pièce de cinq francs qui paya la
chambre.
mangea
Il
chez sa mère, mais
de l'argent.
rais
«
Il
Travaille
»
I
elle lui reiusait
disait
bien crever
!
quelquefois
:
Tu me
«
Elle répondit
»
Berthe put
lui
quelques pièces de dix sous
tal
on n'a besoin de
ou
deux
aussi
déjeuner
tabac, mais
aucune
être sa vie parce
comme
jamais.
puisqu'un
homme
passer
y eut
Il
qui
payaient du
d'elles
ne pouvait
avait
qu'il
choisi
hommes,
y eut deux ou
:
à l'hôpi-
femmes
et
choisissent les
Il
:
rien.
trois
offraient à
ver-
trois
—à
femmes,
a besoin de cela.
attendit assis, les poings
Il
aux dents,
en mangeant du pain sec.
11
dans
attendit,
les
des après-midi entiers,
mes où
marchait
il
sans
temps devenait som-
cause. Parfois
le
bre et restait
immobile au-dessus de
(^
M4
e
e
tête comme un
comme une chose
sa
de Montparnasse
voile
d'ennui,
indifférente
et
Les jours d'action avec les
camarades et les aventures lui semmorte.
blaient des jours passés, des jours
du
vieux temps où l'on vivait chez les
hommes.
nirs
eut deux ou trois souve-
Il
Berthe, avec toutes sortes
:
bâillements, se traînait dans la
bre
disait
<
:
Je m'ennuie.
<
que l'on
tout
un
veuse
f/Al
Il
» Il
soir, alors
monde
Elle
répondait
:
ma main
ne comprenait pas
restât sans courage,
et le
que
pendant
la vie est ner-
plein d'action.
comprenait bien mieux, à présent.
Un peu
de douleur nous éclaire
nous montre
savions voir,
bonheur
et
maux que nous ne
comme des frères éterles
nels et meilleurs.
le
»
Si tu t'ennuies, je te fous
sur la gueule.
cham-
encore.
s'engourdissait
et
de
Il
sentait encore
est précaire,
que
que
notre cœur est une ruine noire
et branlante.
écrivait à
Il
perdit sa foi.
Berthe
o
:
c
14^
il
Je m'eno
'
^.
•
e
EUBU
o
de
nniô
C'est
toi.
la
prcmîcrc
fois
me
sem-
que nous nous séparons
ble
et
il
que nous sommes séparés pour
_ toujours.
ile lui
» îl
des poèmes parce
pas, mais
toutes
n'en
cju'il
lui revenait,
il
les
venait pas au cœvir
une à une,
d'amour
chansons
avait entendues.
savait
Les plus
qu'il
belles et les
plus pures étaient les meilleures.
eut, plus qiie jamais, le sentiment
la Béâlité.
son de
Pàr^déssiis tout,
L&kmé
pose sur
la
de
chan-
vient en nous et
la blessure
où
comme une
se
noits avions
mal. Elle lui Sortait des lèVl-es
uri cri,
Il
haleine et
comme
comme
une bOhilé odeur.
Oui, je Veil* retfouver ton sourire
Et dans t?8 yeux je veux revoir le
Mais
encore
il
vint
un jour où Maurice
plus las
d'attendre.
quinze jours que Berthe
misère
tal^ la
ciel.
lui
était
fut
Depuis-*-^
à l'hôpi-
semblait déjà longue.
Les premiers jours de misère on: des
amis
sà
et des ressources,
vos
mais bientôt
souliers s'usent et vos
o 146 ©
vête-
'
de Montparnasse
•
ments s'effrangent,
misère du pain
la
sec devient la misère des guenilles
pour laquelle
les
amis n'ont pas assez
de ressources ^Autrefois on c rp yait à -J
ja_possibilité-ée»-aventnresr Voler est
bien
^
de son
lorsqu'il s'agit
j?laisirj
mais celui £uivole_à_cause de son
besoin rnet dans seg^aventures trop de
fièvre j)our les
acco mplir avec assu-
rance. Puis on se fatigue
11
avait
du pain sec,
au ventre tout un souvenir de
cela, tout
un poids
mage de
Brie,
ridicule de fro-
une oppression
mauvaise nourriture
et
de
de faim.
révolte gronde au corps, l'odeur
La
du
fromage donne des nausées, l'homme
fort
regarde autour de
lui
avec des
yeux perçants.
Alors
pas
il
revit ses amis.
comme
Il
ne
où, dans
autrefois
à leurs côtés.
arrière-boutiques
coudes sur
Ils
était
allaient
aux
s'asseoir
table,
la
les
âme
après-midi, gaiement, son
libre
les revit
les
et,
poings
les
au
menton, causaient bas en buvant du
9
147 9
•
«
BUBU
o
vin rouge.
II
avait une mélancolie déli-
cate qui l'empêchait d'accomplir
actions quotidiennes et alors
un grand
qu'en un jour
et le vaincre,
fois
il
lui
qu'en une
toutes
fallait
11
les
un
mît aux poches assez
d'or pour attendre,
d'amour,
et
accomplît
quotidiennes.
actions
grand vol qui
il
retrouvât toute
il
son énergie de Bubu
seule
les
fallait
feu de combat, une grande
aventure pour l'agiter
fallait
il
comme un
comme un
rentier
poète de mélan-
colie ne pensant plus qu'à sa belle le
beau matin du retour
et
des nouvelles
épousailles.
Ce
fut
une
histoire simple et déce«
vante. Elle se passa dans
tabac, à trois heures
lieu
encourage
semble bon
comme un
seil. Ils
y
allèrent, la
du sang dans
les
pendant
hommes
dernier con-
gorge sèche
les poings.
enfin, tous les trois,
ter
du matin, au mi-
des avenues désertes,
le silence
que
et
un bureau de
mes
et
Allez-vous
frères, arrê-
vos cœurs et voir ce qu'on voit
o"
148
o
I:'
"4
'
)
dans
que
les vols alors
l'on
cherche
que
et
l'on tremble,
que
l'on trouve.
Tout marcha bien jusqu'à
la
porte et
durs.
les
Ils
tiroirs n'étaient
les autres
toujours douté.
:
La
pas
Maurice s'en
caisse conte-
nait seize francs, la caisse
nait
:
n'eurent pas de chance, ni
uns ni
était
les
la caisse
que seize francs
sirent tout
:
!
ne conte-
Alors
ils
sai-
les timbres, le papier tim^
bré, les cigares, les cigarettes et
le
•
iUBU
•
tabac.
Ils
en remplirent leurs poches,
pui* leur chemise, puis
ils
fireut
paquets avec leur mouchoir.
vide, et
avigc les
ils
Comme
encore
l'avenue
sortaient,
ils
des
était
se séparaient tous les trois
deux
sur leur crâne et des
poids dans les pensées.
Au
bout de deux jours,
ils
n'avaient
pas vendu beaucoup de timbres et
ils
ne pouvaient pas vendre leur tabac.
L'écoulement des produits volés est incertain
comme le
vol
même et les jours
sont terribles quand les nerfs dansent,
de l'homme en
trésor.
tête
à tête avec son
Maurice marchait, des timbres
plein ses poches et des paquets de
cigarettes sur sa poitrine.
être des amis.
jour,
comme
il
Il
avait peut-
Le matin du
troisième
passait quai de l'Hor-
loge, d'un coin sortirent
deux hommes.
rencontrés
Il
les avait déjà
et
remarqua leurs grosses épaules
la
veille
et
Un coup d'œil en arrière,
et les deux hommes suivaient sa route.
11 entendait leurs souliers comme des
leur gueule.
o
150 o
bottes, les sentait lourds
poing-s et avec
qui sait tout.
une
Il
comme
des
épaisseur de police
essayait de
marcher
plus vite et plus légèrement, Puis le
sang vous rentre au corps, la chose
était
prévue, deux poings tormidablgs vpijs
saisissent,
et c'est
deux épaules vous poussent
une
brutalité sans
nom, deux
voix auxquelles on ne réplique point
—
11
et
.Aliez,.
:
ouste!
avait des timbres plein ses poches^
des paquets de cigarettes sur su
poitrine.
Bcrtlie
apprit
o
cela
151
o
par
sa
sœur
•
BUBU
•
Blanche, un jeudi
soir,
l'hôpital
Broca. Blanche
(Zli;irlot,
qui
et l'on savait
de
le tenait
le tenait
de
du Grand Jules
encore, malgré les murs
prison,
la
d'avoir
au parloir de
que Maurice
un chancre
venait
syphilitique. Blan-
che parlait a'unevoixaffairée, porteuse
d'une grande nouvelle, avec des mines
des gestes et une sorte de gloire
et
comme un
journal lançant une infor-
mation.
y eut ensuite un silence
plein,
11
dans
l'air
noir de l'hôpital, entre
quatre murs du parloir, pendant
les
que
les
malades vivaient à son côté
que Berthe se sentait seule.
et
un
air
Il
y eut
obscur qui tombait sur les têtes
p- et voilait les yeux. L'hôpital était da-
vantage l'hôpital,
la vie
semblait davan-
tage la vie pour laquelle on combat et
qui vous blesse. Berthe comprit que la
1
vie jusqu'ici lui avait paru trop facile.
Mais Blanche se mit à dire
— Et puis quoi
qu'il te
!
:
Y a assez longtemps
donnait des coups.
Pendant
les jours suivants,
o
152 o
Berthe
de Montparnasse
o
recomposa sa
Maurice
et,
vie.
Les habitudes de
étaient entrées en son corps
mêlées à son sang, formaient sa
chair et ses idées. Elle était Berthe.
d'abord,
qu'un
rosa,
mais
homme
comme
elle
était
aussi
celle
pendant quatre ans
ar-
d'Egypte aux
la terre
bords du Nil débordant. Elle eut bien
A
peur.
main
et la conduisit
lui dit
il
dix-sept ans,
par la
au monde. Puis
il
C'est par ici qu'il faut aller. Et
:
la surveillait
dans
la prit
il
sa
voie.
quand
elle
marchait
Les jours
d'hôpital
étaient encore les jours
de Maurice, à
cause des jeudis et des dimanches où
il
venait au parloir. Et puis, elle savait
à chaque instant qu'elle pouvait
voir.
d'elle
le re-
Maintenant tout tournait autour
:
Paris, l'hôpital,
le présent,
l'avenir et des sentiments confus
Un
seul être vous
manque
Et tout est dépeuplé.
Pendant
s'essayait à
,
Berthe
vie. Elle la
recomposait avec sa sœur Blanche,
o 153 o
?.;'
Ua,Tfs(xt^\A«^
les jours suivants,
recomposer sa
;
o
•
BUBU
«
avec une petite amie qui
s'app©I<iit
Adèle, puis avec quelqu'un, avec n'importe qui, parce qu'une
femme ne
doit
pas être seule.
cherchait
des
hommes parmi
rappelait
Elle
ses souvenirs. Elle se
Pierre,
celui
avait
qu'elle
accusé dans son malheur
et qui lui
avait écrit en jurant qu'il n'était pas le
coupable.
mère,
— sur
les agitait
bruit et
dans sa
elle
de sa
la vérité.
hommes aussi et
pour
tête
faire
du
pour se donner des espérances.
rien ne pouvait effacer le souve-
nir de Maurice, et7(d[uand
été
la tête
— parce qu'alors c'est
Elle pensait à d'autres
Mais
comme
l'avait juré,
Il
aimait que l'on jurât,
un dieu eût
couché en travers de sa porte,
quand
d'elle
il
eût
fait
sa
compagne
et
l'eûtconduite à la grande gloire, quand
même
i^
l'eût enrichie et
elle l'eût
aimé, jamais
elle n'eût
pu
quand
—
même
jamais
—
oublier celui qui fut le
sien et qui fut plus qu'un dieu parce
qu'il ét^it
l'Homme quand
vierge'^a chair
était
o 154 o
elle
était
gravée dans
la
—i
de Montparnasse
o
sienne bien plus profondément
que
tousles'sentiments et que tous les dé-
sirsJ^Ue ne savait pas comment on
hommes en prison, mais tous
maux passés lui avaient donné une
juge
ses
les
grande défiance
avaient appris
de
l'avenir
que
et
lui
cataclysmes
les
s'engendrent l'un l'autre. {Elle_était_
malade parce qu'elle n'avait pas de
f.r
•îr
y/
^V^
'hance et pour cette
Maurice
que
croyait
même
cause
resterait
elle
loin
^
^d'elle pendant des années^-^
Alors
elle
se sentait
perdue,
promenait sa pensée tout
le
long des
lendemains pour y découvrir un
bonheur
mains,
où
qu'elle
petit
saisi
à pleines
à tous
les coins
eût
elle s'arrêtait
elle
l'on pouvait s'arrêter,
mais rien ne
às^n cœur parce
qu'elle venait
suffisait
d'un beau pays
et
c
qui était son pays.
155
9
s
^r'.
i^
•
buëu
t
avrtit
répondu
qU*elIe croyait à sa .pa-
role.
Elle vint sans qu'il l'attendît.
eux
avait quelque chose èntte
Il
y
et cha-
cun, tout âUtôuf de soi-même, sentit
qu'il
y avait cela. Mais on doit se
vaincre et repôUSSér les points d'hon-
neUr quand on
est
pauvre.
encore ce qui sépare
les
femmes
elle
:
il
cinq francs.
pensait que cette visite
faut vivre
d'abord,
on
ensuite
Ce ne
peut avoir des sentiments.
le
eut
les hômfiiés et
lui coûterait
que
y
pensait qu'elle n'avait
pas un sou,
Il
Il
fut
lendemain matin, lorsqu'elle
eut quitté Pierre, que Berthe
alîît
cher-
cher des nouvelles chez la mère de
Maurice
qu'elle connaissait
un peu.
Elle arriva dans la petite boutique
de Plaisance vers dix heures,
•
L'autre dit
:
•— Ah! vous
Elle la
fit
voilà,
vous
!
passer dans l'arrière-bou-
tique et avant d'être assise
çait déjà.
c
158^
o
commen-
o
cle
r.lbntparnnpce S
«— C'est pour vous que
lait ça.
mon
Je sais tout, que vous
lui
fils
donné vos maladies de pourriture,
puis je sais d'où vous sortez. Les
comme
voil5?, c'est
des mallicurs.
a
avez
et
filles
e
BUBU
•
Elle continnalonî^temps, lançait des
phrases pleines
l'ji
et
rrière-bq utique ,
les
s emblaient refléter ses
meubles
cirés
paroles et
leiir
donner force comfne un exem
sagesse qu'on oppose_à_iios déborde^
ments.
Elle
toute propre et bien
parlait,
peignée, avec une indignation d'honnête femme,
puisque son
elle
fils
fils
autre, lui
du compte,
la fin
n'oubliait pas Berthe,
que Berthe n'oublierait
espérait
pas son
à
et,
et pourrait,
de temps à
envoyer une pièce de cent
sous.
Cependant que Berthe,
regardait ses
sortes
femme avec
confuses,
d'idées
plus que
devenir, pliait
âme douce
tête basse,
mains en rougissant,
écoutait la vieille
se
et
sentait
Certains jours elle était
n'avait pas conscience
si
ne
sa
toutes
savait
pauvre
coupable.
bonne qu'elle
du mal qu'on
lui faisait.
Elle alla chez sa
o
/
appuyait. \D^««
sœur Blanche,
i6o o
t\y
e;^'
Pour
monde
rien au
posé que Bîanche
l'on n'eût sup-
était
Berthe. C'était une
fille
ans, rose et blonde, mais
était
jeune
et pleine,
la
sœur de
de dix-sept
sa peau
si
son vêtement et
son allure éloignaient toute idée de
jevmesse
et l'érigeaient
regard des souteneurs
©
i6i
o
dans
la
comme
rue au
le
type
^
BUBU
»
de ce qu'on appelle
salée
».
des-
Ses cheveux coupés courts au"
iront étaient frisés
bouchonnaient,
fiiles
môme
une
«
aux tempes
suivant
et
ti
l'usage
re-
des
pubhques des fauboUrgs, suivant
donne un uni-
la règle éternelle qui
forme
et entretient l'orgueil
gens d'un
même
nu-tête, les
chez
les
métier. Elle marchait
mains dans
les
poches de
son tablier, tendant le ventre et traînant
les pieds
comme on
Depuis
temps de son enfance où
le
traîne la savate.
volait cent sous à sa patronne,
était
elle
un jour
venu où, dans un hôtel meublé,
elle laissait
choir sa virginité aux mains
d'un souteneur et d'autres jours où
toutes les dispositions de sa chair et de
ses idées la poussaient vers cette carrière
que plus
tard,
librement, elle
y vécut avec assurance,
spontanément elle en eut l'allure et le
choisit. Elle
verbe, toute jeune encore elle fut la
fille
publique
comme M.
fut le poète, tout
litique par vocation, sans
O
de Musset
jeune encore. Syphi-
IÔ2 O
qu'un regard
de Montparnasse
o
en arrière vînt
donner quelque
lui
re-
de poux
tête pleine
gret, elle eut la
o
lui vînt
de propreté et
ses jupes enroulaient autour d'elle
odeur de vice
les
et
hommes
joyeuse
et
l'argent est
une
tin
se
et
en ce
du bien
comme un homme
ment
Elle
inconsciente,
n'avait ni l'idée
l'honnêteté
de crasse qui
accourir.
une
faisait
vivait,
puisque
et
monde,
ni
elle
celle
de
heureuse
sentait
du mo-
à son but,
poches pleines
qu'elle avait les
d'argent.
Parmi
Gaîté,
les
elle
souteneurs de
choisissait
rue de
la
de soa
celui
cœur, — cœur indépendant
vie qui se transtorme, —
la
et pareil
à
l'attirait
à
la
elle et,
quand
rejetait
pour en choisir un autre, scion
elle
en
était lassée,
l'évolution de son désir. ^EUeétait
mropre
le
53,
niaît resse, so ii-propre^ gouver-
et se protégeait elle-m ême par
moyen d'un grand couteau quelle
n e nie nt,
le
portait constanv.iKnt dans sa
poche
qu'elle luiicl;ait avec assr.r:.:-.cc
c
163
o
et
i.o;. iiiO
-^
j/S^'"
.
.
sans qu'un désir
w
n\V^
v
*»:>'
teuBuj»
•--..
•'
'
f-un
.
voyageur sans crainte auprès de
I
:
-.
ses
armes parce
rage ne
lui fera
qu'il sait
que
le
cou-
jamais défaut.
Berthe lui raconta la scène qui venait
de se passer.
Blanche
—
dit
:
Comment
pondre
I
aurais dit
Je lui
:
!
Tu
Vieille hypocrite,
trop contente que je
faites
n'as pas su ré-
aurais tout dit. Je lui
le
vous êtes
nourrisse.
Vous
des manières parce que vous
savez que je suis trop bête.
une guenille au cul
qu'il ait
Il
n'a pas
gagnée par
lui-même. Qu'il y vienne, vous verrez
je sais faire foutre le
si
camp aux ma-
quereaux I
Berthe répondit
:
— Bien sûr, mais moi je ne
me
pas
défendre.
/Et c'est
tie
sais
auprès de sa sœur^A^^ia-sor»
de l'hôpital, que JBerthe vécut.
Auprès de sa sœur, pa rce que les idées
6 164 a
o de Montparnasse
de famîlîe
sont^ plus fortes
que toutes
le^ autres idées et parce qu'une sœur
sera notre soeur, quoi _quJi.jijriv.e^,.
C'est
que Berthe se
ici
Blanche qui
était forte et qui la forti-
un peu. Blanche,
fiait
exemple,
monde,
chez
fixa,
sans
allait
comme un
du
préoccuper
se
sur sa route et Berthe,
déroutée, n'avait qu'à suivre ses pas.
Elle eut
un fond de
tristesse les pre-
miers temps à cause des habitudes
anciennes, et
pensait
âme
en son
sinïpleuje m'ennuie de Maurice». Elle
le
pensait bien fort et regardait les
choses autour
inquiétude
d'elle
comme on
avec
quelque
regarde un ca-
marade qui a changé son vêtement.
Elle vécut
auprès
de Blanche qui
secourait sa conscience et disait
toi qui as raison.»
lieu
pour
Pourtant
elle d'avoir tort
il
:
«
C'est
n'y avait
ou d avoir
raison, /nais jious cherchons_parto_ut
MlassuraacÊ_de. jtious=mênie_4ui
lait
.
Ij^artie
du bonheur.
>
-<
T
*
ô 165 o
'
Le
elles
soir, entre
neuf
descendaient
topol. Place
de\ant
elles
le
dix heures,
et
boulevard Sébas-
du Châtelet
avec ses
deux lignes de feux,
o i66
il
s'étendait
trottoiis,
ses
et scniblail
un
^4.
Montparnasse
o cfa
lVi<'':\v'^':^\':
naissaient
le
maniement
rompu
qu'elles
et
parce que leur
utilisaient sans fatigue
corps était
Tous
à son jeu.
comme
coins de rue leur parlaient
les
des
souvenirs, à chaque pas leur but marchait à leur côté, elles étaient à lui
sans sourire et sans s'émouvoir,
comme
un commerçant qui pratique son commerce. Blanche avait
facile et
directes.
métier plus
le
procédait par interpellations
Berthe,
un peu
tortillée,
Une
montrait des coups d'œil.
foule,
avec des jeunes gens qui semblent des
d'interrogation
points
hommes
avec
,
des
de quarante ans dont l'appa-
rence est sérieuse et
nette et satinante
la
conversation
comme une
pièce de
cent sous, avec des ivrognes qui ne
savent
plus
d'amour
laisse...
compter,
s'endorment
et qui
Des
bavent
qui
souteneurs
a
et
qu'on
gueule
noire passaient en les frôlant, avec des.
HiOts,
ù'ailes
ji
ce travail dont elles con-
avec des airs
et
des battements
de c:»rbeaux. Elles les regar*
o
167 o
W^
d'un coup
d lient
sec
comme
ncUv.
regardons l'homme qui n'est pas
nôtre et secouaient les épaules
s'ils
eussent été posés
là
et
comme
qu'elles
eussent voulu les iaire choir. Elles
laient
:
le
al-
Blanche, nu-tête, à grands pas
solides
comme
les
blanchisseuses
à
paniers, Berthe à petits pas, ayant des
mines
Les
comme
filles
les
ouvrières fleuristes.
publiques passaient
:
celles
qui sont jeunes et brillantes
comme
un
qui ne
de dix-sept ans
plaisir
savent pas
chances
celles qui
et
et
s'emparer des premières
des riches caprices,
—
ne s'arrêtent pas boulevard
Scbr.stopo]
et qui s'en
iC8
o
vont avec un
biuitde dcs'iOUb cnipc^es poui semei
autoni d lTcs
1
— ecllcsqiu ont
,.n\ic,
plusicuis annccb de
connaissent
et
tiottou,
en exprnnent
btance jusqu'à sa
—
fin,
et
qui
la
siib-
puis
a\ait les MCilles a pas louids
le
il
y
comme
des vaches qui font station aux coins
des rues et arrêtent courageusement
tous les passants parce qu'il s'agit de
-
î_
leu r pain quotidienj Les lumières ser-
vaient à étudier les visages de la rue,
les terrasses
d'amorçage
regard
de café étaient des lieux
où
semaient
un
après lequel elles se détoui-
naient pour voir
l'on a
elles
si
l'on récolte ce
semé.
que
\
yjvv-
8
169
9
à^
"S^
\
Y^
e
BUBU
o^
Un peu
quittait
pins
sœur
sa
s'en
et
:r-^.
Bln-^Mie
fai-d,
;L!a'.t
-
Aers les Halles et la rue Yk^
martre. Elle aimait opérer seule
parce
qu'un
d'une
besoin
sérieux a
travail
homme
sait
où Ton
solitude
comme un
concentre ses moyens
qui veut arriver.
Il sufîi-
qu'on la regardât pour qu'elle
s'attachât à nos pas
au désir qui
est
au fond de nos
cœurs,
et ses
tions. Elle vendait
et
hommes
sombre
sont plus
faciles.
pour quinze
buvant,
avec
du
heures
V
la
centimes,
petit verre
matin,
/
fV^^is^
à
en
des
quatre
regagnait Mont-
bourse pleine
content.
o
et,
/
de
et
qu'il fait
parce
"'
'n.
Elle se réconfortait plusieurs fois
rouge,
ç
.*.
bon marché
an quartier de journaux
cafés
'
i
satisfac-
pour vendre plus souvent. C'est
les
'^
elle venait, elle était là, "/
avec ses gestes
bars,
\%
pareille
et,
;
I^^J
170 o
et
le
cœur
o
^>'
i:!s
Montparnasse
sur
Bertlic,
â
boulevard
le
Sébastopoletles Grands Bou-
fr^-^,^
levards, faisait dans les senti-
/"l
Depuis ses bandeaux
nicnts.
son visage blanc jus*
noirs et
cu'à ses jambes battant dans
on
jupes
ses
marche comme une
jolie
sa
ressentait
action
dans une vie distinguée,
l'on ressentait son
une chère
douceur
cœur comme
petite
et
femme de
d'amour.
Il
y
eut bien des oiseaux pris. Les
jeunes gens pensaient
un
:
C'est
de toutes les heures,
plaisir
car en plus de cela elle a
l'air
de savoir goûter à ce qu'on
lui
O.
peut dire.
On
lui disait
:
moiselle, je vous suis et vous
marcher bien
des réponses:
vous
dire".
quand
vite.
«
>
Elle
«
Made-
me
av..it
faites
parfois
Oh! monsieur, je
C'est que je
je marclievite
beaucoup moins.
o
»
171
suis petite et
on s'en
^
^
vais
aDf'i''^ni(
autrCb lois
oiï
o
B
UBU
o
marchait à son côté, on ne
comme cela et qu'on
parce qu'elle
était
en avait
cœur ému.
le
Elle faisait
attire.
Elle souriait
comme
alors et vous attirait
ceur
disait rien
la
dans
les sen-
timents chez les jeunes gens
les
hommes
coup
parce
d'amour
comme
où
chez
parce
terre,
la
emmène
nous
et
et
y a beau-
qu'il
sur
que Famour coule
dou-
des entants vers les femmes
l'on voit de l'enfantillage et de la
bonté.
Elle avait la syphilis.
là elle eut
bouche
ce temps-
beaucoup de mal dans
et je
oiseaux pris.
Il
y eut bien des
A l'hôpital
elle se disait
comment je
Je ne sais pas
autres.
mon
Elle sortit. Les pre-
»
^miers jours elle pensa
Lave-toi bien.
:
vais faire,
puisque je ne veux pas donner
mal aux
la
pense que tous ses baisers
avaient la syphilis.
«
En
»
:
Puis
Je
il
lui
dirai
fallut
:
man-
ger^ puis la pitié n'est pas d'un usage
quotidien.
longtemps,
Quand
les
o
elle
pierres
172
o
avait
marché
devenaient
\
/
de Montparnasse •
o
I
dures
un
pesaient à sa marche
et
de pavés
tas
et
comme
de pierre. Elle pensait
bien donnée.
Ce
l'a
—
»
n'est rien, Seigneur.
femme, sur un
trottoir,
C'est
une
qui passe et
qui gagne sa vie parce qu'il est bien
difficile
de
faire
autrement.
s'arrête et lui parle parce
avez donné la
puis vous savez
L^'est
un
Un homme
que vous nous
femme comme un
Et puis cette femme
sir.
le reste.
plai-
Berthe, et
est
Ce n'est rien.
La faim de s
tigre qui a faim.
tigres ressemble à la faim des
agneaux
Vous nous avez donné des
nourri-
tures. Je
pense que ce tigre est bon
puisqu'il
aime sa femelle
fants et
ait
et ses
en-
puisqu'il aime à vivre. Mais
pourquoi
faut-il
que
la
faim des tigres
du sang, quand la taim des agneaux
est si
Il
douce?
y eut des jeunes gens bien jeunes
qui ne connaissaient rien et qui s'en
allaient
cœur
et
;
des cœurs
On me
«
:
comme
aux femmes avec tout leur
tout leur argent.
©
173
®
Il
y eut
des homwies de vîngt-cînq
ans qui en avaient besoin,
qui les cherchaient et qui
riaient,
quand
trouvées.
hommes
salent
t\
V%
ture,
les avaient
des
eut
y
mariés qui pen-
Une
«
:
'11
ils
un
petite aven-
un
sourire,
ca-
price pour celle qui passe,
parce qu'elle ne ressemble pas à ce que
l'on attendait.
quarante
giène.
Il
» Il
y eut
Il
vint
hommes de
ans qui faisaient de
l'hy-
y eut les passants, n'importe
qui, celui qui se
ment de
les
trouvait à
un mo-
sa destinée.
de
Bretagne unfîomme de
la
cinquante ans pour passer huit jours
à Paris à cause de ses affaires.
contra Berthe
Chaque
soir
le soir
il
lui
ren-
de son arrivée.
payait à dîner, la
conduisait au café-concert et
un peu dans
Il
les restaurants
même
de nuit.
C'est ainsi qu'il connut la vie de Paris, qu'il
n'avait pas
jeune parce
pu connaître
qu'alors
01710
il
n'avalî
étant
pas
o de
Puis
d'ar£^ent.
il
Montparnasse
retourna dans sa Bre-
tagne auprès de sa femme
cœur
le
filles,
c
et
de ses
brillant et les
lèvres
humides.
Une
autre
«
francs.
»
dit
Il lui
il
:
s'étendit à côté d'elle
Il
l'embrassa
Comme
sur les
ceci
j'ai
aimée
perdue.
et
que
j'ai
yeux
:
ressembles à
tu
une femme que
lit
hôtel
x\vant de te coucher, fais bien tes
bandeaux.
et
de
qui
rue Saint- Sauveur et
la
donna quinze
lui
«
un
passèrent la nuit dans
meublé de
et
temps à l'aborder.
avait mis quelque
Ils
homme
ce fut un
fois,
ans qui l'aborda
trante-cinq
beaucoup
>
Il
ne
s'accouda
rien autre chose,
sur roreiller_, elle s'endormit, et
toute
la
nuit
lui
il
sur les bandeaux.
passa
Il
la
main
y a de beaux
coeurs qui sont sauvés.
Berthe
D'ordinaire,
parce que
eue
les
sard
et
les
rentrait
rues n'offrent phis
quarante sous du
que
les
lia-
sentiments sont
o 175 o
Vî
—à
Iasi:és,
deux heures du ma-
tin.
Souvent Blanche ramassait près des
Halles
«
son
homme
du moment qui
»
ne savait pas toujours où dormir, ou
bien
de
qui
surveillait
la nuit.
Tous
trois
événements
les
:
i
Blançh e,£t—
lui,
[Berthe couchaient côte à c ôte^,JiLiis^
\ Bla nche
.
gardait
place du milieu
la
-pouji-Lui--é^itejr ]es _coiitacts.,_^ui
^aientet_p arce
Jûusje- C'était
les soupirs
de
une mait
collante,
de Blanche,
le
matin,
propre, les deux femmes
lit
vers
cendait
l'homme
midi.
chercher
mâle mal-
le
et leur
Blanche
Si
et
commençait
était jolie
parce qu'on n'a jamais
moyens. Elle
protestait,
faire, avait peur et rigolait,
'
'
des-
resté seul avec Berthe s'em-
l'attaque parce que Berthe
'
odeur
manger,
quoi
de
parait de la minute
et
charges
secouaient et sautaient
s'étiraient, se
du
les
avec
sommeil bousculé de
l'autre et le
Berthe. Puis,
dis-
qu'elle était-très ja.-^
©
176 ©
se
trop de
laissait
d3 N!ontparnass9 o
«?
Or Bertlie était une fille publique.
Ce n'est pas un métier que l'on quitte
au matin
que
duquel on est ce
et loin
comme un em-
l'on devait être,
ployé loin de son bureau. Connaissez-
vous l'odeur du
qu'une
vice*
on
fois
respira? Les coups de poing des sou-
teneurs façonnent
leur
marque dans
les filles et laissent
chair blanche au-
la
près des désirs qu'y mit Dieu. Elles
vivent et sont un o^rand troupeau côte
à côte, Blanche,
où l'une
Berthe
comme un exemple
seignement.
de
auprès
est
Il
et
et d'autres,
sa
voisine
comme un
en-
y a l'atmosphère des_
priiStitiiée&,^-qttL-seaLii'abord la liberté-
de
vivrej.pjiis__quLdÊ.S£.eiLd_ejLq-ul_pue-
comme
mille^sexesJouLun jour. Et
mal entre sous vos jupes avec des
sers dévorants.
/les
/Il
y a
chambres d'hôtel
id'argent^jtaûtTli n
le trottoir,
et les
pièces
cogunerce.
joù_ronve nd son âgie pendant
que
l'on
D y
a
vend sa
le
chair.-
bonheur que
o
177
o
l'on
i
le
bai-
o
BUBU
•
cherclie.
Le bonheur des
publi-
filles
ques ressemble aux gueules des rues
qui sont fortes et qui mordent la vie
avecleursmachoires.il faut un bonheur
où
les
hommes
soient dressés et vous
prennent avec leurs poings
colère
Tamour
sous laquelle on
comme une
plie.
Il
y a
que l'on cherche. L'amour des
passante» entre et s'en
va sans
laisser
un peu de son passage, mais il y a
l'autre amour pour le cœur des femmes
qui les saisit et les recourbe et qui les
fait
tomber. Autreiois
il
y
avait
Mau-
rice.
C'est ainsi que Berthe cherchait le
bonheur dans l'amour. Elle connut
d'abord Blondin
portait des
le Cycliste.
Blondin
grand, large, rouge,
le Cycliste était
mains fermes
et des pieds
solides et marchait dans la rue avec
un
poids
que
ses
yeux
semblaient
appuyer déjà sur nos poitrines.
livrait à l'on
ne
sait
bicyclettes et posséda
fois des
deux ou
automobiles qui
o
Il
se
quel commerce de
178 o
lui
trois
donnaient
i'air adroit
et
i'air
commerçant qui
commerce
Berthe à
d'un mécanicien
industrieux
au-dessus^ du
est
ordinaire.
la
d'un
Il
campagne
emmenait
et cela aussi
le séparait
du commun des hommes.
Parfois
avait les
il
d'argent,
sait
poches pleines
d'autres fois,
Berthe,
«
comme
avait besoin
il
di-
qu'on
Son amour rude et appuyé
contenait des bombances ou bien ne
l'aidât ».
contenait que les quarante sous de la
femme que
l'on aime.
parce qu'il vous
ses bras et
qu'il
on
faisait
lui
Et on l'aimait
craquer dans
donnait tout parce
ne voulait pas être pris pour un
'imbécile,
•
,
e
179 o
* Elle
connnt
du
l'Aztèque
Grand-Montrouge,
une
alors qu'elle rentrait.
^»
IKe
au coin d'une rue, pâle
et
nuit,
tenait
mince,
avec sa gueule en avant et ses
lontés
elle
sentait bien
à dire et qu'un
qu'il
Lorsqu'il
tendues.
regarde
l'aborda,
qu'il n'y avait rien
homme
le
vo-
peut tout lors-
monde dans
Elle connut
midi, dans
un
les
La
yeux.
Ouille,
un
après-
bar, qui boitait et semo
i8o o
de Montparnasse
•
un souteneur à
blait
font
trois
et
manque. Cinq
la-
boiteux sont
huit, les
un amour à
drôles, ce fut
è
'
la rigolade.
Elle en connut bien d'autres
:
les
gars de Montrouge, ceux de Montpar-
nasse
ceux du Latin, l'amour des
et
où l'on
après-midi
nuits
où
même,
l'on rentre
flâne,
;
elle
celui
connut
le
boulevard Sébas-
topol, l'amour
en coup de vent
sur
que l'on
Elle
fit
fait
la
dans
sont
comme on
à rire
les
bombes parce
rit
qu'elles
un bonheur en voyage.
une chienne dont
fut
clients.
à rouler dans
à boire tout ce qu'on
les bars,
voulait,
deux
entre
bombe
des
Elle
les chiens
sentaient la cuisse, se pressant
l'un
l'autre,
dressées
et
avec des
choses
gueules
des
folles
de
chiens chauds. Elle les connut tous
et
marchait
dans
les
rues
une chair
faible qui plie, sans
sort, sans
un nerf que
un bien dont
comme
un
res-
l'on tend, sans
elle fOt maîtresse. Elle
o
i8i
©
"^
•
BUBU
o
en
jetait
son porte-monnaie d'où
l'air
pièces d^argent s'écoulaient,
les
traînées au
torrent
d'un
vice sans
'^
frein.
Elle connut
ans,
en-
Kikî. Kild avait ?c\7.q
une voix pointue
comme
les
jambes.
Il
et papillotait
gosses tout autour de vos
était
un peu marchand des
quatre-saisons et connaissait sa rue
comme on
que
connaît quand on vend,
l'on triche sur le poids et
tient tête
le
la
que Ton
aux volés. Les hommes ne
prenaient pas au sérieux
:
c'est
pourquoi Kiki se dressait avec ses
dents et ses griffes, aboyait dans les
rues, sautait sur les choses,
et plus
qu'un autre avait besoin de se mettre
en valeur. Une
bonne avec un
un fouet
—
fois,
il
rencontra une
enfant. L'enfant avait
:
Donne-moi ton
fouet que je
le
fasse claquer.
Kiki s'en amu?a bien cinq minutes,
puis
la
bonne voulut
ter le fouet.
partir et cm;->or-
— Y a rien de
fait,
Comme
s'avançait
elle
pour
le lui
reprendre, Kiki se recula
et
faisait
le
figure de la
— On
Le
en disant
fille
Kiki
pleura,
se relournait
Quand
leur tête.
la
:
n'approche pas.
grosse
il
devant
claquer
en faisant claquer son touet
à autre,
il
ne
partit
de Icmf s
et,
pour se payer
les vit plus, le
fouet l'embari-assait, et
rière
dit Kiki.
il
le jeta der-
une palissade.
un gamin, pour des ga-
C'était
mines, un de ces moucherons dont les
vous amusent. Berthe,
histoires
en
blaguant, se laissa faire, et c'était mal,
parce qu'une
femme
qui se respecte
un homme qui
doit choisir
soit
bon à
quelque chose.
Berthe rencontrait parfois
dans
Jules qui,
l'arrêtait
à
«
la
les
le
premiers temps,
toujours et lui causait
femme d'un ami.
Madame
conduite,
il
»
.
Mais quand
ne
lui parla
o
Grand
183 o
comme
Il
l'appelait
il
connut sa
plus
et, tête
o
BU eu
o
droite, la regardait passer,
soldat
comme un
en armes regarde ceux
violent la discipline et ia
O
i8^
loi.
i>
qui
CHAPITRE
Il
et
VIII
y avait d'autresjours pour Berthe,
c'étaient
les
jours où elle
trouver Pierre Hardy.
— Tu
m'as
fait
Il
disait
allait
:
beaucoup de mal.
Un jour, je t'ai rencontrée
;
nous avions
vingt ans l'un et l'autre et je souffrais
parce que
j'étais
un homme. Vingt
ans, c'est de l'amour, mais l'amour,
c'est
de l'argent. Je prenais un peu
d'amour sur mes économies. Tout de
9
iSs
BUBU
e
o
suite, j'ai
eu cette
Aî n p.invrfi
îTialadîe
^entant, ce n' est ni ta fnnte ni 1n
\
\
î
mjpnnp
Nous vivons dans un monde où
[r2222^p'^ d'^'ivent
les^
Je n'étais ni
s^iiffî-'",^
assez riche ni assez beau pour choisir
ma femme parmi
nais. Tu sais bien
que
celles
que
ie t'ai
con-
je
au
prise
hasard. Toi, je pense que tu as eu
beaucoup de malheurs, puiscjue
tu
tends les bras à tous ceux qui passent.
me
Je
console un
peu en pensant
qu'un jour c'est moi qui fus ton pain
quotidien. Je ne suis pas
ami m'a
dit les paroles
pète, j'ai su
vais et que
m'as
fait
d'hui, ce
que je
monde
te ré-
était
mau-
nous étions à plaindre.
Tu
beaucoup de mal. Aujourmal que tu m'as
qui doit nous unir.
la seule
\
que
le
je
Mais un
bien détestée d'abord.
t'ai
lui
un savant,
femme
toucher donne
Tu
es
fait,
c'est
pour moi
possible, puisque
mon
la peste.
Berthe répondait.
— Que veux-tu! C'est notre métier.
c
iS6
o
TJ-
y>
y<Mi
lis
h
dînaient ensemble dans
un
\
il
res-
taurant à vingt-cinq sous. Salon au
premier. Les (ables, recouvertes d'une
nappe blanche contiennent
et
six places
semblent avec leurs verres, leurs
carafes, leurs huiliers, des tables bien
dressées
où Ton mange
mets des riches
pommes
paille,
:
grands
émincé de chevreuil,
hachis d'agneau, œufs
miroirs, îles flottantes
On
les
au chocolat.
y voit des messieurs en chapeau
haut de forme qui s'avancent avec orgueil et politesse,
o
mangent sans
187 o
diie
—
o
o
BUBU
o
un mot,
^
se tiennent à l'écart et sentent
protondément
sont employés à
qu.'ils
l'Hôtel de VilleJ Puis
on y mange—,
toutes les sauces que la vanité inventa
pour
du mal aux pauvres. On
faire
mmande ses mets suii__iuic ommandement et l'on parle
t^^
t-on-de
c
S^
k _yo\-^
basse pa rce ^ue les gens bien élevés
ne iont pas de bru i t.
B erthe
pressionnée
luxe et disait
«
On
par
connu
le
mal
n'est pas
ici s, elle
:
qui avait
charcuteries bon
les
im-
était
marché
des faubourgs.
Mais après
voisin,
café.
ils
le
repas, dans
allaient
L heure
choisissaient
un
café
prendre une tasse de
était
bien meilleure
un coin
et,
:
ils
coudes
les
sur la table, loin des gens qui font du
bruit et de
c'est
là
Berthe
ceux qui font des manières,
qu'ils
ont beaucoup causé.
la rouleuse, qui roulait
les vices, s'asseyait
coudes sur
la table, et
du fond de
sa conscience
flamme
triste
parmi
dans un coin,
il
lui
les
montait
une
petite
et tranquille, Pierre la
o
i8S
j
o
regardait
côté,
une
il
et,
de Montparnasse
femme à son
un peu d'amour,
sentant. une
croyait voir
flamme toute
petite
o
droite
qui
Tout de
suite
leurs paroles eurent
une grande
fran-
chise. C'est qu'elle
avait
semble
brûle et
cela,
fragile.
besoin de
parce que dans nos âmes
bon coin
faisions pas
y a
le
du temps où nous ne
qui,
le
il
mal, était plein de sen-
timents simples' et qui reste toujours
à sa place et où des voix parfois des-
cendent
et
viennent crier
comme
des
enfants abandonnés JlElle avait besoin
de cela cormne nous__aYQiis_JhÊSûia_
d'une mère , puis_dPun ép oux, jious
qui
sommes des femmes
sans appui,
avec des cœurs incertains
chons
la certitude sur les routes. Elle
avait besoin de dire
ceci
et qui cher-
que je
suis,
comment tu me
«
:
C'est
comme
regarde et dis-moi
trouves. «Jamais
eut d'amour entre eux, mais
quelque cho^^^^ui^J^ dépasse
il
:
il
n'y
y eut
de
ia
confiance et de la bonté.
Elle lui parla de Maurice e4 lui dit
9 IS9
O
BUBU
o
un amant
tout. Elle avait
lait
Maurice, qui
la giflait
qui s'appe-
mauvais
était
et qui
à pleines mains.
— Je ne
sais
pas
si je
l'aime
tellement battue que je ne
me
m'a
il
:
le suis
iamais demandé.
Un'soir
était fou.
11
il
sentit qu'il allait la tuer.
ae prendre un
la battait et
Il
eut
le,
oi"tiller, le lui
la tête et là-dessus
il
il
temps
jeta sur
donna du poing
jusqu'à ce qu'il fût épuisé. Elle en eut
le visage tout bleu,.
était
Mais, à présent,
il
en prison.
Et Pierre
le voyait. Il vit
ces choses
à vingt ans et baissait la tête
Adam
lorsqu'il vit qu'il
au monde. Seigneur,
de mal au monde.
Il
il
comme
y avait du mal
y a beaucoup"^
y a des femmes
qui sont sous vos yeux et qui sont vos
enfants.
les
Vous
les
avez créées, vous
avez mises à nos côtés pour notre
faim
comme un joli gâteau.
semblaient
délicates
si
Elles
nous
que
nous
n'osions pas y mettre la main, Sei-
gneur, Seigneur
o
1
II
y a pourtant des
190 O
•
de
femmes sons vos
croix de
homme
Il
la
tient
parna' SG O
vcurrcv.i |-oi'<cnt des
Sei<2;r.cur,
fer,
s'est
r.'or.t
LSerthe
avec ses griffes
enfonce dans
courbe vers
lasse
De
et les
peau pour
la
ne puisse pas s'échapper.
à marcher.
un
:
planté sur ses épaules.
tout
la terre
comme une
qu'elle ne puisse ni
qu'elle
la
Il
force
son poids,
pour
lui
il
la
qu'elle soit
bête rendue, pour
vous voir
ni
vous
entendre.
^/>'}
'-*/>
'
>
^--3'
'^t,^
Pierre regardait Berthe.
rien.
Il
lui prit la
main
Il
ne
disait
et la tenait entre
o 191 o
•
BUBU
•
ses doigts pour y faire passer de la
pitié, tout
— pour
ils
simplement,
la
un peu de
lui faire
partirent.
dans
rue
Il
gardait la
que personne ne vint
penchait vers
mots pour
c'était
elle,
comme
cela
— Ma chère
petite
amie
il
qu'elle
la
ceci,
bien. Puis
l'emmena chez
lui
il
— comme
lui, et
main pour
toucher.
Il
se
y joignait deux
bien que
sentit
:
petite amie,
ma
chère
!
Parfois Louis Buisson venait les rejoindre au calé.
côté de Berthe
Il
et,
s'asse}'ait
de l'autre
tous trois, les coudes
sur la table, buvant leur café,
causent. L'un était
ils
gens unis
blaient trois jeunes
un pauvre
sem-
et
qui
enfant,
de ceux qui ne savent pas comment
vous
tent
faire
du
bien, mais qui vous met-
un peu de
clarté parce
que vous
sentez qu'ils en ont un grand désir.
L'autre connaissait beaucoup mieux
votre mal
et, lorsqu'il le
doigt, vous sentiez
et
touchait
doux qui vous touchait pour
o
du
un doigt électrique
192
o
la
i
«de
j
bonne cause
Montparnasse
<»
qui vous sonûait parce
et
sonder les plaies avant de les
qu'il faut
guérir.
C'est
en ce
temps-là
racontait à Pierre
— Je
lis
que Louis
:
Évangiles.
les
Une
oJC^^^^^
nuit,
Jésus au jardin des Olives monta avec
les
siens.
C'était
une nuit comme
plaisir
est__mauvais^_jg arce
que
les
_llojîLnms-Ji^ nietteilL ^as d'amour.
dominait Jérusalem où les
filles
Il
pu-
bliques et la débauche se heurtaient
comme
de mauvaises armes qui vous
tuent pour vous faire oublier.
pelait
que
—
de Paris où nous savons que le
celles
que
le
monde
Il
se rap-
est plein d'argent,
les princes des prêtres et les soldats
y jettent de la haine et des coups. Il
montait au Jardin des Olives pour dire
à ses apôtres
:
a
Je suis l'Amour,
Recueillons-nous là-haut
la veille
de
ma
mort.
et veillons,
à
Nous prierons
Celui qui m'a conduit sur votre voie
pour qu'il m'y garde encore. Et demain,
*iuand je serai mort pur l'arbre, vous
9
193 •
"'
^
BUBU
VOUS en
direz
:
L'Amour
»
Use
pria longtemps. Puis
leur parler. Alors
les vit tous
Jude
et
voulut encore
se détourna et
il
endormis. Pierre
Thomas
coudes sous
s'ils
à Técart et
tint
il
et
Jean
autres,
les
et
la tête,
vous
et
nous venons
est né,
vous l'apprendre,
il
monde
irez par le
dormaient
il
et
les
comme
n'avaient eu qu'à dormir. Alors
que
Jésus
sentit
l'avait
couvert
que je répands
:
nuit
la
Il
«
terrestre
y a des années
mon âme
sur le
monde
pour l'animer. Pardonnez-moi, mon
Père, mais je vois que tout a manqué.
Ceux-là dorment aujourd'hui, au dernier jour que vous m'avez donné. Si
les meilleurs
succombent,
sont trop faibles pour
la
si les
Bonne
bons
Parole,
pourquoi m'avez-vous envoyé? JL-»^
a Das^assez de chaleur humaine.
et
mon
pauvre
Et je pensais à Berthe,
mon
Pierre,
prêché l'amour brûlant
amour va mourir.
-
J'ai
»
à cause de Jésus au Jardin des Olives.
Le
Chri.st,
en son dernier jour, a f u
o
194 o
• de Montp«rna«$«
Bonne Parole
pleurer, mais îa
'
n'est
pas morte. Les dormeurs l'avaient gardée, car l'Esprit est fort
saint François d'Assise
cent de Paul. Et nous,
fille
apprendrons
que
Vin-
et saiiU
mon
sa
vie
;
arr.i,
prenne
pour
et
pas
mais je
qu'elle l'aime. Je
nous pourrons
si
sais qu'il n'y a pas
Bonne
frère,
la
sauverJ
de limites 4
Parole. Si nous échouons,
consolons-nous en pensant
son âme
nous ne
que nous
et
Igtioî'ons si
somm es.- pas au commence-
ment de son
salut.
Et plus tard, lorsqu'il vint s'asseoir
auprès de Berthe,
—
il
ma
Voyons,
lui
demanda
petite,
:
pourquoi
faites-vous encore ce métier?
Elle avait
les
un
sourire niais
comme
enfants qui savent bien, mais qui
o
195 o
C^
i
i
^-
^
V o^^
.
v~^
^^^
^^^^
Ici/^^^^'^^
/
iC?'-^
'
NW^'vf^A>>^^
/^
,
^
\
\>^ ç^y
\)^
no.
que nous aurons mis un peu de lumière
en
/p
lui,^
pas
n'est
•
uiie
un
.... peu
de
p.... ..
^.. plus
nôtre pour qu'elle la com-
la
mon
est
et nous
..
..... ...........
mettrons
bonté dans
la
Chair
publique nous a trouvés. Nous
bonne
......
sais
si la
ont sauvé plusieurs âmes
faible. Ils
'^
•
b-^
_,.
BUBU
n'osent pas répondre. Elle
le
promena
quelque temps par sa face en baissant
les
yeux, puis
ne
elle
part elle eût dit
:
Oh!
<
donc pas du chichi
dit rien.
!
»
là là,
Autre
ne
lais
Elle eût dit cela
parce que ceux qui s'intéressent _à_la,
j[nis£re-eii_profit ent d'ab ord et
en suite
ne_pensent plus àJasoulager.
Mais Pierre
air
:
la
Voyons ma
regardait avec
un
petite amie, tu sais
bien que c'est moi avec tout ce que je
possède. Et tout
ce qu'il
possédait
rayonnait autour de sa face
comme un
foyer où l'on voit de belles lumières et
où
l'on sent
Alors
de
elle dit
la
chaleur qui va venir.
:
— Vous croyez
que
l'on fait ce
que
l'on veut.
Ils la
questionnèrent
:
Et combien
gagnait-elle autrefois dans la
fleur?
Elle répondit que l'on pouvait bien
vivre
puisqu'on
francs par
gagnait
vingt-cinq
On
prend une
semaine.
petite
chambre de cinq francs
le soir
on
fait la
et
puis
cuisine chez soi.
Une
6 196
femme, ce n'estplus comme un homme,
car on arrange soi-même se? affaires.
— Mais voyons, ma
pourquoi
petite,
faites-vous encore ce métier?
Voilà.
Quand Maurice
aurait
un peu
d'argent, elle s'établirait entrepreneuse
fleuriste.
qu'elle
Elle aurait
trois
vingt ou
paierait
sous par jour
fois
deux
et
ouvrières-
vingt-cinq
qui lui gagneraient
autant. Elle partit ensuite
dans toutes ses histoires
:
Elle avait
rencontré un monsieur qui devait l'em-
mener en Russie.
©
Elle connaissait
197
o
un
o
BUBU
o
homme
jeune
qui
donnait
lui
des
leçons de danse, après quoi elle entrerait
au Moulin-Rouge où
pour danser dans
a'.lait
les quadrilles. Elle
chanter dans un café-concert où
comme
elle serait décolletée
un corsage de
voulait
iaire,
l'on est pa3'ée
ceci,
avec
Maurice
soie bleue.
acheter un phonographe
et
tous deux, les fêtes des environs
de Paris. Elle aurait bien aimé être
serveuse dans un bureau de tabac
<
Les demi-londrès,
et l'on sourit
voilà,
monsieur
1
:
>
en disant ces mots.
Elle partit dans toutes ses histoires
de pauvre petite putain trotteuse. Leur
imagination
fait
bien des pas, et c'est
comme
bon de marcher
cela
et
de
réussir dans toute? ses entreprises. Les
iiommes
se disent
on
velle et ensuite
Quand on
ment on
écoutant
:
connaît
On tourne
monde,
véritable-
se repose de son tracas en
les enfants.
Mais Louis Buisson
— Ma
mani-
regarde causer.
les
le
la
petite,
o
dit
:
quand vous ne serez
198
o
Montparnasse
o cte
pas heureuse,
faudra venirnous voir.
il
Vous nous raconterez vos
que cela vous fera
je sais
Puis,
comme
histoires et
plaisir.
voulait travailler,
il
Alors Pierre disait
les quitta.
o
il
:
— Tu viendras. Les jours où tu seras
tristC;
je-
Tu
tu viendras.
diras
Oh! que
:
m'ennuie, que je m'ennuie! Je te
regarderai
répondre
:
dans
Moi,
mon cœur en
les
il
heureux de
tout seul et,
voir,
il
me
et
souffrir
te
y a des jours où
claque.
combien l'homme
pour
j-eux
Tu
la
dois savoir
femme
sont
ensemble. Je suis
quand un ami vient me
semble que jamais plus je
ne serai tout seul. Le
soir,
on
me
trouve avant de dîner et l'on dîne avec
me trouve encore.
Tu deviendras mon petit cœur, et
c'est toi qui me manquais. Ne crains
moi. Après cela l'on
rien.
que
Les femmes s'imaginent toujours
l'on veut
abuser
d'elles.
C'est ainsi qu'il causait et tout
fond de lui-même
il
pensait
bon d'avoir une femme
e
199
:
« Il
au
est si
à son côté
1
»
(
^
f
j
"T
^
*-^^
/
L
^jbvX-
'TXi
M^mm&mMX
Elle vint bien des fois.
pas
teÎTips, elle n'osait
Les premiers
et frappait à la
porte avec des gestes retenus, un petit
grattement de pattes de fourmi.
— Je suis venue
course à faire par
dit
:
suis
faim
fait sortir le
et
par^e
loup des bois.
demande pardon, je me
avant
toi. » Il
sers
y a beaucoup de
'^dité dans nos cœurs
fille
Alors je
restaurant elle avait des excuses
Je te
sel
me
ici.
avant dîner
fut d'abord
la
Au
f
une
Tiens, allons voir Pierre.
Ce
que
te voir. J'avais
:
du
timi-
et, si l'on est
une
publique avec un cœur en danse,
même une femme
on
est
les
hommes avec
quand
hésitations.
des douceurs
parmi
et
des
|fe>
Un peu
plus tard, elle disait
— Je suis venue
:
te voir et je sais
que
ça ne t'ennuiera pas.
Elle vint bien des fois. Elle vint les
jours où elle était
triste,
ayant un reste
de noce dans ses jupes
et les brutalités
des mai'lous. Elle vint
les
était
jours où elle
malade, remuant ses souffrances
dans sa tête
comme un
désespoir
constant. Elle ne vint jamais lorsqu'elle
était
où
gaie parce qu'alors
il
y a
les rues
l'on est folle, les souteneurs
où
la
joie est plus épaisse et l'argent des putains
que
l'on jette sur tous les
toirs. Elle vint
comp-
surtout les soirs de paye
av€c son métier
gagner son pain.
et
son
besoin
da
•
BUBU
o
— Et comment vas-tu?
—
•
Regarde!
Elle lui montrait sa langue et 5on
palais qui étaient pleins de mal, qui,
tout le long des soirs, donnaient leurs
baisers aux passants et glissaient leur
bave dans
comme un
bouches
les
plaisir... Elle
eut mal à la gorge et sa
voix raclait en passant quelque chose
qui était plaqué
douleurs dans
là.
Elle eut aussi des
les os
de son corps, qui
semblaient venir du fond d'elle-même
comme
d'un réservoir de douleur.
reste, elle
de mercure parce qu'elle avait
pilules
entendu dire que
le
Du
ne voulait pas prendre des
le
mercure
fait sortir
o
mal.
Elle vint certains soirs, n'ayant pas
mangé depuis la
sait pas, et le
tout
veille.
malheur a
monde.
le
Cela ne parais-
Elle
la figure
se
de
raidissait
d'abord, par une sorte de fierté; au
restaurant elle ne mangeait pas davan-
tage
que
:
«
Il
ne faut pas tout de
je lui fasse faire
de
e 202 o
là
même
dépense,
»
mais, après
le
repas, lu tête et le corps
gonflés, elle ne pouvait passe retenir:
«
Tu
sais,
mangé à midi
ventre.
qui a
pu me
:
— Ma chère
amie, tu
mal au
côtés.
me
fais
mal.
je suis
au monde, à
Viens donc,
viens donc.
que
sais bien
tes
faire
j'ai
>
Pierre disait
Tu
que
ce n'est pas ce
Véritablement,
il
est
bon de
faire
du
bien aux pauvres iemmes. Ona££c[;G
r-£la_
^
^soulager l'hnmnnité snnffraiiL
Quand
tu n'as pas de quoi
manger,
pense à moi.
Tu ne me
viendras et
saurai comprendre.
je
diras rien, tu
Elle répondit doucement.
«- Ça ne
lait
C
rien. Je
2C3
me
suis levée
BUBU
o
ce soir à trois lienres
comme
et,
ceci,
faim ne m'a pas paru du tout.
la
Un
on
soir,
en décembre.
était
décembre mauvais qui marchait
rues avec
les
comme un
tous
restait
et
les
et
le
vent,
nos
par-dessus
d'hommes,
sentiments
moelles
glace
la
maître,
aux
allait
plus fort que
là,
bonheurs
Un
dajis
et
que tous
les
chagrins.
Un décembre
de Paris où les
filles
publiques rentrent leurs épaules dans
leur corps, diminuent leur surface et
llottent
au vent avec
les
flammes des
réverbères.
Pierre
Le poêle
bre.
faisait
un bon vieux chat
dire
«
Reste
fidèle et qui
comme
semble
là,
mon
maître, puisque j'y
»
Pierre pensait
C'est
:
une maladie honteuse
qui rayonne
11
ron-ron
:
suis.
«
dans sa cham-
travaillait
comme
pensait encore
le
:
d 204 «
mal rayonne.
et
»
de Montparnasse
•
o
C'est le ioiir de l'an qui s'avance.
«
Les jours de
l'an
sont .bien changés.
Je demanderai huit jours au chet de
bureau pour
man
dira
vieilles
«
:
aller
Voilà
mon
dans
pa3-s.
mon Parisien
femmes diront
:
«
n'osons plus te tut03-er,
1
»
MaLes
A présent nous
'
»
Il
deux sœurs jet ma^jetite.iiièce. Tous.
les
soirsjeserai Jà, dans cette bûnne
chaleur des proyiE£es_qui .entre _dans
nos coeurs
et
comme
couve nos_idées
des petits poussi ns. C'est
la
année que
j'ai la syphilis.
J'embrasse-
ràTtout
monde
le
première
et je boirai
verres. Elles diront à Juliette
:
dans des
«
Allons,
gourmande, bois-en un peu dans
le
verre de ton oncle.» Je les embrasserai
tout près des
cheveux où
les lèvres
appuient moins. Mais ensuite je ne
saurai pas quoi dire pour
Maman
aille à
de
«
dirait
« Il
:
mon
a bien
verre.
tallu qu'il
Paris pour attraper ses maladies
pourriture.
C'est
une
»
jolie
Mon
père
dirait
compagnie pour
:
ses
sœurs. » Et tous ceux qui n'ont pas
o 20g d
^
J o ^P^
y aura mes
\l. €,
BUBU
•
des places à Paris seraient bien cor<
tents.
Il
pensait aussi
«
Il
men
faut
que je
de
conducteur
chaussées.
suite
:
On
sois reçu à
des
et
s'imaginerait tout
da
Au
le travail.
Et
mangeant du mercure
quand viendra le temps des
accidents tertiaires,
permise.
exa«
ponts
que je n'aime plus
je travaille en
et j'ignore,
mon
si la
vie
me
sera
»
milieu de tout cela quelqu'un
frappa à la porte. Pierre se levait et
oubliait déjà ses chagrins parce
Berthe
c'était
parce qu'une
et
est toujours ce qu'il
nous
que
femme
faut.
C'était Berthe.
Comme
dans ses jupes
Elle dit
—
entrait
qui
sentaient
froid.
:
— C'est moi.
Puis
l'hiver
entra,
elle
Il
fait
bon chez
toi.
:
Oh! écoute donc,
o
206 ©
tu ne
sais
*
«de
pas
:
ma sœur Blanche
Lazare
Montparnasoes
qui est à Saint-
I
y avait un manège de
Il
véloci-
pèdes.
Blanche, avec ses manies de faire
toujours à sa tête, chahutait là-dessus
en montrant ses mollets
On
«
lui avait dit
Ne
fais
j'avais dit
Au
»
:
donc pas ça
qu'un jour ou
ramasser.
et tout.
Ça y
était
:
tu verras
;
tu
l'autre
feras
te
qu'est-ce que
!
Dépôt,
il
y a
visite,
la
n'avait pas passé saine
on
et
elle
l'avait
envoyée se soigner à Saint-Lazare.
Berthe ajoutait
:
— Et, à présent,
moi qui paye
la
il
faut
que ce
soit
chambre.
Elle s'assit et ne dit plus rien.
Elle s'approcha bien près
si
du poêle,
près qu'on eût cru à de l'insensibi-
lité
ou à de
la folie, et, les
deuK mains
croisées sur le genou, se tenait, bas
la tête.
o 207 o
^
o
BUBU
o
Sous ses bandeaux, elle semblait une
pauvre petite femme en farine, quelque
pauvre
et
forme lassée qui se perd
petite
qui penche.
Elle soufflait encore
—
:
Et puis non, non.
11
y a trop
longtemps que ça dure.
Cela
faisait
beaucoup de mal, de
la
voir ainsi.
On
1}A
n'en
comprenait
pas
toutes
o
les
de Montparnfttïtee
causes parce que les causes dé-
bordent
suspendent sur nos têtes
et
leurs cent mille poings de fer
où
les
poids se mêlent et pèsent ensemble
avec
les
a
les jours,
avec
les
coups reçus, avec
avec
fait,
un
vient
où
soir
mai que
l'on
des nuits.
c'est fini,
où
Il
tant de
ont mordues qu'il
ne
pour nous garder
reste plus de force
que notre viande pend dans
et
notre corps comme
l'avaient
le
la vadrouille
gueules nous
debout
chagrins. ?»vec
mâchée.
si
Il
toutes les gueules
vient
l'homme pleure, où
la
un
soir
femme
où
est
vidée.
venue se
'Elle était
jeter enfin chez
ce garçon par
un
crever et qu'il
fallait qu'elle
instinct qu'elle allait
crevât au
meilleur endroit.
Et
c'est
chaise,
elle
qui sent
flancs,
ici
couchée sur sa
que,
était
une bête
.
un dernier
qui
s'en
regarde encore
la
souffle
vide
abattue
dans ses
à jamais
et
tanière avant d'y
laisser ses débris.
e 209 9
"
•
• BITBU •'
eile dît aîors
:
—
Laîsf^e-mol
coucher
i^.
ici.
Je ne
puis pas sortir. Je te
demande parce
le
^-
/^
que
<£-,î-"s^^
\.
''__^-
1
c'est bien
de l'ennui que
<5
causer.
^Une
fille
publique
dît cela,
nuits sont précieuses
tier,
les
comme un mé-
qui les estime à dix francs, et
pour qui
jours
dont
les nuits
sans pain.
perdues sont des
Elle
demande une
.grâce, elle qui sait le prix des grâces
a
2JO s
o de Montparnasse o
l'on accorde, qui sait anssî
que
humain
corps
se pa3'e
reçoit de l'argent de
et
qu'un
que l'on
ceux que
l'on
soulage.
se
Il
coucha à son
dans ses bras où
la
comme un champ de
cœur
longtemps
une
lantes,
petite plainte
ne
disait rien,
femme,
il
îî
de
pitié
qui
flamme.
il
ne pensait pas à
lui-même de
s'entourait
cette douleur et
avait bien envie de
:
— Pauvrepetite sainte
sainte
mit
chaude bien
et la tenait
comme une
crier
de
avec des dévotions brû-
sortait
Il
mit
cailloux
les récoltes sont brisées. Il la
sur son
la
Il
aux pieds, comme une tempête
la tête
de glace,
où
côté.
elle était froide,
1
o 211
o
1
pauvre petite
CHAPITRE IX
Puis décembre
et le
Premier Janvier
_
tout passa; mais depuis
Blanche
comme
le
si,
le
départ de
temps passait avec fatigue
aussi,
lui
il
manqué
eût
d'entraînement.
Un
soir,
passait sur le
boulevard Sébastopol
evant l'église Saint-Leu.
église en pierre
^^ySi^
comme
Berthe
à quatre heures,
C'est
anguleuse
autour des Halles où
et
une
grise
les
mai-
sons rappellent la marée vendue
et la
marchandes.
Ces
forte
gueule
des
«
BUBUe
jours derniers,
il
y
aurait
en Berthe une
espèce de soutfle, un jeu d'organes, du
diaphragme au cœur, dont
ne de-
elle
vinait pas encore l'intention.
Il lui
nait parfois de drôles d'idées qui
mençaient
com-
n'achevaient pas, mais
et
quand même une dou-
qui lui laissaient
Comme
ceur et un goût.
devant
ve-
elle
passa
Saint-Leu, le souffle
l'église
souffla et laprit tout entière. Elle sourit
en
le
suivant et se dit
Elle
fit
deux
et elle était
et,
Mon Dieu,
l'église
Alions-y
fois le tour
de
pendant un
ne sut pas quoi dire
drouille.
«
Ce
je
!
>
l'église
étonnée. Ensuite elle
sur une chaise
«
:
s'assit
instant,
:
ne suis qu'une va-
soir, j'ai
voulu entrer à
Saint-Leu sans savoir pour-
quoi. Puisque je suis dans votre église,
mon
Dieu, je pense à vous. Vous ne
nous regardez guère parce que nous
faisons tout ce que vous avez défendu.
Maurice
disait
moi je vous
Il
Il
:
dis
:
me semble que
n'y en a pas, mais
Il
y a un Bon Dieu.
j'ai quitté le
c 214 o
boule-
de Montparnasse
o
vnrd
Sébastopoî
longtemps.
depuis
Parce que j'étais malade
première communion,
le
jour de
j'ai fait
ma
ma
pre-
mière communion quinze jours plus
Nous étions deux petites en
tard.
de
même
la
fiacre
école
Dame. Nous
en
ma mère
sait
;
la
sœur
prit
nous conduisit, pour
et
communion,
notre première
d'aller
:
blanc,
étions bien
un
faire
à Notre-
heureuses
fiacre.
Et
puis c'étp't
aimait
le
mieux. Elle
moi que
me
di-
«Viens, Berthe, que je te fasse des
que j'arrange bien
frisettes et
veux,
»
tes
che-
Je suis allée au catéchisme de
persévérance etj'aime encore beaucoup
le
Ma mère était bien
n'était pas comme les
mois de Marie.
bo."ine,
autres
Le
elle
femmes
était Italienne.
jour où elle est morte, j'étais à
Mes deux sœurs
l'hôpital.
me
et elle
voir
:
Marthe
sont venues
était toute
mais Blanche se grattait
la
blanche,
tête
et
n'avait pas l'air
d'y penser. Sur le coup
ça ne m'a pas
fait
j'uu.ais cru.
Mon
tant de peine que.
Dieu, je pense àjma
o 215 o
n
i^mmmm'WM
'f.m'^:wmmm^
r-Tî'^î^n'
&. ^.
mère. Je serais si heureuse delà revoir,
me demande
ma)s je
si
ce que je vous
dis là n'est pas des bêtises. Je
mon
prierai,
Dieu, parce que
vous
la prière
bien. Si ceux qui
me
connaissent savaient que je prie,
ils
me
va
me
faire
du
trouveraient ridicule, et
je
vous
prierai pourtant. Je ne suis qu'une vadrouille,
mais
je
ne suis pas mauvaise
encore.
Vous me regarderez
direz
Tiens, c'est la petite Berthe
:
Méténier qui
Elle
se mit à
Notre Père et
elle
fait
«/e
sa prière.
genoux
et
vous
>
et
récita
vous salue, Marie^
ne put arriver à se souvenir du
Je confeBSe à Dicu^ Uti
peu après^
:
mais
:
elle
tmh'^'^"^
.^^\
-^
J^^^
?- "î
?^5
dans son coin resta assise,
s'assit et
toute seule et bien sage,
comme un
enfant qui veut donner le bon
petit
exemple.
Elie sortit et alla tout
droit chez
Pierre Hardy. Elle lui raconta
—
soir
Tu
?
ne
sais
pas ce que
ma
Dieu pour
avait
prié le
bon
:
— A cause de
te sera
j'ai
mère.
un vieux fonds d'éducation
catholique
il
ce
Je passais devant l'église Saint-
Leu. Je suis entrée et
Il
:
j'ai fait
ceci,
ma petite Berthe,
pardonné bien des choses.
Ensuite
il
se rendit
compte que ces
paroles ne voulaient rien dire,
s
m
is
•
BUBU
•
Apres dîner, pendant
au
café, cela la prit
qu'ils étaient
:
— Et puis, je suis
bête de
me
faire
du mauvais sang.
Alors, s'emparant du carafon d'alcool, elle en versait le
tasse,
contenu dans sa
avec un geste décidé
et
des bat-
tements de tête inattendus. Vraiment,
de drôles d'idées
la poussaient, tour-
billonnant toutes ensemble, et que l'on
voyait passer dans ses yeux. Elle se
mit à rire
comme
:
Oui, des
me prend
l'alcool comme
fois,
ceci. Elle but
ça
rien, et ce n'était pas assez.
Elle dit
et s'en
une
:
«
En
versa d'autre.
fois
le
coude
encore, toute une
la tête
avant
où boire
tipliait la joie.
musique
la
La
était
de
le
du coude
une
>
folie venait,
levé,
iolie
!
joie et
lever
et
de
mul-
Elle en versait là-dessus,
d'un geste d'arroseur, qui la mettait en
train, qui la faisait
pousser
et mêlait
à
sa sève une force inconnue. Elle versait
tout cela et l'on eût dit qu'elle
versait sur quelque chose,
o
218 o
le
%%'"%
iTi (ikMf^^d^^^ -^'t ^À^^tv^-'=^^^^=^'^'
"t&^^rsw^^S;;^
^^T"^-^.
Au
coin de
petit gosse.
danse,
rue
la
y eut un tout
Berthe, aux trois quarts en
balancier comme,
faisait le
danseur à
i!
la corde. Elle lui
jambe par-dessus
houp Le gosse
I
c
la tête
passa
en disant
:
un
la
Et
se mit à rire, Berthe
2ig c
e
C'-'BU o
se baissa
pour Tembrassci
e?t c;;entil
«
:
Qu'il
»
!
PendcUTt un instant
fut
et dit
gentil.
Elle
monde
le
entier
du nerf sur
mettait
toutes les choses, les parait d'une ani-
mation
comme
la
sienne
tiers les eût entraînées
billon
et
bien volon-
dans son tour-
:
Mignonne, c'est la garde
Qui passe en ce moment,
Pan ran pan pan pan pan,
C
chantait-elle, et elle s'engouffra dans
la
porte ouverte d'un café
— Et puis
fous.
Ya
Tout
le
l'air et
je
:
m'en fous, et puis je m'en
assez longtemps que ça dure.
chichi m'ennuie.
On crache
ça vous tombe sur
le nez.
Je
en
me
ious de tout à présent et ça vaut bien
mieux.
Il
y en a qui
me
disent:
«Vous
avez de la chance d'avoir bon caractère,
d'eux.
vous
A
riez toujours.
Je
me
fous
présent je veux m'amuser.
C'est vrai, j'avais
soir et je
»
une
crise
me demande
9
22a d
de nerfs ce
à quoi ça m'a
e
de se
servi. C'est pas
de Montparnasse
du mauvais
faire
sang qui vous met de l'argent dans
poche. Eh! vois donc la tête du
la
vieux
Quand
1
bave. Et puis
dans
la
leur dit:
il
boit son bock,
il
en
doit avoir des asticots
il
On
barbe. C'est bon, les vieux.
«Donne-moi quarante sous de
plus pour que je t'embrasse.
»
Qu'est-ce
que Maurice doit prendre là-bas? Deattend de
puis huit jours qu'il
nouvelles
mes
'.J'en avais assez. C'est drôle
comme on
voit les défauts
du monde
Tu ne vois pas son copain
me dit, l'autre jour « C'est pas bien,
que vous laites. > De quoi va-t-il se
à distance.
qui
ce
:
'
mêler, celui-là?
Mais Pierre,
assis
et
tout
droit,
ouvrait la bouche et elle se taisait déjà.
Il
y avait autre chose dans
— Non, celui qui
un homme
est
ton
l'air.
homme
est
et toute chair, la chair qui
souffre et l'âme qui peine, doit être à
nos cœurs plus chère que tous
sirs et
rer là
que toutes
comme un
les
les dé-
haines et demeu-
cri jeté et qui hurlera
9 331 9
•
«
BUBU
a
jusqu'à ce que nous lui offrions notre
amour. Je
sais
mal, mais je
qu'un
homme
est seul. Si ta
t'a fait
que cet
sais surtout
belle,
comme un bon ange
la tête
homme
douleur est grande,
encore que ta douleur soit
Justice de Dieu,
du
fais
penche
sous
la
puis lève la tête et
souris à ton frère Satan.
Il
a porté
la
lumière quand tu avais dix-sept ans,
s'est assis
au matin pour
nant les mains, disait
âme,
toi et, te pre-
Sœur de mon
mon amour?
comprends-tu
Berthe
«
:
Maurice, quand
et
vous enlaçaient,
s'est
il
il
»
les jours
accompli un
miracle de l'Esprît-Saint qui vous
lie
en
ce jour et qui doit marquer à jamais
dans ton souvenir l'instant du Bonheur
passé. Aujourd'hui, l'homme est chassé.
Je te dis
homme
:
Il
parce
faut
que tu oublies cet
qu'il
versa sur ta tête
l'abomination des mâles, mais je m'agenouille à tes pieds et je te prie,
des blessures, d'en étancher
Dis-lui
:
le
s'il
a
sang.
Je pense à toi qui es dans le
fond des enfers
et
je
O 222 O
t'envoie
mon
de Montparnasse
o
'
souffle
pour en
rafraîchir les flamn^cs.
Et puisqu'il y a un jour de résurrection,
puisque
les supplices
ne sont pas
éter-
nels, ce jour-là tu lèveras le front et tu
répondras Je fus une sœur de
:
charitLÎ
qui pansa des blessures. Je suis une
femme que
tu blessas et qui veut vivre,
qui veut guérir et qui ne te connaît
plus.
Ce
n'est pas ainsi
que Pierre pai!a,
ce n'estpas ainsi que Berthe Tentendit,
mais ces paroles dominaient
l'air
aler-
tour de leurs faces et passaient sur eu::
comme
le
souffle supérieur de leurs
paroles humaines.
Elle
demanda de quoi
comme elle écrivait,
folie
de
fille
c'était
publique
homme
t'écrivant ces
cela. Elle
», disait
mots
était
»
:
et
encore una
de
et
trompeuse. Elle l'appelait
petit
écrire,
«
femme
mon
cher
Je pleure en
et riait d'écrire
câline à la façon de
Paris où l'on met son sourire aux rencontres des rues et où toute chose se
passe avec une ironie française.
•
e
BUBU
o
Elle se mît encore à boire des verres
d'un marc bien raide qu'elle avalait
d'un coup sec
nom doux
et qu'elle désignait
un
:
vaient à la
marc.
petit
indienne
file
d'un
se sui-
Ils
comme
des
enfants qui jouent, elle les prenait et
les poussait
une rage
au fond d'elle-même par
d'étouffer tout ce qui pouvait
y rester encore. Quand elle fut ivre,
son ivresse la parcourait entière, sui-
un
vait ses nerfs et leur donnait
qui la secouait et grinçait
ressort serré.
Le monde
rire
comme un
était drôle, les
porte-allumettes sur les tables, les becs
de gaz,
les
quettes la
qu'elle
consommateurs
ban-
et les
un
regardaient avec
ne leur connaissait pas
air
et qui
en riant à gros
la faisait gesticuler
bouillons.
Ils
La rue
partirent enfin.
était
de dégel, les étoiles criblaient
et
descendaient
comme une
bruits roulaient tout
le
noire
temps
grêle, les
un tonnerre de
Dieu, Berthe dans son ivresse nette
saccadée disait
:
e 224 9
et
—
Je ne sais quoi
jamais je n'ai été
Il
triste
l'emmenait chez
me travaille et
comme ce soir.
lui et
dès qu'ils
La
entrèrent^ la crise se résolut.
tronne de l'hôtel les attendait
—
passé
qu'il
Mademoiselle,
ici
a
pour vous
votre
frère
voir. Voici
pa-
:
est
un mot
laissé.
Elle lut ce
mot
pressentiments
Son père
et
comprit tous ses
:
venait de mourir.
^
^>\
i\îétcn!er moiifiit h rhôpitnl, à
Jean
.
VCxge de quarante-neuf ans.
un
soir,
Il
comme une
lourd
pendant quatre jours se
se couclia
pierre,
tordit
et
àcause
de ses coliques de plomb. jÊuis-iLctispc^
sespoings^-s^t o ndit our
ç<
^^ ^
u'
'
^^"-^
vi
Marthe avec deux gosses,
Lazare avec toute
tave collé à la
cV
-jr
'^
y
dans son
Bcthe avec Bubu, Blanche
y
^
:
dos e t-sexL-i
sept enfants
tit__^sg r ses
crâne
le
et Saint-
la gueuserie,
Gus-
Grande Marie qui
sui-
.
vait
souvent
petits
la
feignantise, les trois
gosses qui mangeaient tant de
pain et qui restaient là avec leurs becs
—
ouverts de moineaux,
dents serrées
et la
et
mourut
les
gueule en avant.
^
C^esf pendant ces jours-îà que Berthe
fut si
malheureuse. Nous espérions
revoir et leur dire
:
«
les
Je^iolétais-troei»-
pjée^Jiiais_4e__viius--aimats-bien- quand
rnJine._j£^£eviens^_^t_jTiajjiteftant, la
fajiiille s era
comp let*^
e
226 o
»
Il
était
mort
de Montparnasse
e
Berthe se rappelait surtout un
et
que
leur père surprit
de
Blanche dans
la
rue
Gaîté, au bras d'un souteneur.
la
rentra chez
et dit
fallu
fait
Un jour,
raconté Gustave.
lui avait
<
:
lui,
s'accouda sur
J'avais trois filles,
que ce soient
Il
la table
il
a bien
trois garces.
Et
»
ses grosses larmes
d'homme tombaient
dans sa barbe.
était
Il
mort
quelque chose d'irréparable
et c'était
et d'inat-
tendu. Elle avait perdu beaucoup de
ses sentiments filiaux, mais,
quand
elle
eut vu cette face -grave et juste
des
comme
d'im
morts,
elle.
en
fut cinglée
éternel reproche.
qu'on a peur
Elle eut peur ainsi
la nuit
mars mauvais, dans
dans
les
comme un
crime,
cauche-
les
remords, quarid
l'ombre est dense et pèse,
après
châtiment. Elle
honteuse à cause de son passé,
nières.
«
:
Je suis
la
le
Ir.t
le revit
d'un seul coup avec éblouissement
pensa
et
dernière des der-
»
Et puis elleavaitbesoin d'un costume
î]e
deuil.
La
nuit, elle prit
o 227 o
o
unprétesto
n
|_>ue>^
E'JBU
•
les autres et s'en alla ga-
pour quitter
gner 6on costume de
comme
Elle ht
deuil.
l'ordinaire
à
le
boulevard
Sébastopol. Elle marcha trois heures.
les pieds sur les pierres,
dans
Ireux d'une nuit de mort
et, à la lin,
il
semblait traîner ce cadavre dans
la
lui
rue. Elle
lui
deux hommes. Ee premier
lit
donna dix
couchée sur
mâle
du
fille
p ib;,
passiv e, goûta
et
plaisir à l'amour.
donna cent sous
lui
elle lut
iBerthe, la
le lit,
et sentit
second
quand
trancs, et,
mécanique
bJioiie
l'air ai-
le
Le
mar-
et
chandait. Jamais elle ne put oublier cet
homme-là.
elle avait
dire
teux que tu
où
j'ai
une barbe rouge,
avait
le
mordre
Mais sens donc
«
:
11
envie de
te
perdu
père
Cette nuit la sauva.
qu'on ne
est
si
on
s'assied,
forte
la
lui
qu'il est
hon-
moi
jour
roules sur
mon
de
et
1
le
»
Quand
la
honte
peut plus porter,
on rougit encore, mais on
regarde ailleurs, on s'en va loin de
honte
le
et
il
le faut.
Elle eut à la
goût de cela pendant
e 228 9
les
la
bouche
jours
si
lon^s où notre père est mort, un goût
de pierre
de cendre, de boulevard
et
Sébastopol
où
et d'hôpital
Et tout son métier en
l'on crève.
était plein,
tous
ses jours de vérole et d'infamie, et les
chambres d'hôtel où
un
sur
l'on se
comme une
lit
couche
bête sans con-
sans pensée. Elle revoyait
naissance
et
les objets
innommables, lescu.ettes
choses qui traînent
les
vidés de
iille
dans
ses
et
et
reins
les nuits à clients.
Elle se rappelait tout
marche des
la
:
boulevards, l'alcool des caiés, les baisers sans goût, mêlait tout cela, le ïo:\dait
dans un seul bloc
,
dans son sou-
et
venir toutes ces nuits étaient
l'on devait enterrer
Il
nuit
où
son père.
y avait une réunion de famille. La
grand'mère,
la
la
comme une
fée Carabosse,
regardait avec ses yeux pointus.
Elle disait
:
«
Espèce de fumier
Berthe répondait
:
pas ce que tu as
jeune.
toi,
il
»
Son
«
fait
quand tu
frère disait
faut te taire.
c
»
!
»
Et moi, je ne sais
On
229 o
:
«
étais
D'abord,
avait disposé
o
BUBU
o
des trois petits gosses
On
Maillie prenait
les
deux autres.
en avait disposé à sa
face, sans la
second. Gustave
le
:
consulter, sans la laisser dire, ';omme
si elle n'était
parfois,
«
pas de
Comme
la famille.
proposait de leur venir en aide
elle se
Gustave avait eu un geste
Aide-toi donc d'abord
!
:
»
Elle séchait parmi tout cela, dans
<
"^
^ Xj
vV 0"
^y ^
O
Y''
l'angoisse indéfinissable des bannis et
dans une sorte de terreur qui
la ren-
un peu tremblante. ^^£116
sentait
dait
qu'elle n'était pas
honnête etjjparmi_
tous les siens groupés
d'un
autour
mort, comprenait
qu'il est
honnête. Par un
même
beau d'être
penchant ses
idées allaient aux souteneurs et à
gie.
et
La filiation
des
point
le
sans trêve des intamies
chagrins
plus
perdu dont
poitrine.
l'or-
l'amenait
noir,
l'eau
jusqu'au
un grand trou
amère emplissait sa
Dans son
esprit malhabile la
vie formait image, elle voyait devant
ses
yeux deux épaules débiles
et sur
lesquelles de grands coups se levaient,
c
23,0
o
o
une plainte sur elle-même
Elle avait
des mots pour enfants
Berthe
elle
le
grands
lever de
se
vit
sentiments dans
et
et
Pauv' petite
:
!
Alors
leil
de Montparnastî^
comme un
jour
so-
levant. Elle fut éclairée, Madeleine,
quand
elle se
dressa pour essuyer
son visage mouillé,
son cœur
lumière.
par delà
Elle
sembla que
lui
il
s'éclairait
avec
prime
la
un fond d'amour
vit
les choses,
une grande bonté
qui planait et dont les ailes agitées
tout à la douce battaient autour de son
front. Elle vit cela sans bien se rendre
compte, mais son âme
comme
lorsqu'on a
était
mangé
fraîche
des fruits.
Alléluia! chantaient des anges.
avait
mois de Marie. Quand
Il
y
comme un
au monde un parfum
elle
pensait à
Pierre, elle pensait à ses parents, aux
fleurs artificielles et à la
bonne
certi-
tude de vivre dans des jours égaux et
calmes.
s'asseoir
Comme
et
de
avait envie de
elle
regarder
temps, sans iaire un geste,
o
231
o
passer
et
avec
le
dc-j
BUBU
idées tout entières qui couleraient avec
Quand même,
temps!
le
quelqu'un
si
m'avait prédit cela la semaine dernière,
qu'il
ne l'aurais pas cru, parce
je
a
y
me
malheur
j'en
que
le
poursuit. J'aurais dit
Une
Blaîçueur!
où
longtemps
trop
pour toujours.
que
fois
on
suis,
l'on
:
en est
bien que c'est
sait
Et puis,
n'est
il
pas
possible de faire autrement. Elle pensait
déjà que
campagne
fleurs.
dimanche
le
elle irait à la
et elle
en rapporterait des
Quand on
sort de l'hôpital à
peu près guérie,
l'on appelle cela être
blanchie. Elle était blanchie
Elle pensait
:
Bien
moins d'argent,
et
parce que l'argent
I
sûr, je
ce
fait le
gagnerai
sera
difficile
b onheu r. Je
n'aurai plus des journées de dix francs
comme au
Sébastopol; mais, quand je
m'en souviens,
Sébasto
le
me donne
mal au cœur. C'est sans doute parce
que je ne
suis pas aussi forte
sœur Blanche. De
tais pas, Je
ne
sais
c
que
ma
plus, je n'en profi-
pas ce qu'on a dans
232 o
o
la
peau quand on
de Montparnasse
ce métier.
fait
bien raison de dire que
acquis ne profite jamais.
qu'en travaillant dans
moyen
d'être
occupée toute
manière
Il
la
On
a
bien mal
me semble
la fleur
tranquille.
il
Je
y aurait
serais
journée, et de cette
pas
n'aurais
je
le
envie
de
dépenser tant d'argent. Et puis, quand
on
est sage,
on
est toujours
pensée. Je trouverai bien
qui s'intéressera à
mon
voudra m'aider. Vraiment,
récom-
quelqu'un
sort
et qui
je crois
que
je serai sérieuse. Je ne tiens pas à
me
ménage parce que tous
les
mettre en
hommes
ont leurs travers.
^Uealla consultei^Jes
Réaumur et trouva tout
travail.
livres
les
affiches rue
de^suite
du
Tout se passa comme dans
les
où
l'on voit le
convalescents.
rejoindre
le
soleil chauffer
L'hiver semblait
printemps
et le ciel avait
des airs bien bleus qui vibraient au
soleil,
s'étendaient par-dessus les toits
et faisaient
penser à des adolescents
amoureux. Dans
«
la
233
rue, les passants
9
»
•
BUBU
•
marchaient du côté du soleiL Elle
était
fraîche et vive et bonne, d'une bonté
grande, qu'on eût cru que tout
si
le
beau temps venait de son cœur. Elle
travailla
dans un
atelier
sombre où de
vieux restes d'hiver croupissaient dans
les
coins,
et
patronne aigre,
la
et
toutes les blagueuses avec leur imbécillité
d'amoureuses au début
lui
elle
sem-
comme
blaient de mauvaises choses
en avait vues autrefois, à l'âge
en avait
ingrat. C'est parce qu'elle
perdu l'habitude, mais dans huit jours
elle serait faite à cela.
Le
en sortant,
soir,
Pierre. Elle
nouvelles
lui-
elle alla
:
Tu comprends,
j'en avais assez..,
Voilà ce que je vais faire
drai
trouver
racontait les grandes
une
chambre
petite
:
je pren-
de
cinq
francs la semaine, pas plus. Je m'installerai
dans ce quartier-ci.
mon vieux
Pierre.
o
Un
234 s
Tu
verras,
jour ou l'autre
de Monlparnasse
o
ça
finira
soirs,
par un mariage. Tous les
tu le veux,
si
nous ferons des
promenades dans la rue de Rivoli après
lesquelles nous rentrerons
De temps
soi.
chacun chez
à autre, je t'accompa-
gnerai dans ta chambre, mais pas tous
les jours,
parce
qu'il
ne faut pas trop
se fatiguer. Mais, d'abord,
tu
me donnes
il
que
faut
l'hospitalité jusqu'à
ce
que j'aie touché ma première semaine.
Tu m'emmèneras au restaurant. D'ailleurs, je
pense.
ne suis pas de grosse dé-
Nous
allons bien
Nous pendrons
terai
un poulet que
que
part, et
je ferai rôtir quel-
me
du café. Tu
Je veux
petit dîner.
filtre
mon
verras,
J'achè-
avec des légumes nous
aurons un bon
procurer un
nous amuser.
la crémaillère.
pour faire
vieux, je ferai
un
fricot
épatant.
Et Pierre pensait
«
Je n'avais pas de
marché
n'ai
:
la tête basse,
pas de femme.
Il
femme.
en répétant
y a dans
le
J'ai
:
Je
mal-
heur une continuité qui nous fait croire
o 235 o
.
a
au mal de vivre. C'est
Te
fini.
sens
maintenant que tout ce quimemariquait
va venir
place.
et
Mais
que
j'ai
monde
l'équilibre
premier coup. Je
ce que
le
fait,
:
Qu'est-
quel est donc
mon mérite pour qu'un
me soit donné? »
236
en
ne vient pas du
me demande
donc
p
est bien
tel
bonheur
Viï
^m
î;r.-f."%„
->-iL/
CHAPITRE X
Or, Pierre et Berthc dormaient dos
à dos, à trois heures du matin, dans
ces nuits où
Il
la sentait
Tamour a
passé.
auprès de
lui
comme
la
respiration calme d'une vie tranquille,
comme
la certitude
ne nous émeut
Elle
était
était
d'un bonheur qui
même
lasse, et cette
penser
à
plus.
endormie parce
des
qu'elle
lassitude faisait
lassitudes
de
petit
enfant.
C'est une présence de la
o 237 o
femme dans
la
nuit qui
semble s'arrêter sur nos
fronts et qui est bien plus pénétrante.
.j>
Ah! dormir
ainsi
quand
le
bonheur
iious endort et s'enroule autour de nos
sommeils
comme une
raient tissée des
laine fine qu'au-
mains pieuses.
o 238 o
^'
rr^.
...^«^s
La femme
est vierge et
icssemb!c à
notre ange gardien.
O'.ianJ
sur
ils
le palier,
porte,
blait
furent arrivés tons trois
Bubu
collait l'oreille à la
n'entendait rien et
il
lui
sem-
entendre ses artères.
Le Grand Jules toucha Adèle dans
l'ombre
:
— Vas-y
î
Elle frappa ses trois coups, puis, de
sa voix flûtée
— Berthe
:
est là?.
o
.
239 o
•
BUBU
o
On
la
entendit quelque chose, bientôt
porte s'ouvrit et
Adèle
la
lumière s'allumait.
entrait et disait
— Tu m'en causes des
Bubu,
Puis
:
histoires.
avec silence, qui se
découvrait en entrant, puis
le
Grand
Jules, tout droit, avec sa casquette, et
qui ferma la porte.
On ne les
attendait pas.
Bubu, bas
solides
et
large,
fit
deux pas
comme un déménageur.
— Monsieur, je regrette
Quand on
tances.
les circons-
ans
est resté quatre
avec une femme, vous comprendrez ce
en
qu'il
coûte.
J'accomplis
une
mission.
Ils
se dressaient tous
avec leur chemise
auprès de
la
deux sur
le
bougie tremblante,
regardaient cela
lit,
et leurs épaules,
de
leurs
et
regards
brûlés qui voyaient trop de choses.
Elle sentait
un coup, toutes
qu'elle avait reçues
comme ua
coup.
Bubu
disait
les gifles
:
e 240 a
seul
:?i;a^
"-i^v
i-X-'^'
>'!
'i^
'!rl''ûm\
.'
— Levez-vous,
madame
Elle se dressait sur le
étroit, les
I
lit,
le front
sens en arrêt, dans une
blesse à ne plus savoir
comment ou
parle.
Il
répéta
:
d
• «41 •
fai-
•
SUBU
9
— Levez-vous
Comme
elle
!
ne se
levait pas,
comprit que, qnanJ on a
Bubu
le droit,
il
faut avoir la force.
11
s'avança
:
—
Pardon, monsieur!
Va
la gifla
solidement poiu'
la
rame-
ner au devoir.
Pierre
allait dire
:
— Mais, monsieur,
droits.
vous avez des
si
.
Le Grand
— Oui,
Et à
Jules le coupa
nous avons des
Berthe, qui
:
droits.
s'était
levée, le
Grand Jules disait:
Vous avez de la chance, madame,
—
d'avoir
Puis
un homme qui vous aime.
il
dit
:
— Vous savez, nous
ici
sommes venus
en copains. Nous n'avons pas voulu
vous causer d'ennuis.
garçon d'hôtel
de Hardy?
:
«
J'ai
Où
demandé au
est la
chambre
Nous sommes des amis
qui venons le réveiller.
Et Bubu répliqua
:
o 242 o
>
— Je "vous
demande bien pardon,
me
monsieur, de
présenter chez vous
à cette heure de la nuit. D'ailleurs,
je reviendrai vous voir pour
m'en excuser
et
mieux
pour que vous ne
me
connaissiez pas sous ce mauvais jour.
Et voici qu'Adèle se trouva mal
que son beau coup
la
secoua
et la
et
iit
pleurer.
Berthe
avait dit
lui
homme
un bon jeune
comme
ceci.
.
»
.
•
Mi
9
:
<
Je connais
qui s'appelle
©
BUBU
o
Et
raconté à l'autre t
elle avait tout
Bubu
lui prit la
main
— Tu es fatiguée,
:
mon
petit?
Pierre avait de la fleur d'oranger, et
comme Bubu
verre,
—
il
allait
se ravisa
en verser dans un
:
que je lave ce verre.
On
doit prendre des précautions avec
ma-
11
faut
dame. Madame a
la vérole,
des plaques dans
la
Berthe
a
bouche...
vêtements
ses
s'habillait,
glissaient sur elle
madame
comme un
silence
de nuit, quand un fantôme regarde
et
s'étire.
Elle mettait ses bas, troués au talon,
ses
jarretières,
mettre en
même
et
lui
il
semblait
temps quelque chose
d'infiniment triste à son corps. Elle
mit ensuite son jupon
— Est-ce
sorti
que
et
je savais
dit
:
que tu
étais
?
Bubu
répondit
— C'est
bien,
's'intéresse à
l'avez fait,
son
il
:
madame. Quand on
homme comme
est bien
o
vous
étonnant Cju'on
244 O
de Montparnasse
«
ignore
Ahl
cela.
vous ne saviez pas
que
j'étais sorti!
Il
y a une chose qui
s'appelle la
con-
«
ditionnelle », et à
vous
laquelle
vous
ne
attendiez
guère.
Elle était bien pauvre-
ment
vêtue
pour
quand
froids d'hiver et,
elle
plus
\[
jupe
Il
:'.;.,
-^
M
mis son tricot
eut
blanc,
il
ne
restait
lui
à mettre
et
ces
que sa
son corsage.
Elle sepeignait. Elle ra-
^cl'''B menait ses cheveux noirs
îf.«-s- A^et
.;*«..?•;.
v.
sur son épaule et les peignait avec lenteur parce
qu'elle avait bien le
temps de voir ce
qui allait arriver.
Bubu
dit
— Tiens,
:
il
vous reste encore de3
cheveux. Dépêchez-vous, n)^
o 245 «
belle,
•
â
BUBU
•
nous sommes chez monsieur
et
nous
ne voudrions pas abuser de sa patience.
La première pensée
la
qu'elle eut fut à
mort. JU^la4îrmiâiJ:,^insi_qu'uiLûl^
de &ajviê--que_ron va^ chercher
^elui_qui-4'âvait
qu'elle
sentit
^is en
était
le suivre,
mieux
et
ne
me
il
réfléchir
la
une
malade
et
et
s'endormir à jamais
avait besoin de
l'oublier...
gage. Elle
une chose,
pauvre Berthe informe
pour
cjiez
Et
si
je ne voulais pas
tuerait... Elle
un peu avant
aimait
la
mort
devoir qu'à son désir. Elle
prenait maintenant son corsage et sa
jupe.
Le Grand
Jules dit
— Vous voyez,
:
monsieur, que nous
nous sommes comportés en amis. Nous
que madame
savons qui vous êtes
et
ne vous a
qu'elle a voulu.
dit
que ce
Vous permettez que je
rette
roule
avant de descendre
et
une
ciga-
que je vous
serre la main.
Bubu
—
dit
i
:
Je regrette, monsieur,
o 240 o
tout
ce
6 de Montparnasse o
que
dér'*<n<^ement
Vous avez
été
vous
vous serre
c'est
la
vous
causé.
aï
bien bon d'accueillir
madame comme
Voulez-vous me
bientôt
ie
vous l'avez
fait.
permettre de venir
offrir
un
verre.
Je
main, mais croyez que
un devoir bien pénible que
j'ai
accompli.
Ils
partirent.
demanda
Sur
le
vous êtes
Elle revint
fait
:
— Us veulent que tu me
donnes de
l'argent.
fX;VM¥''^'^:0A
\
—
^^^
Voila cent sous.
V
.„^,,^,.^s.
%^
..<
payer votre
madame ?i
nuit d'amour,
y^V^^^' 'I^W^
Bubu
:
— Vous
"^^
palier
.
Ain
.^.^^,:^J..>^-^
?fc^-ïirl^çit;
1
'^M"if
Elle partait dans
un monde où
la
_
bienfaisance individuelle est sans iorce
parce
qu'il
y a l'amour
parce que ceux qui font
implacables
le
que
parce
et
et l'argent,
mal sont
les
publiques en sont marquées dès
gine
lilles
l'ori-
comme des bêtes passives que l'on
pêne au
Puis
la
pré communal.
porte d'en bas claqua. Pierre
comprenait déjà
9
*
ÎSif3
f
_
^'-jr
S^rJ'^r^-jf^^/'-'fJ'^'T''^
^,
'^liZ'
^a-H
:*i-.
^^-s<
V**''
f
Ah
Mon
!
je sais
que tu vas pleurer
'.
mon Dieu je n'ai pas
de chance. Tu n'as pas assez de courage
Dieu,
!
pour mériter
le
bonheur. Pleure
et
crève! Si tu étais seul, tu aurais dû
descendre eu chemise
pour
crier
:
Au
et
secours!
pieds
Tu
nus
auraia
e
BUBU
•
dû
aller
les
passants
fous
!
Il
dans
la
nie
et leur
raccrocher
et
dire
:
Accourez
y a là-bas une femme qu'on
assassine.
»
FIN
Librairie
UBin
22, rue KuygUens
Editeur,
iïiichel^
Vol.
ALMERAS
Pourquoi
11
FAVAREILLE
(Henri d')
faut haïr l'Allemagne.
.
.
1
administrative par l'AiitoResponsabilité des
et la
Eéfornie
uomie
AMANIEUX
GALOPIN
L'Armature sociale (préface de Goor>res Renaud, professeur au CoMôge
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(traduit
(Rapîiaë!)
l'italien
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(J.-W.)
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La Fontaine
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secret de l'Histoire
Les Indiscrétions de l'Histoire
Mœurs intimes du Passé
Les Morts mystérieuses de l'Hstoiro
Fous couronnés
Folie d'Empereur
Balzac igaoré
Légendes et Curiosités de rUistoin.Une Allemande à la Cour de France
Souvenirs d'un Académicien
L'Histoire éclairée par la Clinique..
CAILLAUX
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Gallieni parle
Contre l'Oligarchie financière
MAUGARS
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Marocaine (préface
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DANIEL (Abbé)
Le Baptême de Sang
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(Gaston)
L'Allemagne secrète
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(Joseph)
Agadir (Ma Politique extérieure) ....
Journal de la
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l'Epopée arménienne
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La Politique de Demain ipréfaïc de
M. René Tiviani, ancien I'rr~idi'Kt
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Le Cabinet
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Les Papiers de Cléonthe
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Les Poupées se cassent (couronné par
l'Académie française)
L'Erreur
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Le Mirage
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