Je n`ai pas mérité Guantanamo

Transcription

Je n`ai pas mérité Guantanamo
L U N D I
2 0
F É V R I E R
emploi
2 0 0 6 • D E U X I E M E
E D I T I O N
N °
7 7 0 9 • W W W .
L I B E R A T I O N .
F R
Aux Etats-Unis, les employeurs scrutent les blogs avant d’embaucher cahier central
Témoignage
«Je n’ai pas
mérité Guantanamo»
AFP
:HIKKLD=ZUVWUW:?a@m@l@h@a
Grippe aviaire:
la filière s’inquiète
La découverte d’un canard
sauvage contaminé par le
virus H5N1, dans l’Ain, fait
craindre à la filière avicole
française, qui emploie
50000 personnes, une
psychose qui entraînerait
une baisse drastique de la
consommation. Page 6
POLITIQUES
En Inde, Chirac gêné par
l’affaire Mittal-Arcelor P.15
SOCIÉTÉ
«Cerveau des barbares»: le
profil de la bande se dessine P.18
Mourad
Benchellali, hier.
turin
2006
Un premier or noir
C U LT U R E
Yann Arthus-Bertrand passe
au-dessus de l’Algérie P. 33
REUTERS
SEBASTIEN EROME.EDITING
Mourad Benchellali,
Lyonnais d’origine algérienne,
raconte son passage dans des camps
talibans en Afghanistan en 2001, avant
d’être arrêté au Pakistan, puis
détenu et torturé par les Américains
à Guantanamo. Page 2
Shani Davis, seul champion
olympique d’hiver afroaméricain, gagne le 1000 m en
patinage de vitesse après avoir
refusé de participer au relais.
Et toute l’actualité des Jeux P.24 à 27
IMPRIMÉ EN FRANCE/PRINTED IN FRANCE Antilles, Réunion, Guyane 1,80 ¤, Allemagne 1,80 ¤, Autriche 2,30 ¤, Belgique 1,20 ¤, Cameroun 1200 CFA, Canada $ 3,25, Côte-d’Ivoire 1200 CFA, Danemark 17 Kr, Espagne 1,80 ¤, Etats-Unis 3 $, Finlande 2,40 ¤,
Gabon 1200 CFA, Grande-Bretagne 1,20 £, Grèce 1,80 ¤, Irlande 2 ¤, Israël 13 NIS, Italie 1,80 ¤, Luxembourg 1,20 ¤, Maroc 12 Dh, Norvège 22 Kr, Pays-Bas 1,80 ¤, Portugal continental 1,80 ¤, Sénégal 1200 CFA, Suède 22 Kr, Suisse 2,5 F, Tunisie 1,6 DT.
2 événement GUANTANAMO
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Mourad Benchellali, parti en 2001 dans un camp taliban, raconte l’horreur
«Tôt ou
tard, il y aura
nécessité
de fermer
Guantanamo.»
«DES MOIS DE COUPS
Kofi Annan, secrétaire général
de l’ONU, le 16 février
«[Kofi
Annan] est
totalement
dans l'erreur.
Nous
ne devons
pas fermer
Guantanamo.»
Donald Rumsfeld,
secrétaire américain à la
Défense, le 17 février
ÉTATS-UNIS
La Havane
BAH.
CUBA
200 km
Guantanamo Bay
(Etats-Unis)
Depuis
2002
Environ 700 détenus – le
gouvernement américain
refuse de donner des
chiffres précis – sont
passés par Guantanamo
depuis l’ouverture de
cette prison spéciale par
l’armée américaine le
11 janvier 2002. Les
prisonniers, des anciens
talibans, des «suspects
de terrorisme», sont
originaires d’une
trentaine de pays.
Nondroit
Les détenus de
Guantanamo échappent
aux conventions de
Genève sur les prisonniers
de guerre, selon le
gouvernement américain,
qui les considère comme
des «combattants
ennemis». La base, de fait
un «no man’s land
juridique», n’est pas
formellement un territoire
américain et les
prisonniers ne sont pas
passibles non plus des
juridictions américaines.
SÉBASTIEN ÉROME. EDITING
MER DES
CARAÏBES
Mourad Benchellali, hier. Parti en juin 2001 de Vénissieux, dans la banlieue lyonnaise, il a été pris au Pakistan par les Américains, puis est passé par plusieurs camps.
Lyon de notre correspondant
ourad Benchellali a quitté Vénissieux en
juin2001. Il avait 19 ans, partait pour l’Afghanistan. Quatre ans et demi plus tard, il
vient de rentrer, après quelques enfers
successifs. Deux mois dans un camp d’entraînement taliban, une capture au Pakistan pour être livré aux Américains. Et la torture, à
Kandahar puis Guantanamo. A son retour, la justice
française l’a placé dix-huit mois en détention, avant
de le libérer, le mois dernier. La silhouette s’est épaissie. Mourad porte des cheveux longs, crépus, qu’il retient d’une queue-de-cheval. Personne ne le reconnaît, et il préfère ça. Il veut tourner la page.
Mais d’abord raconter ce qu’il a vu à Guantanamo. Il témoigne longuement, pour Libération, de la filière utilisée pour rejoindre l’Afghanistan, de l’entraînement
chez les talibans, des tortures endurées.
Son récit est précis, car les multiples interrogatoires, dit-il, ont «gravé» les moindres
détails dans sa mémoire. Il est impossible
de vérifier ses dires mais son témoignage recoupe
ceux d’autres «pensionnaires» de Guantanamo.
«Le départ s’est fait très vite. Quelques semaines
avant, une personne très proche m’a parlé de la possibilité d’aller en Afghanistan [lire encadré page suivante]. Elle-même y était allée, elle m’a dit que ce serait une bonne expérience. Je savais pas que c’était
pour un camp taliban. Il n’était pas question d’apprendre à se battre. L’idée globale, c’était d’aller dans
un pays islamique, où l’on pourrait avoir une vision de
l’intérieur de l’islam. Je n’avais jamais voyagé. Je voulais aller à l’aventure, sortir de la routine. Je devais
chercher une formation en septembre2001. Je pensais quitter Vénissieux pour deux ou trois mois.
M
«Quelques jours avant de partir, j’ai appris que je serai
avec Nizar Sassi. C’était le grand frère d’un ami. J’étais
content. On a pris le TGV jusqu’à Paris, puis un bus
Eurolines pour Londres. On avait le numéro de téléphone d’un homme là-bas, on l’a appelé en arrivant, il
nous a donné rendez-vous à Finsbury Park (1). Il est
venu nous chercher et nous a conduits dans un petit
appartement. C’est la seule personne qu’on a vue à
Londres. Un Algérien, je pense. Il nous a aidés pour les
billets d’avion et, trois jours après, on partait au Pakistan avec un numéro de téléphone et le nom d’un
hôtel à Peshawar. Là, quelqu’un nous a pris en charge
pour nous conduire à Jalalabad, en Afghanistan. A
tion, sauf ceux qui étaient vraiment malades. Il fallait
pour cela l’autorisation du grand émir qui s’occupait
du camp. Nizar, grâce à Dieu, a été malade au bout
d’un mois, il a pu partir.
«J’ai fait ce qu’ils appellent la formation de base. Une
soixantaine de jours pendant lesquels on découvre les
modules de spécialisation qu’on peut choisir après:
topographie, techniques en montagne, explosifs…
Les instructeurs venaient de pays différents. Dès le
premier cours, on nous a montré comment monter et
démonter une Kalachnikov. Puis on a tiré une quinzaine de balles, pour connaître les sensations. Après,
on a appris la topographie, savoir lire une carte, tenir
une boussole. Ensuite le maniement des
explosifs: on nous montrait toutes les
sortes qui peuvent exister. Les conditions
de vie étaient très difficiles: la chaleur, la
fatigue, la faim. Ils voulaient nous faire ressentir des conditions extrêmes, au cas où
on irait combattre, en Tchétchénie par
exemple. J’ai perdu beaucoup de poids.
J’avais une diarrhée très forte.
«Ben Laden est venu une fois pendant qu’on était
dans ce camp. En juillet. Il est arrivé avec son escorte, dans des 4x4 pick-up. Tout le monde dans le camp
a commencé à chanter en arabe “Voilà le cheikh, voilà
le cheikh”. Nizar et moi, on comprenait pas l’excitation. C’était avant le 11septembre, il ne représentait
pas ce qu’il représente aujourd’hui. Je n’avais jamais
entendu parler de lui. On nous a dit: “C’est le cheikh
Ben Laden!” Il est sorti, beaucoup se sont dirigés vers
lui pour lui serrer là main. Il a fait son discours. J’étais
malade, fatigué, je comprenais pas l’arabe, je suis retourné à ma tente, j’ai pas écouté le discours.
«Après ma formation, j’ai retrouvé Nizar et on est repartis à Jalalabad. Là, on a appris la mort de Massoud,
«L’arrivée au camp de Kandahar
a été violente. Ils nous ont roués de
coups de pieds et de poings, avec
des insultes et des crachats.»
chaque étape, la personne laissait un autre contact,
avant de nous quitter. C’était facile. On est partis pour
Kaboul, puis on nous a conduits dans le camp d’entraînement de Kandahar, début juillet2001.
«Quand Ben Laden est venu,
on comprenait pas l’excitation»
«J’ai passé deux mois là-bas, dans le désert. Il y avait
des tentes, une petite mosquée en terre, une petite
clinique. On était plus de 200, de toutes nationalités.
J’ai eu l’impression de m’être fait piéger. Nizar et
moi, on n’avait pas l’intention d’aller dans un tel
camp. Mais il y avait une règle claire: une fois entré,
on pouvait plus ressortir avant la fin de notre forma-
3
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
de sa détention par les Américains à Kandahar puis à Guantanamo.
ET DE PANIQUE»
Par GÉRARD DUPUY
HARAZ GHANBARI. AP
Arbitraire
Une salle d’interrogatoire sur la base de Guantanamo (image visée par l’armée américaine). Benchellali apprendra par la Croix-Rouge qu’il est détenu à Cuba.
le 9 septembre sur RFI. On nous a dit que ça allait devenir dangereux pour nous car des Arabes avaient fait
ça. On a appris ensuite, juste après, pour le World Trade Center. On nous a conseillé d’attendre. Quand les
bombardements ont commencé, on est restés cachés
dans une maison. Des fois, on dormait dehors. Puis
l’Alliance du Nord est remontée jusqu’à Jalalabad, les
talibans se sont sauvés et tout le monde est parti en
passant par les montagnes. La marche a duré plus
d’un mois. Deux d’entre nous sont morts de froid. On
a fini par arriver à un village du Pakistan qui s’appelait
Parachinar, tout près de la frontière. Des habitants
nous ont hébergés. On voulait qu’ils nous aident à rejoindre Islamabad, pour contacter l’ambassade de
France et qu’elle nous rapatrie. Mais un jour, ils nous
ont donné rendez-vous à la mosquée du village pour
parler du voyage. On est entrés, les portes se sont refermées derrière nous. Ils ont appelé les forces spéciales pakistanaises qui sont venues nous arrêter.
«A Kandahar, trois jours de terreur»
«On est passés par trois casernes différentes au Pakistan. Ça a duré deux semaines. Dans la troisième,
des gens sont venus nous voir. Ils se disaient de l’ONU.
Il y avait un drapeau de l’ONU dans la salle où ils nous
ont interrogés. Ils voulaient connaître nos identités,
quels étaient nos parcours, quel lien on avait avec AlQaeda. Ils parlaient assez bien le français, mais avec
un accent américain. Dans l’après-midi, des gardes
pakistanais nous ont dit que c’était la CIA. On nous a
attachés dans des camions, on nous a mis des cagoules
et on a fait un voyage de vingt heures, sans boire ni
manger. Le camion était envahi d’odeurs d’urine. A
l’arrivée, des Américains nous attendaient.
«Il faisait nuit, l’endroit ressemblait à un aéroport
militaire. Ils avaient formé un grand cercle avec des
camions, et les phares éclairaient le centre. C’est là
qu’on a été livrés. Les Américains avaient la liste des
noms obtenus à la caserne. Ils nous ont fait monter
dans de petits avions, nous ont attachés au sol par des
sangles, les mains dans le dos et une cagoule sur la tête. Le vol a duré plus de deux heures. On a atterri à
Kandahar, où je suis resté quinze jours, dans un
camp. Il y avait 150 personnes à mon arrivée, 800 à
mon départ.
«Ils enfermaient les arrivants dans un grand hangar,
avec deux seaux pour leurs besoins. L’arrivée a été
violente. Ils nous ont mis des menottes aux poignets
et aux pieds, des cagoules sur la tête, ils nous avaient
déshabillés entièrement et nous ont roués de coups
de pied et de poing, avec des insultes et des crachats.
Ils nous ont ensuite fait monter les uns sur les autres
et on entendait qu’ils prenaient des photos. Ça a duré deux ou trois jours comme ça. Certains saignaient,
criaient. C’était vraiment trois jours de terreur. Ensuite, ils nous ont mis des combinaisons bleues et
nous ont emmenés dans des grands enclos grillagés,
à 60 par cage.
«Les mauvais traitements étaient quotidiens. Ils urinaient sur des détenus, ils jetaient des corans dans les
seaux où on faisait nos besoins. Il y avait aussi des
gens à qui ils rasaient une partie de la tête, ou un seul
sourcil. On avait l’impression qu’ils faisaient ça par
plaisir. Ils nous parlaient souvent du World Trade
Center. Ils ramenaient des femmes, militaires, qui se
déshabillaient devant nous et touchaient certains
détenus. Les gradés voyaient ce qui se passait.
«J’ai été interrogé trois fois à Kandahar. Toujours les
mêmes questions: “Qu’est-ce que tu as été faire en Afghanistan”, “Qu’est-ce que tu faisais avec les talibans”,
“Est-ce que tu as vu Ben Laden”, “Est-ce que tu sais où
il est?” L’interrogateur était assis à une suite page 4
Un grand frère
formé en Afghanistan
Mourad Benchellali a grandi aux Minguettes, dans
une famille d’origine algérienne installée en France
en 1963. La justice s’intéresse beaucoup à son grand
frère, Abdelhakim, dit Menad. Lors de son
arrestation, le 24décembre 2002 à Romainville
(Seine-Saint-Denis), la DST avait retrouvé une liste
qu’il aurait écrite, avec les noms et coûts de produits
chimiques permettant de fabriquer engins explosifs
et gaz toxiques. Menad aurait aussi réalisé des
expériences chimiques dans la salle de bains de ses
parents. Formé en Afghanistan, il a séjourné fin 2001
dans un camp situé dans les gorges du Pankassi, en
Géorgie. En France, il reste incarcéré dans le cadre de
l’instruction sur une «filière tchétchène» qui aurait
cherché à porter atteinte aux intérêts russes, en
Tchétchénie et peut-être en France. La justice le
soupçonne aussi d’avoir facilité le départ de son frère
et de Nizar Sassi vers un camp taliban, en juin2001.
Mourad, de son côté, était un garçon effacé. Sans
diplôme, il travaillait à l’époque comme «agent de vie
sociale»pour un office HLM.
Leur père, Chellali Benchellali, gérait la salle de
prière Abou Bakr, installée au bas de leur tour. Il
s’était fait connaître en 1993 en passant quelques
mois dans des geôles croates, lors d’un voyage en
Bosnie. Pour une livraison humanitaire, selon lui.
Le père a été arrêté le 6janvier 2004, en même
temps que la mère. La justice n’a pas grand-chose à
reprocher à cette dernière. Elle lui a pourtant infligé
seize mois de détention.
Ol. B. (à Lyon)
Mourad Benchellali ne
fréquente sans doute guère
les œuvres de Voltaire, mais
il y a du Candide chez ce
gamin qui s’enrôle aux
Minguettes et se retrouve
à Guantanamo après avoir
traversé le fracas du monde
sans trop comprendre
ce qui lui arrivait. Les
sergents recruteurs de
l’islamisme n’ont pas de
scrupule pour fabriquer les
petits soldats d’Allah – leur
très sainte cause justifie
tout par avance. Le récit de
Benchellali montre une
nouvelle fois la facilité avec
laquelle des adolescents
sensibilisés à une vision
politique de l’islam peuvent
basculer dans le terrorisme
organisé. Sa capture a
abrégé cette aventure que
d’autres ont poursuivie
jusqu’à l’assassinat et au
suicide.
Le deuxième volet de son
témoignage est autrement
inquiétant. Le compte
rendu de son séjour dans les
geôles américaines,
conforme à tous ceux
qui ont déjà été publiés,
montre un monde placé
hors de toute norme de droit
et qui fait de cette extraterritorialité un argument
de sa défense
(ce devrait pourtant être
l’inverse!). Rien n’oblige
de prendre au pied de la
lettre les accusations
portées – notamment la
désacralisation du Coran,
qui peut n’être qu’une
rumeur de désinformation.
Mais, sur le fond, il faut le
croire quand il montre que
les Etats-Unis dérogent,
dans cette politique
d’incarcération arbitraire,
à leurs propres principes –
sans que leurs amis s’en
émeuvent beaucoup. Il est
heureux que la Cour de
cassation ait contraint la
justice de prendre au
sérieux les plaintes pour
séquestration portées par
des citoyens français contre
leurs détenteurs.
Les accusations contenues
dans ce témoignage en
nourrissent d’autres
récemment entendues
–notamment en Irak, où les
Britanniques aussi sont
montrés du doigt (voire les
policiers français après les
attentats de 1995). Le
danger du terrorisme ne
doit pas être pris à la légère.
Contre cela, il faut répéter
que le principal succès des
terroristes serait de nous
accoutumer à l’exception et
aux passe-droits.
4 GUANTANAMO
suite de la page 3 table, moi accroupi au sol, les poignets et les pieds attachés ensemble, comme un
mouton avant l’égorgement. D’autres fois, j’étais attaché les bras en croix à une barre en fer au-dessus de
ma tête. Les interrogatoires duraient trois ou quatre
heures. Ils donnaient beaucoup de coups sur la
nuque, du tranchant de la main.
«La nuit, toutes les demi-heures, ils nous réveillaient
pour faire l’appel. Ils nous avaient mis des bracelets
avec des numéros. J’avais le 161. Ils nous alignaient
accroupis, puis on retournait dormir quand ils nous
avaient appelés, puis ils nous réveillaient une demiheure après. Psychologiquement, c’était très dur. Il y
avait aussi des détenus qu’ils laissaient debout toute
la nuit. Quand ils piquaient du
nez, ils les frappaient pour les
redresser. A la fin, les gars
étaient si fatigués qu’ils tombaient par terre et se laissaient
frapper. J’étais paniqué. Je me
disais qu’avec ce qu’ils étaient
en train de nous faire, ils ne
prendraient pas le risque de
nous relâcher. Je me suis dis: “Mourad, jamais ils te
laisseront raconter ça. Il faut que tu te prépares à mourir.”
«Au bout d’une semaine et demie, ils m’ont rasé la tête et la barbe, m’ont mis une cagoule et je suis reparti en avion. Ils nous ont collé des patchs qui devaient
être des somnifères. On somnolait. L’avion a fait une
escale au bout d’une heure, on a changé d’appareil.
Puis le voyage a duré vingt-quatre heures. On ne savait pas où on allait. C’est la Croix-Rouge, quelques
semaines après, qui m’a appris que j’étais à Cuba.
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
des containers dont ils avaient enlevé les parois, pour
les remplacer par des grilles. Il y avait une toilette à la
turque, un lavabo et une plaque en fer qui faisait lit,
avec un matelas mince dessus.
«Les interrogatoires pouvaient avoir lieu à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. En moyenne,
j’ai eu un à deux interrogatoires par semaine. Ce
n’était jamais les mêmes hommes. Pour y aller, ils
nous faisaient courir avec des menottes et des
chaînes aux pieds. Ça rentrait dans la chair, ça saignait. Les interrogatoires pouvaient durer deux
heures à quinze heures. Ça se passait dans de grandes
pièces, avec des glaces sans tain sur les côtés. On entendait parfois des gens derrière. La salle était très
«Beaucoup de tentatives de suicide,
mais personne n’a réussi»
«On nous faisait prendre beaucoup de médicaments.
Ils disaient que c’était contre la tuberculose, le tétanos ou la malaria. C’étaient des petites pilules sans aucune référence. Elles étaient rondes, parfois un peu
épaisses. Ça donnait des maux de tête, des vomissements. On pensait qu’ils faisaient des expériences car,
après, des infirmiers nous posaient des questions sur
les effets. Il y avait aussi des vaccins, on m’en a fait cinq
fois je crois, et des prises de sang. J’avais des nausées,
des diarrhées, des constipations. Une fois, ils nous ont
fait une piqûre, ça nous a fait au bras comme un renflement qu’ils sont venus mesurer avec une règle.
«A un moment, on a eu des
livres offerts par la Croix-Rouge, puis ils ont été interdits. On
nous a laissé que le Coran.
L’ennui nous rendait fous. On
recevait parfois du courrier,
mais ils le censuraient en
rayant des passages. Parfois, ils laissaient par
exemple que la dernière ligne: “Voilà toutes les nouvelles sur la famille.” C’était un vrai supplice.
«Il y a eu beaucoup de tentatives de suicide. Au moins
une par jour juste avant que je parte. A ma connaissance, personne n’a réussi. Les gardiens décrochaient
très vite ceux qui se pendaient avec leur drap. Ils les
envoyaient au bloc des fous. Il y avait aussi un camp
isolé, où ils mettaient les gens qu’ils pensaient dangereux. Personne ne sait ce qui s’est passé là-bas. La
Croix-Rouge n’y avait pas accès. J’y pense souvent.
«Trois fois, des policiers français sont venus m’interroger. Les premières fois, ils étaient huit. Deux posaient les questions, les autres autour demandaient
des précisions. Ils étaient corrects. Ils savaient ce qui
se passait à Guantanamo. Ils nous disaient de tenir le
coup, qu’ils ne pouvaient rien faire. Deux Américains
assistaient aux interrogatoires.
«J’ai appris que j’allais rentrer le jour du départ. Un
Yéménite m’a dit: “Mourad, tu es français, toi. Tu
rentres dans un pays où il y a des droits. Raconte ce qui
se passe ici.” Je n’ai pas de haine, de colère. Seulement
de l’incompréhension. Je comprends que les Américains devaient riposter au 11septembre. Mais ils ont
des prisons en Amérique. J’ai peut-être fait une erreur en allant en Afghanistan, mais je n’ai pas mérité
Guantanamo.»•
«A Guantanamo, une équipe intervenait
avec des sortes de tenues antiémeutes
et un grand bouclier en plexiglas. Vous aviez
l’impression qu’un bus vous rentrait dedans.»
«Dans une des salles d’interrogatoire,
l’impression que le cerveau allait se dissoudre»
«A l’arrivée, on a été déshabillés. Ils nous ont mis à
plat ventre et nous ont donné des coups de pied. Il y
avait un homme qui avait un accent arabe, un Libanais je pense. Il hurlait en arabe. “Qu’est-ce que tu fais
là, pourquoi t’es allé en Afghanistan?” Puis on a été
conduits dans une pièce où il y avait un médecin avec
une blouse blanche. Il nous a auscultés et a mis un
gant pour nous mettre un doigt dans l’anus. Ils nous
ont pris en photo nus et nous ont donné des combinaisons rouges. On s’est retrouvés dans le camp provisoire d’X-Ray. On était à peu près 350. Il y avait des
gens qui avaient été arrêtés un peu partout dans le
monde. Six venaient de Bosnie, deux de Zambie, un
Afghan avait été enlevé au Mexique, deux Algériens
disaient avoir été capturés par la mafia russe en
Géorgie. On est resté quatre mois avant d’être transférés dans le camp Delta, avec des cellules faites dans
éclairée, il y avait une chaise avec un harnais pour le
détenu et des gros climatiseurs derrière nous. Ils
mettaient parfois le froid à fond. Les questions
étaient différentes d’à Kandahar. Ils voulaient tout
savoir de notre vie, de notre parcours. Ils voulaient
qu’aucune étape ne leur échappe. Ils se présentaient
comme étant du FBI. Ils étaient toujours deux plus
un interprète.
«Il y avait une autre salle d’interrogatoire, sur laquelle ils avaient écrit en arabe “L’enfer”. Si on coopérait pas, on allait là. C’était une pièce toute noire,
avec au milieu un banc muni de sangles, comme dans
les hôpitaux psychiatriques. Aux murs, il y avait des
enceintes énormes et au plafond des projecteurs. Ils
attachaient les détenus et mettaient de la musique à
fond, souvent de la techno. Les spots faisaient des
flashes de lumière blanche très forte, très rapides. Il
paraît que ça donnait l’impression que le cerveau allait se dissoudre. Certains y sont restés deux jours.
«Il y avait aussi une équipe spéciale de cinq gardes,
qui intervenait avec des sortes de tenues antiémeutes et un grand bouclier en Plexiglas. Ils arrivaient en faisant “Hou hou hou” en rythme, en tapant
des pieds. C’était très impressionnant. Ils entraient
très vite dans la cellule, le bouclier devant eux. Vous
aviez l’impression qu’un bus vous rentrait dedans.
Certains gardes se comportaient bien. Je me souviens d’un qui m’a apporté un gobelet de café en caRecueilli par OLIVIER BERTRAND
chette, à travers la grille. Certains nous ont dit qu’en (1) A l’époque, la mosquée de Finsbury Park était dirigée
rentrant aux Etats-Unis, ils raconteraient ce qu’ils par Abou Hamza, condamné à sept ans de prison le
7 février pour incitation au meurtre et à la haine raciale.
avaient vu.
Six Français
poursuivis
Mourad Benchellali et Nizar
Sassi répondront devant la
justice française de leur
périple afghan. Ils sont en
effet poursuivis, avec quatre
autres ex-détenus de
Guantanamo, pour
«association de malfaiteurs
en lien avec une entreprise
terroriste». Les juges JeanLouis Bruguière et JeanFrançois Ricard les
soupçonnent d’être allés
suivre une formation en
Afghanistan pour commettre
des actions terroristes en
Europe. Mourad et Nizar
contestent cette version.
Leurs avocats, William
Bourdon et Jacques Debray,
dénoncent la procédure,
basée selon eux sur des
déclarations obtenues par la
DST à Guantanamo. Ces
interrogatoires, hors champ
légal, ne sont pas mentionnés
dans le dossier. La chambre
d’instruction de la cour
d’appel de Paris a cependant,
le 4 octobre dernier, validé la
procédure.
De leur côté, Mourad et Nizar
ont porté plainte pour
enlèvement et séquestration.
Ils visent la détention à
Guantanamo, où ils n’étaient
ni prisonniers de guerre, ni
prisonniers de droit
commun. La justice a refusé
d’instruire, mais la Cour de
cassation lui a donné tort.
William Bourdon, Jacques
Debray et Claire Chaillou ont
obtenu, le 1er juin 2005,
l’ouverture d’une
information judiciaire.
Deux magistrates instruisent
depuis leur plainte.
Ol.B. (à Lyon)
Aux Etats-Unis, l’opacité demeure la règle
L’administration Bush ne joue pas la transparence sur le camp de Guantanamo. Pour l’ONU comme pour la presse.
New York de notre correspondant
ous êtes les bienvenus
à Guantanamo, mais
vous ne pourrez rien
voir. C’était, en substance, l’invitation du
gouvernement américain à
l’équipe d’enquêteurs indépendants mandatés par la
Commission des droits de
l’homme de l’ONU. Qui l’ont
poliment déclinée. Elle était
assortie d’une condition inacceptable pour eux: l’impossibilité de parler aux détenus.
«Nous entamerions les capacités de recherche des Nations
unies si nous devions accepter
une invitation que nous refuserions de tout autre Etat dans le
monde», a expliqué l’un des
rapporteurs, cité par le site
Web de CNN.
Tubes. Les cinq auteurs du rapport publié jeudi se sont
V
contentés des témoignages des L’administration Bush n’exfamilles, des avocats des déte- plique pas en quoi une visite
nus et de ceux d’anciens pri- des enquêteurs, avec interdicsonniers. Ils estiment que cer- tion de parler aux détenus, les
tains traitements infligés aux aurait aidés dans leur mission.
prisonniers s’apparentent à Le camp de Guantanamo est
des actes de torture. Ils citent bien sûr une exception, par son
notamment l’alimentation for- fonctionnement et son exiscée des grévistes de la faim, au tence en dehors de tout cadre
moyen de tubes enfoncés dans le nez «Il n’y a pas de torture. Il n’y a pas
(Libération du 16fé- d’abus.»
Donald Rumsfeld, secrétaire à la Défense
vrier). L’administration Bush a eu
beau jeu de dénoncer l’absence légal international. Mais aussi
d’information de première par l’opacité qui l’entoure. Seumain. Scott McClellan, porte- le la Croix-Rouge internatioparole de la Maison Blanche, y nale est autorisée à accéder aux
voit des «allégations réchauf- prisonniers et à contrôler leur
fées qui ont été faites par des santé physique et mentale,
avocats représentant des déte- mais ses conclusions restent
nus». Et d’ajouter: «Nous sa- confidentielles. Les visites des
vons que les détenus d’Al-Qaeda journalistes sont soigneusesont entraînés pour propager de ment encadrées.
Donald Rumsfeld, secrétaire
fausses allégations.»
américain à la Défense, a indiqué vendredi qu’il n’entendait
pas revenir sur cette opacité.
«Il n’y a pas de torture. Il n’y a
pas d’abus.» Et quand bien
même il y en aurait, l’armée
américaine veille. «Dans la
mesure où quelqu’un commet
une faute, il fait l’objet d’un rapport et il est puni suivant le code
de justice militaire. Et, mon
Dieu, c’est comme ça que ça doit
marcher.»Inutile, donc, de faire appel à des enquêteurs indépendants. «Je ne pense pas
que cela servirait notre but que
d’avoir une investigation de
plus, la quinzième au lieu de la
quatorzième, et de rabâcher
tout ceci. Je pense que ce serait
dommageable pour le pays.»
Le 12 février, un éditorial du
New York Times rapprochait
le manque de transparence
entourant Guantanamo avec
le programme d’espionnage
sur les communications des
Américains (tenu secret par
Bush) et les efforts de l’administration pour bloquer une
enquête du Congrès sur le déclenchement de la guerre en
Irak. Autant de cas où le Président demande à son peuple
«d’oublier la démocratie, les
procédures juridiques et l’équilibre des pouvoirs, et de simplement lui faire confiance».
«Anomalie». En mai, l’affaire
du coran avait déjà montré les
limites de l’approche américaine. Newsweek avait révélé
qu’un gardien de Guantanamo
avait jeté un coran dans une
cuvette de toilettes. Sa source
s’était ensuite rétractée et
l’hebdomadaire avait retiré
son article. Mais cette affaire
soulignait la contradiction de
l’administration américaine,
dénonçant des «allégations»
tout en refusant les conditions
d’une information libre sur ses
pratiques à l’intérieur du
camp. L’article de Newsweek
avait provoqué une vague de
protestation dans les pays
arabes, tout comme aujourd’hui le rapport de l’ONU.
Celui-ci suscite une condamnation unanime des EtatsUnis: vendredi, le secrétaire
général de l’ONU Kofi Annan
en a repris la principale
conclusion, appelant Bush à
fermer le camp de Guantanamo «aussi vite que possible».
Même Tony Blair s’est bien
gardé de défendre son allié.
Vendredi, le Premier ministre
britannique déclarait: «J’ai
toujours dit que c’était une anomalie et qu’il fallait tôt ou tard
décider quelque chose.»•
LAURENT MAURIAC
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6 événement GRIPPE AVIAIRE
LA VOLAILLE FRANÇAISE
REDOUTE LA PSYCHOSE
Par JEAN-MICHEL THÉNARD
Vertus
La découverte d’un canard mort de grippe aviaire dans l’Ain fait
craindre le pire aux professionnels, dont les ventes sont déjà en chute.
SÉBASTIEN EROME. EDITING
Faut pas prendre les enfants
du bon Dieu pour des canards
sauvages. Jamais mot
d’Audiard n’aura été aussi à
propos, lui qui eût bien ri de
voir des gendarmes faire la
chasse aux poulets…
grippés. Le premier cas de
H5N1 en France a été
confirmé samedi soir à
quelques kilomètres au sud
de la Bresse, fameuse région
où l’élite de la classe aviaire
est élevée en plein air à des
fins gastronomiques. Il eût
suffi que le canard malade
s’écrase un peu plus au nord
pour que le drame touche
nos assiettes et prenne
encore davantage ampleur
nationale. Pour l’heure, la
Bresse est toujours sauve et
nulle volaille d’élevage ne
tousse. C’est bon signe,
même si ça ne rassure guère
la filière. Les éleveurs
craignent que la psychose
empire et ne la plume
définitivement. La baisse de
la consommation n’a pas
attendu celles de volatiles
malades et elle pourrait bien
croître dans les prochains
jours si, parmi les
migrateurs qui s’apprêtent à
traverser l’Hexagone, trop
devaient défaillir en plein
vol. L’Allemagne a déjà
décidé l’abattage d’élevages
en raison des risques de
contamination. La FNSEA
s’attend à la pareille de ce
côté-ci du Rhin et réclame
une compensation
financière en conséquence
au gouvernement et à
l’Union. Faut-il moquer le
principe de précaution qui
pousse les autorités
sanitaires et les
consommateurs à anticiper
une éventuelle pandémie et
l’aviculteur à lutter, lui,
contre un effondrement
bien réel de son économie?
Il faut plutôt se féliciter que
les leçons de la grippe
espagnole de 1918 aient été
tirées. Venue de Chine,
passée du canard au porc
puis à l’homme, elle fit
400000 morts en France,
plus de 30millions sur la
planète, mais elle fit prendre
conscience de la
mondialisation des menaces
biologiques. D’elle découle
la surveillance planétaire
que nous connaissons
aujourd’hui pour éviter que
le scénario ne se reproduise.
Surveillance qui a pour
inconvénient d’accroître la
psychose, mais pour
avantage de prouver qu’une
mondialisation bien
contrôlée a des vertus
sanitaires et, au final,
économiques.
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Dans la Dombes, samedi, plusieurs oiseaux sauvages morts ont été découverts et sont examinés par les services vétérinaires de l’Ain.
a confirmation en
France, ce week-end,
d’un premier cas de
grippe aviaire chez un
canard mort dans l’Ain
fait craindre le pire aux
éleveurs de la Bresse, toute
proche, berceau des poulets de
luxe français: si Bruxelles met
fin à la dérogation qui leur permet encore de laisser leurs volailles s’ébattre en liberté
(comme l’impose leur cahier
des charges), autant mettre la
clé sous la porte, déclarent en
substance les professionnels
du coin. Ils ne sont pas les seuls
à se faire du mouron: alors que
la menace se précise partout en
Europe, la filière avicole française, numéro un avec son milliard de volailles abattues
chaque année, fait ses comptes
en prévision d’une éventuelle
pandémie. En première ligne,
les 50000 personnes qui tra-
L
vaillent en France à l’élevage, à
l’abattage et à la transformation des volailles pour un
chiffre d’affaires de quelque
6 milliards d’euros, dont un
peu moins de 20 % pour les
produits se prévalant d’un label de qualité supérieure.
Inquiétudes. Le dérapage a
commencé en février 2004,
pic de la crise aviaire en Asie.
L’appétit des Français pour le
poulet rôti et le magret de canard a commencé à se tasser:
10% de moins depuis cette date. Ces dernières semaines, la
découverte d’oiseaux infectés
aux portes de l’Europe a accéléré le plongeon: en novembre,
par exemple, les ventes de poulets dans les hypermarchés ont
baissé de 30% en moyenne. La
semaine dernière, juste avant
la découverte du premier cas
avéré de H5N1, les poulets élevés en plein air (Fermiers de
Loué, poulets de Bresse,etc.),
jugés particulièrement exposés à la contamination, encaissaient une chute de 30 % de
leurs ventes. «Tout va dépendre
du niveau de la consommation.
Si la situation évolue mal, on
peut s’attendre à une crise à 50% pendant une quinzaine de
jours. Tout dépendra de l’effort
d’information qui sera fait pour
protéger et rassurer», explique
Louis Orenga, patron du
Centre d’information des
viandes (CIV). Et justement,
les professionnels de la volaille
ne sont pas rassurés du tout:
tous les regards se tournent
vers l’Italie et la Grèce, où l’appétit des consommateurs s’est
rétréci en quelques jours de
70%.
Une perspective qui fait
craindre le pire aux salariés.
D’autant que certains éléments de la filière sont ● ● ●
Bruxelles attend de voir pour payer
L’Allemagne est devenue le pays le plus touché de l’UE par la
grippe aviaire: 18 nouveaux cas d’oiseaux sauvages morts y sont
apparus dans la seule journée d’hier, portant à 59 le nombre
total de cas avérés dans ce pays. L’Italie a également connu un
nouveau cas hier. Aujourd’hui à Bruxelles, les ministres
européens de l’Agriculture se réunissent pour voir comment
indemniser la filière volaille: «Nous sommes compatissants,
mais, en terme de budget européen, il y a vraiment très peu de
choses que l’on peut faire», a fait savoir Mariann Fischer Boel,
commissaire européenne à l’Agriculture. Les ministres
français, grec et italien ne vont pourtant pas manquer de
demander une augmentation «significative»des restitutions à
l’exportation pour passer le premier cap de la crise (lire cicontre). Quant aux aides directes, c’est une autre paire de
manches: la Commission n’a pas compétence pour intervenir si
les ventes et les prix chutent, indiquait hier Bruxelles. En
revanche, si la grippe aviaire venait à toucher effectivement un
élevage et que celui-ci devait être détruit (poussins et œufs
compris), la Commission pourrait financer leur remplacement
à hauteur de 50%, comme c’est l’usage en cas de crise sanitaire.
En attendant, c’est à chaque Etat membre de financer son
programme de vaccination: pour la France, la note prévisible se
F.P.
monte à 1,6million d’euros.
7
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
plus fragiles que
d’autres: «Chez nous, les abattoirs sont des petites structures
qui seront très vite en difficultés
si elles ne tournent pas à plein»,
analyse un petit producteur de
poulets de Bresse. Mais la taille
des exploitations ne change
rien à l’affaire. Chez Doux par
exemple, le numéro deux français du poulet et de la dinde en
batterie derrière LDC, le chômage partiel est à l’ordre du
jour. Au passage, l’industriel a
mis fin, la semaine dernière, à
tous les contrats des intérimaires après avoir réduit sévèrement le nombre de CDD.
Même genre de punition chez
Duc, le numéro sept tricolore,
qui emploie 700 personnes. Et
aussi chez Tilly-Sabco, filiale
du groupe coopératif breton
Unicopa dans le Finistère: les
500 salariés subiront une semaine de chômage partiel en
mars et une en avril.
Concurrence. Il ne faudra en
tout cas pas compter sur les
exportations (40% du total
produit, surtout sous forme de
filets de dinde surgelés) pour
rendre le sourire aux professionnels: en 2005, sous les
coups de la concurrence brésilienne et américaine, le solde
positif de la balance commerciale avicole française est re●●●
tombé sous les 536 millions
d’euros, contre 660 millions
un an plus tôt. Aujourd’hui,
l’apparition de cas d’oiseaux
contaminés dans l’Hexagone
risque d’aggraver la situation.
Depuis quelques jours, le niveau de commandes à destination du Proche et du MoyenOrient, grand consommateur
de poulets, est en chute de
20 % à 30 % pour février et
mars. «Le gouvernement français et Bruxelles doivent
prendre des mesures significatives», explique Francis Ranc,
patron du Groupement interprofessionnel pour l’exportation des poulets (lire encadré).
Message reçu par Dominique
Bussereau. Samedi, le ministre de l’Agriculture a indiqué qu’il étudiait l’augmentation des «restitutions à
l’exportation», qui permettent
aux pouvoirs publics de subventionner les producteurs
pour résister à la baisse des
prix sur les marchés tiers. Bussereau a également indiqué
qu’il débloquait 5 millions
d’euros pour aider dans l’urgence les éleveurs français.
Plus 1 million d’euros pour financer une campagne d’information à destination du public
et des professionnels.•
FRÉDÉRIC PONS
«Rien de grave» dans la Dombes
Dans la région où a été trouvé le canard, les habitants ne cèdent pas à la panique.
Joyeux envoyée spéciale
l fallait bien qu’il atterrisse
quelque part, le premier
cas français de grippe aviaire. Il a donc choisi la région
de la Dombes, le pays aux
mille étangs, un écrin de nature à quelques dizaines de kilomètres au nord de Lyon, où le
silence le dispute d’ordinaire à
la contemplation. La victime
est un fuligule milouin, un canard migrateur qui vit en Europe occidentale, hiverne dans
le delta du Danube, sur le Léman, les cours du Rhin, mais
aussi dans des régions comme
la Dombes. Retrouvé mort
avec six congénères lundi dernier, ce fuligule est le premier
volatile sauvage mort du
H5N1 sur notre territoire.
Agitation. Samedi, la paisible
région a été l’objet d’un déferlement médiatique, avec apparition d’une autre espèce migratoire: le journaliste, qui s’est
mu en caravane processionnaire derrière le ministre de
l’Agriculture, Dominique Bussereau. Ce dernier s’est rendu
I
sur les bords de l’étang de la autres oiseaux captifs sont incommune de Joyeux, où l’on a terdites. Des gendarmes en
retrouvé le fuligule, puis il a faction ont stoppé les automorendu visite à un éleveur, dé- bilistes toute la journée de saconcerté par le flot de journa- medi pour vérifier que personlistes qui voulaient pénétrer ne ne transportait d’œufs ou
dans son hangar de volailles. A de poulets. Mais hier, le miJoyeux, les 200 habitants as- nistre reparti, les gendarmes
sistent circonspects, goguenards «On ne peut pas maîtriser tout ça. C’est
ou énervés, à l’agita- totalement irrationnel. On ne pourra
tion ambiante. «On pas tuer tous les oiseaux des étangs!»
Patrice Girard, aviculteur à Mionnay
n’est pas spécialement inquiet», indique cette agricultrice du lieu- avaient plié bagages sur les dédit Brône, qui suit toute partementales, laissant la voie
l’affaire à la télé, «tout ça c’est libre à d’éventuels trafiquants
des histoires qu’on nous monte d’œufs.
en mayonnaise, mais, pour l’ins- Analyses. Quand on est aux
tant, il n’y a rien de grave.»
aguets, c’est fou ce qu’on trouLundi dernier, on retrouve un ve d’oiseaux morts dans une
groupe de sept canards décé- campagne bourrée d’étangs.
dés près d’un étang, parmi les- Bilan de la journée de samedi à
quels le porteur de H5N1. crapahuter dans la boue de la
Avant même les résultats des Dombes: cinq cygnes retrouanalyses, une zone de sur- vés morts et filmés par
veillance de 10 km est mise en France 3; une buse décédée
place autour de la macabre dé- dans un champ; un cygne blescouverte, avec une zone ren- sé au milieu de fanes de maïs,
forcée de 3 km. Dans ce péri- un autre flottant dans un
mètre, les sorties de volailles et étang. Les services vétéri-
naires de la préfecture de l’Ain
n’en peuvent plus. Ils ont reçu
des appels tout le week-end
pour ramasser des dépouilles.
«Plusieurs équipes sillonnent le
périmètre et pratiquent un ramassage systématique dans ces
zones sensibles», justifie-t-on à
la préfecture, même si les appels concernent autant la petite mésange retrouvée sur le rebord de la fenêtre que le
canard enterré au fond du jardin. «Il ne faut pas s’alarmer
sur tous les oiseaux morts»,
prévient Pascal Orabi, qui suit
le dossier grippe aviaire à la
Ligue de protection des oiseaux. «La mortalité est anormale quand on trouve entre
cinq et dix individus ensemble.»
Un oiseau mort, à cette
époque, c’est plutôt fréquent.
Il a fait froid, certains ont parcouru des centaines de kilomètres et «ils meurent de faim
ou d’épuisement». Aujourd’hui, une vingtaine d’oiseaux
font l’objet d’analyses dans divers laboratoires du pays.
A Mionnay, les Gi- suite page 8
8 GRIPPE AVIAIRE
rard regardent tout cela avec ironie. Le
couple d’aviculteurs vit à 10 kilomètres de Joyeux et élève
poulets, pintades et pondeuses
en label rouge. Mercredi, ils
ont reçu 4400 pintades au lieu
des 5000 habituelles. «On est
bien obligés de diminuer nos
mises en place de poussins,
avoue, un peu énervé, Patrice
Girard, sans ça, on nous les
achète pas.» D’après l’éleveur,
si on doit tuer toutes les volailles d’un élevage au premier
cas de grippe aviaire avéré, on
devrait également abattre tous
les oiseaux sauvages d’un étang
au premier canard retrouvé
mort. «On ne peut pas maîtriser
tout ça... C’est totalement irrationnel. C’est comme le moustique du chikungunya à la Réunion, on ne pourra jamais tuer
tous les moustiques de l’île. Ici,
on ne pourra pas tuer tous les oiseaux des étangs!» Les Girard
ne s’inquiètent pas outre mesure: ils peuvent conserver
leur label, même si leurs
poules, poulets et pintades ne
mettront pas le bec dehors de
toute leur existence.•
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Un virus
suite de la page 7
LAURE NOUALHAT
La grippe aviaire est
propagée par un virus,
molécule qui «pirate» les
cellules infectées pour les
forcer à le dupliquer. Le
virus résiste donc aux
antibiotiques. La seule
arme est la vaccination.
Les antiviraux comme le
Tamiflu et le Relenza ont
une action limitée.
H5N1
SÉBASTIEN EROME. EDITING
La forme de grippe
aviaire la plus pathogène.
D’autres virus H5 le sont
bien moins. Ce virus se
transmet d’oiseau à
oiseau, plus difficilement
de l’oiseau à l’homme. Le
canard est considéré
comme «réservoir
silencieux»: il peut
propager le virus sans
être malade.
A Mionnay, les Girard élèvent poulets et pintades en label rouge. Face à la baisse des ventes, ils diminuent leur production.
Aucun danger pour l’homme en France
Le virus H5N1 aurait beaucoup d’étapes à franchir avant de contaminer un être humain.
n peu de fièvre? Un peu de toux? Des symp- voire nul». Peu de risques en effet d’entrer en contact
tômes grippaux? Et si c’était la grippe aviai- physique avec un oiseau sauvage malade. Encore
re? Trois bonnes raisons de ne pas avoir à moins de le toucher alors qu’il est malade et vivant.
Et mort, «un oiseau ne se débat pas, continue le viros’inquiéter en France.
logue. Il n’envoie donc pas de
1. La seule victime du
virus H5N1 de la grippe aviaire «Le seul danger pour l’homme est lié à particules et de fientes en susdans l’Hexagone est un volati- la circulation du virus dans les élevages pension que l’on pourrait respirer». Il s’agit donc pour l’insle sauvage. H5N1 ne s’est pas domestiques.»
Jean-Claude Manuguerra, virologue tant
d’empêcher H5N1
encore introduit dans les
d’entrer dans les élevages, à la
basses-cours ou les élevages
français. Or, «l’homme s’infecte via les animaux do- fois pour protéger la filière avicole et indirectement
mestiques, explique Jean-Claude Manuguerra, viro- pour protéger l’homme.
logue à l’Institut Pasteur. Le seul danger pour l’hom- 2. Si H5N1 parvenait à contaminer un élevage, «il aume est donc lié à la circulation du virus dans les rait beaucoup d’étapes à franchir avant de contaminer
élevages domestiques. Tant qu’H5N1 n’a pas pénétré un humain», assure Jean-Claude Manuguerra.
dans cette sphère, le risque pour l’homme est minimal, D’abord ne pas se faire repérer trop vite. Un véritable
U
tué à proximité de la préfecture de police) a été tenu
de cesser ses activités. Le 30janvier, lors d’une intervention devant le Conseil de Paris, Bertrand Delanoë
a donné un aperçu des mesures envisagées en cas de
mutation du virus H5N1 et de pandémie humaine.
«La population serait invitée à rester au maximum à
domicile. Seules les fonctions vitales seraient assurées» comme la «distribution de l’eau, le chauffage urbain, l’aide à domicile», a indiqué le maire. Ou encore l’aide aux personnes en situation d’exclusion ou
isolées,«âgées ou handicapées». A la mairie, une cellule de crise serait activée en «coordination étroite
avec le préfet de police». Les fonctionnaires municipaux seraient «invités à rester chez eux, à l’exception
de ceux qui assurent» desmissions indispensables.
Pour eux, la ville a déjà acquis 3,4 millions de
masques spéciaux de protection. Enfin, d’ici à fin
mars, 300 cadres de la ville et les élus parisiens devront suivre une formation au cas où ils auraient à affronter une pandémie. Mais il ne s’agit là que d’une
hypothèse. Pas de panique.•
TONINO SERAFINI
JULIE LASTERADE
La mairie envisage tous les scénarios, y compris une pandémie.
U
3. Pour l’instant, le danger n’est toujours que vétérinaire. Certes, la maladie gagne du terrain, elle est
d’une ampleur et d’une sévérité inédite, mais pour
l’instant le virus de la grippe aviaire H5N1 ne se
transmet pas d’homme à homme. S’il a fait quelque
90 victimes humaines en Asie, c’est parce qu’elles
fréquentaient des marchés couverts et saturés de
fientes d’animaux malades. La durée du contact
était longue et la quantité de charges virales présentes très importante. «Ce sont des cas rares et atypiques d’infection par un virus animal», ajoute JeanClaude Manuguerra. En attendant, H5N1 ne s’est
pas du tout adapté à notre espèce. Il n’arrive pas à se
multiplier dans «les portes d’entrée» du corps humain. Il fait à peu près 34-35 °C dans nos voies respiratoires (gorge, bouche, haut des poumons). Trop
froid pour lui. Contrairement aux virus humains,
celui-ci «ne se multiplie pas à ces températures», explique Jean-Claude Manuguerra. Il n’a pas encore
réussi à emprunter cette fonction aux virus humains et ses mutations ne lui ont pas permis cette
adaptation. Avantage pour nous: H5N1 peut mourir avant de se reproduire et s’il parvient à se tapir
plus profondément et donc plus au chaud rapidement, il n’est donc pas facilement expulsé en suspension et donc peu contaminant. Inconvénient:
lorsqu’elles parviennent à infecter l’homme, les particules virales vont directement dans les poumons.
Ce qui laisse moins de temps à notre système immunitaire pour monter sa défense contre ce virus
qu’il n’a jamais rencontré.•
Paris sous surveillance renforcée
n dispositif de surveillance de la mortalité des
volatiles a été mis en place début février par la
mairie de Paris en lien avec la Direction départementale des services vétérinaires, qui
dépend de la préfecture. On estime à 60000 le
nombre de pigeons vivant en liberté dans la capitale. Auxquels il convient d’ajouter d’autres espèces
–canards, cygnes, poules d’eau…– qui peuplent les
étangs des bois de Boulogne et de Vincennes ou des
quelques grands parcs. Depuis une dizaine de jours,
les employés municipaux exerçant leurs activités
dans les espaces publics (éboueurs, balayeurs, jardiniers, gardiens de parcs…) sont tenus de signaler
la mort de tout volatile. Ils doivent notamment
mentionner le nombre d’animaux trouvés et le lieu
précis à la Direction de la prévention et de la protection de la ville. Celle-ci est chargée d’alerter les services vétérinaires en cas de morts suspectes à des
fins d’analyses.
Par ailleurs, la vente de volailles vivantes est désormais interdite sur les marchés alimentaires de la capitale et le marché aux oiseaux de l’île de la Cité (si-
challenge, «car chez l’oiseau, la grippe aviaire se manifeste très vite, ce n’est pas une maladie insidieuse»,
continue-t-il. Une fois malades, les animaux meurent en quelques heures et le nombre de victimes
augmente très vite. «L’interdiction de vente serait
alors immédiatement posée.»L’éleveur n’aurait même pas eu le temps de plumer sa volaille malade et
encore moins de la mettre en vente. Et s’il y avait une
faille dans le système? A moins de manger des tartares de canard ou de dinde, peu de danger que l’on
respire ou que l’on avale des particules infectieuses
vu la façon dont on consomme la volaille en France.
0825302302
Ce numéro de téléphone
unique (0,15 euro/mn) a
été mis en place par le
ministère de la Santé pour
s’informer sur la grippe
aviaire. Il fournit la liste des
pays touchés, les
recommandations aux
voyageurs, et répond aux
questions plus générales
sur la grippe aviaire. De
8heures à 22heures,
7 jours sur 7. Une présence
médicale est également
assurée.
Site Internet:
www.grippeaviaire.gouv.fr
Sept pays
en Europe
On a trouvé des oiseaux
sauvages –surtout des
cygnes– morts de H5N1
dans sept pays de l’Union
européenne (Allemagne,
Autriche, France, Grèce,
Hongrie, Italie, Slovénie).
L’Allemagne est de loin le
pays le plus touché. Dixhuit nouveaux cas ont été
signalés hier, portant à
59 le nombre total de cas
avérés sur l’île de Rügen
(Nord-Est), en mer
Baltique. Aucun oiseau
issu d’un élevage n’a
contracté la grippe.
93
personnes sont mortes
de la grippe aviaire dans le
monde depuis 2003, dont
19 en Indonésie et 42 au
Vietnam.
monde
LIBERATION
9
MAHMUD HAMS . AFP
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Ismaïl Haniyeh, hier à Gaza, après sa nomination comme Premier ministre palestinien. «L’Autorité palestinienne est devenue de facto une Autorité terroriste», a déclaré Ehoud Olmert.
Sanctions économiques après la nomination d’un Premier ministre issu du Hamas.
Israël frappe l’Autorité
palestinienne au portefeuille
Jérusalem intérim
e face-à-face a commencé. Alors que le Hamas
s’empare officiellement
des rênes du pouvoir, Israël tente de lui lier les
mains. Hier, les islamistes ont confirmé le choix
d’Ismaïl Haniyeh, leur tête de
liste aux législatives, comme
Premier ministre. Pour Ehoud
Olmert, c’est le signal que «l’Autorité palestinienne est devenue
de factoune Autorité terroriste». Comme prévu, le Premier
ministre par intérim a fait
adopter une série de sanctions
économiques destinées à
étouffer la nouvelle administration Hamas. Israël cesse immédiatement le transfert mensuel de 50 millions de dollars
aux Palestiniens, une somme
qui correspond aux taxes et
droits de douane perçus par
l’Etat hébreu au nom de l’Auto-
L
rité. Premières victimes, les
quelque 150000 employés de
l’Autorité, dont les salaires dépendent en grande partie de cet
argent. Ces fonctionnaires font
vivre environ unmillion de personnes, soit un tiers de la population des territoires occupés. Il
n’a finalement pas été question
d’interdire aux Palestiniens
d’aller travailler en Israël. Leur
tâche sera toutefois plus compliquée avec un renforcement
des contrôles, déjà sévères, aux
points de passage.
Aide humanitaire. Plutôt que ce
type de sanctions radicales,
envisagées la semaine dernière, Israël a fait le choix de resserrer progressivement l’étau.
Il s’agit pour l’Etat hébreu de
ne pas s’aliéner la communauté internationale en appauvrissant encore un peu plus
une population palestinienne
déjà misérable. Israël va, en re-
nous avons relevé d’autres défis
par le passé.»Le nouveau président du Parlement palestinien, Aziz Doueik, a, pour sa
part, conjuré les Israéliens de
revenir sur une décision, électoraliste selon lui, qui ne fera
qu’«augmenter la haine».
Avant ce premier échange de
tirs croisés, l’an I de l’ère Hamas avait commencé, samedi,
«C’est comme un rendez-vous avec
avec la prestation
un diététicien. Les Palestiniens vont
de serment de la
maigrir, mais pas mourir de faim.»
Dov Weissglass, conseiller du gouvernement nouvelle Chambre.
Devant les impélienne: «C’est comme un ren- trants, Mahmoud Abbas a tedez-vous avec un diététicien. nu à montrer qu’il restait le
Les Palestiniens vont maigrir, chef suprême de l’Autorité palestinienne, malgré le raz de
mais pasmourir de faim.»
Réaction immédiate du nou- marée du Hamas aux législaveau chef du gouvernement tives. Signal fort, la cérémonie
palestinien: «Nous n’avons pas avait lieu exceptionnellement
peur, a déclaré Ismaïl Haniyeh. dans son QG de la Mouqata’a, à
Ces mesures sont faites pour Ramallah. En tout cas pour
nous mettre à genoux, mais ceux qui pouvaient s’y rendre.
vanche, appeler les pays qui
supportent financièrement
l’Autorité à cesser leur assistance, sauf «l’aide humanitaire
donnée directement au peuple
palestinien». Selon une formule d’un goût douteux dont il a le
secret, le principal conseiller
du gouvernement, Dov Weissglass, a défini la stratégie israé-
Les autres, essentiellement les
députés islamistes, coincés à
Gaza par les restrictions israéliennes, ont suivi le discours
du président palestinien sur
écran géant.
Engagements. Mahmoud Abbas a martelé que la seule stratégie était la sienne: la négociation avec les Israéliens. Et il
a prévenu les nouveaux élus
qu’ils ne pourraient pas désavouer les engagements internationaux des Palestiniens,
notamment les accords d’Oslo
de 1993. A la fin de son discours, les applaudissements
ne sont pas venus des rangs islamistes. Dès la sortie, le futur
Premier ministre Ismaïl Haniyeh a assuré qu’il y avait des
«divergences, qui seront réglées
par le dialogue».
Dans le même temps, les lieutenants du président palestinien ont fait savoir que l’épreu-
ve de force était engagée:
«Abou Mazen a clairement dit
au Hamas: “voilà mon programme vers une solution à
deux Etats”, a déclaré Saeb
Erekat, le ministre sortant des
Négociations. Si le Hamas lui
présente un cabinet qui refuse ce
programme, nous allons vers
une crise majeure, car le Président a autant le pouvoir de nommer que de limoger les Premiers
ministres.»Mis sous pression à
la fois par Israël et par Mahmoud Abbas, le Hamas a déjà
fort à faire pour son baptême
du feu au gouvernement. •
XAVIER YVON
• Deux Palestiniens ont été
tués hier lors d’un raid israélien près de Khan Younès,
dans le sud de la bande Gaza.
Ils étaient impliqués selon Israël dans des tirs de roquettes
vers le territoire israélien.
10 monde
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
La colère musulmane tourne à l’émeute
Les manifestations contre les caricatures de Mahomet ont fait de nombreux morts au Nigeria et en Libye.
es
manifestations
contre la publication de
caricatures de Mahomet
ont pris une tournure
particulièrement violente au Nigeria et en Libye,
faisant au moins une trentaine
de morts dans ces deux pays.
Dans le nord du Nigeria, région à majorité musulmane,
c’est la communauté chrétienne qui a servi de bouc émissaire à la colère musulmane. Des
boutiques tenues par des chrétiens et onze églises ont été attaquées, pillées et brûlées samedi à Maiduguri, capitale de
l’Etat de Borno, provoquant
la mort de 15 personnes, dont
un prêtre. Un émeutier a par
ailleurs été tué à Katsina, capitale de l’Etat du même nom.
Instauré samedi, le couvre-feu
a été renforcé hier pour prévenir tout regain de violences interconfessionnelles.
La Libyea, pour sa part, décrété hier un jour de deuil à la mémoire des «martyrs» tombés
en essayant d’incendier vendredi le consulat d’Italie à
Benghaz (nord-est de la Libye). Onze personnes avaient
été tuées et 35 autres blessés
par la police. Celle-ci avait tiré
à balles réelles sur les manifestants, qui ont brûlé le premier
étage de la représentation italienne pour protester à la fois
contre les caricatures de Mahomet et le ministre italien
des Réformes, Roberto Calderoli (lire ci-contre).
En Indonésie, quelque
200 membres d’un groupe
musulman ont fait le siège hier
de l’ambassade américaine à
Djakarta, jetant des œufs, brisant des fenêtres et brûlant des
drapeaux américains, avant de
se disperser. Les manifestants
ont demandé la destruction
d’une sculpture de la Cour suprême américaine représentant Mahomet tenant un coran
dans une main et une épée
dans l’autre, qui fait partie
d’une frise montrant 18 hommes de loi importants, dont
Moïse, Confucius et Charlemagne.
Au
Pakistan,
quelque
5000policiers et 800membres
des forces spéciales ont bouclé
hier Islamabad, après l’interdiction d’une manifestation à
l’appel de la coalition islamiste
Muttahida Majlis-e-Amal, regroupant six partis. Les forces
de sécurité ont utilisé des lacry-
Berlusconi
obtient la tête
de Calderoli
L
(Annonce légale)
CHATEAU-ROUGE PRODUCTION
SARL au capital de 56 000 euros.
Siège social : 40, rue Damrémont,
75018 Paris. RCS Paris 422 589 267
Par décision du gérant en date du
07/02/06, la société transfert son
siège social du 40, rue Damrémont,
75018 Paris au 10 bis, rue Bisson,
75020 Paris, à compter de ce jour.
L’article 4 des statuts a été modifié
en conséquence. Pour avis.
Le ministre italien
a démissionné après ses
attaques islamophobes.
Rome de notre correspondant
de ce pays, ils ne connaissent même pas
les produits danois qui font l’objet du boycott, car ils ne sont utilisés que par une
certaine catégorie de la société. Il est facile pour les gens de s’en prendre au Danemark, parce que les gouvernements
arabes n’ont pas beaucoup d’intérêts économiques ou politiques à protéger avec ce
pays. Ils laissent donc faire. Ce serait une
autre histoire si la colère populaire était
dirigée contre un pays avec lequel les pays
arabes ont de forts intérêts.
Est-ce que cette polémique
ne vous semble pas exagérée?
La logique aurait voulu que les gens réagissent plus violemment à la guerre en
Irak qu’aux caricatures, d’autant que la
publication de caricatures du Prophète
n’est pas un phénomène nouveau en Occident. Mais il fallait bien que la frustration éclate à un moment ou un autre, et il
n’est pas surprenant que ce soit sur un
symbole religieux. L’Occident récolte ce
qu’il a semé. Les Etats-Unis ont donné
l’impression de partir en guerre religieuse contre l’Islam, en particulier
quand George Bush a parlé de croisades.
Nous sommes en train de payer le prix
de cette politique. C’est une bombe prête à exploser. •
algré ses attaques islamophobes et xénophobes répétées, en dépit de son appel à une nouvelle croisade
sous les auspices du pape, Roberto Calderoli avait toujours
réussi à sauver son fauteuil de
ministre des Réformes. Pour
Silvio Berlusconi, l’unité de sa
majorité valait bien les incartades de ses précieux alliés de
la Ligue du Nord, surtout à
quelques semaines des législatives des 9 et 10avril. A la suite
des violences de Benghazi, le
Cavaliere a exigé la tête de l’incontrôlable ministre. «Il est tenu à s’en aller immédiatement»,
a indiqué, à l’annonce des événements libyens, un Berlusconi exceptionnellement grave,
alors que depuis mercredi dernier Calderoli s’exhibait en public avec, sous sa chemise, un
T-shirt reprenant une caricature de Mahomet.
Lors du Conseil des ministres,
vendredi, le numéro deux du
gouvernement et ministre
(Alliance nationale) des Affaires étrangères, Gianfranco
Fini, l’avait averti: «Si tu continues comme ça, on risque un incident diplomatique.»Depuis,
le gouvernement s’emploie à
aplanir les tensions avec la Libye et le monde musulman,
mais aussi à limiter la casse en
termes de politique intérieure.
Samedi, Fini s’est ainsi rendu à
la mosquée de Rome pour réaffirmer que la ligne du gouvernement est celle «du dialogue et du respect réciproque».
Berlusconi a, pour sa part, téléphoné au colonel Khadafi
pour calmer les choses.
La Ligue du Nord ne semble
néanmoins pas prête à abandonner sa campagne anti-islamique. Au risque de rompre
avec les autres partis de la majorité. Un conseil directif du
mouvement d’Umberto Bossi
se réunira aujourd’hui pour
décider des suites à donner à
l’affaire. A droite, les autres
formations ne veulent toutefois pas croire que la Ligue ira
jusqu’à la rupture à la veille du
scrutin. Silvio Berlusconi non
plus, qui craint en revanche
que les provocations de Roberto Calderoli n’aient effrayé
les électeurs modérés et mis
un coup d’arrêt à sa remontée
dans les sondages. •
Recueilli par CLAUDE GUIBAL
ERIC JOZSEF
A N J U M N AV E E D . A P
M
A Islamabad, hier, les forces de l’ordre ont violemment dispersé des centaines de jeunes qui bravaient l’interdiction de manifester.
mogènes pour disperser des
centaines de jeunes qui ont
bravé l’interdit.
A Istanbul, en Turquie,
quelques dizaines de milliers
de personnes se sont réunies
hier à l’appel du parti de la Félicité (islamiste). En Iran, la
Maison de la caricature a fait
savoir sur son site Internet que
le meilleur dessin satirique du
concours international sur
l’Holocauste sera récompensé
par un prix de 12000 dollars.
Le rédacteur en chef du quotidien Hamshahri, associé à cette manifestation, a déclaré que
«les caricaturistes danois (qui
ont produit les dessins sur Mahomet, ndlr)pouvaient participer pour laver leurs péchés et
que leur repentance soit acceptée par Dieu».•
S. Etr.
Wael Abdel Fattah, du quotidien «Al-Fagr», explique la frustration des musulmans:
«L’Occident récolte ce qu’il a semé»
Le Caire de notre correspondante
ael Abdel Fattah est directeur de
la rédaction d’Al-Fagr(l’aube),
un quotidien indépendant créé
en Egypte l’an dernier. Au mois
d’octobre, Al-Fagra été le premier journal
égyptien à publier les caricatures controversées à la une de son édition, sans pour
autant déclencher de réactions en Egypte. Retour sur la polémique.
Pourquoi avez-vous publié
les caricatures de Mahomet?
Le directeur financier du journal est tombé par hasard sur ces caricatures sur un site Internet salafiste (www.sahab.net) et
nous avons décidé de les publier pour exprimer notre colère et dénoncer l’image
de l’Islam véhiculée par l’Occident.
Le journal jordanien Shihane
les a également publiées, mais en
demandant à ses lecteurs si ce sont
des dessins ou un attentat contre un
mariage à Amman qui font le plus de
tort à l’Islam. Qu’en pensez-vous?
C’est une comparaison qui n’a pas lieu
d’être. Un attentat est un acte politique, ce
n’est pas une attaque contre l’Islam. Les
caricatures, elles, cherchent à créer une
confusion entre politique et religion.
Elles sont le résultat de la volonté des
Etats-Unis de façonner une certaine ima-
W
ge de l’Islam pour en faire un nouvel ennemi, à la place du communisme. En réalité, ces caricatures ne personnifient pas
tant le prophète Mahomet que le musulman tel qu’il est perçu en Occident, c’està-dire comme un terroriste.
Avez-vous eu des réactions
de vos lecteurs?
Non, jusqu’à ce que d’autres journaux
égyptiens publient à leur tour certaines
de ces caricatures en novembre et décembre. Les gens toutefois n’ont pas besoin de voir les caricatures pour se sentir
offensés. Je suis même sûr que la plupart
des manifestants ne les ont jamais vues.
Le bouillonnement de la rue musulmane
est le résultat des attaques quotidiennes
des Américains contre les Arabes et les
musulmans, de la guerre en Irak, de l’injustice en Palestine. Il y a un sentiment
d’angoisse, d’amertume profonde et d’humiliation, aggravé par le fait que les gouvernements arabes ne défendent pas
leurs citoyens et se montrent incapables
de leur rendre leur dignité.
Vous accusez les Etats-Unis,
mais c’est au Danemark que
les manifestants s’en prennent.
La colère n’est pas dirigée contre le Danemark en tant que tel. Quatre-vingt-dix
pour cent des manifestants ne savent rien
monde 11
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Négociations sous pressions au Kosovo
Le dialogue qui débute aujourd’hui entre Serbes et Albanais semblant impossible, l’ONU pourrait imposer une solution.
artagée entre colère et
résignation, l’opinion
serbe assiste, impuissante, à l’accélération
des pourparlers qui
devraient déboucher sur le
statut final du Kosovo, la province théoriquement serbe
mais administrée par l’ONU,
dont la majorité albanaise à
90 % réclame l’indépendance. Depuis l’intervention de
l’Otan, en 1999, contre les
forces du président déchu Slobodan Milosevic, la province,
grande comme un département français et peuplée de
1,9million d’habitants, échappe au contrôle de Belgrade,
dont le rôle se borne à soutenir
financièrement une centaine
de milliers de Serbes qui vivent dans des enclaves protégées par des militaires occidentaux. C’est de leur sort qu’il
sera question aujourd’hui à
Vienne, où Serbes et Kosovars
albanais se retrouvent pour
un premier tête-à-tête consacré à la «décentralisation» des
guerre», part déjà en croisade
pour qu’un éventuel Kosovo
indépendant soit proclamé
«territoire occupé»… avec le
soutien de la puissante Eglise
orthodoxe. «Nous savons que
la communauté internationale peut nous imposer un Kosovo indépendant et que nous
ne pouvons pas l’empêcher»,
souligne l’évêque de Prizren,
Mgr Artemije. Il faut donc que
les Serbes «ne signent rien et
proclament que cette solution
imposée est une occupation
France donnerait-elle Lyon
ou Metz?» s’emporte Nikola,
30 ans, un réfugié serbe de
Croatie, dont la femme, Serbe
du Kosovo, ne peut plus rendre
visite à ce qu’il lui reste de famille dans la province. Milo, un
universitaire retraité, est aussi
gêné à l’idée de voir le Kosovo
séparé de la Serbie. «L’union de
la Serbie et du Monténégro était
une bonne occasion de constituer un territoire multiethnique, puisque des Albanais, des
Bosniaques, des Hongrois, des
Roms y vivent aux
«La communauté internationale peut côtés de Serbes et
nous imposer un Kosovo indépendant de Monténégrins.
Au lieu de cela, la
et nous ne pouvons pas l’empêcher.»
Mgr Artemije, évêque de Prizren communauté internationale choisit
d’une partie de notre territoi- de créer des ensembles de plus
re». Cette solution ne fait pas en plus petits au nom de la
l’affaire des réformateurs qui multiethnicité.»
aspirent à un partenariat avec Certains ont cependant consl’Otan et l’Union européenne. cience qu’il n’y a pas de retour
Multiethnicité. L’absence d’un en arrière possible. «Le Kosovrai débat sur l’avenir du Ko- vo, c’est fini. Les Serbes ne poursovo se fait sentir en Serbie. ront jamais y revenir. Milosevic
«C’est notre territoire! Pour- a fait trop d’erreurs là-bas»,
quoi devrait-on le donner? La lâche Goran, 43 ans, originai-
www.editions.flammarion.com
Flammarion
P
communes peu- SERBIE ET
proche du Premier
plées de Serbes au MONTENEGRO
ministre conservaKosovo. Plus vite ce HONGRIE
teur Vojislav KosNovi
dossier avancera,
tunica, a, lui, proSad
plus vite sera abor- CRO. Belgrade posé un double
ROUM.
dée la question de
référendum en
fond, celle de l’inSerbie et au KosoSERBIE
BOS. Kosovo
dépendance.
vo. Ce moyen est,
selon lui, le seul apSymbole. Belgrade
MON. Pec
B.
proprié pour channe peut se résoudre
ALB.
ger les frontières
à un geste radical
MAC. 80 km
du pays. De fait, son
tant le Kosovo, où
sont situés les principaux mo- application entraînerait un
nastères orthodoxes serbes et match nul, tant les volontés
où siège le patriarcat de son des deux peuples sont irréEglise, revêt à ses yeux un conciliables, les Serbes rescaractère symbolique. Elle a tant repliés sur leur intégrité
donc fait sienne la devise «plus territoriale et les Albanais du
que l’autonomie, moins que Kosovo sur leur droit à l’autol’indépendance». Ce vague slo- détermination.
gan cache mal la volonté de ne La marge de manœuvre des
prendre aucune décision ir- négociateurs est d’autant plus
réversible engageant les gé- faible que s’amenuise le sounérations futures. Le prési- tien politique aux réformadent réformateur Boris Tadic teurs qui dirigent la Serbie devient d’ailleurs de suggérer que puis la chute de Milosevic, en
le statut final ne soit défini l’an 2000. Premier parti du
qu’«après une période de grâce Parlement, le Parti radical,
de vingt ans». Et le juge de la une formation créée par VojisCour constitutionnelle de lav Seselj, actuellement incarSerbie, Slobodan Vucetic, un céré à LaHaye pour «crimes de
re de Pec, au Kosovo, qu’il a
quitté avec un seul sac, en
juin 1999. Il vit désormais à
Novi Sad où il fait construire
une maison sur un terrain
acheté avec l’argent de son ancien appartement, vendu moitié prix grâce à Habitat, une
agence de l’ONU.
Stabilité. Une majorité de
Serbes comprend qu’elle a peu
de moyens d’influer sur la décision finale alors que la communauté internationale plaide pratiquement ouvertement
pour une indépendance conditionnelle du Kosovo – à savoir,
avec un système de protection
des minorités et l’impossibilité de rattacher la province à
l’Albanie. L’idée d’imposer une
solution se fait jour. Etant donné qu’«il est peu probable que
Belgrade accepte volontairement l’indépendance», la communauté internationale «doit
oser l’imposer»pour assurer la
stabilité de la région, plaide
l’influent groupe de réflexion
International Crisis Group. •
LAURENT ROUY
LA FACE CACHÉE DE
COCA-COLA
« C’est la face cachée de Coca-Cola,
parfaitement inconnue du grand public,
que William Reymond dévoile dans un livre-brûlot. »
Laurent Neumann - Marianne
« William Reymond tente de mettre au jour
les “petits arrangements” de la firme multinationale
avec sa mémoire et nous livre les points-clés
de sa plongée dans les eaux -troubles ?- de Géorgie,
la terre de Coke&Co. »
Caroline Derrien - VSD
« Chez Coca-Cola, on n’aime pas beaucoup
William Reymond, cet homme qui ose
écorner le mythe. Son “enquête interdite”
fait grand bruit. »
432 pages
20 e
Philippe Brassart - La Dépêche du Midi
Studio de création Flammarion
Belgrade correspondance
12 monde
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Les rumeurs de trêve de l’ETA
font long feu en Espagne
Le gouvernement Zapatero exige l’abandon de la lutte armée
avant de négocier avec l’organisation terroriste basque.
Madrid de notre correspondant
e communiqué a eu l’effet d’une douche froide.
Samedi soir, via les ondes de la radio basque
Euskadi Irratia, l’ETA
n’a pas donné suite aux rumeurs persistantes d’un cessez-le-feu unilatéral, ni même
d’une trêve. L’organisation séparatiste armée a certes invoqué les vertus du «dialogue»
et de la «négociation», «seule
solution au conflit», mais a refusé de faire le pas décisif.
L’ETA, qui n’a pas tué depuis
mai2003, a cependant revendiqué six attentats «de basse
intensité»perpétrés depuis le
début de l’année.
Audace. Sans faire mention
d’un possible renoncement à
la lutte armée, l’organisation
terroriste exige de l’«audace»
des partis basques et du gouvernement Zapatero. Cette
«audace» passerait en particulier, à ses yeux, par la reconnaissance du droit à l’autodétermination des Basques. «Il
n’y a pas de marche arrière. Ici
L
conflit basque. Il y a seulement
une semaine, il avait même
évoqué de façon solennelle «le
début de la fin»du terrorisme
basque. Conséquence: la presse espagnole, en particulier le
quotidien catalan la Vanguardia, avait pu présenter comme «imminent» un cessez-lefeu mettant fin à trente-sept
ans d’attentats et
Samedi soir, un communiqué de l’ETA a 830assassinats.
démenti les rumeurs de cessez-le-feu «Erreur». Sans douunilatéral. Rumeurs entretenues
te averti à temps
par l’«optimisme» de Zapatero.
de ce communiqué
alambiqué et rhéavancées, mais tout le monde torique, Zapatero a donné peu
veut aller très vite, alors que ce- avant une interview au quotila demande beaucoup de petits dien conservateur ABC, pupas», a-t-il ajouté. A Madrid, bliée hier, dans laquelle le Prel’exécutif socialiste a répliqué mier ministre socialiste se
à l’ETA: «Le seul communiqué montre très prudent. Pour lui,
que nous attendons, c’est celui le processus de paix au Pays
qui annonce l’abandon définitif basque «ne se fera pas en un
des armes.»
jour, un mois ou une année […]
En fait, sur le plan politique, le mais prendra du temps, beaucommuniqué est un camou- coup de temps. Ce serait une erflet pour José Luis Rodriguez reur d’aller vite et il y aura des
Zapatero qui, ces derniers moments difficiles».
jours, se disait «très optimiste» Malgré ces déclarations temquant à l’issue prochaine du pérées, l’opposition conserva–au Pays basque–, personne
n’a compris pourquoi l’annonce
d’une trêve avait tellement été
médiatisée, les médias spéculent trop», a commenté pour
l’AFP Joseba Alvarez, un responsable du parti indépendantiste Batasuna, bras politique interdit de l’organisation
séparatiste armée. «Il y a des
trice ne s’est guère privée d’attaquer durement Zapatero
«qui ne cesse de mentir à l’opinion». Le leader du Parti populaire (PP, droite), Mariano Rajoy, accuse depuis des mois les
socialistes de négocier secrètement avec l’ETA et d’être
disposés à échanger la «paix
contre les prisonniers», en référence aux quelque 800 détenus etarras. «Ce n’est pas ce que
le gouvernement nous annonce
de manière frivole et irresponsable», a-t-il réagi hier, demandant au Premier ministre
«d’arrêter de suivre la feuille de
route de l’ETA» et de rectifier
sa politique antiterroriste.
Cette stratégie d’affrontement
commence à être bénéfique au
PP qui talonne les socialistes
dans les sondages. Selon une
enquête publiée hier par le
quotidien de droite la Razon,
trois quarts des Espagnols
estiment qu’il ne faut «offrir
aucune concession à l’ETA en
échange d’un éventuel abandon
de la lutte armée». •
Attaques séparatistes contre
Shell dans le delta du Niger
Des militants séparatistes ont mené une série
d’attaques, samedi, dans la région pétrolière du
Delta du Niger (sud du Nigeria), faisant exploser
deux oléoducs, incendiant une plate-forme de
chargement et enlevant neuf travailleurs étrangers.
Malgré la présence de centaines de soldats
gouvernementaux, les rebelles s ont mené leurs
actions sans être inquiétés et se sont enfuis avec
les neuf otages – trois Américains, deux Egyptiens,
deux Thaïlandais, un Britannique et un Philippin. A
la suite de l’attaque, Shell a annoncé l’évacuation
de ses plates-formes offshore ainsi que la
suspension des exportations du terminal de
Forcados, d’où partent 380000 barils/jour, soit
15 % du pétrole nigérian. En janvier, le Mouvement
d’émancipation du Delta du Niger (Mend) avait
enlevé quatre travailleurs sur les installations
pétrolières et les avait relâchés dix-neuf jours plus
tard. Le Mend, dans un communiqué, a déclaré
avoir renouvelé à Shell sa demande de 1,2 milliard
d’euros pour compenser la pollution par le pétrole
des eaux de pêche de l’ethnie Ijaw, forte de
14 millions de personnes. (AFP)
Une histoire
Opération taxis propres à Prague
Le maire de Prague avait longuement mûri son camouflage
de rock star anglaise. Caché derrière des lunettes noires,
il avait cessé de se raser pendant trois jours. Objectif:
contrôler l’honnêteté des taxis locaux qui ont la sale
réputation de gruger les touristes. Selon le quotidien Dnes,
qui raconte l’histoire, Pavel Bem a estimé que la situation
«s’était beaucoup améliorée». Il a pris un taxi qui s’est
contenté de doubler le prix de la course. L’an dernier, grimé
en touriste italien, il avait payé sept fois le prix pour
FRANÇOIS MUSSEAU (avec AFP) un simple déplacement au centre-ville. Selon des chiffres de
la municipalité, établis à partir de contrôles effectués entre
juillet et novembre, près de quatre taxis sur dix pratiquent
des tarifs sauvages dans les lieux les plus touristiques
de Prague. A l’aéroport de Prague, la réputation des taxis est
telle qu’en fin d’année dernière le ministère australien
des Affaires étrangères a tenu à avertir ses ressortissants via
l’Internet. Quant au maire, sa couverture de rock star était
nistre s’est engagé à organiser si réussie qu’un des taxis lui a donné ses meilleures adresses
des examens dans le nord. Ça de discothèques, de fournisseurs de marijuana et les tarifs
n’a l’air de rien, mais ça fait des prostituées. Cette fois, sans supplément.
Jan Egeland, chargé des Affaires humanitaires à l’ONU, craint une reprise des combats:
«L’impunité est de règle en Côte-d’Ivoire»
U
Nous avons repris quelques
activités avec du personnel
local, comme la distribution
deux ans que des millions de
de vivres aux réfugiés. Mais je
jeunes, à cause de la partition
ne nous vois pas reprendre
du pays, ne suivent pas un
le travail dans l’ouest, sans
cursus éducatif normal…
garantie des autorités militaires et civiles. Il faut en finir
Vous avez en revanche
avec l’impunité qui est de
bien eu une réunion
règle en Côte-d’Ivoire. Il faut
avec le Groupe de travail
clairement dire qui a organiinternational, chargé
de suivre le processus
sé cela et punir les respon- Jan Egeland.
de paix…
sables. Les 16, 17 et 18 janvier,
les radios à Guiglo et Abidjan ont appe- Oui, et je leur ai dit que si les agences des
lé à attaquer les locaux de l’ONU. C’est Nations unies continuaient d’être menaun acte criminel qui mérite la prison. cées, si on ne trouvait pas de solution, il y
Par ailleurs, même si nous avons plutôt aurait bientôt une grave crise humanitaifait du bon travail d’urgence, nous ne re. De moins en moins de gens ont accès
pouvons pas continuer à servir d’alibi à l’eau potable, à l’éducation… J’ai aussi
à l’absence de politique cohérente de demandé des fonds pour la reconstrucsécurité et de développement.
tion. Les contributions de la communauté internationale sont extrêmement
En avez-vous parlé au président
faibles,compte tenu des enjeux. L’an derLaurent Gbagbo?
Nous avions un rendez-vous vendredi nier, nous n’avons reçu que la moitié
après-midi. Il a été annulé. J’imagine que des 35 millions de dollars demandés.
mes déclarations sur l’impunité et la res- Cette année, nous n’avons eu que 2 milponsabilité de ces violences ont contribué lions sur les 50 qui seraient nécessaires.
à l’indisponibilité du Président. Néan- Je rends hommage, au passage, à l’Union
moins, j’ai transmis le message au Pre- européenne qui, en Côte-d’Ivoire, reste le
mier ministre et au ministre des Affaires plus important des contributeurs. Mais il
étrangères. J’ai aussi rencontré les Forces est clair que si les Nations unies sont à
nouvelles (opposition, ndlr) à Bouaké. cours de moyens, s’il n’y a pas davantage
Tous parlent de réconciliation. Moi, je ne de pression internationale, la violence
m’arrête pas aux mots, je veux des actions éclatera à nouveau. •
concrètes. A cet égard, le Premier miRecueilli par MARIE-LAURE COLSON
AP
n mois après les attaques dirigées
contre le personnel humanitaire et
les locaux des Nations unies en Côte-d’Ivoire, le secrétaire général adjoint de l’ONUchargé des Affaires humanitaires, le Norvégien Jan Egeland, s’est
rendu dans le sud et l’ouest du pays, où les
affrontements entre miliciens proches
du pouvoir et Casques bleus avaient fait
au moins cinq morts. Il s’en prend directement au pouvoir alors que le processus
de paix semble une nouvelle fois enlisé.
Quelle est la situation
dans ces régions?
Tout le monde a peur que les violences reprennent. Les réfugiés, les déplacés, les civils… Mais ce qui est nouveau, c’est que le
personnel humanitaire qui aidait tous ces
gens à survivre est tout aussi effrayé. Ils
reçoivent des menaces. Et puis on n’avait
jamais vu ça, une destruction aussi totale!
Les bureaux, les entrepôts ont été complètement détruits, pillés, y compris ceux
qui se trouvaient en face d’une base militaire! Ce qui signifie que ceux qui auraient
dû les protéger ne l’ont pas fait.
Selon vous, qui fait régner la peur?
J’ai pour habitude de dire les choses clairement: les leaders de partis à base ethnique, qui ont leurs milices, et les Jeunes
patriotes (partisans du président Laurent
Gbagbo, ndlr).
Dans ces conditions,
les humanitaires peuvent-ils
revenir?
Aucun espoir de retrouver
des survivants aux Philippines
Les secouristes philippins s’employaient hier à
évacuer des tonnes de boue dans l’espoir de
retrouver vivants des écoliers ensevelis depuis un
glissement de terrain qui a balayé, vendredi,
un village de 1800 âmes, à 675 km de Manille.
Quelque 250 enfants et membres du personnel
se trouvaient dans l’école de Guinsaugon, au
moment de la catastrophe. Personne n’a encore
été retiré vivant. Hier soir, quelque 70 corps
avaient été dégagés du sol rougeâtre sous lequel
est enterrée désormais la localité. Au total,
941 villageois sont toujours portés disparus par le
Conseil national de coordination des secours.
Deux mille habitants de villages des alentours ont
été évacués pendant le week-end. (Reuters)
• La présence militaire britannique en Irak
représente une «menace pour [la] sécurité»
de l’Iran, a déclaré hier le chef de la diplomatie
iranienne, Manouchehr Mottaki, en réitérant
l’accusation d’une implication de Londres dans
les attentats de janvier dans le sud du pays.
• Une bombe a explosé hier dans la gare
d’Ahmedabad, la capitale économique de
l’Etat indien du Gujarat (nord-ouest),
blessant 25 personnes, dont trois grièvement.
(COMMUNIQUÉ)
NOTIFICATION OFFICIELLE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DES ÉTATS-UNIS
Si vous avez acheté des actions
Royal Ahold N.V. avant le 24 février 2003,
vous êtes peut-être en droit de recevoir une
partie du montant de 1,1 milliard de dollars US
du règlement à l’amiable.
Un règlement à l’amiable a été négocié dans le cadre de l’action en justice concernant le cours de l’action Royal Ahold N.V. Ce Règlement prévoit
le paiement de 1,1 milliard de dollars US aux investisseurs de Royal Ahold
ayant acheté ou reçu sous forme de dividendes des actions ordinaires ou des
Certificats américains de titres en dépôt (American Depository Receipts)
Royal Ahold pendant la période du 30 juillet 1999 au 23 février 2003 inclus,
ainsi que le remboursement des honoraires et des frais de leurs avocats.
Si vous êtes concerné par ce règlement, vous pouvez envoyer un
formulaire de demande de paiement, mais vous pouvez également vous en
exclure ou objecter. Le Tribunal de grande instance des États-Unis de la
circonscription du Maryland a autorisé l’envoi de cette notification aux
investisseurs de Royal Ahold dans le monde entier, et une audience s’y
tiendra afin d’approuver ou non ce Règlement de façon à ce que des
paiements puissent être effectués au bénéfice des personnes ayant déposé
une demande légitime. Vous pouvez obtenir une notification détaillée sur
le site Web ou en composant le numéro de téléphone indiqué ci-dessous.
QUI
EST EN DROIT DE BÉNÉFICIER D’UN PAIEMENT
?
Vous êtes considéré comme l’un des Participants au Recours collectif
si vous avez acheté ou reçu sous forme de dividendes des actions ordinaires
ou des Certificats américains de titres en dépôt Ahold pendant la période
du 30 juillet 1999 au 23 février 2003, quel que soit votre pays de résidence
et que vous ayez ou non acheté des actions Royal Ahold. Si vous n’êtes pas
certain de remplir ces conditions, veuillez appeler le numéro ou consulter
le site Web mentionné ci-dessous.
QUEL
EST L’OBJET DE CETTE ACTION EN JUSTICE
?
Une action en justice a été engagée contre Royal Ahold et un certain
nombre d’autres défendeurs (voir l’avis détaillé) alléguant que les bénéfices
et les revenus de Royal Ahold annoncés pour la période du 30 juillet 1999
au 23 février 2003 ne représentaient pas fidèlement les bénéfices et les
revenus de Royal Ahold, et que, suite à cette annonce, le cours de l’action
Ahold a chuté de plus de 60 %. Ahold a ultérieurement rectifié ses résultats
pour la période concernée, faisant état de 24 milliards de dollars US de
revenus et de 1,1 milliard de dollars US de bénéfice.
Les défendeurs nient les accusations, et le règlement ne constitue ni une
admission d’une quelconque erreur, ni une indication d’une quelconque infraction à la loi. Le Tribunal ne s’est prononcé ni en faveur des Plaignants, ni
en faveur des Défendeurs. Les deux parties sont en désaccord concernant le
montant de l’indemnisation qui aurait été adjugée en cas de procès. Par contre,
elles ont négocié un Règlement à l’amiable permettant de clore le dossier de
cette action engagée contre Ahold et les autres défendeurs et de procéder au
paiement d’indemnités au bénéfice des Participants au Recours collectif.
QUELS
SONT LES TERMES DE CE RÈGLEMENT
?
Ahold s’engage à créer un Fonds de règlement auquel elle versera 1,1
milliard de dollars US, plus les intérêts, afin de payer les investisseurs
ayant déposé une demande d’indemnisation légitime et de les rembourser
des honoraires et des frais de leurs avocats. L’Accord du Règlement, qui
décrit de manière détaillée les termes de cet accord, peut être consulté sur
le site Web indiqué ci-dessous.
COMMENT
FAUT-IL PROCÉDER POUR
DEMANDER UN PAIEMENT
?
Il vous suffit d'appeler le numéro ci-dessous ou de vous rendre sur le site
Web indiqué pour obtenir un formulaire de demande. Alternativement, vous
pouvez écrire à l'adresse ci-dessous afin de solliciter qu'un dossier de notification et un formulaire de demande de paiement vous soient expédiés. Si
vous pensez être l'un des Participants au Recours collectif, veuillez remplir
le formulaire de demande et le renvoyer au plus tard le 18 août 2006.
DE
QUELLES AUTRES OPTIONS DISPOSEZ-VOUS
?
Si vous préférez ne pas être lié par le Règlement, vous devez vous en
exclure explicitement au plus tard le 12 mai 2006, faute de quoi vous ne
serez plus jamais en droit de poursuivre en justice les défendeurs ayant
accepté ce Règlement sur la base des allégations associées à ce dossier. Si
vous vous excluez de ce Règlement, vous ne recevrez aucun paiement à
partir du Fonds de règlement. Si vous décidez de ne pas vous exclure du
Règlement, vous avez jusqu’au 12 mai 2006 pour objecter. La notification
détaillée explique comment vous exclure du Règlement ou objecter.
Une audience se tiendra au Tribunal concernant cette affaire (In re Royal
Ahold Securities and “ERISA” Litigation, MDL 1539) le 16 juin 2006
afin de déterminer si le Règlement à l’amiable peut être approuvé, ainsi
que pour examiner une requête des avocats représentant les Participants au
Recours collectif (le cabinet Entwistle & Cappucci LLP, de New York)
portant sur un versement en leur faveur à hauteur de 15 % du Fonds de
règlement (18 centimes de dollar US par action) correspondant à leurs
honoraires, plus un versement en leur faveur à hauteur de 4,8 millions de
dollars US correspondant à leurs frais. Ces honoraires et frais représentent
la rémunération des avocats en contrepartie de leur travail d’investigation
et de plaidoirie dans cette affaire, ainsi que de leur travail lors de la
négociation du Règlement. Il vous sera peut-être demandé de comparaître
au Tribunal, mais vous n’y serez pas obligé. Pour de plus amples informations, veuillez composer le numéro d’appel gratuit ci-dessous ou écrire à :
Ahold Claims, P.O. Box 9000 #6378, Merrick, NY 11566-9000, USA.
00 800 1020 4060
(France Télécom)
40 800 1020 4060
(TELE 2)
50 800 1020 4060
(Omnicom)
70 800 1020 4060
(Le 7 Cegetel)
90 800 1020 4060
(9 Telecom)
www.AholdSettlement.com
FR-FRE
Le Fonds de règlement sera divisé en deux parties : le Fonds A et le
Fonds B. Le montant du paiement que vous recevrez dépendra du nombre
de demandes d’indemnisation que les Participants au Recours collectif
enverront, du nombre d’actions Royal Ahold vous avez achetées ou reçues
sous forme de dividendes et de la période pendant laquelle vous avez acheté
et vendu ces actions. Si tous les Participants au Recours collectif envoient
une demande d’indemnisation légitime, le montant moyen du paiement
sera de l’ordre de 1,51 dollar US par action ordinaire ou par Certificat de
titre en dépôt en ce qui concerne le Fonds A, et de l’ordre de 0,40 dollar
US pour chacune des actions correspondant au Fonds B.
14
terre
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Pêche.
La Norvège
accuse Moscou
de dépasser
illégalement
ses quotas
de cabillaud.
SANTÉ
Le Soudan a faim
Près de sept millions de
personnes ont besoin
d’une aide alimentaire au
Soudan malgré
une bonne récolte de
céréales, annonce
la FAO, organisation de
l’ONU pour l’agriculture
et l’alimentation, qui
a lancé un appel pour
réunir 40 millions
de dollars à cet effet.
Scandinavie de notre correspondante
’affaire s’est déroulée
sous l’œil des caméras
norvégiennes, mi-octobre, au large de l’archipel du Svalbard, dans les
eaux territoriales clamées par
Oslo. Des garde-côtes norvégiens arraisonnent le chalutier russe Elektron, qu’ils
soupçonnent de pratiquer la
«pêche au noir» en mer de Barents. Sommé de faire route
vers les côtes norvégiennes,
l’équipage obtempère, avant
de bifurquer et de mettre le
cap sur la région de Mourmansk, au nord-ouest de la
Russie. Deux inspecteurs sont
toujours à bord. Ils ne seront
libérés que cinq jours plus
tard, une fois l’Elektron dans
russes font route vers le large,
les eaux territoriales russes.
OCÉAN
GLACIAL ARCTIQUE
où ils transfèrent leurs car«Rares poursuites». Sous la
gaisons vers un autre bateau,
pression d’Oslo, Moscou proArchipel
MER
avant de revenir pêcher en
met de tirer l’affaire au clair. du Svalbard
DE
(Norvège)
BARENTS
mer de Barents. «Ce transborMais à la Direction norvégiendement n’est pas déclaré et les
ne de la pêche (FiskeriedirekOCÉAN
Mourmansk
documents sont falsifiés, de fatorat), le conseiller chargé de ATLANTIQUE
çon à ce que les chalutiers ne
la lutte contre la pêche au noir NORVÈGE
RUSSIE
puissent être accusés de dépasne se fait guère d’illusions.
SUÈ.
FIN.
ser leurs quotas», précise Tor
«Les poursuites sont rares et les
Glistrup. Les bâtiments de
condamnations encore plus»,
transbordement, naviguant
observe Tor Glistrup. Selon
Oslo
souvent sous pavillon de comdifférentes estimations, la
plaisance, poursuivent leur
pêche illégale de cabillaud en
mer de Barents s’élèverait à 100000 tonnes par an, route vers le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Allesoit plus de 20 % des quotas autorisés. «Et encore, magne, l’Espagne ou la France, où ils revendent leur
c’est une sous-estimation», remarque le conseiller. marchandise en toute impunité.
Ce trafic florissant rapporterait plus de 180millions Liste noire. «C’est une véritable mafia», affirme Rasd’euros par an.
mus Hansson, secrétaire général du Fonds mondial
Depuis une trentaine d’années, Oslo et Moscou, qui pour la nature (WWF) en Norvège. Il évoque «un rése partagent la souveraineté sur la mer de Barents, seau très bien organisé», avec des «connexions en Rusfixent ensemble les quotas annuels de pêche autori- sie et en Europe du Nord» et une flotte de «plusieurs
sés. «Après l’implosion de l’URSS, les Russes ont com- dizaines de bateaux». Sur la liste noire dressée par les
mencé à vendre leur poisson en Norvège. Puis ils se autorités norvégiennes figurent une vingtaine de
sont rendus compte qu’il était facile de tricher avec les chalutiers – y compris l’Elektron – et une quinzaine
quotas, en visant de nouveaux marchés», explique de navires battant pavillon de complaisance.
Tor Glistrup. A la fin des années 1990, les garde- Récemment, dans un documentaire, la chaîne de técôtes norvégiens ont observé le développement du lévision suédoise TV4 a révélé l’implication de plutransbordement, en bordure des eaux territoriales sieurs compagnies scandinaves, accusées d’acheter
norvégiennes.
du cabillaud illégalement pêché en mer de Barents,
Les cales pleines, leurs quotas épuisés, les chalutiers en toute connaissance de cause. Sur le banc des ac-
ÉNERGIE
L
Bush veut du
nucléaire partout
T E D DY S E G U I N
Samedi, le président George
Bush a annoncé le projet
des Etats-Unis de «construire
des centrales (nucléaires)
d’ici à la fin de la décennie».
Il a également proposé
Pêche au cabillaud que les puissances nucléaires
en mer deBarents, s’unissent pour proposer des
en janvier 2004. réacteurs et du combustible
aux pays qui s’engageraient
à ne pas les utiliser à des fins
militaires.
La Russie pêcherait
trop gros en mer de Barents
cusés: l’un des principaux producteurs et exportateurs de produits de la pêche au Danemark. L’un de
ses clients, le groupe suédois Findus, a d’abord démenti les informations, avant de faire savoir que la
société allait «prendre toutes les mesures qui s’imposaient» pour s’assurer qu’elle ne vendrait plus de
poisson pêché au noir.
Stocks menacés. Toutefois, «rien ne changera sans la
coopération de l’Union européenne», affirme Rasmus
Hansson. Si aucun contrôle sur l’origine de la marchandise n’est effectué dans les ports européens, le
trafic se poursuivra. Le leader de la Société norvégienne des pêcheurs, Reidar Nielsen, est furieux : «Bruxelles doit comprendre que l’intérêt
de ses pêcheurs est en jeu.» Car non seulement la
surpêche pousse les prix à la baisse, mais elle
menace les stocks de la mer de Barents, où plus
de 60000 tonnes de cabillaud sont réservées aux
chalutiers européens.
Au ministère de la Pêche à Oslo, le directeur de cabinet, Jørn Krog, admet que «l’action menée jusqu’à présent n’a pas été aussi efficace que souhaitée». Mais il est
optimiste. En revanche, au Conseil international
pour l’exploration de la mer à Copenhague, le chercheur Henrik Sparholt met en garde: «Si les quotas
fixés pour 2006 – autorisant la pêche de 471000tonnes
de cabillaud – assurent la reproduction du stock, la
surpêche de 100000 tonnes n’est pas tenable sur le
long terme.»La survie de la dernière grande réserve
mondiale de cabillaud serait donc en péril. •
ANNE-FRANÇOIS HIVERT
Océanographie. Les poussières de l’éruption du volcan en 1883 ont influencé le niveau marin au XXe siècle.
Avec le Krakatoa, la mer ne montait pas
u XXe siècle, le niveau
des océans a été sous le
contrôle… du Krakatoa.
En 1883, une gigantesque éruption du volcan
indonésien propulsait dans
la haute atmosphère d’énormes quantités de poussières
qui allaient, durant plusieurs
années, refroidir la Terre et
provoquer de magnifiques
couchers de soleil. Des océanographes viennent de démon-
A
trer que l’éruption a aussi influencé le niveau marin durant
presque tout le XXe siècle (1).
La démonstration a pris le
chemin d’une série de simulations sur ordinateurs, utilisant
douze modèles différents représentant le fonctionnement
du couple océan-atmosphère.
Les scientifiques ont simulé la
période 1880-2000 de deux
manières. Une série de six qui
incluait toutes les causes de
variations connues du niveau
marin (effet de serre, activité
solaire, aérosols sulfatés et
volcaniques, dont ceux du
Krakatoa). Et une autre série
qui ne tenait pas compte des
aérosols volcaniques.
La comparaison des deux séries montre que l’effet refroidissant des aérosols volcaniques a pénétré petit à petit
dans les profondeurs océaniques, alors qu’il disparaissait
de l’atmosphère. Du coup, le
niveau marin mondial – déterminé en grande partie par la
température de l’eau qui se dilate en chauffant – a subi cette
influence durant de longues
décennies. A l’inverse, lors de
l’éruption du Pinatubo, en
1991, «comparable en terme de
forçage radiatif»(son effet sur
le rayonnement solaire, ndlr),
expliquent les scientifiques,
l’influence refroidissante des
aérosols a rapidement été
compensée par une élévation
plus rapide de la température
de surface de l’océan en raison
de l’augmentation de l’effet de
serre depuis les années 1970,
due aux émissions massives de
gaz carbonique issues de la
combustion du pétrole, du gaz
et du charbon. •
SYLVESTRE HUET
(1) P.J. Gleckler et al., Nature
du 9 février 2006.
SIDA
Pékin met le cap
sur les capotes
La municipalité de Pékin,
inquiète de
l’augmentation rapide
du nombre de cas de
sida, a décidé de
favoriser l’installation
de distributeurs
de préservatifs dans des
lieux divers: karaokés
(souvent de véritables
bordels), gros chantiers,
dortoirs d’étudiants…
(Annonce légale)
AVIS DE CONSTITUTION
Dénomination :
LA PRINCESSE A ROULETTES
Forme juridique : SCI. Capital
social: 1000 euros. Siège social : 6, rue
Euryale Dehaynin, 75019 Paris. Objet :
L’aquisition, l’administration et la
gestion par location ou autrement de
tous immeubles et biens immobiliers.
Gérante : Mme Elisabeth HUGHES,
demeurant 6, rue Euryale Dehaynin,
75019 Paris. Durée : 99 ans à compter
de l’immatriculation au RCS de Paris.
(Annonce légale)
SARL CORVET
SARL au capital de 8 000 euros.
Siège social : 7, cité Hitorf,
75010 Paris. RCS Paris 485 158 729.
Suivant procès-verbal d’une AGE en date
du 5 février 2006, les associés ont approuvé
à l’unanimité la nomination de M. Orhan
YAMANOGLU, demeurant 5, rue du Rhin,
75019 Paris, en qualité de gérant, pour une
durée indéterminée, en remplacement de
Mme Birgul TIROK, démissionnaire, et ce, à
compter de cette même date.
Pour avis, la gérance.
COMMUNIQUÉ JUDICIAIRE
«Par arrêt du 12 janvier 2006,
la 11ème chambre de la Cour
d’Appel de Paris, section B, a
condamné Serge JULY, directeur de la publication du journal
LIBÉRATION et Karl LASKE,
journaliste, pour avoir diffamé
Geneviève GOMEZ, dans
l’article paru dans le quotidien
LIBÉRATION, le 17 octobre 2002,
et intitulé “JAFFRE dans les
affres de l’affaire ELF”».
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
politiques
15
Le patronat indien accuse la France de «xénophobie» dans l’affaire Mittal Steel.
aris n’en démord pas.
Pour Jacques Chirac,
l’affaire Mittal-Arcelor «n’est pas un problème entre l’Inde et
la France». Persuadé
qu’après l’épisode du Clemenceauce dossier est de nature à
nuire aux contrats qu’il entend
signer en Inde, il tente depuis
plusieurs jours d’en faire un
simple dossier européen. Il ne
manque pas une occasion de
souligner que Mittal est une
société de droit néerlandais,
basée à Londres avec à sa tête
un dirigeant, certes, indien
«mais qui pourrait être de n’importe quelle nationalité». Il
rappelle qu’Arcelor est, elle,
une entreprise luxembourgeoise et non française. Mais
en coulisses, l’Elysée et Bercy
restent totalement hostiles à
l’offre publique d’achat (OPA)
lancée par Mittal Steel. Ils s’activent d’autant plus discrètement à la faire capoter qu’ils ne
sont pas sûrs d’y parvenir.
«Nous avons fait notre boulot.
Voyons ce qui se passe maintenant. J’ai bon espoir que les
choses tournent en notre faveur», assurait hier Lakshmi
Mittal dans une interview au
quotidien Times of India.
«C’est une affaire qui a été
lancée beaucoup trop rapidement et sans véritable projet industriel à la clé», expliquait
samedi à Bangkok le ministre
de l’Economie, Thierry Breton, en marge de la visite
d’Etat de Jacques Chirac en
Thaïlande. Certains conseillers du Président vont encore
plus loin en justifiant la position française par la volonté de
«préserver en Europe un certain type de modèle». A entendre l’un d’eux, «deux visions de
l’économie sont en jeu dans cette affaire emblématique: celle
d’un capitalisme prédateur
strictement financier et celle
d’une économie sociale de marché». Inutile de préciser à laquelle va sa préférence.
Agacement. Mais si Jacques
Chirac a réussi à désamorcer
la polémique autour du Clemenceau avant son arrivée à
New Delhi, il risque d’avoir du
plus mal avec l’affaire MittalArcelor. Les autorités et les
milieux d’affaires indiens ne
cachent pas leur agacement
face à l’attitude de la France
sur ce dossier. La presse locale
s’en est largement fait l’écho.
Car la plupart des obser- ● ● ●
PAT R I C K KOVA R I K . A P
Le temps d’un voyage en Inde,
Chirac met Arcelor en veilleuse
P
Jacques Chirac, dimanche à son arrivée à New Delhi. Les milieux économiques indiens et la presse accusent Paris de ne pas jouer le jeu du libre-échange.
Nucléaire: deux poids, deux atomes
Malgré les tensions avec l’Iran, voilà le chef de l’Etat, marchand de centrales en Inde.
New Delhi envoyé spécial
n pleine crise internationale sur le nucléaire iranien et sur fond de concurrence frontale avec les
Américains, Jacques Chirac fait le funambule.
Depuis le début de son voyage en Thaïlande et
en Inde vendredi, le chef de l’Etat s’emploie à tenter
de banaliser les engagements que la France va
prendre aujourd’hui vis-à-vis de l’Inde en matière de
nucléaire civil. Mais pour garantir à la filière nucléaire française de très juteux contrats, il prend le
risque de donner le sentiment qu’il y aurait deux
poids deux mesures en matière de nucléaire, selon
qu’il est indien ou iranien. Car, contrairement à Téhéran, l’Inde (puissance nucléaire déclarée depuis
1998) n’a jamais ratifié le traité de non-prolifération
(TNP). A ce titre, elle n’a en principe pas le droit de
bénéficier en matière de nucléaire civil de l’aide et
des technologies des Etats du NSG, le Groupe de
fournisseurs nucléaires,dont la France est membre.
Mais à New Delhi, où son séjour passe plutôt inaperçu dans l’attente de celui de George W. Bush début
mars, Jacques Chirac a d’ores et déjà assuré ses hôtes
E
que la France avait pour «objectif prioritaire»d’obtenir un statut particulier et dérogatoire pour l’Inde au
sein du NSG. Une voie déjà ouverte par les EtatsUnis, avec le soutien de la France, en juillet2005 lors
de la signature d’un protocole envisageant des
coopérations nucléaires civiles indo-américaines.
«Inch Allah». Pour justifier sa position, Chirac –qui
nucléaire français: Alain Bugat, administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique, et Anne Lauvergeon, présidente du directoire d’Areva.
«Nous sommes dans les starting-blocks. Nous n’attendons plus que des évolutions politiques», assurait
hier à New Delhi cette dernière, ajoutant qu’avec des
besoins de 25 à 30 centrales nucléaires l’Inde représente un marché «considérable». «Inch
Allah», a glissé, en l’entendant, le ministre
«Nos amis américains ne sont pas compétitifs,
de l’Economie.
la technologie française est beaucoup plus avancée.»
Le président de la République Compétitivité. En bon VRP, Jacques Chirac entend bien aujourd’hui assener à
aurait tant voulu se débarrasser du Clemenceauen ses interlocuteurs indiens son argument «décisif»
Inde– met d’abord en avant ses préoccupations éco- pour que l’Inde s’engage avec la France plutôt
logiques. «Si l’on n’aide pas l’Inde à faire face à ses qu’avec les Américains: selon lui, «la solution franénormes besoins énergétiques, elle va se transformer çaise est sans risque parce qu’elle n’est pas soumise
en gigantesque cheminée à effets de serre en utilisant aux aléas du Congrès américain»,à qui Bush n’arrid’autres ressources plus polluantes que le nucléaire», ve toujours pas à faire lever des sanctions prises
explique-t-il. Peut-être. Mais les contrats qu’il comp- contre l’Inde après ses essais nucléaires de 1998. Et
te obtenir à terme contre le soutien de la France sont puis, bien sûr,«nos amis américains ne sont pas comencore plus motivants. Dans ses valises, le chef de pétitifs, la technologie française est beaucoup plus
l’Etat a emmené avec lui deux personnages clés du avancée». Alors, vendu? •
A.G.
16 politiques
ciations [à l’OMC]ne soient pas
affectées de manière négative
par d’éventuelles actions des
membres de l’UE qui seraient
contraires à ce principe»,poursuit la lettre. Une réaction
quelque peu démesurée
puisque Mittal Steel n’est pas
une entreprise indienne. Pour
un pays qui s’est toujours vu
accusé de protectionnisme, la
pilule Mittal est cependant
difficile à avaler. Sans compter
que Lakshmi Mittal, aujourd’hui le troisième homme le
plus riche au monde, est devenu une icône nationale, même
s’il ne possède aucun actif en
Inde. «L’attitude européenne
est très décevante, on a l’impression que les Occidentaux
n’acceptent pas le fait que les
pays en développement bénéficient à leur tour de la mondialisation», commente Natraj Srinivasan, directeur général de
la Confédération indienne de
l’industrie. «Cela fait plus
d’une décennie que le monde
occidental nous pousse à l’ouverture en nous donnant des
leçons sur le libéralisme, renchérit Rahul Bajaj. Mais aujourd’hui, ce sont eux qui
mettent des barrières au libreéchange quand ça ne les arrange pas. Qu’ils aillent jusqu’au
bout de leur logique, et qu’ils arrêtent de nous donner des leçons!»
«Mittal a promis qu’il n’y aurait pas
Rencontre. Bien
de licenciements. La France
conscient que cette
l’accuserait-elle d’être un menteur?» controverse risque
Rahul Bajaj, PDG de Bajaj Auto Ltd de peser sur sa première visite offibloquer l’OPA n’ont d’autre cielle en Inde depuis huit ans,
explication que «la xénopho- Jacques Chirac a tenté de calbie». 80% d’entre eux approu- mer les esprits avant son arrivent également les propos du vée. Dans une interview
ministre du Commerce, Ka- publiée vendredi par l’hebdomal Nath, selon lesquels les madaire India Today, le Présidéclarations des politiques dent affirme ainsi que l’affaire
européens, et notamment «est une bataille entre entrefrançais, «frisent le racisme»et prises privées». Malheureusesont contraires à l’esprit de la ment pour lui, la polémique a
libéralisation économique d’autant plus de chances de retant vantée par les politiques surgir pendant son séjour que
occidentaux.
Lakshmi Mittal, installé à
La semaine dernière, le mi- l’étranger depuis trente ans,
nistre a carrément laissé en- est actuellement de passage à
tendre à Bruxelles que l’Inde New Delhi. Un hasard de capourrait remettre en question lendrier. Officiellement, le
les négociations en cours à magnat de l’acier est rentré au
l’Organisation mondiale du pays pour assister à un mariacommerce (OMC). Dans une ge. La coïncidence est troulettre adressée à son homo- blante. D’autant que la rumeur
logue européen Peter Mandel- enfle sur le fait qu’il pourrait
son, Kamal Nath affirme en ef- être présent lorsque Jacques
fet que la réponse d’une partie Chirac s’adressera aux
de l’Union européenne (UE) hommes d’affaires indiens, cet
va «à l’encontre de la lettre et de après-midi. Le président franl’esprit du principe du “traite- çais et l’homme d’affaires inment national”» qui prévoit dien risquent donc de se croiqu’un investisseur issu d’un ser se soir. «J’irai le saluer
pays membre bénéficie du comme il se doit», a promis
même traitement que ceux du Jacques Chirac.•
pays hôte. «Vous pourriez vouANTOINE GUIRAL
loir vous assurer que nos négoet PIERRE PRAKASH (à New Delhi)
vateurs indiens estiment
que les réticences exprimées
par Paris sur le projet d’OPA
sont à mettre sur le compte de
la nationalité indienne du patron de Mittal. «Si ce n’est pas
du racisme, qu’est-ce que
c’est?»interroge ainsi l’un des
plus grands patrons indiens,
Rahul Bajaj, PDG de Bajaj
Auto Ltd, fabricant de deuxroues. «L’argument français
sur les “différences culturelles”
entre les deux groupes ne tient
pas debout, Lakshmi Mittal
possède des affaires aux EtatsUnis et cela n’a jamais posé de
problème.»Quant aux craintes
de voir les 30000 emplois
français d’Arcelor supprimés:
«Mittal a promis qu’il n’y aurait pas de licenciements. La
France l’accuserait-elle d’être
un menteur? Il n’est pas devenu
numéro1 mondial de l’acier en
racontant n’importe quoi.»
«Racisme.» Particulièrement
remonté, Rahul Bajaj n’est pas
seul à torpiller la France dans
cette affaire. Les articles de
presse et les émissions de télé
se sont multipliés ces derniers
jours, après qu’un sondage
réalisé par la Fédération indienne des chambres de commerce et d’industrie auprès de
200chefs d’entreprise a montré que, pour 95% d’entre eux,
les efforts européens pour
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
(Annonce légale)
Par requête en date du 15 juin 2005, reçue au greffe le 17 juin 2005, le Tribunal de Grande
Instance de Versailles (Yvelines), a été saisi à l’effet de constater l’absence de Monsieur
Henri Élie Jean LAFAY, né le 9 avril 1937 à ASNIÈRES-SUR-SEINE (Hauts-de-Seine),
fils de Madame Juliette Blanche LE PRÉ, domicilié en dernier lieu chez Monsieur René
LAUNAY, 15 rue Bellièvre, 75013 PARIS, déclaré présumé absent par décision en date
du 7 mars 1994 du Juge des Tutelles du Tribunal d’Instance de Paris 13ème.
La publication de cet extrait de requête en déclaration d’absence a été autorisée par le
Procureur de la République de Versailles, le 13 octobre 2005.
LAURENT TROUDE
●●●
Dominique de Villepin (à d.) en décembre. Le CNE et le CPE ont renforcé la défiance des jeunes à l’égard de son action.
Dans les sondages, le CPE
grève la cote de Villepin
Son action mécontente 54% des Français, selon le baromètre Ifop-JDD.
e temps se brouille pour
Dominique de Villepin.
Une motion de censure
à l’Assemblée sur le CPE
(contrat première embauche); un débat délicat au
Sénat; des manifestations qui
durent même si elles peinent à
s’amplifier; et une opinion qui
se détourne de lui. Après neuf
mois d’une réussite incontestable, le Premier ministre affronte cette semaine sa première zone de turbulences.
Recul. Radieux à l’automne
2005, Dominique de Villepin
encaisse un brusque retour de
manivelle. Selon le baromètre
Ifop-le Journal du dimanche
(JDD), le pourcentage des
Français ayant une opinion
positive de l’action du Premier
ministre a chuté de 9 points,
passant à 43%; simultanément, le total des mécontents
passe de 45% à 54% (1). Un
chiffre qui confirme la dernière enquête LH2-Libération,
qui voyait la popularité du chef
du gouvernement fondre de
5 points (Libération du 6 février), ainsi que les résultats
des baromètres Ipsos-le Point
(-6 points) et Ifop-Paris Match
(-6 points).
Dans l’enquête Ifop-JDD, le
recul le plus net est chez les
jeunes, où il atteint 15 points.
Une conséquence du CPE, ce
nouveau contrat pour l’emploi
qui suscite l’hostilité d’une
partie de la jeunesse. Une
grande manifestation nationale est prévue le 7 mars et,
pour prendre de court les organisations lycéennes et étudiantes, Dominique de Ville-
L
pin a fait adopter son texte le
10 février par l’Assemblée en
vertu de l’article 49-3 de la
Constitution. Mardi, le Premier ministre devra répondre
à la motion de censure déposée par le Parti socialiste à l’Assemblée; deux jours plus tard,
le Sénat commencera à examiner le projet de loi instaurant
le CPE. Un exercice délicat, car
l’UMP a besoin de la neutralité des sénateurs UDF pour
obtenir la majorité.
Actions. Samedi, les représentants d’une trentaine d’universités françaises se sont re-
trouvés à Rennes pour former
une coordination nationale
anti-CPE. «Chaque fac va à son
rythme, estime Annaïs Charrier, venue d’Angers. Mais le
mouvement est dans une phase
ascendante et nous invitons
tous les gens touchés par la précarité à nous rejoindre.» Une
vingtaine de lycéens bretons
ont également participé à la
réunion où, après dix heures
de discussions à huis clos, les
délégués se sont mis d’accord
sur trois revendications principales: l’abrogation du CNE
(contrat nouvelles embau-
ches), le retrait du CPE et
l’augmentation de postes au
Capes. Trois mots d’ordre qui
vont être défendus dans la rue
les 23 et 28février et le 7mars.
Un appel national au blocage
des universités à partir du
23 février a aussi été décidé.
Reste à franchir l’étape des vacances (une semaine à partir
du 25février pour Rennes-II).
Une seconde réunion de la coordination est prévue samedi
à Toulouse.•
É.A. et P.-H.A. (à Rennes)
(1) Effectué par téléphone du 9 au
17février auprès de 1855 personnes.
Les ministres utilisent leurs rejetons
Pour vanter le CPE, ils n’hésitent pas à jouer les parents inquiets.
a marmaille à la rescousse. «Et ma fille, et
mon neveu…» Pour vanter le contrat première embauche (CPE), les ministres ont
appuyé leurs démonstrations sur des
exemples issus de leur propre famille. Quitte à
friser le ridicule. Mercredi, le ministre de
l’Education nationale, Gilles de Robien, a ainsi livré une «confidence»aux lycéens lyonnais
qu’il était venu rencontrer (Libérationdu 16février): «J’ai un fils qui est sorti de ses études avec
bac + 5 à un moment de creux. Il est resté neuf
mois sans travail. L’ambiance dans la famille,
bonjour! Je suis certain qu’avec le CPE ce délai
aurait été réduit.» Il est loin d’être le seul au
gouvernement à user de l’argument du «vécu».
Gérard Larcher, ministre délégué à l’Emploi,
raconte à qui veut l’entendre que son fiston,
brillant ingénieur, s’est vu proposer un stage à
peine indemnisé dans une grande entreprise.
Thierry Breton, ministre de l’Economie, a aussi recouru aux soucis professionnels de ses enfants pour dire tout le bien qu’il pense du CPE.
Jean-Louis Borloo, ministre de l’Emploi et de
la Cohésion sociale, en a, lui, fait un leitmotiv.
L
Dans le Journal du Dimanche du 29 janvier, il
explique à son tour: «J’ai une fille de 23ans, actuellement en stage. On ne lui propose que ça ou
des CDD. Quel parent ne trouverait pas ce
contrat mieux qu’un stage ou un CDD?» Une
interpellation déjà testée à l’Assemblée nationale, quelques jours plus tôt: «Il y a des moments ou les évidences s’imposent. Quel père,
quelle mère ne dira pas à son enfant “prends ce
contrat première embauche plutôt qu’un stage”?»Ce mode de communication ne doit rien
au hasard. Alors qu’une majorité de jeunes
sont hostiles au CPE, le gouvernement veut,
en prenant des exemples concrets, toucher les
parents inquiets de l’avenir de leurs rejetons et
en appeler à leur «bon sens». «Il n’y a pas un
adulte de bonne foi»pour soutenir les propositions des socialistes, a expliqué Dominique de
Villepin le 10février à Toulon. Le Premier ministre veut également montrer qu’il a «les deux
pieds sur terre», comme il l’a rappelé le 25 janvier à l’Assemblée: «Nous nous préoccupons de
la vie quotidienne.»•
VANESSA SCHNEIDER
politiques 17
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Santé: les Français favorables
à la limitation des dépenses
Cinq enquêtes du ministère de la Santé,
échelonnées entre 2000 et 2005, montrent un
tassement de l’optimisme des Français en matière
de santé et de protection sociale. En 2005, un
Français sur deux seulement, contre 62% en
2000, pense que l’état de santé de la population
s’est amélioré au cours des dernières années. Les
opinions favorables à la limitation des dépenses
de santé (86%) sont en progression de 5 points.
Interrogés sur les mesures qu’ils retiendraient
pour réduire le déficit, les Français citent en
priorité le changement de comportement des
médecins et des patients.
PS: Montebourg ouvre
ses bras aux jeunes
Samedi s’est tenu à Saint-Denis le premier meeting
national du nouveau courant Rénover maintenant.
n temps que les plus de
40ans ne peuvent pas
connaître. Pour le premier rassemblement
Les enquêtes ont porté chaque année sur un échantillon
de 4 000 personnes.
national de Rénover
maintenant (RM), samedi à
Saint-Denis (Seine-SaintDenis), le député PS Arnaud
Montebourg s’est fait le défenseur des 18-35 ans, «cobayes
des expérimentations de l’ultralibéralisme à la française».
Ça tombe bien: RM, le courant
qu’il a créé après le congrès
duMans, compte beaucoup de
ces «cobayes», qui ont quitté
Le clip de deux minutes montre d’abord des gens moroses,
immobiles, auxquels succèdent un bébé nageur et un couple avec lui le Nouveau Parti sod’amoureux, dignes représentants d’une France heureuse et cialiste (NPS). Idéal donc pour
mobiliser la base, et se compqui bouge. En voix off enregistrée, Nicolas Sarkozy résume
ter. Devant 400personnes, le
les grands thèmes de campagne. Samedi, à Paris,
député de Saône-et-Loire a
2500 nouveaux adhérents de l’UMP ont été reçus par le
clos la journée d’un discours
président de leur parti, qui leur a réservé la présentation
appelant les jeunes à «refuser
de son nouveau slogan, «Imaginons la France d’après».
le monde tel qu’il est».
Tel un rideau, le panneau supportant le slogan s’est
légèrement soulevé pour laisser apparaître un champ vert vif En pleine mobilisation antiCPE (contrat première emrempli d’une multitude de coquelicots rouges devant une
bauche) –«mais nous avions
haie de cyprès. «La question n’est pas la France d’après qui,
prévu cette journée avant», asla question est la France d’après quoi», a affirmé Sarkozy,
sure Thierry Mandon, le pordevançant les interrogations. «Nous sommes en train de
te-parole du courant–, il accurévolutionner la vie politique», s’est-il complimenté.
U
Une histoire
Amoureux et bébé nageur: l’UMP
présente sa «France d’après»
Qualifiant la gauche «conservatrice» française de «seul
produit parfaitement inexportable», il a estimé que, pour
2007, son parti devait se préparer à «faire le débat tout seul».
sont que la partie visible de
l’iceberg, se lamente Ahmed,
militant associatif. Frêche a dit
tout haut ce que tout le monde
en France pense tout bas depuis
quarante ans.»
Du côté de la gauche non socialiste, qui avait vigoureusement condamné les mots de
Georges Frêche, personne, à
l’exception du Mrap, n’a voulu
s’afficher aux côtés des harkis.
Contactés par Libération, les
responsables communistes se
sont justifiés en refusant de
«participer à une manifestation qui risquait d’être récupérée par la droite», les Verts
avouant leur gêne de «manifester contre le président
d’une majorité régionale dont
[ les écologistes font] partie». Un manifestant résume:
«C’est toujours pareil, la droite
cherche à nous manipuler et
la gauche nous méprise.» •
PIERRE DAUM
A.A. et L.N.
2002.» Rénover maintenant
compte jouer cette carte pour
«peser sur le projet du PS»,explique Montebourg. «Seronsnous capables de dire aux
grands groupes “donnez moins
à vos actionnaires et donnez
plus à vos stagiaires”?»feint-il
de s’interroger. Lui a déjà sa
petite idée.
La commission du projet
risque d’être «le tableau de
tous les renoncements. On va finir par théoriser notre propre
inexistence», ironise-t-il. Sans parler
Arnaud Montebourg raille
d’un système poliles préparatifs de la présidentielle:
«Après les Bronzés 3, voici Jospin 3 !» tique comparé à un
«Jurassic Park ver[qui] vaut mille cocktails Mo- rouillé à double tour»qui «ferlotov!». Et qui, dans un PS me la porte aux jeunes». Dans
vieillissant (moyenne d’âge: le même registre, il raille les
plus de 55ans), donnerait plus préparatifs de la présidentielde poids au courant Monte- le : «Après les Bronzés 3, voici
bourg. L’équation est résumée Jospin 3!» Yvette Roudy, l’expar Alexis Bachelay, chargé du ministre de François Mitdialogue avec les organisa- terrand, avait prévenu l’assistions de jeunesse: «Quand les tance, «Arnaud a retrouvé sa
jeunes ne sont pas au rendez- franchise».•
vous, ça donne le 21 avril
ÉMILE JOSSELIN
se le gouvernement d’être «en
deçà des normes internationales du travail»et envisage de
porter plainte, comme l’a fait
Force ouvrière.
«Une société sans horizon fabrique de la violence», explique
Arnaud Montebourg, pour
qui, après les émeutes en banlieue, «la braise est encore sous
la cendre». Son remède? «Un
grand plan d’embauche publique.» Autre solution, «une
carte Rénover maintenant,
A Montpellier, rassemblement
harki sous les fenêtres de Frêche
Pour le Medef, les licenciements
sont trop contestés
La présidente du Medef, Laurence Parisot, a
souligné dimanche, lors du Grand Jury RTL-LCI-le
Figaro, que la France détient le record du nombre
de contentieux sur les licenciements et que cela
explique «en partie pourquoi le marché du travail
fonctionne mal». Elle a souhaité qu’en France le
licenciement pour inaptitude à son travail ne soit
plus considéré comme un licenciement abusif.
Laurence Parisot a par ailleurs noté que
l’apparition de contentieux sur des licenciements
de salariés embauchés en CNE «révèle au moins
une chose, c’est que le CNE n’est pas une zone de
non-droit».
IMAGES
www.liberation.fr
Montpellier correspondance
lusieurs centaines de harkis (400 selon la police,
1 000 selon les organisateurs) se sont réunis
samedi après-midi sous les
fenêtres du conseil régional
du Languedoc-Roussillon (à
Montpellier), présidé par le socialiste Georges Frêche. La semaine dernière, ce dernier avait
publiquement traité de «soushommes» un groupe de harkis
qui avaient participé, le même
jour, à un rassemblement de
l’UMP. «Pour qui nous prendil? s’énerve une manifestante,
fonctionnaire de police en Auvergne. Pour des indigènes qui
n’ont pas le droit de penser par
eux-mêmes? C’est fini le temps
où nos parents devaient voter ce
que leur député ou leur maire
leur disaient de faire!»
Dans un contexte politique local tendu, les organisateurs de
ce rassemblement se sont ef-
P
forcésd’éviter toute récupération par la droite: «Nous avons
lancé des invitations à tous
les élus, de droite comme de
gauche», a rappelé au micro
Abdelkader Chebaiki, représentant de l’Association Justice
Information et Réparation
pour les harkis (Ajir). Plusieurs
élus UMP ont été priés de ranger leur écharpe tricolore. A la
tribune, seuls des responsables
associatifs ont eu droit à la parole.MohamedHaddouche,présidentnationald’Ajir,adénoncé:
«Si vous lisez bien sa déclaration, c’est aux seuls journalistes [que Frêche] a demandé
de se faire pardonner.»
Dans la foule, beaucoup
d’hommes âgés arborant
leurs médailles militaires, des
veuves avec une photo de leur
mari «mort pour la France», et
beaucoup de jeunes, tous blessés par les paroles de Frêche.
«Le pire, c’est que ces insultes ne
Ils appellent à manifester
en avril contre l’EPR,
dans le cadre des
vingt ans de Tchernobyl.
ingt ans après la catastrophe de Tchernobyl,
une manifestation antinucléaire est organisée les 15 et
16avril près du site de Flamanville (Manche), où doit être
construit le réacteur EPR.
Aujourd’hui, à Cherbourg, plusieurs personnalités, dont
Bové et Mamère, lanceront un
appel à participer à ce «grand
rassemblement»qui s’annonce
considérable sur le papier:
196 organisations de 35 pays
soutiennent l’initiative.
Outre les très nombreuses
associations du réseau Sortir
du nucléaire, plusieurs partis
politiques français annoncent
leur participation: les Verts,
bien sûr, mais aussi CAP21 de
Corinne Lepage, la LCR et le
MJS (Mouvement des jeunes
socialistes). En revanche, il est
peu probable que le PS soit de
la partie. Car si le Parti socialiste s’est clairement prononcé contre l’EPR, il reste exclu
pour lui de s’associer à un
mouvement de protestation
contre l’énergie nucléaire.
Les organisateurs ne se font
guère d’illusions: ils espèrent
10 000 manifestants, grand
maximum. Car dans un contexte de réchauffement climatique et de prix du pétrole élevé,
l’atome fait figure de solution:
«L’actualité sert la propagande pronucléaire du gouvernement, qui se pose en champion de la lutte contre l’effet de
serre», constate l’ex-ministre
écologiste Yves Cochet.
Alors qu’un récent sondage de
la Commission européenne
indique que les Européens
sont très majoritairement
hostiles à l’atome, en France, le
combat antinucléaire reste
cantonné dans la marginalité
depuis le début des années80.
En septembre, entre 4000 et
6000 militants s’étaient retrouvés à Bure (Meuse) pour
protester contre l’enfouissement des déchets radioactifs.
Un record.
Avec l’anniversaire de Tchernobyl, le lancement du nouveau réacteur EPR et la prochaine mise en route de la
campagne pour l’élection
présidentielle, les antinucléaires espèrent qu’ils auront,
en ce printemps, la possibilité
de montrer que leur combat
reste mobilisateur.•
Bussereau peint Ségolène Royal
en «artiste de la déception»
Les organisateurs prétendent éviter la récupération politique.
Dominique Bussereau, ministre UMP de
l’Agriculture et élu de Charente-Maritime, a
qualifié hier la socialiste Ségolène Royal,
d’«immense artiste de la déception». «Elle crée
des espérances, mais c’est une immense artiste de
la déception […] son style, c’est beaucoup de
communication, une pensée assez évanescente,
peu de message.» Le ministre dit qu’il lui arrivait
souvent de côtoyer la députée socialiste dans le
train où il ne l’a «jamais vue en seconde classe».
Bové et Mamère
mobilisent
contre l’atome
V
18
société
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Le chef de
la bande qui
a enlevé Ilan
était, hier
soir, toujours
introuvable.
Un jeune
de Bagneux,
qui l’a connu,
retrace
son parcours.
Q
F R É D É R I C S T U C I N . M YO P
ui est Youssouf F.?
L’homme le plus recherché de France,
le nouvel «ennemi
public»,demeurait
toujours introuvable hier soir. «Toutes les
pistes sont explorées, on le
cherche partout, on vérifie
tout», dit-on à la police judiciaire. Son bras droit ainsi que 1000 à 2000 personnes ont défilé hier à Paris, entre République et Nation, à la mémoire d’Ilan Halimi, décédé après trois semaines de séquestration.
l’aguicheuse, une jeune femme d’origine maghrébine
qui avait attiré Ilan Halimi
dans le guet-apens mortel,
sont également recherchés.
Le «cerveau des barbares»,
chef présumé de la bande qui
a kidnappé Ilan, est arrivé à
Bagneux dans les années 90.
Selon les informations recueillies par Libération, il débarque du quartier de Belleville, à Paris, avec sa famille.
Ses parents, d’origine ivoirienne, travaillent tous les deux. Ils ont éle- interpellés, dont quatorze en France et un Les policiers tentent toujours de cerner les
vé six enfants. Youssouf est le troisième. à Bruxelles. Samedi soir, trois d’entre eux contours du groupe, qui aurait à son actif au
Après avoir fréquenté le collège, il aurait ont été mis en examen et écroués. Il y a là moins six autres tentatives d’enlèvement. Les
suivi une formation de plombier au lycée AudreyL.jeune femme blonde soupçonnée personnes entendues depuis vendredi se déprofessionnel Jean-Monnet, à Montrouge d’être un des appâts du gang à la demande de crivent comme de «simples maillons». «On Sous une pluie tenace, 1000 à 2000personnes ont
(Hauts-de-Seine). «A l’époque, c’était un pe- son petit ami, qui serait un proche de Yous- peut penser qu’ils minimisent leurs responsa- défilé hier à Paris, entre République et Nation, à la
tit jeune tranquille, discret et timide, pas très souf, puis sous la pression du groupe. Elle bilités en chargeant les absents.»Certains au- mémoire d’Ilan. De nombreuses familles, avec des
sportif. Après, il a eu des fréquentations qui s’est rendue spontanément à la police après raient accepté de servir de «garde-chiourme enfants, ont marché, silencieusement d’abord, puis
l’ont mené en prison», se souvient un jeune la diffusion de son portrait-robot.
contre une promesse d’argent», dit une source reprenant les slogans lancés par un groupe de jeunes
de Bagneux.
Figure aussi Almane D. personnage soup- proche de l’enquête pour qui «ces jeunes ne déterminés. Beaucoup, parmi ceux-ci, arboraient un
A 18ans à peine, autour de 1998, Youssouf au- çonné d’être prêteur sur gages africain. Il au- sont pas du genre à se poser des questions».
brassard noir, avec une étoile de David et le slogan:
rait été impliqué dans une affaire de vol à rait servi d’intermédiaire en cas de remise de «Coup de main». L’hypothèse d’une bande or- «Fier d’être juif».Bientôt les «Justice pour Ilan» se
main armée. Placé en détention provisoire à rançon. Tous deux ont été mis en examen ganisée telle qu’on en a connu dans les affaires sont transformés en«Vengeance pour Ilan», «A mort
la maison d’arrêt de Nanterre, il
de grand banditisme laisse également per- Youssef, à mort les barbares»… moins appréciés par
aurait été condamné à trois ans de Samedi soir, trois personnes, dont deux jeunes
plexe un policier: «On a plutôt l’impression une partie du cortège.«Nous sommes venus parce que
prison, purgés à Fleury-Mérogis femmes, ont été mises en examen et écrouées.
d’avoir affaire à un conglomérat de pieds nic- ce climat de peur nous est insupportable. Mais la
(Essonne). «Quand il est sorti, il
kelés avec peut-être une figure qui se détache.» violence touche toute la société»,expliquait une
n’était plus pareil. Il est devenu parano, il pour «enlèvement, séquestration, avec actes de Selon une autre source proche du dossier, au- femme. Près de Nation, quelques jeunes ont jeté sur
n’avait confiance en personne. Il pensait qu’il torture et de barbarie et assassinat». Me Jean tour d’un noyau dur mené par le chef présu- le trottoir des cagettes de fruits d’un «épicier arabe»,
avait été dénoncé. Mais il était heureux de se re- Balan est l’avocat d’Audrey: «Elle affirme mé, se seraient agrégés un cercle de copains de vite protégé par les CRS et le service d’ordre. La
trouver dehors, il allait à l’ANPE, il essayait de qu’elle n’était pas consciente de ce qui pouvait cité qui auraient donné «un coup de main»et voiture d'un automobiliste, qui s’était retrouvé au
se réinsérer», poursuit celui qui l’a connu à arriver aux victimes du groupe. Le calvaire su- un cercle plus large de parents ou voisins, qui milieu du cortège boulevard Voltaire, a été
l’époque. Dans sa description, Youssouf est bi par Ilan lui paraissait inimaginable.» La auraient su mais n’auraient rien dit. A Ba- endommagée. Le Crif a condamné ces incidents.
loin d’y apparaître avec ce profil du meneur. troisième personne mise en cause s’appelle gneux, un jeune confirme la vision policière: Puis, un groupe d’une vingtaine de jeunes
«Je n’ai jamais pensé qu’il aurait pu faire ça, Murielle I. La juge d’instruction estime «Ce groupe que l’on appelle “les Barbarians” encapuchonnés s’est dirigé vers le théâtre dela Main
mais, en prison, on ne fait pas forcément de qu’Ilan serait peut-être vivant si elle avait im- n’existait pas auparavant. Il est fait de bric et de d’Or, QG de l’humoriste Dieudonné. Sur place, ils ont
bonnes rencontres. Je ne sais pas ce qui s’est médiatement dénoncé son amie à la police. broc. Ce sont des petits jeunes totalement in- tenté de défoncer la porte à coups de pied. L’action
passé dans sa tête.»
Elle l’a donc mise en examen pour non-dé- conscients qui ne savent même pas la gravité de n’a duré qu’une trentaine de secondes. La police, hier,
Quinze interpellations. Ce week-end, les poli- nonciation de crime. Les policiers semblent ce qu’ils ont fait.»Le même affirme qu’ils sont affirmait qu’«un motif crapuleux»animait les auteurs
ciers ont entendu de nombreuses personnes, avoir acquis la certitude qu’Ilan a été séques- dans l’échec scolaire, sans emploi mais même du rapt d’Ilan. «Ce qui fait agir, ce n’est pas une raison
«Il y a des mouvements d’allers-retours qui tré quelques jours dans un appartement de pas déclarés au chômage et qu’ils vivent «chez raciale ou religieuse. Dans leur tête, juif égale argent»,
tiennent au fait que beaucoup de personnes Bagneux. Puis ses ravisseurs l’auraient des- papa-maman». «La question que je me pose explique ainsi un enquêteur.
doivent être entendues»,dit une source au par- cendu pendant deux semaines dans une c’est pourquoi ils sont allés aussi loin.»•
MARC PIVOIS
quet de Paris. Jeudi, quinze suspects ont été chaufferie du sous-sol.
DIDIER ARNAUD et JACKY DURAND
Youssouf F., petit jeune
timide devenu «barbare»
De «Justice pour Ilan»
à «Vengeance pour Ilan»
société 19
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
par DOMINIQUE SIMONNOT
«Le retour chez Maman,
c’est fini!»
Tribunal correctionnel de Nanterre
e président arbore une
grosse moustache et un
sourire alerte. «Asseyezvous, mademoiselle», dit-il à
Samira, une jolie blonde, et
il énonce à Maurice, 56ans,
chef infirmier: «Monsieur, il
vous est reproché des
atteintes sexuelles sur cette
jeune femme, pour lui avoir
caressé les cuisses, un sein et
tenté de l’embrasser sur la
bouche.»Il y a deux mois,
Samira, stagiaire
infirmière, a porté plainte
contre Maurice. «Il m’a,
convoquée dans son bureau,
a-t-elle rapporté,il avait
pensé à moi tout le week-end,
j’étais coincée entre le mur et
la table, c’est là qu’il m’a
touchée.» Elle avait protesté
et Maurice aurait souri:
«Quoi? On ne t’a donc jamais
touché les seins? T’as jamais
fait l’amour? Non? Tu sais,
c’est comme les steaks, tant
qu’on y a pas goûté, on ne sait
pas si c’est bon!»Le juge
observe: «Monsieur, il y a là
une connotation
désagréable. On peut penser
que vous abusez de votre
fonction et, que, né en 49,
vous appréciez des
personnes dont vous
pourriez être le père.»
Maurice soupire: «Elle est
venue tous les jours dans
mon bureau…»Et le juge
hausse les sourcils: «Vous
voulez nous dire qu’elle n’est
pas farouche?»Il prend un
air faussement curieux:
«Vous recevez aussi
volontiers des déménageurs
d’1,80mètre portant une
barbe de quatre jours?»
Maurice souffle:«En trente
ans de carrière, je n’avais
jamais eu de geste déplacé!»
Le président lit la lettre que
Samira a adressée au
tribunal:«J’ai pleuré jour et
nuit, j’ai vu un psychiatre, je
me sentais coupable, salie,
on m’a conseillé une
psychothérapie.»Elle
réclame 10000 euros et,
dans la salle, un garçon
siffle. «Mon geste a fait
beaucoup de mal», se désole
Maurice. Le procureur
salue «le courage de cette
jeune victime»et s’emballe:
«Ces faits sont très graves!
Il doit soigner ses
débordements libidineux.
Je ne manquerai pas
d’ailleurs d’avertir les
autorités sanitaires de son
comportement.»Il veut
trentemois avec sursis et
mise à l’épreuve. «Quelle
envolée! râle l’avocat, on
parle de trois gestes, sans
aucune violence, qu’il n’a
L
jamais niés, dont il s’est
excusé et qui ressemblent
plus à une drague poussée et
maladroite…»Il regarde
Samira: «10000euros?
Sans nier le choc, soyons
raisonnables!»Six mois
avec sursis, 2500euros
pour Samira.
«Et maintenant, explique le
président,nous allons nous
occuper des comparutions
immédiates. Combien y en at-il? Huit!» Il se tourne vers
le procureur: «Il faudrait
peut-être se calmer!»
Voilà donc Mohamed,
18ans, qui a balancé dans la
cour de la prison de
Nanterre une canette de
Coca, des épices orientales
et des CD. Le juge raconte:
«Vous avez dit que c’était
pour rendre service à un ami,
le problème c’est que ce n’est
pas la première fois! En juin
déjà. Et déjà pour dépanner
un ami incarcéré.»
Il sermonne: «Monsieur,
vous persistez dans vos
erreurs, vous n’êtes pas juge
de ce qui entre à la maison
d’arrêt, et, si vous voulez y
envoyer des épices, il y a une
procédure pour ça! Vous
savez que vous risquez de la
prison?»Mohamed gratte
sa joue, il est tout pâle. «J’ai
rien à dire…» «C’est fâcheux,
monsieur, reprend le juge, et
dans la vie, vous envisagez
quoi?»«Formation
cariste…»,chuchote
Mohamed. «Monsieur,
parlez plus fort, le tribunal
n’est pas si désagréable
–même s’il nous arrive d’être
vifs– que vous ne puissiez
élever la voix…»
«Je commence en mars»,
murmure Mohamed.
«Allez,l’encourage le juge,
au fond, vous pensez que ce
n’est pas si grave! Ditesnous ce que vous pensez.
Devant le tribunal, c’est
connu, on dit toujours ce que
l’on pense!»«Non», dit
Mohamed. Le procureur
demande: «Accepterait-il
un travail d’intérêt
général?»Mohamed ne dit
rien et le juge le bouscule:
«Monsieur, si ça ne vous
intéresse pas, dites-le!» «Ça
m’intéresse pas!» Et le
procureur se venge:
«J’estimais qu’il fallait
éviter d’encombrer la
maison d’arrêt, tant pis!» Il
fixe le garçon livide: «Ici,
c’est le tribunal des grands!
L’admonestation, le retour
chez maman, c’est fini!»
Il veut deux mois ferme.
Ce sera 60jours-amendes à
10euros, ça fait
600euros.•
Du flou au procès
de Castela et Andriuzzi
En appel, l’accusation s’est montrée embarrassée
face aux «intellectuels» de l’affaire Erignac.
uelle sera l’attitude de
l’avocat général Yves
Jannier, cet après-midi, lorsqu’il commencera son réquisitoire
après deux semaines d’audience du procès de Jean Castela et
Vincent Andriuzzi? Le magistrat va devoir tenir compte de
la tournure prise par le procès
ces derniers jours, qui s’est
transformé en un étalage des
méthodes très contestables,
voire délictuelles (Libération
du 17février) des policiers de la
Division nationale antiterroriste (DNAT). Mais les magistrats du pôle antiterroriste
n’ont pas été plus ménagés, à
travers les astuces judiciaires
utilisées pour réunir les charges contre les deux hommes.
Les deux professeurs bastiais
sont accusés de complicité
dans l’assassinat du préfet
Claude Erignac. En 2003, Yves
Jannier participait au réquisitoire à deux voix, contre les
mêmes accusés, lors du procès
en première instance. Les
peines réclamées avaient
certes été énoncées par son supérieur d’alors, Jean-Louis Nadal, procureur général de Paris.
La prison à perpétuité pour les
deux «intellectuels», dont l’accusateur relevait qu’ils étaient
Q
MOUSTY
CARNETS DE JUSTICE
les «commanditaires» de l’assassinat. Pour autant, durant
les débats, c’est bien l’avocat général Yves Jannier qui avait
«tenu» l’accusation, faisant
montre d’une grande pugnacité. Castela et Andriuzzi avaient
finalement été condamnés à
trente ans de prison.
Cette fois, l’accusation s’est
montrée plus réservée, parfois
représentant des bâtiments administratifs, «cibles» avérées
ou potentielles d’attentats.
Dans la seconde, et en particulier dans l’affaire Erignac, que
reste-t-il à l’issue des débats?
Le commissaire Frizon, venu
mercredi soir une dernière fois
témoigner sur «la téléphonie»,
n’a été capable à nouveau que
de «on peut supposer»ou «rien
n’empêchait que…»,
lorsqu’il s’agissait de
En première instance, Jean Castela
et Vincent Andriuzzi ont été condamnés prouver que l’un ou
l’autre des accusés
à trente ans de prison.
avait participé à une
discrète. Les débats, impecca- quelconque conspiration. Pour
blement menés par le prési- réclamer de nouveau la perpédent Getti, ont permis de tuité, ou trente ans de prison,
décortiquer deux séries de c’est un peu vague.
faits. Deux attentats «légers» Reproches. «Je veux comcontre des bâtiments publics prendre et surtout connaître la
et la perturbation d’un con- vérité. J’aurais aimé que les
cours d’agrégation en 1994, réponses soient claires. Ces derpuis, à l’automne 1997 et en fé- niers jours, je n’ai vu que des hévrier 1998, trois attentats et sitations, des choses approxil’assassinat du préfet. Autant matives et des contrevérités»,
dire que la première série est regrettait à la barre Dominique
incomparablement moins gra- Erignac, la veuve du préfet.
ve que la seconde.
Sans doute faisait-elle référenPetit carnet. Dans la première ce aux déclarations des accusérie, les deux hommes sont sés. Mais ces reproches poumis en cause par des témoi- vaient tout autant s’adresser
gnages, voire des preuves plus aux enquêteurs. Les plaidoitangibles en ce qui concerne ries de la défense et le verdict
Jean Castela, avec ce petit car- sont attendus mardi.•
net couvert de plans de sa main,
MARC PIVOIS
Immigration: un rappel aux juges
La Cour de cassation réaffirme leur rôle de gardiens des libertés.
ela ne peut être un hasard. Le 31janvier, le premier président de la Cour
de cassation, Guy Canivet, a présidé en personne
trois audiences concernant les
étrangers. Et, sous son auguste houlette, la cour a rappelé
aux juges leur rôle constitutionnel de gardiens des libertés individuelles. Pas un hasard non plus, les trois arrêts
sont accompagnés d’un communiqué qui donne plus encore de solennité à l’affaire: «Cet
office[de gardiens des libertés,
ndlr] suppose que le juge judiciaire effectue des vérifications
concrètes et précises.»Ainsi «le
juge doit s’assurer» qu’au moment de son placement en rétention ou en zone d’attente, le
sans-papiers ou le demandeur
d’asile a pu faire valoir ses
droits. Notamment l’assistance d’un interprète, d’un médecin, d’un avocat… Et les juges
doivent être scrupuleux dans
leur examen des dossiers car,
rappelle la Cour de cassation,
C
«l’étranger en rétention est difficilement en état de faire la
preuve, d’une part, qu’il a formulé une demande tendant à
l’exercice de ses droits, et,
d’autre part, qu’un refus a été
opposé à cette demande».
Voilà un avertissement venu
du plus haut magistrat de
France qui remet les choses en
place. Mais aussi ces juges de la
cour d’appel de Paris qui, en
décembre, avaient fait circuler
un tableau critique des décisions de leurs collègues de Bobigny (Libération du 25 janvier). Ils y dénonçaient des
remises en liberté de sans-papiers ordonnées à Bobigny et
qu’ils avaient contredites.
Pour motiver ces libérations,
les juges de Bobigny avaient,
entre autres, avancé l’irrégularité des interpellations, l’absence d’interprète, ou des
garanties suffisantes pour justifier une assignation à résidence… Par lettre, le président
du tribunal de Bobigny avait
incité ses magistrats à plus de
prudence. Il les avait aussi
gentiment avertis qu’une formation au droit des étrangers
leur serait dispensée en juin
par la cour d’appel. Là, c’est
plutôt la cour d’appel qui devra prendre des cours… Cette
histoire avait fortement ému
le tribunal de Bobigny. Plus
encore dans cette ambiance
où le ministère de l’Intérieur
exige de ses préfectures de
plus en plus d’expulsions.
Pour Hélène Franco, viceprésidente du Syndicat de la
magistrature, «la Cour de cassation réconforte les juges et les
encourage à aller le plus loin
possible dans leur rôle de garants des libertés. Car, où qu’il
se trouve, le juge a cette mission
et ne doit jamais capituler devant une politique gouvernementale qui le dépasse».•
D.S.
• Plus d’un millier de personnes
Un ancien
condamné à
mort poignardé
Jacques Lerouge, réinséré
modèle, avait consacré sa
vie aux sortants de prison.
alicieusement, Jacques
Lerouge, ancien condamné à mort, disait de luimême: «Je suis la plus belle
plaidoirie contre la peine de
mort.»Jeudi, à Charmes, dans
les Vosges, plusieurs coups de
poignard ont mis fin à 65 ans
d’une vie extraordinaire. Condamné à mort pour meurtre en
1971, gracié, sorti en libération
conditionnelle après dix-sept
ans de prison, Jacques Lerouge avait ensuite consacré sa vie
à la réinsertion des sortants de
prison. Et c’est l’un d’eux, âgé de
50ans, libéré conditionnel, qui
l’a tué. Un de ces gars qu’il aidait, à travers l’Aperi, l’association qu’il avait créée.
Son existence est de celle que
l’on lit dans les livres –il en a
d’ailleurs écrit (1)–, depuis la
pauvre enfance, le vol d’un
moulin à café à 14 ans, la maison de correction où un éducateur aime la chair fraîche des
enfants qu’on lui confie. Et les
braquages, etc. Jusqu’à la cellule des condamnés à mort où
«on ne fait déjà plus partie du
monde des vivants». Et enfin
cette soif de tout rattraper, de
prouver au monde que la prison est «déresponsabilisante»,
que les longues peines ne servent à rien, que tout homme a
droit à une nouvelle vie.
D’écoles en colloques, Lerouge
portait cette parole et la mettait en œuvre, se démenant
pour trouver des boulots, des
lieux d’hébergement. Sur une
image récente, il donne une affectueuse accolade à Christine
Boutin, le 14 janvier à Lyon,
lors du lancement de la campagne de «Trop c’est trop!»
pour le respect du numerus
clausus dans les prisons. «Il a
consacré sa vie à la réinsertion
des détenus, jusqu’à la perdre
tragiquement dans l’exercice de
cette vocation», a tristement
déclaré la députée UMP, ellemême administratrice de
l’Aperi. «Nous perdons un infatigable militant», salue l’Observatoire international des prisons. Son meurtrier a été
arrêté vendredi à Epinal.•
M
ont défilé samedi à Paris pour
réclamer le retrait du projet (1) Le Condamné à mort et la
de loi de Nicolas Sarkozy sur Grande Traque (Editions
contemporaines)
l’immigration.
D.S.
20 société
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
F LO R E N C E H U B I N . L E PA R I S I E N . M A X P P P
Intoxication au monoxyde de
carbone dans une voiture GPL
Au collège
FrançoisTruffaut, où se
trouve le premier
«internat pour
la réussite».
Une femme et ses trois enfants qui circulaient à
bord d’une voiture GPL ont été intoxiqués par
du monoxyde de carbone échappé du moteur
défectueux, samedi après-midi dans la Drôme.
La voiture roulait sur l’autoroute A7 en direction
du nord quand la conductrice s’est aperçue que
ses deux enfants à l’arrière, deux jumeaux de
13 ans, étaient inconscients. Elle s’est arrêtée sur
l’aire de Donzère, au sud de Montélimar, et a avisé
une patrouille de gendarmerie. Appelés sur place,
les pompiers ont rapidement constaté que les
deux garçons, de même que leur mère et leur
sœur de 10 ans assise à l’avant, avaient été
victimes d’une intoxication très massive. «Si la
mère avait roulé cinq ou dix minutes de plus, on
peut supposer que les enfants seraient morts», a
estimé un pompier. Les intoxications au
monoxyde de carbone dans des garages ou des
lieux fermés sont fréquentes, mais il est
exceptionnel que ce gaz mortel et inodore
s’accumule dans l’habitacle d’un véhicule qui
roule, ont précisé les pompiers.
Une pierre dans l’internat
Une histoire
vitrine de Sarkozy à Asnières Guerre de tombe en Corse
Un «jeu» entre collégiens tourne mal dans cette structure pour élèves en
difficulté sociale ouverte au débotté en septembre et qui fermera en juin.
a Gazette des collégiens des Hautsde-Seine, publication du conseil général, se fait l’écho ces jours-ci «d’un
internat pas comme les autres». Celui du collège François-Truffaut, à
Asnières. En photo, sept garçons de cinquième, accueillis là grâce au conseil général. C’est le premier «internat pour la
réussite», ouvert en septembre à l’initiative du président du département, Nicolas
Sarkozy. Sa vocation: offrir aux élèves les
plus méritants, «mais perturbés par des
difficultés rencontrées à la maison», la possibilité de réussir leur scolarité. C’est un
fleuron du projet de loi sur la délinquance,
défendu par le même Sarkozy et qui sera
bientôt présenté en Conseil des ministres.
Ce que la gazette ne dit pas, c’est que l’internat va fermer ses portes à la fin de l’année, après tout juste une année d’existence. Pour le conseil général, cet internat n’a
jamais été autre chose qu’un ballon d’essai
d’une année scolaire avant l’ouverture
d’autres internats dans le futur.
Blagues et gages. S’il n’a officiellement aucun lien avec cette décision de fermeture,
un incident grave est survenu à l’internat
François-Truffaut le 4 janvier. Ce mercredi, l’assistant d’éducation chargé d’encadrer les pensionnaires reçoit les parents
de l’un d’eux au rez-de-chaussée. A l’étage,
les adolescents s’enferment à clé dans une
chambre. Ils se racontent des blagues, et
celui qui relate l’histoire la plus nulle reçoit
un gage. D’après le conseil général, il y a
dans la chambre deux meneurs, deux suivistes et un souffre-douleur. Qui prend des
claques et se voit planter un stylo à bille
dans les fesses en guise de gage, tandis que
les autres prennent des photos avec un téléphone portable. Le principal du collège a
fait un signalement au procureur. Celui-ci
a confié l’enquête à la brigade des mineurs
et attend les rapports d’expertises. Il n’exclut pas l’option pénale, en plus de mesures
éducatives. Pour le procureur, il s’agit d’une
agression à caractère sexuel, impliquant
L
une «notion de bizutage». Le conseil géné- la-Reine, Boulogne et Nanterre.
ral évoque, lui, «un jeu imbécile et des gages A Asnières, les travaux de construction
scabreux». Pour les parents des internes, d’un internat sont déjà en cours au collège
«le choc a été terrible», raconte une ensei- Auguste-Renoir. Des enseignants s’en ingnante du collège. «Si leurs enfants étaient quiètent. Le conseil général, propriétaire
restés chez eux, ils auraient peut-être ren- des murs, a fait évacuer le bâtimentA du
contré des difficultés pour se concentrer sur collège Renoir et fait transférer six salles
leurs devoirs, mais n’auraient certainement de classe dans des préfabriqués. Les trapas vécu ça!» L’affaire a fait peu de bruit. vaux vont bon train. Ce deuxième internat
Les deux meneurs ont été exclus et ren- pour la réussite doit être prêt pour la renvoyés dans leur collège d’origine. Les sui- trée2006. «Quid des statuts de cet internat,
vistes ont écopé d’une exclusion de huit des critères de recrutement des internes, de
jours. Mais les enseignants de François- son financement, des conventions signées
Truffaut ne décolèrent pas.
entre l’Education nationale et le conseil géPour eux, la précipitation du président du néral, des fondements idéologiques et pédaconseil général est en cause. En juin, ils gogiques d’une telle entreprise?»interroprennent connaissance du projet d’inter- gent des profs.
nat. Pendant l’été, Nicolas Sarkozy dé- «Elèves méritants». Au cabinet du recteur,
bloque 40000 euros au conseil général, on semble apprécier le dynamisme du
«réquisitionne un bâtiment»et inaugure président du conseil général. L’évaluason tout premier «internat pour la réussi- tion du dispositif et le suivi ne sont pas ente»en septembre. «Nicolas Sarkozy vou- core à l’ordre du jour. Les chefs d’établislait aller plus vite que Jean-Louis Borloo, sement du département sont censés
qui avait lui aussi
signaler à l’inspection
des projets d’in- Malgré la fermeture de la structure
académique
les
ternat, raconte d’Asnières, le conseil général des Hauts- «élèves méritants» à
un syndicaliste de-Seine, présidé par Sarkozy, annonce orienter vers l’«interde l’établisse- l’ouverture de nombreux internats dans nat pour la réussite»
ment.Il lui fallait le département «d’ici à 2010».
du collège Augustemonter très vite
Renoir. Il comptera
une opération médiatique. A la rentrée, il y 32places pour filles et garçons, un assisavait des caméras tous les jours au collège. tant d’éducation pour huit internes, une
Les internes se croyaient à la Star Ac, se chambre pour deux avec salle de bain, une
souvient le syndicaliste. Sarkozy a joué à pièce commune avec télé et kitchenette,
l’apprenti sorcier. Il exploite les difficultés et des ordinateurs.
sociales des gens pour faire sa pub. Seule «C’est l’internat que j’aurais aimé
l’annonce compte, le suivi n’existe pas.»
connaître», s’enflamme Isabelle Balkany.
Pluie de projets. Chargée des affaires sco- Conseiller municipal PS à la mairie d’Aslaires au conseil général des Hauts-de- nières et conseiller régional, Sébastien
Seine, Isabelle Balkany, reconnaît qu’au- Pietrasanta dénonce, lui, des internats qui
cun bilan ne sera tiré de l’internat «portent mal leur nom». Pour lui, Sarkozy
François-Truffaut: «Un échantillon de huit «impose des projets clés en main à des comélèves, c’est trop restreint.»Ce qui compte à munautés éducatives qui n’y sont jamais asses yeux, ce sont les projets à venir. Le sociées. Ces internats demandent un encaconseil général annonce une pluie d’inter- drement et un suivi spécifiques des élèves.
nats dans le département «d’ici à 2010»,à Mais, pour Sarkozy, c’est accessoire».•
Asnières, La Garenne-Colombes, BourgMARIE-JOËLLE GROS
En septembre, Emile Corticchiatio était tué par un voisin au
cours d’une querelle d’ordre familial. L’homme, jamais
condamné, était pourtant un responsable local du FLNC
et visiblement estimé de ses troupes. Celles-ci ont voulu lui
rendre hommage, selon la tradition. Un commando
d’hommes encagoulés est venu, lors des obsèques dans le
village de Santa-Maria-Siche (Corse-du-Sud), tirer une salve
en l’air et déposer une plaque signée «FLNC». Le préfet
de Corse n’a pas apprécié. Il l’a fait enlever. Mais les
magistrats ont estimé que ce n’était pas suffisant. L’homme
qui avait commandé la plaque chez le marbrier a été
interpellé avant Noël et conduit en avion militaire chez le
juge parisien antiterroriste Gilbert Thiel. Il est toujours
écroué. Samedi, 200 militants indépendantistes corses ont
déposé une nouvelle plaque: «En mémoire de notre frère,
patriote corse, travailleur, homme de convictions et militant
M.P.
du FLNC.» On attend la réaction des autorités.
Un homme enlevé, puis libéré
enSeine-et-Marne
Deux personnes ont été interpellées et placées
en garde à vue, samedi, dans le cadre de l’enquête
sur l’enlèvement d’un jeune homme de 22 ans,
jeudi soir à Lagny (Seine-et-Marne). L’homme
et la femme interpellés devaient être présentés
devant le juge d’instruction en fin de journée.
Le parquet a ouvert une information judiciaire
pour «enlèvement, séquestration en bande
organisée, violence aggravée et extorsion
aggravée». Entre quatre et six personnes seraient
impliquées dans l’enlèvement du jeune homme,
qui a été embarqué dans une voiture avant d’être
frappé à coups de poing et relâché à Sarcelles
(Val-d’Oise) quelques heures plus tard. La victime
s’est fait dérober plusieurs centaines d’euros.
«Manifestation» de détenus
Une centaine de détenus de la maison d’arrêt de
Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault) ont refusé
pendant plus de deux heures de regagner leur
cellule samedi après-midi, réclamant davantage
de respect de leur «dignité humaine». Selon le
porte-parole de l’Union fédérale autonome
pénitentiaire, le rapport très critique du
commissaire européen aux Droits de l’homme sur
les prisons françaises «n’est pas étranger» aux
revendications exprimées par les détenus, qui se
sont notamment plaints des nouvelles mesures de
sécurité mises en place, et plus particulièrement
des fouilles. Prévue pour accueillir 593 détenus,
la maison d’arrêt en comptait 783 dimanche.
vous
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006 ★
21
Vie citoyenne. Avec l’opération Pedibus, le ramassage scolaire est fait à pied par les parents.
AUNET L’école trottinière, affaire qui marche
S
Pour se faire
voir en peinture
e kitsch est en pleine
croissance. Exemple, avec
le site Une tête bien
faite(1), on peut offrir à ses
proches leur photo (ou pire:
la sienne) à la mode «Warhol
pop art», «BD», «fun style»ou
«peinture à l’huile». En plus,
cesfautes de goût sont
vendues comme «un cadeau
original à partir de 49euros».
Ou comment voir s’afficher
àcoup sûr le sourire gêné de
sesamis face à un présent pas
franchement indispensable.
Le principe: à partir d’une
photo numérique (son
meilleur pote, tante Rosette
ou soi-même pour les plus
narcissiques), les «artistes»
du site la transforment, grâce
à leur «savoir-faire», en une
sorte de tableau imprimé sur
toile ou papier, encadré
ounon. Les formats
atteignent 1,20mètre pour
les plus chers…
Ce cadeau n’est pas sans
risques. Les exemples du site
sont plutôt réussis dans la
version Warhol (pas difficile
avec du jaune, du bleu et du
rose sur une photo potable),
mais pas franchement
avenants pour la BD –vous
pouvez personnaliser les
phylactères– ou la véritable
peinture à l’huile. Il est aussi
plutôt cher. 49euros, c’est le
minimum. Comptez jusqu’à
890euros pour le top du top,
une huile sur toile avec deux
personnages. Enfin, c’est
uncadeau qui souffre du
syndrome «tante Hortense»:
offert avec ou sans cadre, il est
de toute manière destiné à
finir sur vos meubles ou vos
murs. C’est du moins ce que
pensent vos bienveillants
amis, tout sourire.
Dès lors, deux solutions:
1)Subir et faire subir en
permanence le regard de la
fameuse tante, revisitée par
Warhol ou Vinci. Vie de
couple en danger, dépression
presque assurée.
2)Opter pour l’exposition
temporaire de la ou des
œuvre(s), à chaque venue de
l’intéressé(e). Plus
confortable au quotidien,
cette option requiert toutefois
mémoire et dextérité.
Prix élevé, aspect incertain,
intérêt quasi nul. Un mauvais
avatar «moderne» de ces
peintres estivaux qui vous
tirent le portrait pour de vrai
dans les stations balnéaires.
L’authenticité en moins.•
L
JOËL CARASSIO
(1) www.unetetebienfaite.com
Nantes correspondance
ous son parapluie tête
de vache, le petit Pierre
fait «meuh!» à tous les
coins de rue. Apolline,
elle, serre sagement la
main de sa maman, qui arbore
un baudrier vert pomme. Ce
matin, dans le quartier de La
Ripossière, à Nantes, une dizaine de mômes suivent la
ligne Pedibus. Départ à 8h35
devant la boulangerie. Livraison des écoliers avant 9heures
à l’école Ledru-Rollin. L’idée,
qui a ses adeptes dans toute
l’Europe (lire ci-dessous), est
toute simple. Délaissant la voiture, les loupiots vont à l’école
à pied, en groupe, bien encadrés par des parents bénévoles. Papa ou maman confie
ses protégés au coin de la rue, à
des arrêts balisés. Trois
adultes accompagnent le cortège de bout en bout. Les instituteurs collectent alors les
feuilles d’émargement qui indiquent les enfants restant à la
cantine et/ou à l’étude du soir.
Congestion automobile. Les
parcours s’imaginent selon la
T H I E R R Y PA S Q U E T. E D I T I N G
Un site à la loupe
La ligne Pedibus dans le quartier Saint-Jacques, à Nantes, avec parents et écoliers.
Tout d’abord, les parents ne se
sont pas montrés enthousiastes, trouvant l’idée sympathique mais pas au point de
changer leurs habitudes. Depuis, les gros travaux d’implantation d’une ligne de
tram ont transformé le quartier en
«Les familles apprécient la qualité
de vie, la convivialité et l’engagement camp retranché.
Las de la congescollectif [dans l’opération].»
Emmanuelle Binet, de l’Agence de tion automobile
l’environnement et de la maîtrise d’énergie quotidienne, certains parents ont
topographie des quartiers et jugé l’initiative digne d’intérêt.
les adresses des jeunes partici- D’autant que dans le cul-depants. A Nantes, ces parents sac du tout petit parking de la
ont démarré par une seule maternelle, des parents stresligne, les mardis et jeudis. «La sés, pressés, coincés, ont failli
démarche vient de nous, pas des en venir aux mains.
collectivités, mais elles nous ont Enquête. Réalisée auprès des
bien aidés», dit Benoît Lesne, parents via les cartables, une
parent d’élève écolo qui a pré- enquête recense 70 familles
senté l’initiative il y a deux ans. partantes pour la formule. Sur
le papier. Sur le trottoir, seuls
quinze à vingt enfants ont pris
l’habitude de cette petite trotte de ramassage scolaire sans
car. Parfois moins l’hiver,
quand les enrhumés et les fri-
N.D.L.C.
NICOLAS DE LA CASINIÈRE
Internet Haut Débit
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Economie d’énergie et de risques
L’idée fait son petit bonhomme de chemin. Imaginé en 1991
parun Australien, David Engwicht, le Walkingbus a été adopté
en Suisse sous le nom de Pedibus, en 1998, et repris au Canada,au
Royaume-Uni, en France, aux Pays-Bas, en Belgique, en Italie et
en Allemagne. Dès 2002, Tremblay-en-France (Seine-SaintDenis) ouvre sept lignes menant à deux écoles. Des dizaines
d’autres villes ont aussi leurs pédibussiens: Lyon, Grenoble,
Annemasse, Gières en région Rhône-Alpes; Angers, Nantes, La
Montagne en Pays de la Loire; mais aussi Toulouse, Caen…
Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de
l’énergie), un marmot qui trotte au lieu de se faire trimballer en
voiture fait économiser 300kg de CO2 émis dans l’atmosphère
par année scolaire. En moyenne, les déplacements automobiles
d’un ménage français représentent un quart de ses émissions en
gaz à effet de serre. Réduire ces émissions en allégeant le trafic
pour les trajets courts, de moins de 2km, est la première
motivation des collectivités locales et de l’Ademe. Les parents
valorisent plutôt le gain de temps et l’éducation des petits à
l’usage de la ville, en évitant les encombrements et le stress des
départs précipités à l’école. Avec, en prime, un peu d’exercice,
salutaire en ces temps d’obésité menaçante. Sans oublier la
sécurité: la moitié des décès des moins de 14ans sont dus à des
accidents de la circulation, dont 44% ont lieu sur le trajet
scolaire. Vélobus, une version deux-roues, se développe sur le
même principe de convoi groupé et accompagné, sur une ligne
dont les arrêts sont à heures fixes.
leux retrouvent la voiture.
«Les premiers doutes des parents ont porté sur la pérennité
du système, surtout l’hiver,
quand il pleut, tout ça…», dit
Benoît Lesne. La dizaine de
parents investis fonctionne
avec des plannings réalisés sur
deux mois. Si des enfants ne
sont pas au rendez-vous, ça
n’est pas grave. En revanche,
les accompagnateurs, eux, ne
peuvent évidemment pas s’absenter. Une dame qui n’a pas
d’enfants participe régulièrement au Pedibus.
«Notion de parent». Ingénieure à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de
l’énergie (Ademe), chargée de
suivre ces projets, Emmanuelle Binet souligne que «les élus
en ont marre des demandes
d’élargissement de parking à
côté des écoles. L’idéal est d’effectuer un test au printemps et
que les parents se déterminent
pour la rentrée suivante. Dans
la durée, les familles apprécient
la qualité de vie, la convivialité
et l’engagement collectif. Ce qui
interroge sur la notion de parent, lequel se consacre strictement à son enfant et à lui seul
ou considère ce dernier dans sa
classe, l’école, la ville…».•
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22
économie
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
L’Arctique,
nouveau robinet à gaz
Le Canada relance un projet sans
précédent de pipeline de 1200 km
qui pourrait bouleverser la région.
Montréal de notre correspondante
P
de cette opération colossale, qui nécessiterait quatre années de travaux –soit le
plus grand chantier jamais réalisé dans les
Territoires du Nord-Ouest. Elles se sont
notamment inquiétées de la fonte du permafrost et de la montée du niveau de la
mer, dues au changement climatique, qui
menaceraient le gazoduc. «Est-ce qu’on va
dire aux gens du Sud comment vivre et comment se développer?»a vivement rétorqué
Rosemary Kutana, l’ancienne présidente
de la Conférence circumpolaire des Inuits.
Prudhoe
Bay
MER DE
Pôle
nord
magnétique
BEAUFORT
ALASKA
Ce
rc
l
ar e po
ct
iqu la ire
e
Inuvik
Ma
ckenz i e
lus de trenteans après la découverte d’énormes gisements de
gaz naturel dans les régions les
plus septentrionales des Territoires du Nord-Ouest, le projet
d’un pipeline de 1200kilomètres
reliant le delta du fleuve Mackenzie à la
province de l’Alberta (et au reste du marché nord-américain) est à nouveau au
cœur de toutes les discussions dans cette
région de l’Arctique canadien. Un temps
envisagée dans les années70, l’idée d’exploiter ces champs gaziers avait été abandonnée après un rapport de la commission Berger qui recommandait, en 1977,
un moratoire de dixans en raison notamment de l’absence d’accord avec les nations autochtones qui habitent la région.
Mais, en 2000, alors que la demande de
gaz naturel ne cessait de croître, le controversé projet est ressorti des cartons. Voilà
troissemaines, l’Office national de l’énergie du Canada a entamé une série d’audiences publiques: près de 140réunions
sont prévues cette année dans 27communautés de l’Arctique canadien. S’il reçoit le
feu vert des autorités, ce projet sans précédent, de 7,5milliards de dollars (6,3milliards d’euros), engendrera des bouleversements majeurs dans la région.
Hache de guerre. De fait, à Inuvik, à
200 km au nord du cercle polaire, des
associations canadiennes ont, la semaine
passée, multiplié les mises en garde contre
les impacts sociaux et environnementaux
YUKON
TERRITOIRES
DU NORD-OUEST
NUNAVUT
Yellowknife
ALBERTA
COLOMBIE Edmonton
BRITANNIQUE
MAN.
CANADA
Ottawa
300 km
ÉTATS-UNIS
Mais les espoirs de développement suscités par le projet au sein de la population
autochtone –avec un minimum de
15000emplois à la clé– finissent par faire
taire les plus sceptiques. Les ententes territoriales signées ces dernières années
avec les autorités canadiennes ont permis
d’enterrer la hache de guerre. «Pour regagner notre indépendance, notre autonomie
et notre fierté, il nous faut maintenant une
base économique», explique Fred Carmichael, à la tête du Aboriginal Pipeline
Group, qui rassemble trois des quatre nations autochtones concernées par le tracé
du pipeline et qui détiendra un tiers des
parts du gazoduc. Le consortium, dirigé
par Imperial Oil Ltd (filiale du géant américain Exxon), comprend aussi les sociétés
Conoco et Shell. Le gazoduc, qui transporterait de 22 à 28millions de m3 de gaz naturel par jour, permettrait d’augmenter de
10% les réserves canadiennes connues.
Concurrent. Surtout, il ouvrirait la porte à
l’exploration et l’exploitation d’autres ressources naturelles dans la vallée du Mackenzie et de la mer de Beaufort. «Le développement de ce corridor énergétique
mènera au développement, à long terme, de
tout le bassin», affirme le ministre de l’Industrie des Territoires du Nord-Ouest,
Brendan Bell. Les richesses de l’Arctique,
encore mal connues, font rêver. Selon certaines estimations, le quart des réserves
canadiennes de gaz naturel s’y trouverait.
Sans compter le pétrole.
L’Alaska voisin étudie lui aussi depuis plusieurs années un projet de gazoduc, qui
raccorderait les gisements gaziers de
Prudhoe Bay aux autres Etats américains
en passant par Fairbanks puis par le Canada. Avec une capacité trois fois plus importante, il est souvent présenté comme
un sérieux concurrent au projet canadien
–qui a toutefois trois à quatreans d’avan-
Fleuve Mackenzie
dans la région
du Yukon.
Cela fait plus de
trente ans que des
gisements de gaz
naturel ont été
découverts dans
les Territoires du
Nord-Ouest.
ce. Selon Winfried Fruehauf, un spécialiste des pipelines à la Financière Banque nationale, l’appétit insatiable des NordAméricains pour les énergies fossiles
laisse de toute façon de la place pour les
deux projets. Et il souligne que les Américains ont tout autant à gagner que les
Canadiens avec le projet gazier du Mackenzie: «Même si le discours a changé
depuis un an ou deux, beaucoup continuent
de penser que le gaz naturel du Mackenzie
sera en majeure partie envoyé dans les
sables bitumineux de l’Alberta, pour soutenir une production accrue de pétrole. Une
bénédiction pour Washington qui ne cesse
de répéter qu’il veut diversifier ses sources
d’approvisionnement en pétrole.»Gaz naturel ou pétrole, les Etats-Unis accordent
en tout cas de plus en plus d’importance
aux ressources du Grand Nord, terrestres
ou sous-marines. Et ne manquent pas une
occasion de rappeler qu’ils ne reconnaissent pas la souveraineté du Canada sur les
eaux de l’Arctique et ses richesses cachées.•
CAROLE DUFFRÉCHOU
30% des réserves dans le monde arabe
Les treize pays arabes du Moyen-Orient et les quatre d’Afrique
du Nord possèdent 30% des réserves mondiales de gaz,
presque autant que la Russie. Or, seuls six d’entre eux sont
aujourd’hui exportateurs, dont l’Algérie et le Qatar, aux
troisième et quatrième rangs mondiaux. Considéré comme
moins stratégique que l’or noir, le gaz servait jusqu’ici à la
consommation domestique et aux projets industriels nationaux
(pétrochimie, aluminium), tandis que le pétrole était quasi
exclusivement destiné à l’exportation. Un colloque organisé
vendredi par l’Institut du monde arabe à Paris et la chambre
de commerce franco-arabe a démontré que la dépendance
gazière de l’Europe et des Etats-Unis changeait la donne. Du
coup, Yémen, Egypte, Oman ou encore Emirats arabes unis
sont récemment devenus exportateurs. Et l’Arabie Saoudite
pourrait suivre le mouvement. (AFP)
économie 23
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Un quart
des cadres se
sent discriminé
Selon une étude,
les points sensibles sont
le sexe, l’âge, l’origine…
es cadres ne se sentent pas
à l’abri des discriminations à l’embauche. Plus du
quart d’entre eux en a ressenti
en lisant les offres d’emploi ou
lors d’entretiens de recrutement, selon une étude (1) publiée mercredi par l’Association pour l’emploi des cadres
(Apec). Un chiffre «en augmentation manifeste, commente Jean-François Amadieu, de l’Observatoire des
discriminations. D’habitude,
les personnes sous-évaluent les
discriminations dont elles sont
victimes.» Une hausse peutêtre liée au contexte politique
et médiatique.
Les cadres qui éprouvent le
plus la discrimination sont les
femmes, les plus âgés et les
moins de 30ans, les diplômés
de l’université (plus que ceux
des grandes écoles). Les cadres
citent par ailleurs «l’origine
réelle ou supposée» et le fait
d’être une femme (surtout
sans enfant) comme facteurs
de discrimination. Particularité: aux yeux du cadre, «le nondiscriminé, c’est l’autre», résume l’Apec. Par exemple, le
jeune diplômé considère souvent qu’une expérience de
vingt ans est un plus, alors que
le cadre aguerri juge cette expérience défavorable.
Si les offres d’emploi peuvent
exiger des diplômes élevés ou
un certain niveau d’expérience, les recruteurs «font preuve
de souplesse et de pragmatisme», remarque Jacky Chatelain, de l’Apec. Dans l’année
précédant l’étude, 45% des entreprises ont recruté au moins
un cadre qui avait un niveau de
diplôme inférieur à ce qu’elles
recherchaient. Côté candidats,
deux tiers des cadres tentent
leur chance même si l’offre ne
correspond pas à leur profil.
Constat personnel ou diagnostic sur des pratiques générales? 44%des recruteurs reconnaissent que les noms et
prénoms inscrits sur un CV
«peuvent jouer un rôle». Une
référence à l’origine ethnique,
illégale sur une offre d’emploi.
Cette statistique a «surpris et
choqué» Jacky Chatelain. Plus
attendu, selon lui, 70% des entreprises qui recrutent directement «reconnaissent donner de
l’importance à l’information
sur l’âge mentionné dans les
CV». Une mention prohibée
dans les offres d’emploi.•
L
Ma.H.
(1) L’étude Recrutement cadre:
sélectionner sans discriminer
s’appuie sur deux enquêtes,
réalisées en 2005 auprès de
500 entreprises et
1500 cadres et jeunes diplômés
en recherche d’emploi.
La Dresdner Bank rattrapée
par son passé nazi
Des historiens ont établi le rôle actif de la banque sous le IIIe Reich.
Berlin de notre correspondante
ême soixante ans
après la fin du
IIIe Reich, il y a
des vérités qui font
très mal. Ainsi, la
Dresdner Bank, la deuxième
banque commerciale la plus
puissante d’Allemagne, a été
obligée d’admettre publiquement vendredi qu’elle avait
joué un rôle très actif dans le
régime nazi. Il y a dix ans, la
banque aurait peut-être été
louée pour avoir assumé son
passé honteux. Mais son autoanalyse arrive un peu tard. En
effet, il y a deux sortes d’entreprises en Allemagne: celles qui
ont, de leur propre gré, demandé à un comité d’experts
d’examiner leurs archives
pour mesurer le degré de leur
implication dans le régime nazi, et celles qui ont traîné des
pieds. Dans la première catégorie, on trouve la Deutsche
Bank, qui a rendu ses conclusions dès 1995, et le chimiste
Degussa, dont l’ancêtre IG
Farben fabriquait le ZyklonB,
utilisé dans les chambres à gaz.
Longtemps silencieuse sur
son passé, la Dresdner fait partie de la seconde catégorie.
Indubitable. Lorsque le conseil
d’administration de la Dresd-
M
principal de Huta, l’entreprise
en bâtiment de Breslau, chargée à l’été 1942 de construire
les fours crématoires d’Auschwitz. Une fois les portes posées,
en avril 1943, Huta encaissa
133741,65 Reichsmarks de la
direction de la construction SS,
via un compte de la Dresdner.
Comme le soulignait fin janvier le quotidien de gauche Die
Taz (2) «la lecture de cette étude
devrait constituer une sacrée
surprise pour les salariés de la
banque».
Ecran de fumée. Car la Dresdner Bank a réussi durant près
de cinquante ans à jeter un
écran de fumée sur
son rôle prépondéLa Desdner Bank a, délibérément
rant pendant le
et systématiquement, cherché à se
IIIe Reich. Se
rapprocher du régime nazi. Au point
de devenir la banque conseil des SS.
contentant de rejeter la responsabilité
leurs conclusions sont indu- sur Karl Rasche, alors portebitables. La Dresdner Bank parole du conseil d’administran’était pas seulement une ex- tion de la banque, et jugé decroissance de la bureaucratie vant le tribunal militaire de
de l’armée nazie qui aurait été Nuremberg. Le mythe a percontrainte de suivre le mouve- duré jusqu’en 1992, date à lament. La banque a, délibéré- quelle la banque a célébré son
ment et systématiquement, 120e anniversaire. Certains
cherché à se rapprocher du ré- pourront se réfugier derrière
gime nazi. Au point de devenir l’idée que mieux vaut tard que
la banque conseil des SS. jamais. De fait, de nombreux
Exemple parmi d’autres, la instituts financiers, comme les
Dresdner était l’actionnaire caisses d’épargne allemandes,
ner Bank a décidé, en 1997, de
mandater une commission
d’historiens pour faire la lumière sur la période 19331945, il était essentiellement
guidé par le fait «qu’une indifférence prolongée de la banque à
l’égard de son attitude vis-à-vis
du national-socialisme risquait
plus de nuire à la banque que de
lui servir»,a déclaré vendredi
Klaus-Dietmar Henke, l’historien qui a piloté l’étude évaluée
à 1,6 million d’euros. Durant
huit ans, quatre historiens allemands ont compulsé douze kilomètres d’archives et écrit
2374 pages sur le sujet (1). Et
Citroën lance une
super C4 en Chine
ODILE BENYAHIA-KOUIDER
(1) Die Dresdner Bank im Dritten
Reich de Johannes Bähr,
Klaus-Dietmar Henke, Harald
Wixforth et Dieter Ziegler.
Oldenbourg Wissenschafts
Verlag, 79,80 ¤.
(2) Die Beraterbank der SS, article
paru le 27 janvier dans Die TAZ.
Le spécialiste des chaudières prévoit la suppression de 56 postes sur 530.
D
serait plus «qu’une
usine de montage. Côtesd’Armor
Une chaîne, ça se
démonte et ça se re- MANCHE
monte facilement»,
s’inquiète Chantal
Jouan, secrétaire Fin.
Morbihan
de la CGT (syndicat
majoritaire dans
l’entreprise). Un
risque de délocalisation?
«Plausible», juge Janine Tardivel, maire (PCF) de Ploufragan, où est implantée l’usine.
La mise au point de la direction est laconique: «Pas de volonté de délocalisation.»
Les emplois menacés sont
«indirects, en support à la production» (comme les postes
administratifs). «Grâce à l’accroissement des volumes, il n’y
aurait aucun impact sur la
main-d’œuvre directe», a assuré la direction. «Cinquantesixpostes, ce n’est qu’un début,
rétorque Chantal Jouan. L’expert que nous avons mandaté
prévoit au moins 80 emplois
menacés dans la main-d’œuvre
directe.» La syndicaliste estime par ailleurs que la direc-
tion veut «jouer la
division» des salariés en annonçant
un projet de réducSaintBrieuc
tion du personnel
indirect sur le site.
Un site qui, selon
Illeet-Vil. les syndicats, recourt à de nom40 km
breux intérimaires.
Et est piloté par un DRH.
«La lutte des salariés contre ce
projet est d’autant plus légitime
que rien d’autre ne le justifie
que l’amélioration, encore, du
compte en banque des actionnaires», affirme Martial Collet, de FO. D’après les syndicats, le site fait des bénéfices.
Quinze millions d’euros de dividendes versés en trois ans,
selon Chantal Jouan. Les élus,
eux non plus, ne sont pas tout
à fait convaincus par la stratégie du groupe italien. «A aucun
moment, je n’ai eu l’impression
que le projet industriel avait
un fondement économique»,
confie le maire (UDF) de
Saint-Brieuc, Bruno Joncour,
qui a participé à une table ronde, en janvier, en présence du
Le numéro 1 mondial des
médias, Time Warner,
a passé un accord avec
Carl Icahn, qui tentait de
renverser la direction.
Time Warner va
accélérer son
programme de rachat
d’actions comme
le souhaitait Icahn
et ce dernier renonce
à présenter au vote
des actionnaires
des administrateurs
concurrençant
la direction.
également impliquées dans le
système, n’ont pas franchi le
pas. Et la Commerzbank va
passer aux aveux prochainement. Pourtant, la reconnaissance des faits n’implique pas
forcément une volonté de «réparation» aux victimes. HerVillepin ouvre le CAE
bert Walter, l’actuel président
de la Dresdner, a admis «la resLes membres du Conseil
ponsabilité morale»de son insd’analyse économique
titut, mais ne voit pas la néces(CAE) ont été renommés
sité de relancer une procédure
pour deux ans par le
d’indemnisation. Ce qui peut
Premier ministre
paraître contradictoire avec
Dominique de Villepin.
la découverte de la «responsaParmi les 35 membres,
bilité pleine et entière» de la
plusieurs nouveaux noms
banque, mise à jour par les hisapparaissent dont
toriens. Témoignant d’un
Philippe Aghion,
manque de sensibilité étonprofesseur à Harvard, ou
nant, la Dresdner Bank a susciThomas Piketty,
té la semaine dernière une poprofesseur à l’EHESS.
lémique en annonçant son
intention de présenter l’étude
au Musée juif. Un lieu qui a paru tellement inapproprié que
la communauté juive s’en est Citroën (groupe PSA) a
émue. Et a réussi à faire dépla- dévoilé samedi la première
cer la manifestation.•
des deux nouvelles voitures
Licenciements chez Chaffoteaux et Maury
ouche froide pour les
salariés de Chaffoteaux
et Maury, spécialistes
de la chaudière et du
chauffe-eau. Dans les années
1970, les effectifs de leur usine, près de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor) ont grimpé jusqu’à 2200 salariés environ.
Cinq propriétaires plus tard,
ce «fleuron de notre savoirfaire industriel», comme le
dépeint la députée (PS) Danielle Bousquet, ne compte
plus que 530 postes, dont
56 sont menacés: en décembre, le propriétaire italien
MTS a présenté Galileo, un
projet de réorganisation industrielle, «capital pour la
sauvegarde de la compétitivité
et l’avenir du site». «Avec la
marque Chaffoteaux et Maury»,le groupe MTS ambitionne de «reconquérir le leadership du marché en France et
occuper une des trois premières places en Europe dans le
secteur du chauffage».
Actuellement, le site fabrique
puis assemble les composants.
Avec le projet industriel, il ne
Accord entre Icahn
et Time Warner
DRH européen de MTS.
Avant de s’inquiéter pour
l’avenir: «La décision prise en
appelle-t-elle d’autres?» «On
ne sait rien sur l’après 2007, ni
sur les projets futurs ni sur les
volumes», poursuit Chantal
Jouan, vingt-trois ans de
Chaffoteaux et Maury. Et de
citer l’expert mandaté qui
évoque, dans un rapport,
«l’avenir de l’entreprise en péril». Pour les salariés, l’incertitude persiste, tandis que les
discussions entre syndicats et
direction continuent.•
MATHIEU HAUTEMULLE
qu’il doit lancer cette année
en Chine, une berline de
gamme moyenne supérieure
baptisée «c-Triomphe»,
créée pour le marché chinois,
sur la base de la C4 vendue
en Europe. L’objectif de
Citroën est de vendre
50000 c-Triomphe en 2006,
à 20000 euros par véhicule.
En 2005, Citroën a écoulé
140000 automobiles
en Chine.
Petrobras, major
des profits
La compagnie nationale
pétrolière brésilienne
Petrobras a réalisé un
bénéfice record de
11,2 milliards de dollars en
2005, supérieur de 40 %
à celui de 2004.
Vente d’avions en Inde
ATR a signé hier
la vente de quinze
ATR 72-500 à la
compagnie aérienne
indienne Kingfisher
Airlines.
24
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
AFP
Fanara en
piste
C’est l’heure
de vérité pour
Thomas Fanara, 24 ans.
Inconnu en début de saison,
il était non sélectionné pour les JO mais fut
repêché in extremis. Par évidence (meilleur
géantiste français de la saison) et intense
lobbying de son entourage haut-savoyard.
turin2006
«Je suis probablement
Cachez cette marque
lepire skieur du plateau ici, Les marques de bouteilles d’huile d’olive italienne
pots d’herbes aromatiques qui garnissent
donc battre enfin quelqu’un ou
les snack-bars dans les installations olympiques
sont cachées par un adhésif opaque,
sera chouette.»
si ces marques n’entrent pas dans le cadre d’un
Le skieur sud-africain Alexander Heath,
avant le super-G de samedi. Il a terminé 50e sur 56.
contrat avec le Comité international olympique.
Defrasne,
l’ombre
l’or2006
turin
Biathlon poursuite messieurs.
Jusque-là éclipsé par Raphaël
Poirée, le Franc-Comtois
sort la course de sa carrière pour
emporter l’or olympique.
JOHN D MCHUGH. AFP
Biathlon. Poursuite messieurs
Or:Vincent Defrasne (Fra)
Argent:Ole Einar Björndalen (Nor)
Bronze:Sven Fischer (All)
aintenant il n’y
aura plus d’excuses à ignorer où se
trouvent Pontarlier, Les Granges,
Lièvremont ou
Morteau. Toutes ces bourgades si froides du Haut-Doubs
où se conçoivent, se pré- ● ● ●
M
de
à
turin2006
Vincent Defrasne
(à droite) devance
le Norvégien Ole
Einar Björndalen.
turin2006 25
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
cès acquis, tant il a mis du
temps avant de se dessiner.
Vincent Defrasne a encore
dans l’oreille les compliments
reçus pour sa première victoire individuelle en Coupe du
monde: c’était juste le 8 janvier, en sprint, à Oberhof,
La Mecque du biathlon allemand. Samedi, son tympan a
dû exploser. Tout le HautDoubs semblait avoir transhumé en Piémont. Pas des «tifosi» façon football mais des gars
et des filles de villages, coiffés
de bérets, armés de cornes de
brume et porteurs d’un immense amour, venus trinquer
en honneur d’un parent, un
presque cousin dont on sait les
heures, les jours et les mois
passés sur les skis à roulette
l’été et les planches l’hiver.
«Généreux». «Noël, dira Defrasne,c’est souvent bonjour et
au revoir.» A l’issue des saisons2001 et2002, cela aurait
pu être aussi adieu au haut niveau. Aux sacrifices
Au moment de la remise des médailles, pour de maigres
récompenses: une
Vincent Defrasne a eu une infime
poignée de pohésitation, comme une incrédulité
diums en relais, audevant l’intimidante vérité du sport.
tant d’accessits en
monstre du biathlon, le Nor- individuel. Et les gros titres
végien Ole Einar Björndalen, constamment pour «Raph».
alias le «Seigneur des an- Raphaël Poirée, partenaire
neaux» en raison de ses quatre d’équipe sympa mais lointain,
médailles de Salt Lake City. On jaloux de son indépendance,
connaît la suite: le suspense épanoui dans sa PME amoudiabolique et, dans l’équipe de reuse et sportive. Samedi, RaFrance, le trouillomètre à zéro phaël Poirée a abandonné
jusqu’à l’ultime seconde, la après le deuxième tir, les fixaprécipitation dangereuse du tions arrachées. Il s’est éclipsé
Français dans le dernier virage sans un mot. Trois échecs en
(«je me suis mélangé les pin- trois courses. L’encadrement
ceaux»), à la limite de la perte parle de scoumoune injuste,
d’équilibre puis ce sprint d’an- pas encore de fin de règne.
thologie, excitant et rageur. Un Il n’y a jamais eu jalousie dans
moment de pur bonheur.
cette histoire d’hommes, chi«Dans les tripes». Reste ce qui ches en sentiment avoués.
a pu faire la différence entre «Vincent, c’est un type généVincent, 28ans, né et installé à reux, droit, facile à coacher»,
Pontarlier avec sa femme Ca- dit Jean-Paul Giachino, son
therine, si dépouillé en titres, entraîneur et confident de
et Ole Einar, 32 ans, né à prédilection. «Une crème»,
Drammen (Norvège) mais vi- ajoute Sandrine Bailly en dépit
vant en Italie, patrie de sa de sa nouvelle déconfiture
compagne biathlète Nathalie dans la poursuite féminine du
Santer, Crésus ayant tout ga- matin. Bien que plus jeune,
gné: «Ma détermination et la Defrasne remplissait juscertitude depuis plusieurs jours qu’alors le même rôle que Baque j’avais ça dans les tripes,ex- verel: les seconds rôles valeupliquera Vincent avec beau- reux, durs au travail, se
coup de lucidité.Quand on m’a plaignant peu, solidaires, mais
annoncé que j’avais cinq se- dont une moue involontaire
condes de retard au dernier trahit quelquefois la lassitude
tour, je me suis surpris à penser de la demi-pénombre. Defrasque j’allais être deuxième, puis, ne a tenu bon. L’orgueil. La traau milieu de la boucle, je me dition familiale incarnée par
suis dit que ce n’était pas pos- Daniel, son père, très investi
sible, que je n’étais pas venu dans le comité départemental
pour ça et que j’allais me battre de biathlon. Le sentiment de
comme un lion.» Dans la tra- devoir envers tous les accros
duction anglaise, le lion est de- d’une discipline dépourvue de
venu un tigre mais on reste moyens mais riches en résuldans la catégorie des fauves tats. Defrasne les a salués quadominants que Defrasne a siment un par un, kiné, entraîlongtemps contemplés avec neur, farteur, comme le font
un mélange d’envie et d’im- les jeunes réalisateurs fauchés
puissance. A l’image de sa à Cannes ou aux oscars. «Sans
proche voisine (onze kilo- eux, je ne suis rien.»Sans lui et
mètres) Florence Baverel-Ro- Baverel, le bilan à mi-parcours
bert, couronnée en sprint jeu- du biathlon français frôlerait
di, le nouveau champion le vide sidéral.•
olympique va déguster comALAIN LÉAUTHIER
me un alcool hors d’âge le suc(envoyé spécial à San Sicario)
Ski de fond. Le relais français (4e) a déposé un recours contre la Suède (3e).
parent et s’aguerrissent
de futures gloires sans ego, capables au moment du sacre
olympique d’un bref mouvement de recul. L’a-t-on bien vu
samedi cette infime hésitation
de Vincent Defrasne au moment de la remise des médailles? Comme une incrédulité devant l’intimidante vérité
du sport: «Sûr, le premier, c’est
bien moi?» C’est tellement lui
qu’il faudrait n’avoir rien à
ajouter à l’exclamation étouffée de Christian Dumont, dit
Dudu, le directeur sportif du
biathlon français, quelques secondes à peine après la victoire de «la grenouille»: «Quelle
classe, quelle classe!»
Au fait pourquoi «la grenouille»? Ses jambes de sauteur, paraît-il. Des jambes dures et fatiguées quand Defrasne s’est
présenté dans le stade fraîchement reblanchi (de neige) de
San Sicario, collant aux Madshus, les skis préférés du
●●●
Chez lui, le quatuor italien
impose son train d’enfer2006
JENS MEYER.AP
2006
Sur la piste de Pragelato, hier. Un Français et un Suédois ont commis la même erreur de parcours, à l’origine du recours.
Ski de fond. Relais 4x10 km messieurs
Or:Italie
Argent:Allemagne
Bronze:Suède
e relais italien a rempli hier le
contrat qu’il s’était fixé. Fulvio
Valbusa, Giorgio Di Centa, Pietro
Piller-Cottrer et Cristian Zorzi l’ont
emporté, comme l’avait fait avant
eux le quatuor mythique de Lillehammer
en 1994, lorsque – entre autres –Marco
Albarello et Silvio Fauner avaient battu la
Norvège de Björn Daelhie sur ses terres.
Valbusa n’a pas oublié:«Ces quatre-là sont
nos guides et nous sommes leurs disciples.
On s’est construit grâce à eux.»
Depuis cette victoire incroyable, le fond
italien a toujours obtenu des résultats aux
Jeux (deuxième derrière la Norvège à Nagano et à Salt Lake City). Hier, c’est PillerCottrer qui a placé une accélération imparable dans la Montée du loup, lors de
l’avant-dernier relais, larguant ses sept
poursuivants, dont la Norvège (5e), à plus
d’une minute. Emmanuel Jonnier, troisième relayeur français, suivait la cadence
jusqu’à ce moment-là, mais il n’a rien pu
faire contre le démarrage de l’Italien.
Remontée. D’autant que dans le même
temps, comme il s’était engagé dans une
mauvaise direction, Jonnier a dû rebrousser chemin sur quelques mètres
pour rejoindre le tracé. Le même incident
L
a d’ailleurs fait l’objet d’une protestation Transalpins était pure fiction. «Vu comme
de la part des Français (4e). En effet, le Piller-Cottrer est parti, jamais je n’aurais
dernier relayeur suédois, Mathias Fre- pu le reprendre»,a déclaré Jonnier. L’Itadriksson, tombé dans le même piège que lien a procédé par à-coups. L’effort – ajouJonnier, a préféré couper pour rejoindre té à l’altitude – était en effet très difficile à
le parcours plutôt que de revenir sur ses produire.
pas. Et les Suédois se sont classés troi- Au mètre près. Au dernier relais, Zorzi a
sièmes de la course derrière les Alle- même tenté un accord avec Fredriksson
mands et devant les Français. La requête pour faire course commune et éviter un
tricolore a été refusée, mais un appel a été retour des Allemands. «Lorsque Piller est
déposé (la France a soixante-douze arrivé, il avait dix secondes d’avance, a exheures pour fournir des preuves).
pliqué Zorzi. Il a fallu que j’y aille seul et je
Sur le terrain cependant, Vincent Vittoz, n’ai pas l’habitude. Mais j’ai tenu.»Piller,
dernier relayeur tricolore et auteur d’une de son côté, ne voulait pas que la course se
remontée extraordinaire, était satisfait de termine au sprint pour Zorzi. Tout était
cette quatrième place: «Même si je ne calculé au mètre près. «Nous avions déciconnais pas la saveur d’une médaille olym- dé que si tout le monde était en groupe, Piepique, il me procure
tro devait attaquer
des sensations qui «J’avais très peur des Norvégiens
dans cette montée, a
doivent en être pro- mais notre glisse a été la meilleure.
expliqué Marco Alche. Je préfère être Ce tracé a été conçu pour nous.»
barello, le coach,
Marco Albarello, le coach italien du relais à l’issue de la courquatrième sur le
terrain sportif que
se. J’avais très peur
troisième sur le tapis vert.Franchement, je des Norvégiens mais finalement notre
suis content de ce résultat.»
glisse a été meilleure. Ce tracé nous
Une médaille était envisageable pour convient totalement. Il a été conçu pour
les Bleus, au vu de la prestation nous.» C’est aussi ce qu’a reconnu Frode
d’Alexandre Rousselet, le deuxième re- Estil, l’un des Norvégiens, qui a présenté
layeur en classique, qui a permis de garder des excuses nationales. Désormais, dans
le contact avec le peloton de tête. Dou- le match Norvège-Italie, les Nordiques ne
zième après le premier relais, Rousselet mènent plus que par trois titres à deux.
est rentré dans le paquet. Ensuite, tenir de Prochain épisode dans quatre ans. •
bout en bout le rythme imposé par les
DINO DIMEO (envoyé spécial à Pragelato)
26 turin2006
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
jetil-Andre Aamodt
ressemble à un diable
sorti d’une boîte à
trolls. Le sourire imperceptible derrière
une barbe entretenue depuis
des années, l’œil malin, le
«vieux» colosse norvégien n’en
revient pas: «J’avais un bon
sentiment malgré ma blessure
au genou. Et maintenant l’or!
C’est incroyable. J’ai eu de la
chance dans les grands événements.» Chance? Aamodt
représente le palmarès du ski
alpin à lui tout seul. Mais la médaille d’or en super-G, samedi,
est sans doute la plus belle récompense de sa longue carrière. A 34ans, Kjetil-Andre remporte sa vingtième médaille
SKI ALPIN. Kostelic au Panthéon. Même en condition
(Mondiaux et Jeux olympiphysique précaire, la Croate Janica Kostelic s’est montrée
ques confondus), son 4e titre
irrésistible samedi dans le combiné, devenant la première
femme de l’histoire olympique hivernale à remporter quatre olympique, un record absolu qu’il partage depuis ce weektitres olympiques en ski alpin. La star de Zagreb, 24 ans, a
end avec la Croate Janica Kosdevancé l’Autrichienne Marlies Schild et la Suédoise Anja
telic. «C’est rare de défendre
Paerson, sa grande rivale, qui a dû se contenter du bronze.
victorieusement un titre olympique, seul Tomba l’avait fait
avant moi.»Lorsqu’il apparaît
pour la première fois surles tablettes à Albertville, en 1992,
avec deux médailles (or en super-G et bronze en slalom), la
Norvège se découvre alors
douée pour le ski alpin. Il reviendra de Lillehammer en
1994 avec troismédailles, ratera le rendez-vous de Nagano 98 pour mieux rebondir
SAUT A SKIS. Sang neuf autrichien. Les
avec deux titres olympiques à
Autrichiens Thomas Morgenstern et Andreas
Salt Lake City. La médaille de
Kofler, copains de chambrée et souvent associés
samedi, il va la garder précieusous le qualificatif de petits prodiges, ont volé la
vedette aux favoris finlandais et norvégiens sur le sement: «En 2003, toutes mes
grand tremplin de Pragelato, samedi soir. Pour l’or, médailles ont été volées dans la
maison de mon père. Peut-être
Morgenstern, 19 ans, a devancé son aîné de deux
ans de 18 cm seulement. Le Norvégien Lars Bystöl, qu’il les a vendues. En tout cas,
le lendemain il avait une nouun temps en tête, termine finalement troisième.
velle Porsche…»
Cador. Une telle longévité impose le respect de ses adversaires les plus coriaces, tel l’Autrichien Hermann Maier,
deuxième, samedi. Car Aamodt n’est pas là par hasard. Il
fallait avoir les nerfs pour tenir
le rythme d’un super-G disputé en deux parties. La course,
lancée en pleine tempête de
neige, a été suspendue après le
passage de 17concurrents. Le
Français Pierre Emmanuel
SHORT TRACK. Une affaire coréenne. Samedi, la
Dalcin se trouvait alors bien
Corée du Sud a réalisé deux doublés. Sur le
installé en tête, la neige fraîche
1500 m dames, remporté par la championne du
ralentissant tous les autres
monde en titre Jin Sun-yu devant sa compatriote
Choi Eun-kyung (toutes deux en tête sur la photo) concurrents. Puis, tout le monde fut renvoyé au départ. Dalet la Chinoise Wang Meng. Sur le 1000 m
messieurs, Ahn Hyun-soo s’est imposé devant son cin ratait son deuxième passage, finissait sa descente dans
compatriote Lee Ho-suk et l’Américain Ohno.
MIKE SEGAR. REUTERS
GIAMPIERO
2006
FA B R I C E C O F F R I N I . A F P
Super-G messieurs
Or:Kjetil-Andre Aamodt (Nor)
Argent: Hermann Maier (Aut)
Bronze:Ambrosi Hoffmann (Sui)
K
travail acharné. «Il y a des boulots bien plus difficiles dans la
vie,reconnaît-il. Moi, je ne suis
pas encore fatigué, même si je
sais que mon corps est bon pour
les cours d’anatomie. Il contient
plus de clous qu’une quincaillerie!» Kjetil-Andre est un gros
bosseur. Yves Dimier, ancien
slalomeur de chez Dynastar,
voit surtout en lui la force tranquille d’un tempérament nordique: «Il est réservé et très
froid. Mais c’est quelqu’un de
surprenant. Lorsqu’il est dans
une colère noire, et un doigt sa chambre, on a l’impression
d’honneur qui lui vaut une qu’il marche au ralenti, à 20%
amende de 5000francs suisses de ses moyens. On le surnomme
le loir. Mais dans un portillon de
(environ 3200 euros).
Souffrance. Imperturbable de départ, il sait être à 100%.» Kjedétermination, Aamodt avait, til est surtout exigeant sur le
lui, attendu en silence près de matériel, mais pas pointilleux.
quatre heures avec les cadors, «Une fois qu’il a ce qu’il veut, il
dans le froid. «C’est un skieur ne se plaint jamais. Si ça ne
d’exception, reconnaît Mauri- marche pas, il assume.»
ce Adrait, ancien entraîneur Aujourd’hui, le Norvégien
de l’équipe de France. Depuis trouve la vie très belle et on le
quatorzeans, il arrive à se pro- comprend. Marié à une dangrammer pour un objectif très seuse du ballet de Monaco, il se
complaît depuis
trois semaines dans
«Lorsqu’il est dans sa chambre, on a
le rôle du papa poul’impression qu’il marche au ralenti.
le avec sa petite fille
On le surnomme le loir. Mais dans un
portillon de départ, il sait être à 100 %.» Erle. Et tout le
Yves Dimier, un ancien slalomeur monde le voit prendre une retraite
précis.» Blessé à de nombreu- méritée. Tous, sauf lui: «Je n’ai
ses reprises, le Norvégien a aucun plan de retraite. Peuttoujours refait surface lorsque être serai-je encore là à Vancouplus personne ne l’attendait. ver en 2010. Car jusqu’ici, je n’ai
«Il donne l’impression qu’il ne jamais eu l’impression de faire
reviendra plus au haut niveau des sacrifices.» •
et puis, d’un coup, le revoilà en
DINO DIMEO
logique vainqueur, continue
(envoyé spécial à Sestrières)
Adrait. En descente, il y a une
semaine, il avait ressenti une
petite douleur à un genou. Il a
préféré renoncer à défendre son
titre en combiné pour se reprogrammer sur le super-G. La
preuve qu’il se connaît parfaitement.»
Habitué à la souffrance, Aamodt a traversé bien des tempêtes. Une mononucléose à Albertville, un genou cassé parci, une cheville par-là… À chaque fois, il remonte la pente
jusqu’au sommet, fruit d’un
L’épreuve
féminine reportée
Prévu hier, le super-G dames
a été annulé en raison
des chutes de neige et du
brouillard régnant à San
Sicario. La course aura lieu
aujourd’hui à 12h00, entre
les deux manches du slalom
géant messieurs.
Tableau des
médailles
OR
Allemands Andre Lange et Kevin Kuske (photo)
ont remporté hier soir l’épreuve de bob à deux,
devant les Canadiens Pierre Lueders et Lascelles
Brown, médaillés d’argent, et les Suisses Martin
Annen et Beat Hefti, qui se retrouvent en bronze.
Lange et Kuske ont déjà goûté l’or (en bob à
quatre) en 2002 à Salt Lake City.
Saut à skis. Grand tremplin
par équipes (18 heures)
Patinage artistique. Danse,
programme libre (19 heures)
Hockey sur glace. Finale
pour la troisième place dames
(16h30) et finale (20h30)
ARG
ENT
BRO
NZE
2006
BOBSLEIGH. Les Allemands roulent sur l’or. Les
Aamodt, inusable
remonte-pente
OLIVIER MORIN. AFP
MICHAEL KAPPELER . AFP . DPP
Super-G messieurs. Quatrième or olympique pour le Les finales du jour
alpin. Géant messieurs
Norvégien de 34 ans qui enchaîne titres… et blessures. Ski
(9h30)
7
7
6
4
3
3
3
3
2
2
2
2
2
1
1
1
0
0
0
0
0
0
0
7
4
2
5
3
0
0
0
7
6
2
2
1
2
1
0
2
2
1
1
1
0
0
Pays
Allemagne
Etats-Unis
Russie
Autriche
Corée du Sud
Italie
France
Estonie
Norvège
Canada
Suisse
Pays-Bas
Suède
Chine
Croatie
Australie
Finlande
Rép. tchèque
Gr.-Bretagne
Bulgarie
Slovaquie
Ukraine
Lettonie
Total
4
2
5
1
1
4
2
0
7
5
4
2
3
4
0
0
3
0
0
0
0
1
1
18
13
13
10
7
7
5
3
16
13
8
6
6
7
2
1
5
2
1
1
1
1
1
Podiums du week-end
• Ski de fond. Relais 4x5 km
dames
Or: Russie
Argent: Allemagne
Bronze: Italie
• Biathlon. Poursuite dames
Or: Kati Wilhelm (All)
Argent: Martina Glagow (All)
Bronze: Albina Akhatova
(Rus)
• Patinage de Vitesse.
1000 m dames
Or: Marianne Timmer (P-B)
Argent: Cindy Klassen (Can)
Bronze: Anni Friesinger (All)
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006 ★
turin2006 27
Dopage. Un entraîneur
interdit de JO depuis 2002
a été vu avec l’équipe.
HOCKEY SUR GLACE
Les Suédoises
s’invitent en finale
Perquisition
chez les athlètes
autrichiens
La Suède participera ce
soir à sa première
finale mondiale, face au
Canada, champion
olympique en titre.
Vendredi soir,
à la surprise générale,
les Américaines ont
été battues aux tirs au
but 3-2 (2-2 après
prolongation). De leur
côté, les Canadiennes
étrillaient les
Finlandaises 6-0.
2006
Turin envoyé spécial
es Jeux tiennent leur blitz.
Samedi soir, les stups italiens ont investi une résidence privée louée à San Sicario par des membres de
l’équipe d’Autriche: six fondeurs et quatre biathlètes ont
ainsi fait l’objet d’un contrôle
antidopage urinaire, leurs
chambres ont été fouillées
ainsi que les chambres de certains athlètes autrichiens
logeant à Sestrières.
«Tout le monde connaît celui
qui était visé», a expliqué hier
matin Mario Pescante, soussecrétaire d’Etat aux Sports et
superviseur des Jeux. Il parle
de Walter Mayer, directeur
technique national du biathlon et du ski de fond autrichien. Il y a quatre ans, à Salt
Lake City, une femme de ménage avait trouvé dans l’appartement qu’il occupait du matériel de transfusion: deux de ses
athlètes – dont Marc, son fils –
furent convaincus de manipulation sanguine, et Mayer fut
suspendu par le CIO de toute
activité jusqu’en 2010. Il est
réintégré comme directeur
sportif dans son pays en 2005.
Or, Mayer apparaît sur une
carte postale ceinte du logo
olympique où il pose au milieu
de l’actuelle équipe de ski de
fond–comme s’il était membre du staff olympique. L’encadrement autrichien l’a confirmé : Mayer a occupé la
maison perquisitionnée, même s’il n’y était plus hier soir.
Et pour cause : il était rentré en
Autriche, où il a embouti une
voiture de police qui tentait
de l’arrêter.
Selon le quotidien italien La
Repubblica, un sac contenant
des produits aurait été jeté à
travers une fenêtre par un athlète occupant la maison juste
avant l’arrivée des policiers.
Des médicaments pour combattre l’asthme – non-assortis
d’une prescription – auraient
été retrouvés ainsi que des seringues. Le résultat des tests
sera donné aujourd’hui ou
demain par le CIO. Pour les
saisies, c’est à la police de
communiquer.
Mayer a été mis en examen
hier pour avoir «favorisé l’utilisation de produits et de substances interdites». La Fédération autrichienne de ski l’a
licencié, hier soir, de son poste
d’entraîneur national de fond
et de biathlon. Les biathlètes
Wolfgang Perner et Wolfgang
Rottman ont, eux, été exclus
de la délégation olympique
autrichienne, officiellement
pour avoir quitté Turin sans
autorisation.•
G.S.
L
MAX ROSSI . REUTERS
VIP
Clooney, Pitt et Cindy
Crawford attendus
Shani Davis, lors
du 1000 m, samedi.
Patinage de vitesse. Sacré sur 1000 m, l’Afro-Américain Shani Davis avait
refusé de participer au relais, provoquant une polémique dans son pays.
Malaise américain autour du
premier or noir des JO d’hiver
Patinage de vitesse. 1000 m messieurs
Or:Shani Davis (E-U)
Argent:Joey Cheek (E-U)
Bronze:Erben Wennemars (P-B)
ûr qu’ils reviendront, les milliers de
Néerlandais qui remplissent à 80%
l’Ovale turinois, théâtre depuis le
début de la quinzaine olympique
des épreuves de patinage de vitesse.
Ils feront claquer les fanfares – Volare à
plein volume – et se lèveront sans amertume pour applaudir un Américain; l’un de
ceux qui enfoncent les patineurs orange au
fond des podiums. Le Texan Chad Hedrick
avait remporté le titre sur 5000m le weekend dernier. Samedi, c’est le Chicagoan
Shani Davis, 23ans, qui a claqué le 1000m,
«THE distance», comme on dit outreAtlantique. L’Ovale est orange, mais ses
entrailles sont bleu nuit, comme la combinaison des patineurs des Etats-Unis.
Surjouer les Atrides. Depuis le début des
Jeux, toute la presse américaine vient
pour Hedrick, le bon mec, l’Américain
bien tranquille venu à Turin pour égaler
le record d’Eric Heiden à Lake Placid en
1980: cinq fois l’or sur 1000 m, 1500 m,
5000 m, 10000 m et poursuite. Le truc,
c’est qu’Hedrick est planté depuis mercredi et l’échec du relais américain lors
de la poursuite, parce qu’un patineur ne
l’a pas disputé pour ne pas obérer ses
chances en individuel. Ce traître, ce type
sans loi «qui attente à l’esprit olympique»
(un observateur américain), il se trouve
que c’est Davis. Hedrick: «Ce relais, je le
devais à mon équipe et à mon pays.»
Après sa victoire samedi, Davis n’a pas eu
un regard pour ses compatriotes. Il est
parti fêter ça devant un kop orange, avant
d’enlacer le Néerlandais Erben Wenne-
S
mars, 3e. Ensuite, il est parti affronter une Davis a répondu évasivement, se réfugiant
presse américaine à la fois disposée à sur- dans une posture qu’on devine plus natujouer les Atrides – ces patineurs cousus relle: celle d’un type timide, tenté de jouer
d’or qui se déchirent sur l’Olympe –; et avec des trucs qu’il sait ne pas maîtriser.
gênée par le politiquement correct: Davis Le Chicagoan souffre. Ce patineur uniest le premier Afro-Américain à décro- que, champion du monde junior en short
cher une médaille d’or individuelle lors track et sur longue piste à 17 ans, s’est fait
virer de sa sélection en 2005 pour avoir
des Jeux d’hiver.
Le gaillard prend place. Les yeux mi-clos, refusé de remplacer sur sa tenue son sponqui se plissent encore un peu plus quand il sor personnel – une banque néerlandaise
sourit. «Je crois que la pire expérience qu’il – par celui de l’équipe américaine. Il a
m’a été donné de vivre dans ce sport, c’est trouvé refuge à Calgary (Canada), où il
d’être dans ce milieu-là. Je veux dire: ce n’est s’entraîne avec ses«vrais amis».Le coach
ni le basket, ni l’athlétisme. Un Afro-Améri- américain: «Je ne parle plus de Davis, je ne
cain champion olympique sur grande piste, veux pas d’histoire avec lui.»
c’est comme crever un plafond.» Malaise. Le salaud de l’histoire. Samedi, l’intéressé
«Vous me parlez du relais? OK. Mettons que a dû monter au front pour ne pas se laisser
les Etats-Unis déclarent une guerre. Il y enterrer par son compatriote Joey Cheek
a ceux qui partiront se battre et ceux qui (2e), qui expliquait, dans un anglais suave,
diront: “Non, je n’y
reverser toutes ses
vais pas.” Je ne vois «Les gens disaient qu’ils voulaient que primes olympiques
pas pourquoi les je tombe et que je me casse une jambe, «à des organisaseconds seraient ils utilisaient le mot qui commence
tions qui s’occupent
moins patriotes que par “n” [nigger, négro, ndlr].»
des petits enfants du
Shani Davis Soudan». A cet insles premiers. Ils servent leur pays autretant, Davis opinait
ment, en travaillant et en payant des impôts, du chef de façon un peu forcée, comme s’il
par exemple. J’ai fait du short track et je avait éprouvé le besoin de ne pas passer
peux dire: voilà un sport collectif. Je dis pour le salaud de l’histoire. Le Néerlanaussi: le patinage de vitesse est un sport in- dais Erben Wennemars, médaille de
dividuel. Rien n’était organisé autour de ce bronze, était passé avant eux. Il avait parrelais; on ne nous a jamais réunis – même lé de Davis: «Je le connais très bien, car il
deux jours – pour bosser ce truc. Quand vous patine souvent aux Pays-Bas. Il me souhaivous mettez en route, il faut les godasses aux te toujours bonne chance avant les courses,
pieds.»Voilà pour la première salve.
il est d’ailleurs le seul. Je l’ai entendu parler
La deuxième fut brève, électrique: «Les de la difficulté d’être un patineur noir. Moi,
gens disaient qu’ils voulaient que je tombe j’ai toujours vu un type qui patine depuis
et que je me casse une jambe, ils utilisaient ses 6ans, un type comme nous. A part ça,
le mot qui commence par “N”(il veut dire Davis est la crème des mecs: ouvert, gentil,
Nigger, Négro).»Ceux qui lui faisaient fa- avec des conversations passionnantes.» •
ce ont relancé sévère, à plusieurs reprises.
GRÉGORY SCHNEIDER (envoyé spécial à Turin)
Les acteurs américains
Brad Pitt et George
Clooney, ainsi que le
mannequin Cindy
Crawford sont attendus
à Turin. Les deux
premiers invités par
la chaîne NBC, la
troisièmeafin de tourner
une publicité pour
une marque de montre
partenaire des JO.
2006
CÉRÉMONIE DE CLÔTURE
Berlusconi
pour finir les Jeux
L’ancien maire de New York,
Rudolph Giuliani,
le président russe Vladimir
Poutine, le fondateur
de Microsoft Bill Gates, ont
annoncé leur présence
à la cérémonie de clôture.
Le chef du gouvernement
italien Silvio Berlusconi,
absent de la cérémonie
d’ouverture, en sera aussi.
SÉCURITÉ
Carabiniers trop zélés
Le préparateur des skis
de la Suédoise Anja
Paerson, Alkes Sopotnik,
a pesté contre
les carabiniers qui, trop
nombreux, l’ont
empêché d’approcher
la skieuse lors d’un
entraînement: «Il y avait
tellement de policiers
et militaires dans la
cabane de départ que
je n’ai pas pu rentrer.»
MÉDAILLE
Le mystère du trou levé
Une brochure officielle
donne la signification
du trou qui se trouve au
milieu des médailles:
«L’espace vide est censé
être en place sur la
poitrine, là où battent le
cœur et la vie.»
liberation.fr
• A lire, notre blog:
«Quinze jours aux Jeux».
• A voir : Révisez
vos sports olympiques.
28 sports
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
L I O N E L C H A R R I E R . M .Y.O. P.
«J’ai fait tout ce
que Tapie m’a
demandé de faire,
car j’ai toujours
cru en lui.»
Jean-Jacques Eydelie, condamné dans l’affaire OM-VA et en procès avec Tapie
après des révélations sur le dopage à l’OM, défend toujours son ex-patron.
«Tapie m’a tenu au chaud,
il assure même ma survie»
près treize ans de silence, Jean-Jacques
Eydelie, ancien joueur de l’OM condamné
pour corruption active dans l’affaire OMVA, publie ses confessions (1). Un mois
avant leur parution, l’Equipe magazine a
créé l’événement en consacrant un article sulfureux
à l’ancien joueur, aujourd’hui au RMI. Mis en cause,
Bernard Tapie porte plainte contre Eydelie. Tout
cela fait couler beaucoup d’encre, même si personne
n’avait encore lu l’ouvrage.
Votre livre a été annoncé comme un brûlot,
un réquisitoire contre Bernard Tapie. C’est
loin d’être le cas….
Il faut bien différencier mon livre de l’article paru
dansl’Equipe magazineen janvier. Il ne s’agissait ni
de mon livre, ni de mon histoire. On a utilisé mes déclarations pour créer un nouveau scandale et enfoncer Tapie. Tout a été fait dans l’histoire OM-VA pour
détruire Tapie. C’est un fait. La justice, les instances
du foot, les politiques y sont parvenus. L’unique but
de l’affaire était de descendre Tapie dont l’ambition
politique dérangeait. Parce que la corruption dans le
foot, elle est présente, bien au-delà d’une histoire à
250000 francs.
Bernard Tapie serait donc la victime?
Il est victime de lui-même. On a utilisé tous les
moyens pour le descendre en 1993. La cible, dès le
A
Eydelie,
19 ans de foot
• 1984. Débuts
professionnels à Nantes.
• 1992. Transfert à Marseille.
• 20 mai 1993. Match
Valenciennes-Marseille (0-1).
• 26 juin 1993. Mise
en examen pour corruption
active. Incarcéré
jusqu’au 13 juillet.
• 27 avril 1994. Suspendu
deux ans par la Fédération
internationale.
• 15 mai 1995. Condamné à
un an de prison avec sursis.
• 1995-97. Rejoue à Bastia.
• 1997-99.
Transféré à Sion (Suisse).
• 2000-2003. Evolue à
Avranches (CFA 2) puis
entraîne Beaucaire (CFA).
Il m’a juste tenu au chaud et il me donne un minimum pour assurer ma survie. Il n’avait pas confiance en moi et m’a éloigné, de peur que je craque. Je l’ai
rarement rencontré mais j’ai fait ce qu’il m’a demandé de faire, car j’ai toujours cru en lui. Au fond, je pense qu’on se ressemble beaucoup. Je vais vous étonner, mais je souhaite vraiment qu’il se présente à la
prochaine présidentielle. Je pense qu’il peut apporter beaucoup au débat politique.
On parle bien de l’homme avec qui vous êtes en
procès…
Il se défend. Pour lui tout est bon. Les micros se tendent et il m’insulte, me traite de «petite frappe», etc.
C’est sa méthode. Il impressionne encore beaucoup
de monde. Moi un peu moins, car je le connais.
Depuis douze ans, votre vie ressemble à une
fuite hallucinante. De quoi aviez-vous peur?
Les écoutes, les cambriolages, les micros, les menaces, la surveillance: tout ça, je l’ai vécu. C’est ce qui
m’a poussé à déménager constamment. Et puis il y
avait la peur d’affronter les autres, de ce qu’ils pourraient dire. J’étais en cavale…
«En cavale»? Mais vous avez été jugé
et condamné pour l’affaire OM-VA…
Je savais que j’étais toujours dans le mensonge, et je
vivais dans la peur des représailles.
Quel type de représailles?
J’avais peur de prendre une balle. Le foot draine
beaucoup d’argent, et là où il y a de l’argent, le milieu
n’est jamais très loin. Il est même très présent. Il n’y
a qu’à voir tous ces agents qui grenouillent autour du
foot et qui viennent de je ne sais où. Soit on occulte le
problème, et à ce moment-là on accepte que la mafia
gère directement l’OM, soit on s’y attaque véritablement. Quand je parle d’avoir eu peur de prendre une
balle, ce n’est pas du flan. Des joueurs de l’OM ont eu
des pistolets dans la bouche…
Qui? Pourquoi?
Des joueurs qui voulaient renégocier des contrats. Il
s’est passé des choses beaucoup plus graves que mon
histoire. On parle de mafia, là, plus du tout de foot.
Le tableau que vous dressez du monde
du football est apocalyptique, entre dopage,
corruption, milieu…
Je n’invente rien. Les arrangements et combines que
je rapporte dans le livre ont toujours existé. Tout le
monde sait que de nombreux matchs ont été achetés
avant et après OM-VA. Tous les exemples cités sont
connus. On se sert de moi, le «corrupteur»,pour tout
déballer et vendre du papier. Sur la tentative de corruption à Nantes en 1990 –quand l’OM a proposé
une prime aux Nantais en cas de victoire contre Bordeaux–, l’entraîneur, Blazevic, a été condamné.
Vous prêtez aussi le flanc à la rumeur
en suggérant d’autres faits de corruption…
Je cite le fameux match que le PSG a laissé filer
contre Bordeaux pour que l’OM perde le titre, en
1999. Tout le monde sait que des joueurs parisiens
avaient reçu 50000et 100000 francs. Personne ne le
dit, pourquoi? Je cite aussi la rumeur d’achat de
joueurs de Milan par l’OM (lors de la finale de la Coupe d’Europe des clubs champions, en 1993, ndlr),mais
c’est pour rappeler que Jean-Pierre Papin s’est exprimé là-dessus. Pourquoi ses propos n’ont-ils pas
été entendus? Beaucoup de choses ont été dites par
d’autres que moi et personne n’a trouvé utile de pousser plus loin les investigations.
En revanche, vous n’épargnez pas
Didier Deschamps, qui porte lui aussi plainte
contre votre livre…
Je trouve justement qu’il a été épargné par le milieu,
qui le dénigre pourtant. Il est responsable de pas mal
de choses me concernant. Pourquoi n’a-t-il pas accepté de dialoguer avec moi? Je ne vois pas où est son
but, à part protéger coûte que coûte Bernard Tapie.
Deschamps, c’est une icône dans le monde du foot:
champion du monde et champion d’Europe. Lui
pourrait faire changer les choses, s’il parlait… Si les
anciens ne font pas le ménage, qui le fera? La bande
à Platini aussi est aigrie. Ils en savent beaucoup sur
les magouilles, le dopage… A quoi sert Michel Platini
aujourd’hui, à part à dire qu’il faut des arbitres derrière les buts? Je voudrais qu’il dénonce publiquement les dérives du foot.•
départ, c’était lui. On voulait sa peau, et on l’a eue. Noël
Le Graët et Jean Fournet-Fayard m’avaient même
proposé un marché hallucinant: tu nous donnes Tapie et on te permet de rejouer. J’ai refusé, le procédé
était scandaleux. A l’inverse, Jean-Pierre Bernès a accepté de lâcher Tapie, je pense que c’est sans doute
pour ça qu’il est aujourd’hui agent de joueurs.
Pourquoi avoir tout supporté pour Tapie?
Par faiblesse. J’ai fait ce qu’on m’a demandé de faire.
Le bon soldat qui obéit au patron. J’en suis assez fier.
Pour moi, le plus grave, c’est d’accepter de l’argent. Ce
que j’avais refusé en 1992, quand je jouais à Nantes.
Cette fidélité à la parole donnée est étrange…
J’ai été naïf, bête. J’ai baissé pavillon et je n’ai pas su
dire non à l’argent. Je m’en veux. Dans ces momentslà, tu n’es pas un homme, tu es une merde.
Pourquoi tout déballer maintenant?
Pour me reconstruire, j’avais besoin de passer à
confesse. Je viens d’avoir 40 ans, j’ai cinq enfants magnifiques, je veux pouvoir discuter de tout avec eux.
Mon fils joue au foot, ses copains lui posent des questions auxquelles je veux pouvoir répondre. J’ai voulu
briser l’omerta. J’ai été détruit, tant physiquement
que moralement, et je voyais ma vie se terminer très
vite. Mais je ne suis pas seul en jeu, j’ai une famille.
Recueilli par BLANDINE HENNION et ÉTIENNE LABRUNIE
Dans votre livre, vous expliquez que Bernard
(1) Je ne joue plus! Un footballeur brise l’omerta. Editions
Tapie a tout fait pour prolonger votre silence… L’Archipel. Février 2006.
sports 29
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Football. En Ligue 1, Bordeaux conforte sa
deuxième place derrière Lyon.
Le PSG s’incline au Parc des Princes.
Résultats du week-end
Le Mans grimpe
en enfonçant Paris
FOOTBALL
27e journée de L1
à une qualification en Ligue
des champions. Avec un tel
rendement, cet objectif ne sera plus qu’un vieux souvenir,
comme l’est désormais la
course au titre. A écouter Pauaris est tragique!» A leta, encore une fois le meilune époque pas si leur Parisien sur le terrain (et
lointaine, même les toujours meilleur buteur du
supporters les plus championnat), accrocher la
inconditionnels du club de la troisième ou quatrième place
capitale n’hésitaient pas à dé- ne sera déjà pas mal.
tourner leur slogan favori En attendant, c’est l’équipe
(«Paris est magique!») pour du Mans qui a fait la bonne
marquer leur désapprobation opération de la journée en se
face aux résultats pitoyables replaçant devant son adverde leur équipe. A ce rythme-là saire du jour, pour devenir un
– des nuls à la pelle, des dé- sérieux prétendant à une plafaites en pagaille à l’extérieur ce européenne.
comme à domicile –, ils vont Lyon avait assuré l’essentiel en
pouvoir ressortir les bande- prenant trois points et metroles qu’ils espéraient remi- tant autant de buts à Nantes
vendredi soir. Bordeaux ne
sées pour toujours.
Car, face au Mans samedi, pouvait espérer que conforter
dans son Parc des Princes fé- sa place de dauphin. Face à
une équipe d’AjacLe PSG se croyait indéboulonnable dans cio méritante mais
à l’évidence limila course à une qualification en Ligue
des champions. Avec un tel rendement, tée, les Bordelais
cet objectif ne sera plus qu’un souvenir. ont prolongé leur
série de bons résultiche, le Paris SG a de nouveau tats en s’appuyant sur une désombré et perdu (0-1) après fense toujours aussi impitrois nuls consécutifs. Pour les toyable. Cette défaite enfonce
joueurs de Guy Lacombe, tout l’équipe corse dans son inconavait mal commencé avec un fortable position de relégable.
penalty indiscutable à la suite Derrière Bordeaux, seul Lille
d’une main aussi stupide résiste. Cette fois, c’est les
qu’inutile dans la surface de Verts de Saint-Étienne – qui
David Rozenhal. Une fois le ne parviennent pas à ralentir
penalty transformé par Fauré, leur chute libre – qui ont été
les Parisiens n’ont plus cessé les victimes des Nordistes en
de courir après le score pen- se faisant battre à domicile
dant plus de 85 minutes! Et, (2-0). Le parcours d’Auxerre
malgré de nombreuses occa- est tout aussi désolant avec
sions, ce fut en vain. Pourtant, une nouvelle contre-perforles Parisiens ont vu un de leur mance face à Sochaux, plus
ballon franchir la ligne de but proche de la relégation que des
du gardien manceau, mais honneurs du peloton de tête.
c’était après une faute de Bo- Quant à l’Olympique de Marnaventure Kalou… que l’ar- seille, qui tirait le rideau hier
soir, il a été battu (1-0) en toute
bitre avait sifflée.
Il y a peu, le PSG se croyait in- fin de match à Metz, la lanterdéboulonnable dans la course ne rouge.•
L.F.
Lyon-Nantes 3-1; Nice-Monaco 2-0;
Paris SG-LeMans 0-1; Saint-EtienneLille 0-2; Rennes-Lens 4-1; SochauxAuxerre 1-0; Troyes-Nancy 0-1;
Ajaccio-Bordeaux 0-2; ToulouseStrasbourg 1-2; Metz-Marseille 1-0.
«P
Le classement de Ligue 1
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
14.
15.
16.
17.
18.
19.
20.
POINTS JOUÉS GAGNÉS NULS PERDUS MARQUÉS ENCAISSÉS
Lyon
59
26
17
8
1
43
17
Bordeaux
52
27
14
10
3
26
12
Lille
44
27
12
8
7
36
19
Auxerre
43
27
13
4
10
33
27
Le Mans
42
27
12
6
9
27
19
Paris SG
40
27
11
7
9
31
26
Marseille
40
27
11
7
9
26
28
Nice
39
27
10
9
8
22
21
Lens
38
27
8
14
5
34
26
Nancy
38
26
11
5
10
27
19
Monaco
37
26
10
7
9
26
22
Rennes
35
27
11
2
14
29
41
Nantes
34
27
9
7
11
29
29
Toulouse
34
27
9
7
11
26
30
Saint-Etienne 34
27
8
10
9
23
27
Sochaux
30
27
7
9
11
20
28
Troyes
27
27
6
9
12
23
33
Ajaccio
21
27
4
9
14
16
33
Strasbourg 20
27
3
11
13
20
36
Metz
18
26
3
9
14
16
40
DIFF.
26
14
17
6
8
5
-2
1
8
8
4
-12
0
-4
-4
-8
-10
-17
-16
-24
Ligue 2 - 26e journée:
Clermont Foot - Bastia ......................2 - 0
Amiens - Brest .......................................1 - 1
Sedan - Caen ..........................................1 - 1
Valenciennes - Châteauroux .........2 - 0
Guingamp - Créteil ............................0 - 0
Lorient - Dijon ......................................1 - 0
Istres - Grenoble ..................................2 - 1
Sète - Gueugnon ..................................2 - 0
Laval - Le Havre ..................................0 - 0
Reims - Montpellier ...........................0 - 1
Classement:
1. Sedan 49 pts; 2. Bastia 46 pts;
3. Lorient 45 pts; 4. Valenciennes
45pts; 5. Dijon 39 pts; 6. Créteil 38 pts;
7. Montpellier 36 pts; 8. Caen 35 pts;
9. Le Havre 33 pts; 10. Gueugnon
33pts; 11. Châteauroux 32 pts;
12. Grenoble 32 pts; 13. Reims 31 pts;
14. Amiens 31 pts; 15. Brest 30 pts;
16. Istres 30 pts; 17. Clermont Foot
28pts; 18. Guingamp 27 pts; 19. Laval
23 pts; 20. Sète 17 pts.
Championnats étrangers
Allemagne - 22e journée:
Mönchengladbach - Cologne .........2 - 0
Leverkusen - Duisbourg ..................3 - 2
Berlin - Schalke 04 ..............................1 - 2
Nuremberg - Wolfsburg ....................1 - 0
Hanovre - Bayern Munich ................1 - 1
Kaiserslautern - Bielefeld ................2 - 0
Dortmund - Brême ............................0 - 1
Francfort - Hambourg .......................1 - 2
Stuttgart - Mayence ............................2 - 1
Classement:
1. Bayern Munich 55 pts; 2. Hambourg
47 pts; 3. Brême 46 pts; 4. Schalke 04
42 pts; 5. Hanovre 30 pts; 6. Stuttgart
30 pts; 7. Berlin 30 pts;
8. Mönchengladbach 30 pts;
9. Dortmund 29 pts; 10. Leverkusen 28
pts; 11. Francfort 25 pts; 12. Bielefeld 24
pts; 13. Wolfsburg 22 pts;
14. Nuremberg 21 pts; 15. Mayence 20
pts; 16. Kaiserslautern 20 pts;
17. Duisbourg 17 pts; 18. Cologne 15 pts.
Espagne - 24e journée:
Villarreal - Espanyol Barcelone .....4 - 0
Real Madrid - Alavés ..........................3 - 0
FC Séville - Celta Vigo .......................1 - 0
FC Barcelone - Betis Séville ..............5 - 1
Cadix - Osasuna ....................................1 - 3
Deportivo La Corogne - Saragosse .1 - 1
Racing Santander - Athletic Bilbao 0 - 1
Real Sociedad - Valence ....................n.p.
Malaga - Majorque ..............................n.p.
Getafe - Atletico Madrid ....................n.p.
Classement:
1. FC Barcelone 55 pts; 2. Real Madrid
48 pts; 3. Valence 46 pts; 4. Osasuna
46pts; 5. FC Séville 41 pts; 6. Celta Vigo
39 pts; 7. Villarreal 38 pts; 8. Deportivo
La Corogne 37 pts; 9. Saragosse 33 pts;
10. Atletico Madrid 32 pts; 11. Getafe
30pts; 12. Racing Santander 27 pts;
13. Real Sociedad 25 pts; 14. Espanyol
Barcelone 24 pts; 15. Athletic Bilbao
22pts; 16. Alavés 22 pts; 17. Cadix 22
pts; 18. Betis Séville 22 pts; 19. Malaga
20 pts; 20. Majorque 19 pts.
Italie - 26e journée:
Livourne - Inter Milan ......................0 - 0
Messine - Juventus Turin ................2 - 2
Milan AC - Cagliari ..............................1 - 0
Chievo Vérone - Palerme .................0 - 0
Fiorentina - Lazio Rome ...................1 - 2
Lecce - Reggina ...................................0 - 0
AS Rome - Empoli ...............................1 - 0
Sampdoria - Ascoli ..............................1 - 2
Trévise - Parme ....................................0 - 1
Udinese - Sienne ..................................1 - 2
Classement:
1. Juventus 67 pts; 2. Milan AC 57 pts;
3. Inter Milan 55 pts; 4. AS Rome 51 pts;
5. Fiorentina 50 pts; 6. Livourne 43 pts;
7. Chievo Vérone 39 pts; 8. Lazio Rome
38 pts; 9. Sampdoria Gênes 37 pts;
10. Palerme 34 pts; 11. Ascoli 29 pts;
12. Sienne 29 pts; 13. Udinese 27 pts;
14. Reggina 27 pts; 15. Parme 26 pts;
16. Messine 24 pts; 17. Cagliari 23 pts;
18. Empoli 22 pts; 19. Lecce 15 pts;
20. Trévise 14 pts.
BOXE
Championnats de France
amateurs - Finales:
Mi-mouches:
Nordine Oubaali bat Redouane
Asloum aux points (35 - 20)
Mouches:
Jérôme Thomas bat Amine
Boumeraci aux points (38 - 20)
Coqs:
Ali Hallab bat Hicham Ziouti arrêt de
l’arbitre (3e) sur supériorité
Plumes:
Kedhafi Djelkhir bat Guillaume
Frénois aux points (45 - 35)
Légers:
Boubakar Dangnoko bat Jean Gomis
aux points (26 - 25)
Super-légers:
Adriani Vastine bat Saber Bouzaiane
aux points (33 - 17)
Welters:
Alexis Vastine bat Jaoid Chiguer aux
points (32 - 18)
Moyens:
Sami Anouche bat Christopher
Rebrasse aux points (33 - 17)
Mi-lourds:
Mamadou Diambang bat Kevin Piquet
aux points (24 - 21)
Lourds:
Newfel Ouatah bat John-Mickael
Mbumba KO (1er)
Super-lourds:
Mohamed Samoudi bat Mohamed
Amanissi aux points (32 - 20)
CYCLISME
Tour du Haut-Var:
Classement général:
1. Leonardo Bertagnolli (ITA/Cofidis)
les 185 km en 4 h 54’21’’ (moyenne:
37,710 km/h) ; 2. Pietro Caucchioli
(ITA) à 09’’; 3. Jurgen Van de Walle
(BEL) ; 4. Nick Nuyens (BEL) à 56’’.
Classic Haribo:
1. Arnaud Coyot (FRA/Cofidis) les
203,5 km en 5 h 28’16’’ (moyenne:
37,195 km/h) ; 2. Thor Hushovd (NOR)
même temps; 3. Mauro Facci (ITA) à
31’’; 4. Kevin Van Impe (BEL) ;
5.Graeme Brown (AUS) ; 6. Leon Van
Bon (NED) ; 7. Saïd Haddou (FRA) ; 8.
Jaan Kirsipuu (EST) ; 9. James
Vanlandschoot (BEL); 10. Gorik
Gardeyn (BEL) même temps.
Classement de la Coupe de France
après deux épreuves:
1. Arnaud Coyot (FRA) 50 pts;
2. Leonardo Bertagnolli (ITA) 50 pts;
3. Thor Hushovd (NOR) 35 pts;
4. Pietro Caucchioli (ITA) 35 pts;
5. Dmitri Fofonov (KAZ) 16 pts; 6. Saïd
Haddou (FRA) 14 pts; 7. Freddy Bichot
(FRA) 14 pts; 8. Jaan Kirsipuu (EST) 12
pts; 9. Alexandre Pichot (FRA) 6 pts;
10. Pierrick Fédrigo (FRA) 6 pts.
HANDBALL
D1 - 15e journée:
Créteil - Toulouse ...........................31 - 24
Angers - Villefranche-Beauj. .......16 - 16
Paris Handball - Nîmes .................21 - 26
Tremblay - Pontault-Combault .31 - 24
Chambéry - Dunkerque ...............26 - 25
Sélestat - Istres ................................32 - 31
Ivry - Montpellier ..........................24 - 23
Classement:
1. Montpellier 41 pts; 2. Chambéry
38pts; 3. Ivry 37 pts; 4. Paris Handball
36 pts; 5. Dunkerque 36 pts; 6. Nîmes
34 pts; 7. Créteil 28 pts; 8. Sélestat
28pts; 9. Tremblay-en-France 27 pts;
10. Pontault-Combault 26 pts;
11. Toulouse 24 pts; 12. Istres 23 pts;
13. Villefranche-Beaujolais 23 pts;
14. Angers 19 pts.
RUGBY
Top 14 - 17e journée
Perpignan - Castres..........................34 - 3
Brive - Biarritz ....................................8 - 15
Montpellier - Bourgoin ................33 - 20
Narbonne - Stade Toulousain .....27 - 19
Toulon - Clermont .........................14 - 36
Pau - Bayonne...................................21 - 18
Agen - Stade Français .........................n.p.
Classement:
1. Biarritz 57 pts; 2. Stade Toulousain
51pts; 3. Perpignan 50 pts; 4. Stade
Français 48 pts; 5. Clermont 45 pts; 6.
Bourgoin 45 pts; 7. Castres 44 pts; 8.
Brive 35 pts; 9. Agen 34 pts; 10.
Narbonne 25 pts; 11. Bayonne 22pts;
12. Montpellier 20 pts; 13. Pau 17 pts;
14. Toulon 12 pts.
Pro D2 - 20e journée:
Auch - Tyrosse .................................41 - 23
Colomiers - Pays d' Aix ....................9 - 16
Béziers - Mont-de-Marsan ..........32 - 10
La Rochelle - Tarbes .........................14 - 9
Albi - Oyonnax .....................................8 - 6
Dax - Aurillac .....................................32 - 9
Racing-Métro 92 - Montauban ..17 - 18
Stade Bordelais - Lyon OU .............19 - 3
Classement:
1. Montauban 77 pts; 2. Béziers 67 pts;
3. Albi 64 pts; 4. Dax 57 pts; 5. Auch
54 pts; 6. Tarbes 52 pts; 7. Colomiers
47 pts; 8. La Rochelle 45 pts; 9. Stade
Bordelais 44 pts; 10. Oyonnax 41 pts;
11. Racing-Métro 92 pts; 12. Lyon OU
32 pts; 13. Pays d' Aix 31 pts; 14. Montde-Marsan 27 pts; 15. Aurillac 24 pts;
16. Tyrosse 23 pts.
RUGBY A XIII
Championnat de France 14e journée:
Saint-Gaudens - Carcassonne ...68 - 22
Lyon-Villeurbanne - Toulouse ..10 - 50
Villeneuve/Lot - U. 13 catalane ...12 - 15
Carpentras - Lézignan ..................16 - 32
Pia - Villefranche-de-R./Cahors 46 - 16
Limoux - Marseille ........................48 - 20
Classement:
1. Pia 37 pts; 2. Limoux 35 pts; 3. Union
treiziste catalan 34 pts; 4. Toulouse
33pts; 5. Saint-Gaudens 28 pts;
6. Carcassonne 28 pts; 7. Villeneuvesur-Lot 23 pts; 8. Villefranche-deRouergue/Cahors 19 pts; 9. LyonVilleurbanne 19 pts; 10. Lézignan
17pts; 11. Marseille 15 pts; 12.
Carpentras 12 pts.
TENNIS
ATP - Marseille - 7e journée:
Simple messieurs (finale):
Arnaud Clément (FRA) bat Mario
Ancic (CRO/N.6) 6-4, 6-2
Double messieurs (finale):
Martin Damm/Radek Stepanek
(CZE/N.4) battent Mark
Knowles/Daniel Nestor (BAH/CAN)
6-2, 6-7 (4/7), 10-3.
WTA - Anvers - 7e journée:
Simple dames (finale):
Amélie Mauresmo (FRA/N.2) bat Kim
Clijsters (BEL/N.1) 3-6, 6-3, 6-3
Double dames (finale):
Dinara Safina/Katerina Srebotnik
(RUS/SLO/N.2) battent Stéphanie
Forezt/Michaella Krajicek
(FRA/NED) 6-1, 6-1
ATP - San Jose - 6e journée:
Simple messieurs (demi-finales):
Lleyton Hewitt (AUS/N.3) bat Vincent
Spadea (USA) 6-3, 6-4
Andy Murray (GBR) bat Andy
Roddick (USA/N.1) 7-5, 7-5
Doubles messieurs (demi-finales):
Paul Goldstein/Jim Thomas (USA)
battent Simon Aspelin/Todd Perry
(SWE/AUS/N.1) 6-3, 6-7(4/7), 10-3
Jonas Bjorkman/John McEnroe
(USA) battent Jaroslav
Levinsky/Robert Lindstedt
(CZE/SWE/N.4) 6-3, 4-6, 10-8
TENNIS
Clément renaît
Arnaud Clément n’avait
plus gagné de tournoi
depuis l’Open de Moselle
(à Metz) en 2003. Hier, il a
renoué avec le succès en
remportant celui de
Marseille face au Croate
Mario Ancic (6-4, 6-2).
L’Aixois, qui avait
bénéficié d’une invitation,
avait déjà battu Fabrice
Santoro et l’Espagnol
Rafael Nadal lors des
tours précédents.
TENNIS
Mauresmo bat
Clijsters chez elle
Et de trois! Amélie
Mauresmo a remporté hier
son troisième titre de la
saison en venant à bout de la
Belge Kim Clijsters (3-6, 6-3,
6-3) à Anvers. Déjà
victorieuse à l’Open
d’Australie et à Paris, la
Française a ainsi gagné le
22e tournoi de sa carrière.
Devant son public, Clijsters
toujours n° 1 mondiale, a
toutefois cédé en 1h50.
BASKET
Parker tireur d’élite
Le meneur français des
San Antonio Spurs, Tony
Parker, s’est adjugé le
«shooting stars contest»,
concours de tirs organisé
dans le cadre du All Star
Game auquel il
participait samedi
à Houston (Texas).
En réussissant ses six tirs
en 25 secondes, le joueur
de San Antonio a aussi
établi un nouveau record
de rapidité.
30 télévision
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
APRÈS COUP
LE FILM
Par SORJ CHALANDON
Par LOUIS SKORECKI
Le résistant
Man Hunt (2)
ès septembre1944, la libération
a commencé. Mais dans les
camps, on continue à mourir.
A Buchenwald et à Ordhuf, s’adressant
aux soldats, le général Eisenhower a
dit: “Si vous ne saviez pas pourquoi
vous vous battez, maintenant, vous
savez.” Eh bien vous, jeunesse, il faut
que vous sachiez pourquoi vous devez
vous battre.» Applaudissements. Nous
sommes à la préfecture du Calvados.
Des lycéens reçoivent les prix du
concours de la Résistance et de la
Déportation. C’est Marcel Fauvel
qui a parlé. Lorsqu’il reconnaît
Victor Lanot au milieu des jeunes, il
l’étreint. Il le connaît depuis l’enfance.
«Ça ne m’étonne pas de te voir là»,
dit le vieux combattant. Victor a
17ans. C’est au même âge que Marcel
s’est engagé. Peu à peu, le soldat de
l’ombre a refait son chemin de guerre
avec le garçon. Résistant, dénoncé,
matricule21314 à Buchenwald, il l’a
même emmené sur les lieux de son
supplice. L’homme parle. Le lycéen
l’écoute. Le réalisateur Rémi Mauger
les a rejoints (1).
«Pour beaucoup de gens, je crois qu’on
avait eu tort de se faire prendre. Voilà.
On avait pris un risque, et ce risque, il
était normal qu’on l’ait assumé, si vous
voulez, nous dit Marcel Fauvel. Je crois
que les gens ne percevaient pas du tout
la dimension de l’aventure à laquelle
nous avions été confrontés. Beaucoup
de gens nous disaient: “Racontez-nous
votre histoire, et puis foutez-nous la
paix avec ça.” Entre 17 et 25ans, j’étais
en camp de concentration. Je n’avais
donc pas perfectionné une culture en
français. On ne trouvait pas de mot.
On ne trouvait pas d’expression. On ne
trouvait pas de syntaxe pour raconter
les choses. Les mots qui décrivaient
le camp, tout le monde les comprend
aujourd’hui. On sait ce qu’est un kapo,
la Shoah. Tous ces mots-là n’existaient
pas. On aurait dit ça à un Français de
1945, il aurait ouvert de grands yeux.
Et pourtant, ce sont des mots qui
décrivent exactement la situation.
Il n’y a pas d’autre mot pour décrire
un kapo. Il n’y a pas d’autre mot pour
décrire la Shoah.»«Vous avez été
torturé?»demande le réalisateur.
«Oh? Un petit peu, mais enfin, bon.
Comme tout le monde. Vous croyez que
c’est marrant de raconter ça? Qu’on a
été torturé? Vous croyez que ça se
raconte, franchement? Il y a des gens
qui vous racontent ça? C’est humiliant
d’être torturé. C’est jamais drôle
de raconter ce qui est humiliant.
Je me demande si beaucoup de gens
comprennent quand je dis des choses
comme ça.» «Victor, oui?»demande
le réalisateur. «Victor, oui», répond
le résistant.•
CINÉCINÉMA CLASSIC, 18 HEURES.
«D
LAURENT DENIS FRANCE 2
E
Durant la Seconde Guerre mondiale, sept policiers du Service des étrangers vont sauver 348 juifs.
Fiction. Bonne adaptation de l’histoire des «Sept de Nancy».
Une digne indiscipline
es flics qui désobéissent parce qu’ils jugent
inique une loi que le gouvernement les somme d’appliquer, un rêve! En 1942, Edouard
Vigne travaille au Service des étrangers de
Nancy. Un sale boulot: recension des juifs. La
politique de Laval est claire: aller au-delà de la collaboration. Il y a les salauds comme Durieux qui profitent de leur misérable pouvoir pour insulter une
«youpine». Il y a les ternes poulets comme Bauer qui
ne veulent pas faire de vague. Et il y a Edouard, engagé dans la Résistance. Un engagement que le film, intelligemment, n’assortit d’aucun discours idéologique. Il agit selon sa conscience, c’est suffisant.
Daniel Russo donne au personnage sa force calme, sa
densité. Seulement, Edouard a un ami, Lucas, flic de
seconde zone qui se désespère de ne pas rejoindre le
commissariat central. Sa lâcheté sera elle aussi banale. Martin Lamotte a évidemment la gueule de
l’emploi, son regard dit admirablement la bêtise, la
peur, la couardise. C’est sans état d’âme qu’il va devenir une ordure: il veut de l’avancement, il veut des
nouvelles de son fils prisonnier en Allemagne. Alors,
il va se fourrer entre les pattes d’un salaud intégral,
Alfred Callot (parfait Thierry Gibault), truand qui,
comme cent autres, profita de la guerre. C’est au ser-
D
vice des Questions juives qu’il œuvre parce que c’est
là qu’on peut se remplir les poches facilement. Lucas
devient son homme de main.
Dès lors, l’amitié avec Edouard agonise. Elle meurt à
la veille de la rafle du 19juillet, consécutive à celle du
Vél d’hiv’. Mais, au-delà de ce prétexte d’une amitié
qui ne survit pas aux engagements des hommes, il y
a la décision des sept policiers du Service des étrangers de désobéir à leur hiérarchie: le 18juillet, ils sortent les fiches des juifs de la ville et, porte à porte, les
avertissent. Fidèles à l’histoire vraie des «Sept de
Nancy», Patrick Volson et la scénariste Corinne Atlas n’expliquent pas cet acte de désobéissance.
Chaque policier agit selon sa conscience: Edouard et
Charles de La Barre en hommes de réseau; le flic père de famille pense à son fils et à ses proches; le scrupuleux obéit à son chef. La portée de cette désobéissance n’en est que plus forte. Mais l’Histoire n’aime
pas les désobéissants et il fallut attendre 1989 et 1991
pour que les policiers encore vivants soient récompensés. Israël a décerné le titre de Juste à Pierre Marie dont s’inspire le personnage d’Edouard Vigne.
Pourquoi si tard? «C’était sans doute parce que, malgré tout, nous avions désobéi», pensait-il. Les Sept de Un Fritz Lang romantique et violent.
Nancy sauvèrent 348personnes sur les 380 que réclamaient les Allemands. •
comme lettre à la poste son fameux
SOPHIE ROSTAIN refus à Goebbels de devenir cinéaste
officiel du régime. «C’est nous qui
décidons qui est juif et qui ne l’est
pas», lui aurait dit Goebbels.
Lang aurait fui l’Allemagne en train
le soir même.
Je l’ai toujours soupçonné d’avoir
Avant une poignée de nanars
inventé cette histoire. Trop beau,
redoutables dans les
trop rapide, trop scénarisé. Un jour,
années 80 (le Diable au corps,
un historien plus méticuleux a
la Sorcière…), et un regain de
retrouvé le passeport de Fritz Lang.
vigueur que l’on n’espérait
Le visa prouvait à l’évidence qu’il
plus au début de la décennie
2000, Marco Bellochio fut l’un avait hésité plusieurs semaines avant
de refuser l’offre nazie. J’aurais
des cinéastes italiens les plus
préféré me tromper. Dès son arrivée
virulents de l’après-68. En
à Hollywood, Lang a passé son temps
témoigne ce Viol en première
à effacer cette faute originelle
page décapant dont la
(on dit aussi qu’il a tué sa première
critique de la corruption des
femme, mais c’est une autre histoire),
élites et de la manipulation
sous des tonnes de culpabilité
des masses au cours des
scénaristique, jusqu’à son film le plus
«années de plomb» reste
autobiographique et le plus beau,
d’une actualité inquiétante
l’Invraisemblable Vérité. Lang n’y est
dans l’Italie de Berlusconi.
jamais tout à fait, dans ses films
Gian Maria Volonte,
américains. Il rêve à une Walkyrie
compagnon de route du PC
d’une blondeur aveuglante qui
italien dans la vraie vie, est
parfait en patron de presse de le prendrait par la main pour le
conduire sur la lune. Il rêve même
droite et sans scrupule. S.D.
qu’il a voulu tuer Hitler.•
TPS CINÉCULTE, 11h35.
(A suivre)
C O R B I S K I PA
FRANCE 2, 20h50.«Le Temps de la désobéissance», un téléfilm
de Patrick Volson.
Viol en
première page
(1) C’était samedi à 16 heures, Un siècle
à nous deux, sur France 3 Normandie.
ARCHIVES
DR
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www.liberation.fr
spionnage, violence, ambiguïté,
on est dans un drôle de territoire.
Un peu langien, mais pas tant que
ça. Un peu stevensonien, mais pas
tant que ça. Le film est-il trop
romantique, trop mankiewiczien?
Trop fade? Ou juste trop
hollywoodien? Man Huntraconte
l’histoire d’un Allemand qui veut
tuer Hitler, et qui le rate de peu.
Le film est violent, ambigu,
romantique, il est aussi plus que cela.
Fritz Lang était plus proche de
l’idéologie fasciste qu’il ne voulait
l’admettre. Par sa femme d’abord,
Thea von Harbou, hitlérienne des
premiers jours, dont il ne s’est séparé
que très tard. Par sa situation de
cinéaste, par sa culture de classe
aussi. Il n’est devenu juif que quand
on l’a accusé de l’être. Encore a-t-il
menti pendant des années, les
cinéphiles et les historiens acceptant
télévision 31
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
•FILM
Italique : en clair
F2
F3
C+
ARTE
F5
M6
9.05 TF ! Jeunesse. 11.05 La vie
devant nous. Série. 12.05
Attention à la marche ! 13.00
Journal. 13.40 Météo. 13.50 Les
feux de l'amour. 14.40 Un rêve
à l'épreuve. Téléfilm. 16.35
New York : police judiciaire.
Série. 17.25 Las Vegas. Série.
18.15 Crésus. 19.05 A prendre ou
à laisser. 20.00 Journal.
6.30 Télématin. 8.40 Des jours
et des vies. 9.00 Amour,
gloire et beauté. 9.30 KD2A.
11.00 Motus. 11.35
Millionnaire. 11.45 JO :
Curling. 13.00 Journal. 13.55
Rex. Série. 14.50 Un cas pour
deux. Série. 15.55 JAG. Série.
16.55 JO : Turin 2006. 19.30 Un
jour à Turin. 20.00 Journal.
5.20 Côté jardins. 5.40 Les
matinales. 6.00 EuroNews.
7.00 France Truc. 9.20 JO : Ski.
11.50 12/14. 12.55 JO : Turin
2006. 16.10 Plus belle la vie.
16.35 France Truc. 17.30 C'est
pas sorcier. 18.05 Questions
pour un champion. 18.35
19/20. 20.10 Le journal des
Jeux. 20.25 Plus belle la vie.
12.35 Nous ne sommes pas des
anges. 13.40 La grande course.
• 14.00 Nous étions libres.
16.00 «Le Nouveau Monde»,
le making of. • 16.25 Monster.
18.10 Album de la semaine. 18.20
Monster. Série. 18.50 Infos. 19.10
Le grand journal de Canal+.
19.55 Les Guignols. 20.10 Le
grand journal, la suite.
• 15.00 Bloody Sunday.
16.50 Chic. 17.15 La nature en
terrain conquis. Docu. 18.00
12.05 Midi les zouzous. 13.40
12.50 Le 12.50. 13.10 Une
Le magazine de la santé au
quotidien. 14.35 La maîtrise
du feu. 15.45 Lisbonne. Docu.
16.40 Studio 5. 16.50 L'Inde,
des jours et des hommes.
Docu. 17.50 C dans l'air.
santé au quotidien.
nounou d'enfer. Série. 13.30
Trop jeune pour être mère.
Téléfilm. 15.25 La famille
parfaite. Téléfilm. 17.05 Jour
J. 17.55 Un, dos, tres. Série. 18.55
Charmed. Série. 19.50 Six' /
Météo. 20.10 Ma famille
d'abord. Série. 20.40 Six'infos
locales / Kaamelott.
20.50
Joséphine, ange gardien
20.50
Le temps de la
20.55
JO : Patinage artistique
20.50
20.40
• Blind Shaft
20.00
De Gaulle-Churchill,
20.50
• Gomez & Tavarès
Téléfilm historique de
Patrick Volson. Fr. 2005.
Avec Daniel Russo,
Martin Lamotte,
Pascal Elso. (Lire page 30).
Programme libre danse.
A Turin. En direct.
Commentaires : Nelson
Montfort, Annick Dumont,
Philippe Candeloro.
23.45 Soir 3. Présenté par
Marie Drucker
Film d'action de
Sam Raimi. E-U. 2003.
Multilingue. Avec Tobey
Maguire, Kirsten Dunst,
James Franco.
Drame social de Li Yang.
Ch. 2003. v.o. Avec Li
Yixiang, Wang Shuangbao,
Wang Baoqiang.
23.00
1m2 pour vivre
DIRECT 8
LCP
TMC
17.30 Le culture club. 19.05
Division d'élite. Série. 19.55
La loi de Los Angeles. Série.
20.50
• L'âge des possibles
Comédie dramatique
de Pascale Ferran. Fr. 1996.
Avec Anne Cantineau,
Christèle Tual.
22.45 Le culture club.
Magazine. 0.20 Soyons
Sport ! Magazine.
16.30 Si l'on sortait. 17.00 Les
Z'Octopuces. 18.00 Tous en
scène. 19.00 Tout va bien.
20.00 Le journal de 20h.
20.30 Entretien intime.
20.30
TNT Show
Magazine présenté
par Alex Taylor.
Invités : Johannes
Swoboda, Doris Pack,
Pervenche Berès...
22.00 Bouge la France !
Magazine présenté par
Pierre Sled. 23.30 Le
journal parlementaire.
Divertissement. Présenté
par Laurie Cholewa,
François Barré. En direct.
• 22.05 Attila, fléau de Dieu
Péplum avec Anthony
Quinn. 0.00 88 minutes.
21.00
Vivre en Europe
19.00 Starsky et Hutch. Série.
19.50 TMC Météo. 20.00 Les
vacances de l'amour. Série
sentimentale.
• La jument verte
Comédie sentimentale de
Claude Autant-Lara.
Fr. 1959. Avec Bourvil.
22.30 Hercule Poirot. Deux
épisodes. 0.20 Les mystères
de l'Ouest. Série.
20H40
Mesure d’urgence
cinecinema Famiz
De Michael Apted
(1996, E-U) 120 mn.
De Michel Berny et
Maurice Biraud
(1981, Fr) 80 mn.
20H45
Révélations
Spiceworld, le film
cinecinema Premier
De Michael Mann
(1999, E-U). 155 mn.
RTL 9
TPS Cinefamily
De Bob Spiers
(1997, G-B)
Multilingue. 90 mn.
20H50
Salut la Puce
Le faucon Ciné Polar
Comédie
De Paul Boujenah
(1983, Fr) 80 mn.
De Richard Balducci
(1982, Fr) 90 mn.
Galaxy Quest
Vera Drake
TPS Home Cinéma
Canal+ cinéma
De Dean Parisot
(1999, E-U)
Multilingue. 100 mn.
De Mike Leigh (2004)
Multilingue. 120 mn.
Innocents,
the Dreamers
De Frank Marshall
(1995, E-U) 105 mn.
TPS Ciné Culte
De Bernardo
Bertolucci (2003)
Multilingue. 115 mn.
La grande
bourgeoise
cinecinema Classic
De Mauro Bolognini
(1974) 105 mn.
Congo TF 6
Piège à Hongkong
13e Rue De Tsui Hark
(1998, E-U) 90 mn.
Des hommes
d’honneur TvBreizh
22H15
Mad Max 2 Ciné FX
L’expérience
Ulysse TPS Cinétoile Adaptation
De George Miller
(1981, Austr) 90 mn.
cinecinema Frisson
De M. Camerini (1954, cinecinema Premier
It) Multilingue. 105 mn. De Spike Jonze
Blueberry,
(2002, E-U)
l’expérience secrète Multilingue. 115 mn.
Tropical Malady
cinecinema Auteur
D’A. Weerasethakul
(2004) v.o. 115 mn.
22H05
La Belle Verte
cinecinema Famiz
De Coline Serreau
(1996, Fr) 95 mn.
La rançon Ciné Polar
22H10
Huston (1948, E-U)
Multilingue. 125 mn.
CHAT
Canal+ Décalé
De Sam Raimi
(2003, E-U). 120 mn.
Fausses apparences
22H30
L’importance
d’être constant
23H40
De Jan Kounen
(2003, Fr) Multilingue. L’histoire
du petit Muck
120 mn.
Kickboxer 3 : Trafic à
Rio RTL 9 De R. King
cinecinema Famiz
(1992, E-U) 95 mn.
De Wolfgang Staudte
(1953, All) 100 mn.
22H55
Hope Springs
TPS Cinéstar
Le mystificateur
Canal+ cinéma
cinecinema Auteur
De Pascal Thomas
(1978, Fr) 110 mn.
TPS Home Cinéma
D’Oliver Parker (2002) 23H00
Chandler TCM
Multilingue. 95 mn.
De Paul Magwood
Mad Max Ciné FX
(1971, E-U)
De G. Miller (1979,
Multilingue. 90 mn.
Austr) v.o. 90 mn.
Les marins
de l’Orgueilleux
cinecinema Emotion cinecinema Classic
23H05
TPS Cinextreme
The Shanghai
Gesture Ciné Polar
De Josef von Sternberg
(1941, E-U) v.o. 95 mn.
23H55
Le petit Marcel
TPS Cinefamily
TNT
NRJ 12
W9
19.05 Le rebelle. 19.50 Viper.
22.55
Genesis II,
et l'homme créa la nature
19.40 Code Lisa. 20.05 Good
Morning Miami. Série.
20.45
• Robin des Bois,
20.30 Les super communs.
Film d'aventures de
Kevin Reynolds. E-U.
1990. Avec Kevin Costner.
22.30 On va tout vous dire.
«Soins du corps et de
l'esprit : la beauté au
masculin». 23.35 Sex Files.
Série érotique.
20.45
Jack & Jill
Série humoristique.
«Approche amoureuse». «Linge sale et confidences».
Avec Amanda Peet.
22.15 Warlock 3. Téléfilm
d'épouvante. 0.00 Groovy
Baby. 1.00 La totale NRJ 12.
17.20 Cosby Show. Deux
épisodes. 18.10 Star Trek, la
nouvelle génération. 19.00
Le caméléon. Série. 19.50 Les
Simpson. Deux épisodes.
20.50
Dark Angel
Série fantastique
américaine. Avec Jessica
Alba, Michael Weatherly.
22.10 Dark Angel. Deux
épisodes. 23.45 Tendances.
SÉRIES
RADIOS
20H20
20H50
Crimes ordinaires
FRANCE CULTURE 10.00
Le roi de Las Vegas
Diagnostic, meurtre
Jimmy
Les Lundis de l’Histoire:
Série club
Série club
(saison 1, 1/13)
Qu’est ce qui est noir
et blanc et qui pleure
tout le temps ?
20H45
Millennium Jimmy
(saison 1, 5/22)
Le complexe de Dieu.
Multilingue.
13H00
De Bruno Nuytten
(1988, Fr) 170 mn.
Dangereuse alliance
NT1
SPORTS
cinecinema Emotion
• 22.50
Documentaire. (6/7).
«L'enfant de Meru».
23.50 Aventures en haute
montagne.
0.50 Le gang des babouins.
23H50
Camille Claudel
Comédie policière de Gilles
Paquet-Brenner. Fr. 2003.
Avec Stomy Bugsy, Titoff,
Elodie Navarre.
Documentaire réalisé par
Patrick Jeudy en 1998. (1/2).
«Juin 1940 - novembre 1942 :
premières impressions».
20.55 Etats généraux.
21.55 Harcèlements. Docu.
Comédie fantastique
d’Andrew Fleming.
E-U. 1996. Avec Robin
Tunney, Fairuza Balk,
Neve Campbell.
0.35 Le justicier de l'ombre.
Série policière américaine.
«Femme fatale».
1.30 M6 Music alternative.
De Mark Herman
(2003). 90 mn.
De Jacques Fansten
La marche triomphale (1976, Fr) 100 mn.
De Neil LaBute (2003) De H. Hathaway (1949, De Marco Bellocchio
Multilingue. 100 mn.
(1975) 115 mn.
E-U) v.o. 120 mn.
www.liberation.fr
23H20
TPS Ciné Culte
Les nuits de la pleine
De Billy Ray (2003)
De Wolfgang Petersen lune TV5MONDE
Multilingue. 95 mn.
D’Eric Rohmer
(2003, E-U)
Confidences
(1984,
Fr)
100
mn.
Multilingue. 160 mn.
pour confidences
20H55
De Craig R. Baxley
(1990, E-U). 90 mn.
Spider-Man 2
Troie TPS Cinéstar
D’Alex Segal
(1956, E-U) 105 mn.
Le trésor de la Sierra
Madre TCM De John
22H40
D’Oliver Hirschbiegel
La femme et le pantin (2001, All)
Multilingue. 120 mn.
TPS Cinétoile
De Julien Duvivier
Ouragan sur l’eau
(1958, Fr) 100 mn.
plate TPS Cinefamily
Le témoin du mal
De Dick Clement
(1985, G-B) 100 mn.
TPS Cinextreme
De Gregory Hoblit
22H20
(1998, E-U). 125 mn.
De Rob Reiner
(1992, E-U) 140 mn.
cinecinema Frisson
Dark Angel
21H00
mémoires de guerre
Documentaire réalisé
par Andreï Schwartz.
23.45 Arte info.
• 23.55 Nous sommes tous
des voleurs. Policier de
Robert Altman. E-U. 1974.
v.o. Avec Keith Carradine.
1.55 Bienvenue
sur Mars. Docu.
prince des voleurs
20.55
FILMS
Pourquoi pas nous ?
22.10
19.00 Le magazine de la
TNT
Tournoi féminin. Finale.
1.55 Soir 3. Présenté
par Marie Drucker
2.20 Plus belle la vie.
Feuilleton réaliste français.
2.50 Thalassa.
JO : Hockey sur glace
TNT
F4
Débat.
Présenté par Yves Calvi.
0.30 Journal de la nuit.
0.55 Musiques au cœur.
«Eve raconte Mozart» (2/2).
2.10 Mezzo portraits. Docu
2.40 Mezzo mag.
Magazine présenté
par Emilie Raffoul,
Stéphane Haumant.
«Les flics du fisc».
23.55 Mensomadaire.
0.25 The Shield. Série
policière. «Respect».
1.10 Deadwood.
TNT
TNT
Pascal Bataille, Laurent
Fontaine.
0.40 Sept à huit.
1.30 Reportages. «Les
baroudeuses de la foi».
1.55 Un chien sur
ordonnance.
0.10
Lundi investigation
19.00 Voyage au centre du
cerveau. Docu. 19.45 Arte
info. 20.00 Le journal de la
culture. 20.15 Alain Ducasse
au Plaza Athénée. Docu.
TNT
Y a que la vérité qui compte ! 22.40
Magazine présenté par
Mots croisés
TNT
22.35
Sur la route de la soie. Docu.
TNT
désobéissance
Téléfilm sentimental de
Laurent Lévy. Fr. 2005.
«La couleur de l'amour».
Avec Mimie Mathy, Philippe
Caroit, Jean-Roch Pirot.
• Spider-Man 2
TNT
TF1
(saison 2, 3/12)
(saison 6, 19/22) Indice Ligne blanche.
d’écoute.
22H30
Compte à rebours
Téva (saison 1, 13/20)
Beautés fatales.
Les médiums
Série club
22H20
(saison 1, 13/13)
Morts suspectes.
(saison 3, 21/21)
Panne d’électricité.
(saison 2, 1/12)
La maison du péril.
New York 911 13e Rue Hercule Poirot TMC
FRANCE MUSIQUE 12.05
A portée de mots: avec
17H00
JO : Ski Eurosport
JO : Saut à skis
20H30
Slalom géant
messieurs. 2e manche.
En direct.
Eurosport Concours
Championnat
d’Angleterre.
15e journée.
Northampton /
Saracens.
14H15
JO : Curling
Eurosport Tournoi
masculin. 1re phase.
Nouvelle-Zélande /
Allemagne. En direct.
15H30
«L’Histoire du corps», avec
Jean-Jacques Courtine,
pour Histoire du corps: les
mutations du regard, le
XXe siècle(vol. 3, Seuil), et
Nicole Edelmann pour
Histoire de la voyance et
du paranormal, du XVIIIe s.
à nos jours(Seuil).
par équipes (grand
tremplin). En direct.
19H30
Motocross Sport+
Championnat du
monde de supercross.
8e manche. La course
des 125 cc.
19H45
Rugby Sport+
0H45
JO : Hockey sur glace
Eurosport
Tournoi féminin.
Finale.
Toni TPS Star
Golf Sport+ Circuit
JO : Patinage
2H30
artistique Eurosport JO : Ski Eurosport
De Philomène
Esposito (1999) 95 mn.
européen. Open de
Malaisie. 4e jour.
Programme libre
danse. En direct.
Slalom géant
messieurs. 2e manche.
Dialoguez tous les mardis
de 15 h à 15 h 30 avec Daniel Schneidermann
chroniqueur à Libération.
Robert Badinter.
FRANCE INTER 16.20
Charivari: «Rétrospective
Roberto Rossellini à la
Cinémathèque», avec
Isabella Rossellini et
Tag Gallagher pour les
Aventures de Roberto
Rossellini(Léo Sheer).
RTL 18.00
Journal: avec Isabelle
Huppert, pour l’Ivresse du
pouvoirde Claude Chabrol.
32 météo jeux
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
p
LES MOTS D’OISEAU N° 2813
1
2
3
4
5
6
7 8
9
I
II
III
IV
V
VI
VII
VIII
IX
X
XI
Lille
3/5
Amiens
3/5
80 km/h
90 km/h
Caen
3/6
Brest
2/8
Soleil (à Paris)
Lever 7h54 Coucher 18h14
3 mn de soleil en plus
Marées (à Brest)
Coefficients 56/50
En baisse
50 km/h
LYON
MARSEILLE
Bonne
C
D
F
G
Hier
Bonne
3 5 15 34 39 40 ( 37 )
Marseille
7/12
Nice
7/14
Bastia
7/14
60 km/h
Ajaccio
8/14
Helsinki
-8/-3
Oslo
Stockholm
-9/-1
-7/-2
Tallinn
-5/-1
-9/-2
Riga
1/6
24/28
Copenhague
2/6
18/23
Berlin
Varsovie
-1/2
1/3
Londres
20/27
-1/2
-8/-3
Bruxelles
Lille
0/2
-1/2
23/30
7/17
Prague
-2/1
-15/-7
Brest
2/5
loc
Paris
Strasbourg
1/3 loc
23/28
26/30
La Rochelle
25/28
loc
2/5
2/6
ClermontFerrand loc
Toulouse
0/4
0/9
Montpellier
-2/5
2/6
3/10
1/9
Budapest
3/9
Zagreb
-1/11
Milan
18/32
Bratislava
Ljubljana
7/13
Belgrade
20/24
5/10
Sarajevo
3/8
Nice
4/12
Skopje
Ajaccio
Tirana
Rome
4/13
Barcelone
Vienne
2/6
-3/6
Lyon
2/11
Munich
-3/2
Berne
0/7
loc
6/12
25/26
-5/-1
2/8
23/29
Madrid
Vilnius
-4/0
26/30
0/9
9/15
Dublin
Amsterdam
Lisbonne
1/6
-4/0
Edimbourg
7
6
5 4 3 2 1 LOTO TIRAGES DU SAMEDI 18 FÉVRIER 2006
Montpellier
5/13
> 1200 m
loc
> 600 m
Toulouse
4/11
loc
loc
8
4 13 24 36 39 47 ( 1 )
loc Bordeaux
6/11
H
Blancs: Bujisho
Noirs: Maze
Festival des jeux de Cannes 2006
Les Noirs jouent et gagnent
Niveau ***
Linares coupé en deux
Le tournoi mythique, au cours duquel Garry Kasparov disputait l’an passé sa dernière partie officielle en
passant le relais, bien malgré lui, au Bulgare Veseline
Topalov, est scindé cette année en deux parties. La
première moitié de l’épreuve a débuté ce week-end
au Mexique et sera transférée à mi-parcours à Linares en Andalousie. En voyant la liste des participants, le lecteur comprendra pourquoi nous y prêtons une attention particulière : VeselineTopalov
(Bul, 2801, n°1 mondial), Peter Svidler (Rus, 2765,
n°3), Lev Aronian (Arm, 2752, n°4), PeterLeko (Hun,
2740, n°6), Vassili Ivantchouk (Ukr, 2729, n°7), Etienne Bacrot (Fra, 2717, n°12), t Teimour Radjabov (Aze,
2700, n°18) et Vallejo Ponce (Esp, 2650, n°53).
Aeroflot : Victoire au sprint final du Géorgien
Baadur Jobava. Sur les premières tables, trois victoires décisives ont chamboulé tout le classement. Le
Moldave Bologan est le premier à s’imposer face l’exchampion de Russie Motylev. et commence à rêver
à l’or, jusqu’à ce que Jobava fasse de même face à Malakhov. Un peu plus loin, Vachier-Lagrave crée la sensation en écrasant techniquement l’ex-champion junior de Russie, Artyom Timofeïev, 21ans.
Classement final : 1-4e Jobava (Geo, 2614), Bologan
(MDA, 2661), Sasikiran (Ind, 2670) et Mamedyarov
(Aze, 2709) 6,5 pts sur 9 ; 5-23e
Elianov (Ukr, 2655), Vachier Lagrave (Fra, 2542) etc.
Solution du n° 5566:1.Te8!
Une défense en rayon X! 1... Te1+
2.Dxe1 et 1... Dxe8 2.Dg5#! 1...
Fe6 2.Fe3. 0-1, Les noirs ab.
> 800 m
Lyon
4/8
50 km/h
22/28
E
> 700 m
> 800 m
PAR JEAN-PIERRE MERCIER
B
ClermontFerrand
2/7
Besançon
1/5
> 800 m
LES ECHECS N° 5567
A
Dijon
1/5
Poitiers
5/10
Limoges
3/6
Hier
Bonne
Bonne
> 600 m
Strasbourg
3/9
Nantes
4/9
Hier
Bonne
Bonne
Metz
3/7
Orléans
-1/8
QUALITE DE L’AIR
PARIS
Paris
3/8
Rennes
3/7
loc
loc
H:I. Incite à se remuer. - II. Une construction qui ne
respecte pas l’ordre habituel. - III. Cuvettes pleines
de flotte. Note. - IV. Marcellus y vainquit deux fois
Hannibal en Campanie. Evite au moins de perdre au
change dans sa zone. - V. Commun s’il est tendre.
S’écoule du tas de fumier. - VI. Pas tendres. Pronom.
- VII. Plus de première fraîcheur à l’épellation. Par
bonheur pour le verbicruciste, Philibert Delorme y
fit œuvre châtelaine. - VIII. Peut valoir preuve. Ne se
trouve pas ailleurs. - IX. Accaparées. - X. Bien jouée.
Une pièce brillante où alternent couplets et refrain.
- XI. Accompagne souvent le mirliton à la fête.
V:1.Trèsremués. -2. Relèvedel’êtrechezHeidegger. 3. Tellesdescuresdecardinal. SivousdevezfaireSaintCyr, vous serez juste à côté. - 4. Mit en situation difficile. LebacilledeKochn’avaitqu’àbiens’ytenir. -5. Plein
degrostasdegrains. toutàfaitconvaincu. -6. Pasgrasse. Façondeparler. -7. Symbole. Selonlalégended’une
illustration de ce bon vieux Robert, la princesse Shubad y jouait de la harpe. Ne se défait pas. - 8. Bonbonne
de grès. Base d’échanges à Accra. - 9. Mise en pièce.
Solution du No 2812:H: I. Jette tout. II. Obsédante.
III. Uranus. Il. IV. Rural. Ile. V. Dis. Claim. VI. Et.
Mousse. VII. Remerciés. VIII. Emulai. Su. IX. Pétante. X. One. Terme. XI. Stressées. V:1. Jour de repos.
2. Ebruitement. 3. Tsars. Muter. 4. Tena. Mêla. 5.
Edulcorants. 6. Tas. Lucites. 7. On. Iasi. Ere. 8. Utilisés. ME. 9. Télémesures.
Rouen
2/6
1/11
8/15
7/12
4/13
Palma
4/13
Athènes
11/16
Palerme
13/15
Tanger
Alger
Tunis
Malte
8/13
6/12
9/17
13/17
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culture
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
33
survole
l’Algérie
Arthus-Bertrand
es photographies de
l’Algérie vue du ciel
donnent l’impression
d’un pays presque désert, avec de rares humains et peu de repères
temporels. On pourrait y voir
la principale raison du succès
du nouvel opus aérien de Yann
Arthus-Bertrand. Ainsi, telle
mère en Algérie peut contempler sa demeure d’en haut, son
fils immigré en France montrer à ses enfants son lieu de
naissance, et le rapatrié français d’Algérie pleurer la maison de ses rêves. Chacun a la
mémoire de son pays fragmentée par sa propre histoire,
et a toute liberté d’utiliser
les illustrations d’Arthus-Bertrand, comme les pages d’un
album sur lesquelles on colle
les photos de famille, avant de
les recouvrir d’un papier cristal protecteur. Les textes du
journaliste Jean Daniel et de
l’historien Benjamin Stora,
en ouverture, ne trompent
d’ailleurs pas sur la marchandise. Le premier écrit: «…Je ne
retenais de l’Algérie, depuis ma
ville natale, chantée par Gide
(Blida, petite rose, «Ourida»),
que les magies de Tipaza et de
Djemila, amoureusement célébrées par Camus.» Le second
commence par:«Je n’avais jamais vu la ville où je suis né,
Constantine, de cette manière.
Une ville tout entière tassée au
sommet d’un bloc…»
Esthétique sans drame. Premier chasseur d’images à avoir
obtenu l’autorisation de mitrailler du ciel l’Algérie indépendante des militaires, Yann
Arthus-Bertrand a eu le souci de l’équilibrer en cinq dimensions: bords de mer, villes,
campagnes, montagnes et désert saharien. Face à la beauté
et à la diversité des paysages,
visions abstraites parfois hallucinantes, on reste sur ses
gardes. Comme si on se refusait à oublier, sous la pure esthétique, les drames de la décolonisation pour les uns, les dix
années terribles de guerre civile pour les autres. Le vieux
pied-noir de Sidi Bel Abbès
(surnommé jadis Petit Paris)
ne pourra pas ne pas lâcher
une larme à la vue de son «église coincée entre les habitations». Fascinante image d’un
lieu de culte chrétien, comme
encerclé, uniquement accessible par les demeures musulmanes. Mais les Algériens
L
Gros succès en librairie,
«l’Algérie vue du ciel»,
a été initié par le
président Bouteflika.
ne pourront pas regarder les
images de ces terres fertiles
sans penser aux drames et
massacres de familles paysannes arrachées à ces plaines,
à ces vallées majestueuses, il
n’y a même pas une dizaine
d’années.
Du succès de son livre, Yann
YA N N A R T H U S - B E R T R A N D
L’Algérie vue du ciel,par Yann
Arthus-Bertrand, éditions de la
Martinière, 338 pp., 42 ¤. Textes
de Jean Daniel et Benjamin Stora.
Légendes de Djamel Souidi.
Arthus-Bertrand tient à garder deux images. Celle de ces
Algériens et de ces Français
qui ont pleuré ensemble dans
les librairies en s’arrachant un
album qu’il signait à tour de
bras; et celle de la population
actuelle se réconciliant avec
elle-même.Lui, dont la famil-
le yvelinoise n’a aucun lien
historique avec l’Algérie, reconnaît volontiers que ces
photographies sont une commande du chef de l’Etat Bouteflika et de son gouvernement, mais affirme qu’il a eu
toute liberté de voler, qu’aucune photo n’a été consultée,
ni évidemment censurée, par
les autorités.
Problème architectural. Si l’on
devine derrière ce surprenant
cadeau du pouvoir algérien,
une volonté d’offrir une topologie photographique jusque-là
inconnue du plus vaste pays du
Maghreb – qui est aussi, et sur-
tout, une manière de «voir de
loin»un pays que ses dirigeants
n’ont pas envie d’offrir de trop
près aux regards scrutateurs –,
on reste souvent saisi en feuilletant l’Algérie vue du ciel.
A qui, en effet, appartient ce
pays pour garder une urbanité
si figée depuis la décolo- ● ● ●
Sidi Bel Abbès.
Une église
«coincée» entre
les habitations.
34 culture
nisation de 1962, tout en
intégrant dans le désordre des
bâtiments recouverts de paraboles de télévision? On sait
qu’au lendemain de l’indépendance, l’exode rural massif
avait perturbé la configuration tant économique, que
culturelle et sociétale de l’Algérie. On découvre que l’islam
a ici, au contraire des autres
pays arabes, un problème architectural. Les moins belles
mosquées sont celles, gigantesques, construites après
l’indépendance. On leur préfère, de loin, celles qui occupent des anciennes églises
de l’Algérie française — ces
●●●
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
L’ours dort
dernières ayant été cédées à de; et juste derrière elles, des
l’Etat algérien après 1962, par hommes prient, tournés vers
l’archevêché d’Alger.
La Mecque, c’est vendredi.
Nostalgie et incompréhension. L’Algérie ne cesse de fasciner,
D’une certaine façon, les pho- parce qu’elle est une ancienne
tographies de Yann Arthus- colonie qui n’a pas été «maBertrand confortent cette gnifiée» (c’est-à-dire défiguidée: les Algériens ont dû vivre rée) par le tourisme occidental
deux vies. La leur propre, pas comme ses proches voisins, le
toujours facile, et, par procu- Maroc et la Tunisie.
ration, celle de ceux qui ont Les 230 photographies de
été rapatriés il y a quarante- l’Algérie vue du ciel révèlent
quatre ans, virant vite à la nos- aussi un pays mal aimé, incomtalgie. Comme l’atteste cette pris par les Algériens à cause
photo surplombant la plage de leur nationalisme à fleur
algéroise de Raïs Hamidou, de peau et abandonné par
jadis nommée la Pointe Pes- les Français, minés par leur
cade. Sur la plage, des fa- culpabilité nostalgique. •
milles profitent de la baignaNIDAM ABDI
Palmarès de compromis à la 56e Berlinale.
«C’est un livre
de réconciliation»
ann Arthus-Bertrand, 59 ans, reçoit au
siège d’Altitude, son agence de photos
aériennes (plus de 400000 en stock),
enracinée juste en face de l’hippodrome
de Longchamp. S’y agite une ribambelle de
jeunes polyglottes face à des écrans d’ordinateurs où s’affichent des images du monde entier, la réputation de Yann Arthus-Bertrand,
quasi urbi & orbi, lui permettant désormais de
lancer d’autres projets, comme GoodPlanet, inventaire planétaire des six milliards d’humains (1). S’il n’est pas le premier humain à
avoir ravi d’en haut les subtilités terrestres –
sans remonter à Nadar en ballon, on se souvient des vues incandescentes de l’Américaine
Marilyn Bridges –, le succès de la Terre vue du
cielreste un événement quasi industriel: trois
millions d’exemplaires vendus, toutes éditions
confondues.
Paru à l’automne dernier, tiré à 30000 exemplaires, l’Algérie vue du ciel s’est, lui, retrouvé
quasi épuisé en quinze jours. Succès imprévu,
voire imprévisible, il a été réimprimé trois fois
depuis fin novembre. Question: que donne la
méthode YAB – abondance des couleurs, harmonie des sentiments, féerie des paysages – appliquée à l’Algérie, pays peu accessible aux photographes? «Ce n’est pas un livre comme les
autres, répond aussitôt YAB, il a été porté par les
gens. En Algérie, on aime la France, et en France,
on a peur de l’Algérie, ça ne cesse de m’étonner…»
Comment avez-vous travaillé?
Je suis allé huit fois en Algérie, entre maijuin2004 et juillet2005, et grâce à Chérif Rahmani, le ministre de l’Environnement algérien,
j’ai pu aller partout. J’ai été invité dans ce pays,
mon livre n’est pas polémique. Mon rôle, c’est de
montrer qu’on peut vivre ensemble. Qu’est-ce
que je peux dire? J’ai survolé certains lieux de
massacres, j’avais les larmes aux yeux, et je n’ai
pas essayé de faire le malin… J’avais un plan de
vol, et, comme dans tous les autres pays, je volais
à 1000 mètres, parfois 300 mètres, ou plus bas,
Y
à 30 mètres. L’école coranique, par exemple, je
suis à 30 mètres, ça fait du bruit…
Voir un pays d’en haut, n’est-ce pas
l’aseptiser?
D’en haut, ça nettoie tout, on me le reproche
toujours, j’idéalise un peu, mais c’était pareil
avec la France. L’Algérie est un pays qui m’a
touché, je ne fais pas un travail d’investigation,
c’est tout. J’étais libre, je ne me suis pas censuré, j’ai même montré un bidonville… C’est vrai,
j’ai un côté naïf et émerveillé, mais mon livre est
destiné à ceux qui s’intéressent à l’Algérie.
Qu’est-ce qui vous a le plus touché?
Autour de Bal-el-Oued, les champs d’oliviers
qui ressemblent à la Toscane. D’un seul coup,
plus de routes goudronnées, plus de fils électriques… Je ne m’attendais pas à trouver une
terre si cultivée, si entretenue, les champs sont
nickel, pourtant c’est pauvre l’Algérie, c’est un
pays riche avec des gens pauvres.
Vous avez rencontré des photographes
algériens?
Je n’ai pas cherché à avoir des contacts. Moi,
j’adore montrer, mais je suis un photographe
qui n’aime photographier que les gens qui sourient. C’est un portrait de famille. Je le vis bien,
je ne me sens pas loin des gens, pour preuve,
avec l’Algérie vue du ciel, mes lecteurs viennent me voir jusqu’ici. Je suis comblé, je rencontre mon public. Je suis un photographe très
populaire, je me sens proche des gens.
Photographier des paysages, est-ce un
signe de neutralité?
J’ai beaucoup appris sur la guerre d’Algérie, j’ai
lu Germaine Tillon. Photographier un territoire, ce n’est pas neutre. J’aborde ce pays avec un
œil neuf, si ça rend les gens heureux, tant mieux.
Moi, je n’ai pas toutes les clefs… Benjamin Stora
a écrit le texte, il était plus à mêmede parler de
son pays. C’est un livre de réconciliation, même
si ce ne sont que des images et des paysages. •
Recueilli par NIDAM ABDI et BRIGITTE OLLIER
(1) www.yannarthusbertrand.org
DR
Yann Arthus-Bertrand détaille et motive sa méthode de travail:
Ours d’or 2006, Grbavica de Jasmila Zbanic, fiction politique dans le Sarajevo de l’après-guerre.
Berlin envoyé spécial
e jury de la 56e Berlinale,
shaker présidé par Charlotte Rampling, s’est-il
distingué en décernant
son ours d’or à Grbavica,
premier film de fiction de la
suractive Jasmila Zbanic, née
en 1974, plasticienne, documentariste et fondatrice de
l’Association des artistes à
Sarajevo ? Grbavica est
une fiction politique
sur un sujet important
(comment, dans le Sarajevo de l’après-guerre,
une mère peut-elle
révéler à sa fille de
12 ans qu’elle est le
fruit d’un viol dans un
camp tenu par des soldats
tchetniks) mais, formellement,
ternie par un trop grand classicisme. Une mise en scène qui
ne l’aide pas à sortir du lot des
films à thèse.
A la truelle. Si ce prix illustre
une édition plus politique que
cinéphile, il sent aussi le compromis face à une sélection
d’où ne dépassait pas de forte
tête. Un temps pressenti par la
rumeur, The Road to Guantanamo, de Winterbottom, se
contente du prix du meilleur
réalisateur avec son coéquipier Matt Whitecross. Le prix
du jury s’est partagé entre Offside, comédie politique inspirée de l’Iranien Jafar Panahi,
et En Soap,de la Danoise Pernille Fischer Christensen, sur
l’attirance d’une femme pour
L
un travesti. Sympa, sans plus.
Un prix d’interprétation féminine mérité est allé à Michaela Klinger, impressionnante
dans Requiem, de HansChristian Schmidt. Son équivalent masculin est revenu à
Moritz Bleibtreu, au charisme
d’une saucisse de Salzbourg,
pour l’inénarrable Particules
élémentaires.
Ce palmarès un peu
coincé ne cache qu’en
partie un certain état du
cinéma mondial plus
éclaté que jamais et qui
ne va pas très fort. Les
films sont certes toujours plus nombreux,
mais la confiance dans
le geste de mettre en scène
semble disparaître, l’état de
grâce du plan. Et les seules fictions qui ont réveillé le festival
s’invitaient dans les débats
d’actualité, se foutant souvent
de leur forme, filmées à la
truelle. Dans un monde où
l’information est la donnée la
moins rare, le cinéma, qui travaille lentement, dépendant
d’une machinerie lourde, n’entend plus continuer à être tenu
à l’écart d’une circulation toujours plus rapide des images.
Symptôme de cet état des
lieux: le documentaire, jadis
parent pauvre, est redevenu
celui qui empêche les cinéastes
de dormir. Le cas Winterbottom illustre cette tendance:
quand les cinéastes réagissent
en journalistes. Karmakar a
fait plus fort encore: en donnant à entendre le discours de
l’imam radical de Hambourg,
rejoué par un acteur, il a rendu au geste du cinéaste une
fonction d’écoute que les médias trop pressés avaient négligée. Etre de son temps, voilà
l’obsession du moment.
L’auteur dans sa bulle. Du coup,
le grand perdant de la 56e Berlinale est une certaine idée
du cinéma d’auteur, plus formelle, détachée, dans sa bulle.
Terrence Malick (présenté ici
comme «eine grosse Poete des
Kino» – on n’aurait pas dit
mieux) est le seul de la promo
06 à avoir signé un film d’une
beauté telle qu’il serait impoli de lui demander d’être
contemporain. Hélas, derrière,
ce furent souvent des films
«de festival», sans originalité, dupliquant à l’infini les
formes à la mode, jusqu’à donner l’impression d’un maniérisme en phase terminale,
cuits à l’étouffée par le manque
d’inspiration.
A cela, le nouveau cinéma allemand aura échappé. Lucy, de
Henner Winckler, Sehnsucht,
deValeskaGrisebach,Requiem,
de Hans-Christian Schmidt,
Montag kommen, die Fenster
de Ulrich Köhler, ont affirmé
des personnalités plus larges
que le pavillon allemand dans
lequel on aurait tort de vouloir
les enfermer. Les gagnants,
ce sont eux. •
PHILIPPE AZOURY
culture 35
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Créé par Hergé il y a
77ans, Tintin parle enfin
le moldo-valaque, via la
sortie en Roumanie des
Cigares du pharaon et du
Lotus bleu, mais pas
(encore) du Sceptre
d’Ottokar, transposition
de la monarchie
roumaine des années
trente en Syldavie.
Tintin est déjà traduit en
cinquante langues.
A noter qu’une des
injures d’Haddock est:
«Moldo-Valaque!»
Un film turc
fait polémique
en Allemagne
Le dirigeant conservateur
Edmund Stoiber a requis hier
l’interdiction de diffusion
dans les cinémas allemands
d’un film turc traitant de la
guerre en Irak jugé
«antiaméricain et
antisémite»: relatant les
combats d’un Rambo des
services secrets turcs contre
les forces américaines en Irak,
Irak, la vallée des loups,
à ce jour le plus cher de
l’histoire du cinéma turc,
a drainé 200000spectateurs
en Allemagne. «Ce film
irresponsable ne sert pas
l’intégration mais la haine de
l’Occident», estime le
dirigeant de la CSU.
Le Conseil central des juifs
d’Allemagne a aussi appelé
à la censure du film.
Une «fabrique de jazz»
à Pantin
Le festival Banlieues
bleues, dont la
23e édition démarre le
25 février en Seine-SaintDenis, emménage à
Pantin dans une
ancienne usine
transformée en «fabrique
de jazz», lieu qui
deviendra permanent fin
février et recevra des
musiciens toute l’année.
Les locaux abriteront à
terme, autour d’une halle,
un studio
d’enregistrement,
une salle de répétition,
ainsi qu’une salle de
200places.
Batman
versus Al-Qaeda
Suivant l’exemple du film
Opération Espadon,
le prochain album du
dessinateur star Frank
Miller (dont SinCity a
récemment été porté à
l’écran) se propose de
rectifier l’organisation
terroriste Al-Qaeda. Sous
le titre Terreur sacrée,
Batman!, la chose
prouvera qu’il n’y a que
Batman pour «botter le
cul» de Ben Laden.
Théâtre. Depuis vingt ans, on monte beaucoup plus de pièces d’auteurs Les Rolling
contemporains. Pas forcément pour le meilleur… Tour d’horizon parisien. Stones acclamés
à Copacabana
Y a-t-il un auteur bien vivant?
La maison des morts de Philippe
Minyana, théâtre du Vieux-Colombier,
jusqu’au 11mars; rens.: 0144398700.
Léviathan Coccyx,de Jean-Daniel
Magnin, théâtre du Rond-Point,
jusqu’au 25février,
rens.: 08 92701603.
e qui est bien au théâtre
c’est que les comédiens
sont vivants. Fringants
ou décatis, sous les feux
de la rampe, ils le pètent
forcément, le feu. On les voit
respirer, soupirer, transpirer…
Mais les auteurs? Qu’est-ce
qu’un auteur vivant? Il y a les
classiques, morts depuis longtemps mais, revenants en rut,
ils ont toujours quelque chose
à nous dire. Et il y a cette catégorie étrange, «les classiques
contemporains», biologiquement morts et en classe accélérée de «classiquation», ainsi
Beckett, 100ans d’âge en avril,
mort plus vivant que jamais.
Et puis il y a les «auteurs vivants» et là, ça se complique.
Pas très vifs. Une horde d’«auteurs vivants» a ainsi lancé
une OPA (opération pro-auteurs) victorieuse sur le
théâtre du Rond-Point. Le
plus malin de tous, Jean-Michel Ribes, en est devenu le
directeur. Pour monter des
«auteurs vivants» au sens
strictement biologique du
mot. C’était leur cheval de bataille à tous, c’est devenu un
piège. Au Rond-Point, on ne
peut monter que des pièces
d’auteurs pas enterrés. Roland
Topor a donné sa dernière pièce à Ribes, lequel ne peut pas la
monter puisque Topor n’est
plus de ce monde depuis
avril1997. De même pour Koltès, Lagarce, interdits de
Rond-Point, ce qui n’est pas
trop grave car on les monte
souvent ailleurs. C’est plus
dommageable pour des auteurs plus méconnus comme
Ivane Daoudi, mort il y a douze ans dans la fleur de l’âge. De
là à dire qu’au Rond-Point on
joue régulièrement des pièces
plus mortes que vivantes, il n’y
a qu’un pas. Franchissons-le.
La Société des auteurs et
compositeurs dramatiques
(SACD), le Centre national des
lettres (CNL) et autres instances fournissent bourses et
aides diverses aux auteurs vivants et à leurs pièces. Tant
mieux. On n’avait jamais lu et
publié autant de pièces d’auteurs contemporains. On en
monte beaucoup plus qu’il y a
vingt ans. Tant mieux. Mais
pour un vivant Novarina qui
pulvérise le langage, combien
d’auteurs qui semblent morts
de leur vivant, écrivant des
pièces besogneuses, petits
bras? On n’a jamais vu sur
scène autant de pièces molles
C
BRIGITTE ENGUERAND
«Tintin»
en moldo-valaque
n million et demi de personnes a afflué samedi à
Copacabana, sous le fameux pain de sucre de Rio, au
show gratuit des Rolling
Stones. «Hello Brasil!»a lancé
le gymnaste jet set rocker Lord
Jagger à une foule en délire de
fans sans âge, en investissant
en souplesse la gigantesque
scène montée sur la plage
pour le supposé plus grand
concert des 44 ans de carrière
du groupe mythique de Brian
Jones. Comme en son hommage, les Stones ont entamé
sur l’air d’It’s Only Rock and
rollleur gigaconcert suivi par
des milliers de personnes postées aux fenêtres d’immeubles
de la célèbre plage, et sur une
flottille de bateaux affrétés
pour la circonstance.
Ce concert était le premier en
Amérique latine de la tournée
mondiale «A bigger bang», enLa Maison des morts de Philippe Minyana, mise en scène par Robert Cantarella au Vieux Colombier. tamée l’an dernier aux EtatsUnis. Il aura mobilisé toutes
–molles comme le sont les rait un vendeur d’aspirateurs. un lieu particulier et dans un les autorités gouvernemenviandes des jeunes cadavres. Sa mise en scène est, elle aussi, décor particulier.» Cherchez tales et policières de l’Etat de
C’était un samedi, à 19heures, très vendeuse. «Contes et lé- l’auteur, mort ou vif… •
Rio de Janeiro: plus de 15000
le TEP affichait une pièce d’un gendes de l’humanité», ainsi
JEAN-PIERRE THIBAUDAT policiers avaient été déployés
«auteur vivant», Eugène Du- l’auteur définit-il sa pièce. On
dans l’Etat, dont 2050 rien
rif. Autour de la place Gambet- l’a connu plus modeste et (1) Publié aux éditions Actes Sud qu’à Copacabana. Le récital,
ta, les boutiques regorgent de mieux inspiré. La pièce a beau papiers.
d’une vingtaine de morceaux,
victuailles, les poulets rôtis se la jouer, elle manque de (2) Editions théâtrales.
anciens pour l’essentiel, doit
(3)
Editions
Actes
Sud
papiers.
vous font de l’œil, les pont- muscles, de vertèbres, de sang. (4) Collections «Folio Essais»
faire l’objet d’un film.•
l’évêque se coupent en deux Reste l’actrice.
D’après AFP
inédit, chez Gallimard.
pour mieux vous plaire, vous Au Rond-Point, le secrétaire
êtes tenté mais, incorrigible général est aussi un auteur:
soldat, le devoir vous appelle, Jean-Daniel Magnin. Moins
vous résistez aux tentations prolixe que les deux précépour vous nourrir d’une tran- dents mais, comme eux, un
che de pièce contemporaine. gars de la famille théâtre. Il a
Le spectacle n’est pas com- souvent travaillé avec Philippe
mencé depuis dix minutes que Adrien qui a monté l’une de ses
vous savez déjà que votre esto- pièces, la Tranche. La nouvelle, Léviathan
Coccyx(3),s’inspiDe l’auteur naguère maudit
ne risque-t-on pas de passer à l’auteur re de la fin du
couple Ceausescu
fonctionnaire? C’est une question
et du père Ubu.
posée au théâtre d’aujourd’hui.
Alléchant. Elle est
mac va se tordre de douleur. montée par Agathe Alexis. Et
En 1996, la pièce avait déjà été pourtant, rien ne marche. Les
montée sous le titre Via Nega- torts sont probablement partiva(1), la revoilou vaguement tagés entre l’auteur et le metcorrigée, retitrée les Places de teur en scène. Cette fois, mêl’histoire. Les pièces bancales me les acteurs (méritants
ne se bonifient pas en vieillis- comme on dit) ne sont pas
sant. Avec le temps, Durif est vraiment à la fête.
UN SPECTACLE DE
UN SPECTACLE DE
devenu comme un notable de Mauvaise pioche? Possible.
P H I L I P P E G E NTY
S O P H I E P E R EZ
la piécette. Un fournisseur. Plus généralement, de l’auET M A RY U N D E RWO O D
ET XAVI E R B O U S S I RO N
Le spectacle du TEP aurait été teur naguère maudit ne
un désastre s’il n’avait pas été risque-t-on pas de passer à
8 MARS AU 7 AVR. / SALLE JE AN VILAR
2 2 F ÉV. A U 2 3 MA R S / S A L L E G É M I E R
sauvé, ici et là, par les acteurs. l’auteur fonctionnaire? C’est
Comme souvent.
une question posée au théâtre
Vendeur. C’est pour une grande d’aujourd’hui. Qu’est-ce que le
actrice, Catherine Hiégel, que théâtre?, se demandent
Philippe Minyana a écrit la d’ailleurs Christian Biet et
Maison des morts (2) en 1995. Christophe Triau. Ils essaient
La pièce est présentée au de répondre en 1050 pages
TEXTE
théâtre du Vieux-Colombier dans un livre qui vient de paL I O N E L G O L D ST E I N
SA
B
U
R
O
T
E
S
H
I
GAWA
RA
(annexe de la Comédie-Fran- raître(4). En voicila première
A N D O N I S F O N IA DA K I S MISE EN SCÈNE , SCÉNOGRAPHIE
çaise) dans une mise en scène phrase: «Le théâtre est d’abord
de Robert Cantarella, metteur un spectacle, une performance
T H I E R RY F L A MA N D
SIDI LARBI CHERKAOUI
en scène attitré de l’auteur. éphémère, la prestation de co2 2 F ÉVR I E R AU 1 2 MA R S / S T U D I O
2 2 AU 2 5 F ÉVR I E R / SALLE JEAN VILAR
Dans le dossier de presse, Can- médiens devant des spectateurs
tarella vend le côté pratique, qui regardent, un travail corpo- T H É Â T R E N A T I O N A L D E C H A I L L O T
pluridisciplinaire et perfor- rel, un exercice vocal et gestuel,
mant de la pièce, comme le fe- adressés, le plus souvent dans 0 1 5 3 6 5 3 0 0 0 · w w w . t h e a t r e - c h a i l l o t . f r
U
36 culture
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Ray Barretto frappe au paradis
Danse. Nouvelle création
pour dix interprètes
du chorégraphe belge.
out le gang était là, ceux de Porto
C’est de cette époque que date sa renRico, ceux de Cuba. Et parmi eux,
contre avec Charlie Parker; alors qu’avec
celui dont Bernard Lavilliers anun petit groupe il chauffe l’Apollo Bar
nonçait le furieux solo de congas
de New York pour la venue de «Bird»:
en proclamant son nom: «Ray Bar«Quand il est arrivé, tout le monde est desretto!»En 1979, le tube la Salsaa introduit
cendu de scène, mais Parker a posé la main
auprès du grand public français ce musisur mon épaule et m’a dit: “Toi, tu restes.”»
cien déjà idole des Antillais et des AfriAu tout début des années 60, Ray Barretcains de la métropole. La chanson fut ento délaisse le monde du jazz pour se
registrée à New York, avec les musiciens
mettre au rythme en vogue, la pachanga,
du label Fania. Qui répandait à travers le
successeur du mambo ou du cha-cha-cha,
monde la bonne parole de cette exubéet sort son premier disque: Pachanga con
rante musique latine, et qui avait imposé
Barretto.
toute une galaxie de vedettes: les chanAvalanche sonore. En 1962, il met sur pied
teurs Hector Lavoe ou Celia Cruz, les piasa formation la Charanga Nueva, expénistes Larry Harlow ou Eddie Palmieri, le
rimentant la fusion du rhythm’n blues
percussionniste Ray Barretto.
et des musiques caraïbes. Avec un tube
Raymond Barretto était ce qu’on appelle
à la clé: El Watusi, aujourd’hui encore
un pur «Newyorican», né à Brooklyn
propre à mettre le feu à une piste de dan(le 29 avril 1929) de parents portorise. Suivront d’autres classiques chéris
cains. L’an dernier, il racontait dans ces
des DJ branchés acid jazz : The Soul
colonnes (1) son enfance pauvre dans le
Drummers, Acid… Toute cette énergie
ghetto, élevé par sa mère, et sa décision de
musicale bouillonnante de New York est
s’engager, à 17 ans, dans l’US Army faute
bientôt canalisée par un jeune avocat qui
d’autres perspectives. Il se retrouve ainsi
a flairé son potentiel commercial: Jerry
à Munich, où il découvre le be-bop, joué
Masucci, qui crée avec le flûtiste Johnny
par des soldats noirs qui tapent le bœuf
Pacheco le label Fania.
avec des Allemands férus de «musique
L’étiquette salsa viendra à la fin des
dégénérée».
années 60. Lors des grand-messes de la
Fania All Stars, formation qui réunit les
Premier tambour. De retour aux Etatspointures maison, Barretto est un éléUnis, il achète son premier tambour. Le
ment crucial, avec son jeu spectaculaire,
trompettiste Dizzy Gillespie vient de provéritable avalanche sonore où la frappe
voquer un séisme dans le monde du jazz
puissante ne contredit pas l’approche
en introduisant dans l’orchestre la permélodique. Celui qu’on surnomme «Macussion latine du Cubain Chano Pozo.
nos duras» (mains dures) fait naître des
Quand Pozo est abattu dans un bar pour
milliers de vocations de frappeur de peau
une embrouille de marijuana en 1949, le
cubop(pour «cuban be-bop») s’est impo- Ray a vécu deux vies: une pour les musiques latines, l’autre pour le jazz. à travers la planète.
Quand la maison Fania entre en décasé, et aucune formation ne peut se passer
de son conguero. Barretto fait ainsi, au fil des années, Blakey, Max Roach, en parallèle à son activité dans dence, au milieu des années 80, Barretto retourne à
dessessionspour Gillespie, Wes Montgomery, Ken- les orchestres de danse latinos de José Curbelo, ou de ses premières amours: le latin jazz. Coup de pouce
de Lavilliers aidant, la France sera pour lui un terny Burrell, Freddy Hubbard, Lou Donaldson, Art Tito Puente (où il remplace Mongo Santamaria).
rain particulièrement réceptif, avec ses festivals de jazz
et son New Morning qui l’accueillent fidèlement chaque
année. Ses derniers disques,
relectures de classiques jazzy,
seront d’ailleurs souvent des
productions tricolores. Notamment les deux derniers:
Homage to Art Blakey pour
le label Nightbird (2003), et
Time Was, Time Is, sorti par
O +il y a un an.
Quintuple pontage. En septembre dernier, Ray Barretto
se produisait au festival Toros
y Salsa de Dax et une mémorable descarga ( jam) avec le
groupe cubain de rumba Los
Papines avait clos en beauté la
soirée. Ce devait être sa derd shaft.
in
Bl
.
.40
20
à
ir
Ce so
nière prestation en France.
.
ng
Ya
Film de Li
oqiang.
Le 13 janvier dernier, Ray
Ba
ng
Wa
et
ng
Avec Yi Xia
Barretto devait subir un quin03
20
nt
Ours d’Arge
c
tuple pontage coronarien,
En partenariat ave
dont il n’allait pas surmonter
les complications postopératoires. Il s’est éteint vendredi
dans un hôpital du New Jersey.
Ainsi se sont achevées ce que
le musicien appelait ses «deux
m
.co
-tv
te
ar
w.
ww
vies»: celle consacrée aux musiques latines et celle dédiée
au jazz.•
vsprs,concept et mise en scène d’Alain
Platel, Théâtre de la Ville, 2, place du
Châtelet, Paris IVe, jusqu’au 25février
à 20h30. Rens.: 0142742277.
Avec «vsprs»,
Le percussionniste à l’énergie musicale bouillonnante est mort vendredi à 76 ans. Platel distrait
DR
T
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la loi, c’est
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n
u
chac
vivons curieux
FRANÇOIS-XAVIER GOMEZ
(1) Interview par Maya Roy dans
Libération du 9 septembre 2005.
ous avons eu l’occasion de
défendre le travail du chorégraphe et metteur en
scène belge Alain Platel, parfois accusé de faire de la «réalité-danse» de mauvais goût.
Nombre de ses pièces eurent
le mérite de renouveler la dramaturgie, d’introduire une
danse libre sans carcan chorégraphique conventionnel, de
brasser les genres (hip-hop,
classique, disco…) et de donner à des interprètes non issus
de conservatoires ou d’écoles
(dont Sidi Larbi Cherkaoui)
l’occasion de faire de la scène
un lieu d’expression.
Alain Platel n’a pas renoncé
à ces principes de base, et les
dix interprètes de sa nouvelle
création, vsprs, sont toujours
uniques et intrigants. Comme
auparavant, les musiques du
répertoire servent de tremplin à l’écriture d’un opéra
contemporain avec présence
des musiciens sur scène. Pour
vsprs, ce sont les Vêpres de la
Vierge de Monteverdi, que
Platel sifflota enfant, objet
d’un traitement jazzo-tzigane
par l’ensemble baroque Oltremontano, sopranos, groupe
de jazz Aka Moon et deux manouches. Les musiciens trouvent une niche à leur dimension dans le monumental
décor de Peter De Blieck.
Mais ce dernier est si imposant, et objet de tellement d’attention de la part des danseurs, qu’on le prend parfois
en détestation. Montagne de
chiffons ou de sous-vêtements
blancs, ce décor se fait pente
glissante ou crèche, ne laissant
aucune chance de lui échapper. Et la danse ne nous est pas
d’un grand secours pour saisir
le propos de cette œuvre très
spectaculaire, imprégné de visions de films de Jean Rouch
sur la transe et de ceux du docteur Arthur Van Gehuchten,
neurologiste du début du
XXe siècle.
Si certains duos se distinguent
(les acrobates-contorsionnistes ou la référence à Bruce
Lee), chacun semble tout de
même vaquer à ses occupations. Jusqu’à une branlette
qui réunit toutes les identités,
donnant une image névrotique du monde, pas vraiment
fausse mais simpliste. Ce spectacle amuse et distrait une partie du public. Cela semble suffire à Alain Platel et aux Ballets
C. de la B. qui, depuis Lets op
Bach, ont trouvé une structure qui encadre parfaitement
leur propos, sans aucun risque
de débordement.•
N
MARIE-CHRISTINE VERNAY
guide 37
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Arts. A Valenciennes, une exposition collective sur
le thème de la peau réunit une centaine d’œuvres.
Création épidermique
DR
qu’il se connaît»(in l’Idée fixe).
Composé d’une centaine
d’œuvres contemporaines,
toutes disciplines confondues,
peinture, sculpture, photo, vidéo, signées d’une trentaine de
noms (Bertrand Gadenne,
Mona Hatoum, Giuseppe Penone…), l’ensemble rappelle
l’importance ainsi que l’actualité du sujet et montre que les
artistes ont beaucoup tourné
autour de la peau, abordée
sous toutes les coutures, textures, angles, en surface comme en profondeur, et pas toujours caressée, loin s’en faut,
dans le sens du poil.
Divisé en différentes étapes, le
parcours aborde ainsi «La
peau, surface d’affleurement»
(Man Ray, Valérie Belin,
Zhang Huan…), «La peau, lieu
d’incarnation de la figure humaine» (Bill Viola, Antoni Tàpies, Louise Bourgeois…), «La
peau, épreuve de contact»
(Françoise Vergier, Bruno
Carbonnet, Barry Flanagan…),
«La peau, tissu du monde»
(Robert Morris, Claire-Jeanne
Jézéquel, Richard Coplans…).
Dans quelques salles, les commissaires de l’exposition (Emmanuelle Delapierre, conservatrice du musée, et Marie-Claire Sellier, professeure d’histoire de l’art et psychanalyste) ont
pris le parti de garder acrrochées certaines
œuvres de la collection permanente (Rubens,
Watteau, Carpeaux…) pour confronter les canons de la chair.•
Chris, série «Dystopia», 1994, d’Aziz & Cucher.
Valenciennes (59). Musée des Beaux-Arts, boulevard
Watteau. Jusqu’au 13mars. Rens.: 0327225720.
A signaler qu’un colloque se tiendra les 10 et 11mars
en clôture de l’exposition.
L
e titre de cette exposition, «la Peau est ce
qu’il y a de plus profond», est évidemment directement inspiré de la célèbre
phrase de Paul Valéry: «Ce qu’il y a de plus
profond en l’homme, c’est la peau… en tant
HENRI-FRANÇOIS DEBAILLEUX
World. La chanteuse portugaise pour deux soirs au Trianon.
Mísia, parfum de mystère à Pigalle
Le Trianon. 80, bd de Rochechouart, 75018. Ce soir et
demain, 20h30. 34 à 39¤. Rens.: 0145170897. Et le 28/4 à
Gennevilliers (92), le 2/5 à Valenciennes, le 4/5 à Evreux…
ans Neige, le beau film qu’elle avait coréalisé, Juliet Berto hantait les coulisses
du Trianon, à l’époque (1981) temple du
ciné kung-fu, dans un palpitant jeu de
pistes entre dealers et policiers. Avec ses fantômes et ses fictions, la vieille salle de Pigalle la
Blanche est le décor rêvé pour le Drama Boxde
Mísia, le petit théâtre littéraire et sentimental
que dévoile la chanteuse portugaise dans son
dernier disque, dédié à sa mère: «Elle a empli
ma vie de musiques qui m’aident à survivre
quand la vie se meurt», écrit-elle dans le livret
du CD. Les boléros mexicains et les tangos argentins, chantés en espagnol, alternent avec les
fados en portugais, et d’autres voix se mêlent à
la sienne: celles de Fanny Ardant, Maria de Medeiros, Ute Lemper, Carmen Maura et Miranda Richardson qui, chacune dans sa langue, disent Fogo Preso, un beau texte du poète (et
député européen!) Vasco Graça Moura. L’une
d’entre elles sera-t-elle sur la scène du Trianon? Surprise.
Au moment où la concurrence (la rivalité?) se
faisait rude entre chanteuses de fado, Mísia a eu
l’intelligence d’insister sur ce qui la rend
unique: son univers, le jeu de miroirs qui cache
et révèle à la fois des moments de sa propre vie,
D
Théâtre
«Jouer juste»,
reprise de
haute volée
Lucernaire. 53, rue Notre-Dame-desChamps, 75006. «Jouer juste», de
François Bégaudeau, mise en scène
d’Isabelle Duprez. Du mardi au samedi
à 20heures, dimanche à 17heures.
Rens.: 0145445734.
eprise au Lucernaire d’un
des meilleurs spectacles
du off avignonnais de
l’édition 2005, Jouer juste n’a
pas varié d’un iota, ce qui
semble le propre d’un rite fétichiste incarné par un seul et
unique pantin, l’acteur Régis
Bourgade. Celui-ci joue juste
le texte de François Bégaudeau, long monologue d’un
entraîneur de foot devant ses
joueurs (Frédéric, Michael,
Eric et les autres), durant la
pause qui sépare la fin du
temps réglementaire du début
des prolongations. On est en finale de la Coupe d’Europe. Il
défend un jeu tout en passes,
évitements, déplacements,
démarquages, éminemment
collectif, idéal géométrique
qu’on nomme parfois «jeu à la
nantaise». Sauf qu’il va plus
loin, et que toute sa vie est
contaminée par cette passion:
son mode de vie, lui aussi, pratique l’évitement comme un
des beaux arts. C’est le cas avec
Julie, la fille qu’il aime, et qui
n’a pu que le larguer en prenant la mesure de cette existence de manies, de phobies,
d’organisations et de principes.
Jouer justene désigne pas seulement une manière de tâter
de la balle mais de concevoir
ses rapports avec les autres.
Tout en sachant que tout est
voué à l’échec, miné par la mélancolie et la lâcheté humaine.
Ce dandy du foot, c’est Régis
Bourgade, jeune acteur brun
tout en liane. Une sorte de
Jean-Pierre Léaud des vestiaires. Bégaudeau, quant à lui,
a publié un nouveau roman,
Entre les murs.•
R
ANTOINE DE BAECQUE
C H I C O A R AG Ã O
COMMUNIQUÉ JUDICIAIRE
Mísia a produit en 2005 Drama Box.
parfois douloureux. Comme dans un mélodrame hollywoodien (ou almodovarien) où on
n’est jamais si près de la vérité des êtres que
dans le maquillage et l’artifice.•
F.-X.G.
«Par arrêt du 12 janvier 2006,
la 11ème chambre de la Cour
d’Appel de Paris, section B, a
condamné Serge JULY, directeur de la publication du journal
LIBÉRATION et Karl LASKE,
journaliste, pour avoir diffamé
Philippe JAFFRE, dans un
article paru dans le quotidien
LIBÉRATION, le 17 octobre 2002,
intitulé “JAFFRE dans les affres
de l’affaire ELF”».
38 guide
Paris
Daniel Mille
Accordéoniste tout en
nuances, le Grenoblois à
l’univers pastel, après ses
expériences autour des
mots d’Aragon et
d’Apollinaire auprès de
Jean-Louis Trintignant,
revient avec un nouvel
album Après la pluie
etretrouveStéphane
Belmondo (bugle)
et Rémi Vignolo (ctb).
New Morning, 7-9 rue des
Petites-Écuries, 10e. 01 45
23 51 41. Ce soir 21h.
Soutien aux musiciens
de la Nouvelle-Orleans
Marc Perrone
Histoires d’hommes
Avec son accordéon
diatonique qui a
accompagné Bernard
Lubat, Michel Portal,
Louis Sclavis et bien
d’autres, Marc Perrone
prolonge l’aventure
entamée au Zèbre, il y a
trois mois à raison d’un
concert chaque lundi
contant les histoires de
Son Ephémère Passion.
Zèbre de Belleville,
63 bd de Belleville, 11e.
Rens. 01 43 5555 55.
Ce soir 20h. 20/15¤.
Un texte de Xavier
Durringer écrit pour
Judith Magre. Mise
en scène Michel Didym.
Avec Mauricio Romero
à la contrebasse.
Théâtre Pépinière Opéra,
2e. 01 42 61 44 16. Mar-sam
21h, sam 18h.
A
THÉÂTRE
Paris
Eva Perón
Soirée «en direct de
la Nouvelle-Orléans»
avec Tom Mc Dermott,
Evan Christopher, Leah
Chase… organisée par
Life live dans le cadre de
l’accueil en résidences de
musiciens louisianais par
la Ville de Paris.
Sunset, 60 rue des
Lombards, 1er. 01 40 26 46
60. 10¤. Ce soir 21h.
De Copi, mise en scène
Marcial Di Fonzo Bo.
Spectacle en espagnol
surtitré en français.
Théâtre de la Bastille,
76, rue de la Roquette, 11e,
0143574214. Mar-sam
19h30, dim 15h30.
Du 20/2 au 15/3.
P
CHANSON
Traduction des Psaumes
Henri Meschonnic, mise
en scène Claude Régy.
Avec Valérie Dréville.
Théâtre national de la
Colline, 15 rue Malte-Brun,
20e. 01 44 62 52 52. Marsam 20h30, dim 15h30.
Jusqu’au 23/2.
Paris
Catimini
A découvrir, les facéties
chantées a capella de
cette troupe vocale
quelque part entre les Iles
Galapagos et Henri
Salvador, quatre filles et
un garçon dans le vent.
Théâtre Essaïon, 6 rue
Pierre au Lard, 4e. 01 42 78
46 42. 20h. Jusqu’au 25/2.
Comme un
chant de David
Le Roi Lear
De Shakespeare, mise
en scène André Engel.
Avec Michel Piccoli
dans le rôle-titre.
Odéon-Théâtre de l’Europe
aux Ateliers Berthier, 17e.
01 44 85 40 40.
Mar-sam 20h, dim 15h.
Jusqu’au 25/3.
Le fil du Ciné
08 92 68 03 03*
TOUT LE CINÉ, RIEN QUE LE CINÉ
*Editeur Camérapress
(0,34¤ quelle que soit la distance)
Le trio en mi bémol
L’unique pièce d’Eric
Rohmer, mise en scène
Nathalie Conio.
Théâtre du Renard,
12 rue du Renard, 4e,
01 42 71 46 50. Mar-sam
19h. Jusqu’au 18/3.
La Folle et Véritable
Vie de Luigi Prizzoti
D’Edouard Baer.
La Cigale, 120, bd de
Rochechouart, 18e.
A 20h30, jusqu’au 26/2.
Rens. 0892683622.
Repas après le
spectacle (17¤).
Jouer Juste
De François Bégodeau,
ms Isabelle Duprez.
Avec Régis Bourgade.
Lucernaire, 53 rue NotreDame-des-Champs, 6e.
01 45 44 57 34.
Mar-sam 20h, dim 17h.
Jusqu’au 25/2.
Pantin
Je cheminerai
toujours
Un nouveau parcours
initiatique par la
compagnie du Voyage
intérieur, mise en scène
de Léa Dant.
Salle Jacques-Brel, 42,
avenue Edouard-Vaillant.
0140037575.
Quatre représentations
par jour à partir de 15h.
Jusqu’au 1/3.
D
À REPÉRER
Paris
Vidéodanse
150films dont 70 inédits
au menu de cette
vingt-quatrième édition.
Centre Pompidou, Foyer,
niveau 1. 0144781233.
11h-21h. Jusqu’au 20/2.
BIENTOT
NUITS BLANCHES
C
P
PHOTO
SROCK CHANSON «Les grandes années»
Par ÉRIC DAHAN
Paris
Claire Diterzi
Café de la Danse, les 22 &
23/2. Rens. 01 47 00 57 59.
Christer Strömholm
Rétrospective du Suédois
mort en 2002.
Jeu de Paume, site Sully,
62 rue Saint-Antoine, 4e.
01 42 74 47 75. Mar-ven
12h-19h, sam-dim 10h-19h.
Jusqu’au 19/3.
Antony
Raymond Voinquel
«Je sais saluer la beauté».
Maison des Arts, 20 rue
Velpeau, 01 46 74 91 24.
Jusqu’au 12/3.
Gap
Anne Lise Broyer,
Nicolas Comment
Carte blanche.
La galerie du théâtre, 137
bd G. Pompidou, 04 92 52
52 52. Jusqu’au 27/2.
Louviers
The Subways
Joseph d’Anvers
La Maroquinerie, le 22/2.
Rens. 01 40 33 30 60.
Européen, les 27 et 28/2.
Rens. 01 43 87 97 13 .
Depeche Mode
Alain Souchon
Paris- Bercy, les 21, 22
(complets) et 23/2.
0892 692 392 (0,34 ¤/mn).
Olympia, les 27 et 28/2, du
1er au 4/3 puis du 6 au 9/3.
08 92 68 33 68 (0,34¤/mn).
Nine Black Alps
Agnès Jaoui
La Boule noire, le 23/2.
Rens. 01 49 25 89 99.
Européen, les 14, 15 & 16/3.
Rens. 01 43 87 97 13.
Arctic Monkeys
Philippe Katerine
Trabendo, le 24/2.
Rens. 01 49 25 89 99.
La Cigale, le 21/3.
Rens. 01 49 25 89 99.
White Hassle
Q
WORLD
La Maroquinerie, le 24/2.
Rens. 01 40 33 30 60.
Arab Strap
La Maroquinerie, le 26/2 .
Rens. 01 40 33 30 60.
Photos de famille
The Magic Numbers
Artistes contemporains.
Musée de Louviers, place
Thorel, 02 32 09 58 55. Tlj
14h-18h, sf mar. Entrée
libre. Jusqu’au 26/2.
Café de la Danse, le 28/2.
Rens. 01 47 00 57 59.
JEXPO
Paris
Charlotte Salomon
Avant sa mort en 1943 à
Auschwitz, la jeune
femme consigne sa vie
dans un manuscrit de
1325 pages, peint et écrit.
Musée d’Art et d’Histoire
du judaïsme, 71 rue du
Temple, 3e. 01 53 01 86 53.
Lun-ven 11h-18h, dim10h18h. Jusqu’au 21/5.
Rennes
Revolt, She Said!
L’expo fait dialoguer
féministes des années 70
et artistes d’aujourd’hui.
La Criée, centre d’art
contemporain, place
Honoré-Commeurec, 02 23
62 25 10. Jusqu’au 12/3.
Gravenhurts
Café de la Danse, le 5/3.
Rens. 01 47 00 57 59.
The Nits
Le Trianon, le 6/3.
Rens. 01 44 92 78 04.
René Lacaille
& Fantazio
Point Ephémère, le 21/2.
Rens. 01 40 34 02 48.
Cheikh Lô
New Morning, le 7/3.
Rens. 01 45 23 51 41.
Adalberto Alvarez
New Morning, le 9/3.
I
GROOVE
Souad Massi
One Self
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l y avait plus qu’un air de printemps précoce
sur la plage de Malibu et Josh disait que la
terre avait déjà commencé à brûler au
moment où Carlos revenait s’asseoir après
avoir nourri les mouettes au vol pendant près
d’une heure. Elle racontait que Claude Pétin
avait ressurgi et on réalisait qu’on ne l’avait plus
revue depuis un dîner à l’Arc avec Grace Jones,
il y a près de dix ans, puis on rentrait à
Westwood où on trouvait un message de Jessica
qui venait de quitter New York, où elle avait vu
Prince accompagner Tamar au Nokia Theater.
«Le show a commencé à 0h30. Il est entré seul sur
un riff époustouflant, costume orange sur
chemise noire, et chaussures vernies à talons
également orange. Tamar et ses deux choristes
l’ont rejoint ensuite, leurs robes très sexy flottant
autour d’elles.»Suivait une description du
concert avec une première partie «soul music,
slows, ballades et
centrée sur
Tamar»et une
seconde plus
rock et funky:
«Prince était le
patron et
dirigeait tout.»
Jessica notait
qu’il jouait sur
une Fender
Stratocaster,
d’où des «solos de
guitare
fantastiquement
hendrixiens»et
qu’il faisait
chanter à
plusieurs
reprises le
«Ohého»du
Magicien d’Oz
au public mais
sur une mélodie
Carlos sur la plage de Malibu.
différente de sa
chanson, It’s Gonna Be a Beautiful Night.
Comme dans sa maison de West Hollywood,
Prince avait joué de nombreuses reprises dont
le Don’t Stop ‘Til You Get Enoughde Jackson
mais également son propre Partyman, A Love
Bizarreet un frénétique I Want To Take You
Higherde Sly Stone, laissant Jessica conquise:
«Le fantôme de Jimi nous a rendu visite.»
Le lendemain, on ralliait Paris où Romain
donnait un banquet pour ses 28ans dans le
grand salon aux verrières chinoises du
Président, nombre de convives s’envolant le
jour suivant pour l’anniversaire d’Erasmus
à Stockholm, tandis qu’Emmanuel S.bondait
le Saint pour fêter la fin de l’enregistrement
de son nouvel album.
Le week-end resterait marqué par la
performance de Yoko Ono au Châtelet, le jour
même de ses 73ans, accompagnée par son fils
Sean à la batterie et Vincent Gallo à la guitare.
Rufus Kellman était fasciné par son manteau en
vinyle et son jean noir, ses cris et gémissements
au micro et cette chaise qu’elle essayait de
grimper, comme pour atteindre le signe
«Peace»suspendu: «I was waiting forWalking
on Thin Ice, but she totally made my day»,
soupirait d’émotion le styliste scandinave.
En rentrant, on trouvait un nouveau message
de Jessica: «J’ai visionné la vidéo de Sly Stone
aux Grammies. J’étais très triste. Passé la
surprise du look, c’est un homme diminué, qui
arrive à peine à chanter, “pianote” sans savoir
ce qu’il fait, et ne peut même pas redresser la tête.
Il avait tellement de grâce et de classe dans les
grandes années. Ces images m’ont rappelé le film
de David Lynch, Elephant Man.»•
I
E R I C DA H A N
BJAZZ
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Rebonds
39
L’ex-Premier ministre libanais laisse un pays segmenté en une multitude de communautés.
Le déséquilibre fait partie
du legs de Rafic Hariri
nels de guerre libanais sans égard pour Par
leurs victimes sanctionne la déliquescen- RENÉ NABA
ce morale de la nation.
journaliste,
La prorogation du mandat de M. Elias écrivain.
Hraoui en 1995, un homme d’une plus
grande docilité face à M. Hariri, n’avait
pas donné lieu à une telle frénésie juridico-diplomatique. Les remous politiques suscités à la faveur de l’échéance
présidentielle de 2004 visaient-ils dans
cette perspective à infléchir la position
officielle libanaise sur la question palestinienne, à gommer le prestige qu’a récolté le président Emile Lahoud de son habile gestion du dossier du Sud Liban –seul
dirigeant arabe à avoir obtenu le désengagement militaire israélien de son territoire national sans l’assortir d’un traité de
paix? Cherchaient-ils à vaincre la résistance des «Etats parias» du MoyenOrient, la Syrie et l’Iran, les anciens alliés
de la guerre Irak-Iran (1979-1989) vainqueurs a posteriori d’un Saddam Hussein
destitué par ses anciens protecteurs américano-saoudiens?
Le désarmement du Hezbollah réclamé
par Washington a-t-il pour seul objectif
de satisfaire aux besoins de sécurité
d’Israël? Aurait-il
comme objectif
Au vu des dernières élections législatives,
sous-jacent de reléle martyrologue libanais semble être devenu
guer au second
un argument de brocante pour la survie d’une plan le problème
de l’énorme dette
caste politique discréditée.
générée par la polisident effectif du Liban, un homme que tique corruptive de Rafic Hariri en condiles chrétiens accusaient en catimini tionnant le redressement économique
d’«islamiser la terre libanaise»en raison du Liban au désarmement militaire de la
de ses achats massifs de biens fonciers, milice chiite? De compenser la perte de
participe d’un dévoiement de la pensée. l’influence sunnite en Irak par un renforQue l’alliance entre l’un des rares diri- cement sunnite concomitant au Liban,
geants arabes se réclamant du socialisme, dans le but de donner satisfaction à l’AraWalid Joumblatt, et un parfait représen- bie Saoudite et aux autres Etats sunnites
tant du pancapitalisme pétromonar- alliés de l’Occident, et, par la réactivation
chique proaméricain ait abouti au terme d’une alliance maronite sunnite sous
de son processus, en juin 2005, à l’évic- égide occidentale, de viser un étrangletion de la scène politique de l’ancien Pre- ment de la Syrie?
mier ministre Salim el-Hoss et du député De même, la France se serait honorée si
nationaliste Najah Wahim, deux forts elle avait réclamé avec la même fermeté
symboles de la lutte anticorruption, por- une enquête internationale pour conte en germe la marque d’une dégénéres- naître le sort d’un de ses ressortissants, le
cence de la vie démocratique du pays. juge Bernard Borrel, mystérieusement
Qu’une telle alliance ait entraîné l’élimi- décédé le 18octobre 1995, à Djibouti; ou si
nation des deux seuls parlementaires qui elle avait diligenté non une enquête inn’aient jamais pratiqué la vendetta (Omar ternationale, mais simplement une enKaramé, ancien Premier ministre lui- quête locale sur le territoire français pour
même et frère d’un Premier ministre as- révéler les conditions de la disparition de
sassiné, Rachid Karamé, et Soleimane Mehdi Ben Barka, figure de proue de l’opFrangieh dont toute la famille a été déca- position marocaine, disparu à Paris depitée par les milices chrétiennes), que cet- puis quarante ans avec la complicité
te double éviction se soit accompagnée du d’agents français.
blanchiment simultané de tous les crimi- Au vu de cette politique de duplicité, il est
rincipal latifundiaire du pays,
propriétaire de près du cinquième de la superficie d’un minuscule Etat de 10000 km2, par
ailleurs propriétaire d’un empire médiatique surpassant l’ensemble du parc libanais, disposant de
surcroît d’une fortune personnelle supérieure au produit national brut, monopolisant en outre l’expression politique de
l’islam sunnite libanais, Rafic Hariri était
d’un calibrage conforme aux spécifications de ses mentors, son parrain saoudien et le protecteur américain de la
pétromonarchie. Dans un pays désarticulé et segmenté en une multitude de
communautés religieuses, sa protubérance paraissait inadaptée aux structures
libanaises. A défaut de contrepoids, faute
de balises, ce vizir qui se rêvait à la place
du grand vizir, électron libre aux effets
centrifuges, a pu paraître comme un facteur de déséquilibre, un instrument de
déstabilisation pour le Liban et son voisinage immédiat.
Que le combat contre l’arbitraire ait été
mené par cet homme-là qui s’est longtemps vécu abusivement comme le pré-
P
à craindre que le milliardaire libanosaoudien, ancien partenaire de la Syrie,
reconverti en fer de lance du combat antibaasiste, n’apparaisse rétrospectivement
comme une victime majeure du discours
disjonctif occidental, discours prônant la
promotion des valeurs universelles pour
la protection d’intérêts matériels, discours en apparence universel mais à
tonalité morale variable, adaptable en
fonction des intérêts particuliers des
Etats et des dirigeants.
Brouillée avec les Syriens et les Iraniens,
privée de relais auprès des chiites tant en
Irak qu’au Liban, amputée de ses précédents vecteurs –les hommes providentiels qui ont maintenu la compétitivité
des entreprises françaises sur les marchés arabo-africains, l’Irakien Saddam
L’ŒIL DE WILLEM
Hussein, le Libanais Rafic Hariri, le Zaïrois Mobutu, le Togolais Eyadema–, la
France paraît à la dérive, comme à la remorque de l’Amérique, pour la récupération des miettes du marché irakien. De
surcroît, le bras de fer engagé entre le président français Jacques Chirac et son homologue syrien Bachar al-Assad s’est,
pour l’instant, soldé par l’élimination
physique de certains des principaux relais de la France au Moyen-Orient: le Premier ministre Rafic Hariri, le journaliste
franco-palestinien Samir Kassir et le
journaliste francophile Gébrane Tuéni.
Traumatisé par l’autodécapitation de ses
chefs charismatiques, le leadershipchrétien, principalement maronite, balance
entre patriarcat et matriarcat, entre la référence constante au chef spirituel ● ● ●
40
Rebonds
de la communauté maronite, le patriarche Boutros Sfeir, et le tempo politique imposé par les veuves des présidents assassinés du Liban, Bachir
Gemayel et René Mouwad, soutenues à
distance par l’épouse du dirigeant des
Forces libanaises (milices chrétiennes)
Samir Geagea, libéré en juillet 2005 au
terme d’une dizaine d’années d’incarcération. Depuis le 14février, le fils de Rafic
Hariri, Saad, les a rejointes, propulsé à la
tête de la coalition paternelle par fidélité
à la mémoire du «président martyr».
Au vu des dernières élections législatives,
les premières de l’ère post-syrienne, le
martyrologue libanais semble être devenu un argument de brocante pour la survie d’une caste politique discréditée.
Signe d’un désarroi certain, l’absence de
renouvellement du personnel politique
se traduit par le retour en force du religieux en tant que substitut au politique et
par la confirmation de la féodalité clanique en guise de leadership.
Sauf àvouloir provoquer l’exode final des
chrétiens arabes, le leadership chrétien
libanais, en particulier maronite, serait
avisé de se vivre non comme la pointe
avancée de l’Occident en terre arabe,
mais plutôt comme exerçant son pouvoir
symboliquement par délégation des
autres communautés chrétiennes du
monde arabe, et de prendre la mesure du
fait que ses options se répercutent d’une
manière ou d’une autre sur ses coreligionnaires.
Sauf àconsidérer la chrétienté comme relevant du patrimoine exclusif de l’Occident, la vocation première des chrétiens
arabes est d’être partie pleinement prenante au combat national arabe pour la
restauration de la dignité et de la souveraineté nationale de l’espace arabe, et non
comme le fer de lance du combat pour
leur soumission à l’ordre américain, une
fonction dévolue traditionnellement à
Israël dont ils seraient à nouveau les supplétifs déconsidérés. La démocratisation
de la vie arabe sera l’œuvre des Arabes ou
ne sera pas. En aucun cas elle ne devra se
faire à l’ombre des baïonnettes américaines. En tout cas certainement pas avec
les chrétiens arabes dans le rôle de
contremaîtres.
Il est des blessures qui s’ulcèrent avec le
temps au lieu de se cicatriser. L’histoire
est comptable des comportements désinvoltes lourds toutefois de servitudes futures.•
●●●
Auteur deRafic Hariri, un homme d’affaires
Premier ministre (L’Harmattan, 1999).
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Un juge devrait avoir une formation éthique qui ne le limite pas à la seule technique.
Outreau, notre oubli
de ce qu’est l’humanité
Par MICHELA MARZANO normalienne, docteur en philosophie, chercheuse au CNRS.
epuis quelques semaines, tout le monde titative. La vérité de la science. La vérité de la en cause.»Mais l’a-t-on regardé? A-t-on été cajuge. Les acquittés d’Outreau, bien sûr, technique. C’est cette vérité-là qui est un pable d’aller au-delà de son discours? A-t-on évine serait-ce que parce que ce sont eux les «mythe». La vérité judiciaire sera toujours une té de prendre au pied de la lettre ses paroles et de
victimes innocentes de ce «système in- vérité imparfaite, car humaine. Il faut le dire et le faire donc exactement comme lui, quand il prefernal». Mais aussi les journalistes et les redire. Car comment ne pas comprendre que nait au pied de la lettre les accusations des uns et
politiciens, les experts et les honnêtes gens. Le tant qu’on cherche la vérité scientifique, on reste des autres?
plus souvent avec la même inhumanité et les prisonnier du même mécanisme? On veut réfor- A plusieurs reprises, la parole de Fabrice Burgaud
mêmes partis pris qui ont transformé l’affaire mer le système pour éviter dans le futur des dé- tremblait, s’étranglait, tombait en poussière… A
d’Outreau en une catastrophe. On demande ré- sastres semblables. Mais tant qu’on attend le sys- plusieurs reprises, ses yeux s’écartaient en laisparation, on cherche les coupables, on désire tème parfait, on montre ne rien comprendre à ce sant voir son désarroi… Pouvait-on demander
quelque chose d’autre? Tout était là. Son humaqu’ils payent. On accuse avec véhémence la Jus- qu’est l’humain.
tice au nom de la justice et de l’humanité. Et c’est Alors que faire? On dit qu’à l’Ecole nationale de nité tout d’abord. Car l’humanité s’exprime beauainsi qu’on tombe progressivement et inexora- la magistrature il faut des formations à «l’hu- coup plus dans les défauts d’un discours qui ne
main». On n’apprend pas l’humanité – on est hu- convainc pas, que dans des formules de regrets et
blement dans le piège de l’inhumanité…
Les jugements tombent vite. Chacun a ses solu- main. Tout le monde l’est. Mais, hélas, on peut ap- d’excuses fabriquées avec habilité et sûreté. Mais
tions. «C’est le fonctionnement de l’instruction prendre à oublier son humanité sous le couvert pour le comprendre, il faudrait être soi-même
qu’il faut repenser.» «C’est la culture du doute de la scientificité et de la vérité. C’est pourquoi un humain.
Au nom de l’humanité, on l’acqu’il faut apprendre.» Mais ce n’est pas
cuse. Mais dans les accusal’existence d’erreurs qui prouve qu’un sys- N’importe quelle réforme du système ne nous mettra
tions, encore une fois, c’est l’intème fonctionne ou pas. Dans tout systèpas
à
l’abri
des
erreurs
et
des
défaillances
humaines.
humanité qui triomphe. La
me, à un moment où l’autre, il y a des erCar
le
propre
de
l’humain,
c’est
de
commettre
même inhumanité du procureurs. Croire que des réformes du
reur… lorsqu’il répond devant
système peuvent nous mettre à l’abri de des erreurs…
la commission avec maîtrise et
l’erreur, signifie n’avoir rien compris du
tout. Cela signifie aller droit vers d’autres «dé- juge devrait avoir une formation éthique qui lui contrôle, lorsqu’il apparaît bien expérimenté,
sastres». Car ce que révèle de terrible l’affaire donne un recul suffisant pour ne pas tomber lorsqu’il propose comme explication du désastre
d’Outreau pour notre société, c’est bien autre dans le piège de la technique. Mais les juges d’au- le «mythe de la pédophilie»! S’est-il bien rendu
chose: notre oubli de ce qu’est l’humanité. N’im- jourd’hui ont-ils encore, comme jadis un La Boé- compte de ses affirmations hasardeuses? Comporte quelle réforme du système ne nous mettra tie ou un Malesherbes, une culture philoso- ment appeler «mythe»quelque chose de bien réel
pas à l’abri des erreurs et des défaillances hu- phique? Savent-ils que les grands juges ont et de terrible? Comment oser mettre en doute
«la parole des victimes»?
maines. Car le propre de l’humain, c’est de com- toujours été avant tout des humanistes?
Depuis toujours, la philosophie s’oppose à la ré- Si le résultat de tout cela devait être le «doute» demettre des erreurs…
Alors, que faire? Faut-il, comme on l’entend par- duction de l’humain à une simple «matière» d’ex- vant la parole des victimes, alors on aura atteint le
tout, introduire la «culture du doute»? Je «dou- pertise et de savoir, et apprend la complexité du maximum d’inhumanité. Car si la parole des victe» fort de la pertinence de cette formule. S’est- vécu. Mais aujourd’hui, on préfère les «experts» times – comme toute parole humaine, comme la
on interrogé sur la fonction même d’un juge? Un aux philosophes pour former les juges. N’est-il parole du juge Burgaud ou celle du procureur… –
juge est celui qui tranche, décide, partage. Un ju- pas temps de s’interroger sur cette «inhumani- ne doit pas être prise au pied de la lettre, elle doit
ge est celui qui cesse de douter, justement parce té» technique de ceux qui «savent», qui font des toujours être prise au sérieux. Car elle dit bien des
qu’il faut trancher. Même si le fait de trancher, «statistiques», qui donnent des «certitudes»? choses, tout en en cachant d’autres.
comme tout autre acte humain, n’est pas indem- Car c’est encore au nom des certitudes qu’on pré- Réfléchissons alors, bien sûr, à des réformes du
tend aujourd’hui «juger» Fabrice Burgaud et plus système judiciaire. Mais toute réflexion profonne de la faute et de l’erreur.
Juger, c’est écarter les doutes. Mais écarter les généralement la justice. Après l’audition du juge de ne pourra pas se passer d’une prise de
doutes ne signifie pas aboutir à la Vérité. Il fau- d’instruction, on n’a pas évité à nouveau le piège conscience de la perte d’humanité que révèle,
drait peut-être tout simplement arrêter avec le des certitudes. «Il manque d’humanité.» «Il n’a dans notre monde, cette quête dangereuse de
mythe de la vérité. Une vérité mesurable et quan- pas d’affects.» «Il n’est pas capable de se remettre perfection et de vérité… •
D
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AJ2006
2 mois à 49¤
Rebonds 41
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
QUOTIDIENNE
Par PIERRE MARCELLE
Une leçon
d’Allemagne
«Clemenceau», le coût d’une vie
atmosphérique en améliorant la qualité de l’air
uperbe victoire d’associations françaises
peut passer par l’exigence de normes sur les rejets
antiamiante et de Greenpeace, ce qui reste
de gaz polluants, normes dont la mise en œuvre est
du Clemenceauva donc faire route vers
coûteuse. Ou encore, vacciner l’ensemble des
Brest. Superbe victoire, aussi, de l’éthique,
’un côté, il y a le
enfants contre certaines maladies mobilise des
tant il est choquant de faire faire, par
vacarme extravagant
ressources importantes, mais limite le nombre
d’autres travailleurs soumis à des normes de
que font les stratèges
d’infections fatales. Dans chacun des cas, des vies
sécurité peu contraignantes, le sale boulot de
du Pentagone et des étatspeuvent être sauvées, à un certain coût. Ce coût,
«déconstruction» de ce qui fut un superbe navire.
majors coalisés pour
rapporté au nombre de vies sauvées, renseigne sur
Et pourtant… pourtant, quelques bruits viennent
justifier l’invraisemblable
la valeur implicite accordée à la vie humaine ou,
gestion, depuis deux ans, du troubler ce triomphe de la morale: ici, le maire de
plus précisément, sur le consentement à payer
dossier Torture sur la ligne Brest s’inquiète de la perspective de voir cette
Guantanamo-Abou Ghraib. carcasse pourrir lentement dans la rade; ici encore,
De l’autre, il y eut, mercredi l’association écologiste Robin des Bois s’inquiète
du risque d’une prolongation de l’exploitation de
dernier, la décision de la
navires hors d’usage, ou d’une revente à des sociétés
Cour constitutionnelle
Par PIERRE-YVES GEOFFARD
offshore s’affranchissant du droit français. Là-bas,
allemande de s’opposer à
des ouvriers du chantier d’Alang menacent
une loi, entrée en vigueur
pour augmenter la probabilité de ne pas décéder.
d’entamer une grève de la faim pour protester
début 2005 et autorisant
Ainsi, un programme de prévention routière qui
contre la perte d’emplois directement causée par
l’armée à abattre des
coûterait 500millions d’euros et permettrait de
aéronefs civils détournés à cette décision de rapatriement. Quelques bruits
faire passer le nombre de tués sur les routes de
qu’on aimerait tant ne pas entendre, mais qui
des fins terroristes.
5000 à 4500 coûterait 1million d’euros par vie
viennent nous rappeler que la bonne conscience,
Soit, contre la sorte de
sauvée. La mise en œuvre d’un tel programme
jamais, ne s’acquiert à bas prix.
banalisation du mal que
Car si les chantiers de recyclage de navires en fin de révèle que la valeur sociale attribuée à une vie
révèlent les images
vie sont au Sud, c’est bien, en effet, parce que le coût humaine est supérieure à 1million d’euros. Au
toujours plus barbares
de cette activité y est plus faible qu’au Nord. Et si les contraire, un gouvernement décidant de ne pas
auxquelles force est de
entreprendre ces mesures attribuerait à une vie
coûts y sont plus faibles, c’est entendu, c’est en
constater que les opinions
humaine une valeur inférieure à 1million d’euros.
bon gré mal gré s’habituent partie parce que les réglementations visant à
De même, les choix individuels (accepter ou
(inéluctables horreurs de la défendre la santé des travailleurs y sont moins
refuser un travail plus risqué mais mieux payé)
protectrices. En termes économiques, les
guerre, n’est-ce pas…), le
renseignent sur la valeur implicitement attribuée à
exigences de sécurité reposent sur la «valeur
providentiel sursaut d’un
la vie (ou plus exactement, à la probabilité de ne pas
statistique de la vie humaine». Or, cette valeur
Etat de droit. Dans les
décéder). Car, si la vie n’a pas de prix, les ressources
vagissements du millénaire diffère sensiblement d’un pays à l’autre.
disponibles sont limitées: il est impossible
nouveau, se confrontent et Dans chaque pays, au Nord comme au Sud, de
d’entreprendre toutes les actions qui réduiraient,
nombreuses mesures peuvent être entreprises
s’opposent ainsi deux
conceptions de ce qui nous pour réduire le risque de mortalité, des travailleurs un tant soit peu, le risque de décès… De nombreux
reste de «dignité humaine». ou des consommateurs. Par exemple, construire un organismes, notamment dans le domaine des
transports, de l’environnement, ou de la santé,
rond-point sur une route de campagne est cher,
C’est bien celle-ci que les
attribuent d’ailleurs une valeur explicite à la vie
juges allemands invoquent mais diminue le nombre d’accidents mortels. De
statistique. Ainsi, le département des transports
même, réduire les décès liés à la pollution
en effet comme principe:
«On ne tue pas des innocents
de manière programmée»,
disent-ils (fût-ce pour en
protéger d’autres est sousentendu), arguant que «en
disposant unilatéralement
de la vie (des passagers) au
nom de l’Etat, on conteste à
Par MICHEL TRÉGUER réalisateur, écrivain.
ces victimes la valeur qui
revient à l’homme».Et de
es idées et des hommes: toute l’histoire de la Bref, nous savons désormais que les idées aussi ont
préciser que, même sans
philosophie peut se ramener à ce face-à-face une histoire, une langue, des auteur (e) s, des interpassager ou ne véhiculant
entre d’une part des concepts prétendant à prètes…
que des terroristes, un
l’éternité, portés par des mots qui n’ont pas Ainsi, il n’est pas du tout indifférent qu’une même
appareil ne saurait être
besoin de respirer, de manger, de dormir, pour du- idée soit exprimée par une femme ou par un homabattu sans modification de rer, et d’autre part des humains qui pensent ces me, qu’un pays soit dirigé par l’une ou par l’autre.
concepts mais qui, eux, sont à la fois vivants et mor- Même s’il existe dans ces pays nombre de mâles
la Loi fondamentale.
Dans cette leçon de morale tels, c’est-à-dire changeants, souffrants et voués à dont l’histoire, la légitimité et le programme souet de dignité venue d’outre- finir. Les physiciens, qui pourtant vieillissaient tiennent la comparaison avec les leurs, l’élection
Rhin nous apparaît comme comme leurs congénères, se sont longtemps d’Angela Merkel en Allemagne et celle de Michelle
surtout remarquable le fait contentés dans leurs équations d’un temps «au car- Bachelet au Chili ont un poids symbolique consiré» qui ne prenait pas en considération le sens de dérablement plus fort.
qu’elle nous vient d’outreson écoulement.
Rhin, où certain régime
inventa au siècle dernier le Dans l’histoire de la pensée, le
concept d’Untermensch (en XXe siècle s’est particulière- On sent monter au front, dans nombre d’éditoriaux
français,«sous-homme»,
ment distingué en soulignant de presse et de livres annoncés, la grosse cavalerie
comme dit l’autre).
l’importance des conditions des bonnes âmes défendant le statu quo machiste…
Alors que, au nom ou au
d’énonciation d’une idée ou
prétexte de la guerre qu’ils
d’un théorème. Depuis Bohr au nom de la démocratie!
mènent contre le
et Heisenberg, la science reterrorisme, des Etats
nonce à séparer le phénomène observé du disposi- De même, chez nous, les citoyens de droite comme
pourtant démocratiques
tif observant. Depuis Marshall McLuhan (et Régis de gauche, ses adversaires comme ses partisans, sanient partout ces «valeur»
Debray), nous savons que le signifié est l’esclave du vent bien que l’accession de Ségolène Royal à la présignifiant: «le médium est le message» parce qu’il est sidence de la République vaudrait au pays un élecet «dignité» humaines, le
en lui-même «massage» cérébral. «La langue est trochoc d’une tout autre nature, ouvrirait des
silence qui accueille le
propos des juges allemands fasciste», avait même osé affirmer Roland Barthes horizons autrement nouveaux que celle d’un de ses
dans sa leçon inaugurale au Collège de France en camarades éléphants, confrères ou mari, quelles
nous trouble. Est-ce à dire
1977: «Non pas tant parce qu’elle nous empêche de que soient leur complicité et la similitude de leurs
que leur plaidoyer pour la
dire que parce qu’elle nous oblige à dire.» Par engagements.
dignité humaine apparaît
exemple, impossible d’échapper en français à un S’il est temps de le dire, c’est parce qu’on sent moncomme incongru, ou qu’il
choix entre le masculin et le féminin, tandis que ter au front, dans nombre d’éditoriaux de presse et
est d’ores et déjà devenu
l’anglais et l’allemand ont des substantifs neutres. de livres annoncés, la grosse cavalerie des bonnes
inaudible?•
D
S
ÉCONOMIQUES
américain recommande toute action de prévention
routière dont le coût est inférieur à 3millions de
dollars par vie sauvée; de même, le projet Externe
de l’Union européenne, visant à évaluer les coûts
environnementaux de l’énergie, fixait une valeur
de la vie humaine à 3,1millions d’euros.
De nombreuses études économiques tentent de
mesurer cette valeur statistique de la vie révélée
par les choix, collectifs ou individuels, effectués
face à un risque de mort. Les estimations varient
fortement d’une étude à l’autre, mais un fait
marquant se dégage: les pays riches dépensent
davantage que les pays pauvres pour réduire les
risques de décès, ce qui indique une valeur
statistique de la vie plus élevée au Nord qu’au Sud.
D’un point de vue éthique, il est légitime de refuser
ce raisonnement, d’estimer qu’une vie de
travailleur sauvée ne vaut pas davantage s’il s’agit
d’un ouvrier français ou indien, et donc d’exiger les
mêmes normes de sécurité là-bas et ici. Mais les
ressources qui seraient alors mobilisées dans la
prévention des risques professionnels ne seraient
plus disponibles pour construire des routes moins
dangereuses, payer des médecins, ou vacciner les
enfants. Ainsi, un programme de vaccination global
(DTP, BCG, polio, rougeole) coûterait de l’ordre de
1000 à 2000euros par vie sauvée.
En somme, la triste affaire duClemenceau vient
éclairer d’un jour cruel cette dure réalité: l’Inde est
plus pauvre que la France. Le rapatriement de la
carcasse, pourtant déjà désamiantée à 90%,
pourrait coûter au minimum 10millions d’euros
aux contribuables français. Soyons conscients
qu’une telle somme, autrement dépensée, aurait pu
sauver entre 5000et 10000vies en Inde… •
Pierre-Yves Geoffard est chercheur au CNRS.
(Lundi prochain, «Economiques»
avec Thomas Piketty)
L’accession de la candidate socialiste à la présidence ouvrirait d’autres horizons que celle d’un de ses camarades éléphants.
A programme égal, avantage Royal
D
âmes défendant le statu quo machiste… au nom de
la démocratie!
Et c’est aussi la réponse systématique de François
Hollande à ses interviewers: «Peu importe qui sera
le candidat du Parti socialiste; ce qui compte, c’est
l’idée, c’est le programme.» On reconnaît là le culte
de l’abstraction hérité du christianisme et de la Révolution française, sacrifiant la variété des humains réels à la beauté d’un modèle universel. «Plus
de juifs ni de Grecs, plus d’hommes ni de femmes: tous
unis et semblables en Christ», disait déjà saint Paul.
«Plus de juifs ni de Bretons, reprendra l’abbé Grégoire: tous citoyens de la même nation, dotés des
mêmes droits.»
C’est une forme de pensée qui a certes accompagné
l’émancipation des humains et la montée mondiale de la démocratie, mais qui a beaucoup vieilli et
que les récentes émeutes de «Français différents»,
dans les banlieues nouvelles de nos villes anciennes, n’ont pas rajeunie.
Le monde est fait d’idées universelles, de briques
d’éternité; mais aussi de personnes, de corps, de
vies, de cultures, de temps, d’événements, d’évolutions, de ruptures. Bien sûr, le programme compte:
certaines femmes sont de gauche, d’autres de droite ou d’extrême droite. Mais, à programme égal, il
n’est pas du tout indifférent que son champion soit
une championne. Qu’advienne le nouveau! Vive les
femmes! Ségolène, entre autres. •
Dernier ouvrage paru: Aborigène occidental, Mille et
Une Nuits 2004.
42
Grand angle
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Primaires UMP pour la mairie de Paris
Coupsbas
au
Adhésions truquées, sondage douteux,
échanges vachards, le «processus
démocratique» promis par Sarkozy pour
désigner le candidat de la fédération de
Paris tourne à la surenchère entre les
quatre candidats en lice : Goasguen,
Lellouche, Panafieu et Tiberi.
ls ne sont rien, rien de rien. Ils
ne sont même pas à zéro, ils
sont négatifs…»Ainsi parlait
Nicolas Sarkozy, il y a trois
ans, quand il évoquait en privé les incessantes querelles
de la droite parisienne. Un
jugement sévère motivé par
le spectacle que donnait alors
l’opposition municipale,
traumatisée par la défaite
historique de 2001: des élus
déboussolés et sans leader,
repliés sur les beaux quartiers de la capitale, et surtout
incapables d’incarner une alternative crédible à Bertrand
Delanoë. En prenant la tête
de l’UMP, il y a quinze mois,
Nicolas Sarkozy décide donc
de faire le ménage dans ce bastion de la
Chiraquie. «Divisions, oppositions, règlements de comptes doivent cesser», martèle
le nouveau président, qui affiche alors son
ambition de faire de la fédération de Paris
la nouvelle «vitrine»de l’UMP. La méthode, calquée sur celle du PS, consiste à
mettre les quatre députés concurrents
(Claude Goasguen, Pierre Lellouche,
Françoise de Panafieu et Jean Tiberi) en
compétition devant les militants. Après
plus de six mois de campagne, et à
quelques jours du premier tour de ces
primaires visant à désigner leur candidat
pour les municipales de 2008, le «processus démocratique»promis par Sarkozy a surtout été marqué par des chiffres
d’adhésion truqués, des sondages douteux, une surenchère éditoriale et des
échanges de mots vachards…
«Grande bourgeoise», «provincial»,
«droite popu» et «vieux sage»
Consanguinité politique oblige (ils ont
tous travaillé à l’Hôtel de Ville du temps
de Jacques Chirac), les quatre prétendants peuvent difficilement se distinguer
par l’originalité de leur programme. Pour
séduire les militants, chacun dresse donc
son autoportrait flatteur. Françoise de
Panafieu, 58ans, maire du XVIIe, compte
sur sa notoriété et… son sexe pour se faire
élire: «J’ai cette particularité d’avoir une
tête connue dans la population, dit-elle.En
tant que femme, je suis aussi perçue comme
pragmatique, protectrice et portant des valeurs de solidarité.» La dame affiche un
comité de soutien politico-mondain
REMY ARTIGES
casting
(Thierry Breton, Véronique Genest,
Alexandre Jardin…).
Pour mieux dénoncer cette «grande bourgeoise», fille de ministres gaullistes (les
Missoffe) et héritière d’une richissime famille industrielle (les Wendel), son ennemi juré, Claude Goasguen, 60ans, député
du sud du XVIe et président du groupe
UMP au Conseil de Paris, se présente
comme le provincial qui a réussi tout seul
à Paris. Il raconte volontiers comment,
jeune Toulonnais, il est arrivé dans la capitale où il s’est hissé au sommet de la hiérarchie de l’Education nationale (docteur
en droit, recteur d’académie, inspecteur
général de l’Education nationale). Ces
titres respectables n’empêchent nullement l’ancien militant d’extrême droite de
faire preuve de muflerie.Fin janvier, lors
d’un débat, il accusait sa rivale de vouloir
transformer les primaires en «concours de
beauté». «C’est un misogyne fini», tranchet-on dans l’entourage de Panafieu.
Le même soir, un autre challenger, Pierre
Lellouche, 54 ans, renvoyait Panafieu à
ses accointances patronales en appelant
les militants à rejeter la candidate «de l’establishment». En privé, l’ancien conseiller
diplomatique de Chirac s’indigne de la
voir «soutenue par la presse Dassault et
Lagardère». Pour se démarquer, lui se
présente comme un élu de la «droite popu»et rappelle qu’il est, des quatre, celui
qui est élu le plus «à l’est de Paris»–sa circonscription est à cheval sur les VIIIe et
IXe arrondissements. Ce fils d’artisan devenu expert en relations internationales
s’est attribué le rôle du trublion, toujours
prêt à dénoncer l’ambiance «trop convenue»de la campagne interne à l’UMP.
A 70ans, l’ancien maire de Paris Jean Tiberi, élu sans discontinuer depuis trentehuit ans, fait figure de «vieux sage» aux
yeux de ses concurrents –manière de le
renvoyer sous son arbre. «Après avoir perdu la mairie en 2001, il fait son tour d’honneur, analyse un élu UMP de Paris.Xavière et lui savent qu’ils peuvent compter sur
les militants du Ve et il ne fait pas vraiment
campagne.» Deux des challengers (Goasguen et Panafieu) ont d’ailleurs été ses adjoints à l’Hôtel de Ville. Tiberi est le seul à
ne pas avoir publié de livre; le seul, aussi,
à ne pas courir les plateaux télé.
«Chantages à l’investiture»
Voilà donc les quatre concurrents qui,
parmi les dix en lice au départ, ont réussi
43
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
veille. Mais rien n’est encore perdu pour
la fédération UMP de Paris: si les inscriptions pour voter par Internet sont closes,
il est possible d’adhérer jusqu’au samedi
25février, jour du vote manuel(3).
Tendue depuis le début de la campagne,
l’ambiance est devenue franchement exécrable ces dernières semaines. Le 22novembre, le Parisien publie un sondage
Ifop dont les résultats mettent la droite
parisienne sens dessus dessous: pour
46% des sympathisants de droite, Panafieu serait «la mieux placée»pour battre
Bertrand Delanoë en 2008. Loin devant
Jean Tiberi (24%), Pierre Lellouche
(17%) et surtout Claude Goasguen, bon
dernier avec 5%. Quelques jours plus
tard, un «blanc» des Renseignements généraux (une note non signée) arrive dans
les rédactions: le sondage aurait été payé
et commandé par le Medef, Panafieu
étant à la fois proche d’Ernest-Antoine
Seillière (autre héritier de la famille Wendel) et de son successeur, Laurence Parisot, par ailleurs présidente de l’Ifop. La
maire du XVIIe dément formellement.
Jure que le «blanc» des RG est un faux et
qu’elle est victime d’une «basse manœuvre». Claude Goasguen et Pierre Lellouche éructent contre ce «sondage bidon» et saisissent la commission des
sondages. Verdict: c’est bien le Club Lutèce –un think tank patronal proche de
Panafieu– qui a commandé et payé cette
étude. Son président, Jérôme Dubus,
adjoint de Panafieu et délégué du Medef,
est contraint de démissionner, non sans
avoir dénoncé au passage le travail de
quelques «vieilles officines»…
Rumeurs de parachutage
à récolter les parrainages nécessaires
pour se lancer dans les primaires. Les
autres, à la notoriété moindre, ont tous
été éliminés de la compétition, faute
d’avoir pu réunir, durant l’été 2005, le
parrainage écrit d’au moins dix élus de
droite parmi les 200que compte la capitale. Les premiers doutes sur la sincérité
de cet exercice de démocratie inédit à
l’UMP datent de cette époque. Plusieurs
élus font alors état de «menaces» et de
«chantages à l’investiture»exercés par les
cadors de l’UMP afin d’obtenir le maximum de signatures. «Ce sont des méthodes héritées des années passées, dénonce Jean-Luc Romero, conseiller
régional UMP(1). Fausses adhésions, utilisation de moyens illégaux et de fichiers,
coups bas, pressions, manipulations, insultes, chantages…» Pour ajouter à la
confusion, cette première sélection laisse sur le bord de la route un autre
impétrant virtuel, Bernard Debré, 61ans,
qui se met à tirer à vue sur la «mascarade»des primaires: «Aucun des quatre n’a
la carrure pour devenir maire de Paris.
Plusieurs sont mouillés dans des affaires
plus ou moins louches ou sordides […]. Ils
ont tous perdu Paris en 2001», balance le
Bien avant l’ultime confrontation qui doit
avoir lieu ce soirau cirque d’Hiver en présence de Sarkozy, la charte de bonne
conduite censée régir les relations entre
les quatre concurrents est définitivement
passée aux oubliettes. Cible de toutes les
critiques, Panafieu, qui fait figure de favorite, a été accusée de s’afficher trop souvent aux côtés du président de l’UMP lors
des grands rendez-vous du parti –et de récupérer ainsi une part de sa popularité.
Après moult protestations et une nouvelle réunion au sommet qui s’est tenue le
1er février dans le bureau de Sarkozy, ce
dernier a dû promettre aux trois autres
candidats de se montrer avec eux au
moins une fois avant le jour du scrutin…
député du XVIe, fin octobre, dans une 7000adhérents), la fédération va devenir Début février,
«Vu la manière dont s’est déroulée la camen quelques mois la première du pays à Paris. De gauche pagne, on voit mal comment les trois perinterview au Journal du Dimanche.
dants vont pouvoir se ranger derrière le
Quoi qu’il en soit, Sarkozy donne en sep- avec pas moins de… 24000cartes! Mais, à droite : Claude
tembre le coup d’envoi d’une campagne très vite, beaucoup se révèlent des «adhé- Goasguen, Pierre vainqueur», observait la semaine dernière un chiraquien qui n’a jamais cru à cette
officielle qui va durer près de six mois. rents de copinage», accuse un conseiller Lellouche,
«parodie de démocratie». Sarkozy avait
Avec chacun son slogan(«Réveillons Pa- UMP de Paris, Xavier Chinaud: «Cela fait Françoise de
pourtant fait promettre aux concurrents
ris»pour Pierre Lellouche, «Paris 2008, des mois que j’attends d’avoir accès aux fi- Panafieu et Jean
qu’une fois désigné le challenger officiel
Paris gagnant» pour Panafieu, etc.), des chiers pour les vérifier.»Des familles en- Tiberi face aux
de Bertrand Delanoë, les querelles intesréunions de quartier quasi quotidiennes tières ont adhéré du jour au lendemain en Jeunes de l’UMP.
passant directement par la fétines cesseraient, au moins jusqu’aux
dération départementale,
élections municipales. Un pari quasi imFrançoise de Panafieu a été accusée de trop
possible qui entretient les rumeurs de pas’afficher avec Sarkozy. Ce dernier a dû promettre sans que les instances locales,
rachutage sur la capitale après 2007 et
aux trois autres candidats de se montrer avec eux privées de fichier, puissent
contrôler la réalité de ces rall’élection présidentielle, comme ce fut le
au moins une fois avant le jour du scrutin.
liements opportuns. Cerise
cas avec Philippe Séguin en 2001. Dans les
couloirs de l’UMP, il se murmure de plus
et des joutes électorales à répétition. sur le gâteau: le vote par Internet étant
en plus fort qu’une grosse pointure (JeanTrois des quatre candidats(2) se fendent admis dans la semaine précédant le preLouis Borloo, Michel Barnier et, pouraussi d’un livre. Inutile d’y présenter un mier tour (du 21 au 24 février), certains
quoi pas, Dominique de Villepin) pourrait
programme original ou d’y parler de Paris vont voter sans jamais avoir milité ni asfinalement s’imposer sans être passé par
(Lellouche en dira à peine deux mots), sisté à une réunion de circonscription.
la case primaires… Tout ça pour ça.•
l’essentiel c’est d’être invité à la télévision
Faux
«blanc»
des
RG
pour se rappeler au bon souvenir des élecTHOMAS LEBÈGUE
teurs.
Devant le tollé provoqué par ces adhé(1) La Nuit des petits couteaux, de Jean-Luc
Pour donner quelque légitimité démo- sions douteuses, le fichier subit une sévèRomero, éd. Jean-Claude Gawsewitch.
(2) Allô Paris bobo de Claude Goasguen
cratique au scrutin, Sarkozy impose au re cure d’amaigrissement. Le 3février, à
(Ramsay), Illusions gauloises de Pierre
président de la fédération UMP de Paris, trois semaines du premier tour, Philippe
Lellouche (Grasset), et Mon Paris gagnant de
son ami Philippe Goujon, de doubler le Goujon ne décompte plus que 9635 adFrançoise de Panafieu (L’Archipel).
nombre d’adhérents d’ici au vote. Ex- hérents à jour de cotisation – soit 40% des
(3) Si aucun candidat n’obtient la majorité
absolue, un second tour est prévu le 4 mars.
sangue au début de l’année 2005 (environ adhérents officiellement revendiqués la
Portrait
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
50 Cent, 30 ans, ancien petit dealer devenu rappeur superstar aux Etats-Unis, gère
sa carrière artistique comme une multinationale et brandit sa soif de fortune en étendard.
u fond d’un couloir,
juste à côté de l’escalier de service, un colosse surveille la porte.
50 Cent donne ses interviews. L’hôtel est
en face de l’ambassade américaine à Paris. Il y a donc assez de militaires dans la rue pour que le
rappeur se sente en sécurité.
L’ancien dealer, originaire du
Queens (à New York), prétend ne
pas craindre la mort, mais adore
entretenir cette atmosphère autour de lui. A l’entendre, il porte
toujours un gilet pare-balles, ne
se déplace qu’en voiture blindée.
Le trentenaire à la musculature
ostentatoire (deux à trois heures
d’exercices quotidiens), à la fortune estimée entre 50 et 70millions de dollars selon le New York
Times, affiche un sourire avenant puis explique: «La mort est
l’une des plus grandes formes de
divertissement. Ça divertit les
gens de savoir que je puisse être en
danger. Ils se disent: 50Cent s’est
déjà fait tirer dessus neuf fois de
suite. Il y a une forte possibilité
pour que quelque chose lui arrive.
Il faut l’observer, ne surtout pas
rater ce moment.»
Bienvenue dans le monde du
gangsta-rap, où l’on joue à faire
peur et à se faire peur. Jusqu’à aujourd’hui, aucun artiste du genre
n’avait autant joué le jeu et donné
autant de preuves de «street credibility».Cette semaine, 50 Cent,
de son vrai nom Curtis Jackson,
raconte sa vie par le menu dans
un film intitulé comme son premier album, vendu à 11 millions
d’exemplaires en 2003, Get Rich
or Die Trying (Deviens riche ou
meurs en essayant). C’est l’épilogue d’une longue opération
marketing, jalonnée par un livre
autobiographique, Ma vie, ma vérité(City Editions), un jeu vidéo,
Bullet Proof, une ligne de basket
pour le compte de Reebok, une
eau vitaminée (il ne boit pas d’alcool) et un deuxième album, The
Massacre,qui a battu le record des Beatles
en classant quatre chansons dans le top
dès sa première semaine de sortie. «Aujourd’hui, même en ayant vendu près de
20 millions d’albums, fanfaronne-t-il, je
gagne encore plus d’argent avec les
contrats que je passe avec des grandes
marques.»
50 Cent a réussi. Ses raps, ses clips: des
menaces, des insultes pour ses collègues
rappeurs, des mises en scène de sa vie à
coups de rafales de mitraillette, ou des
friandises érotiques mises en musique
par Dr Dre et Eminem… Le film le montre
plus touchant, moins cynique, mais adepte de règles qui resteront certainement
dans le jargon de ses fans, dont celle-ci:
«Ne montre jamais d’affection, ça pourrait
te tuer.» Réussir ou mourir retrace en
grande partie sa vie, «à 75%»dit-il, et débute par un braquage suivi de la fameuse
Rapetout
A
fusillade devant la maison de ses grandsparents.Curtis Jackson n’a jamais connu
son père. Sa mère, Sabrina, a 15ans quand
elle le met au monde. Elle confie immédiatement son nouveau-né à ses parents,
qui élèvent déjà huit autres enfants. Curtis Jackson Senior travaille chez General
Motors, Meulah, sa femme, fait quelques
ménages. Sabrina deale de la cocaïne et
offre à son fils une petite moto pour ses
6ans: «Elle m’a habitué, très tôt, à avoir de
belles choses»,se rappelle le rappeur. Elle
refuse de le voir revenir pleurnicher après
une bagarre, l’oblige à aller se venger,
l’emmène sur son lieu de travail où elle
vend sa drogue. Un jour, on la retrouve inanimée chez elle. Elle a été empoisonnée,
puis asphyxiée au gaz. Curtis n’apprendra
les circonstances de sa mort que bien plus
tard, de la bouche de sa grand-mère,
quand cette dernière découvrira que son
enfants: «Il faut qu’ils éteignent
les radios, mais aussi le câble, l’Internet. Je ne pense pas que ce soit
une bonne chose d’écarter les
mômes de la réalité, d’éviter de
leur montrer le monde tel qu’il est.
Pour moi, un parent qui agit comme cela prépare son enfant à
échouer. Si vous ne les exposez pas
à ce qui se passe dehors, ils vont
être naïfs toute leur vie, et seront
incapables de gérer des situations
dures.»
Son pseudo, 50Cent, c’est le nom
d’un gangster de Brooklyn spécialisé dans le braquage des
chaînes en or des rappeurs. Le
premier titre de l’apprenti rappeur sera d’ailleurs un texte où il
raconte comment il compte détrousser les artistes en vue de
l’époque. 50 Cent crée sa notoriété sur ces provocations. Signé
chez Columbia, il est lâché par la
major en 2000 quand elle apprend qu’il a été victime d’une fusillade. Une des neuf balles qui
l’ont atteint lui laisse un trou
dans la joue. Il s’en sort miraculeusement. Sur la paille, il tente
un dernier coup en s’appuyant
sur le marché des cassettes enregistrées par les DJ, les mixtapes,
véritables réseaux indépendants
du rap. Il offre aux DJ des raps
gratuits: «En matière de marketing, le seul modèle que je connais
c’est le monde de la drogue. Je savais que la seule façon de m’introduire sur un nouveau marché,
c’est de distribuer des échantillons
gratuits. Il fallait que je trouve
une clientèle avant d’engranger
des profits.» C’est comme ça
qu’Eminem le remarque et lui
propose un contrat. 50 Cent est
d’un cynisme carabiné qui se
manifeste également quand il
parle de l’autre monde, celui qui
n’est pas régi par les codes du rap,
dont il a d’ailleurs sa propre définition. Un clip n’est pas une
œuvre artistique mais «une pub
TV de trois minutes» et un rappeur n’est bon que s’il vend beaucoup de disques. Alors républicain ou démocrate, 50 Cent?«Ça dépend. Au
moment de payer mes impôts, je suis plutôt
républicain. En même temps, j’ai été
pauvre pendant vingt-septans de ma vie, je
ne suis riche que depuis trois ans. Donc, je
petit-fils deale aussi du crack. Lui prétend
en vendre depuis l’âge de 12 ans. «Notre
quartier ne ressemblait pourtant pas à un
ghetto, ce sont des petites maisons, mais
Juillet 1975
Naissance à New York. voilà, personne n’a beaucoup de revenus et
la tentation d’obtenir de l’argent illégale1983
ment est trop forte.» Des reMort de sa mère.
mords? «Ce n’est pas moi qui «Au moment de payer mes impôts, je suis plutôt
1995
faisais venir le crack dans le républicain.»
Naissance de son fils.
pays, je n’étais pas un grossiste,
2000
Victime d’une fusillade. juste un dealer à la petite semaine», se la- suis forcément un peu démocrate.»
ve-t-il les mains, tout en racontant qu’il 50Cent est allé chanter pour les troupes
2002
pouvait gagner 4000dollars par semaine. en Irak mais n’a aucun avis sur l’avenir de
Eminem et Dr Dre
A 20ans, après un séjour en prison puis la l’Irak après l’intervention américaine
le signent sur
leurs labels respectifs. naissance de son fils, il décide d’arrêter le dans ce pays: «On y est allés pour le pétro«bizness»: «Pour que mon enfant n’ait pas le et pour être les premiers sur le marché.
2003
Sort son album
à vivre ce que j’ai vécu.»Aujourd’hui, son Mais bon, on fait ça aussi dans le rap, on
Get Rich or Die Trying. fils suit sa scolarité dans une école privée, veut tous être le premier et remporter un
2006
à l’abri, mais 50 Cent ne comprend pas maximum de blé.» •
Sortie du film
que certains parents se plaignent d’enSTÉPHANIE BINET
Réussir ou mourir.
tendre ses raps dans la bouche de leurs
photo JERÔME BONNET
50 Cent
en sept dates
LIBERATION
I
emploi
A l’heure
de
Big
Blogger
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Tous les lundis
Aux Etats-Unis, les
détectives payés par
les entreprises utilisent
désormais les blogs
pour fouiller la vie des
candidats à l’embauche.
MILES HYMAN
Los Angeles correspondance
a cyberdétective américaine
Cynthia Hetherington donne
souvent des formations internes en entreprise. Récemment, une séance de travaux
pratiques sur les blogs a semé
la panique chez les huiles
d’une entreprise. «Plusieurs
dirigeants avaient des enfants
à l’université, et je me suis mise
à dénicher leurs blogs», raconte la fondatrice de l’agence
Data2Know à Haskell, dans
le New Jersey. Les
cadres ont vite constaté que la jeune
génération parade
volontiers sur des blogs, ces
carnets personnels publiés
par millions sur le Web. «Je
n’oublierai jamais la tête du directeur de la sécurité de la boîte
en découvrant une photo de son
fils à une soûlerie étudiante, un
préservatif sur la tête», s’amuse la détective. Qui plus est, Junior était en dessous de l’âge
légal pour boire de l’alcool, fixé
à 21 ans aux Etats-Unis. Cynthia Hetherington comprend
la bouffée d’angoisse pa- ● ● ●
II emploi
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
ternelle: «La photo est
peut-être drôle aujourd’hui,
mais que se passera-t-il pour ce
garçon dans deux, cinq ou dix
ans, quand un employeur potentiel tombera dessus au gré
d’une recherche Internet?»
Négligence. La détective fait
référence à la probabilité
d’un background check, une
enquête de vérification des antécédents, très courantes aux
Etats-Unis avant l’embauche
d’un candidat. L’Amérique, secouée par le 11 septembre et les
grands scandales financiers,
tient à savoir qui elle emploie:
en 2005, 81% des entreprises
disaient enquêter systématiquement, ou presque toujours, sur les candidats à l’embauche (contre 51% en 1996,
selon la Society for Human
●●●
Resource Management, une
association de 200000 professionnels des ressources
humaines). Or, plus de la moitié des entreprises fureteuses
ont recours à l’externalisation,
confiant la tâche à des cabinets
de détectives. Dans un cadre
tout à fait légal (le candidat
signe une autorisation), les enquêteurs vérifient quantité
d’informations accessibles
dans le vaste «domaine public» américain, via des bases
de données sur l’Internet réservées aux professionnels. Le
candidat traîne-t-il un casier
judiciaire ou une condamnation pour vol? A-t-il déclaré
banqueroute? Son parcours
professionnel peut-il être
confirmé en tous points? Autant de choses à vérifier pour
se protéger d’amendes fédérales (pour recrutement d’immigrés clandestins munis de
faux papiers, par exemple) ou
de procès pour negligent
hiring(embauche négligente)
qu’une secrétaire harcelée par
un supérieur peut mener
contre son entreprise. Les
blogs permettent de savoir si
leurs propriétaires utilisent
souvent des gros mots, font
des blagues machistes…
Tatouage. Une «filature» de la
personne sur le Web est la
cerise sur le sundae. Pour
l’heure, «très peu de détectives
savent naviguer dans l’univers
des blogs», constate Hetherington, une ancienne bibliothécaire devenue pionnière
des recherches en ligne. Mais
selon elle, les habitudes chan-
gent avec la généralisation
d’outils de recherche de blogs
tels que Technorati, Feedster
et les moteurs de recherche
spécialisés comme Google
Blog Search et Icerocket. «Les
blogs contiennent des pépites
d’information souvent intéressantes sur le caractère de la personne: si un cadre blogue sur le
triathlon qu’il court annuellement, on peut en conclure qu’il
est en bonne forme», explique
Peter Turecek, manager à
Kroll Inc., la multinationale
d’investigation. Un bémol,
toutefois: «Les blogs étant produits par les gens eux-mêmes,
il faut toujours prendre leur
contenu avec prudence… Ils ont
tendance à exagérer leurs exploits.»Une directrice des ressources humaines du New
Aux Etats-Unis, refuser un candidat à cause d’un blog est interdit, en théorie.
Les non-dits de l’embauche
ux Etats-Unis, les entretiens sont
soumis à des lois strictes: ainsi,
l’employeur ou le détective qui l’assiste ne peuvent pas demander à
un candidat s’il est marié, a des enfants en
bas âge ou pratique une religion qui l’empêche de travailler certains jours. En revanche, les enquêtes sur les employés déjà présents au sein de la société (avant une
opération de fusion, par exemple) ou en
cas de problèmes sur le lieu de travail
(fraude, harcèlement) sont soumises à de
moindres contraintes. Un employeur a-til alors le droit de déterrer sur le blog d’un
candidat les informations qu’il ne peut
pas évoquer lors de l’embauche? Et comment peut-il utiliser des informations intimes étalées sur les blogs?
Selon l’avocat de Los Angeles Marvin
Krakow,un employeur ou son détective
MILES HYMAN
A
en jours d’absence ou en assurance médicale). Selon Marvin Krakow, le patron
alerté par ces révélations peut réagir en
toute légalité en demandant au candidat
de se soumettre à un examen médical afin
de prouver qu’il peut assurer son travail.
Et prendre officiellement en compte les
seuls résultats de l’examen. Selon Ted
Moss, de l’agence Background
«Les propos tenus sur les blogs Network, un détective n’est
font partie du domaine public.» pas censé rapporter certaines
comme les proMarvin Krakow, avocat informations,
pos critiques émanant du blog
peut-on savoir si un employeur est influen- d’une autre personne que le candidat à
cé par telle information? C’est impossible à l’embauche ou des photos publiées sans
autorisation de l’intéressé. Le privé est
prouver.»
Le détective peut donc rapporter à l’em- également censé contacter l’auteur du
ployeur qu’un candidat tient un blog isla- blog pour corroborer par des informamiste ou raconte par le menu sa maladie tions. •
chronique(et risque donc de coûter cher
E. R. (à Los Angeles)
ont parfaitement le droit de connaître des
choses que le candidat crie sur les toits
d’Internet. «Les propos tenus sur les blogs
font partie du domaine public», expliquet-il. En revanche, utiliser ces informations pour enfreindre les lois antidiscrimination est interdit. «Et c’est là où ça
devient délicat,ajoute l’avocat. Comment
emploi III
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
En France, le journal de bord sur
le Net sert surtout à soigner son profil.
Prêt pour
être «googlé»
l y a son nom (Emmanuelle
Pometan), son numéro de
téléphone (06 11 34...), ses
coups de cœur cinématographiques (les Amants réguliers de Garrel). Dans son
blog, Emmanuelle ne cache
ni le prénom de son enfant
ni le récit de ses entretiens
d’embauche: «Je vais bientôt
connaître l’entretien téléphonique avec la RH d’Ikea pour
un poste de responsable communication magasin. Euh, y a
des Ikea sur Paris ou juste en
zone-industrielle-inatteignable ?»
Le blog d’Emmanuelle est
consacré à sa recherche d’emploi. Le ton est léger, comme
ce jour de février où elle annonce qu’elle a retrouvé du
boulot: «Me voilà de nouveau
confrontée aux dures lois de la
vraie vie: le réveil (nan, on est
toujours pas copains). Le comment-je-m-habille-aujourd’huiest-ce-que-je-vois-unclient-nonbon-ben-un-jean.»
Réputation. L’idée d’un blog lui
est venue après un entretien
d’embauche dans une agence
de com. «On m’a demandé:
“Vous avez un blog, vous?” J’ai
senti que ne pas en avoir avait
joué en ma défaveur.» En septembre dernier, elle ouvre son
site et égratigne l’agence d’intérim Caméléon. «Je me suis
grillée avec toutes les agences
d’intérim du secteur.»Mais elle
aime dire que c’est aussi grâce
à son blog qu’elle a décroché
son nouveau job. Son ancienne boîte lui avait prêté un bureau pour chercher du travail.
Au bout du couloir, une entreprise de communication: «La
responsable s’est intéressée à
moi en lisant mes billets. Il a
fallu l’Internet pour passer de
l’autre côté du couloir!»
En France, tenir un blog n’est
pas encore trop risqué car peu
de détectives se lancent aux
trousses du moindre faux pas
I
Jersey, Bette Francis, confiait
au Philadelphia Enquirer apprécier les blogs comme une
fenêtre sur le style de communication d’un individu, son
éthique de travail et son expertise. Mais la consultante en
management Marlyn Kalitan
comparait ces sites personnels
à des tatouages: un caprice de
jeunesse, pas toujours bien
réfléchi mais qui laisse des
traces.
Démasqué. A la conférence
mondiale des détectives WIC,
à Las Vegas, l’automne dernier, Cynthia Hetherington a
démontré l’imprudence de
certains employés frustrés.
Une recherche Google sur le
nom d’une entreprise et la
phrase «Je hais mon boulot»
conduit directement au blog
de salariés grincheux divulguant toutes sortes d’informations. Comme celui de cette serveuse du restaurant
Applebee’s, qui annonce qu’elle déteste son patron et n’a pas
de scrupules à se faire porter
pâle. «Ces blogueurs écrivent
des choses très personnelles,
comme s’ils parlaient à des
amis, en oubliant complètement que n’importe qui peut les
lire», note Cynthia Hethe-
cherche sur le Web. En revanche, une enquête de 500
euros ou plus sur un dirigeant
inclura une incursion poussée
sur la Toile. Les cadres bloguant rarement eux-mêmes,
il faut se renseigner sur leur
surnom dans l’entreprise et se
diriger vers les sites de leurs
subordonnés. C’est ainsi que
Ted Moss, président de Background Network
(2) à Cleveland, a
«Plus de la moitié des
démasqué le préentreprises américaines tendant à un poste
confie des enquêtes à des de chef de laboracabinets de détectives.» toire en Californie.
«Il affirmait avoir
je me rends compte que j’ai été un passé prestigieux dans l’arvraiment stupide», constate le mée que nous ne pouvions pas
confirmer auprès des autorités
blogueur.
«Le problème avec les blogs, militaires», raconte le détectic’est que les entreprises clientes ve. Mais le nom dudit candine souhaitent pas forcément dat figurait sur plusieurs
nous payer pour le temps de blogs, et pas en des termes
recherche supplémentaire», flatteurs: «Ce type avait des enremarque Steven Kelly nemis et était accusé par d’anBrown, un détective de Flori- ciens collègues de travail d’être
de auteur du manuel Idiot’s un escroc dans son industrie.
Guide to Private Investigating. Ce qui nous a permis de remonUn background check véri- ter le fil et de vérifier qu’il avait
fiant le passé d’un caissier de menti sur plusieurs points de
supermarché ou d’une nou- son CV, perpétuant une tradinou de base, pour l’équivalent tion de mensonges sur ses agisde 30 à 150 euros, sera rare- sements.»
ment complété par une re- «Egosurf». Laveille sur le Web
rington. Aux Etats-Unis, plusieurs douzaines d’employés
ont été licenciés à cause de
propos tenus sur leur blog (1).
Dont Michael Hanscom. L’auteur du blog Eclectism fut viré
de Microsoft en 2003 pour
avoir publié une photo ironique d’ordinateurs Apple,
prise dans un hangar du géant
informatique... «Avec du recul,
70000
des informations circulant
sur son propre nom, une pratique surnommée «egosurf»
est désormais essentielle pour
savoir quel type d’information employeurs, collègues de
travail et concurrents
connaissent, risquent d’apprendre ou pensent savoir –
dans le cas d’un blog tenu par
un homonyme par exemple –
sur vous. Avant d’être embauché par Sun Microsystems,
l’informaticien Tim Bray (3)
savait que ses interlocuteurs
lisaient son site. Il aconclu un
entretien d’embauche avec la
question d’usage: «Est-ce que
vous souhaitez savoir quelque
chose de plus à mon sujet?»
avant de s’entendre répondre: «Non, c’est un peu
commesi vous étiez à “code ouvert.”» •
EMMANUELLE RICHARD
(1) Le journaliste Curt Hopkins,
basé dans l’Oregon, tient une
liste de blogueurs licenciés sur
son blog:
morphemetales.blogspot.com/
2004/12/statistics-on-fired
-bloggers.html
(2) Background Network est
l’une des rares agences
d’investigation publiant un blog:
www.crimcheck.com/news
(3) www.tbray.org/ongoing
8%
interactif. De toute façon,
«l’article L-121.8 du code du travail interdit de faire une enquête de préembauche», explique
Christian Borniche, inspecteur privé. Mais «googler» les
candidats (taper leur nom
dans un moteur de recherche
pour lire les pages qui les
concernent) est devenu systématique chez les chasseurs
de têtes. «Le salarié doit soigner sa “réputation en ligne”,
prévient Yannick Fondeur,
économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires). Dans son blog,
mais aussi à travers toutes les
traces, souvent indélébiles, qu’il
peut laisser sur l’Internet: le
message posté sur le blog d’un
autre, la signature d’une pétition en ligne... On a tendance à
abandonner l’anonymat sur la
Toile, à assumer ce qu’on dit. Ce
qui peut devenir problématique: un message vite écrit sera
plus ou moins bien orthographié, une réaction qui semblait
pertinente le paraît moins
l’émotion retombée...»
Vieux CV. Sur son propre blog,
Jacques Froissant, directeur
du cabinet de recrutement Altaïde, égrène ses conseils pour
«gérer son image sur l’Internet»: «Faire un audit complet
de tout ce que vous pourrez
trouver sur le web vous concernant. Eliminer toutes les informations gênantes, comme le
vieux CV laissant apparaître
des divergences de dates avec le
nouveau dans les mains du recruteur...»Surtout faire de son
propre blog «une vitrine qu’on
maîtrise», où on prendra soin
de répéter souvent son propre
nom. Pour que notre blog arrive en tête des pages nous
concernant. Bien avant notre
photo avec les cousins lors de
la dernière fête familiale à
Chasseneuil-du-Poitou. •
S.F.
http://buzzunivers.typepad.com
Un proviseur
nouveaux blogs par jour
de firmes américaines veillent
suspendu pour un blog trop gay
elon David Sifry, de l’outil de recherche de blogs
Technorati, 70 000 nouveaux blogs seraient
créés chaque jour. Toutefois, personne ne sait
exactement combien sont mort-nés, actifs ou
fantômes. On estime également à 27,2 millions le
nombre de blogs sur l’Internet. C’est 8 millions de
plus qu’en octobre dernier.
n règlement concernant les blogs d’employés et
leur contenu auraient été mis en place dans
environ 8% des entreprises américaines, selon
une estimation de la Society for Human Resource
Management en 2005. Certaines firmes installent
des logiciels capables de détecter des mots et
des expressions. Mais, incapables de tout surveiller,
les entreprises enquêtent souvent sur les blogs après
avoir été alertées sur un dérapage ou un problème.
e proviseur d’un lycée de Lozère a été menacé
de révocation en janvier pour avoir évoqué son
homosexualité sur son blog. L’Education nationale
l’accusait de contenir des écrits et des photos
pornographiques. Selon le recteur, le proviseur avait
«failli à son devoir d’éducation pour avoir diffusé des photos
et des commentaires qui lui font perdre sa crédibilité». Suite
à un recours gracieux du blogger auprès du ministère,
la sanction a été ramenée à une suspension d’un an.
s
U
L
IV emploi
Livre
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
Chronique de la vie au travail
La médecine du
travail
auscultée
Entre la tragédie de l’amiante
Elise et les 40 chômeurs
(50000à 100000 décès d’ici
2030) et l’émergence de ce
que Christophe Dejours,
psychiatre-psychanalyste,
appelle «la souffrance au
travail»,les limites sinon
l’impuissance de la médecine
du travail apparaissent
cruellement à travers
l’ouvrage la Santé au travail.
Une situationquin’estpas
récente,selonsesauteurs,et
qui s’explique par la genèse
etl’histoiredelaprotection
médicaledessalariés. Le livre
retrace toute l’évolution de
cette «sous-médecine»,de
1880 à nos jours,et explique
pourquoi les médecins du
travail ne sont pas parvenus,
en France, à conquérir un rôle
significatif dans la prévention
et ledépistage des maladies
professionnelles.
E.P.
La Santé au travail, Stéphane
Buzzi, Jean-Claude Evinck,
Paul-André Rosental, collection
«Repères», Ed. La Découverte.
Un site pour les
patrons à domicile
Ce sera la fin des affichettes
sur les caisses enregistreuses
des boulangeries, affirme
le dossier de presse. La
Fédération nationale des
particuliers employeurs
(Fepem) lance un site pour
particuliers, qu’ils soient
employeurs ou salariés. Les
familles, en quête de nounou
ou de jardinier, peuvent déjà
poster leur petite annonce en
ligne. Les demandeurs
d’emploi aussi. Le site ne les
mettra en relation qu’à partir
d’avril, une fois les annonces
accumulées. Puis deviendra
progressivement payant.
VUILLEMIN
Services
Elise est conseillère emploi pour RMistes dans travail et j’allais m’occuper de ceux qui n’en ont
l’Hérault, le département français au taux de pas.
«En ce moment, j’ai quarante dossiers à suivre,
chômage le plus élevé.
c’est beaucoup. Il faudrait pouvoir recevoir cerepuis deux ans, époque à laquelle j’ai fer- tains demandeurs d’emploi tous les deux ou trois
mé mon auberge, je cherchais un travail jours pour qu’ils restent motivés. Les boulots
fixe, avec mon bac + 5 et mes 52 ans. Il y a pour les personnes sans emploi qui viennent me
huit mois, j’allais m’inscrire au RMI quand on m’a voir, je tente de les trouver sur les sites Internet
proposé de m’occuper de réinsertion dans une ou par le bouche à oreille. J’essaie aussi de faire
association prestataire de services pour l’ANPE. un travail de boîte de placement en mettant en
Je passais tout d’un coup de l’autre côté: j’avais un avant, auprès des employeurs que je prospecte,
«D
Femmes cadres liguées en ligne
Cadres
Les cadres devraient profiter
en 2006 d’une nouvelle
augmentation (+ 4%) des
recrutements, selon une
étude de l’Apec (Association
pour l’emploi des cadres).
Le nombre d’embauches de
cadres devrait être compris
cette année entre 168 000 et
178 000, dans l’ensemble des
secteurs, excepté l’industrie.
Il faut remonter aux années
1999-2001 pour retrouver
de tels chiffres.La raison : le
nombre de départs en
retraite qui a continué de
croître l’an dernier : + 16% par
rapport à 2004.
Recueilli par CORINNE HYAFIL
Promo du mois
www.particulieremploi.fr
Le recrutement
en hausse
les avantages des contrats spéciaux et
autres emplois aidés auxquels ont droit
RMistes, chômeurs longue durée, etc.
Mais les emplois se dégottent au compte-gouttes. Je suis censée leur trouver
du travail et je passe mon temps à régler
des problèmes éloignés de l’emploi.
Sans être travailleur social, je suis souvent à la limite du rôle de l’assistante sociale car la position de RMiste enfonce
souvent la personne dans une désocialisation complète. Beaucoup de mes
«clients» viennent d’arriver dans le Sud
et se retrouvent isolés, seuls, sans famille, sans travail et souvent sans voiture. La misère n’est pas moins pénible au
soleil.
«J’ai six rendez-vous par jour de 9 à
17 heures. Il arrive que des gens ne se
présentent pas, je dois veiller à ce qu’ils
aient une absence justifiée. Trois rendez-vous manqués et je dois avertir la
commission locale d’insertion.
«Lors du premier entretien, je fais un
accueil administratif: «Depuis combien
de temps êtes-vous au RMI? Avez-vous
des enfants?»Puis on commence à discuter: «Comment vous êtes-vous retrouvé au chômage? Avez-vous un CV?
Quelle a été votre carrière?» Dans la
plupart des cas, il y a une fracture. Un
vécu trop lourd depuis l’enfance, un divorce, beaucoup de problèmes d’alcool.
Une sorte de tabou impose qu’il ne faut
pas écrire sur les fiches administratives
“problème d’alcool” ou “problème de
drogue” mais “problème de santé récurrent”.
Par exemple, un RMiste était en voie de clochardisation, un gars intelligent qui avait sombré
dans l’alcool. Je l’ai remonté peu à peu: il devait
intégrer une entreprise d’insertion dans la taille
de pierre. Mais les subventions auprès des associations de formation vont être réduites et il se
peut qu’il ne soit pas pris. Je ne me vois pas le lui
annoncer: ce projet est devenu son principal
moteur.»•
l y a une petite fille avec des ailes d’ange dans le
dos sur la home page,deux silhouettes roses et
féminines sur un fond de costards noirs. En lisant le sommaire, on croirait un nouveau site féminin tendance girlie. Sauf que, dans la rubrique
«chouchous», sont classées les bonnes nouvelles
de la cause féminine: «La Finlande toujours présidée par une femme»ou «Claire Malaurie, présidente de la chambre à la Cour des comptes». Et
dans les «épinglés»: «EDF boute les femmes hors
du CAC 40», «Prix des ingénieurs de l’année: huit
hommes, zéro femmes. Plus jamais ça!»
Le blog «Du rose dans le gris» est la première
vitrine d’un «réseau de réseaux» de femmes
cadres supérieurs: Accent sur Elles, Action de
Femme, Arborus, European PWN, Administration Moderne ou HRM Women. Leur but: «Devenir un groupe de réflexion de référence, et aller
plus loin dans nos actions pour une plus grande
mixité dans la vie publique»,rapporte Lamia Ahmadaly, membre d’Accent sur Elles, qui encourage la promotion des femmes à Accenture. Le
I
blog rappelle qu’«aujourd’hui, les femmes comptent pour 56% des diplômés de l’enseignement supérieur, 30% des cadres en entreprises et… seulement 7% des conseils d’administration».
Ce partage d’expériences sera utile. Une étude
passionnante du Lab’Ho, l’Observatoire des
hommes et des organisations, financé par Adec-
Du rose dans le gris se veut
un groupe de réflexion
pour davantage de mixité.
d’égalité, quand ils sont construits de cette manière, ne concernent qu’une petite partie des salariées:
les futures mères, les femmes avec jeune enfant,
celles qui veulent réussir “comme les hommes”.»
Il s’agirait donc plutôt de permettre aux femmes
de «vivre mieux» dans un «monde d’hommes».
Résultat: «On fait entrer une minorité dans le
groupe dominant sans changer les règles. La minorité ne réussit – évidemment – pas son intégration, échoue ou renonce… phénomène qui sert de
CQFD: la preuve que les femmes ne seraient pas
faites pour ça.» Les auteurs de l’étude donnent
quelques pistes pour une politique de la diversité «moderne»: «ringardiser les stéréotypes
sexués»,par exemple en valorisant la parentalité
en général, et pas seulement maternelle, en modifiant profondément les règles d’avancement et
de promotion, les calendriers de carrière
(concentrées entre 28 et 35 ans) au lieu de se livrer au «rattrapage» pour les seules femmes.•
co,rappelle en effet que nombre d’entreprises qui
se sont lancées dans des «accords sur la diversité» perpétuent les discriminations et les stéréotypes en voulant bien faire… Quand elles s’attellent à l’égalité professionnelle, ces entreprises le
font selon une approche très classique. «La plupart des mesures ne s’adressent qu’aux femmes.
(…) L’égalité, ce serait de mieux protéger les
femmes dominées contre les hommes qui incarnent
SONYA FAURE
la force et occupent le pouvoir. Maisles chantiers www.durosedanslegris.fr — www.labho.fr
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LIBERATION
Tous les lundis
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
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• Psychiatrie infanto-juvénile
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VI emploi
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LUNDI 20 FÉVRIER 2006
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au centre d’une agglomération de 120 000 habitants, recrute
pour son SERVICE DE SOINS INFIRMIERS A DOMICILE
(capacité actuelle de 92 places dont 2 pour personnes handicapées,
3 postes d’infirmiers coordinateurs adjoints
et 17 postes d’auxiliaires de soins), un
INFIRMIER COORDINATEUR
ADJOINT
H/F
Sous l’autorité du Responsable du service, vous participez à l’élaboration du projet de soins
individualisé ainsi qu’au diagnostic infirmier. Vous organisez et vous assurez le suivi des soins
et veillez aux différents réajustements nécessaires. Vous coordonnez et animez l’équipe de votre
secteur, assurez les transmissions quotidiennes avec les auxiliaires de soins. Vous participez
activement aux projets du service et de la direction.
Vous êtes enthousiasmé par l’animation d’une équipe et ce dans le cadre d’une approche du
soin individualisée. Poste à temps incomplet à 1211 heures par an.
Candidat potentiel à ce poste de catégorie B, nous vous invitons à adresser votre candidature :
lettre de motivation manuscrite, photo et curriculum vitae, à : Madame le Maire
Direction des Ressources Humaines - Place de la Liberté - BP 2119
26021 Valence Cedex - Tél : 04 75 79 22 37,
avant le 28 février 2006, dernier délai.
formation VII
LIBERATION
LUNDI 20 FÉVRIER 2006
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Angeles (LILA) recherche des
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