Je n`ai pas mérité Guantanamo
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Je n`ai pas mérité Guantanamo
L U N D I 2 0 F É V R I E R emploi 2 0 0 6 • D E U X I E M E E D I T I O N N ° 7 7 0 9 • W W W . L I B E R A T I O N . F R Aux Etats-Unis, les employeurs scrutent les blogs avant d’embaucher cahier central Témoignage «Je n’ai pas mérité Guantanamo» AFP :HIKKLD=ZUVWUW:?a@m@l@h@a Grippe aviaire: la filière s’inquiète La découverte d’un canard sauvage contaminé par le virus H5N1, dans l’Ain, fait craindre à la filière avicole française, qui emploie 50000 personnes, une psychose qui entraînerait une baisse drastique de la consommation. Page 6 POLITIQUES En Inde, Chirac gêné par l’affaire Mittal-Arcelor P.15 SOCIÉTÉ «Cerveau des barbares»: le profil de la bande se dessine P.18 Mourad Benchellali, hier. turin 2006 Un premier or noir C U LT U R E Yann Arthus-Bertrand passe au-dessus de l’Algérie P. 33 REUTERS SEBASTIEN EROME.EDITING Mourad Benchellali, Lyonnais d’origine algérienne, raconte son passage dans des camps talibans en Afghanistan en 2001, avant d’être arrêté au Pakistan, puis détenu et torturé par les Américains à Guantanamo. Page 2 Shani Davis, seul champion olympique d’hiver afroaméricain, gagne le 1000 m en patinage de vitesse après avoir refusé de participer au relais. Et toute l’actualité des Jeux P.24 à 27 IMPRIMÉ EN FRANCE/PRINTED IN FRANCE Antilles, Réunion, Guyane 1,80 ¤, Allemagne 1,80 ¤, Autriche 2,30 ¤, Belgique 1,20 ¤, Cameroun 1200 CFA, Canada $ 3,25, Côte-d’Ivoire 1200 CFA, Danemark 17 Kr, Espagne 1,80 ¤, Etats-Unis 3 $, Finlande 2,40 ¤, Gabon 1200 CFA, Grande-Bretagne 1,20 £, Grèce 1,80 ¤, Irlande 2 ¤, Israël 13 NIS, Italie 1,80 ¤, Luxembourg 1,20 ¤, Maroc 12 Dh, Norvège 22 Kr, Pays-Bas 1,80 ¤, Portugal continental 1,80 ¤, Sénégal 1200 CFA, Suède 22 Kr, Suisse 2,5 F, Tunisie 1,6 DT. 2 événement GUANTANAMO LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Mourad Benchellali, parti en 2001 dans un camp taliban, raconte l’horreur «Tôt ou tard, il y aura nécessité de fermer Guantanamo.» «DES MOIS DE COUPS Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, le 16 février «[Kofi Annan] est totalement dans l'erreur. Nous ne devons pas fermer Guantanamo.» Donald Rumsfeld, secrétaire américain à la Défense, le 17 février ÉTATS-UNIS La Havane BAH. CUBA 200 km Guantanamo Bay (Etats-Unis) Depuis 2002 Environ 700 détenus – le gouvernement américain refuse de donner des chiffres précis – sont passés par Guantanamo depuis l’ouverture de cette prison spéciale par l’armée américaine le 11 janvier 2002. Les prisonniers, des anciens talibans, des «suspects de terrorisme», sont originaires d’une trentaine de pays. Nondroit Les détenus de Guantanamo échappent aux conventions de Genève sur les prisonniers de guerre, selon le gouvernement américain, qui les considère comme des «combattants ennemis». La base, de fait un «no man’s land juridique», n’est pas formellement un territoire américain et les prisonniers ne sont pas passibles non plus des juridictions américaines. SÉBASTIEN ÉROME. EDITING MER DES CARAÏBES Mourad Benchellali, hier. Parti en juin 2001 de Vénissieux, dans la banlieue lyonnaise, il a été pris au Pakistan par les Américains, puis est passé par plusieurs camps. Lyon de notre correspondant ourad Benchellali a quitté Vénissieux en juin2001. Il avait 19 ans, partait pour l’Afghanistan. Quatre ans et demi plus tard, il vient de rentrer, après quelques enfers successifs. Deux mois dans un camp d’entraînement taliban, une capture au Pakistan pour être livré aux Américains. Et la torture, à Kandahar puis Guantanamo. A son retour, la justice française l’a placé dix-huit mois en détention, avant de le libérer, le mois dernier. La silhouette s’est épaissie. Mourad porte des cheveux longs, crépus, qu’il retient d’une queue-de-cheval. Personne ne le reconnaît, et il préfère ça. Il veut tourner la page. Mais d’abord raconter ce qu’il a vu à Guantanamo. Il témoigne longuement, pour Libération, de la filière utilisée pour rejoindre l’Afghanistan, de l’entraînement chez les talibans, des tortures endurées. Son récit est précis, car les multiples interrogatoires, dit-il, ont «gravé» les moindres détails dans sa mémoire. Il est impossible de vérifier ses dires mais son témoignage recoupe ceux d’autres «pensionnaires» de Guantanamo. «Le départ s’est fait très vite. Quelques semaines avant, une personne très proche m’a parlé de la possibilité d’aller en Afghanistan [lire encadré page suivante]. Elle-même y était allée, elle m’a dit que ce serait une bonne expérience. Je savais pas que c’était pour un camp taliban. Il n’était pas question d’apprendre à se battre. L’idée globale, c’était d’aller dans un pays islamique, où l’on pourrait avoir une vision de l’intérieur de l’islam. Je n’avais jamais voyagé. Je voulais aller à l’aventure, sortir de la routine. Je devais chercher une formation en septembre2001. Je pensais quitter Vénissieux pour deux ou trois mois. M «Quelques jours avant de partir, j’ai appris que je serai avec Nizar Sassi. C’était le grand frère d’un ami. J’étais content. On a pris le TGV jusqu’à Paris, puis un bus Eurolines pour Londres. On avait le numéro de téléphone d’un homme là-bas, on l’a appelé en arrivant, il nous a donné rendez-vous à Finsbury Park (1). Il est venu nous chercher et nous a conduits dans un petit appartement. C’est la seule personne qu’on a vue à Londres. Un Algérien, je pense. Il nous a aidés pour les billets d’avion et, trois jours après, on partait au Pakistan avec un numéro de téléphone et le nom d’un hôtel à Peshawar. Là, quelqu’un nous a pris en charge pour nous conduire à Jalalabad, en Afghanistan. A tion, sauf ceux qui étaient vraiment malades. Il fallait pour cela l’autorisation du grand émir qui s’occupait du camp. Nizar, grâce à Dieu, a été malade au bout d’un mois, il a pu partir. «J’ai fait ce qu’ils appellent la formation de base. Une soixantaine de jours pendant lesquels on découvre les modules de spécialisation qu’on peut choisir après: topographie, techniques en montagne, explosifs… Les instructeurs venaient de pays différents. Dès le premier cours, on nous a montré comment monter et démonter une Kalachnikov. Puis on a tiré une quinzaine de balles, pour connaître les sensations. Après, on a appris la topographie, savoir lire une carte, tenir une boussole. Ensuite le maniement des explosifs: on nous montrait toutes les sortes qui peuvent exister. Les conditions de vie étaient très difficiles: la chaleur, la fatigue, la faim. Ils voulaient nous faire ressentir des conditions extrêmes, au cas où on irait combattre, en Tchétchénie par exemple. J’ai perdu beaucoup de poids. J’avais une diarrhée très forte. «Ben Laden est venu une fois pendant qu’on était dans ce camp. En juillet. Il est arrivé avec son escorte, dans des 4x4 pick-up. Tout le monde dans le camp a commencé à chanter en arabe “Voilà le cheikh, voilà le cheikh”. Nizar et moi, on comprenait pas l’excitation. C’était avant le 11septembre, il ne représentait pas ce qu’il représente aujourd’hui. Je n’avais jamais entendu parler de lui. On nous a dit: “C’est le cheikh Ben Laden!” Il est sorti, beaucoup se sont dirigés vers lui pour lui serrer là main. Il a fait son discours. J’étais malade, fatigué, je comprenais pas l’arabe, je suis retourné à ma tente, j’ai pas écouté le discours. «Après ma formation, j’ai retrouvé Nizar et on est repartis à Jalalabad. Là, on a appris la mort de Massoud, «L’arrivée au camp de Kandahar a été violente. Ils nous ont roués de coups de pieds et de poings, avec des insultes et des crachats.» chaque étape, la personne laissait un autre contact, avant de nous quitter. C’était facile. On est partis pour Kaboul, puis on nous a conduits dans le camp d’entraînement de Kandahar, début juillet2001. «Quand Ben Laden est venu, on comprenait pas l’excitation» «J’ai passé deux mois là-bas, dans le désert. Il y avait des tentes, une petite mosquée en terre, une petite clinique. On était plus de 200, de toutes nationalités. J’ai eu l’impression de m’être fait piéger. Nizar et moi, on n’avait pas l’intention d’aller dans un tel camp. Mais il y avait une règle claire: une fois entré, on pouvait plus ressortir avant la fin de notre forma- 3 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 de sa détention par les Américains à Kandahar puis à Guantanamo. ET DE PANIQUE» Par GÉRARD DUPUY HARAZ GHANBARI. AP Arbitraire Une salle d’interrogatoire sur la base de Guantanamo (image visée par l’armée américaine). Benchellali apprendra par la Croix-Rouge qu’il est détenu à Cuba. le 9 septembre sur RFI. On nous a dit que ça allait devenir dangereux pour nous car des Arabes avaient fait ça. On a appris ensuite, juste après, pour le World Trade Center. On nous a conseillé d’attendre. Quand les bombardements ont commencé, on est restés cachés dans une maison. Des fois, on dormait dehors. Puis l’Alliance du Nord est remontée jusqu’à Jalalabad, les talibans se sont sauvés et tout le monde est parti en passant par les montagnes. La marche a duré plus d’un mois. Deux d’entre nous sont morts de froid. On a fini par arriver à un village du Pakistan qui s’appelait Parachinar, tout près de la frontière. Des habitants nous ont hébergés. On voulait qu’ils nous aident à rejoindre Islamabad, pour contacter l’ambassade de France et qu’elle nous rapatrie. Mais un jour, ils nous ont donné rendez-vous à la mosquée du village pour parler du voyage. On est entrés, les portes se sont refermées derrière nous. Ils ont appelé les forces spéciales pakistanaises qui sont venues nous arrêter. «A Kandahar, trois jours de terreur» «On est passés par trois casernes différentes au Pakistan. Ça a duré deux semaines. Dans la troisième, des gens sont venus nous voir. Ils se disaient de l’ONU. Il y avait un drapeau de l’ONU dans la salle où ils nous ont interrogés. Ils voulaient connaître nos identités, quels étaient nos parcours, quel lien on avait avec AlQaeda. Ils parlaient assez bien le français, mais avec un accent américain. Dans l’après-midi, des gardes pakistanais nous ont dit que c’était la CIA. On nous a attachés dans des camions, on nous a mis des cagoules et on a fait un voyage de vingt heures, sans boire ni manger. Le camion était envahi d’odeurs d’urine. A l’arrivée, des Américains nous attendaient. «Il faisait nuit, l’endroit ressemblait à un aéroport militaire. Ils avaient formé un grand cercle avec des camions, et les phares éclairaient le centre. C’est là qu’on a été livrés. Les Américains avaient la liste des noms obtenus à la caserne. Ils nous ont fait monter dans de petits avions, nous ont attachés au sol par des sangles, les mains dans le dos et une cagoule sur la tête. Le vol a duré plus de deux heures. On a atterri à Kandahar, où je suis resté quinze jours, dans un camp. Il y avait 150 personnes à mon arrivée, 800 à mon départ. «Ils enfermaient les arrivants dans un grand hangar, avec deux seaux pour leurs besoins. L’arrivée a été violente. Ils nous ont mis des menottes aux poignets et aux pieds, des cagoules sur la tête, ils nous avaient déshabillés entièrement et nous ont roués de coups de pied et de poing, avec des insultes et des crachats. Ils nous ont ensuite fait monter les uns sur les autres et on entendait qu’ils prenaient des photos. Ça a duré deux ou trois jours comme ça. Certains saignaient, criaient. C’était vraiment trois jours de terreur. Ensuite, ils nous ont mis des combinaisons bleues et nous ont emmenés dans des grands enclos grillagés, à 60 par cage. «Les mauvais traitements étaient quotidiens. Ils urinaient sur des détenus, ils jetaient des corans dans les seaux où on faisait nos besoins. Il y avait aussi des gens à qui ils rasaient une partie de la tête, ou un seul sourcil. On avait l’impression qu’ils faisaient ça par plaisir. Ils nous parlaient souvent du World Trade Center. Ils ramenaient des femmes, militaires, qui se déshabillaient devant nous et touchaient certains détenus. Les gradés voyaient ce qui se passait. «J’ai été interrogé trois fois à Kandahar. Toujours les mêmes questions: “Qu’est-ce que tu as été faire en Afghanistan”, “Qu’est-ce que tu faisais avec les talibans”, “Est-ce que tu as vu Ben Laden”, “Est-ce que tu sais où il est?” L’interrogateur était assis à une suite page 4 Un grand frère formé en Afghanistan Mourad Benchellali a grandi aux Minguettes, dans une famille d’origine algérienne installée en France en 1963. La justice s’intéresse beaucoup à son grand frère, Abdelhakim, dit Menad. Lors de son arrestation, le 24décembre 2002 à Romainville (Seine-Saint-Denis), la DST avait retrouvé une liste qu’il aurait écrite, avec les noms et coûts de produits chimiques permettant de fabriquer engins explosifs et gaz toxiques. Menad aurait aussi réalisé des expériences chimiques dans la salle de bains de ses parents. Formé en Afghanistan, il a séjourné fin 2001 dans un camp situé dans les gorges du Pankassi, en Géorgie. En France, il reste incarcéré dans le cadre de l’instruction sur une «filière tchétchène» qui aurait cherché à porter atteinte aux intérêts russes, en Tchétchénie et peut-être en France. La justice le soupçonne aussi d’avoir facilité le départ de son frère et de Nizar Sassi vers un camp taliban, en juin2001. Mourad, de son côté, était un garçon effacé. Sans diplôme, il travaillait à l’époque comme «agent de vie sociale»pour un office HLM. Leur père, Chellali Benchellali, gérait la salle de prière Abou Bakr, installée au bas de leur tour. Il s’était fait connaître en 1993 en passant quelques mois dans des geôles croates, lors d’un voyage en Bosnie. Pour une livraison humanitaire, selon lui. Le père a été arrêté le 6janvier 2004, en même temps que la mère. La justice n’a pas grand-chose à reprocher à cette dernière. Elle lui a pourtant infligé seize mois de détention. Ol. B. (à Lyon) Mourad Benchellali ne fréquente sans doute guère les œuvres de Voltaire, mais il y a du Candide chez ce gamin qui s’enrôle aux Minguettes et se retrouve à Guantanamo après avoir traversé le fracas du monde sans trop comprendre ce qui lui arrivait. Les sergents recruteurs de l’islamisme n’ont pas de scrupule pour fabriquer les petits soldats d’Allah – leur très sainte cause justifie tout par avance. Le récit de Benchellali montre une nouvelle fois la facilité avec laquelle des adolescents sensibilisés à une vision politique de l’islam peuvent basculer dans le terrorisme organisé. Sa capture a abrégé cette aventure que d’autres ont poursuivie jusqu’à l’assassinat et au suicide. Le deuxième volet de son témoignage est autrement inquiétant. Le compte rendu de son séjour dans les geôles américaines, conforme à tous ceux qui ont déjà été publiés, montre un monde placé hors de toute norme de droit et qui fait de cette extraterritorialité un argument de sa défense (ce devrait pourtant être l’inverse!). Rien n’oblige de prendre au pied de la lettre les accusations portées – notamment la désacralisation du Coran, qui peut n’être qu’une rumeur de désinformation. Mais, sur le fond, il faut le croire quand il montre que les Etats-Unis dérogent, dans cette politique d’incarcération arbitraire, à leurs propres principes – sans que leurs amis s’en émeuvent beaucoup. Il est heureux que la Cour de cassation ait contraint la justice de prendre au sérieux les plaintes pour séquestration portées par des citoyens français contre leurs détenteurs. Les accusations contenues dans ce témoignage en nourrissent d’autres récemment entendues –notamment en Irak, où les Britanniques aussi sont montrés du doigt (voire les policiers français après les attentats de 1995). Le danger du terrorisme ne doit pas être pris à la légère. Contre cela, il faut répéter que le principal succès des terroristes serait de nous accoutumer à l’exception et aux passe-droits. 4 GUANTANAMO suite de la page 3 table, moi accroupi au sol, les poignets et les pieds attachés ensemble, comme un mouton avant l’égorgement. D’autres fois, j’étais attaché les bras en croix à une barre en fer au-dessus de ma tête. Les interrogatoires duraient trois ou quatre heures. Ils donnaient beaucoup de coups sur la nuque, du tranchant de la main. «La nuit, toutes les demi-heures, ils nous réveillaient pour faire l’appel. Ils nous avaient mis des bracelets avec des numéros. J’avais le 161. Ils nous alignaient accroupis, puis on retournait dormir quand ils nous avaient appelés, puis ils nous réveillaient une demiheure après. Psychologiquement, c’était très dur. Il y avait aussi des détenus qu’ils laissaient debout toute la nuit. Quand ils piquaient du nez, ils les frappaient pour les redresser. A la fin, les gars étaient si fatigués qu’ils tombaient par terre et se laissaient frapper. J’étais paniqué. Je me disais qu’avec ce qu’ils étaient en train de nous faire, ils ne prendraient pas le risque de nous relâcher. Je me suis dis: “Mourad, jamais ils te laisseront raconter ça. Il faut que tu te prépares à mourir.” «Au bout d’une semaine et demie, ils m’ont rasé la tête et la barbe, m’ont mis une cagoule et je suis reparti en avion. Ils nous ont collé des patchs qui devaient être des somnifères. On somnolait. L’avion a fait une escale au bout d’une heure, on a changé d’appareil. Puis le voyage a duré vingt-quatre heures. On ne savait pas où on allait. C’est la Croix-Rouge, quelques semaines après, qui m’a appris que j’étais à Cuba. LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 des containers dont ils avaient enlevé les parois, pour les remplacer par des grilles. Il y avait une toilette à la turque, un lavabo et une plaque en fer qui faisait lit, avec un matelas mince dessus. «Les interrogatoires pouvaient avoir lieu à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. En moyenne, j’ai eu un à deux interrogatoires par semaine. Ce n’était jamais les mêmes hommes. Pour y aller, ils nous faisaient courir avec des menottes et des chaînes aux pieds. Ça rentrait dans la chair, ça saignait. Les interrogatoires pouvaient durer deux heures à quinze heures. Ça se passait dans de grandes pièces, avec des glaces sans tain sur les côtés. On entendait parfois des gens derrière. La salle était très «Beaucoup de tentatives de suicide, mais personne n’a réussi» «On nous faisait prendre beaucoup de médicaments. Ils disaient que c’était contre la tuberculose, le tétanos ou la malaria. C’étaient des petites pilules sans aucune référence. Elles étaient rondes, parfois un peu épaisses. Ça donnait des maux de tête, des vomissements. On pensait qu’ils faisaient des expériences car, après, des infirmiers nous posaient des questions sur les effets. Il y avait aussi des vaccins, on m’en a fait cinq fois je crois, et des prises de sang. J’avais des nausées, des diarrhées, des constipations. Une fois, ils nous ont fait une piqûre, ça nous a fait au bras comme un renflement qu’ils sont venus mesurer avec une règle. «A un moment, on a eu des livres offerts par la Croix-Rouge, puis ils ont été interdits. On nous a laissé que le Coran. L’ennui nous rendait fous. On recevait parfois du courrier, mais ils le censuraient en rayant des passages. Parfois, ils laissaient par exemple que la dernière ligne: “Voilà toutes les nouvelles sur la famille.” C’était un vrai supplice. «Il y a eu beaucoup de tentatives de suicide. Au moins une par jour juste avant que je parte. A ma connaissance, personne n’a réussi. Les gardiens décrochaient très vite ceux qui se pendaient avec leur drap. Ils les envoyaient au bloc des fous. Il y avait aussi un camp isolé, où ils mettaient les gens qu’ils pensaient dangereux. Personne ne sait ce qui s’est passé là-bas. La Croix-Rouge n’y avait pas accès. J’y pense souvent. «Trois fois, des policiers français sont venus m’interroger. Les premières fois, ils étaient huit. Deux posaient les questions, les autres autour demandaient des précisions. Ils étaient corrects. Ils savaient ce qui se passait à Guantanamo. Ils nous disaient de tenir le coup, qu’ils ne pouvaient rien faire. Deux Américains assistaient aux interrogatoires. «J’ai appris que j’allais rentrer le jour du départ. Un Yéménite m’a dit: “Mourad, tu es français, toi. Tu rentres dans un pays où il y a des droits. Raconte ce qui se passe ici.” Je n’ai pas de haine, de colère. Seulement de l’incompréhension. Je comprends que les Américains devaient riposter au 11septembre. Mais ils ont des prisons en Amérique. J’ai peut-être fait une erreur en allant en Afghanistan, mais je n’ai pas mérité Guantanamo.»• «A Guantanamo, une équipe intervenait avec des sortes de tenues antiémeutes et un grand bouclier en plexiglas. Vous aviez l’impression qu’un bus vous rentrait dedans.» «Dans une des salles d’interrogatoire, l’impression que le cerveau allait se dissoudre» «A l’arrivée, on a été déshabillés. Ils nous ont mis à plat ventre et nous ont donné des coups de pied. Il y avait un homme qui avait un accent arabe, un Libanais je pense. Il hurlait en arabe. “Qu’est-ce que tu fais là, pourquoi t’es allé en Afghanistan?” Puis on a été conduits dans une pièce où il y avait un médecin avec une blouse blanche. Il nous a auscultés et a mis un gant pour nous mettre un doigt dans l’anus. Ils nous ont pris en photo nus et nous ont donné des combinaisons rouges. On s’est retrouvés dans le camp provisoire d’X-Ray. On était à peu près 350. Il y avait des gens qui avaient été arrêtés un peu partout dans le monde. Six venaient de Bosnie, deux de Zambie, un Afghan avait été enlevé au Mexique, deux Algériens disaient avoir été capturés par la mafia russe en Géorgie. On est resté quatre mois avant d’être transférés dans le camp Delta, avec des cellules faites dans éclairée, il y avait une chaise avec un harnais pour le détenu et des gros climatiseurs derrière nous. Ils mettaient parfois le froid à fond. Les questions étaient différentes d’à Kandahar. Ils voulaient tout savoir de notre vie, de notre parcours. Ils voulaient qu’aucune étape ne leur échappe. Ils se présentaient comme étant du FBI. Ils étaient toujours deux plus un interprète. «Il y avait une autre salle d’interrogatoire, sur laquelle ils avaient écrit en arabe “L’enfer”. Si on coopérait pas, on allait là. C’était une pièce toute noire, avec au milieu un banc muni de sangles, comme dans les hôpitaux psychiatriques. Aux murs, il y avait des enceintes énormes et au plafond des projecteurs. Ils attachaient les détenus et mettaient de la musique à fond, souvent de la techno. Les spots faisaient des flashes de lumière blanche très forte, très rapides. Il paraît que ça donnait l’impression que le cerveau allait se dissoudre. Certains y sont restés deux jours. «Il y avait aussi une équipe spéciale de cinq gardes, qui intervenait avec des sortes de tenues antiémeutes et un grand bouclier en Plexiglas. Ils arrivaient en faisant “Hou hou hou” en rythme, en tapant des pieds. C’était très impressionnant. Ils entraient très vite dans la cellule, le bouclier devant eux. Vous aviez l’impression qu’un bus vous rentrait dedans. Certains gardes se comportaient bien. Je me souviens d’un qui m’a apporté un gobelet de café en caRecueilli par OLIVIER BERTRAND chette, à travers la grille. Certains nous ont dit qu’en (1) A l’époque, la mosquée de Finsbury Park était dirigée rentrant aux Etats-Unis, ils raconteraient ce qu’ils par Abou Hamza, condamné à sept ans de prison le 7 février pour incitation au meurtre et à la haine raciale. avaient vu. Six Français poursuivis Mourad Benchellali et Nizar Sassi répondront devant la justice française de leur périple afghan. Ils sont en effet poursuivis, avec quatre autres ex-détenus de Guantanamo, pour «association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste». Les juges JeanLouis Bruguière et JeanFrançois Ricard les soupçonnent d’être allés suivre une formation en Afghanistan pour commettre des actions terroristes en Europe. Mourad et Nizar contestent cette version. Leurs avocats, William Bourdon et Jacques Debray, dénoncent la procédure, basée selon eux sur des déclarations obtenues par la DST à Guantanamo. Ces interrogatoires, hors champ légal, ne sont pas mentionnés dans le dossier. La chambre d’instruction de la cour d’appel de Paris a cependant, le 4 octobre dernier, validé la procédure. De leur côté, Mourad et Nizar ont porté plainte pour enlèvement et séquestration. Ils visent la détention à Guantanamo, où ils n’étaient ni prisonniers de guerre, ni prisonniers de droit commun. La justice a refusé d’instruire, mais la Cour de cassation lui a donné tort. William Bourdon, Jacques Debray et Claire Chaillou ont obtenu, le 1er juin 2005, l’ouverture d’une information judiciaire. Deux magistrates instruisent depuis leur plainte. Ol.B. (à Lyon) Aux Etats-Unis, l’opacité demeure la règle L’administration Bush ne joue pas la transparence sur le camp de Guantanamo. Pour l’ONU comme pour la presse. New York de notre correspondant ous êtes les bienvenus à Guantanamo, mais vous ne pourrez rien voir. C’était, en substance, l’invitation du gouvernement américain à l’équipe d’enquêteurs indépendants mandatés par la Commission des droits de l’homme de l’ONU. Qui l’ont poliment déclinée. Elle était assortie d’une condition inacceptable pour eux: l’impossibilité de parler aux détenus. «Nous entamerions les capacités de recherche des Nations unies si nous devions accepter une invitation que nous refuserions de tout autre Etat dans le monde», a expliqué l’un des rapporteurs, cité par le site Web de CNN. Tubes. Les cinq auteurs du rapport publié jeudi se sont V contentés des témoignages des L’administration Bush n’exfamilles, des avocats des déte- plique pas en quoi une visite nus et de ceux d’anciens pri- des enquêteurs, avec interdicsonniers. Ils estiment que cer- tion de parler aux détenus, les tains traitements infligés aux aurait aidés dans leur mission. prisonniers s’apparentent à Le camp de Guantanamo est des actes de torture. Ils citent bien sûr une exception, par son notamment l’alimentation for- fonctionnement et son exiscée des grévistes de la faim, au tence en dehors de tout cadre moyen de tubes enfoncés dans le nez «Il n’y a pas de torture. Il n’y a pas (Libération du 16fé- d’abus.» Donald Rumsfeld, secrétaire à la Défense vrier). L’administration Bush a eu beau jeu de dénoncer l’absence légal international. Mais aussi d’information de première par l’opacité qui l’entoure. Seumain. Scott McClellan, porte- le la Croix-Rouge internatioparole de la Maison Blanche, y nale est autorisée à accéder aux voit des «allégations réchauf- prisonniers et à contrôler leur fées qui ont été faites par des santé physique et mentale, avocats représentant des déte- mais ses conclusions restent nus». Et d’ajouter: «Nous sa- confidentielles. Les visites des vons que les détenus d’Al-Qaeda journalistes sont soigneusesont entraînés pour propager de ment encadrées. Donald Rumsfeld, secrétaire fausses allégations.» américain à la Défense, a indiqué vendredi qu’il n’entendait pas revenir sur cette opacité. «Il n’y a pas de torture. Il n’y a pas d’abus.» Et quand bien même il y en aurait, l’armée américaine veille. «Dans la mesure où quelqu’un commet une faute, il fait l’objet d’un rapport et il est puni suivant le code de justice militaire. Et, mon Dieu, c’est comme ça que ça doit marcher.»Inutile, donc, de faire appel à des enquêteurs indépendants. «Je ne pense pas que cela servirait notre but que d’avoir une investigation de plus, la quinzième au lieu de la quatorzième, et de rabâcher tout ceci. Je pense que ce serait dommageable pour le pays.» Le 12 février, un éditorial du New York Times rapprochait le manque de transparence entourant Guantanamo avec le programme d’espionnage sur les communications des Américains (tenu secret par Bush) et les efforts de l’administration pour bloquer une enquête du Congrès sur le déclenchement de la guerre en Irak. Autant de cas où le Président demande à son peuple «d’oublier la démocratie, les procédures juridiques et l’équilibre des pouvoirs, et de simplement lui faire confiance». «Anomalie». En mai, l’affaire du coran avait déjà montré les limites de l’approche américaine. Newsweek avait révélé qu’un gardien de Guantanamo avait jeté un coran dans une cuvette de toilettes. Sa source s’était ensuite rétractée et l’hebdomadaire avait retiré son article. Mais cette affaire soulignait la contradiction de l’administration américaine, dénonçant des «allégations» tout en refusant les conditions d’une information libre sur ses pratiques à l’intérieur du camp. L’article de Newsweek avait provoqué une vague de protestation dans les pays arabes, tout comme aujourd’hui le rapport de l’ONU. Celui-ci suscite une condamnation unanime des EtatsUnis: vendredi, le secrétaire général de l’ONU Kofi Annan en a repris la principale conclusion, appelant Bush à fermer le camp de Guantanamo «aussi vite que possible». Même Tony Blair s’est bien gardé de défendre son allié. Vendredi, le Premier ministre britannique déclarait: «J’ai toujours dit que c’était une anomalie et qu’il fallait tôt ou tard décider quelque chose.»• LAURENT MAURIAC on imagine une nouvelle entreprise, de nouveaux potentiels. Chez Microsoft France, nous encourageons le développement et la croissance des éditeurs de logiciels innovants au travers du programme IDEES (Initiative pour le Développement Économique des Éditeurs de logiciels et des Start-up). Nous les aidons à se lancer, à se développer et à devenir compétitifs, en leur apportant la technologie, la formation et le conseil dont ils ont besoin. Découvrez-en plus sur microsoft.com/france/onimagine © 2006 Microsoft Corporation. Tous droits réservés. Microsoft et « Votre potentiel, notre passion. » sont soit des marques, soit des marques déposées de Microsoft Corporation aux États-Unis d’Amérique et/ou dans d’autres pays. 6 événement GRIPPE AVIAIRE LA VOLAILLE FRANÇAISE REDOUTE LA PSYCHOSE Par JEAN-MICHEL THÉNARD Vertus La découverte d’un canard mort de grippe aviaire dans l’Ain fait craindre le pire aux professionnels, dont les ventes sont déjà en chute. SÉBASTIEN EROME. EDITING Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages. Jamais mot d’Audiard n’aura été aussi à propos, lui qui eût bien ri de voir des gendarmes faire la chasse aux poulets… grippés. Le premier cas de H5N1 en France a été confirmé samedi soir à quelques kilomètres au sud de la Bresse, fameuse région où l’élite de la classe aviaire est élevée en plein air à des fins gastronomiques. Il eût suffi que le canard malade s’écrase un peu plus au nord pour que le drame touche nos assiettes et prenne encore davantage ampleur nationale. Pour l’heure, la Bresse est toujours sauve et nulle volaille d’élevage ne tousse. C’est bon signe, même si ça ne rassure guère la filière. Les éleveurs craignent que la psychose empire et ne la plume définitivement. La baisse de la consommation n’a pas attendu celles de volatiles malades et elle pourrait bien croître dans les prochains jours si, parmi les migrateurs qui s’apprêtent à traverser l’Hexagone, trop devaient défaillir en plein vol. L’Allemagne a déjà décidé l’abattage d’élevages en raison des risques de contamination. La FNSEA s’attend à la pareille de ce côté-ci du Rhin et réclame une compensation financière en conséquence au gouvernement et à l’Union. Faut-il moquer le principe de précaution qui pousse les autorités sanitaires et les consommateurs à anticiper une éventuelle pandémie et l’aviculteur à lutter, lui, contre un effondrement bien réel de son économie? Il faut plutôt se féliciter que les leçons de la grippe espagnole de 1918 aient été tirées. Venue de Chine, passée du canard au porc puis à l’homme, elle fit 400000 morts en France, plus de 30millions sur la planète, mais elle fit prendre conscience de la mondialisation des menaces biologiques. D’elle découle la surveillance planétaire que nous connaissons aujourd’hui pour éviter que le scénario ne se reproduise. Surveillance qui a pour inconvénient d’accroître la psychose, mais pour avantage de prouver qu’une mondialisation bien contrôlée a des vertus sanitaires et, au final, économiques. LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Dans la Dombes, samedi, plusieurs oiseaux sauvages morts ont été découverts et sont examinés par les services vétérinaires de l’Ain. a confirmation en France, ce week-end, d’un premier cas de grippe aviaire chez un canard mort dans l’Ain fait craindre le pire aux éleveurs de la Bresse, toute proche, berceau des poulets de luxe français: si Bruxelles met fin à la dérogation qui leur permet encore de laisser leurs volailles s’ébattre en liberté (comme l’impose leur cahier des charges), autant mettre la clé sous la porte, déclarent en substance les professionnels du coin. Ils ne sont pas les seuls à se faire du mouron: alors que la menace se précise partout en Europe, la filière avicole française, numéro un avec son milliard de volailles abattues chaque année, fait ses comptes en prévision d’une éventuelle pandémie. En première ligne, les 50000 personnes qui tra- L vaillent en France à l’élevage, à l’abattage et à la transformation des volailles pour un chiffre d’affaires de quelque 6 milliards d’euros, dont un peu moins de 20 % pour les produits se prévalant d’un label de qualité supérieure. Inquiétudes. Le dérapage a commencé en février 2004, pic de la crise aviaire en Asie. L’appétit des Français pour le poulet rôti et le magret de canard a commencé à se tasser: 10% de moins depuis cette date. Ces dernières semaines, la découverte d’oiseaux infectés aux portes de l’Europe a accéléré le plongeon: en novembre, par exemple, les ventes de poulets dans les hypermarchés ont baissé de 30% en moyenne. La semaine dernière, juste avant la découverte du premier cas avéré de H5N1, les poulets élevés en plein air (Fermiers de Loué, poulets de Bresse,etc.), jugés particulièrement exposés à la contamination, encaissaient une chute de 30 % de leurs ventes. «Tout va dépendre du niveau de la consommation. Si la situation évolue mal, on peut s’attendre à une crise à 50% pendant une quinzaine de jours. Tout dépendra de l’effort d’information qui sera fait pour protéger et rassurer», explique Louis Orenga, patron du Centre d’information des viandes (CIV). Et justement, les professionnels de la volaille ne sont pas rassurés du tout: tous les regards se tournent vers l’Italie et la Grèce, où l’appétit des consommateurs s’est rétréci en quelques jours de 70%. Une perspective qui fait craindre le pire aux salariés. D’autant que certains éléments de la filière sont ● ● ● Bruxelles attend de voir pour payer L’Allemagne est devenue le pays le plus touché de l’UE par la grippe aviaire: 18 nouveaux cas d’oiseaux sauvages morts y sont apparus dans la seule journée d’hier, portant à 59 le nombre total de cas avérés dans ce pays. L’Italie a également connu un nouveau cas hier. Aujourd’hui à Bruxelles, les ministres européens de l’Agriculture se réunissent pour voir comment indemniser la filière volaille: «Nous sommes compatissants, mais, en terme de budget européen, il y a vraiment très peu de choses que l’on peut faire», a fait savoir Mariann Fischer Boel, commissaire européenne à l’Agriculture. Les ministres français, grec et italien ne vont pourtant pas manquer de demander une augmentation «significative»des restitutions à l’exportation pour passer le premier cap de la crise (lire cicontre). Quant aux aides directes, c’est une autre paire de manches: la Commission n’a pas compétence pour intervenir si les ventes et les prix chutent, indiquait hier Bruxelles. En revanche, si la grippe aviaire venait à toucher effectivement un élevage et que celui-ci devait être détruit (poussins et œufs compris), la Commission pourrait financer leur remplacement à hauteur de 50%, comme c’est l’usage en cas de crise sanitaire. En attendant, c’est à chaque Etat membre de financer son programme de vaccination: pour la France, la note prévisible se F.P. monte à 1,6million d’euros. 7 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 plus fragiles que d’autres: «Chez nous, les abattoirs sont des petites structures qui seront très vite en difficultés si elles ne tournent pas à plein», analyse un petit producteur de poulets de Bresse. Mais la taille des exploitations ne change rien à l’affaire. Chez Doux par exemple, le numéro deux français du poulet et de la dinde en batterie derrière LDC, le chômage partiel est à l’ordre du jour. Au passage, l’industriel a mis fin, la semaine dernière, à tous les contrats des intérimaires après avoir réduit sévèrement le nombre de CDD. Même genre de punition chez Duc, le numéro sept tricolore, qui emploie 700 personnes. Et aussi chez Tilly-Sabco, filiale du groupe coopératif breton Unicopa dans le Finistère: les 500 salariés subiront une semaine de chômage partiel en mars et une en avril. Concurrence. Il ne faudra en tout cas pas compter sur les exportations (40% du total produit, surtout sous forme de filets de dinde surgelés) pour rendre le sourire aux professionnels: en 2005, sous les coups de la concurrence brésilienne et américaine, le solde positif de la balance commerciale avicole française est re●●● tombé sous les 536 millions d’euros, contre 660 millions un an plus tôt. Aujourd’hui, l’apparition de cas d’oiseaux contaminés dans l’Hexagone risque d’aggraver la situation. Depuis quelques jours, le niveau de commandes à destination du Proche et du MoyenOrient, grand consommateur de poulets, est en chute de 20 % à 30 % pour février et mars. «Le gouvernement français et Bruxelles doivent prendre des mesures significatives», explique Francis Ranc, patron du Groupement interprofessionnel pour l’exportation des poulets (lire encadré). Message reçu par Dominique Bussereau. Samedi, le ministre de l’Agriculture a indiqué qu’il étudiait l’augmentation des «restitutions à l’exportation», qui permettent aux pouvoirs publics de subventionner les producteurs pour résister à la baisse des prix sur les marchés tiers. Bussereau a également indiqué qu’il débloquait 5 millions d’euros pour aider dans l’urgence les éleveurs français. Plus 1 million d’euros pour financer une campagne d’information à destination du public et des professionnels.• FRÉDÉRIC PONS «Rien de grave» dans la Dombes Dans la région où a été trouvé le canard, les habitants ne cèdent pas à la panique. Joyeux envoyée spéciale l fallait bien qu’il atterrisse quelque part, le premier cas français de grippe aviaire. Il a donc choisi la région de la Dombes, le pays aux mille étangs, un écrin de nature à quelques dizaines de kilomètres au nord de Lyon, où le silence le dispute d’ordinaire à la contemplation. La victime est un fuligule milouin, un canard migrateur qui vit en Europe occidentale, hiverne dans le delta du Danube, sur le Léman, les cours du Rhin, mais aussi dans des régions comme la Dombes. Retrouvé mort avec six congénères lundi dernier, ce fuligule est le premier volatile sauvage mort du H5N1 sur notre territoire. Agitation. Samedi, la paisible région a été l’objet d’un déferlement médiatique, avec apparition d’une autre espèce migratoire: le journaliste, qui s’est mu en caravane processionnaire derrière le ministre de l’Agriculture, Dominique Bussereau. Ce dernier s’est rendu I sur les bords de l’étang de la autres oiseaux captifs sont incommune de Joyeux, où l’on a terdites. Des gendarmes en retrouvé le fuligule, puis il a faction ont stoppé les automorendu visite à un éleveur, dé- bilistes toute la journée de saconcerté par le flot de journa- medi pour vérifier que personlistes qui voulaient pénétrer ne ne transportait d’œufs ou dans son hangar de volailles. A de poulets. Mais hier, le miJoyeux, les 200 habitants as- nistre reparti, les gendarmes sistent circonspects, goguenards «On ne peut pas maîtriser tout ça. C’est ou énervés, à l’agita- totalement irrationnel. On ne pourra tion ambiante. «On pas tuer tous les oiseaux des étangs!» Patrice Girard, aviculteur à Mionnay n’est pas spécialement inquiet», indique cette agricultrice du lieu- avaient plié bagages sur les dédit Brône, qui suit toute partementales, laissant la voie l’affaire à la télé, «tout ça c’est libre à d’éventuels trafiquants des histoires qu’on nous monte d’œufs. en mayonnaise, mais, pour l’ins- Analyses. Quand on est aux tant, il n’y a rien de grave.» aguets, c’est fou ce qu’on trouLundi dernier, on retrouve un ve d’oiseaux morts dans une groupe de sept canards décé- campagne bourrée d’étangs. dés près d’un étang, parmi les- Bilan de la journée de samedi à quels le porteur de H5N1. crapahuter dans la boue de la Avant même les résultats des Dombes: cinq cygnes retrouanalyses, une zone de sur- vés morts et filmés par veillance de 10 km est mise en France 3; une buse décédée place autour de la macabre dé- dans un champ; un cygne blescouverte, avec une zone ren- sé au milieu de fanes de maïs, forcée de 3 km. Dans ce péri- un autre flottant dans un mètre, les sorties de volailles et étang. Les services vétéri- naires de la préfecture de l’Ain n’en peuvent plus. Ils ont reçu des appels tout le week-end pour ramasser des dépouilles. «Plusieurs équipes sillonnent le périmètre et pratiquent un ramassage systématique dans ces zones sensibles», justifie-t-on à la préfecture, même si les appels concernent autant la petite mésange retrouvée sur le rebord de la fenêtre que le canard enterré au fond du jardin. «Il ne faut pas s’alarmer sur tous les oiseaux morts», prévient Pascal Orabi, qui suit le dossier grippe aviaire à la Ligue de protection des oiseaux. «La mortalité est anormale quand on trouve entre cinq et dix individus ensemble.» Un oiseau mort, à cette époque, c’est plutôt fréquent. Il a fait froid, certains ont parcouru des centaines de kilomètres et «ils meurent de faim ou d’épuisement». Aujourd’hui, une vingtaine d’oiseaux font l’objet d’analyses dans divers laboratoires du pays. A Mionnay, les Gi- suite page 8 8 GRIPPE AVIAIRE rard regardent tout cela avec ironie. Le couple d’aviculteurs vit à 10 kilomètres de Joyeux et élève poulets, pintades et pondeuses en label rouge. Mercredi, ils ont reçu 4400 pintades au lieu des 5000 habituelles. «On est bien obligés de diminuer nos mises en place de poussins, avoue, un peu énervé, Patrice Girard, sans ça, on nous les achète pas.» D’après l’éleveur, si on doit tuer toutes les volailles d’un élevage au premier cas de grippe aviaire avéré, on devrait également abattre tous les oiseaux sauvages d’un étang au premier canard retrouvé mort. «On ne peut pas maîtriser tout ça... C’est totalement irrationnel. C’est comme le moustique du chikungunya à la Réunion, on ne pourra jamais tuer tous les moustiques de l’île. Ici, on ne pourra pas tuer tous les oiseaux des étangs!» Les Girard ne s’inquiètent pas outre mesure: ils peuvent conserver leur label, même si leurs poules, poulets et pintades ne mettront pas le bec dehors de toute leur existence.• LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Un virus suite de la page 7 LAURE NOUALHAT La grippe aviaire est propagée par un virus, molécule qui «pirate» les cellules infectées pour les forcer à le dupliquer. Le virus résiste donc aux antibiotiques. La seule arme est la vaccination. Les antiviraux comme le Tamiflu et le Relenza ont une action limitée. H5N1 SÉBASTIEN EROME. EDITING La forme de grippe aviaire la plus pathogène. D’autres virus H5 le sont bien moins. Ce virus se transmet d’oiseau à oiseau, plus difficilement de l’oiseau à l’homme. Le canard est considéré comme «réservoir silencieux»: il peut propager le virus sans être malade. A Mionnay, les Girard élèvent poulets et pintades en label rouge. Face à la baisse des ventes, ils diminuent leur production. Aucun danger pour l’homme en France Le virus H5N1 aurait beaucoup d’étapes à franchir avant de contaminer un être humain. n peu de fièvre? Un peu de toux? Des symp- voire nul». Peu de risques en effet d’entrer en contact tômes grippaux? Et si c’était la grippe aviai- physique avec un oiseau sauvage malade. Encore re? Trois bonnes raisons de ne pas avoir à moins de le toucher alors qu’il est malade et vivant. Et mort, «un oiseau ne se débat pas, continue le viros’inquiéter en France. logue. Il n’envoie donc pas de 1. La seule victime du virus H5N1 de la grippe aviaire «Le seul danger pour l’homme est lié à particules et de fientes en susdans l’Hexagone est un volati- la circulation du virus dans les élevages pension que l’on pourrait respirer». Il s’agit donc pour l’insle sauvage. H5N1 ne s’est pas domestiques.» Jean-Claude Manuguerra, virologue tant d’empêcher H5N1 encore introduit dans les d’entrer dans les élevages, à la basses-cours ou les élevages français. Or, «l’homme s’infecte via les animaux do- fois pour protéger la filière avicole et indirectement mestiques, explique Jean-Claude Manuguerra, viro- pour protéger l’homme. logue à l’Institut Pasteur. Le seul danger pour l’hom- 2. Si H5N1 parvenait à contaminer un élevage, «il aume est donc lié à la circulation du virus dans les rait beaucoup d’étapes à franchir avant de contaminer élevages domestiques. Tant qu’H5N1 n’a pas pénétré un humain», assure Jean-Claude Manuguerra. dans cette sphère, le risque pour l’homme est minimal, D’abord ne pas se faire repérer trop vite. Un véritable U tué à proximité de la préfecture de police) a été tenu de cesser ses activités. Le 30janvier, lors d’une intervention devant le Conseil de Paris, Bertrand Delanoë a donné un aperçu des mesures envisagées en cas de mutation du virus H5N1 et de pandémie humaine. «La population serait invitée à rester au maximum à domicile. Seules les fonctions vitales seraient assurées» comme la «distribution de l’eau, le chauffage urbain, l’aide à domicile», a indiqué le maire. Ou encore l’aide aux personnes en situation d’exclusion ou isolées,«âgées ou handicapées». A la mairie, une cellule de crise serait activée en «coordination étroite avec le préfet de police». Les fonctionnaires municipaux seraient «invités à rester chez eux, à l’exception de ceux qui assurent» desmissions indispensables. Pour eux, la ville a déjà acquis 3,4 millions de masques spéciaux de protection. Enfin, d’ici à fin mars, 300 cadres de la ville et les élus parisiens devront suivre une formation au cas où ils auraient à affronter une pandémie. Mais il ne s’agit là que d’une hypothèse. Pas de panique.• TONINO SERAFINI JULIE LASTERADE La mairie envisage tous les scénarios, y compris une pandémie. U 3. Pour l’instant, le danger n’est toujours que vétérinaire. Certes, la maladie gagne du terrain, elle est d’une ampleur et d’une sévérité inédite, mais pour l’instant le virus de la grippe aviaire H5N1 ne se transmet pas d’homme à homme. S’il a fait quelque 90 victimes humaines en Asie, c’est parce qu’elles fréquentaient des marchés couverts et saturés de fientes d’animaux malades. La durée du contact était longue et la quantité de charges virales présentes très importante. «Ce sont des cas rares et atypiques d’infection par un virus animal», ajoute JeanClaude Manuguerra. En attendant, H5N1 ne s’est pas du tout adapté à notre espèce. Il n’arrive pas à se multiplier dans «les portes d’entrée» du corps humain. Il fait à peu près 34-35 °C dans nos voies respiratoires (gorge, bouche, haut des poumons). Trop froid pour lui. Contrairement aux virus humains, celui-ci «ne se multiplie pas à ces températures», explique Jean-Claude Manuguerra. Il n’a pas encore réussi à emprunter cette fonction aux virus humains et ses mutations ne lui ont pas permis cette adaptation. Avantage pour nous: H5N1 peut mourir avant de se reproduire et s’il parvient à se tapir plus profondément et donc plus au chaud rapidement, il n’est donc pas facilement expulsé en suspension et donc peu contaminant. Inconvénient: lorsqu’elles parviennent à infecter l’homme, les particules virales vont directement dans les poumons. Ce qui laisse moins de temps à notre système immunitaire pour monter sa défense contre ce virus qu’il n’a jamais rencontré.• Paris sous surveillance renforcée n dispositif de surveillance de la mortalité des volatiles a été mis en place début février par la mairie de Paris en lien avec la Direction départementale des services vétérinaires, qui dépend de la préfecture. On estime à 60000 le nombre de pigeons vivant en liberté dans la capitale. Auxquels il convient d’ajouter d’autres espèces –canards, cygnes, poules d’eau…– qui peuplent les étangs des bois de Boulogne et de Vincennes ou des quelques grands parcs. Depuis une dizaine de jours, les employés municipaux exerçant leurs activités dans les espaces publics (éboueurs, balayeurs, jardiniers, gardiens de parcs…) sont tenus de signaler la mort de tout volatile. Ils doivent notamment mentionner le nombre d’animaux trouvés et le lieu précis à la Direction de la prévention et de la protection de la ville. Celle-ci est chargée d’alerter les services vétérinaires en cas de morts suspectes à des fins d’analyses. Par ailleurs, la vente de volailles vivantes est désormais interdite sur les marchés alimentaires de la capitale et le marché aux oiseaux de l’île de la Cité (si- challenge, «car chez l’oiseau, la grippe aviaire se manifeste très vite, ce n’est pas une maladie insidieuse», continue-t-il. Une fois malades, les animaux meurent en quelques heures et le nombre de victimes augmente très vite. «L’interdiction de vente serait alors immédiatement posée.»L’éleveur n’aurait même pas eu le temps de plumer sa volaille malade et encore moins de la mettre en vente. Et s’il y avait une faille dans le système? A moins de manger des tartares de canard ou de dinde, peu de danger que l’on respire ou que l’on avale des particules infectieuses vu la façon dont on consomme la volaille en France. 0825302302 Ce numéro de téléphone unique (0,15 euro/mn) a été mis en place par le ministère de la Santé pour s’informer sur la grippe aviaire. Il fournit la liste des pays touchés, les recommandations aux voyageurs, et répond aux questions plus générales sur la grippe aviaire. De 8heures à 22heures, 7 jours sur 7. Une présence médicale est également assurée. Site Internet: www.grippeaviaire.gouv.fr Sept pays en Europe On a trouvé des oiseaux sauvages –surtout des cygnes– morts de H5N1 dans sept pays de l’Union européenne (Allemagne, Autriche, France, Grèce, Hongrie, Italie, Slovénie). L’Allemagne est de loin le pays le plus touché. Dixhuit nouveaux cas ont été signalés hier, portant à 59 le nombre total de cas avérés sur l’île de Rügen (Nord-Est), en mer Baltique. Aucun oiseau issu d’un élevage n’a contracté la grippe. 93 personnes sont mortes de la grippe aviaire dans le monde depuis 2003, dont 19 en Indonésie et 42 au Vietnam. monde LIBERATION 9 MAHMUD HAMS . AFP LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Ismaïl Haniyeh, hier à Gaza, après sa nomination comme Premier ministre palestinien. «L’Autorité palestinienne est devenue de facto une Autorité terroriste», a déclaré Ehoud Olmert. Sanctions économiques après la nomination d’un Premier ministre issu du Hamas. Israël frappe l’Autorité palestinienne au portefeuille Jérusalem intérim e face-à-face a commencé. Alors que le Hamas s’empare officiellement des rênes du pouvoir, Israël tente de lui lier les mains. Hier, les islamistes ont confirmé le choix d’Ismaïl Haniyeh, leur tête de liste aux législatives, comme Premier ministre. Pour Ehoud Olmert, c’est le signal que «l’Autorité palestinienne est devenue de factoune Autorité terroriste». Comme prévu, le Premier ministre par intérim a fait adopter une série de sanctions économiques destinées à étouffer la nouvelle administration Hamas. Israël cesse immédiatement le transfert mensuel de 50 millions de dollars aux Palestiniens, une somme qui correspond aux taxes et droits de douane perçus par l’Etat hébreu au nom de l’Auto- L rité. Premières victimes, les quelque 150000 employés de l’Autorité, dont les salaires dépendent en grande partie de cet argent. Ces fonctionnaires font vivre environ unmillion de personnes, soit un tiers de la population des territoires occupés. Il n’a finalement pas été question d’interdire aux Palestiniens d’aller travailler en Israël. Leur tâche sera toutefois plus compliquée avec un renforcement des contrôles, déjà sévères, aux points de passage. Aide humanitaire. Plutôt que ce type de sanctions radicales, envisagées la semaine dernière, Israël a fait le choix de resserrer progressivement l’étau. Il s’agit pour l’Etat hébreu de ne pas s’aliéner la communauté internationale en appauvrissant encore un peu plus une population palestinienne déjà misérable. Israël va, en re- nous avons relevé d’autres défis par le passé.»Le nouveau président du Parlement palestinien, Aziz Doueik, a, pour sa part, conjuré les Israéliens de revenir sur une décision, électoraliste selon lui, qui ne fera qu’«augmenter la haine». Avant ce premier échange de tirs croisés, l’an I de l’ère Hamas avait commencé, samedi, «C’est comme un rendez-vous avec avec la prestation un diététicien. Les Palestiniens vont de serment de la maigrir, mais pas mourir de faim.» Dov Weissglass, conseiller du gouvernement nouvelle Chambre. Devant les impélienne: «C’est comme un ren- trants, Mahmoud Abbas a tedez-vous avec un diététicien. nu à montrer qu’il restait le Les Palestiniens vont maigrir, chef suprême de l’Autorité palestinienne, malgré le raz de mais pasmourir de faim.» Réaction immédiate du nou- marée du Hamas aux législaveau chef du gouvernement tives. Signal fort, la cérémonie palestinien: «Nous n’avons pas avait lieu exceptionnellement peur, a déclaré Ismaïl Haniyeh. dans son QG de la Mouqata’a, à Ces mesures sont faites pour Ramallah. En tout cas pour nous mettre à genoux, mais ceux qui pouvaient s’y rendre. vanche, appeler les pays qui supportent financièrement l’Autorité à cesser leur assistance, sauf «l’aide humanitaire donnée directement au peuple palestinien». Selon une formule d’un goût douteux dont il a le secret, le principal conseiller du gouvernement, Dov Weissglass, a défini la stratégie israé- Les autres, essentiellement les députés islamistes, coincés à Gaza par les restrictions israéliennes, ont suivi le discours du président palestinien sur écran géant. Engagements. Mahmoud Abbas a martelé que la seule stratégie était la sienne: la négociation avec les Israéliens. Et il a prévenu les nouveaux élus qu’ils ne pourraient pas désavouer les engagements internationaux des Palestiniens, notamment les accords d’Oslo de 1993. A la fin de son discours, les applaudissements ne sont pas venus des rangs islamistes. Dès la sortie, le futur Premier ministre Ismaïl Haniyeh a assuré qu’il y avait des «divergences, qui seront réglées par le dialogue». Dans le même temps, les lieutenants du président palestinien ont fait savoir que l’épreu- ve de force était engagée: «Abou Mazen a clairement dit au Hamas: “voilà mon programme vers une solution à deux Etats”, a déclaré Saeb Erekat, le ministre sortant des Négociations. Si le Hamas lui présente un cabinet qui refuse ce programme, nous allons vers une crise majeure, car le Président a autant le pouvoir de nommer que de limoger les Premiers ministres.»Mis sous pression à la fois par Israël et par Mahmoud Abbas, le Hamas a déjà fort à faire pour son baptême du feu au gouvernement. • XAVIER YVON • Deux Palestiniens ont été tués hier lors d’un raid israélien près de Khan Younès, dans le sud de la bande Gaza. Ils étaient impliqués selon Israël dans des tirs de roquettes vers le territoire israélien. 10 monde LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 La colère musulmane tourne à l’émeute Les manifestations contre les caricatures de Mahomet ont fait de nombreux morts au Nigeria et en Libye. es manifestations contre la publication de caricatures de Mahomet ont pris une tournure particulièrement violente au Nigeria et en Libye, faisant au moins une trentaine de morts dans ces deux pays. Dans le nord du Nigeria, région à majorité musulmane, c’est la communauté chrétienne qui a servi de bouc émissaire à la colère musulmane. Des boutiques tenues par des chrétiens et onze églises ont été attaquées, pillées et brûlées samedi à Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno, provoquant la mort de 15 personnes, dont un prêtre. Un émeutier a par ailleurs été tué à Katsina, capitale de l’Etat du même nom. Instauré samedi, le couvre-feu a été renforcé hier pour prévenir tout regain de violences interconfessionnelles. La Libyea, pour sa part, décrété hier un jour de deuil à la mémoire des «martyrs» tombés en essayant d’incendier vendredi le consulat d’Italie à Benghaz (nord-est de la Libye). Onze personnes avaient été tuées et 35 autres blessés par la police. Celle-ci avait tiré à balles réelles sur les manifestants, qui ont brûlé le premier étage de la représentation italienne pour protester à la fois contre les caricatures de Mahomet et le ministre italien des Réformes, Roberto Calderoli (lire ci-contre). En Indonésie, quelque 200 membres d’un groupe musulman ont fait le siège hier de l’ambassade américaine à Djakarta, jetant des œufs, brisant des fenêtres et brûlant des drapeaux américains, avant de se disperser. Les manifestants ont demandé la destruction d’une sculpture de la Cour suprême américaine représentant Mahomet tenant un coran dans une main et une épée dans l’autre, qui fait partie d’une frise montrant 18 hommes de loi importants, dont Moïse, Confucius et Charlemagne. Au Pakistan, quelque 5000policiers et 800membres des forces spéciales ont bouclé hier Islamabad, après l’interdiction d’une manifestation à l’appel de la coalition islamiste Muttahida Majlis-e-Amal, regroupant six partis. Les forces de sécurité ont utilisé des lacry- Berlusconi obtient la tête de Calderoli L (Annonce légale) CHATEAU-ROUGE PRODUCTION SARL au capital de 56 000 euros. Siège social : 40, rue Damrémont, 75018 Paris. RCS Paris 422 589 267 Par décision du gérant en date du 07/02/06, la société transfert son siège social du 40, rue Damrémont, 75018 Paris au 10 bis, rue Bisson, 75020 Paris, à compter de ce jour. L’article 4 des statuts a été modifié en conséquence. Pour avis. Le ministre italien a démissionné après ses attaques islamophobes. Rome de notre correspondant de ce pays, ils ne connaissent même pas les produits danois qui font l’objet du boycott, car ils ne sont utilisés que par une certaine catégorie de la société. Il est facile pour les gens de s’en prendre au Danemark, parce que les gouvernements arabes n’ont pas beaucoup d’intérêts économiques ou politiques à protéger avec ce pays. Ils laissent donc faire. Ce serait une autre histoire si la colère populaire était dirigée contre un pays avec lequel les pays arabes ont de forts intérêts. Est-ce que cette polémique ne vous semble pas exagérée? La logique aurait voulu que les gens réagissent plus violemment à la guerre en Irak qu’aux caricatures, d’autant que la publication de caricatures du Prophète n’est pas un phénomène nouveau en Occident. Mais il fallait bien que la frustration éclate à un moment ou un autre, et il n’est pas surprenant que ce soit sur un symbole religieux. L’Occident récolte ce qu’il a semé. Les Etats-Unis ont donné l’impression de partir en guerre religieuse contre l’Islam, en particulier quand George Bush a parlé de croisades. Nous sommes en train de payer le prix de cette politique. C’est une bombe prête à exploser. • algré ses attaques islamophobes et xénophobes répétées, en dépit de son appel à une nouvelle croisade sous les auspices du pape, Roberto Calderoli avait toujours réussi à sauver son fauteuil de ministre des Réformes. Pour Silvio Berlusconi, l’unité de sa majorité valait bien les incartades de ses précieux alliés de la Ligue du Nord, surtout à quelques semaines des législatives des 9 et 10avril. A la suite des violences de Benghazi, le Cavaliere a exigé la tête de l’incontrôlable ministre. «Il est tenu à s’en aller immédiatement», a indiqué, à l’annonce des événements libyens, un Berlusconi exceptionnellement grave, alors que depuis mercredi dernier Calderoli s’exhibait en public avec, sous sa chemise, un T-shirt reprenant une caricature de Mahomet. Lors du Conseil des ministres, vendredi, le numéro deux du gouvernement et ministre (Alliance nationale) des Affaires étrangères, Gianfranco Fini, l’avait averti: «Si tu continues comme ça, on risque un incident diplomatique.»Depuis, le gouvernement s’emploie à aplanir les tensions avec la Libye et le monde musulman, mais aussi à limiter la casse en termes de politique intérieure. Samedi, Fini s’est ainsi rendu à la mosquée de Rome pour réaffirmer que la ligne du gouvernement est celle «du dialogue et du respect réciproque». Berlusconi a, pour sa part, téléphoné au colonel Khadafi pour calmer les choses. La Ligue du Nord ne semble néanmoins pas prête à abandonner sa campagne anti-islamique. Au risque de rompre avec les autres partis de la majorité. Un conseil directif du mouvement d’Umberto Bossi se réunira aujourd’hui pour décider des suites à donner à l’affaire. A droite, les autres formations ne veulent toutefois pas croire que la Ligue ira jusqu’à la rupture à la veille du scrutin. Silvio Berlusconi non plus, qui craint en revanche que les provocations de Roberto Calderoli n’aient effrayé les électeurs modérés et mis un coup d’arrêt à sa remontée dans les sondages. • Recueilli par CLAUDE GUIBAL ERIC JOZSEF A N J U M N AV E E D . A P M A Islamabad, hier, les forces de l’ordre ont violemment dispersé des centaines de jeunes qui bravaient l’interdiction de manifester. mogènes pour disperser des centaines de jeunes qui ont bravé l’interdit. A Istanbul, en Turquie, quelques dizaines de milliers de personnes se sont réunies hier à l’appel du parti de la Félicité (islamiste). En Iran, la Maison de la caricature a fait savoir sur son site Internet que le meilleur dessin satirique du concours international sur l’Holocauste sera récompensé par un prix de 12000 dollars. Le rédacteur en chef du quotidien Hamshahri, associé à cette manifestation, a déclaré que «les caricaturistes danois (qui ont produit les dessins sur Mahomet, ndlr)pouvaient participer pour laver leurs péchés et que leur repentance soit acceptée par Dieu».• S. Etr. Wael Abdel Fattah, du quotidien «Al-Fagr», explique la frustration des musulmans: «L’Occident récolte ce qu’il a semé» Le Caire de notre correspondante ael Abdel Fattah est directeur de la rédaction d’Al-Fagr(l’aube), un quotidien indépendant créé en Egypte l’an dernier. Au mois d’octobre, Al-Fagra été le premier journal égyptien à publier les caricatures controversées à la une de son édition, sans pour autant déclencher de réactions en Egypte. Retour sur la polémique. Pourquoi avez-vous publié les caricatures de Mahomet? Le directeur financier du journal est tombé par hasard sur ces caricatures sur un site Internet salafiste (www.sahab.net) et nous avons décidé de les publier pour exprimer notre colère et dénoncer l’image de l’Islam véhiculée par l’Occident. Le journal jordanien Shihane les a également publiées, mais en demandant à ses lecteurs si ce sont des dessins ou un attentat contre un mariage à Amman qui font le plus de tort à l’Islam. Qu’en pensez-vous? C’est une comparaison qui n’a pas lieu d’être. Un attentat est un acte politique, ce n’est pas une attaque contre l’Islam. Les caricatures, elles, cherchent à créer une confusion entre politique et religion. Elles sont le résultat de la volonté des Etats-Unis de façonner une certaine ima- W ge de l’Islam pour en faire un nouvel ennemi, à la place du communisme. En réalité, ces caricatures ne personnifient pas tant le prophète Mahomet que le musulman tel qu’il est perçu en Occident, c’està-dire comme un terroriste. Avez-vous eu des réactions de vos lecteurs? Non, jusqu’à ce que d’autres journaux égyptiens publient à leur tour certaines de ces caricatures en novembre et décembre. Les gens toutefois n’ont pas besoin de voir les caricatures pour se sentir offensés. Je suis même sûr que la plupart des manifestants ne les ont jamais vues. Le bouillonnement de la rue musulmane est le résultat des attaques quotidiennes des Américains contre les Arabes et les musulmans, de la guerre en Irak, de l’injustice en Palestine. Il y a un sentiment d’angoisse, d’amertume profonde et d’humiliation, aggravé par le fait que les gouvernements arabes ne défendent pas leurs citoyens et se montrent incapables de leur rendre leur dignité. Vous accusez les Etats-Unis, mais c’est au Danemark que les manifestants s’en prennent. La colère n’est pas dirigée contre le Danemark en tant que tel. Quatre-vingt-dix pour cent des manifestants ne savent rien monde 11 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Négociations sous pressions au Kosovo Le dialogue qui débute aujourd’hui entre Serbes et Albanais semblant impossible, l’ONU pourrait imposer une solution. artagée entre colère et résignation, l’opinion serbe assiste, impuissante, à l’accélération des pourparlers qui devraient déboucher sur le statut final du Kosovo, la province théoriquement serbe mais administrée par l’ONU, dont la majorité albanaise à 90 % réclame l’indépendance. Depuis l’intervention de l’Otan, en 1999, contre les forces du président déchu Slobodan Milosevic, la province, grande comme un département français et peuplée de 1,9million d’habitants, échappe au contrôle de Belgrade, dont le rôle se borne à soutenir financièrement une centaine de milliers de Serbes qui vivent dans des enclaves protégées par des militaires occidentaux. C’est de leur sort qu’il sera question aujourd’hui à Vienne, où Serbes et Kosovars albanais se retrouvent pour un premier tête-à-tête consacré à la «décentralisation» des guerre», part déjà en croisade pour qu’un éventuel Kosovo indépendant soit proclamé «territoire occupé»… avec le soutien de la puissante Eglise orthodoxe. «Nous savons que la communauté internationale peut nous imposer un Kosovo indépendant et que nous ne pouvons pas l’empêcher», souligne l’évêque de Prizren, Mgr Artemije. Il faut donc que les Serbes «ne signent rien et proclament que cette solution imposée est une occupation France donnerait-elle Lyon ou Metz?» s’emporte Nikola, 30 ans, un réfugié serbe de Croatie, dont la femme, Serbe du Kosovo, ne peut plus rendre visite à ce qu’il lui reste de famille dans la province. Milo, un universitaire retraité, est aussi gêné à l’idée de voir le Kosovo séparé de la Serbie. «L’union de la Serbie et du Monténégro était une bonne occasion de constituer un territoire multiethnique, puisque des Albanais, des Bosniaques, des Hongrois, des Roms y vivent aux «La communauté internationale peut côtés de Serbes et nous imposer un Kosovo indépendant de Monténégrins. Au lieu de cela, la et nous ne pouvons pas l’empêcher.» Mgr Artemije, évêque de Prizren communauté internationale choisit d’une partie de notre territoi- de créer des ensembles de plus re». Cette solution ne fait pas en plus petits au nom de la l’affaire des réformateurs qui multiethnicité.» aspirent à un partenariat avec Certains ont cependant consl’Otan et l’Union européenne. cience qu’il n’y a pas de retour Multiethnicité. L’absence d’un en arrière possible. «Le Kosovrai débat sur l’avenir du Ko- vo, c’est fini. Les Serbes ne poursovo se fait sentir en Serbie. ront jamais y revenir. Milosevic «C’est notre territoire! Pour- a fait trop d’erreurs là-bas», quoi devrait-on le donner? La lâche Goran, 43 ans, originai- www.editions.flammarion.com Flammarion P communes peu- SERBIE ET proche du Premier plées de Serbes au MONTENEGRO ministre conservaKosovo. Plus vite ce HONGRIE teur Vojislav KosNovi dossier avancera, tunica, a, lui, proSad plus vite sera abor- CRO. Belgrade posé un double ROUM. dée la question de référendum en fond, celle de l’inSerbie et au KosoSERBIE BOS. Kosovo dépendance. vo. Ce moyen est, selon lui, le seul apSymbole. Belgrade MON. Pec B. proprié pour channe peut se résoudre ALB. ger les frontières à un geste radical MAC. 80 km du pays. De fait, son tant le Kosovo, où sont situés les principaux mo- application entraînerait un nastères orthodoxes serbes et match nul, tant les volontés où siège le patriarcat de son des deux peuples sont irréEglise, revêt à ses yeux un conciliables, les Serbes rescaractère symbolique. Elle a tant repliés sur leur intégrité donc fait sienne la devise «plus territoriale et les Albanais du que l’autonomie, moins que Kosovo sur leur droit à l’autol’indépendance». Ce vague slo- détermination. gan cache mal la volonté de ne La marge de manœuvre des prendre aucune décision ir- négociateurs est d’autant plus réversible engageant les gé- faible que s’amenuise le sounérations futures. Le prési- tien politique aux réformadent réformateur Boris Tadic teurs qui dirigent la Serbie devient d’ailleurs de suggérer que puis la chute de Milosevic, en le statut final ne soit défini l’an 2000. Premier parti du qu’«après une période de grâce Parlement, le Parti radical, de vingt ans». Et le juge de la une formation créée par VojisCour constitutionnelle de lav Seselj, actuellement incarSerbie, Slobodan Vucetic, un céré à LaHaye pour «crimes de re de Pec, au Kosovo, qu’il a quitté avec un seul sac, en juin 1999. Il vit désormais à Novi Sad où il fait construire une maison sur un terrain acheté avec l’argent de son ancien appartement, vendu moitié prix grâce à Habitat, une agence de l’ONU. Stabilité. Une majorité de Serbes comprend qu’elle a peu de moyens d’influer sur la décision finale alors que la communauté internationale plaide pratiquement ouvertement pour une indépendance conditionnelle du Kosovo – à savoir, avec un système de protection des minorités et l’impossibilité de rattacher la province à l’Albanie. L’idée d’imposer une solution se fait jour. Etant donné qu’«il est peu probable que Belgrade accepte volontairement l’indépendance», la communauté internationale «doit oser l’imposer»pour assurer la stabilité de la région, plaide l’influent groupe de réflexion International Crisis Group. • LAURENT ROUY LA FACE CACHÉE DE COCA-COLA « C’est la face cachée de Coca-Cola, parfaitement inconnue du grand public, que William Reymond dévoile dans un livre-brûlot. » Laurent Neumann - Marianne « William Reymond tente de mettre au jour les “petits arrangements” de la firme multinationale avec sa mémoire et nous livre les points-clés de sa plongée dans les eaux -troubles ?- de Géorgie, la terre de Coke&Co. » Caroline Derrien - VSD « Chez Coca-Cola, on n’aime pas beaucoup William Reymond, cet homme qui ose écorner le mythe. Son “enquête interdite” fait grand bruit. » 432 pages 20 e Philippe Brassart - La Dépêche du Midi Studio de création Flammarion Belgrade correspondance 12 monde LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Les rumeurs de trêve de l’ETA font long feu en Espagne Le gouvernement Zapatero exige l’abandon de la lutte armée avant de négocier avec l’organisation terroriste basque. Madrid de notre correspondant e communiqué a eu l’effet d’une douche froide. Samedi soir, via les ondes de la radio basque Euskadi Irratia, l’ETA n’a pas donné suite aux rumeurs persistantes d’un cessez-le-feu unilatéral, ni même d’une trêve. L’organisation séparatiste armée a certes invoqué les vertus du «dialogue» et de la «négociation», «seule solution au conflit», mais a refusé de faire le pas décisif. L’ETA, qui n’a pas tué depuis mai2003, a cependant revendiqué six attentats «de basse intensité»perpétrés depuis le début de l’année. Audace. Sans faire mention d’un possible renoncement à la lutte armée, l’organisation terroriste exige de l’«audace» des partis basques et du gouvernement Zapatero. Cette «audace» passerait en particulier, à ses yeux, par la reconnaissance du droit à l’autodétermination des Basques. «Il n’y a pas de marche arrière. Ici L conflit basque. Il y a seulement une semaine, il avait même évoqué de façon solennelle «le début de la fin»du terrorisme basque. Conséquence: la presse espagnole, en particulier le quotidien catalan la Vanguardia, avait pu présenter comme «imminent» un cessez-lefeu mettant fin à trente-sept ans d’attentats et Samedi soir, un communiqué de l’ETA a 830assassinats. démenti les rumeurs de cessez-le-feu «Erreur». Sans douunilatéral. Rumeurs entretenues te averti à temps par l’«optimisme» de Zapatero. de ce communiqué alambiqué et rhéavancées, mais tout le monde torique, Zapatero a donné peu veut aller très vite, alors que ce- avant une interview au quotila demande beaucoup de petits dien conservateur ABC, pupas», a-t-il ajouté. A Madrid, bliée hier, dans laquelle le Prel’exécutif socialiste a répliqué mier ministre socialiste se à l’ETA: «Le seul communiqué montre très prudent. Pour lui, que nous attendons, c’est celui le processus de paix au Pays qui annonce l’abandon définitif basque «ne se fera pas en un des armes.» jour, un mois ou une année […] En fait, sur le plan politique, le mais prendra du temps, beaucommuniqué est un camou- coup de temps. Ce serait une erflet pour José Luis Rodriguez reur d’aller vite et il y aura des Zapatero qui, ces derniers moments difficiles». jours, se disait «très optimiste» Malgré ces déclarations temquant à l’issue prochaine du pérées, l’opposition conserva–au Pays basque–, personne n’a compris pourquoi l’annonce d’une trêve avait tellement été médiatisée, les médias spéculent trop», a commenté pour l’AFP Joseba Alvarez, un responsable du parti indépendantiste Batasuna, bras politique interdit de l’organisation séparatiste armée. «Il y a des trice ne s’est guère privée d’attaquer durement Zapatero «qui ne cesse de mentir à l’opinion». Le leader du Parti populaire (PP, droite), Mariano Rajoy, accuse depuis des mois les socialistes de négocier secrètement avec l’ETA et d’être disposés à échanger la «paix contre les prisonniers», en référence aux quelque 800 détenus etarras. «Ce n’est pas ce que le gouvernement nous annonce de manière frivole et irresponsable», a-t-il réagi hier, demandant au Premier ministre «d’arrêter de suivre la feuille de route de l’ETA» et de rectifier sa politique antiterroriste. Cette stratégie d’affrontement commence à être bénéfique au PP qui talonne les socialistes dans les sondages. Selon une enquête publiée hier par le quotidien de droite la Razon, trois quarts des Espagnols estiment qu’il ne faut «offrir aucune concession à l’ETA en échange d’un éventuel abandon de la lutte armée». • Attaques séparatistes contre Shell dans le delta du Niger Des militants séparatistes ont mené une série d’attaques, samedi, dans la région pétrolière du Delta du Niger (sud du Nigeria), faisant exploser deux oléoducs, incendiant une plate-forme de chargement et enlevant neuf travailleurs étrangers. Malgré la présence de centaines de soldats gouvernementaux, les rebelles s ont mené leurs actions sans être inquiétés et se sont enfuis avec les neuf otages – trois Américains, deux Egyptiens, deux Thaïlandais, un Britannique et un Philippin. A la suite de l’attaque, Shell a annoncé l’évacuation de ses plates-formes offshore ainsi que la suspension des exportations du terminal de Forcados, d’où partent 380000 barils/jour, soit 15 % du pétrole nigérian. En janvier, le Mouvement d’émancipation du Delta du Niger (Mend) avait enlevé quatre travailleurs sur les installations pétrolières et les avait relâchés dix-neuf jours plus tard. Le Mend, dans un communiqué, a déclaré avoir renouvelé à Shell sa demande de 1,2 milliard d’euros pour compenser la pollution par le pétrole des eaux de pêche de l’ethnie Ijaw, forte de 14 millions de personnes. (AFP) Une histoire Opération taxis propres à Prague Le maire de Prague avait longuement mûri son camouflage de rock star anglaise. Caché derrière des lunettes noires, il avait cessé de se raser pendant trois jours. Objectif: contrôler l’honnêteté des taxis locaux qui ont la sale réputation de gruger les touristes. Selon le quotidien Dnes, qui raconte l’histoire, Pavel Bem a estimé que la situation «s’était beaucoup améliorée». Il a pris un taxi qui s’est contenté de doubler le prix de la course. L’an dernier, grimé en touriste italien, il avait payé sept fois le prix pour FRANÇOIS MUSSEAU (avec AFP) un simple déplacement au centre-ville. Selon des chiffres de la municipalité, établis à partir de contrôles effectués entre juillet et novembre, près de quatre taxis sur dix pratiquent des tarifs sauvages dans les lieux les plus touristiques de Prague. A l’aéroport de Prague, la réputation des taxis est telle qu’en fin d’année dernière le ministère australien des Affaires étrangères a tenu à avertir ses ressortissants via l’Internet. Quant au maire, sa couverture de rock star était nistre s’est engagé à organiser si réussie qu’un des taxis lui a donné ses meilleures adresses des examens dans le nord. Ça de discothèques, de fournisseurs de marijuana et les tarifs n’a l’air de rien, mais ça fait des prostituées. Cette fois, sans supplément. Jan Egeland, chargé des Affaires humanitaires à l’ONU, craint une reprise des combats: «L’impunité est de règle en Côte-d’Ivoire» U Nous avons repris quelques activités avec du personnel local, comme la distribution deux ans que des millions de de vivres aux réfugiés. Mais je jeunes, à cause de la partition ne nous vois pas reprendre du pays, ne suivent pas un le travail dans l’ouest, sans cursus éducatif normal… garantie des autorités militaires et civiles. Il faut en finir Vous avez en revanche avec l’impunité qui est de bien eu une réunion règle en Côte-d’Ivoire. Il faut avec le Groupe de travail clairement dire qui a organiinternational, chargé de suivre le processus sé cela et punir les respon- Jan Egeland. de paix… sables. Les 16, 17 et 18 janvier, les radios à Guiglo et Abidjan ont appe- Oui, et je leur ai dit que si les agences des lé à attaquer les locaux de l’ONU. C’est Nations unies continuaient d’être menaun acte criminel qui mérite la prison. cées, si on ne trouvait pas de solution, il y Par ailleurs, même si nous avons plutôt aurait bientôt une grave crise humanitaifait du bon travail d’urgence, nous ne re. De moins en moins de gens ont accès pouvons pas continuer à servir d’alibi à l’eau potable, à l’éducation… J’ai aussi à l’absence de politique cohérente de demandé des fonds pour la reconstrucsécurité et de développement. tion. Les contributions de la communauté internationale sont extrêmement En avez-vous parlé au président faibles,compte tenu des enjeux. L’an derLaurent Gbagbo? Nous avions un rendez-vous vendredi nier, nous n’avons reçu que la moitié après-midi. Il a été annulé. J’imagine que des 35 millions de dollars demandés. mes déclarations sur l’impunité et la res- Cette année, nous n’avons eu que 2 milponsabilité de ces violences ont contribué lions sur les 50 qui seraient nécessaires. à l’indisponibilité du Président. Néan- Je rends hommage, au passage, à l’Union moins, j’ai transmis le message au Pre- européenne qui, en Côte-d’Ivoire, reste le mier ministre et au ministre des Affaires plus important des contributeurs. Mais il étrangères. J’ai aussi rencontré les Forces est clair que si les Nations unies sont à nouvelles (opposition, ndlr) à Bouaké. cours de moyens, s’il n’y a pas davantage Tous parlent de réconciliation. Moi, je ne de pression internationale, la violence m’arrête pas aux mots, je veux des actions éclatera à nouveau. • concrètes. A cet égard, le Premier miRecueilli par MARIE-LAURE COLSON AP n mois après les attaques dirigées contre le personnel humanitaire et les locaux des Nations unies en Côte-d’Ivoire, le secrétaire général adjoint de l’ONUchargé des Affaires humanitaires, le Norvégien Jan Egeland, s’est rendu dans le sud et l’ouest du pays, où les affrontements entre miliciens proches du pouvoir et Casques bleus avaient fait au moins cinq morts. Il s’en prend directement au pouvoir alors que le processus de paix semble une nouvelle fois enlisé. Quelle est la situation dans ces régions? Tout le monde a peur que les violences reprennent. Les réfugiés, les déplacés, les civils… Mais ce qui est nouveau, c’est que le personnel humanitaire qui aidait tous ces gens à survivre est tout aussi effrayé. Ils reçoivent des menaces. Et puis on n’avait jamais vu ça, une destruction aussi totale! Les bureaux, les entrepôts ont été complètement détruits, pillés, y compris ceux qui se trouvaient en face d’une base militaire! Ce qui signifie que ceux qui auraient dû les protéger ne l’ont pas fait. Selon vous, qui fait régner la peur? J’ai pour habitude de dire les choses clairement: les leaders de partis à base ethnique, qui ont leurs milices, et les Jeunes patriotes (partisans du président Laurent Gbagbo, ndlr). Dans ces conditions, les humanitaires peuvent-ils revenir? Aucun espoir de retrouver des survivants aux Philippines Les secouristes philippins s’employaient hier à évacuer des tonnes de boue dans l’espoir de retrouver vivants des écoliers ensevelis depuis un glissement de terrain qui a balayé, vendredi, un village de 1800 âmes, à 675 km de Manille. Quelque 250 enfants et membres du personnel se trouvaient dans l’école de Guinsaugon, au moment de la catastrophe. Personne n’a encore été retiré vivant. Hier soir, quelque 70 corps avaient été dégagés du sol rougeâtre sous lequel est enterrée désormais la localité. Au total, 941 villageois sont toujours portés disparus par le Conseil national de coordination des secours. Deux mille habitants de villages des alentours ont été évacués pendant le week-end. (Reuters) • La présence militaire britannique en Irak représente une «menace pour [la] sécurité» de l’Iran, a déclaré hier le chef de la diplomatie iranienne, Manouchehr Mottaki, en réitérant l’accusation d’une implication de Londres dans les attentats de janvier dans le sud du pays. • Une bombe a explosé hier dans la gare d’Ahmedabad, la capitale économique de l’Etat indien du Gujarat (nord-ouest), blessant 25 personnes, dont trois grièvement. (COMMUNIQUÉ) NOTIFICATION OFFICIELLE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DES ÉTATS-UNIS Si vous avez acheté des actions Royal Ahold N.V. avant le 24 février 2003, vous êtes peut-être en droit de recevoir une partie du montant de 1,1 milliard de dollars US du règlement à l’amiable. Un règlement à l’amiable a été négocié dans le cadre de l’action en justice concernant le cours de l’action Royal Ahold N.V. Ce Règlement prévoit le paiement de 1,1 milliard de dollars US aux investisseurs de Royal Ahold ayant acheté ou reçu sous forme de dividendes des actions ordinaires ou des Certificats américains de titres en dépôt (American Depository Receipts) Royal Ahold pendant la période du 30 juillet 1999 au 23 février 2003 inclus, ainsi que le remboursement des honoraires et des frais de leurs avocats. Si vous êtes concerné par ce règlement, vous pouvez envoyer un formulaire de demande de paiement, mais vous pouvez également vous en exclure ou objecter. Le Tribunal de grande instance des États-Unis de la circonscription du Maryland a autorisé l’envoi de cette notification aux investisseurs de Royal Ahold dans le monde entier, et une audience s’y tiendra afin d’approuver ou non ce Règlement de façon à ce que des paiements puissent être effectués au bénéfice des personnes ayant déposé une demande légitime. Vous pouvez obtenir une notification détaillée sur le site Web ou en composant le numéro de téléphone indiqué ci-dessous. QUI EST EN DROIT DE BÉNÉFICIER D’UN PAIEMENT ? Vous êtes considéré comme l’un des Participants au Recours collectif si vous avez acheté ou reçu sous forme de dividendes des actions ordinaires ou des Certificats américains de titres en dépôt Ahold pendant la période du 30 juillet 1999 au 23 février 2003, quel que soit votre pays de résidence et que vous ayez ou non acheté des actions Royal Ahold. Si vous n’êtes pas certain de remplir ces conditions, veuillez appeler le numéro ou consulter le site Web mentionné ci-dessous. QUEL EST L’OBJET DE CETTE ACTION EN JUSTICE ? Une action en justice a été engagée contre Royal Ahold et un certain nombre d’autres défendeurs (voir l’avis détaillé) alléguant que les bénéfices et les revenus de Royal Ahold annoncés pour la période du 30 juillet 1999 au 23 février 2003 ne représentaient pas fidèlement les bénéfices et les revenus de Royal Ahold, et que, suite à cette annonce, le cours de l’action Ahold a chuté de plus de 60 %. Ahold a ultérieurement rectifié ses résultats pour la période concernée, faisant état de 24 milliards de dollars US de revenus et de 1,1 milliard de dollars US de bénéfice. Les défendeurs nient les accusations, et le règlement ne constitue ni une admission d’une quelconque erreur, ni une indication d’une quelconque infraction à la loi. Le Tribunal ne s’est prononcé ni en faveur des Plaignants, ni en faveur des Défendeurs. Les deux parties sont en désaccord concernant le montant de l’indemnisation qui aurait été adjugée en cas de procès. Par contre, elles ont négocié un Règlement à l’amiable permettant de clore le dossier de cette action engagée contre Ahold et les autres défendeurs et de procéder au paiement d’indemnités au bénéfice des Participants au Recours collectif. QUELS SONT LES TERMES DE CE RÈGLEMENT ? Ahold s’engage à créer un Fonds de règlement auquel elle versera 1,1 milliard de dollars US, plus les intérêts, afin de payer les investisseurs ayant déposé une demande d’indemnisation légitime et de les rembourser des honoraires et des frais de leurs avocats. L’Accord du Règlement, qui décrit de manière détaillée les termes de cet accord, peut être consulté sur le site Web indiqué ci-dessous. COMMENT FAUT-IL PROCÉDER POUR DEMANDER UN PAIEMENT ? Il vous suffit d'appeler le numéro ci-dessous ou de vous rendre sur le site Web indiqué pour obtenir un formulaire de demande. Alternativement, vous pouvez écrire à l'adresse ci-dessous afin de solliciter qu'un dossier de notification et un formulaire de demande de paiement vous soient expédiés. Si vous pensez être l'un des Participants au Recours collectif, veuillez remplir le formulaire de demande et le renvoyer au plus tard le 18 août 2006. DE QUELLES AUTRES OPTIONS DISPOSEZ-VOUS ? Si vous préférez ne pas être lié par le Règlement, vous devez vous en exclure explicitement au plus tard le 12 mai 2006, faute de quoi vous ne serez plus jamais en droit de poursuivre en justice les défendeurs ayant accepté ce Règlement sur la base des allégations associées à ce dossier. Si vous vous excluez de ce Règlement, vous ne recevrez aucun paiement à partir du Fonds de règlement. Si vous décidez de ne pas vous exclure du Règlement, vous avez jusqu’au 12 mai 2006 pour objecter. La notification détaillée explique comment vous exclure du Règlement ou objecter. Une audience se tiendra au Tribunal concernant cette affaire (In re Royal Ahold Securities and “ERISA” Litigation, MDL 1539) le 16 juin 2006 afin de déterminer si le Règlement à l’amiable peut être approuvé, ainsi que pour examiner une requête des avocats représentant les Participants au Recours collectif (le cabinet Entwistle & Cappucci LLP, de New York) portant sur un versement en leur faveur à hauteur de 15 % du Fonds de règlement (18 centimes de dollar US par action) correspondant à leurs honoraires, plus un versement en leur faveur à hauteur de 4,8 millions de dollars US correspondant à leurs frais. Ces honoraires et frais représentent la rémunération des avocats en contrepartie de leur travail d’investigation et de plaidoirie dans cette affaire, ainsi que de leur travail lors de la négociation du Règlement. Il vous sera peut-être demandé de comparaître au Tribunal, mais vous n’y serez pas obligé. Pour de plus amples informations, veuillez composer le numéro d’appel gratuit ci-dessous ou écrire à : Ahold Claims, P.O. Box 9000 #6378, Merrick, NY 11566-9000, USA. 00 800 1020 4060 (France Télécom) 40 800 1020 4060 (TELE 2) 50 800 1020 4060 (Omnicom) 70 800 1020 4060 (Le 7 Cegetel) 90 800 1020 4060 (9 Telecom) www.AholdSettlement.com FR-FRE Le Fonds de règlement sera divisé en deux parties : le Fonds A et le Fonds B. Le montant du paiement que vous recevrez dépendra du nombre de demandes d’indemnisation que les Participants au Recours collectif enverront, du nombre d’actions Royal Ahold vous avez achetées ou reçues sous forme de dividendes et de la période pendant laquelle vous avez acheté et vendu ces actions. Si tous les Participants au Recours collectif envoient une demande d’indemnisation légitime, le montant moyen du paiement sera de l’ordre de 1,51 dollar US par action ordinaire ou par Certificat de titre en dépôt en ce qui concerne le Fonds A, et de l’ordre de 0,40 dollar US pour chacune des actions correspondant au Fonds B. 14 terre LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Pêche. La Norvège accuse Moscou de dépasser illégalement ses quotas de cabillaud. SANTÉ Le Soudan a faim Près de sept millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire au Soudan malgré une bonne récolte de céréales, annonce la FAO, organisation de l’ONU pour l’agriculture et l’alimentation, qui a lancé un appel pour réunir 40 millions de dollars à cet effet. Scandinavie de notre correspondante ’affaire s’est déroulée sous l’œil des caméras norvégiennes, mi-octobre, au large de l’archipel du Svalbard, dans les eaux territoriales clamées par Oslo. Des garde-côtes norvégiens arraisonnent le chalutier russe Elektron, qu’ils soupçonnent de pratiquer la «pêche au noir» en mer de Barents. Sommé de faire route vers les côtes norvégiennes, l’équipage obtempère, avant de bifurquer et de mettre le cap sur la région de Mourmansk, au nord-ouest de la Russie. Deux inspecteurs sont toujours à bord. Ils ne seront libérés que cinq jours plus tard, une fois l’Elektron dans russes font route vers le large, les eaux territoriales russes. OCÉAN GLACIAL ARCTIQUE où ils transfèrent leurs car«Rares poursuites». Sous la gaisons vers un autre bateau, pression d’Oslo, Moscou proArchipel MER avant de revenir pêcher en met de tirer l’affaire au clair. du Svalbard DE (Norvège) BARENTS mer de Barents. «Ce transborMais à la Direction norvégiendement n’est pas déclaré et les ne de la pêche (FiskeriedirekOCÉAN Mourmansk documents sont falsifiés, de fatorat), le conseiller chargé de ATLANTIQUE çon à ce que les chalutiers ne la lutte contre la pêche au noir NORVÈGE RUSSIE puissent être accusés de dépasne se fait guère d’illusions. SUÈ. FIN. ser leurs quotas», précise Tor «Les poursuites sont rares et les Glistrup. Les bâtiments de condamnations encore plus», transbordement, naviguant observe Tor Glistrup. Selon Oslo souvent sous pavillon de comdifférentes estimations, la plaisance, poursuivent leur pêche illégale de cabillaud en mer de Barents s’élèverait à 100000 tonnes par an, route vers le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Allesoit plus de 20 % des quotas autorisés. «Et encore, magne, l’Espagne ou la France, où ils revendent leur c’est une sous-estimation», remarque le conseiller. marchandise en toute impunité. Ce trafic florissant rapporterait plus de 180millions Liste noire. «C’est une véritable mafia», affirme Rasd’euros par an. mus Hansson, secrétaire général du Fonds mondial Depuis une trentaine d’années, Oslo et Moscou, qui pour la nature (WWF) en Norvège. Il évoque «un rése partagent la souveraineté sur la mer de Barents, seau très bien organisé», avec des «connexions en Rusfixent ensemble les quotas annuels de pêche autori- sie et en Europe du Nord» et une flotte de «plusieurs sés. «Après l’implosion de l’URSS, les Russes ont com- dizaines de bateaux». Sur la liste noire dressée par les mencé à vendre leur poisson en Norvège. Puis ils se autorités norvégiennes figurent une vingtaine de sont rendus compte qu’il était facile de tricher avec les chalutiers – y compris l’Elektron – et une quinzaine quotas, en visant de nouveaux marchés», explique de navires battant pavillon de complaisance. Tor Glistrup. A la fin des années 1990, les garde- Récemment, dans un documentaire, la chaîne de técôtes norvégiens ont observé le développement du lévision suédoise TV4 a révélé l’implication de plutransbordement, en bordure des eaux territoriales sieurs compagnies scandinaves, accusées d’acheter norvégiennes. du cabillaud illégalement pêché en mer de Barents, Les cales pleines, leurs quotas épuisés, les chalutiers en toute connaissance de cause. Sur le banc des ac- ÉNERGIE L Bush veut du nucléaire partout T E D DY S E G U I N Samedi, le président George Bush a annoncé le projet des Etats-Unis de «construire des centrales (nucléaires) d’ici à la fin de la décennie». Il a également proposé Pêche au cabillaud que les puissances nucléaires en mer deBarents, s’unissent pour proposer des en janvier 2004. réacteurs et du combustible aux pays qui s’engageraient à ne pas les utiliser à des fins militaires. La Russie pêcherait trop gros en mer de Barents cusés: l’un des principaux producteurs et exportateurs de produits de la pêche au Danemark. L’un de ses clients, le groupe suédois Findus, a d’abord démenti les informations, avant de faire savoir que la société allait «prendre toutes les mesures qui s’imposaient» pour s’assurer qu’elle ne vendrait plus de poisson pêché au noir. Stocks menacés. Toutefois, «rien ne changera sans la coopération de l’Union européenne», affirme Rasmus Hansson. Si aucun contrôle sur l’origine de la marchandise n’est effectué dans les ports européens, le trafic se poursuivra. Le leader de la Société norvégienne des pêcheurs, Reidar Nielsen, est furieux : «Bruxelles doit comprendre que l’intérêt de ses pêcheurs est en jeu.» Car non seulement la surpêche pousse les prix à la baisse, mais elle menace les stocks de la mer de Barents, où plus de 60000 tonnes de cabillaud sont réservées aux chalutiers européens. Au ministère de la Pêche à Oslo, le directeur de cabinet, Jørn Krog, admet que «l’action menée jusqu’à présent n’a pas été aussi efficace que souhaitée». Mais il est optimiste. En revanche, au Conseil international pour l’exploration de la mer à Copenhague, le chercheur Henrik Sparholt met en garde: «Si les quotas fixés pour 2006 – autorisant la pêche de 471000tonnes de cabillaud – assurent la reproduction du stock, la surpêche de 100000 tonnes n’est pas tenable sur le long terme.»La survie de la dernière grande réserve mondiale de cabillaud serait donc en péril. • ANNE-FRANÇOIS HIVERT Océanographie. Les poussières de l’éruption du volcan en 1883 ont influencé le niveau marin au XXe siècle. Avec le Krakatoa, la mer ne montait pas u XXe siècle, le niveau des océans a été sous le contrôle… du Krakatoa. En 1883, une gigantesque éruption du volcan indonésien propulsait dans la haute atmosphère d’énormes quantités de poussières qui allaient, durant plusieurs années, refroidir la Terre et provoquer de magnifiques couchers de soleil. Des océanographes viennent de démon- A trer que l’éruption a aussi influencé le niveau marin durant presque tout le XXe siècle (1). La démonstration a pris le chemin d’une série de simulations sur ordinateurs, utilisant douze modèles différents représentant le fonctionnement du couple océan-atmosphère. Les scientifiques ont simulé la période 1880-2000 de deux manières. Une série de six qui incluait toutes les causes de variations connues du niveau marin (effet de serre, activité solaire, aérosols sulfatés et volcaniques, dont ceux du Krakatoa). Et une autre série qui ne tenait pas compte des aérosols volcaniques. La comparaison des deux séries montre que l’effet refroidissant des aérosols volcaniques a pénétré petit à petit dans les profondeurs océaniques, alors qu’il disparaissait de l’atmosphère. Du coup, le niveau marin mondial – déterminé en grande partie par la température de l’eau qui se dilate en chauffant – a subi cette influence durant de longues décennies. A l’inverse, lors de l’éruption du Pinatubo, en 1991, «comparable en terme de forçage radiatif»(son effet sur le rayonnement solaire, ndlr), expliquent les scientifiques, l’influence refroidissante des aérosols a rapidement été compensée par une élévation plus rapide de la température de surface de l’océan en raison de l’augmentation de l’effet de serre depuis les années 1970, due aux émissions massives de gaz carbonique issues de la combustion du pétrole, du gaz et du charbon. • SYLVESTRE HUET (1) P.J. Gleckler et al., Nature du 9 février 2006. SIDA Pékin met le cap sur les capotes La municipalité de Pékin, inquiète de l’augmentation rapide du nombre de cas de sida, a décidé de favoriser l’installation de distributeurs de préservatifs dans des lieux divers: karaokés (souvent de véritables bordels), gros chantiers, dortoirs d’étudiants… (Annonce légale) AVIS DE CONSTITUTION Dénomination : LA PRINCESSE A ROULETTES Forme juridique : SCI. Capital social: 1000 euros. Siège social : 6, rue Euryale Dehaynin, 75019 Paris. Objet : L’aquisition, l’administration et la gestion par location ou autrement de tous immeubles et biens immobiliers. Gérante : Mme Elisabeth HUGHES, demeurant 6, rue Euryale Dehaynin, 75019 Paris. Durée : 99 ans à compter de l’immatriculation au RCS de Paris. (Annonce légale) SARL CORVET SARL au capital de 8 000 euros. Siège social : 7, cité Hitorf, 75010 Paris. RCS Paris 485 158 729. Suivant procès-verbal d’une AGE en date du 5 février 2006, les associés ont approuvé à l’unanimité la nomination de M. Orhan YAMANOGLU, demeurant 5, rue du Rhin, 75019 Paris, en qualité de gérant, pour une durée indéterminée, en remplacement de Mme Birgul TIROK, démissionnaire, et ce, à compter de cette même date. Pour avis, la gérance. COMMUNIQUÉ JUDICIAIRE «Par arrêt du 12 janvier 2006, la 11ème chambre de la Cour d’Appel de Paris, section B, a condamné Serge JULY, directeur de la publication du journal LIBÉRATION et Karl LASKE, journaliste, pour avoir diffamé Geneviève GOMEZ, dans l’article paru dans le quotidien LIBÉRATION, le 17 octobre 2002, et intitulé “JAFFRE dans les affres de l’affaire ELF”». LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 politiques 15 Le patronat indien accuse la France de «xénophobie» dans l’affaire Mittal Steel. aris n’en démord pas. Pour Jacques Chirac, l’affaire Mittal-Arcelor «n’est pas un problème entre l’Inde et la France». Persuadé qu’après l’épisode du Clemenceauce dossier est de nature à nuire aux contrats qu’il entend signer en Inde, il tente depuis plusieurs jours d’en faire un simple dossier européen. Il ne manque pas une occasion de souligner que Mittal est une société de droit néerlandais, basée à Londres avec à sa tête un dirigeant, certes, indien «mais qui pourrait être de n’importe quelle nationalité». Il rappelle qu’Arcelor est, elle, une entreprise luxembourgeoise et non française. Mais en coulisses, l’Elysée et Bercy restent totalement hostiles à l’offre publique d’achat (OPA) lancée par Mittal Steel. Ils s’activent d’autant plus discrètement à la faire capoter qu’ils ne sont pas sûrs d’y parvenir. «Nous avons fait notre boulot. Voyons ce qui se passe maintenant. J’ai bon espoir que les choses tournent en notre faveur», assurait hier Lakshmi Mittal dans une interview au quotidien Times of India. «C’est une affaire qui a été lancée beaucoup trop rapidement et sans véritable projet industriel à la clé», expliquait samedi à Bangkok le ministre de l’Economie, Thierry Breton, en marge de la visite d’Etat de Jacques Chirac en Thaïlande. Certains conseillers du Président vont encore plus loin en justifiant la position française par la volonté de «préserver en Europe un certain type de modèle». A entendre l’un d’eux, «deux visions de l’économie sont en jeu dans cette affaire emblématique: celle d’un capitalisme prédateur strictement financier et celle d’une économie sociale de marché». Inutile de préciser à laquelle va sa préférence. Agacement. Mais si Jacques Chirac a réussi à désamorcer la polémique autour du Clemenceau avant son arrivée à New Delhi, il risque d’avoir du plus mal avec l’affaire MittalArcelor. Les autorités et les milieux d’affaires indiens ne cachent pas leur agacement face à l’attitude de la France sur ce dossier. La presse locale s’en est largement fait l’écho. Car la plupart des obser- ● ● ● PAT R I C K KOVA R I K . A P Le temps d’un voyage en Inde, Chirac met Arcelor en veilleuse P Jacques Chirac, dimanche à son arrivée à New Delhi. Les milieux économiques indiens et la presse accusent Paris de ne pas jouer le jeu du libre-échange. Nucléaire: deux poids, deux atomes Malgré les tensions avec l’Iran, voilà le chef de l’Etat, marchand de centrales en Inde. New Delhi envoyé spécial n pleine crise internationale sur le nucléaire iranien et sur fond de concurrence frontale avec les Américains, Jacques Chirac fait le funambule. Depuis le début de son voyage en Thaïlande et en Inde vendredi, le chef de l’Etat s’emploie à tenter de banaliser les engagements que la France va prendre aujourd’hui vis-à-vis de l’Inde en matière de nucléaire civil. Mais pour garantir à la filière nucléaire française de très juteux contrats, il prend le risque de donner le sentiment qu’il y aurait deux poids deux mesures en matière de nucléaire, selon qu’il est indien ou iranien. Car, contrairement à Téhéran, l’Inde (puissance nucléaire déclarée depuis 1998) n’a jamais ratifié le traité de non-prolifération (TNP). A ce titre, elle n’a en principe pas le droit de bénéficier en matière de nucléaire civil de l’aide et des technologies des Etats du NSG, le Groupe de fournisseurs nucléaires,dont la France est membre. Mais à New Delhi, où son séjour passe plutôt inaperçu dans l’attente de celui de George W. Bush début mars, Jacques Chirac a d’ores et déjà assuré ses hôtes E que la France avait pour «objectif prioritaire»d’obtenir un statut particulier et dérogatoire pour l’Inde au sein du NSG. Une voie déjà ouverte par les EtatsUnis, avec le soutien de la France, en juillet2005 lors de la signature d’un protocole envisageant des coopérations nucléaires civiles indo-américaines. «Inch Allah». Pour justifier sa position, Chirac –qui nucléaire français: Alain Bugat, administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique, et Anne Lauvergeon, présidente du directoire d’Areva. «Nous sommes dans les starting-blocks. Nous n’attendons plus que des évolutions politiques», assurait hier à New Delhi cette dernière, ajoutant qu’avec des besoins de 25 à 30 centrales nucléaires l’Inde représente un marché «considérable». «Inch Allah», a glissé, en l’entendant, le ministre «Nos amis américains ne sont pas compétitifs, de l’Economie. la technologie française est beaucoup plus avancée.» Le président de la République Compétitivité. En bon VRP, Jacques Chirac entend bien aujourd’hui assener à aurait tant voulu se débarrasser du Clemenceauen ses interlocuteurs indiens son argument «décisif» Inde– met d’abord en avant ses préoccupations éco- pour que l’Inde s’engage avec la France plutôt logiques. «Si l’on n’aide pas l’Inde à faire face à ses qu’avec les Américains: selon lui, «la solution franénormes besoins énergétiques, elle va se transformer çaise est sans risque parce qu’elle n’est pas soumise en gigantesque cheminée à effets de serre en utilisant aux aléas du Congrès américain»,à qui Bush n’arrid’autres ressources plus polluantes que le nucléaire», ve toujours pas à faire lever des sanctions prises explique-t-il. Peut-être. Mais les contrats qu’il comp- contre l’Inde après ses essais nucléaires de 1998. Et te obtenir à terme contre le soutien de la France sont puis, bien sûr,«nos amis américains ne sont pas comencore plus motivants. Dans ses valises, le chef de pétitifs, la technologie française est beaucoup plus l’Etat a emmené avec lui deux personnages clés du avancée». Alors, vendu? • A.G. 16 politiques ciations [à l’OMC]ne soient pas affectées de manière négative par d’éventuelles actions des membres de l’UE qui seraient contraires à ce principe»,poursuit la lettre. Une réaction quelque peu démesurée puisque Mittal Steel n’est pas une entreprise indienne. Pour un pays qui s’est toujours vu accusé de protectionnisme, la pilule Mittal est cependant difficile à avaler. Sans compter que Lakshmi Mittal, aujourd’hui le troisième homme le plus riche au monde, est devenu une icône nationale, même s’il ne possède aucun actif en Inde. «L’attitude européenne est très décevante, on a l’impression que les Occidentaux n’acceptent pas le fait que les pays en développement bénéficient à leur tour de la mondialisation», commente Natraj Srinivasan, directeur général de la Confédération indienne de l’industrie. «Cela fait plus d’une décennie que le monde occidental nous pousse à l’ouverture en nous donnant des leçons sur le libéralisme, renchérit Rahul Bajaj. Mais aujourd’hui, ce sont eux qui mettent des barrières au libreéchange quand ça ne les arrange pas. Qu’ils aillent jusqu’au bout de leur logique, et qu’ils arrêtent de nous donner des leçons!» «Mittal a promis qu’il n’y aurait pas Rencontre. Bien de licenciements. La France conscient que cette l’accuserait-elle d’être un menteur?» controverse risque Rahul Bajaj, PDG de Bajaj Auto Ltd de peser sur sa première visite offibloquer l’OPA n’ont d’autre cielle en Inde depuis huit ans, explication que «la xénopho- Jacques Chirac a tenté de calbie». 80% d’entre eux approu- mer les esprits avant son arrivent également les propos du vée. Dans une interview ministre du Commerce, Ka- publiée vendredi par l’hebdomal Nath, selon lesquels les madaire India Today, le Présidéclarations des politiques dent affirme ainsi que l’affaire européens, et notamment «est une bataille entre entrefrançais, «frisent le racisme»et prises privées». Malheureusesont contraires à l’esprit de la ment pour lui, la polémique a libéralisation économique d’autant plus de chances de retant vantée par les politiques surgir pendant son séjour que occidentaux. Lakshmi Mittal, installé à La semaine dernière, le mi- l’étranger depuis trente ans, nistre a carrément laissé en- est actuellement de passage à tendre à Bruxelles que l’Inde New Delhi. Un hasard de capourrait remettre en question lendrier. Officiellement, le les négociations en cours à magnat de l’acier est rentré au l’Organisation mondiale du pays pour assister à un mariacommerce (OMC). Dans une ge. La coïncidence est troulettre adressée à son homo- blante. D’autant que la rumeur logue européen Peter Mandel- enfle sur le fait qu’il pourrait son, Kamal Nath affirme en ef- être présent lorsque Jacques fet que la réponse d’une partie Chirac s’adressera aux de l’Union européenne (UE) hommes d’affaires indiens, cet va «à l’encontre de la lettre et de après-midi. Le président franl’esprit du principe du “traite- çais et l’homme d’affaires inment national”» qui prévoit dien risquent donc de se croiqu’un investisseur issu d’un ser se soir. «J’irai le saluer pays membre bénéficie du comme il se doit», a promis même traitement que ceux du Jacques Chirac.• pays hôte. «Vous pourriez vouANTOINE GUIRAL loir vous assurer que nos négoet PIERRE PRAKASH (à New Delhi) vateurs indiens estiment que les réticences exprimées par Paris sur le projet d’OPA sont à mettre sur le compte de la nationalité indienne du patron de Mittal. «Si ce n’est pas du racisme, qu’est-ce que c’est?»interroge ainsi l’un des plus grands patrons indiens, Rahul Bajaj, PDG de Bajaj Auto Ltd, fabricant de deuxroues. «L’argument français sur les “différences culturelles” entre les deux groupes ne tient pas debout, Lakshmi Mittal possède des affaires aux EtatsUnis et cela n’a jamais posé de problème.»Quant aux craintes de voir les 30000 emplois français d’Arcelor supprimés: «Mittal a promis qu’il n’y aurait pas de licenciements. La France l’accuserait-elle d’être un menteur? Il n’est pas devenu numéro1 mondial de l’acier en racontant n’importe quoi.» «Racisme.» Particulièrement remonté, Rahul Bajaj n’est pas seul à torpiller la France dans cette affaire. Les articles de presse et les émissions de télé se sont multipliés ces derniers jours, après qu’un sondage réalisé par la Fédération indienne des chambres de commerce et d’industrie auprès de 200chefs d’entreprise a montré que, pour 95% d’entre eux, les efforts européens pour LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 (Annonce légale) Par requête en date du 15 juin 2005, reçue au greffe le 17 juin 2005, le Tribunal de Grande Instance de Versailles (Yvelines), a été saisi à l’effet de constater l’absence de Monsieur Henri Élie Jean LAFAY, né le 9 avril 1937 à ASNIÈRES-SUR-SEINE (Hauts-de-Seine), fils de Madame Juliette Blanche LE PRÉ, domicilié en dernier lieu chez Monsieur René LAUNAY, 15 rue Bellièvre, 75013 PARIS, déclaré présumé absent par décision en date du 7 mars 1994 du Juge des Tutelles du Tribunal d’Instance de Paris 13ème. La publication de cet extrait de requête en déclaration d’absence a été autorisée par le Procureur de la République de Versailles, le 13 octobre 2005. LAURENT TROUDE ●●● Dominique de Villepin (à d.) en décembre. Le CNE et le CPE ont renforcé la défiance des jeunes à l’égard de son action. Dans les sondages, le CPE grève la cote de Villepin Son action mécontente 54% des Français, selon le baromètre Ifop-JDD. e temps se brouille pour Dominique de Villepin. Une motion de censure à l’Assemblée sur le CPE (contrat première embauche); un débat délicat au Sénat; des manifestations qui durent même si elles peinent à s’amplifier; et une opinion qui se détourne de lui. Après neuf mois d’une réussite incontestable, le Premier ministre affronte cette semaine sa première zone de turbulences. Recul. Radieux à l’automne 2005, Dominique de Villepin encaisse un brusque retour de manivelle. Selon le baromètre Ifop-le Journal du dimanche (JDD), le pourcentage des Français ayant une opinion positive de l’action du Premier ministre a chuté de 9 points, passant à 43%; simultanément, le total des mécontents passe de 45% à 54% (1). Un chiffre qui confirme la dernière enquête LH2-Libération, qui voyait la popularité du chef du gouvernement fondre de 5 points (Libération du 6 février), ainsi que les résultats des baromètres Ipsos-le Point (-6 points) et Ifop-Paris Match (-6 points). Dans l’enquête Ifop-JDD, le recul le plus net est chez les jeunes, où il atteint 15 points. Une conséquence du CPE, ce nouveau contrat pour l’emploi qui suscite l’hostilité d’une partie de la jeunesse. Une grande manifestation nationale est prévue le 7 mars et, pour prendre de court les organisations lycéennes et étudiantes, Dominique de Ville- L pin a fait adopter son texte le 10 février par l’Assemblée en vertu de l’article 49-3 de la Constitution. Mardi, le Premier ministre devra répondre à la motion de censure déposée par le Parti socialiste à l’Assemblée; deux jours plus tard, le Sénat commencera à examiner le projet de loi instaurant le CPE. Un exercice délicat, car l’UMP a besoin de la neutralité des sénateurs UDF pour obtenir la majorité. Actions. Samedi, les représentants d’une trentaine d’universités françaises se sont re- trouvés à Rennes pour former une coordination nationale anti-CPE. «Chaque fac va à son rythme, estime Annaïs Charrier, venue d’Angers. Mais le mouvement est dans une phase ascendante et nous invitons tous les gens touchés par la précarité à nous rejoindre.» Une vingtaine de lycéens bretons ont également participé à la réunion où, après dix heures de discussions à huis clos, les délégués se sont mis d’accord sur trois revendications principales: l’abrogation du CNE (contrat nouvelles embau- ches), le retrait du CPE et l’augmentation de postes au Capes. Trois mots d’ordre qui vont être défendus dans la rue les 23 et 28février et le 7mars. Un appel national au blocage des universités à partir du 23 février a aussi été décidé. Reste à franchir l’étape des vacances (une semaine à partir du 25février pour Rennes-II). Une seconde réunion de la coordination est prévue samedi à Toulouse.• É.A. et P.-H.A. (à Rennes) (1) Effectué par téléphone du 9 au 17février auprès de 1855 personnes. Les ministres utilisent leurs rejetons Pour vanter le CPE, ils n’hésitent pas à jouer les parents inquiets. a marmaille à la rescousse. «Et ma fille, et mon neveu…» Pour vanter le contrat première embauche (CPE), les ministres ont appuyé leurs démonstrations sur des exemples issus de leur propre famille. Quitte à friser le ridicule. Mercredi, le ministre de l’Education nationale, Gilles de Robien, a ainsi livré une «confidence»aux lycéens lyonnais qu’il était venu rencontrer (Libérationdu 16février): «J’ai un fils qui est sorti de ses études avec bac + 5 à un moment de creux. Il est resté neuf mois sans travail. L’ambiance dans la famille, bonjour! Je suis certain qu’avec le CPE ce délai aurait été réduit.» Il est loin d’être le seul au gouvernement à user de l’argument du «vécu». Gérard Larcher, ministre délégué à l’Emploi, raconte à qui veut l’entendre que son fiston, brillant ingénieur, s’est vu proposer un stage à peine indemnisé dans une grande entreprise. Thierry Breton, ministre de l’Economie, a aussi recouru aux soucis professionnels de ses enfants pour dire tout le bien qu’il pense du CPE. Jean-Louis Borloo, ministre de l’Emploi et de la Cohésion sociale, en a, lui, fait un leitmotiv. L Dans le Journal du Dimanche du 29 janvier, il explique à son tour: «J’ai une fille de 23ans, actuellement en stage. On ne lui propose que ça ou des CDD. Quel parent ne trouverait pas ce contrat mieux qu’un stage ou un CDD?» Une interpellation déjà testée à l’Assemblée nationale, quelques jours plus tôt: «Il y a des moments ou les évidences s’imposent. Quel père, quelle mère ne dira pas à son enfant “prends ce contrat première embauche plutôt qu’un stage”?»Ce mode de communication ne doit rien au hasard. Alors qu’une majorité de jeunes sont hostiles au CPE, le gouvernement veut, en prenant des exemples concrets, toucher les parents inquiets de l’avenir de leurs rejetons et en appeler à leur «bon sens». «Il n’y a pas un adulte de bonne foi»pour soutenir les propositions des socialistes, a expliqué Dominique de Villepin le 10février à Toulon. Le Premier ministre veut également montrer qu’il a «les deux pieds sur terre», comme il l’a rappelé le 25 janvier à l’Assemblée: «Nous nous préoccupons de la vie quotidienne.»• VANESSA SCHNEIDER politiques 17 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Santé: les Français favorables à la limitation des dépenses Cinq enquêtes du ministère de la Santé, échelonnées entre 2000 et 2005, montrent un tassement de l’optimisme des Français en matière de santé et de protection sociale. En 2005, un Français sur deux seulement, contre 62% en 2000, pense que l’état de santé de la population s’est amélioré au cours des dernières années. Les opinions favorables à la limitation des dépenses de santé (86%) sont en progression de 5 points. Interrogés sur les mesures qu’ils retiendraient pour réduire le déficit, les Français citent en priorité le changement de comportement des médecins et des patients. PS: Montebourg ouvre ses bras aux jeunes Samedi s’est tenu à Saint-Denis le premier meeting national du nouveau courant Rénover maintenant. n temps que les plus de 40ans ne peuvent pas connaître. Pour le premier rassemblement Les enquêtes ont porté chaque année sur un échantillon de 4 000 personnes. national de Rénover maintenant (RM), samedi à Saint-Denis (Seine-SaintDenis), le député PS Arnaud Montebourg s’est fait le défenseur des 18-35 ans, «cobayes des expérimentations de l’ultralibéralisme à la française». Ça tombe bien: RM, le courant qu’il a créé après le congrès duMans, compte beaucoup de ces «cobayes», qui ont quitté Le clip de deux minutes montre d’abord des gens moroses, immobiles, auxquels succèdent un bébé nageur et un couple avec lui le Nouveau Parti sod’amoureux, dignes représentants d’une France heureuse et cialiste (NPS). Idéal donc pour mobiliser la base, et se compqui bouge. En voix off enregistrée, Nicolas Sarkozy résume ter. Devant 400personnes, le les grands thèmes de campagne. Samedi, à Paris, député de Saône-et-Loire a 2500 nouveaux adhérents de l’UMP ont été reçus par le clos la journée d’un discours président de leur parti, qui leur a réservé la présentation appelant les jeunes à «refuser de son nouveau slogan, «Imaginons la France d’après». le monde tel qu’il est». Tel un rideau, le panneau supportant le slogan s’est légèrement soulevé pour laisser apparaître un champ vert vif En pleine mobilisation antiCPE (contrat première emrempli d’une multitude de coquelicots rouges devant une bauche) –«mais nous avions haie de cyprès. «La question n’est pas la France d’après qui, prévu cette journée avant», asla question est la France d’après quoi», a affirmé Sarkozy, sure Thierry Mandon, le pordevançant les interrogations. «Nous sommes en train de te-parole du courant–, il accurévolutionner la vie politique», s’est-il complimenté. U Une histoire Amoureux et bébé nageur: l’UMP présente sa «France d’après» Qualifiant la gauche «conservatrice» française de «seul produit parfaitement inexportable», il a estimé que, pour 2007, son parti devait se préparer à «faire le débat tout seul». sont que la partie visible de l’iceberg, se lamente Ahmed, militant associatif. Frêche a dit tout haut ce que tout le monde en France pense tout bas depuis quarante ans.» Du côté de la gauche non socialiste, qui avait vigoureusement condamné les mots de Georges Frêche, personne, à l’exception du Mrap, n’a voulu s’afficher aux côtés des harkis. Contactés par Libération, les responsables communistes se sont justifiés en refusant de «participer à une manifestation qui risquait d’être récupérée par la droite», les Verts avouant leur gêne de «manifester contre le président d’une majorité régionale dont [ les écologistes font] partie». Un manifestant résume: «C’est toujours pareil, la droite cherche à nous manipuler et la gauche nous méprise.» • PIERRE DAUM A.A. et L.N. 2002.» Rénover maintenant compte jouer cette carte pour «peser sur le projet du PS»,explique Montebourg. «Seronsnous capables de dire aux grands groupes “donnez moins à vos actionnaires et donnez plus à vos stagiaires”?»feint-il de s’interroger. Lui a déjà sa petite idée. La commission du projet risque d’être «le tableau de tous les renoncements. On va finir par théoriser notre propre inexistence», ironise-t-il. Sans parler Arnaud Montebourg raille d’un système poliles préparatifs de la présidentielle: «Après les Bronzés 3, voici Jospin 3 !» tique comparé à un «Jurassic Park ver[qui] vaut mille cocktails Mo- rouillé à double tour»qui «ferlotov!». Et qui, dans un PS me la porte aux jeunes». Dans vieillissant (moyenne d’âge: le même registre, il raille les plus de 55ans), donnerait plus préparatifs de la présidentielde poids au courant Monte- le : «Après les Bronzés 3, voici bourg. L’équation est résumée Jospin 3!» Yvette Roudy, l’expar Alexis Bachelay, chargé du ministre de François Mitdialogue avec les organisa- terrand, avait prévenu l’assistions de jeunesse: «Quand les tance, «Arnaud a retrouvé sa jeunes ne sont pas au rendez- franchise».• vous, ça donne le 21 avril ÉMILE JOSSELIN se le gouvernement d’être «en deçà des normes internationales du travail»et envisage de porter plainte, comme l’a fait Force ouvrière. «Une société sans horizon fabrique de la violence», explique Arnaud Montebourg, pour qui, après les émeutes en banlieue, «la braise est encore sous la cendre». Son remède? «Un grand plan d’embauche publique.» Autre solution, «une carte Rénover maintenant, A Montpellier, rassemblement harki sous les fenêtres de Frêche Pour le Medef, les licenciements sont trop contestés La présidente du Medef, Laurence Parisot, a souligné dimanche, lors du Grand Jury RTL-LCI-le Figaro, que la France détient le record du nombre de contentieux sur les licenciements et que cela explique «en partie pourquoi le marché du travail fonctionne mal». Elle a souhaité qu’en France le licenciement pour inaptitude à son travail ne soit plus considéré comme un licenciement abusif. Laurence Parisot a par ailleurs noté que l’apparition de contentieux sur des licenciements de salariés embauchés en CNE «révèle au moins une chose, c’est que le CNE n’est pas une zone de non-droit». IMAGES www.liberation.fr Montpellier correspondance lusieurs centaines de harkis (400 selon la police, 1 000 selon les organisateurs) se sont réunis samedi après-midi sous les fenêtres du conseil régional du Languedoc-Roussillon (à Montpellier), présidé par le socialiste Georges Frêche. La semaine dernière, ce dernier avait publiquement traité de «soushommes» un groupe de harkis qui avaient participé, le même jour, à un rassemblement de l’UMP. «Pour qui nous prendil? s’énerve une manifestante, fonctionnaire de police en Auvergne. Pour des indigènes qui n’ont pas le droit de penser par eux-mêmes? C’est fini le temps où nos parents devaient voter ce que leur député ou leur maire leur disaient de faire!» Dans un contexte politique local tendu, les organisateurs de ce rassemblement se sont ef- P forcésd’éviter toute récupération par la droite: «Nous avons lancé des invitations à tous les élus, de droite comme de gauche», a rappelé au micro Abdelkader Chebaiki, représentant de l’Association Justice Information et Réparation pour les harkis (Ajir). Plusieurs élus UMP ont été priés de ranger leur écharpe tricolore. A la tribune, seuls des responsables associatifs ont eu droit à la parole.MohamedHaddouche,présidentnationald’Ajir,adénoncé: «Si vous lisez bien sa déclaration, c’est aux seuls journalistes [que Frêche] a demandé de se faire pardonner.» Dans la foule, beaucoup d’hommes âgés arborant leurs médailles militaires, des veuves avec une photo de leur mari «mort pour la France», et beaucoup de jeunes, tous blessés par les paroles de Frêche. «Le pire, c’est que ces insultes ne Ils appellent à manifester en avril contre l’EPR, dans le cadre des vingt ans de Tchernobyl. ingt ans après la catastrophe de Tchernobyl, une manifestation antinucléaire est organisée les 15 et 16avril près du site de Flamanville (Manche), où doit être construit le réacteur EPR. Aujourd’hui, à Cherbourg, plusieurs personnalités, dont Bové et Mamère, lanceront un appel à participer à ce «grand rassemblement»qui s’annonce considérable sur le papier: 196 organisations de 35 pays soutiennent l’initiative. Outre les très nombreuses associations du réseau Sortir du nucléaire, plusieurs partis politiques français annoncent leur participation: les Verts, bien sûr, mais aussi CAP21 de Corinne Lepage, la LCR et le MJS (Mouvement des jeunes socialistes). En revanche, il est peu probable que le PS soit de la partie. Car si le Parti socialiste s’est clairement prononcé contre l’EPR, il reste exclu pour lui de s’associer à un mouvement de protestation contre l’énergie nucléaire. Les organisateurs ne se font guère d’illusions: ils espèrent 10 000 manifestants, grand maximum. Car dans un contexte de réchauffement climatique et de prix du pétrole élevé, l’atome fait figure de solution: «L’actualité sert la propagande pronucléaire du gouvernement, qui se pose en champion de la lutte contre l’effet de serre», constate l’ex-ministre écologiste Yves Cochet. Alors qu’un récent sondage de la Commission européenne indique que les Européens sont très majoritairement hostiles à l’atome, en France, le combat antinucléaire reste cantonné dans la marginalité depuis le début des années80. En septembre, entre 4000 et 6000 militants s’étaient retrouvés à Bure (Meuse) pour protester contre l’enfouissement des déchets radioactifs. Un record. Avec l’anniversaire de Tchernobyl, le lancement du nouveau réacteur EPR et la prochaine mise en route de la campagne pour l’élection présidentielle, les antinucléaires espèrent qu’ils auront, en ce printemps, la possibilité de montrer que leur combat reste mobilisateur.• Bussereau peint Ségolène Royal en «artiste de la déception» Les organisateurs prétendent éviter la récupération politique. Dominique Bussereau, ministre UMP de l’Agriculture et élu de Charente-Maritime, a qualifié hier la socialiste Ségolène Royal, d’«immense artiste de la déception». «Elle crée des espérances, mais c’est une immense artiste de la déception […] son style, c’est beaucoup de communication, une pensée assez évanescente, peu de message.» Le ministre dit qu’il lui arrivait souvent de côtoyer la députée socialiste dans le train où il ne l’a «jamais vue en seconde classe». Bové et Mamère mobilisent contre l’atome V 18 société LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Le chef de la bande qui a enlevé Ilan était, hier soir, toujours introuvable. Un jeune de Bagneux, qui l’a connu, retrace son parcours. Q F R É D É R I C S T U C I N . M YO P ui est Youssouf F.? L’homme le plus recherché de France, le nouvel «ennemi public»,demeurait toujours introuvable hier soir. «Toutes les pistes sont explorées, on le cherche partout, on vérifie tout», dit-on à la police judiciaire. Son bras droit ainsi que 1000 à 2000 personnes ont défilé hier à Paris, entre République et Nation, à la mémoire d’Ilan Halimi, décédé après trois semaines de séquestration. l’aguicheuse, une jeune femme d’origine maghrébine qui avait attiré Ilan Halimi dans le guet-apens mortel, sont également recherchés. Le «cerveau des barbares», chef présumé de la bande qui a kidnappé Ilan, est arrivé à Bagneux dans les années 90. Selon les informations recueillies par Libération, il débarque du quartier de Belleville, à Paris, avec sa famille. Ses parents, d’origine ivoirienne, travaillent tous les deux. Ils ont éle- interpellés, dont quatorze en France et un Les policiers tentent toujours de cerner les vé six enfants. Youssouf est le troisième. à Bruxelles. Samedi soir, trois d’entre eux contours du groupe, qui aurait à son actif au Après avoir fréquenté le collège, il aurait ont été mis en examen et écroués. Il y a là moins six autres tentatives d’enlèvement. Les suivi une formation de plombier au lycée AudreyL.jeune femme blonde soupçonnée personnes entendues depuis vendredi se déprofessionnel Jean-Monnet, à Montrouge d’être un des appâts du gang à la demande de crivent comme de «simples maillons». «On Sous une pluie tenace, 1000 à 2000personnes ont (Hauts-de-Seine). «A l’époque, c’était un pe- son petit ami, qui serait un proche de Yous- peut penser qu’ils minimisent leurs responsa- défilé hier à Paris, entre République et Nation, à la tit jeune tranquille, discret et timide, pas très souf, puis sous la pression du groupe. Elle bilités en chargeant les absents.»Certains au- mémoire d’Ilan. De nombreuses familles, avec des sportif. Après, il a eu des fréquentations qui s’est rendue spontanément à la police après raient accepté de servir de «garde-chiourme enfants, ont marché, silencieusement d’abord, puis l’ont mené en prison», se souvient un jeune la diffusion de son portrait-robot. contre une promesse d’argent», dit une source reprenant les slogans lancés par un groupe de jeunes de Bagneux. Figure aussi Almane D. personnage soup- proche de l’enquête pour qui «ces jeunes ne déterminés. Beaucoup, parmi ceux-ci, arboraient un A 18ans à peine, autour de 1998, Youssouf au- çonné d’être prêteur sur gages africain. Il au- sont pas du genre à se poser des questions». brassard noir, avec une étoile de David et le slogan: rait été impliqué dans une affaire de vol à rait servi d’intermédiaire en cas de remise de «Coup de main». L’hypothèse d’une bande or- «Fier d’être juif».Bientôt les «Justice pour Ilan» se main armée. Placé en détention provisoire à rançon. Tous deux ont été mis en examen ganisée telle qu’on en a connu dans les affaires sont transformés en«Vengeance pour Ilan», «A mort la maison d’arrêt de Nanterre, il de grand banditisme laisse également per- Youssef, à mort les barbares»… moins appréciés par aurait été condamné à trois ans de Samedi soir, trois personnes, dont deux jeunes plexe un policier: «On a plutôt l’impression une partie du cortège.«Nous sommes venus parce que prison, purgés à Fleury-Mérogis femmes, ont été mises en examen et écrouées. d’avoir affaire à un conglomérat de pieds nic- ce climat de peur nous est insupportable. Mais la (Essonne). «Quand il est sorti, il kelés avec peut-être une figure qui se détache.» violence touche toute la société»,expliquait une n’était plus pareil. Il est devenu parano, il pour «enlèvement, séquestration, avec actes de Selon une autre source proche du dossier, au- femme. Près de Nation, quelques jeunes ont jeté sur n’avait confiance en personne. Il pensait qu’il torture et de barbarie et assassinat». Me Jean tour d’un noyau dur mené par le chef présu- le trottoir des cagettes de fruits d’un «épicier arabe», avait été dénoncé. Mais il était heureux de se re- Balan est l’avocat d’Audrey: «Elle affirme mé, se seraient agrégés un cercle de copains de vite protégé par les CRS et le service d’ordre. La trouver dehors, il allait à l’ANPE, il essayait de qu’elle n’était pas consciente de ce qui pouvait cité qui auraient donné «un coup de main»et voiture d'un automobiliste, qui s’était retrouvé au se réinsérer», poursuit celui qui l’a connu à arriver aux victimes du groupe. Le calvaire su- un cercle plus large de parents ou voisins, qui milieu du cortège boulevard Voltaire, a été l’époque. Dans sa description, Youssouf est bi par Ilan lui paraissait inimaginable.» La auraient su mais n’auraient rien dit. A Ba- endommagée. Le Crif a condamné ces incidents. loin d’y apparaître avec ce profil du meneur. troisième personne mise en cause s’appelle gneux, un jeune confirme la vision policière: Puis, un groupe d’une vingtaine de jeunes «Je n’ai jamais pensé qu’il aurait pu faire ça, Murielle I. La juge d’instruction estime «Ce groupe que l’on appelle “les Barbarians” encapuchonnés s’est dirigé vers le théâtre dela Main mais, en prison, on ne fait pas forcément de qu’Ilan serait peut-être vivant si elle avait im- n’existait pas auparavant. Il est fait de bric et de d’Or, QG de l’humoriste Dieudonné. Sur place, ils ont bonnes rencontres. Je ne sais pas ce qui s’est médiatement dénoncé son amie à la police. broc. Ce sont des petits jeunes totalement in- tenté de défoncer la porte à coups de pied. L’action passé dans sa tête.» Elle l’a donc mise en examen pour non-dé- conscients qui ne savent même pas la gravité de n’a duré qu’une trentaine de secondes. La police, hier, Quinze interpellations. Ce week-end, les poli- nonciation de crime. Les policiers semblent ce qu’ils ont fait.»Le même affirme qu’ils sont affirmait qu’«un motif crapuleux»animait les auteurs ciers ont entendu de nombreuses personnes, avoir acquis la certitude qu’Ilan a été séques- dans l’échec scolaire, sans emploi mais même du rapt d’Ilan. «Ce qui fait agir, ce n’est pas une raison «Il y a des mouvements d’allers-retours qui tré quelques jours dans un appartement de pas déclarés au chômage et qu’ils vivent «chez raciale ou religieuse. Dans leur tête, juif égale argent», tiennent au fait que beaucoup de personnes Bagneux. Puis ses ravisseurs l’auraient des- papa-maman». «La question que je me pose explique ainsi un enquêteur. doivent être entendues»,dit une source au par- cendu pendant deux semaines dans une c’est pourquoi ils sont allés aussi loin.»• MARC PIVOIS quet de Paris. Jeudi, quinze suspects ont été chaufferie du sous-sol. DIDIER ARNAUD et JACKY DURAND Youssouf F., petit jeune timide devenu «barbare» De «Justice pour Ilan» à «Vengeance pour Ilan» société 19 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 par DOMINIQUE SIMONNOT «Le retour chez Maman, c’est fini!» Tribunal correctionnel de Nanterre e président arbore une grosse moustache et un sourire alerte. «Asseyezvous, mademoiselle», dit-il à Samira, une jolie blonde, et il énonce à Maurice, 56ans, chef infirmier: «Monsieur, il vous est reproché des atteintes sexuelles sur cette jeune femme, pour lui avoir caressé les cuisses, un sein et tenté de l’embrasser sur la bouche.»Il y a deux mois, Samira, stagiaire infirmière, a porté plainte contre Maurice. «Il m’a, convoquée dans son bureau, a-t-elle rapporté,il avait pensé à moi tout le week-end, j’étais coincée entre le mur et la table, c’est là qu’il m’a touchée.» Elle avait protesté et Maurice aurait souri: «Quoi? On ne t’a donc jamais touché les seins? T’as jamais fait l’amour? Non? Tu sais, c’est comme les steaks, tant qu’on y a pas goûté, on ne sait pas si c’est bon!»Le juge observe: «Monsieur, il y a là une connotation désagréable. On peut penser que vous abusez de votre fonction et, que, né en 49, vous appréciez des personnes dont vous pourriez être le père.» Maurice soupire: «Elle est venue tous les jours dans mon bureau…»Et le juge hausse les sourcils: «Vous voulez nous dire qu’elle n’est pas farouche?»Il prend un air faussement curieux: «Vous recevez aussi volontiers des déménageurs d’1,80mètre portant une barbe de quatre jours?» Maurice souffle:«En trente ans de carrière, je n’avais jamais eu de geste déplacé!» Le président lit la lettre que Samira a adressée au tribunal:«J’ai pleuré jour et nuit, j’ai vu un psychiatre, je me sentais coupable, salie, on m’a conseillé une psychothérapie.»Elle réclame 10000 euros et, dans la salle, un garçon siffle. «Mon geste a fait beaucoup de mal», se désole Maurice. Le procureur salue «le courage de cette jeune victime»et s’emballe: «Ces faits sont très graves! Il doit soigner ses débordements libidineux. Je ne manquerai pas d’ailleurs d’avertir les autorités sanitaires de son comportement.»Il veut trentemois avec sursis et mise à l’épreuve. «Quelle envolée! râle l’avocat, on parle de trois gestes, sans aucune violence, qu’il n’a L jamais niés, dont il s’est excusé et qui ressemblent plus à une drague poussée et maladroite…»Il regarde Samira: «10000euros? Sans nier le choc, soyons raisonnables!»Six mois avec sursis, 2500euros pour Samira. «Et maintenant, explique le président,nous allons nous occuper des comparutions immédiates. Combien y en at-il? Huit!» Il se tourne vers le procureur: «Il faudrait peut-être se calmer!» Voilà donc Mohamed, 18ans, qui a balancé dans la cour de la prison de Nanterre une canette de Coca, des épices orientales et des CD. Le juge raconte: «Vous avez dit que c’était pour rendre service à un ami, le problème c’est que ce n’est pas la première fois! En juin déjà. Et déjà pour dépanner un ami incarcéré.» Il sermonne: «Monsieur, vous persistez dans vos erreurs, vous n’êtes pas juge de ce qui entre à la maison d’arrêt, et, si vous voulez y envoyer des épices, il y a une procédure pour ça! Vous savez que vous risquez de la prison?»Mohamed gratte sa joue, il est tout pâle. «J’ai rien à dire…» «C’est fâcheux, monsieur, reprend le juge, et dans la vie, vous envisagez quoi?»«Formation cariste…»,chuchote Mohamed. «Monsieur, parlez plus fort, le tribunal n’est pas si désagréable –même s’il nous arrive d’être vifs– que vous ne puissiez élever la voix…» «Je commence en mars», murmure Mohamed. «Allez,l’encourage le juge, au fond, vous pensez que ce n’est pas si grave! Ditesnous ce que vous pensez. Devant le tribunal, c’est connu, on dit toujours ce que l’on pense!»«Non», dit Mohamed. Le procureur demande: «Accepterait-il un travail d’intérêt général?»Mohamed ne dit rien et le juge le bouscule: «Monsieur, si ça ne vous intéresse pas, dites-le!» «Ça m’intéresse pas!» Et le procureur se venge: «J’estimais qu’il fallait éviter d’encombrer la maison d’arrêt, tant pis!» Il fixe le garçon livide: «Ici, c’est le tribunal des grands! L’admonestation, le retour chez maman, c’est fini!» Il veut deux mois ferme. Ce sera 60jours-amendes à 10euros, ça fait 600euros.• Du flou au procès de Castela et Andriuzzi En appel, l’accusation s’est montrée embarrassée face aux «intellectuels» de l’affaire Erignac. uelle sera l’attitude de l’avocat général Yves Jannier, cet après-midi, lorsqu’il commencera son réquisitoire après deux semaines d’audience du procès de Jean Castela et Vincent Andriuzzi? Le magistrat va devoir tenir compte de la tournure prise par le procès ces derniers jours, qui s’est transformé en un étalage des méthodes très contestables, voire délictuelles (Libération du 17février) des policiers de la Division nationale antiterroriste (DNAT). Mais les magistrats du pôle antiterroriste n’ont pas été plus ménagés, à travers les astuces judiciaires utilisées pour réunir les charges contre les deux hommes. Les deux professeurs bastiais sont accusés de complicité dans l’assassinat du préfet Claude Erignac. En 2003, Yves Jannier participait au réquisitoire à deux voix, contre les mêmes accusés, lors du procès en première instance. Les peines réclamées avaient certes été énoncées par son supérieur d’alors, Jean-Louis Nadal, procureur général de Paris. La prison à perpétuité pour les deux «intellectuels», dont l’accusateur relevait qu’ils étaient Q MOUSTY CARNETS DE JUSTICE les «commanditaires» de l’assassinat. Pour autant, durant les débats, c’est bien l’avocat général Yves Jannier qui avait «tenu» l’accusation, faisant montre d’une grande pugnacité. Castela et Andriuzzi avaient finalement été condamnés à trente ans de prison. Cette fois, l’accusation s’est montrée plus réservée, parfois représentant des bâtiments administratifs, «cibles» avérées ou potentielles d’attentats. Dans la seconde, et en particulier dans l’affaire Erignac, que reste-t-il à l’issue des débats? Le commissaire Frizon, venu mercredi soir une dernière fois témoigner sur «la téléphonie», n’a été capable à nouveau que de «on peut supposer»ou «rien n’empêchait que…», lorsqu’il s’agissait de En première instance, Jean Castela et Vincent Andriuzzi ont été condamnés prouver que l’un ou l’autre des accusés à trente ans de prison. avait participé à une discrète. Les débats, impecca- quelconque conspiration. Pour blement menés par le prési- réclamer de nouveau la perpédent Getti, ont permis de tuité, ou trente ans de prison, décortiquer deux séries de c’est un peu vague. faits. Deux attentats «légers» Reproches. «Je veux comcontre des bâtiments publics prendre et surtout connaître la et la perturbation d’un con- vérité. J’aurais aimé que les cours d’agrégation en 1994, réponses soient claires. Ces derpuis, à l’automne 1997 et en fé- niers jours, je n’ai vu que des hévrier 1998, trois attentats et sitations, des choses approxil’assassinat du préfet. Autant matives et des contrevérités», dire que la première série est regrettait à la barre Dominique incomparablement moins gra- Erignac, la veuve du préfet. ve que la seconde. Sans doute faisait-elle référenPetit carnet. Dans la première ce aux déclarations des accusérie, les deux hommes sont sés. Mais ces reproches poumis en cause par des témoi- vaient tout autant s’adresser gnages, voire des preuves plus aux enquêteurs. Les plaidoitangibles en ce qui concerne ries de la défense et le verdict Jean Castela, avec ce petit car- sont attendus mardi.• net couvert de plans de sa main, MARC PIVOIS Immigration: un rappel aux juges La Cour de cassation réaffirme leur rôle de gardiens des libertés. ela ne peut être un hasard. Le 31janvier, le premier président de la Cour de cassation, Guy Canivet, a présidé en personne trois audiences concernant les étrangers. Et, sous son auguste houlette, la cour a rappelé aux juges leur rôle constitutionnel de gardiens des libertés individuelles. Pas un hasard non plus, les trois arrêts sont accompagnés d’un communiqué qui donne plus encore de solennité à l’affaire: «Cet office[de gardiens des libertés, ndlr] suppose que le juge judiciaire effectue des vérifications concrètes et précises.»Ainsi «le juge doit s’assurer» qu’au moment de son placement en rétention ou en zone d’attente, le sans-papiers ou le demandeur d’asile a pu faire valoir ses droits. Notamment l’assistance d’un interprète, d’un médecin, d’un avocat… Et les juges doivent être scrupuleux dans leur examen des dossiers car, rappelle la Cour de cassation, C «l’étranger en rétention est difficilement en état de faire la preuve, d’une part, qu’il a formulé une demande tendant à l’exercice de ses droits, et, d’autre part, qu’un refus a été opposé à cette demande». Voilà un avertissement venu du plus haut magistrat de France qui remet les choses en place. Mais aussi ces juges de la cour d’appel de Paris qui, en décembre, avaient fait circuler un tableau critique des décisions de leurs collègues de Bobigny (Libération du 25 janvier). Ils y dénonçaient des remises en liberté de sans-papiers ordonnées à Bobigny et qu’ils avaient contredites. Pour motiver ces libérations, les juges de Bobigny avaient, entre autres, avancé l’irrégularité des interpellations, l’absence d’interprète, ou des garanties suffisantes pour justifier une assignation à résidence… Par lettre, le président du tribunal de Bobigny avait incité ses magistrats à plus de prudence. Il les avait aussi gentiment avertis qu’une formation au droit des étrangers leur serait dispensée en juin par la cour d’appel. Là, c’est plutôt la cour d’appel qui devra prendre des cours… Cette histoire avait fortement ému le tribunal de Bobigny. Plus encore dans cette ambiance où le ministère de l’Intérieur exige de ses préfectures de plus en plus d’expulsions. Pour Hélène Franco, viceprésidente du Syndicat de la magistrature, «la Cour de cassation réconforte les juges et les encourage à aller le plus loin possible dans leur rôle de garants des libertés. Car, où qu’il se trouve, le juge a cette mission et ne doit jamais capituler devant une politique gouvernementale qui le dépasse».• D.S. • Plus d’un millier de personnes Un ancien condamné à mort poignardé Jacques Lerouge, réinséré modèle, avait consacré sa vie aux sortants de prison. alicieusement, Jacques Lerouge, ancien condamné à mort, disait de luimême: «Je suis la plus belle plaidoirie contre la peine de mort.»Jeudi, à Charmes, dans les Vosges, plusieurs coups de poignard ont mis fin à 65 ans d’une vie extraordinaire. Condamné à mort pour meurtre en 1971, gracié, sorti en libération conditionnelle après dix-sept ans de prison, Jacques Lerouge avait ensuite consacré sa vie à la réinsertion des sortants de prison. Et c’est l’un d’eux, âgé de 50ans, libéré conditionnel, qui l’a tué. Un de ces gars qu’il aidait, à travers l’Aperi, l’association qu’il avait créée. Son existence est de celle que l’on lit dans les livres –il en a d’ailleurs écrit (1)–, depuis la pauvre enfance, le vol d’un moulin à café à 14 ans, la maison de correction où un éducateur aime la chair fraîche des enfants qu’on lui confie. Et les braquages, etc. Jusqu’à la cellule des condamnés à mort où «on ne fait déjà plus partie du monde des vivants». Et enfin cette soif de tout rattraper, de prouver au monde que la prison est «déresponsabilisante», que les longues peines ne servent à rien, que tout homme a droit à une nouvelle vie. D’écoles en colloques, Lerouge portait cette parole et la mettait en œuvre, se démenant pour trouver des boulots, des lieux d’hébergement. Sur une image récente, il donne une affectueuse accolade à Christine Boutin, le 14 janvier à Lyon, lors du lancement de la campagne de «Trop c’est trop!» pour le respect du numerus clausus dans les prisons. «Il a consacré sa vie à la réinsertion des détenus, jusqu’à la perdre tragiquement dans l’exercice de cette vocation», a tristement déclaré la députée UMP, ellemême administratrice de l’Aperi. «Nous perdons un infatigable militant», salue l’Observatoire international des prisons. Son meurtrier a été arrêté vendredi à Epinal.• M ont défilé samedi à Paris pour réclamer le retrait du projet (1) Le Condamné à mort et la de loi de Nicolas Sarkozy sur Grande Traque (Editions contemporaines) l’immigration. D.S. 20 société LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 F LO R E N C E H U B I N . L E PA R I S I E N . M A X P P P Intoxication au monoxyde de carbone dans une voiture GPL Au collège FrançoisTruffaut, où se trouve le premier «internat pour la réussite». Une femme et ses trois enfants qui circulaient à bord d’une voiture GPL ont été intoxiqués par du monoxyde de carbone échappé du moteur défectueux, samedi après-midi dans la Drôme. La voiture roulait sur l’autoroute A7 en direction du nord quand la conductrice s’est aperçue que ses deux enfants à l’arrière, deux jumeaux de 13 ans, étaient inconscients. Elle s’est arrêtée sur l’aire de Donzère, au sud de Montélimar, et a avisé une patrouille de gendarmerie. Appelés sur place, les pompiers ont rapidement constaté que les deux garçons, de même que leur mère et leur sœur de 10 ans assise à l’avant, avaient été victimes d’une intoxication très massive. «Si la mère avait roulé cinq ou dix minutes de plus, on peut supposer que les enfants seraient morts», a estimé un pompier. Les intoxications au monoxyde de carbone dans des garages ou des lieux fermés sont fréquentes, mais il est exceptionnel que ce gaz mortel et inodore s’accumule dans l’habitacle d’un véhicule qui roule, ont précisé les pompiers. Une pierre dans l’internat Une histoire vitrine de Sarkozy à Asnières Guerre de tombe en Corse Un «jeu» entre collégiens tourne mal dans cette structure pour élèves en difficulté sociale ouverte au débotté en septembre et qui fermera en juin. a Gazette des collégiens des Hautsde-Seine, publication du conseil général, se fait l’écho ces jours-ci «d’un internat pas comme les autres». Celui du collège François-Truffaut, à Asnières. En photo, sept garçons de cinquième, accueillis là grâce au conseil général. C’est le premier «internat pour la réussite», ouvert en septembre à l’initiative du président du département, Nicolas Sarkozy. Sa vocation: offrir aux élèves les plus méritants, «mais perturbés par des difficultés rencontrées à la maison», la possibilité de réussir leur scolarité. C’est un fleuron du projet de loi sur la délinquance, défendu par le même Sarkozy et qui sera bientôt présenté en Conseil des ministres. Ce que la gazette ne dit pas, c’est que l’internat va fermer ses portes à la fin de l’année, après tout juste une année d’existence. Pour le conseil général, cet internat n’a jamais été autre chose qu’un ballon d’essai d’une année scolaire avant l’ouverture d’autres internats dans le futur. Blagues et gages. S’il n’a officiellement aucun lien avec cette décision de fermeture, un incident grave est survenu à l’internat François-Truffaut le 4 janvier. Ce mercredi, l’assistant d’éducation chargé d’encadrer les pensionnaires reçoit les parents de l’un d’eux au rez-de-chaussée. A l’étage, les adolescents s’enferment à clé dans une chambre. Ils se racontent des blagues, et celui qui relate l’histoire la plus nulle reçoit un gage. D’après le conseil général, il y a dans la chambre deux meneurs, deux suivistes et un souffre-douleur. Qui prend des claques et se voit planter un stylo à bille dans les fesses en guise de gage, tandis que les autres prennent des photos avec un téléphone portable. Le principal du collège a fait un signalement au procureur. Celui-ci a confié l’enquête à la brigade des mineurs et attend les rapports d’expertises. Il n’exclut pas l’option pénale, en plus de mesures éducatives. Pour le procureur, il s’agit d’une agression à caractère sexuel, impliquant L une «notion de bizutage». Le conseil géné- la-Reine, Boulogne et Nanterre. ral évoque, lui, «un jeu imbécile et des gages A Asnières, les travaux de construction scabreux». Pour les parents des internes, d’un internat sont déjà en cours au collège «le choc a été terrible», raconte une ensei- Auguste-Renoir. Des enseignants s’en ingnante du collège. «Si leurs enfants étaient quiètent. Le conseil général, propriétaire restés chez eux, ils auraient peut-être ren- des murs, a fait évacuer le bâtimentA du contré des difficultés pour se concentrer sur collège Renoir et fait transférer six salles leurs devoirs, mais n’auraient certainement de classe dans des préfabriqués. Les trapas vécu ça!» L’affaire a fait peu de bruit. vaux vont bon train. Ce deuxième internat Les deux meneurs ont été exclus et ren- pour la réussite doit être prêt pour la renvoyés dans leur collège d’origine. Les sui- trée2006. «Quid des statuts de cet internat, vistes ont écopé d’une exclusion de huit des critères de recrutement des internes, de jours. Mais les enseignants de François- son financement, des conventions signées Truffaut ne décolèrent pas. entre l’Education nationale et le conseil géPour eux, la précipitation du président du néral, des fondements idéologiques et pédaconseil général est en cause. En juin, ils gogiques d’une telle entreprise?»interroprennent connaissance du projet d’inter- gent des profs. nat. Pendant l’été, Nicolas Sarkozy dé- «Elèves méritants». Au cabinet du recteur, bloque 40000 euros au conseil général, on semble apprécier le dynamisme du «réquisitionne un bâtiment»et inaugure président du conseil général. L’évaluason tout premier «internat pour la réussi- tion du dispositif et le suivi ne sont pas ente»en septembre. «Nicolas Sarkozy vou- core à l’ordre du jour. Les chefs d’établislait aller plus vite que Jean-Louis Borloo, sement du département sont censés qui avait lui aussi signaler à l’inspection des projets d’in- Malgré la fermeture de la structure académique les ternat, raconte d’Asnières, le conseil général des Hauts- «élèves méritants» à un syndicaliste de-Seine, présidé par Sarkozy, annonce orienter vers l’«interde l’établisse- l’ouverture de nombreux internats dans nat pour la réussite» ment.Il lui fallait le département «d’ici à 2010». du collège Augustemonter très vite Renoir. Il comptera une opération médiatique. A la rentrée, il y 32places pour filles et garçons, un assisavait des caméras tous les jours au collège. tant d’éducation pour huit internes, une Les internes se croyaient à la Star Ac, se chambre pour deux avec salle de bain, une souvient le syndicaliste. Sarkozy a joué à pièce commune avec télé et kitchenette, l’apprenti sorcier. Il exploite les difficultés et des ordinateurs. sociales des gens pour faire sa pub. Seule «C’est l’internat que j’aurais aimé l’annonce compte, le suivi n’existe pas.» connaître», s’enflamme Isabelle Balkany. Pluie de projets. Chargée des affaires sco- Conseiller municipal PS à la mairie d’Aslaires au conseil général des Hauts-de- nières et conseiller régional, Sébastien Seine, Isabelle Balkany, reconnaît qu’au- Pietrasanta dénonce, lui, des internats qui cun bilan ne sera tiré de l’internat «portent mal leur nom». Pour lui, Sarkozy François-Truffaut: «Un échantillon de huit «impose des projets clés en main à des comélèves, c’est trop restreint.»Ce qui compte à munautés éducatives qui n’y sont jamais asses yeux, ce sont les projets à venir. Le sociées. Ces internats demandent un encaconseil général annonce une pluie d’inter- drement et un suivi spécifiques des élèves. nats dans le département «d’ici à 2010»,à Mais, pour Sarkozy, c’est accessoire».• Asnières, La Garenne-Colombes, BourgMARIE-JOËLLE GROS En septembre, Emile Corticchiatio était tué par un voisin au cours d’une querelle d’ordre familial. L’homme, jamais condamné, était pourtant un responsable local du FLNC et visiblement estimé de ses troupes. Celles-ci ont voulu lui rendre hommage, selon la tradition. Un commando d’hommes encagoulés est venu, lors des obsèques dans le village de Santa-Maria-Siche (Corse-du-Sud), tirer une salve en l’air et déposer une plaque signée «FLNC». Le préfet de Corse n’a pas apprécié. Il l’a fait enlever. Mais les magistrats ont estimé que ce n’était pas suffisant. L’homme qui avait commandé la plaque chez le marbrier a été interpellé avant Noël et conduit en avion militaire chez le juge parisien antiterroriste Gilbert Thiel. Il est toujours écroué. Samedi, 200 militants indépendantistes corses ont déposé une nouvelle plaque: «En mémoire de notre frère, patriote corse, travailleur, homme de convictions et militant M.P. du FLNC.» On attend la réaction des autorités. Un homme enlevé, puis libéré enSeine-et-Marne Deux personnes ont été interpellées et placées en garde à vue, samedi, dans le cadre de l’enquête sur l’enlèvement d’un jeune homme de 22 ans, jeudi soir à Lagny (Seine-et-Marne). L’homme et la femme interpellés devaient être présentés devant le juge d’instruction en fin de journée. Le parquet a ouvert une information judiciaire pour «enlèvement, séquestration en bande organisée, violence aggravée et extorsion aggravée». Entre quatre et six personnes seraient impliquées dans l’enlèvement du jeune homme, qui a été embarqué dans une voiture avant d’être frappé à coups de poing et relâché à Sarcelles (Val-d’Oise) quelques heures plus tard. La victime s’est fait dérober plusieurs centaines d’euros. «Manifestation» de détenus Une centaine de détenus de la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault) ont refusé pendant plus de deux heures de regagner leur cellule samedi après-midi, réclamant davantage de respect de leur «dignité humaine». Selon le porte-parole de l’Union fédérale autonome pénitentiaire, le rapport très critique du commissaire européen aux Droits de l’homme sur les prisons françaises «n’est pas étranger» aux revendications exprimées par les détenus, qui se sont notamment plaints des nouvelles mesures de sécurité mises en place, et plus particulièrement des fouilles. Prévue pour accueillir 593 détenus, la maison d’arrêt en comptait 783 dimanche. vous LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 ★ 21 Vie citoyenne. Avec l’opération Pedibus, le ramassage scolaire est fait à pied par les parents. AUNET L’école trottinière, affaire qui marche S Pour se faire voir en peinture e kitsch est en pleine croissance. Exemple, avec le site Une tête bien faite(1), on peut offrir à ses proches leur photo (ou pire: la sienne) à la mode «Warhol pop art», «BD», «fun style»ou «peinture à l’huile». En plus, cesfautes de goût sont vendues comme «un cadeau original à partir de 49euros». Ou comment voir s’afficher àcoup sûr le sourire gêné de sesamis face à un présent pas franchement indispensable. Le principe: à partir d’une photo numérique (son meilleur pote, tante Rosette ou soi-même pour les plus narcissiques), les «artistes» du site la transforment, grâce à leur «savoir-faire», en une sorte de tableau imprimé sur toile ou papier, encadré ounon. Les formats atteignent 1,20mètre pour les plus chers… Ce cadeau n’est pas sans risques. Les exemples du site sont plutôt réussis dans la version Warhol (pas difficile avec du jaune, du bleu et du rose sur une photo potable), mais pas franchement avenants pour la BD –vous pouvez personnaliser les phylactères– ou la véritable peinture à l’huile. Il est aussi plutôt cher. 49euros, c’est le minimum. Comptez jusqu’à 890euros pour le top du top, une huile sur toile avec deux personnages. Enfin, c’est uncadeau qui souffre du syndrome «tante Hortense»: offert avec ou sans cadre, il est de toute manière destiné à finir sur vos meubles ou vos murs. C’est du moins ce que pensent vos bienveillants amis, tout sourire. Dès lors, deux solutions: 1)Subir et faire subir en permanence le regard de la fameuse tante, revisitée par Warhol ou Vinci. Vie de couple en danger, dépression presque assurée. 2)Opter pour l’exposition temporaire de la ou des œuvre(s), à chaque venue de l’intéressé(e). Plus confortable au quotidien, cette option requiert toutefois mémoire et dextérité. Prix élevé, aspect incertain, intérêt quasi nul. Un mauvais avatar «moderne» de ces peintres estivaux qui vous tirent le portrait pour de vrai dans les stations balnéaires. L’authenticité en moins.• L JOËL CARASSIO (1) www.unetetebienfaite.com Nantes correspondance ous son parapluie tête de vache, le petit Pierre fait «meuh!» à tous les coins de rue. Apolline, elle, serre sagement la main de sa maman, qui arbore un baudrier vert pomme. Ce matin, dans le quartier de La Ripossière, à Nantes, une dizaine de mômes suivent la ligne Pedibus. Départ à 8h35 devant la boulangerie. Livraison des écoliers avant 9heures à l’école Ledru-Rollin. L’idée, qui a ses adeptes dans toute l’Europe (lire ci-dessous), est toute simple. Délaissant la voiture, les loupiots vont à l’école à pied, en groupe, bien encadrés par des parents bénévoles. Papa ou maman confie ses protégés au coin de la rue, à des arrêts balisés. Trois adultes accompagnent le cortège de bout en bout. Les instituteurs collectent alors les feuilles d’émargement qui indiquent les enfants restant à la cantine et/ou à l’étude du soir. Congestion automobile. Les parcours s’imaginent selon la T H I E R R Y PA S Q U E T. E D I T I N G Un site à la loupe La ligne Pedibus dans le quartier Saint-Jacques, à Nantes, avec parents et écoliers. Tout d’abord, les parents ne se sont pas montrés enthousiastes, trouvant l’idée sympathique mais pas au point de changer leurs habitudes. Depuis, les gros travaux d’implantation d’une ligne de tram ont transformé le quartier en «Les familles apprécient la qualité de vie, la convivialité et l’engagement camp retranché. Las de la congescollectif [dans l’opération].» Emmanuelle Binet, de l’Agence de tion automobile l’environnement et de la maîtrise d’énergie quotidienne, certains parents ont topographie des quartiers et jugé l’initiative digne d’intérêt. les adresses des jeunes partici- D’autant que dans le cul-depants. A Nantes, ces parents sac du tout petit parking de la ont démarré par une seule maternelle, des parents stresligne, les mardis et jeudis. «La sés, pressés, coincés, ont failli démarche vient de nous, pas des en venir aux mains. collectivités, mais elles nous ont Enquête. Réalisée auprès des bien aidés», dit Benoît Lesne, parents via les cartables, une parent d’élève écolo qui a pré- enquête recense 70 familles senté l’initiative il y a deux ans. partantes pour la formule. Sur le papier. Sur le trottoir, seuls quinze à vingt enfants ont pris l’habitude de cette petite trotte de ramassage scolaire sans car. Parfois moins l’hiver, quand les enrhumés et les fri- N.D.L.C. NICOLAS DE LA CASINIÈRE Internet Haut Débit à partir de 19,90€ par mois pendant 3 mois(1) Economie d’énergie et de risques L’idée fait son petit bonhomme de chemin. Imaginé en 1991 parun Australien, David Engwicht, le Walkingbus a été adopté en Suisse sous le nom de Pedibus, en 1998, et repris au Canada,au Royaume-Uni, en France, aux Pays-Bas, en Belgique, en Italie et en Allemagne. Dès 2002, Tremblay-en-France (Seine-SaintDenis) ouvre sept lignes menant à deux écoles. Des dizaines d’autres villes ont aussi leurs pédibussiens: Lyon, Grenoble, Annemasse, Gières en région Rhône-Alpes; Angers, Nantes, La Montagne en Pays de la Loire; mais aussi Toulouse, Caen… Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), un marmot qui trotte au lieu de se faire trimballer en voiture fait économiser 300kg de CO2 émis dans l’atmosphère par année scolaire. En moyenne, les déplacements automobiles d’un ménage français représentent un quart de ses émissions en gaz à effet de serre. Réduire ces émissions en allégeant le trafic pour les trajets courts, de moins de 2km, est la première motivation des collectivités locales et de l’Ademe. Les parents valorisent plutôt le gain de temps et l’éducation des petits à l’usage de la ville, en évitant les encombrements et le stress des départs précipités à l’école. Avec, en prime, un peu d’exercice, salutaire en ces temps d’obésité menaçante. Sans oublier la sécurité: la moitié des décès des moins de 14ans sont dus à des accidents de la circulation, dont 44% ont lieu sur le trajet scolaire. Vélobus, une version deux-roues, se développe sur le même principe de convoi groupé et accompagné, sur une ligne dont les arrêts sont à heures fixes. leux retrouvent la voiture. «Les premiers doutes des parents ont porté sur la pérennité du système, surtout l’hiver, quand il pleut, tout ça…», dit Benoît Lesne. La dizaine de parents investis fonctionne avec des plannings réalisés sur deux mois. Si des enfants ne sont pas au rendez-vous, ça n’est pas grave. En revanche, les accompagnateurs, eux, ne peuvent évidemment pas s’absenter. Une dame qui n’a pas d’enfants participe régulièrement au Pedibus. «Notion de parent». Ingénieure à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), chargée de suivre ces projets, Emmanuelle Binet souligne que «les élus en ont marre des demandes d’élargissement de parking à côté des écoles. L’idéal est d’effectuer un test au printemps et que les parents se déterminent pour la rentrée suivante. Dans la durée, les familles apprécient la qualité de vie, la convivialité et l’engagement collectif. Ce qui interroge sur la notion de parent, lequel se consacre strictement à son enfant et à lui seul ou considère ce dernier dans sa classe, l’école, la ville…».• + Téléphonie illimitée (2) 10€ par mois 3 mois remboursés 10 14 (appel gratuit depuis un fixe) Agences France Télécom Offres valables en France Métropolitaine avec engagement de 12 mois, sous réserve de compatibilité technique et géographique. Promotions valables du 19/01/2006 au 28/02/2006, soumises à conditions. Voir conditions et modalités en point de vente. (1) Puis 24,90€TTC/mois, pour toute nouvelle souscription à un forfait Internet 512K norme IP. Voir l’ensemble des forfaits Internet disponibles et renseignements en points de vente. (2) Service valable à partir du forfait Internet 512K pour 10€ de plus par mois et sous réserve de location de la Livebox 3€ par mois. Durée maximale de 2h/appel. Valable uniquement vers les numéros fixes et numéros IP en France métropolitaine. Hors numéros courts, numéros spéciaux et numéros IP à tarification spécifique. 3 premiers mois entiers remboursés sur la téléphonie illimitée et la Livebox, soit 39€ remboursés pour toute souscription concomittante à un forfait Internet Haut Débit, à l’issue des 3 premiers mois entiers d’abonnement et sur l’envoi des justificatifs de paiement avant le 31/05/2006. France Télécom - SA au capital de 10 406 399 336€ - RCS Paris 380 129 866. W I N D S T R A N D S TA F FA N . N AT U R E P L . J AC A N A 22 économie LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 L’Arctique, nouveau robinet à gaz Le Canada relance un projet sans précédent de pipeline de 1200 km qui pourrait bouleverser la région. Montréal de notre correspondante P de cette opération colossale, qui nécessiterait quatre années de travaux –soit le plus grand chantier jamais réalisé dans les Territoires du Nord-Ouest. Elles se sont notamment inquiétées de la fonte du permafrost et de la montée du niveau de la mer, dues au changement climatique, qui menaceraient le gazoduc. «Est-ce qu’on va dire aux gens du Sud comment vivre et comment se développer?»a vivement rétorqué Rosemary Kutana, l’ancienne présidente de la Conférence circumpolaire des Inuits. Prudhoe Bay MER DE Pôle nord magnétique BEAUFORT ALASKA Ce rc l ar e po ct iqu la ire e Inuvik Ma ckenz i e lus de trenteans après la découverte d’énormes gisements de gaz naturel dans les régions les plus septentrionales des Territoires du Nord-Ouest, le projet d’un pipeline de 1200kilomètres reliant le delta du fleuve Mackenzie à la province de l’Alberta (et au reste du marché nord-américain) est à nouveau au cœur de toutes les discussions dans cette région de l’Arctique canadien. Un temps envisagée dans les années70, l’idée d’exploiter ces champs gaziers avait été abandonnée après un rapport de la commission Berger qui recommandait, en 1977, un moratoire de dixans en raison notamment de l’absence d’accord avec les nations autochtones qui habitent la région. Mais, en 2000, alors que la demande de gaz naturel ne cessait de croître, le controversé projet est ressorti des cartons. Voilà troissemaines, l’Office national de l’énergie du Canada a entamé une série d’audiences publiques: près de 140réunions sont prévues cette année dans 27communautés de l’Arctique canadien. S’il reçoit le feu vert des autorités, ce projet sans précédent, de 7,5milliards de dollars (6,3milliards d’euros), engendrera des bouleversements majeurs dans la région. Hache de guerre. De fait, à Inuvik, à 200 km au nord du cercle polaire, des associations canadiennes ont, la semaine passée, multiplié les mises en garde contre les impacts sociaux et environnementaux YUKON TERRITOIRES DU NORD-OUEST NUNAVUT Yellowknife ALBERTA COLOMBIE Edmonton BRITANNIQUE MAN. CANADA Ottawa 300 km ÉTATS-UNIS Mais les espoirs de développement suscités par le projet au sein de la population autochtone –avec un minimum de 15000emplois à la clé– finissent par faire taire les plus sceptiques. Les ententes territoriales signées ces dernières années avec les autorités canadiennes ont permis d’enterrer la hache de guerre. «Pour regagner notre indépendance, notre autonomie et notre fierté, il nous faut maintenant une base économique», explique Fred Carmichael, à la tête du Aboriginal Pipeline Group, qui rassemble trois des quatre nations autochtones concernées par le tracé du pipeline et qui détiendra un tiers des parts du gazoduc. Le consortium, dirigé par Imperial Oil Ltd (filiale du géant américain Exxon), comprend aussi les sociétés Conoco et Shell. Le gazoduc, qui transporterait de 22 à 28millions de m3 de gaz naturel par jour, permettrait d’augmenter de 10% les réserves canadiennes connues. Concurrent. Surtout, il ouvrirait la porte à l’exploration et l’exploitation d’autres ressources naturelles dans la vallée du Mackenzie et de la mer de Beaufort. «Le développement de ce corridor énergétique mènera au développement, à long terme, de tout le bassin», affirme le ministre de l’Industrie des Territoires du Nord-Ouest, Brendan Bell. Les richesses de l’Arctique, encore mal connues, font rêver. Selon certaines estimations, le quart des réserves canadiennes de gaz naturel s’y trouverait. Sans compter le pétrole. L’Alaska voisin étudie lui aussi depuis plusieurs années un projet de gazoduc, qui raccorderait les gisements gaziers de Prudhoe Bay aux autres Etats américains en passant par Fairbanks puis par le Canada. Avec une capacité trois fois plus importante, il est souvent présenté comme un sérieux concurrent au projet canadien –qui a toutefois trois à quatreans d’avan- Fleuve Mackenzie dans la région du Yukon. Cela fait plus de trente ans que des gisements de gaz naturel ont été découverts dans les Territoires du Nord-Ouest. ce. Selon Winfried Fruehauf, un spécialiste des pipelines à la Financière Banque nationale, l’appétit insatiable des NordAméricains pour les énergies fossiles laisse de toute façon de la place pour les deux projets. Et il souligne que les Américains ont tout autant à gagner que les Canadiens avec le projet gazier du Mackenzie: «Même si le discours a changé depuis un an ou deux, beaucoup continuent de penser que le gaz naturel du Mackenzie sera en majeure partie envoyé dans les sables bitumineux de l’Alberta, pour soutenir une production accrue de pétrole. Une bénédiction pour Washington qui ne cesse de répéter qu’il veut diversifier ses sources d’approvisionnement en pétrole.»Gaz naturel ou pétrole, les Etats-Unis accordent en tout cas de plus en plus d’importance aux ressources du Grand Nord, terrestres ou sous-marines. Et ne manquent pas une occasion de rappeler qu’ils ne reconnaissent pas la souveraineté du Canada sur les eaux de l’Arctique et ses richesses cachées.• CAROLE DUFFRÉCHOU 30% des réserves dans le monde arabe Les treize pays arabes du Moyen-Orient et les quatre d’Afrique du Nord possèdent 30% des réserves mondiales de gaz, presque autant que la Russie. Or, seuls six d’entre eux sont aujourd’hui exportateurs, dont l’Algérie et le Qatar, aux troisième et quatrième rangs mondiaux. Considéré comme moins stratégique que l’or noir, le gaz servait jusqu’ici à la consommation domestique et aux projets industriels nationaux (pétrochimie, aluminium), tandis que le pétrole était quasi exclusivement destiné à l’exportation. Un colloque organisé vendredi par l’Institut du monde arabe à Paris et la chambre de commerce franco-arabe a démontré que la dépendance gazière de l’Europe et des Etats-Unis changeait la donne. Du coup, Yémen, Egypte, Oman ou encore Emirats arabes unis sont récemment devenus exportateurs. Et l’Arabie Saoudite pourrait suivre le mouvement. (AFP) économie 23 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Un quart des cadres se sent discriminé Selon une étude, les points sensibles sont le sexe, l’âge, l’origine… es cadres ne se sentent pas à l’abri des discriminations à l’embauche. Plus du quart d’entre eux en a ressenti en lisant les offres d’emploi ou lors d’entretiens de recrutement, selon une étude (1) publiée mercredi par l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). Un chiffre «en augmentation manifeste, commente Jean-François Amadieu, de l’Observatoire des discriminations. D’habitude, les personnes sous-évaluent les discriminations dont elles sont victimes.» Une hausse peutêtre liée au contexte politique et médiatique. Les cadres qui éprouvent le plus la discrimination sont les femmes, les plus âgés et les moins de 30ans, les diplômés de l’université (plus que ceux des grandes écoles). Les cadres citent par ailleurs «l’origine réelle ou supposée» et le fait d’être une femme (surtout sans enfant) comme facteurs de discrimination. Particularité: aux yeux du cadre, «le nondiscriminé, c’est l’autre», résume l’Apec. Par exemple, le jeune diplômé considère souvent qu’une expérience de vingt ans est un plus, alors que le cadre aguerri juge cette expérience défavorable. Si les offres d’emploi peuvent exiger des diplômes élevés ou un certain niveau d’expérience, les recruteurs «font preuve de souplesse et de pragmatisme», remarque Jacky Chatelain, de l’Apec. Dans l’année précédant l’étude, 45% des entreprises ont recruté au moins un cadre qui avait un niveau de diplôme inférieur à ce qu’elles recherchaient. Côté candidats, deux tiers des cadres tentent leur chance même si l’offre ne correspond pas à leur profil. Constat personnel ou diagnostic sur des pratiques générales? 44%des recruteurs reconnaissent que les noms et prénoms inscrits sur un CV «peuvent jouer un rôle». Une référence à l’origine ethnique, illégale sur une offre d’emploi. Cette statistique a «surpris et choqué» Jacky Chatelain. Plus attendu, selon lui, 70% des entreprises qui recrutent directement «reconnaissent donner de l’importance à l’information sur l’âge mentionné dans les CV». Une mention prohibée dans les offres d’emploi.• L Ma.H. (1) L’étude Recrutement cadre: sélectionner sans discriminer s’appuie sur deux enquêtes, réalisées en 2005 auprès de 500 entreprises et 1500 cadres et jeunes diplômés en recherche d’emploi. La Dresdner Bank rattrapée par son passé nazi Des historiens ont établi le rôle actif de la banque sous le IIIe Reich. Berlin de notre correspondante ême soixante ans après la fin du IIIe Reich, il y a des vérités qui font très mal. Ainsi, la Dresdner Bank, la deuxième banque commerciale la plus puissante d’Allemagne, a été obligée d’admettre publiquement vendredi qu’elle avait joué un rôle très actif dans le régime nazi. Il y a dix ans, la banque aurait peut-être été louée pour avoir assumé son passé honteux. Mais son autoanalyse arrive un peu tard. En effet, il y a deux sortes d’entreprises en Allemagne: celles qui ont, de leur propre gré, demandé à un comité d’experts d’examiner leurs archives pour mesurer le degré de leur implication dans le régime nazi, et celles qui ont traîné des pieds. Dans la première catégorie, on trouve la Deutsche Bank, qui a rendu ses conclusions dès 1995, et le chimiste Degussa, dont l’ancêtre IG Farben fabriquait le ZyklonB, utilisé dans les chambres à gaz. Longtemps silencieuse sur son passé, la Dresdner fait partie de la seconde catégorie. Indubitable. Lorsque le conseil d’administration de la Dresd- M principal de Huta, l’entreprise en bâtiment de Breslau, chargée à l’été 1942 de construire les fours crématoires d’Auschwitz. Une fois les portes posées, en avril 1943, Huta encaissa 133741,65 Reichsmarks de la direction de la construction SS, via un compte de la Dresdner. Comme le soulignait fin janvier le quotidien de gauche Die Taz (2) «la lecture de cette étude devrait constituer une sacrée surprise pour les salariés de la banque». Ecran de fumée. Car la Dresdner Bank a réussi durant près de cinquante ans à jeter un écran de fumée sur son rôle prépondéLa Desdner Bank a, délibérément rant pendant le et systématiquement, cherché à se IIIe Reich. Se rapprocher du régime nazi. Au point de devenir la banque conseil des SS. contentant de rejeter la responsabilité leurs conclusions sont indu- sur Karl Rasche, alors portebitables. La Dresdner Bank parole du conseil d’administran’était pas seulement une ex- tion de la banque, et jugé decroissance de la bureaucratie vant le tribunal militaire de de l’armée nazie qui aurait été Nuremberg. Le mythe a percontrainte de suivre le mouve- duré jusqu’en 1992, date à lament. La banque a, délibéré- quelle la banque a célébré son ment et systématiquement, 120e anniversaire. Certains cherché à se rapprocher du ré- pourront se réfugier derrière gime nazi. Au point de devenir l’idée que mieux vaut tard que la banque conseil des SS. jamais. De fait, de nombreux Exemple parmi d’autres, la instituts financiers, comme les Dresdner était l’actionnaire caisses d’épargne allemandes, ner Bank a décidé, en 1997, de mandater une commission d’historiens pour faire la lumière sur la période 19331945, il était essentiellement guidé par le fait «qu’une indifférence prolongée de la banque à l’égard de son attitude vis-à-vis du national-socialisme risquait plus de nuire à la banque que de lui servir»,a déclaré vendredi Klaus-Dietmar Henke, l’historien qui a piloté l’étude évaluée à 1,6 million d’euros. Durant huit ans, quatre historiens allemands ont compulsé douze kilomètres d’archives et écrit 2374 pages sur le sujet (1). Et Citroën lance une super C4 en Chine ODILE BENYAHIA-KOUIDER (1) Die Dresdner Bank im Dritten Reich de Johannes Bähr, Klaus-Dietmar Henke, Harald Wixforth et Dieter Ziegler. Oldenbourg Wissenschafts Verlag, 79,80 ¤. (2) Die Beraterbank der SS, article paru le 27 janvier dans Die TAZ. Le spécialiste des chaudières prévoit la suppression de 56 postes sur 530. D serait plus «qu’une usine de montage. Côtesd’Armor Une chaîne, ça se démonte et ça se re- MANCHE monte facilement», s’inquiète Chantal Jouan, secrétaire Fin. Morbihan de la CGT (syndicat majoritaire dans l’entreprise). Un risque de délocalisation? «Plausible», juge Janine Tardivel, maire (PCF) de Ploufragan, où est implantée l’usine. La mise au point de la direction est laconique: «Pas de volonté de délocalisation.» Les emplois menacés sont «indirects, en support à la production» (comme les postes administratifs). «Grâce à l’accroissement des volumes, il n’y aurait aucun impact sur la main-d’œuvre directe», a assuré la direction. «Cinquantesixpostes, ce n’est qu’un début, rétorque Chantal Jouan. L’expert que nous avons mandaté prévoit au moins 80 emplois menacés dans la main-d’œuvre directe.» La syndicaliste estime par ailleurs que la direc- tion veut «jouer la division» des salariés en annonçant un projet de réducSaintBrieuc tion du personnel indirect sur le site. Un site qui, selon Illeet-Vil. les syndicats, recourt à de nom40 km breux intérimaires. Et est piloté par un DRH. «La lutte des salariés contre ce projet est d’autant plus légitime que rien d’autre ne le justifie que l’amélioration, encore, du compte en banque des actionnaires», affirme Martial Collet, de FO. D’après les syndicats, le site fait des bénéfices. Quinze millions d’euros de dividendes versés en trois ans, selon Chantal Jouan. Les élus, eux non plus, ne sont pas tout à fait convaincus par la stratégie du groupe italien. «A aucun moment, je n’ai eu l’impression que le projet industriel avait un fondement économique», confie le maire (UDF) de Saint-Brieuc, Bruno Joncour, qui a participé à une table ronde, en janvier, en présence du Le numéro 1 mondial des médias, Time Warner, a passé un accord avec Carl Icahn, qui tentait de renverser la direction. Time Warner va accélérer son programme de rachat d’actions comme le souhaitait Icahn et ce dernier renonce à présenter au vote des actionnaires des administrateurs concurrençant la direction. également impliquées dans le système, n’ont pas franchi le pas. Et la Commerzbank va passer aux aveux prochainement. Pourtant, la reconnaissance des faits n’implique pas forcément une volonté de «réparation» aux victimes. HerVillepin ouvre le CAE bert Walter, l’actuel président de la Dresdner, a admis «la resLes membres du Conseil ponsabilité morale»de son insd’analyse économique titut, mais ne voit pas la néces(CAE) ont été renommés sité de relancer une procédure pour deux ans par le d’indemnisation. Ce qui peut Premier ministre paraître contradictoire avec Dominique de Villepin. la découverte de la «responsaParmi les 35 membres, bilité pleine et entière» de la plusieurs nouveaux noms banque, mise à jour par les hisapparaissent dont toriens. Témoignant d’un Philippe Aghion, manque de sensibilité étonprofesseur à Harvard, ou nant, la Dresdner Bank a susciThomas Piketty, té la semaine dernière une poprofesseur à l’EHESS. lémique en annonçant son intention de présenter l’étude au Musée juif. Un lieu qui a paru tellement inapproprié que la communauté juive s’en est Citroën (groupe PSA) a émue. Et a réussi à faire dépla- dévoilé samedi la première cer la manifestation.• des deux nouvelles voitures Licenciements chez Chaffoteaux et Maury ouche froide pour les salariés de Chaffoteaux et Maury, spécialistes de la chaudière et du chauffe-eau. Dans les années 1970, les effectifs de leur usine, près de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor) ont grimpé jusqu’à 2200 salariés environ. Cinq propriétaires plus tard, ce «fleuron de notre savoirfaire industriel», comme le dépeint la députée (PS) Danielle Bousquet, ne compte plus que 530 postes, dont 56 sont menacés: en décembre, le propriétaire italien MTS a présenté Galileo, un projet de réorganisation industrielle, «capital pour la sauvegarde de la compétitivité et l’avenir du site». «Avec la marque Chaffoteaux et Maury»,le groupe MTS ambitionne de «reconquérir le leadership du marché en France et occuper une des trois premières places en Europe dans le secteur du chauffage». Actuellement, le site fabrique puis assemble les composants. Avec le projet industriel, il ne Accord entre Icahn et Time Warner DRH européen de MTS. Avant de s’inquiéter pour l’avenir: «La décision prise en appelle-t-elle d’autres?» «On ne sait rien sur l’après 2007, ni sur les projets futurs ni sur les volumes», poursuit Chantal Jouan, vingt-trois ans de Chaffoteaux et Maury. Et de citer l’expert mandaté qui évoque, dans un rapport, «l’avenir de l’entreprise en péril». Pour les salariés, l’incertitude persiste, tandis que les discussions entre syndicats et direction continuent.• MATHIEU HAUTEMULLE qu’il doit lancer cette année en Chine, une berline de gamme moyenne supérieure baptisée «c-Triomphe», créée pour le marché chinois, sur la base de la C4 vendue en Europe. L’objectif de Citroën est de vendre 50000 c-Triomphe en 2006, à 20000 euros par véhicule. En 2005, Citroën a écoulé 140000 automobiles en Chine. Petrobras, major des profits La compagnie nationale pétrolière brésilienne Petrobras a réalisé un bénéfice record de 11,2 milliards de dollars en 2005, supérieur de 40 % à celui de 2004. Vente d’avions en Inde ATR a signé hier la vente de quinze ATR 72-500 à la compagnie aérienne indienne Kingfisher Airlines. 24 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 AFP Fanara en piste C’est l’heure de vérité pour Thomas Fanara, 24 ans. Inconnu en début de saison, il était non sélectionné pour les JO mais fut repêché in extremis. Par évidence (meilleur géantiste français de la saison) et intense lobbying de son entourage haut-savoyard. turin2006 «Je suis probablement Cachez cette marque lepire skieur du plateau ici, Les marques de bouteilles d’huile d’olive italienne pots d’herbes aromatiques qui garnissent donc battre enfin quelqu’un ou les snack-bars dans les installations olympiques sont cachées par un adhésif opaque, sera chouette.» si ces marques n’entrent pas dans le cadre d’un Le skieur sud-africain Alexander Heath, avant le super-G de samedi. Il a terminé 50e sur 56. contrat avec le Comité international olympique. Defrasne, l’ombre l’or2006 turin Biathlon poursuite messieurs. Jusque-là éclipsé par Raphaël Poirée, le Franc-Comtois sort la course de sa carrière pour emporter l’or olympique. JOHN D MCHUGH. AFP Biathlon. Poursuite messieurs Or:Vincent Defrasne (Fra) Argent:Ole Einar Björndalen (Nor) Bronze:Sven Fischer (All) aintenant il n’y aura plus d’excuses à ignorer où se trouvent Pontarlier, Les Granges, Lièvremont ou Morteau. Toutes ces bourgades si froides du Haut-Doubs où se conçoivent, se pré- ● ● ● M de à turin2006 Vincent Defrasne (à droite) devance le Norvégien Ole Einar Björndalen. turin2006 25 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 cès acquis, tant il a mis du temps avant de se dessiner. Vincent Defrasne a encore dans l’oreille les compliments reçus pour sa première victoire individuelle en Coupe du monde: c’était juste le 8 janvier, en sprint, à Oberhof, La Mecque du biathlon allemand. Samedi, son tympan a dû exploser. Tout le HautDoubs semblait avoir transhumé en Piémont. Pas des «tifosi» façon football mais des gars et des filles de villages, coiffés de bérets, armés de cornes de brume et porteurs d’un immense amour, venus trinquer en honneur d’un parent, un presque cousin dont on sait les heures, les jours et les mois passés sur les skis à roulette l’été et les planches l’hiver. «Généreux». «Noël, dira Defrasne,c’est souvent bonjour et au revoir.» A l’issue des saisons2001 et2002, cela aurait pu être aussi adieu au haut niveau. Aux sacrifices Au moment de la remise des médailles, pour de maigres récompenses: une Vincent Defrasne a eu une infime poignée de pohésitation, comme une incrédulité diums en relais, audevant l’intimidante vérité du sport. tant d’accessits en monstre du biathlon, le Nor- individuel. Et les gros titres végien Ole Einar Björndalen, constamment pour «Raph». alias le «Seigneur des an- Raphaël Poirée, partenaire neaux» en raison de ses quatre d’équipe sympa mais lointain, médailles de Salt Lake City. On jaloux de son indépendance, connaît la suite: le suspense épanoui dans sa PME amoudiabolique et, dans l’équipe de reuse et sportive. Samedi, RaFrance, le trouillomètre à zéro phaël Poirée a abandonné jusqu’à l’ultime seconde, la après le deuxième tir, les fixaprécipitation dangereuse du tions arrachées. Il s’est éclipsé Français dans le dernier virage sans un mot. Trois échecs en («je me suis mélangé les pin- trois courses. L’encadrement ceaux»), à la limite de la perte parle de scoumoune injuste, d’équilibre puis ce sprint d’an- pas encore de fin de règne. thologie, excitant et rageur. Un Il n’y a jamais eu jalousie dans moment de pur bonheur. cette histoire d’hommes, chi«Dans les tripes». Reste ce qui ches en sentiment avoués. a pu faire la différence entre «Vincent, c’est un type généVincent, 28ans, né et installé à reux, droit, facile à coacher», Pontarlier avec sa femme Ca- dit Jean-Paul Giachino, son therine, si dépouillé en titres, entraîneur et confident de et Ole Einar, 32 ans, né à prédilection. «Une crème», Drammen (Norvège) mais vi- ajoute Sandrine Bailly en dépit vant en Italie, patrie de sa de sa nouvelle déconfiture compagne biathlète Nathalie dans la poursuite féminine du Santer, Crésus ayant tout ga- matin. Bien que plus jeune, gné: «Ma détermination et la Defrasne remplissait juscertitude depuis plusieurs jours qu’alors le même rôle que Baque j’avais ça dans les tripes,ex- verel: les seconds rôles valeupliquera Vincent avec beau- reux, durs au travail, se coup de lucidité.Quand on m’a plaignant peu, solidaires, mais annoncé que j’avais cinq se- dont une moue involontaire condes de retard au dernier trahit quelquefois la lassitude tour, je me suis surpris à penser de la demi-pénombre. Defrasque j’allais être deuxième, puis, ne a tenu bon. L’orgueil. La traau milieu de la boucle, je me dition familiale incarnée par suis dit que ce n’était pas pos- Daniel, son père, très investi sible, que je n’étais pas venu dans le comité départemental pour ça et que j’allais me battre de biathlon. Le sentiment de comme un lion.» Dans la tra- devoir envers tous les accros duction anglaise, le lion est de- d’une discipline dépourvue de venu un tigre mais on reste moyens mais riches en résuldans la catégorie des fauves tats. Defrasne les a salués quadominants que Defrasne a siment un par un, kiné, entraîlongtemps contemplés avec neur, farteur, comme le font un mélange d’envie et d’im- les jeunes réalisateurs fauchés puissance. A l’image de sa à Cannes ou aux oscars. «Sans proche voisine (onze kilo- eux, je ne suis rien.»Sans lui et mètres) Florence Baverel-Ro- Baverel, le bilan à mi-parcours bert, couronnée en sprint jeu- du biathlon français frôlerait di, le nouveau champion le vide sidéral.• olympique va déguster comALAIN LÉAUTHIER me un alcool hors d’âge le suc(envoyé spécial à San Sicario) Ski de fond. Le relais français (4e) a déposé un recours contre la Suède (3e). parent et s’aguerrissent de futures gloires sans ego, capables au moment du sacre olympique d’un bref mouvement de recul. L’a-t-on bien vu samedi cette infime hésitation de Vincent Defrasne au moment de la remise des médailles? Comme une incrédulité devant l’intimidante vérité du sport: «Sûr, le premier, c’est bien moi?» C’est tellement lui qu’il faudrait n’avoir rien à ajouter à l’exclamation étouffée de Christian Dumont, dit Dudu, le directeur sportif du biathlon français, quelques secondes à peine après la victoire de «la grenouille»: «Quelle classe, quelle classe!» Au fait pourquoi «la grenouille»? Ses jambes de sauteur, paraît-il. Des jambes dures et fatiguées quand Defrasne s’est présenté dans le stade fraîchement reblanchi (de neige) de San Sicario, collant aux Madshus, les skis préférés du ●●● Chez lui, le quatuor italien impose son train d’enfer2006 JENS MEYER.AP 2006 Sur la piste de Pragelato, hier. Un Français et un Suédois ont commis la même erreur de parcours, à l’origine du recours. Ski de fond. Relais 4x10 km messieurs Or:Italie Argent:Allemagne Bronze:Suède e relais italien a rempli hier le contrat qu’il s’était fixé. Fulvio Valbusa, Giorgio Di Centa, Pietro Piller-Cottrer et Cristian Zorzi l’ont emporté, comme l’avait fait avant eux le quatuor mythique de Lillehammer en 1994, lorsque – entre autres –Marco Albarello et Silvio Fauner avaient battu la Norvège de Björn Daelhie sur ses terres. Valbusa n’a pas oublié:«Ces quatre-là sont nos guides et nous sommes leurs disciples. On s’est construit grâce à eux.» Depuis cette victoire incroyable, le fond italien a toujours obtenu des résultats aux Jeux (deuxième derrière la Norvège à Nagano et à Salt Lake City). Hier, c’est PillerCottrer qui a placé une accélération imparable dans la Montée du loup, lors de l’avant-dernier relais, larguant ses sept poursuivants, dont la Norvège (5e), à plus d’une minute. Emmanuel Jonnier, troisième relayeur français, suivait la cadence jusqu’à ce moment-là, mais il n’a rien pu faire contre le démarrage de l’Italien. Remontée. D’autant que dans le même temps, comme il s’était engagé dans une mauvaise direction, Jonnier a dû rebrousser chemin sur quelques mètres pour rejoindre le tracé. Le même incident L a d’ailleurs fait l’objet d’une protestation Transalpins était pure fiction. «Vu comme de la part des Français (4e). En effet, le Piller-Cottrer est parti, jamais je n’aurais dernier relayeur suédois, Mathias Fre- pu le reprendre»,a déclaré Jonnier. L’Itadriksson, tombé dans le même piège que lien a procédé par à-coups. L’effort – ajouJonnier, a préféré couper pour rejoindre té à l’altitude – était en effet très difficile à le parcours plutôt que de revenir sur ses produire. pas. Et les Suédois se sont classés troi- Au mètre près. Au dernier relais, Zorzi a sièmes de la course derrière les Alle- même tenté un accord avec Fredriksson mands et devant les Français. La requête pour faire course commune et éviter un tricolore a été refusée, mais un appel a été retour des Allemands. «Lorsque Piller est déposé (la France a soixante-douze arrivé, il avait dix secondes d’avance, a exheures pour fournir des preuves). pliqué Zorzi. Il a fallu que j’y aille seul et je Sur le terrain cependant, Vincent Vittoz, n’ai pas l’habitude. Mais j’ai tenu.»Piller, dernier relayeur tricolore et auteur d’une de son côté, ne voulait pas que la course se remontée extraordinaire, était satisfait de termine au sprint pour Zorzi. Tout était cette quatrième place: «Même si je ne calculé au mètre près. «Nous avions déciconnais pas la saveur d’une médaille olym- dé que si tout le monde était en groupe, Piepique, il me procure tro devait attaquer des sensations qui «J’avais très peur des Norvégiens dans cette montée, a doivent en être pro- mais notre glisse a été la meilleure. expliqué Marco Alche. Je préfère être Ce tracé a été conçu pour nous.» barello, le coach, Marco Albarello, le coach italien du relais à l’issue de la courquatrième sur le terrain sportif que se. J’avais très peur troisième sur le tapis vert.Franchement, je des Norvégiens mais finalement notre suis content de ce résultat.» glisse a été meilleure. Ce tracé nous Une médaille était envisageable pour convient totalement. Il a été conçu pour les Bleus, au vu de la prestation nous.» C’est aussi ce qu’a reconnu Frode d’Alexandre Rousselet, le deuxième re- Estil, l’un des Norvégiens, qui a présenté layeur en classique, qui a permis de garder des excuses nationales. Désormais, dans le contact avec le peloton de tête. Dou- le match Norvège-Italie, les Nordiques ne zième après le premier relais, Rousselet mènent plus que par trois titres à deux. est rentré dans le paquet. Ensuite, tenir de Prochain épisode dans quatre ans. • bout en bout le rythme imposé par les DINO DIMEO (envoyé spécial à Pragelato) 26 turin2006 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 jetil-Andre Aamodt ressemble à un diable sorti d’une boîte à trolls. Le sourire imperceptible derrière une barbe entretenue depuis des années, l’œil malin, le «vieux» colosse norvégien n’en revient pas: «J’avais un bon sentiment malgré ma blessure au genou. Et maintenant l’or! C’est incroyable. J’ai eu de la chance dans les grands événements.» Chance? Aamodt représente le palmarès du ski alpin à lui tout seul. Mais la médaille d’or en super-G, samedi, est sans doute la plus belle récompense de sa longue carrière. A 34ans, Kjetil-Andre remporte sa vingtième médaille SKI ALPIN. Kostelic au Panthéon. Même en condition (Mondiaux et Jeux olympiphysique précaire, la Croate Janica Kostelic s’est montrée ques confondus), son 4e titre irrésistible samedi dans le combiné, devenant la première femme de l’histoire olympique hivernale à remporter quatre olympique, un record absolu qu’il partage depuis ce weektitres olympiques en ski alpin. La star de Zagreb, 24 ans, a end avec la Croate Janica Kosdevancé l’Autrichienne Marlies Schild et la Suédoise Anja telic. «C’est rare de défendre Paerson, sa grande rivale, qui a dû se contenter du bronze. victorieusement un titre olympique, seul Tomba l’avait fait avant moi.»Lorsqu’il apparaît pour la première fois surles tablettes à Albertville, en 1992, avec deux médailles (or en super-G et bronze en slalom), la Norvège se découvre alors douée pour le ski alpin. Il reviendra de Lillehammer en 1994 avec troismédailles, ratera le rendez-vous de Nagano 98 pour mieux rebondir SAUT A SKIS. Sang neuf autrichien. Les avec deux titres olympiques à Autrichiens Thomas Morgenstern et Andreas Salt Lake City. La médaille de Kofler, copains de chambrée et souvent associés samedi, il va la garder précieusous le qualificatif de petits prodiges, ont volé la vedette aux favoris finlandais et norvégiens sur le sement: «En 2003, toutes mes grand tremplin de Pragelato, samedi soir. Pour l’or, médailles ont été volées dans la maison de mon père. Peut-être Morgenstern, 19 ans, a devancé son aîné de deux ans de 18 cm seulement. Le Norvégien Lars Bystöl, qu’il les a vendues. En tout cas, le lendemain il avait une nouun temps en tête, termine finalement troisième. velle Porsche…» Cador. Une telle longévité impose le respect de ses adversaires les plus coriaces, tel l’Autrichien Hermann Maier, deuxième, samedi. Car Aamodt n’est pas là par hasard. Il fallait avoir les nerfs pour tenir le rythme d’un super-G disputé en deux parties. La course, lancée en pleine tempête de neige, a été suspendue après le passage de 17concurrents. Le Français Pierre Emmanuel SHORT TRACK. Une affaire coréenne. Samedi, la Dalcin se trouvait alors bien Corée du Sud a réalisé deux doublés. Sur le installé en tête, la neige fraîche 1500 m dames, remporté par la championne du ralentissant tous les autres monde en titre Jin Sun-yu devant sa compatriote Choi Eun-kyung (toutes deux en tête sur la photo) concurrents. Puis, tout le monde fut renvoyé au départ. Dalet la Chinoise Wang Meng. Sur le 1000 m messieurs, Ahn Hyun-soo s’est imposé devant son cin ratait son deuxième passage, finissait sa descente dans compatriote Lee Ho-suk et l’Américain Ohno. MIKE SEGAR. REUTERS GIAMPIERO 2006 FA B R I C E C O F F R I N I . A F P Super-G messieurs Or:Kjetil-Andre Aamodt (Nor) Argent: Hermann Maier (Aut) Bronze:Ambrosi Hoffmann (Sui) K travail acharné. «Il y a des boulots bien plus difficiles dans la vie,reconnaît-il. Moi, je ne suis pas encore fatigué, même si je sais que mon corps est bon pour les cours d’anatomie. Il contient plus de clous qu’une quincaillerie!» Kjetil-Andre est un gros bosseur. Yves Dimier, ancien slalomeur de chez Dynastar, voit surtout en lui la force tranquille d’un tempérament nordique: «Il est réservé et très froid. Mais c’est quelqu’un de surprenant. Lorsqu’il est dans une colère noire, et un doigt sa chambre, on a l’impression d’honneur qui lui vaut une qu’il marche au ralenti, à 20% amende de 5000francs suisses de ses moyens. On le surnomme le loir. Mais dans un portillon de (environ 3200 euros). Souffrance. Imperturbable de départ, il sait être à 100%.» Kjedétermination, Aamodt avait, til est surtout exigeant sur le lui, attendu en silence près de matériel, mais pas pointilleux. quatre heures avec les cadors, «Une fois qu’il a ce qu’il veut, il dans le froid. «C’est un skieur ne se plaint jamais. Si ça ne d’exception, reconnaît Mauri- marche pas, il assume.» ce Adrait, ancien entraîneur Aujourd’hui, le Norvégien de l’équipe de France. Depuis trouve la vie très belle et on le quatorzeans, il arrive à se pro- comprend. Marié à une dangrammer pour un objectif très seuse du ballet de Monaco, il se complaît depuis trois semaines dans «Lorsqu’il est dans sa chambre, on a le rôle du papa poul’impression qu’il marche au ralenti. le avec sa petite fille On le surnomme le loir. Mais dans un portillon de départ, il sait être à 100 %.» Erle. Et tout le Yves Dimier, un ancien slalomeur monde le voit prendre une retraite précis.» Blessé à de nombreu- méritée. Tous, sauf lui: «Je n’ai ses reprises, le Norvégien a aucun plan de retraite. Peuttoujours refait surface lorsque être serai-je encore là à Vancouplus personne ne l’attendait. ver en 2010. Car jusqu’ici, je n’ai «Il donne l’impression qu’il ne jamais eu l’impression de faire reviendra plus au haut niveau des sacrifices.» • et puis, d’un coup, le revoilà en DINO DIMEO logique vainqueur, continue (envoyé spécial à Sestrières) Adrait. En descente, il y a une semaine, il avait ressenti une petite douleur à un genou. Il a préféré renoncer à défendre son titre en combiné pour se reprogrammer sur le super-G. La preuve qu’il se connaît parfaitement.» Habitué à la souffrance, Aamodt a traversé bien des tempêtes. Une mononucléose à Albertville, un genou cassé parci, une cheville par-là… À chaque fois, il remonte la pente jusqu’au sommet, fruit d’un L’épreuve féminine reportée Prévu hier, le super-G dames a été annulé en raison des chutes de neige et du brouillard régnant à San Sicario. La course aura lieu aujourd’hui à 12h00, entre les deux manches du slalom géant messieurs. Tableau des médailles OR Allemands Andre Lange et Kevin Kuske (photo) ont remporté hier soir l’épreuve de bob à deux, devant les Canadiens Pierre Lueders et Lascelles Brown, médaillés d’argent, et les Suisses Martin Annen et Beat Hefti, qui se retrouvent en bronze. Lange et Kuske ont déjà goûté l’or (en bob à quatre) en 2002 à Salt Lake City. Saut à skis. Grand tremplin par équipes (18 heures) Patinage artistique. Danse, programme libre (19 heures) Hockey sur glace. Finale pour la troisième place dames (16h30) et finale (20h30) ARG ENT BRO NZE 2006 BOBSLEIGH. Les Allemands roulent sur l’or. Les Aamodt, inusable remonte-pente OLIVIER MORIN. AFP MICHAEL KAPPELER . AFP . DPP Super-G messieurs. Quatrième or olympique pour le Les finales du jour alpin. Géant messieurs Norvégien de 34 ans qui enchaîne titres… et blessures. Ski (9h30) 7 7 6 4 3 3 3 3 2 2 2 2 2 1 1 1 0 0 0 0 0 0 0 7 4 2 5 3 0 0 0 7 6 2 2 1 2 1 0 2 2 1 1 1 0 0 Pays Allemagne Etats-Unis Russie Autriche Corée du Sud Italie France Estonie Norvège Canada Suisse Pays-Bas Suède Chine Croatie Australie Finlande Rép. tchèque Gr.-Bretagne Bulgarie Slovaquie Ukraine Lettonie Total 4 2 5 1 1 4 2 0 7 5 4 2 3 4 0 0 3 0 0 0 0 1 1 18 13 13 10 7 7 5 3 16 13 8 6 6 7 2 1 5 2 1 1 1 1 1 Podiums du week-end • Ski de fond. Relais 4x5 km dames Or: Russie Argent: Allemagne Bronze: Italie • Biathlon. Poursuite dames Or: Kati Wilhelm (All) Argent: Martina Glagow (All) Bronze: Albina Akhatova (Rus) • Patinage de Vitesse. 1000 m dames Or: Marianne Timmer (P-B) Argent: Cindy Klassen (Can) Bronze: Anni Friesinger (All) LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 ★ turin2006 27 Dopage. Un entraîneur interdit de JO depuis 2002 a été vu avec l’équipe. HOCKEY SUR GLACE Les Suédoises s’invitent en finale Perquisition chez les athlètes autrichiens La Suède participera ce soir à sa première finale mondiale, face au Canada, champion olympique en titre. Vendredi soir, à la surprise générale, les Américaines ont été battues aux tirs au but 3-2 (2-2 après prolongation). De leur côté, les Canadiennes étrillaient les Finlandaises 6-0. 2006 Turin envoyé spécial es Jeux tiennent leur blitz. Samedi soir, les stups italiens ont investi une résidence privée louée à San Sicario par des membres de l’équipe d’Autriche: six fondeurs et quatre biathlètes ont ainsi fait l’objet d’un contrôle antidopage urinaire, leurs chambres ont été fouillées ainsi que les chambres de certains athlètes autrichiens logeant à Sestrières. «Tout le monde connaît celui qui était visé», a expliqué hier matin Mario Pescante, soussecrétaire d’Etat aux Sports et superviseur des Jeux. Il parle de Walter Mayer, directeur technique national du biathlon et du ski de fond autrichien. Il y a quatre ans, à Salt Lake City, une femme de ménage avait trouvé dans l’appartement qu’il occupait du matériel de transfusion: deux de ses athlètes – dont Marc, son fils – furent convaincus de manipulation sanguine, et Mayer fut suspendu par le CIO de toute activité jusqu’en 2010. Il est réintégré comme directeur sportif dans son pays en 2005. Or, Mayer apparaît sur une carte postale ceinte du logo olympique où il pose au milieu de l’actuelle équipe de ski de fond–comme s’il était membre du staff olympique. L’encadrement autrichien l’a confirmé : Mayer a occupé la maison perquisitionnée, même s’il n’y était plus hier soir. Et pour cause : il était rentré en Autriche, où il a embouti une voiture de police qui tentait de l’arrêter. Selon le quotidien italien La Repubblica, un sac contenant des produits aurait été jeté à travers une fenêtre par un athlète occupant la maison juste avant l’arrivée des policiers. Des médicaments pour combattre l’asthme – non-assortis d’une prescription – auraient été retrouvés ainsi que des seringues. Le résultat des tests sera donné aujourd’hui ou demain par le CIO. Pour les saisies, c’est à la police de communiquer. Mayer a été mis en examen hier pour avoir «favorisé l’utilisation de produits et de substances interdites». La Fédération autrichienne de ski l’a licencié, hier soir, de son poste d’entraîneur national de fond et de biathlon. Les biathlètes Wolfgang Perner et Wolfgang Rottman ont, eux, été exclus de la délégation olympique autrichienne, officiellement pour avoir quitté Turin sans autorisation.• G.S. L MAX ROSSI . REUTERS VIP Clooney, Pitt et Cindy Crawford attendus Shani Davis, lors du 1000 m, samedi. Patinage de vitesse. Sacré sur 1000 m, l’Afro-Américain Shani Davis avait refusé de participer au relais, provoquant une polémique dans son pays. Malaise américain autour du premier or noir des JO d’hiver Patinage de vitesse. 1000 m messieurs Or:Shani Davis (E-U) Argent:Joey Cheek (E-U) Bronze:Erben Wennemars (P-B) ûr qu’ils reviendront, les milliers de Néerlandais qui remplissent à 80% l’Ovale turinois, théâtre depuis le début de la quinzaine olympique des épreuves de patinage de vitesse. Ils feront claquer les fanfares – Volare à plein volume – et se lèveront sans amertume pour applaudir un Américain; l’un de ceux qui enfoncent les patineurs orange au fond des podiums. Le Texan Chad Hedrick avait remporté le titre sur 5000m le weekend dernier. Samedi, c’est le Chicagoan Shani Davis, 23ans, qui a claqué le 1000m, «THE distance», comme on dit outreAtlantique. L’Ovale est orange, mais ses entrailles sont bleu nuit, comme la combinaison des patineurs des Etats-Unis. Surjouer les Atrides. Depuis le début des Jeux, toute la presse américaine vient pour Hedrick, le bon mec, l’Américain bien tranquille venu à Turin pour égaler le record d’Eric Heiden à Lake Placid en 1980: cinq fois l’or sur 1000 m, 1500 m, 5000 m, 10000 m et poursuite. Le truc, c’est qu’Hedrick est planté depuis mercredi et l’échec du relais américain lors de la poursuite, parce qu’un patineur ne l’a pas disputé pour ne pas obérer ses chances en individuel. Ce traître, ce type sans loi «qui attente à l’esprit olympique» (un observateur américain), il se trouve que c’est Davis. Hedrick: «Ce relais, je le devais à mon équipe et à mon pays.» Après sa victoire samedi, Davis n’a pas eu un regard pour ses compatriotes. Il est parti fêter ça devant un kop orange, avant d’enlacer le Néerlandais Erben Wenne- S mars, 3e. Ensuite, il est parti affronter une Davis a répondu évasivement, se réfugiant presse américaine à la fois disposée à sur- dans une posture qu’on devine plus natujouer les Atrides – ces patineurs cousus relle: celle d’un type timide, tenté de jouer d’or qui se déchirent sur l’Olympe –; et avec des trucs qu’il sait ne pas maîtriser. gênée par le politiquement correct: Davis Le Chicagoan souffre. Ce patineur uniest le premier Afro-Américain à décro- que, champion du monde junior en short cher une médaille d’or individuelle lors track et sur longue piste à 17 ans, s’est fait virer de sa sélection en 2005 pour avoir des Jeux d’hiver. Le gaillard prend place. Les yeux mi-clos, refusé de remplacer sur sa tenue son sponqui se plissent encore un peu plus quand il sor personnel – une banque néerlandaise sourit. «Je crois que la pire expérience qu’il – par celui de l’équipe américaine. Il a m’a été donné de vivre dans ce sport, c’est trouvé refuge à Calgary (Canada), où il d’être dans ce milieu-là. Je veux dire: ce n’est s’entraîne avec ses«vrais amis».Le coach ni le basket, ni l’athlétisme. Un Afro-Améri- américain: «Je ne parle plus de Davis, je ne cain champion olympique sur grande piste, veux pas d’histoire avec lui.» c’est comme crever un plafond.» Malaise. Le salaud de l’histoire. Samedi, l’intéressé «Vous me parlez du relais? OK. Mettons que a dû monter au front pour ne pas se laisser les Etats-Unis déclarent une guerre. Il y enterrer par son compatriote Joey Cheek a ceux qui partiront se battre et ceux qui (2e), qui expliquait, dans un anglais suave, diront: “Non, je n’y reverser toutes ses vais pas.” Je ne vois «Les gens disaient qu’ils voulaient que primes olympiques pas pourquoi les je tombe et que je me casse une jambe, «à des organisaseconds seraient ils utilisaient le mot qui commence tions qui s’occupent moins patriotes que par “n” [nigger, négro, ndlr].» des petits enfants du Shani Davis Soudan». A cet insles premiers. Ils servent leur pays autretant, Davis opinait ment, en travaillant et en payant des impôts, du chef de façon un peu forcée, comme s’il par exemple. J’ai fait du short track et je avait éprouvé le besoin de ne pas passer peux dire: voilà un sport collectif. Je dis pour le salaud de l’histoire. Le Néerlanaussi: le patinage de vitesse est un sport in- dais Erben Wennemars, médaille de dividuel. Rien n’était organisé autour de ce bronze, était passé avant eux. Il avait parrelais; on ne nous a jamais réunis – même lé de Davis: «Je le connais très bien, car il deux jours – pour bosser ce truc. Quand vous patine souvent aux Pays-Bas. Il me souhaivous mettez en route, il faut les godasses aux te toujours bonne chance avant les courses, pieds.»Voilà pour la première salve. il est d’ailleurs le seul. Je l’ai entendu parler La deuxième fut brève, électrique: «Les de la difficulté d’être un patineur noir. Moi, gens disaient qu’ils voulaient que je tombe j’ai toujours vu un type qui patine depuis et que je me casse une jambe, ils utilisaient ses 6ans, un type comme nous. A part ça, le mot qui commence par “N”(il veut dire Davis est la crème des mecs: ouvert, gentil, Nigger, Négro).»Ceux qui lui faisaient fa- avec des conversations passionnantes.» • ce ont relancé sévère, à plusieurs reprises. GRÉGORY SCHNEIDER (envoyé spécial à Turin) Les acteurs américains Brad Pitt et George Clooney, ainsi que le mannequin Cindy Crawford sont attendus à Turin. Les deux premiers invités par la chaîne NBC, la troisièmeafin de tourner une publicité pour une marque de montre partenaire des JO. 2006 CÉRÉMONIE DE CLÔTURE Berlusconi pour finir les Jeux L’ancien maire de New York, Rudolph Giuliani, le président russe Vladimir Poutine, le fondateur de Microsoft Bill Gates, ont annoncé leur présence à la cérémonie de clôture. Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, absent de la cérémonie d’ouverture, en sera aussi. SÉCURITÉ Carabiniers trop zélés Le préparateur des skis de la Suédoise Anja Paerson, Alkes Sopotnik, a pesté contre les carabiniers qui, trop nombreux, l’ont empêché d’approcher la skieuse lors d’un entraînement: «Il y avait tellement de policiers et militaires dans la cabane de départ que je n’ai pas pu rentrer.» MÉDAILLE Le mystère du trou levé Une brochure officielle donne la signification du trou qui se trouve au milieu des médailles: «L’espace vide est censé être en place sur la poitrine, là où battent le cœur et la vie.» liberation.fr • A lire, notre blog: «Quinze jours aux Jeux». • A voir : Révisez vos sports olympiques. 28 sports LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 L I O N E L C H A R R I E R . M .Y.O. P. «J’ai fait tout ce que Tapie m’a demandé de faire, car j’ai toujours cru en lui.» Jean-Jacques Eydelie, condamné dans l’affaire OM-VA et en procès avec Tapie après des révélations sur le dopage à l’OM, défend toujours son ex-patron. «Tapie m’a tenu au chaud, il assure même ma survie» près treize ans de silence, Jean-Jacques Eydelie, ancien joueur de l’OM condamné pour corruption active dans l’affaire OMVA, publie ses confessions (1). Un mois avant leur parution, l’Equipe magazine a créé l’événement en consacrant un article sulfureux à l’ancien joueur, aujourd’hui au RMI. Mis en cause, Bernard Tapie porte plainte contre Eydelie. Tout cela fait couler beaucoup d’encre, même si personne n’avait encore lu l’ouvrage. Votre livre a été annoncé comme un brûlot, un réquisitoire contre Bernard Tapie. C’est loin d’être le cas…. Il faut bien différencier mon livre de l’article paru dansl’Equipe magazineen janvier. Il ne s’agissait ni de mon livre, ni de mon histoire. On a utilisé mes déclarations pour créer un nouveau scandale et enfoncer Tapie. Tout a été fait dans l’histoire OM-VA pour détruire Tapie. C’est un fait. La justice, les instances du foot, les politiques y sont parvenus. L’unique but de l’affaire était de descendre Tapie dont l’ambition politique dérangeait. Parce que la corruption dans le foot, elle est présente, bien au-delà d’une histoire à 250000 francs. Bernard Tapie serait donc la victime? Il est victime de lui-même. On a utilisé tous les moyens pour le descendre en 1993. La cible, dès le A Eydelie, 19 ans de foot • 1984. Débuts professionnels à Nantes. • 1992. Transfert à Marseille. • 20 mai 1993. Match Valenciennes-Marseille (0-1). • 26 juin 1993. Mise en examen pour corruption active. Incarcéré jusqu’au 13 juillet. • 27 avril 1994. Suspendu deux ans par la Fédération internationale. • 15 mai 1995. Condamné à un an de prison avec sursis. • 1995-97. Rejoue à Bastia. • 1997-99. Transféré à Sion (Suisse). • 2000-2003. Evolue à Avranches (CFA 2) puis entraîne Beaucaire (CFA). Il m’a juste tenu au chaud et il me donne un minimum pour assurer ma survie. Il n’avait pas confiance en moi et m’a éloigné, de peur que je craque. Je l’ai rarement rencontré mais j’ai fait ce qu’il m’a demandé de faire, car j’ai toujours cru en lui. Au fond, je pense qu’on se ressemble beaucoup. Je vais vous étonner, mais je souhaite vraiment qu’il se présente à la prochaine présidentielle. Je pense qu’il peut apporter beaucoup au débat politique. On parle bien de l’homme avec qui vous êtes en procès… Il se défend. Pour lui tout est bon. Les micros se tendent et il m’insulte, me traite de «petite frappe», etc. C’est sa méthode. Il impressionne encore beaucoup de monde. Moi un peu moins, car je le connais. Depuis douze ans, votre vie ressemble à une fuite hallucinante. De quoi aviez-vous peur? Les écoutes, les cambriolages, les micros, les menaces, la surveillance: tout ça, je l’ai vécu. C’est ce qui m’a poussé à déménager constamment. Et puis il y avait la peur d’affronter les autres, de ce qu’ils pourraient dire. J’étais en cavale… «En cavale»? Mais vous avez été jugé et condamné pour l’affaire OM-VA… Je savais que j’étais toujours dans le mensonge, et je vivais dans la peur des représailles. Quel type de représailles? J’avais peur de prendre une balle. Le foot draine beaucoup d’argent, et là où il y a de l’argent, le milieu n’est jamais très loin. Il est même très présent. Il n’y a qu’à voir tous ces agents qui grenouillent autour du foot et qui viennent de je ne sais où. Soit on occulte le problème, et à ce moment-là on accepte que la mafia gère directement l’OM, soit on s’y attaque véritablement. Quand je parle d’avoir eu peur de prendre une balle, ce n’est pas du flan. Des joueurs de l’OM ont eu des pistolets dans la bouche… Qui? Pourquoi? Des joueurs qui voulaient renégocier des contrats. Il s’est passé des choses beaucoup plus graves que mon histoire. On parle de mafia, là, plus du tout de foot. Le tableau que vous dressez du monde du football est apocalyptique, entre dopage, corruption, milieu… Je n’invente rien. Les arrangements et combines que je rapporte dans le livre ont toujours existé. Tout le monde sait que de nombreux matchs ont été achetés avant et après OM-VA. Tous les exemples cités sont connus. On se sert de moi, le «corrupteur»,pour tout déballer et vendre du papier. Sur la tentative de corruption à Nantes en 1990 –quand l’OM a proposé une prime aux Nantais en cas de victoire contre Bordeaux–, l’entraîneur, Blazevic, a été condamné. Vous prêtez aussi le flanc à la rumeur en suggérant d’autres faits de corruption… Je cite le fameux match que le PSG a laissé filer contre Bordeaux pour que l’OM perde le titre, en 1999. Tout le monde sait que des joueurs parisiens avaient reçu 50000et 100000 francs. Personne ne le dit, pourquoi? Je cite aussi la rumeur d’achat de joueurs de Milan par l’OM (lors de la finale de la Coupe d’Europe des clubs champions, en 1993, ndlr),mais c’est pour rappeler que Jean-Pierre Papin s’est exprimé là-dessus. Pourquoi ses propos n’ont-ils pas été entendus? Beaucoup de choses ont été dites par d’autres que moi et personne n’a trouvé utile de pousser plus loin les investigations. En revanche, vous n’épargnez pas Didier Deschamps, qui porte lui aussi plainte contre votre livre… Je trouve justement qu’il a été épargné par le milieu, qui le dénigre pourtant. Il est responsable de pas mal de choses me concernant. Pourquoi n’a-t-il pas accepté de dialoguer avec moi? Je ne vois pas où est son but, à part protéger coûte que coûte Bernard Tapie. Deschamps, c’est une icône dans le monde du foot: champion du monde et champion d’Europe. Lui pourrait faire changer les choses, s’il parlait… Si les anciens ne font pas le ménage, qui le fera? La bande à Platini aussi est aigrie. Ils en savent beaucoup sur les magouilles, le dopage… A quoi sert Michel Platini aujourd’hui, à part à dire qu’il faut des arbitres derrière les buts? Je voudrais qu’il dénonce publiquement les dérives du foot.• départ, c’était lui. On voulait sa peau, et on l’a eue. Noël Le Graët et Jean Fournet-Fayard m’avaient même proposé un marché hallucinant: tu nous donnes Tapie et on te permet de rejouer. J’ai refusé, le procédé était scandaleux. A l’inverse, Jean-Pierre Bernès a accepté de lâcher Tapie, je pense que c’est sans doute pour ça qu’il est aujourd’hui agent de joueurs. Pourquoi avoir tout supporté pour Tapie? Par faiblesse. J’ai fait ce qu’on m’a demandé de faire. Le bon soldat qui obéit au patron. J’en suis assez fier. Pour moi, le plus grave, c’est d’accepter de l’argent. Ce que j’avais refusé en 1992, quand je jouais à Nantes. Cette fidélité à la parole donnée est étrange… J’ai été naïf, bête. J’ai baissé pavillon et je n’ai pas su dire non à l’argent. Je m’en veux. Dans ces momentslà, tu n’es pas un homme, tu es une merde. Pourquoi tout déballer maintenant? Pour me reconstruire, j’avais besoin de passer à confesse. Je viens d’avoir 40 ans, j’ai cinq enfants magnifiques, je veux pouvoir discuter de tout avec eux. Mon fils joue au foot, ses copains lui posent des questions auxquelles je veux pouvoir répondre. J’ai voulu briser l’omerta. J’ai été détruit, tant physiquement que moralement, et je voyais ma vie se terminer très vite. Mais je ne suis pas seul en jeu, j’ai une famille. Recueilli par BLANDINE HENNION et ÉTIENNE LABRUNIE Dans votre livre, vous expliquez que Bernard (1) Je ne joue plus! Un footballeur brise l’omerta. Editions Tapie a tout fait pour prolonger votre silence… L’Archipel. Février 2006. sports 29 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Football. En Ligue 1, Bordeaux conforte sa deuxième place derrière Lyon. Le PSG s’incline au Parc des Princes. Résultats du week-end Le Mans grimpe en enfonçant Paris FOOTBALL 27e journée de L1 à une qualification en Ligue des champions. Avec un tel rendement, cet objectif ne sera plus qu’un vieux souvenir, comme l’est désormais la course au titre. A écouter Pauaris est tragique!» A leta, encore une fois le meilune époque pas si leur Parisien sur le terrain (et lointaine, même les toujours meilleur buteur du supporters les plus championnat), accrocher la inconditionnels du club de la troisième ou quatrième place capitale n’hésitaient pas à dé- ne sera déjà pas mal. tourner leur slogan favori En attendant, c’est l’équipe («Paris est magique!») pour du Mans qui a fait la bonne marquer leur désapprobation opération de la journée en se face aux résultats pitoyables replaçant devant son adverde leur équipe. A ce rythme-là saire du jour, pour devenir un – des nuls à la pelle, des dé- sérieux prétendant à une plafaites en pagaille à l’extérieur ce européenne. comme à domicile –, ils vont Lyon avait assuré l’essentiel en pouvoir ressortir les bande- prenant trois points et metroles qu’ils espéraient remi- tant autant de buts à Nantes vendredi soir. Bordeaux ne sées pour toujours. Car, face au Mans samedi, pouvait espérer que conforter dans son Parc des Princes fé- sa place de dauphin. Face à une équipe d’AjacLe PSG se croyait indéboulonnable dans cio méritante mais à l’évidence limila course à une qualification en Ligue des champions. Avec un tel rendement, tée, les Bordelais cet objectif ne sera plus qu’un souvenir. ont prolongé leur série de bons résultiche, le Paris SG a de nouveau tats en s’appuyant sur une désombré et perdu (0-1) après fense toujours aussi impitrois nuls consécutifs. Pour les toyable. Cette défaite enfonce joueurs de Guy Lacombe, tout l’équipe corse dans son inconavait mal commencé avec un fortable position de relégable. penalty indiscutable à la suite Derrière Bordeaux, seul Lille d’une main aussi stupide résiste. Cette fois, c’est les qu’inutile dans la surface de Verts de Saint-Étienne – qui David Rozenhal. Une fois le ne parviennent pas à ralentir penalty transformé par Fauré, leur chute libre – qui ont été les Parisiens n’ont plus cessé les victimes des Nordistes en de courir après le score pen- se faisant battre à domicile dant plus de 85 minutes! Et, (2-0). Le parcours d’Auxerre malgré de nombreuses occa- est tout aussi désolant avec sions, ce fut en vain. Pourtant, une nouvelle contre-perforles Parisiens ont vu un de leur mance face à Sochaux, plus ballon franchir la ligne de but proche de la relégation que des du gardien manceau, mais honneurs du peloton de tête. c’était après une faute de Bo- Quant à l’Olympique de Marnaventure Kalou… que l’ar- seille, qui tirait le rideau hier soir, il a été battu (1-0) en toute bitre avait sifflée. Il y a peu, le PSG se croyait in- fin de match à Metz, la lanterdéboulonnable dans la course ne rouge.• L.F. Lyon-Nantes 3-1; Nice-Monaco 2-0; Paris SG-LeMans 0-1; Saint-EtienneLille 0-2; Rennes-Lens 4-1; SochauxAuxerre 1-0; Troyes-Nancy 0-1; Ajaccio-Bordeaux 0-2; ToulouseStrasbourg 1-2; Metz-Marseille 1-0. «P Le classement de Ligue 1 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. POINTS JOUÉS GAGNÉS NULS PERDUS MARQUÉS ENCAISSÉS Lyon 59 26 17 8 1 43 17 Bordeaux 52 27 14 10 3 26 12 Lille 44 27 12 8 7 36 19 Auxerre 43 27 13 4 10 33 27 Le Mans 42 27 12 6 9 27 19 Paris SG 40 27 11 7 9 31 26 Marseille 40 27 11 7 9 26 28 Nice 39 27 10 9 8 22 21 Lens 38 27 8 14 5 34 26 Nancy 38 26 11 5 10 27 19 Monaco 37 26 10 7 9 26 22 Rennes 35 27 11 2 14 29 41 Nantes 34 27 9 7 11 29 29 Toulouse 34 27 9 7 11 26 30 Saint-Etienne 34 27 8 10 9 23 27 Sochaux 30 27 7 9 11 20 28 Troyes 27 27 6 9 12 23 33 Ajaccio 21 27 4 9 14 16 33 Strasbourg 20 27 3 11 13 20 36 Metz 18 26 3 9 14 16 40 DIFF. 26 14 17 6 8 5 -2 1 8 8 4 -12 0 -4 -4 -8 -10 -17 -16 -24 Ligue 2 - 26e journée: Clermont Foot - Bastia ......................2 - 0 Amiens - Brest .......................................1 - 1 Sedan - Caen ..........................................1 - 1 Valenciennes - Châteauroux .........2 - 0 Guingamp - Créteil ............................0 - 0 Lorient - Dijon ......................................1 - 0 Istres - Grenoble ..................................2 - 1 Sète - Gueugnon ..................................2 - 0 Laval - Le Havre ..................................0 - 0 Reims - Montpellier ...........................0 - 1 Classement: 1. Sedan 49 pts; 2. Bastia 46 pts; 3. Lorient 45 pts; 4. Valenciennes 45pts; 5. Dijon 39 pts; 6. Créteil 38 pts; 7. Montpellier 36 pts; 8. Caen 35 pts; 9. Le Havre 33 pts; 10. Gueugnon 33pts; 11. Châteauroux 32 pts; 12. Grenoble 32 pts; 13. Reims 31 pts; 14. Amiens 31 pts; 15. Brest 30 pts; 16. Istres 30 pts; 17. Clermont Foot 28pts; 18. Guingamp 27 pts; 19. Laval 23 pts; 20. Sète 17 pts. Championnats étrangers Allemagne - 22e journée: Mönchengladbach - Cologne .........2 - 0 Leverkusen - Duisbourg ..................3 - 2 Berlin - Schalke 04 ..............................1 - 2 Nuremberg - Wolfsburg ....................1 - 0 Hanovre - Bayern Munich ................1 - 1 Kaiserslautern - Bielefeld ................2 - 0 Dortmund - Brême ............................0 - 1 Francfort - Hambourg .......................1 - 2 Stuttgart - Mayence ............................2 - 1 Classement: 1. Bayern Munich 55 pts; 2. Hambourg 47 pts; 3. Brême 46 pts; 4. Schalke 04 42 pts; 5. Hanovre 30 pts; 6. Stuttgart 30 pts; 7. Berlin 30 pts; 8. Mönchengladbach 30 pts; 9. Dortmund 29 pts; 10. Leverkusen 28 pts; 11. Francfort 25 pts; 12. Bielefeld 24 pts; 13. Wolfsburg 22 pts; 14. Nuremberg 21 pts; 15. Mayence 20 pts; 16. Kaiserslautern 20 pts; 17. Duisbourg 17 pts; 18. Cologne 15 pts. Espagne - 24e journée: Villarreal - Espanyol Barcelone .....4 - 0 Real Madrid - Alavés ..........................3 - 0 FC Séville - Celta Vigo .......................1 - 0 FC Barcelone - Betis Séville ..............5 - 1 Cadix - Osasuna ....................................1 - 3 Deportivo La Corogne - Saragosse .1 - 1 Racing Santander - Athletic Bilbao 0 - 1 Real Sociedad - Valence ....................n.p. Malaga - Majorque ..............................n.p. Getafe - Atletico Madrid ....................n.p. Classement: 1. FC Barcelone 55 pts; 2. Real Madrid 48 pts; 3. Valence 46 pts; 4. Osasuna 46pts; 5. FC Séville 41 pts; 6. Celta Vigo 39 pts; 7. Villarreal 38 pts; 8. Deportivo La Corogne 37 pts; 9. Saragosse 33 pts; 10. Atletico Madrid 32 pts; 11. Getafe 30pts; 12. Racing Santander 27 pts; 13. Real Sociedad 25 pts; 14. Espanyol Barcelone 24 pts; 15. Athletic Bilbao 22pts; 16. Alavés 22 pts; 17. Cadix 22 pts; 18. Betis Séville 22 pts; 19. Malaga 20 pts; 20. Majorque 19 pts. Italie - 26e journée: Livourne - Inter Milan ......................0 - 0 Messine - Juventus Turin ................2 - 2 Milan AC - Cagliari ..............................1 - 0 Chievo Vérone - Palerme .................0 - 0 Fiorentina - Lazio Rome ...................1 - 2 Lecce - Reggina ...................................0 - 0 AS Rome - Empoli ...............................1 - 0 Sampdoria - Ascoli ..............................1 - 2 Trévise - Parme ....................................0 - 1 Udinese - Sienne ..................................1 - 2 Classement: 1. Juventus 67 pts; 2. Milan AC 57 pts; 3. Inter Milan 55 pts; 4. AS Rome 51 pts; 5. Fiorentina 50 pts; 6. Livourne 43 pts; 7. Chievo Vérone 39 pts; 8. Lazio Rome 38 pts; 9. Sampdoria Gênes 37 pts; 10. Palerme 34 pts; 11. Ascoli 29 pts; 12. Sienne 29 pts; 13. Udinese 27 pts; 14. Reggina 27 pts; 15. Parme 26 pts; 16. Messine 24 pts; 17. Cagliari 23 pts; 18. Empoli 22 pts; 19. Lecce 15 pts; 20. Trévise 14 pts. BOXE Championnats de France amateurs - Finales: Mi-mouches: Nordine Oubaali bat Redouane Asloum aux points (35 - 20) Mouches: Jérôme Thomas bat Amine Boumeraci aux points (38 - 20) Coqs: Ali Hallab bat Hicham Ziouti arrêt de l’arbitre (3e) sur supériorité Plumes: Kedhafi Djelkhir bat Guillaume Frénois aux points (45 - 35) Légers: Boubakar Dangnoko bat Jean Gomis aux points (26 - 25) Super-légers: Adriani Vastine bat Saber Bouzaiane aux points (33 - 17) Welters: Alexis Vastine bat Jaoid Chiguer aux points (32 - 18) Moyens: Sami Anouche bat Christopher Rebrasse aux points (33 - 17) Mi-lourds: Mamadou Diambang bat Kevin Piquet aux points (24 - 21) Lourds: Newfel Ouatah bat John-Mickael Mbumba KO (1er) Super-lourds: Mohamed Samoudi bat Mohamed Amanissi aux points (32 - 20) CYCLISME Tour du Haut-Var: Classement général: 1. Leonardo Bertagnolli (ITA/Cofidis) les 185 km en 4 h 54’21’’ (moyenne: 37,710 km/h) ; 2. Pietro Caucchioli (ITA) à 09’’; 3. Jurgen Van de Walle (BEL) ; 4. Nick Nuyens (BEL) à 56’’. Classic Haribo: 1. Arnaud Coyot (FRA/Cofidis) les 203,5 km en 5 h 28’16’’ (moyenne: 37,195 km/h) ; 2. Thor Hushovd (NOR) même temps; 3. Mauro Facci (ITA) à 31’’; 4. Kevin Van Impe (BEL) ; 5.Graeme Brown (AUS) ; 6. Leon Van Bon (NED) ; 7. Saïd Haddou (FRA) ; 8. Jaan Kirsipuu (EST) ; 9. James Vanlandschoot (BEL); 10. Gorik Gardeyn (BEL) même temps. Classement de la Coupe de France après deux épreuves: 1. Arnaud Coyot (FRA) 50 pts; 2. Leonardo Bertagnolli (ITA) 50 pts; 3. Thor Hushovd (NOR) 35 pts; 4. Pietro Caucchioli (ITA) 35 pts; 5. Dmitri Fofonov (KAZ) 16 pts; 6. Saïd Haddou (FRA) 14 pts; 7. Freddy Bichot (FRA) 14 pts; 8. Jaan Kirsipuu (EST) 12 pts; 9. Alexandre Pichot (FRA) 6 pts; 10. Pierrick Fédrigo (FRA) 6 pts. HANDBALL D1 - 15e journée: Créteil - Toulouse ...........................31 - 24 Angers - Villefranche-Beauj. .......16 - 16 Paris Handball - Nîmes .................21 - 26 Tremblay - Pontault-Combault .31 - 24 Chambéry - Dunkerque ...............26 - 25 Sélestat - Istres ................................32 - 31 Ivry - Montpellier ..........................24 - 23 Classement: 1. Montpellier 41 pts; 2. Chambéry 38pts; 3. Ivry 37 pts; 4. Paris Handball 36 pts; 5. Dunkerque 36 pts; 6. Nîmes 34 pts; 7. Créteil 28 pts; 8. Sélestat 28pts; 9. Tremblay-en-France 27 pts; 10. Pontault-Combault 26 pts; 11. Toulouse 24 pts; 12. Istres 23 pts; 13. Villefranche-Beaujolais 23 pts; 14. Angers 19 pts. RUGBY Top 14 - 17e journée Perpignan - Castres..........................34 - 3 Brive - Biarritz ....................................8 - 15 Montpellier - Bourgoin ................33 - 20 Narbonne - Stade Toulousain .....27 - 19 Toulon - Clermont .........................14 - 36 Pau - Bayonne...................................21 - 18 Agen - Stade Français .........................n.p. Classement: 1. Biarritz 57 pts; 2. Stade Toulousain 51pts; 3. Perpignan 50 pts; 4. Stade Français 48 pts; 5. Clermont 45 pts; 6. Bourgoin 45 pts; 7. Castres 44 pts; 8. Brive 35 pts; 9. Agen 34 pts; 10. Narbonne 25 pts; 11. Bayonne 22pts; 12. Montpellier 20 pts; 13. Pau 17 pts; 14. Toulon 12 pts. Pro D2 - 20e journée: Auch - Tyrosse .................................41 - 23 Colomiers - Pays d' Aix ....................9 - 16 Béziers - Mont-de-Marsan ..........32 - 10 La Rochelle - Tarbes .........................14 - 9 Albi - Oyonnax .....................................8 - 6 Dax - Aurillac .....................................32 - 9 Racing-Métro 92 - Montauban ..17 - 18 Stade Bordelais - Lyon OU .............19 - 3 Classement: 1. Montauban 77 pts; 2. Béziers 67 pts; 3. Albi 64 pts; 4. Dax 57 pts; 5. Auch 54 pts; 6. Tarbes 52 pts; 7. Colomiers 47 pts; 8. La Rochelle 45 pts; 9. Stade Bordelais 44 pts; 10. Oyonnax 41 pts; 11. Racing-Métro 92 pts; 12. Lyon OU 32 pts; 13. Pays d' Aix 31 pts; 14. Montde-Marsan 27 pts; 15. Aurillac 24 pts; 16. Tyrosse 23 pts. RUGBY A XIII Championnat de France 14e journée: Saint-Gaudens - Carcassonne ...68 - 22 Lyon-Villeurbanne - Toulouse ..10 - 50 Villeneuve/Lot - U. 13 catalane ...12 - 15 Carpentras - Lézignan ..................16 - 32 Pia - Villefranche-de-R./Cahors 46 - 16 Limoux - Marseille ........................48 - 20 Classement: 1. Pia 37 pts; 2. Limoux 35 pts; 3. Union treiziste catalan 34 pts; 4. Toulouse 33pts; 5. Saint-Gaudens 28 pts; 6. Carcassonne 28 pts; 7. Villeneuvesur-Lot 23 pts; 8. Villefranche-deRouergue/Cahors 19 pts; 9. LyonVilleurbanne 19 pts; 10. Lézignan 17pts; 11. Marseille 15 pts; 12. Carpentras 12 pts. TENNIS ATP - Marseille - 7e journée: Simple messieurs (finale): Arnaud Clément (FRA) bat Mario Ancic (CRO/N.6) 6-4, 6-2 Double messieurs (finale): Martin Damm/Radek Stepanek (CZE/N.4) battent Mark Knowles/Daniel Nestor (BAH/CAN) 6-2, 6-7 (4/7), 10-3. WTA - Anvers - 7e journée: Simple dames (finale): Amélie Mauresmo (FRA/N.2) bat Kim Clijsters (BEL/N.1) 3-6, 6-3, 6-3 Double dames (finale): Dinara Safina/Katerina Srebotnik (RUS/SLO/N.2) battent Stéphanie Forezt/Michaella Krajicek (FRA/NED) 6-1, 6-1 ATP - San Jose - 6e journée: Simple messieurs (demi-finales): Lleyton Hewitt (AUS/N.3) bat Vincent Spadea (USA) 6-3, 6-4 Andy Murray (GBR) bat Andy Roddick (USA/N.1) 7-5, 7-5 Doubles messieurs (demi-finales): Paul Goldstein/Jim Thomas (USA) battent Simon Aspelin/Todd Perry (SWE/AUS/N.1) 6-3, 6-7(4/7), 10-3 Jonas Bjorkman/John McEnroe (USA) battent Jaroslav Levinsky/Robert Lindstedt (CZE/SWE/N.4) 6-3, 4-6, 10-8 TENNIS Clément renaît Arnaud Clément n’avait plus gagné de tournoi depuis l’Open de Moselle (à Metz) en 2003. Hier, il a renoué avec le succès en remportant celui de Marseille face au Croate Mario Ancic (6-4, 6-2). L’Aixois, qui avait bénéficié d’une invitation, avait déjà battu Fabrice Santoro et l’Espagnol Rafael Nadal lors des tours précédents. TENNIS Mauresmo bat Clijsters chez elle Et de trois! Amélie Mauresmo a remporté hier son troisième titre de la saison en venant à bout de la Belge Kim Clijsters (3-6, 6-3, 6-3) à Anvers. Déjà victorieuse à l’Open d’Australie et à Paris, la Française a ainsi gagné le 22e tournoi de sa carrière. Devant son public, Clijsters toujours n° 1 mondiale, a toutefois cédé en 1h50. BASKET Parker tireur d’élite Le meneur français des San Antonio Spurs, Tony Parker, s’est adjugé le «shooting stars contest», concours de tirs organisé dans le cadre du All Star Game auquel il participait samedi à Houston (Texas). En réussissant ses six tirs en 25 secondes, le joueur de San Antonio a aussi établi un nouveau record de rapidité. 30 télévision LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 APRÈS COUP LE FILM Par SORJ CHALANDON Par LOUIS SKORECKI Le résistant Man Hunt (2) ès septembre1944, la libération a commencé. Mais dans les camps, on continue à mourir. A Buchenwald et à Ordhuf, s’adressant aux soldats, le général Eisenhower a dit: “Si vous ne saviez pas pourquoi vous vous battez, maintenant, vous savez.” Eh bien vous, jeunesse, il faut que vous sachiez pourquoi vous devez vous battre.» Applaudissements. Nous sommes à la préfecture du Calvados. Des lycéens reçoivent les prix du concours de la Résistance et de la Déportation. C’est Marcel Fauvel qui a parlé. Lorsqu’il reconnaît Victor Lanot au milieu des jeunes, il l’étreint. Il le connaît depuis l’enfance. «Ça ne m’étonne pas de te voir là», dit le vieux combattant. Victor a 17ans. C’est au même âge que Marcel s’est engagé. Peu à peu, le soldat de l’ombre a refait son chemin de guerre avec le garçon. Résistant, dénoncé, matricule21314 à Buchenwald, il l’a même emmené sur les lieux de son supplice. L’homme parle. Le lycéen l’écoute. Le réalisateur Rémi Mauger les a rejoints (1). «Pour beaucoup de gens, je crois qu’on avait eu tort de se faire prendre. Voilà. On avait pris un risque, et ce risque, il était normal qu’on l’ait assumé, si vous voulez, nous dit Marcel Fauvel. Je crois que les gens ne percevaient pas du tout la dimension de l’aventure à laquelle nous avions été confrontés. Beaucoup de gens nous disaient: “Racontez-nous votre histoire, et puis foutez-nous la paix avec ça.” Entre 17 et 25ans, j’étais en camp de concentration. Je n’avais donc pas perfectionné une culture en français. On ne trouvait pas de mot. On ne trouvait pas d’expression. On ne trouvait pas de syntaxe pour raconter les choses. Les mots qui décrivaient le camp, tout le monde les comprend aujourd’hui. On sait ce qu’est un kapo, la Shoah. Tous ces mots-là n’existaient pas. On aurait dit ça à un Français de 1945, il aurait ouvert de grands yeux. Et pourtant, ce sont des mots qui décrivent exactement la situation. Il n’y a pas d’autre mot pour décrire un kapo. Il n’y a pas d’autre mot pour décrire la Shoah.»«Vous avez été torturé?»demande le réalisateur. «Oh? Un petit peu, mais enfin, bon. Comme tout le monde. Vous croyez que c’est marrant de raconter ça? Qu’on a été torturé? Vous croyez que ça se raconte, franchement? Il y a des gens qui vous racontent ça? C’est humiliant d’être torturé. C’est jamais drôle de raconter ce qui est humiliant. Je me demande si beaucoup de gens comprennent quand je dis des choses comme ça.» «Victor, oui?»demande le réalisateur. «Victor, oui», répond le résistant.• CINÉCINÉMA CLASSIC, 18 HEURES. «D LAURENT DENIS FRANCE 2 E Durant la Seconde Guerre mondiale, sept policiers du Service des étrangers vont sauver 348 juifs. Fiction. Bonne adaptation de l’histoire des «Sept de Nancy». Une digne indiscipline es flics qui désobéissent parce qu’ils jugent inique une loi que le gouvernement les somme d’appliquer, un rêve! En 1942, Edouard Vigne travaille au Service des étrangers de Nancy. Un sale boulot: recension des juifs. La politique de Laval est claire: aller au-delà de la collaboration. Il y a les salauds comme Durieux qui profitent de leur misérable pouvoir pour insulter une «youpine». Il y a les ternes poulets comme Bauer qui ne veulent pas faire de vague. Et il y a Edouard, engagé dans la Résistance. Un engagement que le film, intelligemment, n’assortit d’aucun discours idéologique. Il agit selon sa conscience, c’est suffisant. Daniel Russo donne au personnage sa force calme, sa densité. Seulement, Edouard a un ami, Lucas, flic de seconde zone qui se désespère de ne pas rejoindre le commissariat central. Sa lâcheté sera elle aussi banale. Martin Lamotte a évidemment la gueule de l’emploi, son regard dit admirablement la bêtise, la peur, la couardise. C’est sans état d’âme qu’il va devenir une ordure: il veut de l’avancement, il veut des nouvelles de son fils prisonnier en Allemagne. Alors, il va se fourrer entre les pattes d’un salaud intégral, Alfred Callot (parfait Thierry Gibault), truand qui, comme cent autres, profita de la guerre. C’est au ser- D vice des Questions juives qu’il œuvre parce que c’est là qu’on peut se remplir les poches facilement. Lucas devient son homme de main. Dès lors, l’amitié avec Edouard agonise. Elle meurt à la veille de la rafle du 19juillet, consécutive à celle du Vél d’hiv’. Mais, au-delà de ce prétexte d’une amitié qui ne survit pas aux engagements des hommes, il y a la décision des sept policiers du Service des étrangers de désobéir à leur hiérarchie: le 18juillet, ils sortent les fiches des juifs de la ville et, porte à porte, les avertissent. Fidèles à l’histoire vraie des «Sept de Nancy», Patrick Volson et la scénariste Corinne Atlas n’expliquent pas cet acte de désobéissance. Chaque policier agit selon sa conscience: Edouard et Charles de La Barre en hommes de réseau; le flic père de famille pense à son fils et à ses proches; le scrupuleux obéit à son chef. La portée de cette désobéissance n’en est que plus forte. Mais l’Histoire n’aime pas les désobéissants et il fallut attendre 1989 et 1991 pour que les policiers encore vivants soient récompensés. Israël a décerné le titre de Juste à Pierre Marie dont s’inspire le personnage d’Edouard Vigne. Pourquoi si tard? «C’était sans doute parce que, malgré tout, nous avions désobéi», pensait-il. Les Sept de Un Fritz Lang romantique et violent. Nancy sauvèrent 348personnes sur les 380 que réclamaient les Allemands. • comme lettre à la poste son fameux SOPHIE ROSTAIN refus à Goebbels de devenir cinéaste officiel du régime. «C’est nous qui décidons qui est juif et qui ne l’est pas», lui aurait dit Goebbels. Lang aurait fui l’Allemagne en train le soir même. Je l’ai toujours soupçonné d’avoir Avant une poignée de nanars inventé cette histoire. Trop beau, redoutables dans les trop rapide, trop scénarisé. Un jour, années 80 (le Diable au corps, un historien plus méticuleux a la Sorcière…), et un regain de retrouvé le passeport de Fritz Lang. vigueur que l’on n’espérait Le visa prouvait à l’évidence qu’il plus au début de la décennie 2000, Marco Bellochio fut l’un avait hésité plusieurs semaines avant de refuser l’offre nazie. J’aurais des cinéastes italiens les plus préféré me tromper. Dès son arrivée virulents de l’après-68. En à Hollywood, Lang a passé son temps témoigne ce Viol en première à effacer cette faute originelle page décapant dont la (on dit aussi qu’il a tué sa première critique de la corruption des femme, mais c’est une autre histoire), élites et de la manipulation sous des tonnes de culpabilité des masses au cours des scénaristique, jusqu’à son film le plus «années de plomb» reste autobiographique et le plus beau, d’une actualité inquiétante l’Invraisemblable Vérité. Lang n’y est dans l’Italie de Berlusconi. jamais tout à fait, dans ses films Gian Maria Volonte, américains. Il rêve à une Walkyrie compagnon de route du PC d’une blondeur aveuglante qui italien dans la vraie vie, est parfait en patron de presse de le prendrait par la main pour le conduire sur la lune. Il rêve même droite et sans scrupule. S.D. qu’il a voulu tuer Hitler.• TPS CINÉCULTE, 11h35. (A suivre) C O R B I S K I PA FRANCE 2, 20h50.«Le Temps de la désobéissance», un téléfilm de Patrick Volson. Viol en première page (1) C’était samedi à 16 heures, Un siècle à nous deux, sur France 3 Normandie. ARCHIVES DR Consultez en ligne les archives payantes du journal. Jusqu’à 75% de réduction avec le «Carnet d’archives». www.liberation.fr spionnage, violence, ambiguïté, on est dans un drôle de territoire. Un peu langien, mais pas tant que ça. Un peu stevensonien, mais pas tant que ça. Le film est-il trop romantique, trop mankiewiczien? Trop fade? Ou juste trop hollywoodien? Man Huntraconte l’histoire d’un Allemand qui veut tuer Hitler, et qui le rate de peu. Le film est violent, ambigu, romantique, il est aussi plus que cela. Fritz Lang était plus proche de l’idéologie fasciste qu’il ne voulait l’admettre. Par sa femme d’abord, Thea von Harbou, hitlérienne des premiers jours, dont il ne s’est séparé que très tard. Par sa situation de cinéaste, par sa culture de classe aussi. Il n’est devenu juif que quand on l’a accusé de l’être. Encore a-t-il menti pendant des années, les cinéphiles et les historiens acceptant télévision 31 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 •FILM Italique : en clair F2 F3 C+ ARTE F5 M6 9.05 TF ! Jeunesse. 11.05 La vie devant nous. Série. 12.05 Attention à la marche ! 13.00 Journal. 13.40 Météo. 13.50 Les feux de l'amour. 14.40 Un rêve à l'épreuve. Téléfilm. 16.35 New York : police judiciaire. Série. 17.25 Las Vegas. Série. 18.15 Crésus. 19.05 A prendre ou à laisser. 20.00 Journal. 6.30 Télématin. 8.40 Des jours et des vies. 9.00 Amour, gloire et beauté. 9.30 KD2A. 11.00 Motus. 11.35 Millionnaire. 11.45 JO : Curling. 13.00 Journal. 13.55 Rex. Série. 14.50 Un cas pour deux. Série. 15.55 JAG. Série. 16.55 JO : Turin 2006. 19.30 Un jour à Turin. 20.00 Journal. 5.20 Côté jardins. 5.40 Les matinales. 6.00 EuroNews. 7.00 France Truc. 9.20 JO : Ski. 11.50 12/14. 12.55 JO : Turin 2006. 16.10 Plus belle la vie. 16.35 France Truc. 17.30 C'est pas sorcier. 18.05 Questions pour un champion. 18.35 19/20. 20.10 Le journal des Jeux. 20.25 Plus belle la vie. 12.35 Nous ne sommes pas des anges. 13.40 La grande course. • 14.00 Nous étions libres. 16.00 «Le Nouveau Monde», le making of. • 16.25 Monster. 18.10 Album de la semaine. 18.20 Monster. Série. 18.50 Infos. 19.10 Le grand journal de Canal+. 19.55 Les Guignols. 20.10 Le grand journal, la suite. • 15.00 Bloody Sunday. 16.50 Chic. 17.15 La nature en terrain conquis. Docu. 18.00 12.05 Midi les zouzous. 13.40 12.50 Le 12.50. 13.10 Une Le magazine de la santé au quotidien. 14.35 La maîtrise du feu. 15.45 Lisbonne. Docu. 16.40 Studio 5. 16.50 L'Inde, des jours et des hommes. Docu. 17.50 C dans l'air. santé au quotidien. nounou d'enfer. Série. 13.30 Trop jeune pour être mère. Téléfilm. 15.25 La famille parfaite. Téléfilm. 17.05 Jour J. 17.55 Un, dos, tres. Série. 18.55 Charmed. Série. 19.50 Six' / Météo. 20.10 Ma famille d'abord. Série. 20.40 Six'infos locales / Kaamelott. 20.50 Joséphine, ange gardien 20.50 Le temps de la 20.55 JO : Patinage artistique 20.50 20.40 • Blind Shaft 20.00 De Gaulle-Churchill, 20.50 • Gomez & Tavarès Téléfilm historique de Patrick Volson. Fr. 2005. Avec Daniel Russo, Martin Lamotte, Pascal Elso. (Lire page 30). Programme libre danse. A Turin. En direct. Commentaires : Nelson Montfort, Annick Dumont, Philippe Candeloro. 23.45 Soir 3. Présenté par Marie Drucker Film d'action de Sam Raimi. E-U. 2003. Multilingue. Avec Tobey Maguire, Kirsten Dunst, James Franco. Drame social de Li Yang. Ch. 2003. v.o. Avec Li Yixiang, Wang Shuangbao, Wang Baoqiang. 23.00 1m2 pour vivre DIRECT 8 LCP TMC 17.30 Le culture club. 19.05 Division d'élite. Série. 19.55 La loi de Los Angeles. Série. 20.50 • L'âge des possibles Comédie dramatique de Pascale Ferran. Fr. 1996. Avec Anne Cantineau, Christèle Tual. 22.45 Le culture club. Magazine. 0.20 Soyons Sport ! Magazine. 16.30 Si l'on sortait. 17.00 Les Z'Octopuces. 18.00 Tous en scène. 19.00 Tout va bien. 20.00 Le journal de 20h. 20.30 Entretien intime. 20.30 TNT Show Magazine présenté par Alex Taylor. Invités : Johannes Swoboda, Doris Pack, Pervenche Berès... 22.00 Bouge la France ! Magazine présenté par Pierre Sled. 23.30 Le journal parlementaire. Divertissement. Présenté par Laurie Cholewa, François Barré. En direct. • 22.05 Attila, fléau de Dieu Péplum avec Anthony Quinn. 0.00 88 minutes. 21.00 Vivre en Europe 19.00 Starsky et Hutch. Série. 19.50 TMC Météo. 20.00 Les vacances de l'amour. Série sentimentale. • La jument verte Comédie sentimentale de Claude Autant-Lara. Fr. 1959. Avec Bourvil. 22.30 Hercule Poirot. Deux épisodes. 0.20 Les mystères de l'Ouest. Série. 20H40 Mesure d’urgence cinecinema Famiz De Michael Apted (1996, E-U) 120 mn. De Michel Berny et Maurice Biraud (1981, Fr) 80 mn. 20H45 Révélations Spiceworld, le film cinecinema Premier De Michael Mann (1999, E-U). 155 mn. RTL 9 TPS Cinefamily De Bob Spiers (1997, G-B) Multilingue. 90 mn. 20H50 Salut la Puce Le faucon Ciné Polar Comédie De Paul Boujenah (1983, Fr) 80 mn. De Richard Balducci (1982, Fr) 90 mn. Galaxy Quest Vera Drake TPS Home Cinéma Canal+ cinéma De Dean Parisot (1999, E-U) Multilingue. 100 mn. De Mike Leigh (2004) Multilingue. 120 mn. Innocents, the Dreamers De Frank Marshall (1995, E-U) 105 mn. TPS Ciné Culte De Bernardo Bertolucci (2003) Multilingue. 115 mn. La grande bourgeoise cinecinema Classic De Mauro Bolognini (1974) 105 mn. Congo TF 6 Piège à Hongkong 13e Rue De Tsui Hark (1998, E-U) 90 mn. Des hommes d’honneur TvBreizh 22H15 Mad Max 2 Ciné FX L’expérience Ulysse TPS Cinétoile Adaptation De George Miller (1981, Austr) 90 mn. cinecinema Frisson De M. Camerini (1954, cinecinema Premier It) Multilingue. 105 mn. De Spike Jonze Blueberry, (2002, E-U) l’expérience secrète Multilingue. 115 mn. Tropical Malady cinecinema Auteur D’A. Weerasethakul (2004) v.o. 115 mn. 22H05 La Belle Verte cinecinema Famiz De Coline Serreau (1996, Fr) 95 mn. La rançon Ciné Polar 22H10 Huston (1948, E-U) Multilingue. 125 mn. CHAT Canal+ Décalé De Sam Raimi (2003, E-U). 120 mn. Fausses apparences 22H30 L’importance d’être constant 23H40 De Jan Kounen (2003, Fr) Multilingue. L’histoire du petit Muck 120 mn. Kickboxer 3 : Trafic à Rio RTL 9 De R. King cinecinema Famiz (1992, E-U) 95 mn. De Wolfgang Staudte (1953, All) 100 mn. 22H55 Hope Springs TPS Cinéstar Le mystificateur Canal+ cinéma cinecinema Auteur De Pascal Thomas (1978, Fr) 110 mn. TPS Home Cinéma D’Oliver Parker (2002) 23H00 Chandler TCM Multilingue. 95 mn. De Paul Magwood Mad Max Ciné FX (1971, E-U) De G. Miller (1979, Multilingue. 90 mn. Austr) v.o. 90 mn. Les marins de l’Orgueilleux cinecinema Emotion cinecinema Classic 23H05 TPS Cinextreme The Shanghai Gesture Ciné Polar De Josef von Sternberg (1941, E-U) v.o. 95 mn. 23H55 Le petit Marcel TPS Cinefamily TNT NRJ 12 W9 19.05 Le rebelle. 19.50 Viper. 22.55 Genesis II, et l'homme créa la nature 19.40 Code Lisa. 20.05 Good Morning Miami. Série. 20.45 • Robin des Bois, 20.30 Les super communs. Film d'aventures de Kevin Reynolds. E-U. 1990. Avec Kevin Costner. 22.30 On va tout vous dire. «Soins du corps et de l'esprit : la beauté au masculin». 23.35 Sex Files. Série érotique. 20.45 Jack & Jill Série humoristique. «Approche amoureuse». «Linge sale et confidences». Avec Amanda Peet. 22.15 Warlock 3. Téléfilm d'épouvante. 0.00 Groovy Baby. 1.00 La totale NRJ 12. 17.20 Cosby Show. Deux épisodes. 18.10 Star Trek, la nouvelle génération. 19.00 Le caméléon. Série. 19.50 Les Simpson. Deux épisodes. 20.50 Dark Angel Série fantastique américaine. Avec Jessica Alba, Michael Weatherly. 22.10 Dark Angel. Deux épisodes. 23.45 Tendances. SÉRIES RADIOS 20H20 20H50 Crimes ordinaires FRANCE CULTURE 10.00 Le roi de Las Vegas Diagnostic, meurtre Jimmy Les Lundis de l’Histoire: Série club Série club (saison 1, 1/13) Qu’est ce qui est noir et blanc et qui pleure tout le temps ? 20H45 Millennium Jimmy (saison 1, 5/22) Le complexe de Dieu. Multilingue. 13H00 De Bruno Nuytten (1988, Fr) 170 mn. Dangereuse alliance NT1 SPORTS cinecinema Emotion • 22.50 Documentaire. (6/7). «L'enfant de Meru». 23.50 Aventures en haute montagne. 0.50 Le gang des babouins. 23H50 Camille Claudel Comédie policière de Gilles Paquet-Brenner. Fr. 2003. Avec Stomy Bugsy, Titoff, Elodie Navarre. Documentaire réalisé par Patrick Jeudy en 1998. (1/2). «Juin 1940 - novembre 1942 : premières impressions». 20.55 Etats généraux. 21.55 Harcèlements. Docu. Comédie fantastique d’Andrew Fleming. E-U. 1996. Avec Robin Tunney, Fairuza Balk, Neve Campbell. 0.35 Le justicier de l'ombre. Série policière américaine. «Femme fatale». 1.30 M6 Music alternative. De Mark Herman (2003). 90 mn. De Jacques Fansten La marche triomphale (1976, Fr) 100 mn. De Neil LaBute (2003) De H. Hathaway (1949, De Marco Bellocchio Multilingue. 100 mn. (1975) 115 mn. E-U) v.o. 120 mn. www.liberation.fr 23H20 TPS Ciné Culte Les nuits de la pleine De Billy Ray (2003) De Wolfgang Petersen lune TV5MONDE Multilingue. 95 mn. D’Eric Rohmer (2003, E-U) Confidences (1984, Fr) 100 mn. Multilingue. 160 mn. pour confidences 20H55 De Craig R. Baxley (1990, E-U). 90 mn. Spider-Man 2 Troie TPS Cinéstar D’Alex Segal (1956, E-U) 105 mn. Le trésor de la Sierra Madre TCM De John 22H40 D’Oliver Hirschbiegel La femme et le pantin (2001, All) Multilingue. 120 mn. TPS Cinétoile De Julien Duvivier Ouragan sur l’eau (1958, Fr) 100 mn. plate TPS Cinefamily Le témoin du mal De Dick Clement (1985, G-B) 100 mn. TPS Cinextreme De Gregory Hoblit 22H20 (1998, E-U). 125 mn. De Rob Reiner (1992, E-U) 140 mn. cinecinema Frisson Dark Angel 21H00 mémoires de guerre Documentaire réalisé par Andreï Schwartz. 23.45 Arte info. • 23.55 Nous sommes tous des voleurs. Policier de Robert Altman. E-U. 1974. v.o. Avec Keith Carradine. 1.55 Bienvenue sur Mars. Docu. prince des voleurs 20.55 FILMS Pourquoi pas nous ? 22.10 19.00 Le magazine de la TNT Tournoi féminin. Finale. 1.55 Soir 3. Présenté par Marie Drucker 2.20 Plus belle la vie. Feuilleton réaliste français. 2.50 Thalassa. JO : Hockey sur glace TNT F4 Débat. Présenté par Yves Calvi. 0.30 Journal de la nuit. 0.55 Musiques au cœur. «Eve raconte Mozart» (2/2). 2.10 Mezzo portraits. Docu 2.40 Mezzo mag. Magazine présenté par Emilie Raffoul, Stéphane Haumant. «Les flics du fisc». 23.55 Mensomadaire. 0.25 The Shield. Série policière. «Respect». 1.10 Deadwood. TNT TNT Pascal Bataille, Laurent Fontaine. 0.40 Sept à huit. 1.30 Reportages. «Les baroudeuses de la foi». 1.55 Un chien sur ordonnance. 0.10 Lundi investigation 19.00 Voyage au centre du cerveau. Docu. 19.45 Arte info. 20.00 Le journal de la culture. 20.15 Alain Ducasse au Plaza Athénée. Docu. TNT Y a que la vérité qui compte ! 22.40 Magazine présenté par Mots croisés TNT 22.35 Sur la route de la soie. Docu. TNT désobéissance Téléfilm sentimental de Laurent Lévy. Fr. 2005. «La couleur de l'amour». Avec Mimie Mathy, Philippe Caroit, Jean-Roch Pirot. • Spider-Man 2 TNT TF1 (saison 2, 3/12) (saison 6, 19/22) Indice Ligne blanche. d’écoute. 22H30 Compte à rebours Téva (saison 1, 13/20) Beautés fatales. Les médiums Série club 22H20 (saison 1, 13/13) Morts suspectes. (saison 3, 21/21) Panne d’électricité. (saison 2, 1/12) La maison du péril. New York 911 13e Rue Hercule Poirot TMC FRANCE MUSIQUE 12.05 A portée de mots: avec 17H00 JO : Ski Eurosport JO : Saut à skis 20H30 Slalom géant messieurs. 2e manche. En direct. Eurosport Concours Championnat d’Angleterre. 15e journée. Northampton / Saracens. 14H15 JO : Curling Eurosport Tournoi masculin. 1re phase. Nouvelle-Zélande / Allemagne. En direct. 15H30 «L’Histoire du corps», avec Jean-Jacques Courtine, pour Histoire du corps: les mutations du regard, le XXe siècle(vol. 3, Seuil), et Nicole Edelmann pour Histoire de la voyance et du paranormal, du XVIIIe s. à nos jours(Seuil). par équipes (grand tremplin). En direct. 19H30 Motocross Sport+ Championnat du monde de supercross. 8e manche. La course des 125 cc. 19H45 Rugby Sport+ 0H45 JO : Hockey sur glace Eurosport Tournoi féminin. Finale. Toni TPS Star Golf Sport+ Circuit JO : Patinage 2H30 artistique Eurosport JO : Ski Eurosport De Philomène Esposito (1999) 95 mn. européen. Open de Malaisie. 4e jour. Programme libre danse. En direct. Slalom géant messieurs. 2e manche. Dialoguez tous les mardis de 15 h à 15 h 30 avec Daniel Schneidermann chroniqueur à Libération. Robert Badinter. FRANCE INTER 16.20 Charivari: «Rétrospective Roberto Rossellini à la Cinémathèque», avec Isabella Rossellini et Tag Gallagher pour les Aventures de Roberto Rossellini(Léo Sheer). RTL 18.00 Journal: avec Isabelle Huppert, pour l’Ivresse du pouvoirde Claude Chabrol. 32 météo jeux LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 p LES MOTS D’OISEAU N° 2813 1 2 3 4 5 6 7 8 9 I II III IV V VI VII VIII IX X XI Lille 3/5 Amiens 3/5 80 km/h 90 km/h Caen 3/6 Brest 2/8 Soleil (à Paris) Lever 7h54 Coucher 18h14 3 mn de soleil en plus Marées (à Brest) Coefficients 56/50 En baisse 50 km/h LYON MARSEILLE Bonne C D F G Hier Bonne 3 5 15 34 39 40 ( 37 ) Marseille 7/12 Nice 7/14 Bastia 7/14 60 km/h Ajaccio 8/14 Helsinki -8/-3 Oslo Stockholm -9/-1 -7/-2 Tallinn -5/-1 -9/-2 Riga 1/6 24/28 Copenhague 2/6 18/23 Berlin Varsovie -1/2 1/3 Londres 20/27 -1/2 -8/-3 Bruxelles Lille 0/2 -1/2 23/30 7/17 Prague -2/1 -15/-7 Brest 2/5 loc Paris Strasbourg 1/3 loc 23/28 26/30 La Rochelle 25/28 loc 2/5 2/6 ClermontFerrand loc Toulouse 0/4 0/9 Montpellier -2/5 2/6 3/10 1/9 Budapest 3/9 Zagreb -1/11 Milan 18/32 Bratislava Ljubljana 7/13 Belgrade 20/24 5/10 Sarajevo 3/8 Nice 4/12 Skopje Ajaccio Tirana Rome 4/13 Barcelone Vienne 2/6 -3/6 Lyon 2/11 Munich -3/2 Berne 0/7 loc 6/12 25/26 -5/-1 2/8 23/29 Madrid Vilnius -4/0 26/30 0/9 9/15 Dublin Amsterdam Lisbonne 1/6 -4/0 Edimbourg 7 6 5 4 3 2 1 LOTO TIRAGES DU SAMEDI 18 FÉVRIER 2006 Montpellier 5/13 > 1200 m loc > 600 m Toulouse 4/11 loc loc 8 4 13 24 36 39 47 ( 1 ) loc Bordeaux 6/11 H Blancs: Bujisho Noirs: Maze Festival des jeux de Cannes 2006 Les Noirs jouent et gagnent Niveau *** Linares coupé en deux Le tournoi mythique, au cours duquel Garry Kasparov disputait l’an passé sa dernière partie officielle en passant le relais, bien malgré lui, au Bulgare Veseline Topalov, est scindé cette année en deux parties. La première moitié de l’épreuve a débuté ce week-end au Mexique et sera transférée à mi-parcours à Linares en Andalousie. En voyant la liste des participants, le lecteur comprendra pourquoi nous y prêtons une attention particulière : VeselineTopalov (Bul, 2801, n°1 mondial), Peter Svidler (Rus, 2765, n°3), Lev Aronian (Arm, 2752, n°4), PeterLeko (Hun, 2740, n°6), Vassili Ivantchouk (Ukr, 2729, n°7), Etienne Bacrot (Fra, 2717, n°12), t Teimour Radjabov (Aze, 2700, n°18) et Vallejo Ponce (Esp, 2650, n°53). Aeroflot : Victoire au sprint final du Géorgien Baadur Jobava. Sur les premières tables, trois victoires décisives ont chamboulé tout le classement. Le Moldave Bologan est le premier à s’imposer face l’exchampion de Russie Motylev. et commence à rêver à l’or, jusqu’à ce que Jobava fasse de même face à Malakhov. Un peu plus loin, Vachier-Lagrave crée la sensation en écrasant techniquement l’ex-champion junior de Russie, Artyom Timofeïev, 21ans. Classement final : 1-4e Jobava (Geo, 2614), Bologan (MDA, 2661), Sasikiran (Ind, 2670) et Mamedyarov (Aze, 2709) 6,5 pts sur 9 ; 5-23e Elianov (Ukr, 2655), Vachier Lagrave (Fra, 2542) etc. Solution du n° 5566:1.Te8! Une défense en rayon X! 1... Te1+ 2.Dxe1 et 1... Dxe8 2.Dg5#! 1... Fe6 2.Fe3. 0-1, Les noirs ab. > 800 m Lyon 4/8 50 km/h 22/28 E > 700 m > 800 m PAR JEAN-PIERRE MERCIER B ClermontFerrand 2/7 Besançon 1/5 > 800 m LES ECHECS N° 5567 A Dijon 1/5 Poitiers 5/10 Limoges 3/6 Hier Bonne Bonne > 600 m Strasbourg 3/9 Nantes 4/9 Hier Bonne Bonne Metz 3/7 Orléans -1/8 QUALITE DE L’AIR PARIS Paris 3/8 Rennes 3/7 loc loc H:I. Incite à se remuer. - II. Une construction qui ne respecte pas l’ordre habituel. - III. Cuvettes pleines de flotte. Note. - IV. Marcellus y vainquit deux fois Hannibal en Campanie. Evite au moins de perdre au change dans sa zone. - V. Commun s’il est tendre. S’écoule du tas de fumier. - VI. Pas tendres. Pronom. - VII. Plus de première fraîcheur à l’épellation. Par bonheur pour le verbicruciste, Philibert Delorme y fit œuvre châtelaine. - VIII. Peut valoir preuve. Ne se trouve pas ailleurs. - IX. Accaparées. - X. Bien jouée. Une pièce brillante où alternent couplets et refrain. - XI. Accompagne souvent le mirliton à la fête. V:1.Trèsremués. -2. Relèvedel’êtrechezHeidegger. 3. Tellesdescuresdecardinal. SivousdevezfaireSaintCyr, vous serez juste à côté. - 4. Mit en situation difficile. LebacilledeKochn’avaitqu’àbiens’ytenir. -5. Plein degrostasdegrains. toutàfaitconvaincu. -6. Pasgrasse. Façondeparler. -7. Symbole. Selonlalégended’une illustration de ce bon vieux Robert, la princesse Shubad y jouait de la harpe. Ne se défait pas. - 8. Bonbonne de grès. Base d’échanges à Accra. - 9. Mise en pièce. Solution du No 2812:H: I. Jette tout. II. Obsédante. III. Uranus. Il. IV. Rural. Ile. V. Dis. Claim. VI. Et. Mousse. VII. Remerciés. VIII. Emulai. Su. IX. Pétante. X. One. Terme. XI. Stressées. V:1. Jour de repos. 2. Ebruitement. 3. Tsars. Muter. 4. Tena. Mêla. 5. Edulcorants. 6. Tas. Lucites. 7. On. Iasi. Ere. 8. Utilisés. ME. 9. Télémesures. Rouen 2/6 1/11 8/15 7/12 4/13 Palma 4/13 Athènes 11/16 Palerme 13/15 Tanger Alger Tunis Malte 8/13 6/12 9/17 13/17 MÉTÉO Retrouvez la météo dans 2500 villes en France www.liberation.fr et dans le monde. Abonnez-vous à «Libération» ❐ 3mois 77¤ (505,09F) ❐ 6mois152¤ (997,05F) ❐ 1an296¤ (1941,63F) Livraison avant 7H30 sur Paris, IDF, Lille, Lyon, Toulouse, Nancy, Marseille, Aix-en-Prov., Toulon, Rennes et Nantes (y compris jours fériés). Abonnement postal sur le reste de la France. Tarifs hors métropole: nous consulter. NOM:. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom:. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ville:. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal:. . . . . . . . . . . . . . . . . Code d’accès portage:. . . . . . . . . . . . . . . . . . Téléphone:. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail:. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Joindre votre règlement (chèque à l’ordre de Libération), Libération, Service Abonnements B590-60732 Ste-Geneviève cedexTél. : 01 42 76 17 12 . OURS LIBERATION 11, rue Béranger 75154 Paris Cedex 03 Tél. : 01 42 76 17 89 Télex : 217 656 F Site web: www.liberation.fr Edité par la SARL Libération Sarl au capital de 8 726 182 ¤. RCS Paris : 382.028.199 Durée : 50 ans à compter du 3-06-91. Associée unique: SA Investissements Presse au capital de 5983045 ¤ Associés: - Holding financier Jean Goujon - Société Civile des Personnels de Libération - Soparic Participations P.D.G. Serge July. Directeur Général Louis Dreyfus. SARL Libération: Co-gérants Serge July et Louis Dreyfus. 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CCP 2240185 Paris.W Nous informons nos lecteurs que la responsabilité du journal ne saurait être engagée en cas de non restitution de documents dont il est le destinataire. culture LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 33 survole l’Algérie Arthus-Bertrand es photographies de l’Algérie vue du ciel donnent l’impression d’un pays presque désert, avec de rares humains et peu de repères temporels. On pourrait y voir la principale raison du succès du nouvel opus aérien de Yann Arthus-Bertrand. Ainsi, telle mère en Algérie peut contempler sa demeure d’en haut, son fils immigré en France montrer à ses enfants son lieu de naissance, et le rapatrié français d’Algérie pleurer la maison de ses rêves. Chacun a la mémoire de son pays fragmentée par sa propre histoire, et a toute liberté d’utiliser les illustrations d’Arthus-Bertrand, comme les pages d’un album sur lesquelles on colle les photos de famille, avant de les recouvrir d’un papier cristal protecteur. Les textes du journaliste Jean Daniel et de l’historien Benjamin Stora, en ouverture, ne trompent d’ailleurs pas sur la marchandise. Le premier écrit: «…Je ne retenais de l’Algérie, depuis ma ville natale, chantée par Gide (Blida, petite rose, «Ourida»), que les magies de Tipaza et de Djemila, amoureusement célébrées par Camus.» Le second commence par:«Je n’avais jamais vu la ville où je suis né, Constantine, de cette manière. Une ville tout entière tassée au sommet d’un bloc…» Esthétique sans drame. Premier chasseur d’images à avoir obtenu l’autorisation de mitrailler du ciel l’Algérie indépendante des militaires, Yann Arthus-Bertrand a eu le souci de l’équilibrer en cinq dimensions: bords de mer, villes, campagnes, montagnes et désert saharien. Face à la beauté et à la diversité des paysages, visions abstraites parfois hallucinantes, on reste sur ses gardes. Comme si on se refusait à oublier, sous la pure esthétique, les drames de la décolonisation pour les uns, les dix années terribles de guerre civile pour les autres. Le vieux pied-noir de Sidi Bel Abbès (surnommé jadis Petit Paris) ne pourra pas ne pas lâcher une larme à la vue de son «église coincée entre les habitations». Fascinante image d’un lieu de culte chrétien, comme encerclé, uniquement accessible par les demeures musulmanes. Mais les Algériens L Gros succès en librairie, «l’Algérie vue du ciel», a été initié par le président Bouteflika. ne pourront pas regarder les images de ces terres fertiles sans penser aux drames et massacres de familles paysannes arrachées à ces plaines, à ces vallées majestueuses, il n’y a même pas une dizaine d’années. Du succès de son livre, Yann YA N N A R T H U S - B E R T R A N D L’Algérie vue du ciel,par Yann Arthus-Bertrand, éditions de la Martinière, 338 pp., 42 ¤. Textes de Jean Daniel et Benjamin Stora. Légendes de Djamel Souidi. Arthus-Bertrand tient à garder deux images. Celle de ces Algériens et de ces Français qui ont pleuré ensemble dans les librairies en s’arrachant un album qu’il signait à tour de bras; et celle de la population actuelle se réconciliant avec elle-même.Lui, dont la famil- le yvelinoise n’a aucun lien historique avec l’Algérie, reconnaît volontiers que ces photographies sont une commande du chef de l’Etat Bouteflika et de son gouvernement, mais affirme qu’il a eu toute liberté de voler, qu’aucune photo n’a été consultée, ni évidemment censurée, par les autorités. Problème architectural. Si l’on devine derrière ce surprenant cadeau du pouvoir algérien, une volonté d’offrir une topologie photographique jusque-là inconnue du plus vaste pays du Maghreb – qui est aussi, et sur- tout, une manière de «voir de loin»un pays que ses dirigeants n’ont pas envie d’offrir de trop près aux regards scrutateurs –, on reste souvent saisi en feuilletant l’Algérie vue du ciel. A qui, en effet, appartient ce pays pour garder une urbanité si figée depuis la décolo- ● ● ● Sidi Bel Abbès. Une église «coincée» entre les habitations. 34 culture nisation de 1962, tout en intégrant dans le désordre des bâtiments recouverts de paraboles de télévision? On sait qu’au lendemain de l’indépendance, l’exode rural massif avait perturbé la configuration tant économique, que culturelle et sociétale de l’Algérie. On découvre que l’islam a ici, au contraire des autres pays arabes, un problème architectural. Les moins belles mosquées sont celles, gigantesques, construites après l’indépendance. On leur préfère, de loin, celles qui occupent des anciennes églises de l’Algérie française — ces ●●● LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 L’ours dort dernières ayant été cédées à de; et juste derrière elles, des l’Etat algérien après 1962, par hommes prient, tournés vers l’archevêché d’Alger. La Mecque, c’est vendredi. Nostalgie et incompréhension. L’Algérie ne cesse de fasciner, D’une certaine façon, les pho- parce qu’elle est une ancienne tographies de Yann Arthus- colonie qui n’a pas été «maBertrand confortent cette gnifiée» (c’est-à-dire défiguidée: les Algériens ont dû vivre rée) par le tourisme occidental deux vies. La leur propre, pas comme ses proches voisins, le toujours facile, et, par procu- Maroc et la Tunisie. ration, celle de ceux qui ont Les 230 photographies de été rapatriés il y a quarante- l’Algérie vue du ciel révèlent quatre ans, virant vite à la nos- aussi un pays mal aimé, incomtalgie. Comme l’atteste cette pris par les Algériens à cause photo surplombant la plage de leur nationalisme à fleur algéroise de Raïs Hamidou, de peau et abandonné par jadis nommée la Pointe Pes- les Français, minés par leur cade. Sur la plage, des fa- culpabilité nostalgique. • milles profitent de la baignaNIDAM ABDI Palmarès de compromis à la 56e Berlinale. «C’est un livre de réconciliation» ann Arthus-Bertrand, 59 ans, reçoit au siège d’Altitude, son agence de photos aériennes (plus de 400000 en stock), enracinée juste en face de l’hippodrome de Longchamp. S’y agite une ribambelle de jeunes polyglottes face à des écrans d’ordinateurs où s’affichent des images du monde entier, la réputation de Yann Arthus-Bertrand, quasi urbi & orbi, lui permettant désormais de lancer d’autres projets, comme GoodPlanet, inventaire planétaire des six milliards d’humains (1). S’il n’est pas le premier humain à avoir ravi d’en haut les subtilités terrestres – sans remonter à Nadar en ballon, on se souvient des vues incandescentes de l’Américaine Marilyn Bridges –, le succès de la Terre vue du cielreste un événement quasi industriel: trois millions d’exemplaires vendus, toutes éditions confondues. Paru à l’automne dernier, tiré à 30000 exemplaires, l’Algérie vue du ciel s’est, lui, retrouvé quasi épuisé en quinze jours. Succès imprévu, voire imprévisible, il a été réimprimé trois fois depuis fin novembre. Question: que donne la méthode YAB – abondance des couleurs, harmonie des sentiments, féerie des paysages – appliquée à l’Algérie, pays peu accessible aux photographes? «Ce n’est pas un livre comme les autres, répond aussitôt YAB, il a été porté par les gens. En Algérie, on aime la France, et en France, on a peur de l’Algérie, ça ne cesse de m’étonner…» Comment avez-vous travaillé? Je suis allé huit fois en Algérie, entre maijuin2004 et juillet2005, et grâce à Chérif Rahmani, le ministre de l’Environnement algérien, j’ai pu aller partout. J’ai été invité dans ce pays, mon livre n’est pas polémique. Mon rôle, c’est de montrer qu’on peut vivre ensemble. Qu’est-ce que je peux dire? J’ai survolé certains lieux de massacres, j’avais les larmes aux yeux, et je n’ai pas essayé de faire le malin… J’avais un plan de vol, et, comme dans tous les autres pays, je volais à 1000 mètres, parfois 300 mètres, ou plus bas, Y à 30 mètres. L’école coranique, par exemple, je suis à 30 mètres, ça fait du bruit… Voir un pays d’en haut, n’est-ce pas l’aseptiser? D’en haut, ça nettoie tout, on me le reproche toujours, j’idéalise un peu, mais c’était pareil avec la France. L’Algérie est un pays qui m’a touché, je ne fais pas un travail d’investigation, c’est tout. J’étais libre, je ne me suis pas censuré, j’ai même montré un bidonville… C’est vrai, j’ai un côté naïf et émerveillé, mais mon livre est destiné à ceux qui s’intéressent à l’Algérie. Qu’est-ce qui vous a le plus touché? Autour de Bal-el-Oued, les champs d’oliviers qui ressemblent à la Toscane. D’un seul coup, plus de routes goudronnées, plus de fils électriques… Je ne m’attendais pas à trouver une terre si cultivée, si entretenue, les champs sont nickel, pourtant c’est pauvre l’Algérie, c’est un pays riche avec des gens pauvres. Vous avez rencontré des photographes algériens? Je n’ai pas cherché à avoir des contacts. Moi, j’adore montrer, mais je suis un photographe qui n’aime photographier que les gens qui sourient. C’est un portrait de famille. Je le vis bien, je ne me sens pas loin des gens, pour preuve, avec l’Algérie vue du ciel, mes lecteurs viennent me voir jusqu’ici. Je suis comblé, je rencontre mon public. Je suis un photographe très populaire, je me sens proche des gens. Photographier des paysages, est-ce un signe de neutralité? J’ai beaucoup appris sur la guerre d’Algérie, j’ai lu Germaine Tillon. Photographier un territoire, ce n’est pas neutre. J’aborde ce pays avec un œil neuf, si ça rend les gens heureux, tant mieux. Moi, je n’ai pas toutes les clefs… Benjamin Stora a écrit le texte, il était plus à mêmede parler de son pays. C’est un livre de réconciliation, même si ce ne sont que des images et des paysages. • Recueilli par NIDAM ABDI et BRIGITTE OLLIER (1) www.yannarthusbertrand.org DR Yann Arthus-Bertrand détaille et motive sa méthode de travail: Ours d’or 2006, Grbavica de Jasmila Zbanic, fiction politique dans le Sarajevo de l’après-guerre. Berlin envoyé spécial e jury de la 56e Berlinale, shaker présidé par Charlotte Rampling, s’est-il distingué en décernant son ours d’or à Grbavica, premier film de fiction de la suractive Jasmila Zbanic, née en 1974, plasticienne, documentariste et fondatrice de l’Association des artistes à Sarajevo ? Grbavica est une fiction politique sur un sujet important (comment, dans le Sarajevo de l’après-guerre, une mère peut-elle révéler à sa fille de 12 ans qu’elle est le fruit d’un viol dans un camp tenu par des soldats tchetniks) mais, formellement, ternie par un trop grand classicisme. Une mise en scène qui ne l’aide pas à sortir du lot des films à thèse. A la truelle. Si ce prix illustre une édition plus politique que cinéphile, il sent aussi le compromis face à une sélection d’où ne dépassait pas de forte tête. Un temps pressenti par la rumeur, The Road to Guantanamo, de Winterbottom, se contente du prix du meilleur réalisateur avec son coéquipier Matt Whitecross. Le prix du jury s’est partagé entre Offside, comédie politique inspirée de l’Iranien Jafar Panahi, et En Soap,de la Danoise Pernille Fischer Christensen, sur l’attirance d’une femme pour L un travesti. Sympa, sans plus. Un prix d’interprétation féminine mérité est allé à Michaela Klinger, impressionnante dans Requiem, de HansChristian Schmidt. Son équivalent masculin est revenu à Moritz Bleibtreu, au charisme d’une saucisse de Salzbourg, pour l’inénarrable Particules élémentaires. Ce palmarès un peu coincé ne cache qu’en partie un certain état du cinéma mondial plus éclaté que jamais et qui ne va pas très fort. Les films sont certes toujours plus nombreux, mais la confiance dans le geste de mettre en scène semble disparaître, l’état de grâce du plan. Et les seules fictions qui ont réveillé le festival s’invitaient dans les débats d’actualité, se foutant souvent de leur forme, filmées à la truelle. Dans un monde où l’information est la donnée la moins rare, le cinéma, qui travaille lentement, dépendant d’une machinerie lourde, n’entend plus continuer à être tenu à l’écart d’une circulation toujours plus rapide des images. Symptôme de cet état des lieux: le documentaire, jadis parent pauvre, est redevenu celui qui empêche les cinéastes de dormir. Le cas Winterbottom illustre cette tendance: quand les cinéastes réagissent en journalistes. Karmakar a fait plus fort encore: en donnant à entendre le discours de l’imam radical de Hambourg, rejoué par un acteur, il a rendu au geste du cinéaste une fonction d’écoute que les médias trop pressés avaient négligée. Etre de son temps, voilà l’obsession du moment. L’auteur dans sa bulle. Du coup, le grand perdant de la 56e Berlinale est une certaine idée du cinéma d’auteur, plus formelle, détachée, dans sa bulle. Terrence Malick (présenté ici comme «eine grosse Poete des Kino» – on n’aurait pas dit mieux) est le seul de la promo 06 à avoir signé un film d’une beauté telle qu’il serait impoli de lui demander d’être contemporain. Hélas, derrière, ce furent souvent des films «de festival», sans originalité, dupliquant à l’infini les formes à la mode, jusqu’à donner l’impression d’un maniérisme en phase terminale, cuits à l’étouffée par le manque d’inspiration. A cela, le nouveau cinéma allemand aura échappé. Lucy, de Henner Winckler, Sehnsucht, deValeskaGrisebach,Requiem, de Hans-Christian Schmidt, Montag kommen, die Fenster de Ulrich Köhler, ont affirmé des personnalités plus larges que le pavillon allemand dans lequel on aurait tort de vouloir les enfermer. Les gagnants, ce sont eux. • PHILIPPE AZOURY culture 35 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Créé par Hergé il y a 77ans, Tintin parle enfin le moldo-valaque, via la sortie en Roumanie des Cigares du pharaon et du Lotus bleu, mais pas (encore) du Sceptre d’Ottokar, transposition de la monarchie roumaine des années trente en Syldavie. Tintin est déjà traduit en cinquante langues. A noter qu’une des injures d’Haddock est: «Moldo-Valaque!» Un film turc fait polémique en Allemagne Le dirigeant conservateur Edmund Stoiber a requis hier l’interdiction de diffusion dans les cinémas allemands d’un film turc traitant de la guerre en Irak jugé «antiaméricain et antisémite»: relatant les combats d’un Rambo des services secrets turcs contre les forces américaines en Irak, Irak, la vallée des loups, à ce jour le plus cher de l’histoire du cinéma turc, a drainé 200000spectateurs en Allemagne. «Ce film irresponsable ne sert pas l’intégration mais la haine de l’Occident», estime le dirigeant de la CSU. Le Conseil central des juifs d’Allemagne a aussi appelé à la censure du film. Une «fabrique de jazz» à Pantin Le festival Banlieues bleues, dont la 23e édition démarre le 25 février en Seine-SaintDenis, emménage à Pantin dans une ancienne usine transformée en «fabrique de jazz», lieu qui deviendra permanent fin février et recevra des musiciens toute l’année. Les locaux abriteront à terme, autour d’une halle, un studio d’enregistrement, une salle de répétition, ainsi qu’une salle de 200places. Batman versus Al-Qaeda Suivant l’exemple du film Opération Espadon, le prochain album du dessinateur star Frank Miller (dont SinCity a récemment été porté à l’écran) se propose de rectifier l’organisation terroriste Al-Qaeda. Sous le titre Terreur sacrée, Batman!, la chose prouvera qu’il n’y a que Batman pour «botter le cul» de Ben Laden. Théâtre. Depuis vingt ans, on monte beaucoup plus de pièces d’auteurs Les Rolling contemporains. Pas forcément pour le meilleur… Tour d’horizon parisien. Stones acclamés à Copacabana Y a-t-il un auteur bien vivant? La maison des morts de Philippe Minyana, théâtre du Vieux-Colombier, jusqu’au 11mars; rens.: 0144398700. Léviathan Coccyx,de Jean-Daniel Magnin, théâtre du Rond-Point, jusqu’au 25février, rens.: 08 92701603. e qui est bien au théâtre c’est que les comédiens sont vivants. Fringants ou décatis, sous les feux de la rampe, ils le pètent forcément, le feu. On les voit respirer, soupirer, transpirer… Mais les auteurs? Qu’est-ce qu’un auteur vivant? Il y a les classiques, morts depuis longtemps mais, revenants en rut, ils ont toujours quelque chose à nous dire. Et il y a cette catégorie étrange, «les classiques contemporains», biologiquement morts et en classe accélérée de «classiquation», ainsi Beckett, 100ans d’âge en avril, mort plus vivant que jamais. Et puis il y a les «auteurs vivants» et là, ça se complique. Pas très vifs. Une horde d’«auteurs vivants» a ainsi lancé une OPA (opération pro-auteurs) victorieuse sur le théâtre du Rond-Point. Le plus malin de tous, Jean-Michel Ribes, en est devenu le directeur. Pour monter des «auteurs vivants» au sens strictement biologique du mot. C’était leur cheval de bataille à tous, c’est devenu un piège. Au Rond-Point, on ne peut monter que des pièces d’auteurs pas enterrés. Roland Topor a donné sa dernière pièce à Ribes, lequel ne peut pas la monter puisque Topor n’est plus de ce monde depuis avril1997. De même pour Koltès, Lagarce, interdits de Rond-Point, ce qui n’est pas trop grave car on les monte souvent ailleurs. C’est plus dommageable pour des auteurs plus méconnus comme Ivane Daoudi, mort il y a douze ans dans la fleur de l’âge. De là à dire qu’au Rond-Point on joue régulièrement des pièces plus mortes que vivantes, il n’y a qu’un pas. Franchissons-le. La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), le Centre national des lettres (CNL) et autres instances fournissent bourses et aides diverses aux auteurs vivants et à leurs pièces. Tant mieux. On n’avait jamais lu et publié autant de pièces d’auteurs contemporains. On en monte beaucoup plus qu’il y a vingt ans. Tant mieux. Mais pour un vivant Novarina qui pulvérise le langage, combien d’auteurs qui semblent morts de leur vivant, écrivant des pièces besogneuses, petits bras? On n’a jamais vu sur scène autant de pièces molles C BRIGITTE ENGUERAND «Tintin» en moldo-valaque n million et demi de personnes a afflué samedi à Copacabana, sous le fameux pain de sucre de Rio, au show gratuit des Rolling Stones. «Hello Brasil!»a lancé le gymnaste jet set rocker Lord Jagger à une foule en délire de fans sans âge, en investissant en souplesse la gigantesque scène montée sur la plage pour le supposé plus grand concert des 44 ans de carrière du groupe mythique de Brian Jones. Comme en son hommage, les Stones ont entamé sur l’air d’It’s Only Rock and rollleur gigaconcert suivi par des milliers de personnes postées aux fenêtres d’immeubles de la célèbre plage, et sur une flottille de bateaux affrétés pour la circonstance. Ce concert était le premier en Amérique latine de la tournée mondiale «A bigger bang», enLa Maison des morts de Philippe Minyana, mise en scène par Robert Cantarella au Vieux Colombier. tamée l’an dernier aux EtatsUnis. Il aura mobilisé toutes –molles comme le sont les rait un vendeur d’aspirateurs. un lieu particulier et dans un les autorités gouvernemenviandes des jeunes cadavres. Sa mise en scène est, elle aussi, décor particulier.» Cherchez tales et policières de l’Etat de C’était un samedi, à 19heures, très vendeuse. «Contes et lé- l’auteur, mort ou vif… • Rio de Janeiro: plus de 15000 le TEP affichait une pièce d’un gendes de l’humanité», ainsi JEAN-PIERRE THIBAUDAT policiers avaient été déployés «auteur vivant», Eugène Du- l’auteur définit-il sa pièce. On dans l’Etat, dont 2050 rien rif. Autour de la place Gambet- l’a connu plus modeste et (1) Publié aux éditions Actes Sud qu’à Copacabana. Le récital, ta, les boutiques regorgent de mieux inspiré. La pièce a beau papiers. d’une vingtaine de morceaux, victuailles, les poulets rôtis se la jouer, elle manque de (2) Editions théâtrales. anciens pour l’essentiel, doit (3) Editions Actes Sud papiers. vous font de l’œil, les pont- muscles, de vertèbres, de sang. (4) Collections «Folio Essais» faire l’objet d’un film.• l’évêque se coupent en deux Reste l’actrice. D’après AFP inédit, chez Gallimard. pour mieux vous plaire, vous Au Rond-Point, le secrétaire êtes tenté mais, incorrigible général est aussi un auteur: soldat, le devoir vous appelle, Jean-Daniel Magnin. Moins vous résistez aux tentations prolixe que les deux précépour vous nourrir d’une tran- dents mais, comme eux, un che de pièce contemporaine. gars de la famille théâtre. Il a Le spectacle n’est pas com- souvent travaillé avec Philippe mencé depuis dix minutes que Adrien qui a monté l’une de ses vous savez déjà que votre esto- pièces, la Tranche. La nouvelle, Léviathan Coccyx(3),s’inspiDe l’auteur naguère maudit ne risque-t-on pas de passer à l’auteur re de la fin du couple Ceausescu fonctionnaire? C’est une question et du père Ubu. posée au théâtre d’aujourd’hui. Alléchant. Elle est mac va se tordre de douleur. montée par Agathe Alexis. Et En 1996, la pièce avait déjà été pourtant, rien ne marche. Les montée sous le titre Via Nega- torts sont probablement partiva(1), la revoilou vaguement tagés entre l’auteur et le metcorrigée, retitrée les Places de teur en scène. Cette fois, mêl’histoire. Les pièces bancales me les acteurs (méritants ne se bonifient pas en vieillis- comme on dit) ne sont pas sant. Avec le temps, Durif est vraiment à la fête. UN SPECTACLE DE UN SPECTACLE DE devenu comme un notable de Mauvaise pioche? Possible. P H I L I P P E G E NTY S O P H I E P E R EZ la piécette. Un fournisseur. Plus généralement, de l’auET M A RY U N D E RWO O D ET XAVI E R B O U S S I RO N Le spectacle du TEP aurait été teur naguère maudit ne un désastre s’il n’avait pas été risque-t-on pas de passer à 8 MARS AU 7 AVR. / SALLE JE AN VILAR 2 2 F ÉV. A U 2 3 MA R S / S A L L E G É M I E R sauvé, ici et là, par les acteurs. l’auteur fonctionnaire? C’est Comme souvent. une question posée au théâtre Vendeur. C’est pour une grande d’aujourd’hui. Qu’est-ce que le actrice, Catherine Hiégel, que théâtre?, se demandent Philippe Minyana a écrit la d’ailleurs Christian Biet et Maison des morts (2) en 1995. Christophe Triau. Ils essaient La pièce est présentée au de répondre en 1050 pages TEXTE théâtre du Vieux-Colombier dans un livre qui vient de paL I O N E L G O L D ST E I N SA B U R O T E S H I GAWA RA (annexe de la Comédie-Fran- raître(4). En voicila première A N D O N I S F O N IA DA K I S MISE EN SCÈNE , SCÉNOGRAPHIE çaise) dans une mise en scène phrase: «Le théâtre est d’abord de Robert Cantarella, metteur un spectacle, une performance T H I E R RY F L A MA N D SIDI LARBI CHERKAOUI en scène attitré de l’auteur. éphémère, la prestation de co2 2 F ÉVR I E R AU 1 2 MA R S / S T U D I O 2 2 AU 2 5 F ÉVR I E R / SALLE JEAN VILAR Dans le dossier de presse, Can- médiens devant des spectateurs tarella vend le côté pratique, qui regardent, un travail corpo- T H É Â T R E N A T I O N A L D E C H A I L L O T pluridisciplinaire et perfor- rel, un exercice vocal et gestuel, mant de la pièce, comme le fe- adressés, le plus souvent dans 0 1 5 3 6 5 3 0 0 0 · w w w . t h e a t r e - c h a i l l o t . f r U 36 culture LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Ray Barretto frappe au paradis Danse. Nouvelle création pour dix interprètes du chorégraphe belge. out le gang était là, ceux de Porto C’est de cette époque que date sa renRico, ceux de Cuba. Et parmi eux, contre avec Charlie Parker; alors qu’avec celui dont Bernard Lavilliers anun petit groupe il chauffe l’Apollo Bar nonçait le furieux solo de congas de New York pour la venue de «Bird»: en proclamant son nom: «Ray Bar«Quand il est arrivé, tout le monde est desretto!»En 1979, le tube la Salsaa introduit cendu de scène, mais Parker a posé la main auprès du grand public français ce musisur mon épaule et m’a dit: “Toi, tu restes.”» cien déjà idole des Antillais et des AfriAu tout début des années 60, Ray Barretcains de la métropole. La chanson fut ento délaisse le monde du jazz pour se registrée à New York, avec les musiciens mettre au rythme en vogue, la pachanga, du label Fania. Qui répandait à travers le successeur du mambo ou du cha-cha-cha, monde la bonne parole de cette exubéet sort son premier disque: Pachanga con rante musique latine, et qui avait imposé Barretto. toute une galaxie de vedettes: les chanAvalanche sonore. En 1962, il met sur pied teurs Hector Lavoe ou Celia Cruz, les piasa formation la Charanga Nueva, expénistes Larry Harlow ou Eddie Palmieri, le rimentant la fusion du rhythm’n blues percussionniste Ray Barretto. et des musiques caraïbes. Avec un tube Raymond Barretto était ce qu’on appelle à la clé: El Watusi, aujourd’hui encore un pur «Newyorican», né à Brooklyn propre à mettre le feu à une piste de dan(le 29 avril 1929) de parents portorise. Suivront d’autres classiques chéris cains. L’an dernier, il racontait dans ces des DJ branchés acid jazz : The Soul colonnes (1) son enfance pauvre dans le Drummers, Acid… Toute cette énergie ghetto, élevé par sa mère, et sa décision de musicale bouillonnante de New York est s’engager, à 17 ans, dans l’US Army faute bientôt canalisée par un jeune avocat qui d’autres perspectives. Il se retrouve ainsi a flairé son potentiel commercial: Jerry à Munich, où il découvre le be-bop, joué Masucci, qui crée avec le flûtiste Johnny par des soldats noirs qui tapent le bœuf Pacheco le label Fania. avec des Allemands férus de «musique L’étiquette salsa viendra à la fin des dégénérée». années 60. Lors des grand-messes de la Fania All Stars, formation qui réunit les Premier tambour. De retour aux Etatspointures maison, Barretto est un éléUnis, il achète son premier tambour. Le ment crucial, avec son jeu spectaculaire, trompettiste Dizzy Gillespie vient de provéritable avalanche sonore où la frappe voquer un séisme dans le monde du jazz puissante ne contredit pas l’approche en introduisant dans l’orchestre la permélodique. Celui qu’on surnomme «Macussion latine du Cubain Chano Pozo. nos duras» (mains dures) fait naître des Quand Pozo est abattu dans un bar pour milliers de vocations de frappeur de peau une embrouille de marijuana en 1949, le cubop(pour «cuban be-bop») s’est impo- Ray a vécu deux vies: une pour les musiques latines, l’autre pour le jazz. à travers la planète. Quand la maison Fania entre en décasé, et aucune formation ne peut se passer de son conguero. Barretto fait ainsi, au fil des années, Blakey, Max Roach, en parallèle à son activité dans dence, au milieu des années 80, Barretto retourne à dessessionspour Gillespie, Wes Montgomery, Ken- les orchestres de danse latinos de José Curbelo, ou de ses premières amours: le latin jazz. Coup de pouce de Lavilliers aidant, la France sera pour lui un terny Burrell, Freddy Hubbard, Lou Donaldson, Art Tito Puente (où il remplace Mongo Santamaria). rain particulièrement réceptif, avec ses festivals de jazz et son New Morning qui l’accueillent fidèlement chaque année. Ses derniers disques, relectures de classiques jazzy, seront d’ailleurs souvent des productions tricolores. Notamment les deux derniers: Homage to Art Blakey pour le label Nightbird (2003), et Time Was, Time Is, sorti par O +il y a un an. Quintuple pontage. En septembre dernier, Ray Barretto se produisait au festival Toros y Salsa de Dax et une mémorable descarga ( jam) avec le groupe cubain de rumba Los Papines avait clos en beauté la soirée. Ce devait être sa derd shaft. in Bl . .40 20 à ir Ce so nière prestation en France. . ng Ya Film de Li oqiang. Le 13 janvier dernier, Ray Ba ng Wa et ng Avec Yi Xia Barretto devait subir un quin03 20 nt Ours d’Arge c tuple pontage coronarien, En partenariat ave dont il n’allait pas surmonter les complications postopératoires. Il s’est éteint vendredi dans un hôpital du New Jersey. Ainsi se sont achevées ce que le musicien appelait ses «deux m .co -tv te ar w. ww vies»: celle consacrée aux musiques latines et celle dédiée au jazz.• vsprs,concept et mise en scène d’Alain Platel, Théâtre de la Ville, 2, place du Châtelet, Paris IVe, jusqu’au 25février à 20h30. Rens.: 0142742277. Avec «vsprs», Le percussionniste à l’énergie musicale bouillonnante est mort vendredi à 76 ans. Platel distrait DR T , d r o N u d e n i h En C la loi, c’est . i o s r u o p n u chac vivons curieux FRANÇOIS-XAVIER GOMEZ (1) Interview par Maya Roy dans Libération du 9 septembre 2005. ous avons eu l’occasion de défendre le travail du chorégraphe et metteur en scène belge Alain Platel, parfois accusé de faire de la «réalité-danse» de mauvais goût. Nombre de ses pièces eurent le mérite de renouveler la dramaturgie, d’introduire une danse libre sans carcan chorégraphique conventionnel, de brasser les genres (hip-hop, classique, disco…) et de donner à des interprètes non issus de conservatoires ou d’écoles (dont Sidi Larbi Cherkaoui) l’occasion de faire de la scène un lieu d’expression. Alain Platel n’a pas renoncé à ces principes de base, et les dix interprètes de sa nouvelle création, vsprs, sont toujours uniques et intrigants. Comme auparavant, les musiques du répertoire servent de tremplin à l’écriture d’un opéra contemporain avec présence des musiciens sur scène. Pour vsprs, ce sont les Vêpres de la Vierge de Monteverdi, que Platel sifflota enfant, objet d’un traitement jazzo-tzigane par l’ensemble baroque Oltremontano, sopranos, groupe de jazz Aka Moon et deux manouches. Les musiciens trouvent une niche à leur dimension dans le monumental décor de Peter De Blieck. Mais ce dernier est si imposant, et objet de tellement d’attention de la part des danseurs, qu’on le prend parfois en détestation. Montagne de chiffons ou de sous-vêtements blancs, ce décor se fait pente glissante ou crèche, ne laissant aucune chance de lui échapper. Et la danse ne nous est pas d’un grand secours pour saisir le propos de cette œuvre très spectaculaire, imprégné de visions de films de Jean Rouch sur la transe et de ceux du docteur Arthur Van Gehuchten, neurologiste du début du XXe siècle. Si certains duos se distinguent (les acrobates-contorsionnistes ou la référence à Bruce Lee), chacun semble tout de même vaquer à ses occupations. Jusqu’à une branlette qui réunit toutes les identités, donnant une image névrotique du monde, pas vraiment fausse mais simpliste. Ce spectacle amuse et distrait une partie du public. Cela semble suffire à Alain Platel et aux Ballets C. de la B. qui, depuis Lets op Bach, ont trouvé une structure qui encadre parfaitement leur propos, sans aucun risque de débordement.• N MARIE-CHRISTINE VERNAY guide 37 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Arts. A Valenciennes, une exposition collective sur le thème de la peau réunit une centaine d’œuvres. Création épidermique DR qu’il se connaît»(in l’Idée fixe). Composé d’une centaine d’œuvres contemporaines, toutes disciplines confondues, peinture, sculpture, photo, vidéo, signées d’une trentaine de noms (Bertrand Gadenne, Mona Hatoum, Giuseppe Penone…), l’ensemble rappelle l’importance ainsi que l’actualité du sujet et montre que les artistes ont beaucoup tourné autour de la peau, abordée sous toutes les coutures, textures, angles, en surface comme en profondeur, et pas toujours caressée, loin s’en faut, dans le sens du poil. Divisé en différentes étapes, le parcours aborde ainsi «La peau, surface d’affleurement» (Man Ray, Valérie Belin, Zhang Huan…), «La peau, lieu d’incarnation de la figure humaine» (Bill Viola, Antoni Tàpies, Louise Bourgeois…), «La peau, épreuve de contact» (Françoise Vergier, Bruno Carbonnet, Barry Flanagan…), «La peau, tissu du monde» (Robert Morris, Claire-Jeanne Jézéquel, Richard Coplans…). Dans quelques salles, les commissaires de l’exposition (Emmanuelle Delapierre, conservatrice du musée, et Marie-Claire Sellier, professeure d’histoire de l’art et psychanalyste) ont pris le parti de garder acrrochées certaines œuvres de la collection permanente (Rubens, Watteau, Carpeaux…) pour confronter les canons de la chair.• Chris, série «Dystopia», 1994, d’Aziz & Cucher. Valenciennes (59). Musée des Beaux-Arts, boulevard Watteau. Jusqu’au 13mars. Rens.: 0327225720. A signaler qu’un colloque se tiendra les 10 et 11mars en clôture de l’exposition. L e titre de cette exposition, «la Peau est ce qu’il y a de plus profond», est évidemment directement inspiré de la célèbre phrase de Paul Valéry: «Ce qu’il y a de plus profond en l’homme, c’est la peau… en tant HENRI-FRANÇOIS DEBAILLEUX World. La chanteuse portugaise pour deux soirs au Trianon. Mísia, parfum de mystère à Pigalle Le Trianon. 80, bd de Rochechouart, 75018. Ce soir et demain, 20h30. 34 à 39¤. Rens.: 0145170897. Et le 28/4 à Gennevilliers (92), le 2/5 à Valenciennes, le 4/5 à Evreux… ans Neige, le beau film qu’elle avait coréalisé, Juliet Berto hantait les coulisses du Trianon, à l’époque (1981) temple du ciné kung-fu, dans un palpitant jeu de pistes entre dealers et policiers. Avec ses fantômes et ses fictions, la vieille salle de Pigalle la Blanche est le décor rêvé pour le Drama Boxde Mísia, le petit théâtre littéraire et sentimental que dévoile la chanteuse portugaise dans son dernier disque, dédié à sa mère: «Elle a empli ma vie de musiques qui m’aident à survivre quand la vie se meurt», écrit-elle dans le livret du CD. Les boléros mexicains et les tangos argentins, chantés en espagnol, alternent avec les fados en portugais, et d’autres voix se mêlent à la sienne: celles de Fanny Ardant, Maria de Medeiros, Ute Lemper, Carmen Maura et Miranda Richardson qui, chacune dans sa langue, disent Fogo Preso, un beau texte du poète (et député européen!) Vasco Graça Moura. L’une d’entre elles sera-t-elle sur la scène du Trianon? Surprise. Au moment où la concurrence (la rivalité?) se faisait rude entre chanteuses de fado, Mísia a eu l’intelligence d’insister sur ce qui la rend unique: son univers, le jeu de miroirs qui cache et révèle à la fois des moments de sa propre vie, D Théâtre «Jouer juste», reprise de haute volée Lucernaire. 53, rue Notre-Dame-desChamps, 75006. «Jouer juste», de François Bégaudeau, mise en scène d’Isabelle Duprez. Du mardi au samedi à 20heures, dimanche à 17heures. Rens.: 0145445734. eprise au Lucernaire d’un des meilleurs spectacles du off avignonnais de l’édition 2005, Jouer juste n’a pas varié d’un iota, ce qui semble le propre d’un rite fétichiste incarné par un seul et unique pantin, l’acteur Régis Bourgade. Celui-ci joue juste le texte de François Bégaudeau, long monologue d’un entraîneur de foot devant ses joueurs (Frédéric, Michael, Eric et les autres), durant la pause qui sépare la fin du temps réglementaire du début des prolongations. On est en finale de la Coupe d’Europe. Il défend un jeu tout en passes, évitements, déplacements, démarquages, éminemment collectif, idéal géométrique qu’on nomme parfois «jeu à la nantaise». Sauf qu’il va plus loin, et que toute sa vie est contaminée par cette passion: son mode de vie, lui aussi, pratique l’évitement comme un des beaux arts. C’est le cas avec Julie, la fille qu’il aime, et qui n’a pu que le larguer en prenant la mesure de cette existence de manies, de phobies, d’organisations et de principes. Jouer justene désigne pas seulement une manière de tâter de la balle mais de concevoir ses rapports avec les autres. Tout en sachant que tout est voué à l’échec, miné par la mélancolie et la lâcheté humaine. Ce dandy du foot, c’est Régis Bourgade, jeune acteur brun tout en liane. Une sorte de Jean-Pierre Léaud des vestiaires. Bégaudeau, quant à lui, a publié un nouveau roman, Entre les murs.• R ANTOINE DE BAECQUE C H I C O A R AG à O COMMUNIQUÉ JUDICIAIRE Mísia a produit en 2005 Drama Box. parfois douloureux. Comme dans un mélodrame hollywoodien (ou almodovarien) où on n’est jamais si près de la vérité des êtres que dans le maquillage et l’artifice.• F.-X.G. «Par arrêt du 12 janvier 2006, la 11ème chambre de la Cour d’Appel de Paris, section B, a condamné Serge JULY, directeur de la publication du journal LIBÉRATION et Karl LASKE, journaliste, pour avoir diffamé Philippe JAFFRE, dans un article paru dans le quotidien LIBÉRATION, le 17 octobre 2002, intitulé “JAFFRE dans les affres de l’affaire ELF”». 38 guide Paris Daniel Mille Accordéoniste tout en nuances, le Grenoblois à l’univers pastel, après ses expériences autour des mots d’Aragon et d’Apollinaire auprès de Jean-Louis Trintignant, revient avec un nouvel album Après la pluie etretrouveStéphane Belmondo (bugle) et Rémi Vignolo (ctb). New Morning, 7-9 rue des Petites-Écuries, 10e. 01 45 23 51 41. Ce soir 21h. Soutien aux musiciens de la Nouvelle-Orleans Marc Perrone Histoires d’hommes Avec son accordéon diatonique qui a accompagné Bernard Lubat, Michel Portal, Louis Sclavis et bien d’autres, Marc Perrone prolonge l’aventure entamée au Zèbre, il y a trois mois à raison d’un concert chaque lundi contant les histoires de Son Ephémère Passion. Zèbre de Belleville, 63 bd de Belleville, 11e. Rens. 01 43 5555 55. Ce soir 20h. 20/15¤. Un texte de Xavier Durringer écrit pour Judith Magre. Mise en scène Michel Didym. Avec Mauricio Romero à la contrebasse. Théâtre Pépinière Opéra, 2e. 01 42 61 44 16. Mar-sam 21h, sam 18h. A THÉÂTRE Paris Eva Perón Soirée «en direct de la Nouvelle-Orléans» avec Tom Mc Dermott, Evan Christopher, Leah Chase… organisée par Life live dans le cadre de l’accueil en résidences de musiciens louisianais par la Ville de Paris. Sunset, 60 rue des Lombards, 1er. 01 40 26 46 60. 10¤. Ce soir 21h. De Copi, mise en scène Marcial Di Fonzo Bo. Spectacle en espagnol surtitré en français. Théâtre de la Bastille, 76, rue de la Roquette, 11e, 0143574214. Mar-sam 19h30, dim 15h30. Du 20/2 au 15/3. P CHANSON Traduction des Psaumes Henri Meschonnic, mise en scène Claude Régy. Avec Valérie Dréville. Théâtre national de la Colline, 15 rue Malte-Brun, 20e. 01 44 62 52 52. Marsam 20h30, dim 15h30. Jusqu’au 23/2. Paris Catimini A découvrir, les facéties chantées a capella de cette troupe vocale quelque part entre les Iles Galapagos et Henri Salvador, quatre filles et un garçon dans le vent. Théâtre Essaïon, 6 rue Pierre au Lard, 4e. 01 42 78 46 42. 20h. Jusqu’au 25/2. Comme un chant de David Le Roi Lear De Shakespeare, mise en scène André Engel. Avec Michel Piccoli dans le rôle-titre. Odéon-Théâtre de l’Europe aux Ateliers Berthier, 17e. 01 44 85 40 40. Mar-sam 20h, dim 15h. Jusqu’au 25/3. Le fil du Ciné 08 92 68 03 03* TOUT LE CINÉ, RIEN QUE LE CINÉ *Editeur Camérapress (0,34¤ quelle que soit la distance) Le trio en mi bémol L’unique pièce d’Eric Rohmer, mise en scène Nathalie Conio. Théâtre du Renard, 12 rue du Renard, 4e, 01 42 71 46 50. Mar-sam 19h. Jusqu’au 18/3. La Folle et Véritable Vie de Luigi Prizzoti D’Edouard Baer. La Cigale, 120, bd de Rochechouart, 18e. A 20h30, jusqu’au 26/2. Rens. 0892683622. Repas après le spectacle (17¤). Jouer Juste De François Bégodeau, ms Isabelle Duprez. Avec Régis Bourgade. Lucernaire, 53 rue NotreDame-des-Champs, 6e. 01 45 44 57 34. Mar-sam 20h, dim 17h. Jusqu’au 25/2. Pantin Je cheminerai toujours Un nouveau parcours initiatique par la compagnie du Voyage intérieur, mise en scène de Léa Dant. Salle Jacques-Brel, 42, avenue Edouard-Vaillant. 0140037575. Quatre représentations par jour à partir de 15h. Jusqu’au 1/3. D À REPÉRER Paris Vidéodanse 150films dont 70 inédits au menu de cette vingt-quatrième édition. Centre Pompidou, Foyer, niveau 1. 0144781233. 11h-21h. Jusqu’au 20/2. BIENTOT NUITS BLANCHES C P PHOTO SROCK CHANSON «Les grandes années» Par ÉRIC DAHAN Paris Claire Diterzi Café de la Danse, les 22 & 23/2. Rens. 01 47 00 57 59. Christer Strömholm Rétrospective du Suédois mort en 2002. Jeu de Paume, site Sully, 62 rue Saint-Antoine, 4e. 01 42 74 47 75. Mar-ven 12h-19h, sam-dim 10h-19h. Jusqu’au 19/3. Antony Raymond Voinquel «Je sais saluer la beauté». Maison des Arts, 20 rue Velpeau, 01 46 74 91 24. Jusqu’au 12/3. Gap Anne Lise Broyer, Nicolas Comment Carte blanche. La galerie du théâtre, 137 bd G. Pompidou, 04 92 52 52 52. Jusqu’au 27/2. Louviers The Subways Joseph d’Anvers La Maroquinerie, le 22/2. Rens. 01 40 33 30 60. Européen, les 27 et 28/2. Rens. 01 43 87 97 13 . Depeche Mode Alain Souchon Paris- Bercy, les 21, 22 (complets) et 23/2. 0892 692 392 (0,34 ¤/mn). Olympia, les 27 et 28/2, du 1er au 4/3 puis du 6 au 9/3. 08 92 68 33 68 (0,34¤/mn). Nine Black Alps Agnès Jaoui La Boule noire, le 23/2. Rens. 01 49 25 89 99. Européen, les 14, 15 & 16/3. Rens. 01 43 87 97 13. Arctic Monkeys Philippe Katerine Trabendo, le 24/2. Rens. 01 49 25 89 99. La Cigale, le 21/3. Rens. 01 49 25 89 99. White Hassle Q WORLD La Maroquinerie, le 24/2. Rens. 01 40 33 30 60. Arab Strap La Maroquinerie, le 26/2 . Rens. 01 40 33 30 60. Photos de famille The Magic Numbers Artistes contemporains. Musée de Louviers, place Thorel, 02 32 09 58 55. Tlj 14h-18h, sf mar. Entrée libre. Jusqu’au 26/2. Café de la Danse, le 28/2. Rens. 01 47 00 57 59. JEXPO Paris Charlotte Salomon Avant sa mort en 1943 à Auschwitz, la jeune femme consigne sa vie dans un manuscrit de 1325 pages, peint et écrit. Musée d’Art et d’Histoire du judaïsme, 71 rue du Temple, 3e. 01 53 01 86 53. Lun-ven 11h-18h, dim10h18h. Jusqu’au 21/5. Rennes Revolt, She Said! L’expo fait dialoguer féministes des années 70 et artistes d’aujourd’hui. La Criée, centre d’art contemporain, place Honoré-Commeurec, 02 23 62 25 10. Jusqu’au 12/3. Gravenhurts Café de la Danse, le 5/3. Rens. 01 47 00 57 59. The Nits Le Trianon, le 6/3. Rens. 01 44 92 78 04. René Lacaille & Fantazio Point Ephémère, le 21/2. Rens. 01 40 34 02 48. Cheikh Lô New Morning, le 7/3. Rens. 01 45 23 51 41. Adalberto Alvarez New Morning, le 9/3. I GROOVE Souad Massi One Self Diego el Cigala Le Triptyque, le 23/2 Rens. 01 40 28 05 55. Bauchklang Grand Rex, le 16/3. Rens. 01 45 08 93 89. Tomatito Cirque d’Hiver, le 27/3. Rens. 01 47 00 12 25 Cirque d’Hiver, le 28/3. Rens. 01 47 00 12 25 Elysée-Montmartre, le 28/2. Rens. 01 55 07 06 00. BJAZZ Coldcut Nguyen Lê Nouveau Casino, le 28/2. Rens. 01 43 57 57 40. Mattafix La Cigale, le 3/3. Rens. 01 49 25 89 99. New Morning, le 24/2. Rens. 01 45 23 51 41. Infadels The Bad Plus La Maroquinerie, le 6/3 . Rens. 01 40 33 30 60. New Morning, le 1/3. Rens. 01 45 23 51 41. CADEAU ABONNES Vous êtes abonné, découvrez Chevrotine, le nouvel album d’Holden. 100 CD à gagner.Pour participer, renvoyez ce coupon à: Libération Holden Ortim 60508 Chantilly cedex. Expédition sous un mois. Tél. : 01 42 76 17 12 ou [email protected] N° abonné Nom/prénom Adresse CP/ville Courriel Date de naissance Vous disposez d’un droit d’accès, de rectification et de suppression de ces informations (art.27 de la loi informatique et libertés). Les informations recueillies sont destinées exclusivement à «Libération» et ses partenaires commerciaux sauf opposition de votre part en cochant cette case l y avait plus qu’un air de printemps précoce sur la plage de Malibu et Josh disait que la terre avait déjà commencé à brûler au moment où Carlos revenait s’asseoir après avoir nourri les mouettes au vol pendant près d’une heure. Elle racontait que Claude Pétin avait ressurgi et on réalisait qu’on ne l’avait plus revue depuis un dîner à l’Arc avec Grace Jones, il y a près de dix ans, puis on rentrait à Westwood où on trouvait un message de Jessica qui venait de quitter New York, où elle avait vu Prince accompagner Tamar au Nokia Theater. «Le show a commencé à 0h30. Il est entré seul sur un riff époustouflant, costume orange sur chemise noire, et chaussures vernies à talons également orange. Tamar et ses deux choristes l’ont rejoint ensuite, leurs robes très sexy flottant autour d’elles.»Suivait une description du concert avec une première partie «soul music, slows, ballades et centrée sur Tamar»et une seconde plus rock et funky: «Prince était le patron et dirigeait tout.» Jessica notait qu’il jouait sur une Fender Stratocaster, d’où des «solos de guitare fantastiquement hendrixiens»et qu’il faisait chanter à plusieurs reprises le «Ohého»du Magicien d’Oz au public mais sur une mélodie Carlos sur la plage de Malibu. différente de sa chanson, It’s Gonna Be a Beautiful Night. Comme dans sa maison de West Hollywood, Prince avait joué de nombreuses reprises dont le Don’t Stop ‘Til You Get Enoughde Jackson mais également son propre Partyman, A Love Bizarreet un frénétique I Want To Take You Higherde Sly Stone, laissant Jessica conquise: «Le fantôme de Jimi nous a rendu visite.» Le lendemain, on ralliait Paris où Romain donnait un banquet pour ses 28ans dans le grand salon aux verrières chinoises du Président, nombre de convives s’envolant le jour suivant pour l’anniversaire d’Erasmus à Stockholm, tandis qu’Emmanuel S.bondait le Saint pour fêter la fin de l’enregistrement de son nouvel album. Le week-end resterait marqué par la performance de Yoko Ono au Châtelet, le jour même de ses 73ans, accompagnée par son fils Sean à la batterie et Vincent Gallo à la guitare. Rufus Kellman était fasciné par son manteau en vinyle et son jean noir, ses cris et gémissements au micro et cette chaise qu’elle essayait de grimper, comme pour atteindre le signe «Peace»suspendu: «I was waiting forWalking on Thin Ice, but she totally made my day», soupirait d’émotion le styliste scandinave. En rentrant, on trouvait un nouveau message de Jessica: «J’ai visionné la vidéo de Sly Stone aux Grammies. J’étais très triste. Passé la surprise du look, c’est un homme diminué, qui arrive à peine à chanter, “pianote” sans savoir ce qu’il fait, et ne peut même pas redresser la tête. Il avait tellement de grâce et de classe dans les grandes années. Ces images m’ont rappelé le film de David Lynch, Elephant Man.»• I E R I C DA H A N BJAZZ LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Rebonds 39 L’ex-Premier ministre libanais laisse un pays segmenté en une multitude de communautés. Le déséquilibre fait partie du legs de Rafic Hariri nels de guerre libanais sans égard pour Par leurs victimes sanctionne la déliquescen- RENÉ NABA ce morale de la nation. journaliste, La prorogation du mandat de M. Elias écrivain. Hraoui en 1995, un homme d’une plus grande docilité face à M. Hariri, n’avait pas donné lieu à une telle frénésie juridico-diplomatique. Les remous politiques suscités à la faveur de l’échéance présidentielle de 2004 visaient-ils dans cette perspective à infléchir la position officielle libanaise sur la question palestinienne, à gommer le prestige qu’a récolté le président Emile Lahoud de son habile gestion du dossier du Sud Liban –seul dirigeant arabe à avoir obtenu le désengagement militaire israélien de son territoire national sans l’assortir d’un traité de paix? Cherchaient-ils à vaincre la résistance des «Etats parias» du MoyenOrient, la Syrie et l’Iran, les anciens alliés de la guerre Irak-Iran (1979-1989) vainqueurs a posteriori d’un Saddam Hussein destitué par ses anciens protecteurs américano-saoudiens? Le désarmement du Hezbollah réclamé par Washington a-t-il pour seul objectif de satisfaire aux besoins de sécurité d’Israël? Aurait-il comme objectif Au vu des dernières élections législatives, sous-jacent de reléle martyrologue libanais semble être devenu guer au second un argument de brocante pour la survie d’une plan le problème de l’énorme dette caste politique discréditée. générée par la polisident effectif du Liban, un homme que tique corruptive de Rafic Hariri en condiles chrétiens accusaient en catimini tionnant le redressement économique d’«islamiser la terre libanaise»en raison du Liban au désarmement militaire de la de ses achats massifs de biens fonciers, milice chiite? De compenser la perte de participe d’un dévoiement de la pensée. l’influence sunnite en Irak par un renforQue l’alliance entre l’un des rares diri- cement sunnite concomitant au Liban, geants arabes se réclamant du socialisme, dans le but de donner satisfaction à l’AraWalid Joumblatt, et un parfait représen- bie Saoudite et aux autres Etats sunnites tant du pancapitalisme pétromonar- alliés de l’Occident, et, par la réactivation chique proaméricain ait abouti au terme d’une alliance maronite sunnite sous de son processus, en juin 2005, à l’évic- égide occidentale, de viser un étrangletion de la scène politique de l’ancien Pre- ment de la Syrie? mier ministre Salim el-Hoss et du député De même, la France se serait honorée si nationaliste Najah Wahim, deux forts elle avait réclamé avec la même fermeté symboles de la lutte anticorruption, por- une enquête internationale pour conte en germe la marque d’une dégénéres- naître le sort d’un de ses ressortissants, le cence de la vie démocratique du pays. juge Bernard Borrel, mystérieusement Qu’une telle alliance ait entraîné l’élimi- décédé le 18octobre 1995, à Djibouti; ou si nation des deux seuls parlementaires qui elle avait diligenté non une enquête inn’aient jamais pratiqué la vendetta (Omar ternationale, mais simplement une enKaramé, ancien Premier ministre lui- quête locale sur le territoire français pour même et frère d’un Premier ministre as- révéler les conditions de la disparition de sassiné, Rachid Karamé, et Soleimane Mehdi Ben Barka, figure de proue de l’opFrangieh dont toute la famille a été déca- position marocaine, disparu à Paris depitée par les milices chrétiennes), que cet- puis quarante ans avec la complicité te double éviction se soit accompagnée du d’agents français. blanchiment simultané de tous les crimi- Au vu de cette politique de duplicité, il est rincipal latifundiaire du pays, propriétaire de près du cinquième de la superficie d’un minuscule Etat de 10000 km2, par ailleurs propriétaire d’un empire médiatique surpassant l’ensemble du parc libanais, disposant de surcroît d’une fortune personnelle supérieure au produit national brut, monopolisant en outre l’expression politique de l’islam sunnite libanais, Rafic Hariri était d’un calibrage conforme aux spécifications de ses mentors, son parrain saoudien et le protecteur américain de la pétromonarchie. Dans un pays désarticulé et segmenté en une multitude de communautés religieuses, sa protubérance paraissait inadaptée aux structures libanaises. A défaut de contrepoids, faute de balises, ce vizir qui se rêvait à la place du grand vizir, électron libre aux effets centrifuges, a pu paraître comme un facteur de déséquilibre, un instrument de déstabilisation pour le Liban et son voisinage immédiat. Que le combat contre l’arbitraire ait été mené par cet homme-là qui s’est longtemps vécu abusivement comme le pré- P à craindre que le milliardaire libanosaoudien, ancien partenaire de la Syrie, reconverti en fer de lance du combat antibaasiste, n’apparaisse rétrospectivement comme une victime majeure du discours disjonctif occidental, discours prônant la promotion des valeurs universelles pour la protection d’intérêts matériels, discours en apparence universel mais à tonalité morale variable, adaptable en fonction des intérêts particuliers des Etats et des dirigeants. Brouillée avec les Syriens et les Iraniens, privée de relais auprès des chiites tant en Irak qu’au Liban, amputée de ses précédents vecteurs –les hommes providentiels qui ont maintenu la compétitivité des entreprises françaises sur les marchés arabo-africains, l’Irakien Saddam L’ŒIL DE WILLEM Hussein, le Libanais Rafic Hariri, le Zaïrois Mobutu, le Togolais Eyadema–, la France paraît à la dérive, comme à la remorque de l’Amérique, pour la récupération des miettes du marché irakien. De surcroît, le bras de fer engagé entre le président français Jacques Chirac et son homologue syrien Bachar al-Assad s’est, pour l’instant, soldé par l’élimination physique de certains des principaux relais de la France au Moyen-Orient: le Premier ministre Rafic Hariri, le journaliste franco-palestinien Samir Kassir et le journaliste francophile Gébrane Tuéni. Traumatisé par l’autodécapitation de ses chefs charismatiques, le leadershipchrétien, principalement maronite, balance entre patriarcat et matriarcat, entre la référence constante au chef spirituel ● ● ● 40 Rebonds de la communauté maronite, le patriarche Boutros Sfeir, et le tempo politique imposé par les veuves des présidents assassinés du Liban, Bachir Gemayel et René Mouwad, soutenues à distance par l’épouse du dirigeant des Forces libanaises (milices chrétiennes) Samir Geagea, libéré en juillet 2005 au terme d’une dizaine d’années d’incarcération. Depuis le 14février, le fils de Rafic Hariri, Saad, les a rejointes, propulsé à la tête de la coalition paternelle par fidélité à la mémoire du «président martyr». Au vu des dernières élections législatives, les premières de l’ère post-syrienne, le martyrologue libanais semble être devenu un argument de brocante pour la survie d’une caste politique discréditée. Signe d’un désarroi certain, l’absence de renouvellement du personnel politique se traduit par le retour en force du religieux en tant que substitut au politique et par la confirmation de la féodalité clanique en guise de leadership. Sauf àvouloir provoquer l’exode final des chrétiens arabes, le leadership chrétien libanais, en particulier maronite, serait avisé de se vivre non comme la pointe avancée de l’Occident en terre arabe, mais plutôt comme exerçant son pouvoir symboliquement par délégation des autres communautés chrétiennes du monde arabe, et de prendre la mesure du fait que ses options se répercutent d’une manière ou d’une autre sur ses coreligionnaires. Sauf àconsidérer la chrétienté comme relevant du patrimoine exclusif de l’Occident, la vocation première des chrétiens arabes est d’être partie pleinement prenante au combat national arabe pour la restauration de la dignité et de la souveraineté nationale de l’espace arabe, et non comme le fer de lance du combat pour leur soumission à l’ordre américain, une fonction dévolue traditionnellement à Israël dont ils seraient à nouveau les supplétifs déconsidérés. La démocratisation de la vie arabe sera l’œuvre des Arabes ou ne sera pas. En aucun cas elle ne devra se faire à l’ombre des baïonnettes américaines. En tout cas certainement pas avec les chrétiens arabes dans le rôle de contremaîtres. Il est des blessures qui s’ulcèrent avec le temps au lieu de se cicatriser. L’histoire est comptable des comportements désinvoltes lourds toutefois de servitudes futures.• ●●● Auteur deRafic Hariri, un homme d’affaires Premier ministre (L’Harmattan, 1999). LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Un juge devrait avoir une formation éthique qui ne le limite pas à la seule technique. Outreau, notre oubli de ce qu’est l’humanité Par MICHELA MARZANO normalienne, docteur en philosophie, chercheuse au CNRS. epuis quelques semaines, tout le monde titative. La vérité de la science. La vérité de la en cause.»Mais l’a-t-on regardé? A-t-on été cajuge. Les acquittés d’Outreau, bien sûr, technique. C’est cette vérité-là qui est un pable d’aller au-delà de son discours? A-t-on évine serait-ce que parce que ce sont eux les «mythe». La vérité judiciaire sera toujours une té de prendre au pied de la lettre ses paroles et de victimes innocentes de ce «système in- vérité imparfaite, car humaine. Il faut le dire et le faire donc exactement comme lui, quand il prefernal». Mais aussi les journalistes et les redire. Car comment ne pas comprendre que nait au pied de la lettre les accusations des uns et politiciens, les experts et les honnêtes gens. Le tant qu’on cherche la vérité scientifique, on reste des autres? plus souvent avec la même inhumanité et les prisonnier du même mécanisme? On veut réfor- A plusieurs reprises, la parole de Fabrice Burgaud mêmes partis pris qui ont transformé l’affaire mer le système pour éviter dans le futur des dé- tremblait, s’étranglait, tombait en poussière… A d’Outreau en une catastrophe. On demande ré- sastres semblables. Mais tant qu’on attend le sys- plusieurs reprises, ses yeux s’écartaient en laisparation, on cherche les coupables, on désire tème parfait, on montre ne rien comprendre à ce sant voir son désarroi… Pouvait-on demander quelque chose d’autre? Tout était là. Son humaqu’ils payent. On accuse avec véhémence la Jus- qu’est l’humain. tice au nom de la justice et de l’humanité. Et c’est Alors que faire? On dit qu’à l’Ecole nationale de nité tout d’abord. Car l’humanité s’exprime beauainsi qu’on tombe progressivement et inexora- la magistrature il faut des formations à «l’hu- coup plus dans les défauts d’un discours qui ne main». On n’apprend pas l’humanité – on est hu- convainc pas, que dans des formules de regrets et blement dans le piège de l’inhumanité… Les jugements tombent vite. Chacun a ses solu- main. Tout le monde l’est. Mais, hélas, on peut ap- d’excuses fabriquées avec habilité et sûreté. Mais tions. «C’est le fonctionnement de l’instruction prendre à oublier son humanité sous le couvert pour le comprendre, il faudrait être soi-même qu’il faut repenser.» «C’est la culture du doute de la scientificité et de la vérité. C’est pourquoi un humain. Au nom de l’humanité, on l’acqu’il faut apprendre.» Mais ce n’est pas cuse. Mais dans les accusal’existence d’erreurs qui prouve qu’un sys- N’importe quelle réforme du système ne nous mettra tions, encore une fois, c’est l’intème fonctionne ou pas. Dans tout systèpas à l’abri des erreurs et des défaillances humaines. humanité qui triomphe. La me, à un moment où l’autre, il y a des erCar le propre de l’humain, c’est de commettre même inhumanité du procureurs. Croire que des réformes du reur… lorsqu’il répond devant système peuvent nous mettre à l’abri de des erreurs… la commission avec maîtrise et l’erreur, signifie n’avoir rien compris du tout. Cela signifie aller droit vers d’autres «dé- juge devrait avoir une formation éthique qui lui contrôle, lorsqu’il apparaît bien expérimenté, sastres». Car ce que révèle de terrible l’affaire donne un recul suffisant pour ne pas tomber lorsqu’il propose comme explication du désastre d’Outreau pour notre société, c’est bien autre dans le piège de la technique. Mais les juges d’au- le «mythe de la pédophilie»! S’est-il bien rendu chose: notre oubli de ce qu’est l’humanité. N’im- jourd’hui ont-ils encore, comme jadis un La Boé- compte de ses affirmations hasardeuses? Comporte quelle réforme du système ne nous mettra tie ou un Malesherbes, une culture philoso- ment appeler «mythe»quelque chose de bien réel pas à l’abri des erreurs et des défaillances hu- phique? Savent-ils que les grands juges ont et de terrible? Comment oser mettre en doute «la parole des victimes»? maines. Car le propre de l’humain, c’est de com- toujours été avant tout des humanistes? Depuis toujours, la philosophie s’oppose à la ré- Si le résultat de tout cela devait être le «doute» demettre des erreurs… Alors, que faire? Faut-il, comme on l’entend par- duction de l’humain à une simple «matière» d’ex- vant la parole des victimes, alors on aura atteint le tout, introduire la «culture du doute»? Je «dou- pertise et de savoir, et apprend la complexité du maximum d’inhumanité. Car si la parole des victe» fort de la pertinence de cette formule. S’est- vécu. Mais aujourd’hui, on préfère les «experts» times – comme toute parole humaine, comme la on interrogé sur la fonction même d’un juge? Un aux philosophes pour former les juges. N’est-il parole du juge Burgaud ou celle du procureur… – juge est celui qui tranche, décide, partage. Un ju- pas temps de s’interroger sur cette «inhumani- ne doit pas être prise au pied de la lettre, elle doit ge est celui qui cesse de douter, justement parce té» technique de ceux qui «savent», qui font des toujours être prise au sérieux. Car elle dit bien des qu’il faut trancher. Même si le fait de trancher, «statistiques», qui donnent des «certitudes»? choses, tout en en cachant d’autres. comme tout autre acte humain, n’est pas indem- Car c’est encore au nom des certitudes qu’on pré- Réfléchissons alors, bien sûr, à des réformes du tend aujourd’hui «juger» Fabrice Burgaud et plus système judiciaire. Mais toute réflexion profonne de la faute et de l’erreur. Juger, c’est écarter les doutes. Mais écarter les généralement la justice. Après l’audition du juge de ne pourra pas se passer d’une prise de doutes ne signifie pas aboutir à la Vérité. Il fau- d’instruction, on n’a pas évité à nouveau le piège conscience de la perte d’humanité que révèle, drait peut-être tout simplement arrêter avec le des certitudes. «Il manque d’humanité.» «Il n’a dans notre monde, cette quête dangereuse de mythe de la vérité. Une vérité mesurable et quan- pas d’affects.» «Il n’est pas capable de se remettre perfection et de vérité… • D Offre découverte ❏ Oui, Testez le confort de l’abonnement et recevez chaque jour Libération chez vous. • Nom/prénom je souhaite profiter de votre offre spéciale et recevoir Libération chez moi pendant 2 mois à 49 ¤ (au lieu de 62,40 ¤ pour 52 numéros). 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Tél. 01 42 76 17 12 / Fax. 01 42 76 11 30 e-mail : [email protected] Offre reservée aux nouveaux abonnés en france métropolitaine, valable jusqu’au 30/04/2006. (1) 8 h30 samedis et jours fériés. (2) A l’exception de quelques communes. Nous téléphoner pour connaître ces villes. Vous disposez d’un droit d’accès, de rectification et de suppression de ces informations (art.27 de la loi informatique et libertés). Les informations recueillies sont destinées exclusivement à «Libération» et ses partenaires commerciaux sauf opposition de votre part en cochant cette case AJ2006 2 mois à 49¤ Rebonds 41 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 QUOTIDIENNE Par PIERRE MARCELLE Une leçon d’Allemagne «Clemenceau», le coût d’une vie atmosphérique en améliorant la qualité de l’air uperbe victoire d’associations françaises peut passer par l’exigence de normes sur les rejets antiamiante et de Greenpeace, ce qui reste de gaz polluants, normes dont la mise en œuvre est du Clemenceauva donc faire route vers coûteuse. Ou encore, vacciner l’ensemble des Brest. Superbe victoire, aussi, de l’éthique, ’un côté, il y a le enfants contre certaines maladies mobilise des tant il est choquant de faire faire, par vacarme extravagant ressources importantes, mais limite le nombre d’autres travailleurs soumis à des normes de que font les stratèges d’infections fatales. Dans chacun des cas, des vies sécurité peu contraignantes, le sale boulot de du Pentagone et des étatspeuvent être sauvées, à un certain coût. Ce coût, «déconstruction» de ce qui fut un superbe navire. majors coalisés pour rapporté au nombre de vies sauvées, renseigne sur Et pourtant… pourtant, quelques bruits viennent justifier l’invraisemblable la valeur implicite accordée à la vie humaine ou, gestion, depuis deux ans, du troubler ce triomphe de la morale: ici, le maire de plus précisément, sur le consentement à payer dossier Torture sur la ligne Brest s’inquiète de la perspective de voir cette Guantanamo-Abou Ghraib. carcasse pourrir lentement dans la rade; ici encore, De l’autre, il y eut, mercredi l’association écologiste Robin des Bois s’inquiète du risque d’une prolongation de l’exploitation de dernier, la décision de la navires hors d’usage, ou d’une revente à des sociétés Cour constitutionnelle Par PIERRE-YVES GEOFFARD offshore s’affranchissant du droit français. Là-bas, allemande de s’opposer à des ouvriers du chantier d’Alang menacent une loi, entrée en vigueur pour augmenter la probabilité de ne pas décéder. d’entamer une grève de la faim pour protester début 2005 et autorisant Ainsi, un programme de prévention routière qui contre la perte d’emplois directement causée par l’armée à abattre des coûterait 500millions d’euros et permettrait de aéronefs civils détournés à cette décision de rapatriement. Quelques bruits faire passer le nombre de tués sur les routes de qu’on aimerait tant ne pas entendre, mais qui des fins terroristes. 5000 à 4500 coûterait 1million d’euros par vie viennent nous rappeler que la bonne conscience, Soit, contre la sorte de sauvée. La mise en œuvre d’un tel programme jamais, ne s’acquiert à bas prix. banalisation du mal que Car si les chantiers de recyclage de navires en fin de révèle que la valeur sociale attribuée à une vie révèlent les images vie sont au Sud, c’est bien, en effet, parce que le coût humaine est supérieure à 1million d’euros. Au toujours plus barbares de cette activité y est plus faible qu’au Nord. Et si les contraire, un gouvernement décidant de ne pas auxquelles force est de entreprendre ces mesures attribuerait à une vie coûts y sont plus faibles, c’est entendu, c’est en constater que les opinions humaine une valeur inférieure à 1million d’euros. bon gré mal gré s’habituent partie parce que les réglementations visant à De même, les choix individuels (accepter ou (inéluctables horreurs de la défendre la santé des travailleurs y sont moins refuser un travail plus risqué mais mieux payé) protectrices. En termes économiques, les guerre, n’est-ce pas…), le renseignent sur la valeur implicitement attribuée à exigences de sécurité reposent sur la «valeur providentiel sursaut d’un la vie (ou plus exactement, à la probabilité de ne pas statistique de la vie humaine». Or, cette valeur Etat de droit. Dans les décéder). Car, si la vie n’a pas de prix, les ressources vagissements du millénaire diffère sensiblement d’un pays à l’autre. disponibles sont limitées: il est impossible nouveau, se confrontent et Dans chaque pays, au Nord comme au Sud, de d’entreprendre toutes les actions qui réduiraient, nombreuses mesures peuvent être entreprises s’opposent ainsi deux conceptions de ce qui nous pour réduire le risque de mortalité, des travailleurs un tant soit peu, le risque de décès… De nombreux reste de «dignité humaine». ou des consommateurs. Par exemple, construire un organismes, notamment dans le domaine des transports, de l’environnement, ou de la santé, rond-point sur une route de campagne est cher, C’est bien celle-ci que les attribuent d’ailleurs une valeur explicite à la vie juges allemands invoquent mais diminue le nombre d’accidents mortels. De statistique. Ainsi, le département des transports même, réduire les décès liés à la pollution en effet comme principe: «On ne tue pas des innocents de manière programmée», disent-ils (fût-ce pour en protéger d’autres est sousentendu), arguant que «en disposant unilatéralement de la vie (des passagers) au nom de l’Etat, on conteste à Par MICHEL TRÉGUER réalisateur, écrivain. ces victimes la valeur qui revient à l’homme».Et de es idées et des hommes: toute l’histoire de la Bref, nous savons désormais que les idées aussi ont préciser que, même sans philosophie peut se ramener à ce face-à-face une histoire, une langue, des auteur (e) s, des interpassager ou ne véhiculant entre d’une part des concepts prétendant à prètes… que des terroristes, un l’éternité, portés par des mots qui n’ont pas Ainsi, il n’est pas du tout indifférent qu’une même appareil ne saurait être besoin de respirer, de manger, de dormir, pour du- idée soit exprimée par une femme ou par un homabattu sans modification de rer, et d’autre part des humains qui pensent ces me, qu’un pays soit dirigé par l’une ou par l’autre. concepts mais qui, eux, sont à la fois vivants et mor- Même s’il existe dans ces pays nombre de mâles la Loi fondamentale. Dans cette leçon de morale tels, c’est-à-dire changeants, souffrants et voués à dont l’histoire, la légitimité et le programme souet de dignité venue d’outre- finir. Les physiciens, qui pourtant vieillissaient tiennent la comparaison avec les leurs, l’élection Rhin nous apparaît comme comme leurs congénères, se sont longtemps d’Angela Merkel en Allemagne et celle de Michelle surtout remarquable le fait contentés dans leurs équations d’un temps «au car- Bachelet au Chili ont un poids symbolique consiré» qui ne prenait pas en considération le sens de dérablement plus fort. qu’elle nous vient d’outreson écoulement. Rhin, où certain régime inventa au siècle dernier le Dans l’histoire de la pensée, le concept d’Untermensch (en XXe siècle s’est particulière- On sent monter au front, dans nombre d’éditoriaux français,«sous-homme», ment distingué en soulignant de presse et de livres annoncés, la grosse cavalerie comme dit l’autre). l’importance des conditions des bonnes âmes défendant le statu quo machiste… Alors que, au nom ou au d’énonciation d’une idée ou prétexte de la guerre qu’ils d’un théorème. Depuis Bohr au nom de la démocratie! mènent contre le et Heisenberg, la science reterrorisme, des Etats nonce à séparer le phénomène observé du disposi- De même, chez nous, les citoyens de droite comme pourtant démocratiques tif observant. Depuis Marshall McLuhan (et Régis de gauche, ses adversaires comme ses partisans, sanient partout ces «valeur» Debray), nous savons que le signifié est l’esclave du vent bien que l’accession de Ségolène Royal à la présignifiant: «le médium est le message» parce qu’il est sidence de la République vaudrait au pays un élecet «dignité» humaines, le en lui-même «massage» cérébral. «La langue est trochoc d’une tout autre nature, ouvrirait des silence qui accueille le propos des juges allemands fasciste», avait même osé affirmer Roland Barthes horizons autrement nouveaux que celle d’un de ses dans sa leçon inaugurale au Collège de France en camarades éléphants, confrères ou mari, quelles nous trouble. Est-ce à dire 1977: «Non pas tant parce qu’elle nous empêche de que soient leur complicité et la similitude de leurs que leur plaidoyer pour la dire que parce qu’elle nous oblige à dire.» Par engagements. dignité humaine apparaît exemple, impossible d’échapper en français à un S’il est temps de le dire, c’est parce qu’on sent moncomme incongru, ou qu’il choix entre le masculin et le féminin, tandis que ter au front, dans nombre d’éditoriaux de presse et est d’ores et déjà devenu l’anglais et l’allemand ont des substantifs neutres. de livres annoncés, la grosse cavalerie des bonnes inaudible?• D S ÉCONOMIQUES américain recommande toute action de prévention routière dont le coût est inférieur à 3millions de dollars par vie sauvée; de même, le projet Externe de l’Union européenne, visant à évaluer les coûts environnementaux de l’énergie, fixait une valeur de la vie humaine à 3,1millions d’euros. De nombreuses études économiques tentent de mesurer cette valeur statistique de la vie révélée par les choix, collectifs ou individuels, effectués face à un risque de mort. Les estimations varient fortement d’une étude à l’autre, mais un fait marquant se dégage: les pays riches dépensent davantage que les pays pauvres pour réduire les risques de décès, ce qui indique une valeur statistique de la vie plus élevée au Nord qu’au Sud. D’un point de vue éthique, il est légitime de refuser ce raisonnement, d’estimer qu’une vie de travailleur sauvée ne vaut pas davantage s’il s’agit d’un ouvrier français ou indien, et donc d’exiger les mêmes normes de sécurité là-bas et ici. Mais les ressources qui seraient alors mobilisées dans la prévention des risques professionnels ne seraient plus disponibles pour construire des routes moins dangereuses, payer des médecins, ou vacciner les enfants. Ainsi, un programme de vaccination global (DTP, BCG, polio, rougeole) coûterait de l’ordre de 1000 à 2000euros par vie sauvée. En somme, la triste affaire duClemenceau vient éclairer d’un jour cruel cette dure réalité: l’Inde est plus pauvre que la France. Le rapatriement de la carcasse, pourtant déjà désamiantée à 90%, pourrait coûter au minimum 10millions d’euros aux contribuables français. Soyons conscients qu’une telle somme, autrement dépensée, aurait pu sauver entre 5000et 10000vies en Inde… • Pierre-Yves Geoffard est chercheur au CNRS. (Lundi prochain, «Economiques» avec Thomas Piketty) L’accession de la candidate socialiste à la présidence ouvrirait d’autres horizons que celle d’un de ses camarades éléphants. A programme égal, avantage Royal D âmes défendant le statu quo machiste… au nom de la démocratie! Et c’est aussi la réponse systématique de François Hollande à ses interviewers: «Peu importe qui sera le candidat du Parti socialiste; ce qui compte, c’est l’idée, c’est le programme.» On reconnaît là le culte de l’abstraction hérité du christianisme et de la Révolution française, sacrifiant la variété des humains réels à la beauté d’un modèle universel. «Plus de juifs ni de Grecs, plus d’hommes ni de femmes: tous unis et semblables en Christ», disait déjà saint Paul. «Plus de juifs ni de Bretons, reprendra l’abbé Grégoire: tous citoyens de la même nation, dotés des mêmes droits.» C’est une forme de pensée qui a certes accompagné l’émancipation des humains et la montée mondiale de la démocratie, mais qui a beaucoup vieilli et que les récentes émeutes de «Français différents», dans les banlieues nouvelles de nos villes anciennes, n’ont pas rajeunie. Le monde est fait d’idées universelles, de briques d’éternité; mais aussi de personnes, de corps, de vies, de cultures, de temps, d’événements, d’évolutions, de ruptures. Bien sûr, le programme compte: certaines femmes sont de gauche, d’autres de droite ou d’extrême droite. Mais, à programme égal, il n’est pas du tout indifférent que son champion soit une championne. Qu’advienne le nouveau! Vive les femmes! Ségolène, entre autres. • Dernier ouvrage paru: Aborigène occidental, Mille et Une Nuits 2004. 42 Grand angle LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Primaires UMP pour la mairie de Paris Coupsbas au Adhésions truquées, sondage douteux, échanges vachards, le «processus démocratique» promis par Sarkozy pour désigner le candidat de la fédération de Paris tourne à la surenchère entre les quatre candidats en lice : Goasguen, Lellouche, Panafieu et Tiberi. ls ne sont rien, rien de rien. Ils ne sont même pas à zéro, ils sont négatifs…»Ainsi parlait Nicolas Sarkozy, il y a trois ans, quand il évoquait en privé les incessantes querelles de la droite parisienne. Un jugement sévère motivé par le spectacle que donnait alors l’opposition municipale, traumatisée par la défaite historique de 2001: des élus déboussolés et sans leader, repliés sur les beaux quartiers de la capitale, et surtout incapables d’incarner une alternative crédible à Bertrand Delanoë. En prenant la tête de l’UMP, il y a quinze mois, Nicolas Sarkozy décide donc de faire le ménage dans ce bastion de la Chiraquie. «Divisions, oppositions, règlements de comptes doivent cesser», martèle le nouveau président, qui affiche alors son ambition de faire de la fédération de Paris la nouvelle «vitrine»de l’UMP. La méthode, calquée sur celle du PS, consiste à mettre les quatre députés concurrents (Claude Goasguen, Pierre Lellouche, Françoise de Panafieu et Jean Tiberi) en compétition devant les militants. Après plus de six mois de campagne, et à quelques jours du premier tour de ces primaires visant à désigner leur candidat pour les municipales de 2008, le «processus démocratique»promis par Sarkozy a surtout été marqué par des chiffres d’adhésion truqués, des sondages douteux, une surenchère éditoriale et des échanges de mots vachards… «Grande bourgeoise», «provincial», «droite popu» et «vieux sage» Consanguinité politique oblige (ils ont tous travaillé à l’Hôtel de Ville du temps de Jacques Chirac), les quatre prétendants peuvent difficilement se distinguer par l’originalité de leur programme. Pour séduire les militants, chacun dresse donc son autoportrait flatteur. Françoise de Panafieu, 58ans, maire du XVIIe, compte sur sa notoriété et… son sexe pour se faire élire: «J’ai cette particularité d’avoir une tête connue dans la population, dit-elle.En tant que femme, je suis aussi perçue comme pragmatique, protectrice et portant des valeurs de solidarité.» La dame affiche un comité de soutien politico-mondain REMY ARTIGES casting (Thierry Breton, Véronique Genest, Alexandre Jardin…). Pour mieux dénoncer cette «grande bourgeoise», fille de ministres gaullistes (les Missoffe) et héritière d’une richissime famille industrielle (les Wendel), son ennemi juré, Claude Goasguen, 60ans, député du sud du XVIe et président du groupe UMP au Conseil de Paris, se présente comme le provincial qui a réussi tout seul à Paris. Il raconte volontiers comment, jeune Toulonnais, il est arrivé dans la capitale où il s’est hissé au sommet de la hiérarchie de l’Education nationale (docteur en droit, recteur d’académie, inspecteur général de l’Education nationale). Ces titres respectables n’empêchent nullement l’ancien militant d’extrême droite de faire preuve de muflerie.Fin janvier, lors d’un débat, il accusait sa rivale de vouloir transformer les primaires en «concours de beauté». «C’est un misogyne fini», tranchet-on dans l’entourage de Panafieu. Le même soir, un autre challenger, Pierre Lellouche, 54 ans, renvoyait Panafieu à ses accointances patronales en appelant les militants à rejeter la candidate «de l’establishment». En privé, l’ancien conseiller diplomatique de Chirac s’indigne de la voir «soutenue par la presse Dassault et Lagardère». Pour se démarquer, lui se présente comme un élu de la «droite popu»et rappelle qu’il est, des quatre, celui qui est élu le plus «à l’est de Paris»–sa circonscription est à cheval sur les VIIIe et IXe arrondissements. Ce fils d’artisan devenu expert en relations internationales s’est attribué le rôle du trublion, toujours prêt à dénoncer l’ambiance «trop convenue»de la campagne interne à l’UMP. A 70ans, l’ancien maire de Paris Jean Tiberi, élu sans discontinuer depuis trentehuit ans, fait figure de «vieux sage» aux yeux de ses concurrents –manière de le renvoyer sous son arbre. «Après avoir perdu la mairie en 2001, il fait son tour d’honneur, analyse un élu UMP de Paris.Xavière et lui savent qu’ils peuvent compter sur les militants du Ve et il ne fait pas vraiment campagne.» Deux des challengers (Goasguen et Panafieu) ont d’ailleurs été ses adjoints à l’Hôtel de Ville. Tiberi est le seul à ne pas avoir publié de livre; le seul, aussi, à ne pas courir les plateaux télé. «Chantages à l’investiture» Voilà donc les quatre concurrents qui, parmi les dix en lice au départ, ont réussi 43 LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 veille. Mais rien n’est encore perdu pour la fédération UMP de Paris: si les inscriptions pour voter par Internet sont closes, il est possible d’adhérer jusqu’au samedi 25février, jour du vote manuel(3). Tendue depuis le début de la campagne, l’ambiance est devenue franchement exécrable ces dernières semaines. Le 22novembre, le Parisien publie un sondage Ifop dont les résultats mettent la droite parisienne sens dessus dessous: pour 46% des sympathisants de droite, Panafieu serait «la mieux placée»pour battre Bertrand Delanoë en 2008. Loin devant Jean Tiberi (24%), Pierre Lellouche (17%) et surtout Claude Goasguen, bon dernier avec 5%. Quelques jours plus tard, un «blanc» des Renseignements généraux (une note non signée) arrive dans les rédactions: le sondage aurait été payé et commandé par le Medef, Panafieu étant à la fois proche d’Ernest-Antoine Seillière (autre héritier de la famille Wendel) et de son successeur, Laurence Parisot, par ailleurs présidente de l’Ifop. La maire du XVIIe dément formellement. Jure que le «blanc» des RG est un faux et qu’elle est victime d’une «basse manœuvre». Claude Goasguen et Pierre Lellouche éructent contre ce «sondage bidon» et saisissent la commission des sondages. Verdict: c’est bien le Club Lutèce –un think tank patronal proche de Panafieu– qui a commandé et payé cette étude. Son président, Jérôme Dubus, adjoint de Panafieu et délégué du Medef, est contraint de démissionner, non sans avoir dénoncé au passage le travail de quelques «vieilles officines»… Rumeurs de parachutage à récolter les parrainages nécessaires pour se lancer dans les primaires. Les autres, à la notoriété moindre, ont tous été éliminés de la compétition, faute d’avoir pu réunir, durant l’été 2005, le parrainage écrit d’au moins dix élus de droite parmi les 200que compte la capitale. Les premiers doutes sur la sincérité de cet exercice de démocratie inédit à l’UMP datent de cette époque. Plusieurs élus font alors état de «menaces» et de «chantages à l’investiture»exercés par les cadors de l’UMP afin d’obtenir le maximum de signatures. «Ce sont des méthodes héritées des années passées, dénonce Jean-Luc Romero, conseiller régional UMP(1). Fausses adhésions, utilisation de moyens illégaux et de fichiers, coups bas, pressions, manipulations, insultes, chantages…» Pour ajouter à la confusion, cette première sélection laisse sur le bord de la route un autre impétrant virtuel, Bernard Debré, 61ans, qui se met à tirer à vue sur la «mascarade»des primaires: «Aucun des quatre n’a la carrure pour devenir maire de Paris. Plusieurs sont mouillés dans des affaires plus ou moins louches ou sordides […]. Ils ont tous perdu Paris en 2001», balance le Bien avant l’ultime confrontation qui doit avoir lieu ce soirau cirque d’Hiver en présence de Sarkozy, la charte de bonne conduite censée régir les relations entre les quatre concurrents est définitivement passée aux oubliettes. Cible de toutes les critiques, Panafieu, qui fait figure de favorite, a été accusée de s’afficher trop souvent aux côtés du président de l’UMP lors des grands rendez-vous du parti –et de récupérer ainsi une part de sa popularité. Après moult protestations et une nouvelle réunion au sommet qui s’est tenue le 1er février dans le bureau de Sarkozy, ce dernier a dû promettre aux trois autres candidats de se montrer avec eux au moins une fois avant le jour du scrutin… député du XVIe, fin octobre, dans une 7000adhérents), la fédération va devenir Début février, «Vu la manière dont s’est déroulée la camen quelques mois la première du pays à Paris. De gauche pagne, on voit mal comment les trois perinterview au Journal du Dimanche. dants vont pouvoir se ranger derrière le Quoi qu’il en soit, Sarkozy donne en sep- avec pas moins de… 24000cartes! Mais, à droite : Claude tembre le coup d’envoi d’une campagne très vite, beaucoup se révèlent des «adhé- Goasguen, Pierre vainqueur», observait la semaine dernière un chiraquien qui n’a jamais cru à cette officielle qui va durer près de six mois. rents de copinage», accuse un conseiller Lellouche, «parodie de démocratie». Sarkozy avait Avec chacun son slogan(«Réveillons Pa- UMP de Paris, Xavier Chinaud: «Cela fait Françoise de pourtant fait promettre aux concurrents ris»pour Pierre Lellouche, «Paris 2008, des mois que j’attends d’avoir accès aux fi- Panafieu et Jean qu’une fois désigné le challenger officiel Paris gagnant» pour Panafieu, etc.), des chiers pour les vérifier.»Des familles en- Tiberi face aux de Bertrand Delanoë, les querelles intesréunions de quartier quasi quotidiennes tières ont adhéré du jour au lendemain en Jeunes de l’UMP. passant directement par la fétines cesseraient, au moins jusqu’aux dération départementale, élections municipales. Un pari quasi imFrançoise de Panafieu a été accusée de trop possible qui entretient les rumeurs de pas’afficher avec Sarkozy. Ce dernier a dû promettre sans que les instances locales, rachutage sur la capitale après 2007 et aux trois autres candidats de se montrer avec eux privées de fichier, puissent contrôler la réalité de ces rall’élection présidentielle, comme ce fut le au moins une fois avant le jour du scrutin. liements opportuns. Cerise cas avec Philippe Séguin en 2001. Dans les couloirs de l’UMP, il se murmure de plus et des joutes électorales à répétition. sur le gâteau: le vote par Internet étant en plus fort qu’une grosse pointure (JeanTrois des quatre candidats(2) se fendent admis dans la semaine précédant le preLouis Borloo, Michel Barnier et, pouraussi d’un livre. Inutile d’y présenter un mier tour (du 21 au 24 février), certains quoi pas, Dominique de Villepin) pourrait programme original ou d’y parler de Paris vont voter sans jamais avoir milité ni asfinalement s’imposer sans être passé par (Lellouche en dira à peine deux mots), sisté à une réunion de circonscription. la case primaires… Tout ça pour ça.• l’essentiel c’est d’être invité à la télévision Faux «blanc» des RG pour se rappeler au bon souvenir des élecTHOMAS LEBÈGUE teurs. Devant le tollé provoqué par ces adhé(1) La Nuit des petits couteaux, de Jean-Luc Pour donner quelque légitimité démo- sions douteuses, le fichier subit une sévèRomero, éd. Jean-Claude Gawsewitch. (2) Allô Paris bobo de Claude Goasguen cratique au scrutin, Sarkozy impose au re cure d’amaigrissement. Le 3février, à (Ramsay), Illusions gauloises de Pierre président de la fédération UMP de Paris, trois semaines du premier tour, Philippe Lellouche (Grasset), et Mon Paris gagnant de son ami Philippe Goujon, de doubler le Goujon ne décompte plus que 9635 adFrançoise de Panafieu (L’Archipel). nombre d’adhérents d’ici au vote. Ex- hérents à jour de cotisation – soit 40% des (3) Si aucun candidat n’obtient la majorité absolue, un second tour est prévu le 4 mars. sangue au début de l’année 2005 (environ adhérents officiellement revendiqués la Portrait LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 50 Cent, 30 ans, ancien petit dealer devenu rappeur superstar aux Etats-Unis, gère sa carrière artistique comme une multinationale et brandit sa soif de fortune en étendard. u fond d’un couloir, juste à côté de l’escalier de service, un colosse surveille la porte. 50 Cent donne ses interviews. L’hôtel est en face de l’ambassade américaine à Paris. Il y a donc assez de militaires dans la rue pour que le rappeur se sente en sécurité. L’ancien dealer, originaire du Queens (à New York), prétend ne pas craindre la mort, mais adore entretenir cette atmosphère autour de lui. A l’entendre, il porte toujours un gilet pare-balles, ne se déplace qu’en voiture blindée. Le trentenaire à la musculature ostentatoire (deux à trois heures d’exercices quotidiens), à la fortune estimée entre 50 et 70millions de dollars selon le New York Times, affiche un sourire avenant puis explique: «La mort est l’une des plus grandes formes de divertissement. Ça divertit les gens de savoir que je puisse être en danger. Ils se disent: 50Cent s’est déjà fait tirer dessus neuf fois de suite. Il y a une forte possibilité pour que quelque chose lui arrive. Il faut l’observer, ne surtout pas rater ce moment.» Bienvenue dans le monde du gangsta-rap, où l’on joue à faire peur et à se faire peur. Jusqu’à aujourd’hui, aucun artiste du genre n’avait autant joué le jeu et donné autant de preuves de «street credibility».Cette semaine, 50 Cent, de son vrai nom Curtis Jackson, raconte sa vie par le menu dans un film intitulé comme son premier album, vendu à 11 millions d’exemplaires en 2003, Get Rich or Die Trying (Deviens riche ou meurs en essayant). C’est l’épilogue d’une longue opération marketing, jalonnée par un livre autobiographique, Ma vie, ma vérité(City Editions), un jeu vidéo, Bullet Proof, une ligne de basket pour le compte de Reebok, une eau vitaminée (il ne boit pas d’alcool) et un deuxième album, The Massacre,qui a battu le record des Beatles en classant quatre chansons dans le top dès sa première semaine de sortie. «Aujourd’hui, même en ayant vendu près de 20 millions d’albums, fanfaronne-t-il, je gagne encore plus d’argent avec les contrats que je passe avec des grandes marques.» 50 Cent a réussi. Ses raps, ses clips: des menaces, des insultes pour ses collègues rappeurs, des mises en scène de sa vie à coups de rafales de mitraillette, ou des friandises érotiques mises en musique par Dr Dre et Eminem… Le film le montre plus touchant, moins cynique, mais adepte de règles qui resteront certainement dans le jargon de ses fans, dont celle-ci: «Ne montre jamais d’affection, ça pourrait te tuer.» Réussir ou mourir retrace en grande partie sa vie, «à 75%»dit-il, et débute par un braquage suivi de la fameuse Rapetout A fusillade devant la maison de ses grandsparents.Curtis Jackson n’a jamais connu son père. Sa mère, Sabrina, a 15ans quand elle le met au monde. Elle confie immédiatement son nouveau-né à ses parents, qui élèvent déjà huit autres enfants. Curtis Jackson Senior travaille chez General Motors, Meulah, sa femme, fait quelques ménages. Sabrina deale de la cocaïne et offre à son fils une petite moto pour ses 6ans: «Elle m’a habitué, très tôt, à avoir de belles choses»,se rappelle le rappeur. Elle refuse de le voir revenir pleurnicher après une bagarre, l’oblige à aller se venger, l’emmène sur son lieu de travail où elle vend sa drogue. Un jour, on la retrouve inanimée chez elle. Elle a été empoisonnée, puis asphyxiée au gaz. Curtis n’apprendra les circonstances de sa mort que bien plus tard, de la bouche de sa grand-mère, quand cette dernière découvrira que son enfants: «Il faut qu’ils éteignent les radios, mais aussi le câble, l’Internet. Je ne pense pas que ce soit une bonne chose d’écarter les mômes de la réalité, d’éviter de leur montrer le monde tel qu’il est. Pour moi, un parent qui agit comme cela prépare son enfant à échouer. Si vous ne les exposez pas à ce qui se passe dehors, ils vont être naïfs toute leur vie, et seront incapables de gérer des situations dures.» Son pseudo, 50Cent, c’est le nom d’un gangster de Brooklyn spécialisé dans le braquage des chaînes en or des rappeurs. Le premier titre de l’apprenti rappeur sera d’ailleurs un texte où il raconte comment il compte détrousser les artistes en vue de l’époque. 50 Cent crée sa notoriété sur ces provocations. Signé chez Columbia, il est lâché par la major en 2000 quand elle apprend qu’il a été victime d’une fusillade. Une des neuf balles qui l’ont atteint lui laisse un trou dans la joue. Il s’en sort miraculeusement. Sur la paille, il tente un dernier coup en s’appuyant sur le marché des cassettes enregistrées par les DJ, les mixtapes, véritables réseaux indépendants du rap. Il offre aux DJ des raps gratuits: «En matière de marketing, le seul modèle que je connais c’est le monde de la drogue. Je savais que la seule façon de m’introduire sur un nouveau marché, c’est de distribuer des échantillons gratuits. Il fallait que je trouve une clientèle avant d’engranger des profits.» C’est comme ça qu’Eminem le remarque et lui propose un contrat. 50 Cent est d’un cynisme carabiné qui se manifeste également quand il parle de l’autre monde, celui qui n’est pas régi par les codes du rap, dont il a d’ailleurs sa propre définition. Un clip n’est pas une œuvre artistique mais «une pub TV de trois minutes» et un rappeur n’est bon que s’il vend beaucoup de disques. Alors républicain ou démocrate, 50 Cent?«Ça dépend. Au moment de payer mes impôts, je suis plutôt républicain. En même temps, j’ai été pauvre pendant vingt-septans de ma vie, je ne suis riche que depuis trois ans. Donc, je petit-fils deale aussi du crack. Lui prétend en vendre depuis l’âge de 12 ans. «Notre quartier ne ressemblait pourtant pas à un ghetto, ce sont des petites maisons, mais Juillet 1975 Naissance à New York. voilà, personne n’a beaucoup de revenus et la tentation d’obtenir de l’argent illégale1983 ment est trop forte.» Des reMort de sa mère. mords? «Ce n’est pas moi qui «Au moment de payer mes impôts, je suis plutôt 1995 faisais venir le crack dans le républicain.» Naissance de son fils. pays, je n’étais pas un grossiste, 2000 Victime d’une fusillade. juste un dealer à la petite semaine», se la- suis forcément un peu démocrate.» ve-t-il les mains, tout en racontant qu’il 50Cent est allé chanter pour les troupes 2002 pouvait gagner 4000dollars par semaine. en Irak mais n’a aucun avis sur l’avenir de Eminem et Dr Dre A 20ans, après un séjour en prison puis la l’Irak après l’intervention américaine le signent sur leurs labels respectifs. naissance de son fils, il décide d’arrêter le dans ce pays: «On y est allés pour le pétro«bizness»: «Pour que mon enfant n’ait pas le et pour être les premiers sur le marché. 2003 Sort son album à vivre ce que j’ai vécu.»Aujourd’hui, son Mais bon, on fait ça aussi dans le rap, on Get Rich or Die Trying. fils suit sa scolarité dans une école privée, veut tous être le premier et remporter un 2006 à l’abri, mais 50 Cent ne comprend pas maximum de blé.» • Sortie du film que certains parents se plaignent d’enSTÉPHANIE BINET Réussir ou mourir. tendre ses raps dans la bouche de leurs photo JERÔME BONNET 50 Cent en sept dates LIBERATION I emploi A l’heure de Big Blogger LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Tous les lundis Aux Etats-Unis, les détectives payés par les entreprises utilisent désormais les blogs pour fouiller la vie des candidats à l’embauche. MILES HYMAN Los Angeles correspondance a cyberdétective américaine Cynthia Hetherington donne souvent des formations internes en entreprise. Récemment, une séance de travaux pratiques sur les blogs a semé la panique chez les huiles d’une entreprise. «Plusieurs dirigeants avaient des enfants à l’université, et je me suis mise à dénicher leurs blogs», raconte la fondatrice de l’agence Data2Know à Haskell, dans le New Jersey. Les cadres ont vite constaté que la jeune génération parade volontiers sur des blogs, ces carnets personnels publiés par millions sur le Web. «Je n’oublierai jamais la tête du directeur de la sécurité de la boîte en découvrant une photo de son fils à une soûlerie étudiante, un préservatif sur la tête», s’amuse la détective. Qui plus est, Junior était en dessous de l’âge légal pour boire de l’alcool, fixé à 21 ans aux Etats-Unis. Cynthia Hetherington comprend la bouffée d’angoisse pa- ● ● ● II emploi LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 ternelle: «La photo est peut-être drôle aujourd’hui, mais que se passera-t-il pour ce garçon dans deux, cinq ou dix ans, quand un employeur potentiel tombera dessus au gré d’une recherche Internet?» Négligence. La détective fait référence à la probabilité d’un background check, une enquête de vérification des antécédents, très courantes aux Etats-Unis avant l’embauche d’un candidat. L’Amérique, secouée par le 11 septembre et les grands scandales financiers, tient à savoir qui elle emploie: en 2005, 81% des entreprises disaient enquêter systématiquement, ou presque toujours, sur les candidats à l’embauche (contre 51% en 1996, selon la Society for Human ●●● Resource Management, une association de 200000 professionnels des ressources humaines). Or, plus de la moitié des entreprises fureteuses ont recours à l’externalisation, confiant la tâche à des cabinets de détectives. Dans un cadre tout à fait légal (le candidat signe une autorisation), les enquêteurs vérifient quantité d’informations accessibles dans le vaste «domaine public» américain, via des bases de données sur l’Internet réservées aux professionnels. Le candidat traîne-t-il un casier judiciaire ou une condamnation pour vol? A-t-il déclaré banqueroute? Son parcours professionnel peut-il être confirmé en tous points? Autant de choses à vérifier pour se protéger d’amendes fédérales (pour recrutement d’immigrés clandestins munis de faux papiers, par exemple) ou de procès pour negligent hiring(embauche négligente) qu’une secrétaire harcelée par un supérieur peut mener contre son entreprise. Les blogs permettent de savoir si leurs propriétaires utilisent souvent des gros mots, font des blagues machistes… Tatouage. Une «filature» de la personne sur le Web est la cerise sur le sundae. Pour l’heure, «très peu de détectives savent naviguer dans l’univers des blogs», constate Hetherington, une ancienne bibliothécaire devenue pionnière des recherches en ligne. Mais selon elle, les habitudes chan- gent avec la généralisation d’outils de recherche de blogs tels que Technorati, Feedster et les moteurs de recherche spécialisés comme Google Blog Search et Icerocket. «Les blogs contiennent des pépites d’information souvent intéressantes sur le caractère de la personne: si un cadre blogue sur le triathlon qu’il court annuellement, on peut en conclure qu’il est en bonne forme», explique Peter Turecek, manager à Kroll Inc., la multinationale d’investigation. Un bémol, toutefois: «Les blogs étant produits par les gens eux-mêmes, il faut toujours prendre leur contenu avec prudence… Ils ont tendance à exagérer leurs exploits.»Une directrice des ressources humaines du New Aux Etats-Unis, refuser un candidat à cause d’un blog est interdit, en théorie. Les non-dits de l’embauche ux Etats-Unis, les entretiens sont soumis à des lois strictes: ainsi, l’employeur ou le détective qui l’assiste ne peuvent pas demander à un candidat s’il est marié, a des enfants en bas âge ou pratique une religion qui l’empêche de travailler certains jours. En revanche, les enquêtes sur les employés déjà présents au sein de la société (avant une opération de fusion, par exemple) ou en cas de problèmes sur le lieu de travail (fraude, harcèlement) sont soumises à de moindres contraintes. Un employeur a-til alors le droit de déterrer sur le blog d’un candidat les informations qu’il ne peut pas évoquer lors de l’embauche? Et comment peut-il utiliser des informations intimes étalées sur les blogs? Selon l’avocat de Los Angeles Marvin Krakow,un employeur ou son détective MILES HYMAN A en jours d’absence ou en assurance médicale). Selon Marvin Krakow, le patron alerté par ces révélations peut réagir en toute légalité en demandant au candidat de se soumettre à un examen médical afin de prouver qu’il peut assurer son travail. Et prendre officiellement en compte les seuls résultats de l’examen. Selon Ted Moss, de l’agence Background «Les propos tenus sur les blogs Network, un détective n’est font partie du domaine public.» pas censé rapporter certaines comme les proMarvin Krakow, avocat informations, pos critiques émanant du blog peut-on savoir si un employeur est influen- d’une autre personne que le candidat à cé par telle information? C’est impossible à l’embauche ou des photos publiées sans autorisation de l’intéressé. Le privé est prouver.» Le détective peut donc rapporter à l’em- également censé contacter l’auteur du ployeur qu’un candidat tient un blog isla- blog pour corroborer par des informamiste ou raconte par le menu sa maladie tions. • chronique(et risque donc de coûter cher E. R. (à Los Angeles) ont parfaitement le droit de connaître des choses que le candidat crie sur les toits d’Internet. «Les propos tenus sur les blogs font partie du domaine public», expliquet-il. En revanche, utiliser ces informations pour enfreindre les lois antidiscrimination est interdit. «Et c’est là où ça devient délicat,ajoute l’avocat. Comment emploi III LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 En France, le journal de bord sur le Net sert surtout à soigner son profil. Prêt pour être «googlé» l y a son nom (Emmanuelle Pometan), son numéro de téléphone (06 11 34...), ses coups de cœur cinématographiques (les Amants réguliers de Garrel). Dans son blog, Emmanuelle ne cache ni le prénom de son enfant ni le récit de ses entretiens d’embauche: «Je vais bientôt connaître l’entretien téléphonique avec la RH d’Ikea pour un poste de responsable communication magasin. Euh, y a des Ikea sur Paris ou juste en zone-industrielle-inatteignable ?» Le blog d’Emmanuelle est consacré à sa recherche d’emploi. Le ton est léger, comme ce jour de février où elle annonce qu’elle a retrouvé du boulot: «Me voilà de nouveau confrontée aux dures lois de la vraie vie: le réveil (nan, on est toujours pas copains). Le comment-je-m-habille-aujourd’huiest-ce-que-je-vois-unclient-nonbon-ben-un-jean.» Réputation. L’idée d’un blog lui est venue après un entretien d’embauche dans une agence de com. «On m’a demandé: “Vous avez un blog, vous?” J’ai senti que ne pas en avoir avait joué en ma défaveur.» En septembre dernier, elle ouvre son site et égratigne l’agence d’intérim Caméléon. «Je me suis grillée avec toutes les agences d’intérim du secteur.»Mais elle aime dire que c’est aussi grâce à son blog qu’elle a décroché son nouveau job. Son ancienne boîte lui avait prêté un bureau pour chercher du travail. Au bout du couloir, une entreprise de communication: «La responsable s’est intéressée à moi en lisant mes billets. Il a fallu l’Internet pour passer de l’autre côté du couloir!» En France, tenir un blog n’est pas encore trop risqué car peu de détectives se lancent aux trousses du moindre faux pas I Jersey, Bette Francis, confiait au Philadelphia Enquirer apprécier les blogs comme une fenêtre sur le style de communication d’un individu, son éthique de travail et son expertise. Mais la consultante en management Marlyn Kalitan comparait ces sites personnels à des tatouages: un caprice de jeunesse, pas toujours bien réfléchi mais qui laisse des traces. Démasqué. A la conférence mondiale des détectives WIC, à Las Vegas, l’automne dernier, Cynthia Hetherington a démontré l’imprudence de certains employés frustrés. Une recherche Google sur le nom d’une entreprise et la phrase «Je hais mon boulot» conduit directement au blog de salariés grincheux divulguant toutes sortes d’informations. Comme celui de cette serveuse du restaurant Applebee’s, qui annonce qu’elle déteste son patron et n’a pas de scrupules à se faire porter pâle. «Ces blogueurs écrivent des choses très personnelles, comme s’ils parlaient à des amis, en oubliant complètement que n’importe qui peut les lire», note Cynthia Hethe- cherche sur le Web. En revanche, une enquête de 500 euros ou plus sur un dirigeant inclura une incursion poussée sur la Toile. Les cadres bloguant rarement eux-mêmes, il faut se renseigner sur leur surnom dans l’entreprise et se diriger vers les sites de leurs subordonnés. C’est ainsi que Ted Moss, président de Background Network (2) à Cleveland, a «Plus de la moitié des démasqué le préentreprises américaines tendant à un poste confie des enquêtes à des de chef de laboracabinets de détectives.» toire en Californie. «Il affirmait avoir je me rends compte que j’ai été un passé prestigieux dans l’arvraiment stupide», constate le mée que nous ne pouvions pas confirmer auprès des autorités blogueur. «Le problème avec les blogs, militaires», raconte le détectic’est que les entreprises clientes ve. Mais le nom dudit candine souhaitent pas forcément dat figurait sur plusieurs nous payer pour le temps de blogs, et pas en des termes recherche supplémentaire», flatteurs: «Ce type avait des enremarque Steven Kelly nemis et était accusé par d’anBrown, un détective de Flori- ciens collègues de travail d’être de auteur du manuel Idiot’s un escroc dans son industrie. Guide to Private Investigating. Ce qui nous a permis de remonUn background check véri- ter le fil et de vérifier qu’il avait fiant le passé d’un caissier de menti sur plusieurs points de supermarché ou d’une nou- son CV, perpétuant une tradinou de base, pour l’équivalent tion de mensonges sur ses agisde 30 à 150 euros, sera rare- sements.» ment complété par une re- «Egosurf». Laveille sur le Web rington. Aux Etats-Unis, plusieurs douzaines d’employés ont été licenciés à cause de propos tenus sur leur blog (1). Dont Michael Hanscom. L’auteur du blog Eclectism fut viré de Microsoft en 2003 pour avoir publié une photo ironique d’ordinateurs Apple, prise dans un hangar du géant informatique... «Avec du recul, 70000 des informations circulant sur son propre nom, une pratique surnommée «egosurf» est désormais essentielle pour savoir quel type d’information employeurs, collègues de travail et concurrents connaissent, risquent d’apprendre ou pensent savoir – dans le cas d’un blog tenu par un homonyme par exemple – sur vous. Avant d’être embauché par Sun Microsystems, l’informaticien Tim Bray (3) savait que ses interlocuteurs lisaient son site. Il aconclu un entretien d’embauche avec la question d’usage: «Est-ce que vous souhaitez savoir quelque chose de plus à mon sujet?» avant de s’entendre répondre: «Non, c’est un peu commesi vous étiez à “code ouvert.”» • EMMANUELLE RICHARD (1) Le journaliste Curt Hopkins, basé dans l’Oregon, tient une liste de blogueurs licenciés sur son blog: morphemetales.blogspot.com/ 2004/12/statistics-on-fired -bloggers.html (2) Background Network est l’une des rares agences d’investigation publiant un blog: www.crimcheck.com/news (3) www.tbray.org/ongoing 8% interactif. De toute façon, «l’article L-121.8 du code du travail interdit de faire une enquête de préembauche», explique Christian Borniche, inspecteur privé. Mais «googler» les candidats (taper leur nom dans un moteur de recherche pour lire les pages qui les concernent) est devenu systématique chez les chasseurs de têtes. «Le salarié doit soigner sa “réputation en ligne”, prévient Yannick Fondeur, économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires). Dans son blog, mais aussi à travers toutes les traces, souvent indélébiles, qu’il peut laisser sur l’Internet: le message posté sur le blog d’un autre, la signature d’une pétition en ligne... On a tendance à abandonner l’anonymat sur la Toile, à assumer ce qu’on dit. Ce qui peut devenir problématique: un message vite écrit sera plus ou moins bien orthographié, une réaction qui semblait pertinente le paraît moins l’émotion retombée...» Vieux CV. Sur son propre blog, Jacques Froissant, directeur du cabinet de recrutement Altaïde, égrène ses conseils pour «gérer son image sur l’Internet»: «Faire un audit complet de tout ce que vous pourrez trouver sur le web vous concernant. Eliminer toutes les informations gênantes, comme le vieux CV laissant apparaître des divergences de dates avec le nouveau dans les mains du recruteur...»Surtout faire de son propre blog «une vitrine qu’on maîtrise», où on prendra soin de répéter souvent son propre nom. Pour que notre blog arrive en tête des pages nous concernant. Bien avant notre photo avec les cousins lors de la dernière fête familiale à Chasseneuil-du-Poitou. • S.F. http://buzzunivers.typepad.com Un proviseur nouveaux blogs par jour de firmes américaines veillent suspendu pour un blog trop gay elon David Sifry, de l’outil de recherche de blogs Technorati, 70 000 nouveaux blogs seraient créés chaque jour. Toutefois, personne ne sait exactement combien sont mort-nés, actifs ou fantômes. On estime également à 27,2 millions le nombre de blogs sur l’Internet. C’est 8 millions de plus qu’en octobre dernier. n règlement concernant les blogs d’employés et leur contenu auraient été mis en place dans environ 8% des entreprises américaines, selon une estimation de la Society for Human Resource Management en 2005. Certaines firmes installent des logiciels capables de détecter des mots et des expressions. Mais, incapables de tout surveiller, les entreprises enquêtent souvent sur les blogs après avoir été alertées sur un dérapage ou un problème. e proviseur d’un lycée de Lozère a été menacé de révocation en janvier pour avoir évoqué son homosexualité sur son blog. L’Education nationale l’accusait de contenir des écrits et des photos pornographiques. Selon le recteur, le proviseur avait «failli à son devoir d’éducation pour avoir diffusé des photos et des commentaires qui lui font perdre sa crédibilité». Suite à un recours gracieux du blogger auprès du ministère, la sanction a été ramenée à une suspension d’un an. s U L IV emploi Livre LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 Chronique de la vie au travail La médecine du travail auscultée Entre la tragédie de l’amiante Elise et les 40 chômeurs (50000à 100000 décès d’ici 2030) et l’émergence de ce que Christophe Dejours, psychiatre-psychanalyste, appelle «la souffrance au travail»,les limites sinon l’impuissance de la médecine du travail apparaissent cruellement à travers l’ouvrage la Santé au travail. Une situationquin’estpas récente,selonsesauteurs,et qui s’explique par la genèse etl’histoiredelaprotection médicaledessalariés. Le livre retrace toute l’évolution de cette «sous-médecine»,de 1880 à nos jours,et explique pourquoi les médecins du travail ne sont pas parvenus, en France, à conquérir un rôle significatif dans la prévention et ledépistage des maladies professionnelles. E.P. La Santé au travail, Stéphane Buzzi, Jean-Claude Evinck, Paul-André Rosental, collection «Repères», Ed. La Découverte. Un site pour les patrons à domicile Ce sera la fin des affichettes sur les caisses enregistreuses des boulangeries, affirme le dossier de presse. La Fédération nationale des particuliers employeurs (Fepem) lance un site pour particuliers, qu’ils soient employeurs ou salariés. Les familles, en quête de nounou ou de jardinier, peuvent déjà poster leur petite annonce en ligne. Les demandeurs d’emploi aussi. Le site ne les mettra en relation qu’à partir d’avril, une fois les annonces accumulées. Puis deviendra progressivement payant. VUILLEMIN Services Elise est conseillère emploi pour RMistes dans travail et j’allais m’occuper de ceux qui n’en ont l’Hérault, le département français au taux de pas. «En ce moment, j’ai quarante dossiers à suivre, chômage le plus élevé. c’est beaucoup. Il faudrait pouvoir recevoir cerepuis deux ans, époque à laquelle j’ai fer- tains demandeurs d’emploi tous les deux ou trois mé mon auberge, je cherchais un travail jours pour qu’ils restent motivés. Les boulots fixe, avec mon bac + 5 et mes 52 ans. Il y a pour les personnes sans emploi qui viennent me huit mois, j’allais m’inscrire au RMI quand on m’a voir, je tente de les trouver sur les sites Internet proposé de m’occuper de réinsertion dans une ou par le bouche à oreille. J’essaie aussi de faire association prestataire de services pour l’ANPE. un travail de boîte de placement en mettant en Je passais tout d’un coup de l’autre côté: j’avais un avant, auprès des employeurs que je prospecte, «D Femmes cadres liguées en ligne Cadres Les cadres devraient profiter en 2006 d’une nouvelle augmentation (+ 4%) des recrutements, selon une étude de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres). Le nombre d’embauches de cadres devrait être compris cette année entre 168 000 et 178 000, dans l’ensemble des secteurs, excepté l’industrie. Il faut remonter aux années 1999-2001 pour retrouver de tels chiffres.La raison : le nombre de départs en retraite qui a continué de croître l’an dernier : + 16% par rapport à 2004. Recueilli par CORINNE HYAFIL Promo du mois www.particulieremploi.fr Le recrutement en hausse les avantages des contrats spéciaux et autres emplois aidés auxquels ont droit RMistes, chômeurs longue durée, etc. Mais les emplois se dégottent au compte-gouttes. Je suis censée leur trouver du travail et je passe mon temps à régler des problèmes éloignés de l’emploi. Sans être travailleur social, je suis souvent à la limite du rôle de l’assistante sociale car la position de RMiste enfonce souvent la personne dans une désocialisation complète. Beaucoup de mes «clients» viennent d’arriver dans le Sud et se retrouvent isolés, seuls, sans famille, sans travail et souvent sans voiture. La misère n’est pas moins pénible au soleil. «J’ai six rendez-vous par jour de 9 à 17 heures. Il arrive que des gens ne se présentent pas, je dois veiller à ce qu’ils aient une absence justifiée. Trois rendez-vous manqués et je dois avertir la commission locale d’insertion. «Lors du premier entretien, je fais un accueil administratif: «Depuis combien de temps êtes-vous au RMI? Avez-vous des enfants?»Puis on commence à discuter: «Comment vous êtes-vous retrouvé au chômage? Avez-vous un CV? Quelle a été votre carrière?» Dans la plupart des cas, il y a une fracture. Un vécu trop lourd depuis l’enfance, un divorce, beaucoup de problèmes d’alcool. Une sorte de tabou impose qu’il ne faut pas écrire sur les fiches administratives “problème d’alcool” ou “problème de drogue” mais “problème de santé récurrent”. Par exemple, un RMiste était en voie de clochardisation, un gars intelligent qui avait sombré dans l’alcool. Je l’ai remonté peu à peu: il devait intégrer une entreprise d’insertion dans la taille de pierre. Mais les subventions auprès des associations de formation vont être réduites et il se peut qu’il ne soit pas pris. Je ne me vois pas le lui annoncer: ce projet est devenu son principal moteur.»• l y a une petite fille avec des ailes d’ange dans le dos sur la home page,deux silhouettes roses et féminines sur un fond de costards noirs. En lisant le sommaire, on croirait un nouveau site féminin tendance girlie. Sauf que, dans la rubrique «chouchous», sont classées les bonnes nouvelles de la cause féminine: «La Finlande toujours présidée par une femme»ou «Claire Malaurie, présidente de la chambre à la Cour des comptes». Et dans les «épinglés»: «EDF boute les femmes hors du CAC 40», «Prix des ingénieurs de l’année: huit hommes, zéro femmes. Plus jamais ça!» Le blog «Du rose dans le gris» est la première vitrine d’un «réseau de réseaux» de femmes cadres supérieurs: Accent sur Elles, Action de Femme, Arborus, European PWN, Administration Moderne ou HRM Women. Leur but: «Devenir un groupe de réflexion de référence, et aller plus loin dans nos actions pour une plus grande mixité dans la vie publique»,rapporte Lamia Ahmadaly, membre d’Accent sur Elles, qui encourage la promotion des femmes à Accenture. Le I blog rappelle qu’«aujourd’hui, les femmes comptent pour 56% des diplômés de l’enseignement supérieur, 30% des cadres en entreprises et… seulement 7% des conseils d’administration». Ce partage d’expériences sera utile. Une étude passionnante du Lab’Ho, l’Observatoire des hommes et des organisations, financé par Adec- Du rose dans le gris se veut un groupe de réflexion pour davantage de mixité. d’égalité, quand ils sont construits de cette manière, ne concernent qu’une petite partie des salariées: les futures mères, les femmes avec jeune enfant, celles qui veulent réussir “comme les hommes”.» Il s’agirait donc plutôt de permettre aux femmes de «vivre mieux» dans un «monde d’hommes». Résultat: «On fait entrer une minorité dans le groupe dominant sans changer les règles. La minorité ne réussit – évidemment – pas son intégration, échoue ou renonce… phénomène qui sert de CQFD: la preuve que les femmes ne seraient pas faites pour ça.» Les auteurs de l’étude donnent quelques pistes pour une politique de la diversité «moderne»: «ringardiser les stéréotypes sexués»,par exemple en valorisant la parentalité en général, et pas seulement maternelle, en modifiant profondément les règles d’avancement et de promotion, les calendriers de carrière (concentrées entre 28 et 35 ans) au lieu de se livrer au «rattrapage» pour les seules femmes.• co,rappelle en effet que nombre d’entreprises qui se sont lancées dans des «accords sur la diversité» perpétuent les discriminations et les stéréotypes en voulant bien faire… Quand elles s’attellent à l’égalité professionnelle, ces entreprises le font selon une approche très classique. «La plupart des mesures ne s’adressent qu’aux femmes. (…) L’égalité, ce serait de mieux protéger les femmes dominées contre les hommes qui incarnent SONYA FAURE la force et occupent le pouvoir. Maisles chantiers www.durosedanslegris.fr — www.labho.fr emploi LIBERATION Tous les lundis LUNDI 20 FÉVRIER 2006 V emploi LIBERATION.FR/EMPLOI Contacts ➜ Julie Le Bihan (01 44 78 30 00) Arnaud Prud’homme (01 44 78 30 00) , Alice Chanson (30 15) CENTRE HOSPITALIER DE MENTON Alpes-Maritimes RECHERCHE URGENT IDE / IADE/ IBODE Possibilité de logement au foyer infirmier Contacter Mme LEVESQUE Au 04.93.28.77.77 Association Sésame Autisme "La Montagne du Parisis" recherche son futur Directeur Général (FAM - ESAT - FOYER - SAS) A partir d'une expérience de Directeur réussie, diplôme éducateur spécialisé ou équivalent + E.N.S.P / C.A.F.D.E.S. ou équivalent. Faire offre avec CV (court) à : Monsieur Le Président CAT "La Montagne" Route stratégique 95240 CORMEILLES EN PARISIS ASTER RECHERCHE POUR TESTS DE MEDICAMENTS INDEMNISES JUSQU'À 3.800€ SELON VOS DISPONIBILITES : • Hommes de 18 à 45 ans • Femmes de 18 à 45 ans • Femmes de 18 à 40 ans sous contraception par MINIDRIL • Femmes ménopausées sans traitement substitutif hormonal • Hommes de 20 à 60 ans présentant des troubles de l’érection TEL. : 01 53 68 08 60 www.aster-cephac.com LE CENTRE HOSPITALIER DE LIBOURNE 1 307 lits, 27 km de BORDEAUX, possibilité de crêche, recrute Secteurs • Médecine Chirurgie Obstétrique • Personnes Agées I.D.E - I.B.O.D.E I.D.E EXPERIMENTE(E)S PEDIATRIE KINESITHERAPEUTES La Clinique BIZET est située dans le 16ème arrondissement, près de la Tour Eiffel. Cet établissement de 172 lits et places, avec 210 salariés, 35 heures, a mis au cœur de ses priorités la qualité de la prise en charge du patient. Les équipes médicales, infirmières et l’encadrement sont un de ses points forts. Ses pôles d’excellence sont la cardiologie (angio, coro, rythmo), la chirurgie digestive et urologique, la chirurgie réparatrice et esthétique, l’orthopédie et le vasculaire. Pour une meilleure sécurité de nos patients, nous disposons d’une réanimation chirurgicale et d’une unité de soins intensifs de cardiologie. Vous avez envie de prendre part à nos divers projets, Venez rejoindre nos équipes. INFIRMIER(E)S I.D.E - I.D.S.P Adresser lettre et CV s/réf. LIBE à Monsieur le Directeur des Ressources Humaines Centre Hospitalier, BP 199, 33505 Libourne cedex. Renseignements préalables auprès de : Direction des Ressources Humaines Tel. 05 57 55 26 70 Fax 05 57 55 34 94 Nous vous proposons des postes d’infirmières(ers) : › en CDI, › temps plein ou temps partiel, › jour ou nuit, › journées de travail en 12 heures, › prime de recrutement, › salaire convention + primes › 13ème mois Vous pouvez adresser votre CV et votre lettre de motivation à : Astrid Brobecker, Responsable des Ressources Humaines, Association Clinique Bizet - 23, rue Georges BIZET - 75116 PARIS TRAIT D’UNION Secteurs • Psychiatrie • Psychiatrie infanto-juvénile (199 lits et places) VI emploi LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 VILLE DE VALENCE (Drôme) au centre d’une agglomération de 120 000 habitants, recrute pour son SERVICE DE SOINS INFIRMIERS A DOMICILE (capacité actuelle de 92 places dont 2 pour personnes handicapées, 3 postes d’infirmiers coordinateurs adjoints et 17 postes d’auxiliaires de soins), un INFIRMIER COORDINATEUR ADJOINT H/F Sous l’autorité du Responsable du service, vous participez à l’élaboration du projet de soins individualisé ainsi qu’au diagnostic infirmier. Vous organisez et vous assurez le suivi des soins et veillez aux différents réajustements nécessaires. Vous coordonnez et animez l’équipe de votre secteur, assurez les transmissions quotidiennes avec les auxiliaires de soins. Vous participez activement aux projets du service et de la direction. Vous êtes enthousiasmé par l’animation d’une équipe et ce dans le cadre d’une approche du soin individualisée. Poste à temps incomplet à 1211 heures par an. Candidat potentiel à ce poste de catégorie B, nous vous invitons à adresser votre candidature : lettre de motivation manuscrite, photo et curriculum vitae, à : Madame le Maire Direction des Ressources Humaines - Place de la Liberté - BP 2119 26021 Valence Cedex - Tél : 04 75 79 22 37, avant le 28 février 2006, dernier délai. formation VII LIBERATION LUNDI 20 FÉVRIER 2006 assistanat Le lycée International de Los Angeles (LILA) recherche des enseignants pour le études Trocadéro. Chirurgiens-dentistes spécialisés recherchent : secondaire et l'élémentaire et un directeur du primaire pour la rentrée 2006. Consulter notre Web Site : www.lilaschool.com. Référence : « Employment/Job opportunities ». dessinateur LABEL-ANIM rech. dessinateur d'animation (style réaliste) pour turns et attitudes de personnages. Les provinciaux sont les bienvenus. 01.53.59.54.00. ou [email protected] presse Union Presse, revue Pro destinée aux marchands de journaux, recherche pour actualiser son annuaire sur la presse une personne organisée et rigoureuse disponible de la mi-février à fin avril. Salaire : 1.300 € bruts sur 13 mois. Adresser CV et lettre de motiv. manuscrite à : Union Presse, Rédaction, 16 place de la République 75010 Paris Secrétaire médicale dynamique, rigoureuse, très organisée, sens des responsabilités, présentation excellente, aisance téléphonique, anglais courant, maîtrise des outils informatiques (Word, Excel, Outlook et Internet). Salaire intéressant selon compétence. [email protected] hôtellerie Hotel*** La Rochelle. Design. Bar Lounge. Ouverture mai 06. Cherche directeur adjoint, réceptionniste et barman motivés et polyvalents. Bilingue. Envoyer lettres de motivation en français & anglais et CV à [email protected] job d’été Jobs d'été aux USA. Calvin-Thomas organise un "JOB FAIR" le 3 mars 2006 à Paris. Rencontre avec des employeurs américains pour choisir votre job. www.calvin-thomas.com N°indigo : 0825035000 Filiale industrielle d’un grand groupe installée dans l’Océan Indien, leader sur le marché des granulats et de la préfabrication sur l’Ile de Mayotte, certifiée ISO 9001 Version 2000, recrute dans le cadre du développement de son activité " Préfabrication BTP ", son : Responsable de site de production H/F Rattaché au responsable de l’activité BPE & Préfabrications, vous organisez la production de tuyaux en béton armé et de produits préfabriqués destinés au BTP, vous encadrez les équipes placées sous votre responsabilité, assurez le suivi de la qualité des produits, les contacts avec les clients, le développement de produits nouveaux et êtes chargé de la gestion et du suivi des coûts ainsi que du reporting de la production. Vous êtes idéalement issu d’une formation BTS ou DUT Génie Civil, fort d’une expérience de 5 ans dans le métier et attaché au respect des normes de qualité et de sécurité. Opérateurs de machines et équipements de préfabrication. H/F De formation Electromécanicien ou Electrotechnicien, vous serez chargés de la maintenance, du bon fonctionnement et du bon entretien de presses à parpaings, machine à tuyaux ou centrale à béton. Merci de nous envoyer votre candidature par courrier, à : ETPC ATOO recherche : ENQUETEURS Horaires : journée et soirée. Tél. Laurent : 01.70.36.97.85. free lance Graphiste free lance Maitrise de photoshop, illustrator, indesign. Propose sa collabo. avec maisons d'édition, agences de pub. 06.08.00.84.29. formation Contacts ➜ Mustapha Ouamrane (01 44 78 30 03) multimédia presse édition théâtre cours du soir Patrick Le Hir Free-lance PAO propose à agences et clients Maquette-Montage-Exe-Scann Retouche-Chromie-Fichiers prépress-Tél. : 01 43 72 45 81 email : [email protected] Graphiste-illustratrice free lance vous propose ses services de la conception à la réalisation pour affiches, flyers, plaquettes, etc. www.creabook.com : ref. muxx Illustratrice expérimentée Free-lance spécialisée univers enfants - Maîtrise illustrator Propose collaboration à éditeurs, agences, annonceurs Tél. : 01.42.02.36.89 demandes Paris Annie la Jardinière entretien créations, balcons, terrasses. Tél. : 06.64.12.62.85. Documentaliste fait recherches pour écrivain, journaliste, productions... Joindre le 06.63.86.13.41. RESP. EVENEMENTS & MEETINGS Conception, Organis. & Gestion France & International TB expérience, rech. missions CDD / CDI Tél : 06.86.92.70.20. F 39a diplômée cherche travail en tant que présence responsable ou dame de compagnie auprès de pers. âgées ou dépendantes le week-end. 06.66.10.73.09. JF cherche emploi agent de service - surveillante dans école. CNE accepté. 06.30.46.92.00. BP 256 - 97600 MAMOUDZOU - ILE DE MAYOTTE Ou par courriel : [email protected] Tous les jours enseignement ADMISSION TOUTE L'ANNEE Cours Michel GALABRU Théâtre des variétés Rens./Insc.: 06.13.42.26.69. Cours du soir Formations de comédiens : Prépa concours nationaux, Intensive, Non intensive www.studioalaindebock.com Tél. : 01.47.07.67.44. - Dessin - Atelier de modèle vivant - PAO - Peinture - Photographie - DAO - Scénographie Renseignements et inscriptions : Sonia 01.43.46.22.33. Stage conventionné AFDAS Jean-Paul DENIZON (13 ans de travail avec Peter Brook) dirigera atelier théâtral du 6/03 au 7/04/06. 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