Courbes intensité-potentiel Applications `a l`électrolyse
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Courbes intensité-potentiel Applications `a l`électrolyse
Sébastien Bourdreux Agrégation de Physique Université Blaise Pascal - Clermont-Ferrand Courbes intensité-potentiel Applications à l’électrolyse janvier 2004 Table des matières 1 Présentation des courbes i-E 1.1 Lien entre cinétique et intensité . . . . . . . . . . . . 1.1.1 Approche qualitative et conventions . . . . . . 1.1.2 Aspect quantitatif . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.3 Facteurs cinétiques . . . . . . . . . . . . . . . 1.2 Relevé expérimental des courbes i-E . . . . . . . . . . 1.2.1 Principe du montage . . . . . . . . . . . . . . 1.2.2 Exploitation des mesures . . . . . . . . . . . . 1.3 Des systèmes rapides et lents . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1 Caractérisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2 Surtensions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.3 Paliers de diffusion . . . . . . . . . . . . . . . 1.4 Exemples d’utilisation des courbes intensité-potentiel 1.4.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.2 Action des acides sur les métaux . . . . . . . 2 Réactions d’électrolyse 2.1 Quelques généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 Prévisions thermodynamiques . . . . . . . . . . . . 2.3 Utilisation des courbes intensité-potentiel . . . . . . 2.3.1 Mise en évidence des surtensions . . . . . . 2.3.2 Choix des réactions effectives : électrolyse du 2.4 Exemple : électrolyse du sulfate de zinc acidifié . . 2.4.1 Réactions aux électrodes . . . . . . . . . . . 2.4.2 Utilisation des courbes intensité-potentiel . . 2.5 Applications industrielles . . . . . . . . . . . . . . . 2.5.1 L’électrolyse du chlorure de sodium . . . . . 2.5.2 La cémentation . . . . . . . . . . . . . . . . 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . chlorure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 4 4 4 5 6 6 7 7 7 9 10 12 12 13 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . stanneux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 16 18 19 19 20 22 22 23 25 25 27 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction Enjeu industriel des réactions chimiques. Beaucoup de synthèses = compromis entre paramètres (température, pression, quantités de matière, etc...) Prévisions thermodynamiques très importantes, réalisables par les élèves, mais pas toujours les plus intéressantes, voire réelles. Importance de la cinétique de réaction Réactions électrochimiques (notamment électrolyses) très utilisées (intérêts métallurgie, énergie, simplicité...), cinétique décrite par courbes i-E. D’où l’intérêt de leur étude... 3 Chapitre 1 Présentation des courbes i-E 1.1 Lien entre cinétique et intensité 1.1.1 Approche qualitative et conventions La demi-équation électronique caractéristique d’un couple rédox correspond, en général, à une réaction fictive puisque les électrons n’existent pas à l’état libre en solution. En revanche, elle décrit un processus réel appelé réaction électrochimique lorsque cet échange d’électrons se déroule à la surface d’un solide conducteur qui peut accepter ou céder des électrons. a Ox + n e− b Red Le sens ”→” est celui de la réduction (gain d’électrons), l’autre celui de l’oxydation (perte d’électrons). Par convention, on admettra que l’intensité algébrique I du courant électrique traversant l’interface électrode-solution est comptée positivement dans le sens électrodesolution. Ainsi, si l’électrode fonctionne en anode, c’est-à-dire qu’elle est le siège d’une oxydation, les électrons libérés par le réducteur sont captés par l’électrode : une charge dq < 0 traverse l’interface solution-électrode, donc l’intensité correspondante est positive. En revanche, si l’électrode fonctionne en cathode, ie. qu’elle est le siège d’une réduction, des électrons passent de l’électrode vers l’espèce oxydante en solution : une charge dq < 0 traverse l’interface électrode-solution et l’intensité correspondant à ce transfert est négative. 1.1.2 Aspect quantitatif La quantité d’électrons mise en jeu pendant la durée dt au cours de laquelle l’avancement varie de dξ est n dξ. Il lui correspond une charge algébrique dq = n dξ NA .(−e) = −n F dξ 4 LC 40 - Courbes intensité-potentiel 5 où F est la constante de Faraday1 . Puisqu’on considère la réaction de réduction, cette charge traverse formellement l’interface électrode-solution dans ce sens, et I= dξ dq = −n F = −n F V dt dt où V désigne la vitesse globale de la réaction. Puisque 1 dn(Ox) 1 dn(Red) Vred = − = a dt b dt red red et Vox = 1 dn(Ox) a dt on obtient V= = ox 1 dn(Red) − b dt ox dξ = (Vox − Vred ) dt Finalement, on obtient I = +n F (Vox − Vred ) L’intensité traversant une électrode est proportionnelle à la vitesse des processus électrochimiques qui s’y déroulent. En comptant positivement l’intensité rentrant dans la solution, on obtient que – I est positive si l’électrode est une anode (siège d’une oxydation) – I est négative si l’électrode est une cathode (siège d’une réduction) I = Iox + Ired 1.1.3 Facteurs cinétiques Le milieu réactionnel étant hétérogène, la réaction est localisée au voisinage de l’interface électrode-solution et met donc en jeu – l’approche de l’électrode par les réactifs – les transformations, localisées dans une zone appelée double couche et pouvant comporter plusieurs étapes : transferts de protons ou de ligands, réactions de surface (adsorption, cristallisation, désorption...), transferts d’électrons – l’éloignement éventuel des produits de la réaction de l’électrode La vitesse globale de la réaction électrochimique dépend de l’ensemble de ces étapes, parallèles ou successives ; les deux premières constituent un passage obligé et représentent souvent les étapes cinétiquement limitantes de la réaction globale. Les facteurs cinétiques d’une réaction électrochimique sont les mêmes que ceux d’une réaction hétérogène ordinaire : concentration des espèces dissoutes ci , température T , nature de l’électrode, aire S de l’interface électrode-solution et état de cette interface. Cependant, un facteur supplémentaire intervient : le potentiel électrique de l’électrode (ou, plus exactement, la différence de potentiel entre l’électrode et la solution). En modifiant ce potentiel, 1 1 F = 96500 C. 6 LC 40 - Courbes intensité-potentiel on peut agir sur la vitesse des processus électrochimiques se déroulant sur l’électrode, et sur la vitesse du transfert des électrons. Ainsi, I = f (T, S, ci , V ) Les courbes représentant les variations de I en fonction de V , aux grandeurs T , S et ci fixées, sont appelées courbes intensité-potentiel (i-E) du couple Ox/Red pour l’électrode considérée. Remarque. Vred et Vox sont des grandeurs extensives. Il est parfois plus commode de définir une vitesse de réaction intensive, en l’occurrence une vitesse surfacique, obtenue en divisant la vitesse de réaction par la surface S de l’interface où se déroule la réaction. j = n F (vox − vred ) = jox + jred Les courbes j(V ) sont notamment utiles pour l’étude de phénomènes sur une seule électrode, en s’affranchissant de son aire ; en revanche, l’étude des dispositifs réels (toujours à deux électrodes) est faite à l’aide des courbes I(V ) permettant de traduire la conservation de la charge électrique. 1.2 1.2.1 Relevé expérimental des courbes i-E Principe du montage L’étude des courbes i-E se fait par un montage à trois électrodes. L’électrode étudiée, appelée électrode de travail (E.T.), peut être en position de cathode ou d’anode suivant la tension appliquée. Une deuxième électrode, en métal inerte, appelée contre-électrode (C.E.), permet la circulation LC 40 - Courbes intensité-potentiel 7 du courant électrique. Nous ne nous intéresserons pas aux réaction qui s’y produisent. Une dernière électrode, appelée électrode référence (E. réf.), est par exemple une électrode au calomel saturé. Pour jouer son rôle de référence des potentiels, elle doit être traversée par une intensité négligeable2 . Un générateur G permet enfin d’imposer une différence de potentiel (VET − VCE ) continue et stable entre l’électrode de travail et la contre-électrode. – si cette tension est positive, le courant I entre dans la solution par E.T. qui est donc l’anode siège de l’oxydation b Red → a Ox + n e− , et sort par C.E. jouant donc le rôle de cathode – si cette tension est négative, le courant entre dans la solution par C.E. et en sort par E.T. qui devient la cathode siège de la réduction a Ox + n e− → b Red Le courant est débité dans une résistance R et on mesure son intensité I au moyen d’un milliampèremètre. Un millivoltmètre permet de mesurer la tension U entre E.T. et E.Réf. La solution électrolytique est maintenue homogène par agitation mécanique. La durée de l’expérience est supposée suffisamment courte pour que la concentration de chaque espèce soit considérée constante et égale à sa valeur initiale. La température du système est maintenue elle aussi constante. 1.2.2 Exploitation des mesures Dans tous les cas, les potentiels sont mesurés par rapport à l’ESH. En particulier, le potentiel que prend l’électrode de référence par rapport à l’ESH est par définition son potentiel rédox Eref = E o + RT aox log nF ared On arrive finalement à la conclusion que le potentiel de l’électrode de travail par rapport à l’ESH est V = U + Eref Si (VET − VCE ) est nulle, l’électrode est abandonnée à elle-même et prend un état d’équilibre électrique. Le courant I qui la traverse est alors nul et le potentiel qu’elle prend par rapport à l’ESH est caractéristique de son état d’équilibre : c’est le potentiel rédox du couple étudié o (V )I=0 = (U )I=0 + Eref = EOx/Red = EOx/Red + 0, 06 aox ln n ared Si (VET − VCE ) est non nulle, le courant I à travers E.T. est généralement non nul et le potentiel V n’est plus égal au potentiel d’équilibre du couple Ox/Red. 1.3 1.3.1 Des systèmes rapides et lents Caractérisation On appellera dorénavant système électrochimique l’ensemble d’un couple rédox et de l’électrode au contact de laquelle se déroule la réaction électrochimique correspondante. 2 Le voltmètre utilisé dans le montage a une très grande impédance, si bien que la quasi-totalité du courant passe dans E.T. 8 LC 40 - Courbes intensité-potentiel Selon l’allure des courbes i-E obtenues, on peut distinguer deux types de systèmes. a - Systèmes rapides Dès que (V − EOx/Red ) est différent de 0, l’intensité I qui traverse E.T. est importante, positive si cette d.d.p. est positive, négative sinon. La pente de la courbe I = f (V ) au voisinage du point d’équilibre est très grande. L’électrode peut être parcourue par un courant important, même si son potentiel est proche de son potentiel d’équilibre EOx/Red . Ceci traduit la rapidité des échanges électroniques du couple sur l’électrode, d’où le nom donné à ces systèmes. b - Systèmes lents Les échanges électroniques du couple sur l’électrode sont lents. Quand (V −EOx/Red ) cesse d’être nul, les échanges deviennent un peu plus rapides, mais le courant électrique reste indécelable ; en augmentant |V − EOx/Red | on augmente la vitesse de ces échanges et on finit par obtenir un courant mesurable. Il existe donc une plage de (V − EOx/Red ) pour laquelle l’intensité I qui traverse E.T. reste quasi-nulle. La pente de la courbe I = f (V ) au voisinage du point d’équilibre est quasi-nulle. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 9 En somme, le caractère lent ou rapide est caractéristique d’un système électrochimique couple rédox et électrode - : un même couple rédox peut avoir des comportements différents sur des électrodes différentes. Néanmoins, lorsque la réaction électrochimique s’accompagne d’importantes modifications de structure, le couple rédox est souvent lent, quelle que soit l’électrode utilisée. Pour le couple (H3 O+ /H2 ), les échanges sont deux millions de fois plus rapides sur une électrode de platine que sur une électrode de mercure. Quelle que soit l’électrode utilisée, le couple (O2 /H2 O) est lent. Seuls les systèmes rapides ont un potentiel d’équilibre - ie. à courant nul - bien défini : c’est pour cela que les électrodes de référence sont toujours constituées de systèmes rapides comme le couple (H3 O+ /H2 ) sur platine de l’ESH. 1.3.2 Surtensions La quantité (V − EOx/Red ) est appelée surtension pour le système considéré : elle dépend de l’intensité qui traverse l’électrode, et selon le signe de cette d.d.p., on distingue deux cas, – si E.T. est une anode, elle est le siège de l’oxydation b Red → a Ox + n e− , la quantité (V − EOx/Red ) est positive et appelée surtension anodique ηa . – si E.T. est une cathode, siège de la réduction a Ox + n e− → b Red, la quantité (V − EOx/Red ), négative, est appelée surtension cathodique ηc . Pour obtenir une tension IM , il faut porter l’électrode au potentiel VM tel que VM = EOx/Red + η(IM ) où η(IM ) est la surtension pour l’intensité IM . Par convention, la surtension anodique ηa est positive alors que la surtension cathodique ηc est négative. 10 LC 40 - Courbes intensité-potentiel Le comportement des surtensions à la limite I → 0 permet de différencier systèmes lents et systèmes rapides. Pour ces derniers, η s’annule lorsque le courant I s’annule. En revanche, pour un système lent, ηa et ηc peuvent être non-nulles même si l’intensité I est nulle. On appelle parfois surtensions à vide (notées ηo ) les valeurs extrêmes de (V − EOx/Red ) permettant d’obtenir une intensité mesurable. Les valeurs de ηo dépendent alors de l’intensité du courant détectable, c’est-à-dire de l’appareil de mesure choisi... 1.3.3 Paliers de diffusion Si la surtension appliquée à l’électrode devient importante, le processus de transfert de charge devient important et cesse d’être l’étape cinétiquement déterminante. C’est alors le LC 40 - Courbes intensité-potentiel 11 processus de transfert de matière – par migration : déplacement des ions sous l’action du champ électrique créé par le gradient de potentiel dans l’électrolyte – par convection : déplacement des molécules ou des ions sous l’effet d’un gradient de masse volumique ou d’une agitation mécanique – par diffusion : déplacement des molécules ou des ions sous l’effet d’un gradient de concentration ou de potentiel chimique (loi de Fick) qui devient, en général, cinétiquement limitant. Or, la vitesse de ce processus est pratiquement indépendante du potentiel de l’élctrode : il en est donc de même de la vitesse globale et donc de l’intensité du courant traversant l’électrode. La courbe intensité-potentiel présente alors un palier, dont l’ordonnée est proportionnelle à la concentration en réactifs. La courbe précédente concerne le couple (F e3+ /F e2+ ) sur électrode de platine ; les concentrations sont de 10 mmol.L−1 et la solution est acidifiée par de l’acide sulfurique demi-molaire afin d’assurer que les ions ferreux subsistent en solution. Si le réactif considéré est le solvant, sa concentration est si élevée que le transfert de matière ne devient jamais le processus limitant ; la courbe i-E ne présente pas de palier. Il en est de même si le réactif est le matériau constituant l’électrode lors d’une oxydation. 12 LC 40 - Courbes intensité-potentiel A gauche, une électrode de platine plonge dans une solution d’acide sulfurique molaire. L’oxydation de l’eau ne fait pas apparaı̂tre de palier. L’étude du couple (Ag + /Ag), à la concentration de 2, 5 mmol.L−1 sur une électrode d’argent montre qu’un palier de diffusion apparaı̂t pour la réduction des ions Ag + , mais pas pour l’oxydation du métal de l’électrode, puisque le transfert de matière n’intervient pas pour ce réactif. 1.4 1.4.1 Exemples d’utilisation des courbes intensité-potentiel Généralités Les courbes i-E sont utilisables pour des réaction rédox mettant en jeu un métal. Elles permettent d’interpréter des situations pour lesquelles les prévisions thermodynamiques ont pu se trouver en défaut. Cependant, comme toutes les réactions d’oxydoréduction mettent en jeu des couples rédox, il faut prendre en compte les courbes i-E de deux systèmes électrochimiques. La non-existence d’électrons libres dans la solution impose la relation de conservation Ia,2 = −Ic,1 si le premier couple (1) subit une réduction et le second (2) une oxydation. La vitesse des échanges électroniques entre ces deux couples se visualise à partir des courbes I = f (V ) grâce à la condition précédente traduisant le caractère conservatif de la charge. Les courbes suivantes présentent les différents cas de figure lorsqu’on met en présence un oxydant Ox1 et un réducteur Red2 . Ces courbes traduisent la situation instantanée du système ; elles se modifient au fur et à mesure que le système évolue. E1 et E2 représentent les potentiels rédox des deux couples dans l’état initial du système. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 13 Dans les cas a), b) et c), l’ordre choisi pour E1 et E2 , E1 > E2 met en évidence le caractère naturel de l’oxydation du réducteur Red2 par l’oxydant Ox1 . La valeur de I montre que la réaction est rapide pour a), lente pour b) et infiniment lente pour c). En revanche, dans le cas d), cette réaction n’est pas naturelle et I ne peut être que nulle. 1.4.2 Action des acides sur les métaux Etudions l’exemple de l’action de l’acide chlorhydrique sur le plomb. Le potentiel standard du couple (P b2+ /P b) vaut E o (P b2+ /P b) = −0, 13 V A 298 K la constante d’équilibre K o de la réaction P b + 2 H3 O+ → P b2+ + H2 (g) + 2 H2 O 14 LC 40 - Courbes intensité-potentiel est telle que log K o = 2(E o (H3 O+ /H2 ) − E p (P b2+ /P b)) 0, 26 = 0, 059 0, 059 soit K o ' 2, 5.104 . En admettant que le gaz H2 se dégage sous la pression atmosphérique, voisine de po , il suffit que la concentration d’équilibre de H3 O+ soit supérieure à 10−2 mol.L−1 pour que celle des ions plomb (II) dépasse 1 mol.L−1 . Une solution d’acide chlorhydrique à 1 mol.L−1 est donc capable d’oxyder le métal plomb. Or, l’expérience n’est pas concluante : aucun dégagement gazeux n’est visible à la surface du métal ; cette situation subsiste encore après un chauffage du mélange réactionnel : le blocage cinétique est donc très important. Si, en revanche, on touche le morceau de plomb immergé dans l’acide avec un fil de platine, on observe un dégagement de dihydrogène sur le platine, tandis que la surface du plomb change d’apparence. Ces expériences montrent que le blocage cinétique de l’attaque du plomb par les ions H3 O+ provient de la surtension cathodique du couple (H3 O+ /H2 O) sur une surface de plomb. Cette surtension, qui dépend du métal sur lequel s’effectue le dégagement gazeux, est négligeable sur le platine, ce qui permet l’attaque du métal plomb. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 15 Autre exemple : bien que la constante d’équilibre de la réaction Zn + 2 H3 O+ → Zn2+ + H2 (g) + 2 H2 O soit de l’ordre de 1025 à 298 K, le dégagement de dihydrogène observé est très variable ; abondant avec un métal impur, il devient très faible avec du zinc pur et pratiquement nul avec du zinc amalgamé3 . 3 Un amalgame est un alliage de mercure. Chapitre 2 Réactions d’électrolyse 2.1 Quelques généralités Un électrolyseur est un système constitué par deux électrodes plongeant dans une même solution conductrice ou dans deux solutions en contact électrique grâce à une paroi poreuse ; un générateur électrique permet d’imposer le sens du passage du courant et de fixer soit la tension entre les électrodes soit l’intensité du courant qui traverse le circuit. Le passage du courant dans le circuit est assuré par le déplacement des ions dans la solution et par celui des électrons dans les électrodes et les fils extérieurs. Aux interface électrodesolution se produisent des changements de porteurs de charge qui correspondent à des échanges d’électrons entre les ions et les électrodes, c’est-à-dire à des réactions électrochimiques localisées à la surface des électrodes. Sous l’influence du générateur, qui impose le sens du courant en servant de ”pompe à électrons”, 16 LC 40 - Courbes intensité-potentiel 17 – une oxydation a lieu à l’anode (borne +), qui collecte de électrons arrachés aux espèces qui viennent à son contact – une réduction a lieu à l’anode (borne -), qui au contraire fournit des électrons aux espèces qui viennent à son contact La neutralité électrique de la solution n’est maintenue à tout moment que si les quantités d’électrons échangées à l’anode et à la cathode sont égales. Il existe une tension seuil Uo au-dessous de laquelle n’a pour ainsi dire pas lieu. Lorsque l’électrolyse se déroule, UAC est pratiquement une fonction affine de l’intensité I. On écrira donc que UAC = r I + E 0 avec r la résistance interne de l’électrolyseur et E’ sa force contre-électromotrice. L’électrolyse est une réaction non naturelle car elle ne satisfait pas au critère d’évolution spontanée d’un système chimique A dξ > 0 En effet, l’électrolyseur constitue un système électrochimique complexe et l’inégalité qui régit son évolution, à température T et pression P constantes, n’est pas dG 6 0. En effet, pour un système fermé subissant une évolution monobare (Pext = cte) et monotherme (Text = cte) entre deux états d’équilibre mécanique et thermodynamique, les deux premiers principes de la thermodynamique donnent U2 − U1 = W1→2 + Q1→2 S2 − S1 > Q1→2 Text 18 LC 40 - Courbes intensité-potentiel soit p ∗ Text .(S2 − S1 ) > U2 − U1 − (W1→2 + W1→2 ) | {z } W (1→2) p Sachant que le travail volumique des forces de pression s’écrit W1→2 = −Pext (V2 − V1 ), ∗ > U2 − U1 − Pext (V2 − V1 ) − Text (S2 − S1 ) W1→2 c’est-à-dire ∗ G2 − G1 6 W1→2 Au cours de l’évolution monobare et monotherme d’un système fermé entre deux états d’équilibre thermodynamique et mécanique, la variation d’enthalpie libre est inférieure (ou égale si la transformation est réversible) au travail non volumique échangé avec l’extérieur. dG 6 δW ∗ Ce travail représente ici le travail électrocinétique qu’échange le système électrochimique avec l’extérieur. L’électrolyse est une transformation endoénergétique, qui ne se produit que grâce à l’énergie fournie par le générateur. La puissance électrocinétique consommée par l’électrolyseur se compose de deux termes, l’un correspondant à la puissance que nécessite la transformation chimique (E.I), l’autre à une puissance thermique dissipée au cours de la transformation (rI 2 ) 2.2 Prévisions thermodynamiques Soit les réactions suivantes. A l’anode, l’oxydation d Red2 → c Ox2 + n2 e− A la cathode, la réduction a Ox1 + n1 e− → b Red2 Le bilan est donc n2 a Ox1 + n1 d Red2 → n2 b Red1 + n1 c Ox2 L’affinité chimique A du système pour cette réaction permet d’écrire dGT,P = −A dξ = ∆r G dξ = n2 .∆r G1 − n1 .∆r G2 c’est-à-dire dGT,P = n1 .n2 .F.(E2 − E1 ) dξ | {z } n Pendant le temps dt, le travail électrocinétique échangé par l’électrolyseur s’écrit δW ∗ = UAC .I.dt = UAC .dq = UAC .n.F.dξ Le critère d’évolution du système se met donc sous la forme n.F.(E2 − E1 ).dξ 6 UAC .n.F.dξ et l’électrolyse ne peut avoir lieu que si UAC > Uo = E2 − E1 . LC 40 - Courbes intensité-potentiel 19 – le potentiel VA doit être supérieur au potentiel d’équilibre du couple dont le réducteur est oxydé à l’anode – le potentiel VC doit être inférieur au potentiel d’équilibre du couple dont l’oxydant est réduit à la cathode Même dans une solution aqueuse ne contenant qu’un seul type de cation et un seul type d’anion, plusieurs réactions électrochimiques sont envisageables sur chacune des électrodes. – à l’anode, trois réactions d’oxydation : celle des anions de la solution, celle des molécules d’eau et celle du matériau constituant l’électrode – à la cathode, deux réactions de réduction peuvent se dérouler : celle des cations de la solution et celle des molécules d’eau Quand UAC croı̂t à partir de zéro, l’électrolyse commence quand la valeur UAC est suffisante pour que se produisent simultanément – l’oxydation la plus facile à l’anode : VA doit être supérieur au potentiel d’équilibre dont le réducteur est le plus facile à oxyder, ie. du couple de plus bas potentiel rédox – la réduction la plus facile à la cathode : VC doit être inférieur au potentiel d’équilibre du couple dont l’oxydant est le plus facile à réduire, ie. du couple de plus haut potentiel rédox Ces prévisions, basées sur des considérations purement thermodynamiques, peuvent être infirmées par l’expérience si les vitesses des réactions concurrentes sont très différentes. C’est souvent le cas lorsque des dégagements gazeux interviennent aux électrodes. On observe alors des surtensions qui augmentent la tension à appliquer aux électrodes pour observer l’électrolyse. L’existence de ces surtensions explique ainsi que les prévisions thermodynamiques soient parfois prises en défaut. 2.3 Utilisation des courbes intensité-potentiel Les courbes i-E permettent de bien visualiser les facteurs cinétiques et thermodynamiques qui interviennent lors d’une électrolyse. Ces facteurs interviennent dans la relation entre UAC et I d’une part, et dans le choix des réactions se produisant au électrodes d’autre part. 2.3.1 Mise en évidence des surtensions Soit, toujours, l’électrolyse de bilan (cathode) a Ox1 +n1 e− → b Red1 ×n2 − (anode d Red2 → c Ox2 +n2 e ×n1 (bilan) n2 a Ox1 +n1 d Red2 → n2 b Red1 +n1 c Ox2 Supposons connues, dans les conditions initiales de l’expérience, les courbes i-E des deux couples sur les électrodes utilisées. Le schéma suivant montre qe la tension de seuil d’électrolyse est effectivement supérieure à (E2 − E1 ) en raison des surtensions à vide (UAC )i=0 = (E2 + ηo,a ) − (E1 + ηo,c ) 20 LC 40 - Courbes intensité-potentiel ηo,a et ηo,c désignant les surtensions nécessaires pour que commence l’électrolyse ; elles sont d’autant plus importantes que les couples considérés sont lents sur les électrodes employées. Lors de l’électrolyse, quelle que soit la d.d.p. UAC appliquée entre les électrodes, l’intensité traversant les deux électrodes est la même en valeur absolue, soit en valeur algébrique, avec Ia > 0 et Ic < 0 Ia = −Ic La relation précédente permet la détermination graphique de la d.d.p. UAC à appliquer pour obtenir un courant d’intensité I = Ia . En réalité, on détermine ainsi non pas la tension d’électrolyse UAC mais la partie chimique, c’est-à-dire thermodynamique (E2 − E1 ) et cinétique (ηa − ηc ), de cette tension. En effet, la colonne de solution entre les électrodes présente une résistance R, si bien qu’une tension R.I s’ajoute à la valeur lue sur le diagramme. UAC = R.I (E − E ) +(ηa − ηc )I + |{z} | {z } | 2 {z 1} thermodynamique 2.3.2 cinetique ohmique Choix des réactions effectives : électrolyse du chlorure stanneux Cette électrolyse se caractérise par un dégagement de dichlore à l’anode et une arborescence d’étain sur l’anode. Considérons une solution de chlorure d’étain (II). Cette solution contient des molécules d’eau, des ions hydronium H3 O+ , des ions étain (II) Sn2+ , et des ions chlorure Cl− . Ces quatre espèces appartiennent à quatre couples rédox. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 21 Les concentrations sont ici de l’ordre de 0, 1 mol.L−1 pour Sn2+ , 1 mol.L−1 pour H3 O+ et 1, 2 mol.L−1 pour Cl− . Deux oxydations peuvent alors avoir lieu : celle des ions chlorure en dichlore, et celle des molécules d’eau en dioxygène. 3 H2 O → 2 H3 O+ + 2 e− + 1/2 O2 E ' +1, 23 V 2 Cl− → Cl2 (g) + 2 e− E ' 1, 36 V D’une point de vue thermodynamique, l’oxydation la plus facile à réaliser est celle des molécules d’eau en dioxygène. Deux réductions peuvent avoir lieu à la cathode, celle des ions hydronium en dihydrogène et celle des ions Sn2+ en étain métallique. 3 H3 O+ + 2 e− → H2 + 2 H2 O E ' +0, 00 V Sn2+ + 2 e− → Sn E ' −0, 17 V Du seul point de vue thermodynamique, la réduction la plus facile à réaliser est celle des ions hydronium en dihydrogène. Quand l’électrolyse commence, les réactions qui devraient se produire sont à l’anode : 3 H2 O → 2 H3 O+ + 2 e− + (1/2) O2 à la cathode : 2 H3 O+ + 2 e− → H2 + 2 H2 0 avec le bilan : H2 O → H2 + (1/2) O2 Leur bilan serait donc celui de l’électrolyse de l’eau. L’utilisation de critères purement thermodynamiques ne permet donc pas de rendre compte des phénomènes observés. 22 LC 40 - Courbes intensité-potentiel Voici l’aspect des courbes intensité-potentiel pour le système étudié. Le couple (O2 /H2 O) est très lent sur graphite ; sa surtension anodique suffit à compenser l’écart entre les potentiels des couples (O2 /H2 O) et (Cl2 /Cl− ). De même, la forte surtension cathodique du couple (H3 O+ /H2 ) compense largement l’écart entre les potentiels des couples (H3 O+ /H2 ) et (Sn2+ /Sn). Ainsi, le rôle des surtensions peut être déterminant : elles peuvent fausser les prévisions quantitatives portant sur la tension minimale nécessaire à l’obtention d’une électrolyse, mais elles peuvent même fausser les prévisions qualitatives portant sur la nature des réactions aux électrodes. Les réactions anodique et cathodique sont sous contrôle cinétique : les réactions effectivement observées ne sont pas les plus faciles thermodynamiquement, mais les plus rapides. Remarquons enfin que si l’on augmente encore UAC , on observe à la cathode la réduction simultanée des ions hydronium et étain (II), et à l’anode l’oxydation simultanée de l’eau et des ions chlorure. 2.4 2.4.1 Exemple : électrolyse du sulfate de zinc acidifié Réactions aux électrodes On considère une solution de sulfate de zinc (II) à 2 mol.L−1 acidifiée par de l’acide sulfurique à 1, 5 mol.L−1 : elle contient essentiellement des molécules d’eau, des ions hydronium H3 O+ , hydrogénosulfate HSO4− et zinc (II) Zn2+ . On effectue son électrolyse entre une cathode en zinc très pur et une anode inattaquable (platine). Les quatre espèces présentent dans la solution appartiennent à cinq couples rédox dont les potentiels standards sont les suivants. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 23 Deux oxydations peuvent avoir lieu à l’anode, celle des ions hydrogénosulfate HSO4− en ions peroxodisulfate S2 O82− et celle des molécules d’eau. 3 H2 O → 2 H3 O+ + 2 e− + (1/2) O2 E o = +1, 23 V − 2− + − 2 HSO4 + 2 H2 O → S2 O8 + 2 H3 O + 2 e E o ' 2, 08 V Du seul point de vue thermodynamique, l’oxydation la plus facile à réaliser est celle de l’eau en dioxygène. Trois réductions peuvent avoir lieu à la cathode, celle des ions hydronium en dihydrogène, celle des ions zinc en métal zinc et celle des ions hydrogénosulfate en dioxyde de soufre selon 2 H3 O+ + 2 e− → H2 + 2 H2 O E o ' +0, 00 V − HSO4 + 3 H3 O+ + 2e− → SO2 + 5 H2 O E o = +0, 17 V Zn2+ + 2 e− → Zn E o ' −0, 76 V Du seul point de vue thermodynamique, la réduction la plus facile à réaliser est celle des ions hydrogénosulfate HSO4− en dioxyde de soufre SO2 . Du seul point de vue thermodynamique, les réactions les plus faciles à réaliser sont donc à l’anode : 3 H2 O → 2 H3 O+ + 2 e− + (1/2) O2 à la cathode : HSO4− + 3 H3 O+ + 2 e− → SO2 + 5 H2 O 2.4.2 Utilisation des courbes intensité-potentiel La courbe correspondant à la réduction de HSO4− en SO2 n’y figure pas. En effet, quels que soient le pH de la solution et l’électrode utilisée, la réduction électrochimique du soufre (VI) en 24 LC 40 - Courbes intensité-potentiel soufre (IV), c’est-à-dire HSO4− → SO2 SO42− → HSO3− , SO32− n’est jamais observée ; cette réaction est ralentie pas une très forte surtension qui traduit l’importance des changements de structure correspondants. Quand on diminue Vc , la réduction du solvant (ou d’autres oxydants) intervient toujours avant celle du soufre (VI). Les courbes précédentes concernent l’électrolyse d’une solution sulfurique de zinc (II). Sur Zn pur, la surtension cathodique à vide pour le couple (H3 O+ /H2 ) est de l’ordre de -0,9 V. La surtension anodique à vide pour le couple (O2 /H2 O) est de l’ordre de 0,62 V tandis qu’elle est faible pour le couple (S2 O82− /HSO4− ). En solution aqueuse, les ions hydrogénosulfate HSO4− ne sont pas électroactifs pour la réduction. Les courbes précédentes montrent que même avec une électrode de mercure sur laquelle la surtension cathodique de réduction des ions H3 O+ est de l’ordre de -1,2 V, la réduction électrochimique des ions hSO4− n’est pas observée ; la surtension cathodique de la réduction des ions HSO4− en dioxyde de soufre SO2 est donc inférieure à -1,37 V ! A l’anode, bien que le couple (O2 /H2 O) soit toujours lent, la surtension anodique ne suffit pas à compenser l’écart entre les potentiels des couples (O2 /H2 O) et (S2 O82− /HSO4− ). A la cathode, aucune surtension à vide n’entrave la réduction des ions zinc (II) qui commence dès que Vc devient inférieur à -0,76 V. Le dégagement de dihydrogène H2 est très lent sur une surface de zinc ou de plomb. En conclusion, si on se contente d’une faible densité de courant, le bilan de l’électrolyse est donc à l’anode 3 H2 O → 2 H3 O+ + 2 e− + (1/2) O2 à la cathode Zn2+ + 2 e− → Zn A l’anode, la cinétique n’intervient que pour augmenter la tension de seuil d’oxydation, mais elle ne modifie pas la nature du réactif qui subit cette oxydation. La réaction cathodique, en revanche, est sous contrôle cinétique : la réaction observée la première n’est pas la plus facile thermodynamiquement (c’est-à-dire celle de l’oxydant le plus fort), mais la plus rapide. LC 40 - Courbes intensité-potentiel 25 Si on utilise une densité de courant plus forte, il apparaı̂t à chaque électrode une réaction parasite à l’anode 2 HSO4− + 2 H2 O → S2 O82− + 2 H3 O+ + 2 e− à la cathode 2 H3 O+ + 2 e− → H2 + 2 H2 O Ces réactions permettent notamment d’expliquer pourquoi la masse de zinc réellement obtenue est inférieure à la valeur qu’on pourrait calculer connaissant l’intensité I (maintenue constante) et le temps ∆t de l’électrolyse. Le rendement faradique (rappot de l’intensité d’obtention du métal à l’intensité totale) est généralement de l’ordre de 90 %. 2.5 2.5.1 Applications industrielles L’électrolyse du chlorure de sodium C’est une électrolyse d’importance industrielle considérable puisque c’est la source majoritaire de production de dichlore et de soude. Deux procédés traditionnels sont employés industriellement : le procédé à cathode de mercure, et le procédé à diaphragme (cathode de fer et compartiments séparés). Suivant la nature des électrodes, les réactions aux électrodes diffèrent. Seule une étude des courbes i-E permet d’interpréter les différences obtenues. Le matériau constituant l’anode, le graphite, est tel qu’à sa surface l’oxydation de l’eau est lente alors que celle des chlorure est rapide, la courbe i-E d’oxydation de l’eau étant déplacée vers les potentiels positifs. Bien que la réaction soit thermodynamique moins favorable, on observe essentiellement l’oxydation des chlorures, et donc le dégagement de dichlore. La réaction cathodique dépend de la nature de la cathode : la réduction de l’eau, assez rapide sur le platine, s’effectue à vitesse moyenne sur des métaux tels que le fer et est très lente sur le mercure. Le pH de la solution de NaCl utilisée est de l’ordre de 8 ; par ailleurs, E o (Cl2 /Cl− ) = 1, 36 V E o (H + /H2 ) = 0, 00 V 26 LC 40 - Courbes intensité-potentiel E o (N a+ /N a) = −2, 70 V Cathode de fer Sur cette cathode, on observe la réaction H2 O + e− → (1/2) H2 + OH − Le bilan de cette électrolyse s’écrira donc Cl− + H2 O → (1/2) Cl2 + (1/2) H2 + OH − La tension de seuil doit à priori valoir Umin = ηoa − ηoc = 1, 4 − (−1, 2) = 2, 6 V mais l’échauffement du métal doit être pris en compte via une tension ohmique : on en déduit qu’en fait Umin = EA − EC + R.I = EN ernst + (ηa − ηc ) + R.I L’utilisation d’un diaphragme permet en fait de former deux comportement et d’éviter la formation d’eau de Javel (ClO− ,NaCl) par combinaison des ions chlorure et hydroxyde Cl2 + 2 HO− → ClO− + Cl− + H2 O Cathode de mercure Sur cette cathode, la réaction observée est N a+ e− → N a d’où la production de soude, qu’on peut mettre en évidence à l’aide de phénolphtaléine. En fait, c’est un amalgame de sodium qui se forme, relativement stable en présence d’eau, qu’on peut décomposer suivant les réactions N a → N a+ + e− H2 O + e− → HO− + (1/2) H2 Cette décomposition est lente, parce que le système rédox (H2 O/H2 ) est très lent sur le mercure. Elle peut être effectuée plus rapidement si on plonge dans cet amalgame une fil de platine ou de carbone : le système (H2 O/H2 ) y est beaucoup plus rapide (sa surtension diminue). Le bilan de l’électrolyse n’est plus le même : Cl− + N a+ → (1/2) Cl2 + N a La tension minimale, hors terme ohmique, est ici de Umin = ηoa − ηoc = 1, 4 − (−1, 8) = 3, 2 V LC 40 - Courbes intensité-potentiel 27 Remarque : précisions sur ce phénomène d’inversion des courbes i-E. Compte tenu du pH, on peut par exemple précisément comparer les surtensions du couple (H + /H2 ) sur cathode de fer et sur cathode de mercure. En effet, EN ernst (H + /H2 ) = 0 − 0, 06.pH = −0, 48 V On en déduit donc ηF e = −1, 2 − (−0, 48) = −0, 72 V et ηHg = −2 − (−0, 48) = −1, 52 V La surtension de ce couple est plus grande sur le mercure que sur le fer : ceci explique que les réactions d’électrolyse sont différentes selon la nature de l’électrode. 2.5.2 La cémentation En hydrométallurgie, la réduction d’un cation métallique par un métal est appelée cémentation. Il s’agit de l’un des plus anciens procédés électrochimiques mis en jeu en métallurgie. Elle est utilisée pour la récupération des métaux précieux, pour celle du cuivre, dans les solutions de lessivage des minerais pauvres, ou pour la purification des solutions avant l’électrolyse. Considérons par exemple l’action d’une solution de nitrate d’argent sur le métal cuivre. A 298 K, les potentiels standards des couples concernés sont E o (Ag + /Ag) = +0, 80 V E o (Cu2+ /Cu) = +0, 34 V La constante d’équilibre de la réaction Cu + 2 Ag + → Cu2+ + 2 Ag est telle que log K o = 2 (E o (Ag + /Ag) − E o (Cu2+ /Cu)) 0, 92 = ' 4.1015 0, 059 0, 059 La réaction est donc quantitative ; elle est, en outre, assez rapide, comme le montrent les courbes intensité-potentiel correspondantes, au début de la réaction, puis après quelques instants. La vitesse de réaction diminue car la concentration en ions argent diminue. 28 LC 40 - Courbes intensité-potentiel Préparation industrielle du zinc Après les lixiviations (mise en solution du minerai et de sa gangue après grillage à l’air), la solution contient, outre les ions Zn2+ , un certain nombre de cations métalliques. metalM [M 2+ ] (mol.L−1 ) E o (M 2+ /M ) (V ) Mn 0, 09 −1, 17 Zn 2, 3 −0, 76 0, 005 −0, 40 Cd −4 10 −0, 29 Co 10−4 −0, 25 Ni 0, 008 +0, 34 Cu L’élimination de la plupart d’entre eux est effectuée par cémentation, c’est-à-dire par réduction à l’aide d’un excès important de poudre de zinc. L’emploi de zinc permet d’éviter l’introduction d’ions étrangers. Les ions M n2+ et Zn2+ , non réduits, resteront en solution, mais les autres subiront la réduction Zn + M 2+ → Zn2+ + M Les ions Cu2+ et Cd2+ sont très facilement réduits ; la réaction est plus délicate pour N i2+ et Co2+ , qui demandent la présence d’activateurs et d’une température de 75 à 95o C. L’aspect cinétique de ces phénomènes est facilement interprété au vu des courbes intensitépotentiel des différents couples1 . 1 La courbe relative à la réduction des ions N i2+ est semblable à celle relative à la réductiond es ions Co2+ . LC 40 - Courbes intensité-potentiel 29 Nécessité de la cémentation Mettons en évidence la nécessité de la purification par cémentation : supposons que la solution à électrolyser contienne ces impuretés. D’après la figure suivante (avant cémentation), la réduction cathodique de la majorité d’entre elles est plus facile que celle des ions Zn2+ . Le dépôt obtenu est donc du zinc impur, ce qui a un double inconvénient – d’une part, cela risque de rendre nécessaire une opération supplémentairede purification du métal – d’autre part, cela diminue la surtension cathodique du couple H3 O+ /H2 : une part croissante du courant d’électrolyse est alors consommée par cette réaction parasite, ce qui diminue le rendement en courant de l’opération 30 LC 40 - Courbes intensité-potentiel Electrolyse industrielle L’électrode se déroule entre une cathode d’aluminium et une anode de plomb suivant la réaction 1 ZnSO4 + H2 O → Zn + H2 SO4 + O2 2 La couche d’alumine qui se forme sur les cathodes évite une adhérence trop grande du zinc sur le support, ce qui permet de décoller relativement facilement le dépôt de zinc. Les cellules sont constituées de batteries d’anodes et de cathodes, jusqu’à 86 cathodes de superficie 1, 6 m2 . Le dépôt se produit sur les deux faces. L’intensité par cellule varie de 50.000 à 115.000 ampères et la production par cellule de 1,25 à 3 tonnes par jour. La durée du dépôt avant extraction des cathodes est de 48 heures 2 . Le milieu est une solution acide de sulfate de zinc dont la composition est proche de 150 à 190 g.L−1 d’acide sulfurique et de 50 à 70 g.L−1 de zinc sous forme de ZnSO4 . La température étant maintenue entre 30 et 40o C. Les réactions élémentaires sont – à la cathode (réduction) Zn2+ + 2e− = Zn E o = −0, 76 V sans oublier 2H + + 2e− → H2 – à l’anode (oxydation) 2H2 O → O2 + 4H + + 4e− E o = +1, 23 V La tension d’électrolyse minimum est U = 2, 022 V . Les surtensions, nécessaires pour obtenir la densité de courant recherchée de 400 A.m−2 , sont de 750 mV pour la réaction anodique et de 110 mV pour la réaction cathodique Zn2+ /Zn. La chute de tension due à la résistance du bain électrolytique, pour une distance inter-électrode de 30 mm et une densité de courant de 400 A.m−2 , est voisine de 240 mV. La tension totale à appliquer est donc de 3,2 V. Le rendement du courant cathodique est de l’ordre de 90 %, par suite du dégagement de dihydrogène qui se produit simutanément au dépôt de zinc. La consommation d’énergie par tonne de zinc produite est de l’ordre de 2.950 à 3.500 kWh. 2 Cette opération est appelée le pelage ou encore stripping Conclusion Les phénomènes de corrosion... 31