Finding solutions against identity populism
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Finding solutions against identity populism
September 2014 – Magazine/ Revue N°1 Finding solutions against identity populism -‐ Trouver des solutions contre le populisme identitaire UN MOT DE NOS FONDATEURS Lame de fond. Non, ceci n'est, définitivement, pas « une crise ». Il s'agit, au contraire, d'une lame de fond, large, puissante, qui emporte nos repères et ne nous les rendra pas. Non, le 20ème siècle ne reviendra pas après « la crise ». Cette fois nous sommes bien dans le 21ème. Et il a toutes les raisons de nous inquiéter. Nos conditions de vie sont menacées sur, au moins, quatre fronts. Celui de nos libertés. Nos démocraties vacillent. Celui de l'égalité. Notre monde évolue chaque jour vers plus d'injustice. Celui de la fraternité. Notre cohésion sociale et notre capacité à vivre ensemble chancellent sous les coups de boutoir des replis identitaires et des haines de l'autre. Enfin que dire du front de notre solidarité avec les générations futures ? Oui, nous pouvons, collectivement, choisir de regarder de l'autre côté. Nous ne pourrons cependant pas dire à nos petits-enfants que nous ne savions pas. PHILIPPE MAYSTADT, Président Ceci n’est pas une crise, Ministre d’Etat et ancien Président de la BEI Alors que faisons-nous ? Que font nos élus, nos syndicats, nos associations ? Que fait l'Europe bon sang ? Oh ils font énormément. Mais en tombant le plus souvent dans le piège classique des démocraties affaiblies, cette faiblesse qui les ont si souvent fait échouer dans le passé : l'urgence (sociale) et le court terme (économique). L'immédiateté (médiatique), ce talon d'Achille des démocraties, connu et reconnu, est loin d'être améliorée par nos nouveaux rapports à l'information numérique. Oui, au moment où tout devrait nous pousser à considérer le temps long et la modération nous choisissons chacun -- mais chacun plus chacun finit par générer un choix collectif :-( -de nous laisser diriger par la dictature de l'immédiateté. Ceci n'est pas une crise ne dispose d'aucune baguette magique. Nous sommes même en mesure, sur base de nos expériences respectives mises en réseau, de vous confirmer malheureusement qu'aucune baguette magique n'est disponible... immédiatement. Nous avons cependant la conviction que le temps long donnera raison aux progressistes et aux optimistes. Alors pour contribuer à les faire gagner, nous proposons trois axes : Comprendre. Collaborer. Inventer. GREGOR CHAPELLE, Membre fondateur Ceci n’est pas une crise, Directeur général d’Actiris Comprendre ce qui empêche aujourd'hui les vrais démocrates -- ceux qui croient en la liberté, l'égalité, la fraternité et la solidarité avec les générations futures-- de faire progresser leur projet de société. Collaborer pour identifier les leviers efficaces, pour nous allier les uns avec les autres au service de nos valeurs démocratiques. Inventer, aussi, de nouveaux modes d'action, adaptés aux temps difficiles qui viennent. Si vous vous reconnaissez dans ce projet, joignez-vous à nous. Humblement mais concrètement, nous vous proposons de rejoindre notre réseau. Ensemble, à défaut de les voir progresser, nous voulons tenter de sauver nos démocraties. Allons-y. Joignez nous et signez notre document d’adhésion : http://www.cecinestpasunecrise.org/fr/adhesion 2 A WORD FROM OUR FOUNDERS There are many ways to speak about populism; many explanations for its continuing appeal in the difficult times we are going through. And no miracle solutions are in sight, which could ban populism to a past of conflicts and divisions, where we would like to see it buried once and for all. It is the intention of this publication to offer points of view and analysis from authors active in several sectors as well as some experiences of associations and civil groups which look for answers to the evolving faces of so-called identity populism, i.e. populisms in which "identity" represents a key factor of mobilisation. Even if it has to be said that the defense of the "we" in contraposition to those who are not "we" is a major "raison d'être" of the populist discourse in general. Among the strengths and the most difficult challenges of the populist discourse are certainly the use of simple, direct arguments with which people are able to identify effortlessly - because they refer to some of their concrete and true worries; as well as the ability of some leaders to become so credible and convincing not to need to prove with facts the solidity and the sheer truth of these arguments. It is indeed surprising how quickly an increasing number of people suddenly consider established and important cultural, political and socially accepted "values" (solidarity, equality, no to racism, even democracy) to be meaningless words invoked by an elite perceived as incapable to deal with the real problems. On the bright side, we can nevertheless note that in most (if not all) current and past experiences in which political and cultural forces based on populist messages and slogans acceded to power, their concrete implementation proved to be a failure and did not bring convincing solutions to the issues they pretended to address in the first place. Extreme pressure on migrants, separation and new borders among people and cultures, discrimination, reduction of civil liberties and the strengthening of the central power or control on media did not bring prosperity or ended the economic crisis. Showing how weak the populist argument and how sad and gloomy the model of the society they propose can be is a key part of any effective and aggressive strategy to deal with this phenomenon both in politics and in the society. We therefore need to find and spread the rational arguments, the emotional instruments, the effective messengers in order to engage in this cultural and political battle: and this publication is one of the ways we propose to move towards this goal. MONICA FRASSONI, Co-‐founder Ceci n’est pas une crise – This is not a crisis, Co-‐ Chair of the European Green Party Join us and sign our endorsement document: http://www.cecinestpasunecrise.org/en/endorsement 3 SOMMAIRE Anaïs VOY-GILLIS : De quoi le populisme est-il le nom ? 05 Marely MORRIS : Europe’s new dilemmas 06 Laurent LICATA : L’eau, le feu, l’angoisse et la reconnaissance 08 Populism, speech regime and superdiversity: Interview with Jan Blommaert 09 Péter KREKO : Conspiracy theories: deeply enrooted in identity 12 François DE SMET : Quand l’Enfer est toujours l’Autre 13 How have levels of intolerance changed in Western Europe? 15 Andreea CALBEAZA : On the power of words: the anti-migration discourse with regard to Romanian and Bulgarian citizens in France and Great Britain 16 En direct du terrain - Applied solutions Equipes populaires : Etrangers, CPAS, chômeurs - STOP au jeu de massacre ! 18 Space for you! Portrait : Dan Sobovitz 20 Nos fondateurs 22 4 DE QUOI LE POPULISME EST-‐IL LE NOM ? Il y a depuis une trentaine d'années un usage extensif du terme « populiste » qui laisse à penser qu'il peut être employé pour tout dire ou qualifier des régimes et des hommes politiques très différents. Il a longtemps été absent du vocabulaire public où lui étaient préférés des termes comme « démagogie » ou « poujadisme ». Il apparaît comme le concept ventre mou des sciences politiques, un concept passe partout utilisé plus pour disqualifier celui qui s'en trouve affublé que pour vraiment caractériser une position politique. Par conséquent, on peut s'interroger sur l'emploi qui en est fait et les réalités qu'il recouvre. Selon le dictionnaire Larousse, il s'agit d'une « idéologie visant à libérer le Peuple » et il est généralement employé pour qualifier des partis à l'extrême gauche ou à l'extrême droite de l'échiquier politique. A l'origine, il est employé pour résumer les processus sociaux menés par Juan Domingo Perón en Argentine ou Guetúlia Vargas au Brésil. Cette notion a été popularisée en France par Pierre-André Taguieff 1 dans les années 1980. Il a défini deux types de populisme : le populisme identitaire et le populisme protestataire. Le premier fait appel au Peuple « tout entier, sans distinction de classes, de tendances idéologiques ou de catégories culturelles : l'objet de la visée populiste est de réaliser un rassemblement interclassiste dans le cadre national2. » Il y a une crainte de la mise en question de l'identité dans le contexte d'ouverture des frontières qui fait le lit du « national-populisme européen ». Celui-ci se saisit d'une inquiétude perceptible dans l'opinion publique à laquelle il souhaite répondre en assurant la promotion d'une identité nationale qui assimile la communauté nationale à un « ethnos ». Il écarte de celle-ci, ceux qui n'appartiennent pas à cette communauté imaginée ou qu'ils estiment impossible à assimiler en raison de leurs origines culturelles et religieuses. Ce populisme a pour caractéristique une opposition entre « ceux d'ici » et l'Autre, l'affirmation d'un moi collectif national, contre tout corps qui menace d'en altérer l'identité historique, culturelle et religieuse, une volonté d'un appel au Peuple à travers un recours au référendum et un rejet de l'autre sous forme de xénophobie qui peuvent revêtir des formes différentes selon les époques et les lieux. à travers la figure charismatique du leader et un discours interclassiste. Il souhaite réduire les intermédiaires entre le Peuple et le pouvoir « central ». Ces deux formes de populisme peuvent se rencontrer dans un même mouvement, mais leurs fondements sont différents. Le premier est issu du boulangisme, quand le second est issu de penseur comme Henri Drumont et la ligue antisémitique. Il y a une construction d'un discours négatif autour du populisme. L'usage du terme populiste est un moyen de simplifier les choses et de faire écran à ce qui anime les mobilisations électorales. Il ne sert pas à caractériser une force politique définie mais simplement à dessiner l'image d'un certain peuple. Il est convoqué et invoqué pour disqualifier des électeurs et des discours. Ce phénomène a été particulièrement flagrant en 2005 au moment du référendum en France sur le projet du traité constitutionnel européen où le « non » l'a emporté. On estime cet électorat frappé par une déraison politique et on le pense perdu. Porté par son ressentiment contre les élites, il serait prêt à croire toutes les promesses proposées pour résoudre les problèmes sociaux. Le populisme suffit à discréditer les classes populaires et ceux qui en parlent. « Les usages actuels du populisme abusent de la réalité en prêtant à des partis comme le FN un caractère populiste ou populaire3 » rappelle Annie Collovald. Il y a une dissimulation de l'histoire politique de la notion. A force d'être employé pour qualifier des situations très différentes, il perd toute sa signification et empêche tout diagnostic pertinent. Il y a une tentative de décrédibiliser les choix politiques des classes populaires qui se tourne vers les partis dits populistes alors que le premier vote des classes populaires est l'abstention. Il y a toujours des ouvriers qui ont voté à droite, ainsi la thèse du gaucho-lepénisme 4 tient difficilement. Imaginer les classes populaires comme un ensemble homogène, de gauche, est un mythe. Pour A. Collovald, c'est une notion qui est « sans autre substance véritable que les usages qu'on en fait5 ». Dans son emploi contemporain, le populisme désigne deux caractéristiques : l’irresponsabilité des politiques qui font des promesses qu'ils ne pourront pas tenir immédiatement et la limitation du politique au champ du possible. Ainsi, les progrès des partis « nationaux-populistes » sont souvent résumés à un catalogue des difficultés engendrées par le chômage, à l'importance numérique de l'immigration, à la construction européenne qui remet en cause la souveraineté des États et transcende certaines frontières et interroge l'identité nationale. Ces partis prospèrent sur les troubles induits par les changements rapides et perturbateurs de nos sociétés contemporaines. Face aux difficultés qu'engendre cette période, le terme populiste est plus utilisé pour décrédibiliser des acteurs politiques rivaux que pour analyser les mécanismes politiques et sociaux qui favorisent l'émergence de ces dits partis. La question de l'immigration et à travers elle celle de l'identité nationale ainsi que celle de la construction européenne sont le socle idéologique commun des partis européens présentés comme « populiste identitaire ». Le populisme protestataire présentent plusieurs traits de caractère : rejet des élites (ceux d'en haut contre ceux d'en bas), méfiance à l'encontre des régimes représentatifs, appel par référendum au Peuple et hyper personnalisation du mouvement 1 2 Taguieff P.A., La rhétorique du national-populisme, Mots, 1984 Ibid ANAÏS VOY-GILLIS – Étudiante à l'Institut Française de Géopolitique (IFG), France, Membre de l'Observatoire européen des extrêmes (OEE) 3 4 5 Collovald A., Le « populisme du FN ». Un dangereux contresens, Paris, Éditions du Croquant, 2004 Notion développée par Pascal Perrineau,à ce sujet voir Le symptome Le pen. Radiograhie des électeurs du Front National, Paris, Fayard, 1997 A. Collovald, Le « populisme du FN ». Un dangereux contresens, Paris, Éditions du Croquant, 2004 5 EUROPE’S NEW DILEMMAS Renzi, but it still won over 20 per cent of the vote and formed a new coalition with UKIP in the European Parliament. Was it a “peasants’ revolt” or a perfunctory protest? An earthquake or a mild tremor? A cry of despair or a grumble of indifference? The European election results were expected for some time – but that didn’t stop competing interpretations from flooding the airways as the final figures came in. But populists come in very different shapes and sizes. The antiSemitic, fiercely nationalist Jobbik in Hungary is markedly different from the soft centrist populism of Timo Soini’s Finns Party. In the aftermath of the elections, the different populist parties struggled to form coalitions. The anticipated alliance between the Front National’s Marine Le Pen and the Dutch PVV’s Geert Wilders failed to get off the ground when they belatedly realised they did not have enough like-minded partners in EU member states to create a formal political group. Moreover, what was remarkable as the election results came through was the sheer variety of different political movements surging across Europe, far beyond the usual populist suspects. Established parties were faced with surges in support for the anti-austerity Podemos and Syriza in Spain and Greece; the liberal NEOS in Austria; the Feminist Initiative in Sweden. It takes a stretch of the imagination to describe all these parties as having the three features of populism outlined above. As a result of this frenetic activity on the fringes of European politics, the share of the vote for the two main political groups in the European Parliament fell. The most prominent feature of the elections was not the rise of populism per se, but the more gradual trend of electoral fragmentation – combined with stagnating voter turnout. What to do? One thing can be agreed on: in France, Denmark and the UK, among others, anti-establishment parties have done remarkably well. With the rise of the Spitzenkandidaten and the onset of economic recovery, this is now a new stage in Europe’s political development. And in this new stage a long-standing problem is again sinking its teeth into Europe’s nebulous mainstream with a ferocious intensity: the problem of populism. Populism in perspective The scale of populist success is still a matter for debate. To find the truth, it’s worth asking what populism is – and what it is not. Our work at Counterpoint, a research consultancy, has led us to identify three key traits of populist politics. First, populism presents itself as the defender of the pure 'ordinary people' from a distant, corrupt elite. Second, it considers the 'ordinary people' to hold all the answers to political problems. And third, populism privileges a kind of visceral, “common sense” approach to policymaking – it’s a master of the politics of the gut. These features can often lead to a corrosive form of xenophobia, pitting insiders against outsiders, professionals against politicians, true believers against turncoats. Populism is dangerous because it is inherently opposed to pluralist politics: difference is disliked. And while it may uncover deep, culturally infused grievances that deserve answering, too often its purveyors are more interested in exploiting fears, fomenting tensions and encouraging paralysis than looking for viable solutions. In this light, the election results do not simply tell a story of populist victory. True, a number of parties that clearly fit this characterisation of populism scored remarkably well – the UK Independence Party (UKIP) and the Front National in France being the most notable examples. And the Five Star Movement – led by former comedian Beppe Grillo, who advocates internetbased direct democracy and displays clear populist tendencies – might have been soundly beaten by new Italian premier Matteo Still, many populist parties pose a threat to liberal democracy by adopting an exclusionary form of politics, othering groups seen as not part of the people. Others block constructive policymaking by hindering reform efforts and showing an unwillingness to engage with legislative details. At Counterpoint we have conducted a range of research projects on populism and its impact on European politics. Our advice for mainstream politicians spans three levels of action. First, certain policy tools can be used to address the rise of populism in the long term. These need to be targeted at the deeper social forces fuelling populist politics. One of the key findings from our 2012 report on populism, Recapturing the Reluctant Radical, was the educational cleavage that populism exposes. Educational background is one of the strongest and most consistent predictors of populist voting in Western Europe (all else being equal, the higher one’s level of education, the less likely one is to support populist parties). Targeting policy to address this educational inequality should be a priority for policymakers. Second is the question of strategy. Political parties have traditionally struggled to respond effectively to populists, often trying to both ostracise them and adopt a watered-down version of their policy proposals. This simultaneously legitimises their ideas and reinforces the populist narrative that they are “outsiders” persecuted by political elites. The mainstream parties should take the opposite approach. They should engage with populists, particularly more moderate parties such as the AfD, the Five Star Movement, and (parts of) the Finns Party. But at the same time they should avoid mimicking parts of their programmes in what can come across as cynical ploys to win over voters. Third, one of the most powerful tricks up the populist sleeve is to take the grievances of the many and translate them into a compelling narrative, with a political vision, a call to arms, and a cast of scoundrels, traitors, and saviours. The challenge for the mainstream is to find a counter-narrative that is just as persuasive and well-founded. Emotions are sometimes 6 perceived to be the prerogative of the populist. This is nonsense: emotions run through all of politics, and their absence makes the political realm cold and aimless. A counter-narrative to populism needs to embrace emotion too. Parties with an identity populist approach in Europe and voter turnout6 Election results Of course, there is no one catch-all answer: the right narrative depends on both cultural context and political preference. Neither is this just a question of rhetoric. A counter-narrative needs to shape all levels of political thinking. The work of the American cognitive scientist George Lakoff on “reframing” is useful here: as he notes in his classic handbook Don’t think of an elephant!, the process of reframing is in itself a form of social change. 30 Penul,mate na,onal elec,ons 25 20 The populists hogged the limelight at the elections in May. But the ball is now firmly in the court of the political mainstream. The months ahead will present tough dilemmas for national leaders. The danger is that political and national divisions and the fear of populist reprisal will result in inaction. But with innovation, grit and a smidgen of luck, they should be able to forge a different path. Last na,onal elec,ons 15 European elec,ons 2009 10 5 European elec,ons 2014 0 MARLEY MORRIS – Senior Researcher and Consultant at Counterpoint, UK Voter turnout 100 90 Penul,mate na,onal elec,ons 80 70 Last na,onal elec,ons 60 50 40 European elec,ons 2009 30 20 European elec,ons 2014 10 0 6 Abbreviations: FPÖ = Austrian Freedom Party; VB = Flemish Interest, Belgium; DF = Danish People’s Party; PS = True Finns; FN = National Front, France; AfD = Alternative for Germany; XA = Golden Dawn, Greece; Jobbik, Hungary; LN = Northern Ligue, Italy; NA = National Alliance, Latvia; TT = Order and Justice, Lithuania; PVV = Party for Freedom, Netherlands; FrP = Progress Party, Norway; KNP = Congress of the New Right, Poland; SD = Sweden Democrats; SVP = Swiss People’s Party, UKIP = United Kingdom Independence Party. Sources: http://www.results- elections2014.eu/en/country-introduction-2014.html http://www.ukpolitical.info/Turnout45.htm http://www.idea.int/vt/countryview.cfm?country=SE http://www.valasztas.hu/hu/ogyv2014/858/858_0_index.html http://elections2014.belgium.be 7 L’EAU, LE FEU, L’ANGOISSE ET LA RECONNAISSANCE « Certaines choses sont miscibles entre-elles, l'eau et la grenadine par exemple. Au-delà de cette image, c'est ce que l'on appelle l'enrichissement culturel. Mais l'eau et le feu, ça ne marche pas. (…) j'ai la conviction d'après ce que je vois, dans nos villes, nos quartiers, nos rues, que la coupe est pleine; si on continue à inverser la tendance démographique qui se creuse inexorablement, insidieusement, notre culture dans peu de temps aura vécu. » Message posté sur le forum Internet de La Libre Belgique, dans le cadre d’une discussion sur le vote des immigrés extraeuropéens en 2002 Comme Maslow l’a décrit il y a déjà longtemps, les êtres humains ont à peu près tous les mêmes besoins. Ceux-ci vont des besoins physiologiques et de sécurité aux besoins d’appartenance, d’estime, et d’accomplissement. Cette recherche de satisfaction des mêmes besoins physiologiques et psychologiques mène paradoxalement à des conflits entre groupes au sein de nos sociétés, lorsque les membres d’une communauté ont le sentiment que des « autres » font obstacle à la satisfaction de leurs propres besoins. Je propose d’appliquer cette base de raisonnement à la situation des relations entre majorités et minorités culturelles issues de l’immigration dans les sociétés occidentales. On se rend alors rapidement compte qu’interpréter ces relations à travers le prisme de la différence culturelle (ou religieuse), comme le faisait l’internaute cité en exergue, est au mieux insuffisant, au pire carrément erroné. Mais, tout erronée qu’elle soit, son intervention révèle un réel sentiment de menace : sa culture (au demeurant, probablement très difficile à définir) serait sur le point de disparaître suite à l’afflux des immigrés et de leur croissance démographique. Je laisse au lecteur le soin de deviner quelles cultures s’apparentent à la grenadine, et quelles sont celles qui sont semblables au feu. était associé à davantage de préjugés contre les immigrés, et ce d’autant plus lorsque la cause de la crise leur était attribuée. De manière intéressante, ce sentiment menait plutôt à davantage d’antisémitisme lorsque la crise était attribuée aux banquiers, et il n’était associé à aucun préjugé lorsque des causes systémiques étaient évoquées. Une autre étude réalisée aux 9 Etats-Unis a quant à elle révélé que la perception d’une menace économique conduisait à une augmentation des préjugés à l’égard de minorités ethniques perçues comme des rivales économiques (les Asiatiques), mais pas à l’égard d’autres minorités (les Afro-Américains). En bref, le sentiment de menace – qu’elle soit symbolique ou matérielle – peut mener les majoritaires à se replier sur leur identité et leur culture, voire à exprimer et mettre en acte des préjugés à l’égard des minoritaires, en particulier lorsque la menace leur est attribuée. Si les majoritaires peuvent se sentir menacés par la présence de minorités culturelles, que dire alors du sentiment ressenti par les membres de ces minorités ? Objectivement, le risque de perte de distinction de l’identité culturelle apparaît bien plus forte pour 10 ces groupes. Les théoriciens des processus d’acculturation décrivent un double choix auxquels ces personnes sont inévitablement confrontées : maintenir ou pas leur culture d’origine, et participer ou pas à la société majoritaire. Si ce choix est parfois présenté comme individuel, il faut reconnaître que les positions prises par les autres membres du groupe minoritaire, ainsi que les attitudes et les politiques adoptées par la majorité entrent fortement en ligne de compte. En effet, on ne maintient pas une culture tout seul ! Cela nécessite la coopération d’autres membres de la communauté, ainsi que des opportunités offertes par la société d’accueil, comme les infrastructures permettant de transmettre la langue du pays d’origine, la culture, la religion, etc. Il en va de même pour la participation à la société. Vous avez beau vouloir y participer, encore faut-il que l’on vous en donne l’occasion. Les situations les plus difficiles se rencontrent lorsque la société d’accueil fait pression pour que les immigrés abandonnent leur culture d’origine, tout en ne leur permettant pas de participer pleinement à la société. L’effet du sentiment de menace ressenti par les majoritaires sur leurs attitudes envers les immigrés est bien connu. Le sentiment d’angoisse collective peut porter sur la perspective d’une disparition prochaine du groupe (menace d’extinction) ou sur celle d’une perte progressive de distinction (effacement des limites entre groupes). Ce sentiment peut mener à des comportements visant à renforcer le groupe d’appartenance (s’investir dans le groupe, soutenir des mesures visant à renforcer l’identité collective, etc.), mais il peut également mener à des actions à l’encontre des groupes perçus comme menaçants (justifier des agressions envers les immigrés, 7 soutenir des politiques d’immigration restrictives, etc.) . Ce phénomène est amplifié en période de crise. Par exemple, 8 une étude menée récemment en Allemagne a montré que le sentiment de menace généré par la crise économique de 2008 7 8 Wohl, M. J., Squires, E. C., & Caouette, J. (2012). We were, we are, will we be? The social psychology of collective angst. Social and Personality Psychology Compass, 6(5), 379–391. Becker, J. C., Wagner, U., & Christ, O. (2011). Consequences of the 2008 financial crisis for intergroup relations The role of perceived threat and causal attributions. Group Processes & Intergroup Relations, 14(6), 871–885. Que font les minoritaires lorsqu’ils se sentent menacés ? La même chose que les majoritaires, pardi : se replier sur leur identité culturelle, et parfois aussi ressentir des préjugés envers la culture majoritaire (voire également envers les autres groupes culturels présents). On sait ainsi que la perception de 9 Butz, D. A., & Yogeeswaran, K. (2011). A new threat in the air: Macroeconomic threat increases prejudice against Asian Americans. Journal of Experimental Social Psychology, 47(1), 22–27. 10 Voir Licata, L., & Heine, A. (2012). Introduction à la psychologie interculturelle. Bruxelles: De Boeck. 8 discrimination tend à accroître l’identification des minoritaires à leur groupe culturel au détriment de la société d’accueil, et favorise des attitudes plus négatives à son égard. En d’autres termes, la discrimination favorise le repli communautaire. As a consequence of the crisis, you feel closer to the citizens in other European countries (EB autumn 2013)12 80 Etablir et maintenir une identité collective positive n’est guère aisé lorsque l’on fait partie d’une minorité culturelle, souvent stigmatisée. En effet, ses membres ont sans doute peu de choix quant à la dimension de comparaison avec le groupe majoritaire qu’ils peuvent mobiliser. Se trouvant souvent au bas de l’échelle sociale, la plupart ne peuvent pas se prévaloir de hautes performances dans le domaine économique ou d’autres réalisations prestigieuses. Ne pouvant mettre en avant leur compétence, ils peuvent alors faire valoir leur sociabilité – « Ils sont riches et compétents alors que nous sommes pauvres mais chaleureux » – ou encore leur moralité – « Ils sont riches et corrompus alors que nous sommes pauvres mais purs ». Il n’est dès lors guère surprenant que certains investissent la religion, domaine par excellence de la moralité. Donc, en cherchant à satisfaire les mêmes besoins matériels et psychologiques, les membres de groupes culturels majoritaire et minoritaires peuvent, dans certaines circonstances, en venir à s’opposer. C’est le cas lorsque la simple présence, ou les actions de l’autre groupe sont perçues comme une menace et génèrent de l’angoisse. Bien qu’il serait angélique de nier qu’un groupe puisse dans certains cas constituer une menace objective à l’égard d’un autre groupe, c’est la perception de menace, et non l’existence objective de cette menace, qui déclenche cette angoisse. Or, les représentations de la réalité sont plus faciles à changer que la réalité elle-même. La diffusion de représentations sociales décrivant la situation comme très menaçante et attribuant la responsabilité à une minorité peut donc contribuer à enclencher les réactions de repli et de méfiance décrits plus haut. C’est la vieille recette que tentent de remettre au goût du jour, avec hélas un certain succès, les partis d’extrême droite européens. Les majoritaires cherchent avant tout à être rassurés, les minoritaires ont de plus besoin d’être reconnus. Mais lorsqu’ils demandent la reconnaissance – de leurs droits, de leur valeur sociale, de leur voix –, les majoritaires ont souvent tendance à 11 leur dénier . La lutte pour la reconnaissance qu’entreprennent alors certains d’entre eux est souvent perçue comme une menace par les majoritaires, qui ont alors tendance à se replier sur leur propre identité et à refuser d’autant plus la reconnaissance demandée par les minoritaires, et ainsi de suite. La « crise économique » ne fait qu’aggraver le phénomène, en rendant plus tangible la menace. Il n’y a pourtant pas de fatalité : les groupes culturels ne sont pas des entités aussi distinctes que les éléments fondamentaux des philosophes présocratiques – eau, air, feu, terre –, comme le suggérait l’extrait présenté en exergue. Ils sont constitués de personnes qui cherchent à satisfaire les mêmes besoins matériels et psychologiques. La solution se trouve sans doute en partie dans la conscience de cette humanité commune qui nous fait désirer les mêmes choses, tout en nous offrant la possibilité de dialoguer afin d’y parvenir. LAURENT LICATA – Professeur de psychologie sociale et interculturelle à l’Université libre de Bruxelles (ULB), Belgique 11 Sanchez-Mazas, M. (2004). Racisme et xénophobie. Paris: Presses Universitaires de France. 70 60 Totally agree 50 40 30 20 Totally disagree 10 0 POPULISM, SPEECH REGIME AND SUPER-‐ DIVERSITY. AN INTERVIEW WITH PROFESSOR JAN BLOMMAERT Professor Jan Blommaert is a leading Belgian sociolinguist and linguistic anthropologist with a special research focus on the culture of discourse, nationalism and democracy. His publications marked a substantial contribution to globalisation theory. As the Director of the Babylon Center in Tilburg he examines the meaning of superdiversity in our society. We caught him shortly before his summer holiday in July to interview him about his perspective on populism, identity and the future of Europe. Mr Blommaert, in one of your publications you drew a link between language and populism, when you defined populism as a “speech regime”. Could you explain what you mean by that? It refers to a specific form of new populism, which is very strongly influenced by new media. Since the 1990’s all over Europe and indeed all over the world we have a new media culture, largely commercialised. We have seen all over the world the collapse of the state broadcasting systems and even those that still exist, for instance in Belgium but also the BBC, are now compelled to follow an entirely different logic. And if you add to 12 Eurobarometer http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb_arch_en.htm 9 that the internet, the blog culture, the debate fora etc. – it has basically changed the conditions for political discourse in such a way that, in order to be successful these days, you have to keep it short, you have to heavily simplify issues, cut corners when it comes to analysis, because there is no space for analysis anymore – in other words you need to be a populist. Therefore, the typification of new populism I was trying to outline at that moment shows its face by means of resistance against an intellectual voice. There is no space for intellectual voices anymore. There is a heavy emphasis on aesthetics in political communications, through the use of images and heavily stylised figures like Tony Blair and others who have become new political heroes. And in that sense it is a discursive regime in our political culture that has deeply changed in such a way that there is hardly anything left apart from gross populism. diacritics have now become vastly more frequent, vastly more profound. At the moment it actually has very little impact politically. Amazingly, the more diversity we get, the less diversity is recognised as a social given, as a simple sociological fact. But it should impact our thinking about identity. The old diacritics, which are very strongly focussed on factors like nationality, ethnicity etc. are no longer sufficient to speak about the world in which we live. Yet, politically, the more reality is questioning these old categories, the more governments do to enforce these old categories of nationality, of ethnicity and so on. That is a paradox. We now live in a society for which these old administrative notions of identity are no longer appropriate at all. And even in our own lives they are hardly relevant. Yet, what we see is that at the moment we start moving around the world, that exactly these old diacritics, these old criteria, these old “boxes” are more powerful than ever. Just to explain where this insight comes from: For the past 20 years I have been working deeply on asylum issues, specifically analysing the stories of asylum seekers and giving witness and expert testimony in all sorts of procedures in Europe. People who come from a place like Somalia where there is really no state, i.e. non-existing states. For them, nationality is basically irrelevant, until they move to a place like the EU and then all of a sudden their non-existing state begins to dominate everything they are and everything that happens to them, because the nation-state logic is now stronger than ever, while in the face of so many realities in the world there are no nationstates anymore. How would you describe the characteristics of the use of language by populist groups – do they use a particular terminology or vocabulary? There are changes, in the sense that you see an increasing “irrationalisation”, such as for instance a marked resurgence of moral discourses. Tony Blair at the end of his career as Prime Minister used the expression “passionate”. So rather than rational arguments or political consistency or historical arguments, we get moral arguments. Secondly, discourse is never just words. It is also the scenery in which the words are being produced. And there as well, you see an enormous resurgence of aesthetics: the staging of words is very important, the scenery that people have chosen to produce their words, the specific events, occasions etc. At the moment, political discourse or communication in the more general sense has been very strongly influenced by marketing and advertising modes that share this focus on aesthetics. And then of course identity is the ideal sort of irrational, moral appeal that can be voiced in a very short 16 seconds way and sound compelling. One of your main research fields is the concept of so-called “superdiversity”. What is superdiversity and in what way is it different from common diversity? Superdiversity is a dimension of diversity. It doesn’t replace diversity; it simply adds a little adjective to diversity. There is now a level of diversity in most places in the world that have not yet captured mentally, ideologically, politically, culturally and so on. Just imagine that statistically, for instance in a place like Antwerp the presence of nationalities has tripled over the last decade. You are looking at a new environment in terms of ethnic difference but also gender, social class, religion. All sorts of A Malaysian airliner was shot down probably by a rebel movement occupying or liberating – depending on how you see it – an important part of a European republic. So, where is the nation-state here and who are these actors? This is the huge paradox of superdiversity. It rationally ought to direct us in a completely different direction than the way by which we now respond to it, on all levels, in education, in research, in administration, police affairs, immigration etc. What impact does superdiversity have on identity and on the way people perceive themselves and their communities? You cannot specify the notion of superdiversity anymore. For us analytically it is a sort of intersection between two big historical forces of the past decades. The first one is the end of the Cold War and the lifting of the barriers on mobility not only in Europe and basically all over the world. Borders are open and as a consequence, people are moving into different directions. That is a demographic aspect of superdiversity. A second aspect is that exactly at that moment, at the end of the Cold War, the internet and all sorts of new developments in online and mobile communications came into being. That is enabling everyone who has access to these facilities to create all sorts of new social networks, new communities, which also seriously complicates our lives. For instance Facebook has over 1 billion subscribers, which makes it the fourth biggest “nation” so to speak, in the world and this in turn has created all sorts of new complexities. When we investigate the way in which real people in real circumstance really live real identities, we see that these identities have nothing to do with the old diacritics and have everything to do with aspiration very often driven by commodities, so by consumption. We have identities for almost every micro-niche in society and effectively, we move from one identity into another into yet another within the space of an hour. When I leave this interview, my identity will change, I will 10 become a father and a husband here in this room and I will have to behave entirely differently than with you. And so the observable way in which we lead identity these days is completely not covered by anything we thought was identity before. In view of the low turnout of the recent European elections and the obvious success of Euro-sceptic and nationalistic populist parties, do you feel confirmed in your slightly pessimistic analysis in your publication “Decline of democracy” where you stated: “Democracy is one of the main victims of the financial crisis which started in 2008. The crisis has, in particular, revealed the limits of the power of democracy and has aggravated public distrust in it. “ We have seen an increasing radicalization all over Europe. The Euro-sceptics are amongst the big winners, and the eurosceptics often overlap with the nationalists and the right-wing populist organisations. But on the other side of the spectrum, the radical left has also won significantly and not just in places such as Spain and Greece but basically all over Europe. This demonstrates that the crisis triggers an increasing radicalization of the political spectra. However, we need to be very clear with regard to what we mean by that political spectra because here we are only talking about electoral politics. There is a long-term problem within the EU with regard to electoral democratic processes. Whenever the EU offered democratic forms of political participation such as a referendum about the European constitution, we that first of all, there is very little enthusiasm and very little recognition of membership of that democratic community and secondly, there is massive rejection. So I see the results of May in Europe essentially as an extension of a very long tradition in which the EU has hardly any legitimacy within the field of electoral politics. At the same time, we should not reduce politics to what happens electorally. I believe that over the last 3 or 4 years there has been a growing awareness of the European community of interests. There is great solidarity for instance between all sorts of action groups – and they are not small. A solidarity between the North-Western European countries and places such as Greece and Spain and Italy etc. that are heavily hit by the crisis. This solidarity is new and it basically runs absolutely against the idea that there is no Europe and that there is no space for political action as read off the electoral results. Electorally, yes there is no Europe but politically and socially and socio-culturally there is a growing Europe. One of the core focus points of Fondation Ceci n’est pas une crise is the link between identity and populism. In one of your articles published on Kif Kif13 , you stated that an understanding of identity, which is too narrowly defined by the nation-state as a “moral entity” is outdated and would fail to grasp the diversity of today’s perception of identity, as today identity is dynamic and flexible and incorporates a lot more criteria than the nationality. Please explain to us what you mean. It is the way we live our lives. If you want to do the exercise yourself, just try to follow yourself during one day, an ordinary day in your life, from the morning when you get up until the evening. You will have discovered that you have moved between 7 or 8 deeply different social niches each of which prescribes certain social behaviours that are not interchangeable. It sounds very trivial but it is fundamental, because what is identity? Identity is the order that we create in order to lead very complex lives. And so identity is never one thing of course. It is a very broad range of normative ideas we have about being normal in very different circumstances. And each circumstance requires a 13 script and the script is cultural and socio-cultural. As a consequence it is an identity script - I have to become that normative complex. I am of course speaking as a scientist and this is how we see identity at the lowest behavioural level. But we can see that there is is no aggregate, no sort of “higher level” or “lower level”. Let me give you an example: We just had the Football World Cup and one of the really interesting things was the number of Belgian flags here in this country, which was absolutely unprecedented. I grew up in a society where maybe one out of 20 families would have a Belgian flag as an object at home, whereas now in my own house there are four or five! And in my street, which is a « superdiverse » area I counted 80 Belgian flags in approximately 500-600 meters. It is unbelievable. Do you agree that the diversification of identity triggers certain societal insecurities and fears, which can easily be exploited by populists? Do you not think that people seek for a simple and safe definition of their identity, such as nationality? There is a clear reduction of the identity discourses not of identity. We only see complications in the field of real lived identity but in the field of discourses you see enormous simplifications. And just to refer back to the example of the Belgian flags: in our media there was the question “oh gosh, we just had the elections where the nationalists had such a massive victory and now they are loosing again due to the Red Devils”. But this is nonsense because those things occupy entirely different niches in our lives. So when it comes to football, beer or French fries we are very Belgian but when it comes to electoral dynamics, we are Flemish. And there is no contradiction whatsoever, there is only a contradiction for those who indeed organize the issues as mutually exclusive: either you are this or you are that. And that is the main simplification we see – a perpetual reduction of the complexity of identity to one level in which you can only be one thing and you have to choose and you have to have a ranking and choose the most important aspect of your identity - while there is not a moment in life where you can say that one identity overwhelms the other. There are identities that you cannot change, such as your age, but that does not always play an overwhelming role in the things I do. For instance when I take a bus or train, my age or gender does not count for much as I’m just a public transport user and that’s it. What would be the right answer to these simplified identity discourses which exploit people’s insecurities? How can we counter them? I think that the most important answer is that there is nothing wrong with being “inconsistent” and that what looks like paradoxes – Flemish nationalists who cheer for the Red Devils – there is not really a paradox there, and it is very ok not to be consistent when it comes to identity because you cannot live with only one identity. If you live with just one identity, there is a word for it, its called autism. If you can only be one thing in any social circumstance, you’re in trouble! You’re not “normal” so to speak. So that is the message that needs to be brought across: you can never be just one thing, and don’t worry, that’s great! That is how we live our lives. So I think even politically this is a very important message because what really needs to be achieved I think is a relaxed attitude vis-à-vis something about which in real life we are very relaxed: identity. http://www.kifkif.be 11 Where do you see the future of European national populist parties and how can we counter the recent worrying trends in Europe? I think something fundamental needs to be done on the level of democratic representation. The institutions are not in order and that is a job that the EU needs to do for itself. We have just witnessed another very disconcerting show in Brussels the other day, trying to appoint a new president and a new Mrs Ashton by political appointment. But this way the EU keeps giving people like Mr Farage all the ammunition to wage the campaign that he his waging. So something serious needs to be done on the level of political representation and the democratic structure. People need to feel that there are real interests. And there are real interests! Most of the economic and environmental policy is for instance determined by Europe. And the people need to feel that their real interests are really represented by institutions, which are responsive to what happens on the ground. I think that is inevitable. At the same time the hearts and the minds need to be won and I would absolutely not continue as it has been done for a couple of decades now in trying to develop this notion of European identity. We don’t need it! I think it is a lot more important to say that we need to think of European interests and European world power. So what is the role of Europe in the world? How can we contribute to making that role real? For instance by improving the environment all over the world, by supporting peace all over the world, democracy, social rights etc. I think that would be the main issue in political education in the future. Just to summarize: We need really profound and honest institutional reform at a serious level and secondly in terms of the creation of an ideological culture, it needs to be a culture of interests and influence in the world. We need to start thinking of ourselves as important world players who don’t do a job of being important. JAN BLOMMAERT – Professor of Language, Culture and Globalization, Director of Babylon Center for the Study of Superdiversity Tilburg University, TSH-DCU CONSPIRACY THEORIES: DEEPLY ENROOTED IN IDENTITY Conspiracy theories are mirrors of a community. Everywhere in Europe – and even beyond – we can find some popular conspiracy theories that help communities to interpret the world, drawing the borders of their in-group and defend the identity of their own communities. Almost nothing expresses better a group’s identity than the conspiracy theories that they cultivate. And conspiracy theories, in very different forms, are abundant in Europe nowadays. It seems that nowadays, In France, Hungary and Slovakia, as we found in a joint report with Counterpoint UK 14 , very significant numbers agree that it is not the government that governs, but that someone else is pulling the strings. Respondents indicated that international finance, other countries and, especially in France, large media empires were the major conspirators. Some other studies from Poland, Greece, Hungary obviously prove that anti-Semitic conspiracy theories (beliefs on that Jews want to get control the world from the background) are notably popular. While conspiracy theories can vary considerably among communities, it seems that postcrisis Europe is a fertile ground for such theories. While conspiracy theories often seem innocently ridiculous at first sight, they pose a threat to democratic and social peace in different parts of Europe (and even elsewhere). The 20th century clearly proved that conspiracy theories are capable of shaping history in evil directions - it is enough to refer to the career of the Protocols of Elders of Zion as the “institutionalized” World Jewish Conspiracy theory which played a crucially important role in legitimizing the Holocaust. Many conspiracy theories are relentless in their targeting of minority groups – take for instance the “Eurabia” conspiracy theory, which asserts that European governments are deliberately and covertly encouraging the growth of Muslims and Islamize Europe, or the conspiracy theory, popular in the Eastern European radical right, that powerful Jews are secretly orchestrating crimes committed by Roma in order to provoke a civil war Hungary. These conspiracy theories, among many others that are spread by nationalist and populist politicians, spread fear and suspicion towards targeted minorities that can undermine the democratic and peaceful fundamentals of a society. It is hard to treat someone with equal concern and respect if you suspect them of secretly holding enormous power, particularly if you believe they are using that power malevolently. “Outgroup-paranoia” rarely helps in building trust. And as we could see several times in history, some conspiracy theories can serve as the catalisators of violence – that’s why the British Demos calls them, for example, “radicalization multipliers”. The following quote by Anders Behring Breivik sadly illustrates this principle: “Multiculturalism (cultural Marxism/political correctness), as you might know, is the root cause of the ongoing Islamisation of Europe which has resulted in the ongoing Islamic colonisation of Europe through demographic warfare (facilitated by our own leaders)”. Of course, not all of conspiracy theories are leading directly to violence, but most of the intergroup violence (especially the ones 14 http://deconspirator.com/wpcontent/uploads/2013/12/The_Conspiratorial_Mindset_in_an_Age_of_Transition.p df 12 in the name of extremist ideologies) is breed by conspiracy theories. If some conspiracy theories are so dangerous, what to do with them? Anti-Semitic or xenophobic conspiracy theories (for instance, the “Eurabia” conspiracy theory that contends that European governments are encouraging the spread of Islam to undermine European values and traditions) are notoriously hard to tackle. The results from our study suggest that the traditional strategy of “debunking” theories is unlikely to work on its own. If conspiratorial thinking is rooted in institutional distrust, then discrediting the conspiracy theory will not address the underlying problem. Instead, we argue that to address these conspiracy theories campaigners need to engage with their roots: phenomena like political transitions, perceived loss of control, and institutional distrust. This of course will differ depending on the particular cultural context. But combining an appreciation of the roots of the conspiratorial mindset with an active debunking (even ridiculing) strategy is likely to be the best way of undermining the most dangerous and most catchy conspiracy theories. Legal actions against advocates of conspiratorial hate speech are in themselves unlikely to solve the overall problem. If the demand for such theories prevails, they will re-emerge and feed populist and extremist forces again and again. PETER KREKO – Director of the Political Capital Institute (PCI), co-chair at the EU Radicalisation Awareness Network RANPrevent Working Group, Assistant Professor of social psychology at Eötvös Loránd University QUAND L’ENFER EST TOUJOURS L’AUTRE Les récits de guerre rappellent aisément que, malgré nombre d’envolées de propagande idéologiquement teintées laissant penser l’inverse, les soldats des 19ème et 20ème siècle ne partent plus la fleur au fusil, et que l’absurdité des conflits plombe leur moral au creux des tranchées. attributs mystiques, qui sont aussi les outils des religions, aident à ancrer un message de substance à assumer les pertes de la diversité que le nationalisme a pour vocation de dépasser au nom de l’Un. La nation est un narcissisme collectif par lequel l’individu se sent échapper à sa destinée individuelle, pesante, et se laisse volontairement engloutit par le confort de la meute. Le géopolitologue François Thual se réfère lui aussi à cette idée de narcissisme. Il définit le conflit identitaire comme véhément par nature, car « c’est un conflit qui touche au fondement des sociétés, là où l’imaginaire collectif et celui de chacun des membres de la société se retrouvent de façon fusionnelle (...) En fait, les conflits identitaires sont des conflits où s’affrontent des narcissismes collectifs en ce sens qu’ils touchent à la fois à l’individu et au groupe auquel l’individu appartient et par lequel il existe » 16 . Alors, le nationalisme est-il finalement la forme concrète prise par une projection psychique sous forme de besoin narcissique ? Comme le montre Samir Amin dans son ouvrage L’ethnie à l’assaut des nations, ce qu’on appelle une nation floue « repose sur des définitions irrationnelles, sur un narcissisme de groupe, et aussi sur la certitude de la supériorité du groupe et la quasi-incommunicabilité de ses particularités à tout élément extérieur. C’est bien ce qu’il y a de terrifiant dans l’identitaire. La peur de disparaître le conduit à faire disparaître les autres » 17 . Car le problème du narcissisme, qu’il soit individuel ou collectif, c’est qu’il repose toujours sur une blessure – une blessure difficilement soignable et qui pousse à la perpétuelle recherche de confirmations. Tel Narcisse incapable de détacher ses yeux de son reflet pour vérifier qu’il est toujours beau, la nation est, par son narcissisme, prisonnière de sa propre image et va rechercher en permanence des preuves de cet amour qu’elle se porte, des preuves d’existence et de légitimité. Et, surtout, ce narcissisme va se nourrir des peurs que peuvent provoquer les autres nations, le monde extérieur, auquel on prête naturellement les mêmes mouvements potentiellement expansionnistes. Car tel est le drame : pour se légitimer s’ancrer solidement dans les méandres du temps, une nation est obligée d’être en mouvement, de valoriser et de propager son identité. Inévitablement, elle se heurte à l’identité des autres. Inévitablement elle prête aux autres les mêmes velléités que celles qu’elle nourrit, et puise dans ces supposées velléités adverses le fruit d’une légitimité de défense, une peur qui renfloue le sentiment identitaire avec un drapeau rouge tout simple à agiter devant les yeux de sa population : « on veut notre disparition ». Et c’est alors que le narcissisme de la nation devient le véhicule des peurs identitaires. Le culte rendu à la nation est plus subtil qu’un modèle mettant aux prises une idole et des paroissiens. Dans la nation, l’enthousiasme et l’égrégore sont collectifs. Ernest Gellner, dans son ouvrage classique Nations et nationalismes, rappelle, en écho à Emile Durkheim, que la nation est le nom du culte qu’une société se rend à elle-même : « A l’âge nationaliste, les sociétés se vouent un culte à elles-mêmes, de manière tout-à-fait ouverte et impudente, au mépris de toute pudeur. A Nuremberg, l’Allemagne nazie ne s’est pas vénérée en prétendant adorer Dieu ou même Wotan ; elle s’est adorée elle-même ouvertement » 15 . La nation ne serait, ainsi, finalement, qu’un gigantesque narcissisme collectif : les patriotes adhèrent au projet national pour s’aimer eux-mêmes au travers de cet amour ; c’est à cela que servent les rituels de la nation : drapeaux, discours, fanions, hymnes, symboles, rassemblements de foule, chants, préceptes : l’ensemble de ces La meilleure preuve que la nation est le produit d’un processus narcissique est la tendance propre au processus identitaire à se 15 16 GELLNER, Ernest, Nations and Nationalism, Basil Blackwell, Oxford, 1983, trad. par Bénédicte Pineau, Nations et nationalismes, Payot, 1989, p. 87. 17 THUAL, François, Les conflits identitaires, Paris, Ellipses, 1998, p. 4. THUAL, François, op. cit., p. 172. 13 considérer de prime abord toujours en tant que victime, tant est profonde la cécité entretenue par un groupe sur les effets que propre identité peut imposer à autrui. Prisonnier dans un égocentrisme qui identifie l’extérieur à une menace permanente, le groupe identitaire perçoit avec grande sensibilité et hyperréactivité la moindre imposition qui est faite à sa propre identité, voire le moindre geste qui pourrait être interprété comme tel. Nous l’avons vu ; les discours nationalistes sont systématiquement victimaires. Dans l’ère moderne, nul pays ne peut ouvertement assumer qu’il agresse ou envahit un autre par impérialisme ou parce qu’on a les moyens de le faire, ni même par justification d’agrandissement de son espace vital. Même Hitler a justifié chacune de ses annexions engrangées entre 1933 et 1939 par une préoccupation présentée comme légitime, puisant ses racines dans les blessures infligées à l’Allemagne par le traité de Versailles : le souci de réunir au Reich tout ce qui parlait allemand, pour ramener au bercail les malheureux germanophones des Sudètes et d’ailleurs, dont on postulait la nécessaire souffrance comme levier de réparation d’une injustice. La revendication nationaliste se doit de mettre en avant, si besoin en dépit de la réalité, une double antériorité : une antériorité chronologique exprimant la possession première du territoire (« nous étions là avant ») et une antériorité morale exprimant une faute commise par une identité autre et justifiant une action prétendument proportionnée (« ce n’est pas nous qui avons commencé »). Les futurs bourreaux se doivent d’incriminer leurs futures victimes. Les nazis vis-à-vis des Juifs, les hutus face aux tutsi ont toujours dû se présenter comme les victimes passées… ou futures de leurs propres victimes ; le processus victimaire est redoutable, en effet, par son pouvoir de mobiliser non seulement au départ de faits historiques ou de situations passées, mais également en vertu au titre de prévention de menaces à venir. Par ce biais, une fois la mécanique identitaire mise en route, l’invocation de la menace peut s’alimenter de tout ce que l’imagination humaine peut permettre de faire craindre ou de représenter. Même contre l’évidence du présent : le ressort psychologique de la blessure narcissique permet d’aller rechercher dans un passé, réel ou mythique, les arguments permettant de mobiliser les peurs envers son propre groupe pour justifier la guerre ou les exactions contre un autre groupe, qui soit se serait révélé coupable d’exactions semblables par le passé, soit pourrait raisonnablement constituer une menace à l’avenir. Et lorsqu’on touche à la question de la survie, toutes les balises, toutes les frontières morales peuvent sauter. « C’est eux ou nous ». La nation se veut ainsi refoulement du présent, et donc de la réalité, sur la base d’une mobilisation du passé et de l’avenir lui permettant de se maintenir en suspension comme promesse, imaginaire, mouvement. Car dès qu’il n’y a plus de mouvement, dès que la réalité rattrape la promesse de totalité incarnée par la nation, se forme un décalage potentiellement destructeur pour l’identité qui la porte. « Il y a conflit identitaire, indique François Thual, lorsque la survie réelle ou fantasmatique du groupe est en jeu, quand celui-ci se sent dépossédé non seulement d’un territoire ou de son territoire, mais plus gravement lorsqu’il se sent dépossédé de son droit de vivre, de son identité et de sa spécificité »18 . La nation se révèle, ainsi, être par essence le produit d’une peur profonde, existentielle, et irrépressible : celle de l’anéantissement. « Le cœur nucléaire des conflits identitaires, si on voulait emprunter des expressions à la psychanalyse, n’est pas loin de ressembler au complexe de castration »19 suggère François Thual. C’est cela qu’il faut comprendre, en particulier, dans un 21ème siècle où la peur de la disparition physique n’est plus à la racine de la plupart des revendications identitaires – en Europe en tout cas – mais où la crainte de disparition culturelle, symbolique est, elle, toujours bel et bien présente, peut-être 18 19 THUAL, François, op. cit., p.6. THUAL, François, op. cit., p. 5. même avec une acuité d’autant plus importante que le monde est devenu celui de la communication, de la culture, de la parole, bref de l’existence et de la preuve de l’existence par des ressorts identitaires puissants. C’est non seulement la survie matérielle, mais surtout la survie culturelle et psychologique qui est en jeu dans la nation. Or – et telle est la réalité dans laquelle nous devons évoluer – le caractère non-violent de la menace identitaire culturelle n’empêche pas l’angoisse existentielle de se manifester avec ferveur ; car alors que la menace physique de disparition diminue, la prise de conscience de la contingence des identités augmente. Ce qui est investi dans la nation explique la ferveur avec laquelle on défend ce qu’elle représente, car en elle réside un point ou l’ego individuel se fond dans l’entreprise collective. Le constat n’est certes pas nouveau et peut être posé depuis l’émergence des Etats-nations ; mais la postmodernité a offert à cette liaison entre narcissismes individuel et collectif un viatique nouveau, viral et percutant : les médias de masse. Ce qui a changé avec la société post-industrielle d’après-guerre est le rôle catalyseur pris par les médias dans l’attisement du sentiment national : « l’exposition des médias télévisuels et visuels, écrit François Thual, permet encore plus que par le passé de densifier la revendication, d’exaspérer les hantises et d’intensifier les menaces. La conductibilité interne et externe des thèmes identitaires a été accélérée par le progrès des techniques de communication (…) Les médias transforment l’identitaire en un torrent émotionnel de sons et d’images » 20 . Dans l’univers médiatique post-industriel, il suffit de montrer le chaos de l’extérieur pour revigorer le sentiment identitaire, dont le principal carburant est la peur de l’autre. Les médias jouent donc un rôle décisif ; c’est par eux que se transmettent les idées et, plus largement, que peut se forger le sentiment identitaire en basant des messages sur les émotions du public. « En cette fin de 20ème siècle, écrit Thual, les moyens médiatiques, télévision, radio, cassette et bientôt multimédia interviennent comme un surgénérateur de l’identitaire. En relayant l’angoisse collective tous azimuts, le médiatique durcit les positions ». Le radicalisme des points de vue et les crispations de valeurs et d’identités, ainsi, se trouvent échauffées, renforcées et cristallisées par des médias qui non seulement permettent la diffusion d’une information, mais aussi agrègent un sentiment partagé collectif, par lequel chacun se sait récepteur parmi d’autres d’un message et d’une émotion et se sent donc, en puissance, partie à un processus qui le dépasse. Le salut ne peut donc venir que par une prise de conscience qui, elle, ne peut être qu’individuelle : ce n’est que par l’intelligence de chacun à résister au conformisme ambiant, tel que produit par le narcissisme identitaire, que peut se construire une citoyenneté libre, critique et susceptible de résister aux raccourcis inhérents à tous les populismes. FRANCOIS DE SMET – Docteur en philosophie, Université Libre de Bruxelles, Chroniqueur pour La Libre Belgique, Collaborateur scientifique au Centre interdisciplinaire d’étude des religions et de la laicité CIERL (ULB) 20 Ibid. 14 HOW HAVE LEVELS OF INTOLERANCE CHANGED IN WESTERN EUROPE ? This infographic reflects the key findings of a study conducted by Rand Europe and supported by the Open Society Foundations, aiming to situate the widely-shared perception of rising intolerance in Western Europe in the context of empirical evidence on high-level trends in intolerant attitudes in Western Europe. Through analysis of European datasets, a review of empirical literature, and assessments of trends in selected individual countries, the study explores whether intolerance has risen more in some countries than others, whether it has risen more against particular groups, if such attitudes are particularly prevalent among subgroups of the population and if there are clear patterns of association with trends in wider political, social, economic and cultural factors. The full report can be found here: http://www.rand.org/pubs/research_reports/RR334.html%20 15 ON THE POWER OF WORDS : THE ANTI-‐ MIGRATION DISCOURSE WITH REGARD TO ROMANIAN AND BULGARIAN CITIZENS IN France AND GREAT BRITAIN Since the first of January 2014, Romanians and Bulgarians have acquired the right to work in all the EU member states: they are therefore no longer required to obtain prior authorization, they no more need an accession worker card or a registration certificate, as evidence of permission to work or of their right to reside as a worker. Freedom of movement and immigration policies: let’s make the correct distinction The entire debate around the opening of the labour market was driven in a nebulous context that led implicitly to misunderstandings and misinterpretations. Willingly or not, some of the political actors of the two countries mixed in the same discussions two fundamentally different principles. The discourse targeting Romanians and Bulgarians was based on a combination of notions such as “immigration”, “work mobility” and “freedom of movement”, resulting in a misapprehension of the legal regimes behind. Whereas the immigration policies (Article 79 of the Lisbon Treaty) look into the movement of third country nationals to the EU, the freedom of movement is a policy chapter of the Acquis communautaire and a fundamental right guaranteed to EU citizens by the Treaties (Directive 2004/38/EC on the right of citizens of the Union and their family members to move and reside freely within the territory of the EU and EEA member states). A discussion and a fair debate on this topic should maybe focus on another question, that is: “should we still call a “migrant” an EU citizen who enjoys his fundamental right of free movement?”. Nevertheless, there are aspects that remain to be cleared up, before taking this yet another sensitive step. Instead of being a moment of fulfilling, which encompasses the liberalization of the labour market and the principle of freedom of movement, putting an equal between all the citizens of the European Union, 1st of January 2014 turned into an endless fierce debate about the European Union and its capacity of being politically sustainable, while united in diversity, a debate topped with questions that undoubtedly dig up its own roots and foundation stones. This debate, fuelled by the extremist parties and held by the media and particularly by the tabloid journalism, has brought continuously to the attention of the public the good, the bad and the ugly parts of European integration. Maybe less the good and definitely more the bad and the ugly. The stories predicting invasions of Romanians and Bulgarians hit the headlines of the main journals in several European countries, and in two of them in particular: France and United Kingdom. A very important subject such as migration was little explained, blunted and set in a context that completely left aside the real advantages and benefits of work migration. The chronicles about the masses of Romanians and Bulgarians ready to raid into Great Britain and France became popular in the tabloid media (but not only), bringing to the fore reactions that eventually boosted the electoral support for the far-right parties in the two countries. The electoral share of the far-right parties in France and UK, the main suppliers of radical reactions with regards to the two communities, has grown considerably during the past elections: both Front National and United Kingdom Independence Party ended the European election race on the first place, enjoying the support of a quarter of the electorate: 24.95% (FN) and 27.5% (UKIP). The migration debates subsequent to January 1 have brought to the fore side reactions of centrist parties that in some sort legitimized the radical positions. In UK, for instance, the debate on the Immigration Bill put together “foreign criminals”, “illegal immigrants”, “suspected terrorists” and... Romanian and Bulgarian workers! The unfortunate juxtaposition, supported by a firm position assumed by the Conservative Prime Minister to reduce the number of migrants, placed the citizens of the two member states in a grey area. For some, the migration debate is old story (for instance, at the time of UK’s accession to the EU, the French media was voicing against the “uncivil Brits”), but the economic crisis and the austerity measures that came along lead people in actively searching for scapegoats, assuming that the few resources left must be spent on the own citizens, at the expense of migrants. The crisis functioned as a catalyst, taking an important debate such as migration to primetime, where a balanced and reasoned approach does not always sell. Assuredly, the widespread of the anti-migration discourse was energized by the economic difficulties, but it was also influenced by people priorities and concerns over the economy shifting and by a growing frustration towards the rapidly changing society. The radical rhetoric, simplistic and with immediate responses, was the only one concretely addressing people’s fears and therefore very catchy. Browsing the French and British media for the end of 2013 and the beginning of 2014 brought up over 200 articles dealing with the subject of liberalization of the labour markets and the hypothetical invasion. Even though the media offered also space for pro-migrant arguments, the news explaining rationally and on a moderate tone the phenomena had less appeal in comparison to the shocking headlines of the tabloids (“Waves of migrants from the eastern countries” (Derby Telegraph, UK), “Swarm of migrants” coming to “steal jobs and live on social benefits” (Daily Star, UK), “High costs of migrants” (The Telegraph, UK), “Aggressive beggars” (Mail Online, UK), “penniless immigrants” (London Evening Standard, UK), “Measures against migrants”, the beneficiaries of an “irresponsible” open-door immigration policy “dictated by Brussels” (Daily Mail, UK), “Aberration en 16 période de crise (Le Parisien, FR), "C’est une menace, et j’y suis opposé"(Libération, citing a UMP mayor), “Comme les oiseaux, les Roms volent naturellement” (le Point, citing Jean-Marie Le Pen), “La délinquance roumaine se fait plus agressive ” (Le Figaro)). The image of the Romanian and Bulgarian citizens was built out of negative adjectives and stereotypes, the vocabulary associated to them (as threat, security issue and invader, unemployed, beggar, fraudster or criminal), determining the prevalent portrait of the citizen resident in another European country. The media had a critical and very powerful contribution in the debate on the migration of EU-2 nationals, playing the fourth power in the state. What is more, it had the ability to carve public opinion, by raising awareness and by exacerbating feelings. Being the “new kids on the block”, Romanian and Bulgarian mobile citizens were easy targets and perfect scapegoats, as the most recent significant wave of migrants that got access on the western labour markets. Some experts argue that it was by misleading discourse and by easy quid-pro-quo that the Romanian and Bulgarian communities were targeted in a situation that goes beyond their direct influence: hard economic times have always been fertile field for the rise of the extreme parties and the lack of leadership at EU level diminished the trust in EU and made Member States think narrow-mindedly in purely national terms. The EU2 nationals were caught between sentiments of EUphoria and EUphobia: whereas for the two countries 1st of January 2014 meant a moment of accomplishment, for the countries opening their labour markets constituted the rise of the far right and the very beginning of deliberations with regard to their EU membership. The EU was expected to perform on the question of freedom of movement, but has proved once again the incapacity to sell its products, this time one of the fundamental pillars of the European construction: the principle of freedom of movement. However, the challenge of the EU today does not just simply stand in explaining how it works or in pointing out its advantages, but in telling a different story and using a narrative that could undermine the one told until now. Just as the European migrants, the EU was used as convenient scapegoat and the so-called invasion was perceived as the result of politics “dictated by Brussels”. The position of the EU appeared as very weak and it was foreseen to remain weak, in the absence of a leader strong enough to have authority over the Member States, popular and charismatic enough to attract audience and to win back the distrustful citizens and with clear vision, in order to restore the shallow identity of the EU. Confessedly, the good news don’t seem to spread as fast as the bad news and dispelling the myths will take longer and appear to be more problematic than building one’s image with negative adjectives and stereotypes. As the far right and its rhetoric breaths with the help of instigant allegations and shocking headlines, a transversal strategy towards them is advisable. As proved in some cases (Front National in France, for instance), driving them into a corner might result in a counteroffensive, reaching even more scope and approval. Their success, confirmed at the past elections, is based on the core spirit of populist rhetoric and their ability to appeal to people’s feelings and worries, simultaneously supported by the 24 hour news cycle and the need for a strong, controversial and debatable subject. Certainly, there is no all-in-one-solution, so much the more as the radical rhetoric is so different and dissimilar across the countries, but humour and satire can be useful tools against. Mocking their narrative in trying to counterbalance their simplistic and short-sighted positions proves to be the most reasonable approach and several social media campaigns functioned to that effect (“Why don’t you come over” campaign, realized by the Romanian journal Gândul, or the backfiring twitter hash tag campaign by a large number of non-Ukip supporters #WhyImVotingUKIP, intentionally created to promote the party). The real danger that remains the day after a shocking headline is replaced by another sensational story consists in mainstreaming these positions, once stances of the far-right. Both UK and France have seen a rise of the far right parties during the last national and European elections, but also a tendency of the mainstream actors towards the adoption of some of these attitudes, giving them oxygen and credibility in the public debate. Having to deal with a deceived public, with people feeling disconnected from the state and finding out that the promises by the political class have been broken constantly, the centrist parties face the risk of “sliding into sin”, if not careful with how they articulate and decide to deal with these matters. Over the time, the rhetoric of the far-right and the anti-migration discourse had its ups and downs, gaining success mainly in difficult economic times. Notwithstanding, the consequences of their wide spreading can hardly and only to a certain point be measured. With regard to Romanian and Bulgarian mobile citizens, facts flat out denied the existing apprehensions and ridicule political exaggerations, but the circumstance that these were extensively spread and accepted influenced decisively the public debate and offered a framework for xenophobic messages and discriminatory attitudes towards the two communities. Some say that any other country in the role of Romania and Bulgaria would have faced the same aggressive and harsh rhetoric and it was hence bad luck and bad timing, but clearing their image and overcoming prejudice will definitely ask for more than just good luck. The full report “The anti-migration discourse with regard to Romanian and Bulgarian citizens in France and Great Britain: between blame culture, negative stereotypes and prejudice” can be downloaded here: http://www.crpe.ro/en/anti-migrationdiscourse-regard-romanian-bulgarian-citizens-france-uk/ ANDREEA CALBEAZA – Policy Research Fellow Open Society Foundations within the Romanian Centre for European Policies Main concerns of European citizens at national level21 Immigration as one of the 2 main concerns 50 UK 40 30 France 20 10 0 21 EU 25/27/2 8 Eurobarometer http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb_arch_en.htm 17 Main concerns EU wide Terrorism Environment, climate Housing Educa,on system Pensions Taxa,on Crime Health and social Immigra,on Rising prices/ Na,onal economic Unemployment du CPAS, les demandeurs d’emploi et les étrangers. Il nous paraissait important de remettre de l’ordre dans les informations qui circulaient, entre autres, sur internet. EB 66 autumn 2006 EB 80 autumn 2013 0 10 20 30 40 50 60 En direct du terrain – Applied solutions ETRANGERS, CPAS, CHOMEURS, STOP AU JEU DE MASSACRE ! « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde » « Nous n’avons pas le choix, il faut les expulser ! » « L’immigration nous appauvrit ! » « Les chômeurs doivent se rendre utiles » « Ils ne cherchent pas assez ! » « Ils profitent du système ! » « On est trop laxistes en Belgique. » « Ils sont beaucoup trop nombreux à recevoir des aides » « Ils fraudent énormément »… Toutes ces idées reçues polluent les réseaux sociaux, les forums ou même quelques fois les articles de presse. Ras le bol de voir avec quelle facilité ces messages circulent dans les forums et sont alimentés par d’autres, plus durs encore sans mise en contexte, sans arguments contraires pour équilibrer les propos. Ras- le- bol de voir avec quelle rapidité ces sentiments subjectifs peuvent « contaminer » l’opinion et faire de perceptions, des faits objectifs. La campagne « Le jeu de massacre, ça fait mal ! » lancée en mai par les Equipes Populaires a pour objectif de rétablir une certaine vérité, démonter les idées reçues par l’utilisation d’arguments objectifs sans porter de jugement de valeur. L’enjeu est important, celui d’arriver à toucher un public qui généralement ne veut lire que ce qu’il veut entendre où qui est persuadé d’avoir raison, aveuglé par sa situation de vie généralement difficile. Et ce, dans un contexte de crise économique qui produit une division, une concurrence, même au sein des publics fragilisés. Remettre de l’ordre dans les idées Pour ce faire, nous avons décortiqué les commentaires qui foisonnent sur les forums des médias en ligne et nous avons identifié des messages récurrents, aussi bien au niveau du fond que du destinataire (étranger, bénéficiaire du CPAS, chômeur…). Nous avons opté pour un argumentaire objectif sans partir du principe que les opinions recueillies sur les forums étaient inexactes : Maggie de Block nous sauve-t-elle de “l’invasion” des migrants ? Les immigrés nous volent-ils notre travail ? Les immigrés coûtent-ils cher à l’Etat ? La dégressivité des allocations de chômage poussera-t-elle les chômeurs à travailler ? Gagnent-ils vraiment plus que moi qui travaille ? Eston vraiment trop laxistes en Belgique ? Lutter contre la fraude sociale va-t-il équilibrer les dépenses de l’Etat ? Les minimexés devraient-ils faire des travaux d’intérêt général gratuits pour mériter leurs allocations ? A l’aide de chiffres, de témoignages mais aussi d’analyses scientifiques nous avons démontré l’incohérence de ce type de raisonnement. (Voir encadré 1) Mais il ne suffit pas de dénoncer, il faut aussi proposer des solutions (Voir encadré 2). Celles-ci sont brièvement décrites dans le magazine de campagne. Ce dernier est largement diffusé via notre réseau associatif, dans les lieux d’animations mais aussi au sein de nos groupes de citoyens qui utilisent l’outil pour se faire leur propre idée. Il est téléchargeable gratuitement sur notre site web. Mais les écrits ne suffisent pas : Comment associer les gens à notre ras-le-bol ? Par une action concrète, qui leur permettrait d’influer directement sur ces idées reçues. Nous avons proposé à tout un chacun de riposter sur les forums des médias en ligne. Ensemble sur la toile « Dans les situations de tensions, de récessions économiques, d’épidémie, les sentiments de frustrations et de peur sont très forts. Il se crée une forte tension, un désir de supprimer ces frustrations » René Girard Beaucoup de commentaires postés sur les forums sont pris pour vrai par une partie de la population, au même titre qu’une information vérifiée. C’est pourquoi il était important pour nous d’impulser une action auprès des citoyens. Nous avons édité un magazine qui reprend les principales fausses idées nourries à l’égard de trois profils : les bénéficiaires Des groupes de vigilance citoyenne se sont constitués en Wallonie et à Bruxelles. Nous leur avons proposé des 18 arguments « clefs sur porte » mais aussi de rédiger leur propre argumentaire sur base du magazine et d’autres documents que nous leur avons fournis. Les participants ont choisi ensemble des articles sujets à polémique et ont semé leurs « vraies bonnes idées ». estime que l’immigration coûte entre 4 et 8 milliards par an au budget de l’Etat. Etant donné que la situation du chômage est comparable avec la Belgique, on peut dire que l’immigration coûterait approximativement 1 à 2 milliards par an au budget de l’Etat belge. C’est un coût relativement faible. Cette action collective a fait prendre conscience que la démarche est à la portée de tous et leur a permis de dépasser le sentiment d’impuissance. Pourquoi alors ramener systématiquement cet argument sur la table ? Nous bénéficions tous d’une manière ou d’une autre, de l’aide ou de la protection sociale. L’immigration a un coût dans certains pays mais elle rapporte également ! Le bénéfice tiré de l’immigration dans certains pays comme le Canada par exemple s’explique aussi par le fait qu’ils pratiquent l’immigration choisie mais ce n’est pas vrai pour tous les pays. En France, une équipe de chercheurs de l’université de Lille a réalisé une étude en 2009. Celle-ci mettait en évidence le gain de l’immigration pour l’Etat français : plus de 12 milliards d’euros par an. En Belgique, en 2013, chaque immigré a rapporté 3500 euros aux caisses de l’État, selon un récent rapport de l’OCDE. Au-delà de nos groupes, nous avons axé notre communication sur les réseaux sociaux en invitant les internautes à envahir la toile de messages à contre-courant. Cette « veille » appartient à tous, tout le monde peut facilement se saisir de la responsabilité de répliquer lorsqu’un commentaire est faux et qu’il peut influencer, altérer notre conception du monde. Nous avons également développé un « jeu de massacre » pour animer les débats pré-electoraux auxquels nos militants se sont invités. Ce jeu consiste à lancer des balles sur des pyramides de conserves. Le participant aura le choix de tirer sur des visages ou de pulvériser la pyramide des fausses bonnes idées. Il pourra en fin de parcours proposer de vraies bonnes idées et proposer ainsi une réelle alternative aux solutions simplistes souvent évoquées pour atténuer les dégâts de la crise économique. La crise fabrique des boucs émissaires. Ce n’est pas un hasard si les messages de rancœur et de haine gagnent du terrain en période de crise. Les discours sur l’austérité (“Tout le monde doit faire des efforts”) véhiculent des messages stigmatisant les personnes déjà vulnérables. Elles sont une première fois victimes de la crise, et une seconde fois victimes des préjugés ! Le jeu de massacre, ça fait très mal. Et ça ne résout en rien les problèmes de fond : le manque d’emplois, les inégalités croissantes de revenus, une politique d’immigration désastreuse, une fiscalité inéquitable… Il va de soi que combattre les injustices et les inégalités ne se fera pas en un jour. Cela dit, il est important de se mobiliser pour ce qui pose réellement problème dans la société : la répartition inégale des ressources et des revenus. Ne cédons pas à la facilité… Ne nous trompons pas de cible. Encadré 1 : « On ne peut pas accueillir tous ces immigrés parce qu’ils coûtent cher à l’Etat et qu’en temps de crise économique, on ne peut pas se le permettre. » Mais combien coûtent-ils au juste ? Selon François Gemenne, chercheur à l’Université de Liège, la Belgique est un des seuls pays industrialisés avec la France dans lequel l’immigration coûte un peu d’argent. Parce que chez nous, le taux de chômage de la population immigrée est plus important par rapport aux autres pays européens. En effet, Il y a trois fois plus de demandeurs d’emploi auprès des immigrés qu’au sein des belges. Donc, cela prouverait qu’ils viennent chez nous pour profiter des aides sociales ? Là encore, il faut chercher plus loin que les idées simplistes, se documenter, croiser les différentes informations et on en arrive à la conclusion que l’importance du taux de chômage chez les immigrés est essentiellement dû à la discrimination existante sur le marché de l’emploi. Plusieurs études récentes dont le monitoring socio-économique élaboré par le SPF Emploi et le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR) l’ont d’ailleurs démontré. Lutter contre cette discrimination à l’embauche, ramener le taux de chômage des immigrés à celui de la population belge, rapporterait 1% du PIB selon l’OCDE. Extrait « Le jeu de massacre, ça fait mal », dossier Contrastes spécial campagne. Téléchargeable sur www.equipespopulaires.be rubrique supports de campagne. Encadré 2 : LA RE-POLITISATION DES ENJEUX DE SOCIÉTÉ, FACE À LA SUPRÉMATIE ARROGANTE DU MONDE ÉCONOMICO-FINANCIER : Par exemple : • Préserver de la marchandisation et de la concurrence les secteurs d’activités qui rencontrent des besoins fondamentaux, comme l’éducation, la santé, l’accès à l’eau, les services postaux, l’énergie… • Instaurer une vraie gouvernance économique au sein de la zone euro. Pour coordonner des politiques économiques, fiscales et de régulation indispensables. • Soutenir pleinement la dynamique associative. Car c’est par l’articulation bien comprise entre les mouvements collectifs et l’action politique que l’on fait vivre la démocratie et que l’on produit du droit. Extrait « Le jeu de massacre, ça fait mal », dossier Contrastes spécial campagne. Téléchargeable sur www.equipespopulaires.be rubrique supports de campagne. CLAUDIA BENEDETTO – Collaboratrice au magazine Contrastes, Chargée de communication aux Equipes Populaires De plus, selon le bulletin statistique du SPP Intégration sociale, les bénéficiaires d’un revenu d’intégration sociale sont principalement de nationalité belge. En 2012, moins d’un bénéficiaire sur 10 était ressortissant d’un pays de l’Union européenne et environ un sur cinq avait une nationalité extra-européenne. Oui… même considérant ces éléments, l’immigration a un coût me direz-vous ! En France, on 19 Openness to other EU countries: In the past 12 months have you… (EB autumn 2013)22 Read a book, newspaper or magazine in a Watched TV programmes in a language other than Identity populism No What does identity populism mean to you? Yes, once or twice Visited another EU country The political attempt to construct a national ethos around ethnic, religious, and/or linguistic origins causes exclusion by seeing outsiders of the pre-defined group as a threat to society's "purity". It is often accompanied by an alleged metaphysical national fate or a historic mission which is endangered by "others" who don't belong to the "real" demos. Yes, on several occasions Socialised with people from another EU country 0 20 40 60 80 Space for you! PORTRAIT: DAN SOBOVITZ In the section « Space for you » one individual will answer questions about him/herself, identity populism, European identity and living together. In this edition Dan Sobovitz speaks about his own particular background and explains how this has shaped his views about populism, identity, diversity and community. Yourself What are your origins? I spent my childhood between a Jewish settlement of the West Bank and the US, and my adulthood years in Israel, France, Germany, the US, and Belgium. Further back, my father's parents were Holocaust survivors who migrated to Israel after the war from Hungary and Czechoslovakia. On my mother's side, I have a Swiss grandmother and a (rare) grandfather who is the 9th generation to be born in Israel/Palestine. What is your current occupation? I advise the European Commission on its online communication and public campaigns. Recently, I've joined the communication team of the Humanitarian Aid and Civil Protection department, also known as DG ECHO. We try to make EU citizens more aware of the life-savings actions, being done on their behalf around the world. Why did you join Ceci n’est pas une crise? The danger of populist political parties which base their ideologies on hate and scapegoating is not unique to any specific country or a political context; nor is it necessarily related to ethnic or religious conflicts. It is a rising phenomenon which is currently gaining momentum in many countries, even rich, peaceful ones, ones with long histories of democratic values. It is therefore imperative to 22 understand the origins of identity populism on a global scale, and find the most appropriate response to defending democratic values – wherever they are being threatened. Eurobarometer http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb_arch_en.htm What are its main causes and challenges according to you? The democratic model is expecting a great deal of responsibility from its citizens in making their civic choices. In the (original) ancient Greek democracy, free men had the time and resources to engage in public debates. Modern citizens, however, who are often busy with their own survival, are seeking quick and simple answers to their problems in a fast-changing society. Technology has taken the process of simplification even a step further when a political message is often limited to a 140-character tweet. This is a very fertile ground for opportunistic politicians who recognise the political gain of treating genuine problems with unsounded over-simplified solutions, which are often based on hate and scapegoating. Who are the three most common scapegoats used by identity populists? Historically, it has been easier to build purist identities around ethno-religious lines. However, populists are opportunistic in essence, and will choose their victims strategically based on preexisting or potential tensions which can be magnified for gaining political capital. Scapegoating has therefore no rules and can also target groups based on their linguistic origins, sexual orientation, political affiliation, or even gender. European identity What are the 5 most important words that define European identity for you? Diversity, human multilingualism rights, solidarity, environmentalism, How can a European identity be fostered? What will make people feel European? The EU is lacking sex-appeal. It has revolutionised the lives of millions by creating a sustainable peace, removing borders and creating endless opportunities, yet, it is still an amorphic creature which is difficult to grasp, let alone to identify with. It is not enough to create a political framework and expect citizens to gradually identify with it (as can be attested by the reality in the Middle East where pre-state identities are rising back, challenging the post-colonial borders). An identity is a dynamic and fluid construction which the EU will need to constantly invest in and sustain by building a stronger "brand". We need to bring EU politics closer to the people by further democratising it and simplifying its political processes. The 20 introduction of a quasi-direct vote for the European Commission's president was a powerful move in that direction. one that Europe is trying to create which is much and more fluid and broad. It is also about imminent symbols such as building a true European capital, which citizens from across Europe can visit. Rather than mere glass buildings with endless (grey) offices of EU institutions, it should offer visitors uplifting museums about the European accomplishments, statues of European heroes, a place of which Europeans can take true pride. DAN SOBOVITZ – Co-founder Ceci n’est pas une crise – This is not a crisis, Strategic Consultant at the European Commission What is your vision for Europe (not the EU)? I believe a society is not measured by its innovative economy, military power, or even scientific accomplishments but rather by the well-being of its margins; the way it treats its ethnic, religious, and sexual minorities, its old, poor, and sick. Values representing best the EU (EB autumn 2013)23 Self-‐fulfilment Religion Tolerance Equality Solidarity, support for Respect for human life Respect for other Rule of Law Individual freedom Democracy Human rights Peace I reclaimed my grandparents' nationalities and moved to Europe out of conviction that the horrors of its past engraved a solid lesson and fundamental values of democracy, human rights, tolerance and pluralism. I still consider Europe to be more progressive than any other part of the world. However, I also see some widening cracks in the wide consensus which was built around these post-war fundamental values. My vision for Europe is for it to be a mosaic of cultures where minorities have a strong sense of belonging and identification with their compatriots. Living together 0 10 20 30 40 What are the three most important entities that define you (eg family, city, country)? Israeli author David Grossman says that a homeland is (any) country that could make you feel ashamed of its policies. According to this definition, I'm definitely both Israeli and European… Hannah Arendt found it irrational to identify herself with any 'nation' and I can relate to that as well. I'd still say that I share common grounds with humanists and democrats wherever they are. My Jewish cultural background and being a part of the LGBT community also play a role in my self-perception and my identification with minority groups in general. What are the first three words that come to your mind when you think of community? Culture, solidarity, exclusion How can a better understanding between communities be reached in order to facilitate the living together? We need to break the vicious cycle, in which minority groups feel unwelcome within their wide societies and in return reject their European/national identities in favour of sectarian communities, ending up even more alienated than they started off. For example, for a young Frenchman of North-African descent who cannot find a job because of his Arab name, there's little reason to feel French or European. Instead, he is likely to turn to his own, say Algerian community, where he feels respected and equal. In some cases, that leads to failed integration and even religious fanaticism, which in turn aggravate the problem of discrimination and racism by the host societies. An inclusive national identity, based on ideas and values that new members can adopt, rather than on pseudo-physical traits, is therefore in the interest of both the host-societies and its minority groups. That is for me one of the main differences between the politically imposed ethnic identity of Israeli citizens (who need to choose between being Jewish or Arab) and the 23 Eurobarometer http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/eb_arch_en.htm 21 NOS FONDATEURS Qui sont les gens derrière la création de Ceci n’est pas une crise ? Philippe Busquin Philippe Busquin a occupé plusieurs postes de Ministre (Ministre de l'Intérieur, Ministre de l'Éducation et Ministre des Affaires sociales), avant de devenir Commissaire européen à la recherche au sein de la Commission Prodi. En outre, il a également été Membre du Parlement européen (Parti socialiste belge). Philippe Busquin a consacré beaucoup de temps et d'efforts à améliorer la coopération entre la recherche et l'industrie et est Docteur Honoris Causa de nombreuses universités. Grégor Chapelle Grégor Chapelle a été actif dans la politique et des projets de la société civile depuis le début de sa carrière. Il est actuellement Directeur général d'Actiris, l'Office Régional Bruxellois de l'Emploi. Diplômé de Harvard, il a travaillé des nombreuses années pour des sociétés de conseils renommées au niveau international et a été actif dans la politique régionale et nationale belge. Il est le cofondateur de Oxyjeunes / Hydrojeunes, une organisation d’aide aux jeunes en difficulté, et du Cabinet d'Avocats du Quartier des Libertés, qui se bat pour le droit universel d'accès à la justice. Monica Frassoni Monica Frassoni est active dans la politique européenne depuis plus de deux décennies. Elle est Présidente du Parti vert européen depuis 2009 et a été la première députée italienne élue à l'étranger en 1999 sur les listes d’Ecolo, le parti vert belge. De 2002 à 2009, elle a été Présidente du Groupe des Verts au Parlement européen. Elle se consacre notamment aux thèmes de l'environnement et de l'immigration. Elle est également un des fondateurs et Présidente de ECES - The European Centre for Electoral Support - qui soutient le développement démocratique durable par l'appui aux processus électoraux. Pierre Kroll D'abord architecte et licencié en sciences de l'environnement, Pierre Kroll est l'un des caricaturistes politiques belges les plus importants. Il est le dessinateur attitré du quotidien belge Le Soir et des hebdomadaires Ciné-Télé-Revue et Télémoustique. Ses œuvres ont été présentées dans de nombreuses autres publications et au sein d’institutions comme le Parlement européen. Pierre Kroll dessine en direct chaque semaine en télévision pendant le débat politique Mise au Point. Il a remporté plusieurs prix tels que L'humour Vache et Press Cartoon of Belgium. Il est membre de "Cartooning for Peace", un projet initié par Jean Plantu et l'ONU qui rassemble des caricaturistes politiques pour «désapprendre l'intolérance», et Docteur Honoris Causa de l'Université de Liège. Jean-Pascal Labille Didier De Jaeger Didier De Jaeger est spécialisé en psychologie sociale, communication et marketing. Il a été Président de Troy Agency jusqu'à leur fusion avec Emakina Group, une des principales agences de communication digitale européenne, dont il est devenu Partenaire exécutif jusqu'en 2013. Auparavant, il a été Maître de conférence invité à l'Université de Louvain pendant 15 ans, tout en travaillant comme Managing Partner de l’agence de publicité Kadratura de 1993 à 2007. Depuis la fin des années 1980 jusqu'au milieu des années 1990, il a été Managing Partner de la société d’études de marché Censydiam. Jean-Pascal Labille est Ministre fédéral des Entreprises Publiques et de la Coopération au Développement depuis janvier 2013. Il a été également Professeur invité à l'École de gestion HEC de l'Université de Liège pendant plusieurs années. Après une activité de réviseur d’entreprises, il est devenu Secrétaire général des Mutualités Socialistes/ Solidaris de la Province de Liège, puis de l'Union nationale des mutualités socialistes. Il a fortement dynamisé cette mutualité qui est la plus importante de Wallonie et qui regroupe des dizaines d’organisations de la société civile. Il en a aussi modifié le nom, désormais Solidaris. Philippe Maystadt Eric Domb Eric Domb est le fondateur et Président de Pairi Daiza, un zoo, jardin botanique et parc à thème belge, qui vise également à protéger les espèces menacées. Après des études en droit et commerce et une carrière dans le monde de l'entreprise, il a lancé le projet Pairi Daiza en 1992. En surmontant les difficultés des premières années, il a réussi à construire une destination touristique très populaire. Eric Domb a également été Président de l'Union wallonne des entreprises et a reçu le titre Manager de l'Année 2007. Plusieurs fois Ministre et Vice-Premier Ministre, Philippe Maystadt est resté dix ans à la tête du Ministère des Finances de 1988 à 1998. Il a présidé le Conseil Ecofin, le Comité intérimaire du Fonds monétaire international et le Conseil des gouverneurs de la BERD. Pendant douze ans, de 2000 à 2011, il a dirigé la Banque européenne d'investissement. Depuis 2012, il est professeur aux universités de Louvain-la-Neuve et de Luxembourg. Il a aussi succédé à Peter Sutherland à la présidence de l'"European Policy Center". En 2013, il a été nommé Conseiller spécial auprès de la Commission européenne. 22 Benoît Scheuer Benoît Scheuer est sociologue. Après plusieurs années de travail comme enseignant et comme chercheur dans diverses universités, dont l'Université de Louvain, en 1986, il a fondé le centre de recherche en sociologie « Survey & Action » qu'il dirige toujours actuellement. Cet institut de recherche est spécialisé dans les analyses sociétales. Ce centre a compté plus de 20 chercheurs. Depuis près de 30 ans, des centaines de rapports ont été produits dont une partie publiée dans la presse. En 1999, après les errements et la faillite de la « Communauté internationale » qui a été totalement passive à Sarajevo, à Srebrenica et durant le génocide rwandais, Benoît Scheuer, spécialisé en sociologie des problématiques identitaires, a rassemblé plusieurs professeurs d’universités, des écrivains et des responsables de grandes ONGs humanitaires, pour fonder un institut : « Prévention Génocides » devenu Verbatims. Cette organisation s’occupe principalement de formation des opinion makers à la gestion des risques de conflits identitaires en Afrique et spécialement dans l'Est du Congo. Actuellement, il a laissé la direction de cette organisation à de jeunes chercheurs africains et européens. En 2001, Benoît Scheuer a réalisé et produit un film documentaire « Côte d’Ivoire, poudrière identitaire » qui a joué un rôle dans la dynamique de la société ivoirienne. Dan Sobovitz Dan Sobovitz est politologue et spécialiste de communication des affaires publiques en Europe et au Moyen-Orient. Ayant grandi dans une colonie de Cisjordanie (qu’il a quitté pour des raisons idéologiques), Dan Sobovitz s’est impliqué dans de nombreuses initiatives de la société civile pour la paix et le dialogue intercommunautaire à travers le monde. Il a obtenu des diplômes de Columbia University (NY), Sciences Po Paris, Hertie School (Berlin), et Tel Aviv University. Ces dernières années, il consacre son temps aux campagnes de communication publique des institutions européennes. Il est citoyen d'Israël, de Hongrie et de Suisse, et réside actuellement en Belgique. Eric Winnen Eric Winnen est un expert en communication et actuellement Directeur général de Dialectiq, une agence de communication axée sur le monde économique. Il est également l’animateur d'une série d'émissions sur Canal Z qui abordent des sujets tels que le développement durable, la mobilité, la compétitivité et la gestion de l'information. Après sa nomination en tant que porte-parole du Ministère des petites et moyennes entreprises du Gouvernement fédéral Belge, il a également travaillé dans plusieurs établissements d'enseignement supérieur. 23 CECI N ’EST PAS UNE CRISE Public Utility Foundation Square de Meeûs, 22 1050 Brussels, Belgium TEL/ FAX: +32 (0)2 325 5558 E : [email protected] W : www.cecinestpasunecrise.org F : www.facebook.com/cecinestpasunecrise Editors: Sophia Kabir, Programme Manager Esther Bohé, Programme M anager Layout: Mathieu M ichaux 24