Noureddine Zouzou - laboratoire plasma et conversion d`energie
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Noureddine Zouzou - laboratoire plasma et conversion d`energie
Année 2002 THESE Présentée en vue de l’obtention Du TITRE de DOCTEUR de L’UNIVERSITE PAUL SABATIER Spécialité : Génie Electrique par Noureddine ZOUZOU Ingénieur en Electrotechnique ETUDE DE LA MOBILITE MOLECULAIRE DU PEN DESTINE À LA FABRICATION DES CONDENSATEURS : INFLUENCE DE LA MICROSTRUCTURE Soutenue le 16 Décembre 2002 devant la commission d’examen : Président A. TOUREILLE Professeur à l’Université Montpellier II Rapporteurs G. SEYTRE Directeur de recherches CNRS, Université Lyon I G. TOUCHARD Professeur à l’Université de Poitiers Examinateurs J. GUASTAVINO Professeur à l’Université Toulouse III C. LACABANNE Professeur à l’Université Toulouse III J. J. MARTINEZ-VEGA Professeur à l’Université Toulouse III (Directeur de Thèse) Travail effectué au Laboratoire de Génie Electrique de Toulouse (UMR-CNRS 5003) Université Paul Sabatier (Toulouse III) – 118 route de Narbonne – 31062 TOULOUSE Cedex A mes parents, A ma famille… Remerciements : Ce travail a été réalisé au sein du Laboratoire de Génie Electrique de Toulouse (UMRCNRS 5003) à l’Université Paul Sabatier, sous la direction de Monsieur J. J. MARTINEZVEGA, Professeur à l’Université Paul Sabatier. Je voudrais tout d’abord lui exprimer ma reconnaissance pour avoir dirigé ce travail mais aussi pour avoir participé grandement à sa réalisation. Le temps qu’il a bien voulu me consacrer et sa rigueur scientifique m’ont été d’un réel soutien. Monsieur A. TOUREILLE, Professeur à l’Université de Montpellier, me fait l’honneur de présider le Jury de cette thèse. Qu’il veuille bien trouver ici l’expression de ma gratitude. Messieurs G. TOUCHARD, Professeur à l’Université de Poitiers, et G. SEYTRE, Directeur de recherches CNRS, ont accepté de critiquer ce travail et d’en être les rapporteurs. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma sincère reconnaissance. Je suis très sensible à la présence dans ce Jury de Mademoiselle C. LACABANNE, Professeur à l’Université Paul Sabatier. Mes remerciements vont aussi à Monsieur J. GUASTAVINO, Professeur à l’Université de Paul Sabatier, pour sa participation à ce Jury de thèse. Je tiens également à remercier Messieurs C. MAYOUX et L. BOUDOU (lolo) pour leur aide précieuse ainsi que les efforts consentis à ma réussite. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma sincère reconnaissance. Je remercie tous les membres du laboratoire qui ont participé de près ou de loin à la réalisation de ce travail. J’exprime également ma plus grande sympathie à tous mes amis. Une pensé toute particulière est adressée à mon ami Madjid. Enfin, je ne peux pas oublier de remercier Dieu, le Grand puissant, pour m’avoir laissé en vie jusque-là. Noureddine ZOUZOU SOMMAIRE SOMMAIRE INTRODUCTION GENERALE ……………………………………………….……… 1 Chapitre I : GENERALITES ET SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE I.1. Introduction ………………………………………………………………………… 5 I.2. Généralités sur les propriétés et la structure des polymères ……………………. 5 I.2.1. Structures moléculaires des polymères solides …………………….……… 5 I.2.1.1. Structure amorphe ……………………………………………….. 5 I.2.1.2. Structure semi-cristalline ………………………………………... 5 I.2.2. Domaines d’état et zones de transition …………………………………….. 7 I.2.2.1. Domaines d’état ………………………………………………….. 8 I.2.2.2. Zones de transition ………………………………………………. 8 I.3. Polarisation, permittivité et relaxation diélectrique ……………………………... 10 I.3.1. Origine moléculaire de la polarisation ….…………………………………. 10 I.3.2. Comportement dynamique de la polarisation dipolaire …………………… 12 I.3.2.1. Modèle de Debye ………………………………………………… 12 I.3.2.2. Autres modèles …………………………………………………… 14 I.3.3. Dépendance en température des temps de relaxation…………………….… 18 I.3.3.1. Comportement Arrhenius………………………………………… 18 I.3.3.2. Comportement Vogel-Fulcher-Tammann………………………… 20 I.3.4. Relaxations multiples dans les polymères………………………………….. 23 I.3.4.1. Processus primaire……………………………………………….. 23 I.3.4.2. Processus secondaire ……………………………………………. 23 I.4. Le poly(éthylène naphtalène-2,6-dicarboxylate) (PEN) …………………………. 26 I.4.1. Présentation ………………………………………………………………... 26 I.4.2. Procédé de fabrication du PEN …………………………………….……… 27 I.4.2.1. Procédé direct : polycondensation ………………………………. 27 I.4.2.2. Procédé indirect : polyestérification …………………………….. 27 I.4.3. Particularités du PEN ……………………………………………………… 29 I.4.4. Caractéristiques morphologiques et conformationnelles ………………….. 29 I.4.4.1. Mailles cristallines du PEN …………………………………….... 30 I I.4.4.2. Arrangement lamellaire ……………………………………..…… 33 I.4.4.3. Unités morphologiques …………………………………………... 34 I.4.4.4. Développement des unités morphologiques …………………...… 34 I.5. Conclusion ………………………………………………………………………….. 36 Chapitre II : TECHNIQUES EXPERIMENTALES ET MATERIAU II.1. Introduction ……………………………………………………………………….. 39 II.2. Caractérisation de la mobilité moléculaire………………………………………. 39 II.2.1. Analyse diélectrique dynamique (ADD) ………………………………….. 39 II.2.2. Analyse mécanique dynamique (AMD) ………………………………….. 43 II.2.3. Analyse enthalpique différentielle (AED) ………………………………... 44 II.2.4. Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier (IRTF) ……………... 45 II.3. Matériau de l’étude …………………………….…………………………………. 47 Chapitre III : ETUDE DES CHANGEMENTS MORPHOLOGIQUES ET CONFORMATIONNELS DU PEN III.1. Introduction …………………………….…………………………….…………... 49 III.2. Etude du PEN par analyse enthalpique différentielle …………………………. 50 III.2.1. Températures caractéristiques du PEN de référence …………………….. 50 III.2.2. Etude de la cinétique de cristallisation …………………………………... 52 III.2.3. Etude de la cristallisation partielle et totale ……………………………… 59 III.2.3.1. Etude de la cristallisation partielle ……………………………. 60 III.2.3.2. Etude de la cristallisation totale …………………………….…. 65 III.2.4. Cristallisation non-isotherme …………………………………………….. 67 III.3. Configurations et orientations moléculaires après la cristallisation froide isotherme du PEN …………………………….………………………………………… 70 III.3.1. Attribution des bandes d’absorption ……………………………………... 70 III.3.2. Région spectrale 800-1100 cm-1 …………………………………………. -1 III.3.2.1. Triplet 813-826-839 cm ………………………………………. 74 74 III.3.2.2. Doublet à 1044 cm-1 ……………………………………………. 76 III.4. Changement structural mis en évidence par le couplage AED/IRTF ………… 79 II III.5. Conclusion ………………………………………………………………………... 81 Chapitre IV : MOBILITE MOLECULAIRE CARACTERISTIQUE DU PEN IV.1. Introduction ……………………………...………….……………………………. 83 IV.2. Etude de la mobilité moléculaire par analyse diélectrique dynamique ………. 84 IV.2.1. Spectre de relaxations diélectriques dans le PEN de référence ………….. 84 IV.2.2. Effet de la fréquence sur les modes de relaxation ……………………….. 86 IV.2.3. Dépendance en température des temps de relaxation ……………………. 87 IV.2.4. Influence de la cristallisation froide sur les modes de relaxation ………... 89 IV.2.4.1. Spectres de relaxations diélectriques …………………………... 89 IV.2.4.2. Dépendance en température des temps de relaxation …………. 91 IV.2.4.3. Analyse des paramètres d’activation …………………………... 96 IV.3. Etude de la mobilité moléculaire par analyse mécanique dynamique ………... 100 IV.3.1. Spectre de relaxations mécaniques dans le PEN de référence …………... 100 IV.3.2. Influence de la structure sur les spectres de relaxation ………………….. 102 IV.3.3. Dépendance en température des temps de relaxation ……………………. 104 IV.4. Relaxation induite par la cristallisation froide du PEN ……………………….. 106 IV.4.1. Analyse enthalpique différentielle ……………………………………….. 106 IV.4.2. Analyse diélectrique dynamique ………………………………………… 107 Modélisation de l’évolution du processus ρ avec la fréquence et la température 108 IV.4.3. Analyse mécanique dynamique ………………………………………….. 112 IV.5. Conclusion ………………………………………………………………………… 113 Chapitre V : DISCUSSION V.1. Introduction ……………………………………………………………………….. 115 V.2. Modes de relaxation secondaire ………………………………………………….. 115 V.2.1. Mode β …………………………………………………………………… 116 V.2.1.1. Loi de comportement et énergie d’activation …………………… 116 V.2.1.2. Origine moléculaire de la relaxation β …………………………. III 116 V.2.1.3. Corrélation entre le mode β et la microstructure du PEN ……… 118 V.2.2. Mode β* ………………………………………………...………………… 120 V.2.2.1. Loi de comportement et énergie d’activation …………………… 120 V.2.2.2. Origine moléculaire de la relaxation β*………………………… 120 V.2.2.3. Corrélation entre le mode β* et la microstructure du PEN …….. 123 V.3. Mode de relaxation principale α ………………………………………………… 125 V.3.1. Loi de comportement et énergie d’activation …………………………….. 125 V.3.2. Origine moléculaire de la relaxation α …………………………………… 125 V.3.3. Corrélation entre le mode α et la microstructure du PEN ………………... 126 V.3.4. Corrélation entre le mode α et les modes secondaires …………………… 130 V.4. Processus de relaxation ρ …………………………………………………………. 132 V.4.1. Influence de la température ……………………………………………….. 132 V.4.2. Influence de la fréquence …………………………………………………. 133 V.4.3. Influence de la cristallinité ………………………………………………... 133 V.4.4. Corrélation entre les mesures diélectriques et les mesures mécaniques…... 134 CONCLUSION GENERALE ………………………………………………………….. 135 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ……………………………………………... IV 139 INTRODUCTION GENERALE Introduction Générale INTRODUCTION GENERALE Grâce à leurs performances physico-chimiques, les matériaux diélectriques à base de polymère trouvent un champ d’application de plus en plus important dans l’industrie et notamment dans le domaine du génie électrique : câbles de transport d’énergie, condensateurs... Dans l’étude d’un matériau diélectrique, une analyse des propriétés électriques, en particulier celles de la mobilité moléculaire induite par les phénomènes de relaxation, peut s’avérer un instrument intéressant pour apprécier l’état du matériau et quantifier son évolution sous l’influence de certaines contraintes électriques et/ou d’un vieillissement. L’instabilité structurale des isolants organiques rend très difficile l’optimisation de leurs performances, qui peuvent varier en fonction des contraintes auxquelles ils sont soumis. En effet, à cause d’un échauffement local d’un composant par exemple, un diélectrique à base de polymère n’est pas à l’abri d’une modification structurale irréversible qui peut être à l’origine de la défaillance d’un système électrique. Notre étude vient en amont de la quantification d’une dégradation d’un isolant organique qui subit des contraintes thermique, mécanique et électrique. Ainsi, notre attention a été focalisée sur la contribution à la compréhension de l’influence des changements morphologiques du matériau sur sa mobilité moléculaire et notamment sur sa réponse diélectrique. Le matériau d’étude est le poly (éthylène naphtalène-2,6-dicarboxylate) ou PEN. Il appartient à la famille des polyesters aromatiques et il a été présenté depuis quelques années comme un candidat potentiel pour succéder à d’autres matériaux largement utilisés en tant que diélectriques dans les condensateurs. Dans cette gamme, on peut citer par exemple le poly(éthylène téréphtalate) ou encore le polypropylène. Cette étude s’inscrit dans la continuité des recherches effectuées sur le PEN depuis quelques années au sein du groupe de recherche dans lequel se sont déroulés nos travaux. 1 Introduction Générale Ce mémoire comporte cinq parties : Le premier chapitre est tout d’abord consacré à la présentation de l’état de connaissance sur les polymères en général, et le PEN en particulier. En préambule de ce chapitre, nous rappelons quelques généralités sur les propriétés et la structure des polymères ainsi que les phénomènes de polarisation et de relaxation dans les diélectriques. Dans une deuxième partie nous présentons le matériau de l’étude, et nous passons ensuite en revue les travaux relatifs à la microstructure du PEN à différentes échelles d’organisation structurale. La description des techniques expérimentales choisies est présentée dans le deuxième chapitre avec un rappel du principe de fonctionnement de chacune d’elles ainsi que le protocole d’analyse mis en place. Les caractéristiques des échantillons de PEN utilisés sont également précisées à la fin de cette partie. Le troisième chapitre porte sur la formation de la superstructure durant la cristallisation froide isotherme à partir de l’état solide et amorphe du PEN. Dans un premier temps, nous identifions et discutons la cinétique de cristallisation in situ en utilisant l’analyse enthalpique différentielle. Nous étudions ensuite la mise en évidence et la quantification des changements de phase du PEN avant et après une cristallisation isotherme, partielle ou totale. Enfin, les changements de conformation des chaînes du polymère, associés au refroidissement du film jusqu’à la température ambiante après une cristallisation froide, sont observés par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier. Les résultats associés à la mobilité moléculaire du PEN induite par une polarisation électrique ou une sollicitation mécanique sont présentés au quatrième chapitre. En effet, sur une large gamme de températures et de fréquences, nous montrons que le PEN est caractérisé par quatre processus de relaxations notés β, β*, α et ρ. Par ailleurs, nous exposons tout au long de ce chapitre l’impact des changements morphologiques et conformationnels sur la réponse diélectrique ou mécanique complexe (de conservation ou de dissipation), les énergies d’activation et les lois de comportement. Ceci nous permet par la suite de quantifier la modification de la mobilité moléculaire au sein de cet isolant organique. 2 Introduction Générale Le cinquième et dernier chapitre est entièrement consacré à une discussion. Dans cette partie, l’origine de la mobilité moléculaire des différents modes de relaxation est largement abordée. Par ailleurs, une corrélation des informations recueillies dans le troisième et le quatrième chapitres nous permet d’interpréter l’influence du cycle thermique de cristallisation sur les différents modes de relaxation. Nous montrons que cette mobilité dépend non seulement de la température et de la fréquence de sollicitation, mais aussi de l’hétérogénéité du matériau influencée par la proportion des zones cristallines et par la cinétique de cristallisation de ce diélectrique. Les gammes de température qui peuvent induire des changements morphologiques importants dans la structure du PEN sont clairement identifiées. Enfin, pour clore notre travail nous présentons une conclusion générale où nous soulignons les points essentiels dégagés par notre étude et dressons quelques perspectives qui pourraient servir de point de départ à d’autres sujets de recherches sur ce thème. 3 CHAPITRE I GENERALITES ET SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique CHAPITRE I : GENERALITES ET SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE 1. INTRODUCTION Dans cette partie, nous allons rappeler quelques points essentiels destinés à faciliter la compréhension de notre travail par un lecteur non spécialisé. 2. GENERALITES SUR LES PROPRIETES ET LA STRUCTURE DES POLYMERES : 2.1. Structures moléculaires des polymères solides : Une macromolécule ou polymère apparaît comme un composé constitué d’un enchaînement covalent de motifs simples appelés motifs monomères ou mères. C’est dans la structure macromoléculaire en chaîne elle-même que réside l’origine des propriétés spécifiques des substances macromoléculaires, et c’est à cette nature moléculaire que toute interprétation de ces propriétés, en général, devra être ramenée. 2.1.1. Structure amorphe : Les zones dites ‘amorphes’ correspondent à une structure comparable à celle des liquides caractérisée par l’absence d’ordre à grande distance. Il n’y a pas de distance constante entre les macromolécules et aucune régularité dans l’arrangement et l’orientation de celles-ci dans des zones submicroniques. Les macromolécules peuvent former des points d’enchevêtrement physiques qui sont inévitables à partir d’une certaine longueur des chaînes moléculaires, très souvent atteinte dans les polymères commerciaux. La longueur des segments entre les enchevêtrements est en général suffisamment grande pour que les segments se comportent comme des chaînes individuelles. Les segments de chaînes sont capables de créer une certaine mobilité moléculaire si des espaces libres sont régulièrement distribués dans tout le volume du matériau. Ces espaces constituent le volume libre du matériau qui détermine la mobilité des macromolécules et l’aptitude du polymère à changer de conformation. 2.1.2. Structure semi cristalline : Sous l’influence de certaines actions physiques, des zones ordonnées, suivant un réseau périodique, pourront apparaître au sein du polymère. Dans ces zones dites cristallines les chaînes resteront parallèles les unes aux autres, et entre elles s’établira un réseau 5 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique d’interactions transversales qui maintiendra la solidité de la structure. Du fait de l’existence des enchevêtrements entre les chaînes qui se conservent dans le solide pendant la formation des zones cristallines, la régularité du parallélisme des chaînes se trouve limitée à des portions restreintes des longueurs de celles-ci. Les domaines cristallins, dans l’impossibilité où ils se trouvent alors de croître jusqu’à occuper la totalité de la masse du polymère, restent de dimension limitée. Selon la nature des polymères et les conditions de cristallisation, les matériaux obtenus présentent tous les états intermédiaires entre l’état amorphe et l’état cristallin. La cristallisation peut conduire aux superstructures de type sphérolitique. Celles-ci sont visibles au microscope en lumière polarisée sur une coupe mince extraite d’un bloc de polymère. L’image prise présente la forme d’un pavage hexagonal plus ou moins régulier. Cette apparence correspond à l’existence d’unités structurales (ou unités morphologiques) jointives de forme approximativement polyédrique, nommées sphérolites. L’origine de la forme quasi-polyédrique des éléments de structure dans les polymères apparaît clairement lorsqu’on examine le mécanisme de formation de ceux-ci. On constate alors à l’échelle observable par microscopie optique que chaque élément naît en un point déterminé du matériau et se développe par propagation à peu près radiale (cf. figure I.1). La frontière entre deux sphérolites est ainsi le lieu des points atteints simultanément par la cristallisation à partir des centres de développement voisins. Figure I.1 : Représentation schématique d’une unité morphologique sphérolitique dans le Polyéthylène [LIS 70]. 6 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Les sphérolites occupent la quasi totalité du volume du polymère solide et celui-ci n’étant que partiellement cristallin, il en découle que c’est à l’intérieur des fibrilles, au sein de la structure interne des sphérolites, que se trouvent mêlées les unes aux autres zones cristallines et zones amorphes. Le développement des zones cristallines conduit à une structure lamellaire comparable à celle observée pour les empilements de monocristaux. La superstructure des lamelles conduit à une rotation progressive de la normale aux lamelles rencontrées successivement. Cette rotation, de pas relativement long, se traduit par l’aspect très caractéristique de cercles concentriques observés au microscope dans les sphérolites présentant des structures lamellaires [CHA 70]. La nature de la morphologie d’un polymère a évidemment une influence considérable sur les propriétés physiques en général et électrique en particulier. Les relations sont quantitativement mal connues ou n’ont pas pu être développées avec précision. 2.2. Domaines d’état et zones de transition : La notion de domaine d’état exprime le fait que les propriétés d’un matériau varient peu dans un certain domaine de température, dans des conditions de mise en forme ou d’usage. Les propriétés du matériau peuvent être suffisamment bien définies dans un tel domaine. Cette remarque est valable aussi bien pour les grandeurs mesurables que pour les caractéristiques moléculaires et structurales. Pour les matériaux polymères, on peut distinguer les états fondamentaux suivants [EHR 00] : - état vitreux, - état caoutchoutique, - état fondu, liquide ou d’écoulement. Entre ces différents domaines d’état, il existe des zones de transition qui s’étendent sur un certain domaine de température : - zone de transition vitreuse (zone de ramollissement ou de vitrification), - zone de fusion ou de fluidification. Il est bien connu que d’autres transitions au sein d’un polymère peuvent exister selon la nature de celui-ci, nous avons rapporté ici les transitions les plus classiques associées aux polymères et qui intéressent particulièrement notre étude. 7 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique De plus, certains événements qui peuvent se produire dans le même domaine d’état ne peuvent pas être qualifiés uniquement comme des transitions de phase. Entre autres, on trouve les phénomènes de relaxation secondaire qui sont la preuve d’une mobilité moléculaire localisée. Cependant ces phénomènes traduisent aussi le passage d’un état thermodynamique où ces mouvements sont très peu probables à un autre dans lequel ils deviennent possibles. Les phénomènes de relaxation, avec leur caractère bien particulier, seront discutés plus loin. 2.2.1. Domaines d’état : 2.2.1.1. Domaine d’état vitreux : Dans ce domaine d’état, dit vitreux, les matériaux polymères sont durs et fragiles, c’est un comportement analogue à celui des verres. Les seules libertés de mouvements moléculaires correspondent aux oscillations, de plus ou moins grande amplitude, des atomes autour de leur position moyenne d’équilibre. Lorsque la température croît, certains segments de chaînes seulement peuvent commencer à vibrer et à créer une certaine mobilité moléculaire dans leur proche voisinage. Ces mouvements moléculaires se produisent dans un certain domaine de température appelé zone de relaxation secondaire. 2.2.1.2. Domaine d’état caoutchoutique : Ce domaine est caractéristique des polymères amorphes, et son appellation trouve son origine dans la ressemblance du comportement de ce type de polymère avec celui du caoutchouc. Les mouvements de rotation et de translation de segments de chaînes et de chaînes latérales (mouvements micro browniens) sont possibles. La mobilité moléculaire dans ce domaine a une influence sur l’ensemble des propriétés du matériau et en particulier sur certaines caractéristiques mécaniques telles que le module d’élasticité (il est 103 à 104 plus faible que dans l’état vitreux). 2.2.2. Zones de transition : 2.2.2.1. Transition vitreuse : Cette transition correspond à la zone de températures entre le domaine vitreux et le domaine caoutchoutique. Cette zone permet de définir une température caractéristique de la transition dite température de transition vitreuse (Tg). On définit Tg par convention comme la température à laquelle le polymère, après refroidissement, retrouve son équilibre thermodynamique au bout de 1000 secondes [MAR 86]. 8 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Le comportement de la transition vitreuse correspond à un changement de la pente de la variation du volume spécifique en fonction de la température, c'est-à-dire à une discontinuité de sa dérivée première. Ce comportement est attribué à une pseudo transition de second ordre. Cependant, la valeur de Tg dépend de la vitesse de refroidissement du matériau lors du passage de l’état liquide surfondu à l’état solide vitreux, dans lequel le matériau paraît figé à l’échelle des temps d’observation [PER 92]. Le matériau est alors hors équilibre du point de vue thermodynamique [MAR 02]. Ce constat amène à penser que la transition vitreuse ne peut être une simple transition thermodynamique du 2ème ordre, bien qu’elle en présente certaines caractéristiques [PER 92]. 2.2.2.2. Zone d’écoulement : Dans cette zone, les thermoplastiques se trouvent à l’état fondu (liquide pour les polymères semi-cristallins et caoutchoutique pour les amorphes). En raison de l’augmentation de la mobilité moléculaire, les enchevêtrements et les ordres à courtes distances peuvent être supprimés plus facilement et les molécules peuvent glisser les unes par rapport aux autres. Pour les thermoplastiques semi cristallins, la fusion des zones cristallines se produit à des températures telles que les macromolécules des zones amorphes sont déjà totalement caoutchoutiques. Puisque la température de fusion des cristallites dépend de l’épaisseur des lamelles cristallines, qui varient d’un polymère à un autre, la fusion des thermoplastiques semi cristallins s’étale comme pour le processus de transition vitreuse sur un domaine plus au moins large de température. Contrairement à la transition vitreuse, la fusion est caractérisée par une discontinuité des fonctions extensives qui définissent l’état du matériau : le volume spécifique ou l’enthalpie. C’est une transition de premier ordre. Cette transition nous amène à introduire une autre transition de premier ordre qui caractérise le refroidissement du matériau à partir du fondu : la cristallisation. 2.2.2.3. Zone de cristallisation : Au refroidissement, il se produit un processus de germination qui précède la cristallisation à proprement parler. Alors qu’un apport d’énergie supplémentaire est nécessaire à la fusion des cristallites, une chaleur de cristallisation doit être dissipée pendant le refroidissement. La zone de cristallisation, qui se situe toujours à des températures inférieures à celles de la fusion, est fortement influencée par la vitesse de refroidissement. 9 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 3. POLARISATION, PERMITTIVITE ET RELAXATION DIELECTRIQUE : 3.1. Origine moléculaire de la polarisation : Pour mettre en évidence le phénomène de polarisation, il suffit de réaliser une expérience simple sur un condensateur où un matériau diélectrique est placé entre ses deux armatures. La permittivité totale εt d’un diélectrique se manifeste par l’augmentation de la capacité d’un condensateur que l’on constate lorsque l’espace inter-électrode, initialement vide, est rempli d’un isolant condensé. Cette augmentation est liée à l’aptitude du matériau à se polariser dans un champ, à cause des déplacements en sens opposés des charges positives et négatives. εt = C εo Co (I.1) où : C est la capacité du condensateur rempli d’un matériau diélectrique, Co la capacité géométrique (ou capacité du condensateur vide) et εo la permittivité du vide r Du point de vue macroscopique, la polarisation P d’un matériau linéaire et isotrope est reliée r r au champ électrique extérieur appliqué E et au déplacement électrique D , dans le cas de faibles champs appliqués, par les relations suivantes : r r P = ε o χE r r r r D = ε o εE = P + ε o E (I.2) (I.3) où ε est la permittivité relative (ou constante diélectrique) du matériau et χ la susceptibilité diélectrique du matériau (ε = 1 + χ) . Ces équations montrent que le déplacement électrique naît de la contribution du vide ou de la r r contribution géométrique ( ε o E ) et de la contribution de la polarisation du matériau P . Cette polarisation peut provenir de quatre types de mécanismes de polarisation : électronique, ionique (ou atomique), dipolaire et inter-faciale (ou de charge d’espace). -La polarisation électronique : elle est due à la déformation du nuage électronique entourant chaque atome. Cet effet est relativement peu intense et a un temps d’établissement très court (environ 10-15s). -La polarisation ionique ou atomique : elle est due à la distorsion par le champ électrique de l’arrangement atomique d’une molécule. L’inertie des masses mises en jeu augmente le temps de manifestation d’un facteur 103 à 104 par rapport à la polarisation électronique. -La polarisation dipolaire ou d’orientation dipolaire : si les molécules soumises au champ électrique possèdent un moment dipolaire permanent, elles ont tendance à s’orienter suivant le sens de ce champ. Le temps d’établissement est beaucoup plus important que lors du 10 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique phénomène de polarisation précédemment cité et varie entre 10-9 et 105s en raison de la grande diversité des dipôles impliqués et de leurs environnements moléculaires. -La polarisation inter-faciale ou par charge d’espace : elle est due à la présence dans le matériau de porteurs de charges (électronique ou ionique) en excès. Ces charges peuvent être intrinsèques au matériau ou injectées par les électrodes au cours de l’application du champ. Cette polarisation provient de l’accumulation de ces charges aux interfaces entre deux phases qui ont des permittivités et des conductivités différentes. Ce mécanisme induit un moment dipolaire macroscopique dont le temps d’établissement est long (>103s). Avec champ électrique Sans champ électrique E (a) électronique (b) atomique (c) d’orientation (d) de charge d’espace atome A atome B Figure I.2 : Représentation schématique des différents types de polarisation [DUB 98]. Lorsqu’on soumet le matériau à un champ électrique dynamique, les différents types de polarisation apparaissent successivement. Pour les temps courts les entités les plus légères arrivent à suivre le champ. En fonction du temps, les entités les plus lourdes auront le temps de réagir à la présence du champ électrique. Pour des raisons expérimentales, nous allons limiter notre étude aux phénomènes d’orientation dipolaire. Ainsi, nous définissons ε∞ comme la permittivité électrique aux temps courts (ou à fréquence infinie), et εs comme étant la permittivité statique aux temps longs (ou à fréquence nulle). 11 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique De ce fait, les polarisations électronique Pe et ionique Pi seront considérées comme des phénomènes instantanés, contrairement à la polarisation dipolaire Pd : Pd ( t ) = P( t ) − Pe − Pi (I.4) où Pe + Pi = ε o ( ε ∞ − 1 )E (I.5) donc : Pd ( t ) = ε o ( ε ( t ) − ε ∞ )E (I.6) en régime statique, c’est-à-dire aux temps longs : Pds = ε o ( ε s − ε ∞ )E (I.7) 3.2. Comportement dynamique de la polarisation dipolaire : Si un champ électrique E est appliqué sur un système moléculaire, tous les dipôles, pris individuellement, tendent à s’orienter dans la direction du champ, de façon à diminuer l’énergie potentielle du système. Toutefois, les molécules étant en interaction thermique, l’agitation moléculaire tend à s’opposer à l’orientation des dipôles due au champ [COE 93]. Le passage de l’état non polarisé en absence du champ électrique à un état polarisé en équilibre avec le champ n’est pas un phénomène instantané. En effet, un certain retard à l’établissement de la polarisation se manifeste à cause de l’inertie du mouvement des dipôles. Ce phénomène est appelé relaxation diélectrique. 3.2.1. Modèle de Debye : La relaxation dipolaire au sens de Debye [DEB 29] est un processus purement visqueux sans force de rappel élastique et donc du premier ordre. L’équation type d’un tel phénomène est, par exemple, celle qui décrit le mouvement d’une particule de masse non négligeable après l’application d’une force constante dans un milieu visqueux exerçant sur la particule une force de freinage. Par analogie, on peut écrire que la polarisation dipolaire Pd d’un ensemble de dipôles en équilibre thermique obéit à l’équation : dPd ( t ) 1 = ⋅ [ε o ⋅ ( ε s − ε ∞ )E( t ) − Pd ( t )] dt τ (I.8) Ici τ désigne le temps unique de relaxation dipolaire. Imaginons maintenant que les dipôles (ou par analogie les particules) sont dans un champ alternatif de la forme : E * = Eo e iωt (I.9) 12 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique En régime alternatif, toutes les variables, et en particulier la polarisation Pd oscillent sinusoïdalement à la pulsation ω, si bien que l’on peut écrire : P* d = Pdo ⋅ e ( iωt +ϕ ) (I.10) et obtenir directement la solution de l’équation (I.8): P* d ( ω ) = ε o ( ε s − ε ∞ )E * 1 + iωτ (I.11) Sachant que : P* d = ε o ( ε * − ε ∞ ) E * (I.12) il est donc possible de déterminer la constante diélectrique relative complexe : ε*(ω ) = ε∞ + (εs −ε∞ ) 1 + iωτ (I.13) Cette relation est la formule de Debye. Par convention : ε * ( ω ) = ε ′( ω ) − iε ′′( ω ) , donc : εs − ε∞ 2 1 + (ωτ ) (I.14) ( ε s − ε ∞ )ωτ 2 1 + (ωτ ) (I.15) ε ′( ω ) = ε ∞ + et ε ′′( ω ) = Les variations de ces deux paramètres en fonction de la fréquence de sollicitation sont présentées sur la figure suivante : εs ωτ=1 Basses fréquences Hautes ε" fréquences ε' WD ε∝ Basses fréquences log(ω) -π/2 π/2 ωo=1/τ ε∝ Hautes fréquences ε' εs Figure I.3 : Variations des fonctions ε′(ω) et ε″(ω), et diagramme Cole-Cole du modèle de Debye. 13 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Ce modèle à temps de relaxation unique se caractérise par une réponse diélectrique dont la largeur à mi-hauteur du pic ε″ est WD=1,144 décades en échelle logarithmique. La représentation de cette équation dans le plan complexe, appelée diagramme d’Argand ou plus communément diagramme Cole-Cole quand il s’agit du diagramme (ε′, ε″), est un demi ε + ε∞ ε − ε∞ cercle de rayon s et dont le centre est placé sur l’axe des ε′ à l’abscisse s 2 2 (cf. figure I.3). 3.2.2. Autres modèles : A partir de plusieurs études sur les phénomènes de relaxations diélectriques dans les systèmes condensés [JON 83, JON96], il est devenu clair que les fonctions décrivant le comportement dynamique s’éloignent considérablement des prédictions de la loi exponentielle de Debye [DEB 29]. De nombreuses études ont invoqué les distributions des temps de relaxation et celles des énergies d’activation, et parfois seulement des considérations empiriques, pour expliquer la déviation des résultats expérimentaux. On peut citer, entre autres, les équations de Cole-Cole [COL 41], de Cole-Davidson [DAV 51] ou encore l’équation de HavriliakNegami [HAV 66, HAV 67, HAV 97]. 3.2.2.1. Equation de Havriliak-Negami: Havriliak et Negami ont analysé les données de relaxation de nombreux polymères, en particulier le polycarbonate, et ils ont montré les limites des équations existant, en proposant la généralisation suivante [HAV 67] : ε*(ω ) = ε∞ + εs − ε∞ (1 + (iωτ ) ) α β , 0≤α≤1 et 0≤β (I.16) Les expressions de Cole-Cole et de Cole-Davidson sont retrouvées lorsque respectivement β=1 et α =1. L’expression simple de Debye correspond à β =α =1. Dans ce cas, les spectres de relaxation sont plus étalés que ceux prédit par Debye (comme avec l’équation de Cole-Cole) et asymétriques (comme dans le cas de l’équation de ColeDavidson). 14 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Basses fréquences ε" Hautes fréquences -α π/2 α β π/2 ε∝ ε' εs Figure I.4 : Diagramme Cole-Cole de l’équation de Havriliak Negami. Dans le digramme de Cole-Cole (cf. figure I.4), les angles d’intersection avec l’axe des ε′ prennent toutes les valeurs possibles entre 0 et π/2, puisque à basses fréquences l’angle est de (- απ / 2 ), alors qu’elle est de ( αβπ / 2 ) pour les hautes fréquences. 3.2.2.2. Equation de Jonscher : La complexité de la réponse est également décrite par d’autres relations plus ou moins voisines. C’est notamment le cas de la fonction ε″(ω) décrite par Jonscher [JON 83], qui s’apparente à l’équation de Havriliak-Negami ou encore l’équation de Fuoss-Kirkwood [FUO 41] qui ne satisfait que les comportements relaxionnels symétriques. Jonscher suggère une expression pour ε″(ω), qui généralise l’équation de Fuoss-Kirkwood : ε" ( ω ) = ε" max (ωτ ) + (ωτ )1−n −m (I.17) Avec : 0≤m≤1 et 0≤n≤1. Le cas particulier de l’équation de Fuoss-Kirkwood correspond à m=1-n. Selon Jonscher, l’équation de Havriliak-Negami aurait dû être représentée par l’équation suivante : ε*(ω ) = ε∞ + εs −ε∞ (1 + (iωτ ) ) m n −1 m , 0≤n≤1 et 0≤m≤1. (I.18) Dans ce cas les limites hautes et basses fréquences sont parfaitement indépendantes (cf. figure I.5). 15 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Basses fréquences ε" Hautes fréquences -mπ/2 (1-n)π/2 ε∝ εs ε' Figure I.5 : Diagramme Cole-Cole de l’équation de Jonscher-Harviliak-Negami. On peut comparer les formes asymptotiques de la composante ε″ aux basses fréquences (ω<<1/τ) et aux très hautes fréquences (ω>>1/τ) pour les modes de relaxation précédents à l’aide du tableau suivant : Tableau I.1 : Formes asymptotiques de la composante ε″ avec les différentes équations. Equation ω<<1/τ ω>>1/τ 1-Debye ω ω −1 2-Cole-Cole ωα ω−α 3-Cole-Davidson ω ω −β 4-Havriliak-Negami ωα ω − αβ 5-Jonscher ωm ω n−1 Les lignes (4) et (5) du tableau I.1 introduisent deux paramètres ajustables pour représenter les formes asymptotiques de ε″ lorsque ω<<1/τ et ω>>1/τ avec toute la souplesse nécessaire. Dans une analyse générale des pics de pertes, Jonscher a montré, dans un article publié en 1971 [JON 71], que les exposants m et n dans l’équation (I.17) sont parfaitement indépendants l’un de l’autre, et que les formules empiriques de Debye, de Cole-Cole et de Cole-Davidson ne permettent pas de représenter les résultats expérimentaux avec une grande 16 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique précision. Cette étude s’est appuyée sur l’analyse de 100 matériaux dipolaires différents (solides et liquides), en traçant la carte des points (1-n, m) pour tous ces matériaux. m 1 C-D D Comportement Très fréquent 1-n<m<1 C-C 0<m<1-n Comportement rare 1-n 0 1 Figure I.6 : Représentation schématique des équations D (Debye), C-C (Cole-Cole) et de C-D (Cole-Dvidson) dans le plan (1-n, m). L’équation de Havriliak-Negami couvre le domaine complet pour 0≤α≤1 et 0≤β. -0≤β≤1→Comportement très fréquent (PE, PET,….). -1<β→Comportement rare (Acide picrique, Aluminium anodisé,…). Alcoutlabi et Martinez [ALC 98] ont développé un modèle, qui fait appel à la méthode de dérivation et d’intégration fractionnaire [MIL 93], pour prédire le comportement viscoélastique des polymères amorphes. Avec une approche similaire, un modèle analytique sous forme différentielle, en considérant les deux réponses limites : le comportement diélectrique de conservation et celui de dissipation, peut permettre une modélisation du comportement diélectrique complexe des polymères. La prédiction du comportement électrique du matériau dans une gamme de températures et de fréquences très étalée peut être assurée par un circuit électrique, constitué essentiellement d’éléments à phase constante (CPE) avec des propriétés d’autosimilarité [LIU 85]. Selon Niklasson [NIK 93], deux processus fractaux existent dans l’équation de Jonscher. Les deux processus sont couplés dans la région de hautes fréquences et seulement un prédomine aux basses fréquences. 17 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 3.3. Dépendance en température des temps de relaxation : Le diagramme d’Arrhenius permet de visualiser le type de dépendance en température des temps de relaxation à pression constante. Pour cela, il suffit de tracer la variation de τ, dans une échelle semi-logarithmique, en fonction de l’inverse de la température. On observe généralement deux types de comportement : -Comportement de type Arrhenius : C’est une dépendance linéaire dans le diagramme d’Arrhenius régie par l’équation suivante : E τ ( T ) = τ o exp a k BT (I.19) où : Ea est l’énergie d’activation, kB la constante de Boltzmann et τo un facteur préexponnentiel. -Comportement de type VFT : L’équation de Vogel-Fulcher-Tammann (VFT) décrit une dépendance non-linéaire dans le diagramme d’Arrhenius : B τ ( T ) = τ o exp T − To (I.20) B et To sont des constantes. Plusieurs théories moléculaires permettent de prévoir la dépendance en température du temps de relaxation caractérisant les différents mouvements moléculaires. Nous rappelons quelquesunes dans les paragraphes suivants : 3.3.1. Comportement Arrhenius : Les modes de relaxation secondaires, caractérisés par des entités relaxantes de petites dimensions, obéissent généralement à une dépendance τ(1/T) du type Arrhenius [MCC 67]. Ce comportement a été interprété par la théorie des bandes ou celle d’Eyring entre autres. 3.3.1.1. Théorie des bandes : Dans les solides, les forces d’interaction entre une molécule et ses voisines peuvent être représentées par la courbe d’énergie potentielle, ou d’énergie libre, de la position spatiale de la molécule par rapport à ses voisins. En général, la courbe possède des minima qui correspondent à la position d’équilibre de la molécule (cf. figure I.7). L’apport au système d’une fluctuation thermique suffisante permet à la molécule de franchir la barrière de potentiel pour occuper une autre position d’équilibre. 18 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Debye [DEB 29], Fröhlich [FRÖ 58], puis Hoffman [HOF 59] ont montré que le modèle de barrière simple conduit à un seul temps de relaxation microscopique donné par : 1 1 τ(T ) = ⋅ 2 G1 ∆G + exp − Aexp − k BT k BT (I.21) où A est une constante, G1 l’enthalpie libre entre l’état d’équilibre 1 et le maximum par lequel la molécule doit passer pour atteindre l’état d’équilibre 2, et ∆G la barrière d’énergie que doit franchir l’entité relaxante pour passer de l’état 2 à l’état 1. Lorsqu’on considère G1>>∆G et τo=1/(2A), la dernière expression se réduit à : ∆G τ ( T ) = τ o exp k BT (I.22) Cette équation donne une dépendance de type Arrhenius. Energie libre ∆G 2 G1 1 θ1 θ2 Orientation dipolaire Figure I.7. Barrière de potentiel simple à deux positions non équilibrées. 3.3.1.2. Théorie d’Eyring : Dans cette théorie, ou théorie des états activés, Eyring [EYR 36] envisage la rotation des dipôles comme une réaction chimique. Considérant une réaction chimique du type A + B → C, il suppose que la réaction n’a lieu que si A et B passent par un ″complexe actif ″ AB*. Donc A + B → AB* → C. Pour appliquer ce modèle à la rotation des dipôles, il suffit de considérer les coordonnées de la réaction comme une coordonnée angulaire, les produits A+B et C comme deux orientations dipolaires en équilibre et l’état AB* comme l’état dans lequel le dipôle à une énergie suffisante pour franchir la barrière de potentiel. Par le calcul de la fréquence de sauts des dipôles, Eyring obtient : 19 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique τ(T ) = ∆G h exp k BT k BT (I.23) où h est la constante de Planck, ∆G est la différence entre l’enthalpie libre des états activés et non activés qui s’exprime en fonction de ∆H l’enthalpie d’activation, et ∆S l’entropie d’activation par : ∆G = ∆H − T∆S (I.24) Finalement, on peut écrire le temps de relaxation comme suit : τ(T ) = ∆S ∆H h ⋅ exp ⋅ exp − k BT k k T B B (I.25) Si on veut l’écrire sous la forme d’Arrhenius on considère le paramètre τo comme une fonction de la température : τ o(T ) = ∆S h ⋅ exp − k BT k B (I.26) Il est vérifiable, par ailleurs, que l’influence de la partie (h/kBT) dans une échelle semilogarithmique est très faible dans la gamme de températures de notre étude. Néanmoins, cette partie nous évite de résoudre l’énigme de l’équation d’Arrhenius : si T→∞ alors τ→τo=cst ! Cette théorie permet aussi une interprétation physique du facteur pré-exponentiel en terme d’entropie d’activation, grandeur proportionnelle au nombre d’états activés possibles Ω lors de la transition : ∆S = k B ln(Ω) . 3.3.2. Comportement Vogel-Fulcher-Tammann : Ce type de comportement a été observé sur un grand nombre de grandeurs physiques essentiellement dans une gamme de températures supérieures à la température de transition vitreuse (entre Tg et Tg+100°C). Deux concepts sont avérés très utiles pour donner une approche théorique au comportement, ce sont la théorie du volume libre et la théorie d’Adam et Gibbs. 3.3.2.1. Théorie du volume libre : Plusieurs auteurs ont utilisé la théorie du volume libre [WAR 71], et ils s’accordent à considérer le volume libre Vf comme étant la différence entre le volume spécifique V et le volume Vo occupé par la molécule, compte tenu de son agitation thermique : Vf =V-Vo. Cohen et Trunbull [COH 59, TRU 61], ont quant à eux fait l’hypothèse que la fraction du volume libre f=Vf/V est donnée par : 20 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique f=0 pour T<T∞ f = αf (T-T∞) pour T≥T∞ (I.27) où : αf est le coefficient de dilatation thermique. Le temps de relaxation qui varie comme exp (1/f) est donc donné par la relation suivante : 1 τ ( T ) = τ o exp ( ) α T − T ∞ f (I.28) La température T∞ apparaît ainsi comme la température au-dessous de laquelle aucun réarrangement moléculaire ne peut s’effectuer. Cette équation connue sous le nom de Vogel-Fulcher-Tammann [VOG 21, FUL 25, TAM 26] a été introduite d’une manière empirique en 1925 pour exprimer la variation de la viscosité en fonction de la température. 3.3.2.2. Théorie d’Adam et Gibbs : La théorie d’Adam et Gibbs [ADA 65] fut la généralisation d’une première approche introduite par Gibbs et DiMarzio [GIB 58]. Elle est fondée sur la définition de région de réarrangement coopératif (Cooperative Rearranging Region, CRR). Les entités mobiles dans cette région peuvent relaxer seulement si toutes ces entités relaxent simultanément. De plus, les CRR sont considérées sans interaction avec le reste du matériau, mais qui voient leurs tailles augmentées lorsque la température diminue. Il est admis que l’énergie d’activation observée (∆h*) s’écrit : ∆h* = z* ⋅ ∆µ . où: ∆µ est l’énergie d’activation élémentaire et z* le nombre de motifs minimum qui se réarrangent d’une manière coopérative. Ce nombre est dépendant de la température puisque : NA z* ( T ) = * Sc ( T ) sc (I.29) NA : nombre d’Avogadro. et Sc(T) : entropie de configuration macroscopique par mole. sc* : l’entropie de configuration du plus petit CRR. Elle est associée au nombre de configuration accessible Ω* par la relation : sc*=kBlnΩ*. Le temps de relaxation est donc défini, en fonction de l’entropie de configuration, par la relation : N s * ∆µ z * ∆µ = τ o exp A c τ ( T ) = τ o exp k TS ( T ) B c k BT 21 (I.30) Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Pour que la théorie d’Adam et Gibbs soit adaptée aussi à l’état vitreux, Alegria et al. [ALE 95] proposent une dépendance de l’entropie de configuration de la forme : S c (T ) = T fH ∫ T0 ∆C p (T ' ) dT ' T' (I.31) où : ∆Cp définit la différence Cp(liquide)-Cp(verre), T0 est la température à laquelle Sc=0, elle est identique à la température de Kauzmann [ANG 97], et TfH est la température fictive de l’enthalpie H [TOO 46]. On note deux cas particuliers : -A l’équilibre thermodynamique (T>Tg) : T=TfH. - A l’état vitreux (hors équilibre où T<Tg) : T≠TfH. Si on fait l’hypothèse que ∆C p ⋅ T = cst , alors T fH − T0 • T < Tg → S c ( T ) = ∆C p ( Tg )Tg T fH T0 • T > T → S ( T ) = ∆C ( T )T T − T0 g c p g g TT0 (I.32) Ceci conduit naturellement à la fois à l’équation de VFT et l’équation d’Arrhenius. E • T < Tg → τ ( T ) = τ o exp k BT • T > T → τ ( T ) = τ exp B g o T −T 0 (I.33) N A sc ∆µT0T fH * Avec : E = ∆C p ( Tg )Tg ( T fH − T0 ) N A sc ∆µT0 . ∆C p ( Tg )Tg k B * et B = Ceci confirme la possibilité d’appliquer la théorie dans une gamme de température plus large que celle du volume libre. D’autres théories plus ou moins récentes peuvent contribuer à l’extension de la théorie d’Adam et Gibbs par la prise en compte du paramètre ‘pression’ [DIM 76, CAS 01]. Par ailleurs, des études moins récentes peuvent aider à la compréhension de la loi VFT, c’est le cas par exemple du principe d’équivalence temps-température proposé par Williams, Landel et Ferry [WIL 55] qui ne sera pas discuté dans cette partie. 22 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 3.4. Relaxations multiples dans les polymères : Le moment dipolaire net par unité de volume d’un polymère est donné par la somme de tous les types de dipôles dans une unité de répétition, dans la chaîne du polymère et dans toutes les chaînes du système. Comme les mouvements moléculaires dans un polymère dense sont contrôlés par une variété de temps de relaxation, différentes parties du moment dipolaire net peuvent être orientées par différents processus de relaxation. Ainsi, la spectrométrie diélectrique montre un comportement de relaxations multiples sur la signature des pertes diélectriques par exemple. Les mouvements de relaxation peuvent être localisés ou corrélés sur des segments plus ou moins longs du squelette macromoléculaire. L’amplitude des longueurs de chaînes mises en mouvement est une fonction croissante de la température. 3.4.1. Processus primaire : Les mouvements micro browniens des longs segments de chaînes, qui donnent naissance à la transition vitreuse, sont aussi à l’origine du processus de relaxation primaire (α). Dans un polymère amorphe, ou dans les phases amorphes pour un polymère semi cristallin, l’amplitude de cette relaxation est amplifiée. En effet, la coexistence dans les longues chaînes enchevêtrées de liaisons intramoléculaires fortes et de liaisons intermoléculaires plus faibles, implique la possibilité d’existence d’un très grand nombre de degrés de liberté. Le pic de relaxation α observé sur ε″ est plus large que celui prévu par Debye (WD=1,144décades), mais reste en général d’une assez faible largeur et asymétrique. D’autre part, la dépendance en température des temps de relaxation montre généralement une courbure dans le diagramme d’Arrhenius qui est le signe d’un comportement du type VFT. Cependant, Ménégotto [MEN 99] dans une étude mettant en avant la complémentarité des techniques de mesures diélectriques sur le PET amorphe, montre que le passage par Tg induit un changement de la dépendance en température d’un comportement linéaire (du Type Arrhenius) à un comportement non linéaire (de type VFT) 3.4.2. Processus secondaire : Chaque type de polymère possède des phénomènes de relaxation secondaire dans l’état vitreux. Elles sont généralement étiquetées β, γ, δ….dans l’ordre décroissant de température. L’étiquette α étant souvent réservée à la relaxation primaire. Il n’y a généralement pas de lien 23 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique entre l’étiquette d’une relaxation et la nature du phénomène physique mis en jeu lors du passage par la température de transition correspondante. Cependant, on peut affirmer que l’ordre décroissant des températures correspond à des libérations de mouvement d’unités moléculaires de plus en plus petites. Les caractéristiques générales d’une relaxation secondaire (β) étudiée par la spectrométrie diélectrique, par exemple, sont les suivantes : -dans le domaine fréquentiel, le pic sur le facteur de perte (ε″) est de faible amplitude, souvent symétrique et très large (largeur mi-hauteur de 3 à 6 décades [RUN 97]). -la dépendance en température suit un comportement du type Arrhenius avec des valeurs d’énergies d’activation apparentes faibles [JOH 70] La figure I.8 illustre le comportement typique d’une relaxation (α) ainsi qu’une relaxation secondaire (β), pour un thermoplastique semi-rigide et semi cristallin comme le PET ou le PEN. Nous pouvons identifier facilement le comportement linéaire dans le diagramme d’Arrhenius (logτ=ƒ(1/T)) de la relaxation β, et le comportement non-linéaire associé à la relaxation α. Par ailleurs, lorsque la température augmente au dessus de Tg, les deux processus convergeront pour constituer ce qu’on appelle le processus (αβ). La séparation des deux processus individuels devient alors une opération mathématique difficile. Log τ α β 1/Tg 1/T Figure I.8 : Dépendance en température, typique des relaxations primaire (α) et secondaire (β) dans le diagramme d’Arrhenius. 24 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Bien que le phénomène de convergence des modes β et α soit un phénomène largement observé, l’évolution dans cette zone des relaxations reste assez obscure. Généralement, au moins trois types de scénario sont envisagés [GAR 94] : • il y a réunification des modes β et α qui ne forment alors qu’un mode (αβ) (figure I.9.a) • il y a disparition du mode α avant qu’il n’atteigne la trace continue formée par les modes β et (αβ) (figure I.9.b) • il y a disparition du mode β avant qu’il n’atteigne la trace continue formée par les modes α et (αβ) (figure I.9.c) a Log τ α b α β (αβ) β β (αβ) c α (αβ) 1/T Figure I.9 : Trois scénario envisagés pour la zone de convergence des modes α et β. 25 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 4. LE POLY(ETHYLENE NAPHTALENE-2,6-DICARBOXYLATE) (PEN) : 4.1. Présentation : Le PEN appartient à la même famille chimique que le PET, les polyesters aromatiques saturés. Bien que la demande sur le PET soit considérable, des propriétés thermiques et mécaniques plus importantes sont souhaitées pour certaines applications. Alors que les polyimides sont meilleurs sur ces propriétés, leur prix élevé ainsi que les problèmes rencontrés lors de la mise en œuvre restent un obstacle. Le PEN, avec des caractéristiques thermomécaniques particulières, semble pouvoir combler le vide entre les deux premiers matériaux. Par conséquent, il peut à la fois étendre les limites d’utilisation des polyesters et mettre les polyesters attractifs dans de nouvelles applications. Son utilisation industrielle est très récente alors qu’il a été synthétisé pour la première fois en 1948 [COO 48]. Récemment, cet intérêt s’est accentué avec la disponibilité de grandes quantités de monomères de base utilisés dans sa synthèse [CHE 91], et d’autre part avec les possibilités de mise en œuvre et d’élaboration du produit avec la forme souhaitée [KRA 96]. Ainsi, le PEN est utilisé comme support d’enregistrement magnétique grâce à une excellente stabilité dimensionnelle même sous forme de film très mince [YAS 96]. Comme barrière de diffusion, les emballages alimentaires et médicaux ont bénéficié de sa faible perméabilité à l’oxygène entre autres [STE 93, SHE 95]. Dans le domaine du génie électrique, sous la forme de films bi-étirés minces (<1µm) et avec des propriétés diélectriques comparables au PET, il occupe une place importante dans certaines applications [CLE 93, CLE 94, YAS 96]. Il est utilisé, par exemple, comme isolant de classe F (opérationnel jusqu’à 155°C) permettant l’enrubannage des conducteurs dans les moteurs électriques. Ses températures caractéristiques ont permis, en plus, le développement des condensateurs appelés “chips“. Ces condensateurs miniaturisés peuvent être montés en surface par la technologie SMT (Surface Mounted Technologie). Ceci implique la résistance du matériau à une impulsion de soudage de 10 sec à 260°C, ce qui était irréalisable avec les autres polyesters [YEN 92]. La tendance actuelle dans le domaine de l’électronique vers la miniaturisation des systèmes est donc assurée par l’utilisation de ce type de matériau. 26 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 4.2. Procédé de fabrication du PEN : La fabrication du PEN se fait majoritairement par deux procédés utilisés aussi dans le cas du PET. D’autres procédés peuvent exister mais qui n’ont pas, à ce jour, d’utilisation industrielle. 4.2.1. Procédé direct : la polycondensation Vesley et Zamorskey [VES 63] ont montré que la condensation de l’acide naphtalène-2,6dicarboxylique et de l’éthylène glycol donne le PEN après élimination, par chauffage, de l’eau créée pendant la réaction (cf. figure I.10). COOH n HOOC + (1+n) HO(CH2)2OH Polycondensation H COO(CH2)2O HO (CH2)2O OC + 2nH2O n Figure I.10 : Réaction de polycondensation directe. Il est à noter que l’acide naphtalène dicarboxylique présente de nombreux isomères, comme l’isomère 1,4- ; 1,5- ; 2,7- ou encore 2,6-. Tous ces acides peuvent être utilisés pour réaliser le PEN par polycondensation. Cependant il faut souligner que l’isomère 2,6-, le plus symétrique, permet d’obtenir un PEN caractérisé par les températures de transition vitreuse et de fusion les plus élevées [YAS 96]. 4.2.2. Procédé indirect : la polyestérification Dans des travaux récents, Buchner [BUC 89] et Chen [CHE 91] réalisent cette synthèse. La transestérification à chaud, en présence de l’acétate du manganèse comme catalyseur, du naphtalène-2,6-dicarboxylate diméthyle ester avec l’éthylène glycol donne le diéthylène glycol naphtalène-2,6-dicarboxylate. Ensuite, un chauffage à 280°C sous vide de ce composé avec l’éthylène glycol donne par condensation le PEN. Le catalyseur utilisé dans ce cas est le trioxyde d’antimoine (cf. figure I.11). C’est ce procédé qui est utilisé pour la réalisation des films de PEN [KRA 96]. 27 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique COOCH 3 H 3 C OOC + 2HO(CH 2) 2OH N2 220°C-280°C Transestérification Mn(OAc) ou Zn(OAc) COO(CH 2 ) 2 OH HO (CH 2) 2OOC + 2CH 3OH COO(CH 2 ) 2 OH n HO (CH 2) 2OOC vide 280°C Polycondensation Sb 2 O 3 H COO(CH 2 ) 2 O HO (CH 2 ) 2 O OC n Figure I.11 : Procédé indirect. 28 + (n-1) HO(CH 2) 2OH Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 4.3. Particularités du PEN : Il est très utile de comparer la formule développée du PEN et celle du PET (cf. figure I.12). O O O O O . O . . . O O n n PET PEN Figure I.12 : Formule développée du PEN et du PET. Le PEN est caractérisé par une partie aromatique plus importante que le PET qui représente une proportion de l’unité monomère plus grande et lui confère les vertus d’aromaticité avec un impact accru (propriétés thermiques entre autres) [KRA 96]. Ce type de groupement naphtalénique est de nature à rigidifier les chaînes et justifier une température de transition vitreuse voisine de 125°C, ainsi qu’une température de fusion de l’ordre de 267°C. 4.4. Caractéristiques morphologiques et conformationnelles : L’application du PEN dans les systèmes électriques repose sur l’utilisation des films minces qui favorisent la fabrication d’un condensateur, ceci explique sa morphologie semi-cristalline et bi-orientée. La nature semi-rigide de la chaîne du PEN lui permet, comme le PET, de cristalliser sous l’influence d’une contrainte mécanique, thermique ou par l’effet combiné des deux contraintes [CAK 90]. La structure du PEN semi-cristallin peut être définie à différentes échelles d’organisation. ¾ Echelle des molécules de l’ordre de quelques Angströms qui caractérise la conformation de la chaîne et l’empilement des chaînes voisines. ¾ Echelle des lamelles de l’ordre de la centaine d’Angströms. ¾ Echelle des sphérolites de l’ordre de quelques microns ou plus. 29 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 4.4.1. Mailles cristallines du PEN: Sous l’influence de la température, le PEN peut cristalliser dans deux types de réseaux : les formes α et β. La cristallisation du matériau à partir de l’état vitreux ou à partir de l’état fondu à des températures inférieures à 200°C (cf. figure I.13 mode 1-2-3) conduit à une maille de réseau triclinique nommé α (cf. Tableau I.1), où une seule chaîne passe dans la cellule. Cette unité a été découverte pour la première fois par Mencik [MEN 67]. Buchner et al. [BUC 89], dans une étude sur la cinétique de cristallisation et de fusion du PEN, ont fait référence à une deuxième forme, la forme β, à travers une cellule triclinique à quatre chaînes (cf. tableau I.1). Ils ont indiqué que la forme β est obtenue lorsque la température du recuit de cristallisation (Tr) est au-dessus de 200°C avec un échantillon fondu à 280°C (cf. Figure I.13 mode 5). Dans la mesure où la cristallisation est effectuée à haute température (Tr>200°C), la forme du cristal dépend fortement de l’histoire thermique de l’échantillon. En effet, si le matériau est fondu à des températures supérieures à 320°C (mode 4), au lieu de 280°C pour donner la forme β, c’est la forme α qui est obtenue avec des températures de recuit équivalentes [BUC 89], ceci a été lié à la disparition totale des fragments cristallins à 320°C [KRA 96]. PEN État fondu (T>267°C) PEN amorphe État vitreux Tg~125°C 200°C 280°C 320°C 1 2 Forme α 3 4 Forme β 5 Figure I.13 : Mode de cristallisation sous l’influence d’une contrainte thermique. Zachmann [ZAC 85], en observant la forme cristalline β, montre qu’elle est thermodynamiquement plus stable avec un processus de nucléation plus difficile. Vu son caractère, l’existence de la forme β dans un matériau semi cristallin implique la présence inévitable de la 30 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique forme α [BUC 89], alors que la transition entre les deux formes à l’état solide semble impossible. D’autre part, Krause [KRA 96] conclu, suite à une étude réalisée sur des films industriels semi-cristallins et bi-orientés, que les phases cristallines de forme β se logent préférentiellement à la surface des films alors que la forme α réside majoritairement en volume. Bien que, à notre connaissance, des paramètres de la forme α semblables sont repris à travers le peu de modèles proposés dans la littérature, des études récentes proposent un autre réseau pour la forme β, monoclinique cette fois-ci. Liu et al. [LIU 98] proposent un modèle basé sur des mesures de diffraction d’électrons avec un réseau monoclinique à quatre chaînes. Par ailleurs, Van den Heuvel et Klop [VAN 00] trouvent un réseau monoclinique légèrement différent avec une densité élevée. Tableau I.1 : Données cristallographiques du PEN. Forme du cristal Forme α Forme β Système cristallin Triclinique Triclinique Monoclinique Monoclinique a (nm) 0,651 0,926 1,304 0,949 b (nm) 0,575 1,559 0,926 1,331 c (nm) 1,320 1,273 1,300 1,261 α (°) 81,33 121,6 131,47 90,00 β (°) 144,00 95,57 90,00 135,00 γ (°) 100,00 122,52 90,00 90,00 1,407 1,439 1,368 1,425 Nombre d’unités de répétition 1 1 1 1 Nombre de chaînes 1 4 4 4 [MEN 67] [BUC 89] [LIU 98] [VAN 00] Paramètres de la cellule α c β γ a b Densité ρc(g/cm3) Références Des effets similaires de la contrainte thermique sur la morphologie ont été trouvés sous l’action de l’orientation des films à des températures supérieurs à Tg ou le bobinage de fibres de PEN. Cakmak et Kim [CAK 97] montrent que les fibres PEN restent amorphes à des vitesses de bobinage faibles alors qu’ils s’orientent en créant des phases cristallines à des vitesses élevées. De plus, pour des vitesses supérieures, le pourcentage de la phase β relative à 31 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique la phase α augmente. Ils attribuent cet effet à l’augmentation de la température au sein des fibres occasionnée par l’accroissement de la vitesse de bobinage. Par ailleurs, le bi-étirage des films dans la région caoutchoutique (Tg+ 20…30°C) conduit à la formation de la phase cristalline α, ceci est accompagné par un parallélisme des noyaux naphtalènes par rapport à la surface des films dans les zones orientées [CAK 95]. Conformations des chaînes : La création d’ordre à grande distance implique dans un premier temps le développement d’un réseau cristallin unitaire. Celui-ci ne peut avoir lieu sans une orientation spatiale des chaînes particulières, d’où l’intérêt de définir les différentes conformations caractéristiques de chaque réseau. Dans un tel réseau, il est évident que la partie souple de la chaîne du PEN ou partie aliphatique adoptent une conformation exclusivement trans [TON 02]. Cela signifie que les liaisons: –O–CH2–, –CH2–CH2– et –CH2–O– sont dans une conformation trans-trans-trans. Une comparaison avec le PET fait apparaître une particularité du PEN, qui résulte de la présence d’un cycle aromatique supplémentaire, à savoir l’absence d’un axe de rotation libre des noyaux aromatiques à travers les liaisons Caliph–Carom. De ce fait, le PEN est plus riche en arrangements spatiaux des groupements esters avec les noyaux aromatiques (cf. figure I.14). PEN Trans α PEN Trans β PEN cis PET Trans PET cis Figure I.14 : Conformations des noyaux aromatiques dans le PEN et le PET 32 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique La figure I.14 montre clairement que le PEN peut adopter deux conformations trans : trans α et trans β. Les noms de ces conformations trouvent leurs origines lorsqu’elles sont associées à une des deux unités cristallines : le cristal de forme α et le cristal de forme β. Cette constatation peut expliquer l’unicité de réseau cristallin dans le PET [VAN 00]. De plus, dans une conformation trans β, le noyau naphtalène subit une rotation de 180°C par rapport à la conformation trans α. Ceci se traduit par des unités caractéristiques plus courtes dans une conformation trans β, et donc par une morphologie plus compacte de la chaîne. Dans ce cas les chaînes ne sont pas complètement dépliées. 4.4.2. Arrangement lamellaire : Les lamelles ont une épaisseur de l’ordre d’une dizaine d’Angströms, ce qui est largement inférieure à la longueur d’une macromolécule (103 à 105Å) [WUN 73]. Cette observation conduit à la conclusion suivante : une même chaîne macromoléculaire apparaît dans plusieurs domaines cristallins et amorphes. Le tableau I.2 résume les valeurs des paramètres morphologiques obtenus, à partir des mesures de diffraction des rayons X, sur un PEN recuit depuis l’état solide et amorphe jusqu'aux températures du recuit de cristallisation. Tableau I.2 : Variation de la distance inter–lamellaire (L), de l’épaisseur des lamelles cristallines (lc) et de la cristallinité linéaire à l’intérieur de la structure lamellaire (χc=lc/L) en fonction de la température (Tr) et la durée de recuit (tr) [RUE 94]. Tr(°C) tr (mn) L (nm) lc (nm) χc 155 180 - - 0,21 165 120 13,7 3,3 0,24 180 45 14,9 3,8 0,25 200 30 16,4 4,5 0,28 220 30 18,7 5,2 0,28 33 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique 4.4.3. Unités morphologiques (sphérolites) : Baltá-Calleja et al. [BEL 98] ont analysé par microscopie électronique les premières étapes de cristallisation du PEN à des températures supérieures à Tg (entre 145 et 220°C). Cette étude révèle qu’un recuit à des températures relativement faibles (∼165°C), pour de courtes durées (<40mn), induit une séparation de phase au sein du matériau entre phases cristallisables et phases non cristallisables. L’augmentation de la durée de recuit provoque une séparation supplémentaire à l’intérieur des phases cristallisables par la formation des lamelles cristallines et des phases amorphes. Par la suite, le nombre et la taille des lamelles cristallines se développent avec la température et la durée de recuit. Comme nous l’avons déjà dit au début de ce chapitre, les lamelles cristallines forment sur une autre échelle des unités morphologiques, qui sont pour la plupart des cas des sphérolites [ZAC 93]. Cependant, Lee et al. [LEE 98] montrent que le PEN peut cristalliser suivant deux régimes : I et II. Le régime II correspond au développement d’une morphologie sphérolitique classique. En revanche, le régime I est obtenu uniquement lorsque le matériau est cristallisé à une température élevée à partir du fondu (Tr≥250°C), l’unité morphologique dans ce cas est de forme elliptique appelée souvent “structure hedritique”. Dans sa complexité, cette structure présente un intermédiaire entre un cristal simple et un sphérolite [GEI 63]. La structure hédritique montre un comportement optique anisotropique, ce qui indique que les axes des cristaux sont orientés selon la même direction préférentielle [LEE 98]. Lorsque la température du recuit de cristallisation est supérieure à 250°C, le nombre d’hédrites augmente considérablement. En plus, on montre que certaines structures sont composées d’un mélange de formes, certains segments ont une forme sphérolitique alors que d’autres sont similaires aux hédrites elliptiques [LEE 98]. Cette constatation suggère que deux formes cristallines peuvent exister dans la même structure. Cette hypothèse est d’autant plus justifiée lorsqu’on sait que la forme cristalline β est dominante dans cette gamme de recuit [VAS 99]. 4.4.4. Développement des unités morphologiques : Zachmann et Wurtz [ZAC 93] ont montré que la cristallisation isotherme du PEN passe par deux étapes clés : la cristallisation primaire et la cristallisation secondaire (cf. figure I.15). 34 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Au cours de la première étape la taille des entités morphologiques augmente considérablement ainsi que la cristallinité du matériau. Le régime de développement de ces entités dépend essentiellement des conditions d’obtention de celles-ci. Une fois le volume du matériau rempli de ces entités, la cristallisation secondaire débute avec trois mécanismes possibles : ¾ création de nouvelles lamelles à l’intérieur des paquets lamellaires, qui constituent une organisation dans l’espace de lamelles et de régions amorphes (cf. figure I.15.a), ¾ les lamelles deviennent plus épaisses au moment où les régions amorphes sont plus fines (cf. figure I.15.b), ¾ de nouveaux paquets lamellaires se créent entre ceux déjà créés au cours du premier processus de cristallisation (cf. figure I.15.c). Cristallisation primaire Cristallisation secondaire Formation de nouvelles lamelles Epaississement lamellaire a Formation de nouveaux paquets lamellaires c b Figure I.15 : Représentation schématique des changements structuraux durant la cristallisation du PEN [ZAC 93]. 35 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Selon Zachmann la cristallisation à partir du fondu à 252°C induit la création, en plus des sphérolites, des particules de forme elliptique (hédrites). L’auteur a conclut par ailleurs que c’est le premier mécanisme de cristallisation secondaire qui est prépondérant (figure I.15.a). D’autre part, la cristallisation froide à 172°C, à partir d’un état amorphe vitreux, conduit à l’augmentation de la cristallinité au sein des paquets lamellaires par une combinaison des deux premiers mécanismes de cristallisation secondaire, à savoir, la création de nouvelles lamelles et l’épaississement lamellaire (figure I.15.b). Récemment, Denchev et al. [DEN 00] dans une investigation qui avait pour but l’étude de l’origine de la fusion multiple dans le PEN, montrent que le mécanisme de l’épaississement lamellaire est dominant à partir d’une certaine température seuil estimé à 210°C lorsque le matériau est cristallisé à partir de l’état vitreux. Ceci se traduit par une distribution étroite de la taille des lamelles. 5. CONCLUSION : Ce chapitre nous a permis de réaliser un état de connaissance sur les polymères en général, et le PEN en particulier. La première partie de cette étude bibliographique a montré les différentes structures moléculaires d’un polymère, ainsi que les domaines d’état et de transition possibles. Dans un second temps, nous avons traité les phénomènes de polarisation et de relaxation diélectrique ainsi que les modèles décrivant les spectres expérimentaux. Nous avons aussi rappelé les différentes lois de comportement associées aux modes de relaxation secondaire et primaire dans les polymères. Cette étude bibliographique met en évidence le fait que les polymères semi cristallins sont des milieux hétérogènes et que la compréhension du comportement dynamique doit passer par une identification du rôle de chaque phase (amorphe et cristalline), et des mécanismes de mobilité associés à chacune d’elles. Parmi les polymères semi cristallins, le PEN peut être considéré comme un système modèle pour une étude fondamentale. Notre choix s’est porté sur ce matériau pour des raisons diverses. Outre son intérêt dans le domaine de développement d’un nouveau matériau pour le génie électrique, il peut être obtenu à l’état totalement amorphe, et après un traitement thermique adapté, il offre un taux de cristallinité et une morphologie variables. 36 Chapitre I Généralités et Synthèse Bibliographique Dans la suite de ce travail, nous allons développer particulièrement les points suivants : ¾ relever avec précision les changements morphologiques et conformationnels au sein du PEN suite à un cycle de cristallisation froide, ¾ analyser les différentes transitions et relaxations lors d’une rampe en température du PEN amorphe et semi cristallin, ainsi que l’origine moléculaire de chacune d’elles, ¾ corréler les différents paramètres morphologiques de la microstructure du PEN avec le comportement diélectrique et viscoélastique du PEN avant, après et au voisinage de la transition vitreuse. 37 CHAPITRE II TECHNIQUES EXPERIMENTALES ET MATERIAU Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau CHAPITRE II : TECHNIQUES EXPERIMENTALES ET MATERIAU 1. INTRODUCTION : Dans cette étude nous avons utilisé plusieurs techniques expérimentales visant à caractériser les matériaux tant du point de vue électrique que physico-chimique. Nous estimons important de rappeler le principe de chacune d’elles ainsi que le protocole d’analyse pris en compte. 2. CARACTERISATION DE LA MOBILITE MOLECULAIRE : Depuis le début du XXème siècle, des efforts considérables ont été effectués pour mettre au point des techniques de caractérisation de toutes sortes de mobilité au sein des matériaux polymères en général et des diélectriques en particulier. En effet, les variations des propriétés électriques des polymères sont la réponse, à l’échelle macroscopique, des mouvements intervenant à l’échelle moléculaire, impliquant toute ou une partie de la molécule. Dans l’étude d’un matériau isolant une analyse des propriétés diélectriques, en particulier celle de la mobilité moléculaire induite par les phénomènes de relaxation, peut s’avérer un instrument intéressant pour apprécier l’état du matériau et quantifier son évolution sous l’influence de contraintes électriques et/ou d’un vieillissement. Pour caractériser les phénomènes de relaxations diélectriques une technique électrique d’investigation s’impose : l’analyse diélectrique dynamique (ADD). D’une manière complémentaire, l’analyse mécanique dynamique (AMD) fournit des informations intéressantes à la compréhension des phénomènes de relaxation dans les polymères. 2.1. Analyse Diélectrique Dynamique (ADD) : La ADD est un outil idéal pour la mesure de la dynamique des molécules et le transport de charges électriques dans les polymères. En effet, dans sa forme moderne la technique couvre une gamme de fréquence très étalée, entre 10-6 et 1012 Hz [RUN 97]. Pour couvrir cette gamme de mesure différents types de mesure doivent être combinés (cf. figure II.1). 39 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau 100Hz 10-4Hz 104Hz 108Hz 1012Hz Spectromètre dans le domaine temporel Analyseur de la réponse fréquentielle Ponts d’impédance Réflectomètres Circuits résonants Cavités et guides d’onde Figure II.1 : Résumé des techniques de mesure diélectrique. Nous allons nous intéresser par la suite uniquement à la mesure basée sur l’analyse de la réponse fréquentielle. 2.1.1. Principe : Dans une mesure par ADD le stimulus est une contrainte électrique périodique de très faible amplitude. Du fait de cette très faible amplitude la technique en question peut être assimilée à une véritable sonde de mobilité moléculaire. Un échantillon soumis à une tension alternative sinusoïdale u(t) de pulsation ω induit un courant i(t). Etant donné que le matériau est un diélectrique réel un déphasage (θ≠π/2) entre ces deux grandeurs est enregistré (cf. figure II.2). Le courant mesuré est alors séparé en une composante capacitive et une composante conductive. La tension, le courant et l’admittance (ou impédance) du matériau sont des grandeurs complexes qui peuvent être écrites sous la forme suivante : U * = U ⋅ e iωt u( t ) = U sin( ωt ) = Im( U * ) où i( t ) = I sin( ωt + θ ) = Im( I * ) et Y * = I * = I ⋅ e i( ωt +θ ) où 1 I* = Z* U* (II.1) (II.2) (II.3) La figure II.2 présente la réponse temporelle des fonctions u(t) et i(t) déphasées d’un angle θ. D’une manière complémentaire, nous avons illustré sur la figure II.3 la configuration des vecteurs courant–tension dans le plan complexe. 40 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau u(t) i(t) δ I* θ t I* C Y* δ C R θ I*R Figure II.2 : Réponse temporelle du U* Figure II.3 : Présentation dans le plan diélectrique. complexe de U* et I* . L’écart du comportement diélectrique du matériau vis à vis d’un comportement purement capacitif est quantifié par l’angle δ = π / 2 − θ . L’amplitude du courant ainsi que la valeur de cet angle permet de déterminer la capacité et la résistance équivalente du diélectrique dans un ( modèle RC parallèle (cf. figure II.3), puisque : R = Y * ⋅ sin(δ) ) −1 et C = (ω) ⋅ Y * ⋅ cos(δ) . −1 L’angle δ est souvent appelé angle de perte diélectrique. La détermination de l’admittance Y*est fondamentale. En effet, cette grandeur qui permet de préciser la capacité complexe C*, ou la permittivité complexe du matériau ε*, contient l’information sur la réponse diélectrique du matériau. C’est une grandeur qui ne dépend que de la géométrie (épaisseur e et surface S) et des propriétés diélectriques intrinsèques de l’échantillon. C * = (iω ) ⋅ Y * −1 d’où : ε * ( ω ) = C* Y* = , C o iω C o avec Co = (II.4) εoS e Le facteur de perte tan(δ) est donné par la relation : tan( δ ) = (II.5) ε" ε' (II.6) Le rôle de la ADD est de déterminer l’admittance ou l’impédance complexe du matériau dans un domaine de température et de fréquence le plus vaste. Dans notre cas, le dispositif de mesure utilisé est un analyseur de réponse fréquentielle du type DEA 2970 commercialisé par TA instruments. 41 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau Une représentation schématique de la technique de l’analyse de réponse fréquentielle est montrée sur la figure II.4. Échantillon I* Générateur Z* Rm U*1 Analyseur du vecteur tension U*2 Figure II.4 : Schéma du principe de fonctionnement d’un analyseur de réponse fréquentielle. Une tension alternative U* est appliquée à l’échantillon par le générateur de fréquence. Le courant I* traversant l’échantillon est converti en une tension par une résistance de mesure. Deux voltamètres vectoriels permettent en suite de mesurer les tensions complexes U*1 et U*2. L’impédance complexe de l’échantillon peut être calculée à partir des données de la mesure : U *1 Z * = Rm ⋅ * − 1 U 2 (II.7) 2.1.2. Protocole : Pour obtenir une surface caractéristique reproductible et garantir un meilleur contact avec les électrodes une métallisation à base d’or a été réalisée sur chacune des deux faces des échantillons. La métallisation circulaire de 20 mm de diamètre et de 30 nm d’épaisseur a été obtenue par dépôt plasma (sputtering). L’analyseur diélectrique DEA 2970 nous a permis de solliciter les échantillons de PEN avec une tension d’amplitude de l’ordre d’un volt. Sous une atmosphère inerte (azote) et à la pression atmosphérique, les mesures ont été effectuées pour douze fréquences (1, 2, 4.5, 10, 20, 45, 100, 200, 450, 103, 104 et 105 Hz) sous l’action d’une rampe en température avec une vitesse de 2°C/mn. La température d’étude est située dans une gamme comprise entre –100°C et 200°C. 42 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau La mesure est établie dans des conditions non isothermes. En effet, une rampe combinée température-fréquence permet de faciliter l’étude des phénomènes dynamiques tels que la cristallisation froide par exemple. 2.2. Analyse Mécanique Dynamique (AMD) : 2.2.1. Principe : Les échantillons sont soumis à une contrainte sinusoïdale (σ*) aussi de très faible amplitude. La déformation résultante (ε*) est également sinusoïdale mais présente un déphasage (δ) avec la contrainte. Le déphasage δ entre contrainte et déformation caractérise précisément l’importance du caractère visqueux du matériau. Sa valeur est comprise entre 0 et π/2 : pour un matériau purement élastique δ=0, et δ=π/2 lorsque le matériau est purement visqueux. En admettant que la loi de Hooke s’applique aux matériaux viscoélastiques, nous pouvons écrire : ε * = E* ⋅σ * (II.8) Avec : E* module d’élasticité complexe. Par convention : E * = E ′ + iE ′′ . Le module de conservation E ′ caractérise la fraction d’énergie accumulée sous forme élastique et par conséquent restituable. En revanche, le module de perte E ′′ caractérise l’énergie dissipée par frottements internes dus à la composante visqueuse du matériau. L’apparition d’une mobilité moléculaire dans le matériau (dépendant de la fréquence de sollicitation et de la température) se manifeste par un phénomène d’absorption qualifié de relaxation mécanique. Le stockage d’énergie s’accompagne d’une augmentation du déphasage entre contrainte et déformation, ceci se traduit par la présence d’un maximum sur la signature en fonction de la température du facteur d’amortissement tanδ= E ′′ / E ′ . 2.2.2. Protocole : L’analyseur mécanique DMA 2980 commercialisé par TA Instruments nous a permis de solliciter des échantillons de PEN avec une forme parallélépipédique (dimensions approximatives de 21mm x 6mm x 70µm). Les mesures ont été effectuées dans des conditions non-isothermes, pour cinq fréquences (5, 10, 15, 20 et 25 Hz), entre –120 et 240°C. Cette gamme de température a été balayée à la vitesse de 2°C/mn sous atmosphère inerte. 43 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau La caractérisation physico-chimique du matériau permet d’apprécier les changements de la microstructure du PEN avec les différents paramètres morphologiques mis en jeu. 2.3. Analyse Enthalpique Différentielle (AED): L’AED permet de déterminer et de quantifier les processus endothermiques, exothermiques ou athermiques accompagnant une transition physique au sein d’un polymère. 2.3.1. Principe : Le principe de la technique consiste à mesurer la variation de flux de chaleur lorsque le matériau est soumis à une variation de température avec le temps. Lors de cette analyse, le thermogramme enregistré correspond à la variation de dH/dt, c’est à dire à celle de la chaleur spécifique à pression constante Cp, avec la température. La figure II.5 montre le schéma de principe de cette technique. Le système est constitué de deux boucles de contrôle de chauffe. La boucle intégrale permet d’assurer une montée linéaire de la température de la référence TR et de l’échantillon TE en fonction du temps. La boucle différentielle permet d’ajuster la puissance de chauffe de l’échantillon de telle sorte qu’à chaque instant la température TE soit égale à la température TR, en compensant les effets endothermiques, exothermiques ou athermiques mis en jeu lors des transitions de phase. Dans les conditions normales d’utilisation (pression P=1atm), la compensation de la puissance calorifique dH/dt est mesurée en fonction de la température. Capteur de température Echantillon référence E R TE QE TR QR Elément chauffant Boucle différentielle Boucle intégrale Figure II.5. Schéma de principe de l’analyse enthalpique différentielle. 44 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau 2.3.2. Protocole : L’appareil utilisé dans notre étude est un analyseur ″TA Instruments DSC 2010 CE″. La gamme de températures étudiée s’étale de 30 à 300°C balayée à la vitesse de 10°C/mn sous atmosphère inerte (azote). Au départ, la cellule est calibrée avec de l’indium pur. Avant de les placer dans la cellule, les échantillons de PEN, avec une masse comprise entre 10 et 20mg, sont sertis dans des capsules en aluminium. 2.4. Spectroscopie InfraRouge à Transformée de Fourier (IRTF): Les atomes formant les molécules sont reliés entre eux par des liaisons chimiques. Celles-ci peuvent être étirées, fléchies, subir une torsion axiale ou encore vibrer latéralement. Tous ces déplacements satisfont l’approximation qui consiste à considérer la molécule comme un ensemble d’oscillateurs harmoniques. Les oscillateurs peuvent être mis en résonance par une perturbation de leur état d’équilibre. La spectrométrie infrarouge est une technique qui permet d’étudier et de caractériser ce type de vibrations. 2.4.1. Principe Le matériau est soumis à un rayonnement électromagnétique dont la longueur d’onde excitatrice appartient au domaine infrarouge (λ entre 2,5µm et 15µm). Lorsque la fréquence du champ électromagnétique associé au rayonnement est égale à la fréquence d’un des modes de vibration d’une molécule du matériau, il y a absorption de l’énergie : la molécule entre en vibration. Elle passe d’un niveau d’énergie stable à un autre. Les règles de sélection de la spectroscopie infrarouge font qu’il doit y avoir un changement dans le moment dipolaire de la molécule pour que la vibration soit active en infrarouge. Si la molécule possède un centre de symétrie, seules les vibrations antisymétriques par rapport à ce centre seront actives. L’analyse spectrale du faisceau transmis permet d’observer les bandes d’absorption correspondant à une vibration ou à une combinaison de vibrations pour une longueur d’onde donnée. Chaque type de groupement vibre dans des domaines de longueur d’onde (ou de ν cm −1 = 10 4 ⋅ λ−1 ) bien définis, selon le mode de vibration. nombre d’onde ~ [ ] 45 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau Pour désigner les vibrations localisées on utilise les symboles suivants : ν : étirement d’élongation (ou « stretching »). δ : cisaillement (ou « scissoring »). γr : balancement (ou « rocking »). γw : rotation (ou « wagging »). τ : torsion (ou « twisting »). Une autre classification distingue les vibrations symétriques et antisymétriques par les indices s et as successivement. Sur la figure II.6 nous disposons d’une illustration de certains modes de vibration ainsi que des déplacements atomiques associés. Symétrique Antisymétrique (a) Vibrations d’étirement Balancement (dans le plan) Rotation (hors du plan) Cisaillement (dans le plan) Torsion (hors du plan) (b) Vibrations de déformation Figure II.6: Types de vibrations [SKO 92]: + Mouvement dans la direction du lecteur vers l’avant – Mouvement dans la direction du lecteur vers l’arrière. 46 Chapitre II Techniques Expérimentales et Matériau 2.4.2. Protocole : Les spectres IRTF des échantillons, préalablement traités thermiquement, sont enregistrés sur un spectromètre du type Perkin-Elemer 1760X. L’enregistrement a été effectué dans la région spectrale située entre 400 et 4000 cm-1, avec une résolution de 2 cm-1, en moyennant les résultats de 25 spectres. Le temps nécessaire pour l’enregistrement est de l’ordre de 3,6 minutes. La quantification des aires des pics a été effectuée par un ajustement numérique sous Origin 6.0. Dans ce calcul, nous supposons que les bandes sont définies par une distribution Gaussienne à partir de la ligne de base. 3. MATERIAU DE L’ETUDE : Les films de PEN amorphe de référence utilisés dans ce travail ont été fournis par Dupont de Nemours (Luxembourg). L’épaisseur des films est de 45µm, et ils proviennent d’un lot de plusieurs feuilles de format A4 (27,9 × 21cm2). Pour les études physico-chimiques et l’analyse par analyse diélectrique dynamique c’est ce type de films que nous avons utilisé. En revanche, un deuxième lot d’échantillons, fournis par le même fabriquant à un an d’intervalle, a été utilisé pour l’analyse par analyse mécanique dynamique. Ces films ont la particularité d’être plus épais (70µm) ce qui a pour avantage de faciliter et améliorer la mesure mécanique. 47 CHAPITRE III ETUDE DES CHANGEMENTS MORPHOLOGIQUES ET CONFORMATIONNELS DU PEN Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN CHAPITRE III : ETUDE DES CHANGEMENTS MORPHOLOGIQUES ET CONFORMATIONNELS DU PEN 1. INTRODUCTION : L’étude de la cristallisation des polymères a été d’un grand intérêt durant les dernières décennies et reste encore le sujet de plusieurs recherches [VER 96, DIL 99, GRE 99, NOG 01]. La cristallisation, comme d’autres transformations de phase, obéit à des lois thermodynamiques qui définissent les conditions et le moment à partir duquel les états cristallins peuvent exister ou non. En effet, la stabilisation de la structure cristalline finale est déterminée en partie par la cinétique de cristallisation. On peut donc comprendre que les propriétés physiques, et notamment les propriétés diélectriques, du matériau soient subordonnées au processus de mise en œuvre ainsi que par le protocole de cristallisation du matériau. Plusieurs paramètres peuvent influencer le résultat final, en particulier la température de cristallisation, la durée de cristallisation et/ou la vitesse de refroidissement ou de chauffe. De plus, la cristallisation peut être obtenue dans des conditions isothermes ou non-isothermes. Dans ce travail, nous avons étudié la formation d’une superstructure durant la cristallisation froide isotherme à partir de l’état solide et amorphe du PEN. Les outils de caractérisation que nous avons choisi sont : l’analyse enthalpique différentielle (AED) et la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (IRTF). Dans un premier temps, nous avons identifié et discuté la cinétique de cristallisation in situ par une analyse AED. Nous avons étudié, ensuite, l’apparition et la quantification des changements de phase du PEN avant et après la cristallisation isotherme, partielle et totale. Enfin, les changements de conformation des chaînes du polymère, après une cristallisation froide, ont été observés grâce à une analyse infrarouge effectuée à la température ambiante. 49 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 2. ETUDE DU PEN PAR ANALYSE ENTHALPIQUE DIFFERENTIELLE : 2.1. Températures caractéristiques du PEN de référence : L’analyse enthalpique différentielle permet de connaître l’évolution de la morphologie d’un matériau avec la température en mettant en évidence les différentes transitions de phase au sein du matériau dans une gamme de températures située entre l’état vitreux et l’état fondu. Sur le thermogramme de la figure III.1, l’échantillon de référence, sans traitement préalable, montre un saut endothermique de chaleur spécifique ∆Cp=0,32 J.g-1.K-1 autour de 125°C qui caractérise la transition vitreuse (Tg) du matériau. Lorsque la température continue de croître le matériau cristallise en dynamique à Tcd=197°C, finalement la fusion du matériau s’est manifestée par un pic étroit autour de Tf=267°C. -1 -1 2 (J.g .K ) T cd Tg ∆ Cp 25 50 75 100 ∆ Hc 125 150 ∆ Hf endo -1 -1 0.25 (J.g .K ) T(°C) Tf ∆ Cp 0 50 100 150 200 250 300 T (°C) Figure III.1 : Thermogramme du PEN amorphe de référence. Le taux de cristallinité du matériau est calculé suivant la relation : χ (%) = 100 × ( ∆H f + ∆H c ) 50 ∆H of (III.1) Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN où : ∆Hf : enthalpie de fusion du matériau, 39,25 J.g-1 dans ce cas. ∆Hc : enthalpie de cristallisation (-37,47 J.g-1). ∆Hf° : est l’enthalpie de fusion d’un cristal parfait infiniment épais de PEN, estimée à 103,4 J.g-1 par Cheng et al. [CHE 88]. Pour le matériau de référence nous avons calculé une valeur de cristallinité très faible (≈1,72%) ce qui confirme l’état amorphe de celui-ci. Il est important de souligner la présence d’un pic endothermique très large et de faible amplitude, entre 40 et 110°C, probablement dû à la relaxation de contraintes résiduelles induites par le processus de mise en œuvre et présentes dans le matériau de référence. Nous avons remarqué qu’un recuit pendant 30mn à des températures proches mais supérieures à la température de transition vitreuse (∼Tg+10°C) élimine complètement ces contraintes (cf. figure III.2). Ce traitement n’altère ni le taux de cristallinité ni les transitions de phase de -1 -1 2 (J.g .K ) cristallisation ou de fusion. T recuit(°C) ∆ Cp PEN réf 70 100 50 75 100 125 135 150 endo T(°C) T recuit (°C) 0.25 (J.g .K ) PEN réf ∆ Cp -1 -1 70 0 50 100 135 100 150 200 250 300 T (°C) Figure III.2 : Thermogramme du PEN recuit à 70, 100°C et 135°C pendant 30mn. 51 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 2.2. Etude de la cinétique de cristallisation : Avec une vitesse de chauffe de 10°C/mn, une étude de la cinétique de cristallisation isotherme à partir de l’état vitreux est limitée par la température de transition vitreuse (125°C) d’une part, et par la température de cristallisation dynamique (197°C) dans la région des hautes températures d’autre part. Cependant, pour des considérations pratiques de manipulation et sur des durées de recuit acceptables, nous avons limité notre étude à une gamme de températures de recuit, permettant la cristallisation froide du matériau, entre 150°C et 190°C. La figure III.3 montre le pic exothermique caractéristique de la cristallisation froide isotherme (160°C) en fonction de la durée de recuit. A Tr=160°C, le PEN commence à cristalliser (point A). Une augmentation du flux de chaleur est alors observée jusqu’au point B après une durée tm (≈26mn). On note ensuite une décroissance de la vitesse de cristallisation jusqu’à son extinction au point C. Nous pouvons considérer qu’à partir du point C, la cristallisation est achevée et seulement de très faibles variations de flux de chaleur sont enregistrées. B PEN amorphe de référence Tr=160°C -1 Flux de chaleur (W.g ) 0,020 0,015 0,010 0,005 A tm 0,000 0 Endo C 20 40 60 80 100 120 tr (mn) Figure III.3 : Pic exothermique caractéristique de la cristallisation froide isotherme (160°C) du PEN. La vitesse de variation du flux de chaleur dépend fortement de la température du recuit de cristallisation Tr. En effet, la figure III.4 montre l’évolution du flux de chaleur pour plusieurs températures de recuit 150, 155, 160, 165, 170, 175, 180, et 185°C. 52 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN La durée tm, temps de recuit correspondant au maximum du pic exothermique de cristallisation, diminue lorsque la température de recuit Tr augmente, alors que l’amplitude de ce pic augmente avec cette température. 0,35 Tr(°C) -1 Flux de chaleur (W.g ) 0,30 0,25 0,20 0,15 0,10 185 180 175 170 165 160 155 150 Endo 0,05 0,00 1 10 100 tr (mn) Figure III.4 : Pic exothermique de cristallisation froide isotherme du PEN pour différentes températures de recuit. La cristallinité relative (Xr), pour une valeur de la température de recuit donnée, est obtenue par le rapport de l’aire du pic à l’instant t et l’aire totale du pic : t Xr(t ) = ∫ ( dH / dt )dt 0 ∞ (III.2) ∫ ( dH / dt )dt 0 où : dH/dt est le taux de flux de chaleur. Ainsi, la variation de cristallinité relative de la cristallisation froide isotherme est présentée sur la figure III.5. On note que l’évolution de Xr est de forme sigmoïdale en fonction du temps pour toutes les températures de recuit. 53 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Cristallinité relative 1,0 Tr(°C) 0,8 0,6 0,4 185 180 175 170 165 160 155 150 0,2 0,0 0,1 1 10 100 1000 tr (mn) Figure III.5 : Variation de la cristallinité relative en fonction du temps de recuit pour différentes températures de recuit. La forme sigmoïdale des courbes peut être expliquée, dans une première approximation, par la théorie d’Avrami concernant l’évolution de la taille des sphérolites [AVR 39]. Cette théorie suppose que les germes, dont la distribution est statistique, dès qu’ils sont activés donnent naissance à des entités morphologiques, dont la forme doit obéir à plusieurs contraintes. Ces entités croissent toutes à la même vitesse et ce jusqu'au contact avec les entités environnantes. Cette théorie permet l’interprétation de la morphologie sphérolitique généralement observée, et conduit à l’équation suivante : Xr(t ) = χ( t ) = 1 − exp( −kt n ) χ( ∞ ) (III.3) où : χ(t) et χ(∞) sont respectivement les cristallinités au temps t et en fin de cristallisation. k est la constante de taux de cristallisation et n l’exposant d’Avrami qui dépend du mécanisme de nucléation et de la géométrie de croissance des unités morphologiques. Pour des raisons pratiques l’équation d’Avrami s’écrit sous la forme : log (− ln(1 − X r ( t ))) = n log( t ) + log( k ) (III.4) La figure III.6 montre la représentation graphique de l’équation précédente pour les différentes températures de recuit. 54 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 0,6 Log(-ln(1-Xr)) 0,0 Tr(°C) -0,6 -1,2 -1,8 1 10 150 155 160 165 170 175 180 185 100 tr (mn) Figure III.6 : Analyse d’Avrami de la cristallisation froide isotherme du PEN. A partir des données expérimentales (cf. figure III.6), les paramètres k et n sont identifiés au travers de la pente de la courbe et de l’ordonnée à l’origine. Sur cette figure, nous avons tenu compte uniquement de la partie linéaire de la courbe (entre 10 et 90% de la valeur maximale de cristallinité). En effet, l’étude est rendue difficile par le phénomène de cristallisation secondaire qui est amorcé au stade final de la cristallisation. Cette évolution a été observée sur plusieurs polymères [HUA 00, TAN 00, LU 01, SHI 01] dont le PEN [LEE 98, KAJ 00] et sera discutée plus loin. D’autre part, même si les résultats liés au recuit à 150°C présentent quelques anomalies dues essentiellement à la durée de manipulation, les données associées à cette température seront prises en compte dans les paragraphes suivants. Les parties linéaires des courbes sont pratiquement parallèles entre elles avec un déplacement vers les temps longs pour les basses températures de recuit. L’ajustement de la portion droite avec la forme doublement logarithmique de l’équation d’Avrami donne les résultats regroupés dans le tableau III.1. On note : χmax la cristallinité établie à la fin de chaque processus, t1/2 la durée de demi-vie, autrement dit, la durée nécessaire à l’établissement d’une demi cristallinité alors que tmax est le temps de recuit au maximum du pic exothermique. En se fondant sur le concept d’Avrami, t1/2 et tmax sont données par les expressions analytiques suivantes : t1 / 2 ln 2 = k 1/ n 55 et t max n −1 = n⋅k 1/ n (III.5) Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Tableau III.1 : Paramètres d’ajustement avec l’équation d’Avrami. Tr n k -n tmax t1/2 χmax (°C) (/) (mn ) (mn) (mn) (%) 150 2,97 1,862 10-7 160,680 163,079 44,5 155 3,06 2,884 10-6 56,793 57,338 43,5 160 3,02 3,236 10-5 26,849 27,167 43,2 165 2,90 5,248 10-4 11,687 11,916 42,7 170 2,67 6,457 10-3 5,545 5,762 45,7 175 2,52 3,981 10-2 2,941 3,107 43,2 180 2,50 1,288 10-1 1,850 1,960 41,8 185 2,36 3,890 10-1 1,181 1,277 45,0 L’exposant d’Avrami n présente des valeurs décroissantes entre 3,06 et 2,36 avec l’augmentation de la température de recuit (cf. figure III.7). Ceci implique une évolution de la géométrie des entités morphologiques d’une forme tridimensionnelle (3<n<4) vers une forme bidimensionnelle (2<n<3) [WUN 76]. Ces valeurs sont en bon accord avec les résultats de Lee et al. [LEE 98] même si les auteurs associent une géométrie tridimensionnelle à une valeur moyenne n≈2,5. 1000 3,4 3,2 3D 100 2D t1/2(mn) 3,0 2,8 n 2,6 10 2,4 2,2 1 140 150 160 170 180 2,0 190 T(°C) Figure III.7 : Variation du temps de demi-vie et de l’exposant d’Avrami en fonction de la température. 56 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN La figure III.7 montre bien la difficulté en terme de temps nécessaire à effectuer la cristallisation à des températures hors de la gamme d’étude (150-185°C). Ceci implique, par exemple, une durée de demi-vie supérieure à 1000mn (16,7 heures) lorsque Tr=140°C. En revanche, t1/2 qui décroît de manière continue avec la température devient très faible lorsque la cristallisation s’effectue autour de 200°C après une augmentation de la température à partir de l’état vitreux (Tamb). En réalité, la cristallisation se produit pendant la montée en température si Tr>185°C, c’est à dire au début du pic de cristallisation dynamique du PEN de référence (cf. figure III.1). Dans ce cas on parle plutôt de cristallisation froide non-isotherme. Activation thermique : La cristallisation est un phénomène thermiquement activé (cf. figure III.8). L’équation d’Arrhenius peut être utilisée pour illustrer la dépendance en température du paramètre k [CEB 86] : k 1 / n = k o exp( − ∆E ) k BT (III.6) où ∆E est l’énergie d’activation apparente, kB la constante de Boltzmann et ko un facteur préexponentiel. La valeur de ∆E obtenue, à partir d’une représentation semi-logarithmique en fonction de l’inverse de la température de recuit, est de l’ordre de 188 kJ.mol-1. Cette valeur est supérieure à celle du PET, 130 kJ.mol-1 [TAN 00], à cause de la rigidité de la chaîne du PEN induite par la présence du groupement naphtalène. Dans le cas du PEN, peu de travaux concernant l’étude de la cinétique de cristallisation ont été publiés. Cependant, Lee et al. [LEE 98] ont calculé l’énergie d’activation de la cristallisation isotherme à partir du fondu pour deux classes de PEN : faible et haut poids moléculaire. Les auteurs reportent des valeurs comprises entre 237 et 250 kJ.mol-1, nettement supérieures aux valeurs que nous avons obtenues à partir de la cristallisation isotherme du PEN à l’état vitreux. Ceci peut être expliqué par la présence de germes de nucléation plus développés, en nombre et en taille, pour les films industriels. 57 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN T(°C) 185 180 175 170 -1/n 160 155 150 0,1 1/n k (mn 165 Ea=188 kJ/m ol=45 kcal/m ol 21 -1 k o =1.95 10 m n ) 1 190 0,01 2,15 2,20 2,25 2,30 2,35 1000/T (1/K) Figure III.8 : Energie d’activation associée à la cristallisation froide isotherme du PEN. Selon Eder [EDE 97], la cristallisation isotherme des matériaux polymères peut être considérée en général comme la superposition de trois processus : ¾ La Nucléation qui est le processus d’apparition dans l’espace et dans le temps d’un germe, appelé nucléide, qui forme le point de départ de croissance des cristallites. ¾ La Croissance qui est le processus de remplissage ordonnée du volume par les unités morphologiques. ¾ Le Perfectionnement qui est le processus d’amélioration de la structure intérieure des cristallites, aussi appelé cristallisation secondaire. Le film de PEN de référence est un film industriel amorphe vitreux qui contient des charges minérales introduites lors de la mise en œuvre [DUH 01]. Ceci rend donc très difficile l’étude du mécanisme de nucléation. En revanche, nous pouvons discuter le processus de croissance et de perfectionnement à partir d’une étude isotherme détaillée des thermogrammes de l’AED. 58 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 2.3. Etude de la cristallisation partielle et totale : Les différentes transitions de phase : transition vitreuse, cristallisation dynamique et fusion sont très sensibles à l’opération de cristallisation. A partir d’une étude par analyse enthalpique différentielle nous avons traité deux aspects de la cristallisation isotherme : ¾ Cristallisation isotherme totale : l’analyse s’effectue sur un matériau cristallisé à une température donnée pour une durée suffisante à l’achèvement de la cristallisation froide (cf. figure III.3). Les températures caractéristiques des transitions de phase sont donc liées en grande partie à la cinétique de cristallisation. ¾ Cristallisation isotherme partielle : à une température choisie, plusieurs échantillons sont amenés à cristalliser avec des durées de recuit différentes et croissantes. Ceci permet l’analyse des échantillons avec des taux de cristallinité (χ) variants entre 0 et χmax. Etape 4 10 °C /m n n m C/ 0° -1 10 °C /m n tr 20 mn Temps Figure III.9 : Protocole utilisé lors d’une cristallisation partielle ou totale. 59 Température 100°C 0.5 W/g Etape 1 Etape 3 Etape 2 endo Flux de chaleur Le protocole utilisé pour l’étude des deux aspects est présenté sur la figure III.9. Tr Tamb Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN L’analyse de chaque échantillon doit passer par les quatre étapes représentées sur la figure III.9. Les étapes 1 et 3 permettent le contrôle des vitesses de chauffe et de refroidissement du cycle de recuit à une valeur absolue de 10°C/mn. Durant l’étape 2, le matériau cristallise à une température Tr pendant une durée tr. Cette dernière est plus au moins longue selon le taux de cristallinité final souhaité, ce qui permet d’étudier les deux aspects de cristallisation mentionnés à l’introduction de cette partie. L’étape 4 est celle qui nous intéresse en particulier dans cette partie, puisqu’elle permet la caractérisation enthalpique différentielle simple après un recuit. A noter que le matériau de référence n’a subi aucun traitement préalable et son analyse a été présentée dans les premiers paragraphes de ce chapitre. 2.3.1. Etude de la cristallisation partielle : Le thermogramme de l’échantillon amorphe de référence (PEN réf) est présenté sur la figure III.10, avec les thermogrammes des matériaux recuits à 160°C pendant des durées de recuit différentes. -1 -1 2 (J.g .K ) tr (mn) PEN réf ∆Cp 1 5 15 30 37 45 60 endo 120 180 0 50 100 150 200 250 T (°C) Figure III.10 : Influence des temps de recuit à 160°C sur le thermogramme du PEN. 60 300 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Nous avons noté sur la figure III.11 une légère diminution de Tg entre le matériau de référence, c’est-à-dire à sa réception, et celui recuit pendant des temps faibles de l’ordre de 5mn. En effet, le premier passage par cette température du matériau de référence induit un changement de phase qui caractérise une perte d’ordre occasionnée par la température, nous obtenons donc un matériau plus amorphe que celui de référence avant le déclenchement de la cristallisation froide pour des température supérieures. tr(mn) Tg PEN de réf ∆Cp 1 5 15 30 endo 37 -1 45 60 120 180 -1 0.25 (J.g .K ) 110 120 130 140 T (°C) Figure III.11 : Modification de la transition vitreuse en fonction de tr pour Tr=160°C. L’augmentation de la température de transition vitreuse en fonction du temps de recuit (>5mn) est associée à une diminution de saut de chaleur spécifique ainsi qu’un élargissement de ce palier. Ces observations sont en accord avec d’autres investigations [CHE 88] et peuvent s’expliquer. En effet, certains matériaux semi-cristallins, en plus de la phase amorphe et semi-cristalline, peuvent contenir une phase amorphe-rigide qui contribue peu à la variation de la chaleur spécifique à Tg. En effet, la fraction rigide (fr) peut se définir par la relation suivante [CHE 88] : f r (%) = 100 × ∆C pa − ∆C pm ∆C pa (III.7) Avec ∆Cpa le saut de chaleur spécifique d’un matériau totalement amorphe, et ∆Cpm le saut de chaleur spécifique mesuré. 61 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN La fraction rigide fr donne une image sur les différentes phases du matériau polymère qui ne participent pas à la transition vitreuse, c'est-à-dire, les phases cristallines et les phases amorphes rigides. Dans un modèle bi-phasique le taux de cristallinité et la fraction rigide sont égaux, alors que si fr >χ la fraction amorphe rigide existe, et le modèle à trois phases est le plus convenable. Les valeurs numériques des différents paramètres sont regroupées dans le tableau III.2. Ce dernier montre que la fraction fr est légèrement supérieure à la cristallinité, ceci vient appuyer l’hypothèse de l’existence de la phase amorphe rigide mais en faible proportion. Tableau III.2 : Paramètres de l’analyse enthalpique associé au recuit à 160°C. tr Tg Tcd Tf ∆Hc ∆Hf χ ∆Cp fr (mn) (°C) (°C) (°C) (J.g-1) (J.g-1) (%) (J.g-1.°C-1) (%) PEN-réf 125 197 268 -37,47 39,25 1,72 0,328 / 1 124 195 268 -37,60 38,41 0,78 0,321 2,13 5 124 193 268 -36,50 39,83 3,22 0,308 6,10 15 125 189 268 -31,48 37,89 6,20 0,303 7,62 30 125 182 268 -22,77 41,80 18,40 0,265 19,21 37 125 178 268 -10,41 42,73 31,26 0,222 32,32 45 126 178 268 -5,16 43,19 36,78 0,197 39,94 60 128 170 268 0,34 42,21 41,15 0,188 42,68 90 127 172 268 0,80 43,93 43,26 0,185 43,60 120 129 173 267 1,52 42,65 42,72 0,177 46,04 180 130 174 268 2,48 42,81 43,80 0,179 45,43 Nous avons enregistré un pic exothermique de cristallisation pour les échantillons recuits à 160°C pendant des durées inférieures à 60mn. La température, l’amplitude et l’aire du pic diminuent avec l’augmentation de tr, ce qui indique l’effet mémoire du recuit (cf. figure III.10). Lorsque tr est supérieur à 60 minutes, aucun pic exothermique n’est visible, mais à l’inverse c’est un deuxième pic endothermique de pré-fusion que l’on remarque aux alentours de 170°C. Celui-ci se déplace légèrement vers les hautes températures avec l’augmentation de tr. De plus, la position en température du pic montre clairement l’existence d’une phase paracristalline instable dans la structure semicristalline du PEN. 62 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Le comportement de fusion multiple de plusieurs polymères : le PEN, le poly(butylène naphthalène-2,6-dicarboxylate) (PBN) et le poly(éthylène-co-butylène naphthalène-2,6dicarboxylate) (PEBN), ont fait l’objet de plusieurs investigations [PAP 99, DEN 00]. Ce phénomène a été attribué à la fusion des domaines cristallins instables formés durant la cristallisation froide par un effet mémoire. Nous montrerons plus tard que ce changement de structure est plus marqué quand la température de recuit augmente. Sur la figure III.12 on note, en plus des variations de la température de cristallisation dynamique (Tcd) et de Tg déjà mentionnées, que la température de fusion (Tf) est toujours la même. En effet, cette température est associée à la fusion des cristaux qui sont à la fois reproductibles et dominants pour les différentes cinétiques de cristallisation. On note Tf la température du pic endothermique principal de fusion et Tf2 la température du pic endothermique de préfusion. 280 Tf Tg, cd, f (°C) 240 200 Tcd Tf2 160 Tg 120 0 30 60 90 120 150 180 tr(mn) Figure III.12 : Evolution des températures Tg, Tcd, Tf2 et Tf avec la durée du recuit tr. La variation du taux de cristallinité en fonction de la durée tr (cf. figure III.13) est de forme sigmoïdale. De ce fait, l’étude de la cinétique de cristallisation primaire du matériau peut être effectuée par une analyse des cinétiques isothermes partielles. A partir de cette étude, il est possible de retrouver les paramètres d’Avrami qui sont très voisins de ceux du tableau III.1, 63 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN issus d’une étude dynamique de la cristallisation froide. En effet, à partir de la figure III.13 on trouve que n=3,05 et k = 1,26 ⋅ 10 −6 mn − n . La particularité de cette courbe (cf. figure III.13) est la prise en compte des fluctuations thermiques reproductibles, sur tous les échantillons étudiés, lors de la stabilisation de la température de recuit. Pour l’étude des propriétés diélectriques cette figure sera d’une grande importance dans la comparaison des paramètres physiques intrinsèques et de la cristallinité par le biais de la durée de recuit. 50 40 χ (%) 30 20 10 0 Tr=160°C PEN de référence 0 50 100 150 tr(mn) Figure III.13 : Variation de la cristallinité en fonction de la durée de recuit. 64 200 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 2.3.2. Etude de la cristallisation totale : Les spectres AED obtenus pour les échantillons ayant subi une cristallisation isotherme totale jusqu’à la saturation sont présentés sur la figure III.14. ∆Cp Tr(°C) 100 110 120 130 140 ( ) 150 -1 2 (J.g .K ) 90 155 160 165 170 175 180 185 -1 Tg Tr(°C) 155 170 -1 0.25 (J.g .K ) 165 0 50 endo ∆Cp -1 175 180 100 185 150 endo 160 200 250 300 T (°C) Figure III.14 : Influence de la température de cristallisation sur le thermogramme du PEN. A partir de cette figure nous pouvons souligner les remarques suivantes : ¾ Chaque thermogramme présente un double pic de fusion. Le premier pic de fusion est centré à une température supérieure à la température de recuit, tandis que le deuxième est toujours situé aux alentours de 267°C comme dans le cas du PEN de référence. ¾ La disparition du pic exothermique de cristallisation dynamique confirme l’aspect complet de la cristallisation. ¾ La température de transition vitreuse est nettement supérieure à celle du PEN de référence. Cette différence est due à la création de la phase amorphe rigide. En revanche, Tg décroît curieusement en fonction de la température de recuit. Pour plus de détails, nous avons regroupé les valeurs numériques des températures caractéristiques dans le tableau III.3. 65 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Tableau III.3 : Paramètres de l’analyse enthalpique différentielle associé à la figure III.14. Tr Tg Tf2 Tf ∆Hf2 ∆Hf -1 -1 χ ∆Cp(Tg) (°C) (°C) (°C) (°C) (J.g ) (J.g ) (%) (J.g-1.°C-1) 150 128 166 268 0,60 41,76 42,36 0,181 155 128 170 268 1,28 42,82 44,10 0,187 160 130 174 268 2,48 42,81 43,80 0,179 165 128 179 268 2,58 41,63 44,21 0,188 170 128 181 268 2,63 41,96 44,59 0,187 175 127 185 268 2,75 41,69 44,44 0,172 180 127 188 268 2,54 41,12 43,66 0,173 185 126 192 268 2,37 41,39 43,76 0,189 Le tableau III.3 permet de remarquer qu’il n’y a aucune évolution du taux final de cristallinité dont la valeur se situe entre 42 et 45%. Par conséquent, la dimension de l’unité morphologique est indépendante de la valeur finale de la cristallinité. La figure III.15 permet de mettre en évidence une variation linéaire de la température Tf2 en fonction de Tr. Le prolongement de cette caractéristique intercepte la droite Tf2=Tr à une température Tf2o=213,6°C. La théorie de Hoffman-Weeks [HOF 62] décrit la dépendance de la température apparente de fusion avec la température de recuit par la relation suivante : T f = ( 1 / γ )Tr + ( 1 − 1 / γ )T fo (III.8) où : Tfo (213,6°C) est la température de fusion d’équilibre (température de fusion des cristaux étendus infiniment) et γ le facteur d’épaississement lamellaire qui permet de décrire la croissance de l’épaisseur des lamelles durant la cristallisation isotherme. Généralement, cette théorie est appliquée pour étudier le déplacement en température du pic de fusion principale. Or, nos résultats ne montrent pas une variation notable de la température de fusion Tf, alors que l’évolution de la température Tf2 s’accorde parfaitement avec l’équation III.8. 66 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Le facteur γ est souvent décrit comme étant le rapport entre l’épaisseur du cristal avancé (l) et le cristal initial (l*), donc γ=l/l*. Dans notre cas, une valeur de γ≈1,34 implique une augmentation d’épaisseur de 34% durant la cristallisation froide à des valeurs croissantes de Tr. Par ailleurs, ce mécanisme semble présenter une saturation autour de la température de 214°C. Nous avons ici la preuve du mécanisme de perfectionnement qui est activé par la température de recuit. Nous avons négligé l’effet du temps de recuit tr sur le facteur γ, étant donné que la cinétique de l’évolution de ce facteur avec tr est extrêmement lente (cf. figure III.12). 230 220 0 Tf2 =213,6°C 210 200 4T 3 ,74 =0 180 160 140 r 150 f2 T f2 T 170 2 4,9 2 +1 r 190 =T Tf2(°C) 160 170 180 190 200 210 220 230 Tr(°C) Figure III.15 : Variation de la température du pic endothermique de préfusion (Tf2) en fonction la température de recuit (Tr). 2.4. Cristallisation non-isotherme : Même si l’étude de la cristallisation non-isotherme ne fait pas partie de nos objectifs, nous avons souhaité souligner quelques phénomènes qui se manifestent à des températures de recuit supérieures à 200°C. En effet, avec une vitesse de chauffe de 10°C/mn le matériau cristallise en dynamique, comme nous l’avons montré dans la section §.III.2.1, avant même d’atteindre ce niveau de température. 67 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN La figure III.16 montre les thermogrammes du PEN recuit à des températures de 200, 220, 240 et 260°C après une montée de 10°C/mn à partir de la température ambiante. Le pic de pré-fusion se déplace toujours vers les hautes températures, lorsque celui-ci devient très proche de la température de fusion principale son amplitude augmente considérablement, alors qu’il gardait pratiquement la même amplitude pour des températures inférieures. Pour un recuit à 260°C, on note le recouvrement des deux pics de fusion. Nous pensons qu’un mécanisme tout à fait différent de celui de la cristallisation isotherme est à l’origine de ces observations à savoir : un mécanisme de fusion-recristallisation. A l’issue du recuit dans le voisinage du pic de fusion, une partie des cristallites principales fondent, ce qui entraîne une augmentation du volume désordonné entre les paquets lamellaires ou à l’intérieur de ces derniers. Les cristallites secondaires, en augmentation continue d’épaisseur, occupent alors ces espaces avec une proportion nettement plus grandes qu’au départ. Lorsque la taille de ces cristallites devient comparable à celle des cristallites principales, un seul pic étroit de fusion est enregistré. Dans ce cas le taux de cristallinité avoisine les 49% ce qui montre une augmentation du niveau de perfectionnement de la structure du PEN. Tr(°C) 200 220 240 0 endo -1 -1 4 (J.g .K ) ∆Cp 260 50 100 150 200 250 300 T (°C) Figure III.16 : thermogrammes du PEN recuit à des températures supérieures à 195°C. 68 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Sur la figure III.17, l’éloignement des points expérimentaux de la caractéristique Tf2(Tr), associée à la température du pic de préfusion et à la température de recuit, montre bien les limites de séparation entre les phénomènes de cristallisation isotherme et non-isotherme. 280 270°C 260 240 Tf(°C) 220 213,6°C =T 200 r Tf Tf2 T 160 140 f 180 160 180 200 220 240 260 280 Tr(°C) Figure III.17 : Variation de la température du pic de fusion (Tf) et la température du pic de préfusion (Tf2) en fonction de recuit (Tr). 69 Chapitre III 3. CONFIGURATIONS Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN ET ORIENTATIONS MOLECULAIRES APRES LA CRISTALLISATION FROIDE ISOTHERME DU PEN Des études récentes du PET par spectroscopie infrarouge [WAN 00, RAD 01] ont montré comment les spectres pouvaient évoluer en fonction de la morphologie du matériau. L’étude du PEN par la même technique entreprise par Ouchi [OUC 77] est restée longtemps sans suite. Plus tard, l’utilisation de la technique de réflexion multiple a permis à Krause [KRA 96] d’attribuer quelques modes vibrationnels à la structure de surface et d’autres à la structure de volume. Plus récemment, deux travaux sur le PEN [KIM 97, VAS 99] ont mis en évidence le changement du spectre infrarouge durant la cristallisation du matériau in situ, à différentes températures, en particulier la cristallisation à partir du fondu. Ces études ont permis d’attribuer quelques modes vibrationnels à chaque phase cristalline α et β du PEN. Dans notre travail, la formation des différentes morphologies durant la cristallisation froide isotherme à partir des états solides et amorphes du PEN a été étudiée en utilisant la spectroscopie infrarouge (IRTF) par transmission. Les changements de conformation des chaînes de polymère, dus au retour de la température du film à la température ambiante après une cristallisation froide, ont été analysés par cette technique. 3.1. Attribution des bandes d’absorption : Avant de s’intéresser à l’évolution de quelques bandes particulières des spectres IRTF, les figures III.18-21 résument l’attribution des pics d’absorption pour quatre domaines de longueurs d’onde. Cette attribution s’appuie essentiellement sur les travaux effectués par Ouchi et al. [OUC 77], Kimura et al. [KIM 97] et Vasanthan et al. [VAS 99]. Nous prenons comme exemple le matériau amorphe de référence et celui cristallisé à 160°C pendant 180mn avec un taux de cristallinité élevé (χ≈44%). Nous pouvons noter, en particulier, la signature de la vibration des groupements CH2 à 813, 826, 839, 1340, 1377, 1456, 1477, 2890, 2908, 2960, et 2990 cm-1. Ces bandes nous renseignent sur certaines conformations de la partie aliphatique, ainsi que la phase à laquelle le groupe ou la fonction appartient. Les bandes à 882, 932, 3045, et 3065 cm-1 sont associées à la vibration des CH aromatiques. Il est intéressant de signaler aussi la présence des bandes liées aux C–O de l’éthylène glycol à 1044 et 1096 cm-1. Enfin, les vibrations des noyaux aromatiques présentent une saturation de 70 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN spectre provoquée par l’épaisseur de l’échantillon (45µm). Cela a rendu impossible la détermination du nombre d’onde exact associé à chaque vibration. Malgré un bon accord entre l’ensemble de nos résultats avec ceux de Ouchi, une divergence existe pour les pics à 2908 et 2890 cm-1, dont les évolutions sont inversées. L’amplitude du pic à 2908 cm-1 augmente avec la cristallinité, alors que la bande à 2890 cm-1 tend à disparaître (cf. figure III.21). Par conséquent, nous les associons aux phases cristalline et amorphe respectivement. A remarquer que Ouchi note ce mode d’analyse mais se garde de conclure sur l’évolution par + ou –. Sur le spectre du PEN semi-cristallin, nous remarquons l’activation de certains modes vibratoires liés aux changements morphologiques du matériau (cf. figure III.18-21). Ceci se traduit par deux phénomènes d’origine physique, soit par l’évolution de la forme d’un pic soit la dégénérescence de certaines modes. En effet, les forces intermoléculaires, ou champ cristallin, provoquent une distorsion des chaînes, ceci se manifeste par l’apparition d’un triplet entre 800 et 860 cm-1 (cf. figure III.18) qui est attribué aux vibrations de balancement des groupements CH2. Le spectre IRTF du PEN présente une grande richesse spectrale qui est accentuée par la particularité du monomère comparé à celui du PET. En effet, il a été montré que les bandes associées au noyau aromatique du PET ne sont pas affectées par la cristallisation, alors que le changement spectral le plus marqué est celui associé aux conformations de l’éthylène glycol [ESP 76]. Dans le cas du PEN au contraire, la cristallisation peut altérer la conformation de l'unité éthylène glycol ainsi que celle du noyau naphtalène. 71 Absorbance 0,8 0,6 0,0 1200 0,4 1150 1100 1050 Figure III.19 : Région spectrale 900-1200 cm-1. 72 1000 Nombre d'onde (cm ) -1 932. δ (C-H) arom hors du plan, cristal α 650 950 906. Cristal α 700 920. δ (O=C-O) hors du plan, trans, amorphe 750 966. ν (O-C), gauche, amorphe 800 984. cristal α 850 826. γr (CH2), trans, amorphe 623 642. δ (COC)+aromatiques 739. δ (C-H) arom hors du plan amorphe 768. δ (C-H) aromatiques hors du plan 813. γr (CH2), trans, cristal α 1,0 1005. (O-CH2-CH2-O), TTT cristal α 0,0 900 1044. νas (O-C), gauche, amorphe 0,2 839. γr (CH2), trans, cristal α 0,8 νs (C-O), gauche 0,4 882. (C-H) aromatiques, amorphe 0,6 vibrations (naphtalènes) vibrations (naphtalènes), amorphe Absorbance Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN PEN AM réf, χ=2% PEN SC, χ=44%, tr=180mn, Tr=160°C 600 Nombre d'onde (cm ) -1 Figure III.18 : Région spectrale 600-900 cm-1. 1,0 0,2 PEN AM réf, χ=2% PEN SC, χ=44%, tr=180mn, Tr=160°C 900 Absorbance 0,0 3200 0,6 0,4 0,2 3100 1500 3000 Figure III.21 : Région spectrale 2800-3200 cm-1. 73 1400 Nombre d'onde (cm ) -1 2890. νs (CH2), gauche, amorphe 1600 2908. νs (CH2), trans, cristal PEN AM réf, χ=2% PEN SC, χ=44%, tr=180mn, Tr=160°C ν (C=O) 1300 2900 vib (noyaux aromatiques) ν (=C-O)+aromatiques, cristal α 1340. γw (CH2), trans, amorphe+cristal α 1377. γw (CH2), gauche 1407. vib (noyaux arom), amorphe 1456. δ (CH2), gauche, amorphe 1477. δ (CH2), trans, amorphe +cristal α 1504. vib (noyaux arom) 1604. vib (noyaux aromatiques) 0,8 2960. νas (CH2), trans, amorphe 1,0 1700 2970. νas (CH2), cristal α 0,2 2990. νas (CH2), cristal α 0,4 1635. vib (noyaux arom) 0,6 3045. ν (C-H) arom, cristal 3037. ν (C-H) arom, amorphe 0,0 1800 3065. ν (C-H) arom Absorbance Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 1,0 1200 Nombre d'onde (cm ) -1 Figure III.20 : Région spectrale 1200-1800 cm-1. PEN AM réf, χ=2% PEN SC, χ=44%, tr=180mn, Tr=160°C 0,8 2800 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 3.2. Région spectrale 800-1100 cm-1 : Dans notre étude, une attention particulière a été portée à la région des faibles nombres d’onde qui présente deux avantages, d’une part aucune saturation due à l’épaisseur de l’échantillon n’est enregistrée, d’autre part les changements dans les pics et les aires sont très importants. Par conséquent, on peut considérer cette région comme une véritable sonde des caractéristiques vibratoires du paquet moléculaire des chaînes de polymère [VAS 99] ; l’analyse des bandes associées à l’alignement moléculaire peut être très utile pour la détermination d’une relation entre les propriétés du polymère et sa structure. 3.2.1. Triplet 813-826-839 cm-1 : Ce triplet est quasi inexistant pour le matériau de référence et évidement à la température ambiante comme le montre la figure III.22. L’échantillon amorphe de référence présente un épaulement à 839 cm-1 qui évolue vers un pic de grande amplitude lorsque le matériau devient semi-cristallin. Par ailleurs, le pic à 813cm-1 qui se manifeste pour une morphologie cristalline n’est pas décelé lorsque le taux de cristallinité est faible. Le seul pic distinct lorsque le matériau est amorphe a son maximum à 0,45 0,40 Tr=160°C 813. γr (CH2) 0,35 839. γr (CH2) 826 cm-1, on observe sa décroissance au fur et à mesure que le temps de recuit à 160°C croît. 0,25 0,20 0,15 826. γr (CH2) Absorbance 0,30 PEN réf tr=1 mn 15 mn 25 mn 30 mn 60 mn 120 mn 180 mn 0,10 0,05 0,00 860 850 840 830 820 -1 Nombre d'onde (cm ) 810 800 Figure III.22 : Evolution des pics d’absorption en fonction de tr à Tr=160°C, le sens des flèches indique l’évolution des pics en fonction du temps. 74 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN L’étude quantitative, concernant le triplet dans la région 800-860cm-1, consiste à étudier l’évolution de l’aire de chaque pic en fonction de la durée tr, donc en fonction de la cristallinité du matériau. Tout d’abord, nous avons créé une ligne de base linéaire pour chaque spectre, puis des courbes d’absorption normalisées. Une distribution Gaussienne s’est révélée très fidèle à l’ajustement des points expérimentaux des spectres et à la déconvolution du triplet. L’évolution des aires des pics est présentée sur les figures III.23-(a, b) pour les températures de recuit de 155°C et de 160°C. Le pic à 813cm-1 montre bien l’apparition d’une bande après le recuit, comme l’indique la variation de l’aire du pic en fonction du temps de recuit. Ce pic a été associé aux mouvements vibratoires des CH2 en dehors du plan dans une conformation trans [OUC 77]. Ceci implique la vibration des CH2 dans un environnement qui caractérise la nouvelle morphologie du matériau. Compte tenu du processus de cristallisation qui prévoit des températures de recuit inférieures à 200°C, la phase cristalline est du type α [BUC 89 ]. La cristallinité du matériau peut être estimée à partir de cette bande à condition de procéder à un étalonnage grâce à une autre technique, telle que l’analyse enthalpique différentielle ou la méthode de diffraction des rayons X. L’épaulement situé à 839 cm-1 pour le matériau de référence (amorphe) est à l’origine du pic observé pour la structure semi-cristalline, ce pic s’intensifie avec le temps de recuit (cf. figure III.23-b). Cette bande est associée selon Ouchi aux vibrations des CH aliphatiques en conformation trans, comme celle située à 813 cm-1. En accord avec les résultats de Vasanthan [VAS 99], ces vibrations sont très probables dans la phase cristalline α. De plus, le décalage vers les hautes fréquences est le signe de l’augmentation des forces de liaisons des groupements CH2. En effet, la conformation trans peut être générée à la suite de l’opération de mise en forme du film. Le développement d’une structure cristalline moins compacte à partir d’un alignement des chaînes peut être à l’origine de l’existence d’un épaulement à 839 cm-1 pour le matériau de référence. 75 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 1,2 813 cm -1 1,0 Aire (u.a) 0,8 0,6 0,4 0,2 (a) Tr (°C) 155 160 PEN réf 0,0 0 50 100 150 200 tr(mn) 2,0 839 cm -1 (b) Aire (u.a) 1,5 1,0 0,5 PEN réf Tr (°C) 155 160 0,0 0 50 100 150 200 tr(mn) Figure III.23 : Aire des bandes (a) 813cm-1 et (b) 839cm-1 en fonction de tr. 3.2.2. Doublet à 1044 cm-1 : Plusieurs auteurs [OUC 77, KIM 97, VAS 99] attribuent le pic situé à 1044cm-1 à un étirement asymétrique des liaisons (C–O) en conformation gauche. Ceci est moins évident pour Krause [KRA 96] qui note en effet la possibilité d’une attribution multiple compte-tenu de la forme du pic. Ceci pourrait être justifié par une déconvolution arbitraire du pic unique autour de 1044cm-1 (cf. figure III.24). 76 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 0,125 1044cm -1 Absorbance 0,100 0,075 -1 1046cm 0,050 -1 1034cm 0,025 0,000 1070 1060 1050 1040 1030 1020 1010 -1 ν(cm ) Figure III.24 : Déconvolution du pic d’absorption à 1044 cm-1 pour le matériau de référence. Le calcul de l’aire du pic global (1044cm-1) passe par la quantification de chaque pic (1034cm-1 et 1046cm-1). Ceci nous a permis de tracer l’évolution de cette aire en fonction du temps de recuit tr (cf. figure III.25). La diminution de la proportion des conformations gauche est en bon accord avec l’augmentation de la proportion des conformations trans mise en évidence sur le pic 813 cm-1 (cf. figure III.23-a). 6 Tr (°C) 155 160 5 Aire (u.a) 4 PEN réf 3 2 1 -1 1044 cm 0 0 50 100 150 200 tr(mn) Figure III.25 : Aire de la bande 1044cm-1 en fonction de tr pour Tr=155 ou 160°C. 77 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Même si la cinétique de décroissance de la proportion des conformations gauche semble très affectée par la température de recuit, cette dernière n’affecte guère l’aire finale du pic (cf. III.25). Par ailleurs, le passage par la température de transition vitreuse induit, d’après la figure III.25, une légère augmentation de la proportion des conformations gauche, conduisant le matériau à un état plus désordonné que celui de référence. Ceci est en bon accord avec les résultats par AED de la figure III.11. Comme cela à été remarqué en étudiant l’évolution du pic situé à 839 cm-1, le matériau amorphe de référence semble contenir des contraintes mécaniques favorisant une diminution de la conformation trans, à l’image de la figure III.23-b, et une augmentation de la conformation gauche (figure III.25), avant d’enregistrer ensuite un comportement normal de ces deux conformations. 78 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN 4. CHANGEMENT STRUCTURAL MIS EN EVIDENCE PAR LE COUPLAGE AED/IRTF : La présence du champ cristallin peut provoquer, comme nous l’avons déjà remarqué, un dédoublement de pic. Ceci est très accentué à faible nombre d’onde, étant donné que les interactions intermoléculaires sont nettement plus faibles que les interactions intramoléculaires. Le taux de cristallinité est souvent estimé à partir de groupements qui caractérisent la régularité conformationnelle ou l’irrégularité [KRA 96], comme par exemple l’isomérisme rotationnel trans/gauche du mode ciseaux des CH2 (1450/1435 cm-1) dans les polyoléfines. Cependant, si la phase cristalline ne contient en principe que la conformation qui minimise l’énergie (conformation trans), la phase amorphe ne contient pas exclusivement l’autre conformation (conformation gauche) [VAS 99]. Selon Vasanthan et al [VAS 99] le pic centré autour de 814cm-1 (813cm-1 dans notre cas) est un pic de cristallinité vrai du PEN. Ces auteurs notent en particulier la variation linéaire de l’intensité du pic d’absorption avec la densité du polymère. Ces observations ont été aussi notées sur d’autres polymères semi-cristallins, notamment sur le polyéthylène [KRI 56]. 50 1,0 IRTF, pic 813cm AED -1 40 30 χ(%) Aire (u.a) 0,8 0,6 20 0,4 PEN réf 10 0,2 0,0 -50 Tr=160°C 0 50 100 150 0 200 t r (mn) Figure III.26 : Variation de l’aire du pic 813cm-1 et de la cristallinité en fonction de tr. Si nous traçons la variation de cristallinité du matériau étudié en fonction du temps du recuit à une température fixe (160°C), ainsi que l’évolution de l’absorption infrarouge à 813cm-1 pour ce même matériau, on observe (cf. figure III.26) une quasi superposition des courbes et 79 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN l’apparition d’un palier de saturation près de tr=60mn. Ceci montre la correspondance entre l’attribution faite de ce pic d’absorption infrarouge (813cm-1) et l’état cristallin d’une part, et l’intérêt apporté par la technique de caractérisation infrarouge d’autre part, puisqu’elle offre plus de souplesse d’utilisation lorsque on étudie le polymère sous forme de films. La variation de l’aire du pic en fonction de la cristallinité du matériau peut être présentée par l’intermédiaire des données issues de l’ajustement mathématique des deux fonctions. Nous avons souhaité utiliser les valeurs normalisées de l’aire et de la cristallinité qui tendent vers l’unité pour des valeurs de tr élevées. En effet, la figure III.27 ne fait pas apparaître une linéarité entre les deux variables. La cristallinité normalisée augmente durant la première période de cristallisation où les changements conformationnels sont moins affirmés. Par la suite, les rôles s’inversent durant la cristallisation primaire, avant d’enregistrer la superposition de la courbe avec la droite An=χn. 1,0 0,8 An 0,6 0,4 0,2 0,0 0,0 -1 Pic (813cm ) Tr=160°C 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 χn Figure III.27. Variation de l’aire normalisée du pic 813 cm-1 en fonction de la cristallinité normalisée. Dans une étude très récente effectuée par Radhakrishkhan et Kaito [RAD 01] sur la formation de la structure de PET durant une cristallisation isotherme in situ, contrairement à nos résultats, une saturation prématurée de l’évolution de la conformation trans est enregistrée. Cette évolution peut résulter, selon les auteurs, du début du dernier stade de développement de la microstructure par la formation des faisceaux de lamelles de même taille sur des périodes régulières. Cette différence de résultats pourrait être expliquée par le fait que lors de notre étude un échantillon différent est traité pour chacune des mesures de spectrométrie 80 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN infrarouge ou d’analyse enthalpique différentielle. Ainsi, nous ne pouvons pas identifier une nouvelle étape de formation de la microstructure difficile à observer par une analyse enthalpique différentielle. 5. CONCLUSION A partir de toutes les observations que nous avons soulignées, nous pouvons imaginer que l’évolution de la structure physique du PEN, ayant subi une cristallisation froide isotherme, passe par les quatre étapes suivantes : -Etape 1 : Tf → Tamb Cette étape est contrôlée par la méthode de mise en forme des films amorphes industriels, où des contraintes mécaniques sont générées, pouvant occasionner un ordre partiel sans que celui-ci n’induise une cristallinité élevée (<2%). Un recuit à des températures proches mais supérieures à la température de transition vitreuse peut éliminer ces contraintes. C’est dans cette étape que le mécanisme de nucléation est amorcé soit à partir des charges minérales, utilisées dans le processus industriel, soit à partir des fragments cristallins non fondus. La distribution des germes de nucléation dans le volume est contrôlée par le processus de fabrication des films. -Etape 2 : Tamb → ∼(Tg+10°C) Durant cette étape, la transition de certaines conformations trans vers les conformations gauche est notée, notamment les conformations dans l’éthylène glycol. Ceci se traduit par la disparition du pic endothermique sous-vitreux. Par conséquent, le matériau perd une grande partie de la contrainte mécanique de mise en forme et devient plus amorphe que la référence dès sa réception. -Etape 3 : (Tr, tr) < (Tr, tr) seuil La cristallisation primaire du matériau prend naissance sur un réseau cristallin de forme α. Les entités morphologiques commencent à croître à partir de l’activation des germes de nucléation. La vitesse de croissance et la taille de ces entités sont régies par une loi qui peut être celle d’Avrami dans une première approximation, et dépendent de la température et du temps de recuit entre autres. 81 Chapitre III Etude des Changements Morphologiques et Conformationnels du PEN Parallèlement, ce processus induit une augmentation nette des conformations trans en relation directe mais non-linéaire avec la cristallinité du matériau. Cette étape se termine lorsque les entités morphologiques occupent la totalité du volume. Un couple (Tr, tr) seuil de valeur propre à la cristallisation froide isotherme peut être déterminé. Etape 4 : (Tr, tr) > (Tr, tr) seuil La cristallisation secondaire, marquée par le point (Tr, tr) seuil, donne aussi naissance à des lamelles imparfaites ou instables qui se manifestent par un petit pic endothermique de fusion sur le thermogramme du PEN. Ces lamelles trouvent leur existence soit entre les paquets lamellaires soit à l’intérieur du même paquet, sachant que ce dernier est le résultat de l’empilement d’un certain nombre de lamelles. Même si l’espace qu’occupent les nouvelles lamelles est très restreint, leurs tailles augmentent en fonction de la température de recuit avec un rapport constant estimé à 34% (§.III.2.3.2). Ces entités évoluent aussi dans le temps même si le mécanisme de perfectionnement de ces lamelles, vers la création d’une super-structure, présente une cinétique extrêmement lente. Si l’étape 4 marque une évolution nette du taux de cristallinité local, il n’en est pas pour autant vrai en ce qui concerne la cristallinité globale. 82 CHAPITRE IV MOBILITE MOLECULAIRE CARACTERISTIQUE DU PEN Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN CHAPITRE IV : MOBILITE MOLECULAIRE CARACTERISTIQUE DU PEN 1. INTRODUCTION : Les performances électriques des condensateurs sont intimement liées à la nature du matériau diélectrique utilisé. En effet, c’est par le biais de la valeur de la constante diélectrique que la capacité (C) de ce composant passif sera fixée. Cependant, la variation relative de la capacité en fonction de la température (∆C/C) limite l’utilisation du condensateur, ces variations sont la conséquence directe des phénomènes de relaxation dans les diélectriques (tel que le PEN) qui doivent être connus et maîtrisés. Dans ce chapitre, nous allons étudier les relaxations diélectriques et mécaniques dans le PEN. Pour cela deux techniques de caractérisation seront utilisées : l’analyse diélectrique dynamique et l’analyse mécanique dynamique. La première étape est consacrée à la présentation des différentes relaxations qui auront lieu avant, après et autour de la température de transition vitreuse. Dans un deuxième temps nous caractérisons les modes de relaxation mis en évidence avant la détermination des lois de comportement des temps de relaxation. Ensuite, nous verrons l’influence des modifications morphologiques et conformationnelles sur les différents modes de relaxation, sachant que ces modifications sont induites par un processus de cristallisation froide du PEN amorphe de référence. Dans la dernière partie de ce chapitre, nous étudierons le processus de relaxation induit par le phénomène de cristallisation dynamique du matériau. L’influence de la fréquence, de la température et de la morphologie sur ce processus sera analysée. A noter qu’une discussion globale des résultats liés au quatrième chapitre fera l’objet d’un dernier chapitre, dans lequel nous aborderons l’origine moléculaire des phénomènes de relaxation ainsi qu’une corrélation entre les caractéristiques de la mobilité moléculaire et les résultats concernant les changements morphologiques et conformationnels du PEN évoqués précédemment. 83 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 2. ETUDE DE LA MOBILITE MOLECULAIRE PAR ANALYSE DIELECTRIQUE DYNAMIQUE : 2.1. Spectre de relaxations diélectriques dans le PEN de référence : La figure IV.1 montre la variation de la partie réelle (ε′) et la partie imaginaire (ε″) de la permittivité complexe (ε*), du PEN amorphe de référence, dans la gamme de températures comprises entre -100 et 200°C à la fréquence de sollicitation de 10Hz. A partir de -100°C et jusqu’à 140°C, la fonction ε′(T) prend des valeurs croissantes entre 4,5 et 6,3. En revanche, elle décroît par la suite et en particulier à 172°C. Il est évident que seul un changement de la microstructure peut expliquer cette décroissance [WIL 94]. Parallèlement, une analyse approfondie de la partie imaginaire ε″(T) permet l’observation de plusieurs phénomènes diélectriques : ➄ A -62°C est localisé un pic large et symétrique avec une faible amplitude de 0,05. Ce pic sous vitreux correspond à un mode de relaxation secondaire noté β [CHE 91]. ➄ Un épaulement, visible à 94°C, est le signe d’un deuxième mode de relaxation secondaire noté β* [EZQ 93]. Celui-ci est présent dans le domaine de températures comprises entre la température ambiante et la température de transition vitreuse (∼125°C). ➄ Pour une fréquence de 10Hz, un troisième mode de relaxation est observé à 130°C, c’est-à-dire légèrement au dessus de la température de transition vitreuse. Avec une amplitude de 0,35 , nettement supérieure à celle du mode β, ce mode présente un pic très étroit et parfaitement résolu. C’est le mode de relaxation principal α. ➄ A 172°C, c'est-à-dire à la même température où la fonction ε′(T) présente une décroissance notable, un pic noté ρ est observé. A une fréquence de 10Hz, le pic présente une amplitude comparable avec celle du mode α. ➄ Enfin, le spectre ε″ révèle, à haute température (T>Tρ), la contribution de la conductivité (σ). L’analyse de l’évolution de la tangente de l’angle de perte dans la même gamme de température (cf. figure IV.2) confirme ces résultats. 84 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 7 ε' 0,6 PEN amorphe de référence f=10Hz 0,5 6 0,4 α 5 ρ σ 0,3 4 0,2 3 β* β 2 -100 -50 0 50 ε" 0,1 100 0,0 200 150 T (°C) Figure IV.1 : Parties imaginaire et réelle de la permittivité complexe ε* du PEN de référence. 0,08 PEN amorphe de référence f=10Hz α tan δ 0,06 ρ σ 0,04 β* 0,02 0,00 -100 β -50 0 50 100 150 200 T (°C) Figure IV.2 : Variation de l’angle de perte en fonction de la température à 10Hz. 85 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 2.2. Effet de la fréquence sur les modes de relaxation : Nous avons présenté sur la figure IV.3 en échelle semi-logarithmique les spectres ε″ du PEN amorphe de référence obtenus dans la gamme de températures entre -100 et 200°C. Pour la clarté de cette figure nous avons présenté seulement cinq isochrones pour les fréquences de 1, 10, 102, 103, et 104Hz, qui révèlent les informations suivantes : ➄ Le mode de relaxation β est affecté par la variation de la fréquence. En effet, lorsque la fréquence passe de 1 à 104 Hz, l’amplitude et la largeur du pic β augmentent au moment où il se déplace vers les hautes températures. ➄ Si la position de l’épaulement du mode β* est influencée par la fréquence, il est très difficile d’apprécier les changements apportés à son amplitude et à sa largeur essentiellement à cause de la proximité du mode de relaxation principal. ➄ Concernant le mode α, nous pouvons noter la diminution de son intensité avec la fréquence alors qu’il devient de plus en plus large. Comme le mode β, le mode α du PEN se déplace vers les hautes températures avec la fréquence. ➄ Enfin, il très facile de remarquer la chute de l’intensité du pic ρ avec la fréquence. Toutefois, une très fine translation (∼4°C) de sa position en température est relevée. 10 0 ε" 10 -1 10 -2 PEN amorphe de référence 0 f=10 Hz 1 10 Hz 2 10 Hz 3 10 Hz 4 10 Hz -100 σ ρ α β* β -50 0 50 100 150 T (°C) Figure IV.3 : Spectres isochrones de ε″ en fonction de la température. 86 200 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN Une des particularités la plus partagée, entre les modes β, β* et α, est le déplacement des maximums des pics associés vers les hautes températures lorsque la fréquence augmente. Ceci montre bien que ces modes sont thermodynamiquement activés. 2.3. Dépendance en température des temps de relaxation : L’analyse de la dépendance en température des temps de relaxation, à partir d’un spectre isochrone de ε″, consiste à déterminer la température du maximum du pic (TM) associée au temps de relaxation (τ), qui est inversement proportionnel à la fréquence τ=1/2πf, pour un mode donné. La figure IV.4 présente le diagramme d’Arrhenius des temps de relaxation τ des modes β et α. Pour la forme de base du matériau, le mode de relaxation β* ne sera pas étudié à cause de la complexité des spectres ε″ qui ne permettent pas de relever les températures TMβ* avec précision. Cette complexité sera amplement discutée dans le cinquième chapitre. 250200 150 100 50 T (°C) 0 -50 -100 -1 1x10 τ (s) -5 1x10 Mode α -3 1x10 de Mo β -7 1x10 -9 1x10 PEN amorphe de référence 2,0 2,5 3,0 3,5 4,0 3 4,5 5,0 5,5 6,0 -1 10 /T(K ) Figure IV.4 : Temps de relaxation τ des modes β et α du PEN amorphe de référence dans le diagramme d’Arrhenius. Les points expérimentaux du mode β s’alignent sur une droite, c’est donc un comportement de type Arrhenius. Les temps de relaxation sont décrits alors soit par l’équation d’Arrhenius 87 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN (Equation I.19) soit par l’équation d’Eyring (Equation I.25), dont les paramètres d’ajustement par la méthode de régression non linéaire sont reportés sur le tableau IV.1. En revanche, la dépendance en température du mode α présente une courbure caractéristique d’un comportement de type VFT obéissant à l’équation (I.20). Les paramètres de VFT issus de l’ajustement de ce modèle avec les points expérimentaux sont répertoriés dans le tableau IV.1. Tableau IV.1 : Paramètres d’activation des modes β et α du PEN amorphe de référence. Equation Arrhenius Eyring VFT Mode τo (s) Ea (eV) ∆S (eV.K-1) ∆H (eV) τo (s) B (K) T∞ (K) β 8,3 10-16 0,530 3,96 10-4 0,547 α 1,5 10-14 1756,4 339,9 Le tableau IV.1 montre que le mode β possède une faible enthalpie et énergie d’activation apparente des espèces impliquées. Ce résultat est cohérent avec les paramètres d’activation trouvés dans la littérature [EZQ 93, BEL 96]. Le mode β est donc la manifestation diélectrique d’une relaxation secondaire. Par ailleurs, le comportement de type VFT des temps de relaxation du mode α du PEN amorphe de référence permet d’identifier le mode α à la manifestation diélectrique de la transition vitreuse [MCC 67]. Même si la valeur de τo est inférieure à celle du temps de relaxation caractéristique des vibrations moléculaires (10-13s), nous constatons que la valeur de T∞ est très proche de la valeur empirique (Tg-51,6°C). D’autre part, le coefficient de dilatation thermique αf=1/B=5,69 10-4 K-1 est du même ordre de grandeur que la valeur empirique de 4,8 10-4 K-1 [WIL 55]. Sur la figure IV.4, l’extrapolation du comportement des processus associés aux modes β et α montre que ces deux modes se confondent à une température T*≈260°C pour un temps de relaxation τ*≈2 10-10s. Ce phénomène appelé souvent phénomène de ‘merging’ postule de l’existence d’un mode commun, noté (αβ) [GAR 96, MEN2 99], à partir du point (τ*, T*). Pour plus de clarté, ce phénomène sera discuté et interprété ultérieurement lors d’une discussion globale. 88 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 2.4. Influence de la cristallisation froide sur les modes de relaxation : Dans le chapitre III, le sujet de cristallisation froide du PEN amorphe a été traité en détail par la quantification des changements de phase du matériau avant et après cristallisation isotherme. Maintenant, nous nous intéressons aux phénomènes de relaxation induits dans le matériau lors d’une rampe en température sous une contrainte électrique. L’influence de la cristallisation froide isotherme sur les spectres de permittivité complexe (ε*) sera au coeur de la discussion. Pour une température de recuit de 160°C plusieurs échantillons ont subi un cycle de cristallisation partielle. À partir d’un PEN amorphe de référence, et sans traitement préalable, les échantillons sont amenés à cristalliser avec des durées de recuit différentes et croissantes. Il est utile de rappeler que les valeurs de cristallinité associées à chaque temps de recuit (tr) sont indiquées dans le tableau III.2. 2.4.1. Spectres de relaxations diélectriques : Les mesures de permittivité complexe (ε*), des échantillons de PEN cristallisés à 160°C, ont été effectuées dans la gamme de températures située entre -100 et 200°C pour 12 fréquences. Sur les figures IV.5 et IV.6, nous avons tracé la variation des parties réelle et imaginaire de la permittivité complexe pour une fréquence de 10Hz. L’influence de tr sur la fonction ε′(T) se traduit par une diminution notable de la permittivité sur toute la gamme de température. Par rapport au PEN de référence, nous pouvons noter l’affaiblissement des marches de transition (∆ε′) sur la permittivité autour de -60 et 80°C associées aux modes β et β*, respectivement. Pour le mode α, les changements apportés à la transition sigmoïdale en température se manifeste par la diminution de ∆ε′ et par l’élargissement de la marche qui se déplace en plus vers les hautes températures. Cette évolution est fortement liée à l’augmentation de la température de transition vitreuse. Enfin, le phénomène de cristallisation froide, qui était nettement représenté sur le spectre de ε′ du PEN amorphe de référence par une marche de permittivité inversée, est de moins en moins marqué lorsque tr augmente et ceci jusqu'à sa disparition totale (cf. figure IV.6). En effet, pour un matériau dont le phénomène de cristallisation est quasiment saturé ( χ≈44% où tr=180mn); la permittivité croit de façon monotone entre 3,50 et 4,45 dans toute la gamme de températures. 89 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 6 ε' PEN amorphe de référence Recuit 5mn à 160°C Recuit 30mn à 160°C Recuit 60mn à 160°C Recuit 180mn à 160°C f=10Hz 5 4 3 -100 -50 0 50 100 150 200 T(°C) Figure IV.5 : Variation de la permittivité relative réelle en fonction de la température pour les échantillons de PEN de référence et ceux recuits à 160°C. ε" 0,1 PEN amorphe de référence Recuit 5mn à 160°C Recuit 30mn à 160°C Recuit 60mn à 160°C Recuit 180mn à 160°C f=10Hz ρ α β* β 0,01 -100 -50 0 50 100 150 200 T(°C) Figure IV.6 : Représentation en échelle semi-logarithmique de la permittivité relative imaginaire pour les échantillons de PEN de référence et ceux recuits à 160°C. 90 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN Les informations de l’influence du recuit à 160°C sur ε″, révélées à partir de la figure IV.6, peuvent être vues à différentes échelles de comparaison : ➄ Entre le matériau de base et le matériau recuit à 160°C, pour des durées tr courtes (<5mn), les contrastes sont incontestables. Tout d’abord, le mode β avec une amplitude diminuée est particulièrement aplati et est de plus en plus décalé vers les hautes températures. Le mode β*, quant à lui, est davantage résolu que le mode β dans le spectre de ε″. En effet, c’est un mode large, présentant une dissymétrie en température et situé autour de 75°C pour f=10Hz avec une amplitude de 0,07. Autour de 128°C, le mode α ne semble pas avoir subi de changements pour tr=5mn mis à part le léger décalage vers les basses températures avec une amplitude amoindrie. A l’origine de ces constatations intervient sans doute l’effet d’une légère diminution de la valeur de Tg déjà notée dans le tableau III.2 pour la même durée de recuit. À ce niveau de comparaison, les changements apportés au pic ρ sont pratiquement les mêmes que ceux notés sur le mode α concernant la position du pic et son amplitude. ➄ Lorsque la valeur de la durée tr augmente, plusieurs modifications sont enregistrées sur les modes de relaxation du PEN semi cristallin. D’une manière générale, l’amplitude des différents pics diminue avec tr jusqu’à la disparition totale du pic, c’est notamment le cas du pic ρ pour tr>45mn. Les deux modes de relaxation secondaire conservent la même forme dans une échelle semilogarithmique, mais tous deux décalés dans ce cas vers les basses températures pour la fréquence de sollicitation considérée (10Hz). Le mode principal marque encore une fois sa différence avec son déplacement dans le sens inverse des modes secondaires. En fonction de tr il devient plus large avec une asymétrie en température nettement prononcée. 2.4.2. Dépendance en température des temps de relaxation : Le diagramme d’Arrhenius de la figure IV.7, qui concerne le cas du PEN semi cristallin (tr=60mn, χ≈41%), montre l’alignement des points expérimentaux des deux modes β et β* qui ont donc un comportement de type Arrhenius. Le mode α, quant à lui, présente une courbure caractéristique du mode principal avec un comportement de type VFT. Nous constatons une 91 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN similitude dans le comportement de la dépendance en température avec le PEN amorphe de référence (cf. figure IV.4). Nous pouvons également remarquer sur la figure IV.7 deux régions de recouvrement des modes secondaires avec le mode primaire. Dans un premier temps le mode β* forme avec le mode principal un mode commun, noté (αβ*), pour (T* ; τ*)=(180°C ; 8,10-8s). Lorsque la température augmente le mode β intercepte le mode principal à (T* ; τ*)=(220°C ; 3,10-9s) pour former le mode commun (αβ), dans un second temps. 250200 150 100 Mode α 10 -3 10 T (°C) 0 Mo de β* -1 50 -50 e od M -100 β τ (s) -5 1x10 -7 10 PEN recuit 60mn à 160°C -9 10 2,0 2,5 3,0 3,5 4,0 3 4,5 5,0 5,5 6,0 -1 10 /T(K ) Figure IV.7: Représentation dans le diagramme d’Arrhenius de la variation des temps de relaxation des modes β, β* et α. Pour faciliter l’étude et la comparaison de l’influence de la durée tr sur l’ensemble des caractéristiques logτ(1/T), nous avons reporté les données expérimentales sur trois diagrammes d’Arrhenius associés à chaque mode de relaxation (figures IV.8-10). a. Mode β : La relaxation β obéit à la loi d’Arrhenius quelque soit la durée tr (cf. figure IV.8). Les droites en pointillés représentent les ajustements par l’équation d’Eyring. 92 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN Par ailleurs, la pente de la droite caractéristique est nettement modifiée avec la variation de tr, ce qui implique une évolution des énergies d’activation apparentes en fonction du taux de cristallinité. Il est également remarquable de constater que les temps de relaxation tendent à se confondre aux alentours de (T ; τ)=(10°C ; 2,10-5s). Etant donné que ce dernier point appartient à la gamme d’étude accessible par la technique de mesure, les caractéristiques logτ(1/T) s’appuient donc sur un point commun pour réaliser une rotation de la droite, dans le sens des aiguilles d’une montre, lorsque la cristallinité augmente. 60 30 0 T (°C) -30 -60 -90 -1 10 -3 10 τ (s) -5 -5 1x10 °C (10 ; 0 2,1 s) Mode β tr=5mn 30mn 45mn 60mn 180mn -7 10 3,0 3,5 4,0 4,5 3 5,0 5,5 -1 10 /T(K ) Figure IV.8: Dépendance en température des temps de relaxation associés au mode β pour différentes valeurs de tr (Tr=160°C). b. Mode β* : Il très facile de remarquer que la figure IV.9, représentant le diagramme d’Arrhenius du mode β*, apporte les mêmes constatations que celles soulignées sur le mode β. En effet, selon une loi d’Arrhenius la pente de la droite caractéristique augmente avec tr de façon à donner l’impression d’une rotation, toujours dans le sens des aiguilles d’une montre, autour d’un point fixe. Même si celui-ci est difficile à identifier pour le mode β*, nous pouvons le situer dans la zones des grands temps de relaxation et à basses températures (vers 50°C et 0,3s approximativement). 93 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 120 0 10 110 100 90 T (°C) 80 70 60 50 40 -1 10 -2 10 τ (s) Mode β* tr=5mn 30mn 45mn 60mn 180mn -3 10 -4 10 -5 10 2,5 2,6 2,7 2,8 2,9 3 3,0 3,1 3,2 -1 10 /T(K ) Figure IV.9: Dépendance en température des temps de relaxation associés au mode β* pour différentes valeurs de tr (Tr=160°C). 2 10 250 225 200 T (°C) 175 150 125 0 10 -2 10 τ (s) -4 1x10 Mode α tr=5mn 30mn 45mn 60mn 180mn -6 10 -8 10 -10 10 1,9 2,0 2,1 2,2 2,3 3 2,4 2,5 2,6 -1 10 /T(K ) Figure IV.10: Dépendance en température des temps de relaxation associés au mode α pour différentes valeurs de tr (Tr=160°C). 94 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN c. Mode α : Pour toutes les valeurs de tr, les temps de relaxation présentent une courbure caractéristique d’un comportement de type VFT. La tendance, en fonction de tr, est vers l’augmentation des temps de relaxation pour la même température. Pour ce mode, les données expérimentales ne présentent pas l’intersection remarquée dans le mode β et partiellement dans le mode β* sur la gamme d’étude. En effet, si un point de rotation doit exister il se situerait dans la zone des temps courts à hautes températures. Contrairement aux deux modes secondaires, la rotation probable des caractéristiques s’effectuera sans doute dans le sens contraire des aiguilles d’une montre (cf. figure IV.10). Les paramètres d’ajustement des points expérimentaux avec les lois de comportement de type Arrhenius pour les modes secondaires, et de type VFT pour le mode principal sont regroupés dans les tableaux IV.2, IV.3 et IV.4. Tableau IV.2 : Paramètres d’activation du mode β du PEN recuit à 160°C. Equation Arrhenius Eyring tr (mn) τo (s) Ea (eV) ∆S (eV.K-1) ∆H (eV) 5 5,9 10-15 0,583 3,72 10-4 0,561 30 6,1 10-14 0,523 1,72 10-4 0,501 45 -13 1,7 10 0,498 8,26 10 -5 0,476 60 4,3 10-13 0,478 3,29 10-5 0,462 180 2,0 10-12 0,440 -1,30 10-4 0,419 Tableau IV.3 : Paramètres d’activation du mode β* du PEN recuit à 160°C. Equation Arrhenius Eyring tr (mn) τo (s) Ea (eV) ∆S (eV.K-1) ∆H (eV) 5 2,7 10-27 1,730 2,81 10-3 1,699 30 3,7 10-26 1,663 2,58 10-3 1,633 45 1,5 10-25 1,630 2,46 10-3 1,600 60 9,1 10-22 1,363 2,09 10-3 1,465 180 4,7 10-21 1,321 1,81 10-3 1,378 95 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN Tableau IV.4 : Paramètres d’activation du mode α du PEN recuit à 160°C. Equation VFT tr (mn) τo (s) B (K) T∞ (K) 5 1,9 10-14 1620,6 342,6 30 -14 1,6 10 1697,7 340,9 45 3,1 10-15 1999,0 337,0 60 4,4 10-14 1626,5 348,3 180 5,3 10-14 1624,4 351,7 L’énergie d’activation apparente du mode secondaire β*, qui est restée jusque-là inconnue, possède une valeur légèrement supérieure à celle trouvée dans la littérature, estimée à 1,09eV par Cañadas et al. [CAÑ 99], pour un PEN dont le taux de cristallinité est situé autour de 44% qui correspond à un taux quasi maximum pour le PEN. 2.4.3. Analyse des paramètres d’activation : a. Modes secondaires : Les figures IV.11-12 montrent l’évolution de l’enthalpie et de l’entropie d’activation en fonction du temps de recuit tr. Il faut noter que les courbes en pointillés ont simplement été tracées pour guider les yeux. Cependant, la tendance générale est vers une diminution lorsque tr augmente. En effet, en fonction de tr l’enthalpie (∆H) prend des valeurs décroissantes de façon monotone entre 1,730 et 1,321 eV pour le mode β*, et entre 0,538 et 0,440 eV pour le mode β. Outre la distinction au niveau des valeurs de l’enthalpie des modes β et β*, la forme de décroissance avec tr est nettement différente. Cette forme est exponentielle pour le premier mode alors qu’elle est sigmoïdale pour le deuxième mode sous vitreux. Ces deux modes sont distingués non seulement par le volume occupé par l’entité de relaxation associée, mais aussi par le niveau et la manière de perturbation de l’environnement par ces entités. La figure IV.12 confirme ces constatations et montre à quel point l’entropie d’activation suit l’évolution de l’enthalpie. Par ailleurs, ces grandeurs ne semblent pas être indépendantes l’une de l’autre. Dans ces conditions, une augmentation de la cristallinité induit à la fois une diminution de l’enthalpie d’activation (∆H) ainsi qu’une décroissance de l’entropie d’activation (∆S). 96 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 1,8 ∆H (eV) 1,6 Mode β* 1,4 1,2 1,0 0,8 0,6 0,4 Mode β 0,2 0 25 50 75 100 125 150 175 200 tr(mn) Figure IV.11: Variation de l’enthalpie d’activation des modes β et β* en fonction du temps de recuit du PEN à Tr=160°C. 0,0030 -1 ∆S (eV.K ) 0,0025 Mode β* 0,0020 0,0015 0,0010 0,0005 Mode β 0,0000 0 25 50 75 100 125 150 175 200 tr (mn) Figure IV.12: Variation de l’entropie d’activation des modes β et β* en fonction du temps de recuit du PEN à Tr=160°C. 97 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN b. Mode primaire α : Un point de repère concernant l’influence de la cristallinité sur les paramètres d’activation du mode principal α est la température T∞. Comme nous l’avons déjà vu au chapitre I, la température T∞ apparaît comme la température au-dessous de laquelle aucun réarrangement moléculaire ne peut s’effectué. A cet effet, elle a été liée à la température de transition vitreuse par la relation : T∞ = Tg − 51,6°C [WIL 55]. Or, la figue IV.13 n’atteste pas de la parfaite dépendance entre la température T∞ et Tg. En effet, des études plus ou moins récentes [MAR 86, MAR 02] ont montré les limites de cette relation, et même pour les matériaux amorphes comme le Polyméthacrylate de méthyle ou PMMA, puisque une mobilité moléculaire induite par le phénomène de vieillissement physique peut être enregistré pour des températures plus faibles (vers Tg-80°C). Cependant, une forte divergence est enregistrée pour des valeurs moyennes de cristallinité (10mn<tr<60mn). Ceci montre bien que les paramètres d’activation évoluent vers une valeur optimale comme le montre le tableau IV.4. Ce point optimal semble coïncider avec le point d’inflexion de la variation sigmoïdale de Tg, mesurée par l’analyse enthalpique différentielle, en fonction du temps de recuit. 132 128 Tg(°C) Tg (AED) T∞+51.6°C (SDD) 124 120 116 0 50 100 150 200 tr (mn) Figure IV.13 : Evolution de Tg et de (T∞+51,6°C) en fonction du temps de recuit à Tr=160°C. Une corrélation entre l’équation d’Arrhenius et la loi de VFT peut être effectuée en considérant la pente de la courbe logτ(T-1) pour chaque échantillon. Ceci n’a rien de 98 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN quantitatif, puisque le but est d’apprécier la tendance de l’énergie d’activation apparente en fonction de la température et de la cristallinité, qui nous conduit à considérer l’équation suivante : Eaα = k B ∂ ln τ B = kB ∂( 1 / T ) ( 1 − T∞ / T )2 (IV.1) où B et T∞ sont des paramètres issus de l’ajustement des points expérimentaux du mode α selon la loi de comportement de type VFT (cf. tableau IV.4). Bien entendu, cette démarche s’appuie sur l’hypothèse qui considère le paramètre B et le facteur pré-exponentiel (τo) de la loi VFT (cf. équation I.20) indépendants de la température dans la gamme d’étude. La variation de Eaα en fonction de la température est présentée sur la figure IV.14 pour différentes valeurs de tr. La tendance de variation est vers l’augmentation de Eaα en fonction de tr d’une part, et lorsque la température diminue vers la température de transition vitreuse, d’autre part. Ceci peut être expliqué par le fait que la taille des régions de réarrangement coopérative augmente lorsque la température tend vers Tg [GAR 94]. En revanche, l’influence de la cristallinité sur ces régions est plus complexe à cause de la dispersion des valeurs de Tg. Nous analyserons ce point d’une manière plus détaillée dans le dernier chapitre. 9 tr=5mn 30mn 45mn 60mn 180mn 8 7 Ea (eV) 6 5 4 3 2 130 140 150 160 170 T (°C) Figure IV.14: Evolution de l’énergie d’activation apparente en fonction de la température du mode principal pour différentes valeurs de tr à Tr=160°C. 99 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 3. ETUDE DE LA MOBILITE MOLECULAIRE PAR ANALYSE DYNAMIQUE MECANIQUE : Une méthode complémentaire employée pour caractériser la microstructure du PEN, sur un large domaine de température de part et d’autre de la transition vitreuse, est l’analyse mécanique dynamique. Cette méthode expérimentale fournit des informations, non seulement sur la microstructure évaluées en terme de mouvements moléculaires des chaînes, mais encore d’éventuels effets de renfort de la phase amorphe par les cristallites. 3.1. Spectre de relaxations mécaniques dans le PEN de référence : Nous avons utilisé, dans cette partie de l’étude, un deuxième lot d’échantillons amorphes de PEN (lot 2). Les films de ce deuxième lot (fournis par le même fabriquant) ont une épaisseur de 70µm, ils sont donc nettement plus épais que ceux utilisés jusque-là (45µm). Cette particularité facilite les mesures expérimentales par analyse mécanique dynamique. L’analyse enthalpique différentielle a permis de montrer que le matériau de référence, que nous utilisons dans cette partie, est caractérisé par un très faible taux de cristallinité (≈0,5%). Dans le but de contrôler le pourcentage de cristallinité de plusieurs échantillons de PEN (lot 2), nous avons réalisé un cycle de cristallisation comparable à celui déjà adopté pour les films du premier lot. La figure IV.15 représente la variation du taux de cristallinité du PEN en fonction de la durée de recuit tr à Tr=170°C. 50 Etape 2 Etape 1 40 30 χ(%) 20 10 Référence 0 0 50 100 150 200 tr(mn) Figure IV.15: Variation de la cristallinité en fonction de la durée de recuit à 170°C du PEN amorphe de référence (lot 2). 100 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN La figure IV.16 montre la variation du module réel E′ et la tangente de l’angle de perte tanδ en fonction de la température pour une fréquence de sollicitation de 10Hz. Les spectres ont été enregistrés dans la gamme de températures comprises entre -120 et 230°C avec une vitesse de chauffe fixée à 2°C.mn-1. La signature de la SDM confirme l’existence des trois relaxations classiques : β (à -50°C), β*(autour de 85°C) et α (vers 140°C). Celles-ci peuvent être identifiées par la présence d’un pic sur le spectre de tanδ ou par une chute du module E′ associée à chacun des pics. Cette chute peut être très élevée dans le cas du mode principal. En effet, au passage de Tα nous enregistrons une diminution de presque trois ordres de grandeurs du module E′. Par ailleurs, quelques dizaines de degrés après le maximum de la relaxation α (à 10Hz), le processus de cristallisation froide est déclenché. Une augmentation rapide du module de conservation est alors enregistrée à partir de 170°C. Ce processus de cristallisation froide se manifeste dans le thermogramme de tanδ par un épaulement très bien résolu noté ρ. Ces constatations sont en bon accord avec celles de Aoki et al. [AOK 99] 4 10 E'(MPa) 3 10 2 10 1 10 PEN amorphe de référence f=10Hz α 0 10 tan δ -1 10 ρ β* β -2 10 -120 -60 0 60 120 180 240 T(°C) Figure IV.16: Evolution en fonction de la température du module de conservation (E′) et de la tangente de l’angle de perte (tanδ) du PEN amorphe de référence (lot 2). 101 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 3.2. Influence de la structure sur les spectres de relaxation : Dans cette partie, nous allons étudier les modifications apportées sur le module complexe E* par le changement de la morphologie du PEN après un cycle de cristallisation tel qu’il vient d’être présenté. Les variations du module E′ en fonction de la température sont tracées, en échelle semilogarithmique, sur la figure IV.17 pour différentes valeurs de cristallinité (cf. figure IV.15). Nous pouvons observer une augmentation générale de la valeur du module de conservation sur l’ensemble de l’intervalle de l’étude. D’autre part, la chute de ce module associée au mode α est moins marquée lorsque la valeur de cristallinité est élevée. Ceci est généré en grande partie par la disparition de la transition associée à la cristallisation froide, qui était enregistrée à 170°C. A haute température (T>200°C), les spectres convergent vers la même valeur du module E′ (150MPa). Nous avons ainsi l’évidence de l’effet de renforcement des phases amorphes associé à l’augmentation de la valeur de cristallinité. La figure IV.18, représentant l’allure des spectres de variation de tanδ en fonction de la température et pour différentes valeurs de cristallinité, révèle les informations suivantes : ➄ Le processus de cristallisation affecte considérablement les modes de relaxation secondaire. En effet, nous observons une réduction significative de l’amplitude des relaxations β et β*. ➄ Par ailleurs, l’amplitude du pic associé à la manifestation anélastique de la transition vitreuse (mode α) diminue avec la cristallinité, devient plus large et se déplace vers les hautes températures. ➄ Enfin, le pic ρ associé à la cristallisation froide disparaît du spectre de tanδ pour des valeurs élevées de cristallinité (χ>30%). Ces constatations sont en bon accord avec les informations révélées par l’analyse diélectrique dynamique du PEN. Bien entendu, seul le phénomène de transport des charges électriques, comme la conduction par exemple, n’est pas sondé par analyse mécanique dynamique. 102 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 4 10 3 10 E'(MPa) 2 10 1 10 -120 PEN χ=0.5% PEN χ=5.3% PEN χ=14.7% PEN χ=30.8% PEN χ=42.9% PEN χ=43.7% f=10Hz -60 0 60 120 180 240 T(°C) Figure IV.17: Evolution en fonction de la température du module de conservation (E′) des échantillons de PEN amorphe de référence (lot2) et de PEN semi cristallin. 0 10 PEN χ=0.5% PEN χ=5.3% PEN χ=14.7% PEN χ=30.8% PEN χ=42.9% PEN χ=43.7% f=10Hz α ρ tan δ β* -1 10 β -2 10 -120 -60 0 60 120 180 240 T(°C) Figure IV.18: Evolution en fonction de la température de l’angle de perte des échantillons de PEN amorphe de référence (lot2) et de PEN semi cristallin. 103 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 3.3. Dépendance en température des temps de relaxation : Sur la figure IV.19 nous avons représenté la variation du module E″ d’un PEN semi cristallin (χ≈31%.) en fonction de la température pour plusieurs fréquences de sollicitation. Cette représentation nous permet de constater le déplacement des modes β, β* et α vers les hautes températures lorsque la fréquence augmente, ces modes sont donc activés thermiquement. Par analogie avec les résultats par ADD, nous avons associé la dépendance en température du mode β* à un comportement du type Arrhenius alors que le mode α a été confronté à la loi de variation de type VFT. α β* 2 10 β E" 1 10 5Hz 10Hz 15Hz 20Hz 25Hz PEN semicristallin (χ=30.8%) -120 -60 0 60 ρ 120 180 240 T(°C) Figure IV.19: Influence de la fréquence de sollicitation sur les pics de relaxation du PEN. Les tableaux IV.5 et IV.6 reportent les paramètres d’ajustement des points expérimentaux avec les lois de comportement associées. Le mode de relaxation β n’a pas été étudié puisque les mesures du module E″ sont accompagnées d’un niveau de bruit important pour des températures inférieures à 0°C. L’identification de la position en température de ce mode se révèle ainsi très difficile. Même si la gamme de fréquence par ADM est faible, les résultats d’ajustement montrent les mêmes tendances que celles reportées par la technique de ADD. En effet, l’énergie d’activation apparente du mode β* diminue avec la cristallinité (Tableau IV.5). D’autre part, les paramètres B et T∞ issus de l’ajustement avec l’équation de VFT montrent l’existence d’un point optimal autour de χ≈31% (Tableau IV.6). 104 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN Tableau IV.5 : Paramètres d’activation du mode β* du PEN (lot 2) recuit à 170°C. Equation Arrhenius Eyring χ(%) τo (s) Ea (eV) ∆S (eV.K-1) ∆H (eV) 0,5 8,4 10-26 1,608 2,35 10-3 1,577 5,3 -17 2,0 10 0,996 6,75 10 -4 0,965 14,7 1,7 10-21 1,276 1,49 10-3 1,245 30,8 1,9 10-21 1,204 1,27 10-3 1,173 42,9 1,4 10-20 1,204 1,05 10-3 1,173 43,7 2,5 10-18 1,408 8,61 10-4 1,027 Tableau IV.6 : Paramètres d’activation du mode α du PEN (lot 2) recuit à 170°C. Equation VFT χ(%) τo (s) B (K) T∞ (K) 0,5 9,3 10-16 1991,5 336,9 5,3 6,5 10-12 1033,2 356,1 14,7 1,1 10-14 1636,7 348,7 30,8 1,6 10-17 2604,4 332,2 42,9 8,8 10-15 2177,5 338,2 43,7 1,0 10-12 1555,3 349,3 105 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 4. RELAXATION INDUITE PAR LA CRISTALLISATION FROIDE DU PEN : Nous avons mis volontairement à l’écart l’analyse du processus ρ depuis le début de ce chapitre dans le but d’exposer le caractère très complexe de ce processus lors de l’étude détaillée suivante. En effet, l’observation du processus ρ par ADD et AMD montre bien qu’il est dépendant de la fréquence, de la température et de la morphologie entre autres, comme pour les relaxations β, β* et α. 4.1. Analyse enthalpique différentielle : Le pic ρ est lié d’une manière ou d’une autre au phénomène de cristallisation froide d’après les observations que nous avons effectué dans ce chapitre. Cependant, les mesures réalisées par ADD et par AMD ont été réalisées dans une large gamme de température (entre -100 et 230°C) avec une vitesse de montée en température q=2°C.mn-1. La figure IV.20 montre le thermogramme du PEN de référence réalisé par AED avec deux vitesses de balayage : q=2 et 10°C.mn-1. En plus de l’atténuation des pics de fusion et de cristallisation, due à une mauvaise résolution des ces pics, le pic exothermique de cristallisation se déplace nettement vers les basses températures lorsque q diminue. Dans ces conditions le pic de cristallisation est localisé près de 176°C pour q=2°C.mn-1, alors que nous avons noté une valeur de température de endo cristallisation dynamique de 197°C avec q=10°C.mn-1. -1 2 (J.g .K ) ∆Cp q=2°C.mn -1 -1 -1 q=10°C.mn PEN amorphe de référence 0 50 100 150 200 250 300 T (°C) Figure IV.20 : Influence de la vitesse de montée en température (q) sur le thermogramme de PEN de référence. 106 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 4.2. Analyse diélectrique dynamique : La figure IV.21 montre l’influence de la fréquence en particulier sur le spectre de ε″ pour le PEN amorphe de référence (lot 1). Le pic ρ prend place entre le pic de relaxation primaire α et la contribution de la conductivité σ. Sa position est faiblement influencée par la fréquence, en revanche on remarque une brusque diminution de l’intensité du pic avec la fréquence. 3 2 ε" ρ PEN amorphe de référence f=1Hz 2Hz 4.5Hz 10Hz 20Hz 45Hz 100Hz 200Hz 450Hz σ 1 α 0 120 140 160 180 T (°C) Figure IV.21 : Influence de la fréquence sur le pic ρ du PEN amorphe de référence. La fréquence n’est pas le seul paramètre qui affecte le processus ρ. La figure IV.22 montre un autre paramètre d’influence, c’est le temps de recuit à 160°C ou en d’autre termes le taux de cristallinité. L’amplitude du pic ρ diminue considérablement avec l’augmentation de tr et il devient indécelable à partir de tr=45mn. En réalité, le pic n’est visible que lorsque le matériau possède un taux de cristallinité nettement inférieure à la valeur maximale (∼44%) Dans le précédent chapitre, nous avons montré avec l’analyse enthalpique différentielle que le pic de cristallisation froide disparaît complètement lorsque tr>45mn (cf. figure III.10) avec l’apparition d’un pic de pré-fusion pour des durées de recuit supérieures. Il devient alors incontestable d’associer ce pic au phénomène de cristallisation froide. 107 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN ρ σ 1 α ε" 0,1 0,01 100 PEN amorphe de référence Recuit 5mn à 160°C Recuit 30mn à 160°C Recuit 45mn à 160°C Recuit 60mn à 160°C Recuit 180mn à 160°C f=1Hz 120 140 160 180 200 T (°C) Figure IV.22 : Influence du temps de recuit à 160°C sur le pic ρ du PEN amorphe de référence. Modélisation de l’évolution du processus ρ avec la fréquence et la température : Dans les paragraphes suivants, on suppose que le phénomène de conductivité enregistré à basse fréquence et à haute température, ne contribue pas à la partie réelle de la permittivité et que cette conductivité est activée thermiquement selon une loi du type Arrhenius. La supposition d’une contribution simple de la conductivité (ε″σ) sur le spectre de la permittivité imaginaire (ε″) nous permet d’écrire : ε"( β ,β *,α ,ρ ) ( ω ,T ) = ε" ( ω ,T ) − ε"σ ( ω ,T ) où : ε"σ ( ω ,T ) = − Eaσ σ σ = o exp ε oω ε oω k BT (IV.2) (IV.3) et ε″(β,β*,α,ρ) est un terme incluant la contribution de toutes les relaxations, σ la conductivité et σo le facteur préexponentiel associé à σ. La figure IV.23 montre l’évolution de la permittivité imaginaire en fonction de la température avant et après dissociation de la contribution de la conductivité. Il apparaît clairement que le pic ρ est asymétrique par rapport à la température, et que la position en température du pic est légèrement affectée lorsque l’effet de la conductivité est supprimé étant donné que cette contribution modifie essentiellement le coté hautes températures du pic. L’ajustement des points expérimentaux avec l’équation (IV.2) donne les paramètres regroupés dans le tableau IV.7 pour différentes valeurs de tr. 108 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 1 ε" ε"σ ε"-ε"σ σ ρ ε" 0,1 PEN recuit 5 mn à 160°C f=1Hz 140 150 160 170 180 T (°C) Figure IV.23 : Soustraction de la contribution de la conduction (σ) sur la permittivité imaginaire (ε″). Tableau IV.7 : Paramètres d’ajustement de la contribution de la conductivité. tr (mn) σo (S.m-1) Eaσ (eV) PEN de référence 1,70 10-4 1,28 5 1,82 10-6 1,45 30 -7 7,62 10 1,60 45 3,09 10-8 1,66 60 6,55 10-10 1,88 180 5,87 10-11 1,98 Sur le tableau IV.7 on peut noter la diminution de la valeur de l’énergie d’activation apparente de la conductivité avec tr. Ces résultats sont en bon accord avec ceux reportés dans la littérature sur le PET [NEA 97]. Cette tendance indique que la mobilité des charges électriques est de plus en plus faible lorsque la cristallinité augmente. Après la soustraction de l’effet de la conductivité (figure IV.24), nous proposons l’expression suivante permettant l’ajustement des points expérimentaux du processus ρ [ZOU2 02] : 109 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 1 1 1 1 ∆ε × exp a ⋅ B ⋅ − + exp − B ⋅ − ε" ρ ( ω ,T ) = ω T To T To −1 (IV.4) où : ∆ε est l’intensité du pic, B un facteur d’activation, a une constante associée à l’asymétrie du pic et To la température du maximum du pic. PEN amorphe de référence Recuit 5mn à 160°C Recuit 30mn à 160°C Recuit 45mn à 160°C Recuit 60mn à 160°C Recuit 180mn à 160°C f=1Hz 2 ρ ε"-ε"σ 1 0 140 150 160 170 180 T(°C) Figure IV.24 : Effet du recuit sur le pic ρ sans l’influence de la conductivité σ. L’expression (IV.4) implique que la température est responsable de la forme finale du pic contrairement à la fréquence qui ne contribue qu’à l’amplitude du pic, c'est-à-dire : ε" ρ ( ω ,T ) = où : g( ω ) = ∆ε ω et g( ω ) ( f ( T ))a + ( f ( T ))−1 (IV.5) B exp T f (T ) = B exp To (IV.6) L’équation IV.5 s’apparente au modèle de Jonscher (Equation I.17), où deux lois en puissance sont associées (Equation IV.5) pour décrire le comportement asymétrique du pic ρ sur ε″ en fonction de la température au lieu de la fréquence pour le modèle de Jonscher. Par analogie aussi avec ce modèle, le pic ρ est centré à To puisque f (To ) = 1 (Equation IV.6). L’asymétrie 110 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN du pic ρ est évidemment liée à la cinétique de cristallisation non-isotherme contrôlée par la vitesse de montée en température. Comme le montre la figure IV.25, l’ajustement des données expérimentables avec l’équation (IV.4) est très satisfaisant. Les paramètres ∆ε, B, a et To correspondants à des échantillons possédant des faibles valeurs de cristallinité, c’est-à-dire ceux qui montrent ce processus, sont regroupés dans le tableau IV.8. ρ 1 ε"-ε"σ ε"ρ 0,1 150 155 160 165 170 175 T (°C) Figure IV.25 : Résultat de l’ajustement du pic ρ à 1Hz: «❡» points expérimentaux du PEN (tr=5mn, Tr=160°C), «» ajustement avec l’équation (IV.6). Tableau IV.8 : Paramètres d’ajustement du pic ρ avec l’équation (IV.4) tr (mn) ∆ε a B (K-1) B × kB (eV) To (°C) PEN de référence 22,42 0,2301 127641 11,01 172,77 5 16,10 0,2150 118242 10,20 168,38 30 6,70 0,2014 124712 10,75 168,31 Dans l’équation (IV.4), l’amplitude du pic de perte associé au processus ρ est supposée être proportionnelle à l’inverse de la fréquence. Pour vérifier cette hypothèse nous avons tracé l’évolution avec la température du produit (ε″-ε″σ)⋅f sur la figure IV.26, où il apparaît clairement que le modèle proposé satisfait les spectres à basse fréquence (f<10Hz). Pour des fréquences supérieures (f>10Hz) le mode α, qui est activé thermiquement, se déplace naturellement vers les hautes températures et recouvre le processus de cristallisation froide (pic ρ), ce qui induit une surestimation de l’amplitude du pic ρ. 111 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN (ε"-ε"σ) · f (Hz) 3 45 Hz 20 Hz 10 Hz 4.5 Hz 2 Hz 1 Hz modèle 2 PEN recuit 5mn 1 0 150 155 160 165 170 175 180 T(°C) Figure IV.26 : Effet de la fréquence sur le pic ρ du PEN recuit 5mn à 160°C. 4.3. Analyse mécanique dynamique : Un deuxième aspect du processus ρ, non-électrique cette fois-ci, est relevé à travers les mesures de relaxations mécaniques. Comme nous l’avons déjà montré dans les paragraphes précédents et comme le montre la figure IV.27, le pic ρ est présent sur le spectre du module de dissipation (E″). Le pic est situé à une température élevée autour de 194°C, ceci étant dû essentiellement à l’appartenance des échantillons utilisés à un deuxième lot de PEN (lot 2). Outre la sensibilité de la mesure dans cette région de température, la faible gamme de fréquences utilisée ne permet pas de réaliser une analyse détaillée de ce pic. Cependant, il est très clair que ce pic est asymétrique et que son amplitude diminue avec la fréquence de sollicitation. 14 ρ 12 10 E" 5Hz 10Hz 15Hz 20Hz 25Hz PEN semicristallin (χ=30.8%) 8 6 4 180 195 210 225 T(°C) Figure IV.27 : Influence de la fréquence de sollicitation sur le pic ρ issu de la variation du module de dissipation E″. 112 Chapitre IV Mobilité Moléculaire Caractéristique du PEN 5. CONCLUSION : L’utilisation de deux méthodes spectrométriques, l’analyse diélectrique et mécanique dynamique, a permis de montrer la complémentarité de ces deux techniques pour mettre en évidence les modes de relaxation au sein du PEN. Au terme de ce chapitre, quelques points essentiels sont à souligner : 9 Tous les échantillons de PEN présentent trois relaxations notés β, β* et α dans le sens croisant de température. Les temps de relaxation des modes secondaires β et β* sont décrits par la loi d’Arrhenius, en revanche le mode principal α suit la loi de VFT. 9 L’énergie d’activation apparente associée au mode principal varie avec la température. Elle est croissante lorsque la température diminue vers Tg pour une cristallinité donnée et augmente avec la cristallinité pour une valeur fixe de température. 9 Le processus ρ, associé au phénomène de cristallisation froide, se révèle très sensible à l’état morphologique du matériau. En effet, ce processus devient indécelable dans le cas du PEN avec une cristallinité supérieures à 30%. Par ailleurs, l’amplitude de ce pic est inversement proportionnelle à la fréquence. Ce quatrième chapitre dans lequel nous avons présenté les résultats associés à la mobilité moléculaire du PEN est très riche en termes de résultats. Nous avons donc préféré discuter et analyser l’ensemble des résultats dans un cinquième chapitre qui va constituer la discussion générale. 113 CHAPITRE V DISCUSSION Chapitre V Discussion CHAPITRE V : DISCUSSION 1. INTRODUCTION : Dans ce chapitre nous allons tenter de déterminer l’origine de la mobilité moléculaire responsable des différents modes de relaxation observés dans le PEN. Nous établirons une corrélation entre les caractéristiques de cette mobilité moléculaire et les changements morphologiques et conformationnels du PEN que nous avons présentés au troisième chapitre. Dans la dernière partie, nous examinerons avec plus de détail le processus de relaxation ρ. 2. MODES DE RELAXATION SECONDAIRE : Nous avons remarqué sur la figure IV.2 (p.85) l’existence de deux modes de relaxation secondaire. La notation de ces deux modes peut être à l’origine de quelques confusions. En effet, les premiers travaux effectués sur le PEN par spectrométrie diélectrique ont été réalisés à notre connaissance par Kojima et al. [KOJ 82]. Dans ce travail, Kojima a désigné les modes sous vitreux basse et haute température par les étiquettes ‘γ’ et ‘β’, respectivement. D’autres auteurs ont adopté ce système de notation, entre autres : Blundell et al. [BLU 85] et Van den Heuvel et al. [VAN 00]. La notation la plus communément utilisée est établie par Chen et al. [CHE 91]. Elle consiste à attribuer l’étiquette β au processus sous-vitreux basse température, visible sur des températures cryogéniques par spectrométrie diélectrique, et l’étiquette β* au processus sous vitreux haute température, visible par ADD entre la température ambiante et la température de transition vitreuse. C’est cette dernière notation qui est la plus utilisée dans les récents travaux effectués sur le PEN [CAÑ 99, NOG 00, ZOU 00, MAR 01, MAY 01, HAR 01], et c’est exactement celle que nous avons utilisé dans cette étude. Ce choix est justifié surtout par la similitude du mode sous-vitreux basse température avec le mode β observé sur le PET [CHE 91]. 115 Chapitre V Discussion 2.1. Mode β : 2.1.1. Loi de comportement et énergie d’activation : Le mode β a été montré par analyse diélectrique comme étant large, symétrique et de faible amplitude (cf. figure IV.1, p.85). En revanche, il est nettement moins affirmé sous une sollicitation mécanique (cf. figure IV.16, p.101). Le mode β est caractérisé par une dépendance en température de type Arrhenius (cf. figure IV.4 et IV.7, p. 87 et 92). A partir de la pente da la droite caractéristique, nous avons pu calculer des valeurs d’énergie d’activation apparente du processus β comprises entre 0,59 et 0,44 eV dans le sens croissant du taux de cristallinité. Ces valeurs sont très cohérentes avec les données de la bibliographie (0,52 eV pour Ezquerra et al. [EZQ 93], 0,63 eV pour Bellomo [BEL2 96], 0,50 eV pour Cañadas et al. [CAÑ 99], 0,56 eV selon Nogales et al. [NOG 00], entre 0,40 et 0,47 eV pour Hardy et al. [HAR 01], et puis entre 0,55 et 0,65 eV selon Hardy et al. [HAR 02]), lorsque la caractérisation est effectuée par analyse diélectrique. En utilisant l’analyse mécanique, Hardy et al. [HAR 01] trouvent des valeurs comprises entre 0,51 et 0,66 eV. Enfin, la seule valeur établie par la technique des courants stimulés thermiquement (CST) est celle donnée par Kojima et al. [KOJ 82] : 0,1 eV, qui est relativement faible. Bien entendu, la dispersion des résultats est parfaitement admise, et elle est due essentiellement à la diversité des états morphologiques du matériau : amorphe, semi cristallin ou orienté, entre autres. Lorsque la cristallinité augmente la valeur du facteur préexponentiel diminue dans une fourchette comprise entre 10-16 et 10-12 s. Malheureusement, à cause de la pauvreté bibliographique sur ce sujet aucune valeur n’a été trouvée à titre de comparaison. Cependant, selon les études effectuées sur le PET [MEN2 99], les très faibles valeurs de τo ont été attribuées à la contribution d’une entropie additionnelle. 2.1.2. Origine moléculaire de la relaxation β : L’origine moléculaire du mode β du PEN reste incertaine dans la littérature. L’analyse de quelques travaux peut s’avérer donc très utile pour définir l’origine moléculaire de ce mode à cause des attributions multiples. Dans une étude par spectrométrie mécanique du processus β dans les polyesters à cristaux liquides contenant le naphtyle -2,6 ; l’attribution de Youn et Jaffe [YOO 82] du processus 116 Chapitre V Discussion localisé à -40°C concerne les mouvements des groupements phényles, alors que les études effectuées sur le PET n’ont pas suggéré une telle attribution [COB 86]. Blundell et Buckingham [BLU 85] rappellent les conclusions de Youn et ont ensuite interprété le mode β comme étant dû aux carbonyles (C=O). Etant donné la répartition homogène des électrons sur le groupe phényle, Krause et al. [KRA 94] pensent à la lumière de ces deux travaux, que ce pic peut trouver ses sources dans des mouvements complexes, dans lesquels interviennent à la fois les carbonyles à basse température et les phényles à haute température. Par ailleurs, grâce à une analyse par AMD Chen et Zachmann [CHE 91] affirment que ce mode est dû aux mouvements locaux des groupes –CH2, et que le groupe ester (–COO) connecté au noyau naphtalène ne peut pas contribuer à ce mode de relaxation. D’autres auteurs adhèrent à cette hypothèse [KOJ 82, VAN 00]. Cet accord semble naturel surtout lorsqu’on examine le travail réalisé par Dörlitz et Zachmann sur le PEN par Résonance Magnétique Nucléaire (RMN) [DÖR 97]. En effet, les auteurs ont mis en évidence une mobilité moléculaire des groupements éthylènes nettement supérieure dans le PEN comparativement à celle du PET. Or, un travail très récent de Wübbenhorst et al. [WÜB 01] par analyse diélectrique fait apparaître un résultat inattendu sur le PEN. Le mode β peut être remplacé par deux sous modes appelés δ1 et δ2, qui sont situés vers -100 et -60°C à 1.5Hz respectivement , uniquement lorsque le PEN est trempé à 25°C à partir du fondu avec une vitesse de 70°C/mn. Alors, ils calculent une énergie d’activation associée au mode δ aux alentours de 0,1 eV, qui est très inférieure à ce que nous avons trouvé pour le mode β (Eaβ>0.44eV). Ces auteurs estiment par la suite que cette valeur favorise un mouvement collectif de type ″vilebrequin″ des séquences –O–CH2–CH2–O–, logé dans un arrangement cristal liquide régulier créé par la trempe du PEN. Cette structure n’est sans doute pas une caractéristique de la morphologie de nos échantillons. Au vu de ces résultats, notre attribution va dans le même sens que celle retrouvée le plus souvent dans la littérature, et qui consiste à associer le mode β aux mouvements localisés des groupements esters –COO connectés de part et d’autre des noyaux naphtalènes le long de la chaîne [EZQ 93, AHU 96, BOI 98, KAR 00]. Ceci est justifié par la présence du groupement carbonyle qui permet à l’ensemble d’acquérir un moment dipolaire important [HAR 02]. Selon Salz et al. [SAL 81] l’intensité du moment dipolaire de ces dipôles RCOOR’ est légèrement insensible au caractère des groupes R et R’ si ceux-ci sont apolaires, et le moment 117 Chapitre V Discussion dipolaire est estimé dans ce cas à µ=1,89 D. Cette valeur est même utilisée par Guastavino et al. [GUA 99] pour calculer la concentration des groupes esters au travers de l’intensité de la relaxation β du PEN. 2.1.3. Corrélation entre le mode β et la microstructure du PEN : Nous avons exclu dans les paragraphes précédents une mobilité des groupes phényles corrélée avec les groupes esters. Ceci provient du fait que l’intensité du mode β est plus faible par analyse mécanique que par analyse diélectrique (cf. figure IV.6 et IV.18, p. 90 et 103). En effet, le volume de l’entité mobile associé au mode β n’est pas très étendu alors que cette entité possède un moment dipolaire très important. En outre, il est bien établi que la spectrométrie diélectrique à pour sonde le moment dipolaire de l’entité relaxante, alors que la spectrométrie mécanique est sensible au volume moléculaire déplacé par la même entité. L’augmentation de la cristallinité des échantillons de PEN influence la mobilité moléculaire (cf. figure IV.5-6, p.90), détectée par analyse diélectrique et associée au processus β, de la manière suivante : ¾ forte diminution de l’intensité de la relaxation, ¾ une décroissance des valeurs de la l’enthalpie et de l’entropie d’activation avec la durée de recuit. ¾ apparition d’un phénomène de compensation en fonction de la cristallinité. La microstructure du PEN semi-cristallin peut être considérée comme un puzzle complexe constitué à partir de trois phases : une phase cristalline, une phase amorphe dite mobile et une région intermédiaire associée à l’interphase amorphe-cristal, celle-ci est appelée phase amorphe rigide ou moins mobile, comme nous l’avons déjà exposé au chapitre III. Même si la phase amorphe rigide existe, sa proportion est très faible devant celle des phases amorphes ( f r − χ ≤ 4% , Tableau III.2, p.62). Pour des considérations de simplicité de l’analyse, nous négligerons par la suite la contribution de cette phase. Selon l’équation de Kirkwood-Fröhlich [KIR 39, FRÖ 58] l’intensité de la relaxation dans les matériaux à l’état solide est donnée par l’expression suivante : ∆ε ∝ N ⋅ g ⋅µ2 T 118 (V.1) Chapitre V Discussion où : N est la concentration des dipôles, µ le moment dipolaire effectif de l’unité mobile et g le facteur de corrélation. Ce dernier paramètre est égal à 1 en absence de corrélation d’orientation entre les dipôles mobiles et g≠1 pour des dipôles non isolés de l’environnement. Les processus de relaxation secondaires sont généralement associés à l’état amorphe des polymères [JOH 70], ainsi on peut considérer que les mouvements des petites entités relaxantes du mode β apparaissent préférentiellement au cœur des phases amorphes. Par conséquent la diminution de l’amplitude du mode β peut être attribuée principalement à la diminution du nombre d’entités relaxantes due à la concurrence des phases cristallines qui empêchent cette mobilité. L’enthalpie d’activation d’un mode de relaxation caractérise l’intensité des contraintes apportées par l’environnement sur le mouvement moléculaire. En revanche, l’environnement est constitué de tous les atomes entourant l’entité relaxante, dans les unités de répétition voisines ou dans d’autres chaînes. Les figures IV.11-12 (p.97) ont montré que la valeur de l’enthalpie d’activation est faible et que cette valeur présente une fine diminution en fonction de la durée de recuit ou de la cristallinité. On peut alors constater que l’analyse diélectrique nous a permis de sonder une mobilité localisée dans un environnement de moins en moins dense, ce qui engendre un découplage de l’entité mobile de son environnement. Ceci peut apparaître en contradiction avec l’accroissement de la densité globale du PEN après la cristallisation froide. En revanche, on peut considérer le PEN semi-cristallin comme étant un milieu hétérogène à cause de la fluctuation de densité créée par le cycle de cristallisation. En effet, la cristallisation induit la création de phases cristallines très denses et de phases amorphes avec une densité inférieure à celle des phases cristallines et éventuellement à celle des phases amorphes appartenant à un PEN totalement amorphe d’autre part, ce qui serait à l’origine de l’affaiblissement de l’enthalpie d’activation. Par ailleurs, les valeurs d’entropie d’activation du mode β sont très proches de zéro (figure IV.12). Sachant, que l’entropie permet de caractériser la modification de l’ordre local de l’environnement de l’entité mobile ; on peut envisager l’absence de modification de l’ordre local par le mouvement de l’entité relaxante impliquée qui forme un groupe de faible dimension (groupe ester). Il n’y a par conséquent aucune coopérativité entre l’entité relaxante sondée et les différentes entités voisines, qui constituent son propre ordre local, et ceci même dans un milieu hétérogène comme celui d’un PEN semi cristallin. 119 Chapitre V Discussion 2.2. Mode β* : 2.2.1. Loi de comportement et énergie d’activation : Le mode β* est observé par les deux techniques spectrométriques utilisées (cf. figure IV.6 et IV.18, p. 90 et 103). Même si ce mode est confondu avec le mode principal pour une fréquence supérieure à 1kHz, il a été possible de montrer que celui-ci manifeste une dépendance en température des temps de relaxation du type Arrhenius (cf. figure IV.9, p.94). Les valeurs des énergies d’activation apparentes du mode β* (Eaβ*), établies à partir de cette campagne de mesures, nous ont permis de mieux appréhender l’évolution de Eaβ* avec la cristallinité lorsque les mesures sont effectuées par analyse diélectrique (cf. tableau IV.3, p.95). Ceci est dû particulièrement à la gamme de fréquence très étendue associée aux mesures diélectriques (entre 1 et 105Hz). Cependant, on trouve que Eaβ* est comprise entre 1,73 et 1,32 eV par ADD, alors qu’elle est située entre 1,61 et 1 eV par AMD. Nous allons discuter cette évolution dans les paragraphes suivants. Ces résultats sont plus ou moins en accord avec les données de la bibliographie selon la technique de mesure utilisée (par ADD : Eaβ* =1,23 eV [BEL 96], 1,09 eV [CAÑ 99], 1,43 eV [NOG 00], 1,58 eV [HAR 01] ou encore 1,52 eV [WÜB 01] ; par AMD : Eaβ*=0,78 eV [VAN 00] ou entre 1,31-2,79 eV [HAR 01], et enfin des mesures par CST donne une valeur de 0,84eV [CAÑ 99]). Les valeurs du facteur préexponentiel sont étalées sur 7 décades entre 10-27 et 10-20s pour les deux techniques de mesure, des valeurs naturellement très inférieures à la valeur caractéristique des vibrations moléculaires (h/kBT~10-13s). Ceci est le signe d’une modification nette sur le facteur préexponentiel avec la température associée à une entropie additionnelle non négligeable. 2.2.2. Origine moléculaire de la relaxation β* Il est évident que l’énergie d’activation du mode β* est plus élevée que celle associée au mode β. Par conséquent, nous pouvons conclure que les mouvements responsables de ce mode sont ceux d’une entité dipolaire de plus grande dimension, dans un environnement plus perturbé par cette mobilité. Dans ces conditions, l’origine moléculaire de ce processus s’oriente naturellement vers un éventuel mouvement des noyaux naphtalènes. Une affirmation de cette hypothèse est venue de la part de Blundell [BLU 85], qui en réalisant des mesures par spectrométrie mécanique sur des co-polyesters contenant des proportions variables des groupements naphtyle/phényle, remarque que ce mode diminue en amplitude 120 Chapitre V Discussion lorsque la proportion des phényles augmente. C’est probablement la raison pour laquelle cette relaxation est inexistante dans le cas du PET [AHU 96]. Des mesures par RMN n’ont pas pu permettre de déceler des mouvements de rotation associés aux noyaux naphtalènes en dessous de la température de transition vitreuse [DÖR 97]. Ceci a été interprété par le fait que les fréquences utilisées dans les expérimentations RMN sont très élevées (∼1MHz). Ceci est tout à fait évident compte tenu de l’émergence du mode β* avec le mode principal α à partir d’une fréquence proche de 1kHz [EZQ 93]. A travers des mesures diélectriques, Bellomo et Lebey [BEL 96] associent le mode en question à des mouvements hors du plan du noyau naphtalène. Chen et Zachmann [CHE 91] estiment que les noyaux naphtalènes et les groupes esters sont à l’origine de ce pic β*. Ils notent en plus que cette relaxation est associée à une augmentation de la chaleur spécifique. Ceci est vrai en ce qui nous concerne, uniquement dans le cas du PEN amorphe de référence que est caractérisé, sur son thermogramme, par un large phénomène endothermique en dessous de Tg. Ce phénomène disparaît après le recuit du matériau à des températures supérieures à Tg (cf. figure III.1-2, p.50-51). Parallèlement, pour le PEN amorphe de référence en particulier, le pic β* est montré faiblement résolu (cf. figure IV.3, p.86), alors qu’il devient mieux représenté après le recuit à une température de 160°C (cf. figure IV.6, p.90). Récemment, Cañadas [CAÑ 99], en utilisant la technique de AMD à f=10Hz, a mis en évidence deux épaulements (vers 25 et 40°C) caractéristiques du PEN. Il conclut à l’existence de deux conformations possibles du naphtalène et des deux esters : trans et cis. En revanche, d’après Blundell [BLU 85] ce mode existe même lorsque aucun groupement ester n’est lié au noyau naphtalène. Pour cet auteur, un mode de relaxation similaire est observé grâce à la mobilité du naphtalène, lorsque celui-ci est lié aux atomes d’oxygène à travers des liaisons C–O autour desquelles le mouvement peut s’effectuer. Ceci a été confirmé par d’autres investigations [WAR 93]. Cependant, l’implication du groupement ester n’est sans doute pas négligeable pour ce processus. En effet, ce groupe permet au naphtalène d’adopter trois configurations possibles (trans α, trans β et cis) contrairement au phényle dans le PET (trans α et cis), comme nous l’avons présenté sur la figure I.14 (p.32). 121 Chapitre V Discussion D’après Van den Heuvel et Klop [VAN 00], et selon les considérations conformationnelles précédentes, plusieurs possibilités de transition sont théoriquement possibles : (trans α ⇔ trans β), (trans α ⇔ cis), (trans β ⇔ cis) et (cis⇔ cis). A travers une analyse approfondie de ces conformations, Van den Heuvel estime que les transitions trans α ⇔ cis et trans β ⇔ cis font appel à un grand changement conformationnel des unités monomères voisines dans la chaîne macromoléculaire, ce qui est peu probable au dessous de Tg. Par conséquent, la rotation du noyau à l’origine du mode β* peut être plutôt associée aux transitions : trans α ⇔ trans β et cis ⇔ cis, même si un ajustement conformationnel des monomères voisins est nécessaire. Cet ajustement n’est sans doute pas indispensable pour la mobilité du noyau phényle dans le cas du PET. En se fondant sur ces observations, on peut penser que les mesures par analyse diélectrique sont bruitées pour le PEN amorphe de référence, dans la gamme de températures du mode β*, à cause de la superpositions de ces deux transitions possibles qui peuvent accompagner le mode β*. Par ailleurs, après le recuit du PEN ce mode devient plus stable avec la présence d’un pic net et très large entre la température ambiante et Tg (cf. figure IV.6, p.90). Ceci implique une prépondérance de la transition cis ⇔ cis, étant donné que les conformations trans β sont moins stables, en accord avec les spectres d’absorption IRTF qui ne permettent pas d’identifier l’existence d’une proportion nette des conformations trans β (cf. figure III.1821, p.72-73) Nous pouvons conclure que le refroidissement du PEN amorphe lors du processus de mise en œuvre fait apparaître un gradient thermique responsable d’un champ de contraintes internes. Les macromolécules vont donc adopter des états d’énergie élevée qui les empêcheront d’atteindre une conformation d’équilibre même après des temps longs à la température ambiante. Le recuit du matériau peut donc faire disparaître ces états macromoléculaires à courtes distances qui permettent l’existence des conformations du type trans β, et qui donnent naissance à un épaulement supplémentaire dans le domaine de températures du processus β*. Evidement, d’autres conclusions peuvent exister dans la littérature qui sont plus ou moins en accord avec notre synthèse. Nous avons noté en particulier celle de Hardy et al. [HAR 01], qui associent le mode β* à une fluctuation moléculaire des agrégats des noyaux naphtalènes. Ces agrégats avaient été mis en évidence auparavant par Jones et al. [JON 99] en utilisant la technique de fluorescence. 122 Chapitre V Discussion 2.2.3. Corrélation entre le mode β* et la microstructure du PEN : Comme dans le cas du mode sous vitreux basse température, l’augmentation de la cristallinité des échantillons de PEN a une influence considérable sur la mobilité moléculaire du mode β* (cf. figure IV.5-6, p.90). En effet, sous l’action de l'accroissement de la cristallinité, nous avons remarqué une diminution de l’intensité du mode de relaxation β* ainsi qu’une décroissance de l’enthalpie d’activation et de l’entropie d’activation (cf. figure IV.11-12, p.97). Une forte décroissance de la mobilité de certaines chaînes macromoléculaires, à l’intérieur des phases cristallines, est sans doute la cause principale de la diminution de l’amplitude de ce mode. Ceci implique que les mouvements associés au mode β* ont lieu préférentiellement dans les phases amorphes. Par ailleurs, nous avons noté une diminution sigmoïdale de l’enthalpie et de l’entropie d’activation en fonction de la durée de recuit. Ceci caractérise la progression du processus de cristallisation des échantillons et montre que les deux modes de relaxation secondaires (β et β*) responsables de toutes les mobilités sous vitreuses ont un caractère fondamentalement différent. En effet, la gamme de températures où a lieu la relaxation ainsi que les niveaux de ∆H et ∆S sont plus élevés dans le cas du mode β*. Ceci est certainement associé à la taille des noyaux naphtalènes, qui sont plus volumineux que les groupes esters associés au mode β. D’un autre coté, lorsque la cristallinité augmente la diminution de l’enthalpie (∆H) est le signe de la diminution des sollicitations exercées par l’environnement sur l’entité relaxante. Cette entité se trouve alors dans un environnement de densité décroissante. Par ailleurs, l’entropie d’activation (∆S) qui a des valeurs non négligeables diminue aussi avec l’augmentation de la cristallinité, ce qui est le signe de l’affaiblissement de perturbation de l’entité relaxante sur l’ordre local de celle-ci. En plus de ces observations, nous avons montré que le paramètre ∆H est proportionnel à ∆S pour différentes morphologies, nous pouvons conclure que cette manifestation est le signe d’un phénomène de compensation très particulier, qui est activé par la cristallisation. Le phénomène de compensation est la conséquence d’une corrélation entre l’ordre local (∆S) et le niveau de contraintes que l’environnement exerce sur l’entité relaxante. Plus l’ordre local contraint l’entité (∆H croissant), plus il est modifié en retour par le mouvement de cette entité (∆S croissant). Ce phénomène est conditionné par la diminution du pourcentage de cristallinité. 123 Chapitre V Discussion Même si le processus s’effectue à des températures inférieures à la température de transition vitreuse (à partir de Tg-80°C à 1Hz), l’existence du β* met en évidence un certain niveau de coopérativité accentué par la diminution de la cristallinité, qui permet la propagation du mouvement sur des séquences de plus en plus longues. Ceci est en bon accord avec le critère de coopérativité de Starkweather [STA 81]. En revanche, nous ne pouvons pas affirmer que le niveau de coopérativité tend vers zéro lorsque les zones cristallines occupent la totalité du volume, ce qui est à notre connaissance impossible à vérifier du point de vu expérimental. Un niveau d’entropie d’activation proche de zéro ainsi qu’une plage de variation limitée des valeurs d’enthalpie d’activation font que l’amplitude des mouvements coopératifs est faible et confirme ainsi la nature localisée des mouvements associés au mode β. 124 Chapitre V Discussion 3. MODE DE RELAXATION PRINCIPALE α : 3.1. Loi de comportement et énergie d’activation : Dans le PEN, le mode de relaxation le plus intense est enregistré au voisinage de la température de transition vitreuse (cf. figure IV.1 et IV.16 ; p.85,101). Ce mode est le mode de relaxation principal α. La dépendance en température des temps de relaxation du mode α présente une courbure caractéristique du mode principal, qui peut être ajustée avec l’équation de VFT (cf. figure IV.4, p.87). Certains auteurs se sont aventurés à un calcul approximatif de la valeur de l’énergie d’activation apparente de ce mode (Eaα). On trouve dans les données bibliographiques plusieurs valeurs obtenues par spectrométrie diélectrique comme : 2,24 eV par Bellomo et al. [BEL 94], 3,45 eV par Becker et al. [BEC 01], 3,90 eV par Guastavino et al. [GUA 99], 4,73eV par Mayoux et al. [MAY 01], ou 5,64 eV ! d’après Kojima et al. [KOJ 82]. En utilisant la technique de CST, deux valeurs plus faibles sont avancées : 2,04 eV [CAÑ 99] ou 1,5 eV [CAÑ 00]. Ces résultats montrent une grande dispersion des valeurs de Eaα. Naturellement, la dépendance en température globale des temps de relaxation de ce mode ne peut pas être caractérisée par une loi de type Arrhenius. L’énergie d’activation apparente est dans ce cas une fonction décroissante de la température comme nous l’avons déjà montré sur la figure IV.14 (p.99). En effet, au voisinage de la température de transition vitreuse Eaα peut prendre des valeurs très élevées et même supérieures à l’énergie de la liaisons C–C, ce qui n’a aucune signification physique ou chimique. Ceci étant, nous somme conscients que le fait de donner des valeurs apparentes aux énergies d’activation intègre la notion de coopérativité sur la mobilité moléculaire. A cause de la complexité du mode principal, nous allons discuter de l’activation thermique de la mobilité associée à ce mode ultérieurement après regroupement d’un nombre important de paramètres pertinents à nos yeux pour cette analyse. 3.2. Origine moléculaire de la relaxation α Le thermogramme de l’AED de PEN est caractérisé par un saut endothermique de la chaleur spécifique, qui désigne la transition vitreuse du matériau, vers 125°C pour le PEN de référence par exemple (cf. figure III.1, p.50). 125 Chapitre V Discussion Dans la même gamme de températures le mode de relaxation principal α apparaît, ce qui permet d’associer ce mode à la manifestation diélectrique (par ADD), ou anélastique (par AMD), de la transition vitreuse. D’après Runt [RUN 97], une sollicitation avec une fréquence équivalente proche de 10-3Hz est nécessaire pour faire apparaître ce mode à la même température que la transition vitreuse, tout en respectant la vitesse de chauffe qui conditionne la valeur de Tg. Plusieurs auteurs s’accordent à attribuer le mode α à des mouvements micro-Browniens des segments de chaînes, qui proviennent d’un réarrangement conformationnel des chaînes macromoléculaires au sein des phases amorphes [ZOU 99, HAR 01]. 3.3. Corrélation entre le mode α et la microstructure du PEN : La mobilité moléculaire présente dans les phases amorphes d’un PEN semi cristallin dépend dans une première approximation du taux de cristallinité. Dans un PEN semi cristallin et pour des températures supérieures à la température de transition vitreuse, les chaînes des phases amorphes sont enfermées dans un espace restreint cadré par les cristallites. Cette restriction modifie entièrement le mode de relaxation α qui a eu lieu à des températures proches mais supérieures à Tg. L’existence des cristallites dans le PEN est reflétée sur la dynamique du mode principal, lorsque celle-ci est comparée avec celle du PEN amorphe (cf. figure IV.6 et IV.18 ; p.90,103), par les trois effets suivants : ¾ une décroissance de l’intensité de la relaxation, ¾ un changement de la forme du mode, puisqu’il devient plus large et très asymétrique, ¾ un déplacement du mode vers les hautes températures. La forte diminution de l’amplitude de la relaxation α dans les polymères semi cristallins résulte de la diminution de la fraction volumique de phase amorphe mais aussi d’un effet de renfort de cette phase amorphe par les cristallites qui diminue la capacité de mouvements moléculaires des chaînes dans la phase amorphe, même au dessus de Tg. La conséquence de ce renfort se manifeste essentiellement par l’immobilisation des chaînes amorphes grâce à leurs attachements avec les lamelles cristallines. L’ancrage des chaînes amorphes sur les phases cristallines produit un effet dit de réticulation physique [PER 92]. D'un autre côté, nous pouvons penser que les changements apportés à la forme du mode ainsi qu’à sa position en température, pour la même fréquence de sollicitation, sont liés 126 Chapitre V Discussion essentiellement à la proximité de la transition vitreuse (cf. figure IV.6, p.90). En effet, la valeur de Tg augmente avec la cristallinité, ce qui induit un effet similaire à l’augmentation de la fréquence sur la forme de ce mode (cf. figure IV.3, p.86). Dans ces conditions, il en découle que le taux de cristallinité ne soit pas le seul paramètre régissant la mobilité moléculaire associée au mode α, l’évolution de cette relaxation en température est contrainte aussi par la valeur de Tg. L’évolution de l’énergie d’activation apparente (Eaα), lorsque la température diminue, est une fonction croissante qui prend des valeurs importantes lorsque la température tend vers Tg (cf. figure IV.14, p.99). Ceci à été traduit par le caractère coopératif des mouvements moléculaires impliqués dans ce mode [ADA 65]. Pour interpréter l’augmentation de Eaα au voisinage de Tg, Adam et Gibbs [ADA 65] ont proposé un modèle dans lequel le système complexe (le volume du matériau) peut être décomposé en plusieurs domaines de coopérativité équivalents et indépendants (cf. chapitre I, p.21). Ces sous-systèmes sont appelés Régions de Réarrangement Coopératif ou CRR (Cooperatively Rearranging Regions). Les CRR sont constituées d’entités qui relaxent de manière coopérative. La taille de ces domaines est minimale à haute température (T>>Tg) et croit lorsque la température diminue vers Tg. A cette température la coopérativité du système est telle que les CRR occupent la totalité du volume et par conséquent le système se fige. Cependant, la taille de ces domaines coopératifs conditionne la taille des entités relaxantes. L’évolution des temps de relaxation correspond alors à la dynamique d’entités relaxantes de longueurs croissantes lorsque la température diminue, ce qui conduit au final à une loi de comportement du type VFT. De plus, nous avons remarqué sur la figure IV.14 (p.99) une nette augmentation de la valeur de Eaα lorsque la cristallinité augmente. Cette augmentation est beaucoup plus importante aux alentours de Tg. Ceci montre bien que la proximité de la transition vitreuse modifie l’allure de variation de Eaα. Pour pallier l’effet de cette proximité nous proposons de normaliser la température. Cela revient à tracer la variation de Eaα en fonction de T/Tréf, où Tréf est la température de référence. Cette température peut être considérée équivalente à Tg, ou encore à la température pour laquelle le temps de relaxation est unique (τ(Tréf)=10s selon les travaux de Nogales 127 Chapitre V Discussion [NOG 00]). Dans notre étude, nous avons choisi la deuxième considération qui nous permet de calculer les valeurs de Tréf regroupées dans le tableau V.1. Tableau V.1 : Température de référence ou de normalisation (Tréf) pour différentes valeurs de cristallinité. χ(%) 3 18 36 41 44 Tréf (°C) 117,21 117,54 119,83 124,36 127.93 La variation de Eaα en fonction de T/Tréf est présentée sur la figure V.1. Cette dernière montre que les courbes sont faiblement dispersées et présentent la même évolution en fonction de la température normalisée, et ceci quelque soit la valeur de la cristallinité du matériau. Il en découle que la nature coopérative du mode principal, liée à la dynamique de l’énergie d’activation apparente, semble être unique au dessus de la température de transition vitreuse indépendamment du taux de cristallinité initiale du matériau. 8 Mode α 7 ε"MAX 1Hz 3 10 Hz 5 10 Hz 6 Ea (eV) 5 4 3 2 1,00 χ=3% 18% 36% 41% 44% 1,02 1,04 1,06 1,08 1,10 1,12 T/Tréf Figure V.1 : Variation de l’énergie d’activation apparente en fonction de la température normalisée. Pour expliquer cette dynamique, nous avons tenté d’estimer la longueur caractéristique ξ relative à la dimension des régions de réarrangement coopératif (CRR), qui sont caractérisées par un temps de relaxation unique [RIC 93]. 128 Chapitre V Discussion A partir du thermogramme de l’analyse enthalpique différentielle du PEN (figure III.10, p.60), nous avons estimé la valeur de ξ autour de Tg selon la méthode de calcul utilisée par Donth et al. [HEM 00]. Suite au développement de ces données expérimentales concernant le PEN semi cristallin (χ=44%), nous avons trouvé que la valeur de ξPEN est proche de 2,7 nm. Cette valeur est plus élevée que celle estimée pour le PET (ξPET≈1,8 nm) par Schick et Nedbal [SCH 88]. Cette différence peut être liée à la taille du monomère de PEN qui est nettement supérieure à celle du PET (cf. figure I.12, p.29). A partir de ce résultat, le nombre nα qui est défini comme étant le nombre de monomères de PEN, qui forment le domaine CRR à proximité de Tg, est évalué à 68 monomères approximativement, sachant que : nα = ξ 3NAρ M (V.1) Où ρ est la densité du matériau (g.cm-3) M la masse molaire, et NA est le nombre d’Avogadro. Nous pensons que la théorie appliquée pour l’évaluation de ξ ne fait pas partie des objectifs de notre travail. Cependant, pour plus de détail le lecteur pourra consulter les hypothèses de travail et les approximations de calcul utilisées par Donth et al. [HEM 00] pour l’évaluation de la valeur de ξ et celle de nα. La taille des régions de réarrangement coopératif peut donc expliquer en grande partie l’indépendance de la dynamique du mode principal en fonction de la cristallinité pour des températures normalisées. En effet, selon les données du tableau I.2 (p.33), la distance interlamellaire est de l’ordre de 14nm pour une température de cristallisation inférieure à 200°C. Dans les conditions de cristallisation que nous avons adoptées pour cette analyse (Tr=160°C), la taille des CRR est nettement inférieure à l’épaisseur des phases amorphes mobiles, puisque le taux des phases amorphes rigides est négligeable. Donc, indépendamment de la présence des lamelles cristallines dans le PEN semi cristallin, la dynamique du mode α, conditionnée par l’évolution des domaines de coopérativité, reste inchangée pour des températures supérieures à Tg. 129 Chapitre V Discussion 3.4. Corrélation entre le mode α et les modes secondaires : Par analyse diélectrique dynamique, un phénomène de rapprochement des modes secondaires avec le mode principal α est observé pour des temps de relaxation très courts (cf. figure V.2). Le phénomène de bifurcation (ou ″merging″) est très visible pour le mode β* et conduit à la création d’un mode commun avec le mode α que l’on note αβ*. En accord avec plusieurs auteurs, le mode sous-vitreux haute température disparaît complètement sous le mode principal α pour des fréquences de sollicitation supérieures à 1kHz [EZQ 93, CAÑ 99, ZOU2 00, MAR2 01]. Dans ces conditions, le scénario de convergence le plus plausible est celui représenté sur la figure I.9.c (p.25), qui suggère la disparition du mode secondaire avant qu’il n’atteigne la trace continue formée par les modes α et (αβ*) [GAR 94]. L’extrapolation des courbes en pointillés (figure V.2), associées aux différentes lois de comportement, montre que le mode commun αβ* apparaît pour une température T* autour de 200°C et pour des temps de relaxation τ* compris entre 10-8 et 10-10s. 0 10 -100 T (°C) -50 0 50 β -2 10 β* 100 150 200250 α ρ -4 1x10 τ (s) -6 10 -8 10 χ=3% 18% 36% 41% 44% Tg -10 10 6,0 5,5 5,0 4,5 4,0 3 3,5 3,0 2,5 2,0 -1 10 /T(K ) Figure V.2 : Diagramme d’Arrhenius des différents processus de relaxation dans le PEN pour des valeurs croissantes de cristallinité. 130 Chapitre V Discussion Dans son étude par spectrométrie diélectrique sur le PET, Ménégotto [MEN2 99] trouve que les modes secondaire β et principal α du PET sont caractérisés par un phénomène de bifurcation à haute température pour des temps courts, ces observations présentent une grande similitude avec celles du PEN. Selon le modèle d’Adam et Gibbs, l’auteur interprète ce phénomène de la manière suivante : Pour des températures supérieures à la température de bifurcation (T*), le système présente un nombre (N) très faible de domaines coopératifs de taille minimale ξ=ξmin. Lorsque la température est abaissée en restant supérieure à T*, le nombre N des domaines coopératifs augmente jusqu'à ce que la totalité du système soit occupée par des petits domaines de taille semblable ξmin, le nombre de domaines est par conséquent maximum à cette température : N(T*)=Nmax. A T*, il y a bifurcation des modes β* et α. En effet, lorsque la température est abaissée en dessous de T*, un phénomène de coalescence se produit entre ces domaines, ce qui conduit à l’augmentation de la taille des domaines (ξ>ξmin) et la diminution de leur nombre (N<Nmax). Le mode α se sépare alors du mode β* et on observe un comportement de type VFT pour le mode α caractéristique de l’augmentation de la taille des domaines coopératifs, qui occupent la totalité du système à Tg et le système devient alors figé. Une interprétation similaire peut expliquer l’évolution du mode commun αβ* et les deux modes α et β* en fonction de la température. On peut même considérer une origine moléculaire commune des deux modes α et β*. En effet, la coopérativité limitée du mode secondaire β* est la conséquence de l’établissement des mouvements moléculaires dans des domaines de coopérativité de taille ξmin, et ceci même en dessous de T*, contrairement au mode α. Cette coopérativité limitée, sur une gamme de températures inférieures à Tg, confère au mode β* un comportement de type Arrhenius. L’effet de la cristallinité sur le phénomène de bifurcation est vague, essentiellement à cause d’une évolution complexe des valeurs de τ* et T*. D’autre part, l’interprétation moléculaire du phénomène de bifurcation qui reste hypothétique ne tient pas compte des transitions de phase dans le matériau, comme par exemple le phénomène de cristallisation froide détecté par analyse diélectrique autour de 170°C (cf. figure IV.2, p.85). Enfin, le mode commun αβ, dont nous ne pouvons pas affirmer l’existence, ne sera pas discuté dans ce travail à cause de l’absence convergence des deux modes α et β à haute température. 131 Chapitre V Discussion 4. PROCESSUS DE RELAXATION ρ : Même si les attributions des modes secondaire et primaire ont été plus ou moins identifiées, le quatrième mode (noté ρ) qui est décelé par plusieurs techniques, reste un sujet de contradiction. Comme source d’ambiguïté on peut citer : la nomenclature du phénomène, la préparation du matériau et des échantillons ou encore les considérations pratiques d’expérimentation. En utilisant la technique des courants stimulés thermiquement et pour des températures de polarisation des échantillons supérieures à Tg, le processus ρ est détecté sur des échantillons de PEN par Cañadas et al. [CAÑ 99]. Ils attribuent ce processus à la fois au dépiégeage de charges électriques, ou à un effet lié à la charge d’espace dans un autre travail [CAÑ 00]. Le processus ρ a également été mis en évidence par analyse diélectrique [ZOU 00, MAR 01], ou l’influence de la cristallinité sur les résultats d’observation a été traitée. Cependant, un aspect non électrique du processus a été signalé par Aoki et al. [AOK 99], qui ont examiné le PET et le PEN ainsi que leurs copolymères en utilisant l’analyse mécanique dynamique. L’objectif de cette partie de la discussion est de montrer et d’analyser les deux aspects électrique et non électrique du processus ρ. 4.1. Influence de la température : Les pics de pertes diélectriques représentatifs des modes de relaxation β, β* et α sont caractérisés par une augmentation de la partie réelle de permittivité complexe (ε*) lorsque la température augmente. Par rapport à une relaxation diélectrique au sens de Debye [DEB 29], une telle observation donne une évidence d’une perte d’énergie due à une orientation dipolaire classique. Par contre, le pic de perte ρ est caractérisé par une décroissance de permittivité avec la température (cf. figure IV.1, p.85). Par conséquent, ce phénomène ne peut pas être associé à une relaxation diélectrique classique. L’influence de la température sur ce processus à été prise en compte sur la partie imaginaire de la permittivité à travers l’expression IV.4 (p.110). Celle-ci montre que la température affecte considérablement la forme finale du pic (cf. figure IV.25, p.111). Ainsi il a été nécessaire d’associer deux lois en puissance pour décrire l’asymétrie, en fonction de la température, du pic ρ qui est centré autour d’une température To. Par ailleurs, la température centrale du pic (To) est équivalente à la température du pic de cristallisation froide enregistré par AED (cf. figure IV.20, p.106), ce qui implique que la forme finale du pic est liée d’une 132 Chapitre V Discussion manière ou d’une autre à la cinétique de cristallisation non isotherme du PEN, qui ne fait pas partie de notre étude. 4.2. Influence de la fréquence : Sur le module de dissipation E″, le pic ρ est faiblement résolu et peu influencé par la gamme de fréquences de l’étude (cf. figure IV.27, p.112). Par contre, l’expression IV.4 (p.110) montre que l’amplitude du pic ρ sur le spectre ε″ est inversement proportionnelle à la fréquence, ceci a été montré sur la figure IV.26 (p.112) en traçant l’évolution du produit (ε″-ε″σ)⋅f. Lorsqu’on assume ce type de proportionnalité entre le facteur de perte et la fréquence 1 ( ε"∝ ), comme dans le cas de l’effet de la conductivité ohmique, alors la relaxation doit f avoir une origine non dipolaire. D’un autre coté, une mobilité de charge à l’origine de ce pic ne peut pas expliquer la décroissance enregistrée sur la permittivité réelle, puisque sans proportionnalité entre ε′ et ε″ seuls les mouvements dipolaires peuvent contribuer à ε′. Ceci montre bien le caractère complexe des processus impliqués. 4.3. Influence de la cristallinité : L’augmentation du taux de cristallinité provoque une diminution de l’amplitude du processus ρ. La valeur de cristallinité seuil, qui empêche ce processus d’être détecté, est celle à partir de laquelle apparaît le deuxième petit pic endothermique de fusion en analyse enthalpique différentielle (cf. figure III.10, p.60). De plus, dans un travail récent, Hardy et al. [HAR 01] ont signalé un résultat similaire par ADD et AMD pour le PEN amorphe ou semi cristallin (cristallisé à partir du fondu). En revanche, dans une autre investigation par une caractérisation diélectrique isotherme du PET, Neagu et al. [NEA 96] observent un pic associé à la relaxation ρ à basse fréquence pour un PET hautement cristallin. Ils ont supposé que ce pic, qui se déplace vers les hautes températures, implique un transport de charges électriques à travers des distances macroscopiques, qui peuvent être reliées à un changement morphologique, qui suit la transition vitreuse, des chaînes de PET orientées [NEA 97]. En analysant le PET et le PEN par CST, Cañadas et al. [CAÑ2 00] montrent que le pic ρ associé à la relaxation des charges libres s’amplifie et se déplace vers les hautes températures 133 Chapitre V Discussion avec la cristallinité. Par contre, ce pic passe par un maximum avec la présence du petit pic endothermique de fusion, signalé précédemment, avant de décroître par la suite. Ces résultats montrent l’ambiguïté apportée par la technique de mesure, par la méthode de préparation du matériau et par la nomenclature du phénomène associé au pic étiqueté ρ. 4.4. Corrélation entre les mesures diélectriques et les mesures mécaniques : Il est très important dans cette partie de la discussion de combiner les deux techniques spectrométriques utilisées. En effet, chaque technique examine le même processus de relaxation avec une sensibilité propre à la méthode [IVA 98]. Par analyse diélectrique, la signature est gouvernée par l’intensité du moment dipolaire de l’entité mobile impliquée, en revanche la signature par analyse mécanique est sensible au volume déplacé par la même entité mobile. Concernant le mode α, le passage par la transition vitreuse induit des mouvements moléculaires micro-Browniennes des segments de chaîne particulièrement dans la phase amorphe, l’énergie d’activation du mode diminue fortement. Par conséquent, en accord avec la nature de la contrainte appliquée, le pic de perte est accompagné par une marche positive en température sur la partie réelle de la permittivité complexe ou par une marche négative sur le module de conservation. Indépendamment de la technique utilisée, la température du mode α se déplace vers les hautes températures lorsque la cristallinité augmente. Lorsque la cristallisation dynamique froide prend naissance, une diminution sur ε′ et une augmentation sur E′ sont enregistrées. De ce fait, le processus ρ qui est associé à la cristallisation froide peut être gouverné par deux aspects : électrique et non électrique. Une telle origine bimodale pourrait être la source de l’ambiguïté notée dans la littérature. Ainsi, le processus ρ doit être considéré comme une sorte d’anti-relaxation primaire étant donné que la cristallisation froide affaiblie l’amplitude du mode α. De plus, le processus ρ, induit par les mouvements des segments de chaînes macromoléculaires, dévoile une mobilité de charges électriques évidement affectée par le changement de la mobilité moléculaire suite au processus de cristallisation froide. 134 CONCLUSION GENERALE Conclusion Générale CONCLUSION GENERALE Les travaux présentés s’inscrivent dans le cadre général de l’étude des propriétés des matériaux organiques solides destinés à être utilisés dans le domaine du génie électrique en tant que diélectrique. Un intérêt particulier a été porté au poly (éthylène naphthalène-2,6dicaroxylate) qui est un candidat potentiel pour succéder à d’autres matériaux largement utilisés dans les condensateurs miniaturisés en particulier. Les objectifs de ce travail ont été focalisés sur la compréhension de l’influence des changements morphologiques et conformationnels sur les propriétés diélectriques du matériau au travers de l’étude de la mobilité moléculaire de celui-ci. Pour atteindre nos objectifs nous avons combiné plusieurs techniques de caractérisation. Nous avons choisi l’analyse enthalpique différentielle et la spectrométrie infrarouge pour une caractérisation physicochimique, et l’analyse diélectrique et mécanique dynamique pour caractériser la mobilité moléculaire du matériau. D’une manière générale, nous pouvons dresser ici un bilan des principales conclusions dégagées au fil des chapitres : • En ce qui concerne la microstructure du PEN, nous avons mis au point un cycle thermique de cristallisation qui assure la reproductibilité de la structure des nos échantillons pour permettre ensuite une bonne corrélation entre les différentes techniques de caractérisation. En effet, à partir de l’état vitreux du PEN des recuits à des températures comprises entre 150 et 190°C permettent d’obtenir d’une façon maîtrisée une cristallisation froide du matériau. • L’étude de la cristallisation isotherme totale et partielle par analyse enthalpique différentielle nous a permis de quantifier l’existence d’une proportion négligeable de phases amorphes rigides. Par ailleurs, le comportement de double fusion dans le PEN est une caractéristique de la cristallisation complète du matériau, et de l’effet mémoire qui peut être provoqué par le recuit. Cet effet se traduit par le développement d’une deuxième population de lamelles dont l’épaisseur est une fonction croissante de la température et du temps de recuit. • Parallèlement à l’analyse enthalpique différentielle, une analyse par spectrométrie infrarouge du PEN amorphe et semi cristallin nous a permis de réaliser une synthèse de l’attribution des pics d’absorption. Dans un second temps, nous avons montré que le cycle 135 Conclusion Générale thermique de cristallisation donne plutôt naissance à des réseaux cristallins de forme α. D'autre part, l’étude quantitative de quelques bandes montre bien la complémentarité de cette technique avec l’analyse enthalpique différentielle, puisque le processus de cristallisation induit une augmentation nette des conformations trans. • Concernant l’étude de la mobilité moléculaire du PEN, nous avons montré par analyse dynamique diélectrique et mécanique que ce matériau est caractérisé par quatre processus de relaxations: β, β*, α et ρ dans le sens croissant de la température. Le mode de relaxation β a été attribué aux mouvements localisés des groupes ester. La relaxation dénommée β* a été associée aux mouvements du noyau naphtalène, à des températures inférieures à la température de transition vitreuse ; ces mouvements modifient partiellement l’ordre local de l’entité. La relaxation haute température appelée relaxation α résulte des mouvements micro browniens et coopératifs des segments de chaîne induits par un réarrangement conformationnel de séquences de la chaîne. Cette relaxation est associée à la manifestation diélectrique et anélastique de la transition vitreuse. Enfin, un processus de relaxation (ρ) a été identifié dans une structure susceptible de cristalliser. Les mécanismes associés au phénomène de cristallisation froide sont directement à l’origine de ce processus. C’est une transition qui provoque une réorganisation des chaînes macromoléculaires, ce qui induit une mobilité de charges électriques stockées dans le matériau suite à l’opération de mise en œuvre. Des mesures complémentaires en utilisant l’analyse mécanique dynamique ont confirmé les résultats obtenus par l’analyse diélectrique. • L’extrapolation des lois de comportement du mode secondaire β* et du mode primaire α a mis en évidence l’existence d’un mode commun (αβ*). Ce phénomène a été interprété en se basant sur le concept d’Adam et Gibbs. Les régions de réarrangement coopératif (CRR), qui sont statistiquement distribuées dans le volume à haute température, augmentent en nombre en conservant leur taille dans le sens décroissant de la température jusqu'à la température de bifurcation. A partir de cette température, l’augmentation de la taille des CRR provoque la séparation de ces deux modes, à cause du phénomène de coalescence entre les CRR qui ont la même origine moléculaire. Cette augmentation continue jusqu'à Tg où le système se fige et où l’énergie d’activation apparente du mode principal α prend des valeurs très élevées. 136 Conclusion Générale • L’augmentation de la cristallinité induit un changement net sur l’énergie d’activation apparente des différents modes de relaxation. La décroissance de cette énergie pour le mode β a été associée à la diminution de la densité locale des phases amorphes dans un PEN semi cristallin. Pour le mode β*, nous avons souligné une dépendance linéaire entre l’enthalpie et l’entropie d’activation apparente en fonction de la cristallinité, ce qui est dû à la diminution du niveau de coopérativité avec l’augmentation du taux de cristallinité. Dans un référentiel de températures normalisées, nous avons montré que les CRR sont fortement indépendantes du taux de cristallinité du PEN puisque leurs tailles sont toujours inférieures à l’épaisseur des phases amorphes mobiles. • Cette étude nous a permis de mettre en évidence les potentialités du choix technologique qui consiste à utiliser un PEN semi cristallin dans certaines applications en génie électrique, et en particulier comme diélectrique destiné à la fabrication des condensateurs. En effet, par rapport à une structure amorphe, une structure semi cristalline voit sa réponse électrique changer radicalement. On enregistre des pertes électriques plus faibles, par conséquent les paliers de permittivité relative sont moins accentués. De plus, le pic associé à la transition vitreuse se déplace vers les hautes températures, ce qui favorise l’augmentation de la gamme de température où le matériau affiche une variation faible de la permittivité, ce qui est un atout pour les condensateurs à base de film par rapport aux condensateurs céramiques qui ont un facteur ∆C/C très élevés. Comme perspectives à ce travail, il nous paraît important de développer les points suivants : • Observer l’influence de la température de cristallisation isotherme et des paramètres de la cristallisation non isotherme sur la mobilité moléculaire de PEN. • Etudier l’effet isolé de l’orientation, ou l’effet combiné avec le recuit, des films de PEN sur sa morphologie ainsi que sur sa mobilité moléculaire. • Approfondir la caractérisation du matériau par d’autres techniques qui n’ont pas fait partie de notre étude, telles que l’observation par microscopie à lumière polarisée et/ou par la méthode de diffraction des rayons X. • Etudier le vieillissement sous contraintes multiples et en particulier celui associé à l’application d’une contrainte électrique. Ceci permettra d’améliorer les conclusions sur ce sujet et d’appuyer le choix technologique de l’utilisation de PEN dans le domaine du génie électrique. 137 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES [ADA 65] G. Adam, J. H. 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Dans un premier temps une étude physico-chimique a été entreprise pour montrer que l’évolution de la structure physique du PEN, ayant subi une cristallisation froide isotherme, passe par quatre étapes clés à partir du mécanisme de nucléation jusqu’à celui du perfectionnement. La deuxième partie concerne l’influence de la microstructure sur les caractéristiques de la mobilité moléculaire du PEN. Cette mobilité est caractérisée par la présence de quatre processus de relaxation : β, β*, α et ρ, dans le sens croissant des températures. Il a été possible de montrer que le comportement associé aux deux modes secondaires β, β* est fondamentalement différent en fonction de la morphologie. Dans un référentiel bien choisi, qui tient compte de la proximité de la température de transition vitreuse, la dynamique de la relaxation principale α reste peu perturbée par l’augmentation de la cristallinité du matériau. La similitude entre les relaxations β* et α a été associée à un phénomène de bifurcation à hautes températures. Enfin, durant la cristallisation froide du PEN et sous un champ électrique faible (<<1MV/m), un déplacement de charges piégées activé par la réorganisation des chaînes est mis en évidence. MOTS-CLES PEN, Mobilité moléculaire, Relaxation, Microstructure, Condensateurs. TITLE STUDY OF THE MOLECULAR MOBILITY OF PEN USED FOR CAPACITOR MANUFACTURING: INFLUENCE OF MICROSTRUCTURE. ABSTRACT The aim of this work is to understand the influence of morphological and conformational changes on the dielectric properties of Poly(Ethylene Naphthalene-2,6-dicarboxylate) (PEN), which is used for capacitor manufacturing, through the study of its molecular mobility. The development of a thermal treatment has allowed the acquisition of the desired material structures. Initially, a physicochemical study was undertaken to show that evolution of physical structure of PEN, having undergone an isothermal cold crystallization, passes by four key stages starting from nucleation mechanism to that of improvement. The second part relates to the influence of microstructure on its molecular mobility characteristics. This mobility is characterized by the presence of four relaxation processes: β, β*, α and ρ, in the increasing order of temperature. It was possible to show that the behaviour associated with the secondary relaxations β and β* differed basically depending on morphology. In a quite selected referential, the dynamics of the principal relaxation α remains hardly perturbed by increasing crystallinity. The similarity between β* and α has been associated with a merging phenomenon at high temperatures. Finally, during cold crystallization of PEN and under a weak electric field (<<1MV/m), a displacement of trapped charges activated by the reorganization of macromolecular chains is highlighted. KEY WORDS PEN, Molecular mobility, Relaxation, Microstructure, Capacitors.