Effets du feu sur les personnes

Transcription

Effets du feu sur les personnes
Document LNE : G020284 / C672X01 / CEMATE/1
Effets du feu sur les personnes
Synthèse bibliographique - Juillet 2006
Eric GUILLAUME
Responsable des activités Transports, Meubles Rembourrés, Toxicité et
Ingénierie de la Sécurité Incendie,
Division Comportement au Feu,
Centre Energie, Matériaux, Emballage (CEMATE),
Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE)
Remerciements
Nous tenons à remercier le service de documentation du LNE, et particulièrement Mme Poirot
pour toutes ses recherches. L’équipe de la division Comportement au Feu du LNE, et
particulièrement Laurent Saragoza qui a fortement contribué, par ses lectures et avis, à
l’élaboration de ce document. Merci encore à Laurent pour son rôle de premier relecteur. Sa
lecture approfondie et ses commentaires ont été fort utiles à la structure du document.
Merci à Arvin Chaturvedi et Hervé Bazin pour leurs contributions personnelles. Les avis de
David Purser, Gordon Hartzell, Juergen Pauluhn, Richard Gann et Loïc Chesné ont aussi été
profitables et ont permis de construire le document le plus complet possible.
Enfin, nous tenons à remercier tous les relecteurs, en particulier Franck Didieux du LNE,
Daniel Joyeux et Yannick Le Tallec du CTICM, Philippe Fromy du CSTB pour leurs avis et
le temps passé à étudier un tel document.
Effets du feu sur les personnes
Page 2/163
Table des matières
1
Introduction..........................................................................................................................4
2
Généralités ...........................................................................................................................5
2.1
Effets du feu et stades de développement ....................................................................5
2.2
Effets psychologiques et physiologiques de l’exposition au feu ....................................7
2.3
Statistiques relatives à l’effet du feu sur les personnes.................................................9
2.4
Références ..................................................................................................................40
3
Effets du flashover sur le changement de régime de feu..............................................42
3.1
Introduction..................................................................................................................42
3.2
Définition du flashover et critère d’atteinte...................................................................42
3.3
Critères de flashover....................................................................................................44
3.4
Effet du flashover sur les personnes ...........................................................................47
3.5
Références ..................................................................................................................48
4
Risques liés à la perte de visibilité durant l’évacuation ................................................49
4.1
Symboles et définitions................................................................................................49
4.2
Intérêt de la détermination de la visibilité des fumées .................................................49
4.3
Approche théorique de la production de fumées .........................................................50
4.4
Evaluation de la quantité de fumée .............................................................................53
4.5
Modèles de visibilité ....................................................................................................58
4.6
Utilisation de l’évaluation de l’opacité des fumées en France .....................................62
4.7
Conclusions sur les modèles de visibilité ....................................................................64
4.8
Références ..................................................................................................................64
5
Effets thermiques du feu sur les personnes...................................................................66
5.1
Généralités ..................................................................................................................66
5.2
Flux thermique radiatif incident....................................................................................67
5.3
Température ................................................................................................................69
5.4
Dose thermique globale...............................................................................................72
5.5
Utilisation de l’évaluation de l’effet thermique sur les personnes en France ...............73
5.6
Références ..................................................................................................................74
6
Effets toxiques des effluents du feu................................................................................76
6.1
Définitions ....................................................................................................................76
6.2
Le danger lié à la toxicité des fumées .........................................................................78
6.3
Les espèces toxiques à considérer .............................................................................82
6.4
Les méthodes d’analyse des fumées ..........................................................................97
6.5
Critères d’exposition ..................................................................................................103
6.6
Modèles de toxicité aiguë ..........................................................................................113
6.7
Effet toxique à long terme..........................................................................................123
6.8
Utilisation de l’évaluation de la toxicité des fumées en France .................................123
6.9
Références ................................................................................................................127
7
Autres effets du feu sur les personnes .........................................................................132
7.1
Risque d’anoxie .........................................................................................................132
7.2
Risque lié aux particules présentes dans les fumées................................................133
7.3
Références ................................................................................................................142
8
Modélisation de l’effet du feu sur les personnes .........................................................144
8.1
Généralités ................................................................................................................144
8.2
Modélisation des différents effets du feu ...................................................................146
8.3
Perspectives et limitations .........................................................................................152
8.4
Références ................................................................................................................157
Effets du feu sur les personnes
Page 3/163
1 Introduction
Le premier objectif des études d’ingénierie de sécurité incendie est la préservation des
personnes. Cet objectif consiste à évaluer les risques induits par le feu sur les personnes
avoisinantes d’une part en terme d’incapacitation, ce qui sous-entend la préservation de la
capacité des personnes à évacuer les lieux d’un sinistre par leurs propres moyens, mais aussi
en termes de létalité.
Les risques liés au feu sur les personnes exposées sont principalement de trois natures :
-
La perte de visibilité : elle retarde l’évacuation, désoriente les foules et peut les
exposer plus longtemps ou de manière plus importante aux autres effets ;
Les risques thermiques liés au feu et aux fumées : ils peuvent entraîner l’incapacitation
ou une létalité au sein des populations. Ils sont liés au flux thermique et à la
température ;
Les risques toxiques du feu : ils sont liés aux espèces chimiques présentes dans les
fumées, et sont les plus importants. Ils sont incapacitants ou létaux, parfois à des
distances considérables des foyers.
A ces facteurs s’ajoute le risque de développement rapide et incontrôlable du feu par
flashover. Le risque pour les personnes dépend alors des trois critères sus-cités, mais le
principal danger vient de l’étape rapide que constitue le flashover dans l’incendie.
D’autres effets sur les personnes peuvent s’ajouter, comme l’anoxie liée au manque
d’oxygène et les risques d’étouffement liés à la présence de particules de suies.
Les différents paragraphes qui suivent présentent l’état de l’art des connaissances dans le
domaine. Ces travaux ont été réalisés dans le cadre de l’action 17 « Sécurité des personnes,
comportement humain » du Projet National Ingénierie de la Sécurité Incendie. Du fait de
l’importance de ces travaux pour la communauté scientifique française et du financement
alloué par le Projet National pour sa réalisation, le Laboratoire national de métrologie et
d’essais a complété et approfondi le travail sur financement propre de sa fiche R&D 199
« Ingénierie de la sécurité incendie ».
Effets du feu sur les personnes
Page 4/163
2 Généralités
2.1
Effets du feu et stades de développement
Les effets d’un feu dépendent de son état de développement. Les risques présentés dans
l’introduction sont donc fortement corrélés avec le stade de développement du feu. Les feux
peuvent être classés en quatre catégories :
•
•
•
•
Les feux couvant ou sans flammes.
Les feux bien ventilés avec des flammes importantes.
Les feux mal ventilés.
Les feux post-flashover.
Note : Ces catégories diffèrent légèrement de celles présentées dans la norme
ISO TS 19706 : 2004 : Lignes directrices pour l'évaluation des dangers du feu pour
les personnes. En particulier, dans cette spécification technique, les deux dernières
catégories sont groupées.
2.1.1
Les feux sans flammes
Les feux sans flammes se produisent si les conditions de ventilation sont insuffisantes, la
combustion des matériaux étant incomplète. La fumée dégagée contient alors de nombreux
composés organiques et irritants [2]. Les observations suivantes peuvent être faites :
• Une très faible quantité de matériau décomposé peut causer des effets sévères sur
les personnes. Par exemple, une exposition pendant une heure à des gaz de pyrolyse
présents sous les seuils olfactifs peut conduire à une inflammation pulmonaire, ainsi
qu’à une intoxication sévère au monoxyde de carbone.
• Chaque année, les feux couvant font de nombreuses victimes. Le décès est
consécutif à une longue exposition aux gaz de combustion sans que la victime ait
pu en prendre conscience.
• La décomposition des matériaux en milieu sous-oxygéné est souvent très lente. Un
délai significatif peut s’écouler avant qu’une concentration gazeuse dangereuse soit
atteinte.
• Ce sont les personnes endormies qui encourent le plus grand risque. Elles sont tout
d’abord intoxiquées par le monoxyde de carbone, les gaz irritants provoquant
ensuite de sérieux dommages pulmonaires.
2.1.2
Les feux en cours de développement
Pour de tels feux les conditions de décomposition, particulièrement le rapport air/carburant,
sont primordiaux et vont déterminer la quantité de gaz toxiques dégagée. A ce stade, les
principaux dangers sont la température et le monoxyde de carbone puisque la quantité de
fumée opaque et de gaz irritants est généralement faible, bien que variable en fonction du
combustible considéré. Si le feu devient important, la température s’élève et la quantité d’air
nécessaire à l’entretien d’une combustion complète devient rapidement insuffisante. La
chimie de la combustion s’en trouve alors modifiée et de nouvelles espèces gazeuses peuvent
Effets du feu sur les personnes
Page 5/163
être formées ou la répartition de celles-ci peut évoluer fortement. Le feu est contrôlé par la
pyrolyse, puis s’oriente vers un régime conditionné par la ventilation.
Dans le cas d’un feu se déclarant dans un local représentatif d’une pièce d’habitation,
renfermant un fauteuil constitué de polystyrène et de polyéthylène, les événements suivants
sont ceux de la référence [2] :
•
•
•
•
•
2.1.3
Dès la troisième minute, la quantité de fumée présente entrave sérieusement
l’évacuation du fait de l’obscurcissement et de la sensation d’irritation.
Durant la quatrième minute, la température atteint 220°C. Les personnes ressentent
des brûlures sur la peau pouvant conduire à une incapacitation.
A la cinquième minute, les gaz narcotiques provoquent une perte de connaissance.
Le seuil de douleur due à la chaleur est atteint.
Une personne exposée pendant plus de quatre minutes souffrira de brûlures de la
peau et du larynx. Le décès pourra être du à l’apparition d’un œdème pulmonaire.
Une personne exposée plus de six minutes, ne survivra pas plus d’une heure après
son évacuation.
Les feux mal ventilés
A ce stade, la combustion est conditionnée par les conditions de ventilation. La référence [2]
présente un exemple d’effet de feu mal ventilé dans une pièce close. Dans ce cas, le taux
d’oxygène dans l’air diminue très rapidement. Au-delà d’une minute, il ne permet plus une
combustion complète, et une fumée dense, riche en monoxyde de carbone (CO) et autres
produits toxiques se dégage. L’atmosphère devient rapidement mortelle [2]. Le décès de deux
personnes a ainsi été constaté seulement quelques minutes après le début d’un petit feu
survenant dans une pièce close. Une analyse de sang a mis en évidence une dose de
carboxyhémoglobine correspondant à seulement 50% de la dose létale admise. La conclusion
tirée est que le décès est survenu suite à un manque d’oxygène. Des essais ont montré que la
combustion d’un rideau de 500 g dans un local était à même de produire une atmosphère
contenant 10 % d’oxygène et 1 % de CO, potentiellement létale en quelques minutes [2].
Les revêtements muraux peuvent contribuer à la propagation du feu en dégageant des produits
très toxiques, responsables d’une atteinte irréversible de la santé des occupants. Ainsi, lors de
l’incendie survenu en 1989 à Manchester suite à un accident d’avion, une analyse du sang des
victimes a montré que leur décès était imputable au chlorure d’hydrogène produit par la
combustion du PVC, utilisé dans de nombreux revêtements [2].
Effets du feu sur les personnes
Page 6/163
2.1.4
Les feux post-flashover
De tels feux conduisent aux désastres majeurs et font de nombreuses victimes. Un feu postflashover est pleinement développé et sa vitesse de combustion et sa puissance dégagée sont
élevées. Ainsi, la température atteint 1000 °C et la quantité de fumée dégagée est importante.
Ce type de feu peut conduire à l’envahissement rapide d’un immeuble par la fumée.
Dans le cas d’une mauvaise ventilation, l’incendie consomme rapidement tout l’oxygène de
l’air. Une atmosphère pauvre en oxygène, riche en CO et éventuellement en HCN se forme et
se répand. Ces conditions réduisent considérablement les chances de fuite des occupants.
Les feux post-flashover dégagent donc une fumée dense et hautement toxique qui se répand
rapidement dans tout le local. C’est elle qui est responsable de la plupart des décès.
2.2
2.2.1
Effets psychologiques et physiologiques de l’exposition au feu
Généralités
En plus de toutes les incapacités préexistantes au sein des populations, les effets
physiologiques et psychologiques liés à l'
exposition aux effluents du feu peuvent affecter de
manière significative la capacité des occupants à prendre les décisions efficaces pour
accomplir leur propre évacuation ou pour se protéger.
2.2.2
Effets psychologiques
Le déclenchement de l’évacuation est lié à la perception par les occupants de leur capacité de
tenabilité et aux diverses lignes de conduite possibles. La décision d’évacuer ou non, et le
choix d’un chemin d’évacuation impliquent la perception par les personnes des risques relatifs
inhérents à chacune des décisions possibles.
Cette perception est elle-même influencée par une combinaison de la vue de la fumée, du feu,
de la sensation de la chaleur, de l'
irritation oculaire et de la région supérieure de l’appareil
respiratoire. De façon générale, il est difficile d’évaluer quantitativement les effets
psychologiques d'
une exposition au feu et fumées. De plus, leur effet principal conditionne le
temps requis pour l’évacuation.
Effets du feu sur les personnes
Page 7/163
2.2.3
Effets physiologiques
Les effets psychologiques sont liés à des effets physiologiques qui peuvent avoir une
influence sur la capacité physique des occupants à évacuer. La perte de visibilité par la fumée
affecte la capacité des occupants à repérer et à évaluer efficacement leur situation par rapport
aux sorties de secours. Certaines études expérimentales ont ainsi montré l’effet de la densité
de fumées sur la vitesse de déplacement et la capacité de mouvement.
Les effets physiologiques résultant de l’exposition aux effluents gazeux produits lors d’un
incendie peuvent conduire à différents degrés d’atteintes irréversibles sur la santé, voire au
décès. Ces effets sont les suivants :
• Diminution de l’acuité visuelle à cause de l’opacité de la fumée, de ses effets
irritants et de la chaleur intense ;
• Brûlures cutanées par convection ou par rayonnement (flux thermique) ;
• Difficulté à respirer pouvant entraîner divers degrés de détresse respiratoire, voire
conduire à l’asphyxie ; (effets thermiques directs, paragraphe 5.3.1, colmatage des
alvéoles par les suies, paragraphe 7.2) ;
• Perte de connaissance provoquée par l’inhalation des gaz toxiques.
D’autres effets peuvent être considérés, comme le risque d’anoxie induit par le manque
d’oxygène, ou l’effet de colmatage des alvéoles pulmonaires par les suies.
Les considérations majeures à prendre en compte pour évaluer les dangers physiologiques
sont les suivantes :
• Le temps nécessaire à une atteinte irréversible sur la santé entraînant un retard dans
l’évacuation ;
• Le temps nécessaire pour que l’atteinte irréversible sur la santé empêche
l’évacuation ;
• Le temps nécessaire à l’apparition d’une atteinte chronique, ou même pour
provoquer le décès.
L'
irritation des régions de l’appareil respiratoire aggrave souvent les effets dus à la perte de
visibilité en affectant la vitesse de mouvement, la capacité à respirer efficacement, et la
capacité à choisir des sorties de secours. L'
exposition aux agents toxiques asphyxiants
provoque principalement une dépression du système nerveux central, dont les effets se
traduisent par un jugement altéré, une désorientation, la perte de coordination motrice et
l’inconscience. Pris conjointement, ces effets affectent le temps disponible et le temps requis
pour l’évacuation.
Effets du feu sur les personnes
Page 8/163
2.3
2.3.1
Statistiques relatives à l’effet du feu sur les personnes
Statistiques globales en France
2.3.1.1 Généralités
Origine
98 113 incendies d'
habitation domestique ont nécessité l'
intervention des sapeurs pompiers en
2003 [4]. Ils ont pour départ : les locaux vide ordure (29%), souvent par malveillance, les
chambres à coucher (sources du fumeur) (23%), les salles de séjour (21%), la cuisine (20%).
Parmi ces sources, le défaut électrique représente environ le quart des départs de feux.
Coût humain
Parmi les 460 victimes recensées en 2003 (486 en 2002), 20 % des décès sont imputables à
des barbecues allumés ou ravivés avec du White-Spirit ou de l’alcool.
Coût économique
260 000 sinistres sont enregistrés par les assureurs, pour un coût moyen de 5 025 euros. Le
coût total des incendies domestiques s’élève à environ 1,3 milliards d’euros soit un coût
supérieur de 160 % à celui engendré par le vol et de 30 % à celui provoqué par les dégâts des
eaux.
2.3.1.2 Feux en milieu industriel
Les statistiques de la CNAMTS [1] indiquent le nombre d’incendies ayant entraîné des
accidents de personnes en milieu industriel pour 2001 :
-
Les incendies en milieu industriel ont concerné 2 accidents sur 10 000 et 2 décès
sur 730. Le taux de décès est de 0,27 %
-
Le nombre de jours d’incapacité temporaire imputables aux incendies a été de
5483, soit 0,02 %. Celui des taux d’incapacité permanente a représenté 0,06 %.
Les incapacitations ayant eu des effets pouvant contrecarrer une évacuation et
ayant engendré des jours d’interruption de travail est donc de 0,08 %.
Ces chiffres montrent une prévalence faible des incendies graves dans l’industrie. Néanmoins,
les conséquences sont parfois très importantes : là où l’incendie ne représente que 0,08 %
d’incapacités cumulées, il représente 0,27 % des décès.
Les statistiques de la base ARIA du Bureau d’analyse des risques et pollutions industrielles
(BARPI) [3] indiquent que l’incendie est la cause principale d’accident industriel. Il représente
58 % des 2022 accidents recensés en 2003.
Effets du feu sur les personnes
Page 9/163
2.3.1.3 Feux en milieu domestique (habitation)
En milieu domestique, l’incendie représente en France 10 000 victimes chaque année, dont
460 décès [4]. Un incendie se déclare toutes les 2 minutes, 1 sur 4 du fait d’une installation
électrique défectueuse. Ces chiffres correspondent à un taux de mortalité de 0,8 pour 100 000
et un taux d’incapacitation de 16 pour 100 000.
La FNSPF [4] indique de plus que la majorité des incendies se déclare la journée, mais que la
majorité des décès survient la nuit, du fait de la détection retardée et de l’état de veille
(sommeil) des personnes. En 2003, il y a eu en France 98 113 incendies d’habitation.
Le taux de victimes du feu, ayant eu des dommages même temporaires est donc de 10 %. Le
taux de létalité est de 0,46 % dans les incendies domestiques. Ces chiffres sont bien plus
importants que dans le domaine industriel.
2.3.2
Localisation des sinistres et populations concernées en France
2.3.2.1 Bases de données INVS et INSERM
Le taux de mortalité1 par le feu en France est dans la moyenne haute européenne, d’après
l’Institut de veille sanitaire [5]. Pour 100 000 personnes, en 1999, ce taux est présenté cidessous par pays :
Taux de mortalité du au feu pour 100000 habitants pour 1999
0.8
.
0.7
Taux de mortalité
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0.0
Pays-Bas
Italie
Allemagne
Grande
Bretagne
Suède
France
Portugal
Figure 1 : Taux de mortalité pour 100000 habitants en Europe - 1999
1
Taux de mortalité : nombre de décès pour une population totale donnée. Ici, le taux de 0,7 pour 100 000
habitants signifie donc que 7 décès sont imputables au feu en France par tranche de 1 million d’habitants.
Effets du feu sur les personnes
Page 10/163
L’analyse détaillée de ces chiffres montre que près de la moitié des décès est survenue dans la
tranche d’âge de 15 à 64 ans. Il n’y a donc pas de surmortalité apparente en nombre chez les
jeunes enfants et les personnes âgées, bien que celles-ci soient plus sensibles. Ce phénomène
est vraisemblablement lié à une exposition plus importante des classes d’âge intermédiaires.
La référence [5] précise que tout âge confondu, une surmortalité masculine est observée et le
sex-ratio est de 1,5. Cette surmortalité masculine atteint même 2,3 dans la tranche d’âge 15-64
ans.
Bien que les causes ne soient pas spécifiées, il semble que les hommes aient tendance à plus
s’exposer (par exemple en tentant d’éteindre les feux) et à être plus exposés du fait de leur
taille en moyenne supérieure (le visage et la tête se trouvant plus exposés aux fumées). La
référence [19] montre qu’en situation d’incendie, 70 % des hommes cherchent à intervenir sur
le feu contre 33 % des femmes. Cette différence peut expliquer le déséquilibre homme/femme
observé, celles-ci s’exposant beaucoup moins que les hommes.
La répartition des victimes par tranche d’âge est présentée ci-dessous et dans les figures
suivantes :
Décès
0-14 ans
15-64 ans
65 ans et plus
Total
1982
77
334
291
702
1990
64
278
237
579
1999
39
224
197
460
Taux*
0-14 ans
15-64 ans
65 ans et plus
Total
1982
0,7
0,9
3,9
1,3
1990
0,6
0,7
2,9
1,0
1999
0,4
0,6
2,1
0,7
* : pour 100000 habitants
Tableau 1 : Répartition des victimes par tranche d'âge - 1982 - 1999
En taux pour 100 000 habitants, les classes de 65 ans et plus sont plus fortement touchées par
la mortalité en cas d’incendie. Le taux de mortalité a baissé fortement dans toutes les tranches
d’âge depuis 1982. Il est passé globalement de 1,3 à 0,7 décès pour 100 000 habitants durant
cette période.
Effets du feu sur les personnes
Page 11/163
Evolution du nombre de décès liés à l'incendie en France
.
1982
800
1990
Nombre de décès
700
1999
600
500
400
300
200
100
0
0-14 ans
15-64 ans
65 ans et plus
Total
Années
Figure 2 : Evolution du nombre de décès liés à l'incendie en France - 1982 - 1999
Effets du feu sur les personnes
Page 12/163
Evolution du nombre de décès liés à l'incendie en France
..
1982
Taux pour 100 000 habitants
4.5
1990
4.0
1999
3.5
3.0
2.5
2.0
1.5
1.0
0.5
0.0
0-14 ans
15-64 ans
65 ans et plus
Total
Années
Figure 3 : Evolution du taux de décès liés à l'incendie en France - 1982 – 1999
Effets du feu sur les personnes
Page 13/163
Les accidents provoqués par le feu sont référencés sous les codes X00 à X10 dans les codes
CIM10 de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) [8] et de la direction générale de la
santé. (Dans la précédente classification CIM9, ils étaient inscrits sous les codes E890 à
E899). Ces codes sont ceux précisés dans les certificats de décès des personnes en France.
L’interrogation des données du CepiDC [6] [7] permet de préciser ces données par localisation,
sexe et par tranches d’âge. Ces statistiques sont très fiables, du fait de leur origine.
Les codes CIM10 sont composés de 3 caractères principaux indiquant l’exposition des
personnes, suivies d’un quatrième précisant l’origine. Le caractère additionnel n’a pas été
étudié dans le présent document. Il inclut le type d’établissement concerné. Les tableaux de
synthèse des données du CepiDC sont présentés ci-dessous pour l’année 2002 :
Correspondance2
Code CIM
Total
Homme
Femme
X00 :
Exposition à un feu incontrôlé dans un bâtiment ou une structure.
(incendie d’habitation,…)
110
65
45
X01 :
Exposition à un feu incontrôlé à l’extérieur des bâtiments ou
structure (feux de forêt,…)
1
1
0
X02 :
Exposition à un feu contrôlé en bâtiment ou structure
(chaudière,…)
6
4
2
X03 :
Exposition à un feu contrôlé à l’extérieur des bâtiments ou
structures (feux de camp,…)
2
1
1
X04 :
Exposition à des matériaux facilement inflammables (feux de
gasoil, essence,…)
1
0
1
X05 :
Exposition suite à l’inflammation des habits de nuit
0
0
0
X06 :
Exposition suite à l’inflammation d’autres vêtements
1
1
0
X08 :
Exposition à d’autres sources de feu, fumée ou flammes
0
0
0
X09 :
Exposition indéterminée au feu
365
221
144
486
293
193
Total victimes du feu (2002)
Tableau 2 : Décès en France, d’après la numérotation OMS
Dans l’analyse des données, il s’avère que de nombreux enregistrements de décès liés au feu
ne précisent pas le type d’exposition (code X09). Dans les cas où l’exposition est précisée, le
décès est principalement liée aux feux incontrôlés (incendies), en particulier dans les
habitations (code X01). Hors cas non précisés, ceux-ci représentent plus de 90 % des décès.
Le Sex-ratio3 total est de 1,5. Les données pour le code X00 (feux incontrôlés en bâtiment) et
les taux de mortalité due au feu par rapport au nombre de décès sont présentés pour le code
X00 dans les figures suivantes.
2
Ces catégories sont celles reprises par l’OMS. Structure désigne tout environnement construit (entrepôts…)
Le sex-ratio indique le rapport entre le nombre de personnes de sexe masculin et féminin considérés. Un sexratio supérieur à 1 indique une prévalence masculine.
3
Effets du feu sur les personnes
Page 14/163
.
Mortalité - code CIM X00
Femmes
30
Hommes
Nombre de décès
25
20
15
10
5
0
<1
'
1-4
'
5-14
'
1524
'
2534
'
3544
'
4554
'
5564
'
6574
'
7584
'
8594
'
95+
Tranche d'âge
Figure 4 : Nombre de décès par tranche d’âge et par sexe – France, 2002
Effets du feu sur les personnes
Page 15/163
.
Taux de décès - code CIM X00
Femmes
Hommes
par rapport au nombre total de décès
Taux de décès dus au feu,
1.40%
1.20%
1.00%
0.80%
0.60%
0.40%
0.20%
0.00%
<1
'
1-4
'
5-14 '
15-24 '
25-34 '
35-44 '
45-54 '
55-64 '
65-74 '
75-84 '
85-94
'
95+
Tranche d'âge
Figure 5 : Taux de décès par tranche d’âge et par sexe – France, 2002
Effets du feu sur les personnes
Page 16/163
Ces données montrent que les jeunes enfants présentent une susceptibilité particulièrement
importante à cette cause de décès. Les enfants de sexe masculin, et d’âge inférieur à 4 ans sont
particulièrement concernés. Ces phénomènes sont principalement liés à l’effet du feu sur les
enfants, et en particulier des gaz toxiques, dont les effets sont détaillés au paragraphe 6.
2.3.2.2 Bases de données des SDIS (Hors BSPP et BMPM)
Selon la source [10], les statistiques des pompiers, hors BSPP4 et BMPM5, sont reprises cidessous pour 1999. Ce tableau ne recense pas toutes les données existantes de tous les
départements, mais seulement celles collectées dans la référence [10].
Décès
Blessés graves6
Blessés légers
Etablissements recevant du public
19
8,9 %
18
3,6 %
207
6,1 %
Habitations et bureaux
147
69,0 %
315
62,5 %
1945
57,0 %
Locaux industriels
2
0,9 %
24
4,8 %
151
4,4 %
Entrepôts et docks
1
0,5 %
6
1,2 %
35
1,0 %
Véhicules
33
15,5 %
50
9,9 %
297
8,7 %
Feux de forêt et de broussailles
8
3,8 %
21
4,2 %
91
2,7 %
Feux de cheminées
3
1,4 %
70
13,9 %
687
20,1 %
Total
213
504
3413
3917
Tableau 3 : Localisation des décès liés à l’incendie en France, 1999
Le total pour la France entière est de 460 décès. L’ajout des données de la BSPP et du BMPM
ne suffit pas à compléter ce total. Les données présentées ci-dessus ne sont donc pas
complètes pour l’ensemble du territoire national et ne fournissent qu’une indication de la
répartition des types de sinistres rencontrés.
Tant pour les décès que pour les blessés graves, il s’avère que les deux tiers des victimes sont
touchées dans le domaine de l’habitation et des bureaux hors ERP. La seconde prévalence
correspond aux incendies de véhicules. Ces données sont représentées graphiquement
ci-après.
4
BSPP : Brigade des Sapeurs Pompiers de Paris, départements 75, 92, 93 et 94
BMPM : Bataillon des Marins Pompiers de Marseille
6
Les blessés graves sont ceux ayant été hospitalisés pour au-moins une nuit. Les blessés légers ont été traités par
les pompiers sans hospitalisation
5
Effets du feu sur les personnes
Page 17/163
Répartition des décès - France - 1999 (hors BSPP et BMPM)
Feux de forêt et de
broussailles
4%
Feux de cheminées
1%
Etablissements
recevant du public
9%
Véhicules
15%
Entrepôts et docks
0%
Locaux industriels
1%
Habitations et bureaux
70%
Figure 6 : Localisation des décès liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM)
Effets du feu sur les personnes
Page 18/163
Répartition des blessés graves - France - 1999
(hors BSPP et BMPM)
Etablissements
recevant du public
4%
Feux de cheminées
14%
Feux de forêt et de
broussailles
4%
Véhicules
10%
Habitations et bureaux
62%
Entrepôts et docks
1%
Locaux industriels
5%
Figure 7 : Localisation des blessés graves liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM)
Effets du feu sur les personnes
Page 19/163
Répartition des blessés totaux - France - 1999
(hors BSPP et BMPM)
Etablissements
recevant du public
6%
Feux de cheminées
19%
Feux de forêt et de
broussailles
3%
Habitations et bureaux
58%
Véhicules
9%
Entrepôts et docks
1%
Locaux industriels
4%
Figure 8 : Localisation des blessés liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM)
Effets du feu sur les personnes
Page 20/163
2.3.2.3 Informations de la Permanence Générale du LCPP
La permanence générale du Laboratoire Central de la Préfecture de Police de Paris dispose
d’une base de donnée dans laquelle les victimes (décès et blessés emmenés à l’hôpital) sont
recensées sur les incendies pour lesquels ils interviennent, sur Paris et les départements 92, 93
et 94. L’interrogation de la base [17] au 27 avril 2006 est présentée ci-dessous pour les blessés
(ici, personnes ayant été conduites à l’hôpital lors de l’intervention des pompiers) et les
décès :
Table des blessés
Nature de l’affaire
Attentat par engin incendiaire
Attentat (autres et non classés)
Déversement
Incendie de bâtiment
Incendie de cave
Incendie de véhicule
Incendie (autres et non classés)
Total
Année
2003
0
1
4
84
0
5
66
160
2004
1
3
7
54
0
2
104
171
2005
0
0
0
117
4
5
55
181
20067
0
0
2
13
0
1
32
48
Total
En nombre
1
4
13
268
4
13
257
560
En %
0,2%
0,7%
2,3%
47,9%
0,7%
2,3%
45,9%
-
Tableau 4 : Base de la Permanence générale du LCPP : statistiques des blessés
Table des décès
Nature de l’affaire
Attentat par engin incendiaire
Attentat (autres et non classés)
Déversement
Incendie de bâtiment
Incendie de cave
Incendie de véhicule
Incendie (autres et non classés)
Total
Année
2003
0
1
3
31
1
1
31
68
2004
0
2
1
27
0
0
31
61
2005
0
1
0
69
1
1
43
115
20068
0
0
0
9
1
0
9
19
Total
En nombre
0
4
4
136
3
2
114
263
En %
0,0%
1,5%
1,5%
51,7%
1,1%
0,8%
43,3%
-
Tableau 5 : Base de la Permanence Générale du LCPP : statistiques des décès
Naturellement, les affaires considérées ne représentent pas l’ensemble des affaires pour la
zone couverte par la BSPP, mais uniquement celles ayant conduit à une intervention du
LCPP, en général du fait de suspicion d’acte de malveillance ou de procédure judiciaire. Ces
éléments donnent néanmoins quelques indications. Les incendies criminels avérés ne
représentent que 3,2 % des blessés et 3 % des décès.
La grande majorité des victimes se retrouve dans les bâtiments. Enfin, en proportion, les feux
de véhicules semblent faire plus de blessés que de décès, mais les valeurs sont statistiquement
insuffisantes pour conclure de manière satisfaisante.
7
8
Statistique au 27 avril 2006.
Statistique au 27 avril 2006.
Effets du feu sur les personnes
Page 21/163
2.3.3
Données étrangères : Statistiques du Canada
Le Canada dispose de sources intéressantes. Bien que ces statistiques canadiennes soient
intéressantes car très détaillées, elles ne sont pas nécessairement directement transposables
dans le contexte européen. Néanmoins, elles présentent la manière de collecter les données.
Dans la référence [9], pour 771 incendies étudiés en 1997, le nombre de décès est de 25 (16
adultes et 9 enfants), soit une moyenne de 1 décès pour 31 incendies. Le nombre de lésions
traumatiques est de 45 (38 adultes et 7 enfants). Le taux de décès observé dans cette étude est
de 3,2 % par incendie étudié. Le taux d’incapacitation est de 5,8 % par incendie déclaré.
Le rapport annuel des pertes causées par l’incendie au Canada, présenté dans la référence
[11], donne pour l’année 2000 les informations suivantes :
Un total de 53 720 incendies a été rapporté, pour 327 décès et 2 490 blessures, et un montant
de pertes matérielles s'
élevant à 1 185 233 793 dollars canadiens (environ 850 millions
d’euros).
Le taux de décès9 par incendie est donc de 0,6 % par incendie et le taux d’incapacitation10
de 4,6 %. Le secteur de l'
habitation est le plus touché par les incendies. En 2000, on y a
enregistré 21 206 incendies, soit 39 % du nombre total d'
incendies signalés au Canada. Ces
incendies ont entraîné 243 décès, soit environ 74 % des décès accidentels causés par
l'
incendie dans le pays. Ce chiffre est à comparer aux deux tiers environ obtenus en France.
Cela représente un taux de décès de 1,1 %, ce qui est bien plus élevé que la moyenne. On
meurt donc plus dans les feux d’habitation que dans les autres types de sinistres. Quant aux
pertes matérielles, elles se sont élevées à 529 millions de dollars canadiens (380 millions
d’euros), soit 45 % de la valeur totale des pertes. En comparaison, ces incendies d’habitation
ont donc le plus lourd tribut humain, mais pas nécessairement la plus forte incidence
économique.
9
Le taux de décès représente le nombre de victimes de la cause considéré sur le nombre total de décès, à la
différence du taux de mortalité, qui considère le nombre total d’habitants.
10
Le taux d’incapacitation représente le nombre de jours d’incapacités liés à une cause sur le nombre total de
jours d’incapacité, toutes causes confondues.
Effets du feu sur les personnes
Page 22/163
Les détails sont repris dans le tableau et les graphiques suivants :
Incendies
Type de propriété
Nombre
%
Bâtiment résidentiel
21 206
39,48
Lieu de rassemblement
1 656
Etablissement public
Etablissement d’affaire
Blessés
Pertes
(% du total)
Décès
Nombre
%
Nombre
%
44,68
1 676
67,31
243
74,31
3,08
5,30
62
2,49
2
0,61
462
0,86
0,31
98
3,94
7
2,14
588
1,09
2,41
23
0,92
0
0,00
Bâtiment commercial
1 436
2,67
9,02
81
3,25
3
0,92
Usine, atelier de fabrication
1 385
2,58
9,96
164
6,59
0
0,00
Bâtiment d’entreposage
1 314
2,45
5,18
58
2,33
6
1,83
Matériel de transport et
propriétés spéciales
19 126
35,60
11,58
203
8,15
34
10,40
Propriétés diverses
6 547
10,58
8,48
125
5,02
32
9,79
Total
53 720
100
100
2 490
100
327
100
Tableau 6 : Localisation des décès et blessés liés à l’incendie au Canada, 2000
Note : Dans les références étudiées, les propriétés définies dans le tableau ne sont pas
expliquées et diffèrent vraisemblablement du contexte français.
Effets du feu sur les personnes
Page 23/163
Répartition des incendies par nombre - Canada, 2000
Total = 53 720 incendies
Propriétés diverses
12%
Bâtiment résidentiel
39%
Matériel de transport
et propriétés
spéciales
36%
Lieu de
rassemblement
3%
Bâtiment
d’entreposage
2%
Etablissement public
1%
Usine, atelier de
fabrication
3%
Bâtiment commercial
3%
Etablissement
d’affaire
1%
Figure 9 : Répartition des incendies par nombre et localisation, Canada, 2000
Effets du feu sur les personnes
Page 24/163
Répartition des incendies par pertes - Canada, 2000
Propriétés diverses
11%
Bâtiment résidentiel
40%
Matériel de transport
et propriétés
spéciales
36%
Bâtiment
d’entreposage
2%
Lieu de
rassemblement
3%
Etablissement public
1%
Usine, atelier de
fabrication
3%
Bâtiment commercial
3%
Etablissement
d’affaire
1%
Figure 10 : Répartition des incendies par pertes, Canada, 2000
Effets du feu sur les personnes
Page 25/163
Répartition des incendies par blessés - Canada, 2000
Total = 2490 blessés
Matériel de transport et
propriétés spéciales
8%
Propriétés diverses
5%
Bâtiment d’entreposage
2%
Usine, atelier de
fabrication
7%
Bâtiment commercial
3%
Etablissement d’affaire
1%
Bâtiment résidentiel
68%
Etablissement public
4%
Lieu de rassemblement
2%
Figure 11 : Répartition des incendies par nombre de blessés, Canada, 2000
Effets du feu sur les personnes
Page 26/163
Les détails du secteur résidentiel sont présentés ci-dessous :
Incendies
Type de bâtiment
Pertes (%)
Nombre de
blessés
Nombre de
décès
Nombre
%
9350
44.1%
51.4%
778
124
3 338
15.7%
11.6%
451
42
163
0.8%
0.7%
29
0
238
1.1%
1.6%
7
0
Auberge routière, motel
66
0.3%
0.1%
5
0
Dortoir
53
0.2%
0.2%
5
0
Maison mobile, caravane,
roulotte
638
3.0%
2.5%
38
12
0
0.0%
0.0%
0
0
Divers
7 360
34.7%
31.8%
363
65
Total
21 206
100.0%
100.0%
1 676
243
Logement pour une ou deux
familles
Appartement, logement,
maison en rangée
Maison à louer, pension,
maison de chambre
Hôtel, auberge, établissement
de villégiature
Campement (usage saisonnier)
Tableau 7 : Localisation des décès et blessés liés à l’incendie au Canada, 2000, détails
secteur résidentiel
D’autre part, ce document présente les variations du nombre de blessés et de décès depuis les
dix dernières années. Les figures ci-après représentent ces différents éléments.
Une baisse statistique des blessés et décès est observée depuis une dizaine d’années.
Ramenées à la population, des données comparables pour l’année 1999, issues de la
référence [12] permettent d’établir les statistiques suivantes : Le taux d’incendies est de
l’ordre de 180 pour 100 000 habitants en 1999. Il était de près de 360 pour 100 000 habitants
en 1980. Dans la même période, le taux de mortalité par l’incendie pour 100 000 habitants est
passé de plus de 2,5 à moins de 1 (rappel : 0,7 pour la France en 1999). Le taux de blessés est
de l’ordre de 5 pour 100 000 habitants.
Par type de logement, la fréquence et les effets des incendies sont les plus importants pour les
logements d’habitation. Les décès et les blessures liés à l’incendie sont 11 à 12 fois plus
nombreux dans les maisons de chambres et d’hébergement que dans les maisons familiales.
Les décès survenant dans les incendies de mobil-home sont six fois plus importants que dans
les maisons familiales.
De plus, les décès lors d’incendies en milieu rural s’avère plus important, de 1,5 à 4,3 fois
plus que dans les zones urbaines. Le milieu rural est un facteur aggravant du fait des sources
et de la distance des secours.
Effets du feu sur les personnes
Page 27/163
Incendies de bâtiments résidentiels
Répartition par nombre selon le type de logement
Canada, 2000
Divers
35%
Logement pour une ou
deux familles
44%
Campement (usage
saisonnier)
0%
Maison mobile, caravane,
roulotte
3%
Dortoir
0%
Auberge routière, motel
0%
Hôtel, auberge,
établissement de
villégiature
1%
Maison à louer, pension,
maison de chambre
1%
Appartement, logement,
maison en rangée
16%
Figure 12 : Répartition des incendies par nombre et localisation, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels
Effets du feu sur les personnes
Page 28/163
Campement (usage
saisonnier)
0%
Incendies de bâtiments résidentiels
Répartition par blessés selon le type de logement
Canada, 2000
Divers
22%
Maison mobile, caravane,
roulotte
2%
Dortoir
0%
Auberge routière, motel
0%
Logement pour une ou
deux familles
47%
Hôtel, auberge,
établissement de
villégiature
0%
Maison à louer, pension,
maison de chambre
2%
Appartement, logement,
maison en rangée
27%
Figure 13 : Répartition des incendies par nombre de blessés, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels
Effets du feu sur les personnes
Page 29/163
Incendies de bâtiments résidentiels
Répartition par décès selon le type de logement
Canada, 2000
Divers
26.7%
Campement (usage
saisonnier)
0.0%
Logement pour une ou
deux familles
51.0%
Maison mobile, caravane,
roulotte
4.9%
Dortoir
0.0%
Auberge routière, motel
0.0%
Hôtel, auberge,
établissement de
villégiature
0.0%
Maison à louer, pension,
maison de chambre
0.0%
Appartement, logement,
maison en rangée
17.3%
Figure 14 : Répartition des incendies par nombre de décès, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels
Effets du feu sur les personnes
Page 30/163
Evolution du nombre de blessés et de décès sur 10 ans, Canada
450
4000
400
3500
350
3000
300
2500
250
2000
200
Blessés
1500
150
Décès
1000
100
500
50
0
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
.
Nombre de décès
Nombre de blessés
.
4500
0
2000
Figure 15 : Répartition du nombre de blessés et de décès liés à l’incendie, Canada, 1991 - 2000
Effets du feu sur les personnes
Page 31/163
2.3.4
Causes des décès et des incapacitations
2.3.4.1 Causes des décès liés au feu
Très peu de données sont disponibles quant aux causes de ces décès, en particulier s’ils sont
liés à des effets thermiques ou plutôt à une intoxication, et dans ce dernier cas, quelle en était
la cause. Aucune donnée spécifique à la France n’a ainsi été obtenue, l’origine de ces données
provenant principalement de sources anglo-saxonnes.
Les experts de la référence [13] s’accordent pour estimer que les décès par inhalation
d’espèces toxiques dans le feu interviennent dans environ les deux tiers aux trois quarts des
cas. Dans ces cas d’intoxication létale, 90% des décès seraient liés presque exclusivement à
CO et HCN.
Levin [14] apporte des précisions intéressantes. En 1990, 76% des décès dans le feu seraient
imputables à l’inhalation de gaz toxiques [15]. Ce pourcentage a subi une croissance de 1% par
an de 1979 à 1990.
Ainsi, bien que le nombre total de décès liés au feu diminue partout en Europe et en Amérique
du nord, le pourcentage attribué aux fumées augmente [16].
Les statistiques compilées par Hall [15] sont présentées ci-dessous :
Année
Décès
totaux
Inhalation
fumée
Brûlure
Autres
1979
5998
3515
2262
221
1980
5822
3515
2079
228
1981
5697
3501
2048
148
1982
5210
3396
1683
130
1983
5039
3245
1654
140
1984
5022
3277
1625
121
1985
4952
3311
1498
143
1986
4835
3328
1415
92
1987
4710
3307
1301
102
1988
4965
3480
1378
106
1989
4723
3308
1311
103
1990
4181
2986
1138
57
Tableau 8 : Causes de décès selon Hall, USA, 1979-1990
Effets du feu sur les personnes
Page 32/163
Evolution des causes de décès selon Hall, 1979-1990, USA
Nombre de victimes
.
7000
6000
5000
Autres
4000
Brûlure
3000
Inhalation fumée
2000
1000
0
1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990
Années
Figure 16 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en nombre de victimes, USA, 1979-1990
Effets du feu sur les personnes
Page 33/163
Evolution des causes de décès selon Hall, 1979-1990, USA
100%
Propoortion (%)
.
90%
80%
70%
60%
Autres
50%
Brûlure
40%
Inhalation fumée
30%
20%
10%
0%
1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990
Années
Figure 17 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en proportion, USA, 1979-1990
Effets du feu sur les personnes
Page 34/163
Les détails des décès ayant eu lieu dans les bâtiments sont présentés ci-après :
Année
Total
Inhalation
de fumées
Brûlure
Causes
inconnues
Autres
causes
1979
4926
3136
1499
93
198
1980
4801
3164
1347
84
206
1981
4710
3163
1320
95
132
1982
4371
3082
1070
103
116
1983
4136
2909
1026
77
124
1984
4185
2962
1037
79
107
1985
4159
3003
958
70
128
1986
4112
3016
944
71
81
1987
4012
3021
834
66
91
1988
4206
3189
875
47
95
1989
4008
3055
809
51
93
1990
3607
2755
730
72
50
Tableau 9 : Causes de décès selon Hall, USA, 1979-1990, détails pour les bâtiments
Effets du feu sur les personnes
Page 35/163
Evolution des causes de décès selon Hall, feux de structures,
1979-1990, USA
Nombre de victimes
.
6000
5000
4000
Autres causes
Causes inconnues
3000
Brûlure
Inhalation de fumées
2000
1000
0
1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990
Années
Figure 18 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en nombre, USA, 1979-1990, détails pour les bâtiments
Effets du feu sur les personnes
Page 36/163
Evolution des causes de décès selon Hall, feux de structures,
1979-1990, USA
100%
Proportion (%)
.
90%
80%
70%
Autres causes
60%
Causes inconnues
50%
Brûlure
40%
Inhalation de fumées
30%
20%
10%
0%
1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990
Années
Figure 19 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en proportion, USA, 1979-1990, détails pour les bâtiments
Effets du feu sur les personnes
Page 37/163
L’analyse détaillée de ces statistiques montre que, bien que le nombre total de décès ne cesse
de diminuer, la part imputable à l’inhalation de fumées croit. Cette part est bien plus
importante dans les feux de bâtiments que dans les autres feux. En résumé, on meurt plus par
inhalation de gaz toxiques dans les bâtiments et par brûlure dans les autres feux. La plupart
des victimes décédées par inhalation de la fumée sont retrouvées à une distance souvent
importante du foyer.
Hall a exploité à la date de cette publication importante (1995) des données de 1979 à 1990. Il
indique par ailleurs que le rapport entre décès par inhalation et par brûlure est probablement
en 1995 de l’ordre de 3 pour 1, soit 75 %.
2.3.4.2 Causes des incapacitations liées au feu
Pour les incapacitations non létales, les données sont encore plus difficiles à obtenir. La
référence [18] présente les statistiques obtenues au Royaume-Uni sur les effets des incendies
n’ayant pas entraîné de décès. Elles sont résumées dans le tableau ci-dessous et présentées
graphiquement page suivante :
Année
Nombre total de
blessés par le feu
Nombre de blessés suite à une
exposition aux gaz et fumées
1992
13462
5038
37,4%
1993
13594
5193
38,2%
1994
15580
4998
32,1%
1995
16149
5527
34,2%
1996
17348
6179
35,6%
1997
17719
6339
35,8%
1998
17492
6584
37,6%
Tableau 10 : Victimes non décédées des incendies, Royaume-Uni, 1992-1998
Le nombre de victimes non décédées dans les incendies suite à l’inhalation de fumées est de
l’ordre de 30 à 40 %. Cette valeur est à comparer aux valeurs de létalité. Elle montre que le
risque toxique engendre principalement des décès. Le nombre relativement bas des blessés
suite à l’inhalation montre que la survie est bien plus compromise que pour les autres effets
du feu.
Effets du feu sur les personnes
Page 38/163
Nombre de blessés dans les incendies, Royaume Uni
20000
18000
16000
Nombre de blessés
.
14000
12000
Nombre total de blessés par le feu
10000
Nombre de blessés suite à une exposition aux gaz et fumées
8000
6000
4000
2000
0
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
Année
Figure 20 : Victimes non décédées des incendies, Royaume-Uni, 1992-1998
Effets du feu sur les personnes
Page 39/163
2.3.5
Conclusions
Quelle que soit l’origine, ces statistiques montrent une prévalence des feux d’habitation dans
ceux causant le plus de victimes. Près des deux tiers des décès et des blessés se retrouvent
ainsi dans les feux domestiques. Les feux dans les véhicules représentent la deuxième cause
de décès en France. Néanmoins, le nombre de victimes a considérablement diminué ces
dernières années.
Les principaux effets de population observés sont une prévalence significative des décès
masculins, plus particulièrement en taux pour les tranches d’âge de moins de 5 ans et en
nombre pour les tranches d’âge 15-64 ans.
Très peu de données ont été obtenues quant à la cause de ces décès, mais les trois quarts
semblent liés à l’inhalation des fumées, et en particulier à l’effet toxique. Cette proportion
augmente, bien que le nombre total de victimes diminue. Des statistiques détaillées montrent
par ailleurs que cette statistique ne se vérifie pas pour les blessés, ce qui signifie que les
inhalations de fumée conduisent plus fréquemment au décès que les autres effets du feu.
2.4
Références
[1]
INRS ED5005 (2003) : le point des connaissances sur… incendie et lieu de travail
[2]
Purser, D.A. in Improved Fire and Smoke-Resistant Materials for Commercial
Aircraft Interiors: A Proceedings (1995)
[3]
Base ARIA – Bureau d’analyse des risques et pollutions industrielles (BARPI) :
http://www.aria.environnement.gouv.fr
[4]
Campagne nationale de prévention des incendies domestiques 2004 – Dossier de
Presse – INPES 2004
[5]
Institut de veille sanitaire BEH n°19-20/2004 – Les accidents de la vie courante –
Mortalité par accidents de la vie courante : près de 20 000 décès chaque année en
France métropolitaine, C. Ermanel, B. Thélot
[6]
Base de données CépiDC de l’INSERM IFR69 : interrogation sur les causes de décès
en France - www.cepidc.vesinet.fr
[7]
Institut de veille sanitaire BEH n°30-31/2003 : Certification et codification des causes
médicales de décès, Gérard Pavillon, Françoise Laurent, Centre d’épidémiologie sur
les causes médicales de décès, CépiDc-Inserm, Le Vésinet
[8]
Organisation Mondiale de la Santé : World Health Organisation, www.who.int, accès
à la rubrique ICD : International Classification of Dies
[9]
Pertes causées par les incendies dans les Premières nations, 1997. Données tirées du
rapport Pertes imputables aux incendies de 1997, AINC
Effets du feu sur les personnes
Page 40/163
[10]
M. Huet – M. Augereau, Face au Risque n°359 janvier 2000. CNPP Entreprise SARL
[11]
Council of Canadian Fire Marshals and Fire Commissioners - Rapport annuel 2000 Les pertes causées par l'
incendie au Canada
[12]
Le point en Recherche - Août 2004 - Série socio-économique 04-004 Statistiques des
incendies dans les habitations au Canada
[13]
G.L. Nelson, Carbon monoxide and fire toxicity : a review and analysis of recent
work, Fire technology, vol 34, n°1, 1998,pp.39-58
[14]
Levin, B. C.; Kuligowski, E. D. : Toxicology of Fire and Smoke. Inhalation
Toxicology. 2nd Edition. Chapter 10, CRC Press (Taylor and Francis Group), Boca
Raton, FL, Salem, H.; Katz, S. A., Editor(s), 205-228 p., 2005
[15]
Hall, J.R, Jr, Harwood B, Smoke or Burns – Which is Deadlier ? NFPA Journal,
January/February, 38-43, 1995
[16]
Nelson, G.L., Fire and Polymers II, Materials and Tests for Hazard Prevention, Ed.
ACS Symposium Series 599, American Chemical Society, Washington DC, 1995
[17]
Interrogation de la base de donnée de la Permanence Générale, H. Bazin, Laboratoire
Central de la Préfecture de Police de Paris, communication personnelle (27 avril 2006)
[18]
Safe Tolerable Limits for Carbon Monoxide? A Review of the Clinical and Fire
Engineering Implications of a Single, Acute, Sub-Lethal Exposure, S.D. Christian, T.J.
Shields, Journal of Fire Sciences, vol. 18, 2000, pp 308 - 323
[19]
Behavioral Response to Fire and Smoke, J.L. Bryan, The SFPE Handbook of Fire
Protection Engineering, 2nd Edition, Section 3 / Chapter 12, National Fire Protection
Association, Quincy, Massachusetts, 1995.
Effets du feu sur les personnes
Page 41/163
3 Effets du flashover sur le changement de régime de feu
3.1
Introduction
Le stade de développement du feu est un point clé conditionnant le risque encouru par les
personnes (voir paragraphe 2.1). Ainsi, un changement rapide des conditions thermiques au
niveau du foyer peut avoir des conséquences considérables sur les effluents du feu.
Le flashover correspond à une période particulière du développement du feu. Subitement, le
flux thermique s’accroît, ainsi que la quantité et la température des effluents, leur nature se
trouvant modifiée. A ce stade, les personnes ont vraisemblablement évacué le local de départ
du feu, mais tous ces effets peuvent avoir un impact considérable sur les conditions de leur
évacuation, des victimes étant retrouvées fréquemment en des points éloignés du foyer.
Dans une étude de risque du feu sur les personnes, la proximité de ce stade de flashover est
donc un paramètre à considérer au même titre que les autres risques directement inhérents aux
effets du feu.
3.2
Définition du flashover et critère d’atteinte
Période de
décroissance
Feu pleinement
développé
Flashover
Période de
développement
1 Débit
Dans un espace bâti, le développement du feu est influencé par l’environnement : s’il y a
assez de combustible et d’air, le développement du feu va atteindre une phase lors de laquelle
toutes les surfaces combustibles s’embrasent. A ce moment, le feu entre dans un stade
totalement développé. Le flashover correspond à la période rapide de croissance du feu.
Feu s’éteignant (conditions du flashover non atteintes)
2 Temps
Figure 21 : Courbe de développement d’un incendie d’habitation
Il n’existe pas de définition précise du flashover, car il ne représente pas un état précis de
l’incendie comme l’allumage. Il correspond à la période de transition rapide entre deux
régimes de combustion. Avant le flashover, le feu est limité à un ou quelques objets qui
Effets du feu sur les personnes
Page 42/163
représentent une faible part de la charge calorifique et de la surface disponible. A la suite du
flashover, tous les objets combustibles brûlent.
Physiquement, le feu produit des gaz et des suies qui transportent une part de l’énergie dans
l’espace formant la couche chaude de fumée. On estime généralement cette part comme étant
de l’ordre de 70 % du débit calorifique de la source. Cette énergie potentielle est dissipée en
partie, par exemple de manière thermique dans le plafond. Cependant, la couche chaude en
transporte une grande part sous forme de gaz et de solides chauds. La température de cette
couche s’élève avec la production de chaleur par le foyer initial. Les effluents, chargés en
suies, émettent alors de la chaleur sous forme radiative vers un point de l’espace selon la loi
de Stefan-Boltzmann :
avec :
Qr
φ
ε
σ
Tf
( )
Q r = φ ⋅ ε ⋅ σ ⋅ Tf4
: Eclairement énergétique émis par une fumée à la température Tf (W/m²) ;
: Facteur de configuration géométrique, dépendant de l’angle entre l’émission de la
chaleur et le point considéré ;
: Emissivité de la fumée ;
: Constante de Stefan Boltzmann (σ = 56,7.10-9 W.m-².K-4) ;
: Température moyenne des fumées (K)
Note : en retour, ce point étant à une température non nulle, un bilan de flux thermique est à
établir entre le flux reçu et le flux émis au point considéré.
Dans un système stratifié, lorsque ce flux thermique radiatif produit par la couche chaude en
direction du sol devient important, les matériaux environnants s’embrasent. La plupart des
auteurs estiment qu’au-delà d’un flux de 25 kW/m², l’embrasement des matériaux
combustibles se produit spontanément.
Il y a alors occurrence de flashover : le développement du feu s’accélère et la combustion
concerne tous les matériaux disponibles. L’embrasement ne se fait pas de proche en proche,
mais simultanément à chaque endroit de la zone sous la couche chaude.
Dans certains cas, cet embrasement a lieu lorsque de grosses quantités de gaz combustibles
(gaz de pyrolyse et monoxyde de carbone) sont transportées par les fumées. Il y a alors
combustion inversée, le combustible se trouvant alors dans la partie supérieure et le
comburant au-dessous. Les conséquences sont les mêmes que précédemment : le rayonnement
devient alors très intense et peut être suffisant pour provoquer l’inflammation des autres items
de la pièce. Ce phénomène de flamme inversée se rencontre avec les combustibles produisant
de grosses quantités de gaz de pyrolyse.
Effets du feu sur les personnes
Page 43/163
3.3
Critères de flashover
Les observations expérimentales montrent que le flashover se produit si la température au
niveau du plafond est suffisante pour engendrer le flux radiatif nécessaire. Peacock [1] a
résumé les différentes études sur le sujet, reprises dans le tableau ci-dessous :
Température de la couche
chaude (°C)
Flux thermique critique au
niveau du sol (kW/m²)
600
-
Fang
450-650
17-33
Budnick et Klein
673-771
634-734
15
Lee et Breese
650
17-30
Babrauskas
600
20
706 ± 92
20
Quintiere et Mc Caffrey
600
17,7-25
Thomas
520
22
-
20
Auteur
Häggland
Fang et Breese
Parker et Lee
Tableau 11 : Conditions de Flashover – Synthèse de Peacock
En résumé, Peacock propose les valeurs limites de 600 °C au niveau du plafond et 20 kW/m²
au sol comme conditions nécessaires au flashover. Pour tous les auteurs étudiés, le dispositif
expérimental est à chaque fois différent, et le combustible n’est pas toujours identique.
Certaines valeurs s’écartent de manière significative des limites proposées par Peacock. En
effet, le temps de montée en température peut également jouer un rôle sur la température
critique observée au flashover. Il convient alors de considérer les bilans thermiques en prenant
en compte les pertes de chaleur par les ouvertures et par les parois de l’environnement étudié.
Effets du feu sur les personnes
Page 44/163
La limite de 20 kW/m² est à comparer à la valeur de 25 kW/m² communément admise pour
l’inflammation spontanée et immédiate de la plupart des matériaux et avec les flux critiques
inflammation pilotée de différents matériaux, pour des temps d’exposition pouvant atteindre
20 minutes et repris dans le tableau suivant :
Flux critique
Cône calorimètre ISO 5660
(kW/m²)
Flux critique
Test d’inflammabilité ISO
5657 (kW/m²)
Polyéthylène (PE)
13
16
PMMA PX
9,5
9,5
PMMA FINN
12
8
Polypropylène (PP)
10,5
10
Polystyrène (PS)
8,5
13,5
Polyoxyméthylène (POM)
9,5
9,5
Carton
6
11
Panneau de bois aggloméré
12
14
Tapis polyamide
-
18
Gel coat polyester
14
14
Matériau
Tableau 12 : Flux critiques d’inflammation de différents matériaux
Note : Un matériau combustible de faible épaisseur comme un papier peint ou une peinture,
placé sur un solide dense et non combustible comme un support métallique d’épaisseur
importante, ne peut pas être enflammé sans recourir à un flux très important, supérieur
à 40 kW/m². En effet, l’énergie apportée sous forme de flux thermique est dissipée
dans le support. L’inflammation peut être par ailleurs facilitée par des dispositions
comme les angles, par effet de cheminée.
La dispersion des valeurs observées par Peacock montre que les critères de température et de
flux thermique seuls sont insuffisants pour caractériser toutes les occurrences de flashover.
Hägglung a le premier montré qu’un débit de combustion minimum était en outre nécessaire.
Cela peut se traduire par un débit calorifique suffisant pour générer les conditions de
l’embrasement généralisé, car les pertes de chaleur par les parois et les ouvertures sont
dépassées par la production de chaleur.
Pour que la température sous le plafond augmente suffisamment, il faut en effet que l’énergie
dégagée sous forme de débit calorifique soit nettement supérieure à celle perdue par la
ventilation naturelle et la dissipation thermique à travers les parois de la pièce en essai.
Thomas et Mc Caffrey[4] ont ainsi démontré que la température sous le plafond pouvait être
corrélée avec deux nombres adimensionnels X1 et X2 représentant respectivement le débit
calorifique et l’énergie perdue par dissipation de la chaleur.
Effets du feu sur les personnes
Page 45/163
Cette corrélation est présentée ci-dessous :
X1 =
X2 =
Qc
g
1
2
⋅ (C p ⋅ ρ 0 )⋅ T0 ⋅ Aw ⋅ H
1
2
hk ⋅ At
g
1
2
⋅ (C p ⋅ ρ 0 )⋅ Aw ⋅ H
1
2
Figure 22 : Corrélation de Mc Caffrey
avec :
Qc :
Cp :
ρo :
To :
Aw :
H:
hk :
At :
Débit calorifique convectif (en kW) ;
Capacité thermique massique à pression constante des fumées (kJ/kg.K) ;
Densité de l’air à température ambiante (kg/m3) ;
Température ambiante (K) ;
Surface de l’ouverture (m²) ;
Hauteur de l’ouverture (m) ;
Coefficient effectif de perte de chaleur à travers les parois (kW/m².K) ;
Surface interne d’échange entre les parois et le compartiment (m²).
Les paramètres N et M permettent d’ajuster la régression.
La corrélation obtenue a permis de déduire l’équation de Mc Caffrey, présentée ci-dessous :
2
−1
∆T = 480 ⋅ X 1 3 ⋅ X 2
Effets du feu sur les personnes
3
Page 46/163
La résolution de cette équation permet le calcul du débit calorifique critique. En utilisant les
termes adéquats, Drysdale [2][3] a proposé de calculer le débit calorifique critique pour
atteindre le flashover comme étant la valeur correspondant à une élévation de température de
500 K. Dans ce cas, l’équation devient :
(
QFO = 610 ⋅ hk ⋅ At ⋅ Aw ⋅ H
)
1
2
Peacock a proposé une résolution simplifiée de l’équation de Mc Caffrey, basée sur une
température de la couche chaude supérieure à 600 °C. Dans ce cas, le débit calorifique
nécessaire pour obtenir des conditions de flashover est donné par la formule figurant cidessous :
(
QFO = 740 ⋅ hk ⋅ At ⋅ Aw ⋅ H
)
1
2
Hägglund et Babrauskas [5] ont proposé une autre résolution de l’équation de Mc Caffrey,
donnant l’équation suivante :
QFO
1,2
= 1050 ⋅ At ⋅
+ 0,247
At / Aw H
3
Dans chacune des équations présentées, QFO désigne le débit calorifique critique pour qu’il y
ait occurrence de flashover (en kW).
Il existe bien entendu différentes autres techniques pour définir l’occurrence du flashover. En
particulier, dans de nombreuses situations, la surface du foyer peut être suffisante pour
déterminer le débit calorifique critique.
3.4
Effet du flashover sur les personnes
Les risques inhérents au flashover sont décrits dans les parties suivantes : effets de flux
thermique, sur les gaz (visibilité, toxicité, température). En particulier, les effets thermiques
sont prépondérants dans cette phase de l’incendie.
Ces risques sont étudiés en dehors de la zone soumise à une occurrence de flashover, car
celui-ci correspond à un niveau de flux du plafond vers le sol près de 10 fois supérieur à celui
supportable pour les personnes (paragraphe 5.2). Toutefois, il est éventuellement à envisager
pour les sapeurs pompiers intervenant dans un grand volume (de type entrepôt par exemple),
dans lequel ils pourraient se retrouver piégés.
Effets du feu sur les personnes
Page 47/163
3.5
Références
[1]
R.D. Peacock, P.A. Reneke, R.W. Bukowski, V. Babrauskas - Defining flashover for
fire hazard calculations - Fire Safety Journal 32 (1999) pp 331-345
[2]
D. Drysdale - Fire dynamics – An overview - Short course on Fire Dynamics and Fire
Safety Engineering Design - University of Edinburgh – 31/03/03 – 02/04/03
[3]
D. Drysdale - Fires in Compartments - Short course on Fire Dynamics and Fire Safety
Engineering Design - University of Edinburgh – 31/03/03 – 02/04/03
[4]
B. Mc Caffrey, J. Quintiere, M. Harkleroad - Estimating room temperatures and the
likelihood of flashover using fire test data correlations - Fire Technology – Vol 17,
n°2, pp 98-119 (1981)
[5]
V. Babrauskas - Upholstered furniture room fires – Measurements, comparison with
furniture calorimeter data, and flashover predictions - Journal of Fire Science – Vol 2,
pp 5-19 (1984)
Effets du feu sur les personnes
Page 48/163
4 Risques liés à la perte de visibilité durant l’évacuation
4.1
Symboles et définitions
C:
Contraste visuel
Iλ :
Luminance à la longueur d’onde λ
D (bel) :
Densité optique globale d’un milieu, pour un trajet optique L donné.
DO (bel/m) : Densité optique d’un milieu, en l’occurrence des fumées, rapportée à un trajet
unitaire. En négligeant l’effet de dépendance spectrale,
I
D = L ⋅ DO = log10 λ , 0
Iλ
k (m-1) :
Coefficient d’extinction (ou d’absorption) des fumées, lié d’après la loi de
Beer-Lambert (ou Bouguet-Beer-Lambert) à la luminance pour une longueur
d’onde λ et un trajet optique L par : I λ = I 0,λ ⋅ e − kλ ⋅L
En négligeant la dépendance spectrale, k = DO.ln(10)
2,3.DO
HAP :
Hydrocarbures aromatiques polycycliques. Famille de composés à fort
potentiel cancérigène constitués par l’assemblage de quelques noyaux
benzéniques.
S (m) :
Visibilité, exprimée en m et représentant la distance à laquelle un effet de perte
de contraste visuel se fait ressentir.
σs (m²/kg) :
Surface d’extinction spécifique de la fumée
M (kg/m3) :
Masse de suies par unité de volume gazeux
ωsa (kg/kg) :
Taux de production de fumée du combustible
Contraste :
Opposition de couleurs qui se font ressortir mutuellement.
Luminance : Quotient de l’intensité lumineuse émise ou reçue par une surface, par l’aire
apparente de cette surface, pour un observateur lointain
4.2
Intérêt de la détermination de la visibilité des fumées
Dans de nombreux incendies, l’évacuation des personnes est l’un des critères primordiaux
pouvant orienter le sinistre vers une issue tragique. En effet, les personnes présentes lors du
démarrage d’un incendie doivent fuir rapidement. Cette évacuation ne peut se faire si la
visibilité est insuffisante. La production de fumées au début de l’incendie doit donc être
faible, ou bien celle-ci doit être diluée ou évacuée par le système de désenfumage.
Effets du feu sur les personnes
Page 49/163
De plus, la présence de la fumée induit la présence de suies qui peuvent présenter un risque
sur les individus. En effet, ces suies très fines sont inhalées et peuvent bloquer l’arrivée d’air
dans l’appareil respiratoire en formant une barrière mécanique.
La visibilité est une conséquence physiopathologique de l’opacité des fumées. Cela signifie
que le paramètre à déterminer expérimentalement ou par le calcul est l’opacité, exprimée sous
forme de densité optique ou de coefficient d’extinction. La visibilité, donc l’effet sur les
personnes, nécessite pour sa part de passer par un modèle, qui dépend de l’objet que l’on
cherche à voir à travers une fumée de densité donnée, par rapport à un support donné.
Des études ont montré que la fumée était perçue comme une barrière impénétrable pour les
victimes des incendies. Dans des conditions normales, la vitesse moyenne de marche d’un
homme est de 1,2 m/s. Elle chute à 0,3 m/s dans un local enfumé lorsque la densité optique
(DO) atteint 0,5. Pour une obscurité plus grande, les gens agissent comme s’ils étaient dans le
noir complet et suivent les murs pour se déplacer. En fait, ils hésitent à pénétrer dans la fumée
lorsque la visibilité est inférieure à 3 m et ont plutôt tendance à revenir en arrière pour se
réfugier dans un endroit qu’ils estiment plus sûr.
Expressions de la quantité de fumée
La visibilité s’exprime en mètres, le coefficient d’extinction en m-1. Un débit fumigène est un
débit volumique (en m3/s) de fumée ayant un coefficient d’extinction donné (en m-1), et
s’exprime donc en m2/s. Il est noté RSP (Rate of Smoke Production) et ne dépend que de la
source de fumée.
Une quantité totale de fumée occupant un volume exprimé en m3, est donc définie en m² et est
notée TSP (Total Smoke Production).
4.3
Approche théorique de la production de fumées
La fumée est composée des gaz de combustion, de gouttelettes d’eau ou de combustible en
suspension et de suies. La mesure d’opacité prend globalement en compte ces différents
facteurs en évaluant l’atténuation de la lumière par les fumées. Pour considérer le risque que
représente la perte de visibilité, il convient de déterminer ensuite la relation entre l’atténuation
lumineuse observée et la visibilité [20].
Les suies contenues dans la fumée sont principalement formées lors de la cokéfaction des
combustibles, car la température est insuffisante pour oxyder tout le carbone. Ainsi, des
noyaux aromatiques s’accolent pour former des composés allant des HAP (hydrocarbures
aromatiques polycycliques) à des réseaux macromoléculaires (cokes).
La formation des suies est donc liée de manière importante à la présence de noyaux
aromatiques dans le combustible et à la facilité qu’ont ceux-ci à se former (rapport molaire de
carbone dans le monomère, nombre de liaisons C-C, présence de doubles liaisons).
L’énergie pour que ces noyaux s’assemblent est inférieure à celle nécessaire à leur destruction
et les suies se forment donc préférablement. Les composés comme le toluène ou les résines
phénoliques par exemple, auront tendance à produire de grosses quantités de suies.
Effets du feu sur les personnes
Page 50/163
Des exemples de productions de suies pour différents combustibles figurent dans le tableau
suivant :
Combustibles
Motif
Carbone émis sous
forme de suies
Polyoxyméthylène
(POM)
− (CH 2 − O )n −
0,0 %
Poly (méthacrylate de méthyle)
(PMMA)
Polypropylène
(PP)
Polystyrène
(PS)
−
CH 3
CH 3
CH 2
− C − CH 2
−C −
H 3C −
CO 2
− − CH 2
−
H 3C − CO 2
CH
CH 3
CH
−
−
0,3 %
n
5,5 %
n
CH2
18,0 %
n
Tableau 13 : Pouvoir fumigène des matériaux en fonction du motif des molécules
Ce tableau montre la présence de structures plus ou moins « Fumigènes ». En effet, le POM
ne présente pas de liaisons C-C et sa combustion ne génère pas de fumées. Le PMMA
présente des liaisons C-C, mais certains atomes de carbone sont déjà oxydés et la
configuration de la molécule ne permet pas le repliement des atomes en un cycle aromatique.
Le polypropylène est composé de 3 liaisons C-C disposées spatialement à 120°. Le monomère
forme alors déjà un demi-cycle aromatique et la formation de suies est favorisée. Le
polystyrène est déjà composé de noyaux aromatiques. L’énergie nécessaire pour briser ces
noyaux n’étant pas toujours disponible, la formation de suies est très importante.
Effets du feu sur les personnes
Page 51/163
En fait, les processus de formation sont plus complexes. Le schéma ci-dessous présente les
processus mis en œuvre dans le cas de la génération de produits aromatiques complexes lors
de la combustion des hydrocarbures : Hydrocarbures polyaromatiques et particules, qui
constituent la cause principale de l’opacité des fumées [19] :
C
C
C
C
1
2
C
C
C
C
C
3
7
C
C
4
C
5
6
Figure 23 : Processus de cyclation et formation de benzo-a-pyrène
Une fois les hydrocarbures polyaromatiques formés, ceux-ci peuvent se condenser pour
former des produits de plus en plus complexes et solides qui sont à la base des particules de
suies. Ces réactions sont des réactions de cyclation et de condensation :
+
2
+
5
7
+
+
1
3
6
8
4
…
Figure 24 : Processus de formation des différents HAP
Effets du feu sur les personnes
Page 52/163
Ces étapes se poursuivent jusqu’à la formation de suies de plusieurs dizaines de nanomètres,
qui s’agglomèrent ensuite entre elles pour former des suies de quelques micromètres qui sont
décrites au paragraphe 7.2. Tous ces composés, depuis le benzène jusqu’aux suies
macroscopiques, absorbent fortement la lumière blanche sur tout le spectre et sont à l’origine
de l’opacité des fumées.
Les types de suies formées semblent plutôt dépendre des conditions locales lors de la
formation, que de la nature même des produits dégradés. Ainsi, il a été démontré que la
combustion de cellulose, de tabac, de polyéthylène ou de PVC produisait les mêmes quantités
de suies à haute température (1000 °C) [19]. La différence de production observée dans les
feux libres dépend ainsi plus de la température de flamme du produit et des conditions
d’oxydation ou de recombustion des particules que de la nature chimique propre du
combustible. Cela s’explique par des produits de craquage très proches pour tous les
combustibles (méthane, éthane, éthylène, propane principalement).
4.4
Evaluation de la quantité de fumée
4.4.1
Principe
Tous les modèles d’évaluation de la visibilité sont calculés à partir de l’opacité des fumées,
exprimée sous forme de concentration, de coefficient d’extinction ou de densité optique.
L’opacité est donc le paramètre expérimental permettant la détermination de la visibilité.
Celle-ci peut être évaluée par deux grandes familles de méthodes.
4.4.2
Méthodes directes
Les méthodes de mesure directes de l’opacité des fumées sont basées sur des atténuations
optiques [12][13]. Les points essentiels sont repris ci-dessous :
La méthode directe de mesure de l’opacité des fumées consiste à mesurer l’atténuation d’un
faisceau lumineux. En effet, si de la fumée se trouve sur le trajet optique entre une source de
lumière et un détecteur, une partie du flux lumineux est perdu sous l’influence de plusieurs
phénomènes :
-
L’absorption directe par les suies à la manière d’un écran, pour les particules les plus
grosses (dont les tailles sont de l’ordre de quelques micromètres à quelques
millimètres)
-
La diffraction du faisceau lumineux sur les petites particules et suies ayant une taille
comparable à la longueur d’onde du faisceau diffracté.
-
L’absorption spectrale pour les gaz colorés comme les oxydes d’azote qui présentent
plusieurs bandes d’absorption dans le visible.
La mesure de la lumière transmise I est comparée à la transmission en l’absence de fumée I0.
La valeur mesurée pour I dépend alors de la distance entre la source et le détecteur, de la
concentration massique des fumées et des caractéristiques intrinsèques de la fumée, à savoir
son coefficient d’extinction.
Effets du feu sur les personnes
Page 53/163
L’émission lumineuse du foyer, s’il est trop près du dispositif expérimental, peut fausser la
mesure réalisée par le détecteur en surévaluant la transmission lumineuse (le feu illumine le
détecteur).
La longueur d’onde du faisceau lumineux est donc primordiale dans la mesure. Il existe deux
types de sources lumineuses pour les opacimètres disponibles dans le commerce :
-
Les sources monochromatiques de type laser. Ces sources illuminent à une seule
longueur d’onde (350 nm, cas des lasers He-Ne). Cette source est reprise dans les
essais selon les normes ASTM D 5485 [15] ou ISO 5660 [16] par exemple.
-
Les sources polychromatiques en lumière blanche. Ces sources sont plus proches de la
réalité. Elles sont utilisées dans la norme DIN 50055 par exemple [14]. Rasbash et
Phillips[1] précisent qu’une source de lumière blanche stable, travaillant à une
température de couleur de ( 2900 ± 100 ) K est idéale. Pour garantir la stabilité de
l’intensité lumineuse de la source, l’alimentation de la lampe doit être très stable en
tension.
La mesure d’opacité des fumées à l’aide d’une source monochromatique a été réalisée au cône
calorimètre. Elle a montré la difficulté de mise en œuvre de cette méthode et une répétabilité
médiocre, imputable à la forte dilution des fumées dans le conduit d’évacuation. Ces
phénomènes sont dus à la taille même des suies dégagées par les matériaux étudiés, qui est
proche de la longueur d’onde du faisceau. Ceci engendre une diffraction qui fausse la mesure.
Néanmoins, la norme ASTM D 5424 précise que la différence observée en fonction de
l’utilisation d’une source mono- ou polychromatique peut être négligeable pour les fumées de
certains matériaux.
Dans le cas de l’utilisation d’une source polychromatique en lumière blanche, les détecteurs
sont très importants, car ils ne se comportent pas de la même manière à toutes les longueurs
d’ondes. Ainsi, dans les essais en ambiance, la source est un projecteur en lumière blanche et
le détecteur une photopile à l’oxyde de sélénium (NF EN 50268). Ce détecteur est adapté par
son temps de réponse et sa sensibilité à des phénomènes lents et des trajets optiques
importants.
Pour des phénomènes dynamiques (mesures à l’émission), le détecteur est le plus souvent
constitué d’une photodiode au silicium, très sensible dans le rouge et le proche infrarouge
jusqu’à 1100 nm. Ce type de détecteur très sensible a un temps de réponse négligeable. Il est
adapté à une mesure dynamique sur un faible trajet optique, comme la mesure en cheminée.
Effets du feu sur les personnes
Page 54/163
Densités optiques
La méthode la plus simple pour corréler la transmission à l’opacité est d’effectuer la
conversion en densité optique :
I
D = log o
I
Avec :
D
I0
I
: Densité optique mesurée, en bel en fonction du temps ;
: Intensité lumineuse transmise en l’absence de fumées ;
: Intensité lumineuse transmise en présence de fumées (dans la même unité que I0).
Afin de s’affranchir de la longueur du trajet optique, elle peut être ramenée à une longueur
unitaire de la manière suivante :
D
DO =
L
Avec :
DO
D
L
: densité optique pour un trajet optique de 1 mètre, en bel/m ;
: densité optique mesurée, en bel ;
: longueur du trajet optique, en mètres.
Coefficient d’extinction (K)
La loi de Beer-Lambert permet de déterminer l’atténuation d’un faisceau d’une lumière à
travers la fumée pour un chemin optique donné. La loi est dépendante de la longueur d’onde,
mais une approximation courante est utilisée et néglige cette dépendance spectrale.
L’atténuation moyenne du faisceau lumineux est traduite par l’expression :
I
= e −k.L
I0
Avec :
L
k
: trajet optique (trajet suivi par la lumière à travers la fumée) (m)
: coefficient d’extinction moyen de la lumière (m-1)
Masse de particules de suies par volume gazeux
Il est possible de déterminer la masse de particules de suies par volume gazeux. En effet, le
coefficient d’extinction de la lumière dépend de cette masse de suies et de leur propension à
absorber la lumière, caractérisée par leur surface d’extinction spécifique.
k = σ s Cs
Avec :
Cs : concentration massique des particules de suies (kg.m-3)
σs : surface d’extinction spécifique par unité de masse de suies (m2.kg-1). Dans la
bibliographie, σs=10 m²/g [8] et plus précisément, (9,6 ± 3 ) m²/g [9] pour les hydrocarbures
gazeux. Cette valeur dépend de nombreux paramètres et ne peut être connue avec précision
que pour les combustibles simples, dans des conditions de combustion idéales.
Effets du feu sur les personnes
Page 55/163
4.4.3
Méthodes indirectes
Le taux de production de fumées peut être mesuré ou approché par la méthode des ratios :
ω sa =
ms
mc
Avec :
ωsa
ms
mc
: Taux de production de suies du combustible (kg/kg)
: Masse totale de suies produites (kg)
: Masse de combustible brûlé correspondante (kg)
Dans ce cas, la concentration de perte de masse du combustible est donnée par :
ρc =
ρs
ω sa
Avec :
ωsa :
ρc :
ρs :
Taux de production de suies du combustible (kg/kg)
Perte de masse du combustible, correspondant à la masse de combustible brûlé,
rapportée au volume de dilution dans lequel les fumées s’échappent. (kg/m3)
Masse de suie des fumées dans le volume de dilution (kg/m3)
Effets du feu sur les personnes
Page 56/163
Ainsi, à partir de la connaissance du facteur ωsa, du volume et de la perte de masse, il est
possible de recalculer la masse de suie contenue dans les fumées. Des tables de ωsa sont
disponibles dans la littérature. Une synthèse des valeurs est présentée dans le tableau cidessous :
Matériau
Chêne rouvre
Broussailles
Laine vierge pure
ABS
PMMA
PE
PP
PS
Matériaux synthétiques solides Silicone
Polyester-1
Polyester-2
Epoxy
PA 6-6 (Nylon)
Gomme silicone
GM21
GM23
Mousses PU souples
GM25
GM27
GM29
GM31
Mousses PU rigides
GM35
GM37
GM47
GM49
Mousses polystyrènes
GM51
GM53
N°1
N°2
Mousses polyéthylènes
N°3
N°4
PE à 25% Cl
PE à 36% Cl
PE à 48% Cl
Matériaux halogénés
PVC pur
PTFE
ETFE
Matériaux naturels
ωsa (g/g) 11
0,015
0,015
0,008
0,105
0,022
0,060
0,059
0,164
0,065
0,091
0,089
0,098
0,075
0,005
0,131
0,227
0,194
0,198
0,130
0,125
0,104
0,113
0,180
0,210
0,185
0,200
0,056
0,102
0,076
0,071
0,115
0,139
0,134
0,172
0,003
0,042
Tableau 14 : Taux de production de suies des combustibles
Ces tables sont constituées en général à partir de valeurs expérimentales : Le combustible est
pesé avant et après combustion, ce qui permet d’évaluer mc. Les fumées sont aspirées et
passent sur un filtre. La masse déposée sur le filtre représente ms.
En présence de feux bien ventilés, les plastiques courants ont des taux de production de suies
de 1 % à 10 %, les chiffres pour le bois étant légèrement inférieurs. Le taux moyen est de
11
Les valeurs sont indiquées pour des feux ventilés
Effets du feu sur les personnes
Page 57/163
l’ordre de 4 %, avec une concentration massique en aérosol de 0,8 g/m3. Cela correspond à
perte de masse de l’ordre de 20 grammes par m3 d’air.
Dans le cas de feux sous-ventilés, le taux moyen de production de suies double [10]. Dans le
cas d’une combustion sous-ventilée, une concentration en suies de 0,8 g/m3 correspond donc à
une perte de masse de 10 g/m3.
4.5
Modèles de visibilité
4.5.1
Définition de la visibilité
La visibilité est primordiale lors de la considération des évacuations et dépend du niveau de
contraste entre un objet et son environnement. Pour un objet isolé placé sur un fond uniforme,
le contraste peut être défini par la formule [1] :
C=
B
−1
Bo
Avec :
B
Bo
: luminance de l’objet considéré
: luminance du fond.
Dans des conditions d’illumination solaire, le contraste d’un objet noir placé sur un fond
blanc est alors de C = - 0,02 [2]. Cette valeur est couramment utilisée comme limite de
visualisation d’un objet. La visibilité d’un objet est alors la distance nécessaire pour réduire le
contraste à la valeur de - 0,02.
La visibilité dépend de nombreux paramètres, dont l’illuminant considéré, le coefficient
d’extinction des fumées et l’acuité visuelle des individus elle même fonction de la dilatation
de la pupille.
La visibilité n’est pas mesurée directement mais peut être calculée par différents modèles à
partir d’une mesure de densité ou de concentration de fumées. Les modèles existants sont
présentés ci-après.
Effets du feu sur les personnes
Page 58/163
4.5.2
Modèles simplifiés
Ces modèles sont obtenus à partir d’essais. Ils montrent une corrélation de type log/log entre
la densité optique des fumées (et donc le coefficient d’extinction car K = DO x ln(10)) et la
visibilité. Ils sont présentés de manière graphique ci-dessous :
Visibilité en fonction de la densité optique
100
Densité (db/m) Rasbash (1951)
Densité (db/m) Malhotra (1967)
Densité (db/m) Jin (1970-1971)
Corrélation simplifiée Butcher et Parnell (1979)
Visibilité (m)
10
1
0,1
0,1
1
10
100
Densité optique (db/m)
Figure 25 : Modèles simplifiés densité optique / visibilité
La corrélation simplifiée de Butcher et Parnel est du type :
DO S = 10
k S = 23
Avec :
DO
: densité optique par unité de longueur, en bel par mètre (k=DO ln(10))
S
: Visibilité, en mètre
Effets du feu sur les personnes
Page 59/163
4.5.3
Modèles de Jin, Rasbash et Babrauskas
Jin [3] suggère que la limite du coefficient d’extinction admissible est égale à 0,15 m-1
(DO = 0,06 bel/m) pour les personnes non familiarisées avec le trajet de secours. Pour les
sujets connaissant le chemin d’évacuation, cette limite est de 0,5 m-1 (DO = 0,2 bel/m).
Rasbash [4] suggère une limite de visibilité de 10 mètres, équivalente à une densité optique de
0,08 bel/m (k=0,19 m-1)
Babrauskas [5] place la limite d’évacuation à un coefficient d’extinction de 1,2 m-1
(DO = 0,5 bel/m)
Densité optique limite
(bel / m)
Coefficient d’extinction
(m-1)
Jin – Chemin d’évacuation inconnu
0,06
0,15
Jin – Chemin d’évacuation connu
0,20
0,50
Rasbash
0,08
0,19
Babrauskas
0,50
1,2
Modèle
Tableau 15 : Modèles de Jin, Rasbash et Babrauskas
La comparaison montre des valeurs très disparates. L’influence de la connaissance du chemin
d’évacuation est évidente. Les propositions de Jin (chemin d’évacuation inconnu) et de
Rasbash sont les plus sécuritaires et fixent la limite de visibilité pour une évacuation sans
complications aux alentours de K=0,15 à 0,20 m-1.
4.5.4
Modèles de Jin et Yamada
Jin [6] a étudié le lien entre la visibilité et le coefficient d’extinction pour différents systèmes.
Les études réalisées étaient basées sur le contraste visuel minimum acceptable dans deux
configurations, pour aboutir à deux lois simplifiées :
1) Pour les systèmes réfléchissants :
2) Pour les systèmes lumineux :
KxS=3
KxS=8
Dans les deux cas, K représente le coefficient d’extinction exprimé en m-1 et S la visibilité,
donnée en mètres. Cette corrélation est valable pour des trajets entre 5 et 15 mètres.
Effets du feu sur les personnes
Page 60/163
Visibilité en fonction du coefficient
d'extinction selon Jin
pour des systèmes réfléchissants (K.S = 3) et
pour des systèmes lumineux (K.S = 8)
Visibilité S (m)
100
K.S=8
10
K.S=3
1
0,1
1
10
-1
Coefficient d'
extinction k (m )
Figure 26 : Modèle de Yin et Yamada pour les objets réfléchissants et lumineux
Les données provenant de ce modèle ont été obtenues à l’aide de personnes observant derrière
une vitre au travers de la fumée, et ne tiennent donc pas compte de l’effet irritant induit par les
fumées. Cet effet a tendance à dégrader la visibilité, en engendrant clignements des yeux et
larmoiements. L’irritation est due aux gaz acides absorbés au niveau des larmes lubrifiant les
yeux, ainsi qu’à la présence de suies se déposant à la surface de l’œil et provoquant des
clignements.
Jin et Yamada [7] ont alors étudié l’effet réel de la fumée de combustion de bois sur l’acuité
visuelle. Ils ont mis les sujets dans l’environnement du feu, avec un masque respiratoire mais
sans protection des voies oculaires. Ils ont ainsi constaté que l’effet d’irritation dans le cas
d’un feu de bois était important pour des coefficients d’extinction supérieurs à 0,25 m-1.
Effets du feu sur les personnes
Page 61/163
4.5.5
Modèle de la norme ISO 13571
Ce modèle repose sur le contraste visuel minimum détectable [11]. Il estime que les occupants
d’un local sont incapables d’assurer leur propre évacuation lorsqu’ils n’arrivent plus à
distinguer leurs mains devant eux.
ln(−C ) = −σ s ⋅ M ⋅ L
Avec :
C
M
L
σs
: Contraste visuel minimum détectable. En général, C = -0,02
: Masse de suies par volume gazeux, exprimée en g/m3
: Longueur du trajet optique, en mètres
: Surface d’extinction spécifique de la fumée (m²/g)
Dans la bibliographie, on donne σs=10 m²/g [8] 12. La limite de visibilité est généralement
atteinte pour une combustion de 20 grammes de matière par m3 d’air pour un feu ventilé et de
10 grammes par m3 d’air pour un feu sous-ventilé.
Des expériences ont montré que le seuil de visibilité des objets réfléchissants est atteint à une
concentration massique en suies d’environ 0,3 g/m3/L et pour les objets lumineux d’environ
0,8 g/m3/L où L représente un trajet optique compris entre 5 et 15 mètres. La première valeur
est recommandée pour l’évaluation de la visibilité des escaliers, portes, parois…
4.6
4.6.1
Utilisation de l’évaluation de l’opacité des fumées en France
Principe
La caractérisation de l’opacité des fumées est fondamentale dans l’évaluation de la perte de
visibilité due aux fumées. En particulier, dans le domaine des transports, ce critère a été
retenu depuis longtemps, car il est fondamental. Il a été introduit récemment dans le domaine
du bâtiment.
4.6.2
Domaines des transports
Dans le domaine du transport ferroviaire ou de l’aéronautique, l’essai pour la détermination
de l’opacité est basé sur la chambre à fumée « NBS », décrite dans la norme NF X 10-702
(équivalente à l’ASTM E 662:2003). Dans cet essai, une éprouvette de matériau combustible
disposée en position verticale est soumise à un flux radiatif incident de 25 kW/m². L’attaque
est éventuellement complétée par la présence de flammes pilotes appliquées sur la surface du
matériau et destinées à enflammer les gaz de pyrolyse de celle-ci. L’atténuation lumineuse est
mesurée au moyen d’un faisceau lumineux (lumière blanche) traversant le dispositif. Des
deux conditions de dégradation (avec ou sans flammes pilotes), seule la plus sévère est
retenue.
12
Plus précisément, comme donné précédemment, la valeur de (9,6 ± 3 ) m²/g [9] peut être obtenue pour les
hydrocarbures gazeux. Cette valeur dépend de nombreux paramètres et ne peut être connue avec précision que
pour les combustibles simples, dans des conditions de combustion idéales.
Effets du feu sur les personnes
Page 62/163
Dans le domaine ferroviaire, on s’intéresse à l’obscurcissement total sur les 4 premières
minutes (le VOF4 de la norme NF F 16-101) et à la densité maximum atteinte. Cette notion de
4 minutes est le temps exigé pour arrêter un train et démarrer l’évacuation. Dans
l’aéronautique, on s’intéresse à la densité maximale atteinte après 4 minutes.
Dans les domaines de la marine civile, militaire et dans la future norme européenne
ferroviaire (prEN45545-2), l’essai retenu est celui de la norme ISO 5659-2. Cet essai est
similaire au précédent du point de vue de la mesure, mais le modèle de dégradation est
différent. L’éprouvette est soumise à un flux radiatif incident produit par un four conique,
placé au-dessus de l’échantillon. Le flux incident est de 25 kW/m² avec ou sans flamme
pilote, ou de 50 kW/m² sans flamme pilote. La condition entraînant le maximum de
production de fumée est retenue.
A noter : dans les essais selon le référentiel marine civile, la toxicité est mesurée lors de
l’essai de détermination de l’opacité des fumées, après que la densité maximale de fumées a
été atteinte. Dans le futur référentiel ferroviaire européen, il est envisagé une détermination en
continu durant l’essai, ou à un temps donné. Les débats ont lieu actuellement pour optimiser
ce paramètre.
4.6.3
Domaine du bâtiment
Dans le domaine du bâtiment, les Euroclasses ont introduit en matière de réaction au feu un
paramètre relatif aux fumées. Celles-ci n’étaient pas considérées auparavant dans la
réglementation française. La réglementation du domaine du bâtiment est établie par l’arrêté du
21 novembre 2002 relatif à la réaction au feu des produits de construction et d’aménagement
(Décision 2000/147/CE de la Commission (JOCE du 23/02/2000) [17].
Les essais de référence, NF EN 13823 (matériaux de construction) et NF EN ISO 9239
(revêtements de sol) sont ainsi équipés d’un opacimètre en lumière blanche. La mesure est
réalisée en continu.
Les paramètres retenus sont le SMOGRA, exprimé en m²/s², et qui correspond à l’indice de
croissance du RSP, ainsi que le TSP (voir paragraphe 4.2). Ils permettent d’établir la
classification additionnelle « fumée », qui est notée s1, s2 et s3 en fonction du niveau de
performance atteint.
D’autres exigences « fumées » existent dans le bâtiment : Le système de désenfumage est
rendu obligatoire dans certains locaux par le Code du Travail (article R 235.4.8 du décret
n°92.332 du 31 mars 1992). Il est précisé pour les établissements recevant du public (ERP)
par les articles DF et l’Instruction Technique 246, révisés par l’arrêté du 22 mars 2004 [18], et
par la R17 de l’APSAD pour les bâtiments industriels.
L’Instruction Technique 246 décrit un ensemble de dispositions ou la possibilité de recourir à
l’ingénierie du désenfumage afin de dimensionner un système de désenfumage dans les ERP.
Les objectifs de sécurité retenus sont ceux de l’article DF1, c’est à dire l’extraction en début
d’incendie d’une partie des fumées et gaz de combustion de sorte que les cheminements
destinés à l’évacuation du public restent praticables.
Effets du feu sur les personnes
Page 63/163
Les critères cités par exemple sont :
- la hauteur exempte de fumée mesurée depuis le sol doit être suffisante, et toujours
supérieure à 1,8 m,
- le flux de chaleur reçu par les personnes doit être supportable.
Les critères restent cependant imprécis. Le législateur estime que cet objectif de sécurité est
rempli par l’approche descriptive ou par le recours à l’ingénierie du désenfumage.
4.7
Conclusions sur les modèles de visibilité
Deux familles de méthode d’évaluation de l’opacité des fumées existent. Les méthodes
directes se basent sur la mesure du coefficient d’extinction des fumées ou d’un autre
paramètre optique similaire. Les méthodes indirectes mettent en relation la masse de
combustible considéré à la production de suies par l’intermédiaire d’un facteur caractéristique
du combustible.
L’opacité étant déterminée, il convient de choisir le modèle adéquat pour la corréler à la perte
réelle de visibilité. L’évaluation de la visibilité est un paramètre primordial de la sécurité
incendie.
Néanmoins, par analogie avec la toxicité, il est difficile d’apprécier les variabilités d’effets au
sein des populations. C’est pourquoi, en supposant une loi de variabilité des individus de
forme normale, le critère de sécurité choisi doit être élevé. Ainsi, pour une visibilité de 10
mètres, le coefficient d’extinction de l’ordre de 0,3 m-1 pour un système réfléchissant (Jin –
K S=3) à 0,15 m-1 (Jin – Chemin d’évacuation inconnu) peut être envisagé. Cette valeur reste
néanmoins à préciser en fonction de l’utilisation.
4.8
Références
[1]
E.J. McCartney - Optics of the Atmosphere Wiley and Sons, New-York (1976)
[2]
C. Crane Human Tolerance Limit to elevated temperature: An empirical approach to
the dynamics of Acute Thermal Collapse - Federal Aviation Administration,
Memorandum Report N° ACC-114-78-2 – 1978
[3]
T. Jin, J. Fire and Flamm. ,vol. 12, p 130 (1981)
[4]
D.J. Rasbash, Fire Intl., 5 (40) 30 (1975)
[5]
V. Babrauskas, Technical note 1103, National Bureau of Standards, Washington
(1979)
[6]
T. Jin, J. Fire and Flamm. , 9, 135 (1978)
[7]
T. Jin T. Yamada, Fire Science and Technology, 5, 79 (1985)
Effets du feu sur les personnes
Page 64/163
[8]
G.W. Mulholland, M.Y. Choi, Measurement of the mass Specific Extinction
Coefficient for Acetylene and Ethene Smoke using the Large Agglomerate Optics
Facility, Proceedings of the Combustion Institute, 27, 1998, pp 1515-1522.
[9]
A. D. Putorti, Design parameters for stack-mounted light extinction measurement
devices, NISTIR 6215, 1999
[10]
A. Tewarson, Generation of Heat and Chemical Compounds in Fires, in SFPE
Handbook of Fire Protection Engineering, Sect 3 p 92 (1995)
[11]
ISO / TS 13571 : 2002 : (Epreuve française) : Composants dangereux du feu – Lignes
directrices pour l’estimation du temps disponible pour l’évacuation, utilisant les
caractéristiques du feu
[12]
ASTM D 5424 : Smoke obscuration of insulating materials contained in electrical or
optical fiber cables when burning in a vertical cable tray configuration
[13]
NF EN 50268 : 2000 : Méthodes d’essai communes aux câbles soumis au feu Mesure de la densité des fumées dégagées par les câbles brûlant dans des conditions
définies. Partie 1 : Appareillage - Partie 2 : Procédure
[14]
DIN 50055 (1989) : Lichtmeßstrecke f. Rauchentwicklungsprüfungen
[15]
ASTM 5485 : Corrosivity using Cone Calorimeter
[16]
ISO 5660 : Essais au feu. Réaction au feu - Débit calorifique des produits du bâtiment
(méthode au calorimètre conique)
[17]
arrêté du 21 novembre 2002 relatif à la réaction au feu des produits de construction et
d’aménagement, JO du 31 décembre 2002 – pp 22126 – 22133
[18]
arrêté du 22 mars 2004 relatif à la révision des articles DF sur le désenfumage et à
l’Instruction Technique 246, JO du 1er avril 2004 – pp 6343 – 6358
[19]
Harvey, R.G. (1991) Polycyclic Aromatic Hydrocarbons:
Carcinogenicity, Cambridge University Press. pp. 11-15
[20]
Soot. Hamins, A. : Environmental Implications of Combustion Processes. Chapter 3,
CRC Press, Boca Raton, FL, Puri, I. K., Editor, 71-95 p., 1993.
Effets du feu sur les personnes
Chemistry
and
Page 65/163
5 Effets thermiques du feu sur les personnes
5.1
Généralités
En 1743, la Marquise de Breteuil, dans son traité sur le feu [10] expliquait déjà : « Les hommes
ne peuvent soutenir la chaleur […] nous mourerions bientôt, si l’air qui nous entoure, fait
seulement monter le thermomètre à 90 degrés », soit environ 45 °C, pour une exposition
prolongée.
Les effets thermiques du feu sur les personnes ont trois principales origines :
-
-
Un débordement de la thermorégulation qui engendre une élévation de la température
corporelle. Comme la fièvre, cette élévation engendre des maux de tête et peut
entraîner la mort au-dessus de 42 °C. L’évacuation de la chaleur par thermorégulation
étant basée sur le principe de l’évaporation de la sueur, l’humidité ambiante est
primordiale ;
Une atteinte des voies respiratoires, caractérisée par un dessèchement ou des brûlures
à différents niveaux : gorge, trachée et bronches, alvéoles pulmonaires ;
Un effet direct sur la peau qui peut être d’origine radiative (flux radiatif incident), sans
contact de la peau avec les fumées, ou lié à la convection et au contact des tissus avec
les fumées.
Ces atteintes peuvent être caractérisées par deux grandeurs : le flux thermique incident et la
température des fumées. Ces grandeurs peuvent correspondre à deux niveaux de sollicitation :
-
Le niveau de sollicitation thermique suffisant pour brûler la peau et les poumons. Il est
comparable à un effet suraigu, c’est à dire aux expositions uniques fortes, mais de
courte durée ;
L’exposition pour laquelle l’hyperthermie est suffisante pour causer une dégradation
des capacités mentales, diminuant la capacité d’évacuation et de survie. Ce niveau est
comparable à un effet subaigu, c’est à dire à une exposition unique moyenne, mais
prolongée.
Il est avéré que des brûlures de l’appareil respiratoire liés à l’inhalation d’air contenant moins
de 10 % d’eau n’ont jamais été observées sans atteintes préalables de la peau. Cela signifie
que la limite de tenabilité liée aux brûlures de la peau est en général plus basse que celle liée
au système respiratoire. Si l’air inhalé est plus chaud que la température corporelle, il est
rapidement refroidi lors de son entrée dans l’organisme. Néanmoins, des brûlures de
l’appareil respiratoire sont observées dès 60 °C dans de l’air saturé en humidité. Cela signifie
que la teneur en eau des fumées est un critère important dans l’effet thermique du feu, en
particulier pour l’atteinte des voies respiratoires.
La notion de dose thermique permet de rendre compte du niveau de sollicitation thermique en
termes de flux et de température, mais aussi de durée d’exposition.
Effets du feu sur les personnes
Page 66/163
5.2
5.2.1
Flux thermique radiatif incident
Effets du flux thermique radiatif
Le flux thermique radiatif participe aux risques pour les personnes et contribue de manière
importante au développement du feu. Avec la température, il présente des risques pour les
personnes : le flux thermique engendre des brûlures directes de la peau en fonction de
l’exposition. Les différents effets pathologiques observés en fonction du flux thermique sont
présentés dans le tableau suivant :
Flux thermique
(kW/m²)
Effet physiopathologique
Effet descriptif ou correspondance
1,0
-
Rayonnement solaire en zone
tropicale
2,5
Limite de tenabilité de la peau en
30 minutes
-
5,0
Cloques en 30 secondes
Bris de vitres par effet thermique
8,0
-
Début de combustion spontanée du
bois
9,5
Seuil de douleur en 6 secondes
-
90,0
Destruction immédiate des tissus
150,0
-
Rayonnement émis par une surface
chaude (<850°C)
Rayonnement émis par une surface
très chaude (1000°C)
Tableau 16 : Effets du flux thermique radiatif
Le tableau et différentes sources bibliographiques donnent une limite de tenabilité de la peau
de 2,5 kW/m². Le flux radiatif dépend strictement de la direction de propagation, car il est de
nature électromagnétique. Il échauffe donc en priorité les zones corporelles en regard direct
avec la source. Ainsi, une partie du corps peut être exposée intensément, les autres parties
restant dans de l’air frais.
La température de la peau dépend alors du bilan thermique se produisant à sa surface, donc du
flux incident, mais aussi du flux de chaleur évacué dans le corps plus particulièrement par le
sang. Ces considérations expliquent la présence d’un seuil net de 2,5 kW/m², au-delà duquel
le sang ne peut plus assurer l’évacuation du flux de chaleur incident.
Ce bilan thermique dépend donc du flux incident, de l’émissivité de la peau (ou plus
exactement son coefficient d’absorption), mais aussi du débit de circulation du sang sous la
peau et de la proximité des vaisseaux de la surface. Parmi les populations, très peu de
différences existent à ce niveau entre les individus. La valeur de l’émissivité de la peau
humaine est de (0,98 ± 0,01), quelle que soit la couleur et en tout point du corps [11] [12].
Effets du feu sur les personnes
Page 67/163
Trois sources de flux thermique radiatif sont à considérer dans l’incendie :
-
Le flux thermique direct émis par le foyer. Il se propage en ligne droite depuis ce
foyer. Il est le plus intense en terme de flux, mais est localisé et les personnes ne sont
pas nécessairement soumises à son action durant un temps prolongé lors de
l’évacuation. L’effet porte en général vers la face et les membres supérieurs. Dans le
cas d’un feu pleinement développé, ce flux thermique peut porter à de longues
distances et engendrer des effets « domino ». C’est pourquoi il est particulièrement
traité dans le suivi des conséquences à distance des feux très développés (dommages
collatéraux, possibilités d’intervention) ;
-
Le flux thermique issu de la fumée est lié à son émissivité et à sa température. Dans un
système stratifié, toute la surface sous les fumées reçoit de celles-ci un flux radiatif
fonction de la puissance quatrième de la température des fumées. Cette source est celle
décrite au paragraphe 3. Elle assimile les fumées à un corps gris, voire noir. Dans ce
cas, l’effet peut être considérable pour les personnes en cours d’évacuation, même à
des distances importantes du foyer. L’effet est en général dirigé vers le sommet du
crâne et les épaules ;
-
Le flux thermique issu des parois. Une paroi thermiquement fine peut s’échauffer et
transmettre du flux par rayonnement sans pour autant qu’il y ait de passage de fumées.
C’est le cas dans les incendies de navires à cloisonnements métalliques non protégés
(hors cantons), ou par exemple pour les personnes présentes après l’extinction d’un
feu : Les murs se comportent alors comme un corps gris et rendent la chaleur
accumulée sous forme de rayonnement, selon la loi de Stefan-Boltzmann.
5.2.2
Temps d’atteinte des effets incapacitants
La limite de tenabilité de la peau au flux thermique radiatif est estimée à 2,5 kW/m², pour une
exposition voisine de 30 minutes. Aucun effet significatif n’a été observé sur les capacités des
personnes et pour le temps nécessaire à l’évacuation pour ce niveau de sollicitation.
Au-delà de cette valeur, le délai de brûlure de la peau a été décrit par Stoll et. al [8] . Ce délai
correspond à l’apparition de brûlures du second degré. Il est établi d’après l’équation :
t Irad = 4 ⋅ Q −1,35
avec :
tIrad
Q
: temps de tenabilité, exprimé en minutes;
: flux radiatif incident, exprimé en kW/m²
Effets du feu sur les personnes
Page 68/163
L’incertitude sur le temps calculé par cette équation est estimée à 25 %. Le tracé de ces
valeurs est présenté ci-dessous :
.
Effet radiatif du feu
2.0
Temps d'incapacitation (min)
1.8
1.6
1.4
1.2
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
0.0
1.0
2.0
3.0
4.0
5.0
6.0
7.0
8.0
9.0
Flux radiatif incident (kW/m²)
Figure 27 : Effet du rayonnement thermique sur les personnes
5.2.3
Dose thermique radiative
Il est possible de considérer que l’occupant accumule une dose de chaleur amenée par
rayonnement au cours du temps. Une dose de flux radiatif accumulé par minute peut alors être
définie par rapport à l’équation précédente.
Définir une dose thermique radiative seule n’est néanmoins pas nécessairement pertinent, car
le rayonnement n’est pas toujours majoritaire dans l’effet thermique sur les personnes. Une
dose thermique globale, prenant en compte les différentes sources de chaleur, est décrite au
paragraphe 5.4.
5.3
5.3.1
Température
Effet de la température
La température a différents effets physiopathologiques sur l’homme. En particulier, une
exposition courte à de hautes températures engendre des effets directs tels que des brûlures du
derme ou de l’appareil respiratoire, alors qu’une exposition plus modérée peut n’engendrer
que de l’hyperthermie.
Les recherches réalisées lors de l’essai de feu d’école de Los Angeles de 1959 [3] a montré
qu’une température de 66 °C à une hauteur de 1,5 m conduisaient à des conditions critiques
pour l’évacuation. Le NRCC (Canada) a conclu [4] qu’une température de 150 °C était la
Effets du feu sur les personnes
Page 69/163
température maximum de l’air pouvant être respiré durant une période très courte, l’air étant
parfaitement sec. D’autres études [5] ont montré qu’une exposition à 100 °C représente un
niveau suffisant pour engendrer l’hyperthermie et des brûlures locales en 2 à 5 minutes.
L’effet de la présence de vapeur d’eau, présente dans les fumées en quantités importantes,
engendre des effets à des températures inférieures. Dans l’air humide, des brûlures de la peau
sont observables à 100 °C, et toute évacuation devient impossible dès 150 °C [5]. Une table
croisant température, effet physiopathologique et durée de tenabilité a été établie par l’US
Navy [6] et est présentée ci-dessous :
Température
Incapacitation
Létalité
90 °C
35 minutes
60 minutes
150 °C
5 minutes
30 minutes
190 °C
Immédiate
15 minutes
200 °C
Dommages irréversibles aux voies respiratoires
340 °C
Mort instantanée
Tableau 17 : Effets de la température sur les personnes – données US Navy
Le tracé graphique des données de létalité est présenté ci-dessous :
Effet létal de la température
y = 0.0012x2 - 0.8000x + 121.8750
R2 = 1.0000
70
60
Délai de létalité (min)
.
50
40
30
20
10
0
80
100
120
140
160
180
200
Température (°C)
Figure 28 : Effet de la température sur les personnes– données US Navy
Ces valeurs sont données pour de jeunes soldats entraînés et ne reproduisent donc pas
nécessairement le comportement d’une population civile, la population considérée étant
vraisemblablement plus résistante du fait de son jeune âge et de sa condition physique.
Effets du feu sur les personnes
Page 70/163
5.3.2
Temps d’atteinte des effets incapacitants
Comme pour le flux radiatif, le délai d’incapacitation suite à l’effet de la chaleur apportée par
convection en contact d’un gaz chaud peut être calculé. Cette incapacitation correspond au
délai d’apparition de brûlures et de douleurs importantes. Deux relations ont été établies, en
fonction du niveau d’habillage des personnes, les habits jouant le rôle d’isolant thermique par
rapport à l’échauffement. Ces relations sont valables pour des teneurs en vapeur d’eau des gaz
inférieures à 10 %.
La relation établie pour les sujets complètement habillés (hiver, pantalon, bras couverts) est
présentée ci-dessous [9] :
(
)
t Iconv = 4,1× 108 ⋅ T −3,61
La relation pour des sujets légèrement vêtus (T-shirt, short, robe légère) est la suivante [7] :
(
)
t Iconv = 5 × 107 ⋅ T −3, 4
avec :
tIconv : temps de tenabilité, exprimé en minutes;
T
: température du gaz, en °C
Ces deux équations sont empiriques et ont une incertitude estimée à 25 %. Le tracé des
valeurs est présenté ci-dessous :
.
120.0
Temps d'incapacitation (min)
Effet thermique convectif du feu
100.0
Sujet largement vêtu
Sujet légèrement vêtu
80.0
60.0
40.0
20.0
0.0
50
70
90
110
130
150
170
190
Température (°C)
Figure 29 : Effet incapacitant de la température sur les personnes
Effets du feu sur les personnes
Page 71/163
Pour un sujet légèrement vêtu, la température de 67 °C engendre des effets incapacitants en
30 minutes. Cette valeur est conforme à celle de la référence [3] et peut être utilisée dans les
études de danger pour les expositions courtes. Une exposition prolongée à 42°C peut elle
aussi entraîner la mort, par débordement de la thermorégulation, mais pour des temps
d’exposition longs.
5.3.3
Dose thermique convective
Des douleurs dues à l’hyperthermie ou aux brûlures apparaissent rapidement chez les victimes
d’un incendie. Une équation de « Fractional Effective Dose » a été développée pour la chaleur
et est présentée dans la norme ISO 13571 [1]. La relation établie est la suivante :
FEDchaleur = 1 / exp(5,1849 − 0,0273.T )
Dans cette équation, T est la température en degrés Celsius.
5.4
Dose thermique globale
La réponse des personnes à une sollicitation thermique est liée à un effet dose de chaleur sur
une durée d’exposition. Une exposition courte à une forte sollicitation radiative ou convective
est en général moins tolérable qu’une exposition plus longue à une sollicitation moindre, du
fait de la nature des effets mis en jeu : brûlures dans le premier cas et hyperthermie dans le
second. La dose totale reçue par des personnes exposées durant un temps donné peut être
calculée pour un feu donné d’après la formule [1] :
FED =
t2
t1
1
t Irad
+
1
t Iconv
∆t
Les termes tIrad et tIconv de l’équation correspondent respectivement aux valeurs présentées aux
paragraphes 5.2.2 et 5.3.2.
Dans le cas où le flux radiatif serait inférieur au seuil de 2,5 kW/m², le premier terme de
l’équation est éliminé. La FED est basée sur une variation dans la susceptibilité des
populations. Ainsi, l’atteinte d’une FED de 1 signifie que 50% d’une population subit de
sévères effets thermiques gênant l’évacuation et entraînant des brûlures conséquentes. Une
valeur de 0,3 correspond à l’atteinte de 11,4 % de la population.
Effets du feu sur les personnes
Page 72/163
5.5
5.5.1
Utilisation de l’évaluation de l’effet thermique sur les personnes en
France
Instruction technique 246
L’instruction technique 246 constitue l’annexe 3 de l’arrêté du 22 mars 2004, relatif au
désenfumage des établissements recevant du public. La réglementation propose dans le
chapitre 8 de cette annexe la possibilité d’utiliser l’ingénierie du désenfumage afin de valider
les prescriptions relatives au désenfumage.
Dans ce chapitre, il est demandé de remplir l’objectif de l’article DF1, c’est à dire d’extraire,
en début d’incendie, une partie des fumées et gaz de combustion de telle sorte que les
cheminements destinés à l’évacuation du public restent praticables.
Les critères proposés sont que la hauteur libre de fumée soit suffisante, c’est à dire toujours
supérieure à 1,8 m, mais aussi que le flux de chaleur reçu par les personnes soit supportable.
Néanmoins, aucun critère n’est proposé. Les paragraphes précédents peuvent apporter des
éléments de réponse satisfaisants pour remplir cet objectif.
5.5.2
ICPE soumises à autorisation
Une recommandation sur les niveaux de flux thermique existe dans l’arrêté du 29 septembre
2005, relatif à l'
évaluation et à la prise en compte de la probabilité d'
occurrence, de la
cinétique, de l'
intensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents potentiels
dans les études de dangers des installations classées soumises à autorisation (JO n° 234 du 7
octobre 2005).
Des valeurs de référence sont définies pour les structures et pour les personnes. Les valeurs
ont pour but de déterminer les conséquences environnementales d’un feu à grande échelle.
Les critères retenus pour les structures sont les suivantes :
Flux
Effet
5 kW/m²
Destructions de vitres significatives
8 kW/m²
Seuil des effets domino, correspondant au seuil de dégâts graves sur les
structures
16 kW/m²
Seuil d'
exposition prolongée des structures, correspondant au seuil des dégâts
très graves sur les structures, hors structures béton
20 kW/m²
Seuil de tenue du béton pendant plusieurs heures et correspondant au seuil des
dégâts très graves sur les structures béton
200 kW/m²
Seuil de ruine du béton en quelques dizaines de minutes
Tableau 18 : Effets du flux thermique radiatif sur les biens selon l’arrêté du 29 sept. 2005
Effets du feu sur les personnes
Page 73/163
Les critères proposés pour les effets radiatifs sur les personnes sont accompagnés de valeurs
exprimées en flux et en dose :
Flux
Dose
Effet
3 kW/m²
600 [(kW/m²) 4/³].s
5 kW/m²
1 000 [(kW/m²) 4/³].s
8 kW/m²
1 800 [(kW/m²) 4/³].s
Seuil des effets irréversibles délimitant la « zone des dangers
significatifs pour la vie humaine »
Seuil des effets létaux délimitant la « zone des dangers graves
pour la vie humaine » mentionnée à l'
article L. 515-16 du
code de l'
environnement
Seuil des effets létaux significatifs délimitant la « zone des
dangers très graves pour la vie humaine » mentionnée à
l'
article L. 515-16 du code de l'
environnement
Tableau 19 : Effets du flux thermique radiatif sur les personnes selon l’arrêté du 29 sept. 2005
Ces valeurs sont à comparer avec le seuil de 2,5 kW/m², correspondant à un effet incapacitant
en 30 minutes. Seul l’effet radiatif est évalué dans les ICPE. Dans l’étude d’impact, les zones
correspondant aux différents niveaux de flux sus-cités doivent être déterminées.
5.6
Références
[1]
ISO / TS 13571 : 2002 (Epreuve française) : Composants dangereux du feu – Lignes
directrices pour l’estimation du temps disponible pour l’évacuation, utilisant les
caractéristiques du feu
[2]
INRS ED 789 - Incendie et lieux de travail
[3]
Operation School Burning, National Fire Protection Association, Boston, MA, USA,
269, 1959
[4]
Shorter, G.W. et al. “The St Lawrence Burns”, NFPA Quarterly, 53, (4), pp. 300-316,
avril 1960
[5]
Budnick E.K., Klein D.P. and O’Laughlin R.J., “Mobile Home bedroom Fire Studies:
The role of Interior Finish”, National bureau of standards Interim report (NBSIR) 781531, Septembre 1978
[6]
“Naval ships technical manual (NSTM) Chap.555 – Volume 1, Surface ship
firefighting” S9086-S3-STM-010/CH-55V1R9, Naval Sea System Command,
Washington DC, Décembre 2001
[7 ]
D.A. Purser. Toxicity Assessment of Combustion Products, in SFPE Handbook of Fire
Protection Engineering, P. J. DiNenno, Ed., 2nd ed., National Fire Protection
Association, Quincy, MA, Sect. 2, 1995, pp. 85-146
[8]
A. M. Stoll, M.A. Chianta Method and Rating System for Evaluation of Thermal
Protection, Aerospace Medicine, 40, 1969, pp. 1232-1238
Effets du feu sur les personnes
Page 74/163
[9]
C. Crane. Human Tolerance Limit to Elevated Temperature: An Empirical Approach
to the Dynamics of Acute Thermal Collapse, Federal Aviation Administration,
Memorandum Report No. ACC-114-78-2, 1978
[10]
« Dissertation sur la nature et la propagation du feu », Marquise de Breteuil, Paris,
Académie des Sciences (1738), Prault Fils Paris, édition 1744, Bibliothèque Nationale
de France
[11]
Fraden J., Medical infrared thermometry (review of modern techniques), Temperature
Its Measurement and Control in Science and Industry (TIMCSI), 1992, 6, 2, 823-830.
[12]
Love T. J., in: Shitzer A., Eberhart R. C. (ed.), Heat transfer in medicine and biology,
Plenum Press, 1985, vol. 2, 334-340.
Effets du feu sur les personnes
Page 75/163
6 Effets toxiques des effluents du feu
6.1 Définitions
Asphyxiant :
Carboxyhémoglobine :
Produit toxique provoquant la détresse respiratoire d’un
organisme par manque d’oxygène. Cette détresse entraîne une
dépression du système nerveux central avec perte de
connaissance entraînant rapidement le décès. Les gaz
asphyxiants sont principalement le dioxyde de carbone, le
monoxyde de carbone, le cyanure d’hydrogène. L’asphyxie
peut également survenir suite à une raréfaction de l’oxygène,
avec ou en l’absence de gaz asphyxiants.
La saturation en carboxyhémoglobine est le pourcentage
d’hémoglobine converti en carboxyhémoglobine, cette
dernière pouvant provoquer la mort. Ce complexe est formé
par réaction de l’hémoglobine avec le monoxyde de carbone
inhalé.
Courbe Concentration/temps : Représentation graphique de la concentration d’un gaz
toxique en ppm ou d’un effluent du feu en g.m-3 en fonction
du temps.
Dose d’exposition :
Quantité d’un gaz toxique ou d’un effluent du feu disponible
pour l’inhalation, c’est à dire l’intégration de la courbe
concentration/temps.
FEC :
Fractional Effective Concentration - Rapport de la
concentration d’un gaz toxique avec celle qui est supposée
prédire un effet donné sur un sujet exposé à cette
concentration.
FED :
Fractional Effective Dose - Rapport entre le produit Ct d’un
toxique gazeux produit lors d’un essai donné, et le produit Ct
d’un toxique évalué statistiquement à partir de données
expérimentales indépendantes, de façon à provoquer un effet
(létalité) chez 50 % des animaux soumis à l’essai pendant des
périodes d’exposition et de post exposition spécifiées. Les
valeurs temps de ce rapport s’annulant mathématiquement, la
FED n’est donc que le rapport de la concentration moyenne
d’un toxique gazeux et de la valeur de sa LC50 pour une
même durée d’exposition. S’il n’est pas utilisé pour un
toxique spécifique, le terme FED représente la somme des
FED de chaque toxique présent dans une atmosphère de
combustion.
Incapacitation
Impossibilité physique d’accomplir une tâche spécifique : par
exemple évacuer un local encombré par de la fumée.
Effets du feu sur les personnes
Page 76/163
Irritants
Substance qui enflamme les tissus (provoquant ainsi un afflux
de sang) et les organes en provoquant une sensation de
douleur. Les gaz irritants présents dans les effluents du feu
sont principalement le chlorure d’hydrogène, le fluorure
d’hydrogène, le bromure d’hydrogène, les oxydes d’azote,
l’acroléine, le formaldéhyde, l’acétaldéhyde, le dioxyde de
soufre,
l’ammoniac
et
le
sulfure
d’hydrogène.
La stimulation par les irritants des récepteurs nerveux dans les
yeux, le nez, la gorge et la trachée-artère entraînent divers
stades d’inconfort et de douleur causés par les réactions
physiologiques de défense.
Lethal exposure dose 50 :
La LCt50 est le résultat de la multiplication de la
concentration d’un gaz toxique par le temps d’exposition qui
entraîne la mort de 50 % d’une population d’animaux d’essai
d’une espèce donnée, dans des conditions spécifiées. Elle est
exprimée en grammes minute par mètre cube.
Lethal concentration 50 :
La LC50 est la concentration d’un gaz toxique exprimée en
ppm ou en g.m-3, déterminée statistiquement à partir des
concentrations expérimentales qui provoquent le décès de
50 % des animaux après une exposition pendant 30 minutes et
une post-exposition de 14 jours. Des valeurs similaires
peuvent être obtenues pour 5 % ou 1 % de la population.
Narcotique :
Substance qui provoque une altération des capacités
physiques, comme par exemple la possibilité de s’échapper,
ou une perte de connaissance.
Produit Ct / dose d’exposition : Le produit Ct pour un toxique gazeux (ppm.min) ou pour un
effluent du feu (g.m-3.min) est obtenu par intégration de la
courbe concentration – temps dans un environnement.
Toxique :
Substance nocive pour les organismes vivants. On distingue la
toxicité aiguë, à effet immédiat pour une exposition unique,
de la toxicité chronique obtenue par accumulation de
multiples expositions, ou d’une exposition faible mais
prolongée.
Note : Ces définitions complètent celles officielles présentées dans la norme
NF EN ISO 13943 : Sécurité au feu – Vocabulaire.
Effets du feu sur les personnes
Page 77/163
6.2
6.2.1
Le danger lié à la toxicité des fumées
Généralités
Les fumées sont la principale cause de mortalité lors d’un incendie. De nombreux travaux ont
montré que c’est leur inhalation qui va faire le plus de victimes [1-4]. Les fumées sont
dangereuses en raison des produits toxiques qu’elles contiennent, pour leur température
élevée et pour leur opacité qui désoriente les victimes en les empêchant de trouver rapidement
la sortie. Les paragraphes qui suivent présentent les différents aspects de la toxicité des
fumées. Il faut préciser que les caractéristiques des fumées dépendent beaucoup du type de
sinistre [2] Et de la nature du combustible considéré.
En particulier, certaines notions sont essentielles dans l’évaluation du danger lié à la toxicité
des fumées. La référence [55] fait l’état de l’art de ces notions. L’objectif de sécurité est
défini au travers des critères retenus. En particulier, il convient de s’intéresser aux effets
incapacitants et létaux des fumées, ce qui implique de s’intéresser aux effets des substances
présentes. Ces substances peuvent être irritantes, asphyxiantes ou narcotiques.
6.2.2
Facteurs décisifs pour la survie
Le temps de survie des victimes d’un incendie est inversement proportionnel à la
concentration et à la toxicité des produits dégagés.
• La concentration des produits toxiques dégagés en fonction du temps, la densité de
fumée et la chaleur dépendent de :
La variation de la croissance du feu. Elle dépend du taux de perte de
masse du combustible et du volume dans lequel les gaz sont dispersés.
La quantité de produits toxiques dégagée par unité de masse du matériau
brûlé.
• Le potentiel toxique des produits correspond à la concentration d’exposition
(kg/m3) ou la dose d’exposition (kg.min/m3 ou ppm.min/m3) nécessaire pour
produire des effets toxiques ainsi que les effets équivalents en terme de chaleur et
de diminution de la visibilité. Une évaluation de ces effets nécessite la connaissance
des concentrations ou des doses d’exposition qui réduisent ou empêchent
l’évacuation.
Il est important de noter que pour toute intoxication, le corps humain dispose toujours d’un ou
plusieurs processus de détoxication, qu’il soit mécanique (tapis mucociliaire) ou biochimique.
C’est le débordement de ce processus qui engendre les effets toxiques des substances. Dans
certains cas, ce sont les produits intermédiaires des processus d’assimilation des composés qui
se révèlent toxiques dans l’organisme. L’effet apparaît alors de façon retardée, mais est tout
aussi dangereux.
Un autre critère essentiel est le taux d’absorption du produit par l’organisme. Ainsi certains
produits comme l’acide chlorhydrique ont un taux d’absorption de plus de 90 %, alors que
d’autres comme le benzène ne sont absorbés qu’à raison de quelques pourcents et se
retrouvent majoritairement dans l’air expiré.
Effets du feu sur les personnes
Page 78/163
D’autre part, un soin essentiel doit être apporté à l’évaluation de la toxicité des fumées et à la
période de post-exposition. En effet, certains toxiques ont une action plus ou moins lente,
éventuellement modifiée par la présence de suies. Dans ce cas, des individus assurant leur
évacuation sans incapacitation apparente peuvent décéder des suites de leur exposition
plusieurs heures à plusieurs jours après. C’est pourquoi dans les études portant sur des
animaux l’exposition est toujours suivie d’une période d’observation de 14 jours. Dans les
incendies réels, les personnes exposées aux gaz doivent donc être suivies médicalement
plusieurs jours après leur exposition.
6.2.3
Effet des gaz irritants
Dans la fumée, les principaux irritants sont :
• Les acides inorganiques : les halogénures d’hydrogène (chlorure d’hydrogène (HCl),
bromure d’hydrogène (HBr) et fluorure d’hydrogène (HF)), le dioxyde de soufre (SO2)
et les oxydes d’azote (NOx) [5-6]
• Certains composés organiques tels que les aldéhydes de faible poids moléculaire
(acroléine, formaldéhyde, acétaldéhyde). Actuellement, plus de 20 substances
irritantes ont été mises en évidence dans la fumée.
Lorsque qu’une victime est exposée à une atmosphère irritante, elle ressent tout d’abord une
sensation d’irritation des yeux, du nez, de la gorge, puis des poumons. Cette irritation est
proportionnelle à la concentration en gaz irritant.
Ainsi, pour le chlorure d’hydrogène, il a été montré que l’aptitude des personnes à évacuer
n’est pas compromise pour une concentration comprise entre 100 et 500 ppm. Au-delà de
1000 ppm, l’évacuation devient impossible [7].
Les fumées issues de la combustion des matériaux synthétiques ou naturels comportent de
nombreux composés irritants. Purser [2] a fait l’hypothèse de l’additivité des effets des gaz
irritants. Dans ce cas, le concept de FIC (Fractional Irritant Concentration) peut être introduit
pour évaluer les effets toxiques [8]. La FIC de chaque gaz est obtenue en faisant le rapport
entre la concentration mesurée et la concentration critique (voir le tableau ci-dessous).
Cette concentration critique est considérée comme étant sévèrement irritante pour les
hommes. La FIC totale s’obtient en faisant la somme des FIC individuelles de chaque gaz (1).
Si FICtot atteint l’unité, l’atmosphère devient hautement irritante et toute tentative
d’évacuation devient impossible. Au-delà de cette valeur, la victime peut perdre connaissance.
Le niveau de FIC peut alors atteindre des valeurs traduisant la mise en danger de la vie de la
personne.
FICtot = FICHCl + FICHBR + FICHF + FICSO2 + FICNO2 + FICorg
FICtot =
CSO2
C NO2
C HCl
C
C
+ HBr + HFl +
+
+
CC HCl CC HBr CC HF CCSO2 CC NO2
Effets du feu sur les personnes
COrg
CCOrg
(1)
Page 79/163
Dans cette expression, FICorg représente la somme des FIC de tous les composés organiques.
Les Ci désignent les concentrations observées pour chacune des espèces i. Les CCi
représentent les concentrations critiques de ces espèces i. Les valeurs proposées par Purser
sont reprises dans le tableau suivant :
Gaz irritant
HCl
HBr
HF
SO2
CC (ppm)
200
200
120
30
NO2
80
pour 5 min
d’exposition
25
pour 30 min
d’exposition
Tableau 20 : Concentrations critiques de gaz irritants d’après [2]
Malgré tout, l’auteur précise que l’additivité n’est pas tout à fait vérifiée avec le dioxyde
d’azote puisque la toxicité des mélanges binaires (NO2 et autres gaz toxiques) est plus
importante que celle des deux gaz pris séparément [2].
A basse teneur, il est admis que les irritants ont un effet bronchoconstricteur réflexe qui
diminue la capacité respiratoire et augmentent la fatigue, mais protégeant partiellement les
poumons.
6.2.4
Effet des gaz asphyxiants (ou narcotiques)
Le monoxyde de carbone (CO), l’acide cyanhydrique (HCN) et le dioxyde de carbone (CO2)
sont à l’origine de la presque totalité des décès dus à l’intoxication par les fumées. Les effets
de ces trois espèces sont détaillés ci-dessous :
Le CO est le principal asphyxiant. Il serait responsable de 90 % des décès liés à l’inhalation
de gaz lors d’un incendie. En effet, de nombreuses analyses post-mortem ont mis en évidence
des taux de carboxyhémoglobine suffisamment élevés pour provoquer la mort [9].
Lors d’un incendie, la quantité de CO dégagée est liée à la quantité d’oxygène disponible et à
la nature du matériau qui brûle. Dans la plupart des situations, la production de ce gaz est
importante et rapide. Des concentrations de 7 à 11%, soit 20 fois la concentration létale chez
l’animal, ont été mesurées pour la combustion de 127 kg de matériaux synthétiques dans une
enceinte de 8 m3 [2]. Le rapport CO sur CO2 permet d’autre part d’apprécier l’oxygénation du
foyer.
L’asphyxie par le CO résulte de la complexation de ce gaz avec l’hémoglobine du sang, pour
former un complexe beaucoup plus stable que l’oxyhémoglobine normalement formée avec
l’oxygène (L’oxyhémoglobine est la molécule permettant de véhiculer l’oxygène vers les
organes du corps au moyen de la circulation sanguine). Une étude [10] a montré qu’une
réduction de 50 % de la concentration sanguine en oxyhémoglobine entraîne rapidement le
décès. L’activité physique liée à l’évacuation est aussi un paramètre à prendre en compte pour
évaluer la quantité de CO inhalée, puisqu’un comportement de fuite double la vitesse
d’absorption de ce gaz. Le taux de carboxyhémoglobine dans le sang à partir duquel les
capacités de fuite d’un homme sont altérées est de l’ordre de 30 % [4]. Au niveau
Effets du feu sur les personnes
Page 80/163
intracellulaire, l’asphyxie se manifeste aussi par une inactivation de certains enzymes
responsables de la respiration.
Le cyanure d’hydrogène (HCN) figure parmi les gaz faisant le plus de victimes lors des
incendies. Cet asphyxiant peut même provoquer le décès plusieurs jours après l’inhalation, ou
entraîner des problèmes respiratoires chroniques [11]. Les molécules d’HCN provoquent
l’asphyxie par inhibition de la respiration au niveau des mitochondries, qui sont les organites
énergétiques des cellules. Le mécanisme d’asphyxie est en effet lié à l’action des ions cyanure
sur la cytochrome-oxydase, enzyme terminale de la respiration mitochondrienne.
Le troisième asphyxiant par le nombre de ses victimes est le dioxyde de carbone (CO2). Ce
gaz provoque un phénomène d’hyperventilation, qui va accroître la quantité de gaz toxiques
inhalée [12]. A forte dose, son action isolée engendre des effets narcotiques similaires à ceux
de CO, la pression partielle de CO2 étant suffisante pour que l’oxygène soit remplacé par ce
dernier au-niveau de l’hémoglobine.
La principale difficulté réside dans l’estimation de l’effet de synergie existant entre gaz
asphyxiants d’une part, et de l’effet de synergie ou d’antagonisme pouvant exister entre ces
asphyxiants et d’autres gaz.
Enfin, certains décès sont la conséquence d’asphyxie simplement provoquée par la baisse de
la concentration en oxygène aux environs de l’incendie. Ce cas sera traité par la suite.
Les asphyxiants affectent les
qui entraîne rapidement une
début de l’intoxication, les
l’individu est tout d’abord
connaissance.
systèmes cardio-vasculaire et nerveux par sous-oxygénation, ce
perte de connaissance suivie immédiatement par le décès. Au
effets sont peu visibles. Si la durée d’exposition augmente,
dans un état similaire à l’ébriété, puis il perd rapidement
Dans tous les cas, les systèmes nerveux et cardio-vasculaire sont les premiers touchés par les
asphyxiants, car ils sont toujours actifs et consomment l’oxygène. Lorsque la respiration
mitochondrienne est entravée, soit par défaut d’alimentation en oxygène (effet de CO, CO2)
ou perte de la capacité à l’utiliser pour raison enzymatique (effet de HCN), les cellules
touchées meurent rapidement.
Il est important de noter que l’effet toxique dépend de l’activité du système nerveux et du
système cardio-vasculaire. Ainsi, la susceptibilité à l’intoxication est fort différente entre un
sujet au repos et un sujet en activité. De fait, un sujet soumis à la panique s’intoxique encore
plus rapidement.
6.2.5
Variabilité des effets au sein des populations
La plupart des données toxicologiques utilisées pour la détermination de l’effet des fumées
sont issues d’études de laboratoires impliquant des animaux jeunes et en bonne santé. Ces
modèles animaux ne reflètent pas fidèlement le modèle humain, et de nombreux processus
enzymatiques d’intoxication et de détoxication sont différents entre les espèces.
Les valeurs de létalité sont déterminées chez le rat ou la souris, car ces rongeurs ont une
dynamique de population importante permettant des essais sur des populations significatives
avec un taux de reproduction élevé. Néanmoins, leur modèle respiratoire est très différent du
Effets du feu sur les personnes
Page 81/163
nôtre. En présence de CO2, ces espèces ont la capacité de diminuer leur métabolisme, en
ralentissant leur rythme cardiaque et leur rythme respiratoire de manière à ingérer moins de
toxiques. Au contraire, dans la même situation l’homme a tendance à augmenter son rythme
respiratoire et à aggraver son intoxication par les autres espèces.
Des modèles comme les primates sont plus fidèles. En particulier, les expérimentations sur les
babouins se rapprochent du métabolisme des enfants, mais ces essais posent des problèmes
d’éthique, et le taux de reproduction des espèces ne permet pas d’étudier des populations
statistiques conséquentes.
Enfin, au sein même d’une espèce, et en particulier de l’espèce humaine, les variabilités sont
très importantes. Elles ont une origine génétique, mais peuvent aussi être liées aux maladies
passées ou présentes du sujet : tuberculose passée, asthme par exemple. Dans ces souspopulations humaines, certaines sont très importantes. Ainsi, les sous-populations les plus
sensibles sont les jeunes enfants, les personnes âgées, et les asthmatiques (15 % d’enfants et
5 % d’adultes).
Les enfants les plus jeunes sont plus sensibles à l’intoxication car leur métabolisme est plus
rapide. Ils respirent en proportion beaucoup plus de gaz que les adultes, si l’on ramène le
volume d’air inspiré à la masse corporelle. Les personnes âgées sont aussi victimes d’une plus
grande sensibilité. Les personnes souffrant de troubles cardiovasculaires sont très sensibles
aux asphyxiants CO et HCN, qui provoquent un ralentissement puis un arrêt du cœur. Les
asthmatiques et les personnes souffrant d’affections respiratoires (bronchites chroniques, par
exemple) sont particulièrement sensibles aux effets bronchoconstricteurs engendrés par les
expositions aux basses concentrations en irritants. Les fortes concentrations ont également des
effets considérables dans ces populations, la capacité respiratoire initiale étant déjà inférieure
à celle des individus sains.
6.3
Les espèces toxiques à considérer
Dans les fumées de combustion, plus de 200 composés différents peuvent être identifiés. Ce
sont pour la plupart des composés organiques et des oxydes de carbone, mais de nombreuses
espèces peuvent apparaître en fonction du combustible considéré. Certaines sont stables et
d’autres ne subsistent que quelques jours, heures, voire secondes. De nombreux composés se
révèlent toxiques pour l’homme et leur étude doit être approfondie.
Le présent paragraphe décrit les espèces toxiques principales présentes dans les fumées de
combustion des matériaux (hormis la vapeur d’eau), en explicitant leurs effets pathologiques.
Les critères indiqués pour chacun des gaz suivants sont décrits au paragraphe 6.5.
Dans des feux spécifiques, de nombreux autres composés peuvent intervenir dans la toxicité
du mélange gazeux. Il convient alors de se référer à la littérature spécialisée pour déterminer
quelles espèces peuvent être présentes dans les fumées.
Effets du feu sur les personnes
Page 82/163
6.3.1
Dioxyde de carbone CO2
Le dioxyde de carbone est présent en grande quantité dans les fumées de combustion de
presque tous les matériaux. A faible dose, il n’est pas toxique en soi, mais engendre un effet
d’hyperventilation qui augmente les risques d’absorber d’autres polluants.
A forte dose, il présente néanmoins un effet asphyxiant. La table ci-dessous présente les effets
du CO2 sur l’homme [31] .
Pourcentage volumique de CO2 dans
l’air
Effet physiopathologique
10 %
Céphalées 13 et vertiges 14
20 %
Narcose 15
Tableau 21 : Effets physiopathologiques du dioxyde de carbone
6.3.2
Monoxyde de carbone CO
Dès que le dioxyde de carbone est présent dans les fumées, la thermodynamique prévoit la
formation de monoxyde de carbone en proportion variable selon le combustible et les
conditions de ventilation. Pour un feu de méthane en conditions ventilées, très peu de CO est
produit. Au contraire, pour un feu de bois en conditions sous-ventilées, son taux de
production peut être considérable.
Le monoxyde de carbone est exclusivement absorbé par la respiration, et l’intoxication
intervient au niveau pulmonaire. Le CO est toxique par anoxie du fait de son affinité avec
l’hémoglobine 200 fois plus élevée que le dioxygène. La carboxyhémoglobine a donc une
durée de vie beaucoup plus importante, et sa persistance dans le sang est de plusieurs jours.
De ce fait, la dose totale de CO absorbée est à prendre en compte dans le processus
d’intoxication aiguë.
La teneur létale limite admise pour une exposition au CO seul est de 50 % à 60 % de
carboxyhémoglobine. Une teneur de 30 % de carboxyhémoglobine gène l’évacuation. Le
seuil de toxicité admis (incapacitation - SEI) est de l’ordre de 1750 mg/m3.
13
Céphalées : Douleur à la tête, à la périphérie ou au niveau des méninges. (Tiré de BLOUIN, Maurice;
BERGERON, Caroline et all. Dictionnaire de la réadaptation, tome 1 : termes techniques d'
évaluation. Québec :
Les Publications du Québec, 1995
14
Vertiges : Sensation erronée de déplacement des objets environnants par rapport au corps ou inversement.
(Tiré de BLOUIN, Maurice; BERGERON, Caroline. Dictionnaire de la réadaptation, tome 2 : termes
d'
intervention et d'
aides techniques. Québec : Les Publications du Québec, 1997)
15
Narcose : Sommeil provoqué artificiellement par une substance narcotique. Torpeur pathologique. (Tiré de
Terminologie de neuropsychologie et de neurologie du comportement. Recherche et réd. Louise Bérubé. 1991)
Effets du feu sur les personnes
Page 83/163
Une table simplifiée des effets du CO [31] peut être établie :
Pourcentage volumique de CO dans
l’air
Effet physiopathologique
0,01 %
Céphalées
0,05 %
Vertiges
0,1 %
Syncope16
0,2 %
Coma17, mort rapide
0,5 %
Mort immédiate
Tableau 22 : Effets physiopathologiques du monoxyde de carbone
Cette table demeure indicative, car elle ne reprend pas les effets des durées d’exposition. Les
courbes de Chauvin [26] sont plus précises et sont caractéristiques de l’accumulation de CO
dans l’organisme.
Ces courbes permettent de construire, pour une durée d’exposition de 15 minutes, les courbes
d’intoxication au CO en fonction de la teneur dans les fumées, ainsi que la courbe
concentration / temps correspondant à une carboxyhémoglobine de 60 %, considérée comme
rapidement létale.
Ces différentes courbes sont présentées ci-après.
Le monoxyde de carbone est par ailleurs un gaz combustible, en particulier à haute
température, et participe aux phénomènes de roll-over ou de flashover.
16
Syncope : Perte de connaissance brève et temporaire (de quelques secondes à quelques minutes), due à une
anoxie cérébrale par réduction globale de la circulation cérébrale, presque toujours secondaire à une perturbation
cardiovasculaire systémique. (Tiré de Terminologie de neuropsychologie et de neurologie du comportement.
Recherche et réd. Louise Bérubé, 1991)
17
Coma : Dégradation de l'
état de conscience qui empêche la communication réceptive et expressive avec le
milieu environnant. Cet état d'
inconscience duquel le sujet ne peut être éveillé par la stimulation verbale ou
même douloureuse peut être attribuable à une atteinte structurale, à une affection métabolique ou à un agent
toxique exogène ou endogène qui entravent les mécanismes de l'
éveil à différents degrés. (Tiré de Terminologie
de neuropsychologie et de neurologie du comportement. Recherche et réd. Louise Bérubé, 1991)
Effets du feu sur les personnes
Page 84/163
Abaques d'exposition en fonction du temps (sujet en activité)
100
500 ppm
750 ppm
90
1000 ppm
2000 ppm
80
5000 ppm
Carboxyhémoglobine HbCO %
10000 ppm
70
60
50
40
30
20
10
0
0
5
10
15
20
25
30
Temps d'exposition (min)
.
Figure 30 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction du temps – sujet en activité
Effets du feu sur les personnes
Page 85/163
Abaques d'exposition en fonction du temps (sujet endormi)
100
500 ppm
750 ppm
90
1000 ppm
2000 ppm
80
5000 ppm
Carboxyhémoglobine HbCO %
10000 ppm
70
60
50
40
30
20
10
0
0
5
10
15
20
25
30
Temps d'exposition (min)
Figure 31 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction du temps – sujet endormi
Effets du feu sur les personnes
Page 86/163
Exposition au CO - 15 minutes
Activité COHB (%)
Sommeil COHB (%)
100
90
Carboxyhémoglobine (HBCO %)
80
70
60
50
40
30
20
10
0
0
2000
4000
6000
8000
10000
12000
Concentration dans l'air (ppm)
Figure 32 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction de la concentration – exposition de 15 minutes
Effets du feu sur les personnes
Page 87/163
Intoxication par CO
(Effet de CO seul - teneur critique pour 60% HbCO)
12000
10000
Teneur létale (ppm)
8000
6000
Sujet endormi
y = 82665x
-0,8229
2
R = 0,9894
4000
2000 Sujet en activité
y = 34934x
-0,7892
2
R = 0,9768
0
0
60
120
180
240
300
Temps d'exposition (min)
Figure 33 : Rapport concentration / temps pour une carboxyhémoglobine à 60 % (létalité)
Effets du feu sur les personnes
Page 88/163
6.3.3
Cyanure d’hydrogène HCN
Le cyanure d’hydrogène est la forme gazeuse de l’acide cyanhydrique. Il est présent dans les
fumées de combustion de tous les matériaux azotés, naturels (laine, bois…) ou artificiels
(mélamines, polyamides…)
L’acide cyanhydrique est un narcotique puissant. (SEI de 55 mg/m3). Il est, avec le monoxyde
de carbone, la principale cause de risque toxique létal des fumées.
L’acide cyanhydrique est absorbé par la respiration et par la peau. Il se complexe avec la
cytochrome-oxydase, une enzyme essentielle à la production énergétique au niveau
intracellulaire, provoquant ainsi la mort de la cellule par défaut d’énergie. La mesure de la
teneur en cyanure dans le sang donne une indication de la quantité en cours d’assimilation par
l’organisme au moment du décès, mais est insuffisante pour caractériser totalement
l’intoxication, le cyanure ayant déjà agi n’étant pas révélé par cette mesure (voir
paragraphe 6.6.7). De plus cette teneur décroît, même après le décès car le cyanure continue à
être assimilé.
La courbe de létalité de HCN[27] dans l’air est présentée ci-après.
Dans l’organisme, une partie du cyanure libre est détoxiqué sous forme de thiocyanates. Une
autre partie se trouve complexée de manière stable avec la cytochrome-oxydase, la rendant
inactive. Une partie est présente sous forme de méthoxyhémoglobine dans le sang. Enfin, une
partie est rejetée sous forme d’acide cyanhydrique par la peau et les poumons.
Effets du feu sur les personnes
Page 89/163
Intoxication par HCN
(Effet de HCN seul)
350
300
Teneur létale (ppm)
250
y = 2064,3x
200
-0,8809
2
R = 0,9945
150
100
50
0
0
60
120
180
240
300
360
420
480
540
Temps d'exposition (min)
Figure 34 : Rapport concentration / temps pour la létalité par HCN seul
Effets du feu sur les personnes
Page 90/163
6.3.4
Composés chlorés et bromés
6.3.4.1 Chlorure d’hydrogène HCl et bromure d’hydrogène HBr
Les acides halogénés (Chlorure d’hydrogène, acide chlorhydrique, bromure d’hydrogène, et
acide bromhydrique) sont des irritants pulmonaires forts (SEI respectivement de 150 et 170
mg/m3) qui provoquent des toux et dyspnées18. Ils peuvent également provoquer des œdèmes
du poumon, même quelques jours après l’exposition. Ils peuvent entraîner une destruction
tissulaire au niveau pulmonaire et brachial [32]. Ils sont considérablement irritants pour les
muqueuses oculaires et gênent la vision [34].
Il est avéré que le risque de létalité dû à HCl n’apparaît que pour les très fortes teneurs.
L’effet combiné d’HCl et d’autres toxiques, en particulier CO et HCN, s’est révélé additif,
bien que sans synergie [32]. Il est à noter que le seuil de détection olfactif de HCl est de 1 ppm,
ce qui est bien inférieur à une concentration pouvant avoir des effets significatifs.
Les données disponibles sur le chlorure d’hydrogène font état d’une LC50 chez le rat de
61 000 mg/m3 pour une exposition de 5 minutes et de 7 000 mg/m3 pour une exposition de
30 minutes.
Les effets du chlorure d’hydrogène ont été étudiés chez les primates, en particulier chez le
babouin qui est un modèle animal transposable à l’homme. Le babouin possède en effet un
système physiologique proche de celui de l’enfant. L’incapacitation n’a pas été observée pour
des doses allant jusqu’à 30 000 ppm sur 5 minutes d’exposition ou 150 000 ppm.min. Aucun
effet sur le système pulmonaire n’a été observé pour une exposition à la concentration de 10
000 ppm durant 15 minutes. La LC50 du chlorure d’hydrogène est de 3120 ppm pour une
exposition d’une heure.
Le bromure d’hydrogène a un mode d’action similaire au chlorure d’hydrogène. A haute
concentration, il engendre des brûlures sévères de la peau, des yeux et des voies respiratoires.
Il peut provoquer des oedèmes pulmonaires retardés fatals. La LC50 du bromure d’hydrogène
est de 2860 ppm.
Ces gaz sont produits par la combustion de matériaux spécifiques (PVC pour le chlorure
d’hydrogène, matériaux ignifugés au pentabromodiphényle pour le bromure d’hydrogène par
exemple)
6.3.4.2 Phosgène
Le phosgène CO(Cl2) s’observe parfois dans les feux de matériaux chlorés. Ce produit
s’hydrolyse instantanément en deux molécules de chlorure d’hydrogène dans l’organisme. Sa
toxicité atteint cependant nettement plus du double de celle d’HCl, du fait que cette
hydratation se produit directement au-niveau du système respiratoire. L’IDLH du phosgène
est ainsi de 2 ppm, pour seulement 100 ppm pour HCl. La LC50 est de 340 ppm (rat, 30
minutes).
18
Dyspnée : Difficulté ou gêne à la respiration. (A. DOMART, J. BOURNEUF - Nouveau Larousse médical.
Paris 1981.)
Effets du feu sur les personnes
Page 91/163
6.3.4.3 Autres composés chlorés
Les dioxines, particulièrement les TCDD (Tétrachlorodibenzodiphényles) sont parfois
présentes mais toujours en faibles quantités. La nature exceptionnelle des incendies permet de
s’affranchir de l’étude de ces composés, qui sont caractérisés par une bio-accumulation dans
les graisses et donc un effet toxique non pas aigu, mais chronique. Ces composés sont en
revanche étudiés dans l’incinération.
6.3.4.4 Autres composés bromés
Des composés organobromés étaient couramment utilisés comme retardateurs de flammes
dans les matériaux synthétiques et pouvaient se retrouver en faibles traces dans les fumées.
Néanmoins, leur usage est de plus en plus restreint.
6.3.5
Fluorure d’hydrogène HF
L’acide fluorhydrique est un irritant puissant (SEI de 17 mg/m3). Il produit des brûlures
immédiates de la peau et des muqueuses qui s’aggravent secondairement. Comme tous les
irritants, les yeux et le système respiratoire sont fortement touchés et HF peut conduire à
l’œdème retardé du poumon.
Le fluorure d’hydrogène forme l’ion fluorure dans l’organisme. Cet ion s’associe aux ions
calcium (hypocalcémie), ce qui engendre des troubles cardiaques et neurologiques. La LC50
constatée chez le singe est de 1420 mg/m3 pour une exposition de 60 minutes.
Ce gaz est produit lors de la combustion de certains matériaux naturels (laine) ou synthétiques
(PTFE, PVDF, PVF2…). Dans le cas de combustion d’une matrice ne contenant pas
d’hydrogène (cas d’un PTFE pur par exemple), le gaz produit est du difluorocarbonyle COF2.
Ce produit s’hydrolyse instantanément en deux molécules d’acide fluorhydrique dans l’eau ou
au contact des tissus humains. Comme le phosgène, ce composé est nettement plus toxique
que HF.
6.3.6
Produits soufrés
6.3.6.1 Dioxyde de soufre SO2
Le dioxyde de soufre (SO2) est un irritant fort (SEI de 260 mg/m3). La toxicité est liée à la
dissolution de sulfites dans le sang19. Les symptômes s’observent essentiellement au-niveau
du système respiratoire. A faible concentration (moins de 50 ppm), il a essentiellement une
action au-niveau des voies supérieures, mais des concentrations plus fortes (800 ppm / 8h)
peuvent conduire à l’œdème laryngotrachéal ou pulmonaire.
Cet effet est souvent retardé, du fait de l’action antagoniste du tapis-roulant mucociliaire
(remontée permanente de mucus par des cils depuis les poumons vers les voies supérieures).
19
Le dosage des S-sulfites dans le plasma est un excellent indicateur de l’intoxication par le dioxyde de soufre.
Effets du feu sur les personnes
Page 92/163
Le dioxyde de soufre réagit aussi avec la cornée, engendrant une kératite et une inflammation
de l’iris.
6.3.6.2 Sulfure d’hydrogène H2S
Le seuil de détection olfactif très faible de ce gaz est de 0,1 ppm. Les effets irréversibles sont
observés pour des teneurs de 360 ppm pour une exposition de 10 min, 330 ppm pour 20 min
ou 300 ppm pour 30 min. La létalité est observée pour des expositions de l’ordre du double de
ces valeurs, ou de 440 ppm durant une heure [36].
Le sulfure d’hydrogène présente deux effets. Le premier est une irritation locale des yeux, du
nez et de la gorge (observé au-dessus de 100 ppm), pouvant conduire à l’œdème pulmonaire
retardé. Le second est un effet asphyxiant similaire à celui de HCN dans son mode d’action.
Une teneur de 1000 ppm engendre le décès en quelques minutes. 500 ppm provoquent coma,
œdème pulmonaire et une mort rapide sans traitement [37].
Le sulfure d’hydrogène est un gaz extrêmement inflammable, surtout généré par la pyrolyse
des produits soufrés (caoutchoucs par exemple). Quand sa présence est détectée, il est
toujours observé à faible dose et accompagné des autres effluents soufrés.
6.3.6.3 Disulfure de carbone CS2
Le disulfure de carbone est présent à l’état de traces dans les fumées de combustion. Le
produit a une odeur forte très spécifique (odeur de « camembert »), olfactivement détectable
dès 0,1 ppm. Etant peu soluble dans l’eau, il est donc peu absorbé par l’organisme. Il est
assimilé par la respiration et dans une moindre mesure par voie cutanée. Son effet est
principalement une atteinte du système nerveux central.
La LC50 par inhalation est de 8000 ppm pour le rat, sur une exposition de deux heures. Cette
dose est considérable par rapport aux quantités présentes dans les fumées et son étude n’est
que secondaire devant les autres toxiques. Ses effets chroniques sont néanmoins plus
importants.
C’est un gaz extrêmement inflammable qui réagit avec des espèces oxydantes (NOx). Il se
décompose progressivement dans l’air en oxydes de carbone et SO2.
6.3.6.4 Autres produits soufrés
Il existe par ailleurs d’autres composés soufrés pouvant potentiellement être présents à l’état
de traces dans les fumées, comme les mercaptans et les thiols. Bien que ces composés
puissent être relativement toxiques, ils ne sont pas étudiés ici du fait de la faible proportion
qu’ils peuvent représenter.
Effets du feu sur les personnes
Page 93/163
6.3.7
Oxydes d’azote NO
La chimie des oxydes d’azote dans les fumées de combustion est très complexe. Il existe de
nombreuses espèces différentes, et de nombreux équilibres entre elles. Ils sont issus de la
combustion de matériaux azotés, en particulier ceux présentant des groupes nitrés. Les
principaux oxydes d’azote rencontrés sont le monoxyde d’azote NO, et dans les feux les plus
chauds et ventilés, le dioxyde d’azote NO2. En dessous de températures de flamme de l’ordre
de 800°C, NO sera majoritaire devant NO2.
Les oxydes d’azote NO et NO2 sont des irritants puissants (SEI NO2 à 100 mg/m3). Ils
provoquent toux et larmoiements qui gênent l’évacuation. Une forte dose peut conduire à la
mort par œdème pulmonaire aigu. Le NO2 est de loin le plus toxique des oxydes d’azote.
La toxicité de NO2 vient de son absorption par l’eau présente à la surface des cellules
pulmonaires. La toxicité des oxydes d’azote est donc principalement liée à leur solubilité dans
l’eau.
Le protoxyde d’azote N2O s’observe parfois dans les fumées de combustion des matériaux
azotés. C’est un gaz anesthésique. Sa toxicité n’intervient que pour de fortes doses, inhalées
sur une durée très prolongée. Dans ce cas une atteinte du système nerveux et de la moelle
osseuse apparaît du fait d’une interaction sur le métabolisme de la vitamine B12.
Il existe d’autres oxydes d’azote, plus ou moins stables. Ils sont tous présents à l’état de traces
comparativement aux trois précédents. En particulier, N2O5 ou NO3 peuvent exister. NO2 est
toujours présent sous forme de monomère NO2 et de dimère N2O4.
6.3.8
Aldéhydes
Les aldéhydes sont des composés issus de la dégradation à température relativement modérée
des produits contenant une double liaison carbone-oxygène, de préférence en extrémité de
chaîne. Ils sont détruits à haute température et sont ainsi rarement présents dans les feux très
chauds et bien ventilés. Au contraire, ils peuvent abonder dans les combustions incomplètes.
Les principaux combustibles dégageant ces produits sont les résines formo-phénoliques, ou
les panneaux de bois agglomérés à la résine formaldéhyde (Panneaux de type Médium…)
Les aldéhydes sont des produits extrêmement irritants à faibles doses. Les plus courants dans
les effluents du feu sont le formaldéhyde, l’acétaldéhyde et dans une moindre mesure
l’acroléine. Du fait du fort pouvoir irritant de ce dernier, son effet peut être considérable.
Généralement, s’intéresser au formaldéhyde et à l’acroléine suffit à caractériser l’effet de ces
espèces.
6.3.9
Ammoniac NH3
L’ammoniac est dégagé dans les combustions incomplètes de matériaux azotés, plus
particulièrement dans les phases de décroissance du feu ou lorsque tout l’oxygène a été
consommé. C’est un gaz combustible mais peu inflammable (Limite Inférieure
d’Inflammabilité de 16 %, Limite Supérieure d’Inflammabilité de 25 %). L’inhalation
Effets du feu sur les personnes
Page 94/163
d’ammoniac provoque des irritations intenses et des lésions caustiques des yeux et des voies
respiratoires. Etant très hygroscopique, il est en grande partie absorbé dans les voies
respiratoires supérieures, sans pénétrer massivement jusqu’au niveau pulmonaire.
La LC50 de l’ammoniac est de 10150 ppm pour 10 minutes d’exposition chez la souris ou
4837 ppm pour une heure. De ce fait, ce gaz est à considérer comme un toxique mineur dans
les fumées, car il se retrouve souvent présent, mais à des teneurs généralement bien
inférieures à ce seuil de toxicité et toujours accompagné d’autres composés azotés, en
particulier le cyanure d’hydrogène et les oxydes d’azote bien plus toxiques.
6.3.10 Hydrocarbures
Les hydrocarbures sont présents en grandes quantités lors de combustions incomplètes et
lorsque la production de gaz de pyrolyse est importante (feu couvant prêt à redémarrer,
occurrence de flashover par exemple). Deux grandes familles sont présentes dans les fumées :
les produits de craquage thermique et les dérivés aromatiques.
Dans la période de craquage du combustible solide, différents hydrocarbures légers sont
formés. Ce sont ces espèces qui participent à la combustion. On en retrouve en général des
traces imbrûlées, particulièrement dans les phases de croissance et de décroissance du feu.
Dans cette famille, on retrouve principalement le méthane, mais aussi l’éthane, l’éthylène, le
propane, le propylène et éventuellement des composés en C4. Ces différents composés sont
primordiaux dans le processus de combustion, mais n’ont pas de toxicité aiguë, ni même à
long terme. Ils ne présentent aucun danger immédiat pour les personnes, si ce n’est leur
inflammabilité.
Les dérivés aromatiques présents proviennent également du processus de craquage, mais sont
aussi des résidus de combustion. La présence de noyaux aromatiques dans la flamme
engendre une coloration jaune/orange de celle-ci, mais aussi une augmentation du taux de
rayonnement du foyer. Les dérivés aromatiques présents dans les fumées sont de tailles très
variées, pouvant aller jusqu’aux composés solides (traités aux paragraphes 4 et 7.2).20
Dans ces composés aromatiques, deux groupes sont à distinguer :
•
Le premier comprend les composés à un cycle aromatique : principalement phénol,
benzène, styrène et toluène. Ces composés sont caractérisés par une toxicité
chronique, hormis le phénol qui peut présenter un effet toxique aigu dans les teneurs
rencontrées dans les fumées de combustion. Ces composés sont produits en particulier
si un noyau aromatique est présent dans le motif du combustible : résines et mousses
phénoliques, polystyrène par exemple. Ils sont aussi formés lors des combustions
difficiles, par recombinaison de radicaux éthylène et acétylène dans la flamme jusqu’à
former des cycles aromatiques plus stables.
•
Le second groupe est constitué par des hydrocarbures aromatiques polycycliques
(HAP). Le plus toxique de ces composés est le benzo-a-pyrène. Ces composés se
forment dans la flamme par agrégation des noyaux aromatiques libres. Ils ont une
20
A température ambiante, en général, les composés en C1 à C4 sont gazeux, les composés en C5 à C15 sont
liquides et les composés au-delà de C15 sont solides. La composition des fumées en hydrocarbures gazeux
dépend donc fortement de sa température.
Effets du feu sur les personnes
Page 95/163
toxicité chronique considérable (cancérogènes). Le processus de formation de ces
composés est décrit au paragraphe 4.3 et leur participation à la formation de particules
au paragraphe 7.2.2.
Benzo(a)pyrène – C20H12
Les données relatives à l’exposition au benzène
tableau ci-dessous :
[33]
sont reprises à titre indicatif dans le
Teneur
Effet
25 ppm
Pas d’effet observé
50 à 100 ppm
Céphalées, asthénie
500 ppm
Symptômes accentués
3000 ppm
Tolérance de 30 à 60 minutes
20 000 ppm
Convulsions - Mort en 5 à 15 minutes
Tableau 23 : Effets physiopathologiques du benzène
Le phénol engendre des symptômes similaires, auxquels s’ajoute l’irritation des voies
respiratoires.
6.3.11 Autres produits organiques
6.3.11.1 Acrylonitrile CH2CHCN
L’acrylonitrile est une substance entrant dans la composition de différentes matières
plastiques, principalement les copolymères acrylonitrile-styrène (SAN) ou copolymère
acrylonitrile-butadiène-styrène (ABS). En cas de pyrolyse et de combustion de ces produits,
l’acrylonitrile peut se retrouver présent en quantités non négligeables dans les fumées.
L’acrylonitrile est absorbé par voie respiratoire et cutanée. Il est toxique en exposition aiguë,
et provoque des larmoiements, puis une phase convulsive suivie d’une paralysie fatale. L’effet
est celui des nitriles et cyanures produits dans l’organisme lors de la détoxication. La LC50
observée chez le rat, pour une exposition de 4 heures, est de 470 mg/m3.
La substance a par ailleurs de nombreux effets chroniques à long terme.
Effets du feu sur les personnes
Page 96/163
6.3.11.2 Acide formique HCOOH et acide acétiqueCH3COOH
L’acide formique et l’acide acétique sont utilisés dans la fabrication de nombreux produits
combustibles, comme les résines formo-phénoliques ou les acétates de cellulose par exemple.
La LC50 de l’acide formique chez le rat est de 15 000 mg/m3 pour une exposition de
15 minutes. L’acide formique est un irritant puissant, et un produit inflammable. L’acide
acétique est un irritant à fortes concentrations.
6.3.11.3 Monomères
Dans les fumées de combustion des matières plastiques ou de substances chimiques, il est très
fréquent de retrouver des traces du produit ou du monomère de départ, particulièrement lors
des phases de pyrolyse. Ces produits sont en plus fortement combustibles.
Par exemple, la pyrolyse du PMMA dégage une quantité importante de méthacrylate de
méthyle. Ce composé est toxique par irritation des voies oculaires et respiratoires.
6.4
Les méthodes d’analyse des fumées
6.4.1
Généralités
Pour mesurer correctement l’effet toxique des fumées, il convient de définir quel est l’effet à
étudier : incapacitation ou létalité. Il est souhaitable de connaître ou de rechercher le
maximum d’espèces toxiques potentiellement présentes. Les espèces les plus fréquentes
peuvent par exemple représenter 90 % du potentiel létal des fumées, mais seulement 50 % de
leur potentiel irritant.
L’aspect cinétique de production est aussi essentiel. Certains produits dégagent des quantités
très importantes de toxiques dans les premières minutes, alors que d’autres en dégagent
moins, mais plus longtemps. Il est alors difficile de déterminer dans quel cas les fumées
présentent le plus de danger pour les personnes.
La prévision de l’effet toxique des fumées peut se faire de deux manières :
-
A l’aide de méthodes directes. Ces techniques consistent à exposer un animal servant
de modèle à des fumées de combustion et observer l’effet direct sur la population
animale. Ils sont présentés au paragraphe 6.4.2. Ils sont de moins en moins utilisés, du
fait d’une représentativité plus ou moins bonne des modèles animaux, et de l’éthique
sur ce type d’expérimentation ;
-
A l’aide de méthodes indirectes. Celles-ci consistent à analyser les fumées (paragraphe
6.4.3), puis à comparer les résultats obtenus à des critères (paragraphe 6.5) par
l’intermédiaire de modèles prenant en compte les effets conjoints des différents
paramètres (paragraphe 6.6).
Les méthodes indirectes ont néanmoins de nombreux points sensibles. Ainsi, certains modèles
prennent en compte l’évolution des doses reçues sur une période, alors que d’autres ne
Effets du feu sur les personnes
Page 97/163
s’intéressent qu’à la quantité totale de chaque espèce reçue durant un temps prédéfini. De
plus, les méthodes employées pour analyser les espèces présentes dans les fumées doivent
avoir démontré leur adéquation : limites de détection, sensibilité, justesse et fidélité de la
méthode ou l’existence d’interférents sont les points clés dans le choix d’une méthode.
Enfin pour toutes les méthodes, directes ou indirectes, il convient de toujours retenir qu’une
différence fondamentale peut exister entre des feux de laboratoire à petite échelle et des
situations réelles d’incendies pour lesquelles la variété des combustibles, des températures et
de la chimie de la combustion et de la post-combustion sont essentielles. Des réflexions sont
actuellement en cours pour échantillonner et caractériser la fumée d’incendies réels au sein de
l’ISO TC92/SC3.
6.4.2
Méthodes directes
L’effet toxique des fumées est difficile à évaluer directement. En particulier, la létalité ne peut
être déterminée que sur des modèles animaux. Il est naturellement exclu de faire appel à des
modèles humains, quel que soit le niveau d’exposition. De plus les expérimentations animales
longues et coûteuses sont devenues de plus en plus marginales ces dernières années, voire
totalement interdites dans certains pays européens.
La norme allemande DIN 53436 [22] est un exemple permettant de déterminer
expérimentalement la LC50 d’un cocktail de fumées. Cette norme utilise un montage destiné à
étudier la décomposition thermique de matériaux solides ou liquides dans certaines
conditions, sous un flux d’air. Les rats sont exposés aux gaz toxiques. Des analyses de sang
sont réalisées sur les rats décédés pour doser la carboxyhémoglobine. Une première série de
tests consiste à fixer le débit de l’air dans le tube de décomposition à une valeur constante. Le
mélange des gaz toxiques provenant de la décomposition est dilué avec de l’air frais. Si la
toxicité de ce mélange est trop élevée (100 % des animaux décédés) la quantité d’air frais est
augmentée. De plus, le taux d’oxygène dans la chambre d’exposition est toujours supérieur à
12 %. Le RAIT (Relative Acute Inhalation Toxicity) : rapport entre le nombre de rats décédés
et le nombre de rats présents au début du test peut alors être déterminé.
Pour la deuxième série d’essais, le débit d’air dans la zone de décomposition est fixé à une
valeur constante. Pour chaque essai, le mélange des gaz de décomposition était dilué par une
quantité d’air frais constante, mais différente à chaque fois. Cela donne des concentrations
différentes d’effluents gazeux de décomposition à partir desquelles la relation concentrationlétalité est déduite. Cette méthode permet de déterminer expérimentalement la LC50 du
matériau.
Pour les essais avec les rats, la norme DIN 53 436 conseille d’utiliser d’abord la première
méthode afin de faire le bon choix du volume d’air frais à introduire. Les animaux sont
exposés pendant 30 minutes à ces produits de combustion, puis sont gardés sous surveillance
pendant 14 jours. Outre les tests biologiques sur les rats (pesée au début de l’essai, mesure du
temps jusqu’au décès, analyse de sang, examen par dissection des animaux décédés), les
concentrations en CO, CO2, O2, HCN, HCl dans la chambre d’exposition et la perte de masse
de l’échantillon sont mesurées.
Effets du feu sur les personnes
Page 98/163
Le tableau ci-dessous présente un exemple de LC50 déterminées directement en dynamique
dans une chambre d’exposition, pour plusieurs matériaux[35]. Les LC50 sont ramenées à un
gramme de matériau :
Matériau
LC 50 par gramme
Laine
0,4
Polypropylène
0,9
Polypropylène FR
1,2
Mousse polyuréthane FR
1,3
PVC
1,4
Mousse polyuréthane
1,7
SAN
2,0
ABS
2,2
ABS FR
2,3
Polyamide 6,6
2,7
Coton
2,7
Polyamide 6,6 FR
3,2
Chêne rouvre
3,6
Polystyrène
6,0
Tableau 24 : Exemple de détermination directe de la LC50 par gramme de différents
matériaux
Ces valeurs signifient que, dans le volume d’essai considéré, la valeur de 1 correspond au
seuil de létalité, qui serait produite par la combustion d’un gramme de matériau. Pour que la
combustion de 100 grammes de matière ne produise pas de fumées létales, ce volume devrait
être au moins multiplié par un facteur 100. Ces valeurs sont bien entendu données à titre
indicatif, pour une configuration expérimentale d’exposition. Une étude similaire a été
réalisée dans d’autres conditions et n’a pas montré les mêmes classements entre matériaux.
6.4.3
Méthodes indirectes
Les méthodes indirectes font appel à la caractérisation analytique des fumées en recourant à
des techniques analytiques adaptées. Un modèle tentant de reproduire l’effet cumulé des
différentes espèces analysées est ensuite utilisé. Les différents modèles pouvant être utilisés
font l’objet du paragraphe 6.6. Il est évident que les modèles ne sont efficaces que :
-
Si les analyses permettent de caractériser toutes les espèces présentes ayant un effet
toxique dans les fumées ;
Si le modèle prend bien en compte les effets relatifs de toutes les espèces considérées.
De plus, le modèle peut considérer l’effet cinétique de l’intoxication. On doit alors recourir à
une technique analytique en dynamique permettant d’apprécier cet aspect. A l’heure actuelle,
ces méthodes indirectes sont les seules d’usage courant.
Effets du feu sur les personnes
Page 99/163
Il est important de noter qu’il n’existe pas de méthode universelle d’analyse des gaz toxiques
présents dans les fumées. Il est nécessaire de recourir à de nombreuses techniques différentes
afin d’analyser les fumées de la combustion. L’objet de ce paragraphe n’est pas de présenter
toutes les techniques éprouvées dans le domaine des fumées, mais de déterminer les
paramètres essentiels de celles-ci et les méthodes les plus utilisées.
L’un des points clés de choix d’une méthode est son adéquation avec la matrice gazeuse
constituant les fumées, ainsi que ses limites de quantification et de détection, sa justesse et sa
fidélité (répétabilité et reproductibilité) sur le domaine utilisé.
6.4.3.1 Méthode par FTIR
La méthode d’analyse des gaz par FTIR a été utilisée dans le domaine de la sécurité incendie
suite au programme d’étude européen SAFIR [38]. Ce programme a permis l’élaboration de la
norme ISO 19702. La technique consiste à échantillonner le gaz au travers d’une cellule de
mesure et à enregistrer la réponse spectrale, en général sur la plage de fréquences allant de
650 à 4000 cm-1. A chaque fréquence, la position des bandes d’absorption et leur intensité
permettent respectivement de déterminer la nature des espèces et la quantité présentes.
Cette technique est capable de mesurer des concentrations de l’ordre de moins de 1 ppm pour
les espèces absorbant dans l’infrarouge dans des conditions spécifiques d’analyse. L’analyse
permet la mesure dynamique des concentrations, avec des pas de temps de l’ordre de 5
secondes, ce qui permet de calculer l’évolution de la toxicité des fumées en fonction du
temps. Néanmoins, la technique est onéreuse et demande une formation avancée des
opérateurs.
Effets du feu sur les personnes
Page 100/163
2.6
Sample 10 - Tue Oct 15 13:32:16 1996 - P1 cel. 210 mm 600°C 15
2.4
2.2
2.0
1.8
Absorbance
1.6
1.4
1.2
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
3500
3000
2500
2000
1500
1000
Wavenumbers (cm-1)
Figure 35 : Exemple de spectre FTIR de fumées de combustion.
Effets du feu sur les personnes
Page 101/163
6.4.3.2 Autres méthodes
Les méthodes « classiques » d’analyse sont décrites dans la norme NF ISO 19701 et dans la
norme NF X 70-100. Ces méthodes sont d’usage très courant dans de nombreux laboratoires,
mais ne permettent pas d’approcher la cinétique de dégagement des espèces (hormis pour CO
et CO2).
Beaucoup de ces méthodes sont fondées sur l’absorption ou l’adsorption du gaz dans un
milieu de piégeage, puis sur l’analyse ultérieure du contenu de ce milieu. Ainsi, des gaz
comme le chlorure d’hydrogène et le bromure d’hydrogène sont piégés dans l’eau. Le SO2
requiert un milieu peroxydé, à base d’eau oxygénée, alors que l’hydroxyde de sodium est
adapté à HCN, HF ou NO2. Les aldéhydes requièrent une adsorption sur des médias
particuliers (silice greffée de DNPH) ou une absorption dans un milieu acide saturé en DNPH.
Les HAP peuvent être adsorbés sur du charbon actif.
Les techniques analytiques mises en œuvre après piégeage sont des méthodes
chromatographiques (Chromatographie liquide ionique et chromatographie liquide haute
performance), des méthodes classiques (titrimétrie, électrochimie, spectrocolorimétrie) ou des
couplages de méthodes comme la GC-MS (chromatographie en phase gazeuse couplée à la
spectrométrie de masse).
6.4.3.3 Exemple de méthodes de références
Le tableau ci-dessous présente les méthodes ayant été reconnues comme satisfaisantes pour
analyser le potentiel toxique des fumées de combustion des matériaux d’aménagement du
domaine naval militaire (Norme STANAG 4602 AFAP3). Pour la sécurité à bord des sousmarins, la toxicité des fumées est en effet un paramètre essentiel.
Techniques alternatives
d’analyse
Gaz
Dioxyde de carbone
Monoxyde de carbone
Dioxyde de soufre
Acide fluorhydrique
Acide bromhydrique
Acide chlorhydrique
Acide cyanhydrique
Acrylonitrile
Ammoniac
CO2
CO
NOx
(NO + NO2)
SO2
HF
HBr
HCl
HCN
CH2CHCN
NH3
Formaldéhyde
HCHO
Phénol
Benzène
Styrène
Toluène
Sulfure d’hydrogène
Acide formique
Disulfure de carbone
Acroléine
Acétaldéhyde
C6H5OH
C6H6
C6H5CHCH2
C6H5CH3
H 2S
HCOOH
CS2
CH2CHCHO
CH3CHO
Oxydes d’azote
FTIR, GC
FTIR, GC
Chimie-luminescence,
spectrophotométrie FTIR, IC
Fluorescence UV, FTIR, NDIR
ISE
Titration, FTIR
Titration, FTIR, ISE
Spectrophotométrie, FTIR
GC
Titration, FTIR
IC, GC/MS, Titration,
spectrophotométrie
HPLC
HPLC
HPLC
HPLC
Titration
HPLC
GC
GC/MS, Titration
GC/MS, Titration
Technique d’analyse de
référence
NDIR
NDIR
NDIR
IC
IC
IC
IC
IC
GC/MS
IC
HPLC
GC/MS
GC/MS
GC/MS
GC/MS
IC
IC
GC/MS
HPLC
HPLC
Tableau 25 : Exemple de méthodes de référence pour l’analyse des espèces toxiques
Effets du feu sur les personnes
Page 102/163
6.5
Critères d’exposition
6.5.1
Généralités
La toxicité d’une substance dépend de la notion de dose, c’est à dire de la concentration de
cette substance et du temps d’exposition. Les effets des divers composés ont été décrits aux
paragraphes 6.2 et 6.3. Trois types d’exposition sont à différentier :
-
La toxicité suraiguë ou aiguë, correspondant à une intoxication massive durant un
temps très court ;
La toxicité subaiguë, correspondant à une intoxication unique et élevée, durant un
temps plus ou moins long ;
La toxicité chronique. Cette dernière correspond à des expositions modérées mais
fréquentes. Elle n’est pas traitée dans ce document.
Les effets d’un toxique peuvent être immédiats ou retardés quel que soit le type d’exposition
considéré, et correspondent à une tenabilité par rapport à un effet donné. En général, les effets
considérés sont :
-
L’incapacitation, qui est l’aptitude du toxique ou du mélange de toxiques à avoir des
effets irréversibles sur les personnes ou entravant sa capacité à évacuer
La létalité, correspondant à un nombre donné de victimes.
Ces effets sont donc relatifs à un niveau d’exposition de référence, correspondant à l’un des
critères présentés ci-après.
6.5.2
Relation dose-effet
Les effets toxiques létaux résultant de la présence dans l’air d'
un produit toxique dépendent de
la concentration (C) du polluant émis dans l'
atmosphère et de la durée d’exposition (T) à cette
concentration. On peut admettre que les effets létaux suivent la loi de Haber :
Avec :
Effet = f (C x T)
C:
concentration
T:
durée d'
exposition
f:
un modèle (par exemple, le modèle probit)
Le produit C x T représente une dose d’exposition
Une extension de la loi de Haber est admise et consiste à écrire :
Effet = f (Cn x Tm)
où n et m sont des paramètres de régression.
Effets du feu sur les personnes
Page 103/163
Le modèle statistique employé est le modèle « probit ». L’analyse probit permet de corréler la
proportion d’effets (par exemple la mortalité) au niveau d’exposition, caractérisé par une
concentration et une durée. La probabilité que la substance induise un effet donné s’écrit :
p=F
log(C ) + m ⋅ log(t ) − µ
σ
p est donc la probabilité qu’un individu choisi au hasard et exposé à une concentration C de
substance pendant un temps T présente une réponse donnée. On suppose une distribution
lognormale des tolérances, c’est-à-dire que le logarithme des tolérances est distribué selon une
loi normale centrée réduite. Pour faire fonctionner ce modèle mathématique, il convient de
disposer des données suivantes :
•
•
•
•
Ci : la concentration d’exposition du groupe i
bi : le nombre d’animaux ou d’individus dans le groupe i et exposés à la concentration
Ci
yi : le nombre d’animaux ou d’individus affectés, selon un critère défini (par exemple
incapacitation ou létalité) par le traitement parmi les bi exposés à la concentration Ci
ti : le temps d’exposition du groupe bi .
p est donc défini à chaque niveau i par le rapport entre bi et yi.
L’estimation des paramètres de régression (m, µ et σ) est obtenue par une analyse bayésienne
des mesures des effets à différentes concentrations. Les intervalles de confiance sont
déterminés sous l'
hypothèse d'
une fonction de vraisemblance binomiale.
Le calcul peut être basé sur un comptage du taux d’occurrence de l’effet escompté des
individus de la population. Dans le cas de l’analyse des décès, il permet la détermination des
LC50, LC5 et LC1 pour un temps t donné est présenté ci-dessous :
LC50 = exp(µ − m ⋅ log(t ) )
LC5 = exp(µ − 1,645 ⋅ σ − m ⋅ log(t ) )
LC1 = exp(µ − 2,33 ⋅ σ − m ⋅ log(t ) )
Ce calcul est connu sous le nom de loi log-probit. Les coefficients 1,645 et 2,33 viennent des
coefficients de la loi normale à respectivement 95 % et 99 %. Ils estiment donc que les effets
suivent une loi normale au sein des populations.
Il n’existe néanmoins pas de loi connue pour la susceptibilité humaine aux espèces toxiques et
cette simplification est nécessaire.
Effets du feu sur les personnes
Page 104/163
6.5.3
Critères d’incapacitation
6.5.3.1 Les IDLH
Les IDLH (Immediately Dangerous to Life and Health) sont les concentrations
atmosphériques maximales d’une substance toxique dans l’air qui peuvent être respirées
pendant 30 minutes, sans appareil autonome de respiration, sans qu’il y ait d’effet irréversible
pour la santé ou le pronostic vital. Ces valeurs sont celles utilisées le plus souvent pour
traduire l’incapacitation dans les études de toxicité des fumées.
Les IDLH ont été déterminées par le NIOSH (National Institute for Occupational Safety and
Health - USA) et ont été publiées en 1987. Cette détermination a été réalisée en collaboration
avec un autre organisme : l’OSHA (Occupationnal Safety and Health Administration). Les
IDLH ont été déterminées pour 387 substances à partir de données toxicologiques connues à
cette date. Néanmoins, ces données étaient limitées pour bon nombre de ces substances.
Ainsi, le NIOSH a décidé de proposer des IDLH révisées en 1994[16].
Pour déterminer les IDLH de 1987, les données de toxicité aiguë sur l’homme par inhalation
ont été utilisées préférentiellement. Lorsqu’elles n’étaient pas disponibles, ce sont
respectivement les données de toxicité aiguës par inhalation sur les animaux, puis celles de
toxicité sur les animaux par voie orale qui ont été utilisées [16]. Quand les données de toxicité
aiguë n’étaient pas disponibles ou insuffisantes, les toxicités chroniques ou des données
extrapolées à partir d’autres produits chimiques ayant les mêmes propriétés toxiques ont été
utilisées.
Pour la détermination des IDLH révisées (1994), les paramètres utilisés sont en priorité la
toxicité humaine aiguë, puis des données relatives à la concentration létale aiguë (LC) pour
d’autres mammifères (rats, souris, cochons d’Inde et hamsters). Il a été décidé d’utiliser en
priorité les concentrations létales fiables les plus faibles et préférentiellement les LC50
ajustées à 30 minutes. D’autres données sont utilisables, en particulier :
• La dose létale (LD) pour les mammifères (rats, souris, cochons d’Inde et hamsters). Il a
été décidé de retenir les LD les plus faibles avec préférentiellement les LD50.
• Des données de toxicité chroniques.
• Enfin, si aucune autre donnée n’était fiable, il a été décidé d’utiliser des données
valables pour d’autres substances de toxicité proche.
Il convient de préciser que les IDLH de 1987 ont été utilisées comme concentrations critiques
par le Ministère de l’Environnement, sous le nom de SES (Seuils des Effets Significatifs). En
effet, les SES sont utilisées dans le Guide de la Maîtrise de l’Urbanisation (SEI, 1990) pour
dimensionner la zone à partir d’un point de stockage de matières dangereuses dans laquelle la
concentration de la substance est supposée ne plus provoquer d’effets irréversibles sur la santé
de la population après une exposition de 30 minutes. Cette zone sera appelée DES pour
Distance des Effets Significatifs dans le Guide de la Maîtrise de l’Urbanisation. Les seuils des
effets significatifs sont maintenant appelés seuils des effets irréversibles et sont décrits au
paragraphe 6.5.3.2.
Effets du feu sur les personnes
Page 105/163
Pour information, une zone est aussi définie pour la limite des effets létaux. Elle est appelée
DEL (Distance des Effets Létaux). Cette zone est déterminée à partir de la concentration de
substance toxique supposée provoquer la mort de 1 % de la population.
Note : Les valeurs guide recommandées par l’EPA (Environment Protection Agency) pour
l’impact sur les personnes sont le dixième des IDLH de 1994.
6.5.3.2 Seuils des effets irréversibles
Les seuils des effets irréversibles (SEI) délimitent la « zone des dangers significatifs pour la
vie humaine ». Ils ont remplacé les seuils des effets significatifs. Ces valeurs sont celles
recommandées par le Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, dans le cadre des
études de danger relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement
(ICPE) soumises à autorisation.
Ces valeurs sont décrites dans l’arrêté du 29 septembre 2005 relatif à l'
évaluation et à la prise
en compte de la probabilité d'
occurrence, de la cinétique, de l'
intensité des effets et de la
gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations
classées soumises à autorisation (JO n° 234 du 7 octobre 2005).
La définition des S.E.I. actée le 4 juin 1998 est la suivante : Le « seuil des effets
irréversibles » correspond à la concentration maximale de polluant dans l’air, pour un temps
d’exposition donné, en dessous de laquelle on n’observe pas d’effets irréversibles chez la
plupart des individus.
Les SEI sont des seuils de toxicité aiguë. A partir des études de laboratoire sur les substances
retenues pour leurs effets, les concentrations seuils sont calculées et proposées pour des
durées d’exposition de 1, 10, 20, 30 et 60 minutes et permettent de déterminer des zones
d’effets correspondantes.
Ces valeurs sont proches des IDLH de 1987. Un groupe de travail chargé de les élaborer a été
mis en place depuis plusieurs années. Ce groupe est composé de représentants et d’experts
toxicologues du Ministère de l'
Ecologie et du Développement Durable, du Ministère de la
Santé (DGS), de l'
INERIS, de l’INRS, de l’IRSN, du CAP de Rennes, de centres hospitalouniversitaires et de représentants de l'
Industrie Chimique.
Les seuils de toxicité aiguë sont ainsi évalués selon la méthodologie « Emission accidentelle
d’une substance chimique dans l’atmosphère -Méthodologie de fixation des seuils des effets
létaux et des effets irréversibles dans le cadre de la Maîtrise de l’Urbanisation »21 développée
par l’INERIS et adoptée le 3 mai 2001, par le groupe du consensus national. Cette
méthodologie a été développée afin d’évaluer scientifiquement et avec transparence les
données toxicologiques disponibles permettant de fixer les seuils de toxicité aiguë en cas
d'
émission accidentelle dans l'
atmosphère à partir d’un site industriel.
Les seuils ainsi fixés par le groupe du consensus sont utilisés dans les études de dangers en
contexte industriel, mais peuvent aussi être utilisés en situation d’incendie.
21
La méthodologie « Emission accidentelle d’une substance chimique dans l’atmosphère -Méthodologie de fixation des seuils des effets
létaux et des effets irréversibles dans le cadre de la Maîtrise de l’Urbanisation » est disponible sur le site internet de l’INERIS
(http://www.ineris.fr/recherches/som_rapport.htm)
Effets du feu sur les personnes
Page 106/163
6.5.4
Critères de létalité
6.5.4.1 Concentrations létales (LC 50)
Les LC50 sont les valeurs de létalité communément admises par la communauté. Elles sont
basées sur des expérimentations animales et doivent donc préciser le modèle animal utilisé
(rat, souris ou cobaye en général), mais aussi le temps d’exposition. Lorsque rien n’est
précisé, la valeur concerne une exposition du rat durant 30 minutes.
Quand des LC ont été déterminées pour d’autres durées d’exposition, elles peuvent être
ajustées à 30 minutes de la façon suivante :
LC50 (30 min )
t
= LC50 (t )⋅
0,5
1
n
Dans cette expression, LC50 (t) est la LC50 déterminée pour t heures d’exposition. n est un
facteur de correction déterminé par Berge et ses collaborateurs (voir le tableau ci-dessous).
Cet ajustement ne peut se faire que pour des durées supérieures à 30 minutes.
Le tableau ci-dessous présente les facteurs de correction utilisés par le NIOSH pour calculer
la LC50 à 30 minutes à partir de la LC50 pour une autre durée d’exposition :
Temps (heures) t
0,5
1
2
3
4
5
6
7
8
Facteur de
correction n
1,0
1,25
1,6
1,8
2,0
2,15
2,3
2,4
2,5
Tableau 26 : Facteurs de correction utilisés dans le calcul des LC50
Ces valeurs ont une réelle base scientifique, car elles correspondent à l’exposition de
populations animales réelles. La principale difficulté d’utilisation des LC 50 est la
transposition du modèle animal à l’homme, chaque espèce ayant des voies métaboliques
différentes.
D’autres limites sont souvent définies, comme la LC1 et la LC5, représentant respectivement
1 % et 5 % d’atteinte de la population. Le mode de calcul de ces valeurs est défini au
paragraphe 6.5.2.
Effets du feu sur les personnes
Page 107/163
6.5.4.2 Seuils des effets létaux (SEL)
Les seuils des effets létaux sont des valeurs recommandées par le Ministère de l’Ecologie et
du Développement Durable, dans le cadre des études de danger relatives aux installations
classées pour la protection de l’environnement (ICPE) soumises à autorisation.
Ces valeurs sont décrites dans l’arrêté du 29 septembre 2005 relatif à l'
évaluation et à la prise
en compte de la probabilité d'
occurrence, de la cinétique, de l'
intensité des effets et de la
gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations
classées soumises à autorisation (JO n° 234 du 7 octobre 2005).
La définition des S.E.L actée le 4 juin 1998 est la suivante : le « seuil des effets létaux »
correspond à la concentration maximale de polluants dans l’air, pour un temps d’exposition
donné, en dessous de laquelle on n’observe pas de décès chez la plupart des individus.
Deux SEL sont à différencier :
•
•
6.5.5
Les seuils des effets létaux (SEL) correspondant à une LC1 % délimitent la « zone des
dangers graves pour la vie humaine » ;
Les seuils des effets létaux significatifs (SELS) correspondant à une LC5 % délimitent
la « zone des dangers très graves pour la vie humaine ».
Autres valeurs
6.5.5.1 AEGL
Le comité AEGL (Acute Exposure Guideline Levels) propose des séries de valeurs pour
chaque composé. Ces valeurs sont données pour des temps d’exposition de 10, 30 et 60
minutes. Trois niveaux d’AEGL sont définis comme suit :
•
•
•
AEGL-1 : Concentration pour laquelle, dans une population incluant les personnes
sensibles, mais excluant les personnes hypersensibles, aucun inconfort notable n’est
observé. Ce seuil concerne la limite au-dessous de laquelle des odeurs et des goûts
sont perçus, ou des sensations d’irritation et de mal-être sans autre conséquence.
AEGL-2 : Concentration pour laquelle, dans une population incluant les personnes
sensibles, mais excluant les personnes hypersensibles, des effets irréversibles ou
sérieux et prolongés peuvent être observés ou engendrer une réduction de la capacité à
s’échapper. Les concentrations comprises entre l’AEGL-1 et l’AEGL-2 sont celles où
un manque de confort peut être observé.
AEGL-3 : Concentration pour laquelle, dans une population incluant les personnes
sensibles, mais excluant les personnes hypersensibles, des effets pouvant entraîner le
décès ou des dommages sérieux et irréversibles peuvent être observés. Les
concentrations comprises entre l’AEGL-2 et l’AEGL-3 représentent les niveaux
d’exposition pour lesquels des effets irréversibles ou à long terme, ou une réduction de
la capacité à évacuer sont observées.
Effets du feu sur les personnes
Page 108/163
6.5.5.2 ERPG
Aux USA, l’AIHA (American Industrial Hygienist Association) publie les valeurs ERPG :
Emergency Response Planning Guidelines. Ces valeurs sont données pour une durée
d’exposition d’une heure.
Les trois niveaux sont définis de la manière suivante :
•
•
•
ERPG-1 : Concentration maximum dans l’air au-dessous de laquelle il est montré
qu’aucun individu ne présente d’effet notable, même transitoire, suite à une exposition
de une heure pour laquelle rien d’autre n’est perçu si ce n’est une odeur supportable.
ERPG-2 : Concentration maximum en dessous de laquelle il est montré que la plupart
des individus exposés durant une heure présentent des effets qui ne sont pas
néanmoins irréversibles ou sérieux pour la santé, ou pouvant conduire à limiter leur
capacité à se protéger.
ERPG-3 : Concentration maximum en dessous de laquelle il est montré que la plupart
des individus exposés durant une heure présentent des symptômes qui néanmoins
n’engendrent pas d’effets irréversibles sur le pronostic vital.
Ces valeurs sont utilisées couramment en toxicité, mais ne sont pas disponibles pour tous les
produits présents dans les fumées.
6.5.5.3 Autres valeurs
Les EEGL (Emergency Exposure Guidance Levels) sont des valeurs seuils définies par le
NRC National Research Council (NRC) Committee on Toxicology (COT) pour le
Department of Defense (DOD), et spécifiques aux militaires. Les durées d’exposition sont de
1 à 24 heures. Elles correspondent à des effets significatifs mais tolérables, pour lesquels des
effets temporaires peuvent être acceptés. Ces valeurs ont été développées pour de jeunes
militaires entraînés, et ne sont donc pas représentatives des populations civiles communes, en
particulier des jeunes personnes et des personnes âgées.
D’autres valeurs d’exposition existent dans la littérature :
•
•
les TLV-TWA (Threshold Limit Values – Time Weighted Average – USA), les PEL
(Permissible Exposure Limits – OSHA – USA), les REL (Recommended Exposure
Limits – NIOSH – USA) et les VME (Valeurs moyennes d’exposition - France) sont
toutes des valeurs limites d’exposition adaptées au droit du travail, exprimées pour des
expositions moyennes de 8 heures.
Les TLV-STEL (Thresold Limit Values – Short Term Exposure Limit – USA) et les
VLE (Valeurs limites d’exposition - France) sont des valeurs limites d’exposition
adaptées au droit du travail, exprimées pour des expositions ponctuelles de 15
minutes.
Ces valeurs rendent compte d’un effet toxique chronique, et ne sont pas nécessairement
adaptées à l’étude de l’exposition des personnes aux incendies, hormis dans le cas d’études
d’impact sur les pompiers. Il faut noter qu’il existe aussi des valeurs françaises, dites SER
(Seuils des effets réversibles).
Effets du feu sur les personnes
Page 109/163
6.5.6
Table résumée des critères d’incapacitation pour les effluents du feu
Sans précision supplémentaire, les informations présentes dans cette table proviennent des
références [50], [51], [52] et [53].
IDLH
1987
ppm /
30 min
IDLH
1994
AEGL (ppm / 30 min)
ERPG (ppm)
SEI
ppm /
ppm /
30 min
1
2
3
1
2
3
30 min
Dioxyde de carbone
50 000
40 000
-
-
-
-
-
-
-
Monoxyde de carbone
1 500
1 200
ND
150
600
200
350
500
-
100
100
80
ND
ND
-
-
-
ND
50
20
0,5
15
25
1
15
30
50
100
100
0,2
0,75
32
0,3
3
15
-
30
30
1
34
62
2
20
50
200
Monoxyde d’azote
Dioxyde d’azote
[49]
[46]
Dioxyde de soufre
Fluorure d’hydrogène
[44]
Bromure d’hydrogène
50
30
1
43
250
-
-
-
-
Chlorure d’hydrogène
[42]
100
50
1,8
43
210
3
20
150
80
Cyanure d’hydrogène
[43]
50
50
2,5
10
21
-
10
25
-
500
85
-
-
-
10
35
75
37
500
300
30
220
1600
25
150
750
500
30
20
0,9
14
70
1
10
25
ND
250
250
19
29
ND
10
50
200
-
Benzène
3 000
500
73
1 100
5 600
50
150
1 000
-
Styrène
5 000
700
20
160
1 900
50
250
1 000
-
2 000
500
200
570
4 200
50
300
1 000
-
300
100
0,6
32
59
0,1
30
100
100
Acide formique
30
30
-
-
-
1
50
500
-
Sulfure de carbone
500
500
5
200
600
1
50
500
-
5
2
0,03
0,18
2,5
0,1
0,5
3
-
10 000
2 000
45
340
1 100
10
200
1 000
-
Acrylonitrile
Ammoniac
[41]
[45]
Formaldéhyde
[47]
Phénol
Toluène
Sulfure d’hydrogène
[48]
Acroléine
Acétaldéhyde
ND : Non déterminé
Tableau 27 : Seuils d’incapacitation pour les espèces toxiques les plus courantes dans les
fumées
Note : ces valeurs sont celles trouvées dans la littérature à la date du présent rapport. Elles
sont sujettes à modifications régulières.
Effets du feu sur les personnes
Page 110/163
6.5.7
Table résumée des critères de létalité pour les effluents du feu
Les valeurs de LC50 sont données pour le modèle animal rat, pour une exposition de 30
minutes. Ces valeurs dépendent des études considérées. Seule la valeur la plus pertinente,
arrondie, est présentée ci-dessous [19]. Il conviendra de se référer à la littérature spécialisée
pour l’usage de ces valeurs.
LC 50 rat, 30 min
ppm
SEL 30 min
ppm
180 000
-
Monoxyde de carbone
5 700
-
Monoxyde d’azote [49]
1710 (?)
ND
Dioxyde d’azote [46]
170
80
Dioxyde de soufre
1 400
-
2 900
377
3 800
-
Dioxyde de carbone
[44]
Fluorure d’hydrogène
Bromure d’hydrogène
Chlorure d’hydrogène
[42]
3 800
470
Cyanure d’hydrogène
[43]
165
60
Acrylonitrile [41]
3 000 (?)
236
Ammoniac [45]
23 500 (?)
4767
750
ND
Phénol
-
-
Benzène
-
-
Styrène
12 000 (?)
-
Toluène
> 34 000
-
Sulfure d’hydrogène [48]
1 000 (?)
472 - 600
Acide formique
6 200 (?)
-
-
-
150
-
20 000
-
Formaldéhyde [47]
Sulfure de carbone
Acroléine
Acétaldéhyde
ND : Non déterminé
(?) : valeurs incertaines
Tableau 28 : Seuils de létalité pour les espèces toxiques les plus courantes dans les fumées
Note : ces valeurs sont celles trouvées dans la littérature à la date du présent rapport. Elles
sont sujettes à modifications régulières.
Effets du feu sur les personnes
Page 111/163
6.5.8
Comparaison des critères d’incapacitation et de létalité
Les valeurs des IDLH de 1987 et des LC50 utilisés pour les calculs de toxicité sont comparées
dans le tableau ci-dessous pour les composés les plus fréquemment rencontrés :
IDLH 1987
(ppm)
LC 50
(ppm)
LC50 / IDLH
Dioxyde de carbone (CO2)
50 000
180 000
3,6
Monoxyde de carbone (CO)
1 500
5 700
3,8
Cyanure d’hydrogène (HCN)
50
165
3,3
Chlorure d’hydrogène (HCl)
100
3 800
38
Dioxyde de soufre (SO2)
100
1 400
14
Bromure d’hydrogène (HBr)
50
3 800
76
Fluorure d’hydrogène (HF)
30
2 900
97
Composé
Tableau 29 : Comparaison entre seuils d’incapacitation et de létalité
Le tableau montre que le poids des IDLH et des LC50 du bromure d’hydrogène et du fluorure
d’hydrogène est très différent. Le rapport LC50/IDLH, est très variable. De l’ordre de 3 pour le
dioxyde de carbone, le monoxyde de carbone et le cyanure d’hydrogène, il atteint 76 et 97
respectivement pour le bromure et le fluorure d’hydrogène.
Les critères d’incapacitation et de létalité sont donc très différents et fonction des espèces
chimiques, car ils traduisent des phénomènes sensiblement non proportionnels. Or, dans la
littérature[9], une FED de 1/3 est fréquemment utilisée pour caractériser l’incapacitation, la
valeur de 1 traduisant la létalité (la FED représente la létalité car elle est calculée sur la base
des LC50). Ce seuil de 1/3 pour traduire l’incapacitation n’est ainsi pertinent uniquement si
CO, CO2 et HCN sont les seuls toxiques présents dans les fumées. D’autres composés sont en
proportion bien plus incapacitants que létaux.
Autrement dit, le seuil de 1/3 correspond pour CO et HCN à 50 % d’incapacitation au sein
d’une population, mais aussi à un résidu de 10 % de létalité. Pour ces espèces, considérer un
risque d’incapacitation de 50 % de la population correspond donc à un résidu de population
représentant 10 % de létalité.
Si d’autres espèces sont présentes, cette approximation n’est plus applicable. Il convient alors
de traiter létalité et incapacitation avec des modèles et des valeurs seuils différents. En
particulier, les irritants présentent un fort effet incapacitant, mais un faible effet létal. Les
critères ont été présentés précédemment. Les modèles utilisables pour caractériser la toxicité
du mélange de gaz que constituent les fumées est présenté au paragraphe 6.6.
Effets du feu sur les personnes
Page 112/163
6.6
Modèles de toxicité aiguë
Les différentes espèces toxiques sont présentes en diverses proportions dans les fumées. Leur
effet joint n’est pas facile à considérer. En particulier, il existe des effets de synergies ou
d’antagonismes entre les espèces chimiques.
6.6.1
Modèle d’atteinte irréversible sur la santé par exposition aux gaz toxiques
Les effets de la plupart des gaz asphyxiants et irritants sont additifs. Cela n’est pas valable
pour le dioxyde de carbone qui a un effet synergique avec celui des autres gaz toxiques
puisqu’il provoque une hyperventilation [6].
Les effets des gaz irritants sont additifs [13]. Une équation basée sur la FED (Fractional
Effective Dose) prédit le temps qui va s’écouler avant la perte de connaissance [2].
FEDin = (FEDCO + FEDHCN + FEDirr).VCO2 + FEDCO2 + FEDO2
FEDCO, FEDHCN, FEDIRR, FEDCO2 et FEDO2 représentent respectivement les FED du CO, de
l’HCN, des gaz irritants, du CO2 ainsi que de l’appauvrissement en oxygène. VCO2, est un
coefficient de correction de l’effet du CO2 et dépend de la concentration en dioxyde de
carbone. Les différentes expressions des FED sont données ci-dessous[2] :
FEDCO = (8,2525.10−4.(CO )1,036 ).t / 30
FED HCN = ( t /[exp( 5 ,396.0 ,023.HCN )]
FEDirr = FED HBr + FED HCl + FED HF + FED SO2 + FED NO2 + FEDorg
FEDO2 = t /[exp(8,13 − 0,54( 20,9 − %O 2 )]
FEDCO2 = t /[exp(6,1623 − 0,5189.%CO2 )]
VCO2 = exp(0,1903.%CO 2 + 2,0004) / 7,1
Les concentrations des gaz sont exprimées en ppm sauf celles du CO2 et de l’O2 qui sont
exprimées en pourcentages. t représente le temps pendant lequel la victime est exposée à cette
atmosphère.
Lorsque la FEDin (FED d’atteinte irréversible) atteint 1, la victime perd connaissance.
L’équation (2) permet donc d’estimer le temps nécessaire à l’évanouissement. La mort,
survient pour une FEDin de 2 ou 3.
Effets du feu sur les personnes
Page 113/163
6.6.2
Modèles de la norme ISO TS 13571
Cette norme a pour but de permettre aux occupants d’un local en feu de s’échapper en toute
sécurité, c’est à dire sans atteinte irréversible sur la santé ou décès. Elle est basée sur les
limites hautes et basses des concentrations des effluents d’un incendie auxquelles peuvent être
soumis les occupants d’un bâtiment.
L’exposition à des concentrations plus élevées que la limite haute provoquerait de sérieuses
atteintes à la santé sur une majorité de victimes. Si les concentrations sont inférieures à celles
de la concentration limite basse, toutes les personnes exposées devraient pouvoir évacuer sans
aucune atteinte à la santé.
Cette norme s’intéresse donc aux conséquences de l’exposition aux effluents toxiques d’un
incendie. Elle s’adresse aux victimes qui se trouvent au contact des gaz toxiques sans subir
d’effets thermiques. Elle se compose de plusieurs modèles de calcul de la toxicité.
6.6.2.1 Modèle des gaz asphyxiants
Ce modèle est donné par l’équation suivante :
FED =
n
t2
i =1 t1
Ci
∆t
(Ct ) i
Ci est la concentration du gaz asphyxiant i en ppm et (Ct)i, la dose d’exposition en ppm.min
nécessaire pour provoquer l’atteinte irréversible sur la santé. Les FED sont déterminées pour
chaque gaz asphyxiant pour une exposition d’une durée t2-t1. Leur somme est alors comparée
avec la FED totale pour laquelle une perte de connaissance est prévue. Si la FED mesurée lors
de l’essai est supérieure à cette valeur, les conditions pour évacuer les lieux en toute sécurité
ne sont pas garanties.
En prenant seulement en compte le monoxyde de carbone et le cyanure d’hydrogène (cas
général), l’équation s’écrira :
FED =
t2
t1
[CO ] ∆t +
(Ct )CO
t2
t1
[HCN ] ∆t
(Ct )HCN
(Ct)CO vaut 35000 ppm.min [17]
(Ct)HCN vaut 220 ppm.min [7].
Cette équation ne prend pas en compte la raréfaction de l’oxygène et ne pourra être utilisée
que si la concentration de ce gaz reste supérieure à 13 %. L’équation n’est applicable que pour
de courtes durées d’exposition, dans le cas où l’activité physique n’est pas trop intense.
Effets du feu sur les personnes
Page 114/163
Si la concentration du CO2 dépasse 2 %, la FED totale des asphyxiants doit être corrigée par
le facteur VCO2 afin de prendre en compte l’augmentation de la quantité de gaz toxiques
inhalée du fait de l’hyperventilation provoquée par le dioxyde de carbone. Ce facteur VCO2
s’obtient à partir de la concentration en CO2 [7].
VCO2 = exp
[%CO2 ]
4
En cas d’absence de données expérimentales pour Ct, une valeur générique qui représentera
seulement une approximation du risque encouru est utilisée. La valeur LCt50/3 est
généralement admise comme l’approximation de la dose d’exposition conduisant à l’atteinte
irréversible sur la santé. Bien que les LCt50 soient déterminées en utilisant des rats, elles sont
aussi valables pour les humains d’après la norme ISO 9122-2 [18], remplacée par la norme
ISO TS 13571.
6.6.2.2 Modèle des gaz irritants
Les effets irritants sur les voies aériennes et sur les poumons sont évalués en utilisant
l’équation suivante. Si à un instant quelconque de l’exposition la concentration dépasse un
certain seuil, de sévères effets d’irritation pouvant gêner ou même empêcher l’évacuation
devraient se produire.
FEC =
[HCl ] + [HBr ] + [HF ] + [SO2 ] + [NO2 ] + [acroléine] + [Formaldéhyde] +
ICHCl
ICHBr
ICHF
ICSO2
IC NO2
ICacroléine
ICHF
[Irri tan t ]i
i
ICi
Les indices critiques (IC) pour chaque irritant sont donnés dans le tableau ci-dessous. Si la
FEC dépasse 1, une atteinte irréversible sur la santé de la victime qui va empêcher
l’évacuation est prédite.
Gaz irritant
HCl
HBr
HF
SO2
NO2
Acroléine
Formaldéhyde
IC en ppm
1000
1000
500
150
250
30
250
Tableau 30 : Indices critiques utilisés pour le calcul de FEC dans la norme ISO 13571
De nombreuses autres espèces irritantes, présentées au paragraphe 6.3, peuvent être produites
lors d’un incendie. Les termes correspondants peuvent alors être ajoutés à l’équation
précédente.
Effets du feu sur les personnes
Page 115/163
6.6.3
Modèle de la norme ISO 13344 (Modèle N-gaz)
La toxicité est estimée par la FED. Elle s’écrit :
FED =
t
Ci
dt
i =1 t0 ( C ⋅ t )i
n
Ci est la concentration du composant toxique i, exprimée en ppm ;
(C.t)i est le produit de la concentration par la durée, exprimé en ppm.min de la dose
d’exposition spécifique nécessaire pour provoquer l’effet toxicologique.
Lorsque le temps d’exposition considéré est de 30 minutes, la simplification mathématique
entraîne alors que la FED devient le rapport entre la concentration moyenne de toxique
gazeux et la valeur de sa LC50 de ce composé (donnée pour 30 minutes). Lorsque la FED vaut
1, une létalité de 50 % des animaux exposés est prédite.
Concrètement, le pouvoir toxique (LC50) est calculé à partir des données analytiques de
l’atmosphère de combustion pour CO, CO2, O2 et, le cas échéant, pour HCN, HCl et les autres
toxiques. Il est possible d’exprimer une LC50 d’un combustible comme étant la masse de
combustible suffisant pour engendrer une FED de 1 dans un volume de 1 m3.
La FED se calcule alors à l’aide de la formule suivante :
FED =
[CO ]
LC 50 CO
+
[HCN ]
LC 50 HCN
+
[HCl ]
LC 50 HCl
+
[Ci ]
LC 50 Ci
+ ...
[Ci] est la concentration du gaz toxique i en ppm ;
LC50ci est la LC50 du gaz toxique i en ppm.
Les valeurs de toutes les concentrations de gaz représentent les valeurs du produit C.t intégré,
relevées sur toutes leurs courbes respectives concentration / temps pour une période d’essai de
30 minutes divisée par 30 pour chaque période de 1 minute.
Au lieu de l’équation précédente, pour calculer la FED produite en 30 minutes, dans le cas où
l’appauvrissement en oxygène est important ou si les concentrations de CO2 sont
suffisamment élevées (> 1 %) pour avoir un impact significatif sur la toxicité du CO,
l’équation suivante peut être utilisée.
FED =
=
21 − [O 2 ]
m[CO ]
[ HCN ]
[ HCl ]
[ HBr ]
+
+
+
+
[CO2 ] − b 21 − LC50O2 LC50 HCN LC50 HCl LC50 HBr
21 − [O 2 ]
m[CO ]
[ HCN ]
[ HCl ]
[ HBr ]
+
+
+
+
[CO2 ] − b (21 − 5,4)% 150 ppm 3700 ppm 3000 ppm
Dans cette équation, les concentrations des produits toxiques sont les concentrations
moyennes sur trente minutes.
Effets du feu sur les personnes
Page 116/163
Les paramètres m et b dépendent de la concentration en CO2 :
•
•
Si [CO2] est inférieure à 5%, m = -18 et b = 122000 ;
Si [CO2] est supérieure à 5%, m = 23 et b = - 38600.
Pour chaque gaz toxique, les concentrations létales (LC50) sont déterminées à partir d’essais
sur des rats en bonne santé. Elles correspondent aux concentrations gazeuses nécessaires pour
tuer 50 % des animaux au cours d’une exposition de 30 minutes ou durant les 14 jours qui
suivent cette exposition. Ce modèle est parfois appelé « modèle à N-gaz ».
L’équation suivante tient compte de l’effet d’hyperventilation du CO2 sur tous les autres
toxiques en utilisant un multiplicateur VCO2, ainsi que des effets toxiques directs du CO2 en
utilisant un facteur additif A.
FED =
[CO ]
LC50CO
+
[HCN ] + [Irri tan ts ] V
LC50 HCN
LC50irri tan ts
CO2
+A
Les facteurs VCO2 et A qui traduisent l’effet d’hyperventilation provoqué par le CO2 sont
indiqués dans le tableau ci-dessous :
% de CO2
VCO2
A
≤ 2,5
1
0
≤3
1,25
0,1
≤4
1,4
0,2
≤5
1,5
0,25
Tableau 31 : Valeurs des facteurs correctifs liés au CO2, ISO 13344
Dans la norme ISO 13344, il est alors possible de calculer la LC50 d’un matériau dans des
conditions de combustion données. La LC50 d’un combustible est alors déterminée en utilisant
l’équation suivante :
•
LC 50
m
=
FED × V
•
m représente la perte de masse en grammes du combustible,
V représente le volume de l’enceinte d’essai en m3.
LC50 est donc exprimé en g.m-3. Cette façon d’exprimer les risques toxiques liés à un matériau
dans une situation de combustion donnée est néanmoins très discutable et sujette à
incompréhensions. Il est préférable d’éviter son utilisation.
Effets du feu sur les personnes
Page 117/163
6.6.4
Modèle de Purser
6.6.4.1 Description du modèle
Ce modèle est présenté dans le document « Fire and Smoke - Resistant Interior Materials for
Commercial Transport Aircraft » [2]. Il est dérivé du modèle de Levin [54], précurseur du
modèle N-gaz.
Dans ce document, la toxicité est évaluée en prenant en compte les gaz asphyxiants et les gaz
irritants. Ces gaz toxiques provoquent à la fois une toxicité aiguë et une toxicité à long terme.
Les effets aigus entraînent une baisse du jugement, une atteinte irréversible sur la santé et
enfin la mort. Les effets à long terme sont les lésions irréversibles sur certains organes et le
développement de cancers.
Le modèle à N-gaz de la norme ISO 13344 [19] est présenté dans cet ouvrage. Ce modèle
prend en compte les gaz suivants (CO, CO2, HCN, HCl, HBr) ainsi que l’appauvrissement en
oxygène. Si le dioxyde d’azote est aussi pris en compte dans le calcul[20], l’équation est :
FED =
[NO2 ] + [ HCl ] + [ HBr ]
m[CO ]
21 − [O2 ]
[ HCN ]
0,4[NO2 ]
+
+
×
+ 0,4
[CO2 ] − b 21 − LC50O2 LC50 HCN LC50 NO2
LC50 NO2
LC50 HCl LC50 HBr
LC50NO2 = 200 ppm. Les valeurs des autres paramètres sont identiques à ceux de l’équation
présentée au paragraphe 6.6.3.
Le modèle à N-gaz a été développé pour prédire les décès au cours de l’exposition, mais aussi
à long terme. Plus la valeur de la FED est proche de 1, plus les effluents gazeux sont toxiques.
Lorsqu’elle vaut 1, une atteinte irréversible sévère sur la santé de la victime est prédite. Elle
sera suivie rapidement par une perte de connaissance puis par le décès.
6.6.4.2 Validation du modèle
Ce modèle a été évalué à partir d’expérimentations animales. Pour évaluer le potentiel toxique
d’un matériau donné à partir du modèle à N-gaz, la combustion d’un échantillon est réalisée
en mesurant la concentration des gaz dégagés. Une valeur grossière de la LC50 totale est alors
prédite. Ensuite, six rats sont exposés à la fumée d’un échantillon dont la taille est calculée
pour que la combustion produise une atmosphère équivalente à la LC50 précédemment
déterminée.
L’hypothèse suivante est faite : si un certain pourcentage (différent de 0 ou de 100)
d’animaux meurt, la LC50 déterminée par cet essai est proche de la véritable LC50. Une
absence de victimes met en évidence un caractère antagoniste de la toxicité des gaz de
combustion. Par contre, la mort de tous les animaux indique que d’autres gaz toxiques non
pris en compte sont présents. Plusieurs essais aussi bien à moyenne qu’à grande échelle ont
montré qu’un modèle à 6-gaz (paragraphe 6.6.3) était capable de prédire assez correctement
les décès [21].
Effets du feu sur les personnes
Page 118/163
6.6.5
Modèles incapacitants additifs
Ces modèles simplifiés permettent d’estimer l’effet incapacitant à partir de contributions
similaires de chacun des gaz toxiques considérés. Ils sont utilisés dans le domaine
ferroviaire[14], ou dans la marine militaire.
6.6.5.1 Modèle de la norme NF F 16-101
Pour déterminer l’indice de toxicité conventionnel (ITC) de la norme NF F 16-101, le
matériau est pyrolysé à une certaine température et les effluents gazeux dégagés sont
recueillis. La quantité de chaque gaz toxique qui serait dégagée au cours de la combustion de
un gramme de matériau est utilisée. A partir de ces données, l’indice de toxicité conventionnel
s’écrit :
ti
ITC = 100.
i CC i
Dans cette équation, ti est le taux de production du gaz toxique i, exprimé en mg/g de
combustible et CCi sa concentration critique exprimée en mg par m3 d’air. Les concentrations
critiques utilisées dans la norme NF F 16-101 sont les IDLH[16] (Immediatly Dangerous to
Life and Health) de 1987 (voir paragraphe 6.5.3)22.
Note : La norme NF F 16-101 détermine une classification (« classement F ») prenant en
compte cette valeur d’ITC, mais aussi l’opacité des fumées, avec néanmoins un poids
moins important pour cette dernière.
L’Indice de toxicité Conventionnel ainsi établi a la dimension d’un volume minimum (au
facteur 100 près) dans lequel il convient de diluer les fumées issues de la combustion d’un
gramme de matériau, de sorte que la concentration finale corresponde au seuil
d’incapacitation. En d’autres termes, cet indice peut être utilisé afin de prédire la masse de
combustible pouvant brûler dans un volume sans engendrer de risques incapacitants pour les
personnes. Ce type d’indice a été repris pour d’autres référentiels (BS 6853:1999 par
exemple).
6.6.5.2 Modèle de la norme STANAG 4602
Afin de déterminer le risque toxique des fumées de combustion des matériaux d’usage
maritime militaire, de nombreux gaz sont dosés. Ces gaz sont représentatifs des produits de
décomposition des matériaux selon différents modes de dégradation. Les essais sont réalisés
au four tubulaire. Les concentrations mesurées pour chacun des gaz sont exprimés en
ppm/100 g/m3. Suite aux essais, un indice de toxicité est calculé par la formule suivante :
TI =
22
Cθ 1 Cθ 2 Cθ 3
Cθn
+
+
+−−−−+
Cf 1 Cf 2 Cf 3
Cfn
Les IDLH de 1987 utilisées sont alors exprimées en mg/m3 à 20 °C, et non en ppm comme d’usage habituel.
Effets du feu sur les personnes
Page 119/163
Les concentrations seuils utilisées dans le calcul permettent de déterminer la contribution
relative à l’indice de chaque gaz en fonction de la létalité potentielle de l’espèce considérée.
Ces valeurs sont indiquées dans le tableau ci-dessous :
Formule
Cf (ppm)
Dioxyde de carbone
CO2
100000
Monoxyde de carbone
CO
4000
NOx (NO + NO2)
100
Dioxyde de soufre
SO2
400
Fluorure d’hydrogène (acide fluorhydrique)
HF
50
Bromure d’hydrogène (acide bromhydrique)
HBr
150
Chlorure d’hydrogène (acide chlorhydrique)
HCl
500
Cyanure d’hydrogène (acide cyanhydrique)
HCN
90
CH2CHCN
200
NH3
750
HCHO
500
C6H5OH
250
Benzène
C6H6
5000
Styrène
C6H5CHCH2
5000
Toluène
C6H5CH3
5000
H 2S
180
HCOOH
1600
CS2
2000
CH2CHCHO
5
CH3CHO
4000
Oxydes d’azote
Acrylonitrile
Ammoniac
Formaldéhyde
Phénol
Sulfure d’hydrogène
Acide formique
Disulfure de carbone
Acroléine
Acétaldéhyde
Tableau 32 : Concentrations-seuils utilisées dans la norme STANAG 4602
Les valeurs Cf sont spécifiques à la marine militaire et extraites des rapports ci-dessous :
- Defence Science & Technology Laboratories - Knowledge Services, Kentigern House,
65 Brown Street, Glasgow, G2 8EX, UK.
- Report for DERA Holton Heath on toxicity of inhaled gases.
IL1003/1/TM/BIO/U/999/95. October 1995. (DRIC Ref. CDL 57733)
- Toxicity of inhaled gases. DERA/CBD/CR96/046/1.0. January 1997.
(DRIC Ref. CDL 56521)
L’indice de toxicité a la dimension d’un volume dans lequel les fumées de combustion de
100 grammes de matière doivent être diluées pour atteindre le seuil de létalité.
Effets du feu sur les personnes
Page 120/163
6.6.6
Autres modèles recensés
6.6.6.1 Modes de calcul définis dans les documents ISO
Le rapport technique ISO TR 9122 partie 5 « Toxicity Testing of Fire Effluents - Prediction of
the Toxic Effects of Fire Effluents », présente différents modes de calcul de la toxicité qui ont
été repris dans le WP 3 du projet FIRESTARR[23].
Ces modèles sont tous basés sur la même approche. Pour pouvoir les appliquer, il faut d’une
part connaître la composition de l’atmosphère dans laquelle se dégagent les produits de
combustion à chaque instant, et d’autre part les effets toxiques du mélange des produits de
combustion.
6.6.6.2 Modèle du NRC-CNRC (Canada)
Ce modèle s’écrit :
t
a [C (t − t °) − C °]dt
t0
Dans cette expression, C0 est le seuil de concentration critique du composé toxique, t° est le
temps minimum pour qu’un effet toxique se produise, (t-t°) représente le temps écoulé et a est
une constante spécifique à ce composé toxique. Le modèle NRC permet d’évaluer la
différence de toxicité entre le seuil et la situation réelle.
6.6.6.3 Le modèle du NIST (États Unis)
Ce modèle s’écrit de la façon suivante :
21 − φ O2
mφ CO
φ HCN
+
+
≈1
φ CO 2 − b LC50, HCN 21 − LC50,O2
φCO est la concentration de CO en ppm volumique
φCO2 est la concentration de CO2 en pourcentage volumique
φHCN est la concentration en HCN en ppm volumique
φO2 est la concentration en oxygène en pourcentage volumique
m et b sont respectivement la pente et l’ordonnée à l’origine de la droite qui traduit
l’augmentation de la toxicité du monoxyde de carbone lorsque la concentration en CO2
dépasse 5 %.
Effets du feu sur les personnes
Page 121/163
6.6.6.4 Le modèle d’atteinte irréversible sur la santé humaine
Ce modèle prend en compte les effets physiologiques des produits gazeux : CO, HCN, O2 et
CO2. Il s’écrit à partir des FI (doses fractionnelles d’exposition incapacitantes) :
[
FI N = (FI CO + FI HCN )VCO2 + FI o
]
Dans cette expression, FIN représente la FI de tous les gaz narcotiques, FIO celle de la FI due à
l’appauvrissement en oxygène et VCO2 est un coefficient multiplicateur qui prend en compte
l’effet d’hyperventilation du CO2.
6.6.7
Effets de synergie entre CO et HCN et modèle de dosage sanguin
Les effets individuels de CO et de HCN dans le sang ont été présentés aux paragraphes 6.3.2
et 6.3.3. Ces deux gaz sont à l’origine de la plupart des décès. C’est ainsi que, très tôt, se sont
développés des modèles de prise en compte des effets de ces gaz à partir de leur concentration
dans le sang, afin d’évaluer l’effet de synergie de ces deux composés [39].
Le CO présent sous forme de carboxyhémoglobine (COHb) traduit directement l’effet de ce
composé sur l’organisme. En cas de décès, sa teneur décroît lentement. Les individus
normaux peuvent avoir 5 à 10 % de carboxyhémoglobine, notamment s’ils sont fumeurs ou
s’ils travaillent dans la circulation automobile. Un individu atteignant 70 % de COHb est en
danger de mort immédiate.
Le taux d’ions cyanure dans le sang permet de mesurer la quantité d’acide cyanhydrique en
cours d’assimilation. Une partie est présente sous forme de complexe cyanure / cytochromeoxydase. Dans une situation d’intoxication aiguë, il est établi qu’une concentration dans le
sang de 3 mg/L suffit à entraîner la mort [40]. Néanmoins, la teneur de cyanure sanguin décroît
rapidement après le décès des personnes et le prélèvement doit être réalisé et analysé au plus
vite. Il doit en outre tenir compte du temps passé. Il est difficile d’associer le taux de cyanure
sanguin aux critères d’incapacitation et seule la létalité est présentée ici.
A la manière des modèles de FED pour les gaz, il est possible de définir un indice
d’intoxication par ces deux asphyxiants à partir des analyses sanguines. Cet indice est appelé
« Fractional Toxic Concentration in blood » et noté FTCblood[39].
Cet indice est calculé par la formule suivante :
FTCblood =
COHb(%)
70
+
−
CN mg
/L
3
Si cet indice vaut 1, la personne est en danger de mort. Cela signifie d’une part qu’un taux de
carboxyhémoglobine de 70% ou le taux de cyanure sanguin de 3 mg/L peuvent à eux-seuls
entraîner la mort et d’autre part que leur action jointe est synergique. Les techniques d’analyse
mises en œuvre doivent néanmoins être adaptées aux intoxications par les fumées et font
actuellement l’objet d’études par l’ISO TC92/SC3/WG2 sous la référence ISO CD 27368.
Effets du feu sur les personnes
Page 122/163
6.7
Effet toxique à long terme
La toxicité à long terme suite à une exposition aiguë unique est un phénomène très mal connu,
du fait du manque d’informations statistiquement fiables. L’ISO TC92/SC3, qui s’intéresse à
l’effet du feu sur les personnes et l’environnement, a retenu cette thématique afin de recenser
les différentes expériences existantes à ce sujet.
Christian et Shields [57] présentent des travaux sur les séquelles liées à l’intoxication au CO.
Ils montrent que 23 % des patients admis ont présenté des séquelles de nature neurologiques à
plus ou moins long terme. Cet effet est relativement plus important chez les femmes que chez
les hommes, peut-être du fait d’une différence d’organisation du cerveau. Les populations
jeunes semblent nettement moins sujettes aux séquelles que les personnes âgées.
Ces données ne sont néanmoins disponibles que pour CO. De nombreux autres composés
peuvent présenter des effets retardés, qui se manifestent pour certains des années après
l’exposition. Ces composés peuvent même engendrer des cancers, en particulier du poumon
suite à l’agression directe de la moelle et du sang (composés organiques).
6.8
6.8.1
Utilisation de l’évaluation de la toxicité des fumées en France
Principe
A l’heure actuelle, les essais de toxicité sont principalement réservés aux matériaux
combustibles présents dans le domaine des transports. En particulier, les domaines ayant des
contraintes fortes en terme d’évacuation sont les principaux demandeurs : aéronautique ou
ferroviaire par exemple. Dans les cas extrêmes où l’évacuation est impossible, comme dans le
domaine militaire, ces contraintes deviennent même essentielles. Elles viennent toujours en
complément aux exigences de réaction au feu.
6.8.2
Marine civile
A l’OMI, la détermination de la toxicité des fumées est pratiquée par spectrométrie infrarouge
à transformée de Fourrier (IRTF) couplée à la chambre à fumée ISO 5658. Elle est décrite
dans le code FTP, résolution A 653(16).
La mesure est réalisée à un point temporel fixe, situé après le maximum de densité de fumée
dans la chambre, en un point donné de celle-ci. Dans ce cas, certaines espèces gazeuses
peuvent se condenser sur les parois et ne sont donc plus mesurables, en particulier les gaz
fortement hydrosolubles comme HCl, HBr, HF, et dans une moindre mesure HCN, SO2 et
NOx. Le nombre de gaz analysé n’est pas très important.
Effets du feu sur les personnes
Page 123/163
Pour l’acceptation des matériaux, des seuils propres à l’OMI sont définis par gaz et repris
dans le tableau ci-dessous :
Gaz
Seuil (ppm)
Monoxyde de carbone CO
1450
Acide chlorhydrique HCl
600
Acide bromhydrique HBr
600
Acide fluorhydrique HF
600
Acide cyanhydrique HCN
140
Oxydes d’azote NOx
350
Dioxyde de soufre SO2
120
Tableau 33 : Concentrations-seuils utilisées dans la marine civile
Note :
Les seuils proposés, comparés à ceux d’autres référentiels, ne correspondent pas aux
données présentées précédemment : les effets toxiques de l’acide fluorhydrique et de
l’acide cyanhydrique sont sous-évalués et ceux du dioxyde de soufre surévalués.
Ces seuils sont conventionnels. Un matériau peut par exemple dégager tous les gaz en
quantités juste inférieures à chaque seuil et être accepté. Au contraire, un matériau ayant un
seul gaz en quantité au niveau du seuil pourrait être refusé.
6.8.3
Marine militaire
La toxicité des fumées est considérée dans le choix des matériaux d’aménagement des navires
militaires, en particulier dans le domaine des sous-marins. Le principe est décrit dans la
norme STANAG 4602 et le document AFAP3 associé. L’application aux sous-marins est
décrite dans le référentiel technique de la DGA, RT 10-4. Ce référentiel a remplacé
l’Instruction Technique 4390.
En navire militaire, et en particulier dans les sous-marins, l’évacuation est impossible du fait
des contraintes militaires. Le référentiel ainsi concerné est le plus sévère disponible à l’heure
actuelle.
L’essai consiste à brûler une faible quantité de matériau et à analyser les gaz produits. Le
modèle de dégradation est le four tubulaire de la norme NF X 70-100-2, mais il est utilisé à
350 °C et 800 °C. Ces deux températures sont représentatives des températures de pyrolyse et
de combustion vive d’un matériau, reproduisant ainsi deux phases du feu.
20 gaz sont analysés à 350 °C et 15 à 800 °C. Ensuite, un indice de toxicité est calculé à partir
des concentrations obtenues, exprimées en ppm/100g/m3, pondérées par leur indice relatif de
létalité. Les gaz étudiés dans le cadre de la marine militaire et le modèle utilisé sont repris au
paragraphe 6.6.5.2.
Effets du feu sur les personnes
Page 124/163
6.8.4
Aéronautique
Dans l’aéronautique, les essais sont décrits dans le référentiel FAR 25 de la FAA. Ces essais
sont repris et précisés par les principaux constructeurs sous forme de référentiel propre, en
particulier pour la toxicité. Les référentiels de Boeing, Airbus et Bombardier sont très
similaires.
L’essai de toxicité réalisé consiste à mesurer dans la chambre à fumée NBS (NF X 10-702)
les concentrations moyennes en différentes espèces après 4 minutes d’essai et durant
15 minutes. Les méthodes employées peuvent être les techniques classiques par barbotage
pour lesquelles l’échantillonnage est décrit dans la norme NF X 70-101.
Les espèces étudiées, variables en fonction des référentiels constructeurs, prennent en compte
au minimum CO, CO2, HCl, HBr, HF, SO2. Les mesures réalisées sont individuellement
comparées à des seuils propres et ne font pas l’objet d’une utilisation dans un modèle de
toxicité.
6.8.5
Transport ferroviaire
Le transport ferroviaire a très tôt été soumis à des exigences de toxicité des fumées, du fait de
plusieurs raisons : premièrement, les foyers primaires peuvent provenir des éléments apportés
par les voyageurs : bagages… Dans ce cas, il est primordial que les matériaux présents
n’augmentent pas le risque toxique des fumées. Deuxièmement, le temps nécessaire à l’arrêt
du train et à l’évacuation, ainsi que les faibles volumes d’air disponibles rendent nécessaire de
limiter le potentiel toxique des fumées de combustion.
La démarche retenue dans ce cadre est décrite dans la norme NF F 16-101. Chaque matériau
présent dans le train, et plus particulièrement ceux à proximité des voyageurs23, est soumis à
des essais de réaction au feu, d’opacité et de toxicité des fumées. Deux classements sont ainsi
réalisés sur le matériau : un classement M ou I pour la réaction au feu, et un classement F,
englobant opacité et toxicité des fumées. Les critères sont variables en fonction de ces deux
paramètres.
L’essai de toxicité des fumées est basé sur la NF X 70-100. 7 gaz sont étudiés : CO, CO2,
HCl, HBr, HF, HCN et SO2. Un indice de toxicité est alors calculé. Ce calcul est décrit au
paragraphe 6.6.5.1. Cette réglementation est en vigueur depuis 1988 et a permis d’atteindre un
niveau de sécurité très intéressant. Elle a été reprise par d’autres réseaux étrangers
(BS 6853:1999 au Royaume-Uni, norme italienne par exemple) et est maintenant applicable,
dans le cadre de la TSI High Speed (Technical specification for interoperability – statut de loi
européenne) pour l’aptitude d’un train à circuler librement en Europe , pour peu que sa vitesse
soit supérieure à 190 km/h.
Actuellement, une norme européenne (prEN 45545) est en cours de développement afin de
remplacer la norme NF F 16-101. Les débats sont en cours sur l’essai de toxicité, qui
s’orienterai sur une variante de celui décrit dans la marine civile. Les discussions actuelles
portent sur la possibilité d’utiliser une méthode cinétique, c’est à dire une mesure en continu
23
Les limites de masses de matériaux à tester et l’applicabilité des essais dépendent du risque inhérent au type de
véhicule ferroviaire (couchettes, circulation en tunnel…) ainsi que de la localisation de ces matériaux par rapport
aux voyageurs.
Effets du feu sur les personnes
Page 125/163
du potentiel toxique des fumées, ou une méthode ponctuelle, plus simple mais pour laquelle
une partie des informations serait perdue. Les seuils de toxicité retenus sont basés sur des
critères d’incapacitation et reprennent les SEI français.
6.8.6
Bâtiment
Il existe un essai de toxicité dans le domaine du bâtiment en France. Celui-ci porte sur les
matériaux présents en qualité d’isolants dans les établissements recevant du public et n’étant
classés ni M0, ni M1. Les matériaux constitutifs des sièges sont traités s’ils ne sont pas
équipés d’une enveloppe hermétique infusible à 200°C et classée M1 ou M2.
Cette méthode est décrite dans l’Arrêté du 4 novembre 1975 modifié par l'
instruction du
er
1 décembre 1976, portant réglementation de l'
utilisation de certains matériaux et produits
dans les établissements recevant du public. Elle est complétée par le Procès-Verbal CECMI
du 07 avril 2003 référencé DDSC/SDDCPR/DDSC6/VG/PD/N°190 et portant sur la séance
du 10 décembre 2002.
Les essais sont réalisés sur environ un gramme d'
échantillon, suivant les prescriptions de la
norme NF X 70-100. Chaque prise d'
essai est prélevée dans l'
épaisseur du matériau. La
température du four tubulaire est réglée à 700 °C et le gaz de balayage employé est de l’azote.
Les quantités d’azote (N) et de chlore (Cl), susceptibles de se dégager sous forme d’acide
cyanhydrique ou d’acide chlorhydrique, exprimées en g/g de matériau testé, sont calculées à
partir des analyses précédentes selon les formules suivantes :
[N ] = 14 × 1 ×
1
[HCN ]
27 3 1000
-
et
[Cl ] = 35,5 × 1 ×
1
[HCl ]
36,5 3 1000
où
[N] est la quantité totale d’azote (en g/g de matériau) présent dans le matériau
14/27 est le rapport entre la masse de l’azote et la masse de HCN
[HCN] est la quantité d’HCN dégagée par le produit en mg/g de matériau
[Cl] est la quantité totale de chlore (en g/g de matériau) présent dans le matériau
35,5/36,5 est le rapport entre la masse du chlore et la masse de HCl
[HCl] est la quantité d’HCl dégagée par le produit, en mg/g de matériau
1/1000 est le rapport de conversion de mg en g
L’acceptabilité est prononcée en fonction du volume de la pièce, les quantités totales d’azote
et de chlore obtenues ne devant pas dépasser respectivement 5 grammes et 25 grammes par
mètre cube de local. Cet essai n’est pas pertinent en soi, notamment parce qu’il omet
totalement le CO, qui est le toxique engendrant le plus grand nombre de victimes dans les
incendies.
Effets du feu sur les personnes
Page 126/163
6.8.7
ICPE soumises à autorisation
Une recommandation sur les niveaux d’exposition aux gaz toxiques existe dans l’arrêté du
29 septembre 2005, relatif à l'
évaluation et à la prise en compte de la probabilité d'
occurrence,
de la cinétique, de l'
intensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents
potentiels dans les études de dangers des installations classées soumises à autorisation (JO
n 234 du 7 octobre 2005).
Les valeurs de référence sont les SEI, les SEL et les SELS définies pour les personnes. Les
valeurs ont pour but de déterminer les conséquences environnantes d’un feu à grande échelle.
Aucun modèle de toxicité n’est préconisé, et seule une comparaison des seuils est réalisée.
6.9
Références
[1]
K. Sumi, Y. Tsuchiya, Canadian Building Digest - 197, Evaluating the Toxic Hazard
of Fires
[2]
Purser, D.A. in Improved Fire and Smoke-Resistant Materials for Commercial
Aircraft Interiors : A Proceedings (1995)
[3]
M. Imbert et coll., Toxicité aiguë des fumées d’incendie, Encyclopédie MédicoChirurgicale (Paris), Toxicologie-Pathologie professionnelle, 16-359-G-10 (1997)
[4]
Garnier R., Chataigner D., Efthymiou M.L., Toxicité des Produits de Dégradation
thermique des Principaux Polymères - Données Expérimentales, Réanimation Med.
Urg., pp 411-426 (1990)
[5]
P. Rechenbach, Fires Today : Risk and Protection for Fire Fighters, Proceedings of
Flame Retardants Conference 2000, 8-9 Febuary 2000, London (UK), pp 171-176
(2000)
[6]
Determination of Acrolein, Formaldehyde and other Versatile Components from
Combustion of Conductor Wires from Polyolefin Coated Communication Cables,
Proceedings of 8th International Interflam’99 Conference , 29th June - 1st July 1999,
Edinburgh, pp 181-187, 1 (1999)
[7]
Purser D.A., Toxicity assessment of combustion products, pp. I-200 à I-245, in The
SFPE Handbook of Fire Protection Engineering, C.L. Beyler, ed. Quincy,
Massachusetts: National Fire Protection Association
[8]
Purser D.A., Interactions Between Behaviour Patterns and Physiological Impairment
in Escape from Fire, présenté à la conférence Interflam’93, Oxford, United Kingdom,
du 30 mars au 1er avril 1993
[9]
ISO/TS 13571, Fire Hazard Analysis: Life Threat Components of Fire (2002)
Effets du feu sur les personnes
Page 127/163
[10]
J. Troitzsch, Fire Gas Toxicity and Pollutants in Fires - The Role of Flame Retardants,
Proceedings of Flame Retardants Conference 2000, 8-9 Febuary 2000, London (UK),
pp 177-184 (2000)
[11]
Y. Claire et al, Fire Retardacy of Polymers, the Use of Intumescence, M. Le Bras , G.
Camino, S. Bourbigot and R. Delobel Eds, The Royal Society of Chemistry, pp 437447 (1998)
[12]
Étude sur l’amélioration de la norme NF F 16-101, Risque de toxicité des fumées
dégagées par des matériaux utilisés dans les véhicules de transport ferroviaire, rapport
du Laboratoire National d’Essais n° C 607 X 22, décembre 1995
[13]
Hartzell, G.E., W.G. Switzer and D.N. Priest, Modelling of toxicological effects of
fire gases, Journal of Fire Sciences, 3 , pp. 330-342, 1985
[14]
Norme française NF F 16-101, Matériel roulant Ferroviaire, Comportement au Feu,
Choix des Matériaux (Octobre 1988)
[15]
Norme française NF X 70-100-1 (Juillet 2001) : Méthodes d’analyse des gaz
provenant de la dégradation thermique
Norme française NF X 70-100-2 (Juillet 2001) : Méthode de dégradation thermique au
four tubulaire
[16]
National Institute for Occupational Safety and Health, Documentation for Immediately
Dangerous to Life and Health Concentrations
[17]
Kaplan, H.L., Grand A.F., Switzer W.G., Mitchell, D.S., Rogers W.R., Effect of
Combustion Gases on Escape Performance of the baboon and the rat, J. Of Fire
Sciences, 3(4), pp 228-244 (1985)
[18]
ISO/TR 9122-2; Toxicity testing of fire effluents - part 2: Guidelines for biological
assays to determine the acute inhalation toxicity of fire effluents (basic principles,
criteria and methodology)
[19]
Norme ISO 13344 : « Détermination du pouvoir toxique létal des effluents du feu »
[20]
Levin B.C., E. Brown, M. Navarro and M. Paabo, Further Development of the N-gas
Model: an Approach for Predicting the Toxic Potency of Complex Combustion
Mixtures, In Fire and Polymers, G. Nelson, ed ACS Symposium Series, Washington
D.C.; American Chemical Society (1995)
[21]
Babrauskas V., R.H. Harris Jr, E. Braun, B.C. Levin, M. Paabo and G.G. Gann, Large
Scale Validation of Bench Scale Fire Toxicity Tests, pp 3-12 in Interflam ’90, Fire
Safety, C.A. Franks ed. London, Interscience Communication (1990)
[22]
Norme allemande DIN 53436 : Producing Thermal Decomposition Products from
Materials in a Air Stream and their Toxicological Testing ; Decomposition Apparatus
and Determination of Test Temperature (Avril 1981)
Effets du feu sur les personnes
Page 128/163
[23]
FIRESTARR Work Package 3 :Evaluation of Toxic Potency24
[24]
Rapport du CSTB : pré-étude des conditions de modélisation des effets du feu dans le
tunnel de Base ferroviaire du projet Lyon-Turin
[25]
FIRESTARR Work Package 4: Small Scale Test Results: Toxic Gas Analysis
[26]
Le monoxyde de carbone - Jean-luc GERONIMI - Ed. Tec & Doc 2000
ISBN : 2-7430-0377-4
[27]
Cyanides - In Encyclopaedia of Chemical Technology Kirk-Othmer 3rd edition –
Volume 7, pp 307-331 - William R. JENKSEI - Du Pont de Nemours & Co. Inc
Ed. Wiley Interscience 1979 - ISBN : 0-471-02043-5
[28]
Generation of heat and chemical compounds in fires - In The SFPE Handbook of Fire
Protection Engineering - 2nd edition – Section 3, Chapter 4 – pp 3.53-3.124 Archibald TEWARSON - Ed. NFPA – Society of Fire Protection Engineers 1995
ISBN : 0-87765-354-2
[29]
An Introduction to Fire Dynamics, 2nd edition –
Ed. John Wiley & sons (Chichester) 1998 - ISBN 0-471-97290-8
[30]
Ministère de l’environnement - DPPR/SEI/JJ-SES 17/07/96 : Seuils de toxicité - Liste
des Seuils des Effets Significatifs
[31]
INRS ED 789 “Incendie et lieux de travail”
[32]
The toxicity of hydrogen chloride and of the smoke Generated by Poly(Vinyl
Chloride), including effects on Various animal Species, and the implications for Fire
Safety – R.K. Hinderer, M.M. Hirschler, proceedings of “Characterization and toxicity
of smoke” symposium, H.K. Hasegawa, ASTM STP 1082 (1988),
ISBN 0-8031-1386-2
[33]
INRS fiche toxicologique 49 : Benzène (2004)
[34]
INRS fiche toxicologique 19 : Chlorure d’hydrogène (1997)
[35]
Experimental Toxicology of Pyrolysis and Combustion Hazards – H.H. Cornish, K.J.
Hahn, M.L. Barth – Environmental Health Perspectives vol 11, pp 191-196 (1975)
[36]
Hydrogène sulfuré, INERIS-DRC-00-25425-ETSC-Sti 00DR294
[37]
INRS fiche toxicologique 32 : sulfure d’hydrogène (1997)
[38]
SAFIR Smoke gas analysis by Fourier transform infrared spectroscopy – Contract nr
SMT 4 – CT96-2136
D.
DRYSDALE
24
Seul le rapport final de l’étude Firestarr est du domaine public, mais ne présente pas ces détails. Les rapports
des différents Work Package sont consultables au LNE sur demande, mais ne peuvent être copiés ou distribués
sans l’accord de l’ensemble des membres du projet.
Effets du feu sur les personnes
Page 129/163
[39]
ISO TC92/SC3/WG2/CD 27368 Analysis of blood for asphyxiant toxicants – Carbon
monoxide and hydrogen cyanide, enregistré NWIP le 24/02/2006, A. Chaturvedi,
FAA, Document discuté au meeting de l’ISO TC92/SC3 de San Antonio (USA),
avril 2006.
[40]
A. Chaturvedi (FAA), communication personnelle.
[41]
Seuils de toxicité aiguë – Acrylonitrile, rapport INERIS-DRC-01-25590-ETSCMBs/STi – N°01DR149.doc (2002)
[42]
Seuils de toxicité aiguë – Chlorure d’hydrogène, rapport INERIS-DRC-99-TOXI
APi/SD - 00DR010bis_vers2.DOC
[43]
Seuils de toxicité aiguë – Cyanure d’hydrogène, rapport INERIS-DRC-01-25590ETSC/TOXI- STi - 02DR06.doc (2005)
[44]
Seuils de toxicité aiguë – Fluorure d’hydrogène, rapport INERIS-DRC-03-47021ETSC- STi - 03DR072.doc (2003)
[45]
Seuils de toxicité aiguë – Ammoniac, rapport INERIS-DRC-03-47021-ETSC- STi 03DR035.doc (2003)
[46]
Seuils de toxicité aiguë – Dioxyde d’azote, rapport INERIS-DRC-03-47021-ETSCSTi- dioxyde_azote_seuils.doc (2004)
[47]
Seuils de toxicité aiguë – Formaldéhyde, rapport INERIS-DRC-03-47021-ETSCBDo-n°03DR011.DOC (2004)
[48]
Seuils de toxicité aiguë – Hydrogène sulfuré, rapport INERIS-DRC-00-25425-ETSCSTi - 00DR294_version1.doc (2000)
[49]
Seuils de toxicité aiguë – Monoxyde d’azote, rapport INERIS-DRC-03-47021-ETSCSTi - monoxyde_azote_seuils.doc (2005)
[50]
Site Internet du NIOSH, rubrique IDLH, http://www.cdc.gov/niosh/idlh
[51]
Base IPCS INCHEM : Chemical Safety Information from Intergovernmental
Organizations, http://www.inchem.org
[52]
Site Internet de l’AIHA, rubrique ERPG, http://www.aiha.org
[53]
Site Internet de l’EPA, rubrique AEGL, http://www.epa.gov
[54]
Levin, B. C.; Kuligowski, E. D. : Toxicology of Fire and Smoke. Inhalation
Toxicology. 2nd Edition. Chapter 10, CRC Press (Taylor and Francis Group), Boca
Raton, FL, Salem, H.; Katz, S. A., Editor(s), 205-228 p., 2005
[55]
Advances in Combustion Toxicology, ed. G. Hartzell, 1989-1992 Technomic
Publishing Company. Volume 1 : ISBN N°87762-590-5. Volume 2 : ISBN N°87762591-3. Volume 3 : ISBN N°87762-886-6
Effets du feu sur les personnes
Page 130/163
[56]
Sublethal Effects of Smoke on Survival and Health. Gann, R. G.; Averill, J. D.; Butler,
K. M.; Jones, W. W.; Mulholland, G. W.; Neviaser, J. L.; Ohlemiller, T. J.; Peacock,
R. D.; Reneke, P. A.; Hall, J. R., Jr., Human Behavior in Fire: Understanding Human
Behavior for Better Fire Safety Design. International Symposium, 2nd Proceedings.
March 26-28, 2001, Boston, MA, Interscience Communications Ltd., London,
England, 285-296 pp, 2001.
[57]
Safe Tolerable Limits for Carbon Monoxide? A Review of the Clinical and Fire
Engineering Implications of a Single, Acute, Sub-Lethal Exposure, S.D. Christian, T.J.
Shields, Journal of Fire Sciences, vol. 18, 2000, pp 308 - 323
Effets du feu sur les personnes
Page 131/163
7 Autres effets du feu sur les personnes
7.1
Risque d’anoxie
7.1.1
Effets de la diminution du taux d’oxygène
Au sein d’un environnement, la teneur en dioxygène conditionne les paramètres de
combustion. De plus, cette teneur est un critère essentiel pour la sécurité des personnes. La
teneur dans l’air est d’environ 21 % à pression atmosphérique ambiante. Les effets d’une
baisse de la teneur en dioxygène sont repris dans le tableau ci-dessous [1] :
Teneur volumique
dans l’atmosphère
Effet
17 %
Baisse de la vision nocturne
Accroissement de la quantité d’air inspiré
Accélération du rythme cardiaque
16 %
Vertiges
15%
12 %
10 %
6%
Troubles du jugement et de l’attention
Episodes d’apnée
Fatigabilité, Perte du contrôle de la motricité
Fortes perturbations du jugement et de la coordination musculaire
Perte de conscience
Lésions cérébrales irréversibles
Incapacité à se mouvoir
Nausées
Vomissements
Respiration spasmodique
Mouvements convulsifs
Mort en 5 à 8 minutes
Tableau 34 : Effets physiopathologiques de la diminution de la teneur en dioxygène
Ce tableau montre que même pour de faibles variations de teneur en dioxygène, l’effet peut
être similaire à celui du CO2 et favoriser l’intoxication par hyperventilation. Pour les faibles
teneurs, la mort survient rapidement. Les effets significatifs menant à l’incapacitation
s’observent vers 15 à 16 %. Les dommages irréversibles s’observent à 12 %. Ces
concentrations peuvent entraîner la mort si l’exposition se prolonge. Des effets conduisant au
décès en quelques minutes sont obtenus pour des teneurs de 6 %.
7.1.2
Mesure
La mesure de la teneur en dioxygène des fumées est très simple à mettre en oeuvre avec une
bonne précision au moyen de sondes électrochimiques, la technique de référence étant
l’analyse paramagnétique.
Effets du feu sur les personnes
Page 132/163
7.1.3
Utilisation
Dans les fumées d’incendie, la diminution du taux d’oxygène est rarement le seul facteur
déterminant pour les risques liés aux voies respiratoires : l’effet d’anoxie de l’oxygène est en
effet joint aux effets complémentaires liés à la toxicité des gaz.
Le modèle N-Gaz de la norme ISO 13344, présenté au paragraphe 6.6.3, le modèle de Purser,
présenté au paragraphe 6.6.4 et le modèle développé par le NIST présenté au
paragraphe 6.6.6.3 permettent de prendre en compte cet effet de synergie entre les gaz
toxiques et la baisse de la concentration en dioxygène.
7.2
7.2.1
Risque lié aux particules présentes dans les fumées
Définitions
Ces définitions sont issues des références [4] et [5].
Diamètre aérodynamique moyen d’une particule : Diamètre d’une sphère de masse volumique
1 g/cm3, possédant la même vitesse de chute dans l’air calme que la particule réelle
considérée.
Fraction inhalable : fraction massique des particules totales en suspension dans l’air pouvant
être inhalée par le nez et la bouche. La fraction inhalable dépend entre autres de la vitesse et
de la direction du gaz contenant les particules, de la fréquence respiratoire et de l’orientation
de la personne dans le flux de gaz..
Fraction extrathoracique : fraction massique des particules inhalées qui ne peuvent pas
pénétrer au-delà du larynx.
Fraction thoracique : Fraction massique des particules inhalées pénétrant au-delà du larynx.
Fraction trachéobronchique : Fraction massique des particules inhalées pénétrant au-delà du
larynx mais ne pénétrant pas dans les voies aériennes non ciliées (alvéoles).
Fraction alvéolaire : Fraction massique des particules inhalées qui pénètrent dans les voies
aériennes non ciliées (région profonde de l’appareil respiratoire).
Effets du feu sur les personnes
Page 133/163
7.2.2
Nature et formation des aérosols dans les fumées
Les aérosols des fumées sont composés de particules et de gouttelettes de liquides de petite
taille. Les gouttelettes sont composées d’hydrocarbures plus ou moins lourds, souvent
aromatiques, et formant des goudrons en suspension. Ces produits sont en partie décrits au
paragraphe 6.3.10, et leur processus de formation fait l’objet du paragraphe 4.3. Les
gouttelettes présentes dans les aérosols de fumée sont sphériques.
Dans les feux d’hydrocarbures ou de polyoléfines, il est admis que les particules de suie sont
presque exclusivement composées de carbone (au moins 90 % en masse ) et d’hydrogène.
Une grande partie du processus de formation des particules est présenté au paragraphe 4.3.
Les composés polyaromatiques formés s’agglomèrent en vésicules de carbone, qui se collent
les unes aux autres. Le processus est détaillé par les schémas ci-dessous [7] [17] :
a) Agglomération des HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) et des cycles en
molécules planes de plus en plus grosses ;
b) Répartition des molécules planes en feuillets de quelques molécules d’épaisseur,
agglomérées par leurs liaisons Pi à la manière du graphite ;
c) Agglomération des groupes de molécules ;
d) Formation d’une particule élémentaire de suie. Une telle particule forme une sphère d’environ
30 nm de diamètre.
Figure 36 : Processus de formation des particules élémentaires de carbone dans les fumées
Effets du feu sur les personnes
Page 134/163
Ensuite, les particules élémentaires s’agglomèrent entre elles de manière désordonnée pour
former des particules plus grosses par des liaisons de Van Der Waals. Des images par
microscopie électronique à transmission des suies sont présentées ci-dessous :
Figure 37 : Images par MET de particules de suie
Ces images montrent des noyaux de quelques dizaines de nanomètres, constitués par ces
particules élémentaires qui s’agglomèrent pour former des structures complexes pouvant
atteindre plusieurs micromètres de taille.
Les particules de carbone présentes dans les fumées représentent un risque pour les personnes.
La taille, la forme et la nature de ces particules, mais aussi le gaz dans lequel elles sont en
suspension conditionnent leur toxicité.
Dans de nombreux feux, la présence de charges minérales peut engendrer la formation de
particules minérales, comme les hydrates d’aluminium (ATH par exemple), les oxydes de
titane (pigments blancs), les oxydes métalliques (oxyde d’antimoine par exemple) ou des
particules de quartz. La granulométrie et l’effet de ces particules sont très variable et
dépendent de leur dispersion dans la matrice initiale. Leur effet toxique est ainsi à considérer,
bien que le détail des principes ne puisse être envisagé dans le présent document.
7.2.3
Mesure des particules
Une mesure indirecte des particules est réalisée lorsque la densité des fumées est mesurée.
Des techniques permettent ainsi de reconstituer la concentration massique en particules des
fumées, à partir d’informations sur la nature des fumées et de leur densité optique. Ces
techniques sont évoquées au paragraphe 4.4.2. Néanmoins, elles recourent à un coefficient σs
appelé surface d’extinction spécifique par unité de masse de suies, dont la connaissance est
entachée d’une incertitude importante. La valeur de σs admise est de (9,6±3,0) m²/g pour un
illuminant en lumière blanche à 2700 K et (8,5±2,0) m²/g pour un illuminant
monochromatique He-Ne à 633 nm [5].
Cette technique de détermination par opacimétrie est donc peu adaptée. De plus, l’effet des
particules est entre autres lié à leur taille. De ce fait, plus encore que la quantité totale de
particules, l’essentiel est de connaître leur répartition par taille. Cette connaissance de la
Effets du feu sur les personnes
Page 135/163
granulométrie des particules est essentielle dans la détermination de leurs effets directs sur
l’homme.
Différentes techniques de mesure sont adaptées en fonction du niveau de détail souhaité. La
référence [3] présente de manière intéressante les différentes techniques utilisables et leur
justification.
Les données ci-dessous montrent les résultats issus d’une détermination de la taille des
particules de suies du PMMA réalisée sur les effluents produits au cône calorimètre, à l’aide
d’un impacteur en cascade permettant l’obtention de classes de granulométrie :
Granulométrie des particules - PMMA
60.00
55.92
40.00
30.00
20.00
10.44
Fraction de la masse totale (%)
50.00
8.35
6.96
6.50
10.00
4.18
2.78
2.78
2.09
0.00
Diamètre de coupure du plateau (µm)
Droite de Henry - PMMA
0.0
-0.2
Fractile U (loi lognormale)
-0.4
-0.6
-0.8
-1.0
-1.2
-1.4
-1.6
-1.8
-2.0
0.10
1.00
10.00
Diamètre de coupure au plateau (µm)
Taux de production de particules de suie :
Diamètre aérodynamique moyen :
Ecart-type de distribution :
11,2 mg/g
0,36 µm
0,17 µm
Figure 38 : Mesure de la taille des particules présentes dans les fumées de PMMA
Effets du feu sur les personnes
Page 136/163
Les données présentées montrent que le PMMA produit principalement des suies très fines,
d’un diamètre inférieur à 0,48 µm. Le diamètre statistique correspondant est de 0,36 µm, mais
il conviendrait de disposer de données complémentaires pour caractériser les très petites
particules.
Actuellement, une norme sur la mesure de particules dans les effluents du feu est en cours
d’élaboration au sein de l’ISO TC92/SC3/WG2. Le projet est présenté et animé par la France.
Toutefois, il est nécessaire de rappeler que la taille des particules de suie dépend de leur
« temps de résidence » dans la flamme, correspondant au temps d’agglomération. Les essais
de laboratoire sur ce phénomène sont peu représentatifs de la réalité.
7.2.4
Effet des particules sur les personnes
7.2.4.1 Courbes standard d’inhalation
Avant de déterminer l’effet sur les personnes, il convient de définir comment ces particules
pénètrent l’organisme. Globalement pour un aérosol, trois zones d’action sont possibles : les
voies respiratoires supérieures, l’arbre bronchial ou les sacs alvéolaires. Ces différentes
parties de l’organisme sont physiologiquement extrêmement différentes.
La définition des différentes fractions respirables est donnée au paragraphe 7.2.1. La fraction
alvéolaire est la plus dangereuse pour la santé : En effet, les voies supérieures sont ciliées et
peuvent évacuer les particules mécaniquement mais les alvéoles ne sont pas munies de ce
dispositif. Lorsque qu’elles pénètrent jusqu’aux alvéoles, les particules se retrouvent piégées
et ne peuvent être éliminées que par digestion cellulaire. Les fractions alvéolaire et thoracique
dépendent du rythme respiratoire et ne sont que des approximations d’un cas moyen.
Aérosol total
Fraction non inhalable
Bouche - nez
Fraction inhalable
Fraction extra-thoracique
Larynx
Fraction thoracique
Bronchies / alvéoles
Fraction trachéo-bronchique
Fraction alvéolaire
(respirable)
Figure 39 : Définition des fractions de pénétration des particules
Ainsi, en général, la nuisance et la profondeur de pénétration des particules croit à mesure que
leur taille décroît.
Effets du feu sur les personnes
Page 137/163
Les particules les plus grosses, de diamètre supérieur à 10 µm, se déposent dans les conduits
nasaux [9]. D’après Mahaffey & Miller [10] et Peterson [11], les particules de moins de 10 µm
sont trop petites pour être filtrées par l’appareil respiratoire humain. Elles peuvent traverser
les voies respiratoires supérieures (nez et bouche) et pénétrer dans les voies respiratoires
inférieures.
Des courbes standard de définition des différentes fractions sus-citées ont été établies. Elles
donnent la probabilité qu’une particule d’une taille donnée atteigne les différents niveaux de
l’arbre respiratoire. Elles sont conventionnelles. Des tables précises de valeurs existent dans
les références [4] et [5].
Ces courbes signifient par exemple qu’une particule de 4 µm a une probabilité de 89,3 %
d’être présente jusqu’au larynx, 89 % de probabilité d’être présente entre le larynx et les
bronchioles, 50 % de chance d’être encore présente au-niveau des alvéoles des sujets sains et
11 % des sujets à risque25.
Dans l’exemple présenté précédemment pour le PMMA, une partie très importante des suies a
une probabilité de pénétration alvéolaire importante, le diamètre aérodynamique moyen étant
de 0,36 µm et plus de la moitié des particules ayant moins de 0,42 µm.
Le choix de l’utilisation d’une courbe conventionnelle dépend du risque à mettre en évidence.
Ainsi, la convention inhalable est choisie si les particules provoquent l’effet étudié à tous
niveaux de l’arbre pulmonaire, alors que la convention alvéolaire sera retenue pour celles
ayant un effet local au fond des poumons.
Chaque convention correspond aux fractions pénétrant dans une zone de l’organisme, et non à
celle s’y déposant. En particulier, pour la convention alvéolaire, une partie des particules
inspirées est expirée sans se déposer et n’aura donc pas d’effet biologique.
.
25
Pour les enfants et les adultes atteints de certaines maladies respiratoires, la région trachéobronchique collecte
plus de particules de faible diamètre aérodynamique, par rapport aux adultes sains. Une courbe « dégradée »,
appelée convention alvéolaire haut risque, peut alors être utilisée
Effets du feu sur les personnes
Page 138/163
Courbes conventionnelles
Pourcentage de pénétration (%)
.
Convention inhalable (%)
100
Convention thoracique (%)
Convention alvéolaire (%)
90
Convention alvéolaire haut risque (%)
80
70
60
50
40
30
20
10
0
1
10
100
Taille de la particule (µm)
Figure 40 : Courbes conventionnelles de pénétration des particules
Effets du feu sur les personnes
Page 139/163
7.2.4.2 Toxicité des particules par inhalation
Les particules déposées aux différents niveaux de l’arbre respiratoire provoquent des effets
variés sur la santé qui dépendent de leurs propriétés toxicologiques et de leur site de
déposition [3].
Lors de l'
inhalation, les grosses particules (appelées PM10, et dont le diamètre est inférieur à
10 µm) peuvent atteindre les voies aériennes supérieures et les poumons. Celles que l'
on
désigne sous l'
expression de '
'
particules fines'
'(PM2,5, dont le diamètre est inférieur à 2,5 µm)
sont plus dangereuses, car elles pénètrent plus profondément dans les poumons où elles
peuvent atteindre la région alvéolaire. Si les PM10 finissent par disparaître de l'
air ambiant
dans les quelques heures qui suivent leur émission, les PM2,5 peuvent rester en suspension
pendant des jours, voire plusieurs semaines après leur émission.
L’USDA [9] considère que les particules de diamètre moyen (entre 5 et 10 µm) ont tendance à
se déposer dans les voies respiratoires de taille moyenne (bronchioles) puis sont éliminées par
action ciliaire et par la toux. Des corrélations ont été établies entre la concentration en
particules de diamètre inférieur à 10 µm (PM10) et la diminution des fonctions pulmonaires
(des corrélations identiques existent avec les concentrations en CO, en formaldéhyde et en
acroléine).
Les plus petites particules dites respirables (diamètre entre 0,5 et 5µm [9] ), inférieures à
3µm [12] ou inférieures à 2,5µm [13] parviennent jusqu’à la région alvéolaire des poumons où
elles sont ingérées par des macrophages. Ces particules transportent des composés chimiques
dans les poumons où ils peuvent être « absorbés » par la circulation sanguine. Les particules
peuvent provoquer des lésions à proximité de leur site de dépôt, en particulier si des gaz
corrosifs sont adsorbés. La présence des suies potentialise toujours fortement la toxicité des
gaz [16]. Les particules de suies de combustion étant principalement composées de carbone,
elles se comportent comme des pièges constitués de « charbons actifs » et peuvent relarguer
certains composés présents à leur surface. Ces composés peuvent alors être libérés
ultérieurement et leur action est prolongée. Il est avéré [8] que le SO2 (paragraphe 6.3.6.1) est
particulièrement bien adsorbé aux suies.
Les particules les plus fines présentes à des concentrations relativement basses, peuvent,
surtout chez l’enfant, irriter les voies respiratoires ou altérer les fonctions respiratoires.
Certaines particules très petites (0,2 à 0,5µm) ne se déposent pas et repartent à travers les
voies respiratoires pendant l’expiration[9].
En dehors de leur effet aigu immédiat, les particules peuvent avoir un effet à long terme suite
à une intoxication aiguë. Tout d’abord, une diminution de la capacité pulmonaire peut
survenir par obstruction mécanique de certaines alvéoles. Les sacs alvéolaires n’étant pas
ciliés, et certaines particules étant trop grosses pour la digestion cellulaire par les
macrophages, l’organisme ne dispose pas de moyen d’élimination efficace pour ce type
d’agression. La capacité pulmonaire diminue en conséquence, ce qui favorise l’apparition
d’asthme et de syndromes chroniques de perte de capacité pulmonaire.
Les particules les plus fines se déposent au fond des sacs alvéolaires et gênent les échanges
gazeux. Elles peuvent être liées à la naissance ou au développement de cancers du poumon
Effets du feu sur les personnes
Page 140/163
même longtemps après l’exposition aiguë. Il est néanmoins extrêmement difficile de disposer
de données toxicologiques de ce type, du fait de la variété des agressions que subissent les
poumons durant la vie (cigarette, pollution automobile, amiante…). L’effet des particules sur
la mortalité est néanmoins établi dans le cas des émissions environnementales chroniques.
L’effet des particules sur les poumons est donc lié à l’apparition d’asthme chronique, à la
diminution de la capacité pulmonaire. A long terme, des cancers peuvent survenir. Cet effet
peut être effectif encore plusieurs jours après le feu et ce risque demeure donc pour les
personnes présentes après sinistre, qui doivent porter des masques adaptés aux particules les
plus fines.
7.2.4.3 Effets indirects des particules
Flux radiatif
Le flux radiatif issu d’une couche de fumée est lié à sa température, mais aussi à sa
concentration en particules, car celles-ci constituent un corps gris émettant du rayonnement.
Ces phénomènes sont à l’origine du risque de flashover décrit au paragraphe 3, ainsi que de
l’effet thermique radiatif sur les personnes décrit au paragraphe 5.2.
La connaissance de la granulométrie des particules, de leur nature et de leur pouvoir émissif
est essentielle, en particulier dans les sous-modèles radiatifs utilisés dans les modèles champ.
Filtration et effets électriques
Un autre effet important des particules est leur effet additionnel, en particulier sur les
installations de sécurité. Les particules s’insinuent partout en engendrant des courts-circuits,
car elles sont composées de carbone et conduisent l’électricité.
Dans les systèmes où la filtration est essentielle, comme le domaine du nucléaire, la
connaissance de leur granulométrie est essentielle au dimensionnement des filtres en situation
d’urgence car les particules ont la capacité d’adsorber les radioéléments.
Effets de la taille des particules sur la perte de visibilité
Pour la perte de visibilité, décrite au paragraphe 4, les particules de petite taille diffusent la
lumière [11]. Cependant, toutes les particules ne diffusent pas la lumière de la même façon.
Celles de taille proche des longueurs d’onde du visible (c’est-à-dire entre 0,3 et 0,8 µm)
diffusent le plus la lumière [14] et réduisent par conséquent le plus la visibilité. Schaefer [15]
précise que le diamètre des particules réduisant le plus la visibilité est voisin de 0,6 µm. En
général, une particule de plus de 1 µm diffuse la lumière proportionnellement au carré de son
rayon. Une particule submicrométrique la diffuse proportionnellement à la puissance 6 de son
rayon [12]. D’autre part, les particules émises peuvent se coaguler à d’autres particules et
provoquer ainsi une augmentation de la concentration en particules de plus gros diamètre[15].
Effets du feu sur les personnes
Page 141/163
7.2.4.4 Considérations environnementales
L’incidence des particules de l’atmosphère sur l'
environnement a été un souci important
durant une longue période. Les hygiénistes industriels se sont rendu compte de l'
effet de santé
potentiel lié à l'
exposition aux particules fines. La pollution atmosphérique par les particules
en suspension réduit l’espérance de vie de chaque personne vivant dans l'
UE d’environ 8,6
mois. L’origine de ces particules est en partie de cause incendiaire, mais cette source reste
minoritaire en dehors des zones directement exposées aux fumées d’incendies de grande
ampleur. En dehors de ces zones, la contribution des incendies est négligeable devant les
sources relatives aux activités liées à la fourniture d’énergie, la circulation automobile et
l’industrie.
En se déposant sur les plantes, les particules bloquent les stomates, organites intervenant dans
respiration chlorophyllienne, ce qui favorise le dépérissement des végétaux. Pour les animaux,
l’effet est similaire à celui observé sur l’homme. Aucun effet toxique n’a été observé lors de
la digestion des particules et seul l’effet d’inhalation semble présenter un risque certain.
7.2.4.5 Valeurs limites d’exposition
L'
OMS souligne que 80 000 vies pourraient être sauvées d'
ici 2010 en Europe grâce à
l'
application de la directive 1999/30/CE. Cette directive fixe la valeur limite journalière des
PM 10 à 50 µg/m3 et leur valeur limite annuelle à 40 µg/m3. Les chiffres sur les PM 2,5 ne
sont pas encore établis.
Or les PM2,5 sont de loin les plus toxiques. De plus, il n’existe pas à l’heure actuelle de
valeurs-seuils définies pour des expositions aiguës. La teneur de 250 µg/m3 a été retrouvée
dans plusieurs sources pour les PM10.
7.3
Références
[1]
INRS ED 789 “Incendie et lieux de travail”
[2]
Particles from Fire : Evaluation of the particulate fraction in fire effluents using the
cone calorimeter - Le Tallec Y. (LNE), Saragoza L. (LNE), Hertzberg T (SP),
Blomqvist P (SP), proceedings of Interflam 2004, Edimbourg
[3]
Renoux A, Boualud D. : Les aérosols – physique et métrologie – Editions Lavoisier
Tec & Doc – Paris, ISBN 2-7430-0231
[4]
Norme NF EN 481 : Atmosphères des lieux de travail - Définition des fractions de
taille pour le mesurage des particules en suspension dans l'
air.
[5]
Norme NF ISO 7708 (1996) : Qualité de l'
air - Définitions des fractions de taille des
particules pour l'
échantillonnage lié aux problèmes de santé
[6]
A. D. Putorti, Design parameters for stack-mounted light extinction measurement
devices, NISTIR 6215, 1999
Effets du feu sur les personnes
Page 142/163
[7]
M.W.I. Schmidt, A.G. Noack, Black carbon in soils and sediments: Analysis,
distribution, implications, and current challenges - Global Biogeochemical cycles,
vol. 14, pp 777-794 (2002)
[8]
Plan régional Qualité de l’air - Généralités sur la pollution de l’air et ses effets sur la
santé et l’environnement– DRIRE région Nord Pas de Calais, 2000
[9]
USDA, 1991 - Health Hazards of Smoke, USDA Forest Service, Missoula Technology
and Development Center, 9167-2809-MTDC, 8 p.
[10]
Mahaffey L.; Miller M., 1995 - Introduction to fire effects RX 340, cours, Northern
training center, Chap IV Air Quality, 13p.
[11]
Peterson J.L., 1990 - Air quality, smoke management, and prescribed fire. Proceeding
of the 1990 Pacific Northwest Range Management Short Course, Fire in Pacific
Northwest Ecosystems, 23-25 janvier 1990, Pendleton, OR, Corvallis, OR,
Department of Rangeland Resources, Oregon State University, pp. 132-136.
[12]
Mobley H.E. ; Barden C.R. ; Bigler Crow A. ; Fender D.E. ; Jay D.M. ; Winkworth
R.C, 1976 - Southern forestry smoke management guidebook. USDA Forest Service
general technical report SE-10, 140p.
[13]
Ward D.; Hardy D.C., 1991 – Smoke emissions from wildland fires, Environment
International, Vol.17, pp 117-134.
[14]
Sandberg D.V.; Martin R.E., 1975 - Particle sizes in slash fire smoke. USDA Forest
Service research paper PNW-199, 7 p.
[15]
Schaefer V.J., 1974 - Some physical relationships of fine particle smoke. Proceedings
annual : 13 Tall Timbers Fire Ecology Conference; Tallahassee, Florida, 22-23 mars
1973, pp. 283-294.
[16]
Levin, B. C.; Kuligowski, E. D. : Toxicology of Fire and Smoke. Inhalation
Toxicology. 2nd Edition. Chapter 10, CRC Press (Taylor and Francis Group), Boca
Raton, FL, Salem, H.; Katz, S. A., Editor(s), 205-228 p., 2005
[17]
Soot. Hamins, A. : Environmental Implications of Combustion Processes. Chapter 3,
CRC Press, Boca Raton, FL, Puri, I. K., Editor, 71-95 p., 1993.
Effets du feu sur les personnes
Page 143/163
8 Modélisation de l’effet du feu sur les personnes
8.1
Généralités
Le développement de l’évaluation des effets du feu sur les personnes est intimement lié à
celui des modèles plus généraux utilisés en ingénierie de la sécurité incendie. Les différents
effets présentés ne disposent néanmoins pas tous d’un modèle physique explicite. Tous ne
peuvent donc pas être reproduits correctement par le calcul.
8.1.1
Introduction
Tous les produits de construction combustibles et les produits d’aménagement peuvent
produire de la fumée nocive. La plupart des victimes succombent à l’inhalation de fumées,
mais celle-ci n’est pas encore pris en compte dans la réglementation bâtiment. Le danger de la
fumée est une fonction de son pouvoir toxique, de l'
exposition d'
une personne à une
concentration (variable) de fumée et de l’effet thermique au cours du temps.
Certains des effets se produisent progressivement au cours d’une exposition continue, d'
autres
se produisent presque instantanément. La concentration et la distribution de la fumée dans une
habitation en feu, un bâtiment public ou un véhicule dépendent de facteurs tels que la
composition chimique et les taux de combustion des produits brûlant, du taux et de la
direction de la ventilation, et de l’éventuelle mise en action d'
un système d’extinction ou de
désenfumage. Le temps d'
exposition est une fonction de la période de la détection et de
l'
alarme, de la conception du bâtiment, des possibilités de mouvement de la population
considérée, et de la présence des sauveteurs. La sévérité des effets dépend donc de tous ces
éléments et de la sensibilité des occupants aux composants chimiques et aux effets de la
fumée.
8.1.2
Prédiction de la létalité due au feu
Les effets que la fumée peut avoir sur des occupants ou sur le personnel d’intervention
peuvent conduire à la létalité. Afin de limiter cet effet, de nombreuses réglementations ont été
définies dans chaque domaine. Les plus élaborées sont celles présentes dans le domaine des
transports publics, où les configurations géométriques étroites et la ventilation aggravent les
effets du feu.
Les professionnels de la sécurité incendie disposent de plus en plus d’outils pour estimer des
expositions aux fumées potentiellement mortelles. Ils ont été développés intensivement depuis
les dix dernières années. Des outils comme HAZARD I permettent de combiner certains des
facteurs de risque présentés et de prévoir les effets d’un feu donné. La routine d’ EXITT
implantée dans HAZARD I, le logiciel EXIT 89 ou EXODUS [4], par exemple, offrent la
capacité de simuler le mouvement de personnes dans un environnement d’incendie.
Effets du feu sur les personnes
Page 144/163
La Fire Protection Research Foundation a développé une méthode pour calculer le risque
d'
incendie en combinant l'
analyse du scénario avec l'
analyse de risque [2]. De nombreux
calculs ont été réalisés, pour lesquels la survie des occupants a été évaluée. Dans de nombreux
cas, les prévisions sont suffisamment en conformité avec l'
occurrence réelle et sont
suffisamment corrélées à la physique établie du feu. Aussi la communauté admet un certain
degré de confiance en ces possibilités prédictives, quand les analyses sont exécutées par les
personnes bien informées et que les données d’entrée nécessaires à la réalisation des calculs
sont suffisantes.
8.1.3
Prédiction des effets sub-létaux du feu
Il existe des rapports de survivants d’incendies disant que la fumée et la chaleur ont empêché
leur progression vers des sorties du fait d’une altération prolongée de leur santé, ou des cas où
l'
évacuation d’occupants valides a été ralentie par la présence de victimes au sol.
Ces phénomènes sont les conséquences d'
un éventail d'
effets sub-létaux que la fumée peut
avoir sur des personnes pendant leur exposition, sans causer directement la mort :
•
•
Les effets physiologiques de l’incapacitation : incapacité à effectuer sa propre
évacuation, réduction de la vitesse de sortie due, par exemple, à une irritation
sensorielle (yeux, poumons), à la chaleur ou aux dommages infligés par le
rayonnement des flammes et les fumées, réduction des capacités motrices, et
obscurcissement visuel. Ces différents paramètres ont été discutés précédemment.
Les effets psychologiques : choix d'
un chemin d’évacuation plus long ou plus
dangereux dû, par exemple, à une acuité mentale diminuée combinée à un
obscurcissement visuel.
Chacun de ces paramètres peut limiter la capacité à s'
échapper, à survivre et à demeurer en
bonne santé après l’exposition au feu. Il existe néanmoins de nombreuses difficultés quant à
l’analyse de la contribution de ces effets sub-létaux dans les études d’impact sur les
personnes. Ces difficultés résultent entre autres :
•
•
•
•
•
Du nombre souvent non maîtrisé de personnes affectées et de la sévérité des
affections ;
De l’erreur consistant à assigner les effets prolongés observés uniquement au feu, sans
prendre en compte l’inhalation de poussières, d’irritants ou de fumée de tabac dans la
vie courante des personnes;
De la variabilité des effets du feu, comme celle des productions de gaz toxiques en
fonction des conditions locales de combustion, qui sont souvent au moins aussi
importantes que la nature même du combustible ;
De la différence entre l’état du mélange gazeux sur son lieu de production et son état
au-niveau des victimes potentielles ;
Des méthodes de mesure ou des données insatisfaisantes ou inaccessibles sur les effets
sub-létaux de la fumée, ainsi que de l’interprétation contradictoire des données
existantes ;
Effets du feu sur les personnes
Page 145/163
8.1.4
Commentaires
Les modèles retenus pour évaluer les effets létaux ou sub-létaux des fumées doivent donc
prendre en compte toutes les approximations inhérentes à des modèles basés sur des données
pas toujours consensuelles, et sujettes à d’importantes variations au sein des populations. En
tout état de cause, il conviendra de déterminer premièrement à l’aide des modèles si les
personnes ont été en contact avec les fumées, mais cette analyse ne suffit pas : d’une part, les
fumées diffusent vers l’air sain progressivement (diffusion gazeuse) et d’autre part, les effets
thermiques radiatifs n’ont pas besoin de fumées comme support matériel.
8.2
8.2.1
Modélisation des différents effets du feu
Modèle radiatif et flux incident
Des sous-modèles radiatifs sont codés et implémentés dans les modèles de zone et les
modèles champ. Ces modèles sont à même de calculer le flux thermique radiatif issu des
fumées et des flammes vers les personnes.
En général, pour la flamme, le modèle a une formulation de type ratio du débit calorifique
local, alors que le modèle utilisé pour les fumées possède une formulation en T4 de type
Stefan-Boltzmann.
Les paramètres d’entrée de ces modèles sont variables, mais certaines données sont la
dépendance spectrale, la concentration et l’émissivité des espèces présentes dans les fumées.
Or, une connaissance parfaite de l’ensemble des espèces présentes dans les fumées et la
résolution spectrale étendue de l’infrarouge au visible n’est pas envisageable dans la
simulation de combustions à grande échelle à l’heure actuelle, entre autres pour des raisons de
puissance de calcul.
Les incertitudes inhérentes à ces différents paramètres d’entrée demeurent donc importantes,
tout comme des simplifications mathématiques limitent la qualité du calcul. Pour qu’un calcul
d’effet radiatif soit pertinent, il convient de plus de reproduire les positions adéquates pour les
émetteurs (flammes, fumées) et les récepteurs (personnes).
A l’heure actuelle, ce calcul peut se faire en plaçant des cibles reproduisant les personnes dans
leur physionomie, prenant en compte leur coefficient d’orientation, et en suivant le flux
incident et le bilan thermique à la surface de ces cibles. Les critères retenus peuvent être basés
sur le flux limite de 2,5 kW/m² présenté au paragraphe 5.2.
Les modèles de zone peuvent être utilisés pour un calcul rapide de ce type. Sous la couche
chaude, le flux radiatif est alors uniforme. La validité du calcul dépend en grande partie de la
pertinence du système stratifié, mais aussi du solveur utilisé et de ses paramètres. L’un des
jeux de paramètres essentiels est le terme source. L’hypothèse généralement faite est un débit
calorifique et un bilan thermique conditionnant la température d’un média dont le débit de
production est induit par le débit calorifique, au moyen du bilan matière. Il en résulte une
covariance directe entre ces deux paramètres. Le débit fumigène est le paramètre essentiel et
Effets du feu sur les personnes
Page 146/163
le calcul prend en compte une estimation moyenne des flux dépendant de la concentration en
suies et de la température calculées.
Dans un modèle champ, le flux incident provient de toutes les directions de l’espace et est
variable en fonction des divers éléments résolus. La concentration en suies ou/et en vapeur
d’eau, par exemple, peut être variable à chaque point de l’espace, tout comme la température,
résultant d’un bilan thermique complexe. Chaque maille de fumée est alors un émetteur et un
récepteur de rayonnement différent. Le calcul d’effet sur les personnes est alors bien plus fin.
Les espèces présentes dans les fumées peuvent être dépendantes (cas des modèles « mixture
fraction »), c’est à dire avec une unique équation de transport pour une variable « fumée »
définissant des taux de proportionnalité entre espèces, ou une équation de transport différente
peut être résolue pour chaque espèce. Le rayonnement est alors résolu par différentes
techniques. Les méthodes de volumes finis (angles solides) et les méthodes de Monte-Carlo
sont alors les plus à même de calculer le flux reçu en provenance de nombreuses directions de
l’espace. D’autres méthodes, comme les techniques de flux sont souvent plus limitées.
Certains modèles d’évacuation intègrent par ailleurs des couplages avec des modèles de zone
ou des codes à champ, afin de tenter de prédire à la fois la tenabilité, mais aussi le mouvement
des personnes. Les variabilités des populations et les réponses psychologiques montrent
néanmoins les limites de tels développements. Ceux-ci sont présentés au paragraphe 8.3.2.
Lors du recours à un calcul d’effet thermique radiatif sur les personnes, les éléments qui
doivent figurer dans les hypothèses sont :
-
-
-
Les hypothèses sur la source :
o Son émissivité,
o Sa dépendance spectrale (résolution spectrale, par bandes, nombre de
bandes…),
o Les espèces considérées (en général, hydrocarbures, eau, dioxyde de carbone),
o La résolution de différents aspects du rayonnement induits par l’équation RTE
(émission, absorption, diffusion…),
o La méthode de résolution utilisée (méthode FVM, de flux, de Monte-Carlo…)
Les hypothèses sur le récepteur :
o Son émissivité (son coefficient d’absorption),
o Ses attributs de mouvement,
o Les cibles concernées et la variation de leur éclairement dans le temps (facteur
d’orientation)
Les hypothèses sur les critères retenus et leur justification.
L’habillement des zones exposées ou le refroidissement par l’air ambiant (en particulier en
cas de mouvement) sont ainsi des paramètres déterminants dans ces modèles, sans pour autant
que ceux-ci apparaissent dans les formulations ou les critères. La pigmentation de la peau n’a
pas d’effet pour le rayonnement infrarouge, ce qui élimine ce paramètre comme susceptibilité
au sein des populations.
D’autres éléments sont envisageables en fonction du modèle considéré. Il est difficile
d’introduire le mouvement dans ce type de calculs, et par-là même le refroidissement lié à la
vitesse de déplacement dans l’air, car ils correspondent à des changements de conditions aux
limites qui ne sont pas nécessairement bien prises en compte avec les techniques de résolution
adaptées au traitement des incendies.
Effets du feu sur les personnes
Page 147/163
En résumé, plus la connaissance du contenu des fumées est élaboré, plus le modèle peut être
complexe et l’effet radiatif des fumées finement reproduit. Néanmoins, les limitations
évoquées, comme les méthodes numériques ou les variabilités au sein des populations,
rendent cette tâche difficile.
8.2.2
Modèle de transport et effet thermique convectif
Les équations de transport et les bilans de matière et d’énergie permettent de calculer la
température des fumées et de l’air présent. Dans les modèles de zone, le calcul consiste à
obtenir une zone de température élevée (la couche chaude), et une zone de température plus
modérée (la couche froide). Ces deux couches sont supposées à température uniforme. Dans
le modèle champ, les températures moyennes de chaque élément fini constituant le domaine
de calcul sont déterminées.
Les critères présentés au paragraphe 5.3.2 peuvent alors être utilisés (67°C en 30 minutes ou
42°C pour une exposition prolongée). Le calcul de dose thermique est relativement simple à
réaliser. Il convient que le modèle soit à même de reproduire le comportement des
mouvements fluides au plus près de la réalité pour espérer une résolution relativement précise.
Les paramètres influents sur l’effet thermique convectif sont par ailleurs l’humidité et la
vélocité des gaz en contact avec les personnes. Une vitesse relative doit être considérée si les
personnes sont en mouvement.
Lors du recours à un calcul d’effet thermique convectif sur les personnes, les éléments qui
doivent figurer dans les hypothèses sont :
-
8.2.3
Les hypothèses sur la sollicitation thermique :
o La température absolue des gaz,
o Les vecteurs vélocité des gaz,
o La teneur en eau du gaz,
o La méthode de résolution utilisée (LES, DNS, k-ε RANS…)
Les hypothèses sur les personnes :
o Ses attributs de mouvement,
Les hypothèses sur les critères retenus et leur justification.
Dose thermique
La dose thermique peut être implémentée dans les modèles à même de traiter les deux
phénomènes présentés précédemment. Des calculs de dose thermique réalisés selon la
méthode décrite au paragraphe 5.4 peuvent être utilisés. Les dispositions énoncées
précédemment sont applicables.
Certains outils commerciaux, comme le logiciel EXODUS [3][4] ou EXIT89 [3] possèdent ce
type d’algorithme intégré, mais ne sont pas adaptés à une résolution spatiale et temporelle
précise du feu. De plus, l’interprétation de ce type de données couplées à l’évacuation est
ardue.
Effets du feu sur les personnes
Page 148/163
Les logiciels champ connus n’utilisent pas ce type d’algorithme, mais résolvent les
paramètres nécessaires à son utilisation et peuvent donc être réalisés en post-traitement. La
difficulté de considérer les flux radiatifs pour des cibles en mouvement reproduisant les
personnes impose de travailler en général avec les flux reçus au sol et aux températures
moyennes à différentes hauteurs. Un calcul de dose thermique global serait néanmoins
possible à partir de ces outils.
8.2.4
Modèle de transport et perte de visibilité
La perte de visibilité est modélisable seulement si les suies ont été déterminées en proportion
et en mouvement, et la cible souhaitée spécifiée. En effet, au paragraphe 4.5, il a été présenté
que la visibilité ne peut être définie dans l’absolu, mais seulement par rapport à un objet à
visualiser. Dans ce cadre, la visibilité est corrélée par l’intermédiaire d’un modèle au
coefficient d’extinction des fumées.
La modélisation de ce coefficient d’extinction dépend de plusieurs paramètres. En premier
lieu, le terme source utilisé et la manière dont il définit la production de suies est primordial.
Cette production peut être calculée, par une chimie à étapes, indexée sur la production de CO
(ces deux phénomènes sont liés [12]) ou dans le cas général spécifiée comme un ratio du débit
de perte de masse.
Ensuite, les équations bilan de matière et éventuellement de quantité de mouvement
permettent d’étudier la répartition de ces fumées. Le lien entre concentration en fumées et
coefficient d’extinction est réalisé à partir d’un paramètre défini comme la surface
d’extinction spécifique des fumées. Cette surface est présentée au paragraphe 4.4.2. Sa valeur
n’est bien connue que pour certaines suies et une erreur importante est introduite à ce niveau.
La surface d’extinction spécifique est un paramètre numérique du logiciel de simulation.
Le modèle de visibilité relie ensuite le calcul du coefficient d’extinction à l’effet sur les
personnes, en général par rapport à la vision d’un système réfléchissant ou lumineux. Les
modèles les plus utilisés sont les modèles de Yin et Yamada, présentés au paragraphe 4.5.4.
Ces modèles supposent l’utilisation d’une constante empirique, qui constitue un paramètre
numérique du logiciel de simulation.
Il est donc plus précis de calculer les concentrations massiques en suies que les coefficients
d’extinction, ceux-ci étant plus précis que la visibilité. Les deux paramètres numériques
utilisés alors sont primordiaux et doivent être rappelés dans les paramètres de simulation.
Des logiciels comme FDS [5] sont équipés d’un algorithme de calcul de la visibilité des
fumées, mais les valeurs par défaut utilisées ne sont pas nécessairement précisées. FDS utilise
une surface d’extinction spécifique de 10 m²/g et par défaut une constante de Yin de 3.
Il est important de noter qu’avec ce type de modèles, et dans l’état actuel des connaissances,
l’effet de synergie entre perte de visibilité et effets irritants des gaz et des suies sur les yeux
n’est pas pris en compte par les modèles.
Effets du feu sur les personnes
Page 149/163
Lors du recours à un calcul de perte de visibilité sur les personnes en mouvement, les
éléments qui doivent figurer dans les hypothèses sont :
-
-
8.2.5
Les hypothèses sur la sollicitation :
o Les paramètres de production de suies,
o Les paramètres de mouvement des suies,
o La méthode de résolution utilisée pour ce mouvement (Zone, LES, DNS, k-ε
RANS…)
Les hypothèses sur les personnes :
o ses attributs de mouvement,
Les hypothèses sur les critères retenus et leur justification :
o Surface d’extinction spécifique ;
o Modèle utilisé et justification ;
o Système visé et éventuellement constante de Yin.
Modèle de transport et effets des gaz toxiques
L’effet toxique des fumées est un paramètre très difficile à calculer, d’une part du fait de la
finesse des modèles de production et de transport, et d’autre part du fait de la variabilité des
effets sur les personnes. Trois étapes sont à considérer dans la modélisation de l’effet
toxique :
1. La première étape concerne le terme source de production de toxiques. La chimie prise
en compte au-niveau des modèles de combustion permet d’atteindre ce paramètre avec
différentes résolutions. Les modèles globaux sont les plus simples. Ils sont établis sur
une combustion basée sur le mélange des espèces [5]. Ils font appel à une réaction
simple à une étape. Des modèles plus complexes peuvent être utilisés. Ces modèles
sont très difficiles à développer. Un exemple de modèle de prédiction de la production
d’oxydes d’azote est présenté dans les références [6],[7] et [8]. Il montre, outre les
erreurs de modélisation (justesse et fidélité du modèle) un grand nombre d’étapes
réactionnelles, engendrant un surcoût de temps calcul rédhibitoire. A l’heure actuelle,
un calcul identique pour l’ensemble des espèces est trop complexe et manquerait de
données expérimentales fiables.
Deux approches existent pour le terme source. La plus simple est de faire appel à un
terme source prescrit, par exemple suite à des expérimentations à grande échelle. La
plus complexe consiste à calculer le développement du terme source et des espèces
émises.
2. La seconde étape de la modélisation de l’effet toxique est le transport. Dans les
modèles simplifiés, ce transport se fait globalement, par l’intermédiaire d’un scalaire
unique. Les modèles les plus complexes font appel à une résolution d’une équation de
transport par espèce. Cette étape est primordiale pour prédire les concentrations des
espèces issues du terme source au-niveau de la zone d’exposition des personnes.
Résoudre une équation de transport par espèce engendre néanmoins des surcoûts de
temps calcul considérables. La chimie réactionnelle des espèces en dehors de leur zone
Effets du feu sur les personnes
Page 150/163
de production est par ailleurs très mal connue et n’est en général pas prise en compte.
Cette approximation n’est pas vérifiée dans la réalité du fait de nombreux
phénomènes : disparition du formaldéhyde au profit de l’acide formique, équilibres
entre CO et CO2 ou piégeage des espèces sur les suies et les condensas par exemple ne
sont pas modélisés.
3. La troisième étape consiste à calculer, à partir de la résolution des deux étapes
précédentes et de la connaissance des concentrations présentes au point d’exposition,
l’effet sur les personnes du mélange de gaz. L’effet toxique réel dépend, entre autres,
de la concentration locale en gaz, du passif d’exposition, mais aussi de l’état de stress
de la personne (rythmes cardiaque et respiratoire). Il n’existe pas de modèle absolu,
mais l’utilisateur pourra se baser sur les modèles présentés au paragraphe 6.6.
Ainsi, faire appel à une modélisation de la toxicité requiert une bonne résolution spatiale et
temporelle du mouvement des fumées. Les modèles champs s’y prêtent bien mieux que les
modèles de zone. Néanmoins, des tentatives ont été réalisées et des algorithmes sont
implémentés dans des outils comme les logiciels EXODUS [3][4] ou EXIT89 [3]. Il est évident
que les résultats issus de tels calculs sont sujets à discussion. Des travaux sur le calcul de la
toxicité par les modèles champs peuvent néanmoins être envisagés. L’université de
Greenwich expérimente par exemple de tels couplages sur le logiciel SmartFire. Le LNE [9] a
développé des outils utilisables pour calculer des champs de FED ou FEC selon l’ISO 13571
à partir du logiciel FDS.
Figure 41 : Plan de coupe d’indice de toxicité dans une simulation de feu à grande échelle
Naturellement, à l’heure actuelle, de telles interprétations ne peuvent être réalisées que dans
les cas simples de foyers bien connus et dont les taux de production d’espèces ne varient pas
dans le temps. Outre le calcul, l’interprétation et la discussion des résultats demeurent
difficiles (voir paragraphe 6.5).
Effets du feu sur les personnes
Page 151/163
Lors du recours à un calcul d’effet toxique des fumées sur les personnes en mouvement, les
éléments qui doivent figurer dans les hypothèses sont :
-
-
8.3
8.3.1
Les hypothèses sur la sollicitation :
o Les paramètres de production de toxiques,
o Les paramètres de mouvement des toxiques,
o La méthode de résolution utilisée pour ce mouvement (Zone, LES, DNS, k-ε
RANS…)
Les hypothèses sur les personnes :
o Leurs attributs de mouvement et de susceptibilité aux toxiques,
Les hypothèses sur le modèle utilisé :
o Le type de modèle et sa justification scientifique,
o L’objectif de sécurité sous-jacent : létalité, incapacitation…
Les critères retenus et leur justification :
o Les valeurs seuils retenues pour cet objectif.
Perspectives et limitations
Prédiction des effets du feu
Pour l’effet thermique du feu, les évolutions principales vont concerner dans les années à
venir leur couplage avec les modèles d’évacuation. En effet, l’intégration de doses thermiques
sur des personnes en mouvement est dorénavant possible. Les améliorations doivent porter
d’une part sur la connaissance des variabilités de susceptibilité des populations et d’autre part
sur une bonne prise en compte des zones exposées et des incidences de rayonnement. Ce
dernier point ne peut être résolu que par les modèles champ. Pour les modèles de zone,
l’approximation peut être que le flux reçu par les surfaces horizontales provient des fumées
stratifiées et que le flux reçu par les surfaces verticales en regard avec le foyer provient du
feu. La part convective est quant à elle à la base des modèles et a subi de nombreuses
validations.
Comme énoncé précédemment, l’effet toxique est sans doute le plus difficile à modéliser à
l’heure actuelle, du fait de la faible fiabilité des modèles décrits, mais aussi des limitations
numériques des modèles. Cet effet est promis à de nombreux développements. La chimie de
la combustion et l’amélioration des modèles permet d’espérer prochainement une
amélioration considérable de la prédiction des termes sources de fumées [13]. Néanmoins, la
prise en compte de la chimie post-combustion et le temps de calcul correspondant à toutes ces
dispositions ne permet pas d’envisager la possibilité de ce type de calcul dans des situations
d’incendie complexes avant plusieurs années.
Pour la perte de visibilité, il convient avant tout d’identifier la nature et la quantité de suies
présentes, c’est à dire de résoudre un terme source. De nombreux travaux sont en cours à ce
niveau. En particulier, il est avéré que le taux de production de suies par le feu est
proportionnel au taux de production de CO pour de nombreux produits [12] dans le cas de feux
ventilés. Prédire le taux de production de suies dans d’autres conditions est plus difficile et
sujet à d’actives recherches. En général, le coefficient d’extinction des fumées est modélisé
comme un gaz. Enfin, le modèle de visibilité choisi est sujet à discussion. Les améliorations
Effets du feu sur les personnes
Page 152/163
futures peuvent principalement porter sur le terme source, mais aussi sur la chimie
post-combustion des suies et sur l’effet qu’a l’agglomération de celles-ci sur leur coefficient
d’extinction. Tous ces phénomènes sont encore mal connus à l’heure actuelle.
Enfin, la modélisation du mouvement des particules est très difficile et en plein
développement. Les équations de transport sont en général résolues par rapport à des
particules lagrangiennes et l’aspect brownien du mouvement est éludé. L’une des premières
difficultés de la modélisation des particules est la prise en compte de leurs interactions (chocs,
agglomération…), mais aussi la connaissance expérimentale de leur forme, masse et
répartition, du fait de la complexité des phénomènes mis en jeu lors de leur formation (voir
paragraphe 7.2.2). Il est probable que la modélisation du mouvement des particules demeure
très partielle durant encore de nombreuses années.
8.3.2
Influences combinées entre les effets
Les différents risques du feu sur les personnes sont traités comme agissant plus ou moins
indépendamment. En réalité, des interactions entre les effets sont susceptibles de se produire.
Par exemple, les effets des irritants sensoriels sur les yeux sont additifs avec l'
obscurcissement
de fumée, ayant pour résultat la désorientation additionnelle. Ce point a été évoqué dans les
modèles de visibilité (paragraphe 4.5), mais aucun modèle n’a été développé pour lier
concentrations en irritants, nature de ceux-ci et perte de visibilité.
La présence d’irritants peut également avoir une certaine influence sur l'
asphyxie. Les irritants
peuvent affecter les modèles de respiration, entraînant la bronchoconstriction et le
changement de rapports de ventilation et d’irrigation des poumons. Ils ont alors un effet qui
peut être considéré, sous certaines réserves, comme additif à celui des asphyxiants.
Les particules conditionnent la perte de visibilité, mais sont aussi liées fortement aux
phénomènes de flux thermique émis par les fumées et peuvent transporter au-niveau des
poumons des gaz toxiques dont l’effet sera alors retardé.
De façon générale, ces interactions sont considérées comme relativement mineures comparées
aux effets primaires des différents composants. Des développements de modèles combinés
seront encore à faire afin de considérer les différents aspects sur les personnes et de définir
des populations cibles.
8.3.3
Variabilité des populations
Au sein des populations, les effets physiologiques et psychologiques de l’incendie peuvent
limiter les décisions efficaces pour accomplir leur propre évacuation ou pour se protéger. Les
effets psychologiques sont très variables d’un individu à un autre, mais aussi entre un individu
seul et son comportement en groupe. Ces effets conditionnent grandement son potentiel de
survie et peuvent être influencés par de nombreux paramètres : éducation, expériences
précédentes de situations critiques, religion ou appartenance ethnique par exemple.
Il est ainsi avéré qu’une étude sur une population donnée ne donne pas nécessairement des
résultats similaires avec une autre population exposée au même stimulus. Cette réponse porte
Effets du feu sur les personnes
Page 153/163
sur la décision d’évacuer, mais aussi sur le comportement en cours d’évacuation et des choix
effectués.
Lors des incendies d’octobre 2005 dans des hôtels parisiens, des individus ont ainsi préféré se
suicider plutôt que de trouver des solutions pour se mettre à l’abri, alors que des zones de
sécurité existaient encore. Au contraire, lors des attentats du World Trade Center du 11
septembre 2001, des individus ont ralenti l’évacuation car ils ont mal jugé la gravité de la
situation et téléphonaient durant leur descente par les escaliers.
L’objet de ce document n’est pas de présenter les modèles d’évacuation. Les modèles de base
étaient des modèles d’écoulement et ont évolué ces dernières années vers des modèles
maillés. La référence [20] décrit les grands principes de ce type d’outils pour lesquels l’effet
de variabilité des populations est introduit par l’intermédiaire de fonctions statistiques
relatives aux vitesses de déplacement des personnes. Ces vitesses sont influencées par les
conditions environnantes, voire par les fumées dans les outils les plus récents. Un exemple
d’effet de propriétés de populations sur un calcul d’évacuation, basé sur des données
morphologiques, est donné ci-après [17].
Figure 42 - Calcul d’évacuation réalisé en fonction de propriétés de populations données
La référence [19] présente une excellente synthèse des connaissances actuelles sur le
comportement des personnes en situation d’incendie, et un exemple concret des décisions des
personnes. En particulier, la théorie montre que le comportement humain est avant tout basé
sur sa perception du danger. Celle-ci s’opère en 6 étapes : reconnaissance, validation,
définition, évaluation, engagement (décision), réévaluation. Des modèles de stress humain ont
ainsi été développés pour prendre en compte l’état des personnes en situation d’incendie [21].
Cet état peut conduire des personnes à des conduites inadaptées à la préservation de leur
propre vie, bien que parfois compréhensibles : comportement de panique, état de choc ou
retour en arrière (besoins irrésistibles de récupérer des biens ou des personnes). Ces états
Effets du feu sur les personnes
Page 154/163
peuvent être totalement indépendants d’effets physiologiques et arrêtent ou limitent
l’évacuation. Leur modélisation complète et détaillée est impossible.
Les effets physiologiques de l’exposition sont de plus très variables au sein des populations[19]
et ont été évoqués dans les paragraphes précédents26. Un point essentiel est qu’ils ont aussi un
effet en retour sur la psychologie des personnes : perte de lucidité par exemple, accentuée par
un découragement suite à une mise en évidence d’une mauvaise décision d’évacuation sont
des situations où psychologie de l’individu et physiologie sont intimement liées pour assurer
l’évacuation.
8.3.4
Couplages entre modèles
Les couplages les plus évidents à l’heure actuelle sont ceux intervenant entre les modèles
d’évacuation et les différents effets sur les personnes. Ces couplages sont communément
réalisés sur les outils de zone [3][4] et leur utilisation avec les outils champ commence à se
développer. Par exemple, entre le code SmartFire et le logiciel d’évacuation Exodus [14],
développés par l’université de Greenwich. Communément, ce couplage se fait à l’heure
actuelle par interprétation des résultats du calcul CFD sous forme de données issues des
modèles de zone (hauteur d’interface, températures de couches froide et chaude…), pris en
compte par le logiciel d’évacuation.
D’autres outils maillés d’évacuation, comme Simulex, ont été couplés à des outils type zone,
mais n’ont pas fait l’objet d’un couplage avec les outils champ. De toute évidence dans tous
ces couplages, à l’heure actuelle, le lien ne se fait que dans le sens de la présence de fumée
vers l’effet sur les occupants. Un couplage bidirectionnel verrait le comportement des
personnes modélisées être influencé par la présence de fumées. Or, il est très difficile
d’obtenir des données sur le comportement humain en présence de fumées, en situation
d’évacuation.
Les couplages à venir devront ainsi associer modèles d’évacuation et modèles champs, mais
surtout permettre de prendre en compte les deux sens de cette relation : les fumées ont un effet
sur les personnes, mais les personnes ajustent leur comportement en fonction des fumées. Ce
phénomène est d’autant plus important que de nombreux décès sont liés au fait que les gens se
dirigent de préférence vers des zones non enfumées et peuvent se retrouver alors piégés. Ce
phénomène est souvent mis en évidence dans les feux en espaces confinés, où la décision
parfois mauvaise de se rendre de préférence vers une zone moins enfumée plutôt que la sortie
peut engendrer la mort de la personne, rapidement prise au piège et dans une situation
d’évacuation devenue impossible.
D’autres couplages sont envisageables à l’avenir : logiciels de CFD avec calcul de contrainte,
modèles mécaniques d’effondrement par exemple. Ces modèles permettent de créer et
reproduire de nouvelles conditions d’exposition des personnes, par exemple suite à
l’effondrement d’une cloison ou au bris d’une fenêtre. Un couplage global est néanmoins
inenvisageable à l’heure actuelle, ne serais-ce que du fait de la quantité de données
nécessaires à leur utilisation et du temps de calcul demandé.
26
La référence [19] montre, pages 3-258 à 3-260, l’influence de la perte de visibilité au sein de populations
génétiquement relativement proches.
Effets du feu sur les personnes
Page 155/163
8.3.5
Sensibilité et simplifications des modèles
Un des phénomènes important à considérer est le besoin de simplification des modèles. Ainsi,
comme pour les paramètres aérothermiques lors d’une simulation champ, les différents effets
sur les personnes sont dépendants de la validation spatiale et temporelle du modèle. Des
travaux sur les grilles numériques [11] sont ainsi possibles afin d’améliorer le temps de calcul
sans trop dégrader la justesse des résultats.
L’étape de validation est elle aussi primordiale. Une des principales difficultés est d’obtenir
des données expérimentales relatives aux effets sur les personnes dans des situations de feux
parfaitement connues. La prise en compte de l’effet de feux simples ayant entraîné des
victimes est néanmoins possible et pourrait se prêter à ce type de validation. Les situations
étudiées requièrent premièrement que le feu soit fidèlement reproduit [10], puis que les points
de calage observés correspondent entre expertise et simulation. Dans ce cas, la validation des
outils se prête aux exigences présentes pour les autres paramètres. En particulier, l’incertitude
sur les données d’entrée doit être considérée [15], car elle est l’un des principaux phénomènes
intervenant dans la validation de tels modèles. Dans ce cas, et travaillant toujours sur des
populations réduites, voire uniques, la validation des modèles prédictifs de létalité par
exemple, ne peut s’envisager qu’au niveau de l’ordre de grandeur, ne serait-ce que du fait de
la variabilité des populations. La méthode de validation à utiliser la plus évoluée à l’heure
actuelle est celle de l’ISO 16730 [16].
Une étude paramétrique de sensibilité est souhaitable, mais la faiblesse des données
d’exposition ne permet vraisemblablement pas sa réalisation dans le domaine de l’exposition
aux fumées.
De plus, il est évident que les modèles ne pourront jamais reproduire la réalité. De ce fait, les
simplifications nécessaires impliquent que les effets sur les personnes ne seront jamais
totalement reproduits. Ceux-ci font appel à des phénomènes très complexes, et en particulier à
des mécanismes psychologiques et physiologiques souvent mal connus et abordés
précédemment.
Enfin, la vitesse de croissance de la puissance de calcul tend à montrer que les calculs vont
encore s’accélérer et se complexifier. Pour les applications à haute performance (nucléaire,
climatologie…), nous sommes entrés depuis quelques années dans l’ère du téraflop et
envisageons l’exaflop (1018 opérations par seconde) dès 2015 [22]. De tels moyens ne sont pas
encore disponibles pour les simulations usuelles du domaine incendie, mais le seront
rapidement. Dans de telles conditions, les limitations seront de moins en moins de nature
numérique, et de plus en plus liées aux données d’entrée et à la validation des outils. L’effet
de variabilité des populations, ne serait-ce que par sa nature statistique, montre de plus
qu’aucun calcul d’impact sur les personnes ne pourra garantir un nombre de victimes nul.
Effets du feu sur les personnes
Page 156/163
8.4
Références
[1]
Sublethal Effects of Fire Smoke, R.G. Gann, National Institute of Standards and
Technology, Fire Technology, 40, 95–99, 2004 Kluwer Academic Publishers.
Manufactured in The United States.
[2]
Risk Assessment Method: Description of Methodology, R.W. Bukowski, F.B. Clarke,
J.R. Hall, Jr., and S.W. Stiefel, NFPA, Quincy, MA, 1990
[3]
Sublethal Effects of Smoke on Survival and Health. Gann, R. G.; Averill, J. D.; Butler,
K. M.; Jones, W. W.; Mulholland, G. W.; Neviaser, J. L.; Ohlemiller, T. J.; Peacock,
R. D.; Reneke, P. A.; Hall, J. R., Jr., Human Behavior in Fire: Understanding Human
Behavior for Better Fire Safety Design. International Symposium, 2nd Proceedings.
March 26-28, 2001, Boston, MA, Interscience Communications Ltd., London,
England, 285-296 pp, 2001.
[4]
Advanced Occupant Behavioural Features of the Building-EXODUS Evacuation
Model M. Owen, E.R. Galea, and P. Lawrence, Fire Safety Science-Proceedings of the
Fifth International Symposium, Elsevier, London, 1997, pp. 795–806.
[5]
NIST special publication 1018 : Fire Dynamics Simulator (Version 4) - Technical
Reference Guide, Kevin Mc Grattan (NIST) juillet 2004
[6]
A model of the chemical pathways leading to NOx formation during combustion of
mixtures of cellulosic and plastic materials. T. Rogaume, J. Koulidiati, F. Richard, F.
Jabouille, J.L. Torero. 2006. International Journal of Thermal Sciences, vol. 45, pp.
359-366
[7]
Computational Model to Investigate the mechanisms of Formation of NOx During
Waste Incineration. T. Rogaume, F. Jabouille, J.L. Torero. 2004. Combustion Science
and Technology, vol. 176, pp. 925-943.
[8]
Computational model to investigate the effect of different airflows on the formation of
pollutants during waste incineration. T. Rogaume, Auzanneau, Jabouille, Goudeau,
J.L. Torero. 2003. Combustion Science and Technology, vol. 175, pp.1501-1533
[9]
Use of Fire simulation to improve fire safety of railways passenger’s coaches.
Propagation of smoke and gases from seat fires. E. Guillaume (LNE), D. Joyeux
(CTICM), A. Sainrat (LNE) - Proceedings of Fire Safety in Terrestrial Passenger
Transportation - University of Cantabria (Spain), October 20, 2005.
[10]
Comparison of FDS model predictions with FM/SNL fire test data NIST Technical
Report GCR 01-810 P . Friday, W. Mowrer, Avril 2001
[11]
Optimizing the grid size used in CFD simulations to evaluate Fire Safety in Houses
A. Bounagui, N. Benichou, C. Mc Cartney, A. Kashefin. 3rd Symposium on
computational Fluid Dynamics, High Performance Computing and Virtual Reality National Research Council Ottawa, Ontario, Canada, Décembre 2003
Effets du feu sur les personnes
Page 157/163
[12]
Carbon Monoxide and Soot Emissions from Liquid-Fueled Buoyant Turbulent
Diffusion Flames. U.O. Koylu and G.M. Faeth. Combustion and Flame,
pp 87:61–76, 1991.
[13]
Development and validation of a comprehensive model for flame spread and toxic
products in full-scale scenarios - S. Welch & N.R. Marshall. Proceedings 4th
International Seminar on Fire and Explosion Hazards, Derry, September 8-12, 2003.
[14]
Integrated fire and evacuation in maritime environments, E.R. Galea, P. Lawrence, S.
Gwynne, G. Sharp, N. Hurst, Z. Wang and J. Ewer. Proceedings of the 2nd
International Maritime Safety Conference on Design for Safety, Sakai Japan,
Publisher Ship and Ocean Foundation, 27-30 Oct 2004, pp 161-170
[15]
The role of Measurement Uncertainty in the validation of calculation methods for Fire
Safety Engineering, M. L. Janssens, ISO/TC92/SC4 Workshop on Assessment of
Calculation Methods in FSE – 10 avril 2006. Southwest Research Institute, San
Antonio, TX, USA
[16]
ISO DIS 1670 : Fire Safety Engineering – Assessment, verification and validation of
calculation methods - D. Brein, ISO TC92 SC4 WG7, Workshop on Assessment of
Calculation Methods in FSE – 10 avril 2006. Southwest Research Institute, San
Antonio, TX, USA
[17]
Assessment of an Evacuation Model for a Large Occupant Population - EXIT89 – R.
F. Fahy, National Fire Protection Association, ISO/TC92/SC4 Workshop on
Assessment of Calculation Methods in FSE – 10 avril 2006. Southwest Research
Institute, San Antonio, TX, USA
[18]
Guide for Evaluating the Predictive Capabilities of Computer Egress Models, J. Lord,
B. Meacham, A. Moore, R. Fahy, G. Proulx, NIST GCR 06-886, National Institute of
Standards and Technology, December 2005.
[19]
Behavioral Response to Fire and Smoke, J.L. Bryan, The SFPE Handbook of Fire
Protection Engineering, 2nd Edition, Section 3 / Chapter 12,National Fire Protection
Association, Quincy, Massachusetts, 1995.
[20]
Movement of People, J. Pauls, The SFPE Handbook of Fire Protection Engineering,
2nd Edition, Section 3 / Chapter 13, National Fire Protection Association, Quincy,
Massachusetts, 1995.
[21]
A Stress Model for People Facing a Fire, G. Proulx, Journal of Environmental
Psychology, 13, pp 137-147, 1993
[22]
Les fulgurants progrès du calcul intensif, B. Bigot, Haut-Commissaire à l’énergie
atomique, La Recherche, le calcul haute performance, n°393, janvier 2006, p3.
Effets du feu sur les personnes
Page 158/163
Sommaire détaillé
1
Introduction..........................................................................................................................4
2
Généralités ...........................................................................................................................5
2.1
Effets du feu et stades de développement ....................................................................5
2.1.1
2.1.2
2.1.3
2.1.4
Les feux sans flammes .......................................................................................................................... 5
Les feux en cours de développement .................................................................................................... 5
Les feux mal ventilés ............................................................................................................................. 6
Les feux post-flashover.......................................................................................................................... 7
2.2
Effets psychologiques et physiologiques de l’exposition au feu ....................................7
2.3
Statistiques relatives à l’effet du feu sur les personnes.................................................9
2.2.1
2.2.2
2.2.3
2.3.1
Généralités ............................................................................................................................................ 7
Effets psychologiques............................................................................................................................ 7
Effets physiologiques............................................................................................................................. 8
2.3.1.1
2.3.1.2
2.3.1.3
Statistiques globales en France............................................................................................................. 9
Généralités............................................................................................................................................................. 9
Feux en milieu industriel ........................................................................................................................................ 9
Feux en milieu domestique (habitation) ............................................................................................................... 10
2.3.2
Localisation des sinistres et populations concernées en France ......................................................... 10
2.3.3
2.3.4
Données étrangères : Statistiques du Canada .................................................................................... 22
Causes des décès et des incapacitations............................................................................................ 32
2.3.2.1
2.3.2.2
2.3.2.3
2.3.4.1
2.3.4.2
2.3.5
2.4
Bases de données INVS et INSERM................................................................................................................... 10
Bases de données des SDIS (Hors BSPP et BMPM).......................................................................................... 17
Informations de la Permanence Générale du LCPP............................................................................................ 21
Causes des décès liés au feu .............................................................................................................................. 32
Causes des incapacitations liées au feu.............................................................................................................. 38
Conclusions ......................................................................................................................................... 40
Références ..................................................................................................................40
3
Effets du flashover sur le changement de régime de feu..............................................42
3.1
Introduction..................................................................................................................42
3.2
Définition du flashover et critère d’atteinte ..................................................................42
3.3
Critères de flashover ...................................................................................................44
3.4
Effet du flashover sur les personnes ...........................................................................47
3.5
Références ..................................................................................................................48
4
Risques liés à la perte de visibilité durant l’évacuation ................................................49
4.1
Symboles et définitions................................................................................................49
4.2
Intérêt de la détermination de la visibilité des fumées .................................................49
4.3
Approche théorique de la production de fumées .........................................................50
4.4
Evaluation de la quantité de fumée .............................................................................53
4.4.1
4.4.2
4.4.3
4.5
Modèles de visibilité ....................................................................................................58
4.6
Utilisation de l’évaluation de l’opacité des fumées en France .....................................62
4.7
4.8
Conclusions sur les modèles de visibilité ....................................................................64
Références ..................................................................................................................64
4.5.1
4.5.2
4.5.3
4.5.4
4.5.5
4.6.1
4.6.2
4.6.3
5
Principe................................................................................................................................................ 53
Méthodes directes ............................................................................................................................... 53
Méthodes indirectes............................................................................................................................. 56
Définition de la visibilité ....................................................................................................................... 58
Modèles simplifiés ............................................................................................................................... 59
Modèles de Jin, Rasbash et Babrauskas............................................................................................. 60
Modèles de Jin et Yamada .................................................................................................................. 60
Modèle de la norme ISO 13571 ........................................................................................................... 62
Principe................................................................................................................................................ 62
Domaines des transports ..................................................................................................................... 62
Domaine du bâtiment........................................................................................................................... 63
Effets thermiques du feu sur les personnes...................................................................66
5.1
Généralités ..................................................................................................................66
5.2
Flux thermique radiatif incident....................................................................................67
5.2.1
Effets du flux thermique radiatif ........................................................................................................... 67
Effets du feu sur les personnes
Page 159/163
5.2.2
5.2.3
5.3
Température ................................................................................................................69
5.4
5.5
Dose thermique globale...............................................................................................72
Utilisation de l’évaluation de l’effet thermique sur les personnes en France ...............73
5.6
Références ..................................................................................................................74
5.3.1
5.3.2
5.3.3
5.5.1
5.5.2
6
Temps d’atteinte des effets incapacitants............................................................................................ 68
Dose thermique radiative ..................................................................................................................... 69
Effet de la température ........................................................................................................................ 69
Temps d’atteinte des effets incapacitants............................................................................................ 71
Dose thermique convective ................................................................................................................. 72
Instruction technique 246..................................................................................................................... 73
ICPE soumises à autorisation.............................................................................................................. 73
Effets toxiques des effluents du feu................................................................................76
6.1
Définitions....................................................................................................................76
6.2
Le danger lié à la toxicité des fumées .........................................................................78
6.2.1
6.2.2
6.2.3
6.2.4
6.2.5
6.3
6.3.1
6.3.2
6.3.3
6.3.4
Généralités .......................................................................................................................................... 78
Facteurs décisifs pour la survie ........................................................................................................... 78
Effet des gaz irritants ........................................................................................................................... 79
Effet des gaz asphyxiants (ou narcotiques) ......................................................................................... 80
Variabilité des effets au sein des populations ...................................................................................... 81
Les espèces toxiques à considérer .............................................................................82
6.3.4.1
6.3.4.2
6.3.4.3
6.3.4.4
Dioxyde de carbone CO2 ..................................................................................................................... 83
Monoxyde de carbone CO ................................................................................................................... 83
Cyanure d’hydrogène HCN.................................................................................................................. 89
Composés chlorés et bromés .............................................................................................................. 91
Chlorure d’hydrogène HCl et bromure d’hydrogène HBr ..................................................................................... 91
Phosgène ............................................................................................................................................................. 91
Autres composés chlorés..................................................................................................................................... 92
Autres composés bromés .................................................................................................................................... 92
6.3.5
6.3.6
Fluorure d’hydrogène HF ..................................................................................................................... 92
Produits soufrés................................................................................................................................... 92
6.3.7
6.3.8
6.3.9
6.3.10
6.3.11
Oxydes d’azote NO.............................................................................................................................. 94
Aldéhydes ............................................................................................................................................ 94
Ammoniac NH3 .................................................................................................................................... 94
Hydrocarbures ................................................................................................................................ 95
Autres produits organiques ............................................................................................................. 96
6.3.6.1
6.3.6.2
6.3.6.3
6.3.6.4
6.3.11.1
6.3.11.2
6.3.11.3
6.4
6.4.1
6.4.2
6.4.3
6.5.1
6.5.2
6.5.3
Acrylonitrile CH2CHCN......................................................................................................................................... 96
Acide formique HCOOH et acide acétiqueCH3COOH ......................................................................................... 97
Monomères .......................................................................................................................................................... 97
Les méthodes d’analyse des fumées ..........................................................................97
6.4.3.1
6.4.3.2
6.4.3.3
6.5
Dioxyde de soufre SO2 ......................................................................................................................................... 92
Sulfure d’hydrogène H2S...................................................................................................................................... 93
Disulfure de carbone CS2 ..................................................................................................................................... 93
Autres produits soufrés ........................................................................................................................................ 93
Généralités .......................................................................................................................................... 97
Méthodes directes ............................................................................................................................... 98
Méthodes indirectes............................................................................................................................. 99
Méthode par FTIR .............................................................................................................................................. 100
Autres méthodes ................................................................................................................................................ 102
Exemple de méthodes de références ................................................................................................................ 102
Critères d’exposition ..................................................................................................103
6.5.3.1
6.5.3.2
Généralités ........................................................................................................................................ 103
Relation dose-effet............................................................................................................................. 103
Critères d’incapacitation .................................................................................................................... 105
Les IDLH ............................................................................................................................................................ 105
Seuils des effets irréversibles ............................................................................................................................ 106
6.5.4
Critères de létalité.............................................................................................................................. 107
6.5.5
Autres valeurs.................................................................................................................................... 108
6.5.6
6.5.7
6.5.8
Table résumée des critères d’incapacitation pour les effluents du feu............................................... 110
Table résumée des critères de létalité pour les effluents du feu ........................................................ 111
Comparaison des critères d’incapacitation et de létalité .................................................................... 112
6.5.4.1
6.5.4.2
6.5.5.1
6.5.5.2
6.5.5.3
6.6
Concentrations létales (LC 50) ............................................................................................................................ 107
Seuils des effets létaux (SEL) ............................................................................................................................ 108
AEGL.................................................................................................................................................................. 108
ERPG ................................................................................................................................................................. 109
Autres valeurs .................................................................................................................................................... 109
Modèles de toxicité aiguë ..........................................................................................113
Effets du feu sur les personnes
Page 160/163
6.6.1
6.6.2
Modèle d’atteinte irréversible sur la santé par exposition aux gaz toxiques ...................................... 113
Modèles de la norme ISO TS 13571.................................................................................................. 114
6.6.3
6.6.4
Modèle de la norme ISO 13344 (Modèle N-gaz) ............................................................................... 116
Modèle de Purser .............................................................................................................................. 118
6.6.5
Modèles incapacitants additifs ........................................................................................................... 119
6.6.6
Autres modèles recensés .................................................................................................................. 121
6.6.2.1
6.6.2.2
6.6.4.1
6.6.4.2
6.6.5.1
6.6.5.2
6.6.6.1
6.6.6.2
6.6.6.3
6.6.6.4
6.6.7
Modèle de la norme NF F 16-101 ...................................................................................................................... 119
Modèle de la norme STANAG 4602 .................................................................................................................. 119
Modes de calcul définis dans les documents ISO ............................................................................................. 121
Modèle du NRC-CNRC (Canada) ...................................................................................................................... 121
Le modèle du NIST (États Unis) ........................................................................................................................ 121
Le modèle d’atteinte irréversible sur la santé humaine...................................................................................... 122
Effets de synergie entre CO et HCN et modèle de dosage sanguin .................................................. 122
Effet toxique à long terme..........................................................................................123
Utilisation de l’évaluation de la toxicité des fumées en France .................................123
6.9
Références ................................................................................................................127
Principe.............................................................................................................................................. 123
Marine civile....................................................................................................................................... 123
Marine militaire .................................................................................................................................. 124
Aéronautique ..................................................................................................................................... 125
Transport ferroviaire .......................................................................................................................... 125
Bâtiment ............................................................................................................................................ 126
ICPE soumises à autorisation............................................................................................................ 127
Autres effets du feu sur les personnes .........................................................................132
7.1
Risque d’anoxie .........................................................................................................132
7.1.1
7.1.2
7.1.3
7.2
7.2.1
7.2.2
7.2.3
7.2.4
Effets de la diminution du taux d’oxygène ......................................................................................... 132
Mesure............................................................................................................................................... 132
Utilisation ........................................................................................................................................... 133
Risque lié aux particules présentes dans les fumées................................................133
7.2.4.1
7.2.4.2
7.2.4.3
7.2.4.4
7.2.4.5
7.3
8
Description du modèle ....................................................................................................................................... 118
Validation du modèle ......................................................................................................................................... 118
6.7
6.8
6.8.1
6.8.2
6.8.3
6.8.4
6.8.5
6.8.6
6.8.7
7
Modèle des gaz asphyxiants.............................................................................................................................. 114
Modèle des gaz irritants ..................................................................................................................................... 115
Définitions .......................................................................................................................................... 133
Nature et formation des aérosols dans les fumées............................................................................ 134
Mesure des particules........................................................................................................................ 135
Effet des particules sur les personnes ............................................................................................... 137
Courbes standard d’inhalation ........................................................................................................................... 137
Toxicité des particules par inhalation................................................................................................................. 140
Effets indirects des particules ............................................................................................................................ 141
Considérations environnementales.................................................................................................................... 142
Valeurs limites d’exposition................................................................................................................................ 142
Références ................................................................................................................142
Modélisation de l’effet du feu sur les personnes .........................................................144
8.1
Généralités ................................................................................................................144
8.1.1
8.1.2
8.1.3
8.1.4
Introduction ........................................................................................................................................ 144
Prédiction de la létalité due au feu..................................................................................................... 144
Prédiction des effets sub-létaux du feu.............................................................................................. 145
Commentaires ................................................................................................................................... 146
8.2
Modélisation des différents effets du feu ...................................................................146
8.3
Perspectives et limitations .........................................................................................152
8.4
Références ................................................................................................................157
8.2.1
8.2.2
8.2.3
8.2.4
8.2.5
8.3.1
8.3.2
8.3.3
8.3.4
8.3.5
Modèle radiatif et flux incident ........................................................................................................... 146
Modèle de transport et effet thermique convectif ............................................................................... 148
Dose thermique ................................................................................................................................. 148
Modèle de transport et perte de visibilité ........................................................................................... 149
Modèle de transport et effets des gaz toxiques ................................................................................. 150
Prédiction des effets du feu ............................................................................................................... 152
Influences combinées entre les effets................................................................................................ 153
Variabilité des populations ................................................................................................................. 153
Couplages entre modèles .................................................................................................................. 155
Sensibilité et simplifications des modèles .......................................................................................... 156
Effets du feu sur les personnes
Page 161/163
Tableaux
Tableau 1 : Répartition des victimes par tranche d'
âge - 1982 - 1999.................................................................. 11
Tableau 2 : Décès en France, d’après la numérotation OMS ................................................................................ 14
Tableau 3 : Localisation des décès liés à l’incendie en France, 1999 .................................................................. 17
Tableau 4 : Base de la Permanence générale du LCPP : statistiques des blessés................................................. 21
Tableau 5 : Base de la Permanence Générale du LCPP : statistiques des décès .................................................. 21
Tableau 6 : Localisation des décès et blessés liés à l’incendie au Canada, 2000 ................................................. 23
Tableau 7 : Localisation des décès et blessés liés à l’incendie au Canada, 2000, détails secteur résidentiel ....... 27
Tableau 8 : Causes de décès selon Hall, USA, 1979-1990 .................................................................................. 32
Tableau 9 : Causes de décès selon Hall, USA, 1979-1990, détails pour les bâtiments ........................................ 35
Tableau 10 : Victimes non décédées des incendies, Royaume-Uni, 1992-1998 .................................................. 38
Tableau 11 : Conditions de Flashover – Synthèse de Peacock............................................................................. 44
Tableau 12 : Flux critiques d’inflammation de différents matériaux ................................................................... 45
Tableau 13 : Pouvoir fumigène des matériaux en fonction du motif des molécules ............................................ 51
Tableau 14 : Taux de production de suies des combustibles................................................................................ 57
Tableau 15 : Modèles de Jin, Rasbash et Babrauskas .......................................................................................... 60
Tableau 16 : Effets du flux thermique radiatif ..................................................................................................... 67
Tableau 17 : Effets de la température sur les personnes – données US Navy...................................................... 70
Tableau 18 : Effets du flux thermique radiatif sur les biens selon l’arrêté du 29 sept. 2005................................ 73
Tableau 19 : Effets du flux thermique radiatif sur les personnes selon l’arrêté du 29 sept. 2005 ........................ 74
Tableau 20 : Concentrations critiques de gaz irritants d’après [2] ......................................................................... 80
Tableau 21 : Effets physiopathologiques du dioxyde de carbone ........................................................................ 83
Tableau 22 : Effets physiopathologiques du monoxyde de carbone .................................................................... 84
Tableau 23 : Effets physiopathologiques du benzène .......................................................................................... 96
Tableau 24 : Exemple de détermination directe de la LC50 par gramme de différents matériaux........................ 99
Tableau 25 : Exemple de méthodes de référence pour l’analyse des espèces toxiques...................................... 102
Tableau 26 : Facteurs de correction utilisés dans le calcul des LC50.................................................................. 107
Tableau 27 : Seuils d’incapacitation pour les espèces toxiques les plus courantes dans les fumées.................. 110
Tableau 28 : Seuils de létalité pour les espèces toxiques les plus courantes dans les fumées............................ 111
Tableau 29 : Comparaison entre seuils d’incapacitation et de létalité................................................................ 112
Tableau 30 : Indices critiques utilisés pour le calcul de FEC dans la norme ISO 13571 ................................... 115
Tableau 31 : Valeurs des facteurs correctifs liés au CO2, ISO 13344 ............................................................... 117
Tableau 32 : Concentrations-seuils utilisées dans la norme STANAG 4602..................................................... 120
Tableau 33 : Concentrations-seuils utilisées dans la marine civile .................................................................... 124
Tableau 34 : Effets physiopathologiques de la diminution de la teneur en dioxygène ...................................... 132
Effets du feu sur les personnes
Page 162/163
Illustrations
Figure 1 : Taux de mortalité pour 100000 habitants en Europe - 1999................................................................. 10
Figure 2 : Evolution du nombre de décès liés à l'
incendie en France - 1982 - 1999 ............................................. 12
Figure 3 : Evolution du taux de décès liés à l'
incendie en France - 1982 – 1999.................................................. 13
Figure 4 : Nombre de décès par tranche d’âge et par sexe – France, 2002 ........................................................... 15
Figure 5 : Taux de décès par tranche d’âge et par sexe – France, 2002 ................................................................ 16
Figure 6 : Localisation des décès liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM) ................................... 18
Figure 7 : Localisation des blessés graves liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM) ..................... 19
Figure 8 : Localisation des blessés liés à l’incendie, France, 1999 (Hors BSPP et BMPM)................................. 20
Figure 9 : Répartition des incendies par nombre et localisation, Canada, 2000.................................................... 24
Figure 10 : Répartition des incendies par pertes, Canada, 2000............................................................................ 25
Figure 11 : Répartition des incendies par nombre de blessés, Canada, 2000........................................................ 26
Figure 12 : Répartition des incendies par nombre et localisation, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels.. 28
Figure 13 : Répartition des incendies par nombre de blessés, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels ........ 29
Figure 14 : Répartition des incendies par nombre de décès, Canada, 2000, détails bâtiments résidentiels .......... 30
Figure 15 : Répartition du nombre de blessés et de décès liés à l’incendie, Canada, 1991 - 2000........................ 31
Figure 16 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en nombre de victimes, USA, 1979-1990............. 33
Figure 17 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en proportion, USA, 1979-1990 ........................... 34
Figure 18 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en nombre, USA, 1979-1990, détails pour les
bâtiments ..................................................................................................................................................... 36
Figure 19 : Répartition des causes de décès liés à l’incendie, en proportion, USA, 1979-1990, détails pour les
bâtiments ..................................................................................................................................................... 37
Figure 20 : Victimes non décédées des incendies, Royaume-Uni, 1992-1998 ..................................................... 39
Figure 21 : Courbe de développement d’un incendie d’habitation ....................................................................... 42
Figure 22 : Corrélation de Mc Caffrey.................................................................................................................. 46
Figure 23 : Processus de cyclation et formation de benzo-a-pyrène ..................................................................... 52
Figure 24 : Processus de formation des différents HAP........................................................................................ 52
Figure 25 : Modèles simplifiés densité optique / visibilité.................................................................................... 59
Figure 26 : Modèle de Yin et Yamada pour les objets réfléchissants et lumineux................................................ 61
Figure 27 : Effet du rayonnement thermique sur les personnes ............................................................................ 69
Figure 28 : Effet de la température sur les personnes– données US Navy............................................................ 70
Figure 29 : Effet incapacitant de la température sur les personnes ....................................................................... 71
Figure 30 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction du temps – sujet en activité ............................................. 85
Figure 31 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction du temps – sujet endormi................................................. 86
Figure 32 : Taux de carboxyhémoglobine en fonction de la concentration – exposition de 15 minutes............... 87
Figure 33 : Rapport concentration / temps pour une carboxyhémoglobine à 60 % (létalité) ................................ 88
Figure 34 : Rapport concentration / temps pour la létalité par HCN seul ............................................................. 90
Figure 35 : Exemple de spectre FTIR de fumées de combustion........................................................................ 101
Figure 36 : Processus de formation des particules élémentaires de carbone dans les fumées............................. 134
Figure 37 : Images par MET de particules de suie.............................................................................................. 135
Figure 38 : Mesure de la taille des particules présentes dans les fumées de PMMA .......................................... 136
Figure 39 : Définition des fractions de pénétration des particules ...................................................................... 137
Figure 40 : Courbes conventionnelles de pénétration des particules................................................................... 139
Figure 41 : Plan de coupe d’indice de toxicité dans une simulation de feu à grande échelle.............................. 151
Figure 42 - Calcul d’évacuation réalisé en fonction de propriétés de populations données................................ 154
Effets du feu sur les personnes
Page 163/163