Système de santé au Vietnam : une médecine à deux vitesses ?

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Système de santé au Vietnam : une médecine à deux vitesses ?
Système de santé au Vietnam : une médecine à deux vitesses ? Noémie GUEDJ Atessa BAHADORI Claire BARDINI Olivia HOEHN 2 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Table des matières
REM ERCIEM ENTS 4 1. PRESENTATION 5 2. SITUATION DU VIETNAM 5 S ITUATION GEOGRAPHIQUE H ISTOIRE S ITUATION POLITIQUE S ITUATION ECONOMIQUE C ULTURE S YSTEME DE SANTE 5 7 9 9 11 14 3. L’HOPITAL PRIVE FRANCO-VIETNAMIEN 20 P RESENTATION DE L ' HOPITAL O RGANISATION LOGISTIQUE M ATERIEL H YGIENE GENERALE H YGIENE DES MAINS S ALAIRE ET PRIX D ' UNE CONSULTATION R ELATION MEDECIN / MALADE R ELATION MEDECIN / INFIRMIER D EROULEMENT DU STAGE ET JOURNEE TYPE AU SEIN DE L ' HOPITAL C ONCLUSION SUR LE FV 20 21 23 26 26 28 29 30 31 39 4. L’HOPITAL PUBLIC DE TRAUM ATOLOGIE ET D’ORTHOPEDIE 40 P RESENTATION DE L ' HOPITAL O RGANISATION LOGISTIQUE M ATERIEL P ERSONNEL H YGIENE S ALAIRE ET PRIX D ' UNE CONSULTATION / OPERATION R ELATION MEDECIN / MALADE D EROULEMENT DU STAGE ET JOURNEE TYPE AU SEIN DE L ' HOPITAL C ONCLUSION SUR LE HTO 40 41 43 45 47 48 49 49 60 5. MISSION DE SELECTION AVEC CHILDREN ACTION 60 P RESENTATION DE L ' ASSOCIATION P R E S E N T A T I O N D E S P R O F E S S E U R S E T D E L A C O O R D I N A T R I C E L O C A L E D EROULEMENT DE LA MISSION P ATIENTELE R ELATION MEDECIN / MALADE , TRADUCTEUR / MALADE , INTERPRETE / PARENTS 60 62 64 68 76 6. CONCLUSION GENERALE DU STAGE 80 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 3 7. BIBLIOGRAPHIE : 83 4 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Remerciements
Nous remercions la Faculté de Médecine de Genève, tout particulièrement les
Professeurs Chastonay et Kabengele, de nous avoir donné la possibilité de partir à
l’étranger durant notre cursus universitaire. Nous remercions les Professeurs Dutoit
et Le Coultre, le Directeur Gérard Desvignes (FV), le Directeur My (HTO), le Docteur
Thien (FV), le Docteur Nhi (HTO) de nous avoir accueilli chaleureusement et
encadré durant notre séjour.
Nous exprimons également nos remerciements à Giang et Hanh qui ont su nous
accompagner et nous aider durant toute la période de notre IMC.
Enfin, nous aimerions remercier nos familles et nos amis pour leur soutien.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 5 1. Présentation
Nous avons pris contact avec le directeur général de l'Hôpital Franco-Vietnamien
(FV) d'Hô-Chi-Minh-Ville, Dr Gérard Desvignes, suite aux conseils d'étudiants de
l'année précédente ayant accompagné aux urgences une collègue. Le docteur a
tout de suite accepté notre venue en tant que stagiaires dans son établissement
qui est un hôpital privé très reconnu. Intéressées par la comparaison entre
l'organisation d'un hôpital privé et public nous avons décidé de scinder notre stage
en deux et nous nous sommes mises à la recherche d’un hôpital public. Un rapport
de stage des années précédentes nous a permis de prendre contact avec l'Hôpital
de Traumatologie et d’Orthopédie (HTO) d'Hô-Chi-Minh-Ville. Nous avons alors pris
l'initiative de communiquer avec Children Action, qui est une association genevoise
en relation étroite avec le HTO.
Cette association nous a informé d'une mission de sélection d'une semaine dans les
hauts plateaux du Vietnam avec le Professeur Le Coultre (ancienne cheffe de
service de chirurgie pédiatrique des HUG) et le Professeur Dutoit (ancien chef de
service de chirurgie orthopédique du CHUV). Le but de ce type de mission est de
recruter des enfants dont l'accès aux soins est réduit pour des raisons
économiques ou géographiques et de leur offrir une prise en charge par un hôpital
urbain du pays, tel que le HTO d'Hô-Chi-Minh-Ville.
2. Situation du Vietnam
Situation géographique
Avec 1’650 km de long mais uniquement quelques centaines de km de large en
6 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? moyenne, le pays longiligne a eu beaucoup de peine, par le passé, à maintenir ses
territoires en regard de ses voisins envahissants. Cette anatomie particulière
résulte en de grandes variations climatiques, du Nord au Sud, même si le Vietnam
reste principalement un pays tropical, avec un taux d’humidité d’environ 84% et
des moussons importantes durant les mois d’Avril à Novembre. Le pays partage ses
frontières avec le Laos en grande partie, la Chine et le Cambodge. Bordé
principalement par le golf du Tonkin et la mer de Chine méridionale à l’est ainsi que
par le golf de Thaïlande au sud, sa frontière côtière s’étend sur 3’260km. (Image 1)
Le pays compte 90 millions d'habitants, pour une superficie d'environ 330’000
km, ce qui en fait le 13ème pays le plus peuplé au monde. La grande majorité de la
population (environ 70%) vit toujours dans les zones rurales mais un essor
important vers les grandes villes a pu être observé durant ces vingt dernières
années, notamment vers Hô-Chi-Minh-Ville et la capitale, Hanoi. Ces deux villes à
elles seules comptent aujourd’hui plus de 13 millions d’habitants.
Image 1
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 7 Histoire
Le Vietnam a une histoire riche et mouvementée. Les premières traces d’une
occupation humaine du territoire remontent à plus de 500’000 ans. Par la suite, de
nombreuses civilisations, telles que la culture Don Son et les royaumes
cambodgiens de Funan et hindou de Champa ont occupés les terres fertiles,
propices à l’agriculture, notamment des rizières. Au deuxième siècle avant J.-C., le
Vietnam succombe à l’invasion par l’empire chinois et sera sous son autorité
pendant plus de 1’100 ans. L’influence chinoise fait donc partie intégrante de la
culture vietnamienne. Elle sera également responsable de l’essor de la civilisation au
niveau des infrastructures, notamment la construction de barrages et de systèmes
d’irrigation. Au cours du XIXème siècle et après près d’un millénaire d’indépendance,
les français prennent le contrôle du pays pendant plus d’un siècle. Malgré une
occupation japonaise durant la Seconde Guerre Mondiale, la France continue
d’exercer une influence considérable sur le pays. Lorsque Hô Chi Minh (Image 2),
chef du parti communiste Viet Minh, déclare l’indépendance du Vietnam en 1945,
les français tentent de regagner le contrôle du pays et cette lutte donnera lieu à la
Première Guerre d’Indochine qui durera de 1946 à 1954. Cette période sera
chaotique pour le pays qui est à la fois divisé sur le plan interne mais qui subit
surtout les pressions externes continuelles de la France et de pays anticommunistes tel que les Etats-Unis. En 1954 et suite à une écrasante défaite
française, le Vietnam est libéré de l’influence coloniale. La même année, la
conférence de Genève organisée dans le but de mettre un terme aux conflits
régnant en Corée et au Vietnam laisse le pays divisé avec au nord, un
gouvernement communiste dirigé par Hô Chi Minh et au sud, un gouvernement anticommuniste sous influence américaine, dirigé par Ngo Dinh Diem. Le pays reste
divisé jusqu’en 1975, date à laquelle le Viet Cong et l’Armée Populaire
Vietnamienne parviennent finalement à prendre le contrôle du sud. Après vingt-etun ans de lutte acharnée qui auront coûté la vie à plus de 3 millions de personnes
8 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? et qui sera l’une des plus importantes défaites historiques des Etats-Unis, le pays
s’unifie sous le nom de République Socialiste du Vietnam. Malgré une unification du
nord et du sud sur le plan politique, le pays reste divisé dans ses idéologies
économiques et sociales. Les efforts du Parti Communiste Vietnamien au pouvoir
pour remettre le pays sur pied ne seront pas suffisants pour sauver ce dernier
d’une crise économique importante dans les années 80. Celle-ci est exacerbée par
l’invasion du Cambodge par le Vietnam, suite à des tensions survenues à la fin de la
guerre en 1975. Ce n’est qu’en 1991, après la résolution du conflit cambodgien,
que le pays commence à rétablir ses relations diplomatiques et économiques avec
l’occident. Entre 1991 et 1995, le Vietnam normalise ses relations avec la Chine, le
Japon et les Etats-Unis. Aujourd’hui, avec un tourisme florissant et une croissance
importante des grandes villes telles que Hanoi et Hô-Chi-Minh-Ville, le pays est en
plein développement économique. Le défi principal d’un pays communiste comme le
Vietnam subside dans sa capacité à maitriser sa croissance économique tout en
préservant ses idéologies.
Image 2
Image 3 : Drapeau du Vietnam
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 9 Situation politique
Le Vietnam est une république socialiste proclamée en 1945. Son système politique
est relativement simple puisqu’un seul parti y est autorisé : le parti communiste. Il
s’agit du parti vietnamien qui contrôle l’ensemble des institutions politiques du
pays. Le pays est donc officiellement communiste, néanmoins depuis la nouvelle
constitution qui régit le pays depuis 1992, le régime semble de plus en plus
socialiste et capitaliste (sa croissance économique est l’une des plus fortes).
Le premier ministre du Vietnam, chef du gouvernement, est M. Nguyen Tan Dung,
élu par les députés et différents ministres. Il constitue le pouvoir exécutif, c’est-àdire qu’il veille à l’application des lois et résolutions qui émanent de l’assemblée
nationale. Le président du Vietnam est M. Nguyen Minh Triet ; il est élu lui aussi
parmi les députés, et est en quelque sorte le représentant officiel du pays. Il est le
commandant en chef des armées et responsable de la sécurité intérieure. À voir
cette description, on pourrait croire que le Vietnam est doté d’un régime
parlementaire très démocratique mais comme dit précédemment, dans les faits, le
régime politique du Vietnam est un régime de parti unique.
Le Vietnam a aussi des structures politiques locales. Chacune des 59 provinces
et
des 4 villes au statut provincial sont gérées par trois différents pouvoirs : les
directions provinciales des services déconcentrés de l’État, les conseils populaires
et les comités populaires. Ces entités gouvernementales locales sont chargées de la
gestion de leur province ainsi que de veiller à l’application des lois émanant du
pouvoir central.1
Situation économique
En 1986, la campagne Doi Moi fut lancée suite aux difficultés économiques du pays.
1 http://redtac.org/asiedusudest/2009/11/27/vietnam-structures-politiques-etouverture-economique/ 10 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Le but du Doi Moi était de faire évoluer son économie « centraliste » en une
économie de type socialiste. Ceci a permis une importante progression en cette
matière et un impact majeur sur la pauvreté, la diminuant de plus de moitié entre
1993 et 20042.
Le Vietnam étant longuement fermé économiquement jusque là,
cette initiative a donné la possibilité au pays de réaliser des investissements et des
accords avec les pays étrangers. Ainsi ont commencé à bourgeonner entreprises
privées locales et à l’étranger. A la fin des années 1990, plus de 30’000 nouvelles
entreprises privées ont été fondées
3
. Au sein du pays, le marché s’est
métamorphosé ; les paysans y ont obtenu le droit de vendre leurs produits et ont
vu s’abolir les contrôles de prix qui leurs étaient jusqu’à présent imposés. Les
progrès ont touché l’entièreté du Vietnam. En revanche, le développement ne s’est
pas distribué de manière homogène, selon la géographie du pays. Les régions
urbaines et les alentours d’Hô-Chi-Minh-Ville auraient été les plus concernées.
A partir de 2001, un plan économique a été mis en place pour faire rehausser
l’implication du secteur privé, avec succès. Deux ans plus tard, le secteur privé
participait à plus d’un quart du rendement industriel4, et ce dernier évoluait à un
rythme supérieur à celui du secteur public.
Aujourd’hui, le Vietnam fait partie des pays dont l’économie s’améliore le plus
rapidement. Or, cette amélioration a débuté d’un niveau relativement bas, à cause
des séquelles suite à la guerre entre 1954-75, après laquelle certaines mesures
économiques strictes avaient été mises en place pour tenter de redresser les
conditions financières.
En 2009, le Revenu National Brut (RNB) s’élevait à 3’250$ 5 (550$ en 2004 6 ).
2 Library of Congress – Federal Research Division
Country profile : Vietnam
http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/profiles/Vietnam.pdf
3
Idem 4 Idem 5 Site de l’OMS : Vietnam, Statistiques
http://www.who.int/countries/vnm/en/ SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 11 L’industrie et l’agriculture sont deux éléments considérablement importants dans
leur contribution au Produit Intérieur Brut (PIB). La propriété industrielle du Vietnam
existe sous trois catégories, toutes participant plus ou moins au rendement total.
La plus fructueuse est celle de l’état, dont son pouvoir rapporte environ 40%,
suivie de l’industrie à capital étranger 35%, puis de l’industrie privée, environ 25%.
Au niveau agricole, le Vietnam est l’un des pays exportant le plus de riz à l’échelle
mondiale. D’autres produits copieusement exportés sont le café, le coton, le
caoutchouc, les cacahouètes, le sucre de cane et le thé. La pêche est de même un
élément important dans l’export. La morphologie du pays lui confère un grand
avantage à ce propos, avec une côte s’étendant sur plus de 3’260km de long.
Culture
Le Vietnam est un pays aux multiples influences culturelles. La culture indienne et
hindoue prédomine au sud, tandis que la culture chinoise prédomine au nord.
Néanmoins la Chine a eu une grande influence sur le tout pays puisqu’elle occupa
ses terres pendant près d’un millénaire.
La religion prend relativement peu de place dans la vie des vietnamiens. Plusieurs
religions leur ont été introduites au fil des siècles : le bouddhisme, la plus
populaire, ensuite le taoïsme, le caodaïsme, l’ hindouisme, le christianisme (8-10%
de la population) et l’islam. Aujourd’hui le Vietnam est le deuxième pays d’Asie
catholique après les Philippines.
La population vietnamienne est divisée en plusieurs ethnies. La principale concerne
les Vietnamiens proprements-dits ; ensuite il existe une mosaïque de minorités
ethniques qui peuplent les hauts plateaux du vietnam. Parmi celles-ci on trouve les
6 Library of Congress – Federal Research Division
Country profile : Vietnam
http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/profiles/Vietnam.pdf
12 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Bahnar, les Dzao, Ede, Hmong, ou encore les Jarai. Chaque ethnie possède une
langue, des coutumes, des croyances et un habillement distinct. La langue et la
culture délimitent les frontières entres elles ; la tradition d’indépendance de ces
minorités et une méfiance ancrée envers les Viêts continuent également de les
tenir éloignées des plaines.
Ethnie Bahnar
Ethnie Hmong
Ethnie Dzao
Ethnie Jarai
Une autre coutume qui prend beaucoup de place dans la culture vietnamienne est la
médecine traditionnelle. La médecine traditionnelle vietnamienne a puisé sa source
dans l’une des plus anciennes traditions orientales, la médecine chinoise. Les
Vietnamiens s’y intéressent beaucoup ; d’ailleurs, dans les régions montagneuses,
notamment dans les hauts plateaux du Vietnam où vivent la plupart des ethnies
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 13 minoritaires du pays, les habitants ont, encore aujourd’hui, recours à la médecine
traditionnelle.
Pour le diagnostic, la médecine chinoise a principalement recours à trois
composants qui permettent ensemble au praticien de déterminer la cause
« énergétique » qui a amené le patient à venir consulter. Ces trois composants
sont les suivants:
1. le Yin et le Yang
2. les Substances vitales
3. les Cinq Eléments
Premièrement, le praticien a besoin de comprendre et de juger l’équilibre entre le
Yin et le Yang chez son patient. Ainsi il peut diagnostiquer la nature du problème
qui l’emmène consulter. En effet, le Yin et le Yang représentent deux forces
fondamentales de l’univers et quatre caractéristiques décrivent leur intéraction
dynamique :
l’opposition,
l’interdépendance,
leur
consumation
mutuelle,
la
transformation mutuelle de l’un en l’autre. L’équilibre entre le Yin et le Yang varie
d’un individu à l’autre. On associe le Yang au feu (sec, brillant, chaud, actif, se
déplaçant vers le haut et l’extérieur) alors qu’on compare le Yin à l’eau (humide,
sombre, profond, froid et immobile). Lorsqu’une personne tombe malade, son
équilibre entre le Yin et le Yang est perturbé. Si l’équilibre penche vers le Yang, il en
résulte des symptômes comme un état fébrile, rougeurs, constipation, nervosité.
Au contraire, si l’équilibre penche vers le Yin, le patient peut ressentir de grands
frissonnements, des diarrhées, un état léthargique ou de dépression. Une fois que le
médecin a déterminé l’état de cet équilibre, il est en mesure de prescrire un
traitement qui permettra de rétablir l’équilibre et de restaurer la santé du patient.
Deuxièmement, le praticien traditionnel explore également les Substances Vitales.
On en distingue cinq : le Qi (énergie qui sous-tend toutes choses dans l’univers), le
14 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Sang (fluide qui nourrit et hydrate l’organisme), l’Essence du Jing (substance qui
sous-tend toute vie organique à la base de la reproduction et du développement),
les Liquides organiques autres que le sang (sueur, urine, salive et sucs gastriques),
et le Shen (ou Mental-Spirituel).
L’équilibre des Cinq Eléments est finalement également utilisé lors d’un diagnostic.
Le Bois, le Feu, la Terre, le Métal et l’Eau sont interconnectés et représentent
chacun une partie du corps. En effet, chaque élément est lié à deux organes
internes différents, l’un représentant le Yang et l’autre le Yin. Ainsi l’Eau est en
relation avec la vessie et le rein ; la Terre est associée à l’estomac et à la rate
(notre alimentation provient de la terre) ; le Feu au cœur et au péricarde ; le Métal
aux poumons et le Bois au foie.
Après avoir exploré ces trois points, le praticien peut proposer un traitement au
patient. Dans la médecine chinoise, il existe différents traitements, chacun avec un
mode d’administration spécifique : l’acupuncture (insertion de fines aiguilles dans
le corps), la phytothérapie (administration de formules composées de racines, de
tiges, d’écorces, de feuilles, de graines ou de fleurs, ou encore de produits animaux
ou minéraux), le massage, la diététique et les exercices de Qi Gong (mouvements
et exercices physiques).
Système de santé
Il y a 11'112 communes au Vietnam. 99 % des communes disposent d’un
dispensaire communal s’occupant d’environ 6'000 habitants. Un district regroupe
10 à 20 communes (100'000 – 150'000 habitants). Un service de santé gère les
hôpitaux provinciaux des 664 districts. Ce service est lui-même sous contrôle du
service de santé de chaque province (il y en a 63 au total) (Fig.1).
Lorsqu’un habitant est malade, il doit d’abord aller consulter son dispensaire
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 15 communal. Si ce dernier estime que son cas est trop important pour être traité là, il
ira se faire soigner dans les hôpitaux du district puis dans les hôpitaux des grandes
villes (Hanoi, Hô-Chi-Minh-Ville, Danang).
Le financeur du système de santé étant principalement la province (Fig.2), la
qualité des soins dépendra beaucoup des ses moyens. Les provinces reculées et
disposant de peu de moyens auront donc des soins de moins bonne qualité et les
habitants auront alors plus tendance à attendre qu’un cas soit grave pour arriver
directement dans les hôpitaux des grandes villes. Ceci explique pourquoi ces
hôpitaux sont surchargés et les cas rencontrés sont plus sévères.
Fig. 1
16 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Financeur du système public de santé !
28% Provinces!
Patients!
55% 10% Assurances!
Etat!
7% Fig.2
Les objectifs principaux du gouvernement sont d’améliorer l’équité, l’efficacité et le
développement du système de santé. Selon les dires de l’OMS, les dépenses du
gouvernement per capita sur la santé croissent rapidement.
En proportion aux dépenses totales du gouvernement, les dépenses sur la santé
sont passées de 6,3% en 2002 à 9,4% en 20127. En 2011, les coûts de la santé
per capita atteignaient 38.3 millions de dollars (US$), comparé à 6,8 millions US$
en 2002. Ces chiffres prouvent les véritables efforts gouvernementaux consistant
à exploiter l’enrichissement du pays pour investir dans un système de santé de
meilleure qualité.
L’assurance au Vietnam est communément appelée Social Health Insurance (SHI)8
7 Site de l’OMS : Vietnam, « Country statistics »
http://apps.who.int/gho/data/view.country.21300
Health insurance in Vietnam : Current issues and policy recommendations
http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_protect/---
8 Social
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 17 et est régulée par le Vietnam Social Insurance (VSI). Elle a été instaurée en 1989
pour permettre une meilleure accessibilité aux soins pour les personnes vivant dans
des situations précaires et joue un rôle clé dans le financement du système de
santé aujourd’hui. Depuis sa création, ce système d’assurance se propage et couvre
de plus en plus de vietnamiens.
En 2006, la SHI couvrait environ 30% de la population, dont 37% de personnes
défavorisées9. Depuis, ces chiffres ont probablement beaucoup évolué. Par ailleurs,
le nombre de prestations prises en charge par l’assurance est plus favorable pour
les personnes défavorisées, ce qui accomplit les objectifs du gouvernement dans
son instauration.
La SHI opère sous trois formes10:
-SHI Obligatoire – pour tous les salariés du secteur privé, travailleurs et retraités
dans le secteur public. Elle s’applique aussi à d’autres groupes de personnes :
étudiants étrangers au Vietnam, personnes d’âge avancé (>90ans), vétérans et
victimes de dioxine 11 . Depuis 2005, les personnes défavorisées sont aussi
concernées par cette assurance obligatoire et un nombre croissant d’entre eux
bénéficie de cette couverture.
-SHI Volontaire – concerne les écoliers, étudiants, personnes dépendantes de
secsoc/documents/publication/wcms_secsoc_6614.pdf
Health insurance in Vietnam : Current issues and policy recommendations
http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_protect/--sescsoc/documents/publication/wcms_secsoc_6614.pdf
10 Idem 11 La dioxine est l’un des deux composants de l’agent orange. Ce dernier est une arme chimique qui
fut utilisée par l’armée des Etats Unis pendant la guerre du Vietnam entre 1961 et 1971. Lors de ce
conflit, des avions militaires libérèrent ce produit chimique qui est de type herbicide sur les terrains
vietnamiens. Du fait de sa toxicité, la population fut largement affectée par cette molécule.
Nombreuses victimes ainsi que leur descendance développèrent des cancers. Par ailleurs, l’agent
orange est fortement tératogène, c’est-à-dire qu’il cause des malformations fœtales lors de la
gestation, qui ont été transmises au fil des générations. Par conséquent, il existe à présent encore
beaucoup de personnes souffrant de malformations parfois même gravissimes.
9 Social
18 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? membres de l’assurance obligatoire, ainsi que les personnes de même ménage
(c’est-à-dire membres de la même famille vivant à la même adresse) et les
personnes travaillant dans des associations qui fournit l’accès à cette assurance.
-SHI pour personnes défavorisées.
En ce qui concerne l’assurance obligatoire, la cotisation est de 3% du salaire, dont
l’employeur paie 2% et l’employé 1% 12 . De manière adaptée, la cotisation des
personnes défavorisées est moindre que celle des salariés. Malgré cette cotisation
moindre, les personnes défavorisées bénéficient des mêmes prestations et
« packages » que les autres. Cette assurance permet une couverture de tous les
services médicaux en milieu hospitalier et ambulatoire, les examens de laboratoire,
les radiographies conventionnelles et autres techniques d’imagerie, certaines
interventions coûteuses plus avancées telles que les opérations à cœur ouvert, et il
existe une liste de médicaments remboursables qui serait semblable à celle de pays
développés13.
A propos de l’assurance volontaire, une cotisation minimale a été définie. Il en
résulterait
un
déséquilibre
dans
la population
intéressée –
les
demandes
pencheraient plus sur les personnes en besoin de traitements continus et les
personnes âgées ou handicapées. En outre, les personnes saines demanderaient
moins ce type d’assurance pour éviter de payer plus cher pour couvrir les besoins
des personnes nécessitant beaucoup d’attention médicale.
Malheureusement, en dépit de l’assistance que la SHI a accordé à toujours plus de
monde, la proportion de bénéficiaires est devenue tellement importante que cette
assurance se retrouve maintenant en grave état de crise financière. Les prestations
remboursées et les généreux « packages » dont peuvent profiter les Vietnamiens
12 Idem 13 Idem SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 19 ont dépassé le budget à disposition ; c’est-à-dire que le nombre de nouveaux
participants n’a pas augmenté suffisamment pour compenser les dépenses de la
SHI. S’ajoutent à cette circonstance d’autres problèmes freinant un développement
avantageux du système de santé. Actuellement, les difficultés principales
rencontrées limitant la progression du système de santé sont la malnutrition
chronique chez les moins de 5ans, l’augmentation d’interruptions de grossesse et la
grande inégalité des soins dans différentes régions, en fonction du revenu et entre
différentes ethnies14.
NB: les assurances médicales sont gratuites au Vietnam pour les enfants de moins
de 5 ans. Malheureusement, le système est fait de telle sorte l’enfant dépasse
souvent l’âge de la gratuité ou que le nombre d’opération est tel que certaines ne
sont plus prises en charge. Ainsi, bon nombre d’enfants ont des traitements qui
n’ont pas pu commencer ou qui sont non terminés.
14 Library of Congress – Federal Research Division
Country profile : Vietnam
http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/profiles/Vietnam.pdf
à partir de p.8
20 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 3. L’Hôpital privé Franco-Vietnamien
A notre arrivée, le FV nous a chacune affecté dans un service différent ;
- Urgences
- Gynécologie et obstétrique
- Pédiatrie – Cardiologie
- Urologie
Présentation de l'hôpital
L'Hôpital Franco-Vietnamien est un hôpital privé qui a ouvert en mars 2003 à HôChi-Minh-Ville. C'est le premier hôpital au Vietnam reconnu comme hôpital
international et accrédité par la HAS (Haute Autorité de Santé, France). 400
médecins spécialistes reconnus venant de France, Belgique et Suisse soutiennent
l'équipe de 20 médecins étrangers (belges, américains, coréens et français) et 80
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 21 médecins vietnamiens (formés pour la plupart à l'étranger également), dans le but
d'assurer une qualité de soins digne des standards internationaux.
Organisation logistique
L'hôpital est construit sur 6 étages ; les urgences, la pharmacie, la radiologie et les
consultations de médecine de premier recours ainsi qu'une cafeteria (Image 4) et
une caisse - permettant de régler directement les prestations - se trouvent au rezde-chaussée.
Dans les étages supérieurs, nous pouvons trouver les divers services ainsi que le
bloc opératoire adjacent au service des soins intensifs. Toutes les spécialités sont
ainsi représentées au sein du FV.
L'hôpital reçoit en moyenne 150'000 patients par année et la patientèle est
principalement vietnamienne, pouvant accéder à une assurance privée ou ayant les
moyens financiers de payer directement les prestations.
La plupart des touristes internationaux et expatriés viennent au FV pour consulter
en cas de besoin, dans le cas d’urgences ou non. Des patients venant de pays
avoisinants (Cambodge, Malaisie, Chine) ou plus éloignés (Corée, Japon) sont
nombreux - ce qui démontre la popularité de cet hôpital. Pour ceux-ci, une équipe
d'interprètes est mise à disposition par l'hôpital.
Pour les patients privilégiés il existe un service VIP qui comprend une chambre
digne d'un grand hôtel où la famille peut y dormir également. (Image 5)
Dans chaque service une caissière est installée à côté des secrétaires médicales
pour faciliter les paiements directs.
L'établissement propose également plus de 1500 forfaits de chirurgie, obstétrique,
oncologie pour optimiser, selon lui, le rapport coût/efficacité pour le patient.
22 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 4 : La cafeteria
Image 5 : Salle d’attente VIP
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 23 Image 6 : Hall d’entrée de l’hôpital
Matériel
L'hôpital est bien équipé en matière de matériel médical. La plupart des installations
ont 10 ans, (date de l'ouverture du FV en 2003). Chaque service est équipé de
manière à pouvoir offrir un examen de base complet de la discipline en
question. Au service d'imagerie, l'hôpital dispose d'un CT scan, d'une IRM, de
quatre salles de radiologie conventionnelle et de trois salles d'échographie. Les
services
disposent
également
individuellement de
machines
d'échographie
dans les salles de consultation. En urologie, l’on peut trouver une salle de
lithotripsie et du matériel pour un bilan urodynamique (Image 7). Les cystoscopies
se déroulent en salle d'opération. En cardiologie, on trouve une salle d'effort,
d'échocardiographie ainsi que plusieurs ECG. Au département des urgences, une
salle de réanimation en plus des boxes est mise à disposition pour les urgences
vitales. Enfin, le service de gynécologie est équipé de salles de prétravail/travail
(Image 8), d'un bloc opératoire individuel pour les césariennes, d'une salle de bain
24 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? pour les nourrissons et de couveuses (Image 9 et 10). En revanche, l’appareil à
mammographie n’est pas fonctionnel depuis ces deux dernières années et pour ces
raisons, l’examen mammaire consiste en une simple échographie.
Image 7 : salle de lithotripsie
Image 8 : salles de naissances
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 25 Image 9 : couveuse
Image 10 : salle de bain pour les nourrissons
Personnel
L'hôpital compte environ 400 médecins, de nationalité vietnamienne, française,
belge, américaine et coréenne. Les actionnaires de l’établissement sont pour la
plupart, des médecins étrangers résidants en France, en Belgique ou en Suisse. Ces
derniers,
lors
de leurs
passages
réguliers
dans
le pays,
fournissent
des
consultations spécialisées sur place. Un nombre important de médecins ayant des
cabinets privés a aussi la possibilité de consulter dans l’hôpital. Ils sont ainsi divisés
en plusieurs catégories : les médecins dits « référents » qui peuvent utiliser les
locaux et certaines installations telles que le service de radiologie ; les docteurs
« externes » qui eux, peuvent également opérer sur place ; enfin, les docteurs
« associés » ont le plus haut rang dans l’hôpital et ont carte blanche quant aux
installations. L’établissement a un nombre important de collaborateurs, notamment
du personnel infirmier, des aides-soignants et des secrétaires dans chaque service.
Une partie de ces collaborateurs s’occupe de l’organisation logistique de l’hôpital,
26 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? avec des administrateurs et des conseillers à disposition pour accueillir les patients
et les informer des coûts des divers traitements. En règle générale, tous les
membres du personnel parlent vietnamien ainsi qu'une seconde langue à un niveau
variant d'excellent à très faible. C'est principalement l'anglais ou le français qui
prédominent. Des interprètes sont disponibles, notamment pour les patients
khmers, coréens, japonais ou russes.
Hygiène générale
L'hôpital possède un service de nettoyage très actif ; couloirs, toilettes et
ascenseurs sont toujours propres. Les chambres sont nettoyées quotidiennement.
Dans chaque salle nous pouvons trouver un produit désinfectant à disposition.
Hygiène des mains
Les idéaux du FV sont au même niveau que les standards européens et les bases de
l'hygiène des mains sont largement affichées dans l'hôpital FV. (Image 12)
Il y a des concours d'affiches de prévention dans tous les services notamment en
pédiatrie (Image 11).
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 27 Image 11
Il y a des solutions désinfectantes à disposition dans chaque salle de consultation,
chaque chambre et à l'accueil de chaque service.
Image 12
28 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? En théorie, l'hôpital respecte toutes les mesures d'hygiène que l'on retrouve à
Genève. En pratique, c'est différent ; tous les médecins ne respectent pas le port
des gants, le lavage et la désinfection des mains avant et après contact avec le
patient ainsi qu'avant et après un geste invasif. Ils utilisent les solutions
désinfectantes dans 40 % du temps où ce serait nécessaire, c'est à dire, par
exemple après avoir éternué ou après avoir sorti un thermomètre d’une poche de
blouse dans le but de prendre la température d’un nouveau né. Ensuite, les prises
de sang et autres gestes invasifs sont effectués sans gants de nombreuses fois par
les infirmières. De même, les frottis et prélèvements vaginaux sont effectués avec
un speculum stérile, mais dans de nombreuses situations, ce geste est effectué
sans
gants.
Enfin,
les
couvre-lits
des
salles
de
consultations
de
gynécologie/obstétrique et d'urologie ainsi que dans les autres services que nous
avons visité ne sont changés en moyenne que 2 fois par jour malgré de
nombreuses recharges disponibles dans la salle.
Salaire et prix d'une consultation
L’établissement offre divers types de forfait médicaux, en plus des prix de
consultation de base. Par exemple, il existe des programmes de bilan de santé
comprenant un certain nombre de contrôles par année dans différents services. En
outre, les prix des consultations et d’une hospitalisation dépendent du patient :
une personne locale non assurée sera hospitalisée pour environ 60 chf par nuit dans
une chambre partagée. Elle payera sa consultation avec le médecin environ 40 chf
le premier jour et les soins infirmiers 11 chf. En revanche, une personne locale
assurée payera 70 chf pour une chambre partagée, 45 chf pour la première
consultation et environ 14 chf pour les frais des soins infirmiers. Enfin, un patient
international paye 165 chf la chambre, 105 chf la consultation et 33 chf les soins,
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 29 une grande différence de prix pour ces personnes qui sont souvent expatriées et
ont une assurance internationale.
Enfin, peu d’information nous a été donnée concernant les salaires des médecins.
Cependant,
nous
avons
appris
sans
surprise,
que
les
salaires
dans
les
établissements privés sont biens plus avantageux que les salaires dans un hôpital
public. Le salaire est fixe, à l'heure et non au nombre de consultations. La
rémunération dépend ensuite de la spécialité. Le personnel a le droit à un treizième
salaire et une couverture d'assurance qui inclue sa famille proche. A titre
d’exemple, une consultation en urologie avec le chef de service du FV coûte
environ 600’000 dongs, l’équivalent d’environ 30 chf et dure une quinzaine de
minutes. En comparaison, la même consultation de base dans un hôpital public
coute 20’000 dongs, c’est-à-dire environ 1 chf pour cinq minutes de consultation.
Relation médecin/malade
D'une façon générale, il existe une barrière importante entre le médecin et le
patient. Dans de nombreux cas, elle est présente à cause du manque de « body
language » et du peu d'empathie exprimée. Devant noter tous ses rapports
directement sur l'ordinateur, le médecin crée un obstacle supplémentaire dans la
relation soignant/soigné. Il y a également de nombreux bruits et dérangements
annexes. Les secrétaires entrent régulièrement dans la salle sans frapper afin de
faire signer des documents au médecin, ou encore médecin répond sans autre au
téléphone, qu c soit dans le cas d’un appel professionnel ou privé.
L'examen physique se pratique d'une manière très brève ; le patient ne se
déshabille que s'il le faut absolument. La plupart du temps lors de l’auscultation ou
de l’inspection de la marche, le patient peut garder l'intégralité de ses vêtements.
Ayant appris dans la médecine traditionnelle que tout se lit sur le visage (les oreilles
représentent les reins, le nez représente les poumons, les yeux représentent le foie,
30 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? la bouche représente le cœur et la peau l'estomac) nous avons émis l'hypothèse
que le déshabillement du patient pouvait rester inhabituel au Vietnam (pour rappel,
environ 60 % de la population a toujours recourt à de la médecine traditionnelle).
L'examen physique est donc très timide et nous nous demandions souvent
comment un diagnostic pouvait être établi sans avoir observé le patient dans son
intégralité.
Dans le cas de maladies ou d'opérations, les explications faites quant à la cause de
celles-ci restaient très superficielles à tel point qu’il arrivait que le patient ne sache
pas pourquoi il avait du être opéré ou traité.
Relation médecin/infirmier
La relation entre le médecin et le personnel soignant est très différente de celle
que l'on côtoie à Genève. Les infirmières travaillent d'abord pour le bien être du
médecin, ensuite pour celui des patients. Cela signifie que si le médecin choisit un
geste qui sera avantageux pour lui et l'hôpital (financièrement ou qui génère un
gain de temps), le personnel va tout faire pour abonder dans ce sens même si
l'intérêt du patient en pâtit. C'est le cas par exemple pour le choix de la césarienne
ou pour les prescriptions médicales ; les infirmières ne cherchent pas à savoir
pourquoi le médecin a prescrit tel ou tel médicament et encore moins à donner la
raison aux patients. Ceci crée de nombreux malentendus car certains patients se
posent des questions quant au traitement qui leur est administré et ne reçoivent
aucune réponse de la part du personnel soignant. Nous avons assisté à plusieurs
reprises à ce genre de situation où les infirmières devaient faire appel à leurs
supérieurs en leur demandant d'intervenir en faveur du médecin et de faire
accepter au patient l'ordre qui avait été administré sans le comprendre réellement.
Nous avons trouvé ce comportement très différent de celui que nous retrouvons à
Genève où nous avons plutôt l'impression que le personnel soignant fait tout pour
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 31 le bien-être du patient et représente un pion indispensable pour faire la balance
entre les exigences du médecin et la limite que le patient pourrait avoir face à son
traitement.
Le travail de l’équipe médicale et du personnel soignant n'est cependant pas remis
en cause car dans les cas d'urgences vitales, ils savent réagir très vite et nous
avons pu observer que chacun savait exactement ce qu'il devait faire.
Ne négligeons pas non plus la barrière du langage entre les soignants (autres que
médecins) et les patients qui est fréquente et qui perturbe la relation qu'ils
pourraient éventuellement mettre en place car les interprètes ne sont appelés que
lors d’une consultation avec le médecin.
Déroulement du stage et journée type au sein de l'hôpital
Le service des urgences a une salle d'attente spacieuse mais peu souvent pleine.
(Image 13) On y trouve cinq "boxes" et une grande salle de réanimation dans
laquelle les urgences vitales uniquement sont amenées (Image 14). En général,
deux médecins urgentistes et plusieurs infirmières sont de service pendant la
journée. Dans certains cas plus particuliers tels que pour les calculs urinaires ou
fractures et traumas, d'autres médecins plus spécialisés se rendent aux urgences
pour évaluer ces patients. Heureusement, les urgences vitales ne
nous ont pas
semblé fréquentes. Serait-il dû au fait que l'hôpital est privé ? Dans ces
circonstances, la prise en charge est immédiate et efficace. Le personnel est bien
organisé et il n'y a pas de panique, chaque personne connaît son rôle. Par
conséquent, la prise en charge est de bonne qualité et les patients ont de
meilleures chances de survie. De manière générale, les consultations sont en
vietnamien ; il n’a donc pas été évident de participer aux consultations, ni de
comprendre les questions posées à l'anamnèse. Les médecins ne traduisaient pas la
consultation mais nous donnaient brièvement le diagnostic en sortant du box. Il y
32 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? avait tous les jours de longs moments dans la journée sans travail à faire, où le peu
de patients présents avait déjà été examiné et nous attendions les résultats de
laboratoire. Dans ces cas, nous lisions les dossiers des patients et nous nous
instruisions grâce au livres médicaux à disposition, car le personnel avait
fâcheuse tendance à s'entretenir sur internet, ignorant notre présence.
Image 13
une
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 33 Image 14
Le service de gynécologie et obstétrique est reparti sur plusieurs étages ; les
consultations sont au premier étage, les salles de naissances et le bloc opératoire
au deuxième étage et la maternité, qui contient une vingtaine de lit, au cinquième
étage.
Le docteur Trung en est le chef de service. Il a fait ses études en France et
pratique maintenant au Vietnam. Bien qu’il parle français couramment, il ne voulait
pas qu'on le suive trouvant en se justifiant par le fait que nous n'aurions pas les
connaissances requises pour comprendre les consultations.
La première semaine, la cheffe des sages femmes, Dominique de Sales, une
française expatriée, nous a expliqué comment faire un suivi de grossesses, préparer
34 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? les femmes à l'allaitement, faire les premiers bains, proposer une contraception
post accouchement, ainsi que les mesures à prendre en cas d'accouchements. Nous
avons également pu assisté à quelques césariennes.
La deuxième semaine, la doctoresse Hieu et la doctoresse Dung ont accepté que
nous les suivions en consultation et nous avons pu observer le déroulement d'une
consultation gynécologique et obstétrique d'un peu plus près. Les consultations
commencent donc vers 08h30 pour se terminer aux alentours de 15h. La durée
type d'une consultation est de 10 minutes. Une patiente qui vient consulter, peu
importe la raison, a automatiquement droit à un frottis vaginal ainsi qu'à une
échographie. Elle repart généralement avec un traitement même avant d'avoir reçu
les résultats du laboratoire et les antibiotiques sont prescrits généreusement
pendant des périodes qui varient énormément (un ou deux jours et allant jusqu'à
plusieurs mois). Certains antibiotiques peuvent être prescrits également après
l'accouchement d'une façon automatique même si les bilans sanguins sont
satisfaisants.
Du point de vue d'une consultation type, il y a donc de nombreuses différences par
rapport à Genève ; les plus marquantes sont la pratique d'échographies à chaque
consultation, peut importe le motif, ainsi que le nombre de césarienne (62 %) qui
dépasse largement celui de la Suisse, déjà trop élevé (33 %) par rapport aux
recommandations de l'OMS (10-15% des accouchements devraient se conclure
avec une césarienne) 15 . Pourrait-il être dans un intérêt purement financier que
l’équipe médicale l’encourage fortement? Nous avons trouvé d’autres explications
de ce taux: premièrement la douleur serait, selon les femmes vietnamiennes,
diminuée, deuxièmement le choix de la date d'accouchement simplifie la préparation
à l'arrivée de l'enfant. De plus, cette technique est répandue parmi les médecins et
les sages-femmes car cela leur permet de terminer à heure fixe et de ne pas être
amenés à revenir durant les week-ends.
15 http://apps.who.int/rhl/pregnancy_childbirth/childbirth/caesarean/CD004663_abalose_com/fr/ SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 35 Image 15 :
Salle de consultation gynécologique et obstétrique
Image 16 : Salle de consultation gynécologique et obstétrique
36 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Deux étages de l'hôpital sont occupés par le service de pédiatrie : l'un possède des
salles de consultations ambulatoires gérées par un secrétariat et l'autre des lits
pour les hospitalisations d'enfants. Les pédiatres du service sont tous vietnamiens,
excepté le chef de service qui est d'origine belge.
Le planning des pédiatres commence tous les jours à 7h00 par un colloque en
anglais si le chef de service est présent (il ne parle pas vietnamien) ou en
vietnamien. Ensuite les médecins consultent soit à l'étage des hospitalisations, soit
en ambulatoire jusqu'à 15h. Nous avons pu assister aux deux types de
consultations.
En ambulatoire le médecin reçoit dans son bureau les enfants et leur(s) parent(s).
Ceux-ci sont fréquemment accompagnés par la grand-mère qui à notre surprise
prend part autant voire plus à la consultation que la mère elle-même : c'est
toujours elle qui répond aux questions du médecin ; la mère, elle, s'occupe de son
enfant en attendant. Les motifs de consultations ne varient pas beaucoup: il s'agit
pour la plupart de mettre à jour le carnet de vaccination et de suivre la période
post naissance (nous avons rencontré que peu d'enfants de plus de 8 ans). (Image
17)
Les consultations s'enchaînent ; entre chacune le pédiatre ne se gène pas de
"surfer sur le net". Comme dans beaucoup d'autres services, le médecin ne change
pratiquement jamais le drap du lit de consultation pendant la journée et se
désinfecte les mains uniquement avant le contact avec l'enfant. Les familles qui
consultent ici sont en majorité vietnamiennes, du coup il est difficile pour nous de
comprendre tout ce qui se dit pendant la consultation mais grâce au fait que le
médecin remplit le dossier en même temps qu'il conduit l'anamnèse et qu'il le
remplit en anglais ou français on est capable de deviner de quel cas il s'agit. En
effet dans cet établissement les dossiers des patients sont complétés dans ces
langues et non pas en vietnamien, ce qui permet entre autre d'uniformiser la langue
de communication au niveau international. C'est surtout un effort utile pour les
patients étrangers qui y consultent.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 37 La visite de l'étage des hospitalisations se fait au moins deux fois par jour: le matin
tôt et en début d'après-midi. Deux pédiatres par demi-journée sont chargés de
consulter les dossiers et faire le suivi de l'hospitalisation en rédigeant un rapport
après chaque visite. Ils passent de salle en salle, examinent tous les enfants et
remplissent les dossiers. Les cas les plus couramment rencontrés sont les
pneumonies, angines et diarrhées bactériennes toutes traitées (sur-traitées?) par
antibiotiques et antiparasitaires.
Image 17
Dans le service de cardiologie, seule une faible quantité de prestations sont
proposées. En effet aucun geste invasif (infiltrations, chirurgies, choc..) n'y est
pratiqué car le service n'est pas équipé pour, sous prétexte que l'hôpital ne
trouverait pas rentable de développer le service. Le service comporte des salles de
consultations, une salle ECG, une salle d'échographie cardiaque et une salle pour les
tests d'efforts. L'âge des patients se situe entre 20 et 70 ans et plus. Grâce à
certains forfaits proposés par l'hôpital, beaucoup de patients ont droit à un "check
up" cardiaque de routine (ECG et échographie) ce qui explique le grand nombre de
38 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? jeunes personnes en bonne santé qui viennent consulter alors qu'elle n'en n'ont pas
le besoin. (gaspillage?) Ainsi le cardiologue jongle entre consultations et examens
cardiaques.
Comme dans les autres services, le drap du lit est rarement changé et le
stéthoscope, outil utilisé dans chaque examen cardiaque n'est jamais désinfecté. Le
contact avec le patient est minime.
Le département d'urologie se trouve en continuité avec les départements de
cardiologie et de gastrologie. Il se compose d'une salle d'attente souvent remplie
où 3 ou 4 secrétaires s'occupent de rediriger les patients, d'une salle destinée aux
bilans urodynamiques ainsi que d'une salle de lithotripsie. Les bureaux de deux
médecins, dont celui du chef de service Docteur Tien, sont équipés pour les
consultations. Ces salles sont divisées par un rideau en une partie bureau et une
partie pour l'examen physique ou l'on trouve notamment le lit, une machine à
échographie ainsi que tout le matériel nécessaire pour un examen physique basique.
Le matériel est relativement récent, 10 ans au plus, date de l'ouverture de l'hôpital.
Toutes les secrétaires ont une bonne notion d'anglais et certaines parlent
couramment le français également. Le système d'organisation et de prise de
rendez-vous est totalement informatisé, mis à part les demandes de laboratoire et
les ordonnances qui doivent être obligatoirement signées par le médecin. Ceci
résulte en de fréquentes interruptions des consultations par les secrétaires, qui
entrent sans frapper et à tout moment. Mais ce peut être du au fait que les
examens demandés sont souvent effectués directement après la consultation avec
le médecin et que ce dernier est déjà occupé avec le prochain patient au moment
où les papiers sont prêts. Pour un laboratoire sanguin ou urinaire, le résultat prend
quelques minutes à quelques jours mais pour les examens anatomo-pathologiques,
il faut patienter une à trois semaines, car les spécimens sont envoyés en Thaïlande.
Les rendez-vous sont souvent pris très rapidement, avec possibilité de se présenter
le jour même. Une consultation dure en moyenne 15 minutes, un luxe pour un
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 39 hôpital vietnamien, ou un médecin ne passe généralement pas plus de cinq minutes
avec chaque patient. La consultation est centrée sur la plainte principale du
patient, avec relativement peu de questions de santé générale et peu de possibilité
de dialogue. S'en suit un examen physique urologique, composé d'une échographie
rénale et vésicale/prostatique, ainsi que d'un toucher rectal chez les hommes. Un
examen des organes génitaux externes est effectué si nécessaire. La plupart des
patients sont suivis par les médecins, notamment pour des calculs récurrents ou un
prostatisme lié à l'âge. Les docteurs opèrent généralement deux jours fixes par
semaines. Les interventions les plus courantes sont la lithotripsie, pour casser les
calculs, et les cystoscopies avec pose de stent. Ces opérations plutôt bénignes
sont de courtes durées et il est donc possible d'avoir une dizaine d'interventions
par jour. Enfin, les traitements le plus souvent préconisés sont les antibiotiques et
les alpha-bloquants contre l'hyperplasie prostatique
Conclusion sur le FV
Globalement, l’hôpital Franco-Vietnamien est un Hôpital de rang supérieur à celui
d’hôpitaux publics. Bien équipé, entretenu et propre, il possède également une
équipe médicale compétente ayant la capacité de prodiguer des soins de bonne
qualité à sa patientèle. Toutefois, certains aspects au sein de l’hôpital pourraient
être améliorés, tels que certaines règles d’hygiène, et l’utilisation des ressources à
disposition. Cette dernière est tout à fait envisageable, du fait que la prise en
charge dans cet hôpital soit coûteuse, et semblerait-il que l’hôpital ne souffre pas
d’un déficit budgétaire. D’un autre côté, au vu d’un personnel en majeure partie
vietnamien, diverses influences culturelles confèrent à l’hôpital quelques différences
par rapport aux hôpitaux occidentaux, ce qui est normal mais ne correspond pas à
la publicité de l’hôpital.
40 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 4. L’Hôpital public de Traumatologie et d’Orthopédie
Présentation de l'hôpital
L'Hôpital de Traumatologie et d’Orthopédie de Hô-Chi-Minh-Ville est un hôpital
public ayant une capacité de 440 lits. Cependant entre 900 et 1000 patients y
sont hospitalisés. Parmi eux, de nombreuses urgences, ce qui explique que l'hôpital
soit aussi surchargé dans ce service (Image 18). Il y a environ 100 admissions de
traumas par jour et les quatorze salles d'opérations de l'hôpital sont ouvertes 7/7
jours et 24/24 heures. Chaque année, le HTO va opérer en moyenne 24'000
patients d'une chirurgie majeure et 36'000 patients d'une chirurgie mineure.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 41 Image 18 : Salle d’attente des urgences
Organisation logistique
L’établissement comporte cinq étages et les services se trouvent chacun sur un
étage différent. (Image 19) Nous avons été réparties en deux groupes, une
semaine dans chaque service chacun : en chirurgie pédiatrique et aux urgences.
Les médecins vietnamiens travaillent au HTO avec des horaires réguliers de 07h du
matin à 16h pour la majorité d'entre eux. Leur emploi du temps réparti entre les
consultations, le suivi des patients et les chirurgies au bloc opératoire. Les
chirurgies commencent à 09h du matin et se terminent entre 15h et 16h dans les
42 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? services où il n'y a pas d'urgences. Cependant, même dans le service des urgences
les opérations sont pour la plupart contenues dans cette tranche horaire.
La patientèle de l'hôpital est uniquement vietnamienne tout comme le personnel
soignant qui y travaille. Certains soignants parlent couramment français ou anglais
et il était très agréable pour nous d’avoir des traducteurs dans chaque situation.
L'hôpital accueille également de nombreux médecins étrangers, qui viennent
consulter ou opérer, et possède même des accords avec des associations telle que
Children Action pour que certaines opérations soient pratiquées à moindre frais.
Image 19 : Couloirs du HTO
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 43 Matériel
Cet hôpital est bien aménagé pour tout ce qui concerne les traumas et les
accidents. C’est-à-dire qu’il comporte une multitude de salles à radiographie
conventionnelle car ce type d’imagerie prédomine dans la pratique quotidienne des
médecins. De plus, l’hôpital est doté d’un CT scan, ce qui est utile pour déceler les
lésions des tissus mous en cas de traumas, mais il ne possède pas d’IRM. Au bloc
opératoire, le matériel est généralement suffisant. Les instruments et ressources
utilisées lors des chirurgies ne manquent jamais, notamment ceux pour la
microchirurgie. Par contre lors de ce type d’intervention, les chirurgiens ne
bénéficient pas de lunettes loupes et se servent uniquement de leur propre vue
pour effectuer des gestes très minutieux, ce qui peut favoriser la détérioration de
leur vue. Le nombre de tabliers de plomb était insuffisant au sein de la totalité des
salles d’opérations du même étage, et ceci pas uniquement pour les stagiaires
comme nous, certains médecins et aides pratiquaient également lors de ces
interventions sans protection. En effet, nous avons eu l’amère expérience de devoir
être présentes sans protection dans des chirurgies utilisant comme guidance les
rayons X. Autrement, nous avons remarqué que malgré la présence de gants à
disposition, certaines infirmières effectuaient des gestes invasifs sans gants, tels
que lors de poses de perfusion (Image 20).
44 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 20
Du matériel de nettoyage est présent dans les salles, mais son usage n’est pas
aussi appliqué qu’il l’est chez nous. La définition du stérile et du non-stérile au bloc
opératoire semble différente selon les chirurgiens : il est alors difficile d’en déduire
les règles de bases de l’établissement concernant ce point. Ce qui est surprenant
dans le matériel au bloc opératoire est que les champs stériles comme celui du
chariot d’instruments, sur le patient en question, et les habits des chirurgiens, sont
tous faits d’imposants draps blancs en coton. Le fait que les blouses opératoires
soient en coton plutôt qu’en matière synthétique comme c’est le cas chez nous,
permet à l’établissement de réutiliser ces vêtements après restérilisation et ainsi
d’éviter d’acheter puis jeter les blouses. Cela permet certes de faire des économies,
mais le risque d’infections per-opératoires n’en est, d’après eux, pas amoindri. Et
même si ceci n’est pas aussi stérile qu’un matériau jetable, les chirurgiens, eux,
étaient très stricts à propos des règles de préparation et d’habillement. Ils nous
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 45 observaient nous préparer et n’hésitaient pas à nous ordonner de recommencer
depuis le début au cas où nous faisions la moindre erreur. Grâce à leurs exigences,
nous avons eu un aperçu des techniques et du comportement à adopter dans le
milieu opératoire. Nous sommes témoins de la limitation des ressources dans ce
pays car nous avons pu voir que malgré les directives d’hygiène et d’asepsie, le
bloc n’est pas dans son entièreté stérile. Par exemple les lampes éclairant les
chirurgiens et le patient, entre autres, ne sont pas recouvertes d’un matériau
stérile qui permettrait aux chirurgiens de la manier à leur besoin. Par conséquent,
cela laisse place non seulement à plus d’erreurs de manipulation mais aussi à un
risque d’infection plus élevé. En ce qui concerne la protection des chirurgiens face
au sang et autres dangers d’exposition, nous avons remarqué qu’ils n’utilisent pas
de lunettes de protection. Nous avons eu le malheur d’être exposées, ayant reçu
une goutte de sang sur visage. Souvenez vous qu’il est souvent plus probable lors
d’opérations orthopédiques d’être exposé à un projectile que lors d’autres types de
chirurgies. De ce fait, nous conseillons aux prochains stagiaires d'emmener avec eux
un minimum de matériel de protection.
Personnel
La répartition du personnel de l'hôpital est très inférieure à ce que l’on pourrait
trouver en Suisse. Le manque de médecins et d’infirmières a motivé la diminution
de la sélection durant les études de médecine/santé. Le nombre de patients étant
élevé, le travail est particulièrement soutenu.
Au bloc opératoire, nous avons remarqué quelques différences ; les chirurgiens
n'ont pas d'instrumentistes, ainsi ils prennent eux-mêmes ce dont ils ont besoin sur
un plateau mis à leur disposition ou alors des médecins internes ou aides de bloc
qui participent à la chirurgie les assistent et jouent à ce moment-là le rôle
d’instrumentiste. S'ils manquent d'un instrument, ils peuvent faire appel à une aide
46 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? de bloc qui viendra apporter ce dont le médecin a besoin spécifiquement (le
chirurgien, qui est habillé stérilement, ne peut se permettre d'y aller tout seul).
Lors de préparation de la salle de bloc opératoire, le personnel passe une serpillère
sur le sol du bloc et change la poubelle. Aucune autre initiative de nettoyage n'est
entreprise par le personnel pour la désinfection.
Nous avons constaté que les vietnamiens avaient besoin de leur moment de repos
après le repas de midi. Il n'est donc pas étonnant de voir le personnel se reposer
durant ce moment là à divers endroits, dont les couloirs de l'hôpital (Image 21).
Image 21
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 47 Hygiène
Au sein de l'hôpital, certains endroits ne sont pas entretenus par un service de
nettoyage. La porte d'entrée du bloc opératoire se trouve même dans un garage où
des voitures et des scooters sont garés (Image 22). A la différence de l’hôpital FV,
il n’y a malheureusement pas de promotion de l’hygiène des mains à l’affiche.
Les mesures d'hygiènes prises par les médecins dans la salle d'opération semblent
convenir aux exigences européennes ; le personnel est en tenue spécialement
prévue pour la salle d'opération. Un masque et un cache cheveux sont vivement
recommandés. Les chirurgiens procèdent alors au lavage des mains qui est de type
européen, des vêtements stériles sont à leur disposition dans la salle d'intervention.
Ils ne portent pas de lunettes de protection malgré les quelques projections
fréquentes (sang, os) dans le milieu de l'orthopédie, mais sont très stricts quant à
la désinfection des mains et la façon de s'habiller stérilement.
Le personnel soignant de l'hôpital n’est pas aussi attentif que les médecins. En
effet les soignants ne portent pas toujours de masques dans le bloc opératoire, ni
de gants lorsqu’il faut donner du matériel stérile aux chirurgiens ou poser une voie
veineuse. Certains se touchent même les pieds dans la salle d'opération lorsqu'ils
sont assis.
48 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 22 : entrée du bloc opératoire
Salaire et prix d'une consultation /opération
En discutant avec divers médecins locaux, nous avons noté qu’une consultation en
urologie dans un hôpital public coûte 20’000 VND, ce qui correspond à 1.-, alors
qu’une consultation en urologie dans l’Hôpital FV revient à 600’000 VND, soit
trente fois plus cher ! Cette grande disparité des coûts entre le secteur privé et
public s’applique certainement à toutes les spécialités médicales. Nous pouvons
imaginer qu’une différence similaire concerne aussi les salaires des médecins. Par
ailleurs, comme nous l’avons vu dans l’hôpital privé, nous ne connaissons pas les
différences de prix en fonction du type d’assurance que possède le patient, mais il
en existe probablement.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 49 Relation médecin/malade
La relation médecin/malade est comparable à celle décrite à l'Hôpital FrancoVietnamien, c'est-à-dire que les médecins ont un contact très froid avec les
patients ; l’examen physique n’est pas complet, et les malades n’enlèvent pas leur
pantalon même quand il s’agit d’analyser leur démarche. De nouveau, c'est
certainement une question de coutume, de tradition et d'habitude plutôt que de
mauvaise intention. Ils passent très peu de temps avec le patient (vu le nombre de
patients dans l'hôpital, ceci est compréhensible) et les explications sur les suites de
traitement ou sur les chirurgies sont très brèves.
Déroulement du stage et journée type au sein de l'hôpital
Le service de chirurgie pédiatrique est au 2ème étage de l'hôpital. Dans une très
grande salle à l'entrée se déroulent les colloques le matin et quelques consultations
sont effectuées dans la journée. Situé au centre de cet étage, un local de
radiographies conventionnelles est à disposition pour ce service. Devant celui-ci,
nous observons une foule de vietnamiens, enfants et adultes, attendant
patiemment leur tour. Dans la salle des consultations, un ou deux médecins sont
installés à une table alors qu’une infirmière reçoit les patients à une autre. Il y a
donc toujours entre trois et quatre patients dans la salle de consultation (entre
ceux qui attendent et ceux qui sont auscultés), donc très peu d'intimité et un
secret médical inexistant. Nous avons été surprises de voir que les médecins ne
déshabillent pas les enfants et examinent par exemple leur marche sur quelques pas
seulement au sein de cette salle remplie de personnel médical et des prochains
patients. L’examen physique est réalisé brièvement et sans aucune désinfection des
mains le précédant ou le suivant, parfois même après avoir été en contact avec un
pansement. Le médecin parle relativement peu avec l'enfant ou sa famille, sauf s'il
50 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? éprouve le besoin de développer des explications ou directions selon la situation. Il
examine surtout la radiographie, qui est toujours présente en orthopédie, et se
base sur celle-ci pour proposer un plan pour la suite qu'il écrira dans le carnet de
suivi du patient. Les consultations durent donc entre 5 et 10 minutes par patient,
parfois même moins. Chaque chambre dans le service est pleine, comportant entre
8 et 15 lits, et d’autres lits supplémentaires sont localisés dans le couloir pour
permettre à l’hôpital d’accueillir plus d’enfants à la fois. Pour ne pas laisser l'enfant
seul, nombreux membres de la famille sont souvent couchés par terre dans le
couloir ou à côté du lit. Ceci s'explique aussi par le fait que l'hôpital ne propose que
les traitements ; il n’y a pas de distribution de repas. Il arrive donc fréquemment
que la famille se présente avec des plats à préparer. De plus, si elle vient de loin, il
n’est pas défendu de dormir par terre.
Les médecins ont l'habitude de faire le tour des patients ensemble et ne se
répartissent pas le travail. Les chambres étaient donc tellement occupées lors de
ces tours que les chirurgiens nous invitaient à sortir.
Les blocs opératoires de chirurgie pédiatrique sont situés un étage en dessous et
une multitude d’opérations sont pratiquées dans la journée. La majorité des
interventions auxquelles nous avons assisté étaient liées aux fractures et
consistaient en des poses ou retraits de broches. Ces opérations étaient
fréquemment pratiquées sur le membre supérieur. Il a également été intéressant de
voir une greffe de peau autologue car ceci nous a illustré ce que le professeur Le
Coultre nous expliquait à ce propos lors de la semaine de mission de sélection.
D’une manière générale nous avons pu noter que les médecins et autres aides dans
les salles opératoires communiquaient peu avec leurs patients, ce qui nous a
marqué. Les enfants étaient souvent en manque de réassurance et nous nous
sentions frustrées de ne pas pouvoir leur apporter ce confort, principalement à
cause de la barrière de la langue. Il était sûrement aussi question d’une potentielle
barrière culturelle, car nous avons vu que la population de ce pays n’est pas aussi
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 51 émotionnellement démonstrative ou empathique que ce dont nous avons l’habitude
de voir. Un autre aspect surprenant du milieu opératoire est que lorsque nous
voulions nous renseigner sur la cause de l’état des patients, les chirurgiens
n’étaient pas en mesure de nous répondre car ils ne connaissaient pas
systématiquement cette information.
Les opérations pédiatriques orthopédiques en lien avec l’association Children Action
ne se déroulaient malheureusement qu’à partir de la fin de notre stage. Nous avons
tout de même reconnu quelques enfants et leurs familles dans le service au niveau
du local de radiographie conventionnelle.
Globalement, ce stage en chirurgie orthopédique pédiatrique nous a été très
instructif. Nous avons eu la chance d’apprendre à nous habiller stérilement tel un
chirurgien et la possibilité de participer à des opérations avec eux, les aidant avec
divers instruments. Certains étaient heureux de nous accueillir et nous ont donné
l’opportunité de pratiquer des points de sutures. De ce point de vue, ceci nous a
permis de connaître quelques bases des règles d’hygiène au bloc opératoire, ce qui
pourrait éventuellement nous être indispensable dans nos futures carrières.
52 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 23 : greffe de peau sur une petite fille
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 53 Image 24
Le service des urgences orthopédiques et traumatologiques est composé de trois
salles agencées : la première fait office de salle de consultation pour accueillir les
patients, la seconde, dotée d’une dizaine de lits, est utilisée pour les traitements et
pour garder les patients en observation, et la dernière est utilisée comme bureau
pour les médecins. Le personnel se réunit tous les matins à 07h00 pour effectuer la
tournée des lits. Les médecins consultent en groupe de dix environ, en consacrant
54 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? une à deux minutes par patient pour prendre connaissance du dossier et des
éventuels résultats d’examens demandés, et ainsi discuter ensemble du traitement
à adopter. Pendant ce temps, les infirmières nettoient les plaies et renouvellent les
pansements. Nous avons pu remarquer que de la proximité des lits résulte un
manque considérable d’hygiène ; en effet les voisins de lits sont souvent exposés
au sang du patient se faisant soigner. De plus, le personnel ne porte pas toujours
de gants lorsqu’il effectue un soin direct au patient, par exemple, lors de
changement d’un pansement compressif sur une artère radiale sectionnée.
Néanmoins, les plaies sont désinfectées avec des solutions hydro-alcooliques et
toujours recouvertes de pansements. A 07h30, tous les médecins se rendent au
colloque du bloc opératoire, où ils discutent des cas journaliers. Les radiographies
des patients sont toutes exposées et le médecin chef ou le médecin traitant
présente les cas en question. Par la suite, chacun retourne à ses occupations :
certains médecins sont assignés aux consultations des urgences, d’autres vont
commencer les opérations de la journée chez les patients déjà présents. Le service
des urgences possède son propre bloc opératoire, constitué de 5 salles
entièrement équipées et de divers locaux destinés à la préparation des opérations.
Ce service ne s’occupant que des urgences traumatologiques orthopédiques, le
bloc ne possède que le matériel nécessaire à cet effet. Les opérations
programmées se déroulent principalement le matin, l’après-midi étant laissé libre si
d’autres cas se présentent. Les chirurgiens que nous avons suivi nous ont permis
de les assister durant ces interventions ; c’est ainsi que nous avons appris en
détail les règles de stérilité vietnamiennes, pas toujours évidentes lorsque l’on est
habitué aux standards européens. Suite à cette préparation complexe, nous avons
eu la possibilité de participer activement aux chirurgies, apprendre à manier
certains instruments et pratiquer des sutures. Les cas que nous avons le plus
fréquemment observés sont les accidents de la route, notamment en motocyclette,
moyen de transport majeur au Vietnam. Ceux-ci résultent souvent en de graves
fractures fermées et/ou ouvertes ou en plaies ouvertes des membres inférieures
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 55 et/ou supérieurs. Les accidents de travail sont également fréquents, en particulier
chez les travailleurs en manutention tels que les fermiers, les mécaniciens et les
bûcherons. Enfin, nous avons pu voir plusieurs cas d’agressions à l’arme blanche.
Les opérations qui suivent ces cas sont souvent longues et compliquées car les
blessures sont profondes et touchent autant les tissus sous-cutanés que les
muscles, les tendons, les vaisseaux et mêmes les os. La microchirurgie prend de ce
fait une grande place dans ce domaine de la médecine et permet au patient de
récupérer avec succès la fonction de son membre. A cet effet, l’une des
observations marquantes de ce passage aux urgences a été le rapport à la douleur
de la population vietnamienne. Nombre de patients se présentaient avec des plaies
impressionnantes et étaient capables, adultes comme enfants, de patienter
stoïquement jusqu’à leur tour. Le personnel ne semblait pas se soucier en premier
lieu de la douleur. Il était fréquent qu’un patient dorme toute une nuit avec une
plaie ou une fracture ouverte, en attendant son opération prévue le lendemain.
Enfin, durant ces dites opérations, l’anesthésiste administrait toujours une dose
minimale d’anesthésiant. C’était donc souvent le cri du patient au premier coup de
scalpel qui indiquait qu’il fallait augmenter la dose d’analgésique. Nous avons pu
observer ce rapport à la douleur particulier tout au long de notre stage mais
également au cours de la suite de notre voyage en Asie.
56 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 25 : Salle d’opération
Image 26 : Fracture du tibia
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 57 Image 27 : Fracture du tibia
Image 28 : Accident de la circulation
58 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 29 : prélèvement pour une greffe de peau
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 59 Image 30 : Fracture du Fémur
Image 31 : Fracture du Fémur
60 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Conclusion sur le HTO
L’Hôpital de Traumatologie et d’Orthopédie est typique d’un hôpital public
vietnamien en ville. Etant situé au cœur de la ville et le plus spécialisé pour les
urgences traumatologiques, cela fait de lui un des hôpitaux dont la population fait
le plus recours. Tous les services sont surchargés, les médecins ont très peu de
temps pour leur patient et l’hôpital a peu de moyens à disposition par rapport à un
hôpital tel que le FV. Cependant, même si les conditions d’hygiène sont limitées,
les patients se considèrent satisfaits de la qualité des soins prodigués.
Vu que le système de soins au Vietnam est hétérogène et géographiquement peu
répandu, de nombreuses missions nationales et internationales tentent de diminuer
l'inégalité en fournissant une aide aux populations défavorisées.
5. Mission de sélection avec Children Action
Présentation de l'association
L'association Children Action est une association genevoise fondée en 1994 par
Bernard Sabrier, président du Conseil d'administration d’Unigestion SA. Elle
s'occupe principalement de l'amélioration des conditions de vie des enfants et
opère dans de nombreux pays. Au Vietnam, plusieurs projets sont en place : une
école pour les enfants les plus démunis, un centre pour aveugle et des opérations
chirurgicales. C'est depuis 1996 que Children Action organise des opérations
chirurgicales au Vietnam et offre la possibilité aux enfants touchés dans leur santé
physique d'accéder aux soins même si leur situation financière ou géographique ne
leur permet pas.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 61 L'association en quelques chiffres :
-
12 missions sont organisées par année et des chirurgiens européens
reconnus font le déplacement pour opérer directement les enfants. De cette
façon, ils peuvent aussi former les équipes locales à une opération spécifique.
-
3'970 opérations orthopédiques et 1'962 opérations pour des séquelles de
brûlures ont déjà été pratiqué.
-
Une
intervention
chirurgicale
(séquelles
de
brûlure/malformations
orthopédiques) s'élève à environ CHF 250.-, matériel et suivi compris.
- 2'992 orthèses et chaises ont été distribuées. Une chaise roulante revient à
CHF 150.-.
- Aujourd'hui, plus de 45 000 consultations pré et post opératoire ont déjà été
réalisées.
Depuis quelques années, l'association a décidé de dissocier les missions de
sélection, où l'on choisit quels enfants vont pouvoir être opérés, et les missions
d'interventions chirurgicales. Celles-ci se déroulent dans quelques hôpitaux
seulement dont l'Hôpital de Traumatologie et d’Orthopédie d'Hô-Chi-Minh-Ville où
nous avons effectué un stage de 2 semaines par la suite.
Chaque année, 3 missions de sélection par an prennent place loin des grands
centres de santé et permettent un contact rapproché avec la population locale.
62 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Nous avons pu participer avec la permission de la coordinatrice locale Giang Ta Thi
Minh et des Professeurs Le Coultre et Dutoit à une mission de sélection qui s'est
déroulée durant une semaine dans les hauts plateaux du Vietnam.
Présentation des professeurs et de la coordinatrice locale
Le Professeur Le Coultre est l'ancienne cheffe de Service de chirurgie pédiatrique
des HUG. Elle est "l'expert scientifique des missions chirurgicales" et s'intéresse
principalement aux traitements des grands brûlés et des traumas. Elle avait donc le
rôle durant cette semaine de sélectionner les enfants brûlés devant être (re)opérés
prioritairement.
Le Professeur Dutoit est l'ancien médecin chef de l'hôpital orthopédique de la
Suisse Romande (Lausanne). Il est le chef de projet des missions de chirurgie
orthopédique. Son but était de sélectionner les enfants à problèmes locomoteurs
(d’origine neurologique ou orthopédique) et de décider si une opération, une aide
(fauteuils, déambulateurs), ou de la rééducation étaient requises.
La coordinatrice locale Giang Ta Thi Minh a un rôle extrêmement important pour
mener à bien les missions.
Elle s'occupe d’introduire l’association Children Action aux provinces et s’assure de
leur accord pour ensuite organiser l'arrivée des chirurgiens. De nombreuses
annonces sont passées par radio ou télévision pour faire de la publicité et les
provinces éloignées peuvent convoquer les enfants qui pourraient potentiellement
être concernés. Elle doit aussi être en contact avec les hôpitaux locaux afin
d'établir des accords qui permettraient aux chirurgiens d'opérer des enfants à
moindre frais, de les autoriser à utiliser les salles d’opération, ainsi que de mobiliser
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 63 une équipe entière de personnel soignant (par exemple l’anesthésiste, les
infirmiers...).
Ensuite, elle doit prendre contact avec des chirurgiens qui accepteraient de venir
bénévolement opérer les enfants ou participer aux missions de consultations, et
organiser toute l'infrastructure nécessaire à leur déplacement et leur séjour.
Pendant les missions de sélection, chaque enfant va avoir un dossier médical ouvert
sur un site intranet qui est consultable par tous les membres de l'association. Ceci
permet un meilleur suivi de l'enfant (plus de 60% des cas sont revus !) et de voir
au fur et à mesure des missions les améliorations ou les détériorations de la
situation. Pour ce faire, les chirurgiens ont une feuille à disposition (Image 32) qu'ils
remplissent pendant la consultation. Giang et Hanh, son assistante, vont les
informatiser et se charger de respecter toutes les indications des médecins :
opérations, appareillages, kinésithérapie… Elles établissent alors un planning
d'opération en fonction de l'urgence de la situation de l'enfant. Il y a donc un travail
post-mission non négligeable.
Plus que tout, Giang est l'interprète lors des consultations ou dans les salles
d'opération, et permet aux chirurgiens un contact facilité avec le patient et sa
famille.
Enfin, Giang s'occupe de toute la partie administrative de l'association qui est, à
notre grande surprise, plus importante que ce que l'on aurait pu penser.
64 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 32
Durant la semaine de sélection les professeurs ont vu près de 300 enfants. Une
mission d'une semaine permet d'opérer en moyenne 25 enfants et coûte environ
CHF 10'000.-.
Déroulement de la mission
Les deux premiers jours se sont déroulés dans le centre du Vietnam à Dalat, où la
mission venait pour la première fois et les deux derniers à Quang Ngai, dans des
hôpitaux locaux. Ces derniers ont eu la générosité de partager certaines de leurs
ressources telles que les machines à rayons X. Les médecins avaient donc
l’autorisation de prescrire des radiographies conventionnelles pour diagnostiquer
diverses atteintes. A Dalat comme à Quang Ngai, au moment de notre arrivée
devant l'hôpital, nous avons été impressionnées par le nombre d'enfants présents,
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 65 malgré le fait que nous arrivions tôt dans la matinée, soit aux alentours de 7h30.
Image 33
Image 34 : Affiche d’accueil à Dalat
66 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? L’hôpital avait laissé deux salles à disposition pour les médecins de cette mission.
Celles-ci étaient dotées d’un simple bureau et d’un lit sans couvre-lit à changer
entre chaque enfant inspecté ; la porte de la salle reste plus ou moins close pour
assurer un minimum d’intimité. Pour commencer, les professeurs exerçaient
ensemble tout en s’entre-aidant. Lorsqu’il s’agissait d’un problème moteur ou
orthopédique, le professeur Dutoit prenait l’enfant en charge et professeur Le
Coultre remplissait les fichiers en prenant des notes. Pour les enfants souffrant de
brûlures ou de cicatrices aberrantes nécessitant une reconstruction, le professeur
Le Coultre prenait le relais (Image 35 et 36). L’anamnèse et toute autre
communication du médecin avec l’enfant ou sa famille se faisaient par le biais
d’interprètes et traductrices vietnamiennes. Au fil de la journée, le nombre
d’enfants en besoin restait immensément élevé. Pour cette raison, les médecins se
sont donc séparés et consultaient chacun dans une salle. Nous nous sommes alors
divisées en deux groupes de deux et aidions les médecins en notant leurs
observations et indications. C’est en participant de cette manière que nous nous
sommes rendues compte de la rapidité avec laquelle il faut évaluer chaque enfant,
car il n’était pas évident de tout noter aussi précipitamment! Suite à ce
remaniement dans l’organisation, la mission se déroulait de manière beaucoup plus
efficace, et ceci nous a permis de finir vers 19h. A Quang Ngai, les deux jours de
consultations se sont déroulés dans deux hôpitaux locaux différents de nature
beaucoup plus sommaire que celui de Dalat. Néanmoins, de la même manière, il y
avait la possibilité d’ordonner des radiographies ; dans ce cas le médecin
remplissait un bon pour envoyer l’enfant dans le service de radiographie de
l’établissement et prévoyait de le revoir entre deux consultations dès que les
clichés étaient prêts. Par contre, nous avions une seule salle à disposition. Les
médecins devant alors travailler ensemble, il a fallu garantir une bonne efficacité et
organisation pour voir tous les enfants présents.
A la fin des consultations, les médecins discutaient ensemble de la situation de
l’enfant, informaient les parents et les conseillaient sur le traitement qu’ils
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 67 trouvaient le plus approprié grâce à leur riche expérience, toujours en évaluant
chaque situation avec la balance bénéfices versus risques.
Image 35 : Professeur Le Coultre avec deux grands brulés
Image 36 : une fille brûlée
68 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Patientèle
Comme nous l’avons noté auparavant, la population vietnamienne est constituée de
plusieurs ethnies, dont la majorité se trouve dans les zones reculées du pays, loin
des grandes villes et de leurs infrastructures. Ainsi, l’accès aux soins dans les
grands hôpitaux de ces groupes se trouve altéré, premièrement par la distance non
négligeable entre leur village et la zone urbaine la plus proche. Par exemple, nous
avons relevé que la plupart des cas neurologiques que nous avons vus durant cette
partie du stage avaient souffert de manque d’oxygène trop prolongé au moment de
la naissance. Deuxièmement, ces groupes ethniques sont pour la plupart
désavantagés sur le plan économique, le taux de pauvreté y étant de 70% contre
20% chez les vietnamiens (selon UNICEF).
Mais encore, on distingue d’autres
obstacles à l’accès aux soins dont la diversité de cultures du pays est en cause : ils
incluent le manque de confiance lorsqu’il s’agit d’accéder au système de soins de
santé et de traiter avec les travailleurs médicaux, et une mauvaise maîtrise de la
langue vietnamienne.
C’est ainsi que de telles organisations sont mises en place dans ce pays, qui visent
à remédier en quelque sorte à cette « injustice » géographique, économique et
culturelle dont sont victimes ces groupes ethniques. La patientèle présente en
consultation provient effectivement en majorité des hauts plateaux du Vietnam.
Les enfants ont entre 1 an et 18 ans et viennent consulter pour des cicatrices de
brûlures envahissantes, pour une difformité des membres, des doigts ou du thorax
et surtout pour une anomalie de la marche, qu’elle soit d’origine neurologique ou
orthopédique. Les pathologies et signes cliniques que nous avons pu rencontrer lors
de ces journées de consultations étaient très divers malgré des critères de
sélection précis des enfants (cf.
uns :
Déroulement de la mission); en voici quelques
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 69 •
Tâches mongoloïdes
•
Trisomie 21 (ligne palmaire transverse, souffle cardiaque témoignant d’une
CIV, pieds plats, hypotonie)
70 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? •
Myopathie de Duchenne (hypotrophie musculaire des membres, mollets
hypertrophiés, scoliose, hyperlordose)
•
Atteinte du SPI (nerf sciatique poplitée interne)
•
Tétraparésie spastique
•
Hémiplégie
•
Athrogrypose
•
Maladie de Crouzon
•
Syndrôme de Marfan
•
Syndrôme d’antétorsion fémorale tibiale
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 71 •
Genu Varum dans la maladie de Blount
•
Clinodactylie
•
Polydactylie
72 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? •
Plagiocéphalie
•
Maladie de Charcot Marie Tooth
•
Ataxie- Athétose
•
Arthrodèse de hanche
•
Scoliose
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 73 •
Brides amniotiques
•
Exostoses
o
74 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? •
Pieds bots
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 75 •
Ichtyose
agénésie du fémur 76 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Relation médecin/malade, traducteur/malade, interprète/parents
Du fait du jeune âge des patients et de la barrière linguistique, les consultations se
déroulent en présence des parents ou des grands-parents et d’une interprète. Cela
veut dire que pour obtenir une explication ou la réponse à une question posée par
le médecin, il faut la traduction de l’interprète, l’explication du parent, une
éventuelle intervention de l’enfant (pour décrire s’il ressent une douleur par
exemple), une réinterprétation et enfin, une réponse du médecin aux informations
reçues, qu’il faut évidemment à nouveau retraduire. Toutes ces étapes peuvent
représenter un obstacle à la communication. Il est fréquent, par exemple, que le
médecin pose une question précise mais que la réponse obtenue soit totalement
discordante. De même, il arrive souvent que le parent se lance dans de longues
explications mais que la traduction de l’interprète ne se limite qu’à quelques mots.
Dans ces situations, le médecin doit reposer les questions ou demander plus de
clarifications. La relation médecin-parent n’existe qu’à travers l’interprète. Ce
dernier
a
la
tâche
compliquée
d’écouter
les
explications
des
parents,
d’éventuellement éliminer les informations non pertinentes tout en restant fidèle au
récit original et de les traduire de manière claire et concise afin de ne pas avoir à
jongler sans arrêt entre les deux interlocuteurs. Ce va-et-vient est néanmoins
nécessaire, car les explications et la traduction premières sont rarement
suffisantes. Nous nous sommes également habituées à la cacophonie générale qui
règne dans les environs de et dans la salle de consultation, où une foule curieuse
s’assemble pour observer et les protagonistes parlent souvent en même temps. Il
est fréquent d’ailleurs que le médecin doive rappeler un certain ordre dans la salle.
Les consultations se déroulent néanmoins dans une bonne ambiance générale et
l’on peut aisément observer la complicité qu’il s’est créee entre Giang, Hanh et les
professeurs, au fil des années. Nous avons pu remarquer que les grands-parents
disposent d’une grande influence sur les choix concernant leurs petits-enfants.
C’est souvent à eux que revient le rôle de s’en occuper durant la journée où les
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 77 parents travaillent et leurs décisions sont très respectées au sein de la famille.
C’est également à travers les grands-parents que persistent les croyances en la
médecine traditionnelle. De nombreux parents se tournent d’abord vers cette
branche de la médecine pour tenter de soigner leur enfant. Par exemple, nous nous
souvenons d’un jeune enfant souffrant d’une fracture du coude dont les parents
ont eu recours à un médecin traditionnel, qui leur a prescrit une pommade pour la
soigner. Finalement, le véritable obstacle à la communication est le manque
d’information que les enfants et leurs proches disposent, vis-à-vis de leur infirmité.
C’est donc au médecin de discerner ce que l’enfant peut avoir, en l’observant
marcher, en examinant la taille de ses membres et ses éventuelles cicatrices et en
mettant ces informations en relation avec les quelques explications parentales. De
manière générale, il nous a semblé que la relation la plus « naturelle » s’est faite
entre le médecin et l’enfant, directement ; du fait de la différence d’âge, une
autorité naturelle paternelle se dégage du médecin lors de l’examen et le langage
des signes et des gestes suffit pour se faire comprendre (Image 37).
Image 37 : Le Professeur Dutoit et un enfant
78 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 38 : Un consultation à Quang Ngai
Image 39 : Une consultation à Quang Ngai
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 79 Image 40 : l’équipe de Dalat, les Professeurs Le Coultre et Dutoit et nous
Image 41 : Les Professeurs Le Coultre et Dutoit, les coordinatrices locales Giang et
Hanh, avec nous quatre devant l’hôpital à Quang Ngai.
80 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Image 42 : La salle de consultation à Quang Ngai
6. Conclusion générale du stage
L’organisation du système de santé au Vietnam a été conçue de manière à ce que
toutes les classes de la population puissent en bénéficier. Malgré ceci, de nombreux
facteurs entraînent une médecine à deux vitesses. En effet, nous avons remarqué
que les hôpitaux privés diffèrent en de nombreux aspects des hôpitaux publics. La
plupart de la population de Hô-Chi-Minh-Ville a plus recours aux services d’un
hôpital public tel que le HTO alors que les vietnamiens les plus aisés, les expatriés,
les
touristes,
et
certaines
personnes
de
pays
avoisinants
consultent
préférentiellement dans un hôpital privé comme le FV. D’une part car le temps
accordé au patient lors d’une consultation est plus long, d’autre part car les
conditions d’hygiène correspondent davantage à celles qu’ils ont l’habitude de
côtoyer. De plus, les patients bénéficient d’une technologie plus avancée, ce qui
rassure car elle correspond à leurs attentes.
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 81 Cependant, les racines culturelles de ce pays ont un grand impact sur la mentalité
des médecins. Nous avons donc pu relever des similitudes entre ces deux hôpitaux.
En effet, l’attitude envers le patient est semblable ; les médecins adoptent une
relation paternaliste avec leurs patients. De plus, la relation est fondée sur la plainte
du patient et le médecin ne porte alors que peu d’intérêts pour les aspects
personnels et relationnels. Les explications sont minimalistes et il n’y a aucun
effort venant du médecin pour s’assurer de la compréhension, de la réassurance et
de la compliance du patient.
En ayant participé à une mission humanitaire avec Children Action , nous pouvons
affirmer qu’une surprenante proportion de la population dépend de la charité.
L’importance de ce genre de missions est alors évidente car certains enfants, de
par leur couverture maladie et leur situation géographique, ne pourraient
normalement pas se faire soigner. Ceci s’applique d’autant plus pour les adultes.
Pour chacune d’entre nous, cette expérience nous restera mémorable. Il s’agissait
de notre première immersion en communauté dans une culture différente en tout
point. Nous avons du apprendre à respecter les coutumes et les traditions
nationales, ce qui n’est pas toujours évident. Par exemple, nous avons souvent du
nous abstenir de certains gestes et certaines attentions envers les gens qui nous
étaient innés en restant spectatrices de situation que nous ne pouvions maîtriser.
Par ailleurs, ce stage nous a été très enrichissant en matière de connaissances
médicales, théoriques et pratiques. Il nous a donné un aperçu du métier de médecin
grâce à l’originalité de notre stage, puisque nous avons visité plusieurs services de
différents hôpitaux.
82 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? Ce stage nous aura fait réaliser quel impact le médecin peut avoir dans une société
et également à quel point notre passion pour la médecine est grande. Grâce à cette
expérience, nous pouvons maintenant mieux percevoir quel type de médecin nous
aspirons à devenir.
Nous recommandons vivement aux prochaines volées de travailler au HTO où ils
seront chaleureusement accueillis. Nous conseillons également de se rendre au FV
pour se faire une idée des différences notables entre les deux types d’hôpitaux
SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? 83 7. Bibliographie :
•
Library of Congress, Federal Research Division. Country Profile: Vietnam, [En
ligne], 2005, [http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/profiles/Vietnam.pdf] (Août
2013)
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World Health Organization. “Viet Nam”, Countries, [En ligne], 2013,
[http://www.who.int/countries/vnm/en/], (Août 2013)
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Lonely Planet. “History”, Vietnam, [En ligne], 2013,
[http://www.lonelyplanet.com/vietnam/history], (Août 2013)
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2013)
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TRAN Thi Hao, Une introduction à la connaissance du Vietnam, Paris :
L'harmattan, pp. 129-132
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STEWART I., ATKINSON B., DRAGICEVICH P., RAY N., Vietnam, Lonely Planet,
10e édition
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HICKS Angela, Découvrir la médecine chinoise, Ed. Marabout, 1999
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Dr KESPI Jean-Marc, L'Homme et ses symboles, Paris: Ed. Albin Michel, 2002
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KAPTCHUK Ted, Comprendre la médecine chinoise, Bruxelles: Ed. Satas, 1993
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http://redtac.org/asiedusudest/2009/11/27/vietnam-structures-politiqueset-ouverture-economique/
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http://www.irinnews.org/fr/report/87114/vietnam-les-minorités-ethniquesperdantes-dans-les-soins-de-santé-maternels
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http://www.childrenaction.org/app/webroot/files/files/gazette%2034versio
n%20_def.pdf
84 SYSTEME DE SANTE AU VIETNAM : UNE MEDECINE A DEUX VITESSES ? •
http://vivrealetranger.studyrama.com/article.php3?id_article=1638
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http://www.ehesp.fr/wp-content/uploads/2012/12/Note-situationsanitaire-systeme-de-sante-vietnam.pdf
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http://www.senat.fr/rap/r01-241/r01-2417.html
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http://www.chine-informations.com/guide/tache-mongoloide-ou-mongoliquetache-bleue-chez-le-bebe_2582.html
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http://www.unserbaby.ch/laurin04/content-h3756-n166616.html
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http://commons.wikimedia.org/wiki/File:EXOSTOSE.jpg