La cheville de l`enfant: du normal au pathologique

Transcription

La cheville de l`enfant: du normal au pathologique
La cheville de l’enfant: du
normal au pathologique
B. Fregeville, C. Baunin, JR. Boutault, FZ. Mokrane,
J. Vial, JJ. Railhac, N. Sans
Imagerie Pédiatrique, Hôpital des Enfants
Toulouse
Imagerie Centrale
Toulouse - Purpan
Objectifs
Présenter une revue iconographique
des aspects normaux et pathologiques
de l’articulation de la cheville
chez l’enfant.
En dehors de la traumatologie, l’exploration de la cheville fait appel
en première intention à la radiographie standard. De ses résultats
dépendra l’indication d’autres moyens d’imagerie.
Cette revue a pour but :
-de montrer les aspects normaux, leur évolution en
fonction de l’âge et leurs nombreuses variantes.
-de présenter les principales pathologies non
traumatiques susceptibles d’être explorées.
-De préciser les indications des examens utiles.
Sommaire
• Aspects normaux, évolution fonction de l’âge
• Variantes du normal: radio et IRM
• Pathologie:
» Congénitale
» Infectieuse
» Tumorale
» Inflammatoire
» Autres étiologies de cheville douloureuse
Aspects normaux
• Structures osseuses: tibia + fibula + talus
Aspects normaux
• Parties molles: liserés graisseux (Æ)
normal
épanchement
Evolution en fonction de l’age
L’ossification du pied se fait à partir:
– de points d’ossification primaires présents dès la naissance
– de points d’ossification secondaires apparaissant jusqu’à
l’age de 12 ans
• Point talien présent dès la naissance
• Point épiphysaire tibial inférieur : 2 à 8 mois de vie
• Point épiphysaire fibulaire inférieur : après 1 an
1 an
4 ans
Aspects radiographiques
9 ans
15 ans
Evolution en fonction de l’age
L’ossification des noyaux se fait de façon +/-concentrique
Aspects IRM
2 ans
9 ans
*Normal maturing distal tibia and fibula: Changes with age at MR Imaging.
T. Chung, D. Jaramillo, Radiology 1995; 194:227-232
Variantes du normal
Les variantes de la normale sont très fréquentes:
– Points d’ossification accessoires, fragmentation des points
d’ossification : pb avec des fractures
– Irrégularités du cartilage physaire donnant un aspect de
pseudo épiphysiodèse
Intérêt de la consultation d’atlas de référence +++
*Keats TE. Atlas of normal variants that may simulate disease. 7thEd, Philadelphia,
Saunders WB. 2001
Aspects radiographiques
ex : os trigone
Ex : fragmentation des noyaux malléolaires
(D. différentiel : fractures)
Ex : irrégularités de la physe
(D. différentiel : épiphysiodèses post-traumatiques)
Variantes du normal
Aspects IRM
- irrégulérités ducartilage de conjugaison du tibia
- modifications du signal osseux =
modifications physiologiques du signal IRM
Ex : fille 11 ans,
T1
T1 SPIR
DP SPAIR
Hypersignaux T2 médullaires, surtout au niveau du dôme talien (Æ)
Dus à la présence d’ilots de moelle hématopoïétique
Disparaissent après 15 ans
Diagnostic différentiel: tumeurs, infections, traumatismes, algodystrophie
*High signal T2 changes of the bone marrow of the foot and ankle in children: red marrow or
traumatic changes. N. Shabshin et al, Pediatric Radiology 2006; 36: 670-676
Pathologie: Congénitale
1. Les malformations sont exceptionnelles:
– Associées à des malformations complexes du membre inférieur
– Aplasie ou hypoplasie du tibia ou du péroné dans le cadre
d’hémimélies.
Ex :
•
Elles nécessitent :
– la rechecherche d’anomalies associées,
– une enquête étiologique
– une imagerie adaptée à la prise en charge orthopédique
Pathologie: Congénitale
2. Les maladies osseuses constitutionnelles
peuvent
concerner les éléments de la cheville (métaphyse, physe, épiphyse)
Æ exemples
- Les maladies métaboliques:
Rachitisme vitamino-résistant
Pathologie: Congénitale
2. Les maladies osseuses constitutionnelles
peuvent
concerner les éléments de la cheville (métaphyse, physe, épiphyse)
Æ exemples
- Les ostéochondrodysplasies :
Dysplasie épiphysaire hémimélique
= Tarsomégalie = Maladie de Trevor
Dysplasie polyépiphysaire
Pathologie: Infectieuse
Infections aigues
Ex : Ostéoarthrite du nourrisson
Impotence et tuméfaction de la cheville gauche. Contexte fébrile.
Refoulement des liserés graisseux périarticulaires
Image de lacune au niveau du talus Æ
* Remerciements Pr P. Petit. Marseille
Æ Indication d’IRM
*
* Épanchement intra
intra--articulaire avec
prise contraste de la synoviale Æ
Atteinte osseuse talienne
*
Pathologie: Infectieuse
Infection subaigue
EX : Enfant de 8ans, douleur depuis 1 mois
Lacune métaphysaire avec
liseré de sclérose
Épaississement des parties
Molles péri
péri--articulaires
IRM
Atteinte centrée sur la métaphyse
Œdème métaphyse + épiphyse
Pathologie: Tumorale
• Si la cheville n’est pas le siège le plus
fréquent, toutes les tumeurs osseuses
de l’enfant et l’adolescent sont
susceptibles d’être rencontrées:
– Qu’elles soient bénignes ou malignes
– Qu’elles soient métaphysaires ou épiphysaires
• Les modalités d’exploration ne diffèrent
pas de celles des autres localisations
plus fréquentes
Principales tumeurs
. Fonction de l’âge: T. Bénignes / T. Malignes
Principales tumeurs
. Fonction du siège: T. Bénignes / T. Malignes
Kystes osseux essentiel
Kyste anévrysmal
Ostéochondrome
Ostéome ostéoïde
Granulome éosinophile
Chondroblastome
Ostéosarcome
Ewing
Métastases
Principales tumeurs
Quelques exemples
Kyste osseux essentiel
Dystrophie osseuse pseudotumorale
• 90 % avant 20 ans. H > F
• Métaphyse os longs
• Clinique : asymptomatique , fracture pathologique
révélatrice.
• RX : Ostéolyse centrale à bords nets
liseré d’ostéocondensation
corticale soufflée et amincie
• Imagerie complémentaire si doute
– TDM : densité liquidienne
– IRM : lésion en hypo T1 et hyper T2 , rehaussement
de la fine membrane du kyste.
– Remaniements post traumatiques si fracture
pathologique
Kyste osseux anévrysmal
Dystrophie osseuse pseudo tumorale
. 80% entre 10 et 20 ans . F>H
. Métaphyse des os longs (50 % )
. Primitif (2/3) ou secondaire (1/3) (certaines tumeurs
malignes peuvent avoir une présentation kystique).
. Clinique variable
. RX : Ostéolyse excentrée à limites nettes
Corticale amincie , soufflée
Septas intralésionnels
. IRM++: multiples logettes
hyposT1 hyper ST2
niveaux liq /liq
Septa rehaussés après Gd
Ostéochondrome
Ostéochondrome = exostose
Excroissance métaphysaire en continuité avec
spongieux et corticale, coiffe cartilagineuse
-Formes isolées: risque compressif local
-Maladie des exostoses multiples (autosomique
dominante): exostoses bilatérales, +/-symétriques,
dégénérescence exceptionnelle avant 15 ans.
Ostéome Ostéoïde
Tissu ostéoïde ou nidus
Fréquent, avant 30 ans, H >F
Os long
Clinique: douleur intense à recrudescence
nocturne calmée par aspirine.
RX : lacune intracorticale,
liseré d’ostéosclérose
TDM pour diagnostic + thérapeutique
Tumeurs malignes primitives
Ostéosarcome, Tumeur d’Ewing
. 80% avant 30 ans, H>F
. Métaphysaires
. RX : lésion agressive
. Bilan IRM : analyse de la tumeur, extension locale
(physe, épiphyse), extension régionale (articulations sus
et sous jacentes)
Æ Exploration dans les 3 plans, pré et post contraste,
visualisation des articulations sus et sous jacentes
Ex : Ostéosarcome
De l’extrémité inférieure du tibia droit, jeune fille de 17 ans
T1
TDM
T1 FS post contraste
T2FS
Tumeurs secondaires
Métastases de tumeurs ostéophiles
– Chez le nourrisson, penser au neuroblastome: la
métastase peut être révélatrice du diagnostic
– Chez le plus grand, découverte lors d’un bilan
d’extension.
Ex: métastase d’un Sarcome
d’Ewing de l’avant-bras
Pathologie: Inflammatoire
* Imaging of juvenile idiopathic arthritis. Johnson K. et
al. Pediatr Radiol 2006; 36: 743-758
Pathologie: Inflammatoire
2. Maladies de la synoviale
Diagnostic différentiel de l’ACJ car responsables d’un
tableau de monoarthrite.
. Rx et Echo sont peu spécifiques: épanchement, lésions
épiphysaires juxta articulaires, anomalies de l’interligne.
. IRM indispensable à leur caractérisation.
Le diagnostic repose sur la ponction et la biopsie synoviale.
Æ Synovite villonodulaire : hyperplasie inflammatoire des
villosités synoviales
• IRM +++ : synovite, épanchement, hémosidérine (T2 EG), tissu
fibreux ne prenant pas le contraste.
* Pigmented villonodular synovitis. Al-Nakshbandi NA. Clin Radiol 2004; 59:414-420
2. Maladies de la synoviale
Æ Ostéochondromatose synoviale primitive:
primitive
. Révélée par une monoarthrite dans > 95 % cas
= Pathologie tumorale bénigne produisant des (ostéo)chondromes
synoviaux puis intra-articulaires.
• RX : épanchement articulaire, calcifications en grains de riz dans
l’articulation ou les gaines tendineuses, érosions péri-articulaires
• Echo : masse synoviale hétérogène et avasculaire, CE intra articulaires
• CT/ ArthroCT : visualisation des corps étrangers calcifiés (75%)
• IRM ++: anomalie synoviale + chondromes : soit calcifiés, en hyposignal
Soit cartilagineux (15%) , difficiles à différencier du liquide synovial
Æ Intérêt du Contraste IV +++ : au temps précoce, rehaussement des chondromes
rattachés à la synoviale. Au temps tardif, diffusion du Gado et pseudo arthro-IRM.
•A pictorial review of primary synovial ostochondromatosis. Mc Kenzie G. et al.
Eur Radiol 2008; 18: 2662-2669
2. Maladies de la synoviale
Æ Arthropathie hémophilique
. Arthropathie d’aggravation progressive due à la répétition des hémarthroses et
l’accumulation de dépots d’hémosidérine au niveau de la synoviale
.
La cheville est l’une des articulations cibles
IRM ++ indispensable à l’évaluation articulaire
à un stade infraradiologique
Autres étiologies
• Responsables de douleurs chroniques
ou à répétition, génératrices d’examens
complémentaires
• Leur origine traumatique n’est pas
directement établie
Æ Ostéochondrite du dôme talien
Æ Algodystrophie
Ostéochondrite du talus
• Ostéochondrite disséquante, touchant l’os sous-chondral, le cartilage
épiphysaire et le cartilage articulaire
• Probablement d’origine microtraumatique (pratique sportive)
• RX : fragmentation ou lacune du versant médial du dôme talien
• IRM (séquences T2 ou équivalent):
évaluation du cartilage
de la stabilité du fragment
•
Ex : fille 11 ans, antécédents d’entorse
Algodystrophie : Pediatric Complex
Regional Pain Syndrome (CRPS)
L’algodystrophie existe à l’âge pédiatrique.
Affection polymorphe de diagnostic souvent tardif
Æ clinique, scintigraphie, évolution
Æ Imagerie non spécifique
IRM ( STIR, séquences en saturation de graisse) :
œdème médullaire osseux,
épanchement articulaire,
œdème des parties molles
D.différentiel difficile avec les modifications
physiologiques du signal IRM
Ex : garçon, 9 ans
*Pediatric Complex Regional Pain Syndrome. Low AK. et al. J Pediatr Orthop 2007; 27: 567-572
*Sémiologie IRM de l’algodystrophie du pied. Darbois H. et al. J. Radiol 1999; 80: 849-854
Conclusion 1
La pathologie non traumatique de la cheville chez
l’enfant n’est pas rare.
Responsable de douleurs +/- chroniques, elle justifie la
réalisation d’examens d’imagerie.
La radiographie standard reste l’examen de référence.
2 pièges sont à éviter:
Æ ne pas surestimer une variation du normal
Æ ne pas banaliser une douleur persistante
Conclusion 2
Æ ne pas surestimer une variation du normal:
Confrontation clinique et biologique,
Connaissance des nombreuses variations physiologiques
Æ ne pas banaliser une douleur persistante =
Savoir poser l’indication d’une IRM pour:
- rechercher des lésions osseuses infra-radiologiques
- analyser les parties molles et surtout la synoviale par des
séquences post-contraste.