LE SCANNER DANS LES TRAUMATISMES DU ROCHER

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LE SCANNER DANS LES TRAUMATISMES DU ROCHER
LE SCANNER DANS LES
TRAUMATISMES DU ROCHER
H. Moumou, M. Fikri, N. Ech-cherif El Kettani, N. Chakir, MR. El Hassani, M. Jiddane
Hôpital des spécialités, CHU Ibn Sina-Rabat-Maroc.
INTRODUCTION
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Les lésions traumatiques de l’os temporal sont fréquentes et
d'interprétation difficile du fait de la diversité des formes
cliniques et de la complexité de l'anatomie de l'oreille.
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Les progrès de l’imagerie, notamment en résolution spatiale,
tant en tomodensitométrie (TDM) qu’en imagerie par résonance
magnétique (IRM), permettent une meilleure approche des
structures les plus fines de l’os temporal.
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La TDM est l’examen de référence dans la caractérisation des
différentes lésions des structures fines du rocher.
EPIDEMIOLOGIE
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Les fractures du rocher sont soit isolés ou intégrés dans un
contexte de traumatisme crânien ou poly-traumatisme nécessitant
une prise en charge multidisciplinaire.
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elles représentent 7 à 25 % de l’ensemble des lésions
intracrâniennes.
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Dans 10-15%,l'atteinte est bilatérale.
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L'âge des patients est entre 20 et 40 dans 70% des cas.
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Les étiologies les plus fréquentes sont :
y les accidents de la voie publique 41%,
y les chutes 31%,
y les agressions 11%.
RADIOANATOMIE
Le radiologue joue un rôle primordial dans le bilan
lésionnel précis des traumatismes du rocher d'où la
nécessité d'une maîtrise de la radio-anatomie du
rocher.
TDM du rocher en coupe axiale
TDM du rocher en coupe coronale
Les 3 étages de la caisse
du Tympan
Canal carotidien
interne
Cochlée
chaîne ossiculaire
Epitympan (Attique)
Mésotympan (Atrium)
Méat auditif
interne
canal semi-circulaire
latéral
Antre
Hypotympan
Mastoïde
2ème portion
du VII
Ganglion géniculé
1ère portion du VII
2ème portion
du VII
3ème portion du VII
Fenêtre ovale
Vestibule
INDICATIONS DU SCANNER
y
En semi-urgence : c’est la circonstance dans laquelle
l’examen tomodensitométrique est le plus souvent réalisé.
o Otorragie.
o Paralysie faciale périphérique.
o Surdité
o Vertiges
y
En urgence, en cas de traumatisme crânio-encéphalique
grave : mais l’hémotympan peut rendre l’interprétation
délicate (caisse du tympan et osselets +++)
o Otorrhée
o Otorragie
o Paralysie faciale
•
A distance du traumatisme :
o Surdité de transmission avec antécédent traumatique
o Bilan d’expertise.
Hémotympan
TECHNIQUE
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Le scanner cérébral avec reconstructions en coupes fine en
fenêtres osseuses sur le rocher est insuffisant et peut passer a
coté de fracture de l’os temporal.
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D’où la nécessité de réaliser un scanner des rochers en filtre
dur en ultra haute résolution sans injection de produit de
contraste.
TECHNIQUE
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Acquisition hélicoïdal de coupes axiales de 0,6 mm d’épaisseur
avec incrémentation de 0,3 mm.
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Constantes d’étude: 120 kV ; 400-450 mAs ( à adapter chez
l’enfant)
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Reconstructions multiplanaires : ce qui permet d’éviter une
position inconfortable et de réduire la dose d’irradiation.
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La fenêtre de lecture doit être large (4000 UH) centrée sur 400
à 800 UH.
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Il faut systématiquement explorer l’encéphale à la recherche de
lésions hémorragiques intracrâniennes, la voute et la base du
crâne ainsi que le massif facial.
CLASSIFICATION
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La nouvelle approche spatiale définit les fractures
du rocher en terme de plan et non de trait ainsi elles
sont classées en fracture oblique, transversale,
longitudinale et mixte.
Les fractures obliques (80 %):
y Plan de fracture horizontal parallèle à l’axe du
rocher avec points d’impact de la région pariétale
et temporale (choc latéral).
y Habituellement extra-labyrinthiques.
y Elles se manifestent essentiellement par des
otorragies et une surdité de transmission. La
surdité peut être mixte, avec atteinte
perceptionnelle par commotion labyrinthique.
Fracture oblique
CLASSIFICATION
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Les fractures transversales (15 à 20 %):
y Plan de fracture sagittal perpendiculaire à l’axe
du rocher par chocs antérieur ou postérieur.
y Se compliquent souvent de lésions intralabyrinthiques irréversibles par ouverture du
catex osseux du labyrinthe.
y La symptomatologie clinique est dominée par la
surdité de perception, les vertiges et la paralysie
faciale pouvant être immédiate et totale par
fracture du canal de Fallope.
Fracture transversale
Les fractures longitudinales pures (3%):
y Plan de fracture est coronal, perpendiculaire à
la surface latérale de l’os temporal.
y Se compliquent dans 88 % des cas de paralysie
faciale immédiate ou secondaire en rapport
avec une atteinte du ganglion géniculé.
Fracture longitudinale
CLASSIFICATIONS
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Les fractures mixtes:
y Tympano-labyrinthiques longitudinales ou transversales, touchant à la
fois l’oreille moyenne et interne.
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Autres types de fractures:
y Plusieurs traits de fractures associés.
y Fractures parcellaires : fracture de l’os tympanal (retrouvée 50 % des
cas), de l’écaille temporale ou de la mastoïde.
y Fractures labyrinthiques microscopiques: elles échappent souvent à
l’exploration tomodensitométrique. Elles sont du ressort de l’IRM et elles
sont classées sous le nom de commotions labyrinthiques
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Le plus important est de décrire avec précision les différents éléments
anatomiques atteints, en particulier les lésions qui engagent le
pronostic fonctionnel.
Association de deux traits de
fracture: oblique et transversal
tympano-labyrinthique
avec
atteinte du tegmen antri (flèche)
Fractures longitudinales
extra-labyrinthiques
Fracture de l’écaille
Fracture de l’os
tympanal
Fracture de l’écaille
+
Fracture de la
mastoïde avec
diastasis
LÉSIONS TRAUMATIQUES DE LA CHAÎNE
OSSICULAIRE
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Accompagnent plus de 25% des fractures du rocher.
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Il s'agit d'une fracture ou luxation ossiculaire.
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L’enclume est l’osselet le plus instable car c’est
l’osselet le plus lourd, faiblement ancré entre le
marteau et l’étrier.
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Les luxations incudo-stapédiennes et incudomalléaires sont les lésions les plus fréquemment
rencontrées (82% et 57 %). Les luxations incudostapédiennes sont sous-estimée car les distensions
ligamentaires échappent à l’exploration radiologique.
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On peut retrouver égalememt: une luxation de
l’enclume; luxation stapédo-vestibulaire; fractures de
l’étrier, de l’enclume, du marteau.
Fracture oblique avec subluxation
uncudo-malléaire: notez le discret
distasis entre la tête du marteau en
avant et le corps de l’enclume en arrière
LÉSIONS ASSOCIÉES
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Dans son analyse du scanner, le radiologue doit s’acharner à
rechercher d’éventuelles lésions associées responsable de
complications post-traumatiques et séquelles:
y Lésion du canal facial.
y Brèches durales.
y Lésions vasculaires.
y Fistule péri-lymphatique.
LÉSION DU CANAL FACIAL
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Elle se manifeste par une paralysie faciale (PF) présente dans 50 % des
fractures du rocher.
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La portion la plus fréquemment atteinte par le trait de fracture est le
ganglion géniculé.
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Lorsque la PF est retardée, incomplète et transitoire : elle est en rapport
avec une compression ou contusion responsable d’un œdème du VII et
reste de bon pronostic.
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Par contre quand la PF est immédiate et sévère : elle est souvent en
rapport avec une section ou déchirure partielle du VII. Le pronostic est plus
sombre et requiert souvent une exploration chirurgicale avec
éventuellement une suture du nerf facial.
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L’IRM est un complément indispensable pour l’étude du nerf facial. Elle met
en évidence un aspect épaissi et un rehaussement de signal après injection
de gadolinium sur le trajet du nerf facial et au niveau du ganglion géniculé.
Elle permet aussi de montrer la présence d’un hématome du ganglion
géniculé dans les fractures longitudinales.
LÉSIONS VASCULAIRES
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Carotide interne: risque de dissection carotidienne et donc d’AVC. Il faut avoir le
reflexe de compléter par un angioscanner des troncs supra-aortiques en cas de
signes neurologiques non expliqués par le traumatisme crânien ou de trait de
fracture irradiant vers le canal carotidien.
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Sinus veineux: leur atteinte peut entraîner une thrombophlébite post-traumatique
retardée.
Fracture
transversale irradiant
au canal carotidien
qui renferme des
bulles
d’air
Fracture longitudinale
irradiant au canal
carotidien
BRÈCHES DURALES
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Cliniquement, elle se présente par une otoliquorrhée ou rhinoliquorrhée
avec grand risque de méningite.
Au début l’ otorragie peut la masquer d’où l’importance de surveiller si elle
s’éclaircit .
Pour les détecter, il faut réaliser un scanner de la base du crâne en haute
résolution et si nécessaire un cisternoscanner.
Fractures à risque :
y Fracture du tegmen tympani.
y Fracture irradiée au toit du sinus sphénoïdal.
FISTULE PÉRI-LYMPHATIQUE
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Il s’agit d’une communication anormale entre l’oreille interne et
l’oreille moyenne.
y Survenant soit par fracture tympano-labyrinthique avec ou
sans pneumolabyrinthe qu’il faut rechercher attentivement
y Soit par traumatisme des fenêtres ovale et ronde qu’il faut
suspecter devant un:
○ Comblement liquidien du sinus tympani (hypotympan).
○ Subluxation stapédienne (impaction de l’étrier dans le
vestibule à travers la fenêtre ovale).
EVOLUTION
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La surdité de transmission : disparaît en moins de 3 semaines si elle est
due à l’hémotympan. Sa persistance peut être due à une perforation
tympanique ou à une atteinte de la chaîne ossiculaire.
€
La surdité de perception: la cophose est définitive. En cas de fistule périlymphatique : l’exploration de l’oreille moyenne confirme la fuite de
périlymphe au niveau de la platine (fracturée) ou du ligament annulaire
(en cas de platine luxée) ou de la fenêtre ronde. Si le scanner est normal:
C’est une indication d’IRM à la recherche d’hémorragie intra-labyrinthique
en hypersignal spontané T1 ou de commotion labyrinthique avec une
prise de contraste du labyrinthe.
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Le vertige : disparait spontanément en deux à trois semaines par
compensation centrale.
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La paralysie faciale secondaire : peut régresser sous corticothérapie mais
si une dénervation de plus de 90 % existe, elle nécessite une exploration
chirurgicale.
POINTS ESSENTIELS
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Les fractures du rocher requièrent des forces élevées et
s’intègrent souvent dans un contexte de traumatisme crânien ou
de poly-traumatisme.
Leur approche diagnostic a bénéficié pleinement de la TDM en
haute résolution qui permet la détection et la classification des
lésions.
La taille minime de certaines structures étudiées ne représente
plus une limite à leur exploration.
L’IRM réalisée en complément du scanner n’est pas performante
pour l’étude des fractures du rocher, mais trouve son indication
en cas de vertige aigu post-traumatique ou de paralysie faciale
immédiate non expliqués par le scanner.
La prise en charge des fractures du rocher nécessite une
coordination multidisciplinaire entre otologistes, radiologues et
neurochirurgiens.
REFERENCES
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Hiroual, Zougarhi, Cherif Idrissi El Ganouni, Essadki, Ousehal,
Tijani Adil, Maliki, Aderdour, Raji. l’apport du scanner dans les
traumatismes du rocher: à propos de 38 cas. Journal de Radiologie
2010; 91:53-8.
Saraiya, Aygun. Temporal bone fractures. American Society
Emergency Radiology 2009, 16:255-65.
Chammakhi-Jemli, Ben Hassine, Ben Khedher et al. Lésions posttraumatiques de l’oreille moyenne : aspects en imagerie. Feuillets
de Radiologie 2007; 47:231-43.
Bodenez, Darrouzet, Rouanet-Larrivière, Barreau, Liguoro, Bebear,
Franco-Vidal. Paralysies faciales après fracture de l’os temporal.
Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 2006; 123: 9-16.
Alkilic-Genauzeau, Guichard, Guilloux et al. Étude de l’oreille
moyenne : intérêt des reconstructions multiplanaires en
tomodensitométrie spiralée. J Neuroradiol 2001 ; 28 : 183-95.
QCM
€
Les fractures du rocher:
A.
Sont souvent secondaires à des AVP.
B.
Sont souvent bilatérales.
C.
Surviennent rarement chez le sujet jeune.
D.
Sont explorées au mieux par l’IRM.
€
Les fractures obliques:
A. Sont les plus rares.
B. Sont secondaires à des chocs latéraux.
C. Le Plan de ses fractures est perpendiculaire à l’axe du rocher
D. Sont habituellement extra-labyrinthiques.
€
La paralysie faciale:
A. Quant est elle immédiate, elle est de bon pronostic.
B. Quant elle est secondaire, elle est péjorative.
C. Peut nécessiter un complément IRM.
REPONSES
€
Les fractures du rocher:
A.
Vrai .
B.
Faux .
C.
Faux .
D.
Faux .
€
Les fractures obliques:
A. Faux .
B. Vrai .
C. Faux.
D. Vrai .
€
La paralysie faciale:
A. Faux.
B. Faux.
C. Vrai.