`-) Depuis 30 ans qu`elle existe, la cortisone a fait

Transcription

`-) Depuis 30 ans qu`elle existe, la cortisone a fait
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Depuis 30 ans qu'elle existe,
la cortisone a fait la preuve de
son étonnante efficacité, mais
aussi de ses dangers. Sesindications usuelles sont si vastes, et les médicaments dérivés de la cortisone si répandus, que nul ne peut dire qu'il
ne prendra pas un jour, consciemment ou à son insu, ce
médicament à "double tranchant"
Ce dossier est destiné à savoir
s' en servir, le cas échéant.
a femme enceinte est-elle l'avenir
des rhumatisants? se demandait
Hench, en ces années difficiles
de la dernière guerre. En effet, comme
beaucoup d'autres curieux avant lui;
mais lui était plus futé, ce médecin
avait remarqué que les rhumatisantes
qui attendaient un heureux événement
ne souffraient plus! La grossesse sup. primait
l'ankylose articulaire et les
phénomènes inflammatoires bien connus et leur litanie de souffrance. Grossesse = cholestérol (une hormone sté-
L
roïde) + folliculine (autr~ stéroïde)
=
anti-inflammatoire? posa notre chercheur .
Le Dr Hench avait aussi observé que
les rhumatisants qui avaient une jaunisse semblaient, le temps de leur
maladie de foie, guéris de leurs rhumatismes ! Or, jaunisse = bile = cholestérol (stéroïde) et sels biliaires (stéroïdes, toujours). Conclusion: stéroïdes
et rhumatismes paraissaient, dans la
nature, faire très bon ménage thérapeutique. Pourquoi ne pas copier la
nature? Oui, mais comment?
]»reEOiers essais
Nous voilà en 1949. Le Dr Hench se
souvient qu'un chimiste américain,
Kendall, collectionne comme ça, pour
son plaisir, les hormones stéroïdes. Il
lui demande de lui prêter ses pièces de
musée, dans un but thérapeutique.
Après plusieurs essais infructueux, un
échantillon donne raison au Dr
Hench: en quelques heures, un rhumatisant cobaye paraît/guéri. Ce stéroïde était la cortisone, produite par de
ridicules glandes coiffant les -reins
comme une minuscule calotte. Hench
et Kendall devaient obtenir pour cette
première le Prix Nobel de Médecine
(1950).
.
Les rhumatisants, la polyarthrite
rhumatoïde, les malades auto-immuns, ...
'.
L 'ÎIII/}(/IÎe11l1l 65
0
7
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l't
les asthmatiques et un long cortège de
malades. Tous aussi différents les unes
des autres, allaient gagner la vie, la
survie, le confort de vie ou le goût de
vivre. Seulement...
Seulement, comme tout grand médicament dans notre société productrice
et consommatrice, adoratrice de la
déesse Panacée, la cortisone allait être
dans un premier temps le miracle thérapeutique définitif. La solution finale
à tous les maux de l'humanité.
fis meurent "guéris"
mes et les manifestations cliniques les
plus fortes, la cortisone en effet ne
s'attaque paitoujours aux causes delâ.
maladIe; au contraire, elle en favoriserait plutôt certaines. C'est donc un
puissant anti-inflammatoire.
cule de base. Et ces dérivés, on allait
les utiliser parfois à des doses si massives, si monstrueuses par rapport aux
doses naturelles, que leurs actions biochimiques n'avaient plus rien à voir
avec la nature (1). Ils empêchaient par
Des doses massives
Schéma de sollicitation des glandes
CORTICOSURRÉNALES
Mais ce n'est pas tout: les accidents
qu'on va peu à peu recenser dans le
monde révêleront bientôt les effets
d'un autre effet, qui fera mériter à la
cortisone son surnom de "médicament,
à double tranchant" '
On.savanilT'époque que la molécule
de cortisone ressemble presque parfaitement au cortisol au point de pouvoir
le remplacer. Le cortisol est l'hormone
de la vitalité et de la lutte. Lorsqu'il y a
agression, ou plutôt stimulus, il y a très
rapidement une réponse hornionale
destinée à mobiliser l'organisme contre
le danger. Le froid ou le chaud, la fatigue, une infection microbienne, un
traumatisme physique ou psychique,
'
On l'utilisera pour presque tout,
-
puisqu'elle "guérissait" tout. Tels ces
malades atteints de pneumonie à pneumocoques traités au début des années
50 par Finland.
Là aussi, le miracle cortisonique
semble se réaliser: en quelques heures,
plus de fièvre, plus de malaise, de prostration, de douleurs thoraciques ni de
quintes de toux. Les ressuscités se sentent si bien qu'il veulent quitter l'hôpital. Or, les images radio ne sont pas du
tout aussi optimistes, et montrent au
contraire une extension foudroyante
de la maladie. D'ailleurs, certains
malades mourront rapidement bien
qu'apparemment guéris.
Médicament symptomatique
par
excellence, car elle gomme les symptô-
un choc moral
-
agréable ou non
-
vont agir sur nos minuscules glandes
par une succession -de mécanismes qui
vont de l'hypothalamus aux glandes.
Or, on avait obtenu dès 1953, de
nombreux dérivés de la cortisone,
appelés corticoïdes ou cortisoniques,
beaucoup plus puissants que la molé-
.
CORTEXCÉRÉBRAL
1
HYPOPHYSE ANTÉRiEURE
11'g
"
-i
'"
(ACTH)
...
1i
HYPOUS
GLUCOCO~COïDES
(C<>r1isol)
l
~
ANDROGÈNES
MINÉRALOCORTlCOÏDES
(AJduslérone)
exemple tous les agents de défense du
territoire d'intervenir, allant même
jusqu'à
freiner leur fabrication,
comme pour les anticorps. Cet effet
immuno-dépresseur allait se révêler à
la fois très utile et très dangereu,"'{
(infections graves, septicémies...).
Utilisations abusives
Médicament de la survie (life saving,
disent les Anglais), les corticoïdes peuvent être et sont encore trop souvent le
médicament qui donne la mort. Cela
devient rare, car on a recensé maintenant tous ses effets secondaires. Mais
on aura compris qu'utiliser la cortisone, ou plutôt ses dérivés, dans un but
symptomatique ou de confort, c'est
comme si on se servait de la force de
frappe nuc1éaired~ns des comh8t<; cil"
rue.
La cortisone a même tenté quelques
escrocs, qui ont vu tout le parti... et le
fric qu'on pouvait tirer de cette substance "miraculeuse'.'., Ainsi, ce faux'
guérisseur qui propôsait un vaccin contre le coryza (rhume des foins). Cette
8
L'impatient n" 65
-
.
petite merveille dissimulait en fait de la
cortisone. Un comble pour un "vaccin", car celui-ci ne pouvait que créer
d'autres ennuis à long terme. Les pommades ou crèmes "miraculeuses" ont
connu leur vogue. H~las, les corticoïdes créant, entre autres, surh peau et
les muqueuses, le désert immunitaire
(ils stoppent l'arrivée sur le site inflammatoire des globules blancs), c'est
ensuite souvent une flambée nouvelle
du problème de peau, et en plus des
surinfections possibles et coriaces.
Le Grand Prix de la stupidité cortisonique a peut-être été atteint par les
cyclistes professionnels, qui avaient
fait de la cortisone un dopage. Thévenet, il y a quatre ans, y a laissé sa carrière : la cortisone fait fondre les mus. cles, et un sportif sans muscles...
La corticophobie
En médecine officielle aussi, on a
commis en toute bonne foi (?) les
mêmes erreurs, mais sur de larges
L'impatient n 65
0
échelles. Au début, l'emploi inconsidéré et quasi délirant de la cortisone a
causé tant de dégats, tant de maladies
iatrogènes et de morts douteuses, que
tout le monde, malades compris, se mit
dans les années 60 à en avoir peur.
Cette pério<;le de prudence excessive
envers la cortisone, ou "corticophobie" est encore tenace, surtout chez les
médecins mal informés, non recyclés et
pusillanimes. Certains homéopathes en
ont fait leur loup-garou allopathique,
confondant excès et indications.
Paradoxalement, cette crainte de la
cortisone a été et est encore presque
aussi dangereuse que son utilisation à
tout va, laquelle se voit encore pourtant. Aujourd'hui, après les avoir exagérés, on a en principe tendance à
situer les dangers des corticoïdes à une
plus juste place. Certains vont même
jusqu'à les nier, parlant plutôt de prédisposition individuelle aux effets
secondaires des cortisoniques !...
Comme on le voit, la cortisone a
tourné la tête à beaucoup. A qui se
9
fier, dira-t-on? D'autant qu'il y a
d'autres
problèmes non résolus,
comme la prolifération de dérivés puissants, comme celui des mélanges plus
ou moins occultes dans les préparations pharmaceutiques, et comme celui
de la corticothérapie locale, et si on ne
se méfie pas, leurs effets généraux peu- vent êtI"e_c~tastrc)phiques.
Gérard Briche
(1) Le corps se démobilise donc quand il est
agressé? Eh bien oui, car l'homme est par
nature un animal très peureux. il a appris à réagir passivement (fuite, stockàge de réserves...)
plütôt que pàl l'attaqüe. Ce li1écanisme d" ia
réponse-stress est d'ailleurs bien connu grâce aux
travaux de Hans Selye.
Tout se passe aujourd'hui, dans l'histoire de
l'évolution humaine, comme si, devant un risque
infectieux, nous réagissions par un archaïque
réflexe de conservation primaire,' et par une
démobilisation de nos défenses intérieures. C'est
ce qu'on appelle un bel exemple d'inadaptation ...
phylogénétique.
",.
VO;1~IQI(,<
lement un nouveau paroxysme encore
plus fort. Au long cours, la cortisone
peut aggraver les destructions articulaires dans l'arthrite goutteuse.
Effets secondaires et accidents. Les
rhumatologues connaissent tous les
effets secondaireshabituels de la corticothérapie générale: vulnérabilitéaux
infections, ostéoropose, fonte des
muscles, atrophies cutanées, ulcères,
perforations gastro-intestinales, obésité, adiposité, diabète, hypertension
artérielle, retards de croissance pour
les enfants, insuffisancesurrénalienne,
troubles psychiques,
nerveux,
sexuels... Non parce qu'ils héritent de
toutes ces maladies iatrogènes (elles
vont rejoindre normalement leurs spécialités respectives), mais parce que,
grands utilisateurs des dérivés de la
cortisone, ils y sont attentifs... en principe.
Mesurerleseffets
secondaires
Même s'ils ont mis le temps, les rhumatologues savent aussi que leurs infiltrations et injections de corticoïdes à
effet retard ou concentré dans les muscles ou les articulations présentent des
>l
risques car leurs effets dans le temps
sont imprévu1:. Le::;~crtic0rdc;; lûcâ.i.lX
Guidepratique
dela cortisone
nti-inflammatoire, et antiphlogistique,
immunodépressive, anti-allergique,
antl-œdémateuse, anti-choc parfois,
tellessont les qualités incontestablesde
la cortisone. Elle occupe donc un vaste
champ de la thérapeutique médicale,
qui affectionne en outre tout ce qui est
anti-symptômes.
Il serait trop long d'énumérer toutes
les maladies habituellement traitées
(hélas, parfois) par les corticoïdes de
synthèse. Beaucoup de ces indications
sont indiscutables. D'autres, beaucoup
moins. Essayons d'y voir clair.
Il Rhumatoloaie. C'est la spécialité
qui utilise le plus les corticoïdes. Le
rhumatisme articulaire aigü, le rhumatisme post-angineux, les polyarthrites
des collagénoses (lupus, sclérodermie,
péri artérite noueuse, dermato-
A
myosite...), le pseudo-polyarthrite
rhi-
zomélique, sont les maladies où il est
bien admis que les gains de la cortisone
valent largement les risques courus.
Les rhumatologues l'utilisent parfois
dans un seul but de confort dans une
infinité de petites misères articulaires,
ligamentairesetc.
Savoir l'utiliser
Ainsi, il est des indications qui ne
font pas l'unanimité: la polyarthrite
rhumatoïde (surtout si il y a amylose
secondaire),la spondylarthrite ankylosante, le rhumatisme psoriasique, les
atteintes osseuses, lumbagos, sciatiques et autres périarthrites de l'épaule
très douloureuses, entorses ou élongations.
Une contre-indication: la crise de
goutte. Pas par inefficacité, au contraire : les corticoïdesy font merveille.
Mais. l'arrêt du traitement, c'est fata10
,1
utilisés (Hexatrione, Diprostène,
Dilar, Dépomédrol...) peuvent devenir
des corticothérapies générales déguisées. Deux infiltrations par mois suffisent à provoquer un "visage lunaire"
(Cushing).
Nous connaissons bien, à L'Impatient, le cas de cette femme âgée
aujourd'hui de 75 ans, qui a subi pendant quatre ans (de 64 à 67, à la fin de
la période "faste", par conséquent)
des infiltrations dans une épaule après
un accident: complètementdécalcifiée
maintenant, elle a fait plus de trente
fractures (visage,membres, vertèbres,
etc.). Son squelette est fragile comme
du verre, car ses os sont poreux et
transparents à la radio.
n y a aussi d'autres risques (plus
rares) : des infiltrations locales dans la
tête, le cou, sont susceptiblesd'entraîner des cécités,des pertes de vision, des
lésions du nerf optique.
La durée du traitement
Lesrhumatologuesdisent qu'en dessous d~ 10 lng (de Predpjsone ou équivalent), il n'y a pratiquement aucun
risque. Mais nous sommes en 1983,
soit à moins de trente ans du début de
Père Cortisone. Combien d'années de
recul faudrait-il p()ur/ pouvoir être
L 'iII/pu/hm/"" 6J
le malade lui-même. C'est suicidaire.
Ou il faut des corticoïdes, et alors il
faut être prudent. Ou il n'en faut pas
vraiment, et il y a d'auires antiinflammatoires non stéroïdiens (voir
aussi encadré "conduite à tenir en cas
de corticothérapie").
Il Pneumologie. Les pneumOlogues
UtI'lisent les dérivés de la cortisone par "
voie générale ou en aérosols dans
l'asthme.(crise, état de mal, traitement
de fond). L'effet anti-inflammatoire
est recherché, mais aussi l'effet anti- ,
allergique, avec succès souvent.
,
Pouvoir comparé
dcs corticoïdes
(basc) 1,0
30
0,8
30
10
5
5
10
4
4
5
Bctaméthasonc
Cortisonc
Dcxaméthasonc*
Fluprcdnisolonc
Mcprcdnisonc
Mcthylprcdnisolonc
Paraméthasonc*
Prcdnisonc
Prcdnisolonc
Triarncinolonc*
""
"~U~;,"",
,,"""
Mais plus que les doses, .c'est la
durée du traitement qui est le facteur le
plus dangereux. Et puis aussi... les
.médecins.
,~
"Ce sont les généralistes,
et surtout
les vieux praticiens, qui font des blagues", disent les spécialistes à l'unanimité. Exemple: certains vieux médecins ne font pas la différence entre les
formes retard et les autres (!). Ou bien,
ils prennent en charge un rhumatisant
et lui prescrivent allègrement des corticoïdes. Au bout de plusieurs mois, le
malade, peu satisfait et patraque, consulte un rhumatologue. Et l'on s'aperçoit - avec du mal - qu'il s'agit
d'une polyarthrite non diagnostiquée,
rendue difficile à reconnaître à cause
du traitement à la cortisone. .
En outre, la corticothérapie du généraliste s'est faite en dents de scie, faute
d'information sur le maniement des
cortisoniques et d'un peu d'autorité.
Résultats fréquents: la maladie s'est
fortement aggravée, sans bruit c'est-àdire sans manifestations, avec parfois
des poussées viscérales mettant la vie
en jeu! Tout ça parce qu'on prend
encore la cortisone pour un simple
cache-misère, alors qu'il s'agit d'un
médicament majeur. Il faut dire aussi,
avec un cynisme réaliste, que l'efficacité immédiate des corticoïdes renforce
le prestige du médecin qui les emploie.
Et on dirait parfois que certains malaL 'ÙII/ilIlielll Il'' 65
Informerle malade
20,0 mg
0,6
25,0
0,75
1,5
4,0
4,0
2,0
5,0
5,0
4,0
mg
mg
mg
mg
mg
mg
mg
mg
mg
mg
";
aussi affirmatif? Et qui, en France,
s'intéresse à ces effets à très long
terme?
)
,
des sont plus attachés au prestige de
leur "docteur" qu~à leur propre existence, "Si l'on interdisait d'utiliser les
corticoïdes dans un but symptomatique, ça règlerait beaucoup lesprescriptions abusives", m'a dit l'un de ces
spécialistes si prompts à voir la paille
dans l'œil du voisin.
Ces rhumatos connaissent bien, malgré tout, les conséquences osseuses de
l'ostéoporose, mais aussi des atrophies
musculaires amenant des relâchements
articulaires.
'
Le principe de l'économie
Parfois, ils découvrent des ostéonécroses de la tête du fémur, redoutables car les prothèses ont du mal à
tenir, et c'est souvent la chaise roulante, II s'agit presque toujours de corticothérapies très longues, avec des
dérivés puissants. C'est pourquoi,
pour la voie générale, ils n'utilisent
qu'un seul corticoïde: la prednisone
(ou prednisolone) qui, à leur avis,
assure le maximum de pouvoir thérapeutique pour un minimum d'effets
secondaires.
"Pourquoi,
disent-ils
vouloir doubler, tripler, l'effet antiinflammatoire (avec décuplement des
effets indésirables) alors qu'on peut
doubler, tripler les doses de la prednisone ? Presque tous les autres dérivés
sont superflus et dangereux".
Ils ont un autre principe, celui de
l'économie: "mettre toujours en route
des corticothérapies les plus faibles et
les plus constantes". Donc, jamais de
traitements en dents de scie, menés par
11
Les inconvénients sont là aussi nombreux. Certains asthmatiques ont ainsi
hérité d'asthmes sévères à cause de corticothérapies mal conduites ou arrêtées
brutalement, alors qu'ils ne souffraient au départ que d'une difficulté
respiratoire traînante. Beaucoup de ces
asthmatiques,
enchantés
de leur
"pschitt-pschitt" quasi miraculeux au
fond de la gorge, s'y sont carrément
abonnés. On a même parIé de "drogués à la cortisone", Une drogue difficile à faire passer. Maîs avaÏt-on honnêtement informé ces asthmatiques
que ce ~ment
utile momentané- \;
mçnt, ne devait pas être continué indé- {1
.ITlliment ?
.. Ainsi, avec les aérosols aux corticoïdes, on a déjà vu des bronchites surajoutées, des sinusites, des expectorations diverses, mais aussi des herpès
œsophagiens, des cas de candidose
dans la bouche. Normal, si l'on peut
dire: la cortisone empêche les globules
blancs,
les macrophages
et les
lymphocytes d'arriver à l'endroit de
l'inflammation (d'où la désinflammation). Seulement, la voie est alors libre
pour les germes, nullement gênés par la
';~'Z.'5:;c~,HÎSTO~!VRAIE
:~Qi'ett~ jeune feÎnme; a1longée sur son
f.~klit\(:l'l1ôpitaI;lisàit.~;'Nous
Deux".
Soéventrèrebondi
indiquait une grossesse.à si)ll terme." ,
"COmmeje m:enquérais de la date pré; vue pour)'heureux, événement, elle me
lança des,. yeuX exorbités: elle était
dypgis troi§ semaines sous cprtiSOll'::
,
,
Sffi{s;quiw;r,;ion lit. " 'i
'é!-s('nIie'ne?lù(avaitdit
qu'il fallait
è'seUèye. (Explication du gros ven!!i~()p~;,~xaHtj~f~tJO)1dre ses
f"~~I~;ab9°1p1!1ale ne. reteimtéSthr~i,distçhdus par des
~mr~tdusàta'bôulimie~donisone )~~~'i0;;{"i;";);;"
.".
-
cortisone, au contraire! Et comme ils
pullulent déjà dans tous les orifices du
visage, ils n'ont alors plus grand'chose
à faire pour parvenir à leurs fins!
rénales, et surtout dans les transplantatIOns d'organes (reins, surtout), pour
faire "prendre" la greffe. Pour cela, il
faut des doses élevées. Doses élevées et
longues durées: cela n'est pas du tout
de bon augure! Mais il faut bien "casser" le système de défense de l'organisme, qui rejette la greffe. En France,
au moins, on préfère souvent risquer
un rejet plutôt que risquer la vie des
transplantés.
Même dans lesaérosols
\/
;.
~
n
«Un organe arrosé régulièrement
aux corticoiâes est une passoire infectieuse", m'a dit un pédiatre spécialisé
dans l'asthme... Lequel; en 17 ans,
s'est passé presque complètement des
corticoïdes. Comme quoi, c'est possible...
Les dérivés de la cortisone sont toujours potentiellement
dangereux;
Corticothérapies
abusives
Les spécialistes du rein connaissent
par conséquent les gros dégâts des
«corticothérapies au long cours et fortes doses". Tel ce néphrologue également chercheur en immunologie, qui
avoue sans ambiguïté que «la cortisone bousille les vaisseaux sanguins".
Ainsi, on se demande aujourd'hui si
les risques vasculaires ne sont pas augmentés vingt ans après une corticothérapie par hypertension artérielle. Mais
aucune étude n'est venue prouver ce
fait, à cause de la difficulté de suivre
les gens au bout de vingt ans.
même lorsque leur mode d'administration paraît anodin. Qui sait qu'avec de
"simples" aérosols on peut avoir des
effets généraux, comme l'inhibition de
l'axe hypothalam us-hypophysesurrénales? On pourrait presque dire
que plus les corticoïdes sont cachés, et
plus leurs dangers sont grands, parce
que négligés ou méconnus.
III Néphrologie. On se sert utilement
des corticoïdes dans certaines maladies
Des corticothérapies abusives? Il Y
a en a, tel ce syndrome de Raynaud
isolé traité par 20 mg de prednisone,
alors qu'il s'agit de doigts qui bianchissent au froid! Comme si on opérait
des cors aux pieds sous anesthésie
générale.. .
iii Flashes cortisoniques.
Certains
népIvologues ont introduit en France
les méga-doses de corticoïdes (ou
"flashes"), chers aux Anglo-saxons.
Comme c'est un peu la mode, autant
en parler.
Il s'agit de lancer dans les veines, en
un temps très court (quelques
minutes), des doses énormes de corticoïdes concentrés, quelque chose
comme l'équivalent en cinq minutes de
un mois ou deux de corticothérapie à
0,5 mg/kg par jour. On les utilise en
principe dans les lupus (quand la vie
est en jeu), les chocs anaphylactiques,
les vascularites allergiques, les rejets
aigus d'organes greffés. Bien sûr, là
aussi on a tendance à élargir les indications. Les résultats ne sont pas du tout
assurés. Quant aux effets secondaires,
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L'impatient
n 0 65
LA PETITE:
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'-Ii t?/r,<JNOE:
UJfi rl.JOlVé...
fi/smillE
ils sont relativement atténués, compte
tenu des doses colossales. Mais pas
inexistants. Dans une étude anglaise
(50 sujets très atteints), on a relevé
56 11/0
d'effets secondaires avec les flashes cortisoniques, dot 16 % d'effets
sérieux: une gangrène menaçant la
vie, deux cataractes et divers troubles
digestifs et psychiques importants.
Dans une autre étude (16 lupus) : un
décès, une perforation intestinale, un
kyste pulmonaire, une hypothermie
profonde, et d'autres accidents tout de
même moins graves.
1
~
'Œ'
Ii
Médicamentsde survie
...,
Des flashes répétés sont parfois responsables d'ostéo-nécroses de la tête
fémorale. Au total, un bilan plutôt
lourd... Mais il n'y a alors parfois rien
d'autre à faire. Devant le danger de
mort, on prend un autre risque... et ça
marche suffisamment de fois pour que
la cortisone mérite son surnom de
"médicament de la survie".
Il Ophtalmologie. On utilise les corticoïdes par voie générale ou voie locale
(en collyres, pommades, gouttes) pour
diverses complications oculaires. Leur
maniement est très acrobatique, l'œil
étant un objet d'orfèvrerie. En effet,
les risques de la corticothérapie sont le
glaucome, la cataracte, l'œdème papillaire, et j'en passe!
Des contre-indications
absolues:
l'herpès, le zona, les kératites. Or, les
ophtalmo utilisent les corticoïdes après
des kératites virales, dans les atteintes
cornéennes des herpès, les conjonctivites etc. C'est-à-dire en jouant avec le
feu, et souvent dans un but de confort.
Il est vrai qu'une vision brouillée, des
démangeaisons oculaires, c'est difficile
à supporter, et c'est fréquent chez les
plus de 60 ans.
contenus dans les collyres, les pommades oculaires? Il y en a sûrement, mais
personne ne les comptabilise. Elles
seraient limitées: les pharmaciens ne
délivrant pas ces préparations sans
ordonnance, les gens ne réutiliseraient
que leurs fonds de flacons ou leurs
vieilles ordonnances. Mais les généra-
65
.
Accidents: on en voit rarement,
paraît-il. Pourtant, arroser une gorge
g.u un nez avec des corÜèoïdes ne peut
.être sans conséquences. Qu'on songe
seulement qu'on a rapporté, après une
corticothérapie locale, dans l'oreille
9,ui est théorjquement f~rrp.ée par le ~
(~
~
d.M ~:A~,
,si15i:~ÇORT!COT1{ttt~l!IE
1
"é'~"
Et pourtant... Un "simple" 'collyre
contenant des corticoïdes peutaggraver une cataracte, et l'on ne compte
plus les complications infectieuses de
l'œil après utilisation de collyres apparement inoffensifs et si bienfaisants!
En France, ces collyres se vendent
comme des petits pains: cinq millions
de flacons par an, sur ordonnance!
On trouve des associations avec des
antibiotiques, dans l'espoir de prévenir
une surinfection. Certains pharmacologues trouvent cette association illogique dans la plupart des cas. Les ophtalmo, non.
Des automédications aux corticoïdes
0
tient)
.
Attentionaux collyres
L 'ÏilljJllIÎentfi
listes n'auraient-ils par la main généreuse ?
1111
Oto-Rhino-Laryngologie. (O.R.L.)
Par voie générale, les dérivés de la cortisone sont employés pour des affections précises: phlegmons amygdaliens, angines graves, otites séreuses, à
répétition (?), laryngites, pour de courtes durées (dix jours maxi, à 30-40 mg
de prednisone). Plus longtemps pour
des paralysies faciales, des surdités
brusques.
Par voie locale (gargarismes, pulvérisations), on utilise les associations
avec les antibiotiques (dont l'efficacité
n'est toujours pas prouvée, rappellent
les spécialistes anglais !), dans les phénomènes inflammatoires, pour dégager les muqueuses d'un nez encombré
(voir à ce sujet le n° 63 de L'Impa-
13
.. -"'
,',
...;>.~"."'~'.ct1A
.,-
/"
tympan, des mastoïdites. Alors, prudence !
Quatre classes d'activité
Il Dermatologie. Les dermatologues
ont à leur disposition une profusion de
corticoïdes locaux à étaler, appliquer,
frictionner, déposer sur la peau. Mais
si les eczémas constitutionnels, les cicatrices hypertrophiques, les lichenifications sont de bonnes indications, il y a
aussi le long cortège des petits ennuis
de peau, régal des corticoïdes locaux
(C.L.), plutôt pléthoriques, puiqu'on
en recensait quelque 150 il y a deux
ans. Quant on sait que l'enseignement
des dermatologues n'est pas fait sérieusement (ne parlons pas des généralistes !), on peut imaginer les dégâts en
chaîne provoqués par une utilisation
inconsidérée des C.L. Les problèmes
cutanés sont suffisamment complexes
et délicats pour qu'on vienne le moins
possible y semer la zizanie avec la cortisone.
Il y a quatre classes d'activité antiinflammatoire chez les C.L. Les premiers sont peu actifs, comme la dexaméthasone
(Décalibour,
Pimafucort...) ; d'autres puissants (classe III),
comme l'amcinonide (Penticort), ou
désoximéthasone (Topicorte). Ceux de
la classe IV sont carrément dangereux : halcinonide (Dermoval) et propionate de clobétasol. Avec Dermoval,
on a déjà vu des syndromes cushingoïdes, ce qui démontre la perméabilité de
la peau et la puissance de ce glucocorticoïde.
Un à 10 070des C.L. passent dans la
circulation générale, qu'il s'agisse des
crèmes (très utilisées), des pommades
(grand pouvoir de pénétration), des
lotions alcooliques (réservées aux
régions pileuses), ou des gels (efficacité
très douteuse). La peau des enfants est
encore plus perméable que celle des
adultes.
Irremplaçablesdans certains cas
Au plan local, les ennuis sont presque aussi fréquents que les succès thérapeutiques, lesquels ne durent souvent que l'espace
de la cortisone.
Atrophie dermique, télangiectasies
(atteintes vasculaires), vergetures, purpura, surinfection mycosiques ou virales (herpès...), retards de cicatrisation,
troubles de la pigmentation, complications oculaires, tels sont les effets
secondaires fréquents de la corticothérapie locale.
Par voie générale, les corticoïdes ont
des indications paradoxales, comme
dans le zona (comme anti-douleurs,
--
...::.
Le IIlcdet"i1ldui! .I([ruir wnaire
lU/'lqll'c!!e l '([ri.,.e iildiljJel/lah!c.
la brûler pour ses nombreux ennuis?
Ni l'un ni l'autre, bien ~ûr.
après l'éruption), pourtant dû à un
Il faut, en somme, la connaître. Et
virus, alors que la cortisone réduit les
bien. Il faut aussi savoir s'en servir (car
défenses contre les virus. Et dans des
ce il' est pas elle qu'il faut incriminer,
cas gravissimes. Ainsi, pour le pemphimais son utilisation). Et il faut surtout
gus, maladie où le corps secrète des
savoir la "consommer".
anticorps contre sa propre peau.
Ce dossier est trop petit pour ce
Le pemphigus est d'ailleurs une
grand et méchant médicament qu'est la
bonne illustration de la cortisone
cortisone. Ii compone ùes lacune:>. Ii
comme médicament irremplaçable
met peut-être l'accent plus sur les
dans les cas désespérés. Elle est capable
inconvénients de la cortisone que sur
de tuer, mais plus souvent quand
son réel intérêt. l'espère cependant
même de sauver des condamnés à
qu'on aura retenu que, comme tous les
mort. Avant les corticoïdes, la mortagrands outils qui abattent du boulot en
lité dans le pemphigus était de 100 070. un temps record, les corticoïdes sont
Maintenant, on en sauve 70 070,bien
des outils dangereux à manier. Mais
que les malheureux n'aient plus de
s'en 'prner' par principe serait stupide.
peau, ce qui veut dire des risques énorEn avoir'seulement peur, c'est infanmes d'infections massives. Donc 30 %
tile. La peur, là comme ailleurs, est
meurent quand même, tués par les conpeut-être la pire des choses.
séquences de la cortisone. Mais parce
Pour expliciter ce point capital pour
que la cortisone les avait préalableles futurs "clients" obligés de la cortiment tirés d'affaire, en les faisant sursone (et ce peut être vous, un jour),
vivre.
donnons la parole à un dermatologue
Mieux connaître la cortisone
qui connaît bien la question: "Les
Voilà tout ce dont est capable cette
gens qui ont compris les fondements
fameuse cortisone. Faut-il lui dresser
du traitement à la cortisone, ses effets
un temple pour ses victoires? Faut-il
positifs comme ses effets fâcheux " les
gens qui ont compris quels étaient les
........
effets secondaires " les gens qui les ont
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acceptés en toute connaissance de
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mode de vie sera alors différent, leur
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attitude aussi, et qu'ils se battront contre ses effets secondaires. Parce qu'ils
les auront acceptés, ils seïont i7iié:UXà
même de contrebalancer ses méfaits..
Gérard Brirhe
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(Dossier réalisé grâce au. concours des Dr
Avouac, Battisteli, Bish; Chièze, Escande, Lesavre, Revuz, Roujeau, Scart, Soubrié, et de quelques autres).
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