Restaurations

Transcription

Restaurations
Vie des collections
Restaurations
Antiquités orientales
Les programmes de conservation préventive et de restauration des œuvres exposées
et de celles conservées en réserve suivent un rythme régulier. En outre, ils s’adaptent
aux besoins des études, publications en cours et projets d’expositions. En 2010 ont
été restaurées plus de cent quarante œuvres. Certaines de ces opérations nécessitent
une collaboration avec le Centre de recherche et de restauration des musées de
France (C2RMF) pour des analyses sur les matériaux. La coopération internationale
porte aussi sur les restaurations d’œuvres (Yémen, Syrie), notamment en Syrie, pour
les objets provenant des anciennes fouilles françaises. Les restaurations vont de pair
avec les recherches sur les objets conservés dans les musées de Damas (sculpture de
pierre de Mari et de Ras Shamra) et d’Alep (ivoires d’Arslan Tash).
B. André-Salvini
 Preventive conservation and restoration programmes are carried out regularly on exhibited
works and on those held in the Museum’s storage. They are also adapted to meet requirements
that may arise for specific study programmes, publications under preparation, and exhibition
projects. In 2010, more than 140 works were restored. These operations are carried out in
collaboration with the C2RMF (Centre for Research and Restoration of the Museums of France),
which performs the material analysis of each artefact in question. International cooperation also
focuses on the restoration of works excavated in Yemen and particularly in Syria, regarding the
objects discovered in early French archaeological excavations. These restorations go hand-in-hand
with research on related objects held in the museums of Damascus (stone and bronze sculptures
from Mari and Ras Shamra), and in Aleppo (Arslan-tash ivories).
176
Restaurations
Remontage de panneaux appartenant à la frise des Archers de Suse
Programme suivi par Agnès Benoit
Restauration : Marie-Christine Nollinger, Sandrine Gaymay et Jeanne-Marie Séton
Depuis une douzaine d’années, le département des Antiquités orientales a entrepris une campagne de remontage de
panneaux de briques indépendants les uns des autres, représentant des archers. Ces derniers ont initialement appartenu
à la plus grande et à la plus célèbre des frises colorées ayant
orné, vers 500 avant J.-C., les murs du palais du roi Darius Ier
à Suse. Connue sous le nom de « frise des Archers », elle se
compose de deux défilés convergents de personnages, tous
de même taille pour respecter la règle d’isocéphalie propre à
l’art perse et presque tous identiques, hormis le sens de leur
marche, vers la droite ou vers la gauche, et les couleurs et broderies de leur robe plissée. Ils formaient une suite homogène
et volontairement monotone, chargée d’incarner la stabilité
d’un empire qui se voulait universel et détaché des contingences individuelles.
À la suite des fouilles menées à Suse dès 1885 par le couple
Marcel et Jeanne Dieulafoy puis, plus tard, par Roland de
Mecquenem, les réserves du musée accueillirent des milliers
de briques éparses plus ou moins complètes retrouvées sur
les différents tells de la capitale perse, provenant de tous les
décors architecturaux qui avaient revêtu les façades et les murs
internes du prestigieux palais.
Pour répondre à des demandes croissantes de prêts concernant les panneaux qui étaient exposés dans les salles du
département et qui ne pouvaient être satisfaites – car il était
impossible de désinsérer des murs des œuvres de faible épaisseur installées à grand-peine qui auraient laissé la maçonnerie
à nu –, il fut décidé d’exploiter le fonds de briques en réserve,
avec comme seule restriction à ce remontage de conserver
dans les panneaux à venir un pourcentage d’éléments originaux supérieur à 50 %, mais sans être certain d’atteindre ce
chiffre. En effet, de très nombreuses briques, rangées sur les
étagères par thèmes décoratifs, portaient un motif de manche
de lance, mais aurait-on suffisamment de carquois, d’extrémités d’arc à tête de canard, de chaussures en cuir à lacets, de
galons de robes pour atteindre l’objectif fixé ? Avant même de
commencer, on savait qu’il n’y avait plus aucune brique originale correspondant au milieu du visage des Archers. Cette
partie devrait donc être restituée. Mais la bonne surprise fut de
trouver suffisamment de briques correspondant à un troisième
décor de robe, celui de fleurs inscrites dans un losange, non
représenté dans les salles du département, où les robes des
archers sont brodées soit de rosaces sur un fond jaune, soit de
petites maquettes de forteresses sur un fond blanc.
Il a d’abord fallu trier les briques, grâce à des patrons de papier qui permettaient de repérer l’emplacement de chaque élément – puisque les assises, au nombre de vingt et un, avaient
été numérotées, de même que les briques qui les composaient
(deux briques complètes ou une brique centrale complète accostée de deux moitiés). Ensuite, il fallut nettoyer les briques
retenues, les consolider au paralloïd, faire des empreintes des
éléments manquants et les restituer en plâtre, assembler pour
chaque assise le plâtre et les parties originales, assembler les
assises trois par trois en veillant à garder une certaine continuité dans l’avancée des bas-reliefs à chaque niveau, puis, après
la mise en place sur un cadre à étagères, rendre solidaires les
assises des parties métalliques et enfin mettre en couleur les
parties restituées, un ton en dessous pour que la distinction
entre partie originale et partie restituée se fasse sans hésitation. Dernière étape, il fallut combler avec du nid d’abeilles les
manques près du cadre et finir par les joints. La construction
de l’armature, fabriquée par les ateliers du Louvre d’abord en
bois puis en métal, est une étape importante, car les assises de
briques doivent être très cohérentes entre elles au moment des
transports.
Depuis l’année 2000, quatre archers ont été remontés, qui
ont nécessité chacun environ dix-huit mois de travail, exécuté par les mêmes restauratrices (Marie-Christine Nollinger et
Sandrine Gaymay d’abord, auxquelles est venue se joindre
Jeanne-Marie Séton) car il s’agit d’une entreprise complexe qui
ne peut que s’améliorer au fil d’une expérience acquise.
Sb 21965 : Le premier archer est à décor de rosaces et marche
vers la droite (2000).
Sb 23177 : Le second est à décor de forteresses et marche vers
la droite (2003).
Sb 23335 : Le troisième est à décor de fleurs dans un losange
et marche vers la gauche (2007).
Sb 23364 : Le quatrième, qui a fait l’objet d’un généreux mécénat de la part du Cercle des mécènes du Louvre, est à décor
de fleurs dans un losange et marche vers la droite (début 2010).
Choix de briques
Construction des assises par rangée de trois après restitution en plâtre
177
Vie des collections
Mise en place dans le cadre en bois
Vue arrière du cadre métallique
Chacun de ces panneaux mesure à peu près 2 mètres, sur
48 cm de largeur et 22 cm de profondeur (à l’exception du
troisième, dont les briques sont plus larges), et pèse un peu
plus de 200 kg.
Un cinquième archer sera mis en chantier en 2011 et un
sixième est prévu. Mais le fonds restant dans la réserve ne permet plus d’en envisager d’autres. Tous les archers remontés ont
entre 56 % et 64 % de parties originales.
A. Benoit
 In response to increasing demands for loans concerning the Archer
frieze panels, which, in about 500 bc, adorned the walls of King Darius I’s
palace at Suse, the Department decided to use the original bricks in
storage. Indeed, as a result of the excavations carried out in Suse in 1885
by Marcel and Jeanne Dieulafoy, and then, later, by Roland de Mecquenem,
the Museum possesses thousands of assorted bricks in various conditions
found on the tells in the Persian capital, originating from the architectural
decorations on the palace’s facades and interior walls.
Since 2000, four Archer figures have been reassembled. Each one has
required around 18 months of work carried out by a single team of restorers
(Marie-Christine Nollinger and Sandrine Gaymay initially, joined later by
Jeanne-Marie Séton), as the complex operation is facilitated by the
cumulative experience gained over time. Each panel measures around 2
metres by 48 cm wide, and is 22 cm thick (except for the third, whose
bricks are thicker), weighing slightly over 200 kg.
Work on the reassembly of a fifth Archer is being undertaken in 2011,
and there are plans to assemble a sixth panel. However, there are insufficient
bricks remaining to enable another Archer to be assembled. The completed
Archers comprise between 56% and 64% of original elements.
178
Aspect définitif du panneau
Restaurations
Programme de l’Orient méditerranéen dans l’Empire romain (« Trois Antiques »)
Programme suivi par Nicolas Bel
Restauration : Laboratoire Arc’Antiques (Nantes), Atelier de restauration de mosaïques de Saint-Romain-en-Gal,
Isaure d’Avout-Greck, Delphine Bienvenut, Juliette Dupin, Daniel Ibled, Sabine Kessler, Marie-Emmanuelle Meyohas,
Christine Pariselle, Charlotte Rérolle
Dans le cadre du projet de nouvelles salles communes aux trois
départements antiques du Louvre, consacrées aux provinces
orientales de l’Empire romain dans les collections (ouverture
en 2012), un vaste programme de restaurations a été mené,
de 1997 à 2010, par Élisabeth Fontan, Sophie Cluzan (19972007) et Nicolas Bel (2007-2010). Durant cette période, 70 %
des œuvres du département sélectionnées pour ces nouvelles
salles (soit environ deux cents œuvres) ont fait l’objet d’une
intervention (dépoussiérage, nettoyage, consolidation ou modification du support). On peut distinguer six opérations de
grande ampleur :
– l’ensemble des sarcophages en plomb (dix numéros) a fait
l’objet d’une étude globale : l’ampleur du corpus concerné a
permis de pousser la réflexion au-delà d’une restauration traditionnelle (stabilisation du plomb, nettoyage) et de proposer
un mode de montage et de présentation inédit : panneaux de
plomb fixés sur des plaques en nid d’abeilles, assemblés – dans
le cas des sarcophages complets – sur une structure de tubes
d’acier ;
– le lapidaire de la côte levantine d’époque romaine : les sarcophages à guirlandes (deux complets et plusieurs panneaux),
deux lions passants, en ronde bosse, et une sélection de trente
cippes funéraires, provenant de Sidon ;
– l’ensemble des figurines de bronze et des plaquettes en
plomb liées au culte de Jupiter héliopolitain : la restauration
fine des bronzes a mis en évidence et consolidé les placages
d’or, et permis une meilleure lecture de l’iconographie de ces
figurines et des ex-voto en plomb ;
– la sculpture de pierre provenant du tombeau des Rois :
sarcophages (deux complets, trois couvercles), avec dans certains cas une dérestauration des restitutions anciennes, porte,
ossuaire et fragments architecturaux ;
– la collection des Judaïca :
portes de tombeaux, ossuaires, stèles et un ensemble
de moulages pris sur des
tombeaux de Jérusalem au
xixe siècle ;
– l’ensemble du mithraeum
de Sidon, composé de huit
sculptures et d’un bas-relief
en marbre : nettoyage subtil et étude des restaurations
antiques conservées.
Ce programme a également permis de traiter des
séries importantes de figurines de terre cuite, de verres
et d’objets en bronze.
N. Bel
 Given the decision to open a
set of new rooms in 2012 (to be
Statuette de Jupiter héliopolitain,
shared among the Louvre’s three
département des Antiquités orientaantiquities departments) dedicated
les (AO 19534)
to the eastern provinces of the
Roman Empire, a major cycle of restorations was carried out between 1997
and 2010 by Elisabeth Fontan, Sophie Cluzan (1997–2007), and Nicolas
Bel (2007–10). During this period, 70% of the Department’s works selected
for the new rooms (around 200 items in all) were subjected to a detailed
conservation intervention that comprised dust removal, cleaning, and
consolidation or modification of the support.
Sculptures du mithraeum de Sidon, département des Antiquités orientales (AO 22256 à 22263)
179
Vie des collections
Restauration de la statue vouée pour
la vie d’Ikou-Shamagan, roi de Mari
(musée national de Damas, Syrie)
Dans le cadre de sa coopération avec la Direction des antiquités et des musées de Syrie, le département des Antiquités
orientales mène un programme d’études et de restaurations de
pièces emblématiques de sites dont il conserve lui-même des
collections. Au sein de la partie consacrée aux œuvres de Mari,
l’année 2010 a permis d’achever la restauration, à Damas, de
la statue vouée pour la vie du roi Ikou-Shamagan, datant du
milieu du IIIe millénaire avant J.-C. Retrouvée en plusieurs
fragments, cette pièce avait été remontée à l’époque de la découverte ; les yeux et le nez, manquants, avaient été refaits.
Outre l’aspect disgracieux de cette reconstruction et sa relative incohérence avec ce que nous connaissons des visages des
hommes de Mari, la statue dans son ensemble présentait un
aspect heurté dû à la mauvaise qualité de bouchages effectués à
la hâte, du vieillissement de leur matériau et de l’encrassement
de surface résultant d’un manque de protection et de manipulations par le public.
La restauration a été faite par Sabine Kessler et Julie AndréMadjlessi. Deux campagnes ont permis de procéder à l’ensemble des traitements. L’intervention de 2009 s’est focalisée
sur la restauration du corps par nettoyage, reprise et remise à
niveau des bouchages. Outre la lisibilité générale de l’œuvre,
ces opérations ont permis de retrouver certains détails, tels
que des signes d’écriture de l’inscription dorsale, malencontreusement oblitérés par les anciens remontages. L’année
2010 s’est attachée à la délicate question du visage, pour laquelle il a été décidé de procéder en plusieurs étapes : étude
puis dérestauration suivies d’une réflexion sur la question de
l’opportunité d’une nouvelle reconstitution une fois l’état historique retrouvé.
Pour que la décision de dérestaurer le visage puisse être prise,
il fallait pouvoir assurer aux responsables qu’une reconstitution
plus conforme aux standards formels de Mari serait possible au
cas où il serait décidé de ne pas laisser l’œuvre dans l’état qui
était le sien au moment de la découverte. Dans la mesure où ce
chef-d’œuvre est connu sous cette forme dans le monde entier
et sert de référence à de nombreuses études, l’idée de le modifier pouvait en effet sembler effrayante. Néanmoins, après
concertation, il a été décidé de procéder à la dérestauration
du visage, qui a retrouvé son état historique, marqué par les
stigmates du massacre des statues consécutif à la destruction
Statue vouée pour la vie d’Ikou-Shamagan roi de Mari, par Shiboum. état de
Statue vouée pour la vie d’Ikou-Shamagan, roi de Mari. Après reconstruction du
l’œuvre après dérestauration (musée national de Damas)
visage à partir des points d’accroche du nez et des narines retrouvés lors de la
Programme suivi par Sophie Cluzan et Muyassar Fatteh,
conservateur du département des Antiquités orientales
du musée de Damas
Restauration : Sabine Kessler et Julie André-Madjlessi
Statue vouée pour la vie du roi Ikou-Shamagan par Shiboum
Mari, temple de Ninni-zaza, époque des Dynasties archaïques,
vers 2400-2350 avant J.-C.
Albâtre, lapis-lazuli (sourcils). H. 1,12 m
Fouilles André Parrot, 1952
Damas, musée national (m. 2382)
180
dérestauration.
Restaurations
de la ville par les armées d’Akkad, vers 2300 avant J.-C. Par la
suite, le souci de voir l’œuvre reprendre un aspect connu l’a
emporté et le visage a donc été reconstitué. Dans cette voie,
nos travaux ont été guidés par les heureux résultats obtenus
grâce à la dérestauration, qui avait remis au jour les bords des
cavités oculaires, l’accroche supérieure du nez, ainsi que celle
de chacune des narines. Grâce également aux études préalables
par infographie, ces éléments structurants des traits du visage
ont permis d’en proposer une reconstitution au plus près de ce
qu’il a pu avoir été, tout en redonnant à la sculpture une allure
proche de celle qui fut la sienne depuis la découverte.
S. Cluzan
 As part of its ongoing cooperation with the Syrian Department of
Antiquities and Museums, the Louvre Department of Oriental Antiquities is
carrying out a programme of examination and restoration of the Museum’s
more emblematic pieces originating in Syrian sites. Discovered at Mari in
several fragments, the statue dedicated for the life of King Iku-Shamagan
(mid-3rd millennium bc) was reassembled when it was found, and the
missing eyes and nose were reconstructed. Apart from the tasteless
reconstruction and its lack of correspondence with the known faces of the
people of Mari, the statue’s uneven appearance was due to the poor quality
of the filled areas, the ageing of the material used, and the surface dirt.
Sabine Kessler and Julie Madjlessi carried out the restoration work in two
phases, which enabled certain details to be uncovered, such as the traces
of writing of the inscription on the back, unfortunately obliterated by
previous attempts at reassembly. With the aim of restoring a natural
appearance to the work, the face was reconstructed. An attentive cleaning
procedure and corrective restoration has revealed the edges of the ocular
cavities, the upper nasal joint, as well as the joints for each nostril.
Programme de conservation
préventive et de restauration
des tablettes cunéiformes
Programme suivi par Béatrice André-Salvini
Restauration : Anne Liégey et Anne Courcelle,
Béatrice Dubarry-Jallet, Sandrine Gaymay,
Jeanne-Marie Sornay-Setton
Quelque trente tablettes cunéiformes ont été restaurées
selon la méthode mise en place il y a quelques années (voir
« Travaux de recherche »). Le programme respecte les priorités
définies : séries en cours d’étude (notamment les textes protoélamites) ; poursuite du projet de restauration systématique des
tablettes ayant subi des dommages pendant la Seconde Guerre
mondiale par suite de mauvaises conditions de conservation,
puis restaurées de façon provisoire dans les années 1960-1970 : en
2010, les restaurations effectuées ont concerné essentiellement
des tablettes littéraires sumériennes (TCL XV) et l’achèvement de
la correspondance de Hammurabi avec Šamaš-hâsir (TCL VII).
B. André-Salvini
 About 30 cuneiform tablets were restored using a method established
several years ago (see “Research Projects”). The programme respects
certain preset priorities: the series currently being examined (proto-Elamite
texts in particular); a systematic restoration project for the tablets damaged
during World War II and now in poor condition owing to temporary
restoration attempts during the period 1960–70: in 2010, restoration work
carried out by Anne Liégey and Anne Courcelle, Béatrice Dubarry-Jallet,
Sandrine Gaymay, and Jeanne-Marie Sornay-Setton, focused principally on
Sumerian literary tablets (TCL XV), and the completion of Hammurabi’s
correspondence with Šamaš-hasir (TCL VII).
Liste divine sumérienne, département des Antiquités orientales (AO 5376
Liste divine sumérienne, département des Antiquités orientales (AO 5376
[TCL XV, 10]), face
[TCL XV, 10]), revers
181
Vie des collections
Restauration de la statue
de l’intendant de la ville de Mari,
Ebih-il
Programme suivi par Sophie Cluzan
Restauration : Sabine Kessler
Statue d’Ebih-il, intendant de Mari
Mari, temple d’Ishtar, époque des Dynasties archaïques,
vers 2400-2250 avant J.-C.
Albâtre, lapis-lazuli, calcite, bitume. H. 52 cm
Fouilles André Parrot, 1934
Département des Antiquités orientales (AO 17551)
La statue de l’intendant Ebih-il a été restaurée à diverses
reprises depuis sa découverte. Ce sont d’abord les deux morceaux, tête et corps, qui ont été recollés lors de la trouvaille,
alors que des bouchages rendaient à l’œuvre son économie
générale. Dans les années 1960, les deux jambes du personnage, rapportées dans des cavités aménagées sous le jupon,
ont été retirées. En 2010, la restauration entreprise par Sabine
Kessler avait pour objet de vérifier l’état général de la statue et
d’en améliorer la lecture, gênée par l’évolution des anciennes
restaurations. Cette intervention fut également déterminante
pour observer les éléments susceptibles de raconter son histoire depuis sa création.
Un relevé en 3D a été effectué par les ateliers de la Réunion
des musées nationaux pour permettre la confection d’un
moule de l’œuvre, celle-ci ne pouvant supporter le contact
des matériaux nécessaires à la prise directe d’empreinte. Une
reproduction tirée de ce moule a ensuite été déposée en Syrie,
à Mari, au Centre des visiteurs du site, inauguré à l’occasion du
soixante-quinzième anniversaire de la découverte par André
Parrot. En collaboration avec la Direction des antiquités et des
musées de Syrie et la mission archéologique française de Mari,
cette action participe de la coopération qu’entretient le département des Antiquités orientales du Louvre avec les services
patrimoniaux syriens. Un des axes de ces actions est la mise
en valeur des sites archéologiques dont le Louvre conserve des
collections.
S. Cluzan
 The statue of the Superintendent Ebih-il has been restored several
times since its discovery. The 2010 restoration undertaken by Sabine
Kessler aimed to determine the general condition of the statue, and to
improve its legibility, which was hindered by previous interventions.
To this end a 3D scan was performed by the RMN (French national
museums body) to create a mould of the work, as the piece itself was too
frail to make a cast from. A replica made from this mould was then sent to
Mari, in Syria.
Restauration d’un ensemble
d’éléments d’incrustation en nacre
de Mari
Programme suivi par Sophie Cluzan
Restauration : Sabine Kessler et Julie André-Madjlessi
Éléments d’inscrustation en nacre
Mari, temple d’Ishtar, époque des Dynasties archaïques,
vers 2400-2250 avant J.-C.
Nacre
Département des Antiquités orientales (AO 26005)
182
Statue de l’intendant de Mari, Ebih-il, après restauration. Les restaurations
Élément d’incrustation en nacre, fragment de personnage, département des
restent perceptibles sans gêner la lecture de l’œuvre
Antiquités orientales (AO 26005)
Restaurations
De nombreux éléments d’incrustation ont été retrouvés à Mari.
Taillés dans de la nacre, ces petits éléments plats aux détails
incisés étaient assemblés pour représenter différentes scènes.
La collection conservée dans les réserves du département a été
restaurée pour en garantir la conservation, la nacre ayant tendance à se déliter. Les nacres ont été consolidées et certaines
recollées par Sabine Kessler et Julie André-Madjlessi. Dans une
perspective de conservation préventive, un conditionnement
spécial a été conçu : chaque élément est encadré par un carton
neutre, un papier transparent retenant le tout.
S. Cluzan
 Many examples of inlaid work were excavated at Mari, consisting of
small flat elements of mother-of-pearl with incised details, assembled to
compose figurative scenes. The Department’s collection of these items has
undergone a conservative restoration, as this material tends to disintegrate.
The items were therefore consolidated, and some of them were glued in
place by Sabine Kessler and Julie Madjlessi. To ensure their conservation,
each element has been fixed to a neutral card support, and overlaid with
transparent paper.
Campagne de restauration
de la céramique peinte de Suse I
et petites jarres. Deux objectifs ont été poursuivis : restaurer
au mieux les plus beaux exemplaires qui devaient être prêtés,
jusqu’à les démonter et remonter entièrement et commencer à
traiter systématiquement le corpus des coupes pour en assurer la
conservation. Les principales interventions ont été le nettoyage,
la reprise des anciens collages et le collage de fragments épars.
A. Benoit
 A restoration programme for the painted ceramics of Suse I (late 5th
millennium bc) was undertaken in 2009–10 with two goals in mind: to
restore the finest examples intended for loan, and to begin a systematic
treatment of the collection of cups to ensure their conservation. The main
interventions involved cleaning each item, the stabilisation of the previously
glued areas, and the gluing of assorted fragments.
Opération de conservation
préventive sur la collection
d’empreintes antiques
Programme suivi par Françoise Demange
Restauration : Anne Liégey, Amélie Méthivier
Une campagne de restauration de la céramique peinte de Suse I
(fin du Ve millénaire avant J.-C.) a été entreprise en 2009-2010,
à l’occasion de nombreux prêts à des expositions. Le musée du
Louvre est riche d’une collection de plus de mille pièces plus
ou moins complètes, issues des fouilles menées à Suse par des
équipes françaises à partir de la fin du xixe siècle. Les récipients
peuvent se classer en trois formes principales : boisseaux, coupes
Un ensemble de trois cent cinquante scellements et bulles en
argile crue portant des empreintes de cachets ou de sceauxcylindres complète la collection de sceaux. Outre l’intérêt de
leur iconographie, ces scellements, qui servaient à sécuriser les
fermetures de ballots de marchandises ou les portes d’entrepôts, fournissent de précieuses indications sur l’organisation de
la gestion des échanges ; ces œuvres, particulièrement fragiles,
sont très fréquemment consultées par les chercheurs. L’opération de conservation préventive (dépoussiérage, dessalement,
refixage, consolidation) qui a débuté en 2006 s’est terminée en
2010. Elle a aussi consisté en un reconditionnement qui, isolant
chaque empreinte, évite le moindre petit entrechoquement.
F. Demange
Coupe peinte de Suse, époque de Suse I, département des Antiquités orien-
Tablette portant les empreintes d’un sceau-cylindre (défilé de caprinés),
tales (Sb 23389)
département des Antiquités orientales (Sb 1978 bis)
Programme suivi par Agnès Benoit
Restauration : Anne-Sophie Drouet, Sandrine Gaymay,
Jeanne-Marie Sornay-Setton et Fabienne Dall’Ava
183
Vie des collections
 The Department’s collection comprises an ensemble of 350 unfired-clay
fastenings and seals bearing the imprints of stamps or cylinder-seals. Besides
the iconographical interest of these devices—which were used for sealing
bundles of merchandise, or the doors of warehouses—they also provide
precious information on how trade was organised and conducted, and are
therefore frequently consulted by researchers. Such items are particularly
fragile, and preventive conservation work (dust-removal, desalination, fixing,
and consolidation) was carried out from 2006 to 2010, which included the
careful containment of each imprint to protect them from jolts and abrasion.
Restauration d’œuvres des musées
d’Arabie Saoudite, dans le cadre
de l’exposition « Routes d’Arabie »
Programme suivi par Françoise Demange
Restauration : Daniel Ibled, Anne Liégey, Nathalie Bruhière,
Anne Portal, Christine Pariselle, Béatrice Amadei
La Direction des antiquités du royaume d’Arabie Saoudite
nous a confié, dans le cadre de l’exposition « Routes d’Arabie »,
la restauration de trois grands colosses en grès représentant des
souverains du royaume de Lihyân dans le Hijaz (ive siècle avant
J.-C.). Depuis leur découverte très récente, ces statues de près
de 4 mètres de haut étaient restées en l’état. Leur nettoyage
minutieux a mis en évidence une polychromie qui confirme
l’importance de l’influence égyptienne sur l’école de sculpture
du Hijaz. La restauration a aussi permis de restituer à l’une sa
tête et à une autre ses pieds chaussés de sandales.
La restauration de quatre plaques de peintures murales provenant de la cité caravanière de Qaryat al-Faw (iiie siècle avant
J.-C. – iiie siècle après J.-C.) ainsi que le « bichonnage » de deux
cents œuvres antiques ont aussi été menés à bien.
F. Demange
 In the framework of the exhibition “Routes d’Arabie” (Roads of
Arabia), the Kingdom of Saudi Arabia’s Department of Antiquities entrusted
the Department with the restoration of three colossal sandstone statues
representing kings of the Kingdom of Lihyan (Hejaz). This operation
revealed the use of polychrome, confirming the Egyptian influence on the
Hejaz school of sculpture, and enabled the restoration of the head of one
colossus and the feet of another. Four panels of wall paintings from the
caravan city of Qaryat–al Faw were also restored, and the 200 exhibits were
subjected to thorough cleaning.
Restauration d’un support ajouré en
terre cuite (Syrie)
Programme suivi par Élisabeth Fontan
Restauration : Delphine Bienvenut, Christine Pariselle et,
au C2RMF, Noëlle Timbart
Support ajouré
Syrie, IIe millénaire avant J.-C.
Terre cuite. H. 82 cm
Département des Antiquités orientales (AO 20572)
Ce support avait déjà fait l’objet de une ou deux restaurations,
comme en témoigne l’utilisation de deux types d’adhésifs et
d’un mastic. Des décalages dans les collages, des positionnements approximatifs des tessons et des bouchages débordants
ont été constatés, ainsi que de nombreux manques. Après un relevé précis du positionnement de chaque tesson et sa numérotation, l’œuvre a été entièrement démontée à l’aide d’un solvant
préconisé par le C2RMF (non toxique ni pour l’œuvre ni pour
les intervenants). Le nettoyage de tous les tessons et particulièrement des plans de collage a précédé le remontage à blanc, après
quoi le collage a été effectué au moyen d’un adhésif approprié.
Des bouchages ont été effectués pour renforcer la structure ou
améliorer l’esthétique, suivis d’une retouche colorée.
É. Fontan
Statue de Lihyân en cours de restauration au musée du Louvre (2010), univer-
184
sité du Roi-Saoud, musée du département d’Archéologie (140D4)
 This support has been restored several times. It was observed that there
were gluing discrepancies, approximate repositioning of the shards, overfilled
areas, and numerous missing parts. The work was entirely dismantled using a
solvent recommended by the C2RMF (Centre for Research and Restoration of
the Museums of France); the reassembly was carried out with the appropriate
adhesive. Certain parts were filled to reinforce the structure, or to improve the
aesthetic aspect, followed by coloured retouching.
Restaurations
Autres œuvres restaurées en 2010
Outre les opérations portant sur des collections entières ou faisant l’objet d’un programme de conservation préventive ou
de restauration suivi et systématique, des interventions ponctuelles ont eu lieu sur des objets fragiles, devant être exposés
ou prêtés dans le cadre d’une exposition temporaire. Il s’agit
principalement des objets ou des opérations suivants :
– vases en pierre de Tello (fin IVe – début IIIe millénaire avant
J.-C.) : démontage, nettoyage, dessalement, remontage, en
vue d’une nouvelle présentation dans les salles (conservateur :
Françoise Demange ; restauratrice : Christine Pariselle) ;
– verres de Syrie-Palestine : consolidation et restauration de
perles et d’amulettes pour le catalogue raisonné de ArveillerDulong (V.) et Nenna (M.-D.), Les Verres antiques du musée du
Louvre, vol. 3, Paris, Musée du Louvre éditions et Somogy, 2011
(conservateur : Élisabeth Fontan ; restauratrice : Juliette Dupin) ;
– un sarcophage parthe (Sb 23470) : remontage et consolidation (conservateur : Agnès Benoit ; restauratrice : Fabienne
Dall’Ava) ;
– stèle de Tayma (AO 1505) : pour l’exposition « Routes
d’Arabie. Archéologie et histoire du royaume d’Arabie Saoudite » : nettoyage et consolidation (conservateur : Françoise
Demange ; restauratrice : Anne Portal) ;
– sarcophage dit « de la reine Saddan », venant du tombeau
des Rois à Jérusalem (AO 5029), pour l’exposition d’inauguration du musée d’Israël : bouchage d’éclats (conservateur :
Élisabeth Fontan ; restaurateur : Daniel Ibled) ;
– présentation d’un tissu de jarre de Qumran, pour une exposition sur Qumran à la Bibliothèque nationale de France (conservateur : Élisabeth Fontan ; restauratrice : Claire Beugnot) ;
– un bandeau d’or d’Enkomi (AO 18625) pour l’exposition
sur Chypre à Hildesheim (conservateur : Élisabeth Fontan ; restauratrice : Isaure d’Avout-Greck) ;
– études de protection des reliefs du palais de Darius à Suse
en vue des travaux prévus en 2011 pour la construction de
deux escaliers de part et d’autre de la crypte Marengo, lesquels
vont entraîner des nuisances (en particulier des vibrations)
dangereuses pour les œuvres conservées dans les salles proches
du chantier ; certains reliefs en brique seront déposés, d’autres
(frise des Lions, frise des Archers Dieulafoy) demeureront en
place et devront être protégés par un coffrage (conservateurs :
Béatrice André-Salvini, Françoise Demange ; restaurateur :
Daniel Ibled).
B. André-Salvini
Restauration d’un support ajouré, département des Antiquités orientales
(AO 20572)
 Besides operations focusing on entire collections, or forming part of a
programme of preventive conservation or thorough systematic restoration,
certain specific interventions were carried out on particularly fragile objects
due to be exhibited or loaned for temporary exhibitions.
185
Vie des collections
Antiquités égyptiennes
Conformément aux accords passés avec le musée national de Khartoum (Soudan),
qui prêtait près de la moitié des œuvres présentées à l’exposition « Méroé. Un
empire sur le Nil », les restaurations engagées à la fin 2009 et au début 2010 ont
concerné essentiellement ces objets, sur lesquels les interventions allaient du simple
bichonnage à des restaurations, des analyses et études très poussées, pour lesquelles
la collaboration avec le C2RMF a été décisive.
Par ailleurs, les interventions sur les collections du département ont porté comme
chaque année sur les œuvres en cours d’étude, ou destinées à des expositions, ou
encore s’inscrivant dans une politique de conservation-restauration systématique
de certaines séries. C’est ainsi que deux campagnes pluriannuelles de conservation
de tissus et papyrus coptes (dépoussiérage, démontage et conditionnement) ont été
poursuivies. Le C2RMF accueille régulièrement ces travaux et y collabore : vingtdeux œuvres ont été restaurées dans les ateliers de Flore et dix campagnes d’examens
et d’analyses y ont été conduites.
Les deux exemples d’interventions présentés ci-après illustrent les problématiques
et les réponses suggérées par des œuvres en cours d’étude.
G. Andreu-Lanoë
 In accordance with the agreements made with the Sudan National Museum (Khartoum),
which loaned almost half the works displayed in the “Meroë” exhibition, the restorations carried
out at the end of 2009 and the beginning of 2010 mainly related to these exhibits. The interventions
ranged from simple smartening up to in-depth restorations, analyses, and examinations, for which
the collaboration of the C2RMF (Centre for Research and Restoration of the Museums of France)
was essential.
In addition, the interventions on the Department collections focused—as they do each year—on
works currently being examined, those intended for exhibitions, or those that are part of the policy
of systematic conservation and restoration of certain groups. This led to the implementation of two
long-term programmes for the conservation of Coptic fabrics and papyri (dust removal, dismantling,
and packing). The C2RMF regularly hosts and collaborates on these projects: 22 works were
restored in the Flore workshops, where 10 phases of examinations and analyses were conducted.
The two examples of interventions presented here illustrate the problems and the suggested
solutions applied to works that are currently being studied.
186
Restaurations
Le cas de la statue du scribe Khay
Restauration : Sophie Duberson, restauratrice au département des Antiquités égyptiennes
Statue-cube naophore du scribe Khay
Égypte, Nouvel Empire, époque ramesside
Calcaire. 65 cm 5 33 cm 5 36,5 cm
Département des Antiquités égyptiennes (E 136 / A 110)
La conservation-restauration de la statue-cube naophore en
calcaire du scribe Khay présentée dans la salle 28 du département des Antiquités égyptiennes a été entreprise en 2010 à
la demande de Christophe Barbotin, conservateur, avant sa
publication dans le volume 2 du catalogue sur la statuaire du
Nouvel Empire.
Il s’agit d’une statue-cube représentant Khay, scribe administrateur de l’armée à l’époque ramesside, assis, bras croisés,
les jambes repliées devant lui et le corps enveloppé dans un
manteau. Il présente devant lui un naos avec la représentation
du babouin Thot coiffé du disque lunaire.
L’œuvre montrait un état de surface encrassé, au point qu’un
nettoyage devait être envisagé avant sa prise de vue. Le traitement de conservation-restauration effectué a donc eu pour
objectif de rétablir la lisibilité de l’œuvre par un nettoyage modéré, destiné à mettre en valeur le relief sans dénaturer l’objet.
Ce type d’intervention de restauration élémentaire est l’occasion maintes fois répétée d’engager une observation approfondie des œuvres qui, bien qu’entrées dans nos collections
depuis des décennies, ne sont pas techniquement connues
avec précision.
Le retrait de la couche superficielle de salissure, accumulée au
cours d’années de stockage au musée (puisqu’elle recouvrait les
anciens bouchages de restaurations), a été obtenu grâce à une
méthode de nettoyage chimique consistant à appliquer sur la
surface un cataplasme confectionné à base d’eau déminéralisée
et d’argile. La pâte de nettoyage est composée d’un volume de
Méthylcellulose, de deux volumes de pulpe de papier (Arbocel®)
et de trois volumes de sépiolite (argile), additionnés d’eau déminéralisée. Ce procédé, contrôlé et inerte, est adéquat en raison de
la bonne cohésion de l’épiderme de la pierre. Il permet de laisser l’eau suffisamment en contact avec la salissure pour que sa
dissolution se produise, tout en limitant la quantité de liquide
appliquée et par conséquent sa pénétration au sein de la pierre.
L’action du cataplasme doit être ensuite complétée par une action mécanique douce, effectuée à l’aide d’un bâtonnet de coton
humidifié pour éliminer les résidus de salissure, notamment dans
les creux du relief.
Le nettoyage a facilité l’examen structurel de l’œuvre. La
sculpture nous est alors apparue fortement morcelée, fracturation résultant d’une ancienne intervention. Grâce à la fiche
documentaire de l’objet qui en fait mention, nous savions,
sans plus de précision, que la pièce avait été « immergée dans
un bain d’eau pour être nettoyée ». Au cours de cette opération, le monolithe de calcaire s’était brisé en deux blocs principaux et de nombreux fragments secondaires.
Les restaurateurs d’alors ont engagé un travail complexe de
collage et de remontage, en insérant notamment dans l’œuvre
des armatures métalliques. Cette méthode efficace est de nos
jours réservée aux cas les plus lourds, en raison du traumatisme
subi lors de la perforation. Notre travail a consisté à documenter ces interventions en collectant nos observations dans un
rapport de traitement. Nous avons choisi de ne pas procéder à
une dérestauration de la sculpture, en raison des risques qu’aurait fait courir un démontage. Pour l’heure, le montage est sain
et nous jugeons possible de nous fier à la résistance des assemblages, bien que l’absence de renseignements concernant la
nature des matériaux employés nous oblige à rester vigilants
quant au vieillissement de ce bloc restructuré. L’absence de documentation ancienne gêne nos interventions, car la connaissance des matériaux employés est déterminante pour les choix
de traitement (connaissance du mode de vieillissement des adhésifs, corrosion des parties métalliques). Depuis une trentaine
d’années, une part considérable du travail des restaurateurs est
employée à la documentation des interventions.
Parallèlement, la conservation de restitutions anciennes
en plâtre de parties manquantes, révélées par le nettoyage, a
Statue du scribe Khay en cours de restauration
Relevé des altérations
187
Vie des collections
Dans un premier temps, le nez hypothétique restitué en
plâtre du babouin a été enlevé. Nous avons alors découvert un
plan de cassure droit et retaillé, percé en son centre d’un trou
circulaire destiné à accueillir une cheville en bois de soutien.
Ce trou peu compréhensible après l’élimination des ajouts a
été bouché. Renseignés par cette première expérience, nous
avons décidé de conserver la partie refaite du visage de Khay,
car nous avons supposé que la cassure avait subi le même traitement. La conservation de cette « prothèse », motivée principalement par des considérations d’ordre esthétique, nous a
paru justifiée dans la mesure où la réintégration est identifiable
grâce à un matériau et à un traitement différents de ceux de
l’original. Afin de respecter les principes déontologiques attachés à la conservation, cette opération a été largement documentée et est bien entendu réversible.
Cette intervention est une parfaite illustration des opérations de conservation-restauration qui sont entreprises en
interne au sein du département. Elle témoigne de l’intérêt que
présente l’entretien permanent des œuvres. Si la collection se
révèle esthétiquement au gré des restaurations, si sa signification culturelle s’accroît à chaque intervention, sa connaissance s’enrichit également au fil des observations techniques
permises par les examens approfondis des œuvres. Ces observations sont ensuite utilisées lors des manipulations ou bien
collectées pour aboutir à une meilleure connaissance de la
mise en œuvre des œuvres.
S. Duberson
Statue du scribe Khay après restauration
188
donné lieu à de nombreuses discussions, illustrant les choix
de traitement possibles dans le domaine de la restauration des
œuvres d’art.
La sculpture est quasi complète. Pourtant, des parties capitales pour l’uniformité de l’œuvre sont manquantes, comme
l’extrémité du museau du babouin ou une partie du visage de
Khay, comprenant le nez, la partie inférieure de l’œil dextre, le
sillon naso-labial et la lèvre supérieure.
En l’absence de documentation de référence sur la forme des
éléments originaux, on ne peut théoriquement se substituer
à l’artisan et refaire empiriquement un manque qui pourrait
sembler authentique et prêter à confusion.
Toutefois, les œuvres présentées dans les salles du musée
doivent rester lisibles et uniformes pour les visiteurs peu enclins à apprécier un visage mutilé si les plans de cassure sont
retaillés, plans et inesthétiques. Cette question a donc été examinée avec le conservateur pour aboutir à un choix de présentation privilégiant l’unité de la sculpture.
 The intervention on the statue of the scribe Khay was commenced in
2010, on the request of the curator Christophe Barbotin, before its
publication in the catalogue on the statuary of the New Empire (volume 2).
Upon cleaning the surface with a poultice of demineralised water and
clay, and the application of a gentle mechanical treatment with a damp
cotton bud, serious splits came to light. We knew that the monolith had
broken into two main blocks and several fragments during previous
cleaning work. At that time, the restorers had reassembled the statue, and
had inserted metal armatures in the work. We decided not to interfere with
this old restoration.
The conservation of the old plaster reconstructions of the missing parts,
revealed by the cleaning, was the subject of much debate. After a test on
the baboon’s reconstructed nose, we discovered a straight fracture plane
that had been reshaped and pierced in the centre with a circular hole
designed to accommodate a supporting wooden dowel. This hole was
filled in, as it was no longer necessary after the removal of the added parts.
After this informative experiment we decided to leave the reconstructed
part of Khay’s face intact, as we suspected the facial fracture had been
treated in the same way. The conservation of this “prosthesis”, which was
motivated by aesthetic considerations, seems justified because the
reintegrated component can be identified by a material and treatment that
are different to the original ones.
Restaurations
Restauration des vases canopes d’Aâ-Kheperkarê-Senbou
Programme suivi par Hélène Guichard
Examens et analyses au C2RMF : Sandrine Pagès-Camagna, Éric Laval
Restauration au C2RMF : Geneviève Delalande, Céline Saunier, sous la supervision de Noëlle Timbart
Vases canopes d’Aâ-Kheperkarê-Senbou
Égypte, Nouvel Empire, XVIIIe dynastie
Terre cuite polychromée. H. 38,5 cm et 39,6 cm
Département des Antiquités égyptiennes (N 834 a et b)
fondamentale des deux pièces ont été confiées à Geneviève
Delalande et Céline Saunier (restauratrices d’œuvres sculptées).
Les examens et analyses, orientés par l’étude préalable et
menés par Sandrine Pagès-Camagna et Éric Laval au département Recherche du C2RMF (examen sous lumière ultraviolette, diffraction de rayons X, spectrométrie de fluorescence de
rayons X et tests microchimiques), ont livré une étude complète de la couche picturale posée après cuisson (préparation à
base de gypse et de huntite – carbonate double de calcium et
de magnésium – et couche picturale mettant en œuvre les pigments traditionnels de la palette du Nouvel Empire, avec une
mention spéciale pour l’utilisation de sulfure d’arsenic, c’està-dire d’orpiment pour le jaune acide des carnations et des
rayures des perruques). Ils ont permis en outre de préciser la
nature des restaurations et des surpeints modernes, stigmatisés
en particulier par la présence de différents pigments modernes
à base de plomb comme la cérusite (carbonate de plomb).
Après une étude préalable profitablement étayée par les
résultats d’analyse, les deux restauratrices ont élaboré, à la
demande du DAE, un protocole incluant la dérestauration
des interventions modernes. En effet, sous la crasse muséale,
les badigeons modernes, surpeints, renforts de plâtre et résidus de colle, l’aspect authentique et la polychromie originale
des deux vases canopes n’étaient plus lisibles et les Hapi et
Qebehsenouf du musée de Champollion avaient triste figure.
Le traitement s’est déroulé entre août et décembre 2010 dans
les ateliers d’archéologie du C2RMF au pavillon de Flore, sous
la supervision de Noëlle Timbart (conservateur dans la filière
archéologie du département Restauration). Grâce à ces interventions, l’apparence des vases est aujourd’hui considérablement
Dans sa Notice descriptive des Monumens égyptiens du Musée
Charles X publiée en 1827, Champollion le Jeune, conservateur des Antiques du Musée royal du Louvre, signale à l’attention du visiteur, sous les numéros S 35 et S 36 de la salle
funéraire, deux « vases funéraires » en terre cuite peinte, sans
plus de commentaire. Il renvoie néanmoins le lecteur aux
notices D 26 et D 27 de la salle civile, où, dans la section « Statuettes, figurines et amulettes représentant des rois égyptiens »,
figurent ces deux mêmes vases avec la mention « Vases funéraires relatifs à un prêtre du pharaon Thoutmosis Ier, second
roi de la XVIIIe dynastie ». En effet, les deux vases canopes
appartiennent à un personnage nommé Aâ-Kheperkarê-Senbou, premier prêtre du ka de Thoutmôsis Ier, c’est-à-dire prêtre
chargé du culte funéraire de ce pharaon défunt. Des quatre
vases canopes qui contenaient communément les viscères
momifiés d’un individu, il n’en demeure ici que deux : les inscriptions hiéroglyphiques gravées en quatre colonnes sur la
panse des deux objets indiquent notamment qu’ils sont placés
respectivement sous la protection de Hapi (celui des quatre fils
d’Horus qui veillait sur le foie) et de Qebehsenouf (protecteur
des intestins). Les bouchons des deux vases représentent une
tête masculine coiffée d’une perruque enveloppante qui dégage les oreilles.
Exposés au musée Charles X, ces vases avaient ensuite
été remisés en réserve : l’un des deux fut brisé et remonté
à une époque non déterminée ; tombés dans l’oubli, ils
n’étaient plus visibles depuis
plusieurs décennies. Les actuels travaux de recherche
de Sylvie Guichard (ingénieur d’étude au département
des Antiquités égyptiennes)
consacrés à la première collection égyptienne exposée
au Louvre, et qui trouveront
leur aboutissement dans la
réédition prochaine de la
Notice descriptive de Champollion, ont permis de retrouver et d’identifier ces deux
canopes, noircis, poussiéreux
et grossièrement recollé pour
l’un d’eux. À cette occasion,
Vue du dessus de l’un des deux bouchons en cours de
un programme d’étude et de
nettoyage : à gauche, la couche picturale, refixée et
restauration a été lancé par le
débarrassée de son encrassement, retrouve ses couleurs
département des Antiquités
d’origine
égyptiennes (DAE) avec le
concours du C2RMF. L’étude
Vase après dérestauration (démontage et élimination des bouchages, enduits et badigeons modernes) et en cours de
préalable et la restauration
montage « à blanc », sans colle et avec du ruban adhésif
189
Vie des collections
d’apprécier les teintes d’origine, notamment les colonnes
d’inscriptions anciennement bleues sur fond rouge, ressortant
sur le fond clair des panses, et le contraste coloré entre le bleu
vif et le jaune doré des perruques. Par ailleurs, le démontage
du vase brisé et anciennement recollé a permis un remontage
soigné et discret respectant l’objet et complété par le comblement des quelques lacunes les plus gênantes pour la lisibilité
de l’ensemble.
Cette opération très complète sur les vases canopes d’AâKheperkarê-Senbou a pu être effectuée à l’occasion d’un travail
de recherche mené sur les collections et a mis en évidence le
bénéfice d’une collaboration fructueuse et irremplaçable entre
les égyptologues du département, le personnel scientifique du
C2RMF et les restaurateurs.
H. Guichard
Les deux vases canopes avant intervention (des fenêtres de test sont visibles)
améliorée. Outre les impératifs de conservation, aujourd’hui
mieux assurée par l’élimination des matériaux modernes non
appropriés et par la consolidation des vestiges de polychromie
originale en soulèvement généralisé sur les deux bouchons,
l’opération visait à rendre aux objets un aspect plus proche de
leur état archéologique et à remettre en valeur leur véritable
nature, celle de vases de terre cuite conçus par l’artisan égyptien pour s’apparenter à leurs cousins de calcaire ou de calcite,
plus fréquents. Malgré les lacunes et les altérations inévitablement liées au temps, il est à nouveau loisible au spectateur
190
Les deux vases canopes après restauration
 Of the four Canopic jars belonging to Aā-Kheperkare-Senbu—first
priest of the ka of Thutmose I—only two remain, which according to the
engraved hieroglyphic inscriptions, indicate that they were respectively
placed under the protection of Hapi (who protected the liver, and was one
of Horus’s four sons), and under the protection of Qebehsenuef (protector
of the intestines).
Exhibited in the Musée Charles X, these jars had then been placed in
storage, where one of them was broken and reassembled at an unknown
date. The current research work being carried out by Sylvie Guichard
(research engineer at the DAE, the Department of Egyptian Antiquities)
consecrated to the first Egyptian collection exhibited in the Louvre—the
conclusions will appear in the future republication of Champollion’s Notice
descriptive (Descriptive Catalogue)—enabled these two Canopic jars to be
located and authenticated, as they were blackened and dusty, and one of
them was poorly repaired.
On this occasion, the DEA (Department of Egyptian Antiquities) launched
a programme of study and restoration in collaboration with the Centre de
Recherche and Restauration des
Musées de France (Centre for
Research and Restoration of the
Museums of France). Geneviève
Delalande and Céline Saunier
(restorers of sculpture works) were
entrusted with the preliminary
study and the major restoration of
these two objects.
Apart from conservation requirements, which, today, involve the
elimination of inappropriate modern materials and the consolidation
of the remnants of the original polychrome which was generally
detached on the two covers, the
operation restored the objects to
their archaeological state and revealed their true nature—that of
terracotta vases designed by Egyptian craftsmen to resemble their
more common limestone or calcite
counterparts.
Restaurations
Antiquités grecques, étrusques et romaines
Le département des Antiquités grecques, étrusques et romaines a engagé différentes
campagnes pluriannuelles de restauration dans le cadre du redéploiement de ses
salles ou à l’occasion d’expositions. On citera les cinq chantiers principaux qui
concernent les objets d’art grec classique et hellénistique (préparation des salles
inaugurées en juillet 2010), les moulages en plâtre (gypsothèque du Louvre à
Versailles), les objets d’art étrusque et romain (préparation du réaménagement des
salles), projet qui compte un chantier particulier, celui des mosaïques romaines,
et les sculptures des anciennes collections royales et princières (préparation de
plusieurs expositions).
En 2010, ce programme de restauration a porté sur cent soixante-seize œuvres.
Il a vu l’achèvement de la campagne de restauration importante commencée il y
a plusieurs années pour les objets redéployés dans les nouvelles salles d’art grec
classique et hellénistique, avec notamment la spectaculaire restauration de la
Vénus de Milo. Commencée en 2004 pour sauver les grands moulages à remonter,
la campagne de restauration en cours pour la gypsothèque du musée du Louvre à
Versailles a connu une étape décisive en 2010 avec la restauration et le remontage
des reliefs dits de la Geste de Trajan. Une campagne d’une ampleur sans précédent a
pour ambition de restaurer les objets d’art étrusques et romains sélectionnés pour
un projet muséographique qui devrait aboutir dans les années 2015-2017 et pour
les salles qui seront consacrées à l’Orient méditerranéen à l’époque romaine (OMER,
ouverture prévue en 2012), avec en 2010 la restauration du lot important des
mosaïques d’Antioche. Le département a également poursuivi par la restauration des
objets la préparation de trois grandes expositions prévues en 2011 (« Richelieu » au
printemps 2011 à Orléans, Tours et Richelieu ; « Au royaume d’Alexandre le Grand.
La Macédoine antique » à l’automne 2011 au Louvre ; « Les Borghèse et l’Antique » à
la villa Borghèse à Rome de décembre 2011 à avril 2012).
J.-L. Martinez
 The Department of Greek, Etruscan, and Roman Antiquities has conducted several long-term
restoration programmes in the framework of the reorganisation of its rooms and exhibitions. There
are five main projects: those that concern classical and Hellenistic Greek objects (preparation of the
rooms inaugurated in July 2010); the plaster moulds (the Louvre’s “gypsothèque” at Versailles); the
Etruscan and Roman objects (preparation for the refitting of the rooms), a project that includes a
specific programme, that of Roman mosaics; and the sculptures from the former royal and princely
collections (preparation of several exhibitions).
In 2010, this restoration programme focused on 176 works. The major restoration programme
begun several years ago was completed: this concerned objects that were reallocated to the new
rooms consecrated to classical and Hellenistic Greek art, and included the spectacular restoration
of the Venus de Milo. The programme began in 2004 to save and reassemble the large moulds, and
a major step was achieved in the restoration programme that is underway for the Louvre’s
“gypsothèque” at Versailles in 2010, with the restoration and the reassembly of the reliefs called
“la Geste de Trajan”. The Department is continuing to prepare the collections for the opening of
the Etruscan and Roman art rooms (project for 2015/16) and for the rooms which will be
consecrated to the Mediterranean East during the Roman Period (OMER, scheduled to open in
2012), with the restoration of the important collection of Antioch mosaics in 2010. The Department
also continued to restore objects for the three major exhibitions scheduled for 2011 (“Richelieu” at
Richelieu, in March 2011 in Tours and Orléans, “Macédoine antique” (Ancient Macedonia) at the
Louvre in the autumn of 2011, and “Les Borghèse et l’antique” (The Borghese and the Antique) at
the Villa Borghese in October 2011).
191
Vie des collections
La restauration des mosaïques d’Antioche
Programme suivi par Cécile Giroire
Étude : Atelier de conservation et de restauration de mosaïques du musée départemental Arles antique,
dirigé par Patrick Blanc (2006-2007)
Restauration : Atelier de restauration de mosaïques de Saint-Romain-en-Gal dirigé par Évelyne Chantriaux (Ma 3442,
Ma 3459 à 3462 et Ma 3464) et Atelier de conservation et de restauration de mosaïques du musée départemental
Arles antique, dirigé par Patrick Blanc (Ma 3457 et Ma 3463)
Mosaïque du Phénix
Daphné, vie siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire. H. 5,73 m ; l. 4,323 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3442)
Fragment de pavement aux perroquets
Daphné, vie siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire, pâte de verre. H. 1,72 m ; l. 1,54 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3459)
Fragment de pavement avec un buste féminin
Daphné, maison du « Bateau de Psyché », iiie siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire. H. 1,145 m ; l. 1,12 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3460)
Fragment de pavement orné d’oiseaux autour d’un vase
Daphné, salle à manger (triclinium) ? d’une maison, 1re moitié du
iiie siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire, pâte de verre. H. 1,81 m ; l. 1,932 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3461)
Fragment de pavement à décor de poissons
Daphné, à proximité de la maison du « Bateau de Psyché », iiie siècle
après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire. H. 1,075 m ; l. 1,96 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3462)
Fragment de pavement à décor de peltes
Daphné, chambre à coucher (cubiculum) ? de la maison du « Bateau de
Psyché », iiie siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire. H. 1,265 m ; l. 0,88 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3464)
Amazonomachie et fragment de bordure géométrique
Daphné, ive siècle après J.-C.
Mosaïque : marbre, calcaire. H. 2,45 m ; l. 4 m
Département des Antiquités grecques, étrusques et romaines (Ma 3457
et Ma 3463)
192
En vue de leur présentation dans de nouveaux espaces muséographiques du musée consacrés à l’Orient méditerranéen
à l’époque romaine, dont l’ouverture est prévue en juin 2012,
les mosaïques d’Antioche conservées au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines ont fait l’objet d’une
campagne de restauration fondamentale entreprise en 2008 et
qui s’achèvera en 2011.
Découverts entre 1932 et 1935 lors de la mission archéologique franco-américaine d’Antioche, ces pavements ou
fragments de pavement de mosaïque avaient été déposés au
moment des fouilles et placés sur un support moderne en ciment tenu par une solide structure métallique. Avec le temps,
ces supports avaient vieilli et présentaient sur leur revers de
nombreuses fissures produites par la corrosion des barres de fer
enchâssées dans l’épaisseur de ciment. Ces fissures atteignaient
dans certains cas la surface de la mosaïque, le tessellatum, composé de petits cubes de marbre, de calcaire et de pâte de verre :
elles suivaient alors les lignes de joint entre les tesselles ou
avaient provoqué, en de rares endroits, la rupture de quelques
tesselles. Par ailleurs, ces supports modernes étaient d’un poids
considérable et rendaient toute manipulation complexe et
délicate. Il fut donc décidé d’entreprendre une campagne de
restauration fondamentale de ce prestigieux ensemble.
La première étape consista à établir un bilan sanitaire général
de la collection de mosaïques afin d’évaluer l’ampleur du travail et son coût. Ce constat d’état a été effectué en 2006-2007
par l’atelier de conservation et de restauration de mosaïques du
musée départemental Arles antique, dirigé par Patrick Blanc,
dans le cadre d’un partenariat qui liait le musée du Louvre et le
musée d’Arles. Un accord-cadre a ensuite été rédigé afin de sélectionner les prestataires compétents pour ce type de restauration. Le premier marché subséquent (2008-2010) a été attribué
à l’atelier de restauration de mosaïques de Saint-Romain-en-Gal
dirigé par Évelyne Chantriaux et concernait six pavements et
fragments de pavement : la mosaïque du Phénix (Ma 3442), les
panneaux avec une personnification (Ma 3460) et un décor de
peltes (Ma 3464) provenant d’une même maison, celui avec un
décor de poissons (Ma 3462), celui orné d’oiseaux autour d’un
vase (Ma 3461), enfin, celui aux perroquets (Ma 3459). Chaque
restauration s’est déroulée en deux temps, changement du support puis traitement du tessellatum.
Le premier, précédé d’un entoilage de la surface de la mosaïque destiné à la protéger, s’effectue de l’envers. Il consiste
d’abord à ôter le support moderne en ciment armé. Ce retrait,
long et minutieux, est opéré progressivement, à la scie circulaire
à disque diamanté d’abord, puis au micro-inciseur lorsqu’on
approche des tesselles antiques. Une fois atteint, le revers du
tessellatum apparaît, avec quelquefois des traces du dessin préparatoire antique à l’ocre rouge. Le jointoiement antique est
conservé dans les zones où il est préservé. Un mortier synthétique chargé de sable sert d’interface entre les tesselles et le nouveau support, une structure en nid d’abeilles d’aluminium de
Retrait du support de ciment sur un des fragments de la mosaïque du Phénix
(Ma 3442)
Restaurations
Détail du revers de la mosaïque avec personnification (Ma 3460)
Mosaïque avec personnification (Ma 3460) sur son nouveau support, avec réintégration
après retrait du ciment ; quelques traces du dessin préparatoire tracé
partielle des lacunes et échantillons pour le choix du mortier de fond
à l’ocre rouge apparaissent dans le visage
50 mm d’épaisseur dont chaque face est revêtue d’un stratifié de
toile de verre et de résine époxy. Utilisé dans l’industrie aéronautique, ce matériau est à la fois stable, insensible aux variations
du climat et surtout résistant et léger. Une fois fixé à ce nouveau
support, le tessellatum est alors débarrassé de l’entoilage qui le
protégeait pour pouvoir être traité : les tesselles et les joints font
l’objet d’un nettoyage minutieux, les comblements modernes de
précédentes interventions de restauration, disgracieux et débordants, sont retirés. Le cadrage du support est ensuite ajusté, assez
serré lorsqu’il suit le bord du panneau de mosaïque, plus large
lorsqu’il longe une zone fragmentaire pour évoquer la poursuite
du décor. Un mortier de chaux et de sable dont la teinte et la
granulométrie sont minutieusement choisies en fonction de
chaque mosaïque est appliqué sur le support moderne autour
du tessellatum, très légèrement en retrait par rapport à ce dernier.
Enfin, les lacunes sont réintégrées avec des mortiers de chaux
chargés de sable, parfois de poudre de marbre, mortiers dont la
teinte et la granulométrie sont longuement discutées. Le traitement des lacunes, tout en demeurant visible, ne doit pas attirer
l’œil et doit redonner au décor antique sa lisibilité.
Ces mêmes procédés ont régi la restauration de la mosaïque
de l’Amazonomachie (Ma 3457) et du fragment de bordure
géométrique (Ma 3463) appartenant au même pavement, qui a
été l’objet d’un second marché (2009-2010) attribué à l’atelier
d’Arles. Grâce aux photos d’archives conservées à l’université
de Princeton (Department of Art and Archaelogy) montrant
ce pavement in situ, les deux panneaux, présentés séparément
jusque-là, ont pu être rassemblés sur un même support, dans
une configuration conforme à leur positionnement original.
Un troisième marché public prévu en 2011 et intégrant un
grand fragment de rinceau peuplé (Ma 3458) permettra de
clore cette campagne de restauration des mosaïques d’Antioche, le pavement des saisons de la « villa Constantinienne »
(Ma 3444), scellé depuis 1936 au sol de la cour du Sphinx, sera
traité ultérieurement en raison de l’ampleur de cette opération
et des problèmes qu’elle pose.
Brièvement présentée lors d’une journée d’étude consacrée
aux travaux actuels sur le site d’Antioche le 15 avril 2010 à la
fondation Dumbarton Oaks à Washington, cette campagne de
restauration fondamentale est remarquable par son envergure.
Elle fournit l’occasion de reconsidérer l’étude de ce matériel et
de son contexte archéologique en s’appuyant sur les documents
d’archives et les objets issus de ces fouilles conservés à Princeton. L’ouverture des nouveaux espaces muséographiques dédiés
à l’Orient méditerranéen à l’époque romaine en 2012 permettra
de rendre visible cette recherche appliquée aux collections et de
réunir la communauté scientifique travaillant sur ce domaine
dans le cadre d’une journée d’étude organisée au musée par le
département des Antiquités grecques, étrusques et romaines.
C. Giroire
Bibliographie
Baratte (F.), Catalogue des mosaïques romaines et paléochrétiennes du musées du Louvre, Paris, RMN, 1978, no 44 p. 92-98 (Ma 3442), nos 46 et
47 p. 118-121 (Ma 3457 et Ma 3463), no 49 p. 123-124 (Ma 3459),
no 50 p. 124-125 (Ma 3460), no 51 p. 126-128 (Ma 3461), no 52 p. 129130 (Ma 3462) et no 53 p. 130 (Ma 3464).
Giroire (C.), Roger (D.), dir., De l’esclave à l’empereur. L’art romain dans les
collections du musée du Louvre, catalogue d’exposition (Arles, musée
départemental Arles antique, 2008-2009), Paris, Somogy, Musée du
Louvre éditions, Conseil général des Bouches-du-Rhône, 2008, no 81
p. 175 (fragment de Ma 3442).
193
Vie des collections
Chantriaux (é.), « L’atelier de restauration de Saint-Romain-en-Gal
(Rhône) », Dossier d’archéologie, juillet-août 2011, no 346, p. 104-105.
Giroire (C.), « Mosaïque de la Syrie antique. Les collections du Louvre
restaurées à Saint-Romain-en-Gal », Dossier d’archéologie, juillet-août
2011, no 346, p. 114-115.
 The pavements or fragments of mosaics discovered between 1932
and 1935 during the Franco-American excavations at Antioch had been
placed on a support made from cement reinforced by a metal structure.
The support is very heavy, and this made any manipulation very complex
and delicate, and it gradually developed many cracks on the back and the
front. The first step involved carrying out a general examination in 2006–
07 by the mosaics conservation and restoration workshop of the Musée
Départemental Arles Antique, overseen by Patrick Blanc.
The restorations of the Phoenix (Ma 3442) mosaic and panels Ma 3460,
Ma 3464, Ma 3462, Ma 3461, and Ma 3459 were carried out by the
mosaics restoration workshop of Saint-Romain-en-Gal led by Evelyne
Chantriaux, and was completed in two stages: changing the support and
then treating the tessellatum.
The Amazonomachy (Combat of the Amazons; Ma 3457) and fragment
Ma 3463 were restored using the same process in the Arles workshop.
Thanks to the photos from the University of Princeton showing the
pavement in-situ, it was possible to assemble the two panels presented
separately on the same support.
The restoration programme will terminate in 2011 with work on a grand
fragment de rinceau peuplé (large fragment of foliage with figures; Ma
3458). The pavement des saisons (the seasons pavement; Ma 3444), sealed
since 1936 into the floor of the Cour du Sphinx will be treated later due to
the scale of the operation and the problems involved.
The opening of new museographic spaces dedicated to the Mediterranean
East during the Roman era in 2012 will enable this applied research on the
collections to be viewed and to bring together the scientific community
working in this field, in the framework of a Museum study day organised by
the Department.
Mosaïque aux perroquets (Ma 3459) après réintégration des lacunes et
traitement du fond
194
Mosaïque de l’Amazonomachie (Ma 3457 et Ma 3463) sur son nouveau support, avec essai de restitution de la bordure géométrique et échantillon pour le mortier de fond
Restaurations
La restauration de la Vénus de Milo
Programme suivi par Alain Pasquier, Jean-Luc Martinez et Ludovic Laugier
Études préalables : relevé photogrammétrique effectué en 2005 par Digital Archives Lab. CAD Center Corporation
(Japon) ; contrôle gammagraphique effectué en mars 2006 par le centre de Saclay du Commissariat à l’énergie
atomique (CEA, SSTM du LIST [Service systèmes et technologies pour la mesure du Laboratoire d’intégration des
systèmes et des technologies], ingénieur, chef du projet : Bernard Rattoni) ; étude structurelle de la statue par
Hubert Boursier et Geneviève Rager, restaurateurs (rapport de décembre 2006) ; études préalables à la restauration
par Jean-Luc Martinez (commission de restauration du musée du Louvre le 2 octobre 2009).
Études des matériaux et techniques : étude de la provenance des marbres par Annie et Philippe Blanc, université
Pierre et Marie Curie, département de Géologie sédimentaire dirigé par Marc de Rafelis (rapport de janvier 2010) ;
étude de l’altération et des matériaux de bouchage par le C2RMF (analyses chimiques élémentaires, pétrographie
et endoscopie par Yvan Coquinot, examen au microscope optique en lumière réfléchie par Nathalie Balcar, analyses
organiques par Juliette Langlois et Nathalie Balcar, rapport du 3 juin 2010).
Restauration : Anna Martinotta, restauratrice (octobre 2009 – avril 2010)
Dans le cadre du projet de rénovation des salles d’art grec classique et hellénistique du musée du Louvre et après plusieurs
études préalables menées durant cinq ans, la restauration de
la Vénus de Milo a été conduite en deux temps, entre octobre
2009 et avril 2010. L’aspect de surface de la statue a ainsi été
amélioré et notre connaissance matérielle du chef-d’œuvre
complètement renouvelée.
Études préalables à la restauration (2005-2009)
La rénovation des espaces supposant leur fermeture, le déplacement de la Vénus de Milo avait été imaginé dès 2006 et imposait de vérifier l’état matériel de la statue. Une série d’études
préalables à la restauration a donc été conduite entre 2005 et
2009. Grâce à la générosité de la société japonaise CAD Center, un relevé photogrammétrique de la statue effectué en 2005
et complété par une couverture photographique sous lumière
ultraviolette a permis de disposer d’une documentation à jour
sur l’état de la statue avant intervention. La méconnaissance de
la structure et des scellements utilisés pour lier les deux parties
principales de la statue nous a également conduits à procéder au
contrôle par gammagraphie effectué au Louvre une nuit de mars
2006 par l’équipe de Bernard Rattoni, ingénieur du centre de
Saclay du CEA. La délicatesse de l’opération nécessita la création
d’un périmètre de sécurité autour de l’œuvre et, malgré les parois de plomb installées, conduisit à la fermeture de la cour Carrée. La présence et l’emplacement de deux longs goujons furent
ainsi révélés, assurant la solidité de la statue, que l’on put déplacer sans crainte. Analysant ces résultats, les restaurateurs Hubert
Boursier et Geneviève Rager procédèrent en 2006 à une étude
structurelle complète de la statue, cartographiant avec précision
son état de conservation. Les résultats de ces recherches enrichies d’une étude historique des anciennes restaurations alors
connues furent présentés à la commission de restauration du
musée du Louvre réunie le 2 octobre 2009.
Les étapes d’une restauration conduite la nuit
et les jours de fermeture
Les conditions d’intervention sur le chef-d’œuvre furent particulièrement difficiles, car il devait rester visible durant toutes
les opérations. Le restaurateur choisi, Anna Martinotta, devait
donc intervenir du lundi soir après 18 heures au mercredi matin avant 9 heures, puis les nuits, tout en préservant un état de
conservation provisoire acceptable pour le nombreux public
venu admirer la Vénus dans la journée. Il faut rendre hommage
La Vénus de Milo après restauration, avril 2010
195
Vie des collections
Mars 2006, photogrammétrie de la statue
Sommet de la tête de la statue montrant une forte érosion
Main gauche tenant une pomme (Ma 400)
Schéma de localisation des bouchages
196
ici à l’habileté d’Anna Martinotta, qui, grâce à des prises d’empreintes des bouchages anciens ou à la pose de glacis à l’aquarelle masquant les tests de nettoyage d’une séance à l’autre,
put nettoyer la statue d’octobre à décembre 2009, puis purger
et refaire les joints de bouchage de janvier à avril 2010, tout en
redonnant chaque matin à la Vénus son apparence habituelle.
Sur avis de la commission du Louvre, il fut en effet convenu
de procéder tout d’abord à un décrassage de la totalité de la
statue afin d’harmoniser la partie inférieure, autrefois touchée
par le public et particulièrement sale, et la partie supérieure,
davantage préservée de l’encrassement mais en moins bon état
de conservation. Anna Martinotta a donc dépoussiéré la statue
au pinceau, posé des masticages provisoires sur les zones de
fractures, d’écailles et de fissures afin de nettoyer la surface à
Découverte des canaux de coulée
Restaurations
l’eau à l’aide d’une éponge, de brosses à dents souples pour
certains plis notamment ou de compresses sur papier. La saleté
grasse a ainsi été éliminée par simple nettoyage à l’eau enrichi
d’un tensioactif à 5 %. La purge des joints a permis d’éliminer
les bouchages débordants en plâtre ou en résine, d’observer les
surfaces de joints et les mortaises antiques. Après avis de la seconde commission de restauration du Louvre réunie le 29 janvier 2010, les bouchages définitifs ont été effectués à base de
poudre de marbre teintée et de résine acrylique en émulsion.
L’extrémité en plâtre de l’orteil droit a finalement été retirée,
tandis que le complément du nez débordant sur la surface originale a été repris. Les zones de forte érosion du marbre localisées sur la partie supérieure de la tête et du chignon ont été
consolidées au moyen de silicate d’éthyle. Les griffures les plus
évidentes ont été atténuées par un léger glacis à l’aquarelle.
Bilan des analyses et de la restauration pour les recherches sur la
Vénus de Milo
Cette campagne sans précédent d’études et de restauration a permis de renouveler considérablement notre connaissance matérielle de la sculpture tout en précisant l’histoire complexe de sa
restauration. Les analyses de marbre révèlent pour la première
fois scientifiquement que la statue est taillée dans plusieurs blocs
très proches de marbre de Paros (variété Lychnites, sans doute
de la carrière de la grotte des Nymphes, ou de celle de Pan). Elles
ont également permis d’écarter l’appartenance à la statue des piliers hermaïques découverts avec elle (Ma 403 et Ma 404 sont en
Paros Chorodaki, des carrières à ciel ouvert, et Ma 405-406 sont
en marbre du Pentélique d’Athènes). En revanche, elles rendent
possible l’appartenance à la statue d’une main gauche tenant la
pomme (Ma 400) et d’un départ du bras gauche (Ma 401) découverts également avec la statue mais non intégrés au xixe siècle à la
restauration. L’hypothèse désormais confortée de l’appartenance
de ces deux fragments du bras gauche à la statue n’est pas sans
conséquence sur l’identification de la déesse représentée et la restitution de son attitude : il faudrait reconnaître une Aphrodite à
la pomme du jugement de Pâris, le bras gauche tendu. La purge
des bouchages comme l’examen gammagraphique et endoscopique ont également apporté leur lot de découvertes. Les mortaises antiques entre la partie inférieure drapée et le buste comme
les canaux de coulée ont pu être repérés et explorés. Ils révèlent
une réparation antique et expliquent l’éclatement de deux fragments des hanches provoqué par les canaux de coulée. De même,
deux autres mortaises se sont révélées antiques : celle percée sous
le sein droit appartient au système qui soutenait le bras droit plié ;
celle creusée dans le pied gauche suppose un avant de pied rapporté. Les observations faites ont permis de préciser l’histoire de
la restauration de la statue. L’intervention de Bernard Lange en
1821 fut plus radicale qu’on ne l’avait pensé : la cassure du nez
comme celle du pied gauche avaient été affranchies pour un complément en marbre ; l’avant-bras droit comme la plinthe ont été
retaillés. Une intervention en 1936 par l’atelier des marbriers du
Louvre a été révélée par un petit papier inscrit dissimulé dans la
mortaise située sous le sein droit. La chronologie des bouchages
de plus en plus sombres au fur et à mesure de l’encrassement de la
statue a été précisée. Les goujons modernes apparus à la gammagraphie sont désormais bien localisés, sans que l’on sache pour
autant quand ils ont été mis en place puisque, à l’intervention
documentée de 1871, l’étude récente vient d’ajouter deux interventions jusque-là inconnues, celles de 1936 et 1964.
J.-L. Martinez
Partie supérieure de la statue avec les compléments en plâtre retirés (nez, mortaise sous le sein droit, plis au niveau des hanches)
Bibliographie
Abou (C.), « Gammagraphie. La Vénus dévoilée », Les Défis du CEA, 113,
avril 2006, p. 8.
Hamonou (é.), « La Vénus de Milo sous les rayons gamma », Les Cahiers
de Science et Vie, 101, octobre-novembre 2007, p. 99.
Martinez (J.-L.), « Les secrets de la Vénus de Milo », Grande Galerie. Le
Journal du Louvre, 12, juin-juillet-août 2010, p. 38-45.
Martinez (J.-L.), La Vénus de Milo, Paris, Musée du Louvre éditions et
Somogy, « Solo », à paraître.
 In the framework of the renovation of the Louvre’s Classical and Hellenistic Greek rooms, and after various preliminary studies conducted over a fiveyear period, the Venus de Milo’s restoration was carried out in two phases,
between October 2009 and April 2010. As a result, the statue’s surface
appearance improved and new insight was gained into the masterpiece’s
material characteristics. The gamma imaging test and the endoscopic examination improved our understanding and observation of the antique sockettenon joint and the modern dowels that hold the statue’s two main parts
together. The removal of the filled areas revealed new conservation elements,
attesting to Bernard Lange’s preparations in 1821 for a comprehensive restoration project that was never completed and revealing another (hitherto undocumented) restoration carried out in the Louvre in 1936. These observations raise questions about the creative techniques: the pour channels were
precisely located and the antique socket under the right breast and at the
level of the front joint of the left foot were temporarily removed.
197
Vie des collections
Arts de l’Islam
Le département des Arts de l’Islam est engagé dans un vaste chantier de restauration,
préalable à l’ouverture de ses futurs espaces, en 2012. Ce chantier a débuté en
septembre 2007 et s’achèvera à la fin de l’année 2011. Régi par un accord-cadre, il a
été divisé en douze lots de restauration :
– lot 1 : arts graphiques ;
– lot 2 : reliures ;
– lot 3 : céramiques ;
– lot 4 : carreaux ottomans ;
– lot 5 : tapis ;
– lot 6 : bois ;
– lot 7 : textiles ;
– lot 8 : métal ;
– lot 9 : ivoire ;
– lot 10 : verre ;
– lot 11 : pierre ;
– lot 12 : stucs et vitraux.
Le choix des pièces à restaurer a été guidé en premier lieu par des critères de
conservation et par la programmation muséographique. Certaines pièces ont
nécessité des traitements d’urgence. Pour les œuvres destinées aux futures salles,
il a paru essentiel d’harmoniser les interventions afin d’assurer une présentation
cohérente.
Actuellement, environ deux mille six cents œuvres ont été restaurées dans le cadre
du chantier et une centaine d’autres restent à traiter durant l’année 2011. Parmi
celles-ci, plusieurs lots ont fait l’objet d’une attention toute particulière et donné lieu
à la rédaction préalable d’un protocole de restauration. Nous nous attarderons sur
un chantier de restauration spécifique, d’une ampleur considérable par le nombre
d’œuvres considérées, et sur une restauration d’envergure portant sur une œuvre
unique présentée dans les futures salles.
Les carreaux ottomans
Le musée du Louvre conserve un ensemble d’environ trois mille carreaux ottomans,
dont un millier provient du fonds déposé par le musée des Arts décoratifs en 2005.
La collection du musée du Louvre a fait l’objet d’un important travail de récolement,
achevé en 2010. En effet, entrés par lots, beaucoup de carreaux avaient été mélangés,
si bien que leur historique avait été perdu. Afin de mener à bien les recherches
nécessaires à l’identification précise des pièces, il s’est avéré nécessaire de démonter
l’ensemble des panneaux. S’ajoutaient à cela des raisons de conservation impérative,
les deux collections, celle du Louvre comme celle des Arts décoratifs, étant souvent
montées depuis la fin du xixe siècle sur des supports qui provoquaient de graves
dommages (plâtre, filasse et armatures métalliques, béton armé, contreplaqué,
etc.). L’ensemble a donc fait l’objet d’un chantier exhaustif de démontage en 2007,
puis mis en état de conservation entre 2007 et 2010. Enfin, les carreaux qui seront
présentés dans les futurs espaces du département ont vu leurs manques restaurés
dans un respect complet du protocole de réintégration. Le but était d’obtenir une
homogénéisation parfaite de la retouche, tant dans le dessin, le niveau de couleurs
que les matériaux, afin de ne pas nuire à la présentation conjointe de plus de cinq
cents carreaux dans les futures salles.
Le porche mamlouk
198
Un chantier spécifique est dédié à une œuvre, un ensemble architectural d’époque
mamlouke, provenant du Caire, retrouvé au musée des Arts décoratifs. Depuis
1889, date de son arrivée en France, où il n’a jamais été identifié, la complexité du
Restaurations
Intervention sur un des carreaux ottomans.
remontage (même s’il a peut-être été envisagé en 1889) a précipité son oubli. Cet
ensemble de 5,5 tonnes de pierres présente l’aspect d’un immense puzzle dont les
enjeux sont l’étude, le remontage et l’intégration architecturale dans les nouveaux
espaces du département des Arts de l’Islam (DAI).
Dans les archives du musée des Arts décoratifs, quelques dessins hâtifs ont fait
surgir la silhouette d’un remarquable élément de l’architecture du Caire des sultans
mamlouks (1250-1517). Grâce à l’appui de la fondation Kress, qui a permis de
financer le travail préparatoire d’un chercheur en post-doctorat (A. C. Mathews),
une première phase de compréhension de l’ensemble a été menée parallèlement à
l’étude de son histoire, de son embarquement en Égypte jusqu’à son arrivée à Paris.
Le premier travail a consisté à réunir tous les blocs dispersés, jusqu’à Béziers. S’en est
suivi alors un patient travail d’identification des blocs, souvent dégradés et couverts
d’une épaisse couche de poussière.
Cette première phase a permis de lancer une étude approfondie, confiée, à l’issue
d’un marché, à la société Tollis, appuyée par l’architecte Édouard de Bergevin
(2009). Cette étude a permis de valider l’essentiel de la restitution proposée, de
la faire évoluer, d’effectuer un montage à blanc de l’ensemble (murs et coupoles)
afin d’en proposer la reconstruction définitive et les cotes hors tout de l’ouvrage. Il
viendra en effet prendre place au cœur des espaces en construction, avec une marge
d’ajustement de 3 cm de part et d’autre de la structure métallique portant la coque
de résine. Cette opération a été l’occasion unique de placer tous les membres de
l’équipe de restauration dans la situation de leurs prédécesseurs de la fin du xive et
du début du xve siècle, montant et calant, bloc à bloc, la structure.
L’ultime phase, de restauration proprement dite, a débuté en 2010. Le nettoyage
des blocs a été achevé, par le dégagement d’un badigeon posé en 1869, au moment
d’une « remise à neuf » des monuments du Caire à l’occasion de l’inauguration du
canal de Suez. Le monument fut démonté avant 1889, date de son arrivée à Paris.
Cette couche superficielle d’histoire pesait lourdement sur la lecture du décor.
Son dégagement a permis de retrouver une bichromie intacte qui exalte la qualité
d’un décor sculpté couvrant. La préparation de la fixation des blocs, pièce à pièce
sur la coque, est actuellement en cours. Le choix des matériaux employés pour
la réintégration vient d’être validé, la fabrication de deux grilles de fer battu qui
viendront combler les emplacements vides est en cours, tout comme la taille des
blocs manquants, parfaitement documentée par des dessins de l’architecte français
Jules Bourgouin, retrouvés par les soins de l’équipe à l’Institut national d’histoire de
l’art (INHA) en 2009.
199
Vie des collections
La mise en place de l’ensemble restauré se fera très en amont de l’installation des
œuvres, au cœur du chantier architectural des Arts de l’Islam, au printemps 2011.
G. Fellinger et S. Makariou
 The Department of Islamic Art is engaged in a vast restoration project ahead of the scheduled
opening of its permanent display areas in 2012. Some of the works of art have themselves required
urgent preparation work. The interventions will be coordinated to ensure a coherent presentation
of the collections. Around 2,600 works have already been restored, and the restoration of another
100 works will be completed by the end of 2011. Several batches of items required special
conservation according to a specific restoration agreement.
The Ottoman tiles
The Louvre currently possesses around 3,000 Ottoman tiles, including about 1,000 from a
collection deposited by the Arts Décoratifs in 2005. The tiles were mounted on supports, resulting
in serious damage. Consequently, the entire collection was systematically dismantled in 2007, and
underwent conservation treatment between 2007 and 2010.
The Mamluk portal
A specific project is focusing on this architectural ensemble from the Mamluk era, which came from
Cairo to France in 1889 and was stored in the Louvre’s Arts Décoratifs department. The restoration
of this stonework weighing 5.5 tonnes provided a unique opportunity to place all of the restoration
team members in the same situation as their predecessors in the late fourteenth and early fifteenth
centuries, as they assembled and propped up the structure block by block. The removal of the
distemper applied in 1869 revealed a completely intact, two-colour decorative scheme that greatly
enhanced the beauty of the carved surface decorations.
200
Le porche mamlouk en cours de remontage
Restaurations
Sculptures
Comme tous les départements, celui des Sculptures doit à la fois adapter sa politique
de façon conjoncturelle aux nouvelles acquisitions et aux expositions à venir et,
d’autre part, de façon plus structurelle, assurer une programmation pluriannuelle
en fonction des recherches, de l’état des œuvres et d’une cohérence d’état dans des
espaces définis, telle la salle Jean Goujon.
C’est ainsi que, pour l’année 2010, ont été prises en compte les restaurations
pour les expositions organisées au cours de cette même année, « France 1500 »
(Vierge Blumenthal, Vierge d’Olivet, reliefs de la chapelle Commynes, fontaine de
Blois, reliefs de Gaillon, Mort de la Vierge, trois statues provenant de Chantelle),
« L’Antiquité rêvée » (Amour de Bouchardon, Baigneuse d’Allegrain) et « Le Maître
de Naumbourg » (chapiteau provenant de Chartres), mais aussi la préparation de
l’exposition sur la sculpture florentine du Quattrocento (Vierge à l’Enfant d’après
Ghiberti, Vierge trônant d’après Della Robbia), prévue en 2012.
Des restaurations plus lourdes se sont attachées à des œuvres majeures, qui
nécessitaient une étude en laboratoire complexe et un dégagement de polychromie,
afin de retrouver l’état original, bien que lacunaire : Christ de descente de Croix, dit
Christ Courajod, Bourgogne, xiie siècle ; bustes de bronze de Faustine et d’Hadrien, par
l’Antico ; Hercule et Atlas, morceau de réception de Michel Anguier ; grand retable de
l’Ascension, de Della Robbia, provenant de Città di Castello ; reliefs de la fontaine
des Innocents de Jean Goujon ; Saint Louis de Gonzague, Autriche, xviiie siècle.
Ces chantiers importants sont en général traités en deux parties : étude d’abord,
puis restauration, avec parfois la nécessité de séparer les deux phases en raison des
délais d’étude, de passage devant la commission de restauration et de temps de
passation des marchés.
G. Bresc-Bautier
 Like every other department in the Museum, the Department of Sculptures adapts its policy in
accordance with the new acquisitions and yearly exhibition schedule, maintaining structural
coherence, while ensuring the long-term programme of research, the physical state of the works
themselves, and guaranteeing that suitable conditions are offered by specific rooms, such as the
Salle Jean Goujon.
Various restoration projects were carried out prior to exhibitions held in 2010: “France 1500”
(the Blumenthal Virgin, Olivet Virgin, Reliefs from the Chapelle Commynes, the Fontaine de Blois, the
Gaillon Reliefs, Mort de la Vierge, and three statues from Chantelle); “Antiquity Revived”
(Bouchardon’s Amour and Allegrain’s Baigneuse); the Naumburg Master (capital from Chartres); and
the preparation for the exhibition on “Quattrocento Florentine Sculpture” (Vierge à l’Enfant after
Ghiberti and Vierge trônant after Della Robbia, scheduled for 2012).
More detailed restorations were carried out on certain major works that required complex
laboratory examinations and cleaning work on the polychrome, in order to restore the works to
their original state, even if this meant that some elements were removed: Christ de descente de
croix, called Christ Courajod, Burgundy, twelfth century; Bronze busts of Faustina and Hadrian by
“Antico”; Hercule et Atlas, Michel Anguier’s morceaux de réception; the Altarpiece of the Ascension by
Della Robbia, from the Citta di Castello; Reliefs from the Fontaine des Innocents by Jean Goujon; Saint
Aloysius Gonzaga, Austria, eighteenth century.
These major projects are generally conducted in two phases, starting with a detailed technical
examination, and then the appropriate restoration; on occasion these two stages did not follow
automatically, owing to deadlines, submission to the restoration committee, or market delays.
201
Vie des collections
Étude et restauration de l’Enfant Jésus de Malines
Programme suivi par Sophie Guillot de Suduiraut
Analyses au C2RMF : Élisabeth Ravaud (étude xylologique), Thierry Borel (étude radiographique),
Yannick Vandenberghe (analyse de la polychromie)
Étude et restauration : Dominique Faunières
Enfant Jésus
Le style de l’Enfant Jésus, ses matériaux et ses techniques d’exécution sont caractéristiques de la production de Malines, dans
les anciens Pays-Bas méridionaux.
La statuette, taillée dans une seule pièce de noyer, est en bon
état. Seuls manquent la croix sur le globe terrestre (remplacée
par un élément moderne) et le nimbe en métal qui était fixé
à l’arrière de la tête. Le sexe de l’Enfant a été mutilé et son
bras droit, cassé, a été recollé. La statuette a été, dès l’origine,
solidement fixée par deux tiges de métal sur son socle hexagonal en chêne. Les trois faces avant du socle étaient ornées
d’applications métalliques (alliage de plomb et d’étain) : au
centre des faces étaient placées des fleurettes à six pétales (il en
subsiste deux) ; aux angles, des éléments aujourd’hui disparus
étaient vraisemblablement en forme de perles.
La polychromie a fait l’objet de plusieurs reprises. Avant restauration, l’examen de l’œuvre à la loupe binoculaire et les
analyses de polychromie ont précisé la succession des interventions.
Pâle, délicate et finement craquelée, la polychromie originale des carnations de l’Enfant Jésus (préparation à base de carbonate de calcium lié à la colle animale et couche de blanc
de plomb) a été recouverte d’un vernis brun, puis de trois
couches. La dernière, rose vif, posée à larges coups de pinceau
et empâtant les traits, était particulièrement maladroite.
Sur les cheveux, la dorure originale (feuille d’or pur) sur une
mixtion (couche huileuse constituée de terre potassique et de
blanc de plomb) a été recouverte d’une nouvelle dorure sur
mixtion, ensuite d’une couche brun-rouge, puis d’une couche
jaune clair.
Enfant Jésus de Malines, avant restauration
Enfant Jésus de Malines, après restauration
Malines
Vers 1500
Statuette, bois (statuette en noyer ; socle en chêne) polychromé.
H. 32,5 cm ; l. 12 cm ; pr. 5 cm
Marque malinoise de garantie du bois (les trois pals) sous le pied gauche
Achat 2009
Département des Sculptures (R.F. 2009.05)
202
Restaurations
La dorure originale du globe et du socle a reçu ultérieurement deux nouvelles dorures. La seconde recouvrait également les fleurettes en métal, dont la surface était à l’origine
revêtue d’un glacis rouge. Le dessus du socle, rouge vif, a été
repeint deux fois.
En conclusion, la polychromie originale de la sculpture,
de très belle qualité, est largement présente sous les couches
récentes qui l’ont dissimulée postérieurement.
L’étude préliminaire, complétée par des tests de dégagement,
a permis de déterminer l’objectif de la restauration : retrouver
la polychromie originale des carnations et des cheveux de l’Enfant, des fleurettes et du dessus du socle, tout en conservant la
dernière dorure du globe et du socle.
Sur les carnations, la suppression des repeints récents a
été une longue opération, très minutieuse, effectuée au scalpel sous loupe binoculaire ; le vernis brun, appliqué inégalement, a été allégé au moyen de solvants sous forme de gel. Sur
les cheveux, les fleurettes et le dessus du socle, les couches
récentes ont été retirées au scalpel et au moyen de solvants.
À la suite du dégagement et du nettoyage de la polychromie originale, quelques retouches réversibles à l’aquarelle ont
été effectuées, principalement sur les bords des lacunes de
la dorure du socle, qui laissaient apparaître la préparation
blanche sous-jacente. Le bois, visible dans quelques lacunes
de la polychromie, a été nettoyé et éclairci, ou, sur la partie
arasée du sexe, revêtu d’un léger glacis beige pour atténuer le
contraste entre le brun sombre du noyer et le ton clair des
carnations.
Le résultat de la restauration est spectaculaire. En effet, non
seulement le modelé du corps a gagné en finesse, les chairs ont
repris leur délicat ton ivoirin et les cheveux blonds leur éclat
doré, mais surtout le visage a retrouvé son expression initiale,
qui avait été beaucoup affadie par la dernière polychromie.
Le caractère espiègle de la physionomie enfantine est à nouveau rendu sensible grâce à la réapparition de la polychromie
originale, qui révèle un traitement subtil des yeux rieurs et
de la petite bouche pincée. Les iris brun clair sont animés de
rehauts blancs pour évoquer les reflets de la lumière. Les traits
brun foncé qui ombrent les paupières soulignent leur forme arquée. Les lèvres roses sont cernées par une ligne rouge sombre
qui accentue la saillie de la petite bouche.
En raison d’analogies avec d’autres statuettes malinoises dont
le socle porte la marque de garantie bruxelloise (BRVESEL), la
polychromie raffinée de l’Enfant Jésus laisse penser que la sculpture, taillée à Malines, a dû être polychromée dans un atelier de
Bruxelles, selon un usage fréquent autour de 1500.
S. Guillot de Suduiraut
 The style, materials, and production techniques of this piece are typical
of Mechelen production in the former Southern Lowlands. The statuette and
its plinth are in good condition. Only several added parts are missing.
The preliminary examination revealed that the original polychrome
work, which was very fine, was mostly present under the recent layers that
had masked it. The restoration work (mainly using a scalpel, under
binocular magnifying glass, and in certain places with chemicals) revealed
the original polychrome of the flesh tones and the hair, the metal fleurons,
and the red upper portion of the plinth. The later gilding of the globe and
the plinth was left intact.
The results of the restoration are highly satisfactory. The modelling of
the body is now finer, the flesh tones restored to their delicate ivory colour,
and the hair has a golden shine, but above all the face has recovered its
original mischievous expression, laughing eyes, and small pursed mouth.
Because of the similarities with other Mechelen statues whose plinths
bear the Brussels hallmark (BRVESEL), the refined execution of the
polychrome of the Enfant Jésus leads us to conclude that, although carved
at Mechelen, the work was later coloured in a Brussels workshop, which
occurred frequently in the period around 1500.
Étude et restauration de la Vierge à l’Enfant (R.F. 2201A)
Programme suivi par Geneviève Bresc-Bautier
Analyses au LRMH : Lise Leroux (identification de la pierre) ; au C2RMF : Jean Marsac (radiographie),
Sandrine Pagès-Camagna et Yannick Vandenberghe (étude de polychromie)
Restauration : Julie André-Madjlessi, en collaboration avec Agnès Le Boudec et Sabine Kessler
Vierge à l’Enfant
Normandie, vers 1500
Statue, pierre de Vernon (craie calcaire) polychromée.
H. 1,62 m ; l. 51 cm ; pr. 42,5 cm
Don de George et Florence Blumenthal, 1932
Département des Sculptures (R.F. 2201A)
La grande Vierge normande offerte par George Blumenthal en
1932 est d’une remarquable force plastique. Encore hiératique,
somptueusement couronnée d’une couronne à fleurs de lis
(dont la plupart des fleurons sont endommagés), elle porte une
robe à encolure ornée d’un motif de cabochons à l’imitation
de l’orfèvrerie. L’Enfant, complètement nu (dont le sexe a été
bûché), se détourne d’elle et tient un oiseau. Tant le manteau
que la robe sont bordés d’orfrois à inscriptions en relief, selon
une pratique fréquente en Normandie au début du xvie siècle.
Exposée dans la salle de la « Mort Saint-Innocent », elle pré-
sentait un état de surface assez brouillé et sale, incompatible
avec sa grande qualité. Elle était recouverte d’une cire teintée brune qui masquait les accidents et enrobait maladroitement les volumes, alors qu’étaient perceptibles des plages de
la polychromie antérieure sous-jacente. Celle-ci apparaissait
ponctuellement à la suite de grattages grossiers probablement
effectués en 1962. En conséquence de cette opération malheureuse et de l’usure généralisée, la pierre restait très visible aussi
sur certaines parties, ainsi que la couche préparatoire rouge.
L’ensemble offrait une vision très chaotique.
L’étude a montré d’une part la structure de la sculpture.
Un grave accident, survenu au Louvre en 1962 et sur lequel
il existe un rapport précis, avait entraîné le détachement et le
bris du corps de l’Enfant, suivis d’une restauration selon les
méthodes de l’époque. Une radiographie a permis de préciser
cette restauration et d’identifier les points de rupture et l’emplacement des multiples goujons de fixation, de différentes
203
Vie des collections
204
sections sur le bras gauche de l’Enfant, au niveau de la taille,
sur le bras gauche et l’épaule gauche.
Elle a surtout permis d’identifier les trois repeints successifs et la polychromie originale, qui a été dégagée (sauf sur les
carnations). Cette polychromie d’origine, bien conservée, est de
belle qualité. Elle est posée sur une préparation rouge appliquée
sur l’ensemble de la sculpture (à base de carbonate de calcium,
terre, minium, oxydes de fer). La Vierge, couronnée d’or, porte
une robe bleue (azurite sur sous-couche grise, de blanc de plomb
et terre) à motifs de fleurs de lis dorées, dont les orfrois sculptés de lettres sont aussi dorés. Le manteau est doré (alliage d’or
et d’argent) à la mixtion, rehaussé de motifs peints en glacis
marron, alors que son revers présente une imitation de fourrure
d’hermine, de mouchetures noires (noir de carbone) sur fond
blanc (blanc de plomb). Même si l’union des fleurs de lis sur
azur et des hermines est fréquente, la richesse, tout à fait remarquable ici, peut évoquer les lis royaux et l’hermine de Bretagne,
c’est-à-dire les armoiries d’alliance des souverains Charles VIII et
Louis XII avec Anne de Bretagne, et suggérer, peut-être, l’hypothèse d’une commande liée à la cour. Les cheveux de la mère et
de l’enfant étaient dorés sur mixtion, et les carnations, peintes
en rose (blanc de plomb). L’oiseau était vert vif (vert de cuivre
avec des grains de jaune de plomb et d’étain).
Le premier repeint reprenait la robe en bleu pâle (bleu de
cuivre synthétique), en masquant les fleurs de lis, et changeait complètement le manteau doré sur mixtion épaisse au
revers rouge. Les cheveux devenaient noirs. L’oiseau virait au
vert kaki et la terrasse au vert marron. Le second repeint était
encore plus sobre : la robe uniformément blanche, le manteau doré sur ses deux faces et les cheveux marron, comme
d’ailleurs l’oiseau. Le troisième repeint ponctuel intéressait le
manteau, devenu bleu avec un revers blanc – mais la bordure
toujours dorée –, et les carnations.
Dans un premier temps, la cire teintée a été ramollie à l’aide
d’un appareil à air chaud et d’un coton imbibé de ligroïne.
Cette opération a été menée conjointement au refixage de la
polychromie. Il a été décidé de dégager la polychromie originale sur la robe, le manteau, les cheveux, l’oiseau et la terrasse.
En revanche, les bordures dorées, la couronne et les carnations, dont la couche originale était fragile et lacunaire, ont été
Vierge à l’Enfant, avant restauration
Vierge à l’Enfant, après restauration
Restaurations
dégagées au niveau du repeint, ce que justifiait l’homogénéité
des couleurs depuis l’origine. Le dégagement a été effectué au
scalpel sous loupe binoculaire sans utiliser de solvants. Ce qui
a permis de découvrir les motifs décoratifs.
À la suite du dégagement, la polychromie de l’ensemble
était mieux conservée que ce que l’on aurait pu attendre. Les
retouches ont été ponctuelles et ont cherché à donner une meilleure lecture en abaissant la vitalité du rouge de la préparation
encore visible et le blanc de la pierre.
G. Bresc-Bautier
 This remarkably impressive piece of sculpture portrays the Virgin
wearing a sumptuous fleur-de-lis crown and a dress whose neck is adorned
with a motif of cabochons; the naked Child in her arms is holding a bird.
Her cloak and dress are bordered with orphrey and inscriptions in relief.
The statue’s surface was covered with a brown wax, under which patches
of polychrome could be seen.
The examination identified the three layers successively painted over
the original polychrome, which was laid over a red preparation of calcium
carbonate. Crowned with gold, the Virgin is wearing a blue (azurite) dress
with a design of gilded fleurs-de-lis, with orphreys also in gold. Oil/
mordant gilding was used on the cloak and enhanced with motifs painted
in a brown glaze; while its reverse side is an imitation of the ermine fur. The
combination of fleurs-de-lis on azure and ermines may reference the joint
coat-of-arms of Kings Charles VIII/Louis XII and Anne de Bretagne, and
suggest a royal commission. The hair of the mother and child were in oil
with gilded details, and the flesh tones were pink. The bird was bright
green.
The first repainted layer covered the dress with pale blue, masking the
fleurs-de-lis, and changed the cloak, gilded with oil on the red revers. The
hair had turned black, and the bird khaki. The second painted layer was
even more sober: the dress was white and the cloak gilded on both sides.
It was decided to reveal the original polychrome, except on the gilded
borders, the crown, and the flesh. The removal of the layers was carried out
using a scalpel under a binocular magnifying glass.
Restauration d’un relief en terre cuite d’Italie du Nord
Programme suivi par Marc Bormand
Analyse au C2RMF : Anne Bouquillon (analyse de la terre)
Étude de restauration : Céline Knecht-Saunier, 2007
Restauration : Delphine Masson
Vierge et l’Enfant sous un édicule
Italie du Nord (Vérone ?), 1re moitié du xve siècle
Relief, terre cuite avec traces de polychromie.
H. 82,5 cm ; l. 55 cm ; pr. 19,2 cm
Don du baron Jean-Charles Davillier, 1884
Département des Sculptures (R.F. 688)
La Vierge et l’Enfant sous un édicule, avant restauration
Ce beau relief présentait un aspect général très insatisfaisant
dû à une patine noire, un badigeon gris-beige sur le fond étoilé
et un encrassement général important et inégal perturbant la
lecture des volumes. De plus, des restitutions pulvérulentes le
fragilisaient.
La Vierge et l’Enfant sous un édicule, après restauration
205
Vie des collections
La restauration a consisté principalement dans les étapes
suivantes :
– un dégagement et un refixage des restes de polychromie
(bleu, jaune), en particulier sur le fond étoilé ;
– l’élimination mécanique des comblements au plâtre rose ;
– une reprise de l’assemblage de l’Enfant avec la Vierge, qui,
après analyses au C2RMF, s’est révélé être fabriqué dans la
même terre que l’œuvre ;
– des collages, bouchages ou petites reconstitutions, retouches
d’intégration et d’harmonisation pour redonner une lisibilité
satisfaisante à l’œuvre.
M. Bormand
 This fine relief was obscured under a dark patina, a grey-beige
distemper on the starry ground, and an uneven overall layer of dirt that
impaired the sculptural effects. Moreover, the deterioration of the
reconstructions had rendered the piece fragile.
The restoration mainly consisted of:
- the removal of dirt and the repair of the traces of polychrome (blue and
yellow), particularly on the starry ground;
- the mechanical elimination of the areas filled with pink plaster;
- a review of the assemblage of the Child with the Virgin, which, after
analyses by the C2RMF (Centre for Research and Restoration of the Museums
of France), was found to be made from the same clay as the work itself;
- the gluing of areas, filling in, and small reconstructions, all integration
and harmonisation work to ensure the piece has greater legibility.
Restauration de deux bustes de l’Antico
Programme suivi par Marc Bormand
Analyse au C2RMF : Marc Aucouturier (analyse des matériaux)
Étude et restauration : Marie-Emmanuelle Meyohas, avec le concours de Juliette Lévy
206
Attribués à Pier Jacopo Alari Bonacolsi, dit l’Antico
(Mantoue, vers 1460 – 1528)
Antonin le Pieux
Faustine l’Ancienne
Vers 1525
Buste, bronze patiné et partiellement doré. H. 67 cm ; l. 50 cm
Probablement Mantoue, puis ancienne collection de la Couronne
Département des Sculptures (Cat. 1922-849)
Vers 1525
Buste, bronze patiné et partiellement doré. H. 68 cm ; l. 48 cm
Probablement Mantoue, puis ancienne collection de la Couronne
Département des Sculptures (Cat. 1922-847)
Antonin le Pieux, avant restauration
Antonin le Pieux, après restauration
Restaurations
Faustine l’Ancienne, avant restauration
Faustine l’Ancienne, après restauration
L’étude préalable effectuée par Marie-Emmanuelle Meyohas
avec le concours de Marc Aucouturier a révélé la présence de
plusieurs couches superposées qui masquaient le contraste original entre les parties patinées et les parties dorées. En effet, à
l’origine, les carnations étaient recouvertes d’une patine fine et
noire, tandis que le manteau, la couronne d’Antonin, le drapé et
la coiffure de Faustine portaient une dorure. La surface des deux
bustes était dissimilée sous les repeints et les couches de cire.
La restauration a consisté en un dégagement sous loupe
binoculaire de la dorure sur les drapés ainsi que sur la coiffure et la couronne, redonnant aux deux bustes leur splendeur
originale, et en l’élimination des couches recouvrant la patine
originale, permettant de redécouvrir la finesse des visages, du
tracé et des boucles des chevelures.
M. Bormand
 The preliminary examination carried out by Marie Emmanuelle
Meyhoas, with the assistance of Marc Aucouturier, revealed several
superposed layers that masked the original contrast between the patinated
and gilded parts. Indeed, originally, the flesh tones were covered with a
fine, black patina, and Antoninus’s coat and crown and Faustina’s drapery
and coiffure were gilded. The surface of both busts was hidden under the
layers of repainting and wax.
The restoration involved removing the gilding from the drapery, hair,
and crown, and eliminating later layers applied over the original patina, to
reveal the fine details of the faces, contours, and locks of hair.
207
Vie des collections
Restauration d’une terre cuite de Michel Anguier
Programme suivi par Geneviève Bresc-Bautier
Analyse au C2RMF : Thierry Borel (radiographie)
Étude et restauration : Catherine Lepeltier
Michel Anguier (Eu, 1612 – Paris, 1686)
Hercule aidant Atlas à supporter le globe terrestre
Groupe, terre cuite. H. 1,30 m ; l. 58 cm ; pr. 60 cm
Donné par le sculpteur à l’Académie royale de peinture et de sculpture
le 9 mars 1669, à l’occasion de sa réception à titre honorifique
le 4 février 1668
Département des Sculptures (M.R. 3516)
208
bonne cuisson. Pourtant, elle a entraîné des fissures – ensuite
comblées – et des restitutions en plâtre qui sont anciennes.
Ponctuellement, une couche noire indique une tentative
visant à donner l’aspect du bronze.
G. Bresc-Bautier
La radiographie et l’élimination de plusieurs badigeons de
surface, rose ou marron, ainsi que de ragréages ont permis
de comprendre les étapes de la création. L’œuvre en terre a
été exécutée en plusieurs pièces et les personnages conçus
séparément. On observe sur les membres des joints réguliers,
correspondant à des abattis, nécessaires pour obtenir une
 The radiography and the elimination of several surface distempers in
pink and brown, and the removal of material added to consolidate the
surface, revealed the stages of the group’s creation, which involved
combining several separate pieces. Regular joints can be seen on the limbs,
indicating the use of abatis (reinforcements) to facilitate the firing process.
However, cracks did occur—which were then filled in—and there are old
plaster reconstructions. Here and there, a black layer indicates an attempt
to give the piece the appearance of bronze.
Hercule aidant Atlas à supporter le globe terrestre, avant restauration
Hercule aidant Atlas à supporter le globe terrestre, après restauration
Restaurations
Restauration d’une statue de bois représentant saint Louis de Gonzague
Programme suivi par Guilhem Scherf
Analyse au C2RMF : Thierry Borel (radiographie), Anne-Solenn Le Hô (polychromie)
Étude et restauration : Claire Dard-Ternisien
Saint Louis de Gonzague
Allemagne du Sud, début du xviiie siècle
Statue, bois (tilleul) polychromé, sur socle de bois (résineux) doré.
H. 1,25 m ; l. 86 cm ; pr. 51 cm
Acquis sur le marché de l’art parisien, 1938
Département des Sculptures (R.F. 2490)
L’œuvre a subi un décapage drastique sur les carnations et sur
le devant du vêtement. La surface était très chaotique : des
traces de préparation blanche originale, du bol rouge, des
restes de feuilles d’argent aujourd’hui noircis, des repeints…
auxquels s’ajoutait de l’encrassement. Il a été décidé de procéder à une restauration fondamentale de cette statue, rare
exemple de sculpture du baroque germanique dans les collections du Louvre. Les éléments de polychromie ancienne ont
été nettoyés, de fines retouches effectuées. Le dégagement de
parties non grattées a mis au jour, au dos de l’œuvre, une argenture bien conservée et non oxydée, ce qui est rare.
G. Scherf
 The work was subjected to a drastic stripping of the flesh areas and the
front of the clothing. The surface was very muddled: there were traces of
original white preparation, red bole, the remains of silver leaf, which had
blackened, repainted areas, and not least a layer of dirt. The decision was
made to undertake a major restoration of this work, which is a rare example
of German Baroque sculpture in the Louvre collections. The old polychrome
elements were cleaned, and certain parts were finely retouched. On the
back of the work the removal of unscratched areas revealed silvering that
was well preserved and which had not oxidised, which is rare.
Saint Louis de Gonzague, avant restauration
Saint Louis de Gonzague, après restauration
209
Vie des collections
Les restaurations des sculptures du jardin des Tuileries
Programme suivi par Geneviève Bresc-Bautier
Pierre Legros et Jean Robert
Deux vases
Marbre
Département des Sculptures (M.R. 2904-2905)
Restauration : Frédéric Rouchet
Lorenzo Ottone
Le Nil
Marbre
Département des Sculptures (M.R. 1964)
Restauration : Arnaud de Villeneuve
Pierre Bourdict
Le Tibre
Marbre
Département des Sculptures (M.R. 1765)
Restauration : Arnaud de Villeneuve
Giuseppe Franchi
Deux lions
Marbre
Département des Sculptures (LL 57-58)
Restauration : Hugues de Bazelaire
210
Vase (M.R. 2904), avant restauration
Depuis que le musée du Louvre a reçu la gestion du jardin des
Tuileries, un programme de restauration des sculptures y est accompli, ainsi qu’un entretien annuel de la sculpture contemporaine (par Olivier Morel) et des bronzes (par Antoine Amarger).
En 2010, trois ensembles d’œuvres ont fait l’objet de restaurations fondamentales : deux vases exécutés pour Versailles, Le Nil
et Le Tibre, commandés par Louis XIV à Rome, et les deux lions
placés aux angles de la place de la Concorde. Outre le traitement
biocide contre les colonisations végétales, les restaurateurs ont
procédé à l’ablation des croûtes noires qui se formaient dans
les zones protégées, par compresses et/ou microgommage. Les
parties saillantes déminéralisées (marbre « pouf ») ont été consolidées. Les joints dégradés et les fissures ont été comblés.
G. Bresc-Bautier
 Since the Musée du Louvre was given responsibility for the Tuileries
garden, a restoration programme has been implemented for the sculptures
and annual maintenance of the contemporary sculpture (by Olivier Morel)
and the bronzes (by Antoine Amarger). In 2010, three groups of works
were completely restored: two vases executed for Versailles, the Nile and
the Tiber, commissioned by Louis XIV in Rome, and the two lions located in
the corners of the Place de la Concorde. In addition to treatment against
mould, the restorers removed the black encrustations that had formed in
the depressions, using compresses and/or micro-exfoliation. Demineralised
projecting parts (“friable” marble) were consolidated. The worn joints and
cracks were filled in.
Vase (M.R. 2904), après restauration
Restaurations
Le Nil (M.R. 1964), avant restauration
Le Nil (M.R. 1964), après restauration
Le Tibre (M.R. 1765), avant restauration
Le Tibre (M.R. 1765), après restauration
Lion (LL 57), avant restauration
Lion (LL 57), après restauration
211
Vie des collections
Restaurations pour l’Histoire du Louvre
Programme suivi par Guillaume Fonkenell
Restauration : Sara Benkhalifa, Fabienne Druilhe
212
À la suite du transfert des plâtres de l’architecte en chef du
Louvre depuis la réserve Macdonald jusqu’à la plaine SaintDenis, la section Histoire du Louvre a entrepris une campagne
progressive de conservation préventive sur ces pièces. Deux
estampages pris par l’architecte Lefuel au début des années
1860 sur le palais des Tuileries et témoignant des détails de
modénature de ce palais disparu ont été refixés sur un support
rigide, consolidés et dépoussiérés (HL MOUL 153 et 302). Des
modèles préparatoires au décor du xixe siècle (HL MOUL 191,
473 et 550) ont également été restaurés. Cette opération a
été menée par les restauratrices Sara Benkhalifa et Fabienne
Druilhe.
G. Fonkenell
 After the transfer of the plasters by the Louvre’s chief architect from
the McDonald reserve to the Plaine Saint-Denis reserve, the History of the
Louvre division has undertaken a gradual campaign of preventative
conservation on these items. Two impressions taken by the architect Lefuel
at the beginning of the 1860s on the Palace of the Tuileries, which attest to
the proportions and outlines of this now inexistent palace, were attached
to a rigid support, consolidated, and cleaned of dust (HL MOUL 153 and
302). Preparatory models of the nineteenth-century decorations (HL MOUL
191, 473, and 550) were also restored. This operation was carried out by
the restorers Sara Benkhalifa and Fabienne Druilhe.
Estampage pris par Lefuel sur le palais des Tuileries
Modèle préparatoire au décor du xixe siècle
Restaurations
Objets d’art
Le projet de rénovation des salles de mobilier du xviiie siècle est évidemment le
chantier de restauration prioritaire au sein du département des Objets d’art, en vue
de la réouverture de ces salles au printemps 2013.
Concernant les autres périodes, certaines opérations d’envergure ont été lancées
à l’occasion de prêts importants pour des expositions temporaires, comme dans
le cas de la tapisserie de l’Adoration des Mages, prêtée au Japon, qui a fait l’objet
d’une étude détaillée et d’une intervention fondamentale. Un exemple similaire
est la couronne de Louis XV, dont le prêt exceptionnel à Versailles a donné lieu
à une révision complète : nettoyage très poussé, remplacement avec l’aide de la
maison Chaumet d’un chaton de pierre manquant, remise en place d’un rang de
perles d’imitation anciennes, préservation de la calotte originale, qui a été copiée à
l’identique en soie rouge brodée de fils d’or par la maison Lesage.
D’autres opérations menées en 2010, sur – entre autres – des émaux fragiles
de Limoges ou de Venise, ou encore le nettoyage complexe de l’argenterie des
appartements Napoléon III, s’inscrivent dans des campagnes régulières de suivi des
collections.
M. Bascou
 The renovation project on the eighteenth-century furniture rooms is a clear priority for the
Department of Decorative Arts, given that the rooms are scheduled to reopen in the spring of
2013.
As far as the other periods are concerned, thorough operations have been initiated whenever
important works have been loaned for temporary exhibitions, such as the tapestry of the Adoration
of the Magi, which was sent to Japan and required a systematic examination and intervention.
Another similar example is the crown of Louis XV, which was exceptionally loaned to Versailles, and
underwent extensive restoration work. This involved a delicate cleaning operation, and the
replacement—with the help of Chaumet—of a stone missing with its setting, the refitting of a row
of ancient imitation pearls, and the preservation of the original cap, which was identically copied
in red silk and embroidered with gold threads by the maison Lesage.
Other operations carried out in 2010—which included safeguarding fragile enamels from
Limoges and Venice and the intricate cleaning of the silverware from the apartments of Napoleon
III—are part of the regular maintenance programmes for the collections.
213
Vie des collections
Une restauration inédite de tapisserie par nettoyage enzymatique
Programme suivi par Agnès Bos
Études et analyses : Sylvie Forestier et Nathalie Balcar (C2RMF), Dominique de Reyer (LRMH)
Restauration : Sylvie Forestier, assistée de Cécilia Aguirre et Tahlia Bajon-Bouzid
L’Adoration des Mages
Bruxelles, vers 1570
Tapisserie. H. 1,40 m ; l. 1,75 m
Ancienne collection Spitzer ; legs Charles Rochard, 1896
Département des Objets d’art (OA 5942)
La tapisserie de l’Adoration des Mages est entrée dans les collections du musée du Louvre grâce au legs de Charles Rochard
en 1896, collectionneur qui l’avait acquise à la vente de la collection Spitzer deux ans auparavant. De dimensions modestes
et particulièrement riche par la présence de nombreux fils
métalliques, cette tapisserie devait servir à la dévotion d’un
particulier ou comme retable dans une chapelle. Ce format qui
la rapproche d’un tableau avait justement conduit l’un de ses
propriétaires anciens (Spitzer ?) à la faire tendre sur un châssis.
Le prêt de la tapisserie pour l’exposition « L’Enfant dans les
collections du musée du Louvre », présentée à Tokyo, au National Art Center, de mars à juin 2009, puis à Osaka, au National
Museum of Art, de juin à septembre 2009, sous le commissariat de Guillemette Andreu-Lanoë, a été l’occasion d’enlever le
châssis qui provoquait des tensions nuisibles et d’envisager sa
restauration, confiée à la restauratrice de textiles Sylvie Forestier. La dépose du châssis puis de la doublure qui se trouvait
entre celui-ci et la tapisserie a révélé la présence d’un badigeon
de colle, mélange de colle de peau et de colle d’amidon (analyse
par Nathalie Balcar). Ce type d’adhésif ne peut être ôté de façon
satisfaisante ni mécaniquement (au scalpel) ni par un nettoyage
classique comme il est habituellement pratiqué sur les tapisseries. Depuis quelques décennies, le recours à un traitement
enzymatique est privilégié par certains restaurateurs textiles
dans des cas de figure comme celui-ci et permet d’obtenir des
résultats satisfaisants. Dans la littérature sur le sujet, il n’existe
pas de mention d’un tel traitement appliqué à une tapisserie
à fils métalliques, car les spécialistes considèrent que l’action
des enzymes est susceptible d’être inhibée par ces éléments
214
Tapisserie de l’Adoration des Mages (revers), en cours de restauration
métalliques. L’année 2009 a donc été consacrée à une étude
approfondie par Sylvie Forestier de la faisabilité d’un nettoyage
enzymatique de la tapisserie. Outre la question des fils métalliques, il convenait également de tester au préalable la stabilité
des colorants en bain et l’ampleur des risques de dégorgement
le cas échéant. Cette étude fut complétée par une analyse des
fils métalliques au microscope électronique à balayage couplé à
une micro-sonde EDS, effectuée par Dominique de Reyer.
L’étude détaillée menée par Sylvie Forestier a conclu à la possibilité de procéder à un tel traitement et a permis de mettre
en place un protocole précis, à partir d’un test effectué sur une
petite partie de la tapisserie. L’enzyme utilisée est l’α-amylase,
catalyseur spécifique de l’amidon, qui est activée en milieu
aqueux, dans des conditions de pH et de température précises et
soigneusement contrôlées. L’adoption d’un tampon phosphate
permet d’éviter les chutes de pH au moment de la mise en bain
de la tapisserie, dont le badigeon est acide. Après validation
de la proposition de traitement par la commission de restauration du musée du Louvre en janvier 2010, il fallut procéder
à la construction d’un bac de lavage adapté aux dimensions
de la tapisserie. Après d’ultimes tests, le bain eut lieu en juillet
2010, au sein de l’atelier de restauration des textiles du C2RMF,
sous la direction d’Agnès Mathieu-Daudé et Roberta Cortopassi,
conservateurs de la filière arts décoratifs. Sylvie Forestier était
assistée de deux autres restauratrices textiles, Cécilia Aguirre et
Tahlia Bajon-Bouzid, afin de pouvoir effectuer l’ensemble des
opérations de lavage et de séchage dans une seule journée.
Le résultat de cette opération a dépassé les espérances. Non
seulement le badigeon de colle a presque entièrement disparu
– l’objectif premier était donc atteint –, mais les fils métalliques, noircis par la sulfuration, ont retrouvé un éclat remarquable qui rend à la tapisserie sa splendeur d’origine. Enfin, la
restauration s’est poursuivie par les consolidations nécessaires
et par la pose d’une doublure adaptée.
Au caractère exceptionnel de cette restauration, qui semble
être une première en France,
une autre découverte s’est
ajoutée. Lors de la dépose du
châssis et de la doublure ancienne, le galon moderne a
également été ôté. Cette opération a révélé la présence,
sur la lisière ancienne, de la
marque Brabant Bruxelles et
du monogramme du licier,
FG, attribué traditionnellement à Frans Geubels,
entrepreneur bruxellois très
important dans les années
1560-1585. Cette découverte
permet d’envisager de façon
sérieuse une étude approfondie de cette œuvre qui
n’a jusqu’ici jamais attiré
l’attention des historiens
Restaurations
spécialistes de la tapisserie,
en dépit de ses qualités aussi
bien techniques qu’esthétiques. Un article à paraître
dans La Revue des musées de
France. Revue du Louvre est
en préparation, en collaboration avec Agnès MathieuDaudé et Sylvie Forestier, et
la tapisserie fera également
l’objet d’une présentation
à l’auditorium du Louvre
pour une « Œuvre en scène »
à l’automne 2011. Cela permettra, nous l’espérons, de
faire connaître largement ce
chef-d’œuvre de la tapisserie
flamande de la Renaissance.
A. Bos
 The loan of this tapestry for
the exhibition “L’enfant dans les
collections du musée du Louvre”
(Children in the Musée du Louvre
collections; Tokyo and Osaka,
2009) provided the opportunity to
remove it from the stretcher—
which was causing unwanted tension—and to perform restoration
Tapisserie de l’Adoration des Mages, après restauration
work on the tapestry. Once the
stretcher and the lining were removed, the fabric’s back revealed
the presence of an adhesive distemper—a blend of animal skin glue and starch glue (analysis by Nathalie
The outcome exceeded all expectations: the adhesive distemper was
Balcar, C2RMF, the Centre for Research and Restoration of the Museums of
almost completely removed and, above all, the metal threads, blackened
France). In 2009, a detailed examination of the work was carried out by
by sulphurisation, are now remarkably shiny, which has restored the
Sylvie Forestier to decide on the feasibility of enzymic cleaning. The stabiltapestry to its original splendour. Moreover, when the later border was
ity of the dyes was also tested, to assess the risks of the colours running.
detached along with the canvas-stretcher, the original edge of the material
Meanwhile the metal threads were studied under a electron microscope
revealed the mark of Brabant Bruxelles and the monogram of the tapestry
equipped with an energy dispersive spectrometer (SEM/EDS), carried out
maker, FG, traditionally attributed to Frans Geubels, a major entrepreneur
by Dominique de Reyer (LRMH).
in Brussels from 1560 to 1585.
Le chantier des collections de mobilier du xviiie siècle
Programme suivi par Frédéric Dassas
Dans la perspective de la rénovation complète des salles de mobilier du xviiie siècle, dont la réouverture est prévue en 2013, les
opérations conduites en 2010 ont porté sur les lambris et le bois
doré, le mobilier Boulle et les bronzes d’ameublement, les garnitures de siège, la collection de boîtes et objets de vitrine. Elles
se répartissent entre campagnes de constats, établissement de
cahiers des charges de restauration et restaurations proprement
dites. Pour les travaux concernant le mobilier Boulle, on se référera à la partie consacrée aux travaux de recherche.
Restauration des ensembles de boiseries
Les boiseries recueillies par le département des Objets d’art,
provenant d’hôtels particuliers parisiens, sont bien documen-
tées et ont heureusement échappé au décapage radical couramment pratiqué à la fin du xixe et au début du xxe siècle. Leur
restauration devrait permettre de rétablir dans toute la mesure
du possible les couleurs et les subtilités des dorures originales.
La réflexion sur la restauration et le remontage des lambris
s’est déroulée avec la collaboration scientifique de Fabrice
Ouziel, historien, et du C2RMF, en concertation avec l’agence
de Michel Goutal, assisté du scénographe Jacques Garcia.
Chaque ensemble a fait l’objet d’une étude préalable conduite
en 2010 par Jean Perfettini, et d’un projet complet de remontage, incluant le traitement des parties existantes, la définition des parties à restituer (corniches, éléments disparus), en
accord avec les informations fournies par les descriptions et
215
Vie des collections
vues anciennes. Les boiseries qui étaient présentées dans les
salles du département ont été démontées au cours du dernier
trimestre 2010 en vue de leur externalisation.
Le travail d’élaboration des cahiers des charges de restauration des lambris, suivi de l’analyse des offres remises par les
entreprises, a été achevé au cours du premier semestre 2010
pour le petit salon de l’hôtel de Villemaré (lot attribué au groupement constitué par J. Perfettini) ; pour la bibliothèque de
l’hôtel de Villemaré, ainsi que pour le salon de compagnie et
la chambre sur cour du même hôtel (lots attribués au groupement constitué par les Ateliers La Chapelle) ; et au second
semestre 2010 pour les boiseries de la chambre de parade de
l’hôtel de Chevreuse (lot attribué au groupement constitué par
les Ateliers La Chapelle). La restauration des trumeaux de miroirs et niches de l’hôtel Le Bas de Montargis doit en revanche
être effectuée au C2RMF.
Campagne de constats et restauration des bois dorés
La campagne a été conduite en collaboration avec le C2RMF et
confiée à Roland Février, responsable de l’atelier de bois doré.
Elle a été suivie au département des Objets d’art par Frédéric
Dassas et Marie-Elsa Dantan.
Entreprise en avril 2010, elle s’est achevée en mars 2011. Elle
a porté sur soixante-neuf sièges, vingt-quatre consoles et deux
miroirs. L’examen a donné lieu à l’établissement d’un constat
détaillé par objet et d’un programme de restauration : suppression de retouches anciennes masquant les dorures originales et
restitution d’éléments manquants. Un document de synthèse
a été élaboré, après achèvement des examens, au cours du premier semestre 2011.
La campagne de restauration des consoles de bois doré,
entreprise en 2008, a vu l’achèvement de la restauration des
œuvres suivantes :
– OA 5260 : console Louis XIV à six pieds ;
– OA 5088 : console du grand cabinet du château de Bercy ;
– OA 5049 : table-console à huit pieds du château de Bercy.
Les restaurations suivantes ont été poursuivies ou mises en
chantier :
– OA 5089 : console Régence ;
– OA 5127 : console rocaille ;
– OA 5234 : console du cabinet turc du comte d’Artois.
Campagne de constats des bronzes d’ameublement
La campagne a été conduite en collaboration avec le C2RMF
et confiée à Emmanuel Plé, responsable de l’atelier de métal.
Elle a été suivie au département par Frédéric Dassas et Béatrice
Coullaré.
Entreprise en avril 2010, elle s’est achevée au cours du
premier trimestre 2011. Elle a porté sur près de quatre cents
objets : luminaires, chenets et objets montés. L’examen a donné lieu à l’établissement d’un constat détaillé par objet et d’un
programme de restauration : nettoyage, consolidation et réassemblage, en fonction des choix faits pour les futures salles.
Un document de synthèse a été élaboré après achèvement des
examens.
Restauration de la console du cabinet turc du comte d’Artois, quatre étapes de
216
l’intervention sur l’une des figures ailées
Campagne de constats des garnitures de sièges
La campagne a été confiée à Xavier Bonnet, tapissier restaurateur, et s’est déroulée en juin 2010. Elle a été suivie au département par Frédéric Dassas et Catherine Voiriot. Elle a porté sur
environ cent quatre-vingts sièges.
Restaurations
L’examen a donné lieu à l’établissement d’un constat permettant de repérer les garnitures anciennes ou les fragments
de garnitures subsistantes.
Campagne de constats des boîtes et objets de vitrine
Entreprise en 2009 et achevée au cours du troisième trimestre
2010, la campagne a concerné l’ensemble de la collection de
boîtes en or et objets précieux du département, soit sept cent
quarante-trois objets.
Elle a été confiée à des restaurateurs spécialisés : Béatrice
Beillard (émaux et orfèvrerie), Virginie Trotignon (vernis et
miniatures), Élisabeth Grall (écaille) et Stéphane Crevat (structures et démontages). Elle a été suivie au département par
Frédéric Dassas et Marie-Hélène de Ribou. Chaque pièce a fait
l’objet d’un constat détaillé et d’une estimation du temps de
travail à prévoir en vue des interventions nécessaires avant la
réouverture des salles.
F. Dassas
Restauration de la console du cabinet turc du comte d’Artois, partie supérieure
du pied portant un décor à l’imitation de pierre dure : état avant et après
 As part of the complete renovation of the eighteenth-century furniture
rooms (scheduled to reopen in 2013), the interventions carried out in 2010
focused on the panelling and gilt wood, the Boulle furniture and gilt
fittings, the seat fittings, and the collection of boxes and objects of vertu.
The restoration and reassembly of the panelling was conducted in
collaboration with the historian Fabrice Ouziel, and the C2RMF (Centre for
Research and Restoration of the Museums of France), in conjunction with
the agency of Michel Goutal, assisted by the designer Jacques Garcia. Each
ensemble was subjected to a preliminary study carried out in 2010 by Jean
Perfettini, and was completely reassembled.
The work on the gilt wood pieces (69 seats, 24 consoles, and 2 mirrors)
was carried out in collaboration with the C2RMF and run by Roland Février,
head of the gilt wood workshop; the operation was overseen in the
Department by Frédéric Dassas and Marie-Elsa Dantan. It was started in
2010 and scheduled to finish in March 2011.
The programme relating to the gilt fittings was carried out in
collaboration with the C2RMF, and was run by Emmanuel Plé, head of the
metalworking workshop and overseen in the Department by Frédéric
Dassas and Béatrice Coullaré about 400 objects.
The verification and examinations of the seat fittings (about 180 seats)
was run by the upholsterer and restorer Xavier Bonnet, and took place in
June 2010; the operation was overseen in the Department by Frédéric
Dassas and Catherine Voiriot.
The verifications and examinations of the boxes and objects of vertu
focused on the Department’s entire collection (743 objects). This was
entrusted to specialized restorers: Béatrice Beillard (enamels and silver/gold
works), Virgine Trottignon (varnishes and miniatures), Elisabeth Grall
(surface flaking), and Stéphane Crevat (structures and dismantling); the
operation was overseen in the Department by Frédéric Dassas and MarieHélène de Ribou.
restauration.
217
Vie des collections
Peintures
Travaillant en étroite collaboration avec le C2RMF, qui assure l’intégralité de
la maîtrise d’œuvre de ces restaurations, le département des Peintures a défini,
pour l’année 2010, trois axes principaux en ce qui concerne les restaurations des
collections dont il a la responsabilité.
Tout d’abord, la poursuite d’une programmation d’interventions sur des tableaux
montrés en salles ou conservés en réserves et n’ayant pas bénéficié des campagnes de
restaurations accompagnant les travaux du Grand Louvre. C’est dans cette logique
que l’on a décidé d’entreprendre la restauration de la série des paysages peints au
Brésil par Frans Post, présentée ci-dessous, ainsi que des paysages peints par JulesGeorges Bondoux et représentant les sites de Suse et leurs vestiges archéologiques.
Par ailleurs, plusieurs restaurations importantes ont été liées en 2010 à des retours
d’œuvres déposées – particulièrement dans des ministères –, œuvres qui ont dû
subir à leur arrivée au Louvre des interventions plus ou moins approfondies avant
de réintégrer les salles d’expositions permanentes.
Ensuite, l’année 2010 a été tout particulièrement occupée par la préparation,
la poursuite ou le lancement de la restauration de cinq tableaux très importants :
La Vénus du Pardo de Titien ; Sainte Anne, la Vierge et l’Enfant Jésus de Léonard de
Vinci ; la grande croix attribuée à Giotto ou à son atelier ; Les Pèlerins d’Emmaüs
de Rembrandt, étudiés ci-dessous ; Eva Prima Pandora de Jean Cousin. Discutées
et analysées au préalable durant des journées d’étude, ces restaurations, qui
seront expliquées et diffusées en toute transparence à l’occasion d’expositions
et de publications futures, ont généralement été suivies par des commissions de
spécialistes.
Enfin, il convient de signaler l’achèvement en 2010 de la restauration du Déluge
de Girodet-Trioson, une intervention importante qui a été décidée à l’issue de
l’exposition consacrée en 2005 à ce peintre et qui a dû être effectuée dans les ateliers
du C2RMF à Versailles. De même, le département des Peintures a suivi la restauration
de l’imposant tableau d’Ary Scheffer Les Bourgeois de Calais, restauration financée
par l’Assemblée nationale, où il se trouve toujours déposé.
Dans le cadre du chantier des objets d’art du xviiie siècle, le département des
Peintures a lancé des appels d’offres pour la restauration de deux importants
plafonds peints par Giovanni Scaiario et Antoine François Callet.
V. Pomarède
218
 Throughout each year the Department of Paintings works in close collaboration with the
C2RMF (Centre for Research and Restoration of the Museums of France) to ensure that every
aspect of the restoration of its holdings is safely concluded.
In 2010 the Department adopted a three-part approach, the first stage of which involved working
on paintings on display in the exhibition rooms, or held in storage and previously omitted from
restoration programmes. The first choice fell on a series of landscapes painted in Brazil by Frans Post,
and paintings documenting the archaeological sites of Suse and the ancient ruins discovered there.
Also, several major restorations carried out in 2010 were related to the return of works on loan
(particularly those previously entrusted with French ministries), which required varying degrees of
restoration before they could be integrated into the permanent exhibition halls.
Among the main achievements of the year was the restoration of five highly prized works: The
Pardo Venus by Titian; the Virgin and Child with St Anne by Leonardo da Vinci; the large cross
attributed to Giotto or his workshop; Rembrandt’s The Pilgrims at Emmaus; and Jean Cousin’s Eva
Prima Pandora. The first stage involved holding a series of dedicated Study Days for discussion and
analysis (the findings of which will be divulged through forthcoming exhibitions and publications),
after which the projects were monitored by specialist workgroups.
The year 2011 also saw the successful completion of restoration work on Girodet-Trioson’s
Déluge, which began after the 2005 exhibition devoted to this painter, and was undertaken in the
C2RMF workshops at Versailles. Likewise, the Department of Paintings oversaw the restoration of
Ary Scheffer’s impressive Les bourgeois de Calais, a restoration funded by the Assemblée Nationale,
where it remains on deposit.
Restaurations
Étude et restauration du Reniement de saint Pierre des frères Le Nain
Programme suivi par Sylvain Laveissière
Restauration au C2RMF : Jean-Michel Hulot pour le support et Frédéric Pellas pour la couche picturale en 2009
Les frères Le Nain, Louis (Laon, vers 1600-1610 – Paris, 1648),
Antoine (Laon, vers 1600-1610 – Paris, 1648) ou Mathieu
(Laon, vers 1607 – Paris, 1677)
Le Reniement de saint Pierre
Huile sur toile. H. 92 cm ; l. 1,18 m
Trésor national donné à l’État pour le Louvre par le Groupe AXA
Département des Peintures (R.F. 2008-56)
bords soulevés ont été abrasés. Malgré une adhérence médiocre,
l’opportunité d’une reprise de rentoilage n’a pas été retenue.
L’étude de la radiographie a fait apparaître que la toile avait
fait l’objet d’un double réemploi. Un portrait de femme dans
le sens vertical et une scène ressemblant à une Nativité dans le
sens horizontal se sont succédé, apparemment dans cet ordre,
et chacune a été recouverte d’une couche, parfois noire, qui a
conditionné la perception de la composition définitive.
La préparation est à deux couches, rouge d’abord puis grise,
comme il est fréquent au xviie siècle et constant chez les Le Nain.
Les grains de litharge, nombreux, ont subi une abrasion.
Le nettoyage a révélé la profondeur et la luminosité du vêtement de saint Pierre, dont le bleu est exécuté en lapis sur une
sous-couche mélangeant indigo et blanc de plomb.
S. Laveissière
Ce tableau, connu par les sources, est réapparu en vente publique
à Nancy le 19 mars 2000. Il s’identifie avec le « Saint Pierre de
défunt M. Le Nain » que l’Académie royale de peinture, en quête
d’un logis au Louvre, offrit en 1656 au cardinal Mazarin, avec un
« tableau de fruits » de Pierre Antoine Lemoine. Il s’agit, comme
pour le tableau de Lemoine, du « morceau de réception » offert à
l’Académie par l’auteur, pratique dont l’usage se régularisera par
la suite. On le retrouve dans l’inventaire du ministre en 1661, sans
nom d’auteur mais avec dimensions et description : « Un autre
 This painting was identified as the St Peter’s Denial by the Le Nain
brothers, offered to Cardinal Mazarin in 1656 by the Académie Royale de
[tableau] fait sur toile représentant saint Pierre entre deux soldats
Peinture. On the canvas, whose original upper and left-hand edges have
et une servante, haut de deux pieds dix pouces et trois pieds neuf
survived, are the marks of the old canvas-stretcher, which shows that the
pouces de large [0,92 5 1,21 m], prisé 45 livres ». Les frères Le Nain
painting’s current dimensions are very close to those of its original format.
furent reçus à l’Académie royale de peinture et de sculpture en
Although the canvas is slightly loose, it will not be reinforced.
mars 1648, et les deux aînés devaient mourir subitement en mai.
Radiographic tests revealed that the canvas itself had already been used
La mention « défunt M. Le Nain » doit donc désigner Antoine ou
twice, with a Portrait of a Woman on the vertical axis, and a scene resembling
Louis. Mais on sait que les trois frères travaillaient dans un atelier
a Nativity in the horizontal position.
commun et signaient sans préciser le prénom de chacun. L’attriUnder the yellowed and dirty varnish, large areas of the picture had
bution du présent tableau à l’un ou l’autre, ou à deux, voire à trois
been retouched. The cleaning revealed the depth and luminosity of St
Peter’s clothing, and the blue was executed in lapis lazuli over an undercoat
des frères est donc encore sujette à discussion.
of a mixture of indigo and lead white.
Les observations suivantes résument les deux rapports de traitement rédigés par Frédéric
Pellas.
L’œuvre n’avait pas été touchée depuis la vente de 2000.
La toile, dont les bords originaux supérieur et senestre sont
conservés, avec une bande non
préparée, montre sur les quatre
côtés des guirlandes de tension prononcées qui, avec les
marques de l’ancien châssis,
attestent que les dimensions
actuelles du tableau sont très
proches de son format original. Sous un vernis jauni et encrassé, il présentait de larges repeints, y compris sur de petites
lacunes non mastiquées, et un
jutage général, imputables à
une restauration du xixe siècle,
sans doute contemporaine du
rentoilage effectué après 1842
(datation fournie par les journaux utilisés en bordage). Le
coloris du tableau s’en trouvait
fortement altéré, et les formes
alourdies. La surface présente
des craquelures larges dont les
Le Reniement de saint Pierre, avant restauration
219
Vie des collections
Le Reniement de saint Pierre, après restauration
Étude et restauration des Pèlerins d’Emmaüs de Rembrandt
Programme suivi par Blaise Ducos
Étude : Groupe de travail international (Ashok Roy, The National Gallery, Londres ; Petria Noble, Mauritshuis, La Haye)
Restauration au C2RMF : Isabelle Leegenhoek
Rembrandt (Leyde, 1606 – Amsterdam, 1669)
Les Pèlerins d’Emmaüs
1648
Huile sur bois. H. 68 cm ; l. 65 cm
Acquis à la vente Randon de Boisset par Paillet, marchand d’art, pour
Louis XVI, 1777
Département des Peintures (INV. 1739)
220
La restauration des Pèlerins d’Emmaüs (ou Le Souper à Emmaüs)
de Rembrandt s’inscrit dans un programme de recherche au
long cours sur la collection rembranesque du Louvre, riche
d’environ trente peintures – œuvres du maître ou qui lui
furent attribuées au cours de leur existence. Depuis 2006 et
les premières journées d’étude organisées par le département
des Peintures sur « Rembrandt au Louvre » (26 juin 2006, restitution à l’Auditorium le 1er décembre), la collection est l’objet
d’une étude systématique renouvelée, en partenariat avec le
C2RMF. Source d’informations neuves et complémentaires, les
examens des tableaux livrent une image précise de l’état des
œuvres, en même temps qu’ils fournissent l’indispensable matériau à même de servir la comparaison avec d’autres tableaux
de Rembrandt ou de son école conservés à l’étranger. Les
tableaux du Louvre peuvent et doivent être mis en relation
avec les œuvres du Rijksmuseum à Amsterdam, du Mauritshuis
à La Haye, du Metropolitan Museum of Art, de la National
Gallery de Londres, de la Gemäldegalerie Alte Meister à Dresde.
Les Pèlerins d’Emmaüs, un tableau reconnu et célèbre, œuvre
de la maturité de l’artiste, offrait un état de présentation insatisfaisant : irrégularités de la surface en grand nombre, couches
superposées de vernis modernes fortement oxydés, tensions
exercées par le vernis risquant d’entraîner des soulèvements
de la couche picturale. De l’avis général des spécialistes, la
Restaurations
dégradation du vernis – matériau dont la fonction est d’assurer
la protection de l’œuvre et de renforcer la profondeur de l’image
– altérait nettement la conservation et la vision du tableau.
Les visiteurs de l’exposition organisée autour de la figure du
Christ chez Rembrandt (Louvre, 2011, Philadelphie et Detroit,
2011 et 2012) ont pu redécouvrir l’œuvre et en admirer la beauté.
Plusieurs points sont en effet réapparus avec la restauration,
éclairés par les spécialistes du Mauritshuis et de la National
Gallery qui l’ont suivie de bout en bout. Le tableau présente
ainsi la remarquable caractéristique d’être travaillé en relief par
Rembrandt. L’artiste a suggéré, en particulier, la texture des
murs de la pièce où se déroule l’épisode biblique par des frottements, des arrachages de matière qui évoquent de manière saisissante le crépi ancien… La liberté, la légèreté de la touche ont
une fonction expressive qui vient servir la narration : nuage de
fumée s’élevant du rôt et évoquant l’atmosphère familière dont
le peintre pare les récits des Écritures, crispation des mains des
pèlerins, aura enveloppant le Christ et, surtout, lumière inondant la scène avec des jeux de contre-jours, de clartés réfléchies,
d’ombres propres, indirectes ou portées, qui, toutes, servent
l’affirmation d’une présence exceptionnelle. Enfin, les nuances
de rose, vert, gris qui font vibrer le panneau ont été révélées.
L’allègement de vernis ne livre pas, pour autant, un tableau
dysphonique, dans lequel les couleurs entreraient en concurLes Pèlerins d’Emmaüs, avant restauration
rence les unes avec les autres.
C’est bien une forme d’unité
tonale qui était recherchée
par Rembrandt, mais la
construction graduelle de
l’image peinte (de l’arrière
vers l’avant, au moyen de
palettes différentes selon la
zone travaillée), tout comme
son caractère composite (à la
manière des fresques peintes
à la journée), donnent au résultat une spécificité qui était
occultée par l’action d’un
vernis oxydé.
La restauration des Pèlerins
d’Emmaüs de Rembrandt n’a
pas seulement pour conséquence de faire redécouvrir
une image aux mille détails
jusque-là largement obscurcis (le chien sous la chaise, la
fumée du plat, la texture du
mur, les effets changeants de
la tunique du Christ, le rouge
vif des manches du pèlerin
de droite…). Cette restauration restitue également la
compréhension de l’espace
et de la lumière d’un peintre
du xviie siècle, travaillant
avant les heures glorieuses
de la peinture tonale. Les
contemporains de Rembrandt
louaient l’artiste pour sa capacité à dissocier les couleurs,
tout en associant celles qui
Les Pèlerins d’Emmaüs, après restauration
221
Vie des collections
entretiennent entre elles des relations directes de manière à faire
ressentir la constellation des impressions fugitives que produit
sur l’œil la vision de la nature.
Ayant gardé une enveloppe de plusieurs microns de vernis à
l’issue de l’allègement, Les Pèlerins d’Emmaüs s’insèrent à présent
avec aisance dans la production rembranesque des années 1640.
B. Ducos
 The restoration of The Pilgrims at Emmaus is part of a study programme
on thirty paintings by (or attributed to) Rembrandt. Since the first dedicated
Study Days of 2006 this group of Rembrandts has been systematically
examined in partnership with the C2RMF (Centre for Research and
Restoration of the Museums of France). One in particular, The Pilgrims at
Emmaus (a later work) manifested various problems, including many surface
irregularities, heavy oxidation, and layers of later varnish that had caused
tension in the pictorial layer, especially in the central figure; furthermore,
there were assorted surface alterations and whitened areas that compromised
the rendering of Christ’s face, the chiaroscuro, and the picture’s spatial
construction. Comparison with signed contemporary works held in other
museums corroborated the Louvre painting’s problematic condition.
During restoration, various hitherto obscured details emerged (the dog
under the chair, the steam from the dish, the texture of the wall, the
lighting shifts of Christ’s tunic, the bright red of the sleeves of the pilgrim
on the right, etc.). The restoration has further endorsed this seventeenthcentury painter’s outstanding comprehension of space and light.
Restauration de tableaux de l’école française
Jean Jouvenet (Rouen, 1644 – Paris, 1717)
L’Hiver
1699
Huile sur toile. H. 2,44 m ; l. 1,87 m
Commande de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 5497)
Restauration au C2RMF : Yves Lutet pour le support et Véronique
Sorano-Stedman pour la couche picturale
222
sitaire du tableau (2001) et financeur de l’opération. Roulé sans
doute depuis l’époque de sa dépose au xviiie siècle, le tableau,
fort dégradé, a fait l’objet d’une restauration longue et délicate.
Remis sur un nouveau châssis, rentoilé, rapiécé, il a bénéficié
d’une réintégration illusionniste comportant la réinvention de
certains détails anatomiques disparus (pied, jambe).
M.-C. Sahut
Ce tableau fait partie d’une série de quatre Saisons commandées
pour le salon du pavillon central du château de Marly. Sa restauration est le fruit d’un accord avec le musée de Marly, dépo-
 This painting is part of a series of four Saisons commissioned for the
salon of the central pavilion of the Château of Marly, and was restored
by agreement with the Musée de Marly in 2001, where the painting is on
deposit, and which funded the operation. Regrettably, the canvas
L’Hiver, avant restauration
L’Hiver, après restauration
Restaurations
had probably remained rolled up since it was loaned out in the eighteenth
century, and the resulting damage necessitated a long and delicate restoration. Mounted on a new stretcher, relined, and fully repaired, the painting
was then subjected to a careful reintegration operation, which included the
completion of certain anatomical details that had disappeared (foot and leg).
François de Troy (Toulouse, 1645 – Paris, 1730)
Portrait d’une femme avec un enfant se mirant dans une glace
1704
Huile sur toile. H. 1,46 m ; l. 1,135 m
Legs Chauchard, 1910
Département des Peintures (R.F. 1918)
Restauration au C2RMF : Christian Chatellier pour le support et Anne
Lepage pour la couche picturale
Déposé au ministère de l’Emploi de 1924 à 2008, le tableau a
été restitué au Louvre pour cause de soulèvement généralisé
de la couche picturale, lequel a été résorbé par un refixage à la
colle d’esturgeon. Le parti général a été de conserver les restaurations précédentes, bien accordées dans l’ensemble, en particulier les bandes d’agrandissement dont la suppression aurait
entraîné trop loin (changement du châssis et du cadre, etc.). La
découverte d’une signature a confirmé la récente attribution à
de Troy.
M.-C. Sahut
Portrait d’une femme avec un enfant se mirant dans une glace, avant restauration
 Entrusted with the French Ministry for Employment between 1924 and
2008, the painting was returned to the Louvre when the pictorial layer
began to show signs of detachment, which was resolved by the application
of sturgeon glue. The basic aim was to leave the previous, largely harmonious
restorations intact, in particular the extension strips, whose removal would
have resulted in further interventions (a new stretcher and frame, etc.). The
discovery of a signature confirmed the recent attribution to De Troy.
Charles Antoine Coypel (Paris, 1694-1752)
Cléopâtre avalant le poison
1749
Huile sur toile. H. 1,30 m ; l. 1,95 m
Collection Louis XV
Département des Peintures (INV. 3542)
Restauration au C2RMF : Jean-Pascal Viala pour le support et Isabelle
Chochod pour la couche picturale
Portrait d’une femme avec un enfant se mirant dans une glace, après restauration
Cléopâtre avalant le poison, en cours de restauration
223
Vie des collections
Cléopâtre avalant le poison, après restauration
Illustrant le dénouement tragique de la pièce de Pierre Corneille
Rodogune, l’œuvre montre le rôle de Charles Antoine Coypel,
premier peintre du roi et dramaturge, dans la persistance de la
grande peinture d’histoire sous le règne de Louis XV. Imprésentable en raison de l’oxydation du vernis, le tableau a fait
l’objet d’une restauration fondamentale. Il figure dans une exposition sur la théâtralité en peinture organisée en 2011 par le
musée des Beaux-Arts de Nantes.
M.-C. Sahut
 Illustrating the tragic denouement of Pierre Corneille’s play, Rodogune,
the painting attests to the role played by Charles-Antoine Coypel, Premier
peintre to the king and playwright, in continuing the genre of great
historical painting during the reign of Louis XV. The painting was
unpresentable, due to the oxidisation of the varnish, and required major
restoration. It will be included in an exhibition on the theme of theatricality
in painting organised in 2011 by the Musée des Beaux-Arts de Nantes.
Antoine François Callet (Paris, 1741-1823)
Portrait d’un chartreux
Huile sur toile ovale. H. 69,5 cm ; l. 57 cm
Legs du peintre Constant Mongé-Misbach, 1871 ; déposé à la mairie de
Brionne en 1876
Département des Peintures (R.F. 11)
Restauration au C2RMF : Yves Lutet pour le support et Patricia Vergez
pour la couche picturale
224
À la suite du récolement général des collections nationales, ce
tableau en mauvais état a fait l’objet d’une fin de dépôt en
2004. La restauration a été menée à titre conservatoire. Un
soin particulier a été apporté à la préservation des éléments
d’origine, châssis et toile.
M.-C. Sahut
 As part of the Louvre’s sweeping programme for locating and authenticating the national collections across the country, this painting was returned
to the Louvre in 2004 for repairs and conservative restoration. Particular care
was taken to preserve the original elements, stretcher, and canvas.
Catherine Lusurier (vers 1753 – Paris, 1781)
Portrait du peintre Germain Jean Drouais (1763-1788) à l’âge de
quinze ans
Vers 1778
Huile sur toile ovale. H. 80 cm ; l. 64 cm
Acquis en 1849
Département des Peintures (INV. 6406)
Restauration au C2RMF : Annie Hochart-Giacobbi pour la couche picturale
Affiliée à la dynastie des peintres Drouais, Catherine Lusurier a
portraituré ici, en « petit dessinateur », son jeune cousin Germain
Jean, le futur tenant du néoclassicisme, mort prématurément
en 1788. La perspective de deux expositions consacrées aux
femmes peintres (l’une à Tokyo, l’autre à Washington) a donné
l’occasion de restaurer cette œuvre qui, signée en toutes lettres,
est une référence dans le corpus limité de l’artiste. Un allégement du vernis oxydé lui a rendu sa lisibilité.
M.-C. Sahut
Restaurations
Portrait d’un chartreux, avant restauration
Portrait d’un chartreux, en cours de restauration
Portrait du peintre Germain Jean Drouais (1763-1788) à l’âge de quinze ans,
Portrait du peintre Germain Jean Drouais (1763-1788) à l’âge de quinze ans,
avant restauration
après restauration
225
Vie des collections
 Affiliated to the Drouais dynasty of painters, Catherine Lusurier created
this portrait of a “young man drawing”—her young cousin Germain-Jean,
the future champion of Neoclassicism, who died prematurely in 1788. Two
exhibitions consecrated to women painters (one in Tokyo, and the other in
Washington, D.C.) provided a good opportunity to restore this work,
which is clearly signed and a major piece in the artist’s small body of work.
Light cleaning of the oxidised varnish restored the work’s legibility.
Jean Hilaire Belloc (1786-1866)
La Mort de Gaul, ami d’Ossian
Salon de 1810
Huile sur toile. H. 2,80 m ; l. 3,87 m
Daté en bas à gauche : 1810
Acquis en 1820. Retour de dépôt au musée Toulouse-Lautrec à Albi (1872-2003)
Département des Peintures (INV. 2499)
Restauration : Geneviève Fabre et Lucia Guirguis
La Mort de Gaul, ami d’Ossian, en cours de restauration
La Mort de Gaul, ami d’Ossian, après restauration
226
Fortement altéré à la suite d’un roulage prolongé, aggravé par
un écrasement ayant entraîné des pliures verticales, ce tableau
présentait des déformations, de multiples déchirures et lacunes, principalement dans l’angle inférieur senestre où deux
fragments de toile avaient disparu, l’un avant 1972, date d’une
photographie du musée d’Albi, l’autre après. La restauration
de cet angle s’est aidée d’une gravure au trait publiée dans les
Annales du Musée. Salon de 1810 de Landon. Toutefois, cette
gravure diffère en quelques endroits de la composition définitive : il apparaît que l’artiste l’a reprise, peut-être en 1820, au
moment de l’achat par Louis XVIII. Belloc est un proche de
Prud’hon, et si ce tableau ossianesque de 1810 dérivait visiblement de La Justice et la Vengeance divine de 1808, il trahit dans
son état final l’influence du Christ en Croix de 1821.
S. Laveissière
Restaurations
 After a prolonged period of being rolled up for storage, the painting
was seriously compromised, and the damage was aggravated by crushing,
which caused vertical creases; the picture was deformed, with assorted tears
and lacunae, mainly in the lower left corner, where two fragments of canvas
were missing altogether, one before 1972 (documented in a photograph in
the Musée d’Albi), and the other some time later. The reconstruction of this
corner was done from a line engraving published in Landon’s Annales du
Musée. Salon de 1810, which however differs in several places from the final
composition. It appears that the artist continued working on the piece,
perhaps in 1820, when it was purchased by Louis XVIII. Belloc was a friend of
Prud’hon, and while this Ossianesque painting from 1810 was clearly
influenced by the latter’s Justice and Divine Vengeance of 1808, its final state
betrayed the influence of the 1821 Christ on the Cross.
Relevé de sept fragments de céramique
Jules-Georges Bondoux (Paris, 1866-1919)
Il s’agit de la première étape de la restauration d’un ensemble
de quinze huiles sur carton et deux grands tableaux représentant les ruines de Suse et de la région, exécutés pendant
la mission que l’artiste effectua en 1902-1903 en Perse avec
l’archéologue Jacques de Morgan. à l’avenir, cet ensemble
pourrait trouver place dans l’une des salles du département
des Antiquités orientales.
S. Allard
Ensemble d’œuvres représentant les ruines de Suse
et de la région
Intérieur de grotte
1902-1903
Toile sur carton. H. 48,5 cm ; l. 65 cm
Entré avant 1919
Département des Peintures (R.F. 3675)
1902-1903
Toile sur carton. H. 37 cm ; l. 54 cm
Entré avant 1919
Département des Peintures (R.F. 3676)
Vue de la grotte de Tagh-é-Bostan
1902-1903
Toile sur carton. H. 36,5 cm ; l. 50 cm
Entré avant 1919
Département des Peintures (R.F. 3684)
Restauration au C2RMF : Claudia Sindaco
Intérieur de grotte, avant restauration
Intérieur de grotte, en cours de restauration
Vue de la grotte de Tagh-é-Bostan, avant restauration
Vue de la grotte de Tagh-é-Bostan, apres restauration
227
Vie des collections
 This is the first stage of the restoration of an ensemble of fifteen canvases
on cardboard, and two large paintings representing the ruins of Susa and the
region, executed during the artist’s excursion to Persia in 1902–03 with the
archaeologist Jacques de Morgan. In the future, this ensemble may be placed
in one of the rooms of the Department of Near Eastern Antiquities.
Citons également comme autres restaurations effectuées durant
l’année 2010 :
ainsi que :
– François Boucher (d’après), Le berger Amynthe revenant à la
vie dans les bras de Sylvie, INV. 2737, restauré par Emmanuel
Joyerot et Diane Arbus (déposé au ministère des Affaires étrangères, qui a payé la restauration) ;
– Ary Scheffer, Les Bourgeois de Calais, 1342, INV. 7854, restauré par Yolanta Mendili (déposé à l’Assemblée nationale, qui
a payé la restauration).
 The following restorations were also carried out in 2010:
– Nicolas de Largillière, Portrait de Lamoignon, R.F. 1942-8,
restauré par Jean-Pascal Viala et Laurent Blaise ;
– Louis Lafitte, Un guerrier mourant, R.F. 2263, restauré par
Jean-Pascal Viala et Bénédicte Trémolières ;
– Jean Charles Nicaise Perrin, Cyrus et Astiages, INV. 7167,
restauré par Frédéric Pellas ;
– François Puget, Réunion de musiciens, INV. 7346 (pour dépôt d’un an au musée de la Musique, Paris), restauré par JeanPascal Viala et Anne Lepage ;
– Jean Raoux, La Liseuse, M.I. 1100, restauré par Annie
Hochart-Giacobbi.
Suivi de la restauration de plusieurs tableaux déposés par le
musée du Louvre
Le département des Peintures a suivi de près la restauration de
plusieurs tableaux inscrits sur ses inventaires et déposés dans
d’autres musées ou institutions.
Citons notamment :
– un ensemble de morceaux de réception déposés à l’École
nationale supérieure des beaux-arts :
. Pierre Dulin, Punition de Laomédon par Apollon, INV. 4278,
restauré par Yves Lutet et Marie-Alice Belcour ;
. Jean Joseph Dumons de Tulle, Adam et Ève, INV. 4282, restauré par Nathalie Pincas ;
. Jean Laurent Mosnier, Hercule armé par les dieux, INV. 6757,
restauré par Jean-Pascal Viala et Marie-Alice Belcour ;
- Nicolas de Largillière, Portrait de Lamoignon, R.F. 1942-8, restored by
Jean-Pascal Viala and Laurent Blaise
- Louis Lafitte, Dying Warrior, R.F. 2263, restored by Jean-Pascal Viala and
Bénédicte Trémolières
- Jean-Charles-Nicaise Perrin, Cyrus and Astiagus, INV. 7167, restored by
Frédéric Pellas
- François Puget, Group of Musicians, INV. 7346 (for a one-year loan to
the Musée de la Musique), restored by Jean-Pascal Viala and Anne Lepage
- Jean Raoux, Woman Reading, M.I. 1100, restored by Annie
Hochart Giacobbi.
Monitoring of the restoration of several paintings loaned out by the Louvre:
The Department of Paintings has closely monitored the restoration of
several paintings listed in its inventories and deposited in other museums
and institutions.
The most noteworthy of these restorations are:
- an ensemble of morceaux de réception deposited at the École Nationale
Supérieure des Beaux-Arts;
- Pierre Dulin, Laomedon Punished by Apollo, inv. 4278, restored by Yves
Lutet and Marie-Alice Belcour;
- Jean-Joseph Dumons de Tulle, Adam and Eve, inv. 4282, restored by
Nathalie Pincas;
- Jean-Laurent Mosnier, Hercules Armed by the Gods, inv. 6757, restored
by Jean-Pascal Viala and Marie-Alice Belcour.
and:
- François Boucher (after), The shepherd Amynthus coming back to life in
the arms of Sylvia, inv. 2737, restored by Emmanuel Joyerot and Diane
Arbus (on deposit to the French Foreign Ministry, which funded the
restoration);
- Ary Scheffer, Les Bourgeois de Calais, 1342, INV. 7854, restored by
Yolanta Mendili (on deposit to the Assemblée Nationale, which funded the
restoration).
Restauration de tableaux de l’école italienne
Raffaello Santi ou Sanzio, dit Raphaël
(Urbino, 1483 – Rome, 1520)
Petite Sainte Famille (revers)
Bois. H. 38,6 cm ; l. 29,5 cm
Acquis par Louis XIV vers 1664
Département des Peintures (INV. 605)
Restauration au C2RMF : Frédéric Pellas
228
Dans le cadre de la préparation de l’exposition consacrée aux
dernières années de Raphaël prévue en 2012, il a été décidé
de redonner une lisibilité au revers peint en faux marbre de
ce panneau, noirci par un épais vernis oxydé et caché par un
papier de bordage et quelques étiquettes récentes. L’opération a consisté à retirer ces papiers collés et à alléger le vernis.
L’œuvre a ainsi retrouvé une cohérence avec son couvercle,
l’Abondance (INV. 657), présentant un décor raffiné de faux
marbre comparable.
V. Delieuvin
 In the framework of the exhibition on the last years of Raphael’s life
scheduled for 2012, it was decided to restore the legibility on the back of
this panel painted in faux marble, blackened by thick oxidised varnish, and
hidden by edging paper and several recent labels. The operation involved
removing the glued papers and cleaning the layer of varnish. The work is
now consistent with its shutter, Ceres (inv.657), with its comparably fine
faux marble decorations.
Restaurations
Petite Sainte Famille (revers), avant intervention
Petite Sainte Famille (revers), en cours de restauration
Restauration de tableaux de l’école hollandaise
Frans Post (Leyde, vers 1612 – Haarlem, 1680)
L’Ancien Fort portugais des Trois-Mages (Ceulen) à Rio Grande
Ensemble d’œuvres représentant le Brésil
1638
Huile sur toile. H. 62 cm ; l. 95 cm
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1726)
Le Village de Serinhaem
Huile sur toile. H. 1,12 m ; l. 1,45 m
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1722)
La Maison d’un noble portugais
Huile sur toile. H. 1,01 m ; l. 1,36 m
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1723)
Vue de la sucrerie d’Engenho Real
Huile sur toile. H. 1,17 m ; l. 1,67 m
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1724)
Une habitation de planteur près de la rivière Paraïba
Huile sur toile. H. 1,04 m ; l. 1,30 m
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1725)
Le Rio Sao Francisco et le fort Maurice
1639
Huile sur toile. H. 62 cm ; l. 95 cm
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1727)
Le Char à bœufs
1638
Huile sur toile. H. 62 cm ; l. 95 cm
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1728)
Les Alentours de Porto Calvo
1639
Huile sur toile. H. 63 cm ; l. 89 cm
Collection de Louis XIV
Département des Peintures (INV. 1729)
Restauration au C2RMF : Ariane Ceresa et son équipe
229
Vie des collections
La restauration de huit toiles de Frans Post a bénéficié du mécénat du Cercle des jeunes mécènes. Cette opération bisannuelle
s’est achevée en 2010. C’est à l’issue de l’exposition « Frans Post.
Le Brésil à la cour de Louis XIV » (2005-2006) que l’on a pris
le parti de restaurer les tableaux du paysagiste de Haarlem.
Le Louvre possède quatre toiles peintes par l’artiste au Brésil,
durant son séjour des années 1630-1640 ; quatre autres toiles
ont été exécutées après le retour de Post en Hollande et témoignent du goût de ses contemporains pour les paysages exotiques. Les toiles étaient voilées par un vernis oxydé, d’anciens
repeints s’étaient altérés, certaines mises sur châssis occultaient une partie des bords, l’encadrement demandait à être
revu. La restauration a permis de remettre en valeur ces toiles,
rarissimes témoignages du Brésil avant le Brésil moderne.
B. Ducos
 The restoration of eight landscape paintings by the Haarlem-born
painter Frans Post was sponsored by the Cercle des Jeunes Mécènes (Young
Patrons Circle), a two-year operation concluded in 2010. At the end of the
2005/06 exhibition “Frans Post, Le Brésil à la cour de Louis XIV” (Frans Post:
Brazil at the Court of Louis XIV) the decision was taken to restore the set.
The Louvre possesses four canvases painted by the artist in Brazil during the
years he spent in the country between 1630 and 1640; Post completed
four other paintings when he returned to Holland, and these attest to the
taste for the exotic landscapes of his contemporaries. The canvases were
covered in an oxidised varnish, and areas repainted in the past had altered,
some of the mountings on stretchers obscured part of the edges, and the
frames required repairs. After their restoration, these glorious canvases
provide rare insights into Brazil as it was before the modern era.
Le Rio Sao Francisco et le fort Maurice, avant restauration
Le Rio Sao Francisco et le fort Maurice, après restauration
230
Restaurations
Restauration d’une peinture grecque
Saint Georges à cheval
Grèce, seconde moitié du xve siècle
Tempera sur bois. H. 31 cm ; l. 24,2 cm
Entré au Louvre en 1863 avec la collection de tableaux du marquis
Campana
Département des Peintures (M.I. 351)
Restauration au C2RMF : Aline Berelowitsch et Florence Delteil-Ruffat
Jadis propriété du marquis Campana (1808-1880), qui possédait, en marge de ses tableaux italiens, un petit noyau de
peintures grecques, cette icône a été débarrassée des repeints
et des vernis ainsi que de l’épaisse moulure de stuc, refaite à
l’imitation du cadre d’origine en bois doré, qui nuisaient à
l’appréciation de sa qualité remarquable. On a pris le parti de
réintégrer les lacunes de façon illusionniste (notamment l’œil
senestre du saint), mais de laisser les usures apparentes sur le
fond d’or et le cheval.
D. Thiébaut
Saint Georges à cheval, avant restauration
 The icon was once in the collections of Marquis Campana (1808–80),
who, in addition to his Italian paintings, possessed a small collection of
Greek works. The repainted areas and varnish were removed, as along with
the thick stucco moulding, which was devised to imitate the original gilt
wood frame, all of which prevented the painting’s remarkable quality from
being fully appreciated. It was decided to reintegrate the missing areas in
an illusionistic way (particularly the saint’s left eye), but to leave the signs
of wear on the gold ground and the horse.
Saint Georges à cheval, après restauration
231
Vie des collections
Arts graphiques
Le département dispose d’un atelier de restauration dont l’activité est coordonnée
par un chef d’atelier, en relation directe avec la conservation. Les œuvres conservées
par le département sont quotidiennement consultées, exposées, prêtées, étudiées, ou
font l’objet de séminaires devant des étudiants ; il est de ce fait indispensable qu’elles
bénéficient de l’attention constante de restaurateurs avertis, dont les interventions
répondent aux objectifs et aux méthodes définis par la conservation avec le chef
d’atelier. Grâce à un travail collectif, les restaurateurs de l’atelier – deux permanents
et une vingtaine de restaurateurs indépendants – appliquent des traitements
adaptés à chaque œuvre en tenant compte à la fois des exigences de conservation et
des contraintes de logistique et d’exposition. Plusieurs programmes de restauration
pluriannuels engagent l’activité de l’atelier, concernant le traitement d’œuvres de
très grand format (cartons de tapisserie ; cartons de Charles Le Brun et son atelier),
ainsi que des œuvres conservées dans des albums factices (Albums des costumes
de fêtes et mascarades de la collection Edmond de Rothschild ; Albums Cochin de
la même collection). Un projet visant à améliorer l’encadrement historique des
pastels, œuvres fragiles mais souvent exposées, vient d’être entrepris.
C. van Tuyll van Serooskerken
 The Department’s conservation studio is coordinated by the head of the studio, who is in
direct contact with the curatorial staff. The works held in the Department are regularly consulted,
exhibited, loaned, and studied, or are used for student seminars. Hence, it is essential that they
benefit from the constant attention of experienced restorers, whose interventions meet the
objectives and methods defined by the curatorial staff and the head of the studio. Thanks to
collective effort, the studio’s restorers—two of whom are permanent members of staff, while
around twenty are independent restorers—apply the appropriate treatments for each work, taking
into account conservation requirements and logistical and exhibition constraints. A number of
long-term restoration programmes have been implemented in the studio, concerning large-scale
works (tapestry cartoons; the cartoons of Charles Le Brun and his workshop), as well as works held
in loose-leaf albums (Albums des Fêtes and Masquerades from the Edmond de Rothschild
Collection; the Albums Cochin from the same collection). A project recently undertaken aims to
improve the original framing of the pastels, which are fragile and frequently exhibited.
232
Restaurations
Quatre cartons de Charles Le Brun restaurés en 2010
Restauration : André Le Prat, Hélène Bartelloni, Eve Menei, Laurence Caylux, Christelle Desclouds, Anna Gabrielli
et Ariane de la Chapelle
Charles Le Brun (Paris, 1619-1690)
Un esclave
Vers 1674-1679
Pierre noire, avec rehauts de craie blanche, sur plusieurs morceaux de
papier beige réunis. Annoté à la pierre noire, en bas à gauche : 10.
Traits repassés au stylet. Contours irrégulièrement découpés. Marouflé
sur toile. H. 1,57 m ; l. 1,73 m
Département des Arts graphiques (INV. 29 902)
Mercure et Pégase
Vers 1674-1679
Pierre noire, avec rehauts de craie blanche, sur plusieurs morceaux de
papier beige réunis. Inscrit dans un cercle tracé à la pierre noire. Annoté
à la pierre noire, en bas à gauche : 61. Traits repassés au stylet. Marouflé
sur toile. H. 1,86 m ; l. 1,57 m
Département des Arts graphiques (INV. 29 901)
La Vigilance
Vers 1674-1679
Pierre noire, sur plusieurs morceaux de papier beige réunis. Traits
repassés au stylet. Contours irrégulièrement découpés. Marouflé sur
toile. H. 1,98 m ; l. 86 cm
Département des Arts graphiques (INV. 29 941)
Une Renommée
Vers 1674-1679
Pierre noire, avec rehauts de craie blanche, sur plusieurs morceaux de
papier beige réunis. Inscrit dans un cercle tracé à la pierre noire. Annoté
à la pierre noire, en bas, à droite : 60. Traits repassés au stylet. Marouflé
sur toile. H. 1,67 m ; l. 1,57 m
Département des Arts graphiques (INV. 29 904)
Historique : Atelier de Le Brun ; entrés dans les collections royales en
1690 ; dernière provenance : Cabinet du Roi ; mode d’acquisition : saisie
royale ; année d’acquisition : 1690
roulés sur des barres de bois depuis le xviiie siècle, et, d’autre
part, des cartons marouflés sur toile au xixe siècle. Tous ces dessins ont souffert de mauvaises conditions de conservation : ils
n’ont été protégés ni de la lumière, ni de la poussière, ni de
l’humidité. Le contact avec des matériaux acides a provoqué
un jaunissement prononcé des papiers, en particulier ceux des
cartons marouflés au xixe siècle. Toutes ces feuilles sont déchirées sur les bords, de plus elles sont souvent lacunaires.
Une première campagne de restauration (1992) a consisté à
dépoussiérer et consolider les nombreuses déchirures qui fragilisent ces feuilles, afin qu’elles puissent être photographiées
en toute sécurité. Après la rédaction du premier catalogue raisonné (2000), la véritable restauration a commencé.
Pour le traitement des cartons, trois protocoles ont été mis
en œuvre :
L’hydrolyse enzymatique des colles de pâte. La colle de pâte est
constituée de colle de farine et de colle de peau. Cette hydrolyse
est obtenue, pour la partie amylacée, au moyen d’une solution
d’amylase. Le processus mis au point définit les seuils de concentration optimums pour affaiblir l’ancien adhésif afin de le solubiliser et de l’éliminer en milieu aqueux sur une table basse pression. Il précise également les modes opératoires pour ce qui est
de la température, du pH et de la durée d’activité des enzymes.
Nouveau marouflage. La suite de l’intervention se prolonge
par le marouflage sur une nouvelle toile. L’approche choisie
diffère radicalement des recettes artisanales traditionnelles.
Elle s’inspire de techniques japonaises de doublage, grâce à
l’utilisation de papier de Kozo et de colle d’amidon de blé.
Nouveaux châssis extensiométriques. Du fait de leurs dimensions, les grands formats sont soumis à des tensions mécaniques
plus importantes, engendrées par les variations hygrométriques.
Pour pallier ces inconvénients, un châssis extensiométrique a
été mis au point avec un atelier de mécanique. Ce châssis adapté
Le département des Arts graphiques conserve environ deux cents
cartons préparatoires au décor
de la voussure de l’escalier des
Ambassadeurs du château de
Versailles. La vie de ces cartons est mouvementée. Ils ont
d’abord séjourné à la manufacture des Gobelins, où se
trouvait l’atelier de Le Brun.
Nous retrouvons leur trace
dans une note écrite en 1730
par Charles Coypel : « Ces cartons de Tres peu de Valeur que
feu mon père trouva presque
pourris sont au vieux Louvre
dans mon atelier. » Un mémoire daté du 2 juin 1749 rappelle que « ces cartons ayant
été peu soignés et renfermés
dans des lieux humides sont
presque en lambeaux ».
Deux groupes bien distincts sont conservés séparément ; d’une part, les cartons
Cartons de Le Brun, en cours de restauration
233
Vie des collections
Nouveau marouflage
à l’amplitude du mouvement des papiers permet d’en amortir
la force dynamique liée aux variations hygrométriques et de
l’équilibrer continuellement à son niveau de tension minimum.
Ces trois volets de l’évolution du traitement des grands
formats participent d’anciens procédés tels le marouflage et
la mise en tension sur châssis. L’atelier a gardé le principe
de ces méthodes car elles s’inscrivent dans notre culture de
conservation et d’exposition. Mais il s’est inspiré des méthodes
traditionnelles japonaises, qui procurent toutes les garanties
d’innocuité et de pérennité. Leur assimilation apporte une
amélioration qualitative qui réhabilite le marouflage.
A. Le Prat
 The Department of Graphic Arts holds around 200 preparatory
cartoons for the decoration of the coving of the Escalier des Ambassadeurs
(Ambassadors’ Staircase) at the Château of Versailles. These cartoons were
never treated with the greatest of care, and a report dated 2 June 1749
stated that they “have been neglected and kept in a damp place, so they
are almost in tatters”.
Two very distinct groups can be identified: on the one hand, cartoons
that had been left rolled on wooden bars since the eighteenth century,
and, on the other hand, cartoons mounted on canvas in the nineteenth
century. An initial restoration programme (1992) involved the dust removal
and the consolidation of the numerous tears that made the sheets fragile.
After the first catalogue raisonné of Le Brun’s drawings in the Louvre was
published in 2000, the actual restoration phase commenced.
The restoration of these cartoons was carried out using three treatments:
- enzymatic hydrolysis of the adhesive paste;
- mounting cartoons on new canvas;
- the addition of new extensometric stretchers.
These three steps in the treatment of large-format works involve
traditional processes such as marouflage and mounting on stretchers. The
studio adhered to the principle of these methods, as they are integral to
our conservation and exhibition culture. However, the conservation
procedure also incorporated traditional Japanese-paper methods, which
provide every guarantee of reversibility and permanence. The assimilation
of these techniques has resulted in qualitative improvements that
rehabilitate marouflage as a viable technique.
Restauration des recueils de « Costumes de fêtes et mascarades
de Louis XIV» de la collection Edmond de Rothschild
Restauration : André Le Prat, Laurence Caylux, Marie-Christine Poisbellaud, Isabelle Drieu La Rochelle,
Sophie Chavanne, Isabelle Bonnard et Laurence Lamaze
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Quatorze albums regroupent un ensemble de deux mille six
cent quarante-trois dessins provenant des anciennes collections royales des Menus Plaisirs, dispersées sous la Révolution.
Les dessins furent montés en albums factices au début du
xixe siècle. En 2010, l’atelier de restauration du département
des Arts graphiques a achevé la restauration des albums.
La problématique de la restauration des albums factices s’inscrit dans l’évolution des usages et des méthodes qui entourent
la conservation, l’étude et l’exposition des œuvres au sein du musée. Une meilleure analyse du processus de dégradation des papiers a favorisé l’emploi de montages individuels pour les dessins.
Cette solution répond également à la sécurité attendue durant les
expositions et améliore la lecture des œuvres proposées au public.
Les albums, même factices, témoignent de l’histoire de ces dessins. Ils constituent des ensembles indissociables et leur reliure
conforte et singularise leur identité. Cette réflexion a orienté la
recherche vers des solutions permettant de conserver et communiquer chacun des dessins, ainsi que l’album qu’ils constituent.
Les albums « Costumes de fêtes et mascarades » montrent
bien des analogies avec les albums des dessins de Delacroix
restaurés précédemment. Le papier du corps d’ouvrage, devenu cassant, se déchire à chaque consultation. La coloration
soutenue traduit la présence de produits dégradés de cellulose.
Ceux-ci étant hydrosolubles, ils contaminent progressivement
les dessins. Les plats des reliures se sont légèrement déformés,
dos et coiffes sont épidermés. Ces usures superficielles permettent cependant de les conserver en l’état.
Les dessins décollés de leur ancien support sont restaurés en
considérant chaque cas particulier : feuilles déformées, adhésifs inadaptés, couleurs altérées, etc. Après traitement, ils sont
placés sur un dépassant constitué de deux feuilles de papier
japonais contrecollées. Le dépassant permet de transférer
directement l’œuvre de l’album dans un montage d’exposition. Au retour, le dépassant est de nouveau fixé par une bande
de papier japonais à un onglet pris dans la reliure de l’album.
Album factice en cours de remontage
Restaurations
Deux albums supplémentaires ont été confectionnés pour
les grands formats.
Ce nouveau modèle de conservation des œuvres en album
représente un gain de volume de rangement et les conditions de
conservation s’avèrent meilleures au sein d’un corps d’ouvrage
qu’à l’intérieur d’un montage, comme le démontrent des études
récentes (cinétique de dégradation et effet de confinement).
Une déclinaison de ce modèle d’album factice est également
envisagée pour l’ensemble des gravures de Cochin appartenant
au fonds Rothschild du département des Arts graphiques. En
parallèle, une étude technique a été menée afin de valider les
procédés de fabrication des dépassants à partir d’une sélection
de papiers japonais et d’adhésifs appropriés.
A. Le Prat
 Fourteen albums contain 2,643 drawings from the former royal
collections of the “Menus plaisirs”, which were dispersed during the
Revolution. The drawings were mounted in loose-leaf albums at the
beginning of the nineteenth century. Although these albums have been
compiled in an arbitrary manner, they form part of the history of these
drawings. Research has therefore been oriented towards finding solutions
for the conservation and presentation of each drawing, as well as the
album in which they are contained.
The drawings were lifted from their old supports and restored according
to their particular requirements. After restoration the drawings were
mounted within false margins of Japanese paper, and inserted with a strip
of Japanese paper in the binding of the new album. This system facilitates
the temporary removal of each sheet for exhibition purposes.
La restauration des œuvres graphiques en vue de leur exposition
Programme suivi par André Le Prat, Laurence Caylux, Eve Menei, Anna Gabrielli, Isabelle Drieu la Rochelle, Sophie
Chavanne, Marie-Christine Poisbellaud, Valentine Dubard, Christelle Desclouds, Sophie Lennuyeux, Laurence Lamaze,
Marianne Bervas, Hélène Bartelloni, Axelle Deleau, Valerie Luquet, Sara Ortego-Boldo et Ariane de la Chapelle
L’atelier de restauration répond en priorité aux demandes de prêts
et d’expositions des dessins que conserve le département des Arts
graphiques ; plus de mille œuvres ont été traitées en 2010. Toutes
ces œuvres ont fait l’objet d’interventions de conservation, afin
d’optimiser la sécurité d’œuvres soumises lors des expositions à
des contraintes climatiques et à des niveaux d’éclairement parfois inadaptés. De plus, ces interventions améliorent la lisibilité
de la feuille d’œuvre en atténuant des altérations qui auraient
une incidence visuelle sur l’intégrité du dessin.
A. Le Prat
 The conservation studio treats all works requested for loan and
exhibition; this involved over 1,000 works in 2010. All these works were
given conservation treatments to optimise their condition. Moreover, these
interventions improve legibility, by attenuating any alterations that might
have a visual incidence on the drawing’s integrity.
Intervention sur une gravure du xviiie siècle
Création d’un cadre emboîtant pour les pastels
Programme suivi par André Le Prat, Marianne Bervas et Valerie Luquet
En 2010, l’atelier a supervisé la fabrication d’un modèle d’encadrement adapté aux pastels, permettant la meilleure adéquation possible entre le cadre emboîtant et le cadre ancien. La
mise au point de ce nouveau système a été conçue et réalisée
avec l’atelier d’encadrement du musée et d’autres institutions
comme le Rijksmuseum à Amsterdam, avec lequel le projet sera
finalisé. Cette modélisation s’appliquera ensuite à l’ensemble
des pastels (environ cent quarante œuvres, de prestigieux portraits des xviie et xviiie siècles pour la plupart).
A. Le Prat
will eventually be applied to all the pastels (about 140 works, mostly
seventeenth- and eighteenth-century portraits).
 In 2010 the conservation studio supervised the creation of a framing
model suitable for pastels, in which each work is placed within a protective
frame that fits within the old frame. The development of this new system
was designed and carried out in collaboration with the Museum’s framing
workshop and external institutions, including the Rijksmuseum in
Amsterdam, with whom the project will be finalised. This framing model
Système d’encadrement adapté au pastel
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