focus La bLanchisserie bouLonnaise - Boulogne
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focus La bLanchisserie bouLonnaise - Boulogne
focus La blanchisserie boulonnaise boulogne-billancourt édito 1. Champs d’étendage Pendant près de 300 ans, quotidiennement, des monceaux de linge ont été lavés, essorés, séchés et repassés à Boulogne-Billancourt. Des gestes, des techniques et des savoirs se sont transmis de génération en génération, de blanchisseuses de fin en apprenties, de maîtres blanchisseurs en industriels avisés. Ainsi, la blanchisserie a-t-elle été au cœur de l’histoire de la Ville, de son développement et de son enrichissement. Elle a contribué à forger une part insigne de son identité. C’est dans cet esprit que l’exposition que vous êtes sur le point de découvrir a été conçue : elle met en lumière une histoire artisanale, industrielle et humaine particulièrement riche et en explore toutes les facettes. Cette exposition, qui pourrait s’apparenter à une véritable « archéologie industrielle », donne à voir des trésors d’exception. Je pense tout particulièrement aux émouvants registres paroissiaux et documents préalables au mariage datant du XVIIIe siècle qui sont présentés pour la première fois au public. Je pense également au film Boulogne, cité de blanchisseurs, dont le ton enthousiaste est révélateur de l’ambiance boulonnaise d’après-guerre. à la (re)découverte de ce patrimoine marquant, nous vous souhaitons avec Ségolène Missoffe, adjointe déléguée à la Culture et Claude Rocher, conseiller municipal à l’Animation culturelle une agréable visite. Pierre-Christophe Baguet Maire de Boulogne-Billancourt Président de Grand Paris Seine Ouest Maquette Direction de la Communication d’après DES SIGNES studio Muchir Desclouds 2015 1 Crédits couverture Blanchisserie Robat (détail), Boulogne-Billancourt, collection Lamé Impression Ribet-Prissy 2. Modèle de blanchisserie L’exposition La Blanchisserie boulonnaise présente une histoire de cette activité de ses origines au XVIIe siècle à son déclin dans la ville à partir des années 1960. Ont ainsi été réunis près de 250 objets, documents d’archives, films issus des fonds de collections de la ville et de collections privées, répartis selon trois grandes sections. La première section remonte le temps et s’ancre aux XVIIe et XVIIIe siècles. En effet, lors des deux derniers siècles de l’Ancien Régime, la blanchisserie prend son essor à Boulogne qui est alors un petit village entouré de champs, de vignes, de landes et assez éloigné de Paris. Connaître les blanchisseurs de cette époque est malaisé : leur maison et leur matériel ont disparu. Néanmoins, il est possible de les « approcher » au travers de documents d’archives et d’images anciennes. 3. Cheminée de l’ancienne blanchisserie Robat © Philippe Fuzeau L’importance que prend la blanchisserie au XIXe siècle transforme radicalement le paysage urbain boulonnais, non sans conséquences pour les blanchisseurs et les habitants. La troisième section en témoigne. Pollution et accidents sont quotidiens, au point qu’au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, petit à petit, la blanchisserie doit quitter la ville lasse de ces nuisances. La diffusion de la machine à laver dans les foyers amplifie le phénomène. La deuxième section, la plus importante et la plus richement dotée grâce à de nombreux prêts, rend compte des formidables avancées techniques, chimiques et mécaniques dont la blanchisserie bénéficie de la fin du XVIIIe siècle, puis tout au long du XIXe siècle. Ces progrès opérés par des scientifiques, des ingénieurs et les blanchisseurs eux-mêmes entraînent l’industrialisation de l’activité. Les quantités de linge lavé augmentent considérablement, le coût du lavage baisse tandis que le repassage gagne en qualité. C’est l’apogée de la blanchisserie à Boulogne qui occupe à la fin du XIXe siècle plus de 5 000 hommes et femmes. Fer à repasser © Philippe Fuzeau 2 Section 1 Section 2 4 Lavoir Guibert Vue du nouveau pont de Sèvres À la rencontre des blanchisseurs de l’Ancien Régime Par la modestie de leur condition, les blanchisseurs qui exercent à Boulogne aux XVIIe et XVIIIe ont laissé peu de traces de leur existence. Pour autant, des documents d’archives – registres paroissiaux, documents préalables au mariage, inventaires après décès dressés par le notaire de Boulogne – permettent [non sans émotion pour nous] de faire leur connaissance, même fugacement. Les premières mentions écrites de blanchisseurs datent de la seconde moitié du XVIIe siècle. Elles sont très lacunaires et difficiles à déchiffrer. C’est pourquoi, il leur a été préféré, pour l’exposition, les documents datant du XVIIIe siècle, plus lisibles, nombreux et variés. Manuscrits pour la plupart, et donc uniques, ils sont autant de bribes de vies de blanchisseurs. Les inventaires après décès s’en distinguent car plus bavards : ils nous font pénétrer au seinmême de la maison de certains d’entre eux. Le paysage des blanchisseurs du XVIIIe siècle 3 La formidable croissance urbaine de BoulogneBillancourt aux XIXe et XXe siècles a fait disparaître le paysage dans lequel les blanchisseurs boulonnais de l’Ancien Régime ont pu évoluer. Tout ou presque a changé. Pour imaginer le « Boulogne » de ces premiers blanchisseurs, il faut recourir à des vues anciennes et à des peintures du XIXe siècle, réalisées avant l’urbanisation du territoire, quand il était encore rural, composé de vignes, champs et étendues herbeuses.La Seine qui est primordiale dans la vie des blanchisseurs puisqu’ils y lavent dans les premiers temps le linge qui leur est confié, n’est pas encore domptée, ses eaux connaissent de fortes variations et ses berges sont peu aménagées. La vue du vieux pont de Sèvres permet d’imaginer les opérations de lavage en bord de Seine. Laver le linge au XVIIIe siècle Le matériel que les blanchisseurs de l’Ancien Régime utilisent pour laver le linge se compose principalement de cuviers, de battoirs et d’autres menus outils. Pour blanchir, ils suivent inlassablement le même processus. Cela commence par l’essengeage, c’est-à-dire le tri du linge sale, se poursuit par le coulage. Cette étape, la principale, se décompose en trois opérations : tout d’abord le remplissage méthodique du cuvier par le linge sale, ensuite le dépôt de la lessive (cendres) et enfin l’adjonction d’eau chaude. Puis vient le lavage qui permet d’éliminer les dernières tâches à l’aide du battoir. C’est enfin le rinçage à l’eau courante. Le séchage a lieu en grenier ou bien encore sur les prairies alentours. Le linge est ensuite repassé et plié. Ces techniques perdureront dans les campagnes bien après l’industrialisation. Laver et repasser avec efficacité À la fin du XIXe siècle et tout au long du XXe siècle de grands progrès sont effectués dans différents domaines pouvant être appliqués à la blanchisserie. La principale avancée est conquise par le chimiste Claude Berthollet qui met à profit les propriétés du chlore pour blanchir le linge : ce sera l’eau de Javel. Du point de vue technique et mécanique, les efforts des ingénieurs se concentrent sur le lavage. Ainsi, vers 1840 apparaissent les premiers tambours à compartiments pour laver le linge. Il s’agira par la suite d’améliorer le principe. Les fers à repasser connaissent, eux aussi, au XIXe siècle une nette évolution qualitative grâce notamment à l’apparition de la fonte et du fer moulé, faciles à chauffer et à manipuler. Les fers à braise et à lingot tombent en désuétude. 2 Le peuple des blanchisseries La blanchisserie boulonnaise emploie essentiellement des femmes pour des tâches peu qualifiées comme le triage et le marquage ou bien très méticuleuses comme le repassage et le pliage. La blanchisseuse dite de fin est au somment de la hiérarchie : elle repasse les linges délicats. Tout en bas peinent les intérimaires qui chaque matin vont à la « louée des blanchisseuses » chercher de l’ouvrage pour la journée chez une patronne. Elles enchaînent quotidiennement jusqu’à 14 heures de travail. Au XXe siècle, les lois relatives au temps de travail améliorent petit à petit leurs conditions de vie. Les hommes recrutés par la blanchisserie le sont pour le fonctionnement et l’entretien des machines, le lavage en machine et les livraisons. L’architecture des blanchisseries Au cours du XIXe siècle, la rationalisation des différentes étapes que doit suivre le linge pour être rendu propre et plié à son propriétaire, pousse les blanchisseurs et les architectes à imaginer des bâtiments adaptés, dans la mesure du possible, au circuit suivi par le linge. La disposition des ateliers de travail s’enchaîne logiquement et tente d’éviter au linge des aller-retours. Ainsi se suivent les salles de tri, de lavage et celles destinées au repassage. L’autre grande particularité de l’architecture des blanchisseries est la présence de séchoirs. Les plus rudimentaires sont des greniers à claies mobiles par lesquelles le vent passe et assèche le linge. Les plus élaborés sont munis d’un calorifère alimenté par un combustible. Maquette de lavoir-blanchisserie © Philippe Fuzeau 4 Section 3 Ancienne blanchisserie artisanale © Philippe Fuzeau Petit glossaire de la blanchisserie 2 Les nuisances de la blanchisserie : un mal nécessaire ? Un paysage transformé par la blanchisserie Le développement de la blanchisserie à Boulogne-Billancourt au cours du XIX e siècle transforme radicalement le paysage. L’urbanisme de la ville se singularise : les blanchisseurs achètent des parcelles de terrain en longueur, à l’avant desquelles ils construisent des bâtiments abritant le travail et à l’arrière desquelles ils étendent le linge à la belle saison. L’industrialisation de l’activité modifie encore plus la ville. Des cheminées se dressent et des sheds –des toits dissymétriques composés d’un versant court à pente forte et d’un versant plus long à faible pente (qui d’ailleurs est encore aujourd’hui le symbole de l’usine)- recouvrent les ateliers de travail. Les photographies de la ville, prises depuis le ciel au début des années 30 laissent imaginer ce paysage si particulier. Avec un peu d’attention on peut repérer des champs d’étendage et des sheds. 5 La blanchisserie telle qu’elle est pratiquée au XIXe siècle et tout au long du XXe siècle pollue à la fois l’eau par les rejets lessiviels et l’air par le rejet des fumées des chaudières et calorifères. à cela s’ajoute la pollution sonore des machines. Les archives de la ville conservent, en nombre, des plaintes de riverains de blanchisseries excédés par ces nuisances. Le conseil municipal où siègent régulièrement des blanchisseurs tente d’y remédier à l’aide d’arrêtés, d’amendes et par un contrôle des implantations, tout en ménageant les intérêts économiques. Le plus éminent et imminent des dangers reste l’explosion d’une chaudière. C’est pour partie en raison de ces nuisances que la blanchisserie industrielle quitte progressivement le territoire après la Deuxième Guerre mondiale. Dans le sillage des blanchisseries Pour mener à bien leur travail, les blanchisseurs achètent d’une part des machines (à laver, à essorer) des outils (charriots…) et d’autre part des détergents. La concentration de près de 450 blanchisseurs à Boulogne-Billancourt à la fin du XIXe siècle, soit 450 clients potentiels, concourt à l’implantation de fabricants de matériel de blanchisserie et d’usines de savons ou autres produits chimiques. Ces usines ont, elles aussi, disparu. Néanmoins un catalogue de vente rarissime et des publicités passées dans les annuaires locaux attestent de leur existence. 3 Séchoir de la blanchisserie Franck Acide muriatique : chlore. Amidonner : action d’apprêter le linge à l’aide d’amidon. Azurage : opération consistant à traiter le linge blanc par des colorants bleus pour lui donner plus d’éclat à la lumière. Barbotte : appareil dans lequel le linge à laver est brassé dans une eau savonneuse. Par extension le terme désigne la blanchisserie. Bateau-lavoir : ponton installé au bord d’un cours d’eau où les blanchisseuses lavent le linge Battoir : palette en bois munie d’un manche court, utilisée pour battre le linge. Blanchisserie : magasin où le linge sale déposé par le client est rendu lavé et repassé. Après l’industrialisation de l’activité, le mot peut également désigner l’usine dans laquelle est blanchi le linge. Blanchisseur, blanchisseuse : celui ou celle qui blanchit et souvent aussi repasse le linge. La blanchisseuse de fin est celle qui ne traite que le linge fin. Elle est au sommet de la hiérarchie des blanchisseuses. Calandre : machine composée de plusieurs cylindres chauffés qui permet de presser et lustrer les étoffes. Calorifère : appareil produisant de la chaleur et la diffusant dans un bâtiment par l’intermédiaire de tuyaux. Coulage : action de faire bouillir le linge dans une lessiveuse avec des cendres de bois pour lessive. Cuvier : petite cuve en lattes de bois ou en tôle galvanisée dans laquelle on effectue la lessive. Essengeage : tri du linge sale. Étendage : assemblage de cordes ou surface sur lesquels est étendu le linge à sécher. Glacer : donner une apparence lisse au linge (cols, ourlets…) à l’aide d’un produit à glacer. Lavoir : édifice comportant un bassin alimenté en eau et aménagé pour laver et rincer le linge. Manège : appareil formé d’un arbre vertical portant une perche horizontale à laquelle on attelle un animal qui permet d’utiliser la force de celui-ci afin de faire mouvoir une machine. Saponide : détergent. Séchoir : local aménagé pour le séchage à froid ou à chaud du linge. Soufroir: lieu clos où l’on procède au blanchiment et à la désinfection du linge délicat – soie et laine - à l’aide de vapeur de soufre. 6 « La ville de Boulogne est encore, à l’heure actuelle, le plus grand centre de blanchisseurs de la région parisienne...». État des communes à la fin du XIXe siècle, Boulogne, notice historique et renseignements administratifs, Montévrain, 1905. Modalités de visite Le service de l’animation de l’architecture et du patrimoine coordonne les initiatives à l’échelle de l’ensemble de la ville de Boulogne-Billancourt, ville d’art et d’histoire. Il propose toute l’année des animations pour les habitants et les scolaires. Il se tient à votre disposition pour tout projet. Accès Autobus : lignes 126 et 175 (arrêt Hôtel-de-Ville) Métro : ligne 9 (station Marcel-Sembat), ligne 10 (station Boulogne-Jean-Jaurès) Renseignements, réservations Office de tourisme de Boulogne-Billancourt 25, avenue André Morizet 92 100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01 41 41 54 54 Internet : www.otbb.org [email protected] Service de l’animation, de l’architecture et du patrimoine Hôtel de ville 26, avenue André Morizet 92 100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01 55 18 53 00 Internet : www.boulognebillancourt.com MA 30 / musée des Années Trente 28, avenue André Morizet 92 100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01 55 18 46 42 Boulogne-Billancourt appartient au réseau national des Villes et Pays d’art et d’histoire Le ministère de la Culture et de la Communication attribue l’appellation Villes et Pays d’art et d’histoire aux collectivités locales qui animent leur patrimoine. Il garantit la compétence des guides-conférenciers et des animateurs du patrimoine ainsi que la qualité de leurs actions. Des vestiges antiques à l’architecture du XXe siècle, les villes et pays mettent en scène le patrimoine dans sa diversité. Aujourd’hui, un réseau de 184 villes et pays vous offre son savoir-faire sur toute la France. A proximité L’Etampois, Meaux, Noisiel, le Parc naturel régional du Vexin français, Pontoise, Plaine Commune, Vincennes, Rambouillet, Saint-Quentin-en-Yvelines bénéficient du label Villes et Pays d’art et d’histoire.