L`œuvre au noir, alchimie des collections automne
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L`œuvre au noir, alchimie des collections automne
Automne-hiver 2012/2013 L’œuvre au noir, alchimie des collections automne-hiver 2012/2013 Photos, Terry Gates. Stylisme, Benjamin Galopin. Texte, Laurent Dombrowicz. Création, Kappauf Maquillage, Morgane Martini. Coiffure, Alexandry Costa C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 1 Automne-hiver 2012/2013 NEW YORK En rouge et noir. Dopée par la génération montante de créateurs et directeurs artistiques, la mode américaine fait son facelift Le duo fête ses dix ans de création. Un parcours sans faute, même si une relative discrétion ne les place pas dans les leaders mondiaux du prêt-à-porter. Pourtant, leur collection hiver est, comme très souvent, une réussite évidente. Aux pliages néosportswear succèdent des ensembles qui évoquent les robes chinoises des années 1960. Le tout est tonique, juste, et parfaitement dans l’air du temps. 2 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L ALEXANDER WANG Carton plein pour le défilé le plus attendu de la scène new-yorkaise ! Un casting VIP, une scénographie qui évoque les monolithes de 2001, l’Odysée de l’espace et une collection forte et réaliste à la fois. Les manteaux courts et les robes fluides font la synthèse entre l’esprit futuriste de Courrèges et le minimalisme sexy d’Helmut Lang. Les matières, très sophistiquées, jouent sur la brillance et le trompe-l’œil. Une mode à consommer immédiatement. DIESEL BLACK GOLD Sophia Kokosalaki prend la tangente avec cette collection au tempérament très personnel. Les silhouettes semblent volontairement décalées, presque cassées — sans doute une volonté habilement accompagnée par le stylisme de MarieAmélie Sauvé — et mettent en valeur de vrais parti pris : jupes longueur genoux, jacquards pixellisés et ponyskin rouge sang. Une jolie vision rock, un peu off beat. LACOSTE Très en verve, Felipe Oliveira Baptista revisite l’histoire de la griffe tout en la plaçant sur une nouvelle orbite. Les années Courrèges (André Courrèges lui-même ne portait que des polos Lacoste blancs) et le modernisme des années 1930 donnent le rythme et le graphisme de ce nouveau chapitre très efficace, au masculin comme au féminin. On retient aussi un champ coloriel restreint, urbain, où le noir est un pivot plus qu’une finalité. PHOTOS, D.R. PROENZA SCHOULER Lacoste Combipantalon bleu marine à manches zippées C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 3 Automne-hiver 2012/2013 De l’Amérique de la prohibition (Gatsby le magnifique) à l’Angleterre de 1910 (Downton Abbey), il n’y a que l’Atlantique à traverser. Ralph Lauren présente une sorte de florilège, habilement orchestré, et placé sous l’influence de l’élégance britannique du début du xxe siècle. Ses héritières Crawley et Grantham, en trench camel, costume trois pièces de velours ou fourreau noir, ne sont pas prêtes à abandonner leurs privilèges. Et c’est tant mieux. MIGUEL ADROVER Retour surprenant pour ce créateur d’origine cubaine qui s’était échoué sur une plage d’Ibiza depuis plus de dix ans après avoir fait la une de la fashionweek new-yorkaise au début du millénaire. Un trublion inventif qui ose le recyclage dans la capitale de la consommation ! Un mélange réussi entre le Nord et le Sud, l’Orient et l’Occident, où les drapés bousculent le casualwear, et où l’on croise même une robe vintage d’Alexander McQueen retaillée pour l’occasion. Un hommage. 4 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L HERVé LéGER Max et Lubov Azria se surpassent avec une collection tout en féminité, transcendant l’évidence et l’efficacité des fameuses robes à bande, signature de la marque. La saison est d’autant plus réussie que l’écueil du monoproduit pourrait apparaître comme épouvantail créatif. Cette saison, la thématique équestre vitamine le style : motifs jacquard mais surtout harnais de cuir qui lorgnent avec délice vers un SM policé. CALVIN KLEIN collection Entre rigueur et féminité, Francisco Costa s’est frayé un chemin particulier : saison après saison, son approche quasi mathématique de la mode et son sens des matières font merveille chez Calvin Klein. Très à l’aise avec les volumes amples, il tient cependant cette saison à marquer une taille haute et donc à réveiller un discret parfum 50’s. Faussement simples, les robes coquelicot sont de vraies prouesses techniques et d’équilibre stylistique. TOMMY HILFIGER Dans le sillage de son parfum Eau de prep, le toujours sémillant créateur américain nous emmène du côté des college girls, WASP et fun tout à la fois. Ici aussi, on affiche un goût pour les champs de course, pour les tartans néobritish, pour le militaire revisité, bref, pour tout ce qui fait le sel des conversations dans les belles résidences des Hamptons. PHOTOS, D.R. RALPH LAUREN COLLECTION CALVIN KLEIN collection Haut coton velours et cuir. Pantalon carotte coton velours. Escarpins croco noir DIESEL BlACK GOLD Haut manches courtes fausse fourrure noire, short cuir imprimé léopard Automne-hiver 2012/2013 LONDRES God Shaves the Queen. Les belles impertinences de la mode britannique PHOTOS, D.R. BURBERRY PRORSUM Christopher Bailey intitule sa collection Town and Field. Au-delà d’une réunion de circonstance, le brillant directeur artistique entend surtout élargir le champ stylistique de la griffe. À l’outerwear, il ajoute saison après saison de superbes (et parfois étonnantes) digressions sur une garderobe en devenir. Les poches à rabats (Field) deviennent des basques rétro (Town), les volants s’installent sur les jupes et les microbombers, issus de la collection homme, viennent rappeler avec justesse les origines utilitaires de la marque. DAVID KOMA Ce brillant Géorgien, Londonien d’adoption, séduit chaque saison davantage avec une vision aiguisée de la femme contemporaine. Pourtant, il cite parmi ses références de la saison des portraits de la marquise Cassati et les portraits animaliers du peintre belge Thierry Poncelet. Les robes de Koma sont de souples armures, écrins d’une féminité presque dangereuse, tant l’anatomie y est soulignée. Le dessin des épaules est sublime, tout comme les chaussures à talon “lévrier” imaginées par son complice florentin, le jeune Alain Quilici. CHRISTOPHER MARY KANE KATRANTZOU Depuis plusieurs saisons, il s’est affirmé comme le leader des créateurs anglais grâce à un sens de la coupe précis et sans chichis, et à un vrai discours de mode relayé par une efficacité souvent en berne outreManche. À un été fleuri succède un hiver sombre, presque gothique. Le créateur compare d’ailleurs les effets moirés qui parsèment sa collection à l’intérieur d’un cercueil. Bon sang ne saurait mentir ! Challenge important mais réussi pour la créatrice devenue la reine incontestée des imprimés surprises. Elle renouvelle le genre avec brio, étendant sa palette de couleurs à l’infini mais en se concentrant davantage sur les formes. Les robes corsetées sont un écho à l’époque élizabethaine— la première ! — et les ensembles plus body conscious citent un autre héros de la mode anglaise, Anthony Price qui, à la fin des années 1970, habillaient les fantasmes de Roxy Music. C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 7 Automne-hiver 2012/2013 8 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L PAUL SMITH Avec son habituelle et charmante désinvolture, le doyen des créateurs anglais propose sa leçon de masculin/féminin. Un credo : le pantalon sur tous les tons. En costume, en pyjama, en leggings, en forme courte et évasée, en quasi leggings, il est bien la plus noble conquête de la femme, sur et hors podium. McQ Pour la première fois, la deuxième ligne de la griffe Alexander McQueen prend la route du catwalk. Une vraie réussite qui nous montre par la même occasion que Sarah Burton est plus à l’aise avec cette démonstration qu’avec la ligne phare qui s’apparente saison après saison à une recette pâtissière un peu indigeste. Chez McQ, le army chic en total look khaki côtoie avec bonheur le romantisme du velours dévoré. La proposition est désirable et réaliste. PHOTOS, D.R. KTZ Depuis quelques saisons, Marjan Pejoski a choisi les initiales de sa boutique Kokon to Zai pour présenter ses collections aussi insolentes que rafraîchissantes. Après un été punk massaï, il lorgne cette fois vers le début des 80’s avec une habile irrévérence. La collection est le fruit de la rencontre des Blitz kids londoniens et des popes orthodoxes. On pense aux débuts de Boy George, au mouvement Buffalo, au mannequin transsexuel Terry Toye, bref, à tout ce qui fait que Londres est Londres. PAUL SMITH Manteau cachemire noir. Chaussures “fontaines” cuir verni TOM FORD Soutien-gorge python verni et pantalon-legging Veste chocolat agneau de Mongolie, Sprung Frères Gucci Longue cape jersey de cachemire noir. Blouse mousseline de soie noire, jodhpur jacquard de soie et lurex. Bottes à lacets cuir noir 1 2 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L Automne-hiver 2012/2013 MILAN Sur du velours Une fois encore, la mode italienne joue la carte de l’opulence PHOTOS, D.R. DOLCE & GABBANA Retour gagnant et foudroyant pour la célèbre griffe qui n’est jamais autant appréciée que lorsqu’elle retourne à ses origines. C’est donc la Sicile éternelle qui est célébrée, voire sanctifiée, dans une collection au finale époustouflant. Les vierges baroques, fleuries, semblent échappées d’une fresque xviie siècle, les enluminures dorées répondent aux total looks de dentelle noire. La mode tutoie l’histoire, avec raison mais aussi avec aplomb. JIL SANDER Une sortie en (extrême) beauté pour Raf Simons qui clôture ses années chez Jil Sander avec une collection parfaite. Des citations couture, notamment dans les volumes librement inspirés de Cristobal Balenciaga, des couleurs poudrées, une longueur délicieusement dérangeante et une rigueur qui cette fois s’est enrichie d’une partition poétique et subtile. PRADA Pas de discours théorique cette saison, Miuccia Prada place sa collection sous le signe de la beauté et de l’envie de vêtements. Ce discours ne fait cependant pas place au simplisme. On retrouve tout le vocabulaire Prada dans cette collection qui, deci delà, pourrait faire penser à un best-of : les imprimés optiques “mauvais goût” qui ont fait la gloire de la marque au milieu des années 1990, les pantalons courts et évasés portés sous des jupes et des manteaux trois quarts, les broderies métalliques et géométriques rythmant des aplats de noir, etc. Longue vie à Prada. GUCCI Le luxe à l’italienne dans toute sa splendeur. Dans un camaïeu de couleurs sourdes — faux noirs aux reflets améthyste, grenat, bleus de Prusse —, la femme Gucci est imparable dans sa leçon de séduction. Fatale en robe du soir volantée, mystérieuse en boléro de plumes, volontaire en manteau militaire ou aristocratique en décolleté de velours. Frida Gianini à son apogée. GIORGIO ARMANI La présentation des collections Armani est toujours très particulière. Scénographie, direction artistique, casting et surtout stylisme sont abordés ici de manière très radicale, comme à la fin des années 1980. Ou dans le générique de The Bold and the Beautiful. On ne sera pas étonné de retrouver l’habileté du seigneur de Milan dans les ensembles déstructurés. Ses nouveaux pantalons sont d’ailleurs les plus cool de la saison. Les couleurs choc, fuschia en tête, viennent casser l’harmonie trop parfaite des gris urbains. C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 1 3 JIL SANDER Robe crêpe de soie et vinyle noirs Escarpins Pigalle Christian Louboutin PRADA Manteau et pantalon laine noire brodée Souliers à bride C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 1 5 GIORGIO ARMANI Veste laine de Mongolie avec plumes noires et oranges. Bermuda organza noir Collants opaques, Dim SALVATORE FERRAGAMO Robe noire crochet avec rubans velours Capuche raccoon tricoté, Sprung Frères C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 1 7 Automne-hiver 2012/2013 VERSACE Tentations gothiques pour Donatella qui orne ses manteaux de velours et ses robes graphiques de crucifix géants. En deuxième partie de ce Blonde Ambition Tour, des robes qui empruntent les techniques à l’âge d’or de Paco Rabanne : la cote de maille et les rivets métalliques emportent les robes sirène dans une autre dimension. 1 8 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L ROBERTO CAVALLI Nouvelles envolées pour le roi du baroque (le vrai !) qui conjugue cette fois ses célèbres imprimés animaliers avec un travail de transparence, de layering, et même de trompe-l’œil entre fourrures et imprimés. Une âme gitane qui vient tutoyer avec brio la culture des tapis rouges, c’est l’essence même de cette griffe qui est à son top lorsqu’elle est vraiment elle-même. DSQUARED2 Dean et Dan Caten sont très habiles pour faire revivre l’image fantasmée de la jet-set des années 1960. Jackie O, Lee Radziwill, Nan Kempner et toutes leurs copines milliardaires, très occupées entre un divorce et une pool party, sont les invitées fantôme de cette collection chic et fun, ou les jeans coupés fricotent avec les manteaux façon panthère et où les robes du soir sortent d’un carcan trop formaliste. Le mélange, c’est l’essence. MONCLER GAMME ROUGE Le ski et le luxe, c’est un duo qui existe depuis que Gstadt est Gstadt. Moncler Gamme rouge, la ligne superétoilée dessinée par Giambattista Valli, slalome donc en pleine poudreuse, avec ses capuches oversized en agneau de Mongolie, ses manteaux cocons — vraie signature créative — et une recherche de matériaux réfléchissants. Pour un bronzage sans démarcation à 3 000 mètres d’altitude, cela va de soi. PHOTOS, D.R. FENDI C’est dans une optique tribale et avant-gardiste, qui n’est pas sans rappeler le film Apocalypto de Mel Gibson, que Karl Lagerfeld et Silvia Fendi ont placé cette collection qui est avant tout un incroyable manifesto de fourrures ! Au-delà du savoir-faire de la maison romaine, c’est une vision radicale et élégante d’un langage mode pourtant connu. Le manteau de fourrure est tout sauf bourgeois. Toutes les espèces y passent — y compris l’antilope —, et l’omniprésence du galuchat (en inserts, imprimé, accessoires, même en décor) confortent la griffe dans la sphère de l’hyperluxe. FENDI Manteau fourrure de Mongolie bleu nuit et multicolore. Bottines noires cuir et galuchat Serre-tête velours et métal, Erik Halley ROBERTO CAVALLI Haut manches courtes entièrememt rebrodé de paillettes opaques noires mélangées à des plumes vertes. Pantalon évasé crocodile noir, taille haute C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 2 1 TRUSsARDI Robe cuir noir DSQUARED2 Robe voile et dentelle noirs Gants, Georges Morand C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 2 3 Automne-hiver 2012/2013 PARIS Les grandes manœuvres La capitale à l’heure de l’alternance 24 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L JEAN PAUL GAULTIER Une collection très personnelle mais qui aurait pu donner naissance à un autre storytelling que celui choisi par notre turbulent couturier, devenu entretemps juré du Festival de Cannes. Ni cinéma ni musique au menu, mais l’énergie de la rue — un vrai credo mode chez Jean Paul Gaultier — et la pertinence du graffiti dans la culture artistique contemporaine. C’est donc sur la base de son vestiaire classique revisité et habilement stylisé qu’il balance ses gangsta girls et ses maquerelles du bitume en vestes jacquard façon muraille vandalisée. PAUL & JOE Les modes passent et parfois trépassent. Sophie Albou, elle, reste fidèle à sa joie de vivre — en français dans le texte ! — et peut compter sur son flair pour rencontrer les envies des femmes. Les vraies et non pas celles qui ne vivent que dans les magazines. Une humeur à la Claude Sautet plane sur cette collection automnale. Le décor boisé, les trench-coats imparables, les pantalons sous influence 70’s s’enrichissent de velours soyeux et de paillettes disco chic. PACO RABANNE Un style contemporain, moins théâtral que la saison dernière, qui revampe les classiques de la marque imaginés à l’aube des années 1970 et portés alors par les plus belles femmes, de Brigitte Bardot à Françoise Hardy. La transposition de ses robes en cote de maille ou en métal mesh dans un vestiaire 2012 passe aussi par de nouvelles matières, plus confortables (maille réfléchissante, ponyskin…) et par des tons froids (bleu dur, blanc cassé) empruntés à des détails de l’architecture soviétique des années 1970. PHOTOS, D.R. CHANEL En direct de la planète Krypton, Karl Lagerfeld est plus minéral que jamais. Les manteaux aux manches facetées, les broderies pyramidales, les imprimés et jacquards géométriques, jusqu’aux sourcils bijoux, Chanel est à l’âge de la pierre (précieuse, cela va sans dire). Depuis sa collection Paris Bombay, le locataire — sans préavis — de la rue Cambon semble raffoler immodérément du pantalon porté sous la jupe. Cela donne un genre. ELIE SAAB Debout : cape crêpe de laine et combipantalon noirs Assise : robe dentelle brodée et mousseline plissée C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 2 5 KENZO Parka drap de laine réversible. Gants cuir et astrakan HUGO BOSS Robe soie noire manches trois quarts ballon et ceinture cuir noir boucle dorée Bottines, Cesare Paciotti C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 27 VIKTOR & Rolf Robe tulle avec application renard. Gants cuir noir et bottes cuir façon écaille vernie Collants, Dim MAISON MARTIN MARGIELLA Renard naturel. Pantalon coton Bottes cuir C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 2 9 Automne-hiver 2012/2013 Entre années 1920 et années 1970, le cœur de Marc Jacobs balance. Certes, il a bien observé la proposition de Miuccia Prada et parfaitement assumé cette filiation créative. Il pousse le curseur en imaginant une héroïne à mi-chemin entre Mary Poppins — avec son grand cabas — et Janis Joplin. Les couleurs et les imprimés chantent un refrain psychédélique, le lurex allume la soie, les chapeaux de Stephen Jones ont du mal à passer par les portes. C’est fun, c’est Vuitton. 3 0 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L DIOR Y a-t-il encore une âme chez Dior ? Depuis le départ de John Galliano, la question se pose. Son remplaçant temporaire, Bill Gaytten, confirme cette saison le retour d’un New Look à l’élégance discrète. L’image de la femme Dior s’empreint donc de rétrochic, à base de jupes fluides, sous le genou et ceinturées à la taille, déclinées dans les tons pastel. L’hiver sera doux et sage. En attendant la nouvelle ère du créateur anversois Raf Simons, fraîchement nommé à la création mode femme de la Maison. A.P MANISH ARORA Le créateur indien réussit le grand écart entre une relecture des années 1950 et la culture graffiti. Aux jupes New Look à découpes laser répondent des looks taggés façon camouflage. Des bouches de velours s’accrochent aux robes tandis que les têtes s’ornent d’un bibi de plumes de cuir vieil or. Invité pour une collaboration arty par le sorcier de Delhi, le streetartist Judith Supine et ses visages sur fond urbain. ELIE SAAB Ce n’est pas du côté de ses robes longues, toujours parfaites, que le créateur libanais emmène notre regard. Ni davantage vers la somptuosité de ces cascades de sequins. Les ensembles de jour sont le point d’ancrage de cette nouvelle collection et établissent, d’emblée, une identité parfaitement renouvelée. Ajustés sans être tapageurs, graphiques sans être caricaturaux, les tailleurs d’Elie Saab sont une vraie bonne nouvelle. PHOTOS, D.R. LOUIS VUITTON MIU MIU Robe veau velours bleu marine rebrodé de miroirs Chemise organza noir PAUL & JOE Combipantalon soie noire dos dentelle noire et manteau fourrure noire LOUIS VUITTON Longue robe brodée noire et violette. Chapeau marron velours avec plumes C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 3 3 Automne-hiver 2012/2013 3 4 C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L HERMÈS La griffe, synonyme de luxe intemporel à la française, est également évocatrice de voyage. C’est sur cette idée que Christophe Lemaire a construit sa collection en privilégiant des coupes amples et confortables. Les citations sont diverses, du folklore russe aux années Martin Margiela. C’est un luxe non ostentatoire, aux emprunts discrets qui a comme vocation d’accompagner la vie d’une femme plutôt que de simplement l’habiller pour une saison. COMME DES GARCONS Rei Kawakubo est sur toutes les lèvres. Une évidence pour certains, une redécouverte pour d’autres. De la cérémonie des CFDA au Musée de la mode, elle déploie une œuvre unique, souvent déstabilisante, loin des standards du luxe contemporain. La dernière collection Comme des Garçons est une réponse subtile et ironique à cette mode qui se consomme sur écran 13 pouces. Toutes les silhouettes semblent être en 2D, comme mises sous blister. Rei Kawakubo, seule dans son genre certes, mais royale. MAISON MARTIN MARGIELA C’est avec délice que l’on retrouve originalité et savoir-faire dans cette maison qui semblait bien en peine de survivre créativement à son passé glorieux. Faire du Martin Margiela sans Martin Margiela : le défi permanent dont le studio pourrait bien avoir eu raison cette saison. Cette collection joue sur des effets de “porter” avec des volumes rigidifiés, des cols qui couvrent le menton, des vestes basculées, des pantalons aux proportions stretchées et même des chaussures qui semblent avoir été coulées dans le béton. C’est du solide. PHOTOS, D.R. LANVIN Dix ans de création et de récréation tant la bonne humeur de la mode selon Alber Elbaz est contagieuse. Un défilé aussi brillant qu’efficace et une soirée mémorable emmenée par un créateur chantant et enchanté, un Joey Arias détonnant et un buffet à 3 millions de calories. La collection renoue avec la perfection : tailleurs monochromes en néoprène, volants souverains, bijoux à faire pâlir la plus exigeante des maharanis et imprimés dentelle évoquant les tests de Rorschach. De la belle ouvrage. YVES SAINT LAURENT Haut et pantalon radzimir noir. Col et revers cuir. Ceinture cuir et métal. Bottes plateformes cuir talon miroir Capuche plumes d’aigle noir, JC de Castelbajac GUY LAROCHE Haut coton et fourrure de Mongolie. Pantalon coton et gants longs cuir DIOR Veste alpaga bleu marine et gants longs cuir C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 3 7 JOHN CALLIANO Robe écailles de cuir bleu marine CHANEL Veste plumes jersey gris foncé. Combinaison tulle brodé C I T I Z E N K I N T E R N AT I O N A L 3 9