Etude sociolinguistique sur l`adéquation entre la demande et l`offre d

Transcription

Etude sociolinguistique sur l`adéquation entre la demande et l`offre d
Etude sociolinguistique sur l’adéquation entre la
demande et l’offre d’enseignement bilingue dans la
région de Mopti
Projet de recherche mené en collaboration avec la Cellule de Planification et
de Statistique, la Direction Nationale de la Pédagogie, la Direction Nationale
de l’Enseignement Fondamental du MEALN et le Programme USAID/PHARE
PARTIE 1 – RAPPORT
2011
Cette étude a été réalisée avec le soutien de l’Agence des Etats Unis pour le Développement
International (USAID). Les opinions exprimées dans ce rapport sont celles des auteurs et ne
reflètent pas nécessairement celles de l’USAID et du Gouvernement des Etats-Unis
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS
2
ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES
4
LISTE DES TABLEAUX
5
LISTE DES GRAPHIQUES
6
PARTIE A. RÉSUMÉ EXÉCUTIF
7
PARTIE B. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
12
B.1. Historique de l’introduction des langues nationales dans l’école malienne ............... 12
B.2. Contexte de la présente étude .................................................................................. 14
B.3. Objectifs de l’étude ................................................................................................... 15
PARTIE C. Méthodologie
17
C.1. Le champ de l’enquête .............................................................................................. 17
C.2. Concepts et définition ............................................................................................... 17
C.3. Les outils de collecte ................................................................................................. 18
C.4. Les limites de l’étude ................................................................................................ 20
PARTIE D. Les données collectées
21
D.1. Les écoles ................................................................................................................. 21
D.2. Les IFM ..................................................................................................................... 23
PARTIE E. La demande d’enseignement en langue nationale
24
E.1. Les écoles dont tous les enfants parlent la même langue .......................................... 24
E.2. La langue commune des élèves ................................................................................. 27
E.3. Quelques réflexions sur la détermination de la langue commune .............................. 32
PARTIE F. L’adéquation entre demande et offre d’enseignement bilingue
34
F.1. Le programme pédagogique au niveau de l’école ...................................................... 34
F.2. La langue d’enseignement du curriculum .................................................................. 36
F.3. La mise en application du curriculum dans les classes des écoles curriculum ............. 39
F.4. Les facilités des enseignants dans les langues nationales ........................................... 42
F.5. La formation des enseignants pour enseigner en curriculum ..................................... 45
F.6. La disponibilité du matériel didactique ...................................................................... 50
PARTIE G. La mise en œuvre de l’enseignement bilingue dans la région de Mopti
52
PARTIE H. L’enseignement des langues nationales dans les IFM
54
PARTIE I. Conclusions et recommandations
58
I.1. La connaissance des réalités linguistiques .................................................................. 58
I.2. Une réflexion à approfondir à l’échelle nationale ....................................................... 60
Bibliographie
61
Annexes
62
REMERCIEMENTS
Cette étude a été réalisée par le programme PHARE en collaboration avec la Cellule de
Planification et de Statistique (CPS), la Cellule d’Appui à la Décentralisation et à la
Déconcentration de l’Education (CADDE), la Direction Nationale de la Pédagogie (DNP), la
Direction Nationale de l’Enseignement Fondamental (DNEF) du Ministère de l’Education, de
l’Alphabétisation et des Langues Nationales (MEALN) et a été financée par l’USAID. A
chaque étape du processus, les techniciens des différentes structures du MEALN et du
Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS) ont apporté
leurs contributions.
De sincères remerciements vont à tous ceux qui ont participé à cette étude pour leur
expertise dans le domaine et leur rigueur qui ont largement contribué à la qualité
scientifique de ce rapport.
Collecte des données
Cellule de planification statistique
Direction Nationale de l'Education de Base
Direction Nationale de la Pédagogie
Cellule d’appui à la décentralisation et à la
déconcentration de l’éducation
AE de DOUENTZA
CAP de BANDIAGARA
CAP de BANDIAGARA
CAP de BANKASS
CAP de BANKASS
CAP de DOUENTZA
CAP de KORO
CAP de KORO
AE de MOPTI
CAP de DJENNE
CAP de MOPTI
CAP de SEVARE
CAP de TENENKOU
CAP de YOUWAROU
KALOGA DJANKÉ
SAMBA
GUÉDIOUMA
DJIBRIL
LAMINE
MAÏMOUNA
MAMADOU D
KALOGA
KONTAGA
THIÉRO
DIARRA
DEMBELE
DIALLO
TRAORÉ
KOUNGARAMA
KODJO
NOUMORY
SANA
SIDIKI
MOUSSA AMALÉ
ABDOULAYE L.
ISMAËL
MATHIEU
AMPILÉMA
MODY
GUÉDJOUMA
MOUSSA
ENELOU
BOCAR KOLA
SOUMANA
MAHAMAR Y.
KONÉ
OUOLOGUEM
TRAORÉ
GUINDO
MAÏGA
DICKO
ONGOÏBA
SAGARA
CISSÉ
DAOU
GUINDO
MAIGA
PLÉ
MAÏGA
2
Analyse et rédaction
Cellule de planification statistique
Direction Nationale de l'Education de Base
Cellule d’appui à la décentralisation et à la
déconcentration de l’éducation
Institut Supérieur de Formation et de Recherche
Appliquée
PHARE
OUMAR
TIÉOULÉ
ABDOULAYE
LASSINE
ABDRAHAMANE
CISSE
DIARRA
MAÏGA
SIDIBE
KONE
ABOU DIARRA
DIARRA
CHEICK OUMAR
FOMBA
NORMA
YOUSSOUF M.
ALMOUGAÏRATA
REBECCA
ABDOULAYE
AUDE
EVANS
HAÏDARA
MAÏGA
RHODES
SINAYOKO
VESCOVO
3
ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES
AE
CAP
CADDE
DNP
DNEB
EDC
EPT
ESL
IFM
LN
MEALN
MEB
PHARE
PISE
PRODEC
PTF
TDR
UNESCO
USAID
Académie d’Enseignement
Centre d’Animation Pédagogique
Cellule d’Appui à la Décentralisation/Déconcentration de l’Education
Direction Nationale de la Pédagogie
Direction Nationale de l’Éducation de Base
Education Development Center/Centre du Développement de l’Éducation
Éducation Pour Tous
Etude sociolinguistique
Institut de Formation de Maître
Langue nationale
Ministère de l’Éducation, de l’Alphabétisation et des Langues Nationales
Ministère de l’Education de Base
Programme d’Harmonisé d’ Appui au Renforcement de l’Education
Programme d’Investissement Sectoriel de l’Education
Programme Décennal de Développement de l’Education
Partenaire Technique et Financier
Termes de Référence
Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture
Agence des États Unis pour le Développement International
4
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 Tableau 2 Tableau 3 Tableau 4 Tableau 5 Tableau 6 Tableau 7 Tableau 8 Tableau 9 Tableau 10 Tableau 11 Tableau 12 Tableau 13 Tableau 14 Tableau 15 2010
Tableau 16 -
La généralisation du curriculum prévue en 2005 ............................................... 13
Le champ de l’enquête ....................................................................................... 17
Les outils de collecte........................................................................................... 19
Exhaustivité des données ................................................................................... 21
Population enquêtée .......................................................................................... 21
La qualité des données ....................................................................................... 22
Personnes interrogées dans les IFM ................................................................... 23
Ecoles homogènes en termes de langues parlées par les élèves....................... 24
Langue des élèves dans les écoles dites homogènes ......................................... 25
Ecoles hétérogènes en termes de langues parlées par les élèves ..................... 27
Nombre moyen de langues parlées par les élèves dans une école ................... 28
Langue commune des élèves.............................................................................. 29
Quelques aspects de la détermination de la langue commune ......................... 33
Le programme scolaire appliqué des écoles de la région de Mopti .................. 34
Evolution du nombre et de la proportion d’écoles curriculum entre 2005 et
............................................................................................................................ 35
L’adéquation entre la langue commune des élèves et la langue d’enseignement
............................................................................................................................ 37
Tableau 17 - Cas de discordance entre la langue commune des élèves et la langue
d’enseignement du curriculum ................................................................................................ 37
Tableau 18 - Application du curriculum dans les classes des écoles à curriculum ................. 39
Tableau 19 - L’utilisation du curriculum bilingue dans les classes des écoles curriculum ...... 41
Tableau 20 - Concordance entre la langue maternelle des enseignants et la langue qu’ils
estiment parler le mieux .......................................................................................................... 42
Tableau 21 - Les facilités linguistiques des enseignants (mesurées par la langue qu’ils disent
parler le mieux) dans la langue commune des élèves de l’école ............................................ 43
Tableau 22 - Comparaison de la fréquence de chaque langue en tant que langue commune
des enfants et en tant que langue la mieux parlée par l’enseignant ...................................... 43
Tableau 23 - Formation continue des enseignants du niveau 1 en 2005 ............................... 46
Tableau 24 - Ecoles dont les enseignants suivant le curriculum bilingue sont formés pour
enseigner en langue nationale, dans la bonne langue et pour le bon niveau......................... 46
Tableau 25 - La formation des enseignants suivant le curriculum dans leur classe ............... 47
Tableau 26 - Le manque de formation des enseignants : un facteur important de l’abandon
du curriculum dans les classes des écoles curriculum ............................................................. 48
Tableau 27 - Le problème de la formation par niveau ............................................................ 48
Tableau 28 - Situation de répartition optimale des enseignants formés................................ 49
Tableau 29 - Disponibilité de matériel didactique dans les écoles curriculum ....................... 50
Tableau 30 - L’enseignement des LN dans les IFM de la région de Mopti .............................. 54
Tableau 31 - Les compétences des professeurs en langues nationales .................................. 54
Tableau 32 - Les compétences des élèves maîtres dans ces langues ..................................... 55
Tableau 33 - Les facilités des élèves maîtres dans les langues nationales .............................. 56
Tableau 34 - Comparaison de la fréquence de chaque langue en tant que langue commune
des enfants d’une école et de sa fréquence en tant que langue la mieux parlée par les
enseignants ............................................................................................................................ 63
5
LISTE DES GRAPHIQUES
Graphique 1 Langue commune des élèves des écoles homogènes de la région de Mopti
(n=609)
26
Graphique 2 Langue commune des élèves des écoles homogènes par AE ............................ 26
Graphique 3 Langue commune des élèves des écoles de La région de Mopti ....................... 29
Graphique 4 Langue commune des élèves des écoles de l’AE de Douentza .......................... 30
Graphique 5 Langue commune des élèves des écoles de l’AE de Mopti ................................ 31
Graphique 6 Degré d’application du curriculum dans les classes selon le niveau .................. 40
Graphique 7 Fréquence des langues en tant que langue commune des enfants et en tant
que langue la mieux parlée par les enseignants ...................................................................... 44
6
LISTE DES CARTES
Carte 1 - Répartition géographique des écoles homogènes et des écoles hétérogènes en
termes de langues parlées par les élèves. ............................................................................... 25
Carte 2 - Répartition géographique des écoles selon la langue commune des élèves ........... 32
Carte 3 - Répartition géographique des écoles dites « classiques » et des écoles dites
curriculum ................................................................................................................................ 35
7
PARTIE A. RÉSUMÉ EXÉCUTIF
Depuis les années 1980, le Mali a affiché la volonté d’offrir un enseignement bilingue aux
enfants des écoles fondamentales, tout en gardant au français le statut de langue officielle.
C’est dans cette perspective que le MEALN a développé le curriculum bilingue par
compétences, communément abrégé par « curriculum ». En 2009-2010, année scolaire au
cours de laquelle a eu lieu la collecte de données de l’enquête sociolinguistique sur
l’adéquation entre la demande et l’offre d’enseignement bilingue (ESL 2010), toutes les
écoles devaient offrir les 5 premières classes en langue nationale et les écoles incluses
précédemment dans la pédagogie convergente devaient également offrir la 6 ème année en
enseignement bilingue.
Les défis d’une telle politique sont grands, notamment la formation des enseignants et la
production et distribution de matériel didactique, défis d’autant plus grands que le nombre
de langues considérées est élevé. Pour réussir ce pari, il faut s’assurer que les enfants
reçoivent un enseignement en langue nationale adaptée à leurs besoins et de bonne
qualité.
L’objectif principal de cette étude est d’analyser, dans la région multilingue de Mopti,
l’adéquation entre la demande d’enseignement en langues nationales et l’offre
d’enseignement en langue nationale. Il s’agit donc ici de :
-
Déterminer la carte linguistique de la région de Mopti, c’est-à-dire la carte des
langues parlées par les enfants entre eux
-
Déterminer les compétences des enseignants pour l’enseignement bilingue
-
Déterminer les matériels disponibles dans les écoles
-
Déterminer les compétences des IFM pour l’enseignement des langues nationales
-
Evaluer le degré de mise en œuvre de la politique d’enseignement bilingue
Le champ de l’étude est l’ensemble des écoles publiques et communautaires offrant au
moins une classe de fondamental 1er cycle dans la région administrative de Mopti ainsi que
les deux IFM de la région. 949 écoles ont été concernées, soit une couverture de 96% et
2846 enseignants ont été rencontrés sur 3287, soit 87%.
Dans l’académie de Douentza, 3 langues permettent d’enseigner le curriculum bilingue dans
plus de 90% des écoles : le Dogon1, le Bambara et le Peul. Dans l’AE de Mopti, 4 langues
permettent d’enseigner le curriculum bilingue dans plus de 90% des écoles : le Bambara, le
Peul, le Bozo et le Songhaï. Pour toute la région de Mopti, 4 langues permettent d’enseigner
le curriculum bilingue dans plus de 90% des écoles : le Dogon, le Bambara, le Peul et le Bozo.
1
Pour des raisons de cohérence et de typographie, les notations françaises des noms des langues
ont été adoptées dans le présent rapport.
8
Dans 70% des écoles, la détermination de la langue des élèves et donc de la langue
nationale dans laquelle il serait préférable d’appliquer le curriculum ne pose pas de
problème a priori. Dans l’académie de Douentza, cette langue unique parlée par tous les
enfants est majoritairement le Dogon (86% des écoles homogènes). Dans l’académie de
Mopti, le Peul est parlé par l’ensemble des élèves de 47% des écoles dites homogènes. 21%
des écoles dont les enfants ne parlent qu’une langue sont de langue unique Bambara. De
façon générale, la région de Mopti est plus hétérogène en termes de langues.
Dans l’académie de Douentza, la langue Dogon est quasiment la seule langue de
communication entre les élèves dans les CAP de Bandiagara et Koro. Dans l’académie de
Mopti, la langue commune des élèves est plus hétérogène. Il s’agit du Peul dans 37% des
cas, du Bambara dans 32% des cas ou le Bozo dans 19% des cas.
Dans l’ensemble de la région de Mopti, seules 24% des écoles offrent un enseignement
bilingue selon la déclaration de leur Directeur, soit 228 écoles.
Parmi ces écoles, 91% offrent aux enfants de leur communauté un enseignement dans la
langue nationale adaptée, à savoir la langue dans laquelle les enfants communiquent entre
eux.
La mise en application n’est pas effective dans les écoles supposées offrir un enseignement
en langue nationale. En effet, dans seulement 37% des écoles à curriculum dont la langue
d’enseignement est approprié, l’ensemble du cursus offert est proposé en langue
nationale. 24% des écoles supposées être curriculum et dont la langue d’enseignement du
curriculum est la langue commune des enfants n’offrent en réalité aucune classe suivant le
curriculum. Le pourcentage de classes suivant le curriculum dans les écoles supposées
curriculum décroit avec le niveau.
81% des classes curriculum des écoles curriculum dont la langue d’enseignement est
appropriée sont tenues par des enseignants formés pour enseigner dans cette langue. Mais
ces enseignants ne sont pas forcément formés pour le niveau de la classe tenue. Seuls
52,4% sont formés pour enseigner dans cette langue et pour le niveau de la classe tenue.
Les 19% restants ne sont pas formés du tout pour enseigner dans une quelconque langue
nationale.
Le problème réside dans le manque de formation des enseignants pour le niveau de la
classe qu’ils tiennent mais pas dans la pertinence de la langue de formation vis-à-vis de la
langue d’enseignement du curriculum. L’inadéquation entre le niveau de la classe tenue et
le niveau pour lequel un enseignant a été formé est due à deux phénomènes :
-
le manque d’enseignants formés pour le niveau 3
-
la mauvaise affectation des enseignants.
9
Ce manque de formation conduit de nombreux enseignants et écoles à abandonner le
programme en langue nationale alors même que l’école est identifiée comme une école à
curriculum. Les enseignants des écoles curriculum qui ne suivent pas le programme en
langue nationale ne sont pas formés pour le faire.
Parmi les écoles offrant un enseignement bilingue dans la langue appropriée tout au long
du fondamental 1, 11% comptent des enseignants formés pour le faire.
L’analyse successive des ces différents aspects que sont le programme pédagogique de
l’école, la langue d’enseignement, l’application du curriculum bilingue dans les classes et la
formation des enseignants permet de tirer des conclusions sur la généralisation de
l’enseignement bilingue dans la région de Mopti.
1% des écoles de la région de Mopti offrent un enseignement bilingue dans la langue
adéquat, tout au long du cycle fondamental 1, dispensé par des enseignants formés.
En 2007, Y.M. Haïdara note que le curriculum bilingue n’a pas été introduit dans les IFM,
« faisant de la formation continue la seule stratégie utilisée ». Cette situation n’a
malheureusement pas changée. Dans les deux IFM, on note le très faible temps accordé aux
langues nationales, l’insuffisance du contenu et le manque de formation des professeurs. De
plus, l’IFM de Sévaré ne touche qu’au Bambara bien que la première langue commune dans
l’AE de Mopti soit le Peul.
L’étude a donc montré une bonne connaissance des réalités linguistiques pour la
détermination de la langue nationale. En revanche, la généralisation de l’enseignement
bilingue est bien en deçà des objectifs fixés. Les recommandations quant à la cartographie
linguistique sont donc moindres : vérifier l’adéquation entre la langue d’enseignement du
curriculum et la langue commune des enfants dans les autres régions du Mali et de prendre
soin de préciser la collecte annuelle de la CPS.
En revanche, l’étude a montré un très faible degré de généralisation de l’enseignement
bilingue. Les enseignants et directeurs n’étant pas dans les conditions adéquates pour offrir
un enseignement en langue nationale, retournent vers le programme classique, ce qui
explique le fort pourcentage d’écoles dites curriculum qui offrent des classes suivant le
programme classique.
La formation continue pour l’enseignement bilingue est rarement menée au terme des 3
niveaux de formation. Il convient de réétudier les modalités de la formation continue.
D’autre part, la formation initiale des enseignants ne peut pas être ignorée dans la
politique du curriculum bilingue. Il est nécessaire de définir clairement comment on
introduit les langues nationales dans l’enseignement normal. La formation initiale doit
concerner la connaissance de la langue nationale, la didactique de la langue nationale, la
10
didactique de la lecture écriture en langue nationale et l’utilisation de la langue comme
medium pour l’enseignement des autres disciplines. Si la formation initiale se limite à la
transcription de la langue nationale, aucun enseignant ne sera apte à utiliser la langue
nationale comme médium d’enseignement et à utiliser les compétences acquises en LN
pour développer d’autres capacités.
11
PARTIE B. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
B.1. Historique de l’introduction des langues nationales dans l’école
malienne
En 1979, le Mali ouvre quatre écoles expérimentales, qui enseignent en Bambara dans les
premières classes du fondamental. En 1982 l’expérimentation est étendue à 3 autres
langues nationales, le Peul, le songhaï et le tamasheq, et à 108 écoles. Les résultats de ces
expérimentations sont jugés satisfaisants, confortant le MEALN dans l’idée que
"l’enseignement en langue nationale dès la 1ère année de la scolarité facilite les acquisitions
fondamentales, libère la spontanéité de l’enfant, lui permet de réaliser des progrès rapides"
(Diakité, 2002, citant l’Institut pédagogique national, s.d.).
Une des difficultés de l’enseignement bilingue réside dans le transfert en français des
compétences acquises en langue nationale. C’est pourquoi l’Etat élabore la méthodologie
dite convergente, centrée sur l’apprenant et sur la communication, mettant l’accent sur
l’imagination et la créativité de l’enfant. La Pédagogie Convergente devait fournir aux
enseignants des méthodes et techniques d’enseignement qui permettent de suivre un
curriculum bilingue.
La pédagogie convergente est mise à l’essai en 1987 dans 2 écoles de Ségou (Calvet, 1988).
En 1994, le gouvernement prévoit une généralisation des langues nationales à côté du
français qui demeure matière et médium d’enseignement. "Tout en gardant au français le
statut de langue officielle, les autorités maliennes entendent développer les langues
nationales en les introduisant dans l’enseignement fondamental pour développer chez
l’enfant malien un bilinguisme fonctionnel" (Diarra, 1997). La loi d’orientation de 1999
institue l’enseignement concomitant d’une langue nationale et du français.
En 2002, l’enseignement en langue nationale entame une nouvelle phase. La réforme
curriculaire a introduit l’approche par compétences, qui déterminent quelles compétences
un enfant doit posséder à la fin de chaque niveau. Entre 2002 et 2005, l’enseignement
selon le curriculum bilingue par compétence, abrégé communément en « curriculum », est
mis à l’essai sur 80 écoles, puis introduit dans 2050 écoles, dont les écoles ayant
auparavant été formées à la pédagogie convergente.
Suite à cette expérimentation, les étapes suivantes de généralisation de l’enseignement des
langues nationales ont été fixées par le Département de l’Education :
12
Niv 1
Niv 2
Niv 3
Niv 4
2015-2016
2014-2015
2013-2014
2012-2013
2011-2012
2010-2011
2009-2010
2008-2009
2007-2008
2006-2007
La généralisation du curriculum prévue en 2005
2005-2006
2004-2005
Tableau 1 -
1ère année
2ème année
3 ème année
4 ème année
5 ème année
6 ème année
7 ème année
8 ème année
9 ème année
Toutes les écoles
Ecoles de la PC
En 2009-2010, année scolaire au cours de laquelle a eu lieu la collecte de données, toutes
les écoles maliennes devaient offrir les 5 premières classes en langue nationale et les écoles
incluses précédemment dans la pédagogie convergente devaient également offrir la 6ème
année en enseignement bilingue.
Les langues concernées par l’enseignement bilingue sont parmi les 13 langues reconnues
par la loi n°96-049 (1996) portant modalités de promotion des langues nationales. Seules les
langues assez instrumentées peuvent être utilisées pour l’enseignement bilingue. En 2007, 2
de ces 13 langues étaient jugées trop peu instrumentées, le Malinke et le Maure. Les 13
langues nationales officielles sont les suivantes :
Langue
BAMBARA
AE offrant des écoles à curriculum dans cette langue
Kayes, Kita, Koulikoro, Kati, Sikasso, Koutiala, Ségou, San, Mopti,
Douentza , Bamako RD, Bamako RG, Nioro, Bougouni 14/17
Koutiala, San 2/17
Mopti 1/17
Douentza 1/17
Kayes, Kita 2/17
BOBO
BOZO
DOGON
KHASSONKE
MALINKE
MAURE
MINIANKA
Koutiala, San 2/17
PEUL
Kayes, Koulikoro, Mopti, Douentza 4/17
SENOUFO
Sikasso 1/17
SONGHAÏ
Douentza, Tombouctou, Gao 3/17
SONINKE
Kayes, Kita, Koulikoro, Nioro 4/17
TAMASHEQ
Tombouctou, Gao, Kidal 3/17
Source : Haïdara, 2005
Nombre d’AE
14/17
2/17
1/17
1/17
2/17
0/17
0/17
2/17
4/17
1/17
3/17
4/17
3/17
13
B.2. Contexte de la présente étude
La mise en œuvre d’un enseignement bilingue exige des actions dans les domaines suivants :
a) La détermination de la carte linguistique
b) La formation initiale des enseignants pour :
-
l’enseignement en langue nationale (la langue nationale est le médium
d’enseignement au cours des premières années du fondamental)
-
l’enseignement de la langue nationale (la langue nationale est également matière au
cours de tout le cycle fondamental 1)
-
l’enseignement du français et le transfert des compétences acquises en langue
nationale pour l’apprentissage du français.
c)
La formation continue des enseignants pour ces mêmes compétences
d) L’élaboration, la production et la distribution de matériel didactique adapté
En 1999, le Ministère de l’Education de Base (MEB) a entrepris une étude sociolinguistique
sur l’identification des langues nationales dominantes par zone, sur le potentiel enseignant
par langue et l’adhésion des maîtres à la politique de l’enseignement bilingue (Diarra et
Haïdara 1999). Cette étude visait donc à donner des réponses à la question de la carte
linguistique (a) mais aussi à identifier les besoins de formation des enseignants (b et c).
Cette étude a permis d’établir une cartographie linguistique du Mali et de montrer
l’adhésion des enseignants à l’utilisation des langues nationales.
La CPS collecte des informations sur les langues nationales, notamment la langue la mieux
parlée par l’enseignant et la langue parlée par les élèves. Cette collecte présente l’avantage
incomparable d’être effectuée chaque année et dans toutes les écoles maliennes, de toute
région et de tout statut. Cependant elle doit nécessairement être accompagnée d’études
sociolinguistiques plus approfondies qui permettent de collecter des données plus riches et
plus adaptée aux zones multilingues.
C’est pourquoi en 2010, il est apparu nécessaire de réaliser une nouvelle étude sur les défis
de la mise en œuvre de l’enseignement bilingue, huit ans après le début de l’utilisation du
curriculum bilingue. Cette étude permet d’appréhender les 4 domaines d’action d’une
politique d’enseignement bilingue (a, b, c et d).
Cette nouvelle étude doit permettre de mettre à jour la carte linguistique (a), c’est-à-dire de
déterminer la langue d’enseignement qui doit être utilisée dans chaque commune ou école.
L’étude a ainsi permis de géo-référencer les écoles de la région de Mopti.
14
Elle doit aussi permettre de collecter des données sur les compétences des enseignants et
leur formation continue (en langue nationale, dans l’enseignement en langue nationale,
dans l’enseignement de la langue nationale) (b et c).
Enfin, cette étude aborde la formation initiale des enseignants dans les IFM (b). Ce dernier
aspect n’a pas été abordé en 1999 ni par la suite. Pourtant la formation initiale des
enseignants est une des clés pour un enseignement bilingue. La présente étude vise donc à
mesurer les compétences prochaines des futurs enseignants en s’intéressant aux élèvesmaîtres de la 3ème année des IFM et à mieux connaitre les modalités de l’enseignement
normal des langues nationales comme médium et matières en s’intéressant aux
programmes et aux professeurs des IFM.
L’étude se focalise sur la région de Mopti, dont la carte linguistique est particulièrement
complexe du fait du multilinguisme de la zone.
B.3. Objectifs de l’étude
L’objectif général est d’analyser l’adéquation entre la demande d’enseignement en langues
nationales et l’offre d’enseignement en langue nationale. Les objectifs spécifiques sont les
suivants :
Déterminer la carte linguistique de la région de Mopti
Il s’agit ici de recenser les langues nationales parlées par les élèves des écoles et de
déterminer, pour chaque école, la langue commune des élèves. La langue commune des
élèves définit la demande d’enseignement en langues nationales qui pourra être
représentée par des cartes grâce au géo-référencement des écoles.
Déterminer les compétences des enseignants pour l’enseignement bilingue
Cet objectif consiste à déterminer les langues les mieux parlées par les enseignants ainsi que
les langues et le niveau dans lesquels les enseignants ont été formés pour enseigner.
Connaissant ces compétences, il convient alors d’analyser l’adéquation entre la demande
d’enseignement en langues nationales et les compétences des enseignants.
Déterminer le matériel disponible dans les écoles
A l’aide du recensement des manuels des enseignants et des élèves dans les écoles, par
langue d’enseignement et par niveau, la satisfaction des besoins en termes de matériels
sera analysée.
Déterminer les compétences des IFM pour l’enseignement des langues nationales
15
Ici, l’objectif est d’une part de connaître la façon dont la didactique des langues nationales
et l’enseignement bilingue sont introduits dans le programme de l’enseignement normal.
D’autre part, il s’agit de mesurer les compétences linguistiques des professeurs et des
élèves-maîtres afin de connaître les compétences des futurs enseignants.
Evaluer le degré de mise en œuvre de la politique d’enseignement bilingue
Il s’agit ici :
-
de déterminer les écoles qui offrent réellement un enseignement en langue
nationale au fondamental 1, dispensé par des enseignants formés pour cela et qui
disposent du matériel didactique approprié pour le faire.
-
d’identifier les principaux défis dans la mise en œuvre de la politique
d’enseignement bilingue et de proposer des recommandations pour relever ces
défis.
Formuler des recommandations permettant de mieux gérer les ressources humaines et
matérielles pour l’enseignement bilingue dans les écoles et les IFM
16
PARTIE C. Méthodologie
C.1. Le champ de l’enquête
Le champ de l’étude est l’ensemble des écoles publiques et communautaires offrant au
moins une classe de fondamental 1er cycle dans la région administrative de Mopti.
Ces écoles dépendent des neuf Centres d’Animation Pédagogique des Académies
d’Enseignement de Mopti et Douentza. Au total, l’étude concerne 118 communes,
représentant une population totale de plus de 2 000 000 habitants :
Tableau 2 -
Le champ de l’enquête
AE
DOUENTZA
MOPTI
Total
CAP
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
9
Nombre de communes
22
13
16
21
12
8
7
10
9
118
Cette population présente une grande diversité linguistique. Pour pouvoir étudier cette
diversité et l’adéquation de la mise en œuvre de la politique d’enseignement en langue
nationale, plusieurs concepts linguistiques doivent être définis.
C.2. Concepts et définition
Langue majoritaire et langue commune
La langue majoritaire d’une communauté est la langue parlée par la plus grande partie de
ses membres. Par exemple, dans un village ou 40% des personnes parlent Dogon, 30%
parlent Peul et 30% parlent Bambara, la langue majoritaire est le Dogon. La langue
majoritaire de la communauté est une variable collectée lors du recensement annuel de la
CPS. Cette information est importante, mais ne suffit pas à appréhender la demande
d’enseignement en langue nationale.
La langue commune est différente de la langue majoritaire. C’est la langue qu’utilise des
groupes de langue différente pour communiquer. Par exemple, dans un village ou 40% des
personnes parlent Dogon, 30% parlent Peul et 30% parlent Bambara, la langue majoritaire
17
est le Dogon mais il est possible que pour communiquer entre eux, les différents groupes
linguistiques préfèrent le Bambara. C’est dans cette langue nationale commune que doivent
être éduqués les enfants des écoles à curriculum plutôt que dans la langue nationale
majoritaire.
Langue maternelle de l’enseignant et Langue la mieux parlée par l’enseignant
La (les) langue(s) maternelle(s) est (sont) la (les) langue (s) que l’on a apprise(s) en premier
et à laquelle (lesquelles) on s’identifie. (Définition de l’UNESCO)
La langue qu’un enseignant parle le mieux n’est pas nécessairement sa langue maternelle.
La langue la mieux parlée n’est pas nécessairement non plus la langue de sa région
d’origine, ni la langue pour laquelle il a été formé.
Enseignement en langue nationale et enseignement de la langue nationale
L’enseignement EN langue nationale consiste en l’utilisation de la langue nationale en tant
que médium d’enseignement. C’est-à-dire que les cours de mathématiques, d’histoire ou
autres sont dispensés en langue nationale. C’est différent de l’enseignement de la langue
nationale en tant que matière.
C.3. Les outils de collecte
La collecte s’est déroulée du 6 au 30 avril 2010. Les enquêteurs étaient des agents du niveau
central (CPS, DNEB, CADDE, DNP) et des structures déconcentrées (AE et CAP) de la région
de Mopti. Leur formation a duré 9 jours et a porté sur les instruments de l’enquête et
l’utilisation du GPS. Elle a été l’occasion de tester les instruments et de s’approprier
réellement les outils décrits dans le tableau ci-dessous.
Les instruments sont résumés dans le tableau suivant :
18
Tableau 3 Instrument
Source
Mode d’administration
Questionnaire école
Directeur
Auto-administré
Questionnaire
enseignant
Tous les
enseignants de
l’école
Auto-administré
Focus groupe élève
Questionnaire DE
IFM
Questionnaire
professeur IFM
Questionnaire élève
maître
3 Groupes d’élèves
choisis dans la cour
Directeur des
études des IFM
Professeur chargé
de l’enseignement
d’une LN
Elève maître 3ème
année
Entretien avec des groupes
d’enfants
Auto-administré
Auto-administré
Auto-administré
Les outils de collecte
Information collectées
 Code géo-référentiel
 Langue d’enseignement du curriculum à l’école
 Langue maternelle du directeur et langue la mieux parlée par le directeur
 Niveaux atteints dans la langue d’enseignement du curriculum
 Langue commune à l’école pour les élèves
 Manuels en LN disponibles à l’école
 Programme d’enseignement
 Langue maternelle de l’enseignant et langue la mieux parlée par l’enseignant
 Formation de l’enseignant dans la LN du curriculum appliqué à l’école
 Niveaux atteints dans la langue d’enseignement du curriculum
 LN dans laquelle l’enseignant est capable d’enseigner
 LN parlées par les élèves
 LN commune des élèves de la classe
 Guides du maître pour l’enseignement en LN
 Manuels en LN pour élèves
 Langue nationale commune des élèves
 Langues nationales enseignées dans l’IFM et volumes horaires
 Maitrise des LN par les élèves maîtres
 Langue maternelle et langue la mieux parlée
 Formation en LN
 Niveau en LN (auto-évaluation)
 Langue maternelle et langue la mieux parlée
 Formation en LN
 Niveau en LN (auto-évalué)
19
C.4. Les limites de l’étude
Les infos collectées sur le matériel didactique se sont avérées difficiles à exploiter. Par
exemple, la quantité de manuels est parfois donnée pour le livre d’une série et d’un niveau
(par exemple « Jate Kalan 1ère année ») et parfois pour toutes les années confondues (par
exemple « Jate Kalan 1, 2, 3 et 4ème année »). Il est donc impossible de savoir, pour chaque
école ou classe, le nombre de manuels destinés aux élèves de 1 ère année pour
l’enseignement de la langue Dogon, ou le nombre de guide du maître pour l’enseignement
des sciences en Peul aux élèves de 2ème année.
La formation de l’enseignant pour enseigner en langue nationale est posée uniquement
pour la langue du curriculum en vigueur dans l’école et non pour les autres langues
nationales dans lesquelles l’enseignant aurait potentiellement pu être formé.
La collecte à eu lieu à la fin de l’année scolaire 2009-2010, marquée par les grèves des
enseignants. Ceci à conduit à ce que certains enseignants des écoles enquêtées ne soient
pas questionnés. Cependant, 87% des enseignants ont été enquêtés. De plus, la grève ne
concernait pas spécifiquement les enseignants suivant un programme en particulier.
20
PARTIE D. Les données collectées
D.1. Les écoles
Pour déterminer le taux de couverture de l’enquête, la base de données des écoles de la
CPS de 2009-2010 est utilisée (puisque la collecte a eu lieu en mai/juin 2010). La couverture
de l’étude est quasi-exhaustive puisque 96% des écoles publiques et communautaires de la
région de Mopti ont été enquêtées (944 écoles sur 985).
Tableau 4 -
Non enquêtée
Enquêtée
Ensemble
Etude SL 2010
Exhaustivité des données
Ecole présente dans la base 2009-2010 de la CPS
Non
Oui
Ensemble
0
41
41
5
944
949
5
985
990
Notons par ailleurs que l’enquête a concerné 5 écoles qui ne figurent pas dans la base de la
CPS 2009-2010.
97% des écoles enquêtées ont été géo-référencées. L’enquête a donc permis de géoréférencer 94% des écoles fondamentales 1 publiques et communautaires de la région de
Mopti.
Tous les enseignants du cycle fondamental 1 étaient interrogés. Un enseignant tenant 2
classes ou une classe multigrade était invité à remplir deux fois le questionnaire ce qui
explique que le nombre de groupes pédagogiques est supérieur au nombre d’enseignants.
Tableau 5 Nombre
d’écoles
enquêtées
AE DE DOUENTZA
BANDIAGARA 166
BANKASS
156
DOUENTZA
115
KORO
209
AE DE MOPTI
DJENNE
89
MOPTI
63
SEVARE
48
TENENKOU
61
YOUVAROU
42
Total
949
Population enquêtée
Nombre de
questionnaire
DE
Nombre
d’enseignants
interrogés
Nombre de
groupes
pédagogiques
166
156
115
209
494
264
252
740
515
302
347
891
166
156
115
209
89
63
48
61
42
949
296
313
156
199
133
2847
325
345
174
241
159
3299
89
63
48
61
42
949
Nombre de
groupe focus
21
228 écoles, soit 32% des écoles, sont des écoles suivant le curriculum. Les écoles à
curriculum sont identifiées par les critères suivant :
-
Le Directeur donne la langue d’enseignement du curriculum
-
Un enseignant au moins dit suivre le curriculum
18% des écoles enquêtées (169 écoles) sont des écoles communautaires.2 94% des écoles
enquêtées (895 écoles) sont en milieu rural. 6% des directeurs (61 personnes) sont des
directrices.
Le tableau 8 présente certains aspects relatifs à la qualité des données collectées.
Tableau 6 -
La qualité des données
Nombre
%
Ecoles sans questionnaire enseignant rempli
77
8% des écoles
Ecoles dont les langues parlées par les élèves sont inconnues
79
8%
46
5%
61
6%
Ecoles dont la langue commune des enfants n’est pas
renseignée par le DE
Ecoles dont la langue commune des enfants n’est pas
renseignée par le focus
Ecoles à curriculum dont la langue d’enseignement est
inconnue
Enseignants d’écoles à curriculum dont le programme
d’enseignement est inconnu
15
31
7% des écoles à
curriculum
3% des enseignants des
écoles à curriculum
Dans 77 écoles, aucun questionnaire enseignant n’a été rempli. Dans le cas de Directeur seul
chargé de cours dans l’école, celui-ci aurait du tout de même remplir le questionnaire
enseignant. Aussi, ces données manquantes sont certainement davantage à imputer à des
absences des enseignants, notamment dues aux mouvements de grève de la fin de l’année
2009-2010.
Ceci explique que pour 79 écoles, les différentes langues parlées par les élèves sont
inconnues, car cette question était posée seulement à l’enseignant. Hormis les écoles "sans
enseignant", cette information est manquante pour seulement 2 écoles.
5% des Directeurs d’école n’ont pas déterminé la langue commune des élèves.
6% des groupes focus d’élèves n’ont pas permis à l’enquêteur de déterminer la langue
commune des élèves.
2
Notons qu’il y a de nombreuses divergences entre le statut de l’école collecté lors de l’ESL et celui figurant
dans la base CPS 2009-2010. 3 écoles de l’ESL sont des medersas dans la base CPS 2009-2010. Le nom des
medersas est en général très spécifique, en arabe ou religieux. Ce n’est pas le cas pour ces 3 écoles. Aussi,
nous ne supprimons pas ces écoles de notre échantillon. 65 écoles sont communautaires dans la base de la
CPS et publiques selon l’ESL. A l’inverse, 16 écoles sont publiques dans la base de la CPS et communautaires
selon l’ESL
22
Concernant la mesure de la mise en œuvre du curriculum, pour 15 des 228 écoles à
curriculum (7%), la langue d’enseignement du curriculum n’a pas été renseignée.
Par ailleurs, le programme d’enseignement (classique ou curriculum) n’est pas renseigné
pour 3% des enseignants des écoles à curriculum.
D.2. Les IFM
La région de Mopti compte 2 IFM. Celui de Koro et celui de Sévaré. Dans chacun des deux
IFM, le Directeur des Études a été interrogé. En tout, 10 professeurs chargés de
l’enseignement en langue nationale (professeurs de lettres ou de psychopédagogie) ont été
interrogés. 333 élèves-maîtres de 3ème année généralistes et de 2ème année spécialistes ont
été interrogés, 179 de l’IFM de Koro et 154 de l’IFM de Sévaré.
Tableau 7 AE
MOPTI
DOUENTZA
Ensemble
Personnes interrogées dans les IFM
Directeurs des
Etudes
IFM
KORO
SEVARE
1
1
2
Professeurs
5
5
10
Elèves-maîtres
179
154
333
23
PARTIE E. La demande d’enseignement en langue nationale
E.1. Les écoles dont tous les enfants parlent la même langue
Quelle est la fréquence du multilinguisme dans les écoles ? Quel pourcentage d’écoles
accueillent des élèves de langues diverses ?
Les informations sur les langues parlées par les élèves sont collectées grâce au
questionnaire adressé aux enseignants qui demande les différentes langues parlées par les
élèves.
Les informations sur les différentes langues parlées par les élèves sont disponibles pour 870
écoles, soit 92% des écoles. Parmi ces 870 écoles, 609 écoles accueillent des élèves qui
parlent tous la même langue. Ces écoles sont homogènes en termes de langues parlées par
les élèves.
Tableau 8 -
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUWAROU
ENSEMBLE
Ecoles homogènes en termes de langues parlées par les élèves
Ecoles pour lesquelles les
différentes langues parlées par les
élèves sont connues
578
161
123
86
208
292
89
63
42
61
37
870
Ecoles pour lesquelles une seule langue
est citée comme parlée par les élèves
488
150
103
41
194
121
17
17
24
40
23
609
84%
93%
84%
48%
93%
41%
19%
27%
57%
66%
62%
70%
Dans 70% des écoles, la détermination de la langue des élèves et donc de la langue
nationale dans laquelle il serait préférable d’appliquer le curriculum ne pose pas de
problème a priori.
24
Carte 1 - Répartition géographique des écoles homogènes et des écoles hétérogènes en
termes de langues parlées par les élèves.
La carte 1 permet de voir que le sud de la région de Mopti est davantage homogène en
termes de langues. Les zones représentées sur cette carte sont les cercles de la région de
Mopti et non les CAP. CAP et cercles coïncident globalement, exception faite du cercle de
Mopti qui contient les CAP de Mopti (au sud du cercle de Mopti) et de Sévaré (au Nord du
cercle de Mopti). Cette homogénéité est due au fait que dans beaucoup d’écoles des CAP de
Bandiagara, Koro et Bankass, tous les élèves parlent Dogon. Les autres CAP (Tenenkou,
Youwarou, Djenné, Mopti, Sévaré et Douentza) sont plus hétérogènes, avec une forte
présence de Peul et de Bambara dans les cours d’école.
Tableau 9 -
Langue des élèves dans les écoles dites homogènes
MAURE
PEUL
SONGHAÏ
SONINKE
TAMASHEQ
AUTRES
488
150
103
41
194
121
17
17
DOGON
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
BOZO
Ecoles
homogènes
BAMBARA
Langue parlées par les élèves des écoles homogènes
7%
1%
31%
0%
0%
21%
24%
41%
1%
2%
0%
0%
0%
17%
47%
0%
86%
97%
63%
61%
94%
0%
0%
0%
1%
0%
0%
0%
2%
0%
0%
0%
4%
0%
6%
27%
2%
47%
29%
47%
%
0%
0%
10%
0%
5%
0%
0%
0%
0%
0%
0%
0%
2%
0%
12%
0%
0%
0%
2%
0%
7%
0%
0%
1%
0%
0%
0%
3%
0%
0%
0%
25
SEVARE
TENENKOU
YOUWAROU
ENSEMBLE
24 25%
40 18%
23 9%
609 10%
21%
13%
9%
4%
0%
0%
0%
69%
0%
0%
0%
1%
50%
55%
43%
13%
0%
0%
26%
2%
4%
0%
0%
0%
0%
15%
13%
2%
0%
0%
0%
1%
Dans l’académie de Douentza, cette langue unique parlée par tous les enfants est
majoritairement le Dogon, pour 86% des écoles homogènes. Dans le CAP de Douentza, un
nombre non négligeable d’écoles accueillent exclusivement des élèves parlant Peul (27%
des écoles dites homogènes) de même que 10% des écoles dites homogènes accueillent
exclusivement des élèves parlant Songhaï. Dans le CAP de Bankass, si 63% des écoles
homogènes sont uniquement de langue Dogon, 31% des écoles homogènes accueillent
exclusivement des élèves parlant le Bambara.
Graphique 1
Langue commune des élèves des écoles homogènes de la région de
Mopti (n=609)
Graphique 2
Langue commune des élèves des écoles homogènes par AE
AE de DOUENTZA
(n=488)
AE de MOPTI
(n=121)
26
De façon générale, la région de Mopti est plus hétérogène en termes de langue. Dans
l’académie de Mopti, le Peul est parlé par l’ensemble des élèves de 47% des écoles dites
homogènes. 21% des écoles dont les enfants ne parlent qu’une langue sont de langue
unique Bambara.
Les autres langues sont le Mossi et le Kalanga. La langue Haoussa est également parlée par
certains élèves d’une école du CAP de Bankass.
E.2. La langue commune des élèves
Dans les écoles accueillant des élèves de langue différente, quelle est la langue commune ?
Quelle langue doit être utilisée pour l’enseignement ?
Tableau 10 - Ecoles hétérogènes en termes de langues parlées par les élèves
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUWAROU
ENSEMBLE
Ecoles dont les différentes langues Ecoles pour lesquelles plusieurs langues
parlées par les élèves sont connues sont citées comme parlées par les élèves
578
90
16%
161
11
7%
123
20
16%
86
45
52%
208
14
7%
292
171
59%
89
72
81%
63
46
73%
42
18
43%
61
21
34%
37
14
38%
870
261
30%
En moyenne, 1,5 langues différentes sont parlées dans une même école.
27
Tableau 11 - Nombre moyen de langues parlées par les élèves dans une école
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUWAROU
ENSEMBLE
Nombre moyen de langues parlées par les élèves d’une école
1,1
1,1
1,0
1,4
1,1
2,0
2,5
2,5
1,6
1,4
1,3
1,4
Dans les écoles moins homogènes, dans lesquelles tous les enfants ne parlent pas la même
langue, il est nécessaire de pouvoir choisir une langue. En effet, pour une politique
d’enseignement, il faut déterminer, au niveau de chaque école, une langue d’enseignement
du curriculum. Cette langue doit être la langue que les enfants partagent. Cette langue
partagée est appelée la langue commune. Elle est collectée de plusieurs manières : auprès
du Directeur, auprès de l’enseignant et en observant des groupes d’élèves.
Pour déterminer la langue commune des élèves, les informations suivantes sont
disponibles :
-
Les différentes langues parlées par les élèves
-
La langue commune des élèves selon le Directeur
-
La langue commune des élèves selon chaque enseignant
-
La langue commune des élèves selon l’enquêteur qui a observé les enfants.
Dans 94% des cas, les différentes sources de données sont cohérentes. Dans 4% des cas, les
différentes sources de données donnent des langues communes différentes. Dans ce cas, la
langue déterminée par le groupe focus est privilégiée. Enfin, aucune information sur les
langues parlées par les élèves n’est disponible pour 2% des écoles.
Le tableau 9 ci-dessous présente la langue commune des élèves de l’ensemble des écoles
de la région de Mopti, par AE et CAP.
28
Graphique 3
TAMASHEQ
AUTRES*
ND
646
AE de DOUENTZA
9% 0% 74% 0% 1% 9% 2%
BANDIAGARA
166
2% 1% 95% 0% 0% 2% 0%
BANKASS
156
26% 0% 57% 0% 0% 5% 0%
DOUENTZA
115
10% 0% 35% 0% 0% 37% 13%
KORO
209
1% 0% 92% 0% 2% 1% 0%
AE de MOPTI
303
32% 19% 1% 0% 0% 37% 6%
DJENNE
89
49% 28% 1% 0% 0% 19% 2%
MOPTI
63
52% 8% 2% 2% 0% 30% 2%
SEVARE
48
13% 29% 0% 0% 0% 52% 4%
TENENKOU
61
20% 15% 0% 0% 0% 56% 0%
YOUWAROU
42
7% 14% 0% 0% 0% 38% 31%
ENSEMBLE
949
16% 6% 51% 0% 0% 18% 3%
*Les autres langues communes sont le Mossi, le Haoussa et le Kalanga.
SONINKE
SONGHAÏ
PEUL
MAURE
MALINKE
DOGON
BOZO
Nombre
d’écoles
BAMBARA
Tableau 12 - Langue commune des élèves
0%
0%
0%
3%
0%
1%
0%
3%
2%
0%
0%
1%
0%
0%
0%
3%
0%
3%
0%
0%
0%
10%
10%
1%
1%
0%
1%
0%
3%
0%
0%
0%
0%
0%
0%
1%
3%
0%
11%
0%
0%
0%
0%
2%
0%
0%
0%
2%
Langue commune des élèves des écoles de La région de Mopti
Dans l’ensemble de la région, la langue Dogon est la langue commune dans la majorité des
écoles : dans 51% des écoles. Ce pourcentage masque de grandes différences entre les
académies et entre les CAP au sein d’une même académie.
En effet, la langue Dogon est utilisée comme langue commune seulement dans l’académie
de Douentza et dans 2 écoles de l’académie de Mopti.
29
Graphique 4
Langue commune des élèves des écoles de l’AE de Douentza
Dans l’académie de Douentza, la langue Dogon est quasiment la seule langue de
communication entre les élèves dans les CAP de Bandiagara et Koro. Dans le CAP de
Bankass, 57% des écoles ont le Dogon comme langue commune et 26% des écoles ont vu
leurs élèves choisir le Bambara comme langue commune. Notons que dans ce CAP de
Bankass, la langue commune n’a pas pu être déterminée dans 11% des écoles ce qui
pourrait accentuer ou atténuer considérablement certains écarts. Enfin, dans le CAP de
Douentza, le Dogon et le Peul sont aussi souvent utilisée comme langue commune par les
élèves, respectivement dans 35% et 37% des écoles. Le Songhaï est la langue commune de
13% des écoles, quant au Bambara, il est utilisé comme langue commune dans 10% des
écoles du CAP de Douentza.
30
Graphique 5
Langue commune des élèves des écoles de l’AE de Mopti
Dans l’académie de Mopti, la langue commune des élèves est plus hétérogène. Les élèves de
37% des écoles de l’académie ont adopté le Peul comme langue commune, les élèves de
32% des écoles de l’académie ont adopté le Bambara. Enfin, les élèves de 19% des écoles
ont le Bozo comme langue commune. Le Bozo était quasiment absent de l’académie de
Douentza. Au sein des différents CAP de l’académie de Mopti, la répartition des écoles entre
le Bambara, le Bozo et le Peul varie. Le Bambara domine à Djenné et Mopti. Le Peul domine
à Sévaré, Tenenkou et Youwarou. Le Bozo est surtout important à Djenné et Sévaré. Le
Songhaï est important à Youwarou (31% des écoles).
31
Carte 2 - Répartition géographique des écoles selon la langue commune des élèves
Les zones représentées sur cette carte sont les cercles de la région de Mopti et non les CAP.
CAP et cercles coïncident globalement, exception faite du cercle de Mopti qui contient les
CAP de Mopti (au sud du cercle de Mopti) et de Sévaré (au Nord du cercle de Mopti).
Seules les langues représentant plus de 3% des écoles sont représentées.
E.3. Quelques réflexions sur la détermination de la langue commune
La langue commune des élèves est-elle la langue la plus parlée ?
Le tableau 10 ci-dessous ne concerne que les 6 langues les plus souvent citées comme
langues parlées par une partie des élèves ou par tous les élèves. Lorsque le Dogon est parlé
dans une école, il est très souvent la seule langue utilisée par les élèves (dans 79% des cas).
En revanche, lorsqu’une autre langue que le Dogon est également présente, le Dogon est
abandonné par les enfants qui adoptent une autre langue commune. En effet, face à
d’autres langues, le Dogon ne devient la langue commune que dans 32% des cas.
En revanche, lorsque le Bambara est parlé dans une école, il côtoie dans 75% des cas des
autres langues. Mais il s’impose comme langue commune dans 49% des cas. Le Bambara est
donc davantage une langue de partage entre les différentes communautés.
32
TAMASHEQ
124
528
299
77
18
27%
14%
61%
34%
9%
2%
59
23
418
77
10
10
D/C
25%
19%
79%
26%
13%
56%
B-D
179
101
110
222
67
8
88
34
35
72
16
0
49%
34%
32%
32%
24%
0%
Nombre d’écoles pour lesquelles on
connait les langues parlées :
870
(B) Ecoles où la langue est parlée
(C)
(D)
(E)
(F)
(G)
(H)
DOGON
SONGHAÏ
(A)
BOZO
238
Calcul
BAMBARA
PEUL
Tableau 13 - Quelques aspects de la détermination de la langue commune
% d'écoles dans lesquelles la langue
est parlée
Ecoles où elle est l'unique langue
parlée
% des écoles où elle est parlée pour
lesquelles elle est l'unique langue
Ecoles où elle n’est pas l'unique
langue parlée
Ecoles où elle est la langue
commune parmi plusieurs
% de "victoire" dans les écoles où
d'autres langues sont présentes
B/A
G/F
Ces résultats confirment l’hypothèse que la langue majoritaire n’est pas nécessairement la
langue commune des enfants. Ils justifient donc le fait de mesurer la demande
d’enseignement en langue nationale par la langue commune des enfants.
La capacité d’une langue à s’imposer comme langue commune diffère d’une langue à
l’autre. L’étude n’a pas cherché à savoir comment une langue devient commune. Les
mécanismes de cette détermination sont certes très intéressants, mais seul le résultat de
ces mécanismes est utile pour appréhender la demande d’enseignement en langue
nationale.
33
PARTIE F. L’adéquation entre demande et offre d’enseignement bilingue
La demande d’enseignement en langue nationale est maintenant déterminée pour chaque
école. L’offre d’enseignement satisfait-elle cette demande ?
Cette section cherche à répondre à cette question en étudiant les facteurs suivants
d’adéquation de l’offre à la demande : (1) le programme pédagogique au niveau de l’école
(2) la langue d’enseignement du curriculum, (3) l’utilisation du curriculum dans les classes
des écoles à curriculum (4) les compétences des enseignants en langues nationales, (5) la
formation des enseignants pour enseigner en langue nationale, (6) les matériels didactiques
disponibles dans les écoles à curriculum.
F.1. Le programme pédagogique au niveau de l’école
Le tableau suivant contient, par AE et par CAP le nombre et le pourcentage d’écoles à
curriculum. Une école est considérée « école curriculum » dès lors que la langue
d’enseignement donnée par le Directeur est une langue nationale.
Tableau 14 - Le programme scolaire appliqué des écoles de la région de Mopti
AE DE DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE DE MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Total
Classique
Curriculum
509
138
134
90
147
212
60
39
39
45
29
721
137
28
22
25
62
91
29
24
9
16
13
228
% d’écoles
curriculum
21%
17%
14%
22%
30%
30%
33%
38%
19%
26%
31%
24%
Ensemble
646
166
156
115
209
303
89
63
48
61
42
949
24% des écoles de la région de Mopti, soit un quart, sont des écoles à curriculum bilingue.
Cela représente 228 écoles. Cette proportion diffère légèrement selon l’académie, elle est
de 30% dans l’AE de Mopti contre 21% dans l’AE de Douentza. Au sein même des
académies, cette proportion est variable. Ainsi, dans l’AE de Douentza, elle va de 14% dans
le CAP de Bankass à 30% dans le CAP de Koro. Dans l’AE de Mopti, elle va de 19% dans le
CAP de Sévaré à 38% dans le CAP de Mopti. La proportion d’écoles à curriculum n’est pas
corrélée à la taille du CAP. La carte 3 ci-dessous illustre ces différences géographiques.
34
Carte 3 - Répartition géographique des écoles dites « classiques » et des écoles dites
curriculum
Les zones représentées sur cette carte sont les cercles de la région de Mopti et non les CAP.
CAP et cercles coïncident globalement, exception faite du cercle de Mopti qui contient les
CAP de Mopti (au sud du cercle de Mopti) et de Sévaré (au Nord du cercle de Mopti).
Tableau 15 - Evolution du nombre et de la proportion d’écoles curriculum entre 2005 et
2010
2005
AE DE DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE DE MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
Tout
Curriculum
programme
447
97
136
29
108
24
74
20
129
24
196
80
63
23
56
16
32
10
45
16
34
15
643
177
ESL 2010
%
22%
21%
22%
27%
19%
41%
37%
29%
31%
36%
44%
28%
Tout
Curriculum
programme
646
137
166
28
156
22
115
25
209
62
303
91
89
29
63
24
48
9
61
16
42
13
949
228
%
21%
17%
14%
22%
30%
30%
33%
38%
19%
26%
31%
24%
Le nombre d’écoles curriculum dans la région de Mopti à augmenté depuis 2005, passant de
177 écoles à 228. Cette augmentation absolue est relativisée par la diminution de la
proportion d’écoles à curriculum, passant de 28% en 2005 à 24% en 2010.
35
L’augmentation absolue du nombre d’écoles à curriculum est visible dans les deux
académies de la région. Dans l’AE de Douentza, en 2010, 40 écoles à curriculum de plus
qu’en 2005 sont ouvertes (il peut s’agir de nouvelles créations ou de « conversion », du
programme classique vers le programme bilingue). Dans l’AE de Mopti, c’est 11 écoles à
curriculum de plus en 2010 qu’en 2005.
En proportion cependant, la part des écoles à curriculum dans l’ensemble des écoles
fondamentales est restée inchangée dans l’AE de Douentza (22% en 2005 contre 21% en
2010). Dans l’AE de Mopti, cette part a véritablement chuté, passant de 41% d’écoles
curriculum à 30% d’écoles curriculum.
La proportion d’écoles à curriculum est certes plus faible, mais elle a augmenté en 5 ans,
passant de 22% d’écoles curriculum à 27%, soit 40 nouvelles écoles à curriculum. Dans l’AE
de Mopti, la proportion d’écoles à curriculum a augmenté également en 5 ans, passant de
41% d’écoles curriculum à 43%, ce qui représente 11 nouvelles écoles à curriculum.
Récapitulatif 1
(a) Pourcentage d’écoles curriculum
24%
F.2. La langue d’enseignement du curriculum
La langue dans laquelle doit être fait l’enseignement, la langue commune, est maintenant
déterminée pour chaque école. L’offre d’enseignement respecte-t’elle ces réalités
linguistiques ?
Les comparaisons entre la langue commune des élèves et la langue d’enseignement portent
sur l’échantillon de 211 écoles curriculum dont la langue commune des élèves et la langue
d’enseignement sont connues.
36
Tableau 16 - L’adéquation entre la langue commune des élèves et la langue
d’enseignement
Nombre d'écoles
curriculum
Nombre d'écoles curriculum offrant
un enseignement…
dans la langue
appropriée
dans une autre
langue
(B)
(C)
(A)
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Total
123
26
19
23
55
88
27
23
9
16
13
211
114
25
16
20
53
77
24
19
9
13
12
191
% d'écoles à
curriculum dans
la langue
appropriée
9
1
3
3
2
11
3
4
0
3
1
20
(D) =(B)/(A)
93%
96%
84%
87%
96%
89%
89%
83%
100%
81%
92%
91%
Le choix de la langue d’enseignement est pertinent dans 91% des cas d’écoles curriculum.
Dans l’ensemble de la région de Mopti, 91% des écoles curriculum ont pour langue
d’enseignement la langue des enfants. Le tableau 13 suivant présente les 20 cas
d’inadéquation entre langue commune et langue d’enseignement du curriculum. Ils ne
concernent pas une seule et unique langue qui serait alors "lésée" :
Tableau 17 - Cas de discordance entre la langue commune des élèves et la langue
d’enseignement du curriculum
BOBO
BOZO
DOGON
PEUL
SONGHAÏ
Total
Langue commune
des élèves
BAMBARA
BOZO
DOGON
PEUL
SONINKE
Total
BAMBARA
Langue d’enseignement du curriculum
0
1
3
1
1
6
0
1
0
0
0
1
1
0
0
1
0
2
2
0
0
2
1
5
3
0
1
0
0
4
1
1
0
0
0
2
7
3
4
4
2
20
Les cas de discordance sont rares et ne concernent pas toujours la même langue. Dans 7
cas de discordance, les élèves parlent entre eux le Bambara mais la langue d’enseignement
37
de leur école est différente. Dans 3 écoles il s’agit du Peul, dans 2 écoles il s’agit du Dogon,
dans une école du Bozo et dans une école du Songhaï.
Récapitulatif 2
(a) Pourcentage d’écoles curriculum
24%
(b) Pourcentage des écoles curriculum dont la langue
d’enseignement du curriculum est la langue commune des enfants
91%
→
91% des écoles sont supposées offrir aux enfants un enseignement dans la langue
nationale appropriée.
38
F.3. La mise en application du curriculum dans les classes des écoles
curriculum
Dans les écoles curriculum dont la langue d’enseignement est bien la langue commune des
élèves, les enseignants suivent-ils le curriculum ?
Dans une école curriculum, certaines classes peuvent suivent le curriculum bilingue pendant
que d’autres classes suivent le programme classique. Pour mesurer cela, il a été demandé à
chaque enseignant quel programme il suit avec sa classe.
Pour l’étude du degré d’application du curriculum dans les classes des écoles curriculum,
l’échantillon est l’ensemble des écoles à curriculum dont la langue des élèves et la langue
d’enseignement sont connues et identiques et dont au moins un enseignant a précisé le
programme qu’il suit, soit 187 écoles et 899 classes. Autrement dit, pour 4 écoles curriculum
de langue d’enseignement appropriée, le programme suivi par les enseignants est inconnu.
Une école est considérée comme offrant tout le cycle fondamental en enseignement
bilingue si, pour chaque année d’enseignement de fondamental 1 offerte dans l’école, elle
compte au moins une classe suivant le curriculum bilingue.3
Tableau 18 - Application du curriculum dans les classes des écoles à curriculum
Ecoles
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
111
25
13
20
53
76
24
19
9
13
11
187
Classes
515
111
28
101
275
384
112
105
49
67
51
899
% d’écoles offrant tout
le fondamental 1 en
enseignement bilingue,
34 %
40 %
8%
65 %
26 %
42 %
42 %
42 %
56 %
46 %
27 %
37 %
% d’écoles curriculum
dont aucun enseignant
ne suit le curriculum
32%
24%
77%
20%
30%
11%
8%
16%
11%
8%
9%
24%
3
Si une école est à recrutement biennal et ne compte que les années 1, 3 et 5 par exemple, on
considère qu’elle offre, pour chaque année ouverte, au moins une classe curriculum si elle les classes
de 1ère, 3ème et 5ème année suivent le curriculum bilingue. C’est-à-dire que le fait qu’une année ne soit
pas ouverte dans une école ne donne pas d’information sur l’application du curriculum.
Si une école a plusieurs classes de la même année, par exemple deux classes de 1 ère année, on
considère qu’elle offre, pour chaque année ouverte, au moins une classe curriculum si au moins une
des deux classes de 1ère année suit le curriculum.
39
La mise en application n’est pas effective dans les écoles supposées offrir un enseignement
en langue nationale. En effet, dans seulement 37% des écoles à curriculum de la région de
Mopti, l’ensemble du cursus offert est proposé en enseignement bilingue4. Dans 24%
d’entre elles, tous les enseignants disent suivre le programme classique.
Les écoles de l’académie de Mopti semblent davantage appliquer le curriculum dans les
classes puisque dans 42% des écoles à curriculum, l’ensemble du cursus offert est proposé
en langue nationale. Dans l’académie de Douentza, ce taux est seulement de 34%.
Autre mesure du degré d’application du curriculum dans les classes des écoles curriculum, le
pourcentage d’écoles curriculum dont aucun enseignant ne dit suivre le curriculum bilingue.
Ce pourcentage est de 11% dans l’académie de Mopti et s’élève à 32% dans l’AE de
Douentza. Notons que pour le seul CAP de Bankass, ce pourcentage est de 77%.
Le faible degré d’application du curriculum dans les classes est variable selon le niveau de la
classe, comme le montrent le graphique suivant :
Graphique 6
Degré d’application du curriculum dans les classes selon le niveau
4
En 2009-2010, année scolaire au cours de laquelle a eu lieu la collecte de données, toutes les
écoles maliennes devaient offrir les 5 premières classes en langue nationale et seules les écoles
incluses précédemment dans la pédagogie convergente devaient également offrir la 6ème année en
enseignement bilingue.
Le pourcentage d’écoles qui offre les 5 premières années du cycle fondamental en enseignement
bilingue est de 53%. C’est-à-dire que 53% des 187 écoles à curriculum dont la langue commune des
élèves et la langue d’enseignement sont connues et identiques et pour lesquelles on connait le
programme suivi par les enseignants offrent les 5 premières années du cycle fondamental en
enseignement bilingue.
40
Le tableau suivant donne le degré d’application du curriculum dans les classes par CAP :
Tableau 19 - L’utilisation du curriculum bilingue dans les classes des écoles curriculum
% de classes d’écoles curriculum qui suivent le curriculum bilingue
DOUENTZA
DOUENTZA - BANDIAGARA
DOUENTZA - BANKASS
DOUENTZA - DOUENTZA
DOUENTZA - KORO
MOPTI
MOPTI - DJENNE
MOPTI - MOPTI
MOPTI - SEVARE
MOPTI - TENENKOU
MOPTI - YOUVAROU
Total
Au niveau 1
65%
68%
11%
89%
59%
85%
93%
78%
82%
86%
81%
74%
Au niveau 2
63%
53%
22%
78%
65%
71%
97%
61%
100%
70%
24%
66%
Au niveau 3
51%
42%
22%
73%
49%
58%
60%
55%
80%
64%
25%
54%
Ensemble
60%
56%
19%
81%
58%
72%
82%
65%
87%
73%
48%
65%
Dans la région de Mopti, 65% des classes des écoles curriculum dont la langue
d’enseignement est appropriée suivent effectivement le curriculum bilingue d’après la
déclaration de leur enseignant. Ce taux n’est pas uniforme selon le niveau. En effet, 74% des
classes de niveau 1 de ces mêmes écoles suivent effectivement le curriculum bilingue. Ce
taux chute à 66% pour les classes de niveau 2 et à 54% pour les classes de niveau 3.
Seulement la moitié des classes de niveau 3 des écoles curriculum suivent le curriculum
bilingue.
Une des raisons de ce faible taux d’utilisation du curriculum bilingue dans les écoles
curriculum est le manque de compétences des enseignants. En effet, notons que pour 79%
des enseignants suivant le curriculum bilingue, la langue d’enseignement est celle qu’ils
parlent le mieux. Or, pour seulement 62% des enseignants des écoles curriculum ne suivant
pas le programme bilingue, , la langue d’enseignement est celle qu’ils parlent le mieux. Il y a
donc une corrélation entre le fait qu’un enseignant suive le curriculum bilingue dans une
langue et ses compétences dans cette langue.
Notons enfin que les pratiques pédagogiques dans les classes suivant le curriculum bilingue
n’ont pas été étudiées ici. Il est possible que si l’analyse entrait dans les salles de classes,
certains enseignants supposés suivre le curriculum bilingue n’utilisent pas vraiment ce
programme, ou des techniques inadaptées à l’enseignement bilingue.
41
Récapitulatif 3
(a) Pourcentage d’écoles curriculum
24%
(b) Pourcentage d’écoles curriculum dont la langue d’enseignement
91%
du curriculum est la langue commune des enfants
(c) Pourcentage d’écoles curriculum dont la langue d’enseignement
est appropriée offrant tout le 1er cycle fondamental en enseignement 37%
bilingue
→
37% des écoles curriculum dont la langue d’enseignement est la langue commune
des enfants offrent un enseignement bilingue tout au long du cycle fondamental 1.
F.4. Les facilités des enseignants dans les langues nationales
Les enseignants ont-ils des facilités personnelles dans les langues utilisées par les enfants
entre eux ? Savent-ils parler la langue commune des enfants de l’école dans laquelle ils
enseignent ?
Lors de l’enquête, il a été demandé à l’enseignant sa langue maternelle et la langue qu’il
parle le mieux. En effet, la langue maternelle d’un individu n’est pas forcément celle qu’il
parle le mieux.
Tableau 20 - Concordance entre la langue maternelle des enseignants et la langue qu’ils
estiment parler le mieux
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
Pourcentage d’enseignants dont la langue qu’ils parlent le mieux est
leur langue maternelle
88%
88%
81%
80%
92%
72%
69%
71%
71%
81%
72%
82%
42
Le tableau ci-dessus montre que pour 18% des enseignants de la région de Mopti, la langue
maternelle n’est pas la mieux parlée.5 Aussi, pour aborder les facilités des enseignants dans
une langue, il peut être préférable de considérer la langue la mieux parlée.
Le tableau 22 présente le pourcentage d’enseignants dont la langue la mieux parlée est la
langue commune des élèves de l’école dans laquelle ils enseignent. Le pourcentage est
calculé sur la base des enseignants dont la langue la mieux parlée est connue et pour
lesquels la langue commune des élèves de l’école est connue, soit 2754 enseignants.
Tableau 21 - Les facilités linguistiques des enseignants (mesurées par la langue qu’ils
disent parler le mieux) dans la langue commune des élèves de l’école
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
Pourcentage d’enseignants dont la langue la mieux parlée est la
langue commune des élèves de l’école dans laquelle ils enseignent
73%
71%
64%
50%
85%
50%
57%
63%
30%
49%
29%
64%
Tableau 22 - Comparaison de la fréquence de chaque langue en tant que langue
MALINKE
MAURE
MINIYANKA
PEUL
SENOUFO
SONGHAÏ
SONINKE
TAMASHEQ
AE de DOUENTZA
% d’écoles dont c’est la
9% 0% 0% 74%
langue commune des élèves
% d’enseignants dont c’est
18% 1% 0% 65%
la langue la mieux parlée
AE de MOPTI
% d’écoles dont c’est la
32% 0% 19% 1%
langue commune des élèves
% d’enseignants dont c’est
63% 1% 3% 5%
la langue la mieux parlée
KHASSONKE
DOGON
BOZO
BOBO
BAMBARA
commune des enfants et en tant que langue la mieux parlée par l’enseignant
0%
0%
1%
0%
9%
0%
2%
0%
0%
0%
0%
0%
0%
8%
0%
3%
0%
0%
0%
0%
0%
0% 37% 0%
6%
1%
3%
0%
0%
0%
0% 16% 0%
8%
0%
2%
5
Cela représente 511 enseignants. Parmi eux, 402 parlent mieux le Bamanankan que leur langue
maternelle, soit 79% et 65 parlent mieux le Fulfuldé que leur langue maternelle, soit 13%.
43
Région de Mopti
% d’écoles dont c’est la
16% 0%
langue commune des élèves
% d’enseignants dont c’est
36% 1%
la langue la mieux parlée
6% 51% 0%
0%
0%
0% 18% 0%
3%
1%
1%
1% 42% 0%
0%
0%
0% 11% 0%
5%
0%
1%
Le graphique suivant met en relief, pour l’ensemble de la région de Mopti, la différence
entre la fréquence d’une langue en tant que langue commune des élèves et la fréquence
d’une langue en tant que langue la mieux parlée par les enseignants.
Graphique 7
Fréquence des langues en tant que langue commune des enfants et
en tant que langue la mieux parlée par les enseignants
Dans l’académie de Douentza, 73% des enseignants parlent mieux la langue commune de
leurs élèves que les autres langues. La comparaison de la proportion d’enseignants parlant
mieux chaque langue et du pourcentage d’écoles de chaque langue commune, au niveau
des académies (Tableau 23) montre cependant que le Bambara est plus fréquent comme
langue la mieux parlée par les enseignants que comme langue commune des élèves d’une
école alors que le Dogon est moins fréquent du côté enseignant que du côté élèves.
Dans le CAP de Douentza, le pourcentage des enseignants parlant mieux la langue commune
de leurs élèves que les autres langues est plus bas, il est de 50%. La comparaison des
fréquences des langues comme langue la mieux parlée par les enseignants et comme langue
commune des élèves, au niveau du CAP (voir tableau 32 en annexe) montre que le Bambara
y est plus fréquent comme langue maternelle de l’enseignant que comme langue commune
44
des enfants, alors que le Dogon et le Peul y sont moins fréquent du côté enseignant que du
côté élèves.
Dans l’AE de Mopti, 50% seulement des enseignants parlent mieux la langue commune de
leurs élèves que les autres langues. La comparaison des langues les mieux parlées par les
enseignants aux langues communes des élèves (Tableau 25) permet de mieux comprendre
ce taux. Si 37% des écoles ont des élèves qui parlent entre eux Peul, seulement 16% des
enseignants déclarent que c’est la langue qu’ils parlent le mieux. De même, 19% des écoles
ont des élèves qui parlent entre eux Bozo mais seulement 3% des enseignants déclarent que
c’est la langue qu’ils parlent le mieux 6. A l’inverse, le Bambara est davantage représenté
comme langue la mieux parlée par les enseignants (dans 63% des cas) que comme langue
commune des élèves (dans 32% des écoles).
F.5. La formation des enseignants pour enseigner en curriculum
Dans les écoles curriculum, dont la langue d’enseignement est la langue commune des
élèves, et qui offre l’enseignement bilingue tout au long du 1 er cycle fondamental, les
enseignants sont-ils formés pour enseigner en langue nationale ?
La stratégie de formation continue des enseignants pour l’enseignement bilingue s’articule
autour de 3 vagues de formation, d’une durée de 20 jours chacune, réalisées pendant les
grandes vacances scolaires. Elle repose également sur le principe que les enseignants
« suivent leur classe ». C’est-à-dire qu’un enseignant qui tient la 1ère année en 2005 doit
tenir la 2ème année en 2006.
Le premier niveau de formation, l’initiation, concernait les enseignants du niveau 1 et leur
permettait de mener un enseignement bilingue dans leur classe du niveau 1.
Deux ans plus tard, ces mêmes enseignants, tous arrivés au niveau 2 avec leur classe,
seraient formés pour mener un enseignement bilingue dans leur classe du niveau 2.
Encore deux ans plus tard, ces mêmes enseignants, tous arrivés au niveau 3 avec leur classe,
seraient formés pour mener un enseignement bilingue dans leur classe du niveau 3.
Ainsi un enseignant cumule les 3 modules de formation. Il ne peut en théorie faire le niveau
3 que s’il a fait les niveaux 1 et 2 auparavant.
Lors de chacune des 3 vagues de formation, les enseignants sont formés sur :
-
l’étude de la langue nationale (aspects phonologique, morphologique et syntaxique),
-
la didactique des deux langues (langue nationale et français) et les méthodes actives,
6
Pourtant, le Fulfuldé et le Bozo ne s’imposent pas plus facilement dans les cours de récréation face à d’autres
langues (Tableau 14). Cette différence pourrait donc s’expliquer par une faible propension des personnes de
langue maternelle Fulfuldé ou Bozo à choisir le métier d’enseignant.
45
-
l’évaluation des apprentissages
Dans la région de Mopti, 177 enseignants d’écoles publiques et communautaires ont été
formés pour le niveau 1, c’est-à-dire avaient suivi le premier module de formation, comme
le montre le tableau ci-dessous :
Tableau 23 - Formation continue des enseignants du niveau 1 en 2005
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
Nombre d’enseignants de niveau 1 formés en septembre 2005
Bambara
Bozo
Dogon
Peul
Songhaï
TOTAL
8
0
75
12
2
97
0
0
28
1
0
29
5
0
14
5
0
24
3
0
10
5
2
20
0
0
23
1
0
24
8
16
0
56
0
80
0
1
0
22
0
23
5
0
0
11
0
16
0
0
0
10
0
10
1
14
0
1
0
16
2
1
0
12
0
15
16
16
75
68
2
177
Pour étudier la formation des enseignants et son adéquation avec l’offre d’enseignement
proposée par l’école, la population d’intérêt est l’ensemble des écoles à curriculum :
-
dont la langue d’enseignement est bien la langue commune des élèves
-
dont les classes suivent le curriculum
-
dont la formation des enseignants qui tiennent ces classes curriculum est connue (en
termes de langue et de niveau)
On calcule alors, dans cette population, le pourcentage d’écoles dont les enseignants des
classes curriculum sont formés pour l’enseignement dans la langue du curriculum et pour le
niveau où ils enseignent.
Tableau 24 - Ecoles dont les enseignants suivant le curriculum bilingue sont formés pour
enseigner en langue nationale, dans la bonne langue et pour le bon niveau.
Ecoles curriculum dont la langue d’enseignement est appropriée offrant tout
le 1er cycle fondamental en enseignement bilingue…
AE de DOUENTZA
BANDIAGARA
BANKASS
DOUENTZA
KORO
AE de MOPTI
… dont les enseignants ont
la formation approprié
3
1
0
0
2
3
Ensemble
29
6
0
11
12
28
%
10%
17%
NA
0%
17%
11%
46
DJENNE
MOPTI
SEVARE
TENENKOU
YOUVAROU
Région de Mopti
2
0
1
0
0
6
9
6
5
6
2
57
22%
0%
20%
0%
0%
11%
Parmi les écoles à curriculum dont la langue d’enseignement est appropriée et qui offrent le
cycle fondamental 1 en enseignement bilingue, 11% seulement ont un personnel enseignant
formé pour cela.
Afin de comprendre ce déficit de formation, penchons nous sur le profil de formation des
enseignants qui enseignent dans les classes curriculum. Les pourcentages du tableau 25
suivant sont calculés sur la base des 523 classes suivant le curriculum des écoles à
curriculum dont la langue d’enseignement est la langue commune des élèves.
Tableau 25 - La formation des enseignants suivant le curriculum dans leur classe
Enseignants non formés pour enseigner en langue nationale
Enseignants formés pour enseigner en langue nationale
dont :
Formés pour la bonne langue
dont :
Formés pour le bon niveau
Formés pour un niveau inférieur
Formés pour la mauvaise langue
dont :
Formés pour le bon niveau
Formés pour un niveau inférieur
19,1 %
81,9%
81,7%
52,4 %
28,3 %
0,2%
0,0%
0,2 %
82% des classes curriculum des écoles curriculum dont la langue d’enseignement est
appropriée sont tenues par des enseignants formés pour enseigner en langue nationale. Les
enseignants formés le sont pour enseigner dans la langue d’enseignement du curriculum de
leur école. En revanche, 28% des enseignants des classes curriculum sont formés pour un
niveau inférieur à celui de la classe qu’ils tiennent. Finalement, 52% des classes des écoles
curriculum dont la langue d’enseignement est appropriée sont formés pour enseigner dans
cette langue et pour le niveau de la classe tenue.
Le problème réside donc dans le manque de formation des enseignants pour le niveau de la
classe qu’ils tiennent mais pas dans la pertinence de la langue de formation.
Le tableau 25 concerne les classes dont l’enseignant dit suivre le curriculum. Quid des autres
classes des écoles curriculum ? Leurs enseignants ont-ils reçu une formation qu’ils ne
mettent pas à profit ou ont-ils renoncé au curriculum car non formés ? Le tableau 26 suivant
permet de comparer la formation des enseignants suivant le curriculum à celle des
enseignants ne le suivant pas.
47
Tableau 26 - Le manque de formation des enseignants : un facteur important de
l’abandon du curriculum dans les classes des écoles curriculum
Enseignants non formés pour enseigner en langue nationale
Enseignants formés pour enseigner en langue nationale
dont :
Formés pour la bonne langue
dont :
Formés pour le bon niveau
Formés pour un niveau inférieur
Formés pour la mauvaise langue
dont :
Formés pour le bon niveau
Formés pour un niveau inférieur
Dans les
Dans les
Dans
classes
classes ne
l’ensemble
suivant le le suivant
des classes
curriculum
pas
19,1 %
78,4%
40,7%
81,9%
21,6%
59,3%
81,7%
20,9%
58,9%
52,4 %
28,3 %
0,2%
6,7%
14,2%
0,7%
35,9%
23,0%
0,4%
0,0%
0,2 %
0,0%
0,7%
0,0%
0,4%
La différence de formation entre les enseignants des classes suivant le curriculum et les
enseignants continuant à suivre le programme classique, dans les écoles curriculum, est très
importante. Pour les classes ne suivant pas le curriculum, 78% des enseignants n’ont pas
reçu de formation du tout pour enseigner en langue nationale et 15% ont reçu une
formation inadaptée. Finalement, seuls 7% des enseignants ont reçu une formation pour la
bonne langue et le niveau de la classe qu’ils tiennent. Il apparait donc clairement que les
enseignants des écoles curriculum qui ne suivent pas le programme en langue nationale ne
sont pas formés pour le faire.
Le manque de formation des enseignants nuit à leur enseignement en langue nationale
lorsqu’ils suivent le programme dit du curriculum. Mais surtout, ce manque de formation
conduit de nombreux enseignants et écoles à abandonner le programme en langue
nationale alors même que l’école est identifiée comme une école à curriculum.
Les enseignants formés pour enseigner en langue nationale le sont quasiment toujours dans
la langue appropriée, celle de l’enseignement de l’école dans laquelle ils travaillent.
L’inadéquation de la formation, quand formation il y a, vient du niveau de formation comme
le montre le tableau 27 suivant :
Tableau 27 - Le problème de la formation par niveau
Niveau de la
classe
Niveau 1
Niveau 2
Niveau 3
Ensemble
Nombre de
classes
concernées
172
135
115
422
Formés pour
le niveau 1
114 (66%)
54 (40%)
38 (34%)
206 (49%)
Formés pour le
niveau 2 (et le
niveau 1)
52 (30%)
76 (56%)
56 (48%)
184 (43%)
Formés pour le
niveau 3 (et les
niveaux 1 et 2)
6 (3%)
5 (4%)
21 (18%)
32 (8%)
48
Parmi les 172 classes de niveau 1 dont l’enseignant est formé pour enseigner en langue
nationale, toutes sont tenues par des enseignants formés au moins pour ce niveau.
En revanche, parmi les 135 classes de niveau 2 dont l’enseignant est formé pour enseigner
en langue nationale, seulement 60% sont tenues par des enseignants formés pour ce niveau
au moins. En effet, les 40% restant sont tenues par des enseignants formés uniquement
pour tenir une classe de niveau 1.
De même, parmi les 115 classes de niveau 3 dont l’enseignant est formé pour enseigner en
langue nationale, seulement 18% sont tenues par des enseignants formés pour ce niveau.
En effet, 34% sont tenues par des enseignants formés uniquement pour tenir une classe de
niveau 1 et 48% sont tenues par des enseignants formés uniquement pour tenir une classe
de niveau 1 ou de niveau 2.
Dans l’idéal, si toutes les classes étaient tenues par des enseignants ayant le niveau de
formation adéquat, seules les cases bleues, situées sur et au dessus de la diagonale,
devraient contenir des classes. Les cases situées en dessous la diagonale, en orange,
correspondent à des cas où les enseignants ne sont pas affectées dans des classes pour
lesquelles ils sont formés.
Le tableau 28 suivant répartit de façon optimale le vivier d’enseignants formés entre les
classes.
Tableau 28 - Situation de répartition optimale des enseignants formés
Niveau de la
classe
Niveau 1
Niveau 2
Niveau 3
Ensemble
Nombre de
classes
concernées
172
135
115
422
Formés pour
le niveau 1
Formés pour le
niveau 2 (et le
niveau 1)
Formés pour le
niveau 3 (et les
niveaux 1 et 2)
135 (100%)
49 (43%)
184 (43%)
32 (28%)
32 (8%)
172 (100%)
34 (29%)
206 (49%)
Les classes des niveaux 1 et 2 peuvent être tenues par des enseignants formés pour ce
niveau. Cependant, même si les enseignants formés pour le niveau 3 sont affectés en
priorité pour le niveau 3 et de même pour le niveau 2, 72% des classes de 3ème niveau ne
seraient pas tenues par des enseignants ayant atteint ce niveau de formation.
L’inadéquation entre le niveau de la classe tenue et le niveau pour lequel un enseignant a
été formé est donc due en partie à la mauvaise affectation des enseignants, mais surtout au
manque d’enseignants formés pour le niveau 3
49
Récapitulatif 4
(a) Pourcentage d’écoles curriculum
24%
(b) Pourcentage d’écoles curriculum dont la langue d’enseignement
91%
du curriculum est la langue commune des enfants
(c) Pourcentage d’écoles curriculum, dont la langue d’enseignement
est appropriée, offrant tout le 1er cycle fondamental en
37%
enseignement bilingue
(d) Pourcentage de ces écoles curriculum dont la langue
d’enseignement est appropriée et offrant tout le 1er cycle
11%
fondamental en enseignement bilingue, dont les enseignants ont la
formation adéquate
→
11% des écoles de la région de Mopti dont la langue d’enseignement est
appropriée et qui offre tout le 1er cycle fondamental en enseignement bilingue disposent
d’enseignants ayant la formation adéquate.
F.6. La disponibilité du matériel didactique
Sur 228 écoles à curriculum, 73 écoles n’ont pas déclaré de supports didactiques du tout.
Parmi les 155 écoles curriculum restantes, 153 disposent de manuels didactiques dans la
langue d’enseignement du curriculum (2 écoles de langue d’enseignement Dogon ont
uniquement des manuels en Peul).
Le tableau suivant présente, le nombre moyen de manuels dans la langue d’enseignement
du curriculum, destinés aux élèves par école, pour les écoles curriculum.
Tableau 29 - Disponibilité de matériel didactique dans les écoles curriculum
En ignorant les écoles pour lesquelles aucun manuel n'est listé
Nombre de manuels
Nombre d'élèves par
Nombre d'élèves par
destinés aux élèves
manuel
manuel de LC
En ignorant les écoles n’ayant déclaré aucun manuel
AE de DOUENTZA
147,9
1,5
2,0
AE de MOPTI
153,4
1,4
1,9
Ensemble
150,3
1,5
2,0
En considérant que les écoles n’ayant déclaré aucun manuel n’en possède aucun
AE de DOUENTZA
93,9
2,3
3,1
AE de MOPTI
114,6
1,9
2,6
Ensemble
102,2
2,1
2,9
50
Les résultats diffèrent selon la façon dont la non-réponse est interprétée :
-
les écoles dont le directeur n’a cité aucun titre de manuel ont tout de même des
manuels, mais le Directeur ne les a pas cités pour une raison ou une autre. Dans ce
cas, le nombre moyen de manuels par école est calculé en ignorant ces écoles.
-
les écoles dont le directeur n’a cité aucun titre de manuel n’ont pas de manuels et
c’est pour ça que le Directeur n’en a cité aucun.
Il est très probable que la réalité se trouve entre ces deux situations. Certaines écoles
n’ayant pas cité de manuels n’en ont pas, d’autres en ont.
En moyenne, les écoles curriculum de la région de Mopti dispose de 102 à 150 manuels
(selon l’interprétation de la non réponse) en langue nationale, pour toute discipline et tout
niveau confondu. Les écoles de l’AE de Mopti sont mieux dotées en manuels : de 115 à 153
manuels contre de 94 à 148 manuels pour l’AE de Douentza.
Comparé aux effectifs des écoles, cela représente en moyenne de 1,5 à 2 élèves par manuel.
Les trois quart environ des manuels destinés aux élèves présents dans les écoles sont des
manuels de lecture-écriture ou plus largement de langue et communication. Le quart
restant concerne le calcul et les sciences. Ainsi, dans la région de Mopti, 2 élèves se
partagent un même manuel de lecture. Si la non réponse est assimilée à l’absence de
manuels, 3 élèves se partagent un même manuel de lecture.
51
PARTIE G. La mise en œuvre de l’enseignement bilingue dans la région de
Mopti
La section précédente a étudié l’adéquation de l’offre d’enseignement bilingue à la
demande à travers les prismes :
(1)
du programme pédagogique des écoles
(2)
de l’adéquation entre la langue d’enseignement du curriculum et la langue commune
des élèves,
(3)
de l’utilisation du curriculum dans les classes des écoles à curriculum
(4)
des compétences des enseignants en langues nationales,
(5)
de la formation des enseignants pour enseigner en langue nationale,
(6)
de la disponibilité des matériels didactiques en langues nationales.
L’analyse jointe de ces différents aspects qui concourent à l’adéquation en demande et offre
d’enseignement en langue nationale permet de déterminer le degré réel d’enseignement
bilingue dans la région de Mopti.
La présente section cherche donc à déterminer la proportion d’écoles dans la région de
Mopti qui offre véritablement un enseignement bilingue de qualité durant tout le cycle
fondamental 1, c’est-à-dire la proportion d’écoles qui vérifient :
-
le Directeur déclare que son école mène un enseignement bilingue
-
la langue d’enseignement du curriculum est la langue commune des élèves
-
tout au long du cycle fondamental 1, l’enseignement est bilingue
-
les enseignants sont formés pour la langue d’enseignement du curriculum et pour le
niveau de la classe qu’ils tiennent.
52
Total des écoles de la région de Mopti
945 écoles
Le programme pédagogique choisi au niveau de l’école
a) Pourcentage d’écoles dont le Directeur déclare qu’elle suit le
24%
curriculum bilingue
→ Parmi les 945 écoles de la région de Mopti, 24% propose un enseignement
bilingue
Le choix de la langue d’enseignement
b) % des écoles curriculum dont la langue d’enseignement du
91%
curriculum est la langue commune des enfants
→ Parmi toutes les écoles de la région de Mopti, 22% offrent un enseignement
bilingue dans la langue appropriée aux élèves. (22% = a x b)
Le programme suivi dans les classes
c) % des écoles curriculum dont la langue d’enseignement du
curriculum est la langue commune des enfants et dont toutes
37%
les classes suivent le programme en langue nationale
→ Parmi toutes les écoles de la région de Mopti, 8% offrent un enseignement
bilingue tout au long du cycle fondamental 1 dans la langue appropriée aux
élèves. (8% = a x b x c)
La formation des enseignants
d) % des écoles curriculum dont la langue d’enseignement du
curriculum est la langue commune des enfants et dont toutes
les classes suivent le programme en langue nationale dont les
11%
enseignants sont formés pour enseigner dans la langue
d’enseignement du curriculum et au niveau de leur classe
→ Parmi toutes les écoles de la région de Mopti, 1% offrent un enseignement
bilingue tout au long du cycle fondamental 1 dans la langue appropriée aux
élèves, dispensé par des enseignants formés pour cela. (1% = a x b x c x d)
53
PARTIE H. L’enseignement des langues nationales dans les IFM
En 2007, Y.M. Haïdara note que le curriculum bilingue n’a pas été introduit dans les IFM,
« faisant de la formation continue la seule stratégie utilisée ». Cette situation n’a
malheureusement pas changée.
Deux IFM sont chargés de la formation des enseignants dans la région de Mopti. Les IFM de
Koro (académie de Douentza) et de Sévaré (Académie de Mopti). Seuls les professeurs de
lettres chargés d’enseigner les langues nationales ont été interrogés, 5 dans chacun des 2
IFM.
Tableau 30 - L’enseignement des LN dans les IFM de la région de Mopti
IFM de KORO
IFM de SEVARE
Langue enseignée
DOGON
BAMBARA
Volume horaire hebdomadaire
2 heures
1 heure
DOGON (74%)
PEUL (37%)
BAMBARA (9%)
BAMBARA (32%)
PEUL (9%)
BOZO (19%)
Langue commune des élèves dans les écoles de l’AE
1ère langue commune
2
ème
langue commune
3ème langue commune
Dans l’IFM de Koro, de l’académie de Douentza, le Dogon est enseigné comme matière aux
élèves-maîtres. Il est regrettable que ce soit la seule langue enseignée. En revanche, le choix
de cette langue est pertinent puisque le Dogon est la langue commune des élèves dans 74%
des écoles. En revanche dans l’IFM de Sévaré, de l’académie de Mopti, seul le Bambara est
enseigné alors que les besoins de formation en langue sont plus divers. En effet, 37% des
écoles accueillent des élèves dont la langue commune est le Peul, le Bambara n’arrivant
qu’en 2ème position avec 32% des écoles. Les 19% d’écoles dont les élèves échangent en
Bozo sont également laissées pour compte en termes de formation initiale en langue
nationale.
Le volume horaire accordé à l’enseignement de ces langues est très faible (1 ou 2 heures par
semaine) du fait que l’enseignement est fait au cours de l’initiation à la linguistique.
Tableau 31 - Les compétences des professeurs en langues nationales
Langue enseignée
Nombre de professeurs chargés de l’enseignement en LN
formés dans la langue enseignée
formés dans aucune langue
formés pour une autre langue
Nombre de professeurs chargés de l’enseignement en LN
dont la langue enseignée est la langue maternelle
dont la langue enseignée est la langue la mieux parlée
IFM de KORO
IFM de SEVARE
DOGON
BAMBARA
5
5
2
1
0
4
3
0
3
3
2
5
54
Dans l’IFM de Koro, 2 des professeurs sont formés en Dogon ou pour enseigner le Dogon
aux élèves-maîtres et trois sont formés pour le Bambara. Ces 2 professeurs formés pour le
Dogon ont le Dogon pour langue maternelle et estiment que le Dogon est également la
langue qu’ils parlent le mieux. Un professeur de langue maternelle Dogon parle mieux le
Bambara, pour lequel il a été formé. Parmi les 2 professeurs formés pour le Dogon, un
estime avoir un niveau moyen dans cette langue, l’autre un niveau élevé.
Dans l’IFM de Sévaré, un seul professeur a été formé en Bambara ou pour enseigner le
Bambara aux élèves-maîtres. Les 4 autres professeurs ne sont formés pour aucune langue.
L’enseignant formé, bien que de langue maternelle Songhaï, estime mieux parler le
Bambara. Les 4 autres enseignants, non formés, 1 de langue maternelle Songhaï et 3 de
langue maternelle Bambara, estiment mieux parler le Bambara.
Ainsi, dans l’IFM de Sévaré, la formation des professeurs est très inadéquate. Le fait que le
Bambara soit la langue la mieux parlée par les professeurs ne remplace pas le manque de
formation pour ces langues. Les professeurs en ont parfaitement conscience eux-mêmes
puisque les 4 enseignants non formés pour le Bambara estiment n’avoir aucune maîtrise du
Bambara alors que le professeur formé estime avoir un niveau moyen de maîtrise du
Bambara.
Tableau 32 - Les compétences des élèves maîtres dans ces langues
Nombre d'élèves maîtres interrogés
Nombre d'élèves maîtres (EM) formés dans une langue nationale
Soit en pourcentage
Nombre d’EM formés dans la langue enseignée dans l’IFM
Soit en pourcentage
Nombre d’EM dont la langue la mieux parlée est la langue enseignée dans l'IFM
Soit en pourcentage
IFM DE
KORO
154
37
24%
6
4%
30
19%
IFM DE
SEVARE
179
8
4%
4
2%
102
57%
Dans l’IFM de Koro, seuls 24% des élèves-maîtres ont été formés pour une langue nationale.
Dans l’IFM de Sévaré, ce taux chute à 4%.
Seulement 4% des élèves maîtres de Koro ont été formé en Dogon, langue supposée être
enseignée dans l’IFM. En revanche, sur les 37 élèves formés à une langue nationale, 23 ont
été formés en Bambara. On ignore s’ils sont été formés au sein de l’IFM.
55
Tableau 33 - Les facilités des élèves maîtres dans les langues nationales
Nombre d'élèves-maîtres
BAMBARA
BOBO
BOZO
DOGON
KHASSONKE
MALINKE
MAURE
MINIYANKA
PEUL
SENOUFO
SONGHAÏ
SONINKE
TAMASHEQ
AUTRE
ND
Graphique 8
IFM DE KORO
Langue
Langue la
maternelle
mieux parlée
154
64%
36%
6%
7%
0%
1%
19%
32%
0%
0%
0%
1%
1%
2%
1%
4%
1%
2%
3%
7%
2%
3%
0%
1%
0%
0%
1%
3%
1%
1%
IFM DE SEVARE
Langue
Langue la
maternelle
mieux parlée
179
30%
57%
6%
5%
4%
2%
24%
18%
1%
0%
4%
1%
1%
0%
6%
3%
6%
7%
5%
2%
12%
5%
0%
0%
1%
1%
1%
1%
1%
0%
Fréquence des langues en tant que langue commune des enfants et
en tant que langue la mieux parlée par les élèves-maîtres
Le manque de formation ne permet donc pas de compenser l’écart entre les facilités des
élèves-maîtres et les besoins des élèves dans les écoles. En effet, seulement 32% des élèves-
56
maitres de Koro parlent mieux Dogon que les autres langues, tandis que 74% des écoles de
l’AE de Douentza ont besoin de maîtres en Dogon. Le Bambara est mieux parlé par 36% des
élèves maitres alors qu’il n’est nécessaire que dans 9% des écoles de l’académie.
Dans l’IFM de Sévaré, le Bambara est mieux parlé par 57% des élèves maitres alors qu’il
n’est nécessaire que dans 32% des écoles de l’académie. Le Peul est la langue la mieux
parlée par seulement 7% des élèves maîtres alors que 37% des écoles de l’AE de Mopti
devrait enseigner en Peul. De même seuls 2% des élèves maîtres parlent mieux le Bozo que
les autres langues quand 19% des écoles de l’AE de Mopti devraient enseigner en Bozo.
Les élèves-maîtres de l’IFM de Koro sont 19% à parler mieux le Dogon et ceux de Sévaré
sont 57% à mieux parler le Bambara que les autres langues.
Dans l’IFM de Koro, seuls 9 élèves-maîtres (6%) estiment avoir un niveau élevé dans une
langue nationale, 6 en Bambara et 3 en Dogon. Dans l’IFM de Sévaré, aucun élève maître
formé en langue nationale n’estime avoir un niveau élevé.
57
PARTIE I. Conclusions et recommandations
I.1. La connaissance des réalités linguistiques
L’étude a montré que, dans une région aussi complexe en termes de multilinguisme, le choix
de la langue d’enseignement était adéquat dans 91% des cas.
En effet, 91% des écoles offrant un enseignement bilingue le font dans la langue commune
des élèves.
Pour toute la région de Mopti, 4 langues permettent d’enseigner le curriculum bilingue dans
plus de 90% des écoles : le Dogon, le Bambara, le Peul et le Bozo.
Recommandation 1. La langue d’enseignement du curriculum doit être la langue commune
adoptée par les élèves, car c’est le seul moyen de toucher tous les enfants d’une école
Recommandation 2. La langue commune des élèves doit être déterminée pour chaque
école, de façon annuelle La CPS collecte déjà la langue parlée par les élèves. Lors de la
collecte, il doit être précisé qu’il s’agit de la langue commune des élèves, qu’il est possible
de déterminer en observant et écoutant plusieurs groupes d’élèves.
Recommandation 3. L’étude doit être réalisée dans les autres régions multilingues voire sur
l’ensemble du territoire malien. La bonne connaissance des réalités linguistiques est
attestée dans la région de Mopti, il est nécessaire de le vérifier dans les autres régions.
1. Une faible généralisation du curriculum
La généralisation du curriculum n’est pas effective pour plusieurs raisons. La première d’entre elles
est le manque de formation des enseignants. Les enseignants et directeurs n’étant pas dans les
conditions adéquates pour offrir un enseignement en langue nationale, retournent vers le
programme classique, ce qui explique le fort pourcentage d’école dite curriculum qui offre des
classes suivant le programme classique.
La formation initiale des enseignants
Recommandation 4. Il est primordial de définir clairement le programme de formation en
langues nationales dans l’enseignement normal. La formation doit offrir des plages horaires
pour :
-
la langue nationale (qui doit être beaucoup plus vaste que la seule transcription)
-
l’utilisation de la langue comme medium pour l’enseignement des autres disciplines à
des enfants du fondamental
58
-
la didactique de la lecture-écriture et des autres disciplines, qui s’applique à toutes les
langues nationales comme aux langues secondes
Recommandation 5. La formation initiale doit être adaptée aux réalités linguistiques de la
région, c’’est-à-dire offrir une formation initiale dans les langues de la région. Par exemple
l’offre de formation initiale en langue peut être fixée de façon à couvrir au moins 80% des
besoins des écoles et pas seulement dans une langue.
Recommandation 6. L’introduction réelle des langues de la région dans la formation initiale
peut être testée dans un IFM pilote.
La formation des professeurs à l’ENSUP
Recommandation 7. La formation à l’ENSUP doit offrir des plages horaires pour :
-
la langue nationale (qui doit être beaucoup plus vaste que la seule transcription)
-
l’utilisation de la langue comme medium pour l’enseignement des autres disciplines à
des enfants du fondamental
-
la didactique de la lecture-écriture et des autres disciplines, qui s’applique à toutes les
langues nationales comme aux langues secondes
La formation continue des enseignants
Recommandation 8. La formation continue des enseignants doit concerner :
-
la langue nationale (qui doit être beaucoup plus vaste que la seule transcription)
-
l’utilisation de la langue comme medium pour l’enseignement des autres disciplines à
des enfants du fondamental
-
la didactique de la lecture-écriture et des autres disciplines, qui s’applique à toutes les
langues nationales comme aux langues secondes.
Recommandation 9. Le principe d’une formation par niveau doit être revu, car elle a
rarement été menée à termes du fait de son coût. D’autre part, un enseignant doit être
formé de sorte à pouvoir tenir toutes les classes du fondamental 1 et il doit connaître les
compétences requises à chaque niveau et les stratégies pour les atteindre.
Une première formation en présentiel pourrait être compléter de formation lors des
réunions des communautés d’apprentissage ou par une formation interactive par la radio.
Lors de la formation, les enseignants doivent recevoir un support approprié qui lui permet
de mettre en œuvre un enseignement bilingue tout en respectant l’approche par
compétence et les principes de pédagogie active dans sa classe.
59
I.2. Une réflexion à approfondir à l’échelle nationale
La présente étude n’a concerné que la région de Mopti, du fait de sa complexité
linguistique.
Recommandation 10.
Il serait pertinent d’étendre l’ESL à l’ensemble des régions du
Mali afin d’étudier l’adéquation entre l’offre et la demande d’enseignement bilingue dans
l’ensemble du Mali.
1% des écoles de la région de Mopti offrent un enseignement bilingue dans la langue
appropriée tout au long du cycle fondamental et dispensé par des enseignants formés pour
ça.
Recommandation 11.
La généralisation du curriculum doit être étudiée pour
l’ensemble du Mali. La région de Mopti peut être atypique du fait de son multilinguisme ou
d’une autre raison. Un état des lieux de la mise en œuvre du curriculum bilingue permettrait
de mesurer les défis qu’ils restent à relever pour une généralisation effective.
Recommandation 12.
Afin d’appréhender les défis restant à accomplir, d’autres
réflexions sont à mener à l’échelle nationale :
-
L’application du curriculum doit être mesurée jusque dans la salle de classe afin de
savoir si les enseignants supposés enseigner en langue nationale le font réellement. Dans la
présente étude, les enquêteurs n’entraient pas en salle de classe et demandaient seulement
à l’enseignant le programme suivi.
-
Un recensement exhaustif des matériels présents dans les écoles, par langue, par
discipline, par classe et par public (élèves ou enseignant) doit être effectué à l’échelle
nationale.
-
L’adaptation pédagogique des matériels pédagogiques à leur public cible doit être
analysées.
Recommandation 13.
Les rendements pédagogiques de la mise en œuvre du
curriculum méritent d’être étudiés : Quel a été l’impact de la mise en œuvre de
l’enseignement bilingue ? Quelle est la part imputable aux techniques de pédagogie active
et la part imputable à l’utilisation de la langue nationale ?
60
Bibliographie
CALVET, L.J. (1988), Evaluation des classes expérimentales en bambara dans la région de
Ségou (Rapport). Bamako.
DIAKITE, D. (2002), Les défis du multilinguisme au Mali, Recherches africaines, 00 - 2002,
Faculté des lettres, langues, arts et sciences humaines de Bamako.
DIARRA, S. O. (1997), Pédagogie convergente, Nordic Journal of African Studies, 6 (2) : 20-30
DIARRA, A. et HAÏDARA, M.Y. (1999), Etude sociolinguistique sur l’identification des langues
nationales dominantes par zone et du potentiel enseignant par langue (Rapport).
Ministère de l’éducation de Base
HAÏDARA, Y.M. (2007), Les langues maternelles à l’enseignement fondamental : acquis, défis
et perspectives, Communication présentée lors de la Journée Internationale de la
Langue Maternelle, Ministère de l’Education, de l’Alphabétisation et des Langues
Nationales.
HAÏDARA, Y.M. (2005), Rapport de la formation des maîtres au curriculum niveau I.
Ministère de l’Education de Base.
Ministère de l’Education Nationale (Sans date), Problématique de l’introduction des langues
nationales dans l’enseignement formel, Institut pédagogique national, Bamako.
61
Annexes
62
Tableau 34 - Comparaison de la fréquence de chaque langue en tant que langue commune des enfants d’une école et de sa fréquence en
tant que langue la mieux parlée par les enseignants
% des écoles dont c’est la langue des élèves
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
BANDIAGARA
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
BANKASS
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
DOUENTZA
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
KORO
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
AE de MOPTI
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
DJENNE
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
MOPTI
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
SEVARE
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
TENENKOU
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
YOUVAROU
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
% des écoles dont c’est la langue des élèves
Région de
% d’enseignants dont c’est la langue la mieux parlée
Mopti
AE de
DOUENTZA
Bamba
Khasso Malink
Miniya
Senouf Songh Sonink Tamas
ra
Bobo Bozo Dogon nke
e
Maure nka
Peul o
aï
e
heq
9%
0%
0% 74%
0%
0%
1%
0%
9%
0%
2%
0%
0%
18%
1%
0% 65%
0%
0%
0%
0%
8%
0%
3%
0%
0%
2%
0%
1% 95%
0%
0%
0%
0%
2%
0%
0%
0%
0%
13%
1%
1% 69%
0%
0%
0%
0% 12%
0%
2%
0%
0%
26%
0%
0% 57%
0%
0%
0%
0%
5%
0%
0%
0%
0%
50%
1%
0% 41%
0%
0%
0%
0%
3%
0%
1%
0%
0%
10%
0%
0% 35%
0%
0%
0%
0% 37%
0% 13%
3%
3%
26%
0%
0% 29%
0%
0%
0%
0% 25%
0% 14%
0%
1%
1%
0%
0% 92%
0%
0%
2%
0%
1%
0%
0%
0%
0%
8%
0%
0% 83%
0%
0%
0%
0%
2%
0%
1%
0%
0%
32%
0% 19%
1%
0%
0%
0%
0% 37%
0%
6%
1%
3%
63%
1%
3%
5%
0%
0%
0%
0% 16%
0%
8%
0%
2%
49%
0% 28%
1%
0%
0%
0%
0% 19%
0%
2%
0%
0%
75%
1%
2%
3%
0%
0%
0%
1% 10%
0%
7%
0%
0%
52%
0%
8%
2%
0%
2%
0%
0% 30%
0%
2%
3%
0%
70%
1%
1%
4%
0%
0%
0%
0%
9%
0% 12%
0%
1%
13%
0% 29%
0%
0%
0%
0%
0% 52%
0%
4%
2%
0%
54%
2%
4%
3%
0%
1%
0%
0% 28%
1%
5%
0%
1%
20%
0% 15%
0%
0%
0%
0%
0% 56%
0%
0%
0% 10%
50%
2%
5%
7%
0%
0%
0%
1% 26%
0%
6%
0%
6%
7%
0% 14%
0%
0%
0%
0%
0% 38%
0% 31%
0% 10%
49%
1%
2% 14%
0%
1%
0%
0% 16%
1% 14%
0%
3%
16%
0%
6% 51%
0%
0%
0%
0% 18%
0%
3%
1%
1%
36%
1%
1% 42%
0%
0%
0%
0% 11%
0%
5%
0%
1%
63