Maquette Ammoniac COUV.qxp - Ministère de l`écologie et du
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Maquette Ammoniac COUV.qxp - Ministère de l`écologie et du
MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE Les Emissions d’ammoniac et de gaz azotEs A effet de serre en agriculture Bâtiment d’élevage Pâturage Fertilisation Effluents au champ minérale CORPEN COMITE D’ORIENTATION POUR DES PRATIQUES AGRICOLES RESPECTUEUSES DE L’ENVIRONNEMENT 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp - Tél. 01 42 19 12 86 - www.ecologie.gouv.fr GROUPE AZOTE / Ammoniac et gaz azotés d'origine agricole 2006 LE CORPEN COMITE D’ORIENTATION POUR DES PRATIQUES AGRICOLES RESPECTUEUSES DE L’ENVIRONNEMENT www.ecologie.gouv.fr/ puis compléter la rubrique CHERCHER avec le mot CORPEN et cliquer sur OK Le CORPEN a été créé en 1984, sur décision des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture. Son domaine d’action visait la pollution de l’eau par les nitrates et les phosphates provenant des activités agricoles. Il a été étendu en 1992 aux pollutions par les produits phytosanitaires. En 2001, son domaine d’action est élargi et devient les pratiques agricoles respectueuses de l’environnement (aquifères, milieux aquatiques, air et sols). SES OBJECTIFS ET SES MISSIONS o Le CORPEN est un lieu de concertation entre tous les acteurs concernés par les relations entre agriculture et environnement. o Le CORPEN fait aux ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement toutes suggestions qui lui paraissent appropriées pour réorienter, compléter ou renforcer les politiques publiques. o Il élabore des outils servant aux agriculteurs pour modifier leurs pratiques en vue d’une réduction de leur incidence environnementale, en tenant compte de leur impact sur l’économie de l’exploitation. o Il fournit des éléments techniques à l’administration et l’aide ainsi à adapter ses politiques publiques aux contextes locaux et à participer aux négociations internationales. S ES C I B L E S o Les agriculteurs par l’intermédiaire de leurs conseillers et prescripteurs o Les enseignants agricoles o Les administrations et les élus S ON M O D E DE TRAVAIL o Des groupes réunissant des experts de tous les organismes concernés par le sujet traité font la synthèse des connaissances scientifiques et techniques disponibles. Ils proposent ensuite des recommandations techniques pour les agriculteurs, ils évaluent leur coût de mise en œuvre et ils examinent leur incidence en terme de gestion de l’espace. o Un bureau, qui se réunit trois ou quatre fois par an, approuve, sur la base des propositions des groupes, les messages faisant l’objet d’un consensus. Les recommandations formulées constituent les meilleures pratiques environnementales et font l’objet de publication. o Un comité plénier annuel, en présence des représentants des ministres, évalue le travail effectué dans l’année écoulée et fixe les priorités pour l’année suivante. SA COMPOSITION 1 - Des organisations professionnelles : Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture (APCA) - Agriculture biologique (FNAB) ,- Association Nationale des Industries Agro-alimentaires (ANIA) - Association Française de Protection des Plantes (AFPP) - Comité d’Etudes et de Liaison des Amendements minéraux basiques (CELAC) - Comité Français d’Etude et de Développement de la Fertilisation Raisonnée (COMIFER)- Fédération Nationale des Groupements de Protection des Cultures (FNGPC) - Fédération des entreprises du Commerce et de la Distribution (FCD) - Fédération du Négoce Agricole (FNA) - Fédération Française des Coopératives Agricoles de Collecte, d’Approvisionnement et de Transformation (FFCAT) - Mutualité, Coopération, Crédit (CNMCCA) - Syndicats agricoles (FNSEA, JA, Coordination rurale, Confédération Paysanne) - Syndicat Professionnel des Distributeurs d’Eau (SPDE) - Union des Industries de la Fertilisation (UNIFA) - Union des Industries de la Protection des Plantes (UIPP). 2 - Des organisations d’usagers : Association des Maires de France (AMF) - Confédération de la Consommation, du Logement et du Cadre de Vie (CSV) - Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et Régies (FNCCR) - France Nature Environnement (FNE) - Union Fédérale des Consommateurs (UFC) - Union Nationale pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique (UNPPMA). 3 - Des instituts et centres techniques agricoles : ACTA - ARVALIS (maïs, céréales et fourrages), ANITTA (tabac) CETIOM (oléagineux) - CTIFL (fruits et légumes) - ITAB (agriculture biologique) - ITAVI (aviculture) - Institut de l'Elevage - ITB (betterave) - IFIP (porc) - ITV (vigne). 4 - Des établissements publics de recherche : BRGM - Cemagref - IFREMER - INERIS - INRA. 5 - Des agences de l’eau et autres établissements publics : ADEME - CSP - IFEN. 6 - Des ministères : Agriculture - Écologie - Santé - Économie - Finances - Industrie - Intérieur. 7 - Des acteurs d’opérations pilotes de terrain : Ferti-Mieux - Irri-Mieux - Phyto-Mieux - FARRE. 8 - Des personnalités qualifiées. 3 PRINCIPALES BROCHURES ET PLAQUETTES P U B L I É E S P A R LE CORPEN Documents téléchargeables depuis le site du CORPEN : www.ecologie.gouv.fr/ puis compléter la rubrique CHERCHER avec le mot CORPEN et cliquer sur OK NITRATES ET PHOSPHATES - Programme d’action pour la réduction de la pollution des eaux par les nitrates et les phosphates provenant des activités agricoles (1984) - Amélioration des pratiques agricoles pour réduire les pertes de nitrates vers les eaux (1986 et actualisations en 1989 et 1993) - Estimation des rejets de phosphore par les élevages avicoles - Propositions de références provisoires (1997) - Programme d’action concernant la maîtrise des rejets de phosphore provenant des activités agricoles (1998) + plaquette (6 pages) - Bilan de l’azote à l’exploitation (1988) - Fertilisation azotée de trois légumineuses : le haricot, la luzerne et le pois protéagineux (1999) - Cahier des charges des opérations de conseil aux agriculteurs en vue de protéger l’eau contre la pollution nitratée (1991) - Estimation des flux d’azote, de phosphore et de potassium associés aux vaches laitières et à leur système fourrager (1999) - Interculture (1991) - Estimation des rejets d’azote et de phosphore par les élevages cunicoles (1999) - Recueil des bases de préconisations de la fertilisation azotée (1992) - Propositions pour le Code des Bonnes Pratiques Agricoles (1993) - L’élu face aux nitrates (1994) - Estimation des flux d’azote, de phosphore et de potassium associés aux bovins allaitants et aux bovins en croissance et à l’engrais, issus des troupeaux allaitants et laitiers et à leur système fourrager (2001) - Programme national de réduction de la pollution des eaux par les nitrates provenant des activités agricoles (1994) - Les émissions d’ammoniac d’origine agricole dans l’atmosphère. Etat des connaissances et perspectives de réduction des émissions (2001) - Estimation des rejets d’azote et de phosphore des élevages de porcs - Impact des modifications de conduite alimentaire et des performances techniques (1996) + plaquette (4 pages) - Estimation des rejets d’azote, de phosphore, de potassium, de cuivre et de zinc des porcs - Influence de la conduite alimentaire et du mode de logement des animaux sur la nature et la gestion des déjections produites (2003) - Estimation des rejets d’azote par les élevages avicoles (1996) - Des indicateurs Azote pour gérer des actions de maîtrise des pollutions à l’échelle de la parcelles, de l’exploitation et du territoire (2006) - Bien choisir et mieux utiliser son matériel d’épandage de lisiers ou de fumiers (1997) - Estimation des rejets d’azote - phosphore - potassium clacium - cuivre et zinc par les élevages avicoles (2007) PRODUITS PHYTOSANITAIRES - Programme d’action contre la pollution des eaux par les produits phytosanitaires provenant des activités agricoles (1994) - Protection des cultures et prévention des risques de pollution des eaux par les produits phytosanitaires utilisés en agriculture - Recommandations générales (1995) + plaquette (4 pages) - Qualité des eaux et produits phytosanitaires Propositions pour une démarche de diagnostic (1996) - - Techniques d’application et de manipulation (TAM) des produits phytosanitaires utilisés en agriculture - Eléments pour prévenir les risques de pollution des eaux (1996) - Jeu de transparents TAM - Produits phytosanitaires et dispositifs enherbés - Etat des connaissances et propositions de mise en œuvre (1997) + plaquette (4 pages) - Désherbage - Eléments de raisonnement pour une maîtrise des adventices limitant les risques de pollution des eaux par les produits phytosanitaires (1999) 4 - Désherber en limitant les risques de pollution des eaux (plaquette 6 pages) - Diagnostic de la pollution des eaux par les produits phytosanitaires - Bases pour l’établissement de cahiers des charges des diagnostics de bassins versants et d’exploitations (2001) - Mesures réglementaires concernant les produits phytosanitaires, leurs utilisateurs et leur incidence sur l’environnement (2003) = actualisation de la partie réglementaire de la brochure “TAM” de 1996 - Eléments méthodologiques pour un diagnostic régional et un suivi de la contamination des eaux liée à l’utilisation des produits phytosanitaires - Utilisation des Systèmes de traitement de l’Information Géographiques (SIG) (2003) - Des indicateurs pour des actions locales de maîtrise des pollutions de l’eau d’origine agricole : éléments méthodologiques – application aux produits phytosanitaires (2003). - Techniques d’application et de manipulation des produits phytosaniataires (2006) COMPOSITION DU G R O U P E DE T R A V A I L Ce document a été élaboré par le groupe "Ammoniac et gaz azotés d'origine agricole" du CORPEN, à la demande du groupe « Azote ». Animation José MARTINEZ et Carine PAGLIARI-THIBERT Membres et Organismes Frank ALLUINE Claude AUBERT Louis-Pierre BALAY Marcel BERTRAND Michel CARIOLLE Emilie CHERON Hélène CLEMENT Sandrine ESPAGNOL Philippe EVEILLARD Emmanuel FIANI Guillaume GABORIT Sophie GENERMONT Nadine GUINGAND Sylvie HACALA Mélynda HASSOUNA Roger JUMEL Afsaneh LELLAHI Laurence LOYON José MARTINEZ Carine PAGLIARI-THIBERT Claire RELANDEAU Paul ROBIN Christine SCHUBETZER Ajinomoto Eurolysine SAS ITAVI CGGREF - SCORPEN DRAF Nord-Pas de Calais - SCORPEN ITB ADEME Chef de projet Agriculture Durable IFIP UNIFA ADEME CITEPA INRA Thiverval-Grignon IFIP Institut de l’élevage INRA MAAPR/DGFAR ARVALIS – Institut du végétal Cemagref Cemagref SCORPEN Ajinomoto Eurolysine SAS INRA USARQ ADEME Responsables de rédaction/coordination des chapitres : Guillaume GABORIT, Sophie GENERMONT, Sylvie HACALA, Laurence LOYON. Le groupe de travail remercie l'ensemble des personnes qui ont apporté leur aide à la réalisation de ce document et tout particulièrement Marie-Noëlle MAUDET (Cemagref) qui a assuré le secrétariat du groupe, Hervé BOSSUAT (SCORPEN) pour sa contribution à la finalisation de la brochure et les journalistes de la revue ENTRAID’ pour les photographies. Maquette : MAP/DGFAR/MAG-Communication interne - Evelyne Simonnet 5 LISTE D E S A B R É V I A T I O N S ET U N I T É S U T I L I S É E S ACTA ARVALIS Association de Coordination Technique Agricole Institut du Végétal (anciennement ITCF) CEE-NU Commission Economique pour l’Europe des Nations Unies (United Nations Economic Commission for Europe - UNECE ) CCNUCC Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (United Nations Framework Convention on Climate Change - UNFCCC ) Centre Interprofessionnel Technique d’Etudes de la Pollution Atmosphérique CORe INventory of AIR emissions Chlorure de Polyvinyle Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole European Center for Ecotoxicology and Toxicology of Chemicals European Fertilizer Manufacturers Association European Monitoring and Evaluation Programme Entreprise de Travaux Agricoles Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (Intergovernmental Panel on Climate Change) Hydro Agri France Installations Classées pour la Protection de l’Environnement International Fertilizer Industry Association Institut de la Filière Porcine (anciennement ITP) Institute of Grassland and Environmental Research Institut Technique de l’Aviculture Institut Technique des Céréales et Fourrages (désormais ARVALIS) Institut Technique du Porc (désormais IFIP) Matière Azotée Totale Greenhouse Gas Mitigation for Organic and Conventional Dairy Production Matière Sèche Protoxyde d'azote Ammoniac Oxydes d'azote (monoxyde d’azote NO et dioxyde d’azote NO2) Protéine Digestive dans l’Intestin / Unité Fourragère Laitière Programme de Maîtrise des Pollutions d’Origine Agricole Surface Agricole Utile Service Central des Enquêtes et Etudes Statistiques Commission Economique des Nations Unies pour l’Europe Union des Industries de la Fertilisation CITEPA CORINAIR CPV CUMA ECETOC EFMA EMEP ETA GIEC/IPCC HAF ICPE IFA IFIP IGER ITAVI ITCF ITP MAT MIDAIR MS N2O NH3 NOx PDI/UFL PMPOA SAU SCEES UNECE UNIFA UNITÉS : Les concentrations en NH3 sont exprimées en μg N-NH3/m3 ou mg N-NH3/m3. La conversion en ppm et ppb s’effectue selon les facteurs suivants : 1 ppm = 0.7 mg NH3/m3 = 0.58 mg N-NH3/m3 1 ppb = 0.7 μg NH3/m3 = 0.58 μg N-NH3/m3 6 RÉSUMÉ L’azote est un facteur clé de la production agricole et sa gestion a des conséquences très importantes sur l’environnement. En effet, les enjeux environnementaux d’une gestion durable de l’azote en agriculture concernent à la fois les ressources en eau, en air et la biodiversité. A l’instar des nitrates largement médiatisés depuis les années 80, les gaz azotés tels que l’ammoniac (NH3) et le protoxyde d’azote (N2O) ont des impacts très importants, tant sur la santé (humaine et animale) que sur le milieu naturel et méritent, de ce fait, qu’on leur accorde une grande attention. Les émissions de ces deux gaz relevant de l’activité humaine sont pour l’essentiel d’origine agricole et une grande partie provient des déjections des animaux d’élevage. Alors que les effets irritants, voire toxiques, de l’ammoniac se manifestent localement (vis à vis des éleveurs et des élevages), ses effets polluants sur l’environnement peuvent s’étendre sur une zone géographique beaucoup plus vaste. D’autre part, le protoxyde d’azote est un gaz à effet de serre dont le pouvoir radiatif est 310 fois plus élevé que celui du CO2. Dans cette brochure, il s’agit principalement de dresser l’état des connaissances sur l’ammoniac (NH3) et sur les autres gaz azotés notamment le protoxyde d’azote (N2O) - ayant un effet sur notre environnement - afin d’en dégager des orientations et des recommandations pouvant être utiles aux techniciens et aux instances décisionnelles. Sont abordées seulement les pratiques exercées au sein des exploitations agricoles et non dans l’ensemble du secteur agricole (fabrication d’engrais, …). Les émissions d’ammoniac peuvent être réduites en introduisant des mesures techniques au sein des exploitations d’élevage. Ces techniques comprennent des stratégies alimentaires pour réduire l’azote contenu dans les déjections animales (et donc le potentiel d’émission d’ammoniac), de nouvelles configurations des bâtiments d’élevage et des méthodes pour réduire les émissions issues du stockage et de l’épandage des déjections. Ce document s’articule en quatre volets : 1. Le premier volet propose de rappeler et de détailler les différentes étapes d’émission de composés azotés gazeux dans le cycle de l’azote et dans l’environnement. 2. Puis, le cas des émissions azotées provenant des activités agricoles en France est abordé sous l’angle de la quantification et des inventaires des différentes sources d’émission. 3. Le troisième chapitre poursuit avec les différents types de gestion et de transformation de l’azote à la ferme. 4. Le dernier chapitre propose des méthodes d’atténuation des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote, tant au niveau des bâtiments d’élevage et du stockage, que de l’épandage au champ. 7 SOMMAIRE Chapitre I LE CYCLE DE L’AZOTE ET LES COMPOS É S AZOT É S GAZEUX 1 - 2 - p. 13 Le cycle naturel de l’azote 1. Les transformations de l’azote au sein du système “sol-plante-animal” 2. Les entrées et sorties du système “sol-plante-animal” 3. Devenir des composés azotés gazeux 14 14 15 17 Des processus naturels amplifiés par l’action de l’homme 14 1. La combustion de sources d’énergie fossiles 2. L’agriculture et la fertilisation minérale 3. Conclusion 3 - Impacts environnementaux des excès de composés azotés dans l’atmosphère, l’hydrosphère et la biosphère 1. Impacts sur la santé humaine et animale 2. Volatilisation de NH3, impacts dans l’atmosphère et retombées 3. Le réchauffement global 4. L’eutrophisation 5. L’acidification des sols 6. La diminution de la biodiversité 19 19 20 21 21 21 22 23 23 23 Chapitre II p. 25 INVENTAIRE DES É MISSIONS AZOT É ES PROVENANT DES ACTIVIT É S AGRICOLES EN FRANCE 1 2 3 - Cadre pour l'établissement des inventaires 26 Généralités sur les inventaires d’émissions 26 M é t h o d o l o g i e p o u r l e c a l c u l d e s é m i s s i o n s a z o t é e s d ’ o r i g i n e a g r i c o l e 27 1. Ammoniac 2. Protoxyde d’azote 4 - Principaux résultats 1. Emissions nationales en France métropolitaine par secteur d'activité 2. Evolution des émissions (cf Annexe 2) 3. Emissions départementalisées (cf Annexe 2) 5 8 Limites, incertitudes et améliorations 28 30 33 33 34 34 34 Chapitre III p. 35 GESTION ET TRANSFORMATION DE L’AZOTE À LA FERME 1 - Les différentes sources d’azote en agriculture 36 36 36 1. Les engrais minéraux 2. Les engrais de ferme ou engrais d’origine organique 2 3 - Gestion des engrais de ferme 38 Transformation de l’azote à la ferme et pertes gazeuses 41 1. Les engrais minéraux 2. Les engrais de ferme 42 43 Chapitre IV p. 51 MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D’AZOTE 1 - La diminution des intrants du système de production 1. Ajustement de la fertilisation 2. Ajustement de l’alimentation azotée des animaux 2 - Changements des éléments du système de production 1. Le mode de logement et sa gestion 2. L’utilisation d’additifs 3. Le traitement de l’air extrait 3 - Gestion des déjections au stockage 53 54 56 56 60 61 64 Traitements 64 65 66 Techniques d’épandage 66 1. La couverture des fosses 2. L’acidification de l’engrais de ferme 4 5 - 52 1. Epandage des engrais de ferme 2. Epandage d’engrais azotés minéraux 66 73 Conclusion 77 Références bibliographiques 79 Annexes 89 9 INTRODUCTION LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I NTRODUCTION La population mondiale, qui s’élevait à 4,4 milliards d’habitants en 1980, devrait atteindre un chiffre de l’ordre de 7 milliards en 2020, même si l’on enregistre une certaine décélération de l’évolution démographique mondiale. Cette évolution nécessitera une augmentation des ressources alimentaires, qui entraînera inévitablement des changements importants dans le cycle global de l’azote, élément essentiel à la production agricole (Galloway 1998). L’évolution récente de l’agriculture s’est traduite par l’utilisation de méthodes de production plus intensives, une forte augmentation des rendements agricoles et une spécialisation des exploitations. Cette évolution a conduit à une concentration importante des animaux dans quelques régions d’élevage et à une augmentation de la quantité de déjections qui devient difficile à gérer (Martinez & Le Bozec, 2000). Pour l’essentiel, ces déjections animales font l’objet d’épandages sur les terres agricoles. Ce recyclage traditionnel par le sol et la plante constitue le premier traitement naturel et un outil de résorption en même temps que de valorisation de ces effluents. 10 La pollution azotée d’origine agricole prend principalement la forme de nitrates, de protoxyde d’azote (gaz à effet de serre) et d’ammoniac, les nitrates étant véhiculés par les eaux et les deux autres par l’air. La volatilisation de l’ammoniac (NH3) contribue à un transfert de l’azote contenu dans les effluents d’élevage vers l’atmosphère. Ce processus se produit dans les bâtiments d’élevage, dans les lieux de stockage et au moment de l’épandage au champ. Outre la réduction de la valeur fertilisante des effluents épandus qu’elles entraînent, ces pertes d’azote par volatilisation de l’ammoniac ont des conséquences potentielles variées sur la santé humaine et animale (asthme, bronchites chroniques, diminution des performances zootechniques) et sur les écosystèmes naturels (eutrophisation, ici utilisée au sens des conséquences d’un enrichissement du milieu en azote, et acidification). Récemment, la France a souscrit aux premiers engagements internationaux (protocole ONU en 1999 à Göteborg, Directive européenne sur les plafonds nationaux d’émission en 2001), qui visent à réduire (de façon modeste dans un premier temps) les émissions d’ammoniac ; l’agriculture est donc concernée en première ligne. Le cycle de l’azote est régi par des processus chimiques et biologiques permettant le passage d’une forme à une autre, ces formes étant généralement regroupées selon trois grands réservoirs : azote organique (acides aminés, protéines…), azote minéral (NO3-…) et composés gazeux (N2, NH3, N2O…). Dans les milieux naturels, on n’observe pas d’accumulation d’azote dans l’un ou l’autre compartiment car un équilibre s’instaure entre ces trois réservoirs. L’azote est un constituant essentiel pour toutes les LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 formes de vie, aussi bien dans les écosystèmes aquatiques que terrestres (l’Homme prenant part à ces processus). De façon générale, l’azote est un facteur limitant de la croissance pour les règnes animal et végétal dans les écosystèmes naturels. Par son expansion démographique et géographique, l’Homme a transformé les écosystèmes naturels et a modifié le cycle de l’azote : dans les zones densément peuplées où les activités humaines et particulièrement agricoles sont importantes, on observe une accumulation de l’azote. Cette accumulation résulte de deux processus : le transport d’azote d’une région géographique à une autre par le biais de la nourriture des animaux notamment et la fixation d’azote atmosphérique. En évaluant à l’échelle mondiale les entrées et sorties d’azote dans le système Sol - Plante - Animal, Van der Hoek (1998) arrive à la conclusion que l’efficacité d’utilisation de l’azote est de 60 % pour la production végétale mondiale et de 10,5 % pour la production animale mondiale (année de référence : 1994). L’azote non utilisé par les plantes et les animaux s’accumule dans les sols ou, selon les cas, est redistribué sous différentes formes dans l’eau et dans l’air. C’est ainsi que les pollutions d’origine agricole s’ajoutent aux émissions des autres secteurs d’activité, tels que l’industrie ou le transport pour ne citer que les plus importants. Des pertes sous forme de N2 (78 % de la composition de l’atmosphère) rééquilibreraient les transferts entre chaque compartiment, mais ce scénario idéal ne se produit pas, l’essentiel des pertes se faisant sous la forme d’émissions de NOx, de NH3 et de N2O, qui ajoutent de nouveaux composés azotés réactifs dans la nature. - LES COMPOSÉS - I NTRODUCTION - Figure 1 le cycle naturel de l’azote Dénitrification + Volatilisation Synthèse des engrais azotés Évaporation Source : Groupe Azote Artois-Picardie Nitrate d’ammonium Déjections Cadavres Micro-organismes fixateurs d’azote et bactéries des légumineuses Résidus végétaux Azote minéral Azote organique urée, ammoniaque, nitrite, nitrate AZOTÉS GAZEUX DANS LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET DANS L ’ ENVIRONEMENT Azote atmosphérique Ruissellement vers les cours d’eau et la mer Réorganisation Minéralisation Entrainement vers les nappes 11 CHAPITRE I Le cycle de l’azote et les composés azotés gazeux CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr L’azote (N), élément constitutif des protéines et de nos gènes, et à ce titre élément nutritif essentiel des plantes, est, avec l’eau et le carbone, un des constituants dont le cycle naturel est le plus modifié par les activités humaines. L’homme et les animaux terrestres vivent au milieu « d’un océan » d’azote, puisqu’il entre pour quatre cinquièmes dans la composition de l’atmosphère sous sa forme moléculaire diazote (N2). Mais cet azote libre gazeux ne constitue une source nutritionnelle que pour un nombre restreint d’espèces qui le convertissent, par fixation biologique en une forme assimilable. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I - LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX Ce premier chapitre apporte des connaissances indispensables et utiles quant au cycle de l'azote, en vue d'une meilleure gestion. 14 1 - Le cycle naturel de l 'azote Le cycle de l’azote est un cycle biogéochimique complexe, dont l’essentiel des entrées dans la biosphère est constitué par la fixation biologique. Au sein de la biosphère, diverses réactions transforment l’azote minéral (nitrate ou ammonium) en azote organique (protéines, acides aminés, urée, acide uréique…) : on parle d’immobilisation ou d’organisation. Inversement, l’azote organique est transformé en azote minéral : on parle de minéralisation. 1- Les transformations de l’azote au sein du système “sol - plante - animal” 1. 1- Minéralisation-organisation Les déchets organiques sont dégradés par la microflore et la microfaune du sol en composés organiques qui sont à leur tour décomposés par activité microbienne et transformés en azote minéral. Cette dégradation de la matière organique et cette minéralisation des composés organiques constituent un des maillons clés du cycle de l’azote. La minéralisation (ou ammonification) peut se dérouler à la fois sous des conditions aérobies ou anaérobies. L’organisation (ou immobilisation) est la réaction inverse de la minéralisation, elle transforme l’azote minéral en azote organique. L’équilibre annuel entre minéralisation et immobilisation (minéralisation nette) varie en fonction des conditions pédo-climatiques, de la disponibilité et de la qualité des résidus de culture. 1. 2 - La nitrification La nitrification est l’oxydation biologique de l’ammonium en nitrate. Elle procède en deux étapes successives : la nitritation, réalisée par les bactéries nitritantes (Nitrosomonas, Nitrosospira, Nitrosolobus, Nitrosovibrio) est l’oxydation de l’ammonium en nitrite, avec pour intermédiaire le NH2OH ; la nitratation, réalisée par les bactéries nitratantes (Nitrobacter, Nitrococcus, Nitrospira) est l’oxydation des nitrites en nitrates. ammonium NH4+ Nitratation : nitrite NO2- hydroxylamine NH2OH nitrite NO2- nitrate NO3- La nitrification est très dépendante des conditions environnementales, en particulier du taux d’oxygénation, puisqu’elle n’a lieu qu’en conditions aérobies. L’activité de la microflore est optimale pour des pH de 6,9 à 9 et des températures comprises entre 20 et 36°C. En outre, certains composés peuvent ralentir ou bloquer ces processus, comme de fortes teneurs en ammonium ou en nitrite, ou des inhibiteurs de la nitrification. 1. 3 - La dénitrification Selon le type de dénitrifiants, la réaction est totale ou partielle. Si elle est partielle, il y a accumulation des formes azotées intermédiaires. nitrite NO2- monoxyde d’azote NO protoxyde d’azote N2 O diazote N2 2 - Les entrées et sorties du système “sol - plante - animal” CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX nitrate NO3- - I - LE La dénitrification ne se déroule qu’en présence d’un pouvoir réducteur, et en anaérobiose. L’activité dénitrifiante est faible aux basses températures et est optimale pour des températures de 25-30°C et pour des pH compris entre 6 et 8. - CORPEN 2006 La dénitrification est un élément clé du cycle de l’azote, puisque c’est le seul permettant le retour à l’azote gazeux atmosphérique : c’est la réduction des nitrates en diazote moléculaire (N2), en passant par des formes intermédiaires, les nitrites NO2 -, et les oxydes d’azote gazeux NO et N2O : LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Nitritation : Les entrées dans le système se font essentiellement par fixation biologique de l’azote atmosphérique. Les sorties de la biosphère se font par : A le lessivage des nitrates A les émissions gazeuses à partir du sol, des océans et des eaux de surface mais également à partir des plantes. La figure 2 récapitule les principaux processus directement mis en jeu : 15 - Figure 2 Transferts d’azote liés à la volatilisation d’ammoniac azote minéral NH4+ LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I - LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX ammonium en solution 16 volatilisation d’ammoniac émissions de N0 et N 20 physico-chimique biologiques N2 diazote NH3 NH3 ammoniac en solution NO2nitrite N2O ammoniac gazeux NO NO3 - nitrate protoxyde d’azote oxyde nitrique nitrification dénitrification lessivage de nitrate 2.1- La fixation biologique L’entrée principale d’azote dans le système "sol-plante-animal" est la fixation biologique du diazote (N2) atmosphérique par des micro-organismes, les bactéries libres, les actinomycètes, les bactéries et les cyanobactéries vivant en symbiose avec certains végétaux comme les légumineuses. Cette fixation consiste en l’assimilation du diazote en molécules organiques (essentiellement protéines et acides aminés) constitutives de ces micro-organismes et des tissus végétaux des plantes vivant en symbiose avec eux. Il est ensuite utilisé pour la constitution des tissus animaux. Cet azote organique retourne au sol, soit après la mort de ces différents organismes, soit par excrétion (essentiellement urée et acide urique…). 2.2 - Lessivage des nitrates Le nitrate est la forme préférentielle d'absorption de l'azote par la plupart des plantes cultivées. Il n’est pas exposé au risque direct de volatilisation, mais c’est une molécule très mobile qui peut être facilement lessivée et entraînée par les eaux de pluie dans les nappes phréatiques ou dans les eaux de surface. Le lessivage des nitrates est très dépendant de la pluviométrie, du type de sol et du contenu en azote du sol. Les processus ou conditions de lessivage des composés azotés diffèrent entre les zones tempérées et les zones tropicales. Dans les zones tropicales avec des sols acides à charges variables (pH 4 à 5.5), une partie des nitrates est retenue par les charges positives des argiles ce qui diminue l'importance du lessivage. Dans ce contexte et malgré un climat très pluvieux (>3000mm/an), les risques de lessivage d'ammonium sont peu importants. 2.3 - Emissions de NOX et de N2O Lors de la dénitrification, N2O est un produit intermédiaire obligatoire, qui peut être émis si la dénitrification ne va pas jusqu’au produit final : N2. En revanche, pour ce qui est de la nitrifica- 2.4 - Volatilisation d’ammoniac L’ammoniac est émis par le sol ou les plantes à partir de l’ammonium. L’azote ammoniacal est en effet la forme obtenue après minéralisation complète des composés organiques azotés dans le sol. La présence d’azote ammoniacal dans une solution en contact avec l’air conduit systématiquement à la volatilisation d’ammoniac du fait d’un simple jeu d’équilibres physiques et chimiques, sans intermédiaires biologiques : ammonium NH4+ absorbé dans la fraction liquide du sol ammoniac NH3 en solution dans la fraction liquide du sol ammoniac NH3 gazeux 3. 1- Dans l’atmosphère Le monoxyde de diazote, appelé aussi protoxyde d’azote (N2O), est un gaz incolore, non toxique et peu soluble dans l’eau. C’est un gaz à effet de serre ayant un impact important sur l’environnement. Son potentiel de réchauffement (pouvoir radiatif) est 310 fois plus élevé que celui du dioxyde de carbone (CO2) et sa durée de vie est d’environ 120-150 ans. De plus, au niveau de la stratosphère, le N2O réagit avec un atome d’oxygène et donne du monoxyde d’azote (NO), gaz destructeur de la couche d’ozone stratosphérique. Parmi les nombreux oxydes d’azote, le N2O a une grande importance pour la chimie de l’environnement, avec les NOx représentés par le monoxyde d’azote (NO) et le dioxyde d’azote (NO2). Pourtant, malgré les quantités importantes de N2O présentes dans l’atmosphère (300 ppb contre 10 ppb pour les NOx dans l’air pollué), on parle avant tout des NOx à propos de la pollution de l’air. CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX 3 - Devenir des composés azotés gazeux - I - LE La volatilisation dépend en conséquence très fortement des conditions physiques et chimiques du milieu, en particulier elle est étroitement liée à la surface de contact entre la solution contenant l’azote ammoniacal, au pH et à la température de la surface émettrice. - CORPEN 2006 à la fraction solide du sol ammonium NH4+ en solution LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE tion, N2O est un produit secondaire. De manière générale, les émissions de N2O sont associées à des taux de saturation en eaux du sol élevés (milieu réducteur), et donc plutôt à des situations de dénitrification, alors que les émissions de NO sont plutôt associées à des sols secs, et donc à des situations nitrifiantes (milieu oxydant). En effet : A Les NOx sont toxiques alors que le N2O ne l’est pas. A Les NOx participent aux réactions photochimiques au niveau de la troposphère (1) où naissent les nuages et où donc se déroulent les phénomènes météo), alors que le N2O participe aux réactions photochimiques seulement au niveau de la stratosphère (2) (1) La troposphère est la première couche de l’atmosphère : de 0 à 11 km environ (2) La stratosphère est la deuxième couche principale de l'atmosphère. Elle se trouve au-dessus de la troposphère et est séparée d'elle par la tropopause. Elle occupe la région de l'atmosphère d'environ 12 à 50 kilomètres 17 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I - LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX A La durée de vie des NOx est de l’ordre d’une journée contre 120-150 ans pour le N2O. Ils sont donc plus significatifs d’une pollution de l’air anthropique récente, que le N2O. 18 En fait, les NOx et le N2O, n’interviennent pas au même niveau, ni sur la même échelle de temps. Les NOx sont une pollution directe et courte avec des effets directs au niveau régional, alors que le N2O représente une pollution globale avec des effets au niveau climatique, à l’échelle mondiale. L’ammoniac a beau avoir un fort pouvoir absorbant dans l’infra-rouge, son faible temps de résidence dans l’atmosphère ne fait pas de lui un gaz qui contribue directement à l’effet de serre. Cependant, il peut être, pour une faible fraction, oxydé en NOx en présence de radicaux hydroxyles pouvant alors conduire à la production d’ozone. En revanche, de par son caractère acidobasique, l’ammoniac entre dans la composition de nombreux aérosols tels que (NH4)2SO4 dont le pouvoir absorbant est très fort. Par ailleurs, l’ammoniac est la principale base de l’atmosphère et joue un rôle épurateur en neutralisant les composés acides (acide sulfurique et acide nitrique). 3. 2- Dans la biosphère et l’hydrosphère L’azote ammoniacal se dépose sous différentes formes et est très facilement absorbé par voie foliaire. Dans les tout premiers kilomètres, le processus dominant est le dépôt sec (aérosols ou ammoniac). Une part substantielle d’ammoniac est ainsi déposée à proximité des sources. L’ammoniac est très soluble dans l’eau et il peut ainsi être transporté sur de longues distances selon les conditions climatiques (jusqu’à quelques centaines de kilomètres) sous forme d’ammoniac dissous et de sels d’ammonium dissous (essentiellement NH4NO3 et (NH4)2SO4) avant d’être déposé lors des dépôts humides (pluies, brouillards…). Cet azote ainsi déposé rentre dans le cycle de l’azote de l’écosystème sur lequel a eu lieu le dépôt. Il est en particulier repris dans les réactions de nitrification et de dénitrification. 2 - Des processus naturels amplifiés par l 'action de l 'homme L’homme exerce une influence majeure sur le cycle de l’azote à travers : B l’agriculture, et particulièrement : A l’utilisation des sols (ex : travail du sol, irrigation et drainage) qui influence les processus chimiques et biologiques du sol ; A l’accroissement des apports d’azote aux sols par le biais de la fertilisation minérale, des cultures de légumineuses qui fixent l’azote atmosphérique et des mouvements d’azote d’une région à une autre du fait des importations de nourriture pour animaux ; A l’élevage, qui joue un rôle clé dans la transformation des cultures en produits utiles à l’homme, mais qui donne aussi lieu à de larges volumes de déchets, auxquels sont associées des émissions d’azote. B la combustion de sources d’énergie fossiles, dans les activités industrielles, militaires et civiles. Cette combustion génère des oxydes d’azote qui entrent dans le cycle de l’azote comme une augmentation globale des entrées de nitrates dans les sols et l’eau. 1- La combustion de sources d’énergie fossiles 2 - L’agriculture et la fertilisation minérale Au sein de l’Union Européenne à 15, l’utilisation d’engrais azotés a diminué au cours de la dernière décennie et a atteint 9 Mt N en 2003-2004, passant ensuite à 10,9 Mt N dans l’UE à 25 (EFMA, 2002). CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX La production mondiale d’ammoniac a atteint 133 Mt N en 2003 dont 85 Mt N ont été utilisées pour la fertilisation (IFA, 2003). Les autres utilisations de l’ammoniac concernent la production des fibres synthétiques et de nombreuses autres applications dans la chimie. L’ammoniac est obtenu par la combinaison de l’azote de l’air N2 et de l’hydrogène H2 provenant du gaz naturel CH4 (procédé Haber-Bosch). - I - LE A l’échelle mondiale, la fixation anthropique de l’azote atmosphérique par la production industrielle de l’ammoniac, la culture des légumineuses fixatrices et la combustion des carburants d’origine fossile dépassent, avec 141 Mt N en 1990, la fixation liée aux processus naturels (Galloway & Cowling, 2002). - CORPEN 2006 L’industrie et le transport routier sont essentiellement impliqués dans les émissions de gaz azotés tels que NOX et dans une moindre mesure dans les émissions de N2O ou NH3 (ECETOC, 1994). Bien que minoritaires devant les émissions d’origine agricole, les émissions d’ammoniac dues au transport routier ne cessent d’augmenter depuis 1993 à cause de l’introduction progressive de pots catalytiques qui transforment l’acide nitrique en ammoniac par l’intermédiaire du platine agissant comme catalyseur (CITEPA, 2003). LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE L’action de l’homme sur le cycle de l’azote soulève des problèmes environnementaux illustrés par les conflits de société relatifs aux nitrates ; ils ont justifié la mise en place du CORPEN au milieu des années 80. Plus récemment, mais déjà depuis une vingtaine d’années, les agronomes se préoccupent des conséquences environnementales et des sources de composés azotés gazeux, le protoxyde d’azote, les oxydes d’azote et l’ammoniac. L’intensification de l’action de l’homme sur le cycle de l’azote provoque une accélération des transformations naturelles de ce cycle. Les principaux secteurs d’activités agissant sur le cycle de l’azote sont le transport routier, l’industrie et l’agriculture. En France, l’évolution est comparable : 2,3 Mt N en 2003-2004 et 2004-2005, 2,2 Mt en 2005-2006 (UNIFA, 2006). L’ensemble des animaux d’élevage produit un peu moins de 1,4 Mt N dans le total des déjections, chiffre prenant en compte le forfait CORPEN de 30 % de volatilisation en bâtiment et au stockage. L’apport total (N minéral + N animal) a diminué de –10 % depuis 15 ans et représente en moyenne 140 kg N/ha fertilisable (SAU hors jachères et parcours). Le solde du bilan de l’azote agricole (Apports – Exportations), calculé par le SCEES selon la méthode CORPEN adaptée à la ferme France, se situe entre 0,6 et 0,8 Mt N selon les années soit entre 16 et 22 % du total de l’apport aux sols agricoles (BIMA, 2005). Les pertes d'azote au champ réduisent la valeur fertilisante des engrais et constituent un manque à gagner pour l'agriculteur. Ainsi, l'engrais azoté apporté à une culture n'est pratiquement jamais 19 utilisé en totalité par la culture : le coefficient d'utilisation de l’azote par un blé varie généralement entre 30 % et 80 %. Cet écart s’explique par différents facteurs, notamment l’organisation de l’azote dans le sol et les pertes par volatilisation et par lixiviation. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I - LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX D’après Matthews (1994), la fixation anthropique de l’azote atmosphérique égalerait celle de la fixation symbiotique. Le produit final de la fixation industrielle est l’ammoniac qui entre dans la composition du nylon, des détergents et réfrigérants industriels mais également dans la production de fertilisants pour l’agriculture. La fixation industrielle de l’azote atmosphérique pour former des fertilisants azotés est réalisée au moyen de la synthèse de l’ammoniac. 20 Depuis 1945, l’ammoniac est la principale source azotée des fertilisants car 95 % des fertilisants azotés commercialisés sont dérivés de cette molécule. A l’heure actuelle, l’ammoniac est également synthétisé à partir de l’azote de l’air, avec du gaz naturel (méthane) ou du naphta (fraction légère des hydrocarbures) fournissant l’hydrogène nécessaire. La fixation biologique de l’azote est insuffisante pour couvrir les besoins des cultures en azote. L'agriculteur doit alors suppléer la fourniture du sol par des apports de fertilisants minéraux ou organiques. En Europe, près de 9.1 millions de tonnes d’azote sous forme de fertilisants minéraux (simples et composés) sont consommées pour couvrir les besoins des cultures (EFMA, 2002). Pour un objectif de rendement de 85 q de blé par ha, il convient de fournir à la plante 255 kg d’azote, venus des engrais, du reliquat d’azote minéral présent dans le sol à la sortie de l’hiver (très variable) et de la minéralisation des matières organiques, quantité également variable en fonction des caractéristiques physico-chimiques du sol (teneur en N total, en argile et en CaCO3), des résidus de récolte du précédent (variables en fonction de leur nature et des quantités incorporées au sol) et des conditions d’humidité et de température. Il en résulte des doses d’engrais qui, pour atteindre cet objectif, varient le plus souvent de 150 à 200 kg/ha. Si les conditions sont réunies (faible réserve utile du sol, pluviométrie importante et absence de couverture végétale pendant l’hiver), les pertes par lessivage peuvent atteindre jusqu’à 30 kg /ha, soit seulement 11,5 % de la quantité totale d’azote mise en jeu, ce qui, pour des lames d’eau courantes sous notre climat, induit des concentrations en nitrates de l’eau sous les racines supérieures à la norme de potabilité de 50 mg/litre. D’après le CITEPA (2003), l’agriculture serait à l’origine de 15 % des émissions de NOx (qui ont une action sur la chimie de l’ozone atmosphérique), de 64 % des émissions de N2O lors de la nitrification/dénitrification, ce dernier composé azoté étant un des composés qui contribue à l’effet additionnel de l’effet de serre. Mais l’agriculture est surtout à l’origine de 98 % des émissions d’ammoniac anthropique dont 78 % sont émis par les activités liées à l’élevage et 19 % par la fertilisation des cultures. 3 - Conclusion L’ensemble des activités humaines conduit à une perturbation générale du cycle naturel de l’azote. L’activité agricole reste la principale source de composés azotés gazeux, car elle amplifie tous les processus du fait des intrants : pour l’ammoniac, elle représente plus de 95 % des sources dans les pays où l’agriculture est intensive comme en Europe de l’Ouest, 10 à 20 % pour les oxydes d’azote (NOx) pour lesquels les sources sont assez mal connues et 65 % pour le protoxyde d’azote. Le chapitre 2 revient sur les inventaires des émissions pour la France. 1- Impact sur la santé humaine et animale L’ammoniac émis n’aura pas le même devenir selon la distance entre les zones d’émission et les sites industriels sources de H2SO4, SO2, HCl, HNO3 et NOx. Loin des sites industriels, l’ammoniac excède en quantité les espèces chimiques acides de l’atmosphère avec lesquelles il réagit. Une grande proportion de l’azote ammoniacal reste donc sous la forme gazeuse NH3 qui se dépose sous forme de gaz ou de particules dans ou à proximité des zones d’émission. Dans des atmosphères plus chargées en acides sous forme humide ou particulaire (H2SO4, HNO3), NH3 est rapidement converti sous la forme de particules d’ammonium (NH4+). Le couplage de NH3 avec H2SO4 tend à augmenter leur piégeage dans l’humidité de l’air et donc dans des gouttelettes d’eau. CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX La volatilisation de NH3 se fait selon un gradient de concentration, de la plus forte vers la plus faible. L’atmosphère jouera donc le rôle, soit de source, soit de puits. - I - LE 2 - Volatilisation de NH3, impacts dans l’atmosphère et retombées - CORPEN 2006 Lorsque la qualité de l’air est mauvaise (odeurs piquantes, atmosphère chargée en gaz, poussières, bactéries et endotoxines) dans les bâtiments d’élevage, elle rend non seulement les conditions de travail difficiles, mais peut aussi avoir un impact important sur la santé du personnel (Wiegand et al., 1994). Des études épidémiologiques ont ainsi mis en évidence des corrélations entre le taux de contamination de l’air et la fréquence des pneumopathies chez les travailleurs. Les bronchites chroniques, l’asthme, la fibrose pulmonaire, les affections des voies aériennes supérieures constituent la majorité des maladies respiratoires professionnelles des éleveurs. Au Danemark, une étude épidémiologique montre qu’indépendamment de l’âge et du comportement tabagique, les éleveurs de porcs sont les plus touchés par l’asthme et les bronchites chroniques (Iversen et al., 1988). Parmi les facteurs responsables, des gaz tels que l’ammoniac ont été incriminés (Gustin et al., 1991). LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 3 - Impacts environnementaux des excès de composés azotés dans l 'atmosphère, l 'hydrosphère et la biosphère L’ammoniac émis vers l’atmosphère retombe en partie à proximité du lieu d’émission. L’autre partie peut parcourir de longues distances, selon les conditions climatiques, avant de retourner à la biosphère sous forme de précipitations. (des observations Météo France ont mis en évidence l’origine bretonne de dépôts d’ammoniac trouvés dans les Vosges). L’azote ammoniacal retombe, soit sous forme NH3 (dépôt sec), soit sous forme d’aérosols de NH4+ ou de gouttelettes de NH4+ (dépôt sec et/ou humide) (Moal, 1994). Le modèle présenté par Asman et Janssen (1987) montre que les dépôts secs de NH3 dans un pays donné, sont principalement issus de ce même pays, alors que les dépôts secs et humides de NH4+ sont pour une partie importante causés par des sources venant de pays voisins. L’ammoniac émis se dépose donc à sec près de la source et, plus loin de celle-ci, sous forme sèche ou humide (Sommer et al., 1996). 21 - Figure 3 Impacts environnementaux de la volatilisation d’ammoniac Formation Formation d’aérosols d’aérosols + 2NH NH4 + NO NO33- SO SO442- Cl Cl- Volatilisation 4 Dépôt sec ou humide LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - I - LE CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX NH3 22 à courte ou longue distance qq 100 m Dommages sur la végétation qq 100 km NH3 NH4+ N2O Nitrification Bâtiment d’élevage Pâturage NO3H+ Al3+ Eutrophisation Effluents au champ Fertilisation minérale Acidification Diminution de la biodiversité Moindre résistance aux stress 3 - Le réchauffement global Le réchauffement global, c’est à dire à l’échelle de l’ensemble de la planète, est lié à l’effet de serre additionnel : c’est l’effet de serre qui se rajoute à l’effet de serre naturel dû à la composition initiale de l’atmosphère. La concentration en N2O est en augmentation au rythme de 0,25 % par an et son rapport de mélange actuel de 310 ppb contre 260 ppb lors de l'ère préindustrielle. En raison du fort pouvoir de forçage radiatif (1)de ce gaz, il contribue actuellement à 6,1 % de l’effet de serre additionnel. Les dépôts d’azote ammoniacal entraînent une augmentation des gaz à effet de serre tels que N2O dont les émissions sont estimées à environ 1 % de l’azote ammoniacal déposé. Toutefois, les impacts environnementaux de l’ammoniac se font essentiellement lorsque celui-ci se dépose dans les écosystèmes naturels ou semi-naturels (prairies, landes, tourbières, …) . Les concentrations des NOx sont en augmentation, mais leur répartition fortement hétérogène horizontalement et verticalement, ne permet pas de calculer à proprement parler un taux d'augmentation moyen à la surface de la Terre. (1) On appelle forçage radiatif tout phénomène qui influe sur le comportement du rayonnement. Un forçage radiatif positif provoque une augmentation de chaleur au niveau du sol, un forçage radiatif négatif provoque un refroidissement. 4 - L’eutrophisation L’eutrophisation des milieux est principalement due à l’enrichissement des eaux en phosphates. Mais les nitrates y jouent aussi un rôle non négligeable. Les dépôts atmosphériques sont une source supplémentaire d’azote qui ne peut être supportée que dans une certaine mesure par les écosystèmes naturels, on parle alors de « saturation en azote ». L’eutrophisation consécutive aux dépôts d’azote ammoniacal concerne principalement les eaux continentales de surface qui s’enrichissent en azote. Betton et al. (1991) ainsi que Allot et al. (1995), ont corrélé la teneur en nitrates des eaux de montagne avec l’intensité des dépôts ammoniacaux. D'autres gaz, comme le dioxyde de soufre issu de l'industrie, participent aussi à l'acidification, mais la réduction significative de leurs émissions ces dernières années a augmenté l'importance relative de l'ammoniac. 6 - La diminution de la biodiversité CYCLE DE L ’ AZOTE ET LES COMPOSÉS AZOTÉS GAZEUX Le dépôt d’ammoniac ou d’ammonium induit aussi une intensification de la nitrification dans les sols, réaction génératrice d’acidité. Des expérimentations ont par exemple montré qu’une diminution de moitié des dépôts d’azote ammoniacal engendrait une augmentation de pH de 0,8 unité. - I - LE 5 - L’acidification des sols - CORPEN 2006 Les dépôts atmosphériques ammoniacaux constituent un apport non maîtrisable d’azote dans les écosystèmes. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE L’impact de l’augmentation des concentrations de ces composés dans l’atmosphère a des répercussions tant d’un point de vue du changement climatique (l’ozone O3 est un gaz à effet de serre) à l’échelle globale et à l’échéance de quelques années voire quelques dizaines d’années, que du point de vue de l’impact sur la qualité de l’air pour des épisodes de pollution photochimique (ozone troposphérique) de courte durée (quelques jours) et d’échelle régionale. L’augmentation des dépôts sur les écosystèmes naturels ou semi-naturels accélère le développement d’espèces nitrophiles (du fait de l’enrichissement du milieu en azote) qui sont alors susceptibles de supplanter les espèces natives adaptées au déficit naturel de l’écosystème en nutriments (Sutton et al., 1993). Par exemple, aux Pays-Bas, Bobbink et al. (1992) rapportent que 50 % de la bruyère de certaines régions proches des zones d’élevage, ont été remplacés par des espèces prairiales. Dans le même sens, les travaux de Pitcairn et al. (1995 et 1998) montrent des variations de la composition floristique en fonction de la distance par rapport à un bâtiment d’élevage de volailles. Un certain nombre d’écosystèmes terrestres naturels ou semi-naturels sont très sensibles aux dépôts azotés. Cet effet d’eutrophisation peut conduire localement à des pertes de biodiversité de la flore et de la faune. 23 CHAPITRE II Inventaire des émissions azotées provenant des activités agricoles en France CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -II- INVENTAIRE DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN FRANCE 1 - Cadre pour l 'établissement des inventaires 26 Depuis la fin des années 70, période à laquelle la pollution atmosphérique est apparue comme une problématique réelle, la France s'est engagée dans plusieurs accords internationaux visant à évaluer régulièrement les émissions dans l'atmosphère de diverses substances. Sans entrer dans le détail des conventions et protocoles que la France a signés, on citera les conventions CEE-NU (Commission Economique pour l'Europe des Nations unies également connue sous son acronyme anglo-saxon UNECE) et CCNUCC (Convention Cadre des Nations unies sur les Changements Climatiques également connue sous son sigle anglo-saxon UNFCCC) qui fournissent le cadre réglementaire général pour le suivi respectivement des gaz eutrophisants, acidifiants et concourant à la pollution photochimique (dont le NH3) d'une part, et des gaz à effet de serre (dont le N2O) d'autre part. En annexe 1, un panorama exhaustif des engagements français est fourni. En plus des engagements de quantification des émissions de polluants, les protocoles imposent des réductions ou fixent des plafonds d'émissions. Le protocole de Kyoto, par exemple, entre dans le cadre de la CCNUCC. Il impose que l’ensemble des pays signataires – de l'annexe I – réduisent ou ne dépassent pas un certain pourcentage de leurs émissions de gaz à effet de serre (dont le N2O) en 2010 par rapport à leur niveau de 1990, de façon à ce que dans l'ensemble les émissions de ce groupe de pays soient réduites de 5,2 % en 2010 par rapport à 1990. Dans ce cadre, la France a négocié un objectif de stabilité de ses émissions par rapport à 1990. Les inventaires d’émissions permettent alors de rendre compte du respect des engagements et d’estimer les progrès accomplis. Les inventaires d'émissions ont également un rôle d’aide à la décision. Ils sont mis à profit pour connaître les activités responsables de fortes émissions et permettent aux décideurs d'engager des mesures adéquates pour limiter ces émissions. Le CITEPA est l'organisme français désigné par le ministère en charge de l'environnement d'établir les inventaires nationaux requis par les différentes conventions internationales. Néanmoins, il faut noter que les données d’émissions issues de l'agriculture font l’objet de fortes incertitudes qui doivent inciter à beaucoup de prudence concernant leur utilisation. Ces niveaux d'incertitude, fréquemment supérieurs à 50 %, peuvent être expliqués par la grande variabilité inhérente aux activités agricoles selon 3 composantes : variabilité du vivant, variabilité spatiale, variabilité temporelle. 2 - Généralités sur les inventaires d 'émissions L'objectif d'un inventaire d'émissions est de comptabiliser les rejets atmosphériques de certaines substances issues de sources anthropiques et/ou naturelles. Les inventaires les plus couramment utilisés (dont ceux réalisés pour les deux conventions précitées) sont basés sur une approche orientée "source" dans laquelle chaque élément de l'inventaire décrit les émissions d'une technologie ou d'un phénomène naturel (par exemple les émissions des vaches laitières ou celles des voitures essence catalysées). D'une façon simplifiée, les émissions d'une activité donnée peuvent être exprimées par la formule générale suivante : Es,a,t = Aa,t × Fs,a où E : émission relative à la substance "s" et à l'activité "a" au cours de la période "t" A : quantité d'activité relative à l'activité "a" au cours de la période "t" F : facteur d'émission relatif à la substance "s" et à l'activité "a". (1) Pour information, en 2003, les NOx générés par l'emploi de fertilisants (minéraux et organiques) représentent environ 5 % des émissions nationales de ce polluant. Cette quantité non négligeable dans l'absolu reste cependant bien en deçà de la contribution de l'agriculture aux émissions nationales de NH3 et de N2O. FRANCE Les méthodologies du secteur agricole sont basées sur celles décrites dans les deux principaux guides méthodologiques précédemment cités (à savoir les guides EMEP/CORINAIR et GIEC). Conformément aux recommandations de l'EMEP et du GIEC, certaines améliorations ont été apportées aux méthodologies par défaut de ces guides de façon à décrire au mieux les spécificités de l'agriculture française dans la limite des connaissances et des données disponibles. Certains facteurs d'émissions cités dans d'autres chapitres de cette brochure diffèrent des don- DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN Cette section présente la méthodologie mise en œuvre pour estimer les émissions de NH3 et de N2O provenant de l’agriculture sur le territoire français. Les facteurs d’émissions utilisés et les activités retenues sont notamment explicités. Les résultats d’émissions sont, quant à eux, détaillés dans la section suivante. On gardera à l'esprit qu'en plus des émissions azotées sous forme de NH3 et de N2O, l'agriculture produit également du monoxyde d'azote NO, suite à l'épandage des fertilisants et à leur dégradation par les processus biochimiques. Cependant les NOx représentant une problématique agricole moindre (1) que celle des NH3 et N2O, ce polluant n'est pas traité dans le cadre du CORPEN. - II - INVENTAIRE 3 - Méthodologie pour le calcul des émissions azotées d 'origine agricole - CORPEN 2006 Par exemple : AVL,2000 : nombre de vaches laitières en 2000 FNH3,VL,2000 : quantité d’ammoniac produite par une vache laitière au cours de l’année 2000 ENH3,VL,2000 : quantité totale d’ammoniac émise par le cheptel de vaches laitières en 2000. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE L'établissement d'un inventaire répond à certaines exigences dont notamment l'exhaustivité et la comparabilité. De façon à assurer ces qualités aux inventaires nationaux, des guides méthodologiques de référence établis par des groupes d'expert intergouvernementaux listent les sources à prendre en compte et les méthodes recommandées pour en estimer les émissions. En première approche, deux guides principaux peuvent être retenus : les lignes directrices du GIEC (Groupe Intergouvernemental d'Experts sur l'évolution du Climat, aussi connu sous son sigle anglo-saxon IPCC) et le guidebook EMEP / CORINAIR. Ainsi, les méthodes employées pour dresser les inventaires d'émissions sont internationalement reconnues. Des groupes d’experts mandatés par les Nations Unies s’assurent que les méthodes employées par les pays signataires des conventions sont bien conformes aux recommandations des guides méthodologiques. 27 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -II- INVENTAIRE DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN FRANCE nées par défaut et ne sont pas intégrés dans les inventaires d'émissions. Ceci pour diverses raisons : soit qu'ils requièrent des données statistiques qui ne sont pas disponibles annuellement, soit que les éléments justificatifs ne sont pas suffisants pour les faire valider, soit encore qu'ils sont actuellement en cours d'étude pour intégration. 28 D'une façon générale, les méthodologies d'inventaires bénéficient des meilleures données disponibles, ce qui amène parfois à revoir les estimations à la lumière de nouvelles études. Des circuits de validation des données utilisées dans les méthodologies des inventaires ont effectivement été mis en place de façon à s'assurer de la justesse des estimations. Ce circuit comporte tout d'abord une validation au niveau national par des experts du secteur d'activité puis par un comité de concertation sur les inventaires. Par la suite, des groupes d'experts des Nations Unies comparent et vérifient tous les ans les inventaires d'émissions des pays de la convention sur les changements climatiques (CCNUCC). Cette étape assure notamment la complétude, la cohérence et la comparabilité des inventaires. Au cours de l'ensemble de ces étapes de contrôle, il est indispensable de justifier de façon pertinente les changements méthodologiques (modification de facteur d'émission ou méthode complète), les données employées devant ainsi faire l'objet d'un large consensus. 1 - Ammoniac Les méthodologies employées sont basées sur celles du guide EMEP / CORINAIR et sont relativement simples (en dépit d'une sectorisation relativement fine des types d'intrants). Deux sources d'ammoniac sont distinguées : les émissions des sols suite à l'épandage des fertilisants minéraux et les émissions dues aux déjections animales. On notera en particulier que les émissions générées lors de la synthèse des fertilisants minéraux ne sont pas incluses dans le secteur agricole, mais dans celui de l'industrie. 1.1- Emissions des sols suite à l'épandage de fertilisants minéraux Les activités retenues sont les consommations annuelles d'engrais. En fonction de la nature du fertilisant considéré, les facteurs d'émissions suivants sont appliqués : Type de fertilisant g N-NH3 / kg de N épandu Ammoniac anhydre Nitrate d'ammonium Nitrate d'ammonium et de calcium Sulfate d'ammonium Phosphate monoammonique Phosphate diammonique Autres (NK, NPK) Solutions azotées Urée 40 20 20 100 20 50 20 80 150 Tableau 1 - Facteur d’émission ammoniac des fertilisants minéraux (EMEP/CORINAIR, 2002) Les activités élémentaires retenues sont le nombre d'animaux. Les facteurs d'émissions ci-dessous sont appliqués. Ce sont des facteurs globaux qui prennent en compte aussi bien les émissions au bâtiment, au stockage que lors de l'épandage ou de la pâture. Cheptel Tableau 2 - Émissions d’ammoniac selon les types de déjections animales (EMEP/CORINAIR, 2002) Le tableau ci-dessous présente les émissions de base par type d'élevage. Kg NH3 / place / an 0,15 – 0,45 6,8 1,8 11,6 Tableau 3 - Émissions de base par type d’élevage FRANCE On constate que certaines données semblent à première vue différentes des données prises en compte dans les inventaires nationaux. Le facteur d'émission des truies par exemple apparaît plus élevé dans les inventaires. Cette apparente différence provient du fait que les inventaires incluent les porcelets aux truies, alors que ce n'est pas le cas pour la déclaration des émissions. Il existe toutefois une différence notable entre les deux modes de calcul du fait de la résolution. Dans le cadre de la déclaration des émissions, le facteur d'émission standard peut être modulé en fonction des équipements de réduction des émissions mis en place dans chaque exploitation. Cette information statistique n'étant pas disponible de façon exhaustive à l'échelon national, il n'est pas possible d'appliquer la même méthodologie aux inventaires, le facteur d'émission étant alors plutôt représentatif d'une situation globale estimée. L'intégration des données issues des déclarations d'émissions aux inventaires est cependant à l'étude de façon à améliorer la précision des estimations et de prendre en compte les efforts de réduction réellement mis en oeuvre. DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN Cheptel Poules Pondeuses Porcs d'engraissement Porcs Post-sevrage Truies/Verrats - II - INVENTAIRE Depuis 2004, certaines exploitations agricoles doivent déclarer les émissions de NH3 qu'elles génèrent (cf. détails en Annexe 1). - CORPEN 2006 Vaches laitières Autres bovins Poules Poulets Autres volailles Ovins Caprins Porcs charcutiers Truies Anes Chevaux kg NH3 / animal / an selon les productions 28,5 15,1 0,4 0,3 0,9 1,3 1,3 6,8 17,6 7,3 7,3 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 1.2- Déjections animales 29 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -II- INVENTAIRE DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN FRANCE D'autre part, le tableau 3 n'est pas aussi exhaustif que le guide en ce qui concerne les types de volailles, la méthodologie de calcul étant basée pour les canards, poulettes, volailles de chair et volailles de reproduction sur des surfaces d'élevage, et non pas par tête, rendant la comparaison non pertinente. 30 2 - Protoxyde d'azote La méthodologie employée est issue des lignes directrices du GIEC. Le cadre réglementaire normatif est fixé à l’échelle européenne. Du fait de l'absence de données spécifiquement nationales, les données par défaut fournies par le GIEC sont appliquées dans une large mesure. Les données issues des enquêtes "bâtiments d'élevage" menées par le ministère chargé de l'agriculture ont permis d'avoir accès aux occurrences des modes de gestions des déjections (qui influent notablement sur les émissions) pour le cas français qui se démarque considérablement des données par défaut que le GIEC attribue à la zone "Europe" (par exemple la part de déjections solides est largement plus importante en France que dans les autres pays de l'Europe). La méthodologie est plus élaborée que dans le cas de l'ammoniac. Elle fait intervenir des épiphénomènes responsables d'émissions indirectes (lixiviation des sols, redépositions de l'azote ammoniacal atmosphérique), qui s'ajoutent aux émissions directes (épandage, stockage, stabulation et pâture, ainsi que celles issues des résidus de cultures, aux plantes fixatrices d'azote ou bien encore provenant de l’épandage des boues de station de traitement des eaux). Une description synthétique des modes de calcul est fournie dans les paragraphes suivants : Emissions directes B Epandage des fertilisants minéraux Contrairement au cas de l'ammoniac, la méthodologie pour le N2O ne distingue pas les différentes formes d'apport de l'azote minéral. Forfaitairement, 10 % de l'azote apporté à l'épandage est supposé perdu par volatilisation sous forme de NH3 et NOx. Une faible part, 1,25 %, de l'azote restant est alors transformé en N2O par un processus de nitrification/dénitrification dans les sols. B Epandage des déjections animales Le même type d'approche que pour les fertilisants minéraux est appliqué à la différence que le taux de perte par volatilisation est de 20 % de l’azote total (cf. gestion des déjections pour le mode de calcul de la quantité d'azote organique à épandre). La méthode appliquée ne permet pas de prendre en compte les procédés limitant les pertes par volatilisation (relativement aux émissions de NH3) telles que celles qui sont décrites dans les sections idoines de cette brochure (enfouissement, etc.), d'une part du fait d'un manque d'information sur les facteurs d'émissions et d’autre part, parce que le manque de statistiques sur les pratiques d'épandage ne permet pas à l'heure actuelle de calculer les émissions au niveau national avec un tel détail. Ce type d'amélioration permettra à l'avenir de valoriser les efforts de réduction mis en place en agriculture. B Plantes fixatrices d'azote Plusieurs espèces (type soja, trèfle, etc.) contiennent une quantité d’ azote supérieure à la moyenne et favorise donc la formation de N2O. Il est supposé que la teneur en azote de ces végétaux est de 3 % et que 1,25 % de cet azote est transformé en N2O. B Gestion des déjections (stockage et pâture) Le GIEC fournit pour chaque type d'animal une quantité d'azote excrété. Bien qu'une méthodologie ait été élaborée pour prendre en compte l'alimentation pour estimer cette quantité d'azote, trop de paramètres sont exigés et les données statistiques - entre autres - ne permettent pas de la mettre en place. Les valeurs par défaut fournies prennent cependant en compte, dans une certaine limite, les caractéristiques (alimentation en particulier) par grande zone géographique. (GIEC, 2001) Les occurrences des modes de gestion des déjections (système liquide, solide, lagunage ou pâture) permettent de répartir la quantité totale d'azote excrété par l'ensemble des animaux, chacun de ces modes étant affecté d'une plus ou moins grande propension à émettre du N2O : 2 % de l'azote est volatilisé sous forme de N2O dans les cas d'un système solide ou de la pâture tandis qu'il n'est que de 0,1 % dans le cadre d’un épandage liquide (la filière liquide émet en revanche plus de méthane, autre gaz à effet de serre). FRANCE B Epandage des boues de station d'épuration Le traitement des eaux usées en station d'épuration génère des quantités importantes de boues, mais dont la production annuelle reste néanmoins faible en regard des matières organiques issues de l’élevage. Ces boues d'origine organique sont valorisées suivant deux voies : soit par incinération, soit par épandage sur les sols agricoles (pour environ 60 % du volume), le reste étant mis en décharge. Suivant le mode de valorisation, les émissions associées aux boues sont comptabilisées dans le secteur de l'énergie, de l'agriculture ou des déchets respectivement. Dans le cas de l'épandage, la procédure de calcul retient que la teneur en azote de la matière sèche est estimée à 4,5 %. De même que pour les autres types d'épandage, on estime que 1,25 % est ensuite émis sous forme de N2O. DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN Tableau 4 - Quantité d'azote excrétée par type d'animal - II - INVENTAIRE Azote excrété (kg N/tête/an) 100 82 30 70 0.6 20 10 20 20 10 25 25 - CORPEN 2006 Vaches laitières Génisses laitières Bovins < 1an Autres bovins Volailles Ovins Jeunes ovins Porcs charcutiers Truies mères Jeunes porcs Equins Caprins LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE B Résidus de récolte Les résidus de récoltes concernent les cultures pour lesquelles une part importante de la plante est laissée en décomposition dans les champs. Parmi ces cultures se retrouvent par exemple les pommes de terre, les betteraves pour lesquelles seules la partie racinaire est récoltée, ou bien encore les céréales. La méthodologie pour la prise en compte de ces émissions intègre des éléments propres à chaque culture. 31 Emissions Indirectes B Redéposition ammoniacale Lors de l'épandage des divers engrais (minéraux, organiques, boues), une part de l'azote apporté a été émis sous forme de NH3 ou de NOx. Une proportion de cet azote volatilisé (1,0 %) se redépose et pour 1,25 % donne lieu à la formation de N2O. B Lessivage des sols Tout l'azote disponible n'est pas absorbé par la végétation. Une part notable, estimée forfaitairement à 30 %, est entraînée par les eaux de ruissellement et percolation. On considère qu'environ 2,5 % de cette estimation forfaitaire sont alors réduits en N2O lorsque l'eau rejoint la surface. Le logigramme suivant donne une vue d'ensemble épurée de la méthodologie pour le N2O : - Figure 4 Logigramme pour la quantification des émissions des cultures avec fertilisation Population des cheptels par type d'animaux Consommation d'azote minéral Estimation de la quantité d'azote organique produite Production de plantes nitrophiles et autres générant des résidus de cultures Surfaces agricoles, Consommation d'azote minéral par type d'engrais Estimation des modes de dispersion de l'azote Facteurs d'émissions Emissions cultures avec fertilisation 32 Quantité de boues épandues 1 - Emissions nationales en France métropolitaine par secteur d'activité Les graphiques ci-dessous présentent la contribution de chacun des postes vis-à-vis des émissions de NH3 et de N2O. L'agriculture ressort comme contributeur majoritaire pour ces deux polluants : en 2002, 97 % des émissions d'ammoniac sont d'origine agricole, l'agriculture comptant pour 76 % des émissions de N2O. Ces ordres de grandeurs se retrouvent pour toutes les années de la période 1980-2002. - Figure 5 Principales sources d’émission d’ammoniac (NH3) en France Procédés Industriels 0% Agriculture 97% Energie 2% - Figure 6 Principales sources d’émission de protoxyde d’azote (N2O) en France UTCF 0% Utilisation de Solvants 0% Procédés Industriels 12 % Epandage des déjections animales 7% Agriculture 76 % Résidus de récolte 4% Pâture 10 % Redéposition atmosphérique 4% Fertilisants minéraux 17 % Gestion des déjections 9% Epandage des boues 0% Lixiviation des sols 21 % FRANCE Energie 10 % Plantes fixatrices d'azote 3% Déchets 2% DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN Déjections animales 78% - II - INVENTAIRE Déchets 1% Epandage de boues 0% - CORPEN 2006 Fertilisants minéraux 19% LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 4 - Principaux résultats Cultures sans fertilisants 1% 33 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -II- INVENTAIRE DES ÉMISSIONS AZOTÉES PROVENANT DES ACTIVITÉS AGRICOLES EN FRANCE 2 - Evolution des émissions (cf. Annexe 2) 34 La part de l’agriculture dans les émissions de N2O n’a cessé de croître, passant de 68 % en 1990 à 76 % en 2002, malgré un volume d’émission quasi stable en raison des efforts de réduction opérés dans les autres secteurs d’activité (principalement l’industrie chimique). Bien que les émissions dans le secteur agricole soient plus difficiles à maîtriser que dans le cas des procédés industriels du fait des processus biologiques responsables de la formation des composés, des solutions existent pour réduire les émissions azotées (NH3 et N2O). (se reporter au chapitre 4). 3 - Emissions départementalisées (cf. Annexe 2) Dans le cadre du programme EMEP (partie intégrante de la convention CEE-NU), le CITEPA a réalisé un inventaire spatialisé des émissions avec une résolution de 50 x 50 km. Les résultats de ces émissions ont également fait l'objet d'une restitution suivant un format départementalisé. Les cartes présentées en annexe 2 montrent l'existence de disparités importantes entre les départements et font, en particulier, ressortir les zones Ouest et Nord-ouest. On notera une relativement forte corrélation entre les zones fortement émettrices de NH3 et celles émettrices de N2O, l’agriculture étant dans les deux cas l’activité majoritairement impliquée. 5 - Limites, incertitudes et améliorations Les émissions issues de l'agriculture sont associées à des incertitudes particulièrement élevées. Ces niveaux d'incertitude, fréquemment supérieurs à 50 %, peuvent être expliqués par : A le fait que les émissions d'origines agricoles sont diffuses (les émissions des sols par exemple). Les mesures expérimentales sont en conséquence beaucoup plus difficiles à réaliser que dans le cas des rejets canalisés et sont également moins reproductibles. A la dépendance, parfois forte, des émissions avec les conditions pédoclimatiques (climat et nature des sols). A la forte variabilité temporelle et géographique de paramètres majeurs, tels que la teneur en azote de l'alimentation des animaux. A une connaissance incomplète des occurrences des pratiques agricoles au niveau national. Cet état de fait n'est cependant pas une fatalité. Il existera toujours une part d'incertitude notable inhérente, en particulier, à la nature diffuse des émissions (donc complexe à mesurer) et à la très grande difficulté matérielle d’inventorier les pratiques agricoles en relation avec le climat local, mais ces incertitudes peuvent être réduites progressivement. Ainsi, une amélioration de la méthodologie, permettant la prise en compte de spécificités nationales plutôt que des paramètres par défaut, doit être envisagée. Pour ce faire, une meilleure connaissance de l’évolution des pratiques est nécessaire. Le chapitre suivant propose un état des lieux qualitatif des pratiques agricoles et de leur incidence sur la gestion de l’azote à la ferme. CHAPITRE III Gestion et transformation de l’azote à la ferme CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr De nombreuses études réalisées dans ce domaine mettent en évidence la variabilité des pertes en azote selon l’espèce animale, la conduite de l’élevage, le type d’engrais (fumier, lisier ou fientes) et leur mode de gestion. L’évolution de la composition des engrais au cours du temps avant leur épandage et les variations climatiques sont également des facteurs intervenant dans les pertes d’azote sous forme de NH3 et de N2O. Nous présentons dans ce chapitre une première partie relative aux quantités et caractéristiques des engrais azotés ainsi qu’une description succincte des grands modes de gestion des engrais de ferme. Dans une deuxième partie nous décrirons les différents paramètres responsables de la transformation de l’azote sous forme de NH3 et N2O ainsi qu’une quantification, lorsque cela est possible, de cette transformation. 1 - Les différentes sources d'azote en agriculture LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME En France, les deux principales sources d’azote sont les fertilisants minéraux et les engrais de ferme. L’application de ces deux formes d’engrais sur les surfaces agricoles permet de répondre aux besoins nutritifs des cultures mais engendre également des problèmes de pollutions. Outre la pollution des eaux par les nitrates, les engrais sont également une source de pollution atmosphérique avec la volatilisation de l’azote sous forme d’ammoniac et la production de gaz à effet de serre (CH4, CO2, N2O). Les inventaires nationaux tels que décrits dans le chapitre précédent, confirmés au niveau européen (1), démontrent que les engrais de ferme représentent plus de 80 % des émissions de NH3 tandis que 10 % à 20 % émanent des engrais minéraux de synthèse et des cultures fertilisées. 36 1 - Les engrais minéraux En 2003-2004, les engrais minéraux apportent, avec 2,3 Mt, 63 % de l'azote fourni aux sols (37 % de l'azote a pour origine les excrétions des animaux d'élevage) (UNIFA, 2005). Les engrais minéraux se présentent sous différentes formes physiques et sous différentes formes d’azote minéral (ammoniacal, nitrique et uréique). Les engrais minéraux azotés simples utilisés sont les ammonitrates (43 %), les solutions azotées (26 %) et l'urée CO(NH2)2 ( 2) (11 %). L'ammoniac anhydre représente une part marginale (moins de 2 %). Il faut également ajouter les engrais composés (NPK, NP, NK) qui représentent 16 % (UNIFA, 2005). L’absorption racinaire de l’azote par les plantes se fait préférentiellement sous la forme nitrique (NO3- ) issue de la transformation des différentes formes de l’azote appliquées. C’est notamment au cours de ces transformations qu’ont lieu les émissions de NH3 ou de N2O. 2 - Les engrais de ferme ou engrais d’origine organique Le terme "engrais de ferme" réunit toutes les formes de déjections animales : le fumier solide (fèces avec ou sans litière), le lisier (fèces et urine, avec eau de dilution et litière, s’il y a lieu) souvent appelé fumier liquide et le purin ou jus de fumiers (urine et eau de dilution). Selon le chep(1) http://europa.eu.int/comm/agriculture/envir/report/fr/acid_fr/report.htm (2) L’urée est un composé organique très rapidement hydrolysé dans le sol sous des formes minérales 2.1- Production annuelle des déjections animales La production annuelle des engrais de ferme est estimée à environ 300 millions de tonnes de matière brute (Tableau 5). Les engrais bovins sont largement dominants et se présentent surtout sous forme de fumiers. Le lisier concerne une partie des effluents bovins et la grande majorité de la production porcine. Cheptel Matière Brute Millions de têtes Matière Sèche Millions de tonnes/an 19.5 240 30 Porcin 15.1 28 2.8 Volaille 208 Lapin 10 }10 }3.4 Ovin 9.2 Caprin 1.2 }16 }2.0 - CORPEN 2006 Bovin - III - Tableau 5 - Production annuelle des engrais de ferme (Statistiques Agricoles annuelles, 2003 et Ademe, 2001) L’azote ingéré par les animaux est excrété à 60-90% dans les urines et les fèces sous différentes formes allant de l’urée ou de l’acide urique à des composés plus complexes. Le tableau 6 indique la variabilité de la teneur en azote des engrais de ferme en fonction de leur type et du cheptel. Les fumiers de volailles sont 4-5 fois plus riches en éléments fertilisants (N, P, K) que les fumiers bovins. La variation au sein d’un cheptel s’explique par une différence de conduite d’élevage, de régime alimentaire ou de gestion des engrais de ferme. Ainsi, l’ensemble du cheptel français produit environ 1.4 millions de tonnes d’azote par an. Type N P2O5 K 2O CaO MgO (kg / tonne de produit brut) Fumier de dépôt Fumier frais (très compact de litière accumulée) 6,5 5,8 3,0 2,3 11,0 9,6 5,0 3,8 1,7 Fumier compact de pente paillée 4,9 2,3 9,0 3,8 1,7 Fumier compact d'étable entravée 5,3 1,7 7,1 3,8 1,7 Fumier mou de logettes 5,1 2,3 6,2 3,8 1,7 8,0 5,0 14,0 6,0 3,0 Lisier presque pur 4,0 2,0 5,0 4,5 1,5 Lisier dilué 2,7 1,1 3,3 2,5 1,0 Lisier très dilué 1,6 0,8 2,4 1,0 0,5 Purin pur 3,0 0,9 5,7 2,0 2,0 Purin dilué 0,4 0,2 1,5 1,0 0,5 Bovin Compost de fumier GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME 2.2- Teneur en azote des engrais de ferme Cheptel LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE tel considéré, la répartition entre ces différentes formes varie. Le cheptel bovin émet essentiellement du fumier, le cheptel porcin du lisier et le cheptel avicole autant de fumier que de lisier. 37 Porcin Fumier de litière accumulée sur paille 7,2 7,0 10,2 6,0 2,5 Fumier de litière raclée sur paille 9,1 10,9 11,2 7,5 3,1 Lisier pur 9,6 4,8 5,9 5,2 1,7 Lisier dilué 4,3 3,8 2,6 3,6 1,2 Compost de fumier de litière accumulée 7,6 10,2 14,7 8,0 3,0 11,0 18,3 20,8 10,0 4,0 Compost de lisier sur paille 7,7 14,9 10,5 5,0 2,0 Compost de refus de tamisage de lisier 7,2 43,4 2,6 10,0 3,0 Compost de fumier de litière raclée LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME Lisier pondeuse 38 6,8 9,5 5,5 16,2 1,2 Fiente humide pondeuse 15,0 14,0 12,0 40,5 3,0 Fiente présèchée sur tapis pondeuse 22,0 20,0 12,0 50,0 4,8 Fiente séchée en fosse profonde pondeuse 30,0 40,0 28,0 60,0 8,0 Fiente séchée sous hangar pondeuse 40,0 40,0 28,0 60,0 8,0 5,9 5,9 4,1 6,0 1,0 Fumier sortie du bâtiment poulet de chair 29,0 25,0 20,0 14,5 3,7 Fumier après stockage poulet de chair 22,0 23,0 18,0 11,0 2,8 Fumier sortie du bâtiment poulet label 20,0 18,0 15,0 10,0 2,5 Fumier après stockage poulet label 15,0 17,0 14,0 7,5 1,9 Fumier sortie du bâtiment dinde de chair 27,0 27,0 20,0 23,5 3,7 Fumier après stockage dinde de chair 21,0 25,0 18,0 18,2 2,8 Fumier sortie du bâtiment pintade de chair 32,0 25,0 20,0 18,0 2,0 6,7 4,0 12,0 11,2 1,4 11,5 7,0 23,0 22,0 3,0 Fumier 6,1 5,2 7,0 8,0 2,0 Fumier Lisier 8,2 8,5 3,2 13,5 9,0 7,5 6,0 13,9 2,0 0,5 Lisier canard Volaille Fumier Compost de fumier d'ovins Tableau 6 - Composition des engrais de ferme en éléments fertilisants (Institut de l’élevage, ITAVI, ITCF, ITP, 2001) Il faut noter qu'au sein de chaque catégorie, il existe une grande variabilité qui dépasse parfois la variabilité existante entre chaque catégorie. 2 - La gestion des engrais de ferme La gestion des engrais de ferme est liée à la conduite d’élevage adoptée et aux contraintes réglementaires visant à minimiser l’impact environnemental des élevages. L’élevage hors sol des porcs permet de récupérer quasiment la totalité des déjections tandis que l’élevage bovin maintenu en partie à l’extérieur induit une dispersion ou une excrétion directe. Selon les données SCEES (1994) 50 % des déjections totales sont émises au champ et ne sont donc pas collectées. L’autre moitié des déjections est récupérée sous forme de lisier ou de fumier avec une répartition différente selon l’espèce animale. De plus, le volume des déjections collectées journellement varie en fonction de la conduite d’élevage (stabulation entravée, aire d’exercice couverte,…), du type de logement (sur caillebotis ou sur litière), du mode de collecte des déjections (raclage, pente) et de la fréquence des lavages (tableau 7). A l’inverse, le cheptel porcin, élevé à 91 % sur caillebotis pour les porcs à l’engraissement et à 80 % pour les truies en gestation ou en maternité (Primeur Agreste, 2004), génère essentiellement des engrais de ferme sous forme de lisier (75 % des déjections porcines). Ce lisier est stocké pour 90 % des élevages dans des fosses de capacité nécessaire à au moins 4 mois de stockage (Agreste Primeur, 2004). Les aires de stockage de fumier sont peu nombreuses et généralement non couvertes. Les modes de stabulations des porcins sont très divers (cases collectives ou individuelles, sols raclés, paillés ou en caillebotis,…) et variables selon les régions. L’élevage sur litière connaît un regain d'intérêt en relation avec les signes officiels de qualité (labels, AB…) et pour des raisons d'acceptabilité sociale. Mode d’élevage Fumier 80% Lisier 20% 50% fumier - 50% lisier Fumier 94% Lisier 6% 50% fumier - 50% lisier Fumier 94% Lisier 6% GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME % de déjections - III - Vaches laitières Stabulation entravée avec litière Stabulation libre avec pente paillée Stabulation libre avec litière accumulée Stabulation entravée sans litière Stabulation libre à logettes 1 Systèmes mixtes Vaches allaitantes Stabulation entravée avec litière Stabulation libre avec pente paillée Stabulation libre avec litière accumulée Stabulation entravée sans litière Systèmes mixtes Taurillons Stabulation entravée avec litière Stabulation libre avec pente paillée Stabulation libre avec litière accumulée Stabulation entravée sans l itière Stabulation libre avec caillebotis Système mixte Veaux de boucherie Stabulation entravée sans litière ou libre avec caillebotis 100% Truie mère et suite Plein air Bâtiment couvert avec caillebotis Bâtiment couvert avec sol raclé ou paillé Jeunes truies Plein air Semi plein air ou bâtiment couvert avec sol raclé ou paillé Bâtiment couv ert avec caillebotis Type de déjections - CORPEN 2006 Cheptel LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Pour le cheptel bovin, 37 % des places bovines sont en stabulation libre avec un couchage sur paille, 33 % en stabulation libre sans paille, 20% en stabulation entravée avec litière, 3 % en stabulation entravée sans litière et 7 % en plein air (Agreste primeur, 2004). Cette répartition explique pourquoi les lisiers sont très minoritaires : 6 % des déjections des bovins viandes (hors taurillons et veaux de boucherie) et 20 % des déjections des vaches laitières. Le stockage des effluents liquides (lisier, purin) n’est pas encore généralisé (Agreste primeur, 2004). En effet, 41 % des exploitations ne disposent pas d’unité de stockage. Les exploitations qui stockent leurs engrais de ferme ont, pour 28 % d’entre elles, 4 mois de capacité de stockage (valeur réglementaire ICPE) et pour 31 % des capacités de stockage inférieures à cette valeur réglementaire. 50% fumier- 50% lisier Lisier 100% Emises au champ non récupérables Lisier Fumier Emises au champ non récupérables Fumier Lisier (1) Les bâtiments à logettes produisent des effluents intermédiaires (lisiers pailleux à fumier mous) classés ici dans la catégorie « lisier » 39 Autres porcs (post-sevrage, engraissement, verrats) Plein air Semi plein air ou bâtiment couvert avec sol raclé ou paillé 15 % Bâtiment couvert avec caillebotis 85 % Poules pondeuses et poulettes GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME -III- CORPEN 2006 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Lisier Fientes humides à sèches selon le mode d’évacuation et de stockage Sans litière 40 Emises au champ non récupérables Fumier Volailles de chair (hors palmipèdes) Avec litière Fumiers Canards et oies Lisiers liquides ou fumiers Mixtes : 90 % sans litière et 10 % avec litière Tableau 7 - Gestion et répartition des engrais de ferme selon le cheptel (SCEES, 2001) Les élevages de poulets, dindes, pintades et cailles sont toujours pratiqués sur une litière dont la composition est variable (paille de blé, copeaux) et donnent donc lieu à la gestion d’un fumier. D’une manière générale, les déjections sont émises à l’intérieur du bâtiment d’élevage. Toutefois, les animaux peuvent avoir accès à un parcours (notamment les volailles sous label) et, dans ce cas, suivant les espèces, les situations d’élevage et certaines particularités, les déjections émises sur les parcours peuvent représenter entre 20 et 80 % de la totalité des déjections. Les canards à rôtir sont élevés dans la plupart des cas sur caillebotis (ce qui donne lieu à la gestion des déjections sous forme de lisier). Les canards destinés à la production de foie gras (canards dits « prêts à gaver » ou PAG) ont un cycle de production divisé en deux phases distinctes : une phase d’élevage qui donne lieu à une production de fumier (et 60 à 80 % des déjections émises sur le parcours) et une phase de gavage avec des animaux en cages et une production de lisier En élevages de pondeuses, les modalités d’élevage (matériel, gestion des déjections, alimentation) sont très variables. L’élevage en cages reste prépondérant avec une production de lisier (moins de 20 % de MS) ou de fientes plus ou moins sèches (de 35 à 85 % de MS) ; on note en particulier que des systèmes de séchage des fientes performants ont été mis au point, ce qui permet de réduire les pertes d’azote sous forme d’ammoniac. L’élevage de pondeuses se pratique également au sol, avec éventuellement accès à un parcours ; dans ce cas, les déjections à l’intérieur du bâtiment d’élevage sont gérées sous 2 formes : des fientes pures plus ou moins sèches sous les caillebotis (1/3 de la surface) et du fumier. D’une manière générale les volailles de reproduction sont élevées selon des modalités similaires à celles des pondeuses. En résumé, il est possible de classer les déjections avicoles en trois grands types : A les produits liquides (llisiers) issus de l’élevage des poules pondeuses et des canards à rôtir ou en gavage, A les produits pâteux à secs (ffientes) issus de l’élevage des poules pondeuses, A les fumiers dont l’origine est l’élevage des poulets, dindes, pintades, cailles, canards prêts à gaver, pondeuses au sol et volailles de reproduction. Afin de réduire les excédents en éléments fertilisants de certaines régions agricoles intensives, les engrais de ferme peuvent ou doivent être traités. En octobre 2004, 297 stations étaient recensées en Bretagne (Source Préfecture de Bretagne). Ces installations sont plus ou moins complexes en fonction de l’excédent d’azote à réduire. Des modules de séparation mécanique (centrifugeuse, vis compacteuse) du lisier brut peuvent être annexés au réacteur biologique ainsi que des bassins de décantation du lisier aéré. Le lisier traité, 1 266 000 m3 en 2003 (Levasseur & Parmi les traitements mis en œuvre, le traitement biologique aérobie (70 % des traitements) concerne principalement les élevages porcins dans le cadre de la réduction des excédents azotés au titre de la Directive Nitrates et des PMPOA. 3 - Transformation de l’azote à la ferme et pertes gazeuses - III GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME Les émissions de NH3 sont dues à des mécanismes physico-chimiques se produisant à l’interface de la source ammoniacale et de l’atmosphère. Une description détaillée des mécanismes de volatilisation de NH3 est donnée dans la brochure du CORPEN (2001) « Les émissions d’ammoniac d’origine agricole dans l’atmosphère - Etat des connaissances et perspectives de réduction des émissions ». D’un point de vue théorique, les principaux paramètres physico-chimiques influençant le processus d’émission sont la concentration en ammoniac et le pH, la température, la surface d’échange gaz/liquide et la vitesse de renouvellement de l’air à l’interface. En effet, pour un gaz et une concentration donnés, le processus d’émission est favorisé par une augmentation de la température. De même, les émissions sont favorisées lorsque la surface d’échange gaz/liquide et/ou lorsque le renouvellement de l’air à l’interface gaz/liquide sont importants (Vlek & Stumpe, 1978 ; Sommer, 1991 ; Zhang et al., 1994 ; Moal, 1994 ; Génermont, 1996 ; Sommer, 1997 ; Arogo et al., 1999 ; Ni, 1999). Cependant, au-delà d’une certaine vitesse de renouvellement de l’air, l’accroissement de la volatilisation peut devenir négligeable (Vlek et Stumpe, 1978 ; Sommer, 1991). Des études ont également montré que la volatilisation de NH3 vers l’atmosphère dépend aussi de la teneur en matières sèches de l’engrais (Muck et al., 1984 ; De Bode, 1991; Zhang & Day, 1996 ; Itodo & Awulu, 1999 ; Guingand, 2002). - CORPEN 2006 Au cours de la gestion des engrais de ferme et des engrais minéraux, des transformations biologiques ou physico-chimiques de l’azote sont à l’origine de pertes azotées gazeuses. Ces pertes sous forme d’ammoniac (NH3) et de protoxyde d’azote (N2O) sont liées à la présence d’azote ammoniacal (NH4+) dans les engrais de ferme ou au moment de l’application des engrais minéraux. Cet azote ammoniacal provient de la dégradation des composés azotés ingérés (protéine) par les animaux ou de l'évolution des engrais suite à leur épandage. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Lemaire, 2003), est alors réparti en une phase solide qui sera épandue et en une phase liquide stockée en lagune et servant à irriguer les cultures. Lorsque le traitement est doté d’une séparation mécanique, la phase solide du lisier est stockée pour être transférée vers d'autres cultures, notamment les cultures maraîchères. Ces différents traitements se traduisent par l’obtention de co-produits ayant une valeur fertilisante très différente de l’engrais d’origine (Béline et al., 2003). A ces stations s'ajoutent plusieurs dizaines de stations de compostage, notamment de fumiers de volailles et de lisiers de porcs sur paille. Le N2O est produit lors des processus de nitrification et dénitrification qui transforment l’azote ammoniacal sous forme gazeuse, essentiellement en N2. La nitrification est l’oxydation des composés azotés (organique ou inorganique) en nitrates. Dans le cas des engrais, la nitrification vise essentiellement l’oxydation de l'ammonium en nitrates par des bactéries nitrifiantes. La nitrification implique la formation de co-produits tels que le N2O, NO et N2. La dénitrification est la réduction des nitrates (ou des nitrites) en azote moléculaire (N2) et/ou oxyde d’azote gazeux (N2O, NO). 41 Du monoxyde d’azote (NO) peut être également formé par nitrification mais peu de données relatives à la gestion des engrais sont disponibles. Les transformations de l’azote contenu dans les engrais et par conséquent les pertes en ammoniac et en N2O ont lieu au cours et après l’application des engrais minéraux. L’amplitude de ces pertes dépend : A du type d’engrais utilisé (composition chimique, formulation, dose appliquée) qui définit la teneur en azote ammoniacal disponible à la surface du sol ; A du type de sol (pH, caractéristiques et matières organiques) ; A des conditions météorologiques (pluie, température,…) pendant et après l'application ; A de l'importance de la couverture végétale pendant et après l'application. Selon l’étude bibliographique de Génermont (1996), les pertes en NH3 sont souvent plus élevées pour les engrais liquides que pour les engrais solides. Cependant, cette capacité dépend du type de sol et du taux d’humidité. En effet, des études récentes menées par l’INRA montrent que l'humidité du sol et de l'air sont des variables clés dans le processus de volatilisation de NH3. Elles déterminent le temps de dissolution des granules pendant lequel la volatilisation est faible mais non négligeable (de 5 à 16 % des pertes totales selon les conditions d'humidité). Ce délai de dissolution peut varier d'une dizaine d'heures à plusieurs jours en fonction de l'humidité du sol et de l'air. D’autre part, la volatilisation de NH3 est plus importante pour l’urée que pour les ammonitrates selon le type de sol (Van der Werden & Jarvis, 1997; Harrison & Webb, 2001). Cette différence est due à l’hydrolyse de l’urée qui produit du NH3 : LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME 1 - les engrais minéraux 42 (NH2)2CO + 2H2O NH4+ + NH3 + HCO3- Pour les autres fertilisants la volatilisation est plus faible car le NH4+ contenu dans le produit semble être un faible précurseur de NH3 (Van der Werden & Jarvis, 1997) en raison des conditions acides des sols peu favorables à la volatilisation. Pain et al. (1998) Misselbrook et al. (2004) Hutchings et al. (2001) Engrais Urée en surface % de N appliqué 15 Urée enfouie 2 NH3 solution enfouie (NH4)2SO4 Sulfate d'ammonium (NH4)2 HPO4 Phosphate d'ammonium NH4NO3 Ammonitrate Autres 1 Engrais Urée Urée+ammonitrate Type de sol Prairie Terre Arable Prairie Terre Arable % de N appliqué 23 11.5 8 8 5 5 Autres Prairie Terre Arable 1.6 0.8 2 2 Tableau 8 - Exemples de pertes en azote (NH3) lors de l’application des engrais minéraux. Le mode de gestion des engrais de ferme détermine l’évolution de la teneur en azote et par conséquent les pertes en ammoniac et protoxyde d’azote. La volatilisation de NH3 a lieu rapidement lors de l’émission au pâturage, de l’épandage et du stockage des déjections dans les bâtiments et en fosse extérieure. La volatilisation de NH3 des engrais de ferme dépend de divers facteurs, tels que : A les caractéristiques des engrais. Un lisier de porc, de teneur en NH4+ plus élevée, émet 2 à 3 fois plus d’ammoniac qu’un lisier bovin, A la conduite de l’élevage, qui détermine le temps passé par les animaux à l’intérieur ou en pâturage particulièrement pour le cheptel bovin, A la configuration du bâtiment (type de sol, ventilation, type et fréquence d’évacuation des engrais), qui définit le type des engrais (fumier/lisier). A le système de stockage au bâtiment et à l’extérieur (préfosse, fosse extérieure couverte ou non), A pour l’épandage, des propriétés du sol, telles que le pH, la teneur en calcium, la teneur en eau, le pouvoir tampon ou la porosité, de la méthode et la dose d’épandage des engrais, A des conditions météorologiques et saisonnières. GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME 2.1- Généralités - III - 2 - Les engrais de ferme - CORPEN 2006 Les pertes sous forme de N2O sont plus faibles que les pertes de NH3. La production de N2O est due aux processus de nitrification/dénitrification de NH4+ ou de dénitrification de la forme nitrique (NO3-). Les deux processus sont fortement influencés par la température, l’humidité, la teneur en matières organiques du sol et l’absorption par les plantes. La production de N2O a lieu suite à l’application des engrais minéraux azotés. Cependant, en dehors des périodes d’épandage de fortes émissions de N2O ont souvent lieu lorsque la teneur en eau du sol est importante ou immédiatement après des évènements pluvieux. Dans ces conditions, les émissions N2O sont la plupart du temps issues de la dénitrification. (Skiba et al., 1993 ; Dobbie et al., 1999, Ruser et al., 2001). Une production de N2O de l’ordre de 0.2-2.2 % du N appliqué a été observée selon le type de fertilisant (Clayton et al.,1997). Un facteur unique de 1.25 % du N appliqué est retenu même si la forme physique (granulé, …) et le mode d'épandage des engrais peuvent influencer la quantité de N2O (Bouwman, 1996 ; Chadwick et al.,1999). Ces derniers estiment que les différents facteurs liés au travail du sol, à la pluviométrie, aux types de cultures, interfèrent plus sur les émissions de N2O que la composition du fertilisant elle-même. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Aussi, dans le cadre des inventaires relatifs aux émissions de NH3, l’UNECE (1) (Van der Hoek, 1998 a) a retenu des valeurs moyennes de pertes en azote selon le type de fertilisants (8 % du N appliqué pour le sulfate d’ammonium, 2 % pour les ammonitrates, 15 % pour l’urée, …). Cependant, d'autres auteurs (Pain et al., 1998 ; Misselbrook et al., 2004 ; Hutchings et al., 2001) envisagent des pertes en NH3 différentes également selon le type de sol ou le mode d’application (tableau 8). La production de N2O peut avoir lieu à tous les stades de gestion des engrais de ferme (bâtiment, stockage, épandage, traitement) lorsque les conditions sont favorables aux processus de dénitrification/nitrification. Les émissions de N2O peuvent être importantes lorsque les déjections sont soumises alternativement à des conditions aérobies (présence d’oxygène), qui favori(1) UNECE : Commission Economique des Nations Unies pour l’Europe 43 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME sent la nitrification, et anaérobies (absence d’oxygène), qui favorisent la dénitrification. Le potentiel de production dépend alors de la composition des déjections et des quantités d’oxygène disponibles. Ainsi, le N2O est détecté essentiellement au cours du compostage des fumiers, au cours de l’épandage et très peu pendant le stockage du lisier. 44 La transformation de l’azote au pâturage concerne essentiellement l’élevage bovin. Les pertes en NH3 sont plus faibles que celles en bâtiment du fait de l’infiltration rapide des urines dans le sol. Elles dépendent de la fertilisation ou non de la zone de pâturage. Plus cette zone est fertilisée, plus les émissions de NH3 sont importantes (Misselbrook et al., 2000; Hutchings et al., 2001). Ces pertes sont estimées à 6-10 % du N excrété (Jarvis et al. 1989). Les processus de nitrification et de dénitrification peuvent également entraîner une production de N2O. Selon les synthèses bibliographiques de Oenema et al. (1997) et Van Groenigen et al. (2005), la production de N2O est estimée entre 0.1 et 3.8 % de l’azote contenu dans les urines et entre 0.1 et 0.7 % pour les fèces. Au bâtiment les pertes en azote sont dues essentiellement aux urines qui contiennent la majorité de l’azote excrété par les animaux. Les pertes en azote sont liées aux modes de logement (litière, caillebotis), à la climatisation des locaux (ventilation, température) et aux propriétés physicochimiques des engrais de ferme, ces derniers pouvant être influencés par l’alimentation. Le logement sur litière semble favoriser les pertes en N2O mais diminuerait celles en NH3 (Robin et al., 1999). Cependant ces pertes dépendent du substrat utilisé (paille ou sciure). L'activité des animaux (période d’alimentation, de repos,…) intervient également sur les pertes azotées. Au stockage, la transformation de l’azote est associée à la structure et la composition des engrais de ferme et aux conditions de stockage (aérobie/anaérobie). Les lisiers sont essentiellement stockés en conditions anaérobies tandis que les fumiers sont soumis à des conditions plus ou moins aérobies selon la porosité du tas. Les pertes en NH3 d’un lisier ont lieu tout au long du stockage et sont plus faibles que celles d’un fumier dont les pertes diminuent au cours du stockage (Dolle, 2000 ; Chadwick, 2005). De plus, le retournement du fumier, favorisant les conditions aérobies, engendre plus de NH3 qu’un stockage anaérobie (Kirchmann & Witter, 1989). Les pertes en NH3 sont alors estimées à environ 60 % de la teneur initiale en N (Martins et Dewes, 1992) et semblent avoir lieu rapidement après la formation du tas (Martins et Dewes, 1992; Dewes, 1999). Pour le stockage du lisier essentiellement effectué en fosse, les pertes en NH3 suivent les mêmes processus quel que soit le cheptel. Les différences observées sont liées principalement à la composition du lisier. Un lisier porcin émet plus de NH3 qu’un lisier bovin du fait d’une différence de teneur en matières sèches (favorisant une croûte naturelle au stockage) et de teneur en azote ammoniacal NH4+. Les pertes en N2O sont généralement nulles pour le stockage du lisier car les conditions anaérobies sont défavorables à la production de N2O (Osada et al., 1998; Phillips et al., 1997). Par contre, l’utilisation de litière au bâtiment engendre des émissions plus importantes de protoxyde d’azote au cours du stockage (Robin et al., 1999). Pour les fumiers, du N2O peut être produit car cet engrais est caractérisé par une hétérogénéité importante favorisant des zones aérobies et anaérobies, (Amon et al., 1997; Béline et al., 2000). A l’éépandage, les émissions de NH3 d’un fumier sont généralement supérieures d’environ 20 % à celles d’un lisier pour une teneur en azote ammoniacal et un système d’application similaires. Les pertes en NH3 d’un lisier sont fortement influencées par les facteurs climatiques (essentiellement la température et l’humidité) tandis que celles d’un fumier dépendent essentiellement du taux d’azote ammoniacal appliqué. La volatilisation de l’ammoniac des lisiers épandus est un processus caractérisé par une grande variabilité cinétique et quantitative. Plusieurs travaux et articles de synthèse décrivent le rôle joué par les différents facteurs (climat, couvert végétal, 2.2- Elevage bovin Au pâturage, les pertes azotées (N2O) sont estimées en moyenne à 2 % du N excrété (Oenema et al., 1997, Chadwick et al., 1999). Pour l’ammoniac, les pertes (% du N appliqué) dépendent de la fertilisation ou non de la zone de pâturage. Comme indiqué précédemment, plus cette zone est fertilisée plus les émissions de NH3 sont importantes. Elles sont estimées à 6-10 % du N excrété (Jarvis et al. 1989, Misselbrook et al., 2000 ; Hutchings et al., 2001). Type de déjections Stabulation logettes caillebotis Stabulation logettes raclées Stabulation logettes paillées Stabulation paillée couloir raclé Stabulation paillée couloir caillebotis Lisier Lisier Fumier Fumier Fumier + lisier Emissions d’ammoniac kg NH3/VL/6mois 7.3 6.8 4.2 3.9 3.3 GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME Mode de logement - III - Au stockage, les pertes en NH3 sont plus importantes pour un fumier composté (avec retournement du tas) par rapport au fumier stocké simplement en condition anaérobies. Cependant, il semble que les pertes globales en NH3 soient équivalentes pour ces deux systèmes sur l’ensemble [bâtiment-stockage-épandage] pour une stabulation entravée (Amon et al., 2001). De plus, le système fumier émet plus de NH3 que le système lisier (Dollé, 2000) car le stockage de lisier conduit à la formation d’une croûte naturelle qui limite la volatilisation de NH3. L’Institut de l’élevage a mesuré les pertes en NH3 d’un stockage de fumier à 8-12 % du N initial (lorsque l’apport de paille est optimal pour les animaux - 6 à 7 kg de paille/animal/jour -). Ces pertes en NH3 du système fumier peuvent être réduites en augmentant la quantité de paille à la litière. - CORPEN 2006 Les pertes en azote au bâtiment et sur les aires de repos/exercice sont attribuables principalement à la volatilisation de NH3 au cours de la collecte et du stockage. D’après la bibliographie ces pertes varient en fonction du bâtiment et du mode de nettoyage des aires. Le nettoyage à l’eau réduit davantage les pertes en azote qu’un raclage. Selon la littérature les pertes gazeuses représentent entre 25 à 35 % de l’azote excrété par l’animal. Il existe une différence entre une stabulation libre et une stabulation entravée : les pertes au bâtiment ne dépendent pas du type de déjections en stabulation entravée (Amon et al., 2001) au contraire d’une stabulation libre (Dollé, 2000). En effet, cette dernière étude indique que les émissions de NH3 sont plus fortes pour les systèmes lisier (logettes) que pour les systèmes fumier (aire paillée). Par ailleurs, sur l’ensemble [bâtiment-stockage-épandage] un élevage en stabulation entravée émet moins d’azote (NH3, N2O) qu’un élevage en stabulation libre (Amon et al., 2001). LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE nature de l’apport azoté,…) sur les émissions de NH3 évaluées jusqu’à 80 % de l’azote ammoniacal appliqué (Moal, 1994). En moyenne, 75 % des pertes totales d’ammoniac ont lieu au cours des 16 premières heures. Les études relatives aux émissions de N2O indiquent des quantités de l’ordre de 0.1 - 3.4 % de l’azote apporté et ne paraissent pas significativement différentes pour les lisiers et les fumiers. (Weslien et al., 1998 ; Chadwick et al., 2000 ; Vermoesen et al., 1996 ; Koops et al., 1997). Néanmoins, Robin et al. (2002) mesurent en conditions expérimentales d’anoxie un potentiel de production de N2O jusqu’à 0-20 % du N appliqué d’un lisier porcin. Tableau 9 - Emissions d’ammoniac par mode de logement pour un débit d’air de 1000m3/VL/heure en stabulation libre (Dollé, 2000) Les émissions de N2O sont insignifiantes (< 0.01 %) (Dollé & Capdeville, 1998 ; Amon et al., 2001 ; Misselbrook et al., 2001 ; Ellis et al., 2001 ). 45 A l’éépandage, le système lisier induit des pertes en NH3 alors qu’elles sont quasiment inexistantes pour le système du fumier avec compostage (Amon et al., 2001). Ainsi, les pertes en NH3 au bâtiment retenues par le CORPEN sont de 25 % du N excrété et de 5 % au stockage (CORPEN, 1999 ; 2001). 2.3 - Elevage porcin LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME En élevage extérieur, Williams et al. (2000) ont évalué les pertes azotées pour des truies à : 11 g N-NH3.truie-1.j-1, quel que soit le couvert végétal. 46 Dans le cas d’une filière sur caillebotis, des pertes d’azote au bâtiment correspondant à environ 25 % du N excrété sont retenues (CORPEN 2001, 2003). Les pertes dépendent néanmoins des conditions (température du lisier, ventilation des bâtiments,…) et de la durée du pré-stockage. Selon les modalités d'élevage, la volatilisation d'ammoniac dans le bâtiment peut ainsi varier entre 15 et 30 % de la quantité d'azote excrété. Il semble également que l’âge des porcs influe sur les pertes en NH3 (Aarnink et al., 1995) en raison de l’accroissement de la consommation d’aliment. La croissance des animaux s’accompagne d’une augmentation des émissions de NH3 au bâtiment. Une modélisation de l’influence de ces différents paramètres a été proposée par Dourmad et al. (2002). Certaines études indiquent que le piétinement du sol peut favoriser la volatilisation de NH3, spécialement pour les porcs à l’engraissement (Aarnink et al.; 1995, Aarnink et al., 1997; Ni et al., 1999). Par ailleurs, la nature du sol, caillebotis total ou partiel, métallique ou béton, influence également la volatilisation. Des facteurs d’émissions de NH3 ont également été établis (CORPEN, 2003) pour les systèmes sur litière et sur sciure. Les techniques de compostage de paille et surtout de sciure réduisent sensiblement les émissions de NH3 (-12 % et -47 %) mais elles sont productrices de gaz à effet de serre. Ainsi, les travaux de l’INRA indiquent qu’un élevage porcin sur litière de sciure émet deux fois moins de NH3 qu’un élevage sur caillebotis conventionnel en faveur de fortes émissions de N2 (gaz non polluant) et de N2O. Les émissions de N2O peuvent être réduites notablement en limitant les brassages de la litière et les émissions de NH3 par le lavage des bâtiments (écoulement en discontinu, évacuation hydraulique,…). Les émissions d’ammoniac, au cours du stockage des lisiers de porcs, varient de : 1,8 à 12 g N-NH3. m -2.j-1 (De Bode, 1991; Sommer et al., 1993; Guingand, 2002; …). La volatilisation augmente avec la durée de stockage, la température du lisier et son pH, la vitesse de l’air en surface et dépend du rapport surface/volume de la fosse de stockage. C’est pourquoi, Misselbrook et al. (2000) différencient le type de stockage (fosse circulaire ou lagune). De Bode (1991) estime la volatilisation de l’ammoniac à 5-15 % de l’azote total pour une période de stockage de 180-250 jours. La perte d'azote est d’environ 30 % en cas de compostage de fumier de paille et 10 % en cas de compostage de fumier de sciure. Pour un fumier humide contenant de l’azote ammoniacal au départ et avec une montée en température, la perte se ferait majoritairement sous forme ammoniacale (90 % N-NH3, 5 % N-N2O, 5 % N-N2). Le CORPEN (2003) retient une perte de 5 % de l’azote stocké pour le stockage de lisier, de 27 % pour le compostage d’une litière de paille et de 9 % pour une litière de sciure. Les pertes d'azote à la suite de l'épandage des lisiers varient de 10 à plus de 50 % de l’azote apporté, la valeur de 20 % étant retenue par le CORPEN (2003). Pour l’épandage des litières non compostées les pertes en azote sous forme de NH3 sont de 10 %. Dans le cas du traitement aérobie du lisier, du N2O peut être émis. Les émissions sont généralement inférieures à 2 % de l’azote du lisier traité par aération intermittente et à 20-30 % par aération continue (Burton et al., 1993; Béline et al. 1999; Béline et al., 2001; Béline & Martinez, 2002). Epandage (%N appliqué) NH3 N2O N2 24 4 29 20 8 44 5 - - - - 27 2 2 9 1 - Lisier Litière 20 - 10 - Lisier Litière 43 - 29.1 4 29 Litière Compostée Litière Compostée 37.8 4.8 29.7 Litière 10 Litière 23 8 44 Litière Compostée Litière Compostée 22.7 8.3 44 (2003) Pour les engrais de ferme les processus de nitrification et de dénitrification lors du traitement des effluents peuvent être à l’origine des émissions de N2O (Béline, 1998, Béline & Martinez, 2002). Ces processus se développent également dans les litières. 2.4 - Elevage avicole Les pertes en bâtiment et au stockage des engrais avicoles sont importantes et variables. Les différentes mesures et divers essais réalisés montrent que dans les bâtiments d’élevage, les pertes globales d’azote sont comprises entre 18 % (poulets) et 37 % (dindes) en conditions terrain et autour de 30 % pour les deux espèces en conditions expérimentales. Les mesures réalisées dans un élevage industriel de poulet par le Cemagref (Guiziou & Béline, 2005) indiquent des pertes en NH3 de l’ordre de 5,74 gN par animal. Cette valeur est à rapprocher de celles de Groot Koerkamp & Ueng (1997) ou de Demmers et al. (1999) qui estiment les émissions d’ammoniac à environ 6,5 et 10 g N-NH3 par animal respectivement. Très peu de données existent sur les pertes en N2O. GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME Tableau 10 - Pertes azotées des différentes filières porcines retenues par le CORPEN - III - Pertes cumulées (% N excrété) - NH3 - N2O - N2 25 - - CORPEN 2006 - Litière Sciure LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Caillebotis Bâtiment (% N excrété) - NH3 - N2O - N2 Stockage (% N initial) - NH3 - N2O - N2 Compostage (% N initial) - NH3 - N2O - N2 Pertes azotées Litière Paille Les émissions de NH3 augmentent avec l’âge (Amon et al., 1997). Cependant, les paramètres les plus importants sont la température, le pH, la vitesse d’air des bâtiments, l’humidité relative ainsi que l’activité microbienne dans la litière. De fortes concentrations de NH3 ont été détectées (50200 ppm) dans les bâtiments à cause de la réutilisation de la litière, d’une ventilation réduite ou d’une forte humidité (Wathes et al., 1997). La condensation est plus forte dans des espaces confinés en hiver et se traduit par des litières humides favorables à la volatilisation de NH3. 47 Compte tenu de la diversité des élevages, le CORPEN (1996) a retenu, pour les pertes en bâtiment et au stockage, les valeurs suivantes (tableau 11) : Dans le bâtiment (% du N excrété) FUMIER Claustration Volailles de chair (*) Avec parcours Canards et oies PAG(*) Reproducteurs FIENTES Préséchage + stockage sous hangar Séchage Fosse profonde LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 48 30 % 40 % 50 % 55 % 50 % 30 % 25 % 60 % 15 % 15 % 15 % 15 % 20 % 30 % 25 % 15 % Lors de l’épandage (en % du N épandu) Azote utilisable (en % du N excrété) 54 % 46 % 38 % 34 % 32 % 44 % 51 % 29 % 10 % 20 % 10 % (*) et 60 % sur les parcours Tableau 11 - Pertes en NH3 au bâtiment, stockage et épandage des élevages avicoles (% du N excrété) Les pertes en ammoniac peuvent donc être estimées sur la base des valeurs recommandées par le CORPEN. Selon ces données, l’ITAVI (2001) a estimé les pertes pour un bâtiment d’élevage de poulets et de dindes entre 2,5 et 3,2 kg d’azote par an et par m2 de bâtiment (tableau 12). Les déjections émises sur les parcours sont également soumises à des pertes d’ammoniac par volatilisation. A défaut de mesures adaptées et de références, ces pertes sont estimées globalement à 60 % de l’azote excrété sur le parcours, quelle que soit l’espèce ou la situation d’élevage considérée. - CORPEN 2006 -III- GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME LISIER Lors du stockage (en % du N sorti bâtiment) Poulet standard Dinde medium Canard de barbarie (mixte) Pondeuse en cage (avec séchage des déjections) Pertes dans le bâtiment et au stockage calculées selon les données CORPEN En g/kg de Poids En g/animal En kg/m2/an Vif N NH3 N NH3 N NH3 21 17,3 11,2 9,2 2,840 2,340 154 126,8 17,6 14,5 3,120 2,570 107 88,1 27,0 22,2 4,840 3,985 312 256,9 - - - - Tableau 12 - Pertes en NH3 au bâtiment et au stockage des élevages avicoles D’une manière globale, les pertes totales en azote par volatilisation se situent entre 32 et 60 % de l’azote excrété. En dessous de 40 %, il s’agit de certaines volailles label et au-dessus de 50 %, il s’agit des palmipèdes et d’espèces marginales. Pour les autres volailles de chair ou de reproduction, les pertes se situent entre 40 et 50 %. Dans le cadre de la déclaration annuelle des émissions polluantes des installations classées soumises à autorisation, selon l'Arrêté du 24 décembre 2002 du Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable et pour les élevages concernés (c’est-à-dire les élevages de plus de 40 000 animaux équivalents), en conditions standard de production, (avec stockage et épandage) les facteurs d’émission de NH3 retenus pour les filières avicoles sont les suivants : Tableau 13 - Facteurs d’émission de NH3 pour les principales filières avicoles GESTION ET TRANSFORMATION DE L ’ AZOTE À LA FERME Leur présentation fait l’objet du prochain chapitre. - III - Les paragraphes précédents montrent dans quelle mesure des émissions de gaz azotés se produisent tout au long des étapes de production et de gestion des déjections. Cette multiplicité des sources d’émission rend d’autant plus difficile leur maîtrise. Cependant, on dispose aujourd’hui d’une gamme étendue de pratiques et d’interventions, simples ou plus complexes à mettre en œuvre, allant du simple bon sens jusqu’à l’application de technologies évoluées, chacune participant à la réduction des émissions gazeuses. - CORPEN 2006 Poulets, dindes, pintades en claustration Poulettes Canards à rôtir Pondeuses (lisier, fientes humides) Pondeuses (fientes séchées) Pondeuses (fosse profonde) kg de NH3/m2 kg de NH3/place 2,9 1,7 4,6 0,300 0,150 0,450 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Il n’existe pas de mesure fiable concernant les pertes au cours de l’épandage de produits issus de l’aviculture. On peut raisonnablement estimer les pertes à 10 % pour les fumiers et 20 % pour les lisiers. 49 CHAPITRE IV Méthodes pour limiter les émisions d’ammoniac et de protoxyde d’azote CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr La diminution des intrants azotés minéraux est possible grâce à un ajustement des apports de minéraux aux besoins des cultures et des prairies, une meilleure valorisation des effluents d’élevage ; la diminution des concentrés alimentaires peut s’obtenir par une meilleure adéquation des apports d’aliments aux besoins des animaux en fonction de leur stade physiologique et des autres constituants de la ration, une meilleure valorisation des prairies. Il s’agit ici d’approches globales annuelles des besoins des plantes et des animaux à l’année, souvent sur-évalués ou non évalués de façon précise dans la situation initiale. Ces deux points concernent toutes les espèces animales. De nombreux travaux ont été menés en élevages bovins sur le sujet depuis 10 ans. Des indicateurs par système de production ont été constitués. Le bilan apparent des minéraux est un outil de sensibilisation des éleveurs de bovins. Il concerne aussi les volailles qui sont, pour 70 %, des ateliers dans un élevage de bovins et pour 20 % des ateliers au sein d’élevages de porcs. Après l’alimentation et la fertilisation, un ensemble de points techniques peuvent être optimisés au niveau des bâtiments, des stockages, des traitements ou des techniques d’épandage. Cependant, il faut distinguer les mesures d’atténuations qui peuvent être mises en place dans un bâtiment (ou ouvrage de stockage) existant moyennant de petites adaptations, de celles qui peuvent être appliquées exclusivement lors d’une restructuration importante ou d’une construction nouvelle. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Les deux principaux postes d’intrants pour une exploitation d’élevage sont la fertilisation minérale et les concentrés destinés à l’alimentation des animaux. 52 1 - La diminution des intrants du système de production Le bilan des minéraux ou bilan apparent de l’azote au niveau de l’exploitation montre généralement un solde en kg N par hectare de SAU très positif (hors fixation par les légumineuses). Le bilan consiste à convertir en kilogramme d’azote toutes les entrées et toutes les sorties de l’exploitation et à ramener le solde à l’hectare de surface agricole utile. Ce solde varie de 40 à plus de 200 kg N/ha selon les niveaux d’intensification mais, à niveaux d’intensification équivalents (de l’animal et des surfaces fourragères ), il peut souvent être réduit de plusieurs dizaines de kg par hectare (20 à 80 selon les cas), sans affecter les productions. Premier indicateur : le solde du bilan apparent de l’azote en Kg N/ha SAU Sorties kg N Entrée kg N Vente,exportations Achat, importations: engrais minéral et organique lait EXPLOITATION AGRICOLE: concentrés animaux animaux Végétaux fourrages litière Fixat° legumineuses Exportations engrais Ferme EXCEDENT (kg N/ha) = ( kg N Entrées- kg N Sorties)/ ha SAU - Figure 8- Grains/céréales Viande kg N/ha SAU - CORPEN 2006 Exemple de solde du bilan apparent avant et après optimisation de l’alimentation et de la fertilisation LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - Figure 7- Lait animaux Céréales engrais soja Solde du bilan Soja fixation Engrais engrais 0 Entrées Sorties Initiales déjection Entrées Sorties Optimisées Le solde de ce bilan à l’hectare n’est pas directement disponible pour la production immédiate puisque selon ses différentes formes qui peuvent évoluer rapidement dans le temps (voir Chapitre 1), l’azote peut être : A organisé dans le sol, A perdu par lessivage et contribuer à accroître l’émission de N2O. Il est admis que 2,5 % de l’azote lessivé est émis indirectement sous forme de protoxyde d’azote, A ou émis sous forme gazeuse à différents postes du système de production : bâtiments, stockage, pâture et sols. Cependant, diminuer ce solde permet de diminuer les pertes d’azote du système de production. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Solde du bilan - IV- soja 1 - Ajustement de la fertilisation Le tableau ci-dessous présente différentes pratiques fertilisantes susceptibles de réduire les émissions de NH3, N2O, CH4 et leurs conséquences économiques pour l’exploitant. 53 Fertilisation MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE -IV- CORPEN 2006 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 54 Mesures d’atténuation possibles Ajuster la dose et limiter les pertes Adapter la fertilisation (minérale et organique) strictement aux besoins Fractionner les apports de lisier et autres fertilisants Limiter les apports de lisier à 20 m 3/ha par épandage Augmenter les légumineuses en mélange ou dans la rotation Choisir les bonnes conditions de fertilisation Maintenir le stock de matières organiques des sols Chauler (pH) Décompacter les sols 1 Prendre en compte la météo à l’épandage Température basse, vent faible Choisir un matériel d’épandage adapté au produit Conditionner, homogénéiser les engrais de ferme au stockage (brassage, broyage pour les liquides, maturation ou compostage pour les solides) Utiliser des matériels performants pour épandre les fertilisants organiques et minéraux et assurer une répartition uniforme de la dose souhaitée Avec un matériel per formant, limiter la dose de lisier (2) entre 18 et 20 m 3 (1) NH3 ↓ ↓ ↓ ↓ Effet sur N 2O CH4 ↓ ↓ ↓ Coût ↓ ↓ ↓ ↓ ↑ ↑ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↑ ↓ ↓ ↓ ↑ (1) Mc Taggart et al. 1997 et Oenema et al. 1997 (2) L’injection de lisier sous pression déplace un volume de terre d’environ 20 m3 ; injecter un volume supérieur fait ressortir le lisier qui est alors soumis à la volatilisation. Tableau 14 - Méthodes d’atténuation des émissions via les modalités de fertilisation 2 - Ajustement de l’alimentation azotée des animaux Selon le type d’animal, 60 à 80% de l’azote ingéré est excrété par les animaux. Toute baisse des apports alimentaires diminue les rejets. Et toute baisse des rejets azotés provoque une baisse de la volatilisation ammoniacale des déjections. Cependant, la limite de la baisse azotée du régime est le maintien de la productivité animale au niveau initial ou l’acceptation d’une baisse économiquement calculée. L’ajustement de l’alimentation azotée aux stricts besoins est indispensable. Tout excès d’azote est excrété donc gaspillé, il augmente les émissions et cause parfois des maladies. La ration doit être considérée comme une somme de constituants en azote, protéines, énergie. La complémentation azotée doit être raisonnée en fonction des constituants de base. Plus les constituants de base sont digestibles, plus on peut en limiter les apports et par conséquent les rejets et les émissions qui en découlent. En production porcine la réduction et le fractionnement de l'apport azoté dans l'alimentation durant l'engraissement permettent de réduire la quantité d'azote dans le lisier d'environ 20 % (Corpen, 1996). Latimier et al. (1993) ont calculé une réduction de l'ordre de 25 % de la quantité d'ammoniac volatilisé dans l'ambiance entre un régime unique à 16.5 % de MAT et un régime biphase avec un aliment à 15 % en croissance suivi en finition d'un aliment à 12 %. Les travaux de Portejoie et al. (2002) sur l’effet de la réduction du taux protéïque de l’aliment ont par ailleurs démontré une réduction importante de la volatilisation (plus de 60 %) en abaissant le taux protéïque de l’aliment de 20 à 12 %. En élevage de bovins laitiers, les acides aminés, protégés (par des procédés chimiques ou bien par extrusion) pour être digérés au niveau intestinal, peuvent réduire les rejets. Cependant ils nécessitent pour les seconds des dépenses en énergie fossile importantes. En production avicole l’efficacité alimentaire a pu être considérablement augmentée, grâce aux progrès de la génétique (pour 60 %) et de la nutrition. Ainsi, depuis une trentaine d’années, les indices de consommation ont baissé de 20 à 30 % suivant les espèces. L’utilisation de certaines matières premières ou d’enzymes, la mise en oeuvre de traitements technologiques particuliers, l’adoption d’une alimentation multiphase (1) ont permis de diminuer les quantités ingérées, d’améliorer la digestibilité de la matière organique et l’assimilation des nutriments, et par conséquent de diminuer les rejets azotés par animal. Des essais réalisés en France ou à l'étranger ont permis de quantifier ces effets. En moyenne, la réduction du taux protéique de l'aliment de 10 % permet de réduire de quasiment 20 % les rejets d'azote et d'ammoniac chez le poulet de chair (Van Cauwenberghe et Burnham, 2001). La diminution des rejets d'azote total, d'azote dans les litières et d'azote ammoniacal dans l'air peut être modélisée. Le modèle néerlandais réalisé pour la Commission Européenne (ERM/ABDLO, 1999) donne des résultats en accord avec les essais, avec une baisse des rejets d'azote dans les litières pour 10 % de réduction de la protéine alimentaire, de 14 %, 15 %, 15 % et 19 % respectivement pour la poule pondeuse, le canard, le dindon et le poulet. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE L'intérêt environnemental des formules à taux protéiques réduits est connu et décrit. Faire ingérer moins d'azote permet de diminuer les rejets d'azote total et, dans les mêmes proportions, les rejets d'azote dans les litières et d'ammoniac dans l'air. - IV- Les acides aminés industriels permettent d'adapter le profil en acides aminés de l'aliment au besoin de l'animal pour les plus limitants tels que la lysine, la méthionine et la thréonine, ce qui permet un moindre recours aux sources de protéines sans affecter les performances zootechniques. Ces formules supplémentées et à taux protéiques réduits ont des intérêts multiples : réduction des rejets d'azote, amélioration de l'état sanitaire avec une influence sur la qualité des litières et de l'ambiance. - CORPEN 2006 L'alimentation des animaux doit apporter la juste quantité de nutriments permettant d'optimiser les performances tout en limitant les excès. Dans le cas de l'azote, les animaux utilisent les acides aminés constitutifs des protéines alimentaires (essentiellement végétales) pour synthétiser leurs propres protéines (animales). Cependant, les profils en acides aminés de ces protéines diffèrent, ce qui conduit à apporter une quantité importante de protéines alimentaires pour sécuriser l'apport en acides aminés potentiellement les plus limitants, quitte à apporter les autres acides aminés en excès. Cet azote superflu ne sera pas utilisé par l'animal et sera rejeté. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE En production bovine, Smits et al. (1995) ont montré qu’il existe une relation linéaire entre l’azote de la ration et les émissions d’ammoniac. Les recommandations alimentaires ont été revues à la baisse et le rapport entre les protéines digestibles dans l’intestin peut passer de 110 grammes par unité fourragère à 90 PDI/UFL sans affecter la production. Les rejets peuvent être réduits de 15 % environ et l’émission d’ammoniac par les pissats également. Le développement de l’utilisation des acides aminés industriels actuellement disponibles (lysine, méthionine, thréonine et tryptophane) apparaît comme un levier important d’abaissement des (1) La composition de l’aliment est adapté à l’âge et/ou l’état physiologique de l’animal : par exemple : aliment démarrage, puis croissance et enfin finition, mais le nombre d’aliments peut aller jusqu’à 6 dans le cas de la dinde. 55 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- 56 Le tableau ci-dessous présente différentes pratiques alimentaires susceptibles de réduire les émissions de NH3, N2O, CH4 et leurs conséquences économiques pour l’exploitant. Mesures d’atténuation possibles Alimentation MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE taux de protéines des aliments et par conséquent des rejets d’azote par l’animal. D'autres acides aminés sont en cours de développement et permettront à terme de faciliter une réduction encore plus poussée des taux protéiques des aliments et des rejets. Pour tous les animaux Diminuer les apports en azote strictement au niveau des recommandations alimentaires par stade physiologique Pour les volailles spécifiquement Acides aminés Pour les porcs spécifiquement Ajuster les teneurs en protéines du régime au stade physiologique, adopter les aliments dits biphases ou triphases Acides aminés Pour les bovins spécifiquement Allonger la saison de pâturage Augmenter la surface en herbe Choisir des fourrages riches en sucres solubles pour diminuer les rejets azotés, combiner graminées et légumineuses Augmenter les légumineu ses prairiales Apporter simultanément azote et sucres solubles Apporter les concentrés énergétiques pour compenser une pâture trop riche en azote Favoriser la digestion intestinale (extrusion des acides aminés) A performances zootechniques égales, effet sur NH3 N 2O CH4 Coût ↓ ↓ ↓ = ↓ ↓ =1 ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↑ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ = ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ = = ↓ ↓ ↓ ↑ Tableau 15 - Méthodes d’atténuation des émissions via les modalités d’alimentation (Institut de l’élevage, ITAVI, ITCF, ITP, 2001) 2 - Changement des éléments du système de production 1 - Le mode de logement et sa gestion Dans les bâtiments d’élevage, les déjections animales réparties sur les aires de circulation des animaux sont en contact permanent avec l’atmosphère. Les échanges gazeux et notamment d’ammoniac avec l’air ambiant dépendent d’un nombre de critères importants (alimentation, mode de logement, ventilation, température,...) qui conditionnent les possibilités de réduction des émissions. La conception des sols dans un bâtiment englobe un nombre conséquent de paramètres : les matériaux (substrat carboné de type paille ou sciure, béton, plastique, acier,…), l’organisation des sols en terme de rapport espace plein/espace vide dans le cas des caillebotis et dans certains cas, le type de ventilation associée et la surface par animal. Ces deux derniers paramètres feront l’objet de paragraphes indépendants. 1.1- La conception des sols, réduction de la surface par animal, évacuation rapide des déjections hors bâtiment B En production porcine, l’incidence de la conception des sols sur les émissions gazeuses a été étudiée du point de vue des matériaux ainsi que de la répartition de la surface en caillebotis par case. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE La vidange des préfosses en cours d’engraissement se révèle être une piste intéressante de réduction des émissions d’ammoniac par les porcheries. En effet, l’évacuation des lisiers par simple gravité vers la fosse de stockage extérieure, réalisée tous les 15 jours, permettrait de réduire l’émission d’ammoniac d’environ 20 % (Guingand, 2000). Cependant, cette intervention nécessite de prévoir une capacité de stockage en fosses extérieures supérieure qui, de plus, devrait être couverte pour limiter les émissions d’ammoniac durant le stockage. - IV- Influence de la surface en caillebotis : L’incidence de la surface en caillebotis a fait l’objet de nombreuses études aux Pays-Bas. En comparaison avec une salle sur caillebotis intégral béton, l’émission d’ammoniac est réduite de 30 % avec une diminution de 50 % de la surface en caillebotis. De même, le taux de réduction atteint 40 % quand seulement 25 % de la surface de la case est en caillebotis (Aarninck et al., 1997). Dans les conditions d’études néerlandaises, l’influence de la surface en caillebotis (et donc directement de la surface de la préfosse puisque dans les systèmes néerlandais étudiés, celle-ci ne couvre que la surface en caillebotis, c’est à dire, selon les systèmes, entre la moitié et le quart de la surface de la case) serait donc importante sur la réduction de la volatilisation d’ammoniac. Cependant, des études réalisées en France, basées sur la réduction de la surface en caillebotis en engraissement, n’aboutissent pas au même résultat. En effet, avec une réduction de 50 % de la surface en caillebotis, l’émission d’ammoniac est augmentée de 30 % (Guingand & Granier, 2001 – Guingand, 2003). Ces différences de résultats entre les études découlent des différences de mode de gestion de l’ambiance et de conception des salles. - CORPEN 2006 Influence des matériaux : Le choix des matériaux peut participer à la réduction de l’émission d’ammoniac par les porcheries. Si on considère, comme base de référence, l’émission d’ammoniac avec du caillebotis béton classique (lattes de 10 cm de large espacées de 2 cm), le caillebotis fonte (lattes de 2.5 cm espacées de 1.5 cm) et le caillebotis fil triangulaire métallique (lattes de 1 cm espacées de 1 cm) permettent de réduire respectivement de 15 et 27 % l’émission d’ammoniac par les bâtiments (Aarninck et al., 1995). LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Quelle que soit la production, l'objectif est de limiter le temps et/ou la surface d'échanges entre les rejets des animaux et l'air ambiant pour réduire au maximum la volatilisation d'ammoniac. B En production bovine les études pratiquées en bâtiment vaches laitières mettent en évidence un effet déterminant du facteur surface souillée par les rejets des animaux sur la volatilisation. En système lisier comme en système fumier, toute augmentation de surface se traduit par une volatilisation supérieure (Dollé & Capdeville, 1998). 57 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE De nombreuses études ont été menées à l’étranger en vue d’étudier les moyens de réduire les émissions en agissant sur la conception des sols. 58 Des travaux ont porté sur la recherche d’une évacuation rapide des urines par la réalisation de couloirs en « V » avec une pente de 3 % vers une rigole centrale dirigée vers la fosse de stockage. Ce principe, qui permet une réduction de 50 à 70 % des émissions, ne s’est pas développé du fait des problèmes de glissance à l’origine de nombreuses chutes des animaux. L’influence du type de sol a également été étudiée, notamment en remplaçant des caillebotis béton par des caillebotis acier. Les concepteurs ont renoncé à cette solution étant donné les nombreuses boiteries causées par ce type de sol. Parallèlement, l’application d’une résine époxy sur sol plein et sol caillebotis pour obtenir un sol lisse et une évacuation rapide des urines a été testée par Groenestein (1993). Cette technique, associée à un raclage fréquent, (Oosthoek et al., 1990), permet une réduction de la volatilisation pouvant atteindre 30 % (Groenestein,1993). Néanmoins, cette technique reste dangereuse pour les animaux : sur ces surfaces lisses, le risque de voir les animaux glisser et se blesser gravement est important. B En production avicole, la production d’ammoniac provenant d’une nouvelle bande sur de la litière nouvelle sera lente dans un premier temps, mais après approximativement 20 jours le pH augmente, facilitant le développement d’une des principales bactéries uricolitiques (Bacillus pasteurii) et donc la production d’ammoniac. La volatilisation de l’ammoniac provenant de la litière est aussi liée au taux d’humidité de la litière. Une faible teneur en humidité réduit l’activité microbienne produisant l’ammoniac, ainsi qu’une forte teneur en humidité diminue la production d’ammoniac à cause des conditions anaérobies. Maintenir un taux d’humidité de la litière à 30 % a été suggéré comme un moyen de contrôle de l’ammoniac. Il était fréquent d’obtenir des litières à 80 % de MS en poulets et 65 % en dindes, mais l’arrêt de l’utilisation des farines animales depuis la fin de l’année 2000 a généré des changements importants dans les formulations alimentaires, avec pour conséquence une diminution du taux de MS des fientes et donc des fumiers. Par ailleurs, pour une même quantité de litière, on a pu observer que la teneur en ammoniac était plus élevée dans les bâtiments avec un sol cimenté ou imperméable que dans ceux avec un sol en terre battue : il a été mis en évidence une relation très nette entre les taux de matières sèches des litières, leurs températures et leurs émissions d’ammoniac. Cela est dû au fait qu’avec une litière relativement épaisse, il se produit un phénomène de condensation au niveau de la dalle en béton et donc une humidification excessive de la litière, ce qui conduit à des fermentations et donc à une production d’ammoniac. Le problème est résolu en diminuant la quantité de litière sur sol bétonné (par exemple 800 g de litière/m² au lieu de 5 kg sur sol en terre battue), sous réserve toutefois d’une bonne ventilation de surface de la litière. En élevage de canards, la pratique ancienne consistait à laisser stagner les rejets des animaux sous les caillebotis pendant toute la durée de la bande. Certains bâtiments sont pourvus d’une légère pente, permettant un écoulement gravitaire permanent du lisier vers une fosse de stockage extérieure, améliorant ainsi la qualité de l’ambiance dont la teneur en ammoniac. De plus en plus de bâtiments sont équipés de racleurs permettant l’évacuation quotidienne des fientes. La ventilation est un facteur important de variation des émissions d’ammoniac. Cependant, c’est la gestion de l’ambiance dans le bâtiment qui prime pour la santé de l’éleveur et des animaux. C’est en fonction d’eux que se fixent les limites basses de ventilation pour éviter des concentrations en dioxyde de carbone et l'ammoniac. B En production porcine, il existe deux grandes catégories d'extraction : l'extraction basse avec ou sans cheminée et l'extraction haute ou dite dans la masse. Il existe peu de références sur l'influence de ces types d'extraction sur l'émission d'ammoniac. Massabie et al. (1999) ont montré qu’à débit faible, il n'y avait pas de différence alors qu'à débit élevé, l'émission d'ammoniac était plus faible avec l'extraction basse par rapport à l'extraction haute. La dépression créée dans les salles permet l'extraction de l'air ambiant par des ventilateurs. 1.3 - Le flushing ou chasse d’eau Le principe du flushing est de réduire la durée de séjour des rejets des animaux sur les sols (sur des surfaces souillées en contact avec l’air ambiant) en les évacuant de façon régulière par un effet dit de "chasse d'eau". Il existe différentes formes d'évacuation mais toutes nécessitent un process de séparation de phase : la phase liquide permettant l'évacuation par "chasse d'eau". B En production porcine, différents systèmes ont été étudiés principalement par les équipes néerlandaises de Hoeksma et al. (1992) et Oosthoek et al. (1990) : flushing avec rétention d'environ 10 cm de liquide sous les animaux, réseau de drains avec ouverture régulière au cours de la journée, sol de préfosse en pente pour évacuation directe des urines. Le flushing doit s'effectuer entre 4 et 6 fois par jour. Pour chacun de ces systèmes, le liquide de recirculation est obtenu suite à un enchaînement de trois traitements successifs : séparation de phase, aération de la phase liquide et sédimentation. Ce traitement de la phase liquide est indispensable pour obtenir un abattement de l'émission d'ammoniac par le bâtiment qui peut varier entre 40 et 70 % selon MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE B En production bovine, les travaux conduits sur les bâtiments vaches laitières à ventilation naturelle (Dollé &Capdeville, 1998 ; Dollé, 2000) ont mis en évidence que toute augmentation du débit d’air se traduisait par une augmentation des émissions. Le débit d’air étant lié aux conditions climatiques, il est difficile d’intervenir sur ce facteur, sans compter qu’une réduction du débit porterait préjudice aux conditions d’ambiance du bâtiment et à la santé des animaux. - IV- La ventilation va permettre le renouvellement de l’air et donc l’évacuation de l’humidité ambiante, permettant ainsi à la litière de rester sèche. Cependant, les mouvements d’air sont susceptibles d’avoir une influence sur le confort des animaux en agissant sur les échanges thermiques entre le sol, l’air et l’animal et peuvent être à l’origine de diarrhées chez les jeunes avec pour conséquence directe une humidification de la litière et donc création de conditions favorables aux dégagements d’ammoniac. - CORPEN 2006 B En production avicole, un lot de 22 000 poulets standards (soit un bâtiment de 1 000 m² avec 22 poulets/m²) produit environ 44 tonnes de fientes à 25 % de MS (ce qui correspond à 33 tonnes d’eau) et rejette près de 40 tonnes d’eau par le phénomène de la respiration. Ces importantes quantités d’eau sont à évacuer du bâtiment, d’où l’importance de la maîtrise de l’ambiance à l’intérieur de celui-ci. En effet, une mauvaise gestion de l’ambiance aboutira à une humidification importante de la litière avec des conséquences au niveau du confort des animaux et de la production d’ammoniac. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 1.2 - La ventilation 59 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE les systèmes. Cependant, il ne faut pas négliger la perte d'ammoniac par volatilisation pendant la phase d'aération du processus d'obtention du liquide de recirculation. En l'absence de traitement de la phase liquide, la recirculation de la fraction liquide du lisier aurait tendance à augmenter la concentration en ammoniac dans l'ambiance, du fait de la mise en contact de l'urée présente dans l'urine avec l'enzyme uréase présente dans les fèces. 60 B En production bovine, les premiers travaux se sont attachés à comparer l’efficacité du flushing avec utilisation d’eau seule en variant la pression, le volume et la périodicité. Avec un volume d’eau de 110 litres par vache laitière et par jour, l’efficacité est très variable, comprise entre 0 et 17 % de réduction des émissions. Ogink & Kroodsma (1996) trouvent une réduction de 14 % avec utilisation de 20 litres d’eau par vache laitière et par jour et flushing toutes les deux heures. Le flushing devient plus efficace lors de l’ajout d’acide. Ogink & Kroodsma (1996) démontrent que 4 g de formaldéhyde mélangé à de l’eau assurent une réduction de 50 % des émissions. Ces procédés qui résolvent partiellement les émissions d’ammoniac sont consommateurs d’eau en quantité importante. De telles techniques vont à l’encontre des orientations prises dans le cadre de la lutte contre la pollution de l’eau où l’on vise à concentrer les rejets des animaux en vue d’une meilleure maîtrise. De plus, une dilution des rejets se traduit par une augmentation forte du coût de gestion lié au stockage et à l’épandage. Cette technique est aujourd’hui en développement en bâtiment pour vaches laitières grâce au traitement partiel et au recyclage de l’eau de salle de traite. 2 - L’utilisation d’additifs Depuis quelques années, un certain nombre d'additifs est apparu sur le marché. Quelle que soit la forme de présentation (à incorporer dans l'aliment, à épandre sur le caillebotis ou sur litière, en poudre ou en granulés) et le mode d'action, ces additifs sont censés réduire les odeurs et l'ammoniac. L'objectif principal de ces produits est de réduire les odeurs d'élevage. Malheureusement, une confusion s'opère entre les nuisances olfactives et l'ammoniac. L'ammoniac participe aux odeurs émises par les bâtiments d'élevage mais la destruction totale de l'ammoniac émis n'induit pas systématiquement la disparition des émissions d’odeurs. Il serait souhaitable de définir plus clairement les caractéristiques de ces produits, leurs conditions d’utilisation ainsi que le niveau d’efficacité attendu sur les odeurs et/ou l’ammoniac. Cette voie de réduction des émissions d’ammoniac séduit particulièrement les éleveurs de par sa facilité de mise en œuvre et son coût très faible par rapport à des techniques de traitement de l’air, comme le lavage par exemple. B En production porcine, de nombreux produits sont proposés (plus de 80 selon un recensement réalisé par l’ITP) aux éleveurs tant pour une application au niveau du bâtiment, que des unités de stockage extérieures et à l’épandage. Au niveau du bâtiment, certains produits ont fait l’objet d’études en conditions d’élevages et/ou expérimentales. (Guingand et al., 2004 – Guingand et al., 2005) et montrent des résultats plus ou moins contrastés en terme d’efficacité vis-à-vis de l’ammoniac. Dans l’étude de Guingand et al., (2005), l’incorporation d’acide benzoïque à raison de 1% dans l’alimentation des porcs charcutiers a permis une réduction de 25 % de l’émission d’ammoniac par porc charcutier au niveau des bâtiments. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE B En production bovine, comme en production porcine, de nombreux produits sont proposés aux éleveurs pour une application sur litière ou dans les lisiers. L’objectif en utilisation sur litière accumulée est d’assécher le fumier, de réduire les nuisances olfactives et d’éviter le développement de bactéries compromettantes pour la qualité bactériologique du lait. En lisier, l’emploi de ces produits vise également à réduire les émissions d’ammoniac et à fluidifier le lisier stocké pour en faciliter son homogénéisation. Toutefois, si les objectifs de ces produits sont bien connus, leur efficacité est beaucoup plus incertaine. En effet, peu d’études ont été menées sur le sujet. B En production avicole, l’approche est identique à celle pratiquée dans les filières bovine ou porcine et les additifs proposés sont très souvent les mêmes, avec les mêmes réserves quant à leur efficacité. Le superphosphate et l’acide phosphorique ont été étudiés comme inhibiteur de la croissance microbienne. Ces produits présentent l’avantage d’être peu chers et facilement disponibles. Le superphosphate est le produit le plus utilisé dans les élevages. Il a une action asséchante sur la litière. L’utilisation bihebdomadaire aux doses de 100 à 200 g/m2 s’avère intéressante. Ce produit ne demeure actif que pendant une période d’environ 5 jours. L’acide phosphorique a la capacité de réduire la production d’ammoniac d’un facteur de quatre par son action acidifiante. La chaux est également utilisée ; elle a un effet bactéricide et bloque, par son pH de 9 à 11, les fermentations dans la litière. - CORPEN 2006 3 - Le traitement de l’air extrait - IV- Traiter l’air à la sortie de la ventilation peut permettre de réduire l’émission d’ammoniac dans l’atmosphère. Cependant, cette approche ne peut s’envisager sans la mise en place d’une extraction centralisée de la ventilation de l’ensemble du bâtiment d’élevage, ce qui n’est appliqué à ce jour que dans le cas des bâtiments d’élevage de porcs. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Le lavage d'air par voie humide (cf photo n°1) Le lavage d’air est une technique reconnue par les experts de l’IPPC comme une voie de réduction des émissions d’ammoniac. Dans le cadre de la déclaration des émissions polluantes, la mise en œuvre de cette technique permet de réduire la quantité d’ammoniac déclarée comme émise par les bâtiments d’engraissement et/ou l’ensemble de l’élevage selon le type d’installation. Le taux d’abattement reconnu par Source : IFIP Le principe est simple : transférer le ou les composés à éliminer de la phase gazeuse vers une phase liquide. Cette filière est principalement intéressante dans le cas de composés solubles dans l'eau comme c'est le cas de l'ammoniac. L'air à traiter passe donc au travers d'un "rideau d'eau" qui effectue son lavage. Des contacteurs gaz-liquide (colonnes à bulles, tours vides ou atomiseurs, maillage....) sont utilisés pour effectuer le lavage des gaz ou de l'air extrait d'un bâtiment. Un vésiculeur est installé en haut de la colonne de traitement pour empêcher l'air à traiter d'entraîner les gouttes les plus fines. photo n°1 - Dispositif de lavage d’air par voie humide 61 62 Cette voie de traitement est en développement au niveau de la production porcine du fait de son efficacité vis-à-vis des odeurs principalement. Elle nécessite cependant des aménagements conséquents au niveau de la gestion de la ventilation (centralisation de l’extraction) et représente un investissement important, dépendant du volume d’air à traiter. Le principe de base est assez proche de celui du lavage d’air. Des rampes de brumisation sont installées à l’intérieur des salles et diffusent de très fines gouttelettes qui vont favoriser la sédimentation des poussières et la solubilisation de cerphoto n°2 - Dispositif de brumisation tains composés gazeux. Cette technique est déjà présente depuis quelques années dans les élevages porcins dans un objectif de refroidissement de l’ambiance en période chaude. En effet, l’exposition des animaux à des températures élevées provoque une dégradation notable des performances de croissance et de reproduction. Cette technique permet de réduire la température ambiante de 2,5°C en moyenne lorsque la température extérieure est supérieure à 25°C sans que cela ne se solde par une baisse des performances zootechniques, ni par une détérioration de la santé des animaux (Dutertre et al., 1998). Son application environnementale a fait l’objet de peu d’études. L’IFIP en collaboration avec la Chambre Régionale d’Agriculture des Pays de la Loire ont mis en œuvre un programme d’études sur cette filière de traitement de l’air. Source : IFIP La brumisation (cf photo n°2) Du fait de son double rôle (refroidissement et réduction des odeurs) et des moindres investissements et transformations des bâtiments par rapport au lavage d’air par exemple, la brumisation séduit de plus en plus d’éleveurs de porcs qui optent pour cette filière de traitement de l’air. Il faut cependant émettre quelques réserves quant à son utilisation en période froide. La biofiltration (cf photo n°3) Dans un biofiltre, le passage de l’effluent gazeux est forcé au travers d’un matériau de remplissage au sein duquel des populations microbiennes propres au matériau ou exogènes (ensemencement) sont immobilisées et se développent pour traiter les composés volatils présents dans l’air à traiter. photo n°3 - Dispositif de biofiltration Les matériaux couramment employés sont la tourbe, les écorces, le compost (à partir de déchets végétaux, d'écorces). On assiste souvent à une utilisation mixte de tourbe et d'écorces mais aussi de déchets végétaux (feuilles, branches). Ce mélange permet d'assurer d'une part une bonne distribution de l'air en Source : IFIP LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE le groupe d’experts de l’IPPC est de 70% pour l’ammoniac (IPPC, 2003). Cependant, une étude récente menée par l’ITP sur un laveur commercial met en évidence des abattements pouvant atteindre 50 % avec une restriction d’efficacité liée à la vitesse d’air (Guingand, 2005). La mise en place d'un biofiltre à la sortie d'une porcherie d'engraissement permet de réduire de l'ordre de 70 à 85 % la quantité d'ammoniac émis (Biofiltre à base de tourbe et de bruyère : Scholtens et Demmers, 1990 - Biofiltre à base de tourbe et d'écorces de pin : Guingand et Granier, 1996). Cependant, malgré une bonne efficacité du système un certain nombre d'inconvénients justifie le peu de biofiltres mis en place sur le terrain. La gestion de l'humidité du substrat est le premier frein à une bonne efficacité du biofiltre. De plus, la surface de biofiltre nécessaire est un deuxième facteur limitant : entre 0.2 et 0.3 m2/porc. Malgré l'efficacité du système, ces inconvénients majeurs (gestion de l'humidité du substrat, surface importante) ne permettent pas de recommander l'utilisation de la biofiltration en élevage porcin. Le charbon actif Bio filtration de l’air Diminuer le temps de séjour des déjections dans les bâtiments Logement Diminuer le temps de stockage en fosse caillebotis Existant sous les animaux (température) Diminuer la surface par animal strictement au niveau des recommandations par animal Augmenter la fréquence de raclage Pailler (ou autre carbone) les aires raclées pour absorber l’urine - =si épandage inclus - Bussink et Oenema 1998 Augmenter le paillage des litières accumulées (1) Augmenter la profondeur des fosses sous Logements caillebotis (2) à Nettoyer les aires à racler par chasse d’eau construire Diminuer la surface des caillebotis Installer un racleur automatique pour augmenter la fréquence de raclage NH3 ↓ ↓ Effet sur N 2O CH4 ? ? ? ? Coût ↑ ? ↓? ↓? ↓ ↓ ↓ =si ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓? = ↑ ↑ ↓ ↑ ↑ ? = = = MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Mesures d’atténuation possibles - IV- Le tableau ci-dessous présente différentes modalités d’aménagement des bâtiments susceptibles de réduire les émissions de NH3, N2O, CH4 et leurs conséquences économiques pour l’exploitant. - CORPEN 2006 Le traitement de l’air par charbon actif repose sur le phénomène d’adsorption de composés gazeux sur un substrat présentant une très forte porosité. Son application en production porcine est très limitée du fait de la concentration importante en poussières dans l’air extrait induisant un phénomène de colmatage du substrat très rapide. Dans l'étude réalisée par l'Institut Technique du Porc sur le traitement de l'air par charbon actif, l'air était filtré et le taux d'abattement d'ammoniac était supérieur à 90 % (Guingand & Granier, 1996). Malgré la filtration, une cartouche de charbon d'un mètre cube a été nécessaire pour le traitement de deux bandes de 40 porcs charcutiers, du fait de la présence importante de poussières dans l’air extrait des porcheries. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE évitant les passages préférentiels et la création de zones anaérobies, d’autre part une humidité relative homogène du substrat. L'humidification du matériau de remplissage est vitale à l'activité biologique du filtre (humidité comprise entre 40 et 60 %). (1) 1 à 1,2 kg de paille/m² sur litière accumulée est une limite sanitaire à ne pas dépasser pour éviter l’apparition de mammites. (2) Attention aux problèmes techniques au-delà de 2m de profondeur. Tableau 16 - Méthodes d’atténuation des émissions dans le bâtiment 63 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- 64 Dans le cas d'une fosse de stockage extérieure non couverte, les engrais de ferme sont en contact permanent avec l'atmosphère. Ils sont alors soumis aux conditions climatiques (température, précipitations, vent) ce qui favorise les échanges gazeux à l'interface entre le lisier et l’atmosphère. 1 - La couverture des fosses (cf photo n°4) Le principe même de la couverture des fosses de stockage extérieur est de limiter le contact entre le lisier et l'atmosphère. En agissant ainsi, le phénomène de volatilisation d'ammoniac est en partie maîtrisé. La mise en place d'une couverture, quel que soit le matériau, permet la création d'une zone tampon. En réduisant la volatilisation photo n°4 - Système de couverture de fosse d'ammoniac pendant le stockage, on limite la perte en azote du lisier. Après stockage couvert, on obtiendra donc un lisier plus riche en valeur azotée d'environ 20 à 30 %. De plus, la couverture des fosses extérieures présente deux autres avantages considérables : A la réduction de la dilution du lisier stocké par les eaux de pluies. Ceci permet de limiter le volume de lisier à transporter et donc le temps et le coût liés au chantier d'épandage, A la réduction des odeurs émises pendant le stockage (50 à 100 %). En effet, la couverture agit aussi sur les autres composants volatils présents dans le lisier par son action tampon entre le lisier et l'atmosphère. B En production porcine, la mise en place d'une couverture sur fosse de stockage extérieur de lisier de porcs permettrait la réduction du taux d'émission d'ammoniac de 70 à 90 %. Cette technique semble intéressante, non seulement du point de vue de la réduction de l'émission d'ammoniac dans l'atmosphère, mais surtout pour la réduction des nuisances olfactives qui peuvent être émises par le stockage du lisier en fosse extérieure. B En production bovine, les émissions qui se produisent lors du stockage représentent une très faible part du total des émissions produites depuis le bâtiment jusqu’à l’épandage et ne justifient pas la construction d’une couverture sur la fosse. La croûte naturelle qui se forme sur le lisier suffit pour limiter les émissions lors du stockage en fosse. B En production avicole, compte-tenu du mode de gestion des déjections, seules les productions de canards sont concernées par l’éventualité d’une couverture de fosse. (IFIP) MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE 3 - Gestion des déjections au stockage Dans le cas du gavage des canards, la tendance observée à l’heure actuelle est à l’utilisation de fosse circulaires en béton avec une couverture en chapiteau. 2 - L’acidification de l’engrais de ferme Le pH conditionne la présence d’ions ammonium NH4+ dans le lisier. Lorsque le pH est inférieur à 9,25, la forme azotée prédominante dans le lisier est le NH4+. Les pertes en azote sous forme NH3 sont alors limitées. L’acidification des lisiers revêt alors un intérêt pour limiter la volatilisation de l’ammoniac. Le tableau ci-dessous présente différentes modalités relatives au stockage des lisiers susceptibles de réduire les émissions de NH3, N2O, CH4 et leurs conséquences économiques pour l’exploitant. N 2O Effet sur CH4 Coût ↑ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↑ ↓ ↑ ? ? ? ↓ ↓ ↓ ↑ ? ↑ ↓ ↓ ↓ ↑ ↑ MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Diluer les lisiers avec les eaux de nettoyage Diminuer la surface d’échange Stockage déjection /l’air existant Diminuer le vent sur les déjections - épandre les liquides a vant la hauteur de garde 1 - couvrir la fumière et la barder Stockage Entretenir une croûte naturelle existant nécessite que les apports de lisiers ou à frais se fassent sous la croûte consruire Constituer une croûte de paille Constituer une croûte de copeaux ou de tourbe Acidifier le lisier (irréaliste pour bétons et sols) Couvrir avec de l’huile Stockage Construire une couverture rigide à Construire une couverture flexible construire Diminuer la surface des fosses et augmenter la profondeur (de Bode, 1991, Sommer, 1992) NH3 ↓ - IV- Mesures d’atténuation possibles - CORPEN 2006 En production bovine, plusieurs acides ont été utilisés pour réduire les émissions d’ammoniac au niveau du stockage et de l’épandage. La diminution du pH autour de 5 permet de réduire les émissions de 25 à 50 % (Klarenbeek & Bruins, 1987, Frost et al., 1990). Cependant, face à cette solution se posent des problèmes de fond tels que l’application de ces lisiers acidifiés sur les sols ainsi que les coûts inhérents à l’utilisation de ces acides. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE En production de canards à rôtir, pour des raisons de coûts, les fosses de stockage en géo-membranes se sont développées. Or, compte tenu de la surface de ces fosses, leur couverture est difficile ou alors à un coût prohibitif. C’est pourquoi, à de rares exceptions, ces fosses ne sont pas couvertes. = (1) correspond à une hauteur d’atténuation des émissions lors du stockage Tableau 17 - Méthodes d’atténuation des émissions lors du stockage 65 Le tableau ci-dessous présente différentes modalités de traitement des déjections susceptibles de réduire les émissions de gaz, et leurs conséquences économiques pour l’exploitant. Mesures d’atténuation possibles Séparer les fractions liquides et solides des déjections Traitement Composter les fumiers des Composter les lisiers avec un support carboné fumiers Attention les effets dépendent des valeurs au stockage initiales en NH3, C/N, MS (Amon et al., 1998) Tasser le fumier, augmenter la compacité (Sommer et al., 1998) Traitement des Refroidissement (pour mémoire) lisiers Digestion a naérobie au stockage Dénitrifier les lisiers (aérobie anaérobie) NH3 ↓ Effet sur N 2O CH4 ↓ = ↑ ↑ ↓ ↓ ↓ ↓ ↑ ↑ ↓ ↓ ↓ ↑ ↓ Coût ↑ = ↑ ↑ Tableau 18 - Méthodes potentielles d’atténuation des émissions lors du traitement LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE 4 - Traitements 66 5 - Techniques d’épandage 1 - Epandage des engrais de ferme L’efficacité comparée de ces matériels est présentée au graphique suivant (figure 9). Il est possible d’épandre le lisier avec un matériel de type rampe ajouté à la tonne et muni d’un broyeur répartiteur qui limite les pertes à l’épandage (épandage en ligne, pendillards). Le plus efficace est l’enfouisseur-injecteur très profond mais il demande un effort de traction important. Cependant l’abattement est réel seulement si la dose épandue est faible. Elle ne doit pas dépasser le volume de terre déplacé dans le cas d’un injecteur. Par ailleurs, il faut noter que l’abattement d’ammoniac a comme conséquence une augmentation de N2O émis par énergie fossile. La moins efficace mais la plus polyvalente est la rampe à pendillards pour épandage en ligne. Avec ce matériel, la dose maximum de 20 m3doit être respectée également. En effet, les pertes d’ammoniac doublent lorsque la dose épandue passe de 20 à 35 m3. indice 100 épandage en plein épandage en ligne injecteurs à soc abattement 90 % abattement de 50 à 70 % dépôt surface : épandage avec sabots abattement de 50 à 90 % sol lisier - CORPEN 2006 injecteurs à disques LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - Figure 9 Efficacité comparée de rampes d’épandage pour lisier - IV- Les dispositifs pour les produits liquides Il existe actuellement différents dispositifs permettant l’amélioration des performances d’épandage de produits liquides quant à la volatilisation et aux odeurs ; il s’agit des rampes d’épandage et des enfouisseurs/injecteurs de lisier. Il existe également des techniques permettant d’optimiser l’épandage de produits liquides avec des dispositifs classiques (buse/palette) ; il s’agit alors d’enfouir le lisier aussitôt après épandage. B 1 - Le dispositif dit buse-palette La palette éclate le jet de lisier sortant de la buse, favorisant ainsi la formation de fines gouttelettes sensibles au vent et de fait à la volatilisation. Ce phénomène de volatilisation est aggravé du fait d’une couverture de la totalité de la surface du sol ou de la végétation par le lisier. C’est la technique d’épandage de lisier qui génère le plus de volatilisation. Il existe cependant des solutions permettant de diminuer sensiblement cette volatilisation de produits azotés. L’une des solutions consiste à diluer le lisier épandu. Mais si l’on considère que le temps de transport représente souvent plus de la moitié du temps d’un chantier, cette solution trouve vite ses limites. Une deuxième solution consiste à n’épandre que par temps couvert avec une pluie fine et un vent quasi nul. Une troisième solution consiste à enfouir le lisier dans les minutes ou l’heure qui suit son épandage. Cette solution n’est applicable que sur un sol nu labouré ou sur un sol en chaumes et elle entraîne des contraintes supplémentaires au niveau d’un chantier d’épandage. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Les pistes de réduction des émissions d’ammoniac au champ pour les engrais de ferme sont respectivement la dose apportée, la période d’apport et le matériel. Seule sera détaillée ci après l’influence du matériel. 67 68 Cette pratique permet l’épandage de lisiers très liquides et ne nécessite pas forcément la présence d’une citerne. En effet, le pompage peut s’effectuer directement de la fosse de stockage. L’épandage au canon entraîne l’oxygénation du lisier et la formation de fines gouttelettes très sensibles au vent. Mais le fait d’épandre un lisier dilué entraîne la réduction de la volatilisation au sol grâce à une meilleure pénétration du produit. Il est donc conseillé d’utiliser cette technique uniquement quand la vitesse des vents est quasiment nulle, par temps couvert ou avec une pluie très fine. B 3 - Le dispositif d’épandage par tuyauterie et rampe d’épandage Cette technique permet l’épandage sur culture avec l’avantage de ne pas causer de dégâts sur la végétation du fait qu’aucun train d’essieux de tracteur ou de tonne à lisier ne roule sur la parcelle. Sur maïs par exemple, cette pratique permet de déposer le lisier aux pieds des plantes et de favoriser ainsi sa valorisation immédiate. Cette valorisation par la plante est d’autant plus importante que le lisier est dilué. Ainsi, il s’infiltre plus facilement dans le sol, limitant l’effet de l’atmosphère (soleil et vent surtout) sur la volatilisation de l’azote. B 4 - Le dispositif de rampe d’épandage Le lisier refoulé par la vanne de sortie arrive dans une unité centrale ou répartiteur. Il existe deux types d’unité centrale de distribution. La première, simple, redistribue le lisier dans un cylindre rigide alimentant les différentes sorties de la rampe à l’aide de tuyauterie souple. La deuxième (dite répartiteur-hacheur ou répartiteur-dilacérateur) est rotative ce qui permet l’épandage de lisier légèrement plus épais. 4.1. Les rampes avec sorties buses-palettes (cf photo n°5) La descente du lisier vers les sorties se fait par gravité dans la plupart des cas. En effet, la pression de refoulement du liquide à la sortie des buses est pratiquement nulle avec un recouvrement de toute la surface réceptrice (sol nu et couvert végétal). Cela favorise l’action du soleil et du vent provoquant ainsi une plus forte volatilisation des composés azotés. Fédération des CUMA des Deux-Sèvres LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE B 2 - Le dispositif d’épandage par tuyauterie photo n°5 - Rampe d’épandage à buses L’enfouissement/injection de lisier reste actuellement la solution la plus efficace au regard des problèmes de volatilisation et d’odeurs. Toutefois, il nécessite une plus grande puissance de traction. Cette opération peut se faire sur sol nu, sur chaumes ou sur prairies. Il existe trois catégories d’enfouisseurs/injecteurs distinctes : les enfouisseurs pour sols cultivés, les enfouisseurs pour prairies et les enfouisseurs polyvalents, qu’on appelle également mixtes ou tout terrain. 5.1. Les enfouisseurs pour sols cultivés A Les enfouisseurs à disques (cf photo n° 7) Le lisier est épandu en surface et enfoui plus ou moins selon les réglages et la vitesse d’avancement par des disques recouvreurs. Cette technique d’enfouissement réduit le contact lisier/atmosphère assurant de ce fait une réduction sensible de la volatilisation. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE B 5 - Les dispositifs d’enfouissement de lisier - IV- photo n°6 - Rampe d’épandage à pendillards - CORPEN 2006 Société SAMSON Ce dispositif permet une nette diminution des émissions des particules polluantes et odorantes, du fait d’un dépôt du lisier au ras du sol. Les tuyaux traînent par terre déposant le lisier aux pieds des plantes avec une pression pratiquement nulle en sortie des tuyaux. Le lisier ainsi déposé en ligne, ne couvre pas l’ensemble de la parcelle, ce qui permet de réduire l’interface lisier atmosphère et donc l’effet du vent et du soleil sur la volatilisation des composés azotés et autres composants responsables des mauvaises odeurs du lisier. La réduction d’émissions d’ammoniac peut ainsi atteindre plus de 55 %. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE 4.2. Les rampes avec répartiteur-hacheur et pendillards (cf photo n°6) 69 ENTRAID’ A Les enfouisseurs à dents ou à socs (cf photo n°8) L’enfouissement du lisier se fait en profondeur (12 à 18 cm) ; le lisier est totalement enfoui. Le contact lisier/atmosphère est donc pratiquement nul et la réduction d’émissions d’ammoniac varie de 95 à 100 %. 70 Société JOSKIN LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE photo n° 7 - Enfouisseur à disques photo n° 8 - Enfouisseur à socs 5.2. Les enfouisseurs pour prairies (cf photo n° 9) Un disque étroit ou en V coupe le tapis végétal et l’écarte permettant l’injection du lisier dans la saignée ainsi formée (5 à 8 cm de profondeur). La plus grande partie du lisier injecté est valorisée directement par la plante et le contact lisier/atmosphère est réduit considérablement. De ce fait, la réduction de la volatilisation d’ammoniac est comprise entre 75 et 98 %. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE ENTRAID’ Société PICHON - IV- Ils sont conçus pour travailler sur sols cultivés et sur prairies. Ils sont toutefois plus adaptés aux cultures qu’aux prairies car ils peuvent occasionner des dégats sur le mat racinaire si l’épandage est suivi d’une période sèche. Ces enfouisseurs sont équipés généralement de disques de grand diamètre et l’injection de lisier se fait en profondeur (jusqu’à 10 à 15 cm). Aussi, la réduction de la volatilisation de l’ammoniac est très significative. - CORPEN 2006 5.3. Les enfouisseurs polyvalents (cf photo n° 10) LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE photo n° 9 - Enfouisseur pour prairies Certains injecteurs sont équipés d’un patin tranchant. Il s’agit d’écarter le sol et de déposer le lisier dans la saignée à faible profondeur (0 à 5 cm). Ce dispositif peut trouver ses limites dans le cas d’une parcelle en pente ou avec du lisier très liquide (risques de ruissellement) : il est donc recommandé d’épandre dans le sens des courbes de niveaux. La plus grande partie du lisier est déposée dans la saignée, mais une légère partie reste tout de même aérienne. La dose épandue ne doit pas dépasser 20 m3/ha. Malgré cela et du fait de la localisation des bandes de lisier, la réduction de la volatilisation d’ammoniac est très significative et varie entre 82 et 95 %. photo n° 10 - Enfouisseur polyvalent 71 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE B 6 - Dispositifs de localisation à sabots ou à patins 72 Souvent confondus avec les injecteurs ou les enfouisseurs, ces dispositifs sont souvent utilisés pour l’épandage sur prairies. Il s’agit de soulever le couvert végétal à l’aide du sabot ou du patin et de déposer le lisier au ras du sol, au niveau des racines, de façon à ne pas souiller l’herbe et à rendre l’utilisation du lisier par les plantes plus facile. Ce dispositif permet de réduire la volatilisation de l’ammoniac de 54 à 80%, par la réduction de l’effet du vent et du soleil sur le lisier. L’épandage de produits solides L’épandage de fumier doit obéir à certaines règles de bonne conduite afin de réduire la volatilisation de l’azote ammoniacal. Pour rendre possible sa valorisation par les cultures, le fumier doit être incorporé dans les heures suivant son épandage. Cette incorporation ne peut être envisagée que dans le cas d’épandage sur sol nu ou sur sol en chaumes : elle est impossible sur prairies. Toutefois, les épandages sur prairies étant conseillés à l’automne, les niveaux de volatilisation sont moindres. Plusieurs outils de travail du sol peuvent être utilisés pour réussir les travaux d’incorporation de fumier dans le sol : outils à dents comme le chisel ou outils à disques comme les cover crop. Dans les deux cas, il est recommandé de rouler vite afin de projeter la terre et de mieux la mélanger au fumier. L’utilisation des charrues est également possible pour l’enfouissement de fumier. Conclusions Les pertes d’azote sous sa forme ammoniacale sont inévitables et sont fonction des conditions météorologiques pendant et immédiatement après l’épandage, du type et de la composition de l’engrais de ferme, de l’état du sol pour le lisier et du matériel utilisé pour réaliser l’opération d’épandage. La réduction des émissions d’ammoniac oscille entre 25 et 95 %, sachant que plus de 60 % du total des émissions se produisent le premier jour après épandage, d’où l’intérêt d’incorporer ces produits dans les toutes premières heures après l’épandage. Afin de réduire les pertes d’ammoniac à l’épandage, quelques règles de bases sont à rappeler : 1. Eviter le temps chaud et sec et attendre plutôt un jour de basse pression pour effectuer l’opération d’épandage. Si ceci est impossible, il est conseillé d’épandre en fin d’après midi, le soir, avant ou pendant une pluie fine ce qui aurait pour conséquence l’infiltration de l’azote dans le sol. Attention dans ce dernier cas aux risques de lessivage, de ruissellement et à la destruction de la structure du sol sur le passage des roues de l’ensemble tracteur/matériel d’épandage. 2. Tenir compte de l’état du sol. Le lisier doit pouvoir s’infiltrer rapidement. Il est conseillé d’éviter l’épandage de lisier sur des sols compactés ou desséchés. De même, il est conseillé d’éviter l’épandage de fumier sur sols collants ou très détrempés. 3. Un lisier liquide a plus de chance de pénétrer rapidement dans le sol, ce qui a pour effet de limiter l’effet du soleil et du vent sur la volatilisation de l’ammoniac. Il est 4. Utiliser des techniques et des matériels d’épandage adaptés : A pour le fumier, l’incorporation dans les heures qui suivent l’épandage est recommandée afin de réduire sensiblement la volatilisation de l’ammoniac, A pour le lisier, l’utilisation d’un dispositif rampe à pendillards ou d’un dispositif d’enfouissement/injection semble apporter les meilleurs résultats. Il s’agit donc de localiser, à pression nulle, le lisier au sol ou aux pieds des plantes, ce qui limite la surface de contact lisier/atmosphère et réduit de ce fait la volatilisation de l’ammoniac. Dans les deux cas, il est indispensable de connaître les quantités épandues à l’hectare et d’introduire ces quantités dans le plan de fumure des parcelles. 2 - Epandage d’engrais azotés minéraux Choix du type d’engrais azoté minéral Les engrais azotés minéraux diffèrent en premier lieu par leur composition (tableau 19). L’ammonitrate contient par exemple une proportion équivalente d’azote ammoniacal et nitrique. En revanche, la solution azotée est composée pour moitié d’azote uréique. Types d’engrais azoté minéral Ammonitrate Etats physiques Solide Teneurs en N (%) Sulfate d’ammoniaque Solide 21,0 0 100 Nitrate de calcium Solide 15.0 100 0 0 Urée Solide 46.0 0 0 100 Liquide 30,0 25 25 50 Gaz liquéfié 80.0 0 100 0 Solutions azotées Ammoniac anhydre 20 - 27 ou 33 - 34,5 Formes d’azote (% en poids du N total) Nitrique Ammoniacal Uréique 50 50 0 0 MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE B choix du type d’engrais minéral, B positionnement de l’engrais minéral par rapport à la surface du sol, B choix de la date d’épandage par rapport aux conditions climatiques et aux besoins du peuplement végétal. - IV- Les techniques susceptibles de limiter les émissions d’ammoniac au moment de l’épandage des engrais azotés minéraux peuvent être classées en trois catégories : - CORPEN 2006 Les émissions d’ammoniac à partir des engrais azotés minéraux se produisent soit à partir des ions ammonium contenus dans certains engrais azotés minéraux (ammonitrate, solutions azotées, sulfate d’ammoniaque, ammoniac anhydre), soit à partir de l’urée qu’ils contiennent [CO (NH2)2] (urée agricole, solutions azotées) après hydrolyse de celle-ci en carbonate d’ammonium [(NH4)2 CO3]. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE donc conseillé de trouver le meilleur compromis entre dilution du lisier et performances/coûts de chantier d’épandage. Tableau 19 - Composition de quelques engrais azotés minéraux simples 73 L’état physique de l’engrais conditionne sa capacité à se volatiliser : il a été fréquemment noté que les pertes par volatilisation sont plus élevées pour les engrais liquides (solution azotée) ou gazeux (ammoniac anhydre) en l’absence d’enfouissement, que pour les engrais solides (ammonitrate, engrais composés NPK, NP, NK). En effet, la volatilisation de l’ammonium des engrais azotés solides suppose que le sol soit humide (pluie antérieure ou postérieure à l’apport). En conditions de sol sec et d’hygrométrie faible, il faut attendre plusieurs jours pour obtenir la dissolution complète de granulés d’urée, l’hydrolyse de l’urée en ions ammonium et leur volatilisation sous forme d’ammoniac. Cet avantage est contrebalancé par le fait qu’il peut se produire une élévation considérable du pH aux points de contact entre granulés et sol, créant des conditions favorables à la volatilisation. En outre, la forme liquide s’applique sous forme de jets (jets tri-filets), d’où une surface accrue de contact entre l’air et le produit azoté. Enfin, à quantités égales d’azote ammoniacal, la forme la moins concernée par les pertes est l’ammonitrate, les formes les plus affectées étant l’urée et les solutions azotées. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Diverses comparaisons expérimentales entre formes d’azote ont été réalisées sur blé. Elles ont montré que l’ammonium et l’urée sont rapidement transformés en azote ammoniacal, lequel peut être directement soumis au processus de pertes par volatilisation parallèlement à la nitrification. En revanche, le nitrate constitue la forme la mieux utilisée par la culture. Ceci résulte de l’absence de pertes par volatilisation et d’une migration plus rapide de l’azote dans le profil se traduisant par une meilleure absorption par le système racinaire : toutefois, cette forme est sujette à d’autres pertes (dénitrification et lixiviation). 74 Positionnement de l’engrais azoté minéral par rapport à la surface du sol L’incorporation d’une partie ou de la totalité de l’engrais azoté minéral dans les premiers centimètres est une technique souvent préconisée pour réduire la volatilisation d’ammoniac. L’engrais incorporé est en effet placé dans un milieu plus humide, à l’abri du vent et au contact direct des colloïdes du sol (argiles, ...) et des racines. Dans le cas des cultures d’hiver (blé tendre, colza, ...) ou des cultures de printemps précoces (orge, colza, lin, ...), les apports d’engrais azotés minéraux se font généralement sur culture en place, en fin d’hiver ou en début de printemps. L’incorporation est, le plus souvent impossible, sauf lorsque l’apport d’engrais azoté minéral peut être suivi par un passage effectué avec une herse étrille. Pour les cultures de printemps tardives (betteraves, maïs, tournesol, sorgho, ...), l’engrais azoté minéral est apporté soit avant le semis, soit entre le semis et la levée, soit entre la levée et un stade qui permet encore le passage de tracteurs dans les interlignes. Avant le semis, la volatilisation d’ammoniac peut être limitée considérablement en appliquant le produit sur un sol finement émietté en surface (par exemple par un passage de rouleau lisse) et en effectuant un hersage immédiatement après l’application. Il existe des applicateurs montés sur des semoirs réalisant un enfouissement des engrais minéraux au semis (betterave, maïs, …). Entre le semis et la levée, l’engrais azoté minéral peut être incorporé par un passage de herse écroûteuse. Après la levée (par exemple au stade 7-8 feuilles du maïs), la localisation de l’engrais azoté minéral au milieu de l’interligne constitue la meilleure solution pour réduire les pertes d’azote par volatilisation d’ammoniac. L’autre solution consiste à réaliser l’épandage d’engrais azoté minéral juste avant un binage. Choix de la date d’épandage par rapport aux conditions climatiques La pluviométrie naturelle ou artificielle agit sur la volatilisation d’ammoniac : A soit par action instantanée : les pertes par volatilisation varient fortement, en plus ou en moins, avec l’intensité des pluies ou de l’irrigation après l’épandage de l’engrais azoté minéral ; A soit par action diffuse : l’action d’une averse ou d’un arrosage perdure pendant plusieurs jours, par dilution et infiltration d’une partie de l’ammonium déposé en surface vers les horizons superficiels du sol. Fox & Hoffman (1981) montrent par ailleurs que la quantité d’ammoniac volatilisé dépend fortement de la pluie et d’une irrigation égale ou supérieure à 10 mm dans les 2 jours suivant l’épandage des engrais azotés pour que la volatilisation d’ammoniac devienne très faible (tableau 20). 3à5 7à9 5 5 10 à 30 0 6 plus de 30 Tableau 20 - Influence de l’intensité et du délai d’un épisode pluvieux survenant après un épandage d’urée sur les pertes par volatilisation d’ammoniac. (Fox & Hoffman, 1981) L’absence de vent : L’application de la solution azotée doit être réalisée par temps calme, à la fois de façon à réduire le risque de volatilisation et pour obtenir une régularité transversale d’application de la dose. Cette précaution s’applique aussi à l’épandage des engrais solides granulés par les appareils centrifuges, particulièrement dans les grandes largeurs de travail de plus de 24m. La température de l’air : De préférence, l’application de la solution azotée ou l’épandage d’engrais uréique et ammoniacaux doit être réalisé par temps frais en évitant les températures élevées qui favorisent la volatilisation. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Volatilisation de NH3 (% en poids du N total) peu de pertes moins de 10 - IV- Nombre de jours après apport (j) 2 3 - CORPEN 2006 Pluviométrie (mm) 10 10 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE L’enfouissement de l’ammoniac anhydre est obligatoire et nécessite un matériel d’injection homologué et régulièrement contrôlé. 75 Conclusions Pratique culturale Recommandation Choix de la forme d’engrais azoté B A chaque fois que cela est possible, préférer la forme nitrique aux formes uréiques ou ammoniacale. Positionnement de l’engrais B Apports avant ou au semis (ou à la plantation ) ou dans l’inter-rang : à chaque fois que cela est possible, enfouir les engrais ammoniacaux ou uréiques par une façon superficielle ou avec un matériel de localisation. L'enfouissement de l'ammoniac anhydre avec un matériel homologué est obligatoire. B Apports de couverture : à chaque fois que cela est possible, faire coïncider les apports d’engrais avec des périodes à forte vitesse de croissance. (Sur céréales d’hiver ceci concerne en particulier les apports courant tallage et début montaison. P our les apports de fin montaison, éviter l’emploi de solution azotée). LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Le tableau 21 résume les recommandations pour limiter les émissions d’ammoniac lors de l’épandage d’engrais azotés minéraux, épandage qui doit être déterminé avant tout par les besoins des cultures et leur stade physiologique. 76 Conditions d’apport BA chaque fois que cela est possible, épandre les engrais sur un sol humide en surface, pendant ou avant un épisode pluvieux (voire une irrigation, e n veillant à limiter la pluviométrie horaire pour ne pas provoquer des excès d’eau en surface, favorables à la dénitrification). B Eviter d’épandre en conditions ventées et par fortes températures. Tableau 21 - Synthèse des recommandations pour limiter les émissions d’ammoniac lors de l’épandage des engrais azotés minéraux Autres pertes gazeuses en N2O et NO : Cette source plus diffuse de perte gazeuse à partir du sol sous forme de NO ou de N2O résulte des processus biologiques de nitrification- dénitrification qui peuvent être stimulés par l’apport d’engrais azotés minéraux. L’apport sur un sol bien ressuyé et à une période qui minimise les risques ultérieurs d’excès d’eau contribue à limiter le risque de conditions dénitrifiantes. Le choix de la date d’apport doit par ailleurs permettre une utilisation rapide de l’azote apporté par un couvert végétal en croissance. Le fractionnement en plusieurs apports, quand il est possible en cours de culture, contribue également à réduire le risque de ces pertes. Ce document est la mise à jour de la brochure CORPEN de juin 2001 intitulée « les émissions d’ammoniac d’origine agricole dans l’atmosphère ». A l’époque du premier document, l’objectif assigné au groupe de travail était, dans un premier temps, d’évaluer l’impact des retombées atmosphériques d’azote sur le sol et les milieux aquatiques ; dans un second temps, de prendre en compte la volatilisation dans la gestion de l’azote à l’exploitation, dans le souci de limiter les pertes de fertilisants et d’éviter les transferts de polluants vers le « compartiment eau ». Avec cette nouvelle version, le CORPEN a souhaité prendre en compte les évolutions du contexte international qui ont des conséquence sur la gestion de l’azote. A côté de développements « encyclopédiques » sur le cycle de l’azote et les modalités d’inventaire des différentes sources d’émission, le document présente une typologie complète des techniques de gestion et de transformation de l’azote à la ferme, accompagnée des différentes possibilités d’atténuation d’émissions gazeuses tout au long de l’enchaînement des manipulations de produits azotés. Ce document se présente ainsi comme l’indispensable complément du « Document de référence sur les meilleures techniques disponibles pour l’élevage intensif de volailles et de porcs » élaboré par la Commission Européenne en Juillet 2003 au titre de la directive 96/61/CE sur la prévention et la réduction intégrée de la pollution. En effet, en se limitant aux élevages industriels de volailles et de porcs, ce « BREF » (Best available REFerence document) ne prend pas en compte les élevages bovins. MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Ce nouveau document tente donc de dresser un état des lieux exhaustif des connaissances sur les gaz azotés ayant un effet sur notre environnement, afin d’en dégager des orientations et des recommandations pouvant être utiles aux techniciens et aux instances décisionnelles. - IV- En application du Programme de Lutte contre le Changement Climatique et la prise en compte des Gaz à Effet de Serre, la problématique s’est élargie à l’ensemble des gaz azotés d’origine agricole, notamment au protoxyde d’azote (N2O) qui est un puissant gaz à effet de serre (l’agriculture est à l’origine de 76 % des émissions de N2O en France). - CORPEN 2006 En application de la directive européenne 2001/81/CE du 23 octobre 2001, la France a élaboré un Programme National de Réduction des Emissions de Polluants Atmosphériques, dont l’ammoniac fait partie. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE CONCLUSION 77 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 -IV- MÉTHODES POUR LIMITER LES ÉMISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE PROTOXYDE D ’ AZOTE Exploitants, techniciens et décideurs trouveront ainsi les différents leviers sur lesquels il est possible d’agir pour réduire les émissions de gaz azotés en agriculture, avec plus ou moins de pertinence en fonction du contexte local. 78 Insistons sur le fait qu’il ne s’agit pas de bannir l’azote des pratiques agricoles mais de lui conserver au maximum son action fertilisante tout en minimisant ses impacts négatifs vis à vis de la santé et du climat. Mais le document pointe aussi les lacunes qui existent dans nos connaissances sur les gaz à effet de serre. On le voit au déséquilibre de traitement entre les parties dédiées à l’ammoniac et les parties traitant du protoxyde d’azote. On le voit aussi à l’absence de prise en compte du compostage. Cette technique est fort prisée car elle permet « d’abattre » le taux d’azote dans le substrat final. Mais que devient l’azote « abattu » ? Par ailleurs, pour des raisons de cohérence thématique, le méthane n’est pas traité dans ce document (CH4 est l’autre grand GES d’origine agricole : l’agriculture est à l’origine de 69% des émissions de CH4 en France). L’enjeu que représente le changement climatique mérite que tout soit mis en œuvre pour combler ces lacunes et obtenir les données manquantes, nécessaires à une gestion optimale des flux de matières et d’énergie en agriculture, du point de vue de leurs impacts environnementaux. Aarnink A.J.A., Keen A., Metz J.H.M., Speelman L., Verstegen M.W.A. (1995) Ammonia Emission Patterns during the Growing Periods of Pigs Housed on Partially Slatted Floors. Journal of Agricultural Engineering Research, 62, (2), 105-116. Aarnink A.J.A., Swierstra D., Van den Berg A.J., Speelman L. 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ANNEXE 1 Le contexte réglementaire CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr Engagements de la France concernant les émissions d’ammoniac Les émissions d’ammoniac dans l’atmosphère sont dans leur quasi-totalité (98% en 2002) issues de l’agriculture (80 % des émissions d’origine agricole proviennent de la gestion des déjections animales). Ce schéma français bien que fortement accentué par la large présence de l’agriculture, reste dans le même ordre de grandeur dans de nombreux pays. Responsable de l’eutrophisation des milieux aquatiques, de l’acidification des pluies par formation d’acide nitrique dans l’atmosphère, il est apparu nécessaire d’en réglementer le niveau d’émission. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - ANEXXE 1 1 - La convention de Genève (UNECE / LRTAP) 90 La Convention des Nations Unies sur la pollution transfrontière à longue distance (connue sous le nom de Convention de Genève ou UNECE / LRTAP pour Long Range Transboundary Air Pollution) a été signée le 13 novembre 1979 et est entrée en vigueur en 1983. Elle regroupe actuellement 49 Parties, avec pour objectif général de lutter contre les risques d’eutrophisation, d’acidification et de pollution photochimique (formation d’ozone troposphérique) dus aux activités humaines. Le nombre de composés visés par cette convention a progressivement été élargi pour inclure d'autres polluants dont les métaux lourds et les polluants organiques persistants (POP) dont le caractère polluant est amplement avéré. Dans le cadre de cette Convention plusieurs protocoles ont été adoptés pour fixer des objectifs concrets (les objectifs cités sont ceux de la France) : - EMEP (European Monitoring and Evaluation Programme – 1984). Rôle : Mise en place du système de surveillance des émissions. - Premier protocole soufre (1985). Objectif : réduction de 60 % des émissions de dioxyde de soufre entre 1980 et 1993. - Protocole NOx (1989). Objectif : réduction de 30 % des émissions d’oxydes d’azote entre 1980 et 1998. - Protocole COV (1997). Objectif : réduction de 30 % des émissions de composés organiques volatils non méthanique entre 1988 et 1999. - Deuxième protocole soufre (1994). Objectif : établissement de plafonds d'émissions : 2000 (868 kt), 2005 (770 kt) et 2010 (737 kt). - Protocole POP (1998). Objectif : ramener les émissions de dioxines, de HAP (polluants aromatiques polycycliques) et de HCB (Hexachlorobenzène) à leur niveau de 1990. - Protocole Métaux Lourds (1998). Objectif : ramener les émissions de cadmium, de mercure et de plomb à leur niveau de 1990. - Protocole de Göteborg (1999). Objectif : réduire les émissions de quatre polluants (SO2, NOx, COVNM et NH3) en fixant des plafonds d’émission pour 2010 : SO2 400 kt, NOx 860 kt, COVNM 1100 kt, NH3 780 kt. L’ammoniac fait en quelque sorte figure de mauvais élève parmi les polluants de l’UNECE / LRTAP, d’une part, en raison de sa réglementation tardive : le premier protocole concernant l’ammoniac date de 1999, 20 ans après la signature de la convention, alors que le soufre à la même date est 2 - Le protocole de Göteborg Dernier né des protocoles de la convention, le protocole de Göteborg est aussi connu sous le nom "Multi-polluants, multi-effets". Il couvre en effet la pollution atmosphérique de façon plus large que ses prédécesseurs. En plus de l’ammoniac, il réglemente les émissions d'oxydes de soufre, les oxydes d’azotes et les composés organiques volatils non méthanique d’origine anthropique. Ces polluants sont impliqués dans les phénomènes d’eutrophisation (NH3, NOx), d’acidification (SOx, NOx, NH3) et de pollution photochimique (COVNM, NOx), d'où l'appellation multi-effet. - ANEXXE 1 La France s’est ainsi engagée à respecter un seuil de 780 kt/an d'ammoniac à l’horizon 2010. L'effort de réduction induit est particulièrement faible et traduit en partie la difficulté d’intervenir sur un polluant pour lequel le processus d’émissions n’est pas facilement maîtrisable (par oppositions aux polluants émis par l’industrie ou les transports). Pour les autres gaz, les engagements pris au niveau français sont nettement plus marqués puisque les réductions entre 1990 et 2010 correspondant aux plafonds souscrits sont d'au moins 50 % (à la date de signature). Les ordres de grandeurs sont identiques sur le plan européen sauf pour l’ammoniac où une réduction de 15 % est envisagée. Alors que pour le SO2, les NOx et les COVNM, les efforts engagés ont orienté les niveaux d'émission dans la voie du respect des engagements, la quasi stabilité requise au niveau français pour l’ammoniac, n’en reste pas moins une gageure sans une évolution des pratiques agricoles. Devant les demandes alimentaires croissantes, les autorités françaises tablent en effet sur une augmentation de 10 % des émissions d’ammoniac en 2010 par rapport à leur niveau en 1990 (cf. rapport OPTINEC, CITEPA 2001, basé pour l'agriculture sur le modèle MAGALI du MINEFI). - CORPEN 2006 Il établit pour chaque Etat signataire des plafonds d’émission pour chacun de ces gaz en s’appuyant sur le principe de charges critiques, c'est-à-dire des quantités de dépôts de polluants que peuvent tolérer les écosystèmes naturels. Ces plafonds sont déterminés à l’aide du modèle d'émissions RAINS développé par un institut européen, l’IIASA (International Institute for Applied Systems Analysis). Suivant les conditions naturelles et les niveaux d’émissions actuels de chacun des Etats, des efforts d’intensité variable suivant les pays et les polluants ont donc été décidés. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE traité par trois protocoles. D’autre part, les niveaux de réduction visés pour l’ammoniac sont peu ambitieux au regard de ce qui est fait pour les autres polluants (cf. section suivante) et vis-à-vis des efforts consentis pour ce polluant par les autres pays signataires. 3 - La directive NEC La France se voit imposée par l’adoption de la directive 2001/81/CE encore appelée directive NEC (National Emission Ceilings) d'appliquer des plafonds nationaux d’émissions pour les quatre polluants atmosphériques réglementés par le protocole de Göteborg. La directive NEC impose des plafonds à l'horizon 2010 plus contraignant que ceux adoptés à Göteborg ... sauf pour le NH3 dans le cas de la France : SO2 375 kt, NOx 810 kt, NH3 780 kt et COVNM 1050 kt. La directive NEC spécifie un certain nombre de moyens à mettre en ouvre comme par exemple, l’élaboration d’un programme de réduction progressive des émissions nationales des polluants. De même, les Etats membres, dont la France doivent établir et mettre à jour, chaque année, des inventaires nationaux des émissions par polluant. 91 4 - La déclaration des émissions d’ammoniac par les ICPE soumises à autorisation Depuis 2004, certaines ICPE soumises à autorisation doivent déclarer annuellement leurs émissions de polluants en accord avec l’arrêté du 24 décembre 2002 (publié au JORF du 07 mars 2003). Parmi les ICPE concernées, on trouve : - les élevages de porcs (de plus de 2 000 emplacements de porcs de plus de 30 kg ou 750 emplacements de truies) ; - les élevages de volailles (de plus de 40 000 emplacements). Pour les élevages de porcs et de volailles, cette déclaration annuelle ne porte que sur l’émission d’ammoniac générée par l’installation. Cette déclaration doit être envoyée aux Services Vétérinaires de chaque département avant le 01 avril de chaque année. Bien que le texte stipule une application dès 2003, cette déclaration annuelle n’est effective que depuis cette année. Un guide d’évaluation des émissions est fourni avec la déclaration en vue d’aider les éleveurs à calculer l’émission annuelle d’ammoniac en fonction des caractéristiques de leurs élevages. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - ANEXXE 1 Cet arrêté a pour objectif, entre autres, d’alimenter le registre européen des émissions polluantes (EPER) sur les émissions d’ammoniac liées à l’agriculture. 92 5 - Le programme national de réduction des émissions de polluants atmosphérique Approuvé par l’arrêté du 08 juillet 2003 (JORF du 30 octobre 2003), le programme national de réduction des émissions de polluants atmosphériques a été établi en application de la directive NEC (directive 2001/81/CE) fixant les plafonds nationaux d’émissions et les moyens à mettre en ouvre. Ce programme comporte quatre annexes dont l’annexe D dédiée à l’ammoniac. Du fait de la contribution de l’élevage à l’émission d’ammoniac au niveau national, l’annexe D est orientée de manière quasi-exclusive vers la gestion des déjections animales. Les principaux points abordés sont : - La nécessité de généraliser la mise en place d’alimentation multiphase permettant d’adapter les apports en protéines aux besoins des animaux. - La mise en place de couvertures de fosses, d’aération de fosse ou de traitement biologique par aération - La réduction de l’emploi des engrais à fort taux de volatilisation (comme l’urée et les solutions azotées) - Le développement favorisé de l’utilisation par les agriculteurs de dispositifs d’injecteurs-enfouisseurs pour épandre le lisier. Les émissions de protoxyde d’azote (N2O) proviennent pour majeure partie du secteur agricole (76 % en 2002). Ce gaz à effet de serre, dont le pouvoir de réchauffement est 310 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone (CO2), est principalement émis lors du stockage et suite à l’épandage des déjections ou d’engrais minéraux suivant un processus bactériochimique de nitrification/dénitrification. Bien que les émissions de l’agriculture aient globalement diminué sur la période 1990-2002 en raison d’une réduction du cheptel bovin principalement, la part de ce secteur dans les émissions totales ne cessent de croître du fait des efforts de réduction consentis et réalisés par les industriels principalement (dans un contexte de réduction générale de 20 % des émissions nationales de N2O, l'industries chimique par exemple a diminué de 60 % ses émissions de N2O depuis 1990 alors que les émissions agricoles n'ont baissé que de 7 % sur cette même période). - ANEXXE 1 La Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (connu sous l’appellation UNFCCC ou Convention Climat) a été adoptée le 9 mai 1992 à New York. Ratifiée depuis par 188 pays, cette convention est entrée en vigueur le 21 mars 1994. - CORPEN 2006 1 - La Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Engagements de la France concernant les émissions de protoxyde d’azote Son objectif est de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Elle n’impose cependant pas aux pays qui y adhèrent de seuils d’émissions. De façon à rendre compte aux Nations Unies des niveaux d’émissions et des éventuels progrès accomplis chaque Etat signataire doit fournir annuellement un inventaire d'émissions des six gaz à effet de serre direct non réglementés par le protocole de Montréal, à savoir : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), le protoxyde d’azote (N2O), les hydrofluorocarbures (HFC), les perfluorocarbures (PFC) et l’hexafluorure de soufre (SF6) auxquels s’ajoutent quatre gaz à effet de serre indirects (oxydes de soufre, oxydes d’azote, monoxyde de carbone et composés organiques volatils non méthanique). 1 - Le Protocole de Kyoto Partie intégrante de la Convention sur les changements climatiques, le Protocole de Kyoto a été ratifié le 31 mai 2002 par la France et l’Union européenne (UE). A l’échelle planétaire, cet accord vise à réduire de 5,2 % les émissions de gaz à effet de serre des pays cités en annexe I du Protocole sur la période 2008-2012 par rapport à leur niveau de 1990. L’UE s’est vue assigner un objectif de réduction de ses émissions de 8,0 %. Au sein de l'UE, l’effort de réduction a été reparti entre les Etats membres en fonction des efforts déjà accomplis par chacun et des niveaux de réduction nationale envisageables. La France, principalement en raison de sa politique énergétique fortement orientée vers le nucléaire (non émetteur de gaz à effet de serre), s’est vue attribuer un objectif de 93 stabilisation de ses émissions, alors que d’autres pays ont eu des exigences de réduction de 28%, comme le Luxembourg par exemple. Les gaz visés par le Protocole sont les six gaz à effet de serre direct couverts par la Convention. Contrairement aux autres accords de réduction, le Protocole de Kyoto ne vise pas à réduire un polluant en particulier. L’effort de réduction est à porter sur le panier des six gaz dans son ensemble, chaque gaz étant pondéré par son pouvoir de réchauffement global (PRG) (PRGCO2=1, PRGCH4=21, PRGN20=310, PRGHFC≈9000 (moyenne pondérée, variable suivant la composition), PRGPFC≈7000 (moyenne pondérée, variable suivant la composition), PRGSF6=23900). L’objectif français de stabilisation, bien que modeste en apparence, n’en est pas moins difficile à respecter, en raison de la demande accrue en énergie (transport et industrie) et en produits alimentaires (augmentation des cheptels, …). Pour satisfaire à son engagement et préparer un objectif à plus long terme de 75 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050 (1) , des actions sont à entreprendre. C’est dans cette optique que la France a élaboré en 2003 un Plan Climat qui s'inscrit dans le cadre du Plan National de Lutte contre le Changement Climatique (PNLCC) de 2000. A la date de rédaction de cet article, le Plan Climat n'a pas encore été publié, mais il est d'ores et déjà certain que plusieurs mesures concernent l'agriculture. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - ANEXXE 1 Pour entrer en vigueur, il est nécessaire qu’il soit ratifié par au moins 55 pays représentant 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 1990 des pays cités en annexe I (correspondant aux pays développés). A la date de rédaction de cet article, il a été ratifié par 120 Parties et représente 44,2 % des émissions des pays cités en annexe I. Depuis le retrait des Etats-Unis qui comptait pour 36,1 % des émissions, l'entrée en vigueur du protocole semble conditionnée par la ratification de la Russie qui pèse 17,4 % des émissions. Pour comparaison, la France représente 2,7 % des émissions des pays "Annexe I". 94 (1) Discours d'ouverture de la 20ème session plénière du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat, par Jean-Pierre Raffarin, février 2003. ANNEXE 2 Évolution et distribution des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote CORPEN Comité d’ORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de l’ENvironnement 20 avenue de Ségur - 75302 Paris 07sp Tél. 01 42 19 12 86 www.ecologie.gouv.fr Emissions de NH 3 dans l'air en France métropolitaine Gg 850 800 750 700 CITEPA – CORALIE/ SECTEN fev 2005 650 600 550 500 450 400 350 300 250 200 150 100 50 96 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 Industrie manufacturière Transport routier Résidentiel / tertiaire Autres transports Evolution sur 22 ans des émissions d’ammoniac dans l’air en France métropolitaine. Emissions de N 2O dans l'air en France métropolitaine Gg 300 275 250 225 200 175 150 125 100 75 50 25 Transformation énergie Agriculture/sylviculture Autres Industrie manufacturière Transport routier 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 0 1990 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE - CORPEN 2006 - ANEXXE 2 Transformation énergie Agriculture/sylviculture Autres 1992 1991 1990 1985 1983 1980 0 Résidentiel / tertiaire Autres transports Evolution sur 12 ans des émissions de protoxyde d’azote dans l’air en France. LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE NH3 - CORPEN 2006 - ANEXXE 2 Distribution des émissions d’ammoniac par département en France 97 98 LES ÉMISSIONS D’AMMONIAC ET DE GAZ AZOTÉS À EFFET DE SERRE EN AGRICULTURE Distribution des émissions de protoxyde d’azote par département en France - CORPEN 2006 - ANEXXE 2 POUR EN SAVOIR PLUS Site du CITEPA : http://www.citepa.org Site du GIEC : http://www.ipcc.ch Site de l'EMEP : http://www.emep.int Site de l'agence européenne pour l'environnement : http://www.eea.eu.int Site du CORPEN : http://www.ecologie.gouv.fr/ puis taper CORPEN dans le champ « Recherche »