2OO3 / 2OO4 - Théâtre de la Ville
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2OO3 / 2OO4 - Théâtre de la Ville
2OO3 / 2OO4 ph. J. Antonio Carrera Qu’est-ce que je serais heureux si j’étais heureux. Woody Allen Rodrigo García et la société de consommation, une « déflagration poétique (1)». vents favorables En guise de sommaire : théâtre – l’équilibre à bons ports 2002/2003 : 245 000 spectateurs, 94 % de fréquentation. Les bons comptes font, mais pas seulement, le théâtre public. La saison 2003/2004 débute le 20 septembre pour se terminer le 22 juin. 84 programmes – 31 créations – 399 représentations. « Celui qui ignore vers quel port il se dirige ne trouve jamais de vent favorable ». Sénèque Une politique au service des artistes et du public : • Priorité à la création, c’est une évidence – aux coproductions, c’est une volonté – à la découverte, c’est une recherche – aux parcours artistiques, c’est une démarche… • Diversité des genres et des courants, c’est cohérent – liberté en tous domaines, c’est vital. • Un théâtre parisien soutenu par sa mairie, à vocation nationale et internationale, la Ville est Capitale. « Nous ne faisons qu’assister à la plupart des spectacles qui nous sont offerts, tandis qu’il faudrait que le théâtre se jette sur les spectateurs à la manière d’une bête folle, sinon d’un véritable fauve […] » André Pieyre de Mandiargues (2) • Une ouverture rêvée avec l’intégrale du Soulier de satin de Paul Claudel, dans une mise en scène d’Olivier Py. Une « somme » (en intégrale ou en 2 jours) nécessaire par sa folie amoureuse, pour l’amour fou de la scène du monde et pour les fous de théâtre. « C’est autour de la mise en scène, considérée non comme le simple degré de réfraction d’un texte sur la scène, mais comme le point de départ de toute création théâtrale, que se constituera le langage type du théâtre. » Antonin Artaud(2) Le Théâtre de la Ville a contribué à les faire connaître : Yves Beaunesne, Omar Porras, Dan Jemmett, Emmanuel Demarcy-Mota, Laurent Laffargue… Au tour de Thierry de Peretti. Ces jeunes metteurs en scène sont souvent attirés par Shakespeare. • Thierry de Peretti a choisi Richard II, une tragédie sur le pouvoir. • Laurent Laffargue, Beaucoup de bruit pour rien, une comédie sur l’amour. Au Théâtre de la Ville, avec Claudel et Shakespeare, la langue est belle et la littérature dramatique au sommet. Aux Abbesses et “ hors les murs “ les auteurs contemporains prennent le pouvoir : • Deux Rodrigo García, auteur et metteur en scène : Jardinage humain et J’ai acheté une pelle en solde pour creuser ma propre tombe. Il regarde comment le monde autour de lui s’abîme. Et de toutes ses forces, de tout son talent, cherche à faire entendre sa peine et sa peur. Pour se faire entendre, il faut crier fort. Et même parfois trop. Il faut provoquer, dire et redire. Un théâtre politiquement incorrect. Trois auteurs à découvrir : • Les Relations de Claire de Dea Loher, mise en scène Michel Raskine. Le simple fait de vivre selon ses désirs, suffitil à se trouver, trouver son équilibre, définir un principe de liberté ? • Le Professionnel de Dusan Kovacevic, mise en scène Laurence Calame. Drame politique, pièce d’actualité mais aussi une comédie à l’écriture classiquement divertissante. • Ma vie de chandelle de Fabrice Melquiot, mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota. « Plus tout à fait au théâtre, plutôt dans la représentation théâtrale de ces jeux télévisés où il s’agit moins de gagner que de “ se donner en spectacle “. » • La Visite de la vieille dame de Friedrich Dürrenmatt, mise en scène Omar Porras. Un théâtre primitif, essentiel. • La Fin de Casanova de Marina Tsvetaïeva, mise en scène Anita Picchiarini. Une écriture superbe. • Trois créations musicales : Angélique Ionatos interprète Frida Khalo ; Philippe Meyer cherche L’Endroit du cœur ; Vicente Pradal fait chanter et danser Federico García Lorca. danse – l’histoire Un plateau de “choix” : 28 programmes, 19 créations, quelques reprises, 168 représentations. Merce Cunningham, Lucinda Childs, Mats Ek, Pina Bausch pour trois semaines, Anne Teresa De Keersmaeker pour trois programmes, Sidi Larbi Cherkaoui, déjà un grand, sur deux fronts, Alwin Nikolais de nouveau parmi nous, DV8 de retour après le congé sabbatique de Lloyd Newson, Emio Greco et Marie Chouinard, après leurs triomphes, Grace Ellen Barkey et Needcompany. musique – la fête De grands interprètes, ou en passe de le devenir, des fidélités, des programmes originaux librement choisis. En ouverture Bang on a can all-stars, Kronos Quartet, Café Zimmermann donnent le la. À signaler, le 20e anniversaire du Quatuor Ysaÿe, le retour du Beaux-Arts Trio, l’arrivée de Cecile Licad (piano), d’Annette Dasch (soprano), d’Alexeï Ogrintchouk (hautbois,) de Ferenc Vizi (piano) et du Quatuor Aviv… musiques du monde – l’écoute D’autres cultures musicales pour mieux comprendre le monde et résister à la mondialisation. Des maîtres, des représentants les plus éminents de ces musiques, la plupart recherchés et choisis sur place : Inde, Iran, Pakistan, Tadjikistan, Kazakhstan, Azerbaïdjan – Irak, Syrie, Algérie, Maroc – Chine, Japon – Hongrie, Portugal, mais aussi Bretagne, Corse… À signaler : Shujaat Husain Khan, Kayhan Kalhor, duo sitar et kamantché ; Debashish Bhattacharya et ses guitares ; Vadhya Lahari, violon, nadaswaram et saraswati veena ; le 20e anniversaire de l’ensemble Al-Kindi – un opéra en provenance de Chine… services publics Prix des places accessibles au plus grand nombre. Des formules d’abonnement simples aux multiples atouts. Un journal à domicile (4 ou 5 numéros). Un site www.theatredelaville-paris.com. Une information “juste” (textes et photos). Une équipe expérimentée et compétente. partenaires et acteurs Des partenaires de qualité : France Inter, France Culture, FIP, RFI, Radio Classique, Mondomix, Festival d’Automne, Théâtre de la Cité internationale, Théâtre de la Bastille. En choisissant des projets, en prenant le risque de la création, de spectateur vous devenez acteur de la vie culturelle. Applaudissements mérités aux relais, aux enseignants, aux abonnés individuels. l’engagement « Le secret d’être ennuyeux est de tout dire. » Voltaire Après le temps de la lecture et de la réflexion, celui de l’engagement : Rêvez votre saison ! Solos : Wim Vandekeybus, Akram Khan, Jan Fabre, Malavika Sarukkaï, Alarmel Valli. Les amis français : Josef Nadj dix jours avec Jean Babilée, Angelin Preljocaj deux semaines avec le groupe Air, François Verret au côté de Robert Musil, Régine Chopinot et son Ballet Atlantique, Francesca Lattuada pour Rita Quaglia, les chansons de Georges Appaix, la démarche exigeante de Daniel Dobbels, les propositions hardies de Xavier Le Roy et Brice Leroux. le directeur Gérard Violette (1) Jean Genet (2) In Jorge Lavelli de Dominique Nores et Colette Godard, Christian Bourgeois Editeur théâtre THEATRE AU THEATRE DE LA VILLE LE SOULIER DE SATIN Paul Claudel Olivier Py mise en scène création RICHARD II Shakespeare Thierry de Peretti création SPECT. MUSICAUX AUX ABBESSES ANGÉLIQUE IONATOS Alas pa’volar création PHILIPPE MEYER L’Endroit du cœur création ROMANCERO GITANO Federico García Lorca Vicente Pradal mise en scène BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN création Shakespeare Laurent Laffargue mise en scène THEATRE AUX ABBESSES LES RELATIONS DE CLAIRE Dea Loher création Michel Raskine mise en scène LE PROFESSIONNEL Dusan Kovacevic Laurence Calame THEATRE HORS LES MURS AU THEATRE DE LA CITE INTERNATIONALE JARDINAGE HUMAIN création Rodrigo García texte, mise en scène J’AI ACHETÉ UNE PELLE EN SOLDE POUR CREUSER MA PROPRE TOMBE création Rodrigo García texte, mise en scène création en France mise en scène MA VIE DE CHANDELLE Fabrice Melquiot création Emmanuel Demarcy-Mota LA VISITE DE LA VIEILLE DAME Friedrich Dürrenmatt Omar Porras mise en scène LA FIN DE CASANOVA Marina Tsvetaïeva Anita Picchiarini mise en scène danse DANSE AU THEATRE DE LA VILLE LUCINDA CHILDS BALLET DE L’OPERA NATIONAL DU RHIN Underwater - Dance DV8 PHYSICAL THEATRE LLOYD NEWSON The Cost of living JOSEF NADJ Il n’y a plus de firmament création DANSE AUX ABBESSES FRANÇOIS VERRET Chantier Musil création ALARMEL VALLI création bhârata natyam XAVIER LE ROY Projet création MERCE CUNNINGHAM création 2003 Fluid Canvas création Est-ce que ce qui est loin s’éloigne de l’être humain ? She never stumbles solo WIM VANDEKEYBUS SIDI LARBI CHERKAOUI ANGELIN PRELJOCAJ Near life experience DANIEL DOBBELS création MATS EK BALLET DE L’OPÉRA NATIONAL DE LYON It création solo AKRAM KHAN Ronin solo de kathak création BRICE LEROUX Solo for two Fluke création Gravitations RÉGINE CHOPINOT création GEORGES APPAIX création W.H.A (Warning Hazardous Area) « Non seulement … » ? ALWIN NIKOLAIS AKRAM KHAN RIRIE WOODBURY DANCE COMPANY Kaash MARIE CHOUINARD FRANCESCA LATTUADA Etude #1 - Chorale création ANNE TERESA DE KEERSMAEKER création Ostinato création reprise solo création MALAVIKA SARUKKAÏ bhârata natyam création Bitches Brew - Tacoma Narrows JAN FABRE SIDI LARBI CHERKAOUI Foi reprise Quando l’uomo principal e una donna solo création EMIO GRECO Rimasto Orfano création ANNE TERESA DE KEERSMAEKER JOLENTE DE KEERSMAEKER création 2004 création ANNE TERESA DE KEERSMAEKER Once solo AU THEATRE DE LA BASTILLE GRACE ELLEN BARKEY NEEDCOMPANY (And) reprise PINA BAUSCH création 2003 DANSE HORS LES MURS création création Le Soulier de satin création PAUL CLAUDEL OLIVIER PY DU 20 SEPTEMBRE AU 11 OCTOBRE mise en scène et lumières Olivier Py musique Stéphane Leach et Le Cantique de Jean Racine de Gabriel Fauré (Éditions Alphonse Leduc) scénographie et costumes Pierre-André Weitz assistant à la mise en scène Olivier Balazuc assistante aux costumes Nathalie Bègue réalisation des armures et sculptures Fabienne Killy production Centre dramatique national/Orléans-Loiret-Centre – Théâtre national de Strasbourg – Théâtre de la Ville, Paris. avec le soutien de la Fondation BNP PARIBAS, la région Centre, la SPEDIDAM et Agnès B. avec la participation artistique du Jeune Théâtre national. 4 La passion d’Olivier Py pour le théâtre de Claudel est profonde et ancienne, il en admire le lyrisme, la démesure, la puissance d’une pensée théologique, esthétique et politique. Mais au-delà de la beauté du verbe, c’est l’énergie dramatique et l’invention des jeux scéniques qui le conduisent irrésistiblement à monter Le Soulier de satin, somme et dénouement de tout le théâtre claudélien. C’est fort de son travail réalisé sur son œuvre, qu’il s’est senti suffisamment maître de son art pour porter à la scène cette épopée de près de dix heures. Dans un XVIe siècle rêvé, l’amour impossible de Prouhèze et Rodrigue qui tout au travers du monde se cherchent, s’appellent et ne se rejoignent jamais, offre la possibilité de représenter tous les pays et tous les peuples par toutes formes de théâtre possibles, poème lyrique, comédie moliéresque, farce à la Goldoni, pastiches chantés, nô, drame historique shakespearien, théâtre d’ombre, etc. C’est par l’utilisation du mélange des genres, par la fluidité de la scénographie, par l’engagement d’une distribution excellente (Jeanne Balibar et Philippe Girard en tête), par la pertinence et la beauté de la musique, que l’œuvre devient un grand objet de théâtre populaire. Le théâtre dans tous ses états, voilà ce qu’offre Le Soulier de satin mis en scène par Olivier Py qui, ainsi, entend rendre justice à Claudel, faire oublier l’image fausse du poète académique, bigot et ennuyeux, tout ce que Claudel lui-même – qui déclarait à qui voulait l’entendre, préférer être un poète comique plutôt que cosmique – tentait de contrecarrer. C’est toujours l’amoureux fou de Rimbaud, l’homme luttant pied à pied contre la folie qui a dévoré sa sœur, et l’intelligence pure et THEATRE DE LA VILLE • TARIF B ph. A. Fonteray avec Jeanne Balibar, Philippe Girard, Miloud Khétib, John Arnold, Olivier Balazuc, Damien Bigourdan, Nazim Boudjenah, Céline Chéenne, Sylviane Duparc, Guillaume Durieux, Michel Fau, Mireille Herbstmeyer, Stéphane Leach, Sylvie Magand, Christophe Maltot, Elizabeth Mazev, Jean-François Perrier, Alexandra Scicluna, Bruno Sermonne, Pierre-André Weitz, Anna Killy en alternance avec Margot van Hove, et Olivier Py libre, qui font l’immortalité de ce poète adoré et haï. C’est avec joie qu’on découvrira une telle verve comique, un tel sens du trivial, et des propositions dramatiques aussi folles, clowneries, chansons, mots d’esprit… Mais toutes les facéties que sollicitent les didascalies et la parole ne sont là que pour offrir un contrepoint à la puissance lyrique et à la formulation époustouflante d’une pensée inouïe. Au cœur de cette pensée, l’amour comme co-naissance tel que Claudel l’orthographiait et voulait le faire comprendre. Ainsi, le parcours géographique de Rodrigue est tout autant un parcours initiatique où chaque point du globe a son équivalence dans le ciel : l’Amérique est le désir, l’Afrique le désespoir, l’Espagne le berceau et la tombe, le Japon le purgatoire. Jusqu’à ce canal de Panama que, sans peur de l’anachronisme, Claudel fait percer par Rodrigue, achevant l’œuvre de réunir la terre ouverte par Colomb et franchissant la barrière symbolique des Amériques comparée à la barrière du corps. C’est par ce voyage fou que la terre et le ciel sont réunis, comme la sexualité et la spiritualité, le monde des morts et celui des vivants, le péché et la grâce. Mais le souci de l’absolu qui fait la beauté de Prouhèze n’a d’égal chez son amant que le rêve de totalité, de paix universelle, de réunion sous la bannière espagnole et sous la croix que le roi d’Espagne, se servant de Rodrigue, tente d’imposer aux deux hémisphères. Indissociables, la politique, l’amour, la foi et le théâtre se partagent le message claudélien. La souffrance qu’il avait exprimée dans Partage de midi se trouve là transformée en béatitude, il n’y a pas de vie qui ne conduise, quels que soient les méandres, à la vérité révélée, et le théâtre est là pour nous le rappeler plus évidemment que tout discours religieux. Après Barrault en 1942 et Vitez qui réalisa la première intégrale complète en 1988, c’est comme une comète dans le ciel du paysage théâtral que revient Le Soulier de satin, nécessaire par sa folie amoureuse et pour l’amour fou de la scène du monde. Olivier Py, ph. A. Fonteray Onze heures d’un spectacle magnifique d’émotion et de vie, d’invention et de générosité. […] Le voyage est fascinant, envoûtant, entraînant sur les routes de l’aventure humaine autant que spirituelle – ou plutôt sur ses mers, tant la barque du théâtre menée par Olivier Py prend des allures de bateau ivre où se brassent toutes les émotions, toutes les interrogations. […] On est tout à l’écoute de la langue de Claudel, superbe. Le drame est aussi poème. Les déclarations d’amour sont parmi les plus belles qui aient jamais été écrites. Pour les faire entendre, Olivier Py s’appuie sur une distribution alerte, qui sait user de tous les registres du tragique comme du comique. Didier Méreuze, La Croix Olivier Py Un enfant prodige, un enfant prodigue, assoiffé de paroles, d’action, assoiffé de vie, une vie axée sur le théâtre. À vingt-trois ans (en 1988) il monte au Théâtre Essaion son premier texte Des oranges et des ongles. À partir de là, s’adressant aux enfants comme aux adultes, il ne cesse d’écrire, de mettre en scène, de donner ses pièces à d’autres que lui, de jouer, pour lui et pour d’autres : Jean-Luc Lagarce (Le Malade imaginaire, 1989), François Rancillac (La Nuit au cirque, de lui-même, Ondine de Giraudoux 1992, ou Le Nouveau Menoza de Lenz, 1996)… Il parcourt les scènes de France, infatigable, inépuisablement créatif, renverse les barrières, étonne le Festival d’Avignon sa presse et son public avec, en 1995, La Servante, qui se donne sept jours entiers, c’est-à-dire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, autour d’une "héroïne" : la Servante, ainsi se nomme la petite lampe qui veille sur le plateau désert… Le tour de force n’éblouit pas tant que la force poétique d’une écriture qui, déjà, fait comparer Olivier Py à Claudel. Mais comme il n’aime pas se trouver là où on le cherche, l’année suivante, à Avignon encore, il devient Miss Knife, sopraniste de charme, chanteuse de cabaret toute en fanfreluches et jarretelles. Et en 1997, de par un nouveau virage à 180 degrés, il inaugure le Festival à la cour d’honneur, avec Le Visage d’Orphée. En 1998, aux Abbesses, Michel Raskine présente Théâtres, et en 2000, lui-même crée, toujours à Avignon, L’Apocalypse joyeuse. Entre-temps il aura joué au cinéma notamment avec Cédric Klapish (Chacun cherche son chat en 1996, Peut-être en 1999), tourné son propre long métrage (Les Yeux fermés) aura, en 1998, été nommé à la tête du centre dramatique d’Orléans-Loiret-Centre, où l’année suivante il crée Requiem pour Sebrenica, aura milité pour les peuples de Palestine et de Bosnie, aura continué d’écrire, de jouer, de mettre en scène, aura affronté le chef-d’œuvre de Claudel Le Soulier de satin, et continue de vivre, de faire vivre le théâtre. Cet immense oratorio baroque, sublime et extravagant, est aussi une cérémonie secrète. […] Ces dix heures de spectacle s’écoutent comme un rêve. […] Il faut donc aller voir le magnifique spectacle créé par Olivier Py. […] Olivier Py ne triche à aucun moment. Les décors, tantôt abstraits, tantôt d’un baroque stylisé, exaltent le fabuleux métal qui aimante les conquérants. Dans la rencontre de Rodrigue et de Prouhèze sur le bateau, à la fin de la troisième journée, le jeu de ces grandes parois dorées atteint au grandiose. Et la musique originale de Stéphane Leach, ajoutée à celle de Fauré, aurait enchanté Claudel. Jacques Julliard, Le Nouvel Observateur De l’inconciliable, Olivier Py fait son miel, et l’aisance avec laquelle il aborde Claudel est sidérante. […] Vivant, inventif sans se disperser, son spectacle est aussi plus tourmenté qu’apaisé, douloureux même, à l’image de Jeanne Balibar retranchée dans son renoncement à l’amour, ou de Philippe Girard (Rodrigue), émerveillé, jamais en paix. ph. A. Fonteray René Solis, Libération Le Soulier de satin Pièce de Paul Claudel en 4 journées INTÉGRALES les samedis et dimanches à 13h durée approximative: 10h30 entracte re entracte e entracte e 1 journée – 20mn – 2 journée – 20mn – 3 journée – 50mn* – 4e journée *restauration simple sur place ou restaurants aux alentours du théâtre EN DEUX PARTIES les mardis (1re partie) et mercredis (2e partie) à 18h30 mardis, 1re partie: durée approximative : 4h30 entracte 1re journée – 20mn – 2e journée mercredis, 2e partie: durée approximative: 5h entracte 3e journée – 50 mn – 4e journée 5 Richard II création SHAKESPEARE THIERRY DE PERETTI avec Thierry de Peretti, Alban Guillon, Caroline Ducey, Eric Peuvrel, Benjamin Baroche, Céline Milliat-Baumgartner, Léna Breban, Nadine Darmon, Johann Leysen, Albert Delpy, Olivier Parisis, JeanChristophe Pagnac, Thomas Roux, Christophe Veillon, Ludovic Virot, Giuliano Errante, Sylvain Jacques coproduction Théâtre de la Ville, Paris Théâtre du Nord, centre dramatique national de Lille – Théâtre de Béziers. avec le soutien de la Ville d'Ajaccio et de la Collectivité territoriale de Corse. avec la participation artistique du Jeune Théâtre national et le soutien de la SPEDIDAM en partenariat avec Lille 2004 production déléguée Compagnie des Petites Heures 6 À dix-huit ans, Thierry de Peretti travaille sur deux scènes du Richard II de Shakespeare. Douze ans plus tard, il dirige seize comédiens (pour quarante personnages) dans cette « triste histoire de la mort d'un roi ». Tragédie d'un homme qui possédait tout, à qui tout fut repris. Face à lui, le futur Henri IV, qui ne possédait rien d'autre que le droit de tout prendre. Drame historique donc, prologue à soixante ans de luttes sauvages. Ou plutôt machination de l'Histoire, dont l'origine est évidemment un meurtre, perpétré avant que commence la pièce. « Ayant tous deux mis la main dans l'engrenage, sans pouvoir rien contrôler, ils se sont trouvés emportés dans un torrent de boue, dit Thierry de Perretti. Henri guette Richard, qui accumule les erreurs, et en qui on pourrait voir un suicidaire. En fait, roi de droit divin, il n'imagine pas pouvoir se tromper. Mais à partir du moment où il met en péril sa classe tout entière et non plus sa seule personne, la limite est atteinte, la chute inévitable. » Touché par la poésie de la pièce, porté par une sorte d'intuition, Thierry de Peretti s'est englouti dans le monde du Richard de Shakespeare. Il a rassemblé tous les documents qu'il a pu trouver sur les précédentes mises en scène. Il a lu et relu Le Livre de Job, La Violence et le Sacré, Les Évangiles… Car c'est une grille évangélique qu'il donne à sa lecture, voyant dans le meurtre initial comme une référence à Caïn et Abel, et dans ceux qui suivent une notion sacrificielle. Et dans les trahisons qui jalonnent le parcours de Richard, il trouve le reniement de Pierre, le baiser de Judas. Et dans ce parcours, un chemin de croix qui mène à la solitude et à la conscience, sans plus d'autre choix que la recherche de la vérité. Chemin qui aboutit à l'abandon forcé de l'enfance, à l'apprentisTHEATRE DE LA VILLE • TARIF A sage de l'état adulte, avec les responsabilités et les meurtres que cela implique. « Meurtres réels, ou métaphoriques : pour avancer, il faut tuer une part de soi. La pièce se fonde sur l'absence, sur le deuil. Elle porte une profonde tristesse, en même temps qu'une forme d'apaisement. Plus je l'étudie, plus j'y reconnais un lien avec Hamlet, pour la façon dont les morts hantent les vivants, pour la façon dont se mettent en mouvement les mécanismes de la vengeance. « De manière frontale, j'ai vu comment, d'un claquement de doigt, par la force de rancœurs personnelles, de l'orgueil, des ambitions, on peut changer l'harmonie en terreur permanente. Richard II est roi d'Angleterre, son histoire est insulaire et nationaliste. Mysticisme et superstition s'y mêlent, avec la brutalité du rapport à l'autre. Sous le vernis de la chevalerie et de ses codes d'honneur, se cache un modèle de type mafieux qui transmet sa "morale", une amorce d'idéologie : puisque pour vivre il faut marcher sur les cadavres, ne restons pas en arrière. « Mais il y a autre chose : le langage. Richard II roi-poète, c'est un cliché qui reflète une volonté de faire de l'or avec les mots. « Alors dans un décor en jeu de cubes qui vont et viennent, construisant alternativement un espace de désolation totale puis un envahissement de tours et de pièges, je voudrais que se fasse entendre la beauté de cet oratorio à quarante voix. » Thierry de Peretti joue et met en scène Richard II, ph. X, DR DU 9 AU 31 JANVIER traduction originale André Marcowicz mise en scène Thierry de Peretti assistant à la mise en scène Ludovic Virot dramaturgie Patrice Spinosi chorégraphie Nasser Martin-Gousset décor Rudy Sabounghi vidéo David Bersanetti lumières Jean-Luc Chanonat costumes Caroline de Vivaize musique Nicolas Baby Thierry de Peretti Après un passage au cours Florent, quelques stages, une bourse de la Villa Médicis hors les murs, Thierry de Peretti se fait comédien au théâtre, notamment pour Pierre Vial (Le Soulier de satin en 2001), et au cinéma avec entre autres Claude Berri (Lucie Aubrac), Vincent Ravalec (Une prière vers le ciel), Patrice Chéreau (Ceux qui m'aiment prendront le train)… Il lui arrive de jouer dans ses propres mises en scène, jusqu'à présent consacrées aux auteurs du XXe siècle : Xavier Durringer (Une envie de tuer), Anita Langhoff (Saleté de paix); et, avant tout, Bernard-Marie Koltès dont il a monté Quai Ouest (1991), Sallinger (1998), Retour au désert, prix de la révélation théâtrale du Syndicat national de la critique 2001. Reconnaissance confirmée par la création de Valparaiso Valparaiso de Don de Lilo. Beaucoup de bruit pour rien création Shakespeare, © ND-Viollet Laurent Laffargue, © Enguerand SHAKESPEARE LAURENT LAFFARGUE DU 11 MARS AU 1er AVRIL texte français Jean-Michel Déprats mise en scène Laurent Laffargue scénographie Philippe Casaban, Éric Charbeau costumes Hervé Poeydomenge son Yvon Tutein avec Muriel Amat, Philippe Bérodot, Éric Bougnon, Cyril Dubreuil, Daniel Martin, Pascal Vannson (distribution en cours) coproduction Théâtre de la Ville,Paris – Théâtre national Bordeaux-Aquitaine – Théâtre national de Toulouse MidiPyrénées – Scène nationale de La Rochelle – Compagnie du Soleil Bleu Ayant depuis quelques années mis en scène plusieurs spectacles pour le moins sombres (du Tartuffe à Terminus de Daniel Keene, en passant par Sauvés d'Edward Bond, La Fausse Suivante de Marivaux, Homme pour homme de Brecht ou Othello), Laurent Laffargue a éprouvé un besoin de comédie. Il est resté avec Shakespeare, cherchant du côté du Songe d'une nuit d'été qu'il présentait en duo avec la tragique histoire du Maure de Venise. Il s'est arrêté sur Beaucoup de bruit pour rien, modèle même de la comédie d'intrigues. En effet, s'y croisent trois histoires d'amour et de mensonges, d'une vertigineuse complexité, écrites dans « une merveille de langage double et triple, de jeux de mots, de lapsus plus ou moins volontaires », dit Laurent Laffargue, qui a demandé une traduction nouvelle à Jean-Michel Déprats. Donc, chacun, homme et femme, tombe follement amoureux tout en jurant qu'il – ou elle – n'aimera jamais personne, tandis qu'un jaloux monte un subterfuge pour faire croire à l'amant que sa maîtresse est une catin, et que, histoire d'arranger les choses, un moine la fait passer pour morte. Après quoi, une sorte de Columbo ivrogne, roi du calembour, mène l'enquête. Sans oublier les amis et valets qui lancent de troublantes rumeurs. Le tout dans un cadre chaleureux, ensoleillé, sensuel. L'histoire est censée se passer à Messine (Sicile), après une bataille victorieuse d'où reviennent d'ardents jeunes gens, italiens et espagnols, qui se lancent alors dans un autre genre de conflit, celui des amours. À travers l'incapacité des personnages à THEATRE DE LA VILLE • TARIF A exprimer directement ce qu'ils pensent, comme à agir selon la logique de leurs désirs, Laurent Laffargue retrouve quelque chose de Marivaux. En plus brutal, en plus baroque sans doute : « Et puis de même qu'avec L'Ile des esclaves ou La Dispute, tous sont réunis dans un endroit clos, où ils ne peuvent s'éviter. J'imagine une sorte d'enceinte labyrinthique, à la manière du film de Peter Greenaway Meurtre dans un jardin anglais. Ce ne sont pas seulement les personnages qui bougent, le décor aussi, qui les piège, quoi qu'ils fassent. Comme s'ils se trouvaient sous le regard du peintre, témoin et manipulateur, à l'affût au centre d'un tableau en incessante évolution : le spectacle. » Au-delà de ces défis stylistiques proposés par Shakespeare, Laurent Laffargue a creusé jusqu'aux racines mêmes des intrigues, s'est interrogé sur ce qui pousse les personnages à se compliquer ainsi l'existence. Il s'en est senti proche, lui, comme, dit-il, toute sa génération de trentenaires. Ou en tout cas une bonne partie : « Oui, je retrouve là ma génération, dans son rapport crispé au couple, se demandant si tomber en amour n'était pas une régression ? Et il y a cette peur, quelque chose comme le syndrome des enfants du divorce, qui pousse à vouloir connaître l'amour avant de le vivre, histoire de se sécuriser. Une illusion. La pièce me fait également penser à Corneille, et ce serait "l'Illusion tragi-comique"… Tout se passe dans la tête. Dans les mots. Les personnages de Shakespeare font l'amour avec les mots, et c'est magnifique. « Il s'agit avant tout de sauvegarder cette magnificence, de privilégier le jeu par rapport aux enjeux. L'entrelacement des intrigues entraîne le rythme d'une danse à plusieurs temps, pour, à la fin, laisser triompher le bonheur, la liesse, l'euphorie de la vie, et du théâtre. Tout est mal qui finit bien. » Laurent Laffargue En 1992, Laurent Laffargue fonde sa compagnie, monte L'Épreuve de Marivaux (prix du public et du jury au Festival Turbulences de Strasbourg). En résidence au centre dramatique national de Bordeaux, il met en scène du Feydeau, et Tartuffe. Suivent Le Gardien (1995) et Le Monte-plats (1996) de Pinter, La Fausse Suivante de Marivaux (1997), Sauvés d'Edward Bond, en 1998 dans une nouvelle traduction de Jérôme Hankins (prix des Rencontres Charles-Dullin). En 1999, associé pour trois ans à l'Opéra de Bordeaux (il y crée Don Giovanni de Mozart en 2002), il met en scène Le Barbier de Séville, puis crée Dépannage de Pauline Sales, entreprend un diptyque shakespearien qui, sous le titre Nos nuits auront raison de nos jours, rassemble Le Songe d'une nuit d'été et Othello qui tourne trois saisons dans toute la France. En 2001, à la Coursive de La Rochelle, c'est Homme pour homme de Brecht. En 2002, il crée Terminus de l'Australien Daniel Keene, aux Abbesses et reçoit le Prix Pierre Jean Jacques Gautier. 7 Les Relations de Claire création DU 5 AU 22 NOVEMBRE texte français Laurent Muhleisen mise en scène Michel Raskine décor Stéphanie Mathieu costumes Josy Lopez lumières Thierry Gouin son Sylvestre Mercier assistant Olivier Rey avec Philippe Crubézy, Simon Delétang, Marief Guittier, Odja Llorca, Claire Semet production Théâtre du Point du Jour, Lyon – Théâtre de la Ville, Paris – Théâtre du Nord, Lille (Théâtre national Lille Tourcoing, Région Nord Pas-de-Calais) 8 « Renoncez au repassage. Séparez-vous de votre fer à repasser. Apportez-le à un brocanteur, vous en tirerez toujours trois francs six sous » énonce Claire, rédactrice commerciale, chargée de promouvoir… un nouveau modèle de fer à repasser. Évidemment, elle est licenciée. Elle s'en va alors chez le mari de sa sœur, banquier, pour lui demander un prêt, apportant comme seule garantie son prochain mariage, avec un copain pas du tout au courant… Et ce n'est qu'un début. Lorsque Claire arrive quelque part, autour d'elle les liens plus ou moins hypocrites se disloquent. Non qu'elle le cherche. Elle n'est pas, à la manière du personnage de Pasolini dans son film Theorema, le révélateur des désirs cachés, des mensonges de la famille et de la bourgeoisie. Elle est absolument une enfant d'aujourd'hui : il lui suffit de vivre selon ses désirs. Elle réagit sur l'instant, traverse les obstacles en essayant de comprendre comment ça fonctionne, n'a aucune prise sur le réel, qui, en dépit de ses efforts, sans cesse lui échappe. Claire, l'enfant du siècle, est fille de Dea Loher, jeune auteur allemande dont Michel Raskine a déjà monté, l'an dernier, Barbe Bleue, espoir des femmes, histoire d'un vendeur de chaussures. Les femmes, il les tue parce qu'il ne peut pas leur donner tout l'amour qu'elles exigent. Laurent Muhleisen, qui traduit en français le théâtre de Dea Loher, le définit comme de la "comédie tragique". Ou de la "tragédie comique". Transportant en tout cas une drôlerie composée d'un goût de l'absurde, de lucidité inexorable, de plaisir de vivre. « Claire est pleine d'allant, dit Laurent Muhleisen, rien ne l'arrête. D'ailleurs, même si d'une manière générale, les personnages paraissent désarmés, ils ne sont pas, comme chez Kroetz par exemple, écrasés par le poids de la fatalité. Dea Loher pense que nous ne sommes préparés à rien, que tout peut à chaque instant arriver, que nous devons rendre des comptes même si nous ne sommes pas directement responsables, et que l'essentiel est d'assumer son identité. Ce LES ABBESSES • TARIF A qui n'est pas forcément évident. Claire parvient à comprendre sinon le monde autour d'elle, du moins quelque chose d'elle-même. Elle se trouve un peu dans la situation de don Juan, en fuite perpétuelle parce qu'il n'arrive pas à se battre contre tout ça. « Il y a encore vingt ans, les comportements pouvaient être déterminés par le milieu social. Ce n'est plus le cas. Nos contemporains, comme en tous temps, veulent se réaliser pleinement, mais leur manque le support d'une stabilité sociale qui a disparu. C'est ce dont parle Dea Loher : par impuissance à les contrôler plus que par lâcheté, ses personnages se laissent mener par les événements. Ils sont les cousins d'Anna Thomson dans le film d'Amos Kollek Sue perdue dans Manhattan, douce descente en enfer d'une femme sans travail, sans attaches, sans repères d'aucune sorte. Dea Loher s'en est d'ailleurs inspirée. Séquence par séquence, comme Sue, Claire accomplit son chemin de croix. Pour autant, elle ne se sent pas perdue. Elle se sait utilisée, retourne la situation à son avantage, du moins provisoirement, ouvre une porte, et encore une autre… « Dea Loher pose la question : le simple fait de vivre selon ses désirs suffit-il à se trouver, trouver son équilibre, définir un principe de liberté ? » Michel Raskine, ph. X, DR Dea Loher, ph. D. Baltzer DEA LOHER MICHEL RASKINE Michel Raskine Assistant de Roger Planchon entre 1973 et 1978, membre de la troupe de Gildas Bourdet à Lille, et acteur (avec entre beaucoup d'autres, Lucian Pintilié, Karge et Langhoff, Joël Jouanneau, Bob Wilson…), Michel Raskine est un familier du Théâtre de la Ville. C'est d'ailleurs en tant qu'acteur que d'abord il y est venu avec deux spectacles de Gildas Bourdet : Une station service (1985), Les Crachats de la lune (1987). Ensuite, en tant que metteur en scène : L'Épidémie et Un rat qui passe d'Agota Kristof (1993), Chambre d'amour d'Adamov (1997) Théâtres d'Olivier Py (1998), Elle est là et C'est beau (2002). Directeur depuis 1995 du Théâtre du Point du Jour à Lyon, il y a mis en scène notamment L'Amante anglaise de Duras (1996), Chambre d'amour d'Adamov (1997), Les 81 minutes de Mademoiselle A de Lothar Trolle (présentées au Festival d'Avignon), Au but de Thomas Bernhard, Max Gericke ou Pareille au même de Manfred Karge, repris en 2003, toujours avec l'irremplaçable Marief Guittier. Le Professionnel création en France DUSAN KOVACEVIC LAURENCE CALAME DU 14 AU 31 JANVIER traduction Anne Renoue,Vladimir Cejovic mise en scène Laurence Calame scénographie et lumières Peter Wilkinson avec Christian Grégori, Anne-Laure Luisoni, Patrick Mamie, Jacques Michel coproduction Théâtre Le poche, Genève – Théâtre Vidy-Lausanne ETE Belgrade 1990, c’est la fin d’une époque, c’est la dislocation de l’ancienne Yougoslavie unie depuis 1945 par le Maréchal Tito. La fin du rôle dirigeant de la Ligue des communistes et le nouveau pouvoir communiste de Slobodan Milosevic, le nationalisme et la xénophobie pourraient bien conduire à un conflit… MOI : tout ce qui est bien, tu l’as gagné ici, tout ce qui ne l’est pas — tu l’as apporté de chez toi… Comme au café-théâtre, l’acteur s’adresse au public, comme au cinéma aussi on passe alternativement d’une narration au présent (voix off dans les polars américains des années 40) à un flashback dialogué. À Belgrade, le théâtre est un art populaire, et l’humour y est érigé en vertu essentielle. La gravité du propos est donc perceptible sous le voile d’une comédie dans laquelle l’absurde et le fantastique rivalisent avec la musique. L’émotion surgie de façon inattendue, parce que les larmes se dissimulent sous le rire, un rire qui les sèche aussitôt. Les films de Kusturica, dont Kovasevic a été le scénariste, sont des exemples magistraux de cet humour exubérant, à la fois tendre et grimaçant. Le Professionnel est aussi une comédie à l’écriture classiquement divertissante. Dans le chaos d’une maison d’édition, sur fond de fête et de musique, l’ancienne génération combat la nouvelle, les femmes sont violentes ou victimes, les écrivains sont en colère. La « transition » ne conduit visiblement pas à une radieuse démocratie. Le nouveau directeur de l’entreprise, Teodor Teja Krai, écrivain autrefois dissident, nous raconte son passé. Ce passé oublié dans les vapeurs d’alcool et les turbulences de sa jeunesse, lui a été rendu par un policier retraité des services secrets. Ce témoin minutieux a rassemblé et consigné des mots, des discours, des souvenirs. Après trente ans de loyaux services, son temps est révolu ; Avant de se retirer, il tient à montrer LES ABBESSES • TARIF A Laurence Calame Formation École supérieure d’art dramatique de Genève Comédienne Depuis 1978 En France : Théâtre de la Ville et Théâtre national de Bretagne. Avec : André Steiger, Stuart Seide, Matthias Langhoff (Mademoiselle Julie de Strindberg, 1988 ; La Duchesse de Malfi de Webster, 1990), Hervé Loichemol, Nathalie Mauger, Hans Peter Cloos (Richard II de Shakespeare, 2001)… Mises en scène Vive l’Europe de Paul Scheerbart ; Savannah Bay de Marguerite Duras ; Stella de Goethe. Traductions et adaptations La Cerisaie d’Anton Tchekhov publié à l’Age d’Homme, Jour d’abattage de Thomas Hürlimann, Le Lieutenant Gustl d’Arthur Schnitzler, Mademoiselle Julie d’August Strindberg publié à Acte Sud, Œdipe tyran de Heiner Müller d’après Sophocle, Vive l’Europe de Paul Scheerbart, Île du salut de Matthias Langhoff d’après Kafka, Femmes de Troie de Matthias Langhoff d’après Euripide, La Compagnie des spectres de Lydie Salvaire. Mise en onde Depuis 1988, metteur en onde à la Radio Suisse Romande. En particulier, l’émission Le Professionnel de Dusan Kovacevic sur Espace 2 a obtenu le Prix radiophonique suisse 2000. ph. I. Meister L. Calame, ph. M. del Curto son visage au grand jour pour restituer cette mémoire. Dans la confrontation entre ces deux hommes, le policier et l’écrivain, se dessine le fossé qui sépare deux générations : celle qui croyait en l’avenir communiste et celle qui n’aspire qu ‘à l’oublier. Mais le vieux chien de garde et le jeune loup doivent surmonter leurs différences et leurs ressentiments parce qu’ils ont besoin l’un de l’autre. C’est la solidarité d’un peuple et de ceux qui, peut-être, seront toujours perdants, car sous le poil et la fourrure, ils ne sont que deux hommes soumis aux caprices du pouvoir. Laurence Calame 9 Ma vie de chandelle création DU 3 AU 27 MARS mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota assistant à la mise en scène Christophe Lemaire scénographie et lumières Yves Collet musique Jefferson Lembeye costumes Corinne Baudelot maquillage Catherine Nicolas avec Philippe Demarle, Valérie Dashwood, Alain Libolt (distribution en cours) production Comédie de Reims – Théâtre de la Ville, Paris. 10 Le décor, c'est une chambre avec un grand lit. Les personnages, ce sont deux hommes et une femme. A priori le trio classique : le mari, la femme, l'amant. Qui d'après ses confidences, pourrait être l'amant du mari. Ce qui, vu le mouvement de la mode, est en passe de devenir tout aussi classique. D'ailleurs rien ne vient le confirmer. D'ailleurs, rien n'est confirmé. Les personnages, désignés comme l'Homme, la Femme, l'Autre Homme, se racontent des souvenirs dont on ne saura jamais le degré de vérité, et changent sans cesse de prénoms. Peut-être ont-ils vécu plusieurs vies, bloqués dans cette situation de base, soir après soir indéfiniment répétée. Pas tout à fait la même, pas tout à fait une autre… Après avoir créé – et repris pour cause de triomphe – au Théâtre de la Ville la pièce de Pirandello Six Personnages en quête d'auteur, qui fait vivre le processus de création et ses déchirements, avec Ma vie de chandelle de Fabrice Melquiot, Emmanuel Demarcy-Mota affronte son contraire : la dislocation pour cause d'usure, de l'intrigue et des personnages. En fait, nous ne sommes plus tout à fait au théâtre. Nous serions plutôt dans la représentation théâtrale de ces jeux télévisés où il s'agit moins de gagner que de « se donner en spectacle ». S'exposer intimement aux spectateurs… Eux-mêmes filmés, ils pourront, au jour de la diffusion, se regarder et, au commandement, applaudir. « Dans un instant, le réveil sonnera et on applaudira. Tous ensemble » ordonne l'Autre Homme, de sa profession "chauffeur de salle". Fabrice Melquiot s'interroge sur le public, Emmanuel Demarcy-Mota se demande à quelle place il se situe. Ce qu'il cherche, si toutefois il cherche encore quelque chose. Pas seulement au théâtre, mais dans la vie, dans le monde, dans l'histoire : « Rien n'est pire que de n'avoir envie de rien, et c'est le cas du couple là, sur scène, dans LES ABBESSES • TARIF A E. Demarcy-Mota, © Enguerand F. Melquiot, ph. R. Senera/Bernand FABRICE MELQUIOT EMMANUEL DEMARCY-MOTA ce décor de chambre où le désir est devenu, non pas même interdit : impossible. L'Homme et la Femme sont encore jeunes, disent qu'ils vont faire l'amour et ne font rien. Sait-on s'ils y croient encore ? Ils vivent sous le probable regard de la vidéo, de plus en plus présente au théâtre. Je n'ai rien contre, sauf si on lui fait prendre la place du corps de l'acteur. « Or, eux se voient, se vivent comme une image dans l'image, et se laissent vampiriser par l'Autre Homme, lui-même prisonnier du jeu, mais qui reste leur seul lien avec le horschamp. Avec le monde extérieur : la salle et les spectateurs. C'est à la fois tragique, drôle, violent, pathétique, dérisoire, toujours sur le fil du rire, de la colère, de la compassion. » Les courriers des lecteurs, les lignes ouvertes ont précédé la télévision et les trompe-l'œil de ses reality-shows. Ces émissions où l'on vient déballer ses secrets. On vient pour ça. Non pas pour une apaisante confession, mais au contraire pour provoquer le drame. Pour être, en public, le héros ou l'héroïne de ce drame. Et ainsi échapper à la banalité. À l'intérieur d'un cadre parfaitement contemporain, Emmanuel Demarcy-Mota et Fabrice Melquiot (à peine trentenaires tous les deux) se posent des questions sur des comportements humains qui ne datent pas d'aujourd'hui. Qui touchent à la liberté de penser et d'agir, à la solitude et au besoin d'en sortir. À la fascination de l'image, bien sûr. Cette envahissante image que l'on tente sans cesse de "décrypter". Pour mieux s'y noyer ? Emmanuel Demarcy-Mota En 1989, Emmanuel Demarcy-Mota fonde au lycée Rodin le Théâtre des Millfontaines, qui, en 1994, au Théâtre de la Commune d'Aubervilliers, crée L'Histoire du soldat de Ramuz, sans la musique de Strawinski. Après avoir tourné, le spectacle est repris de même que la création suivante : Léonce et Lena de Büchner dans une traduction nouvelle de François Regnault. (1996). En 1997, la compagnie entame une collaboration avec le Forum du Blanc-Mesnil, y organise des ateliers, y présente Peine d'amour perdue de Shakespeare, accueilli au Théâtre de la Ville en 1999. En 2000, la compagnie retrouve le Théâtre de la Commune avec Marat Sade de Peter Weiss, et en 2001 le Théâtre de la Ville avec Six Personnages en quête d'auteur de Pirandello. Le spectacle y est repris en janvier 2002 tandis qu'Emmanuel Demarcy-Mota est nommé à la tête de la Comédie de Reims, centre dramatique national, où il présente deux pièces de Fabrice Melquiot, Le Diable en partage, et L'Inattendu. O. Porras, © Enguerand F. Dürrenmatt, © Lipnitzki-Viollet La Visite de la vieille dame création FRIEDRICH DÜRRENMATT OMAR PORRAS DU 27 AVRIL AU 15 MAI adaptation et mise en scène Omar Porras décor et masques Fredy Porras, Mariom Speck costumes Lesley Gautier, Fredy Porras lumières Angelo Bergomi musique Andrés García assistante à la mise en scène Mariom Speck avec Angelo Bergomi, Andrés García, Lesley Gautier, Yann Joly, Paola Pagani, Fredy Porras, Mariom Speck, Omar Porras, Irma Riser, Didier Sergent production Teatro Malandro Voilà dix ans (précisément en 1994) déboulait à Dijon un étrange personnage : Omar Porras, Colombien d'origine, qui représentait la Suisse au Festival Théâtre en Mai de Dijon, où il proposait La Visite de la vieille dame de Friedrich Dürrenmatt. Avec sa compagnie Teatro Malandro, il avait créé la pièce l'année précédente à Genève. Travesti, masqué, il en interprétait le rôle principal. On découvrait la force de son imaginaire baroque, sa fausse naïveté, sa vraie poésie, son orgueilleuse pauvreté. Un choc, un bonheur. La veuve et la famille de l'auteur avaient fort apprécié, disant reconnaître ce dont Dürrenmatt avait rêvé. Et le spectacle s'est joué plus de cent cinquante fois, en France, en Allemagne, en Amérique latine. Et voilà qu'Omar Porras réendosse son masque et sa robe de riche dépenaillée : à nouveau il incarne la Vieille Dame, de retour en son village, promettant aux habitants une fortune s'ils tuent l'homme qui, dans sa jeunesse, l'a séduite et abandonnée… Il y a dix ans, l'actualité de la pièce lui paraissait évidente. Aujourd'hui davantage encore. La lâcheté, l'outrage aux faibles, l'appât de l'argent n'ont pas disparu. Ce n'est pas plus gai pour ça, pourtant le texte est drôle. Impitoyablement. Quant aux qualités d'il y a dix ans : grotesque, ironie, cruauté, exubérance, elles se retrouvent intactes dans la nouvelle version. Semblable et différente, dans la mesure où après dix ans et plus encore de mises en scène, les hommes changent, le monde aussi, et les comédiens. Mais chez Omar Porras demeure inchangée la passion de la scène, d'un théâtre lumineux, bigarré, tendre et vigoureux. Un théâtre de la vie, c'est-à-dire qui parle aussi de la nuit, et de la mort : « Dürrenmatt n'est pas un auteur psychologique. Il se nourrit des Grecs, de Molière, et par moments me rappelle Gozzi. C'est un satiLES ABBESSES • TARIF A riste, qui tire le comique de son pessimisme, mélange les genres : vaudeville, boulevard, mélodrame… Il raconte des vérités terribles sur la façon, justement, dont nous nous masquons la vérité, dont nous nous cachons derrière celles qui nous conviennent. Il saisit le côté exécrable des comportements humains. Les mensonges et les compromis que nous gérons quotidiennement. La facilité avec laquelle, tout en critiquant "l'autre", nous acceptons les bénéfices du mal, nous nous soumettons à ceux qui, contre l'argent, la tranquillité, dirigent nos pensées. Nous habitons un monde déserté de Dieu comme du Diable. On ne sait pas où ils sont passés, alors nous nous sentons en perpétuel déséquilibre. » Autre raison pour laquelle Omar Porras a éprouvé le besoin de revisiter La Visite de la vieille dame : après plusieurs spectacles, comme Ay ! Quixote dans lesquels la scénographie était éclatante, la pièce lui permet de revenir à une sorte de dépouillement. Des éléments de décors (apparemment) bricolés, des costumes "vintage". Restent les masques, somptueux, indispensables, qui parfois font ressembler les personnages à des animaux. Omar Porras n'a jamais été tenté par le réalisme, et encore moins ici que dans tout autre spectacle. Sa performance de travesti ne doit rien au cabaret, beaucoup au désir de représenter en quelque sorte concrètement les perpétuels travestissements de la réalité, et tout à une forme de théâtre primitif, essentiel. Un théâtre des racines. « Le théâtre, tout simplement ». Omar Porras Omar Porras est né à Bogota, y a commencé son apprentissage de comédien, est arrivé dans les années 80 à Paris où il ne connaissait personne. Il a donc gagné sa vie avec des spectacles de marionnettes dans le métro et s'est tenu au courant de la vie théâtrale en se glissant dans la salle du Théâtre de la Ville !… Le hasard l'emmène en Suisse où, en 1990, il fonde sa compagnie le Teatro Malandro. Avec comédiens et marionnettes, il monte Ubu roi de Jarry. En 1992, La Tragique histoire du docteur Faustus d'après Marlowe, en 1993 La Visite de la vieille dame. Après quoi, la plupart de ses spectacles viennent en France : en 1995 à Dijon, Othello créé à la Comédie de Genève. En 1997, Noces de sang, présenté aux Abbesses en 1999. En 2000, Les Bakkhantes d'après Euripide, également aux Abbesses. En 2002, Ay ! Quixote * au Théâtre de la Ville. En 1998, il joue le metteur en scène dans Ce soir on improvise, mise en scène de Claude Stratz, à l'Athénée. * Coproduction Théâtre de la Ville. 11 La Fin de Casanova A. Rotger, ph. J. Stroh M. Berman, ph. R. Baltauss A. Picchiarini, ph. X. dr M. Tsvetaïeva, © Martinie/Viollet MARINA TSVETAÏEVA ANITA PICCHIARINI DU 25 MAI AU 19 JUIN traduction Hélène Henry conception et réalisation Anita Picchiarini scénographie Marc Berman création musicale Joëlle Léandre maquillages Cécile Krestschmar lumières Fabrice Combier avec Marc Berman, Joëlle Léandre, Anne Rotger 12 Au terme de son existence, Casanova le joueur, le séducteur, incapable de supporter son déclin, reclus dans la bibliothèque du château de Dux, chez l’homme qui l’héberge, décide de s’enfuir au dehors, dans la tempête. D’aller au-devant de sa propre mort. C’est la dernière heure du siècle. Rageusement, il détruit les mille lettres d’amour reçues jadis. C’est alors que surgit une adolescente, et elle lui dit qu’elle l’aime. C’est alors que s’engage entre le vieil homme et la jeune fille un jeu singulier, duel philosophique et passionnel, « mille et unième – et ultime – déclaration d’amour à Casanova ». Cette Fin de Casanova, Marina Tsvetaïeva l’a écrite durant l’hiver 1919 à Moscou, où elle vit encore, mais dans un complet dénuement. Elle professe un superbe mépris pour le théâtre, qui, dit-elle, lui a toujours paru « un soutien pour les pauvres en esprit ». Mais LES ABBESSES • TARIF A quand elle rencontre les jeunes comédiens du Studio Vakhtangov, coup sur coup elle écrit pour eux six pièces brèves, « poèmes dramatiques », dont les deux derniers sont consacrés à Casanova. Marina Tsvetaïeva était une rebelle, une femme intègre, imprévisible, excessive. Passionnée. Motifs de l’admiration éprouvée par Anita Picchiarini envers le personnage, et ses textes. En particulier ces poèmes dramatiques, qui culminent avec La Fin de Casanova : « Mais il n’y a rien là de romantique, en tout cas au sens de sentimental. Au-delà de la joute amoureuse, se joue la survie de la poésie. Femme et poète, Marina Tsvetaïeva sans aucun doute se projette dans le personnage de Casanova. D’où l’accomplissement d’une écriture superbe, qui offre aux comédiens un matériau verbal extraordinaire. Peu importe s’ils n’ont pas l’âge du rôle. L’essentiel pour eux, est de faire entendre la musicalité de ce langage : "une fête de mots dans la peste des jours". « L’histoire s’enroule autour de ce duel, de ce face-à-face ludique entre l’homme qui vit le dernier acte de son existence et la jeune fille qui paraît sortie d’un tableau de Balthus, et ne peut rien espérer. Peut-être d’ailleurs n’est-elle qu’un rêve. » Un face-à-face, un duel à trois : aux côtés de Casanova (Marc Berman) et de Franziska, la jeune fille (Anne Rotger), se tient Joëlle Léandre, contrebassiste, chanteuse, comédienne. Elle pourrait représenter Tsvetaïeva elle-même. Elle offre un contrepoint musical à la parole des comédiens qu’elle encadre, avec lesquels elle dialogue, accompagnant leur parcours poétique à travers un univers à la fois énigmatique et concret : « Un plancher ancien, patiné, un radeau. La lumière vibre, les objets sont peu nombreux. Ils apparaissent comme par magie, et dès qu’ils se posent sur scène, prennent corps, deviennent tangibles. Seul, dépouillé, l’homme qui s’en va a détruit son passé comme s’il lui fallait oublier pour renaître. Il donne là sa dernière représentation, joue en temps réel sa dernière heure. La dernière avant la prochaine expression de la vie. Nous sommes au bord du réel : au théâtre ». Anita Picchiarini Comédienne, Anita Picchiarini rejoint en 1980 le Théâtre du Campagnol pour la création du Bal, y rencontre Marc Berman, qui participera à la plupart de ses spectacles. Elle y fait ses débuts de mise en scène et, en 1988, fonde sa compagnie, le Sirocco, avec laquelle elle crée à la Maison de la culture de La Rochelle, son adaptation des Frères Karamazov de Dostoïevski. Suivent Le Bouc de Fassbinder avec Anne Rotger, Baal de Brecht en 1993, Aux hommes de bonne volonté de François Caron, à Théâtre Ouvert. Accueillie en 1995 au CDBB Lorient, elle y monte Combat de nègre et de chiens de Koltès. En 1998, elle présente Electre de Hoffmansthal au TGP de Saint-Denis, avec Anne Rotger et Joëlle Léandre. En 2001, c’est la Médée de Hans Henny Jahnn au Théâtre de la Colline. Après quoi, elle s'accorde quelques mois d'éloignement et de réflexion, avant de porter son choix sur Marina Tsvetaïeva. HORS LES MURS R. García, ph. X, DR ph. T. Jeanne-Vales/Enguerand THEATRE Jardinage humain création RODRIGO GARCÍA textes en espagnol surtitrés en français AU THÉÂTRE DE LA CITÉ INTERNATIONALE DU 20 NOVEMBRE AU 6 DÉCEMBRE mise en scène, scénographie Rodrigo García assistante à la mise en scène Mireia Andreu traduction Christilla Vasserot lumières Carlos Marquerie costumes Galiana vidéo de La Pietá Rodrigo García avec la collaboration de Maria Zaragoza montage Javier Marquerie vidéo des chiens et de George Bush, création de Javier Marquerie musiciens Dj Honk / Dj Léto avec Idurre Azkúe, Nico Baixas, Teo Baró, Sonia Gómez, Núria Lloansi, Angélica Riquelme production Théâtre national de Bretagne, Rennes – Théâtre de la Ville, Paris – Festival d'Automne, Paris – Théâtre de la Cité International – Le Cargo, Maison de la culture,Grenoble – TNT, Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées. avec l'aide de l'ONDA. « Fabriquer des formes avec des hommes comme les jardiniers le font avec les plantes… » Rodrigo GarcÍa imagine un insomniaque tournant et retournant cette idée paranoïde dans sa tête. Voyant son corps perdre son aspect humain reconnaissable. Trouvant un équivalent dans la façon dont les images de la publicité imposent aux êtres des apparences idéalisées, normalisées, complètement irréalistes. Trouvant un parallèle dans la façon dont l'éducation formate les esprits. Voilà à nouveau l'Argentin d'Espagne monté sur ses grands chevaux, tel un don Quichotte en lutte contre les moulins à vent de la consommation. Rien n'y manque. Les caddies débordants, les couples trop empêtrés dans leurs sacs en plastique de supérette pour CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C pouvoir s'aimer fiévreusement. Le débordement provocateur d'une fille accroupie… Les gags et la fureur, le défi et la tendresse. Du Rodrigo des grands jours. Plus quelque chose d'autre. Les acteurs espagnols – fortes personnalités pour qui depuis toujours sont écrits les textes – sont entourés d'images vidéo. Ce n'est pas nouveau, mais, bien qu'il soit lui-même vidéaste, Rodrigo GarcÍa les utilise rarement. On y voit des jardiniers fabriquant des paysages de fleurs et des chirurgiens réparant des corps. Pour les adapter aux lois de la jeunesse et de la mode ? On voit aussi des textes qui s'inscrivent sur l'écran, et pas seulement en tant que surtitres. Ils racontent une histoire. Celle d'une colère ressassée, toujours vive, contre l'imbécillité des rapports humains dégradés, contre la domination des marchands, avec entre autres exemples, le gouffre entre le prix des baskets et le salaire payé à ceux qui les confectionnent… L'histoire aussi d'un pays aujourd'hui affamé, qui continue de produire les meilleures viandes du monde : l'Argentine. De là naît le "quelque chose d'autre". De cette blessure d'exil, plaie toujours ouverte. D'une fragilité soudain révélée, assumée. De la souffrance de se savoir, en dépit des colères les plus sincères, intégré à une existence relativement confortable. Tandis que les amis, parents, témoins, acteurs de l'enfance se débattent pour ne pas être ensevelis sous des montagnes de misère, de violence non plus mentale, mais économique, mais policière. Rodrigo GarcÍa a mal à l'Argentine. Lui qui avoue son admiration pour Buñuel, rejoint également quelqu'un qui pourrait être son grand frère : Fernando Arrabal. Exilé de l'Espagne franquiste. Et qui a pratiqué le sacrilège envers la religion comme Rodrigo GarcÍa envers la consommation. Avec le même plaisir ludique et rageur. Mais naturellement, au-delà de ces grimaces d'enfants qui font la nique, il y a des hommes qui regardent comment le monde autour d'eux s'abîme. Et de toute leur force, de tout leur 13 ph. J. Antonio Carrera talent, cherchent à faire entendre leur peine et leur peur. Pour se faire entendre, il faut crier fort. Et même parfois trop. Il faut provoquer, dire et redire. Raconter, montrer la désarticulation des corps et de la pensée dans l'apocalypse d'un tremblement de terre. Alors, reste la réalité virtuelle des images vidéo, démesurées et grises. Les images d'une Pietá accroupie comme un mendiant dans une rue passante, sous un capuchon de rappeur qui cache son visage. « Elle porte dans ses bras des Christs Rodrigo García Né en 1964 à Buenos Aires, Rodrigo García découvre le théâtre grâce à Yerma, de García Lorca dans la mise en scène de Victor García. Argentin lui aussi, portant de Paris à Barcelone les fulgurances de son génie indomptable. En 1986, il s'exile à Madrid, où, en 1989, il fonde la Carnicería Teatro (la Boucherie Théâtre), avec laquelle il monte tous ses spectacles. C’est seulement en 1998 qu'il franchit les frontières. D’abord à Genève, puis à Rennes (Conocer gente, comer mierda 1999), à Caen (Ignorante en 2000) puis en Grèce, à Delphes, avec After Sun, qui arrive en France via Rennes, Toulouse, Avignon, enfin Paris*. À partir de là, en France, ses textes sont traduits, publiés par « Les Solitaires intempestifs ». Julie Brochen, François Berreur, Christian Perton, Matthias Langhoff entre autres s’y intéressent. En Argentine, en Espagne, d’autres que lui en ont déjà monté plusieurs, tandis que lui-même affronte Thomas Bernhard, Heiner Müller, Baudelaire… Et continue de se battre contre la résignation. * Au Théâtre de la Cité Internationale en co-réalisation avec le Théâtre de la Ville et le Festival d’Automne à Paris. ph. T. Jeanne-Vales/Enguerand ph. A. Dugas/TNB Rennes 14 bien plus importants que Dieu : un ouvrier, une femme riche, une étudiante, un courtier… », écrit Rodrigo GarcÍa. J’ai acheté une pelle en solde pour creuser ma propre tombe RODRIGO GARCÍA textes en espagnol surtitrés en français AU THÉÂTRE DE LA CITÉ INTERNATIONALE DU 9 AU 20 DÉCEMBRE texte et mise en scène Rodrigo García texte français Christilla Vasserot costumes Mireia Andreu lumières Carlos Marquerie vidéo Javier Marquerie avec Patricia Lamas, Juan Loriente, Ruben Escamilla, Ana Maria Hidalgo J'ai acheté une pelle en solde pour creuser ma propre tombe… On pourrait croire à la funeste épopée d'un homme au bout du rouleau, qui n'a même pas de quoi s'offrir un suicide décent. Mais il s'agit d'une histoire bien plus inquiétante : il s'agit d'un spectacle de Rodrigo GarcÍa dont on a pu voir la saison dernière, invité par le Théâtre de la Ville, After sun, jeu piégé d'un couple adolescent – ses acteurs de toujours – et d'un lapin… Certains ont crié au scandale. Pourquoi pas. Rodrigo GarcÍa se sert du théâtre pour mettre en relief les scandales de la société de consommation auxquels, depuis la fin des années 60, tous, y compris les gens de théâtre, se sont (semble-t-il) confortablement habitués. Pas lui. Lui, vient d'Argentine, vit en Espagne, a travaillé dans la publicité : il sait de quoi il parle. Il en parle, obsessionnellement, et en particulier dans J'ai acheté une pelle… Plus encore, il montre. À travers trois personnages, trois corps qui s'emmêlent et se démènent dans un maelström d'objets inutiles et de bouffe – le terme “nourriture" pouvant laisser croire à une nécessité quelconque. Ici, il n'est pas question de faim, d'appétit, de désirs, mais d'une angoisse de manque. Les aliments s'accumulent, servent à tout et n'importe quoi. L'usage qu'en fait le couple sous le regard amusé d'un gamin, a failli provoquer une interdiction. Il ne faudrait pourtant pas espérer de frissons graveleux. Les créatures de Rodrigo GarcÍa sont des adultes en mal d'enfance. Des enfants, ils possèdent la brutalité, et l'innocence. Comme eux, ils aiment jouer, mettre en jeu leurs rêves. Sans limite. Sans bienséance. Les enfants connaissent-ils même la signification de ce mot ? Rodrigo GarcÍa la connaît, connaît ses comédiens. Il écrit pour eux, leur donne le matériau qui leur permettra, en toute conscience, en toute énergie, de mettre à mal ces limites de bienséance qui endorment les rêves. Tout se passe dans le décalage qu'entraîne la conscience. Ici, faire venir un enfant sur scène, lui donner à observer, à comprendre la réelle violence de l'univers CITÉ INTERNATIONALE • TARIF C ph. T. Jeanne-Vales/Enguerand production La Carniciera Teatro – Ville de Madrid – INAEM, ministère espagnol de la Culture. coréalisation Théâtre de la Ville, Paris – Festival d'Automne à Paris – Théâtre de la Cité Internationale. – moins physique que mentale – devient « source d'espoir. L'espoir qu'il va changer tout ça. Pour nous, il est trop tard ». Un spectacle de Rodrigo GarcÍa ne se raconte pas. Non par crainte de rebuter, mais pour ne pas en trahir le foisonnement, la force de vie. Et la poésie. Poésie faite de cette générosité qui l'éloigne de la mode trash. Rodrigo GarcÍa n'est ni amer, ni désespéré, ne se complaît pas dans la noirceur humaine. Il est en colère et même furieux. Il a beau fanfaronner : « Je fais un théâtre sale, laid », par la magie de sa poésie justement, sans quitter le simulacre théâtral, il se joue de la saleté comme de la laideur. Il ose parler de ce qui fait peur : la maladie, l'argent, le sexe, les errements, les erreurs… Sans haine ni mépris, sans faire la leçon. Au contraire, avec exaltation et une inébranlable attente de bonheur. Y compris en allant acheter une pelle pour creuser sa tombe… Spectacle suffoquant devant lequel on est en droit de rire comme un gosse dégourdi devant la naïveté maladroite des adultes. Rodrigo GarcÍa peut, sans crainte d'être démenti, affirmer sa volonté d'un théâtre politiquement incorrect. textes théâtre Colette Godard 15 Angélique Ionatos Alas pa’volar (Des ailes pour voler) création DU 14 AU 26 OCTOBRE textes extraits du journal de Frida Kahlo adaptation Christine Ferarios mise en scène Omar Porras musique Christian Boissel 16 F. Kahlo, ph. X. DR A. Ionatos, ph. J. Beneich/Alamo avec Angélique Ionatos chant Christian Boissel direction musicale, piano Éric Chaland contrebasse Ramon Lopez percussions Michael Nick violons César Stroscio bandonéon puis Olivier Gluzman et Gérard Violette se sont dit qu'il pouvait y avoir là matière subtile à récital. Le Colombien Omar Porras est entré en scène, lui qui venait de présenter au Théâtre de la Ville son merveilleux Ay ! Quixote. Son côté baroque, « ces faits minimaux poétiquement traités » ainsi que le résume Angélique Ionatos elle-même, sa fantaisie, tout l'appelait et c'est lui qui invente l'idéal univers. Angélique Ionatos connaissait depuis longtemps Frida Kahlo, son œuvre, son des- ANGÉLIQUE IONATOS, LES AILES DE LA COLOMBE Elle chante les textes de la bouleversante artiste mexicaine Frida Kahlo en un concert scénographié par Omar Porras sur des compositions de Christian Boissel, Des ailes pour voler. Un haut front pensif, un regard d'audace sombre pétillant d'intelligente autorité, une énergie de tout l'être dans un format de gamine insolente. Se ressembler est affaire de spiritualité. Y penserait-on si après Marie des brumes*, Sappho de Mytilène*, Angélique Ionatos ne célébrait Frida Kahlo ? Elles ne se ressemblent vraiment que de l'intérieur, par le feu intérieur. Et pourtant, Angélique Ionatos, exactement comme Salma Hayek dans le film de Julie Taymor aurait pu, et de la plus troublante des manières, donner l'impression que Frida Kahlo surgissait à nouveau, tout armée des combats à venir. Elle n'a pas voulu de cela. Pas de pâle copie. Mais l'essence, mais le sens, mais la transfiguration de quelques traits : « Angélique Ionatos chante Frida Kahlo ». Formule sobre. « À dire vrai, je n'y pensais pas. Christian Boissel, qui avait écrit les arrangements de Sappho de Mytilène, s'était intéressé à elle sur la suggestion de Christine Ferarios, touchée par la personnalité et le journal de Frida et sur des fragments de textes qu'elle avait choisis ; il avait alors composé. » De ces chansons, de ce destin, Angélique Ionatos aurait pu simplement faire un disque, le beau disque qui accompagne ce projet. Et LES ABBESSES • TARIF C tin. « Mais il ne s'agit en rien d'une hagiographie et toute ressemblance sera fortuite », tient-elle à préciser au jour lointain où on la rencontre et alors que le spectacle est comme une masse vaporeuse à l'horizon, promesse d'images et d'émotions. Frida Kahlo, ce nom qui claque comme un étendard, cette souffrance de jeune fille mutilée dans un accident stupide – un autobus contre un tramway –, la peinture comme l'expression même, le seul langage qui tienne, la Révolution, Diego Rivera, l'amour de l'allumette pour le grand ogre, la folie, le sens aigu de l'injustice qui n'interdit jamais le caprice, l'Histoire pour vous emporter, les voyages, les rencontres, les provocations, la quête, l'idéal, l'espérance qui tue, l'abnégation. Une vie. Ligotée de souffrance physique, taraudée de souffrance sentimentale, déchirée de souffrance métaphysique : pulvérisée, Frida, n'était la peinture. Et cela se raconte en chansons ? Bien sûr. « Pourquoi aurais-je besoin de pieds, si j'ai des ailes pour voler ? » demande-t-elle, et le titre, le projet, le programme sont là : Alas pa'volar. Les titres comme un collier de perles colorées. Paroles Frida Kahlo, musique Christian Boissel et la couleur particulière du timbre d'Angélique Ionatos pour ces mots d'allégresse et d'espérance, de vie, d'amour. Armelle Héliot * Deux des huit spectacles d’Angélique Ionatos coproduits par le Théâtre de la Ville depuis 1982. Omar Porras, ph. M. del Curto Ch. Boissel et A. Ionatos, ph. T. Dorn Philippe Meyer création L’Endroit du cœur (avec vue sur l'envers) textes et chansons sur le thème de l'amour, de Maurice Scève à Jean Genet Après Causerie* et Paris la Grande** il propose L'Endroit du cœur, récital-spectacle consacré à l'amour en textes et en chansons. « Le but de la peinture est la délectation, disait Poussin ; eh bien, si j'avais une ambition ce serait d'utiliser toutes mes capacités pour faire déguster au public toute la palette des émotions et le conduire à se reconnaître dans mes choix, à se dire : Tiens, je l'aurais fait ainsi », explique, souriant, Philippe Meyer lorsqu'à des mois des premières représentations de son nouveau spectacle, il tente d'en circonscrire les lignes de force. Après Causerie et Paris la Grande, cet homme inclassable, à la vertigineuse érudition, s'engage dans une nouvelle aventure, un nouveau spectacle qu'il intitule L'Endroit du cœur ajoutant, malicieux, « avec vue sur l'envers ». Derrière ce joli titre, un de ces bijoux dont il a le secret sur le thème de l'amour. Des chansons, des textes et ce liant subtil qui est sa présence même, cette légèreté apparente qui cache des trésors de savoirs très divers et offerts. « Même lorsque je construis une émission pour la radio, je la conçois comme un spectacle », note celui qui a toujours conservé quelque chose d'un gamin intrépide. L'homme qui peut être rosse – cela fait partie de son charme – et s'est composé plusieurs vies sans se disperser, est exactement le même, qu'il enseigne à Sciences Po ou qu'il se produise sur un plateau, qu'il se balade à vélo, qu'il rédige un article, donne une conférence, analyse un tableau, écrive un essai. Profession, Philippe Meyer ? Homme de plume, sans aucun doute. Ce qui lui est consubstantiel, c'est l'encre. Pour L'Endroit du cœur, il a pensé à ce que les Italiens nomment l'inamoramento, ce sentiment d'amour qui trouble et aiguise les sens, qui oxygène tout l'être, corps et pensée. Il a lu, relu, textes, poèmes, il est allé en biblioLES ABBESSES • TARIF C P. Meyer, ph. P. Matfas/Opale DU 25 AU 29 NOV. ET DU 9 AU 11 DÉC. scénographie et mise en scène Philippe Meyer piano et arrangements musicaux Jean-Pierre Gesbert thèque, il a écouté des disques, il a rêvé. « Je me suis fixé la même règle que pour Paris la Grande : pas d'époque. Je dirais que cela peut aller de Maurice Scève à Jean Genet. Je ne veux me priver de rien… Je taille dans la profusion ! », glisse-t-il, souriant derrière ses lunettes d'intellectuel qui a usé ses yeux sur bien des grimoires. Un récital que l'on élabore, c'est comme une toile qui ne prend son sens que progressivement, à petites touches. Un jeu de construction spirituel qui exige la patience des architectes en allumettes et la vision des bâtisseurs de l'éternel. « Mais un jeu, d'abord », souligne-t-il. Un jeu de plaisir et du partage. « Il y aura des parties chantées, des textes. Mais je ne veux pas devenir chanteur, je suis un diseur qui aime raconter des histoires… » Il retrouve Jean-Pierre Gesbert, pianiste et magicien des arrangements qui l'accompagne pas à pas. « Mon vieux complice, glisse-t-il, fraternel, m'aide à donner peu à peu forme au magma initial. Il faut que rien ne se répète, que tout se déploie de la manière la plus fluide possible. » Armelle Héliot * Au Théâtre des Abbesses, novembre 1998. ** Au Théâtre des Abbesses, mars-avril 2001, coproduction du Théâtre de la Ville. 17 Romancero gitano musique et mise en scène Vicente Pradal assistante Maryse Bergonzat scénographie et costumes Isidre Prunes lumières Dominique You son Nicolas Jobet Luis de Almería chant Cristo Cortes chant Concha Távora chant Vicente Pradal chant Sabrina Romero danse Manuel Gutierrez danse Antonio Cortes guitare Emmanuel Joussemet violoncelle Jean-Luc Amestoy accordéon Laurent Paris percussions avec la collaboration de Michel Rostain 18 Personne ne sait où repose le corps de Federico García Lorca, assassiné en 1936 par les soldats franquistes. À Grenade, ses livres furent ensuite brûlés sur la place publique. Mais le poème survit aux assassinats et aux autodafés. Les quinze tableaux du Romancero gitano, écrits par García Lorca entre 1924 et 1927, composent l’une de ses œuvres majeures. Chant d’une beauté éperdue, qui puise dans la douleur des persécutions un lyrisme enflammé, le Romancero, disait Lorca, « est le poème de l’Andalousie et je l’appelle "gitan" car le gitan est ce qu’il y a de plus élevé, de plus profond, de plus aristocratique dans mon pays, de plus représentatif dans ses usages, celui qui garde la braise, le sang et l’alphabet de la vérité andalouse et universelle * ». Dans sa traduction d’un vers de la Bible, Henri Meschonnic a ciselé cette magnifique formule : « Le chant est qui chante ». Il y a, dans la poésie de García Lorca, cette même incantation lancinante et poignante, qui s’enroule dans une cape nocturne (« Cuando llegaba la noche/noche que noche nochera ») et prend la lune à témoin. Nuit des temps où le chant s’élève et propage son mystère dans la caverne des voix, pourvu que coule un peu de vin et le filet d’une guitare. Depuis La Nuit obscure, en 1994, sa première création sur des poèmes du mystique espagnol Jean de la Croix, le compositeur Vicente Pradal s’est donné comme ligne de cœur ce qu’il nomme des "tragédies musicales", où le poème ensemence et fertilise l’agora du théâtre. De Federico García Lorca, avec la complicité du metteur en scène Michel Rostain, il a déjà mis LES ABBESSES • TARIF C Jean-Marc Adolphe * Conférence de Federico García Lorca sur le Romancero gitano, 1926, traduction Vicente Pradal. Sidi Larbi Cherkaoui, ph. L. Philippe DU 10 AU 21 FÉVRIER Poèmes de Federico García Lorca en musique, en 1996, le Llanto por Ignacio Sánchez Mejías. Enfant de l’exil, issu d’une famille qui fut proche de García Lorca (son arrière-grand-père fut même son instituteur à Fuente Vaqueros, près de Grenade), le Romancero gitano donne aujourd’hui à Vicente Pradal l’occasion de réactiver sa mémoire intime comme sa propre culture flamenca. Formé par le grand guitariste Pepe Habichuela, il a participé à de nombreux concerts aux côtés d’artistes de premier plan tels que Juan Varea, Rafael Romero, Carmen Linares ou Enrique Morente. Quatre chanteurs, accompagnés par quatre instrumentistes et deux jeunes danseurs de flamenco, porteront la poésie de García Lorca de son terreau andalou à une dimension universelle et contemporaine. Car le cri de révolte « contre la barbarie subie par les gitans andalous est aussi et surtout, un pamphlet contre toutes les barbaries, tous les pogroms ». Le village gitan mis à sac par la garde civile, que García Lorca évoque dans le quinzième et ultime poème du Romancero, aura ainsi valeur métaphorique pour tous les ghettos, d’aujourd’hui et de demain. Et si la composition musicale de Vicente Pradal puise dans des citations de musique populaire, andalouse, comme dans le rythme entêtant de l’antique Seguiriya gitane, la guitare flamenca dialoguera aussi avec les sonorités "décalées" d’un accordéon et d’un violoncelle. Car la « peine andalouse » que chante Lorca ne saurait être confinée dans un folklore pittoresque. Elle est, disait le poète, le seul personnage du Romancero, « la Peine qui s’infiltre dans la moelle des os, dans la sève des arbres et qui n’a rien à voir avec la mélancolie ou la nostalgie ni avec aucune affliction ou maladie de l’âme, qui est un sentiment plus céleste que terrestre : la Peine andalouse qui est une lutte de l’intelligence amoureuse avec le mystère qui l’entoure sans pouvoir la comprendre* ». F. García Lorca, © Fondation F. García Lorca V. Pradal, ph. B. Conte FEDERICO GARCÍA LORCA VICENTE PRADAL danse L. Childs, ph. J.-L. Tanghe DANSE AU THEATRE DE LA VILLE THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 15 AU 19 OCTOBRE Lucinda Childs Balletdel'Opéra nationalduRhin Underwater solo dansé par Lucinda Childs extrait de White Raven, opéra en 5 actes de Robert Wilson et Philip Glass lumières Robert Wilson et Heinrich Brunke 17 danseurs L. Childs, ph. S. Berger musique Philip Glass décor et film Sol LeWitt avec le Festival d’Automne à Paris 20 Du pouvoir sensuel et émotionnel du minimalisme, la chorégraphe américaine Lucinda Childs, étoile de la postmodern dance, a mesuré les nuances les plus secrètes à travers une écriture répétitive éprise de mouvement perpétuel. Cette esthétique paradoxale se déploie sur un tracé géométrique rigoureux que les mouvements des danseurs enguirlandent de pas courus, de sauts, de tours. Il y a du vent dans les tee-shirts sur le fil de cette ligne de vertige soigneusement tendue que les danseurs arpentent sans jamais céder à l’ivresse. C’est toute la singularité de Lucinda Childs, cette inflammation du geste qui reste toujours strictement élégant. Détachement ne se confond heureusement pas avec froideur, tant s’en faut. Fleuron de l’œuvre de la chorégraphe, Dance* conçu en 1979 en collaboration avec le plasticien Sol LeWitt, signe un pacte spectaculaire inoubliable entre les vertigineuses circonvolutions de Lucinda Childs et les boucles musicales de Philip Glass. Trois ans après Einstein on the beach de Bob Wilson, la chorégraphe y découvrait le bonheur de dialoguer avec la musique et raffinait une mathématique de la danse qui allait devenir sa signature. Un noyau de pas très simples multiplié avec d’infimes décalages et variations rythmiques constitue les trajectoires de cette danse cosmique qui dialogue avec les images des danseurs originels projetés sur un écran de tulle. Ce sont ceux du Ballet du Rhin, avec lesquels la chorégraphe collabore régulièrement, qui nous offrent le bonheur de revoir cette pièce historique. Et à la demande expresse du Théâtre de la Ville, Lucinda Childs sera présente en personne dans Underwater, solo extrait du spectacle White Raven de Bob Wilson sur une musique de… Philip Glass. Rosita Boisseau * Dance fut présenté en 1983 au Théâtre de la Ville. La version intégrale avec film le fut en 1991. Ndlr : De 1983 à 2000, Lucinda Childs a été invitée 5 fois au Théâtre de la Ville. DV8, ph. Uri Omi Dance refusés" où l’on croise deux danseurs classiques qui n’ont pu faire carrière parce que leurs corps n’étaient pas "aux normes", un homme obèse, une junkie, une espiègle retraitée, et l’extraordinaire David Toole, hommetronc et néanmoins danseur d’exception. En une suite de saynètes qui flirtent avec le mauvais goût, mais toujours avec tendresse, Lloyd Newson mène à grand train la cavalcade de l’ironie. Jean-Marc Adolphe J. Nadj et J. Babilée, photos M. del Curto DV8, ph. M. Rayner * le Théâtre de la Ville en a coproduit deux : - Bound to please, juin 1996 ; - The happiest day in my life, juin 1999. THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 24 AU 30 OCTOBRE DV8 Physical Theatre Lloyd Newson The Cost of living 15 danseurs avec le Festival d’Automne à Paris Parce qu’il se refusait à considérer la danse comme une variante de l’arrangement floral, Lloyd Newson s’est mis à cultiver les herbes folles, les plantes épineuses, coriaces, vénéneuses. Son jardin à lui n’est pas conçu pour y faire d’agréables promenades ; la nature humaine est autrement plus complexe, âpre, insolente. Venu d’Australie, il a posé son exubérance à Londres où, entre études de psychologie et école de danse, il a définitivement décidé de n’en faire qu’à sa tête, hors des voies toutes tracées. Avec Dead Dreams of Monochrome Men, en 1988, il clame son homosexualité sans faire dans la dentelle. La danse est crue, carnassière, outrageuse. Le nom de sa compagnie, DV8, se prononce « deviate ». L’intention, au moins, est affichée. Lloyd Newson ne s’en départira pas, cultivant la veine d’un "théâtre physique" qui « raconte des histoires spécifiques, extrêmes, pour illustrer certaines conditions de notre société ». Il n’y a dans cette posture aucun dandysme, mais une sensibilité écorchée qui ne se satisfait pas des effets de mode. Et chaque création* de Lloyd Newson résulte de plusieurs mois de répétitions intensives qui engagent les interprètes dans une véritable aventure collective. En guerre contre l’ère du "tout est marchandise", le chorégraphe accorde aux êtres vivants une valeur absolue. Tel est le leitmotiv de The Cost of living, alternativement titré « Can we aford this ? » (Est-ce qu’on peut se le permettre ?), une pièce pour 17 danseurs-acteurs, créée à l’occasion de l’Olympic Arts Festival de Sydney en 2000. « Pris entre ce que nous sommes et ce que nous pensons devoir être, nous nous camouflons dans le conformisme, nous nous dissimulons derrière des masques, sourions, simulons, et ainsi nous pouvons être invités au bal. Mais que se passe-t-il pour ceux qui ne peuvent faire semblant ? », questionne Lloyd Newson. Avec un humour ravageur et une poésie sans concession, il brasse morphologies et caractères dans un éloge de la différence en forme de cabaret symphonique. Un véritable "salon des THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 4 AU 15 NOVEMBRE CRÉATION Josef Nadj Il n’y a plus de firmament 7 interprètes Comment naît un spectacle ? À en croire Josef Nadj, il s’agit d’une succession de rencontres. D’une promenade toute simple où l’on croise, comme par hasard, des figures extraordinaires. Le chorégraphe, conteur aux multiples facettes, plasticien, danseur, homme de théâtre, n’a besoin que de quelques gestes, semble-t-il, pour effacer les frontières entre l’art et la vie. Et peu de mots lui sont nécessaires pour nous faire entrer dans le monde de sa nouvelle création, Il n’y a plus de firmament. Tout débute par une conjonction de signes apparus bien en amont de la pièce. Une visite au peintre Balthus, une conversation autour d’un artiste, Antonin Artaud, dont le chorégraphe relit à l’envers les œuvres complètes. S’y ajoute une phrase, léguée par le peintre avant sa mort : « Josef, n’oublie pas mon ami Artaud ». Josef Nadj raconte encore des histoires étranges où se superposent l’homme et le cheval, la photographie et les espèces humaine et animale. À New York, il croise une autre étoile, de la danse cette fois, un jeune homme-oiseau de 80 ans, Jean Babilée. Nouvelle conversation à propos du peintre et de son œuvre, le jour même de sa disparition. Alors le chorégraphe reprend son ouvrage et tisse d’énigmatiques fils entre les tableaux de Balthus et la poésie d’Artaud. « Depuis ce moment, dit-il, je revisite Rilke, Tsoeing-Tseu, le Japon, l’Italie, l’Irlande. Je relie ces espaces comme une araignée, je tisse un labyrinthe dans lequel naît le spectacle ». Le chorégraphe officie avec une compagnie éclectique réunie autour de Jean Babilée, le célèbre créateur du Jeune homme et la Mort, chorégraphié par Roland Petit en 1946 d’après le livret de Jean Cocteau. Il est accompagné d’une jeune interprète chinoise Jing Li, de l’acteur et metteur en scène Yoshi Oïda, et d’artistes venus des arts de la piste, comédiens, jongleurs et acrobates. Jeu mas- 21 qué où dansent les ombres des figures tutélaires avec lesquelles Josef Nadj poursuit ses correspondances. Pièces maîtresses qui forment au fil du temps un recueil singulier de mémoires lunaires ou d’outre-tombe. Il n’y a plus de firmament, évoque les voyages, mais n’échappe pas à cette loi : la poursuite sans trêve d’un rêve halluciné dont les formes circulent entre théâtre et arts plastiques, enchâssent propos philosophiques et poésie. Esquisses, journaux de voyage, créations et rencontres dessinent peu à peu un parcours entièrement voué à l’évocation d’un mystère : le corps poétique et son langage. Irène Filiberti F. Verret, ph. Q. Bertoux THEATRE DE LA VILLE • TARIF C 25, 26, 28, 29 NOVEMBRE DU 18 AU 22 NOVEMBRE IN SITU PRODUCTIONS ET LE KWATT CRÉATION François Verret COMPAGNIE FRANÇOIS VERRET Chantier Musil CRÉATION Xavier Le Roy THEATRE DE LA VILLE • TARIF A 22 Le Théâtre de la Ville a coproduit et présenté 4 spectacles de François Verret depuis 1992. X. Le Roy, ph. D. Rüchel Le Théâtre de la Ville a présenté Canard pékinois en novembre 1987, et a coproduit 12 spectacles de Josef Nadj depuis 1988. compagnie. Les artistes sont ici des acteurs aux pratiques différentes. Scénographe, plasticien, graphiste, acrobate, compositeur, éclairagiste privilégient des modes d’expression qui ont de la patine et, en pleine ère digitale, inventent leurs propres outils : les tables à rouleaux où courent les pans de paysages déployés de Zouzou Leyens ; les dessins sur rhodoïd de Vincent Fortemps réfléchis sur plaque de verre et filmés. De l’espace-fil aux figures-mannequins, une seule logique, le flux de l’invention portée par le souffle d’une écriture de la sensation. Amples pulsations rythmiques, intervalles de silence et dissonances nourrissent cet art du récit. Un paysage mental éclairé de présences et d’intensités. I.F. 6 interprètes ÉLOGE DE L’INSTABLE Laboratoire, mémento, chantier, chez François Verret, tout part de l’espace et d’une réflexion sur la perception du réel : interroger le monde dans lequel nous vivons. Processus de travail ouvert, Chantier Musil, sa dernière création, est guidé par une lecture de L’Homme sans qualités de Robert Musil. À partir du grand œuvre inachevé de l’écrivain autrichien, le chorégraphe ajuste sa propre traversée dans le roman à la façon d’un repérage: « C’est une suite d’écritures fragmentaires, de visions, de tableaux. Il faut qu’il y ait le temps, que s’installe une durée pour que la mobilité du mouvement qui interroge le réel opère chez le spectateur. Et chaque vision est un fragment d’un tout, lui-même insaisissable ». La ville comme environnement, le regard changeant des pensées et des souvenirs du personnage central, Ulrich – dont le discours tend à relativiser avec ironie, le point de vue du récit précédent –, se croisent sur le plateau où différents langages artistiques multiplient encore les points de vue. Chantier Musil est un espace en mouvement qui n’en finit pas de se construire et de se reconstruire. À partir de l’image et du travail du regard. Comme à son habitude, pour cette récente création, François Verret expérimente en Projet 19 chorégraphes-danseurs LES JEUX SONT-ILS FAITS ? Xavier Le Roy ne cherche pas à livrer les secrets de l’influence du système de production sur le travail artistique. Mais si le danseur et chorégraphe français installé à Berlin s’est lancé dans une création de grande dimension intitulée Projet, c’est tout de même en y réfléchissant longuement. Aussi cette nouvelle pièce, répondant au nom de Projet – terme incontournable pour qui cherche à s’investir – est-elle la mise à l’épreuve d’un concept signé Xavier Le Roy dans un espace théâtral. La chorégraphie n’est plus le fait d’un seul chorégraphe mais de 19 artistes de tous pays, réunis sur le plateau. Autrement dit, si depuis les années 80, en Europe, le mot "danseur" a peu à peu été remplacé par celui d’interprète dans le vocabulaire de la danse contemporaine, il disparaît complètement avec cette nouvelle redistribution des rôles. Peut-on interroger à ce point la définition d’un statut, les pratiques d’un système et l’élaboration de son langage ? Le tout à travers une représentation et sa réception par le public ? Xavier Le Roy, coordinateur subtil, expert en maniements de concepts, n’en est plus à sa première expérimentation. Parmi ses différentes pièces, souvent réalisées en solo, figure SelfUnfinished (créé en 1998 et présenté au Théâtre de la Ville en 2000). Mémorable proposition révélant un corps aux configurations étranges tour à tour mécanique, animal, dédoublé. Une réflexion entre phénomènes optiques et métamorphoses corporelles dont le caractère ludique et inquiétant s’approchait THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 2 AU 7 DÉCEMBRE CRÉATION Merce Cunningham MERCE CUNNINGHAM DANCE COMPANY Fluid Canvas (2002) 15 danseurs création en France M. Cunningham, ph. T. Dougherty du conte et des jeux d’enfants. Après une série de pièces singulières structurées pour la plupart sous forme d’autoportraits, Xavier Le Roy, par ailleurs docteur en biologie moléculaire, s’est intéressé aux possibles déploiements de sa recherche. Aussi s’est-il fait l’instigateur, avec d’autres collaborateurs artistiques (Jérôme Bel complice de ses jeux de langages et d’interprétation ; Laurent Goldring, plasticien dont les chantiers ouverts invitent différents artistes à interroger l’image, l’espace et le corps), d’événements où se rencontrent artistes et scientifiques. Une de ces initiatives commencée en 1999 était baptisée E.X.T.E.N.S.I.O.N.S.. Les questions surgies lors des différentes sessions de ce travail ont mené Xavier Le Roy à ce nouveau dispositif. Dans la blancheur électrique des lumières, Projet travaille entre fiction et réalité. Un thème central traverse la représentation. Qu’est-ce que le jeu ? Le français ne possède pas la subtile distinction de la langue anglaise entre play et game. À l’œuvre sur le plateau. De la présence de l’acteur à d’autres notions plus complexes. Une multitude de jeux et de possibilités : entre l’écriture et l’improvisation, l’implication et la distance, le langage et ses matières. Un nouveau travail « sur la construction de nos subjectivités et son rapport aux I.F. règles sociales ». Canvas*, créée en 2002 lors du festival Dance Umbrella de Londres, et que le Théâtre de la Ville présentera pour la première fois en France, parallèlement à une nouvelle création. Sur l’écran noir d’un espace infini, comme surgies d’étourdissantes ténèbres, des traces lumineuses zèbrent l’opacité, spermatozoïdes galactiques venant féconder dans le corps même de la danse quelque énergie stellaire. Depuis plusieurs années, Merce Cunningham a adopté le logiciel informatique Lifeforms (un nom sur mesure !). Il s’en sert comme d’un pinceau virtuel pour démultiplier en trois dimensions une pensée du mouvement dont la vivacité excède toutes les clôtures, genèse en permanente formation. J.-M. A. * Fluid Canvas sera la 18e création en France du chorégraphe au Théâtre de la Ville depuis 1972. création 2003 À chaque fois, jubilation recommencée. Voudrait-on ranger Merce Cunningham une fois pour toutes dans les étagères de la mémoire, le figer dans cette histoire de la danse qu’il a bousculée, donnant corps aux nombreux préceptes qui ont ensemencé la danse contemporaine pendant cinquante ans ? Peine perdue. À 80 ans passés, le voici toujours aussi pétillant, insatiable chercheur, savant et empiriste, comme mu par une curiosité jamais rassasiée pour tous les tropismes du mouvement dansé. L’espace flambe des comètes qu’il y injecte, en artisan des constellations qui condense dans le moindre tracé l’infinie complexité du vivant. Poète de l’univers en son instabilité dynamique, Cunningham défait la pesanteur terrestre en piégeant la gravitation des corps, les projetant en d’insaisissables hiéroglyphes. On pourrait voir le corps cunninghamien comme une marionnette dont un dieu facétieux tirerait les fils avec une dextérité enjouée. Mais ce dieu marionnettiste n’existe pas. Pas d’autorité supérieure : le miracle de la vie se suffit à luimême, comme un fluide sur lequel aucune instance ne peut légiférer. « Je pense à la danse comme à une constante transformation de la vie même », confia un jour Merce Cunningham. Paradoxe d’une architecture du mouvement qui est, en elle-même, essence mobile, comme le suggère le titre de l’une des dernières pièces du chorégraphe, Fluid A. Preljocaj, ph. Ch. Robin avec le Festival d’Automne à Paris THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 10 AU 23 DÉCEMBRE CRÉATION Angelin Preljocaj BALLET PRELJOCAJ CCN Near Life Experience 9 danseurs musique et interprétation sur scène Air (Jean-Benoît Dunckel, Nicolas Godin) Il l’affirme sur un ton dont la conviction laisse percer un émerveillement toujours incrédule : le corps dansant peut tout dire et en particulier les sensations les plus secrètes, celles que les mots échouent à cerner. Depuis près de vingt ans, le chorégraphe Angelin Preljocaj n’a cessé de fouiller des états physiques hautement insaisissables : la sainteté à travers le personnage de Jeanne d’Arc dans Hallali 23 Romée (1987), le désir pour Liqueurs de chair (1988) puis Le Parc (1994), la souffrance dans MC 14/22 (2001), l’effroi du sexe dans Le Sacre du printemps (2001). Cette poétique du corps, conduite dans une écriture souple et coupante comme une liane, avec ses sauts serrés mais aussi ses suspensions cotonneuses, le chorégraphe sait la chauffer jusqu’à l’incandescence avec un instinct très sûr. Dans sa nouvelle pièce intitulée Near Life Experience, il met en scène ces zones intermédiaires à la limite de la conscience, voire carrément de l’ordre de l’inconscience, que sont l’évanouissement, l’extase, l’hystérie, l’orgasme, la transe… « Il s’agit d’évoquer ce corps exceptionnel qui s’échappe, sort de ses gonds pour pénétrer dans une dimension de la vie totalement extraordinaire, explique Angelin Preljocaj. C’est une sorte de tentative de soustraction au temps et à l’espace, une éclipse du moi à travers laquelle je cherche une nouvelle écriture en creux du corps. » La musique électro-pop suave du groupe Air (Nicolas Godin et Jean-Benoît Dunckel) soutient cette quête affolante d’un homme qui, une fois encore, jette la danse dans la bataille et la défie d’en sortir victorieuse. R. B. Ndlr : De 1972 à 1998, le Théâtre de la Ville a invité 8 fois le Ballet Culberg et a présenté 21 des 26 chorégraphies de Mats Ek dont : Solo for two en 1996 ; Giselle en 1984 et 1986 ; Carmen en 1992 ; Le Lac des cygnes en 1987 et 1990 ; La Maison de Bernarda en 1984, 1992 et 1996. Mats Ek, ph. P. Gely/Bernand Air, ph. J. Teller Ndlr : Le Théâtre de la Ville invite Angelin Preljocaj pour la 11e fois. Il a présenté 13 de ses spectacles dont 9 coproductions. Hallali Romée fut présenté en 1987, Liqueurs de chair en 1989 et 1990, et Le Sacre du printemps, en 2001. le vocabulaire classique dont on dirait qu’il lui a tordu les pieds, cassé les reins et écartelé les jambes, Mats Ek taille dans le vif une gestuelle expressive, piquée d’accents triviaux, qui semble toujours au bord d’un danger, du geste en trop. C’est dire la force d’impact de ses spectacles basés par ailleurs sur des scénarios qui, explicites ou non, se révèlent souvent anxiogènes. Soit qu’il puise dans le répertoire classique (Giselle, Carmen…) dont il opère des relectures d’une redoutable acuité, soit qu’il libère ses fantasmes dans des pièces plus abstraites, ce chorégraphe ne recule devant aucun excès pour évoquer l’obscur destin humain. « Le grotesque est ma représentation de la beauté » se plaît-il à dire. Quant à l’amour, il le place sous l’égide de l’incompréhension, de la cruauté et de la mort, que le sexe permet un temps d’oublier. Solo for two (reprise scénique d’un film conçu pour Sylvie Guillem et Niklas Ek, frère du chorégraphe, dont le titre dit bien la solitude à deux du couple), l’une des deux pièces présentées par le Ballet de l’Opéra de Lyon, concentre l’essence de sa vision du couple, solitude à deux, entre tragique et merveilleux. Pièce pour douze danseurs, Fluke sur une musique du groupe Fläskkvartetten, entrechoque la solitude des uns contre la puissance des autres en groupe. Un match serré comme un poing, comme la danse de Mats Ek. R. B. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 3 AU 7 FÉVRIER Mats Ek Ballet de l’Opéra nationaldeLyon 24 Ils se comptent sur les doigts d’une seule main, ceux qui ont sculpté une écriture chorégraphique tellement spécifique qu’on l’identifie d’entrée de jeu. Le Suédois Mats Ek fait partie de ceux-là. Sa danse possède non seulement une ossature singulière mais aussi la densité charnelle qui va avec, plus serrée que la moyenne et non moins rare. Arc-bouté sur R. Chopinot, ph. M. Olmeta Solo for two 2 danseurs Fluke 12 danseurs CRÉATION THEATRE DE LA VILLE • TARIF A CRÉATION A. Nikolais, ph. C. Masson/Enguerand Régine Chopinot BALLET ATLANTIQUE - RÉGINE CHOPINOT W.H.A. (Warning Hazardous Area) 9 danseurs Depuis dix ans, ils ne s’étaient pas vraiment revus. En venant voir Chair-obscur * au Théâtre de la Ville, Jean-Paul Gaultier a glissé ce compliment à Régine Chopinot : « Tu ne t’es pas assagie ». Du coup, le styliste et la chorégraphe vont retravailler ensemble sur la prochaine création de W.H.A. (Warning Hazardous Area). Le duo Chopinot-Gaultier a marqué de son double sceau tout un pan de la danse des années 80, intrépide, effrontée mais ludique, euphorisante et affranchie. Tout fut permis : un mémorable Défilé de créatures hybrides, des danseurs harnachés dans les airs de Rossignol *, une scène transformée en ring de boxe pour K.O.K… Depuis, c’est vrai, Chopinot ne s’est pas assagie, mais l’époque a changé. Plus sombre, plus incertaine, moins utopique. Désormais installée à La Rochelle, la chorégraphe du Ballet Atlantique a su ne pas se reposer sur ses lauriers. Tout au contraire, elle a sarclé les fondements de sa danse, préparé l’humus de nouvelles énergies : Végétal *, Paroles du feu *, La Danse du temps *, ont pris à contre-pied ceux qui ne voyaient en Chopinot que le goût de la mode. Au risque d’être incomprise, elle signe avec Chair-obscur une sorte de danse macabre, suffocante et vertigineuse ; et tout récemment avec Alain Buffard, met à nu sa folle liberté d’être. « Je ne suis pas dans le concept, je suis dans l’artisanat du corps », affirme celle qui n’en a heureusement pas fini de se délester des contraintes et du « confort de la certitude » à l’encontre desquels la danse oppose obstinément une quête de sens. W.H.A. expose une nouvelle zone de turbulences entre l’accumulation des entraves et le sentiment de liberté qui peut naître d’une volonté suspendue. Aux danseurs du Ballet Atlantique se joignent deux performers sud-africains et deux interprètes vietnamiens ; corps et langages assemblés, jusque dans un travail de voix qui devrait prendre la forme d’un chant onomatopéique, pour se laisser aller à la seule subversion de "l’idiotie". Ultime espace de provocation laissé aux libres artistes ? J.-M. A. * 5 des 9 spectacles de Régine Chopinot coproduits par le Théâtre de la Ville depuis 1984. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 24 AU 28 FÉVRIER Alwin Nikolais RIRIE WOODBURY DANCE COMPANY direction artistique Murray Louis extraits de : Crucible (1985), Lythic (1956), Blank on Blank (1987), Liturgies (1983), Noumenon (1953), Mechanical Organ (1982), Tensile Involvement (1955) En cinquante ans de danse et 130 ballets, l’Américain Alwin Nikolais (1910-1993) n’a jamais démérité de son surnom de Nik l’enchanteur, façonnant avec une inventivité gourmande mille et un stratagèmes visuels pour métamorphoser la scène en un vivant kaléidoscope. Danse, costumes, accessoires, lumières, projections, musique, cet artisan et artiste d’un théâtre total aussi inclassable que lui, fabriquait tout, rêveur actif de cette féerie de l’étrange où les corps deviennent les supports vibrants d’images toutes plus hallucinantes les unes que les autres. Mais au-delà de cette apparence de flamboyant mirage optique, c’est une vision du danseur manipulé, partie interchangeable d’un grand tout en mouvement, que propose cet ex-marionnettiste qui aimait parler de l’homme « comme compagnon voyageur dans le mécanisme universel, plutôt que comme le dieu source de toute chose. » Fragmentée, sa gestuelle additionne les postures drolatiques et raconte le choix d’une danse décalée, un brin ironique et totalement libérée du joug de la beauté classique. Le programme établi par Murray Louis, son interprète et compagnon, témoigne de l’amplitude de son invention. Depuis Noumenon (1953) dans laquelle les interprètes sculptent le mouvement à l’intérieur de tissus extensibles jusqu’à Blank on Blank (1987), œuvre de danse pure en passant par Tensile Involvement (1955) piège d’élastiques, ce panorama unique raconte l’affirmation têtue d’un artiste soucieux de repeindre l’univers aux couleurs de l’illusion. R. B. Ndlr : De 1971 à 1992 le Théâtre de la Ville a invité 8 fois Alwin Nikolais et présenté plus de 30 pièces dont toutes celles du programme sauf Lythic. A. Nikolais, ph.L. Philippe DU 10 AU 14 FÉVRIER 25 A. T. De Keersmaeker, ph.H. Sorgeloos M. Chouinard, ph.L. Labat l’impatience qu’il y aurait à violer la croûte terrestre, à laisser venir dans le corps la sève volcanique du dessous. La danse de Marie Chouinard est au diapason de cette griffure nerveuse des surfaces, à l’écoute des énergies enfouies qu’elle amène à fleur de peau. J.-M. A. THEATRE DE LA VILLE • TARIF B DU 5 AU 9 AVRIL 1er PROG. Anne Teresa De Keersmaeker THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 2 AU 6 MARS Marie Chouinard Étude # 1 ROSAS Bitches Brew - Tacoma Narrows 13 danseurs REPRISE solo dansé par Lucie Mongrain Chorale 10 danseurs 26 CRÉATION CRÉATION Au commencement était la Danse… Pour Marie Chouinard, il est clair que l’humanité ne s’origine pas dans un Verbe divin, mais dans un magma de forces terrestres, cosmiques et organiques, dont le corps dansant peut retrouver l’écho. Ce pré-langage fiévreux, la chorégraphe canadienne en a fait la source brûlante de ses créations depuis vingt-cinq ans. La forge de ses premiers solos a façonné un travail de compagnie que l’on a pu découvrir l’an passé au Théâtre de la Ville avec Les 24 Préludes de Chopin et le cataclysmique Cri du monde. La "chorégraphie" est ici la ligne de tension qui tient le champ magnétique des énergies non domestiquées. De ces « pulsions irrésistibles qui étirent les corps et les désaxent », Marie Chouinard fait naître un unisson qui chante le mystère infini d’une grande fête païenne. Chorale, sa prochaine création, part en quête de ces "apothéoses" où l’informe et le difforme, l’étrange et l’inquiétant, mènent une sarabande commune. La danse, soutenue par une composition électroacoustique de Louis Dufort, se propagera dans le souffle d’un chœur, singulièrement composé de « voix haletées, scandées, gloussées, hurlées, ululées ». En prélude au déferlement de cette Chorale, Marie Chouinard offrira à nouveau le magnifique Étude # 1, solo composé pour Lucie Mongrain, dans lequel la danseuse racle le sol métallique de ses semelles ferrées, désignant musique Miles Davis Anne Teresa De Keersmaeker, chorégraphe de l’infiniment multiple. Fase et Rosas danst Rosas – voici maintenant plus de vingt ans –, contenaient déjà le noyau d’une danse incroyablement vivante qui touche au cœur même de l’activité humaine, en ses patients recommencements, ses montées de sève, ses imprévisibles engendrements. Entre structure et émotion, Anne Teresa De Keersmaeker n’a cessé d’explorer de nouvelles lignes de flux, chaque création venant relancer le jeu dynamique des formes, dont les "corps conducteurs" du mouvement sont venus chaque fois fêter la jouissive expérience. « Ce qui est fini n’est jamais achevé », écrit Paul Valéry. Jamais le mystère du vivant ne s’épuise. La chorégraphe de Rosas a fouillé, inlassablement, les structures musicales – de Bartók à Monteverdi, de Bach à Steve Reich et Thierry De Mey –, fascinée par la souveraineté du rythme et ses architectures complexes. Mais le chaos est aussi venu bousculer ce savoir, tant il est vrai que « la vie circule rapidement d’un point à un autre, en une sorte de ruissellement électrique » (Georges Bataille), et que sur scène, la "présence" des interprètes jaillit de cet influx, quitte à affoler et enflammer la composition qui les inclut. Enfin, force d’abstraction, la danse n’est cependant pas coupée du monde. Chez Anne Teresa De Keersmaeker, elle s’y intègre par la théâtralité de certaines œuvres, de Stella autrefois au récent In real time, création partagée avec les musiciens de l’ensemble Aka Moon et les acteurs de la compagnie tg Stan. Cette très riche palette de formes et d’expressions irrigue la prochaine saison du Théâtre de la Ville, avec trois spectacles distincts, dont deux créations et une reprise du solo Once. Exception faite de la collaboration avec les improvisateurs d’Aka Moon, jamais à ce jour Anne Teresa De Keersmaeker n’avait puisé dans la musique jazz l’élan de ses tourbillons. Cet "oubli" sera réparé avec la création de Bitches Brew–Tacoma Narrows, qui laisse infuser le tempérament de la danse dans le bouillonnement d’un album culte de Miles Davis, Bitches Brew, issu de l’enregistrement de plusieurs séances d’improvisation, à la toute fin de la "décennie tumultueuse" des sixties. Entouré de musiciens d’exception, en voltigeur d’éclats d’un jazz furieusement libre et cosmopolite, Miles Davis semble « galvaniser les turbulences » que traversent alors les États-Unis (assassinats de John et Robert Kennedy, de Martin Luther King et Malcolm X, mouvements radicaux contre la discrimination raciale, manifestations contre la guerre du Vietnam…). Sur les plages de cet album à haut voltage, Anne Teresa De Keersmaeker cherche le grain de nouvelles matières chorégraphiques, traversées par l’écho des dancing steps de vieux films de jazz ainsi que par des figures venues du hip hop ou de la danse africaine. C’est aussi pour elle l’occasion d’approfondir des systèmes d’improvisation, où « les notions de liberté, de décision dans l’instant, de travail sur le présent » peuvent donner au mouvement une acuité maximale. J.-M. A. Foi *, pièce reprise cette saison, est le premier spectacle d’un genre inédit : un opéra médiévo-contemporain. La musique jouée sur scène, chantée, est un paradigme essentiel au travail du chorégraphe. Cette production réunit 18 interprètes de différentes nationalités dont quatre chanteurs et trois musiciens de l’ensemble vocal et instrumental flamand, Capilla Flamenca, dirigé par Dirk Snellings. Le XIVe siècle et les musiques savantes écrites de l’Ars Nova jouxtent un répertoire de chants villageois transmis par tradition orale. Les danseurs-chanteurs dirigés par Christine Leboutte avec la collaboration de Damien Jalet, complice de création du chorégraphe, les interprètent. Dans un espace en triangle, évoquant une tour ou une tombe, voix cristallines et présences angéliques provoquent l’imaginaire des interprètes. Une rare intensité se dégage des gestes des danseurs qui, entre saynètes théâtrales, chants polyphoniques et danses singulières, se livrent à un hallucinant récitatif, véritable reflet des sentiments d’une société, semé d’images. Sans rien altérer de la violence et de l’intelligence de ces vies réinventées, Sidi Larbi Cherkaoui met en scène, entre le rire et les larmes, une communauté de figures aveugles qui semblent attendre un improbable messie ou campent en posture de survie face au néant. I. F. * Coproductions Théâtre de la Ville depuis février 2001. THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 21 AU 29 AVRIL REPRISE Sidi Larbi Cherkaoui LES BALLETS C. DE LA B. - CAPILLA FLAMENCA 11 danseurs et 7 musiciens ENTRE VISION ET RÉALITÉ Sidi Larbi Cherkaoui a fait son nid dans la chatoyance de spectacles qui épousent l’air du temps. Ses compositions procèdent sur un mode simple et sans façons : styles de danse et pratiques artistiques se côtoient sans hiérarchie. À égalité de voix. Dans le sillon d’Alain Platel et des Ballets C. de la B. dont il fut un des interprètes, le jeune chorégraphe belge et marocain distille une savante confusion entre arts mineurs et majeurs. Il ne redoute ni les décalages abrupts, ni le réalisme, ni le travail en collectif avec ses complices de création. Rien de rien*, premier essai présenté au Théâtre des Abbesses il y a deux ans, s’intéressait aux blessures identitaires, traçait avec humour la fable vive de mythes individuels entre danse classique et salsa, ou récits de voyage rythmés par les mots et les gestes. L’année suivante, D’avant *, mettait en scène un fabuleux quatuor de jeunes troubadoursinterprètes chantant a cappella, désamorçant quelques stéréotypes masculins entre séquences de tango et scènes de football, numéro de transformisme et parade de revue. Ce joyeux boys band médiéval préfigurait le grand œuvre accueilli au printemps dernier au Théâtre de la Ville. S. L. Cherkaoui, photos L. Philippe Foi 27 E. Greco, ph. B. Guilherme CRÉATION Emio Greco EMIO GRECO/ PC – STICHTING ZWAANPRODUKTIES Rimasto Orfano 6 danseurs 28 LE CORPS ET SES VISIONS Ils travaillent en tandem et ne se refusent rien, ni le spectaculaire, ni l’éloquence. Emio Greco, danseur et chorégraphe originaire du sud de l’Italie a suivi une formation classique avant de rejoindre le renommé démiurge flamand Jan Fabre. Il dansera dans plusieurs de ses spectacles ainsi que pour le chorégraphe japonais Saburo Teshigawara. Metteur en scène et chorégraphe néerlandais, Pieter C. Scholten réalise des spectacles à partir de personnalités qui le fascinent. C’est ainsi qu’en 1995, il fonde avec Emio Greco une compagnie avec laquelle ils décident d’explorer les possibilités du corps, les origines du mouvement. Une première trilogie intitulée Fra Cervello et Movimento (Entre cerveau et mouvement) fait la synthèse de ce langage singulier. Vocabulaire classique et postmoderne empreint d’une théâtralité rigoureusement abstraite. Chez Emio Greco et Pieter C. Sholten, les gestes sont dotés d’une énergie fulgurante. Captés dans le passage des lumières, les corps explorent la densité des couleurs, blanc, rouge et doré dans la trilogie, noir pour Conjunto di nero1 et se fondent dans la pulsation musicale. Une démarche qui met en relief les différentes qualités des danseurs alors même qu’une gestuelle identique, uniforme, les conduit. Ce langage crée une fascination insolite, souvent perturbée par des évènements qui introduisent de la distance, de l’ironie, par brusques déflagrations, transformant soudainement l’espace ou les phrases dansées. Deux de ces médusantes fictions de chair, créées et interprétées par Emio Greco sous les lumières sophistiquées également dues à Pieter C. Scholten, ont été accueillies par le Théâtre de la Ville : Double Points : One and Two 2 et Conjunto di nero, première création pour cinq danseurs glissant sur le plateau à la façon d’ironiques surfeurs de l’inconnu. À la suite de cette recherche sur la couleur noire, les deux chorégraphes imaginent un travail sur le silence. Rimasto Orfano, (littéralement « resté orphelin ») explore un autre espace de transition où projeter leur danse. Ce moment où une force libératrice réduit le corps au silence. Abandon, désespoir ou solitude. Beauté idéale du corps souffrant, inspirant toutes sortes de sentiments comme la compassion. Sur des musiques contemporaines du compositeur américain Michael 1 2 Présenté au Théâtre de la Ville, février 2003. Présenté aux Abbesses, novembre 2001. J. et A. T. De Keersmaeker, ph. B. Dexters DU 4 AU 8 MAI Gordon, le mouvement se relâche, avant de peu à peu se découvrir une nouvelle vigueur. Entre conscience et intuition, ordre et chaos, Rimasto Orfano sculpte un autre corps, à la recherche de la force dans la fragilité. Énigmatique enquête chorégraphique où le corps tient un rôle essentiel. Un personnage doué de visions. I. F. A. T. De Keersmaeker, ph. H. Sorgeloos THEATRE DE LA VILLE • TARIF A P. Bausch, ph. L. Philippe THEATRE DE LA VILLE • TARIF B e DU 11 AU 15 MAI 2 PROG. CRÉATION Anne Teresa De Keersmaeker Jolente De Keersmaeker ROSAS création 2004 cente, pour tenir cette partition délicate sur la crête quasi liturgique de certaines chansons de Joan Baez. Les combats d’hier ont-ils baissé en intensité ? Les images d’un champ de bataille, projetées à la fin de Once, sont là pour rappeler que la violence et la guerre sont toujours le lot de ce monde. Peau dénudée, traversée par cette projection, Anne Teresa De Keersmaeker dit alors son désarroi face à cette persistance des forces de destruction, contre lesquelles la danse s’avance à découvert, dans la seule humilité de son offrande. J.-M. A. 13 danseurs La seconde création de cette saison reste pour l’heure une énigme. Seule certitude : la chorégraphe de Rosas travaillera en binôme avec sa sœur, Jolente De Keersmaeker, épatante et mutine actrice du collectif de théâtre tg Stan. Cette collaboration n’est pas nouvelle. Enracinée à partir de Just before (1997), où les danseurs faisaient remonter dans le langage leurs souvenirs ; poursuivie avec les mots de Heiner Müller dans Quartett (1999) ou ceux de Peter Handke dans I said I (2000), cette recherche d’un champ communicant entre danse et texte, qui maintient dans un état d’urgence réciproque le mot et le mouvement, s’apparente, pour Jolente De Keersmaeker, à la découverte « d’un territoire inconnu, sans délimitation frontalière : il en ressort un nouveau langage, un courant souterrain dont la substance vous demeure secrète, et qui est en mutation permanente. » J.-M. A. THEATRE DE LA VILLE • TARIF A DU 18 AU 22 MAI 3e PROG. REPRISE Anne Teresa De Keersmaeker ROSAS Once solo dansé par Anne Teresa De Keersmaeker « Je veux chercher le geste qui sort du dit, et à l'inverse nier le texte pour laisser exister le mouvement » : dans le solo Once, c’est encore ce fructueux dialogue entre plusieurs courants d’intensité que tisse Anne Teresa en se projetant, intime et souveraine, sur l’écran nostalgique des chansons de Joan Baez. L’espace y est nu, sans artifice, tendu du seul écho qui se propage de la voix intense, épaisse et vibrante, de la chanteuse contestataire des années 60, aux "lignes d’erre" que la chorégraphe-danseuse ébauche et dessine en taille-douce. Il faut toute la maturité d’une danse qui ne verse jamais dans l’ostentation, et feint au contraire quelque malice adoles- THEATRE DE LA VILLE • TARIF EXCEPTIONNEL DU 4 AU 22 JUIN CRÉATION Pina Bausch TANZTHEATER WUPPERTAL création 2003 20 danseurs Pendant les trois heures de la création 2003, le plateau creusé comme une vasque se nappe imperceptiblement d’eau avant de s’assécher. Miracle d’une scénographie de Peter Pabst, si simple et si sophistiquée à la fois, que le phénomène semble naturel. On est à Istanbul, nouvelle étape du voyage autour du monde entamé en 1989 par Pina Bausch. Encore une ville d’eau, une de plus après Lisbonne, Rio, Budapest, occasion d’une scène au hammam en serviette de bain blanche, telle que les affectionne la chorégraphe de Wuppertal. Clin d’œil et quasi-citation, les vingt danseurs de la compagnie y brodent des motifs mousseux soufflés par les cheveux des filles battant l’air comme des feuilles de palme. L’insouciance apparente du spectacle est sans cesse grignotée par une certaine gravité que souligne le fond de scène, trou noir d’où émergent les silhouettes pailletées des femmes. Sur une bande-son composée de musiques turques, de chansons de Tom Waits ou de tangos d’Astor Piazzolla, les solos, pierres de voûte, aujourd’hui des pièces de Pina, se révèlent tous d’une furieuse beauté. Inventifs en diable, ciselés au coude près et débordants d’une vitalité exacerbée, ils exaltent les tempéraments de chacun des interprètes au point qu’on les croirait en train de jouer leur peau à chaque passage. Istanbul et ses seize millions d’habitants, banlieue comprise, vit au bord d’un gouffre : la ligne de faille anatolienne passe par la mer de Marmara et fait l’objet d’une surveillance permanente par des spécialistes. Sur les rideaux en tulle blanc que les danseurs tirent comme pour une séance impromptue de cinéma, un des deux filmsvidéo de cette création 2003* plonge dans les eaux tumultueuses du Bosphore. R. B. * 21e passage de Pina Bausch au Théâtre de la Ville. 29 DANSE AUX ABBESSES LES ABBESSES • TARIF A DU 23 AU 27 SEPTEMBRE CRÉATION Alarmel Valli bhârata natyam A. Valli, ph. Birgit Fulgurante interprète de bhârata natyam, Alarmel Valli sait en faire miroiter toutes les brillances, conjuguant avec une aisance non dépourvue de séduction, la fluidité et la géométrie inhérentes à cette danse. Basé sur la figure du triangle, le plus ancien style traditionnel indien originaire du Tamil-Nadu s’enracine dans des codes complexes et stricts (position en demi-plié, symétrie du corps, distance de hauteur établie à huit centimètres entre les pieds…) que cette danseuse formée par les plus grands maîtres du genre, innerve avec un subtil mordant. Des deux versants du bhârata natyam, la danse pure (nritta) et la danse expressive (abhinaya), Alarmel Valli aiguise encore et toujours la concision des formes et des rythmes avec une musicalité qui coule de source. Mais cette exquise incarnation ne serait que pur exploit technique s’il n’y avait cet embrasement sensible qui déporte la danse de l’expression des mythes collectifs vers celle, individuelle, d’une artiste d’aujourd’hui. Respectueuse au sens fort des traditions, Alarmel Valli a légèrement tempéré l’aspect extraverti du bhârata natyam tout en conservant cette joie de danser, essence même du style. Héritière des devadasis, ces danseuses des temples qui officiaient pour les dieux, elle tisse un lien vivace entre le passé et l’avenir. Dans le programme présenté au Théâtre de la Ville*, elle a choisi, à travers une série de poèmes, d’évoquer la guerre, sa vanité et la souffrance individuelle qu’elle engendre. Parallèlement, elle se glissera dans les méandres d’un texte contemporain écrit par un poète tamoul sur l’eau et le cycle de la vie. Dans sa radieuse féminité, avec ce sourire indescriptible qui ne la quitte que rarement quand elle danse, Alarmel Valli nous tend en toute simplicité les clefs de son art. R. B. * Où elle est déjà venue en 1997, 1998 et 2002. LES ABBESSES • TARIF C DU 2 AU 5 OCTOBRE Daniel Dobbels DE L’ENTRE-DEUX Est-ce que ce qui est loin s’éloigne de l’être humain ? (1999) 3 danseurs She never stumbles (1997) solo dansé par Brigitte Asselineau B. Asselineau, ph. G. Nicolas 30 « De quel jour s’éclaire une danse ? Quelles nuits et combien de nuits traverse-t-elle pour venir en son jour ? » Questions inspirantes parmi d’autres posées par l’écrivain et chorégraphe Daniel Dobbels que le Théâtre de la Ville invite pour la première fois. Compagnon de création de Christine Gérard pendant vingt ans, à la tête de sa propre compagnie de l’Entre-Deux depuis 2000, il met en scène un S. L. Cherkaoui, ph. L. Philippe geste d’une parfaite étrangeté qui remonte de si loin que son évidence ne fait pas un pli. Lentement déployé, comme s’il fallait l’arracher à son obscurité, le mouvement s’étire, épuré et vibrant, sec et charnel. Une certaine gravité nimbe l’acte de danser selon Daniel Dobbels. « La ligne même devient une expérience première », résume-t-il à propos des deux pièces au programme. Sur trois chansons de Bob Dylan, She never stumbles, interprété par la complice de longue date Brigitte Asselineau, met en scène un mouvement quasi empêché qui creuse sa voie, inconnue et imprévisible, en prise directe avec l’inconscient. Sous l’égide d’Oskar Schlemmer, professeur du Bauhaus en 1933 et inventeur du fameux Ballet Triadique, Est-ce que ce qui est loin s’éloigne de l’être humain ?, pièce pour trois interprètes, travaille par soustraction l’œuvre de l’artiste allemand. Sans les fabuleux costumes qui ont fait la signature Schlemmer, que reste-t-il de la danse ? Sur ce chemin dénudé, Daniel Dobbels fait dialoguer les corps avec l’espace pictural et architectural du plasticien, glissant, à travers des projections et des textes, dans ce temps suspendu qu’est le partage d’une vision, fût-elle, passée. R. B. festation propose chaque année aux danseurs de choisir un chorégraphe pour leur écrire un solo. Dans l’édition 2001, Dominique Mercy, interprète emblématique de Pina Bausch avait rencontré Josef Nadj, le chorégraphe conteur, le temps de la création d’un magistral duo baptisé Petit Psaume du matin*. L’été 2002, à son tour, Sidi Larbi Cherkaoui, le danseur, sollicite Wim Vandekeybus, le chorégraphe flamand, qui a suivi son travail depuis ses débuts dans les Ballets C. de la B. À cette occasion, ils créent ensemble, It, un spectacle tout d’abord présenté en plein air, qui s’inspire et s’amuse d’une nouvelle de Paul Bowles, The Circular Valley. Le texte récité en voix off est porté par un magnifique âne, séducteur impassible cherchant à ravir la vedette au danseur-ascète longtemps immobile sur un mât avant d’entreprendre au sol une danse toute en énergie aérienne. Cette première version a été réadaptée et développée pour le théâtre. La pièce se poursuit, intégrant un nouveau film de Wim Vandekeybus, avec la complicité de Charo Calvo, qui conçoit les environnements sonores des pièces de nombreux artistes, et a écrit une musique électro acoustique pour ce solo. Les deux chorégraphes ont mixé leurs conceptions du mouvement, et leur forme d’humour. Ils ont noué un dialogue complice qui part d’une intention donnée par le chorégraphe flamand. « Nous allons travailler sur la capacité de se transformer, pour accéder à des états différents. J’aimerais que Larbi oublie qu’il est de chair, qu’il devienne un esprit. Ce solo raconte une histoire, mais ce n’est pas lui qui va la raconter. Il est l’histoire. L’histoire est racontée par un enregistrement. J’ai toujours été fasciné par ce que l’on ne peut pas toucher, par exemple les émotions. » Dans It, danseur spirituel, Larbi Cherkaoui se présente en hauteur, pieds et tête suspendus dans le vide. Son corps allongé, perché à l’horizontale au faîte d’un mât scintillant, forme la barre transversale d’un T. Peut-être celui de "it", cet article de genre neutre en anglais. Esprit qui ne consent à descendre que pour s’illustrer dans une valse de gestes fluides, soyeusement virtuoses, tour à tour sinueux ou ondoyants. Entre la chair et l’esprit, le récit imaginé par Wim Vandekeybus travaille au plus près des qualités de son interprète. Performance physique et humour accompagnent cette rencontre toute en énergie avec deux chorégraphes remarquables. I. F. W. Vandekeybus, ph. W. Filz * Coproduit et présenté par le Théâtre de la Ville en décembre 2001. LES ABBESSES • TARIF C 2, 3, 5, 6 DÉCEMBRE 1er PROG. LES ABBESSES • TARIF C DU 7 AU 11 OCTOBRE CRÉATION Wim Vandekeybus Sidi Larbi Cherkaoui ULTIMA VEZ – LES BALLETS C. DE LA B. It solo dansé par Sidi Larbi Cherkaoui DANSE DE L’ESPRIT Tout a commencé dans le cadre du Vif du sujet, durant le Festival d’Avignon. Cette mani- CRÉATION Akram Khan AKRAM KHAN COMPANY Ronin solo de kathak dansé par Akram Khan Kathak. En deux syllabes, le nom de cet art demi-millénaire plonge déjà dans l’ivresse des rythmes, mathématique stellaire que la musique et la danse ont apprivoisée et transmise. L’Inde du Nord a été le berceau du kathak, dans la foulée des troubadours nomades qui propageaient les grands récits mythologiques de l’Inde (la geste de Râma, les épisodes du Mahabharata…). Les influences musulmanes et persanes se sont 31 B. Leroux, ph.X. DR A. Khan, ph. A. Tanveer progressivement mêlées aux origines hindoues pour aboutir à un style dans lequel la dimension narrative et théâtrale a perdu de son importance. C’est cette longue tradition, qui n’a cessé d’évoluer, qu’Akram Khan prolonge aujourd’hui dans la quête d’une intensité rythmique d’où peuvent jaillir les plus exquises fulgurances : « Je suis très sensible à la qualité de danse produite par la rotation, la vitesse, qui rapproche le kathak du soufisme ou des derviches. Le développement d’une énergie continue qui amène le danseur au bord de l’explosion et qui soudain peut être contrôlée dans une extrême lenteur, est au cœur de mon travail ». Akram Khan, s’il a suivi l’enseignement du maître Sri Atrap Pawar, s’est aussi familiarisé, en Grande-Bretagne où il est né, avec les préceptes de la danse contemporaine. Cette double approche lui permet de nourrir un dialogue constant entre tradition et création. Avec Ronin, il poursuit une exploration du kathak dépourvue de tout maniérisme ostentatoire, initiée avec le solo Polaroïd Feet, présenté la saison dernière au Théâtre de la Ville. Accompagné des musiciens Partha Sarathi Mukherjee (aux tablas), Baluji Shrivastav (au sitar), du violoncelliste Philip Sheppard et de la chanteuse Faheem Mazhar, Akram Khan s’inspire cette fois-ci de plusieurs épisodes du Mahabharata, dont le célèbre dialogue entre Krishna et le guerrier Arjuna. Une geste que le danseur transpose avec une rare éloquence dans l’exacte ponctuation des vitesses du mouvement. J.-M. A. LES ABBESSES • TARIF C DU 16 AU 20 DÉCEMBRE CRÉATION Brice Leroux DIXIT. VZW Gravitations – quatuor avec le Festival d’Automne à Paris LA MARCHE DU TEMPS Gravitations-quatuor ne s’explique pas et peut à peine se décrire. Quatre interprètes identiques, portant tunique et jupe longue, glissent dans l’ombre. Silence, espace. Juste le frottement des pieds sur le sol. « Une bande sonore tout simplement générée par le mouvement dont le bruit est amplifié et remodelé au fil de la représentation » *. Le rythme de cette marche crée une danse de cercles. Les silhouettes sont hiératiques. Fines et immuables dans leur verticalité. Elles semblent s’allonger à la limite de disparaître. Juste un seul mouvement, elliptique. Une sorte de spirale cinétique, une réflexion sur la gravitation. Au sol, les lumières diaphanes montrent le trajet des cercles : des fils lunaires, presque fluorescents qui dessinent des figures géométriques, un monde de courbes évoluant dans un climat de transe où le spectateur sous perfusion hypnotique maximale perd peu à peu ses repères pour entrer dans un autre espacetemps. Ce vertigineux quatuor de marcheurs dans le cosmos est l’œuvre de Brice Leroux. Le jeune chorégraphe français longtemps interprète chez Anne Teresa De Keersmaeker dont il intègre la compagnie Rosas à l’âge de dixneuf ans, travaille, depuis, en Belgique. En 1999, il crée un premier programme en deux volets, Continuum solos et duos sur place, sur la musique de Steve Reich. Dès ses débuts, les propositions du chorégraphe sont remarquées d’autant qu’elles offrent une lecture critique des études et de la composition développées par la compagnie Rosas en s’y reliant de façon très particulière. Chez Brice Leroux, la conception de la chorégraphie est proche des théories d’Oskar Schlemmer : « Selon moi, dit-il, le chorégraphe est un plasticien au sens traditionnel du terme, mais qui travaille avec une dimension supplémentaire : celle du mouvement et de l’espace ». Brice Leroux montre une prédilection pour les structures minimales qu’il développe en explorant la perception du temps et du mouvement, mais aussi en travaillant sur l’illusion et les phénomènes optiques. Partition quasi mathématique où son, lumière, corps et costumes cherchent à rendre l’idée la plus transparente possible. « La rigueur extrême de cette écriture, explique-t-il, contraint le danseur à chercher au fond de lui les moyens lui permettant de mettre la partition à exécution. L’écriture agit comme des œillères qui l’obligent à se consacrer entièrement à la tâche qui lui est impartie. Ce sont les cercles et le temps qui lui dictent ce qu’il doit faire, dans un langage impérieux qui ne tolère aucune remise en question et l’empêche de penser à autre chose. Paradoxalement cette contrainte ouvre une foule de possibilités ». Elle permet aussi d’accéder à un autre état de conscience, une sensation étrange dont l’impact trouble la perception du spectateur. I. F. * Citation et extraits d’entretien Pieter T’Jonck, De Tijd, 25/09/02. 32 G. Appaix, ph.E. Zheim A. Khan, ph.H. Glendinning LES ABBESSES • TARIF C DU 5 AU 10 JANVIER CRÉATION Georges Appaix Non seulement… 6 danseurs et 2 musiciens NON SEULEMENT... ALORS, TU VAS CHANTER ? Aujourd’hui, Georges Appaix* ose une chose épatante. Il chante : « La petite ritournelle, elle tourne, elle est là, elle manigance, elle fait du bruit, elle danse, elle croque le fruit./Les mots des langues sur les notes posées, la mélodie épousant l’alphabet,/ the music of your voice ou le son de ta voix, les nuances et surtout le timbre,/ tu m’écriras. ». Jusqu’ici les spectacles du chorégraphe à la geste musicale n’ont fait qu’effleurer ce sujet sensible. La question le fait hésiter dans L est là, respirer, souffler avec le vent dans M. encore !, pièce accueillie il y a deux ans au Théâtre de la Ville. Dans Non seulement… l’artiste marseillais, saxophoniste avant d’être danseur, saute le pas. Il signe les paroles et la musique de chansons qu’il interprète sur scène, en rajoute quelques-unes de Cuba ou bien encore Rimes (Claude Nougaro/Aldo Romano)… Cette aventure est aussi celle de ses compagnons de voyage. Ensemble, ils dansent, phrasent, murmurent sur les vagues du langage, écrivent eux-même des textes fins, drôles, légers, citent parfois quelques auteurs de prédilection, Jankélévitch, Deleuze, sans jamais se prendre au sérieux. Le chorégraphe du swing et ses complices, ont toujours eu l’humeur nostalgique et le goût de la ballade. Ils font aussi référence à l’épopée du jazz et prennent parfois les pays du Sud pour point d’ancrage. Dans Non seulement…, les inter- prètes offrent une autre lecture des textes chantés par le chorégraphe. Deux musiciens et trois instruments – guitare, accordéon, trombone – accompagnent les danseurs qui se déplacent en chansons, poussent la mélodie dans ses retranchements, modulent autrement, à leur façon, la délicate alchimie entre musique, texte et voix. Non seulement… déploie ses délicates compositions entre corps et projections vidéo. La pièce débute par de légers déhanchements, qui évoluent vers une gestuelle ample, charnelle. Lui succèdent un solo de femme sous une petite ampoule, puis des jeux d’ombres et de lumières qui morcellent les corps avec des effets colorés, sortes d’empreintes musicales. Ainsi va le spectacle, tressage d’émotions entre images du monde et partitions dansées. Dans cet espace particulier recherché par Georges Appaix, entre syncope et syntaxe, s’invente une nouvelle forme de langage qui mêle chanson, danse et texte. Non seulement… est un récital à la poésie légère, qui fait appel au plaisir des sens. I.F. * Au Théâtre de la Ville en 1993, 1994, 1999 et 2001. LES ABBESSES • TARIF C DU 3 AU 7 FÉVRIER 2e PROG. REPRISE Akram Khan AKRAM KHAN COMPANY Kaash 5 danseurs décor Anish Kapoor On peut être intègre sans être intégriste. Contre le "choc des civilisations" qu’annoncent certains tenanciers d’un Occident bardé de ses propres certitudes, les cultures savent aussi entrelacer leurs différences, 33 J.-M. A. nationale du cirque. Une phénoménale énergie traverse la piste délivrant un monde foisonnant, pulsionnel et humoristique, qui remporte un succès international. Mais après ce voyage inédit dans l’histoire des numéros et leur dimension magique ou rituelle, Francesca Lattuada abandonne le chapiteau et sa colonie de figures étranges pour se consacrer à une seule idée, immédiatement dédoublée : la danse et la danseuse. Elle imagine alors une autre forme singulière, « partition pour une danseuse seule », taillée sur mesure pour Rita Quaglia, longtemps interprète de Catherine Diverrès, de Mathilde Monnier et de Lluis Ayet. À travers le temps et les traditions, les mythes et leur modernité, les débris de la mémoire et les figures grotesques ou fantastiques, Ostinato, obstinément, interroge la danse, ses fonctions, ses multiples figures. Insaisissables dimensions, sublimes ou profanes, que l’interprète sculpte dans une lutte inattendue avec l’espace et le temps. Qu’estce que la grâce, qu’en est-il de la transe, de quoi sont faits l’art de la danse et son langage, le corps, le mouvement, la pensée et les sensations d’une danseuse ? Énigmatique présence de Rita Quaglia, traversant un labyrinthe de questions. Un personnage que des costumes insensés métamorphosent sans cesse. Ostinato se regarde comme un voyage, une aventure ondoyante où se réfléchit une passion : la danse et son intraduisible pulsation. I. F. * Coproduction Théâtre de la Ville. R. Quaglia, ph.T. Jeanne-Vales/Enguerand combiner les sources d’inspiration, puiser dans une tradition pour en extraire une sève qui peut irriguer des horizons contemporains. Le devenir de l’humanité n’est-il pas riche de toutes ses origines ? C’est à cette aune, en tout cas, que l’on peut rêver d’une "mondialisation" qui ne soit pas celle de la domination, mais plutôt d’un flux qui établisse un courant sensible entre diverses intensités culturelles. Pour Akram Khan, ce ne sont pas des notions théoriques. Il est lui-même pétri de ces courants mêlés ; lignes de vie à partir desquelles il fait éclore de nouvelles configurations. Né à Londres de parents originaires du Bengladesh, il a formé son corps aux rythmes et saveurs du kathak, avant de prendre pied dans la danse contemporaine. Et a trouvé dans ce double foyer le lieu de son intégrité. S’il continue à célébrer l’art du kathak (voir p. 31), il rejoue parallèlement cet héritage dans une voie contemporaine. Kaash, sa seconde pièce de groupe, conçue en collaboration avec deux artistes indo-anglais de renom, le sculpteur Anish Kapoor et le compositeur Nithin Sawhney, engage une physicalité acérée, véloce et précise, qui défait toute ligne narrative pour jouir d’une pure effusion de mouvement. Les trois séquences qui agencent le spectacle ont certes, aux dires d’Akram Khan, un lien avec Shiva, divinité à la fois créatrice, protectrice et destructrice. Mais l’allusion est davantage cosmique que religieuse. Et "l’image" formée par Anish Kapoor – un cadre rectangulaire noir aux contours incertains, tantôt nets, tantôt troubles, qui semble flotter dans l’écran blanc d’une toile de fond – peut faire penser aux "trous noirs" qui intriguent les astrophysiciens. Entre le trait tranché de la danse et cet espace infini, le regard vacille. C’est que Kaash, acclamé la saison dernière au Théâtre des Abbesses, tisse l’envoûtant dialogue du physique et du mental, de la surface et de la profondeur, du matériel et de l’immatériel. LES ABBESSES • TARIF C DU 30 MARS AU 3 AVRIL CRÉATION Francesca Lattuada Ostinato 34 L’ÉNIGME DE LA DANSEUSE. « Tout ce qui plus tard, dans les siècles des siècles, se donnera comme douceur, est présent dans cette épaisseur, dans cette texture, dans cette grâce de mouvement que la rêverie ne lâche jamais ». Ainsi parle l’écrivain Claude Louis-Combet dans Terpsichore aux doigts de rose, un texte écrit pour Francesca Lattuada, consacré aux différents visages de la danseuse. L’inclassable chorégraphe et chanteuse développe un travail dédié aux arts populaires. Orchestrant tour à tour somptueux carnavals dans les villes et extravagants spectacles tragi-comiques, elle réfléchit aussi en solitaire, le temps d’un solo chanté comme dans La donna è mobile*, sa dernière pièce accueillie au Théâtre des Abbesses, il y a trois ans. L’artiste aux multiples registres ne cesse d’inventer des mondes. Le point culminant de cette énergie drôle et sauvage s’épanouit dans La Tribu Iota, spectacle créé en l’an 2000 pour seize jeunes élèves de l’École F. Lattuada, ph. L. Piantoni solo dansé par Rita Quaglia J. Fabre, ph. X. DR LES ABBESSES • TARIF A DU 13 AU 17 AVRIL CRÉATION Malavika Sarukkaï bhârata natyam Sa place est à part au firmament des étoiles du bhârata natyam. Non contente d’en être l’une des interprètes les plus virtuoses, des plus célébrées, Malavika Sarukkaï* tente de faire évoluer cette danse millénaire à travers des recherches thématiques très personnelles, passerelles entre le monde passé et celui d’aujourd’hui. Après avoir évoqué les temples de Khajuraho – village au nord de l’Inde – dont les sculptures sont dédiées à l’art amoureux, elle s’est penchée dans Uthkanta – Longing sur le thème du désir et de la plénitude à travers l’histoire d’une femme indienne qui, ne pouvant devenir mère, avait planté trois cents arbres dans son village. Pour cette artiste déterminée, la scène se révèle le lieu central de compréhension de soi, et le bhârata natyam la forme supérieure de son accomplissement. De cet art de la géométrie et de l’ornement parfois un peu emphatique, elle a extrait sa couleur, plus intériorisée, voire même un peu grave. Car le bhârata natyam n’est pas seulement, depuis sa plus tendre enfance, une histoire de passion, mais bien de dévotion. Ce que nous réserve sa prochaine création reste encore un secret. Gageons que cette femme qui évoque si bien, mais avec pudeur et presque l’air de rien, le sacrifice que représente en Inde le choix de danser, saura nous galvaniser avec une de ses réflexions aussi profondes qu’émouvantes. « Les pieds chantent, les mains émerveillent » a-t-elle coutume de dire à propos du bhârata natyam. L’esprit de Malavika Sarukkaï quant à lui, rayonne. R. B. * Elle est venue au Théâtre de la Ville en 1997, 2000 et 2001. M. Sarrukaï, ph. Birgit LES ABBESSES • TARIF C DU 20 AU 23 AVRIL CRÉATION Jan Fabre Quando l’uomo principale e una donna solo L’œuvre hérétique de Jan Fabre* creuse une veine fiévreuse, insomniaque. À la domestication de l’homme en animal social, l’artiste flamand oppose depuis toujours l’incontrôlable grouillement des pulsions dévorantes. Ce que la raison, religieuse ou scientifique, n’a su museler dans l’être humain, éternel barbare en puissance, revient dans ses spectacles avec le bellicisme exalté des corps en excès. Taillant à vif dans la chair des conventions, il atteint ainsi une plastique de la saturation et du dérèglement. Protéiforme, toute son œuvre est traversée par cette mise à vif. Mais on trouvera dans les solos qu’il met en scène et chorégraphie, une acuité toute particulière portée au sujet même de ce qui s’incarne. Pour Jan Fabre, "l’outrage" n’est pas une image à atteindre (ce qui pourrait n’être que provocation de pacotille), mais une force en nous qui peut nous mettre hors de nous. Il se joue alors dans ces solos, paradoxalement, un corps à corps entre corps banal et corps monstrueux. Les acteurs ou danseurs sont ces "guerriers de la beauté" qui acceptent de livrer en eux-mêmes ce combat des corps antagonistes. Les deux plus récents solos qu’il a conçus sur mesure pour Wim Vandekeybus (Body, little body on the wall) et Erna Omarsdottir (My movements are alone like streetdogs), conjointement présentés au Théâtre des Abbesses, témoignaient assez de ce travail d’arrachement, d’écartèlement. Jan Fabre s’en remet à nouveau à la danse et à ce qui l’excède, hors des figures qui la contiennent, pour un prochain solo, Quando l’uomo principale e una donna. Où il s’agira peut-être, par-delà la "séparation" du masculin et du féminin, d’en découdre à nouveau avec les apparences et les appartenances. J.-M. A. * Depuis 1990, le Théâtre de la Ville a présenté 11 créations de Jan Fabre dont 9 coproductions. 35 DANSE HORS LES MURS HORS ABONNEMENT THEATRE DE LA BASTILLE • TARIF C DU 6 AU 8 AVRIL Jan Lauwers NEEDCOMPANY G. Ellen Barkey, ph. M. Vanden Abeele Needlapb Le Théâtre de la Ville et le Théâtre de la Bastille présentent : THEATRE DE LA BASTILLE • TARIF C DU 24 MARS AU 3 AVRIL Grace Ellen Barkey NEEDCOMPANY (And) 36 6 danseurs Au sein de la Needcompany de Jan Lauwers, dont elle est l’une des interprètes majeures depuis Need to know (1987), Grace Ellen Barkey développe sa propre partition, diablement enjouée. D’origine indonésienne, formée en danse à Amsterdam, elle signe avec (And) son huitième spectacle, électrisée par une verve qui n’a pas vraiment d’équivalent dans la production chorégraphique contemporaine. « Dans la danse, je suis à la recherche d’une certaine image ou d’un son qui dépasse la danse […]. Je suis à la recherche d’une certaine énergie, et cette recherche est passablement violente », confie Grace Ellen Barkey, et c’est peu dire ! Dans son précédent spectacle, Few Things, contournant l’interdiction d’utiliser la musique du Mandarin merveilleux que lui avaient opposé les ayants droit de Bartók, elle reprenait le conte à sa source, et le tirait avec vigueur vers une fantaisie amère et moqueuse. Il y a, à nouveau, dans (And), le filon d’un conte oriental, l’histoire d’une princesse qui se refuse à ses prétendants et finira emmurée dans son silence, comme un poisson dans son palais de verre. Avec les outils du merveilleux et du fantastique pour distordre le réel, Grace Ellen Barkey fait éclater le récit dans un maelström de corps, d’images, de voix et de musiques. Poussant le ridicule jusqu’au grotesque, le spirituel jusqu’au burlesque, elle concasse les jeux de l’amour et de la séduction en un pétillant concert de théâtre rock, espiègle et sauvage, scandé de mélodieux lamentos, de raps énergiques, des plaintes de la guitare électrique de Maarten Seghers et des incursions d’une chanteuse pop. Et personne ne sort indemne de cette furia magistralement orchestrée. J.-M. A. Le Théâtre de la Villle accueille et coproduit les spectacles de Jan Lauwers et de la Needcompany depuis quinze ans ! Il y a dans cette fidélité la juste reconnaissance d’un "théâtre d’art" qui s’emploie, plutôt que de ressasser de conventionnelles recettes dramaturgiques, à faire de la scène de théâtre un nerf vivant où l’action prévaut sur la narration, et où se composent « des champs d’associations entre les paroles, les bruits, les corps, les mouvements, la lumière et les objets ». Le récent No comment, qui réunissait cinq monologues féminins, serait-il le geste d’adieu à un artisanat du théâtre dont Jan Lauwers a exploré les ressources en signant plusieurs mises en scène magistrales de textes de Shakespeare, le seul "répertoire" auquel il a bien voulu se confronter ? Avec Morning Song (1999) puis Images of affection (2002), le travail de la Needcompany s’est à nouveau engagé dans des voies inédites, où la notion même de "théâtre" semble voler en éclats. Alors que certains acteurs-danseurs de la compagnie développent leurs propres projets (Grace Ellen Barkey, Carlotta Sagna, Viviane De Muynck), qu’apparaissent de nouvelles complicités du côté de la musique et de la vidéo, et que Jan Lauwers a réalisé pendant l’été 2001 son premier long métrage de cinéma ; il est clair que l’expérimentation et l’hybridation de nouvelles virtualités sont au goût du jour. La formule du Needlapb, où prennent corps de façon fragmentaire « des idées, des notes, des ébauches, des pensées éparses », répond à ce besoin d’hétérogénéité artistique. Ce laboratoire en temps réel, « imprévisible et surprenant », s’agence comme un work in progress des créations à venir, et associe des « invités surprises » (auteurs, acteurs, musiciens, vidéastes, etc.), qui sont les partenaires d’émulsion d’une fabrique de sens hautement indisciplinaire. J.-M. A. J. Lauwers dans son atelier, ph. M. Vanden Abeele musique MUSIQUE AU THEATRE DE LA VILLE BANG ON A CAN ALL-STARS ANNETTE DASCH soprano KATRIN DASCH piano TAN DUN - MARC MELLITS - LOUIS ANDRIESSEN CONLON NANCARROW - JULIA WOLFE HERMETO PASCOAL SCHUMANN - BRAHMS - WOLF - MARTIN - R. STRAUSS CAFÉ ZIMMERMANN Pablo Valetti 1er violon solo et direction Amandine Beyer 2e violon solo David Plantier, Christophe Robert, Farran James, Helena Zemanova et Paula Waisman violon Patricia Gagnon, Natan Parutzel alto Petr Skalka, Felix Knecht violoncelle Ludek Brany contrebasse Céline Frisch clavecin AVISON/D. SCARLATTI - GEMINIANI GIL SHAHAM violon AKIRA EGUCHI piano ZHU XIAO-MEI piano ORCHESTRE DE CHAMBRE D’AUVERGNE direction musicale Arie van Beek BARBER - MOZART - BRITTEN ALBAN GERHARDT CECILE LICAD piano violoncelle BEETHOVEN - BRITTEN - RACHMANINOV CECILE LICAD piano SCHUMANN- KNUSSEN- LISZT- BEETHOVEN- CHOPIN COPLAND - BACH - FAURÉ FABIO BIONDI KRONOS QUARTET VLADIMIR MARTYNOV - CHARLES MINGUS ALEXANDRA DU BOIS - BLIND WILLIE JOHNSON MIDHAT ASSEM violon MASCITTI - VERACINI - GEMINIANI - STRADELLA LOCATELLI - MASCITTI Les 20 ans du QUATUOR YSAŸE BEAUX-ARTS TRIO RACHMANINOV - SCHUBERT HAYDN - BEETHOVEN - RAVEL avec QUATUOR TAKÁCS MIKLÓS PERÉNYI ZOLTÁN TÓTH alto DVORÁK - BEETHOVEN - MENDELSSOHN BRAHMS - SCHÖNBERG MIKLÓS PERÉNYI violoncelle DÉNES VÁRJON piano BEETHOVEN - KODÁLY - MARTINU - FAURÉ DVORÁK - JANÁCEK GRAF MOURJA violon NATALIA GOUS piano SCHUBERT - SZYMANOWSKI - GRIEG - BARTÓK ALEXEÏ OGRINTCHOUK FERENC VIZI piano HAENDEL - HAYDN - BEETHOVEN QUATUOR AVIV MOZART - CHOSTAKOVITCH MUSIQUE AUX ABBESSES BARTHOLD KUIJKEN flûte ARTHUR pianoforte SCHOONDERWOERD HUMMEL - HAYDN - BEETHOVEN - FRANZ XAVER MOZART 3 CONCERTS EN UN SCHUMANN - BRITTEN violoncelle hautbois CÉLINE FRISCH D’ANGLEBERT - F. COUPERIN clavecin VEN. 10 OCT. 20H30 BANG ON A CAN ALL-STARS TAN DUN : Concerto for Six MARC MELLITS : 5 machines LOUIS ANDRIESSEN : Workers Union CONLON NANCARROW : Four Studies JULIA WOLFE : Believing HERMETO PASCOAL : Arapua 38 NOUVELLE EXPLOSION C’était prévisible : le Théâtre de la Ville adore ce groupe créé en 1992 par Julia Wolfe, David Lang et Michael Gordon. Il fêtait en décembre 2002, lors de sa première venue, les 20 ans du manifeste plein d’humour de ces trois compositeurs new-yorkais. Ce qui au départ devait être un happening unique est devenu un foyer intense de créations musicales admirablement défendues par 6 musiciens exceptionnels. Une curiosité aiguë ouvre en permanence ces diplômés des plus grandes écoles américaines à toutes les expériences artistiques : Lisa Moore, pianiste d’origine australienne, a pour idoles Monk et Horowitz. Mark Stewart, guitare électrique (et aussi violoncelle) « gagne sa vie en jouant et en écrivant de la musique populaire, semi populaire et impopulaire ». Wendy Sutter, violoncelliste, issue de la Juilliard School, a beaucoup travaillé avec des chorégraphes, Barysnikov, Jérôme Robbins, Marc Morris… La découverte du gamelan influence tout ce que le clarinettiste Evan Ziporyn fait pour Bang ou Kronos. À Cambridge, il dirige le Galak Tika, un orchestre de gamelan (25 musiciens). David Cossin, né dans le Queens, apprit d’abord les percussions classiques à la Manhattan School of music. Le nouveau programme des "all-stars" explore des univers complètement différents. « Concerto for Six, proche de la danse, enjoué, évoque la joie d’un rituel villageois » explique Tan Dun que le Kronos Quartet fit découvrir au Théâtre de la Ville en 1995 avec Ghost Opera. Très rythmée, parfois très jazz, cette œuvre révèle de splendides solos d’improvisation. « Spécialement écrite pour Bang on a can allstars dont j’avais les musiciens en tête, 5 machines sollicite toutes leurs capacités. » Dans cette partition sensuelle, Marc Mellits, né à Baltimore en 1966, articule cinq mouvements spécifiques, cinq subtils climats nés de l’à-peine audible. Dans Workers Union de 1975, le grand compositeur hollandais né à Utrecht, Louis Andriessen a tout déterminé excepté les notes. Cette œuvre participe du mouvement américain des années 60 quand les compositeurs souhaitaient évacuer certains contrôles. « C’est de toute évidence, explique David Lang, une pièce qui doit beaucoup à la tradition expérimentale américaine mais c’est difficile à identifier. et c’est cela qui, pour moi, est intéressant. » Politiques ou musicales, les idées de Conlon Nancarrow poussèrent l’Américain né en Café Zimmerman, ph. R. Davies TARIF C 1912, à s’exiler et à s’isoler au Mexique. C’est un des créateurs les plus innovants de notre époque. Le clarinettiste Evan Ziporyn a arrangé beaucoup de ses partitions initialement écrites pour le piano, dont ces Four Studies. « J’essaie de garder l’intensité viscérale de la musique où se juxtaposent un lyrisme humain heureux et une énergie maniaque, mécanique. » Believing, deuxième pièce de Julia Wolfe dédiée à son groupe, en décline vraiment l’identité. Son titre est une phrase récurrente de la chanson de John Lennon Tomorrow never knows. « Croire est un mot plein de pouvoir, plein d’optimisme et de combativité… Il est dur mais libérateur de croire. » Qui peut faire peur à Julia Wolfe ? Hermeto Pascoal né en 1936 est considéré comme le père de la musique contemporaine brésilienne. Ses compositions complexes n’oublient cependant jamais ses racines terriennes ni les rythmes originels de son pays. Arapua, s'inspire du bourdonnement de l’abeille dont elle porte le nom. Vraiment big, ce Bang on can all-stars ! Bang on a can all-stars, ph. P. Serling MUSIQUE AU THEATRE DE LA VILLE MAR. 21 OCT. 20H30 CAFÉ ZIMMERMANN Pablo Valetti 1er violon solo et direction Amandine Beyer 2e violon solo David Plantier, Christophe Robert, Farran James, Helena Zemanova et Paula Waisman violon Patricia Gagnon, Natan Parutzel alto Petr Skalka, Felix Knecht violoncelle Ludek Brany contrebasse Céline Frisch clavecin Concerti grossi pour cordes et basse continue de Charles Avison, à partir des Sonates pour clavecin de Domenico Scarlatti, et Concerti grossi de Francesco Geminiani extraits des Douze Concertos, d’après les Sonates pour violon et basse continue op.5 d’Arcangelo Corelli. AVISON : Concerto grosso n°3, en ré mineur GEMINIANI : Concerto grosso n°4, en fa majeur AVISON : Concerto grosso n°9, en ut majeur Concerto grosso n° 5, en ré mineur GEMINIANI : Concerto grosso n°9, en la majeur AVISON : Concerto grosso n°12, en ré majeur En novembre 2002, les Abbesses ont dû refuser du monde pour le concert époustouflant de Café Zimmermann. C’est le Théâtre de la Ville qui accueille cette fois l’ensemble dont le nom sent bon l’effervescence intellectuelle, politique et artistique : n’est-ce pas celui de l’établissement situé rue Sainte-Catherine à Leipzig ? N'est-ce pas là que se réunissaient au XVIIIe siècle penseurs et créateurs européens et que se produisaient les étudiants du Collegium Musicum dirigé par Jean-Sébastien Bach ? Il faut voir répéter les deux fondateurs de la formation, le violoniste argentin Pablo Valetti, sensible, chaleureux, la claveciniste française Céline Frisch, sereine, attentive, et leurs amis de la Schola Cantorum de Bâle : on comprend alors à quel point tous ces jeunes solistes échangent connaissances et idées dans la plus grande liberté. Inventifs dans leur interprétation, ils le sont aussi dans leur répertoire. Leur nouveau programme où les œuvres et les tonalités s’enchaînent avec beaucoup d’intelligence, affiche deux des compositeurs les plus inspirés de l’âge baroque. De l’Anglais Charles Avison, il offre 4 des 6 joyaux de leur récent compact (Diapason d’or) consacré au remarquable transcripteur des sonates de Scarlatti. De son maître, l’Italien Geminiani qui vécut à Londres, deux concerti grossi transcrits de l’opus 5 de Corelli, le dieu de l’époque et pas seulement. « En transcrivant pour orchestre ces sonates, ils ont su, admire Pablo Valetti, en garder le génie. Une essence indépendante de l’habit de la composition. » De quoi désirer un Café nommé Zimmermann. Avec la Partita en ré mineur de JeanSébastien Bach il ne s’agit plus de charme mais bien d’essence sacrée, de ciel : l’ange y est chez lui. Il n’a pas peur de la grandeur. Quant à Fauré, c’est le charme français et peut-être le charme tout court. Qu’il s’agisse de l’irrésistible Berceuse ou de la célèbre Sicilienne, tout est élégance, subtilité et chant. La Sonate en la majeur, écrite en 1875, est encore plus inspirée. Premier chef-d’œuvre du jeune Fauré, elle exalte une liberté, une souplesse et une fraîcheur radieuses. Le miroir de Gil Shaham. LUN. 10 NOV. 20H30 KRONOS QUARTET David Harrington violon John Sherba violon Hank Dutt alto Jennifer Culp violoncelle Premières en France : VLADIMIR MARTYNOV Folk Dance* CHARLES MINGUS Children’s Hour of Dream ** (arr. Sy Johnson) ALEXANDRA DU BOIS Oculus Pro Oculo Totum Orbem Terrae Caecat (An eye for an eye makes the whole world blind) * BLIND WILLIE JOHNSON Dark was the night** (arr. Stephen Prutsman) MIDHAT ASSEM Ya Habibi Taala (My Love, Come Quickly) ** (arr. Osvaldo Golijov) G. Shaham, ph. S. Johnson * écrit pour Kronos Quartet ** arrangé pour Kronos Quartet Programme susceptible d'être modifié. SAM. 8 NOV. 17H GIL SHAHAM violon AKIRA EGUCHI piano COPLAND : Sonate pour violon et piano BACH : Partita n°2, en ré mineur, BWV 1004 FAURÉ : Berceuse en ré majeur, op. 16 Morceau de lecture à vue (1903) Fileuse, de "Pelléas et Mélisande", op. 80 n°2 Sicilienne en sol mineur, op. 78 Sonate n°1 pour violon et piano, en la majeur, op. 13 LA MÉLODIE DU BONHEUR Les anges musiciens existent. Vous en doutez ? Venez écouter Gil Shaham. C’est le chouchou du dieu de la musique qui lui en a confié presque tous les arcanes : simplicité, pureté, sincérité. Son violon crée un cercle de lumière. Rayonne comme un soleil, même dans ses plus infimes pianos, un autre de ses secrets. L’année dernière encore, le public quittait les Abbesses transformé. En paix avec lui-même, avec les autres, le bonheur dans le cœur. Pour son cinquième passage, c’est dans la grande salle que l’enchanteur viendra distiller les philtres d’un programme digne de lui. Insaisissable est le charme de la sonate, curieusement peu jouée, qu’Aaron Copland écrit en 1944. « Il réside dans le type d’accents rythmiques employés par le père de la musique américaine », explique André Prévin dans le compact qu’il a justement réalisé avec Gil Shaham. « Nous étions très décontractés pendant les séances et nous avons passé un très bon moment. » Fallait-il le préciser ? Certains boudent encore le charme de ces quatre musiciens, leur décontraction, leur humour. Peu importe ! Avec talent, opiniâtreté et instinct, David Harrington le premier violon et ses partenaires ont fait de Los Angeles l’alambic de tous les parfums musicaux du monde. C’est le treizième passage de la formation californienne au Théâtre de la Ville. Le premier eut lieu en 1992. Au total, plus de 80 créations en France ! Que de découvertes jusqu’à son concert 2003 où pour ses trente ans il nous conviait à « une véritable fête pour les yeux et les oreilles ! Même si, poursuivait Daniel Caux, les quatre silhouettes des musiciens rassemblés au centre de la scène avec leurs instruments et leurs archets ont toujours constitué une fascinante sculpture mobile et sonore ». Leur nouveau programme, encore incomplet, affiche l’arrangement de deux œuvres sentimentales My love, Come Quickly de Midhat Assem et Children’s Hour of dream du grand jazzman Charles Mingus. Folk Dance de Valdimir Martynov offre, dit le compositeur né à Moscou en I946, « un modèle abstrait de l’idée de danse populaire. C’est beaucoup plus un rituel qu’un acte esthétique ». Dark was the night est un chant tragique de Blind Willie Johnson que sa bellemère rendit volontairement aveugle à l’âge de 7 ans en lui jetant de la lessive dans les yeux. C’est la cécité morale symbolique que la jeune Alexandra du Bois née en Virgine en 1981 pointe dans l’œuvre généreuse qui a pour titre L’Œil pour œil rend le monde aveugle, jugement de Gandhi sur la loi du talion . En prise sur l’actualité du monde, Kronos Quartet mérite décidément bien son nom ! 39 Kronos Quartet, ph. J. Blakesberg BEAUX-ARTS TRIO Menahem Pressler piano Daniel Hope violon Antonio Meneses violoncelle RACHMANINOV : Trio élégiaque n°2, en ré mineur, op. 9 SCHUBERT : Trio en si bémol majeur, op. 99 Quatuor Takács, ph. N. White/Decca ÉMOTION Retour du trio américain au Théâtre de la Ville où il faisait ses débuts en 1977. Cinq concerts du mardi au samedi. En 1979, 1982 et 1985, le triomphe se renouvelait comme partout dans le monde. Toscanini considérait le trio comme le meilleur depuis Rubinstein-HeifetzFeuermann ! Vingt ans après, revoilà la sublime trinité. Toujours synonyme de perfection du style et d'intégrité musicale. Des milliers de concerts et toujours la même fraîcheur ! La personnalité exceptionnelle du pianiste Menahem Pressler, fondateur de la formation en 1955, explique ce miracle. Le virtuose qui conseille à ses étudiants « d’être comme l’abeille, de faire son propre miel en butinant de fleur en fleur », en possède un royal, un millésime de 50 ans d’expérience. Ses partenaires, le grand violoncelliste Antonio Meneses, choisi en 1998, et un jeune violoniste de 27 ans, Daniel Hope, élu en 2002, profitent de ce nectar qu’ils enrichissent à leur tour. « L’amour de la musique est beaucoup plus important encore que le style ou la maîtrise technique. Sans lui, on ne peut rien donner aux autres ». Il leur inspire un bouleversant programme : l’hommage tourmenté, lyrique que Rachmaninov commence le jour de la mort de Tchaikovski et le céleste Opus 99 de Schubert. « Ne manquez pas d’aller entendre le Beaux-Arts Trio au Théâtre de la Ville, je sais que vous en serez émerveillés » écrivait l’éminent Bernard Gavoty en 1977. Vingt-six ans après, le conseil est toujours d'actualité. SAM. 29 NOV. 17H QUATUOR TAKÁCS DVORÁK : Quatuor n°10, en mi bémol majeur, "Slave", op. 51, B 92 BEETHOVEN : Quatuor n°11, en fa mineur, « Quartetto serioso », op. 95 MENDELSSOHN : Quatuor n°2, en la mineur, op. 13 40 Grâce. C’est le sceau du Quatuor Takács. Sonorité pure et frémissante, souplesse. Tout grand quatuor élabore sa pierre philosophale dans un travail complexe et lent. Au cours de M. Perényi, ph. Th. Martinot Beaux-Arts Trio, ph. D. Pollard SAM. 22 NOV. 17H cette alchimie, quatre instruments n’en deviennent plus qu’un, quatre personnalités se fondent dans une sonorité sculptée au fil des années, souvent dans les épreuves. Fondé en 1975, le Quatuor Takács a été capable de surmonter le départ de son premier violon en 1992, puis le décès de son altiste en 1994. Les deux Anglais qui leur ont succédé et les deux autres Hongrois fondateurs ne peuvent plus échapper à leur destin : il est scellé par la parole donnée à Gábor Ormai avant qu’il ne meure. Une promesse tenue, cette année encore, en février 2003 le prestigieux “Grammy Award for the Best Performance” l'a honoré. Depuis 1986, la trajectoire du Quatuor Takács passe par le Théâtre de la Ville. Pour sa quinzième venue, il commencera par le Quatuor n°10 de Dvorák (I879). L’esprit expressément slave de cette partition fulgure dans leur enregistrement chez Decca. À ses parfums, ses nostalgies ses réminiscences de danses et chants populaires succéderont l’âpre violence, la concision et l’ellipse de l’opus 95 (1810) de Beethoven. Le génie de Bonn qui l’avait appelé “quartetto serioso” est justement en filigrane dans le puissant Quatuor en la mineur de Mendelssohn, une œuvre de jeunesse, écrite quelques mois après la mort de Beethoven, dont il n'eut de cesse de faire connaître le génie. Transmettre. L’éternité. SAM. 13 DÉC. 17H MIKLÓS PERÉNYI violoncelle DÉNES VÁRJON piano BEETHOVEN : Sonate n°4 pour violoncelle et piano, en ut majeur, op. 102 n°1 KODÁLY : Adagio pour violoncelle et piano, en ut majeur MARTINU : Sonate n°3 pour violoncelle et piano, H 340 FAURÉ : Sonate n°1 pour violoncelle et piano, en ré mineur, op. 109 DVORÁK : Rondo en sol mineur, op. 94, B 171 JANÁCEK : Conte (Pohadka) pour violoncelle et piano Presto pour violoncelle et piano LA QUÊTE DE L’ABSOLU Elle anime en permanence le violoncelliste hongrois, l’un des plus grands au monde même si cette excellence reste toujours confidentielle. Aux paillettes de la renommée, Miklós Perényi préfère la pureté de l’art, ses joies. « Dis-moi ce que tu joues et je te dirai qui tu es » pourrait-on dire. Et pas seulement pour un seul concert mais sur la durée. Les choix de Miklós Perényi sont révélateurs : il s’agit toujours de nouvelles propositions. Comment pourrait-il faire autrement, lui qui redoute que la routine, la mémoire musculaire finissent par tuer l’élan de l’interprétation ? C’est qu’il a rendez-vous avec la musique là où elle prend sa source. Il ne veut pas s’en éloigner. Et comme les états d’âme ne sont pas prévisibles, il répugne à se projeter dans le futur et réduit N. Gous et G. Mourja, ph. É. Manas SAM. 10 JAN. 17H GRAF MOURJA violon NATALIA GOUS piano SCHUBERT : Fantaisie pour violon et piano, en ut majeur, op. 159, D 934 SZYMANOWSKI : Mythes, trois poèmes pour violon et piano, op. 30 GRIEG : Sonate n°2 pour violon et piano, en sol majeur, op. 13 BARTÓK : Sonate n°2 pour violon et piano, Sz 76 UNE VRAIE PERSONNALITÉ Ni formaté, ni fabriqué. Graf Mourja est luimême. Un instinct héréditaire lui donne la clé des univers musicaux les plus éloignés de sa culture. Le jeune violoniste ukrainien en parle immédiatement la langue. Du conservatoire Tchaikovski de Moscou, il a su assimiler l’enseignement sans se laisser couler dans le moule. Le résultat est un talent authentique, une sonorité unique. Révélés au Théâtre de la Ville en janvier 1996 dans le cadre d’une “place aux jeunes !”. Graf Mourja avait 23 ans. Il revient pour la sixième fois avec un programme rare qui exige des deux musiciens beaucoup d’intuition et une technique exceptionnelle. Deux qualités que possède sa partenaire, la belle pianiste russe Natalia Gous. On entend peu la troublante Fantaisie que Schubert écrit en 1827, un an avant sa mort. Fantasque, à la fois virtuose et profonde, elle est pourtant attachante. Graf Mourja et Natalia Gous ont enregistré Mythes (1915-1916) du Polonais Szymanowski dans un compact qui a fait l’unanimité de la critique hexagonale et internationale. Ils ont su rendre le mystère et le climat impressionniste presque français de ces trois poèmes. Grieg qualifiait de nationaliste son propre opus 13 nourri d’anciens rythmes populaires typiquement norvégiens. Malgré le nom de sonate de danse qui lui est parfois donné, son climat est plutôt sombre. Né à I5 kilomètres du village de Béla Bartók, Graf Mourja est chez lui dans les paysages sonores abruptes de la Sonate n°2 du maître hongrois. Quatuor Aviv, ph. X. DR F. Vizi, ph. X. DR A. Ogrintchouk, ph. X. DR ses apparitions publiques. Comme Richter, et ce n’est pas un hasard s’il en a été le partenaire. Pour la huitième fois cependant le virtuose quitte Budapest pour offrir au Théâtre de la Ville la grâce d’un concert original, organique et colossal. Beethoven le fonde dans la liberté de l’opus 102 n°1 sa “Freie Sonate” justement, sa “sonate libre” qui, fantasque, mine, à l'aube du XIXe siècle, les formes traditionnelles. Écrites un siècle plus tard, cinq autres œuvres articulent à leur guise climats différents et inventions. Une française, la Sonate n°1 de Fauré implose dans son austère beauté. Les quatre autres, signées Kodály, Martinu, Dvorák et Janácek, sentent bon l’Europe centrale, ses paysages, ses nostalgies, ses danses, son chant. L’imaginaire de Perényi. SAM. 17 JAN. 15H 3 CONCERTS EN UN : ALEXEÏ OGRINTCHOUK FERENC VIZI piano hautbois QUATUOR AVIV SCHUMANN : Trois Pièces en style populaire, op. 120 n°2, n°3 et n°4 – versions pour hautbois et piano BRITTEN : Temporal Variations pour hautbois et piano HAENDEL : Chaconne et Variations pour piano, en sol majeur HAYDN : Variations pour piano, en fa mineur, H XVII/6 BEETHOVEN : Sonate pour piano n°32, en ut mineur, op. 111 MOZART : Quatuor pour hautbois et cordes, en fa majeur, K 370 CHOSTAKOVITCH : Quatuor n°9, en mi bémol majeur, op. 117 La formule qui permet au public de découvrir plusieurs jeunes musiciens en un concert en a révélé de bien grands : Andreas Scholl, Graf Mourja, François Leleux… L’édition 2003-2004 donne trois grands noms de demain : Alexeï Ogrintchouk, Ferenc Vizi, déjà Lauréats Juventus comme leurs aînés et le Quatuor Aviv. Les Parques leur ont parfois envoyé un ange gardien pour aider le hasard. Les divinités du destin aiment la musique. UNE BELLE HISTOIRE Alexei Ogrintchouk au regard de ciel bleu pâle est né à Moscou en 1975. L’enfant tombe amoureux du hautbois qu’il entend chez lui quand ses parents pianistes professionnels répètent avec leurs partenaires. Il a 13 ans quand il apprend au dernier moment à l’école de musique Gnessine (des enfants surdoués), que le hautboïste Maurice Bourgue donne des masterclasses au conservatoire Tchaikovski. Il s’y rend – par chance rien ne l’en empêche – son hautbois sous le bras, avec le secret espoir de pouvoir jouer pour le maître. Ce qui se réalise. Deux ans plus tard, le grand pédagogue français lui écrit pour lui demander s’il n’a pas une cassette à lui envoyer. Justement si, il en a enregistré une avec l’orchestre de son école. Dans une autre longue lettre, Maurice Bourgue l’invite à se présenter au Conservatoire de Paris. « Après deux cours inoubliables avec [son] père spirituel », Alexei Ogrintchouk réussit, bien sûr. Ses parents 41 "DEVENIR" LA MUSIQUE Enfant, le jeune Roumain Ferenc Vizi rêvait de faire de la musique. Décrété inapte par un idiot de sa petite ville, Reghin, interdit de piano, il ne renonce pas et apprend l’accordéon dans son école primaire. Avec le violon, c’est l’instrument des Tziganes. Né en Transylvanie en 1974, Ferenc Vizi, d’origine hongroise, revendique son appartenance à cette minorité. Un jour, par hasard, le directeur de l’école de musique où il souhaitait aller, l’entend jouer. Il l’inscrit immédiatement dans son établissement où il étudie enfin le piano à 9 ans. Passant le concours Enesco de Bucarest (il y remporte le prix spécial), il est remarqué par Gérard Frémy, un des membres du jury, qui le présente au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Il y remporte ses premiers prix à l’unanimité. Mais le choc de sa vie a lieu quand il entend György Sebök au Théâtre de la Ville en 1996 : « Jusque là, j’étais dans la logique de celui qui veut jouer le mieux possible du piano, de l’instrument. Après l’avoir entendu, j’ai changé. » Ferenc Vizi fait sienne la phrase du maître : « Ne pas jouer la musique mais devenir la musique ». Il s’était promis d’inscrire la Chaconne de Haendel au programme de son premier grand concert dans la capitale. D’honorer ainsi le géant hongrois qui l’avait donnée en bis. L'Andante con variazoni de Haydn et la dernière sonate de Beethoven explorent aussi la forme variations. Depuis longtemps Ferenc Vizi fait « grandir dans son laboratoire ces œuvres qu’il pourrait jouer mille fois sans avoir le sentiment de se répéter ». L’Opus 111 particulièrement. « Surgi d’on ne sait où, il retourne au silence. » 42 À L’AUBE D’UN PRINTEMPS Grands-parents, papa, maman, frère, sœur, ils sont tous pianistes dans la famille de Serguey Ostrovsky. Le premier violon, fondateur du Quatuor Aviv, pouvait-il échapper au destin de musicien ? Non. Les dés étaient jetés. Mais en choisissant, dès l’âge de 4 ans, le violon entendu pendant les répétitions de musique de chambre de ses parents, Serguei Ostrovsky manifesta l’indépendance d’esprit, nécessaire à tout grand artiste. Né à Gorki en 1975, il quitte la Russie à 16 ans pour Israël. Son talent le conduit très vite vers la carrière de soliste. Mais c’est au quatuor que le virtuose veut consacrer sa vie : il se retrouve dans l’intégrité qu’exige sa pratique. Son répertoire est à ses oreilles le plus beau de toute la musique classique. Aussi, en 1997, fonde-t-il un quatuor avec trois jeunes femmes : la violoniste Evgenia Epstein émigrée d’origine russe elle aussi, l’altiste israélienne Shuli Waterman et la violoncelliste canadienne Rachel Mercer. Deux ans plus tard, ils remportent les quatre premiers prix de la Melbourne International Chamber Music Compétition. Ils viendront bientôt s’installer à Paris, « la ville la plus excitante du monde ». La France n’a-t-elle pas d’autre part une grande tradition de quatuor ? Et comme « les Français comprennent bien Chostakovitch », les Aviv ont choisi le 9e de ses I5 quatuors. « Le plus beau » pour Serguei qui « aime tout du compositeur russe » mort en 1975. La partition très émotionnelle va mettre en vibration l’âme de la jeune formation et donne aussi la parole à chacune de ses individualités. De quoi cueillir les quatre fleurs à peine écloses de ce nouveau “printemps". Aviv, en hébreu. A. Dasch, ph. X. DR accepteront que leur fils unique parte en France. Son parcours brillantissime – multiples premiers prix, premiers engagements – les récompensera. Nommé hautbois solo du Philharmonique de Rotterdam à 21 ans, le jeune virtuose vient d’enregistrer, accompagné par… son papa, un tout premier compact consacré à Schumann. Y figurent notamment les tendres « Stücke im Volkston du seul romantique à avoir écrit pour cet instrument de lumière qui chante et parle. » Du lyrisme le plus absolu au babillage le plus acrobatique, Britten en exploite la quintessence dans Temporal Variations. Le Quatuor de Mozart aussi. Un autre soleil. LUN. 19 JAN. 20H30 ANNETTE DASCH soprano KATRIN DASCH piano Das Mädchen spricht (La Jeune fille parle) SCHUMANN : Liebeslied ; Die Meerfee ; Der Nussbaum ; Suleika ; Aufträge BRAHMS : Das Mädchen spricht ; Therese Vom Strande ; Immer leiser wird mein Schlummer WOLF : 6 Keller-Lieder ; Mignon SCHUMANN : Heiss mich nicht reden ; So lasst mich scheinen bis ich werde MARTIN : Drey Minnelieder R. STRAUSS : Ständchen ; Die Georgine ; Geduld ; Mit deinen blauen Augen ; Schlechtes Wetter ; Wie sollten wir geheim sie halten LA JEUNE FILLE ET LA VIE Elle a 27 ans. D’immenses yeux verts, d’épais cheveux blonds, un sourire splendide, le visage pulpeux, la silhouette aussi. La voir, c’est déjà l’aimer. La voix est fruitée, le timbre dru, la technique parfaite, le style impeccable. L’entendre, c’est l’aimer plus encore. La jeune Berlinoise a remporté en l’an 2000 le premier prix de trois concours internationaux : Maria Canals de Barcelone, Robert Schumann de Zwickau, Concours de Genève où elle obtint aussi le Prix du public. Faut-il s’en étonner ? La soprano a souvent triomphé dans le répertoire sacré. À l’opéra les plus beaux rôles l’attendent : Fiordiligi, Pamina et, forcément, la Comtesse Almamiva dont elle est l’incarnation. Mais c’est au lied que la nouvelle diva veut consacrer son premier concert à Paris. Le genre de l’excellence exige autant de musicalité, d’intelligence, que de présence. Celle d’Annette Dasch est inouïe. Des grands interprètes, elle a le charisme, le regard, cet œil qui fait qu’on ne remarque qu’elle. Son récital a pour titre celui d’un lied de Brahms, frémissant, enflammé : "La jeune fille parle”. Il est la clé d’une superbe anthologie qu’ouvre Liebeslied de Schumann et referme Wie sollten wir geheim sie halten ? de Richard Strauss. De l’amour torturé qui ne peut s’assouvir au désir exalté de dire son bonheur, Annette Dasch exprime les battements de l’âme. Ces secrets, c’est avec sa sœur Katrin qu’elle veut les chuchoter « Elle me connaît si bien ! » dit-elle de cette accompagnatrice hors pair. La jeune fille peut parler. Annette Dasch chanter. Le public l’admirer. A. Gerhardt, ph. F. Berisha Zhu Xiao-Mei, ph. Th. Martinot C. Licad, ph. J. Henry Fair A. van Beek, ph. X. DR LUN. 26 JAN. 20H30 SAM. 6 MARS 17H ZHU XIAO-MEI piano ORCHESTRE DE CHAMBRE D’AUVERGNE ALBAN GERHARDT violoncelle CECILE LICAD piano direction musicale Arie van Beek BARBER : Adagio pour cordes, op. 11 MOZART : Concerto n°17, en sol majeur, K 453 BRITTEN : Simple Symphony, op. 4 MOZART : Concerto n°23, en la majeur, K 488 Radieuse Zhu Xiao-Mei ! Pour son sixième passage au Théâtre de la Ville qui la découvrait en 1994, elle réalise son rêve : jouer des Concertos de Mozart. Bonheur de retrouver cette pianiste chinoise tellement à part. Quand on surmonte les épreuves d’une vie hors du commun, quand on survit à 5 ans de camp totalitaire, quand, grâce à Isaac Stern qui avait repéré ses dons à Pékin, on débarque seule à New York puis à Paris, c’est qu’on a une force particulière. Une étincelante vision de vie qui bannit certains mots – carrière, mondanités, ronds de jambe… –, en remplit d’autres de sens : échange, existence, musique, « la plus belle chose qui soit, l’axe de ma vie ». Dans sa philosophie, il y a un temps pour tout qu’elle sait attendre. Celui de jouer Mozart « le compositeur le plus difficile au monde car justement si simple, si pur » est arrivé. Celui de retourner en Chine, pas encore. « Cela me fait peur. Les gens, trop matérialistes, ne sont toujours pas mûrs pour le profond. » L’essentiel est son oxygène. D’où son jeu sans concession, pur. Avant de lui servir d'écrin, l’excellent Orchestre de chambre d’Auvergne offrira sous la direction de son chef hollandais Arie Van Beek l’Adagio nostalgique du New-Yorkais Samuel Barber et la très pimpante Simple Symphony que Britten composa à l’âge de 21 ans. Intelligents préludes aux concertos de Mozart choisis par Zhu Xiao-Mei : le dix-septième « dont la joie transforme fatalement l’auditeur » et le vingt-troisième qu’elle jouait déjà à 10 ans. « La musique de Mozart n’est pas cérébrale, elle est instinctive, spontanée, splendide, délicate. Elle exprime mieux que quiconque les contradictions humaines. Même dans les moments de gravité intense, il y a toujours une perspective inattendue qui nous conduit vers la lumière. En choisissant les concertos de Mozart, j’ai voulu faire passer un message d’espoir et d’optimisme. » Merci ! BEETHOVEN : Sonate pour piano et violoncelle, en sol mineur, op. 5 n°2 BRITTEN : Sonate pour violoncelle et piano, en ut majeur, op. 65 RACHMANINOV : Sonate pour violoncelle et piano, en sol mineur, op.19 ENFIN ! Alban Gerhardt et Cecile Licad reviennent qui, en mars 2002, ensorcelaient le public. « Il y avait une atmosphère incroyable » se rappelle l’élégant virtuose allemand. Effectivement ! Ce concert reste dans les mémoires. On fêta le violoncelliste dont la maîtrise et la sensibilité avaient déjà séduit les Abbesses en 1999, et la pianiste que la France découvrait, toute d’instinct et de perfection. Deux félins : un abyssin, une panthère noire. Bien dans sa tête, dans sa peau, dans son cœur, le jeune homme a toujours su transformer en générosité son bonheur personnel. Et dépasser les facilités mises par le destin sur son chemin. Il va au-delà, il cherche, questionne. C’est pour cela qu’il aime jouer avec Cecile Licad : « Avec elle c’est toujours différent ». Leur entente, immédiate, passe par le jeu, rarement par la parole. « On répète, on répète et finalement le jour du concert on joue quelque chose de complètement différent. C’est possible car on est sûr que l’autre va suivre. À mon avis, il faut être très bons amis. Je n’ai jamais compris comment des musiciens qui se détestent arrivent à jouer ensemble. Je ne pourrais pas. Cecile, je la sens, je la comprends tellement bien ! » Souffrance et passion. Telle est la trame des trois pièces si différentes de leur programme. La tonalité de sol mineur de la première et de la troisième assombrit le rouge de ce fil. Il tisse la Sonate opus 5 n°2 de Beethoven, « la plus triste la plus profonde de toutes ». Éperdue, ardente, la sonate de Rachmaninov l’est aussi. « Cecile la joue comme Rachmaninov lui-même, de façon pas trop sentimentale mais très passionnée. Rien à voir avec la musique de film que certains veulent y entendre. » Entre ces deux orages, la sonate de Britten, âpre, haletante. « C’est probablement une des meilleures pièces de musique de chambre écrites pour violoncelle et piano. Les deux instruments, égaux, forment vraiment un duo. » Cecile Licad et Alban Gerhardt aussi. C. Licad, ph. J. Henry Fair SAM. 13 MARS 17H CECILE LICAD piano SCHUMANN : Sonate n°2, en sol mineur, op. 22 KNUSSEN : Prayer Bell Sketch, op. 29 LISZT : Au bord d’une source, de la 1re Année de pèlerinage BEETHOVEN : Sonate n°26, en mi bémol majeur, « Les Adieux », op. 81a CHOPIN : Douze Études, op. 25 43 qu’il fallait me responsabiliser. » C’est ainsi que l’adolescent de 14 ans partit vivre seul à Parme. « Dès lors, tout a très bien marché. » Plutôt ! Fabio Biondi est une des personnalités artistiques (et humaines) essentielles de notre époque. Il peut revenir chaque année au Théâtre de la Ville : il a toujours quelque chose de nouveau à dire et une nouvelle manière de le dire. Pour son treizième passage, il propose un florilège enivrant de sonates italiennes du XVIIIe siècle. « Avec une conception neuve. Il est presque possible de les transformer en quatuors. » Bien sûr, puisque c’est un sorcier. Et d’autant plus puissant que la famille de son premier maître, décédé il y a 20 ans, vient de lui en confier le violon mythique. « Un rêve. » Qui envoûta la salle en mars 2003 : après l’espagnolissime Fandango de Boccherini donné en bis, que Fabio Biondi s’était dédié « non par mégalomanie mais parce que c’est mon anniversaire », la salle lui fit un nouveau triomphe puis entonna un chaleureux « joyeux anniversaire ! ». Magique, non ? Quatuor Ysaÿe, ph. A. Yanez UN ÉVÉNEMENT Paris offre enfin son premier récital à la pianiste qu’Alban Gerhardt a révélée au Théâtre de la Ville. Folle d’une “folie” que le violoncelliste compare à celle de Marta Argerich. Elle a l’éclat de l’étoile filante, la détente du félin, l’incandescence du feu. Des pianissimi à peine audibles, irisés comme la mer des midis calmes, doux comme un chat qui dort. Envoûtante. En elle, tous les sortilèges des îles du Pacifique, de Manille où elle naît en 1961. “Élevée au piano” par sa mère ellemême musicienne professionnelle, elle donne son premier concert à l’âge de 7 ans avec l’Orchestre philharmonique des Philippines. En 1973 elle part à New York, au Curtis Institute, étudier avec Mieczyslaw Horszowski, Seymour Lipkin et Rudolf Serkin avec qui elle continuera. « Quel que soit ce que je lui jouais, il ne suffisait pas de bien le jouer. Je devais travailler dur pour essayer d’atteindre le cœur de la musique, et même là il fallait aller plus loin encore, se rappelle-t-elle. Il m’apprit qu’il n‘y avait pas de raccourci pour faire de la musique au plus haut niveau. » Celui-là même de son prométhéen programme. « La deuxième sonate de Schumann est une pièce ouverte ; extravertie qui me fait battre le cœur. La sonate "des Adieux" de Beethoven a une dimension transcendantale. C’est dans ce registre que je voulais terminer la première partie. La spiritualité des pièces de Knussen et de Liszt apporte le calme et m’y prépare moi-même ainsi que le public. » Les Douze Études opus 25 de Chopin, un des plus grands défis que les pianistes peuvent se lancer, électrisent la seconde partie. Hallucinant ! SAM. 27 MARS 17H ET LUN. 29 MARS 20H30 F. Biondi, ph. Th. Martinot Les 20 ans du QUATUOR YSAŸE SAMEDI 27 MARS 17H HAYDN : Quatuor n°58, en ut majeur, op. 54 n°2 BEETHOVEN : Quatuor n°12, en mi bémol majeur, op. 127 RAVEL : Quatuor en fa majeur LUNDI 29 MARS 20H30 avec MIKLÓS PERÉNYI violoncelle ZOLTÁN TÓTH alto SAM. 20 MARS 17H FABIO BIONDI violon Maurizio Naddeo violoncelle Fabio Bonizzoni clavecin et orgue Giangiacomo Pinardi théorbe, guitare, cistre MICHELE MASCITTI : Psyche FRANCESCO MARIA VERACINI : Sonate en sol mineur op. 1 FRANCESCO SAVERIO GEMINIANI : Sonate pour violon et basse, en la mineur, op. 4 n°5 ALESSANDRO STRADELLA : Sinfonia pour violon, violoncelle et basse, en ré mineur PIETRO ANTONIO LOCATELLI : Sonate pour violon et basse, en ré mineur, op. 6 n°12 MICHELE MASCITTI : Sonate pour violon, violoncelle et basse, en sol mineur, op. 6 n°15 44 SI FABIO M’ÉTAIT CONTÉ Il était une fois un petit garçon sicilien. Un jour, non loin de Palerme, dans la maison d’amis de ses parents, Salvatore Cicero – ce serait son premier maître – lui met dans les mains son fabuleux violon, un Gagliano, « un de ceux qu’on ne peut pas s’acheter », précise Fabio Biondi. Il avait onze ans. Un mois plus tard, il jouait avec orchestre… « Mais j’étais un enfant rebelle, un désastre. Par chance, mon père, pédopsychiatre, a tout de suite compris BRAHMS : Sextuor à cordes n°2, en sol majeur, op. 36 SCHÖNBERG : La Nuit transfigurée, pour sextuor à cordes, op. 4 JOYEUX ANNIVERSAIRE ! Le Quatuor Ysaÿe le premier de France, l’un des meilleurs au monde, aura 20 ans en 2004. « Cet anniversaire ne pouvait avoir lieu qu’au Théâtre de la Ville qui nous suit depuis 1992 et dont nous aimons l’acoustique : elle nous permet de recréer les couleurs que nous recherchons dans notre travail », précise l’altiste fondateur Miguel da Silva. Profond, juste. Il tient à saluer tous ceux qui ont rendue possible la transmutation de leurs quatre individualités en une seule, “cette cinquième personne”, l’âme de tout quatuor : leur maître le Quatuor Amadeus ; les musiciens qui les ont quittés mais dont ils ont assimilé la richesse ; Marc Bleuse qui leur octroya une bourse de trois ans ; Paribas qui prit le relais… « 20 ans cela signifie la maturité et avoir franchi le plus dur si l’on en croit la boutade selon laquelle ce sont les 20 premières années d’un quatuor qui sont les plus difficiles. Nous avons gagné notre liberté et nous entrons dans une seconde vie » se réjouit le second violon Luc Marie Aguera, un autre fondateur. Subtil. géants Haydn et Beethoven, peu importe à Barthold Kuijken. Qu’elles donnent la suprématie au piano ou à la flûte aussi. Son plaisir est le même. « Le musicien, dit-il, doit refléter une œuvre qui l’a touché, qu’il voudrait partager avec l’auditoire, et qu’il lui fait parfois découvrir. C’est un miroir entre une pièce et un public. Ce n’est en dernier lieu jamais l’interprète qui est important. » Voire. En effet derrière le miroir n’y a-t-il pas la personnalité de l’artiste, ses dons, ses intuitions et son travail ? Des qualités qui font la différence entre les miroirs déformants et les autres. Barthold Kuijken et Arthur Schoonderwoerd en sont deux de la plus haute définition. MUSIQUE AUX ABBESSES SAM. 3 AVR. 17H C. Frisch, ph. Th. Martinot Une renaissance, donc. Pour l’honorer, deux concerts diamants. Le premier affiche Haydn et Beethoven, deux lettres de noblesse du quatuor Ysaÿe. Ne va-t-il pas bientôt achever l’intégrale Haydn qu’ils donnent depuis l’an 2000 dans le cadre du Festival de Besançon ? Ne gravit-il pas régulièrement les sommets de l’Himalaya beethovénien ? Mais on est français ou on ne l’est pas, les Ysaÿe ont choisi pour finir le quatuor de Ravel créé en mars 1904 dont – le hasard fait bien les choses – ils fêteront ainsi le centenaire. Pour leur deuxième concert de fête, ils veulent aller encore plus loin dans le partage. Le quatuor devient sextuor en s'agrandissant de deux musiciens rares : Zoltán Tóth l’ex-altiste du quatuor Eder, dont ils admirent le talent instrumental, et le grand Milklós Perényi dont ils vénèrent l’intégrité et la pensée. C’est la première fois qu’ils joueront ensemble. Un rêve. D’autant plus beau qu’ils mettent en regard le Sextuor n°2 de Brahms et La Nuit transfigurée de Schönberg. Chefs-d’œuvre. CÉLINE FRISCH clavecin A. Schoonderwoerd, ph. Y. Petit B. Kuijken, ph. Th. Martinot TARIF C SAM. 31 JAN. 17H BARTHOLD KUIJKEN flûte ARTHUR pianoforte SCHOONDERWOERD Flûte et pianoforte autour de 1800 HUMMEL : Sonate en ré majeur, op. 50 HAYDN : Sonate en fa majeur Hob. XV : 17 BEETHOVEN : Variations sur un Air russe op. 107 n°3 FRANZ XAVER MOZART : Rondo en mi mineur BEETHOVEN : Serenade en ré majeur, op. 41 MIROIRS DES LUMIÈRES Le séduisant programme qu’offre Barthold Kuijken, invité pour la cinquième fois, est à la charnière des XVIIIe et XIXe siècles. Le maître de la flûte traversière appporte « les saveurs du nouveau sentiment de musique en train de naître » et convie le public à les déguster. En compagnie d’Arthur Schoonderwoerd, un autre gourmet de la musique, dont le jeu aussi subtil qu’inventif fit pétiller les quatre précédents concerts. Quoi de plus délicieux, de plus agréable que les cinq œuvres choisies ? Qu’il s’agisse des deux “petits maîtres”, Hummel tellement doué que son professeur Mozart ne lui faisait pas payer les leçons, Franz Xaver Mozart le fils cadet talentueux du génie, ou des deux D’ANGLEBERT : Première Suite, en sol majeur, des Pièces de clavecin (Paris, 1689) F. COUPERIN : Extraits du Second ordre en ré du Premier Livre de Pièces de clavecin (Paris, 1713) D’ANGLEBERT : Deuxième Suite, en sol mineur, des Pièces de clavecin LA LUMINEUSE Calme, en elle-même, Céline Frisch a traversé la scène pour rejoindre son clavecin. Et l’Aria céleste fut. Avant et après les 30 Variations Goldberg de Jean Sébastien Bach. Dans un silence de rêve. Pas une toux, pas un froissement de programme ne vint troubler ce lever et coucher de soleil. Pas un seul mouvement de spectateur sur le cuir des sièges. Communion. C’est le sixième passage aux Abbesses de celle qui sait faire le vide en elle pour créer l’avènement de la musique. Après avoir guidé le public, il y a un an, dans cette quête du Graal, Céline Frisch l’emmène en France, dans l’univers de sa grande école de clavecin. Jean-Henri D’Anglebert est un sommet du XVIIe siècle. Et pourtant il n’a publié qu’un seul recueil, dont sont extraites les deux Suites du programme. Dans leurs préludes toute la quintessence de leur majesté. Dans l’acrobatique menuet de la suite en sol majeur, l’apogée de leur virtuosité. Entre ces deux pôles, François Couperin, le plus éminent compositeur français de sa génération. Nous ne connaissons pas encore quels "délices" – c’est ainsi qu’on appelait les pièces de Couperin “le Grand” – Céline choisira mais ils porteront les noms savoureux que le maître leur a presque toujours donnés. Si du ciel des musiciens le fin portraitiste entend la jeune Française, il en fait sûrement d'exquis croquis. Qui pourraient bien s’appeler l’Intelligente, la Raffinée, la Profonde, ou bien encore pour fêter la petite fille qu’elle vient de mettre au monde, l’Éloïne… textes musique A.-M. Bigorne 45 musiques du monde AU THEATRE DE LA VILLE AUX ABBESSES MOHAMMAD REZA SHAJARIANE chant ANGÉLIQUE IONATOS Iran Kayhan Kalhor kamantché Hossein Alizadeh târ et setar Homayoun Shajariane tombak SHIVKUMAR SHARMA Inde Alas pa’volar création (Des ailes pour voler) textes extraits du journal de Frida Kahlo mise en scène Omar Porras musique Christian Boissel santour PHILIPPE MEYER DEBASHISH BHATTACHARYA L’Endroit du cœur création (avec vue sur l'envers) textes et chansons sur le thème de l'amour, de Maurice Scève à Jean Genet guitares hawaïennes Inde du Nord OPÉRA LI YUAN XI Chine NAN YIN Chine du Sud musiques traditionnelles chinoises chants et musiques courtoises POÈTES ET MUSICIENS DU RAJASTHAN MARIZA KAYHAN KALHOR kamantché Iran SHUJAAT HUSAIN KHAN Inde Portugal fado JACKY MICAELLI Corse sitar GEORGES APPAIX CHANTS ET MUSIQUES DU BADAKHCHAN Tadjikistan Sâhiba Dovlatshâeva chant Djonbaz Doshanbiev chant, ghijak création Non seulement… danse et chansons TOURIA HADRAOUI chant Maroc malhoun FONÓ ZENEKAR musiques de danse et chants de Hongrie SEIKIN TOMIYAMA jiuta Japon chant et shamisen JULIEN WEISS ENSEMBLE AL-KÎNDI ROMANCERO GITANO Al-Kîndi fête ses 20 ans avec Tunisie Loutfi Bouchnak chant classique Husayn Al-Azami mâqâm de Bagdad Irak avec Sheikh Habboush chant Syrie MOHAMED SEGUENI chant, alto et direction Algérie malouf et aïssaoua de Constantine SHAHID PARVEZ Inde du Sud Pakistan avec un ensemble qawwali RAJAN ET SAJAN MISRA chant khyal ANNIE EBREL Bretagne chant a cappella TOUD’SAMES Bretagne ULJAN BAÏBUSYNOVA YELDOS YEMIL chant épique, dombra SAÏANE AKMOLDA Kazakhstan kobyz (sorte de vièle) ONDAR MONGUN-OOL chant, tschansy (sorte de luth) musique et chant carnatiques BADAR ALI KHAN musique et mise en scène Vicente Pradal chant épique Inde du Nord sitar VADHYA LAHARI T.M. KRISHNA chant FEDERICO GARCÍA LORCA Inde du Nord Touva NEZAKAT TEYMUROVA chant et daf Azerbaïdjan H. Alizadeh, M. R. Shajariane, K. Kalhor, H. Shajariane, ph. X. DR MUSIQUES DUMONDE AU THEATRE DE LA VILLE MOHAMMAD REZA SHAJARIANE chant Iran Kayhan Kalhor kamantché Hossein Alizadeh târ et setar Homayoun Shajariane tombak Ces quatre virtuoses, parmi les meilleurs d’Iran, ont contribué à raviver l’intérêt du public pour la musique classique persane. Ils viennent de lancer leur premier disque commun où figurent des compositions modernes dans le respect de la plus pure tradition. Véritable légende vivante en Iran, parfois surnommé le « Pavarotti persan », Mohammad Reza Shajariane possède une voix à nulle autre pareille, d’une souplesse incomparable. Lors de sa dernière venue au Théâtre de la Ville avec Dariush Tala’i en 1998, « sa sobriété, sa justesse, son style épuré et limpide » avaient fait merveille. Virtuose du târ (sorte de luth), auteur de musique de films iraniens réputés, Hossein Alizadeh mène une carrière de premier plan comme interprète et compositeur. Depuis quelques années, il a créé sa propre école, contribuant ainsi à l’émergence d’une nouvelle génération de musiciens iraniens. Dans ses apparitions au Théâtre de la Ville auprès d'Ali Asghar Bahari, Mahmoud Tabrizi Zadeh et Dariush Tala’i, il a développé avec brio son art de l’improvisation. Kayhan Kalhor, maître du kamantché (sorte de vièle), s’est distingué en mariant la musique persane à d’autres traditions : tradition indienne avec l’ensemble Ghazal (on le retrouvera en duo avec le jeune sitariste Shujaat Husain Khan, le fils de Vilayat, au Théâtre de la Villle le 15 novembre), ou classique occidentale avec Yo-Yo Ma et le Kronos Quartet. À ces trois figures dominantes s’ajoute celle de Homayoun Shajariane, chanteur et joueur de tombak (tambour de bois), le fils de Mohammad Reza Shajariane. Bien qu’âgé d’une vingtaine d’années seulement, on le dit bien engagé pour suivre les traces de son père. Une rencontre au sommet où l’on ne peut trouver ambassadeurs plus qualifiés pour découvrir le raffinement de la musique classique persane. Jacqueline Magnier MAR. 7 OCT. 20H30 SHIVKUMAR SHARMA Inde santour Rahul Sharma santour Shaafat Ahmed Khan tabla Lors de leur précédent passage au Théâtre de la Ville, on a pu apprécier ce rapport distancié cachant si bien une intimité réelle entre le maître incontesté du santour Shivkumar Sharma et son fils et disciple Rahul, tous deux si élégants dans leur maintien et sereins dans la force intérieure de leur jeu. Ce duo entre père et fils est certainement le meilleur et le S. Sharma, ph. R. Kapse LUN. 29 ET MAR. 30 SEPT. 20H30 D. Bhattacharya, ph. P. R. Pal TARIF C plus nourrissant jamais présenté récemment sur les scènes de la musique hindoustanie. Car le fils est à la hauteur du père et celui-ci sait rester lui-même, laissant la parole à celuilà au moment opportun, et ainsi la roue tourne de l’un à l’autre dans une parfaite égalité des rôles où la fraîcheur d’un jeu pourtant savant domine. Rahul Sharma, qui maîtrise le santour avec la même aisance et la même vélocité que son père, est déjà un maître. Rompu à la subtilité de frappe des baguettes, il déploie un jeu audacieux, se livrant à des envolées de passages improvisés d’une étonnante variété. L’imagination combinée du père et du fils offre ainsi un spectacle aux facettes saisissantes jusqu’au moment où interviennent des compositions accompagnées au tabla. C’est alors une jubilation. Shivkumar Sharma voit dans le santour un instrument mystique, dans le son comme dans l'effet hypnotique dû aux frappes subtiles ou fortes des baguettes courbes qui viennent faire résonner les cent cordes de cette cithare originaire du Cachemire, dont le maestro a fait l'un des instruments les plus populaires de l'Inde. Christian Ledoux SAM. 18 OCT. 17H DEBASHISH BHATTACHARYA guitares hawaïennes Inde du Nord Subhashish Bhattacharya tabla Un guitariste hawaïen venu en Inde avant la dernière guerre mondiale, a fait découvrir aux musiciens indiens sa slide guitar jouée en faisant glisser un objet dur le long des cordes sans frettes. Le premier grand interprète à l’avoir présentée en concert est Brij Bushan Kabra. Il enregistra le CD Call of the Valley au succès considérable, en compagnie de Chaurasia et Shivkumar Sharma. Attiré par la guitare, Debashish Bhattacharya désire apprendre avec ce maître. Quittant sa ville de Calcutta, il n’hésite pas à se rendre de l’autre côté de l’Inde, à Ahmadabad, capitale où habite Brij Bushan, et reste auprès de lui pendant sept années consécutives. Issu d’une famille de gens de théâtre où la musique tient un grand rôle, Debashish attend d’être fin prêt pour se lancer dans la carrière, et ne donne son premier concert public qu’après l'âge de trente ans. Son jeu extraordinairement fertile et d’une technique hors pair, lui ouvre les portes d’un succès croissant, et après seulement six années de concerts, il peut se targuer d’un joli palmarès avec des tournées en Europe et aux USA et quelques CD à son actif. Debashish s’est fait construire trois types de guitares de tailles différentes qu’il utilise selon les pièces qu’il choisit de jouer, et a introduit des améliorations sur la grande guitare, élar- 47 Opéra Li Yuan Xi, ph. San Bartolomé Gafoor Khan, photos M. Le Bastard MAR. 11 NOV. 20H30 POÈTES ET MUSICIENS DU RAJASTHAN les Langas et les Manghaniyars LUN. 20 OCT. 20H30 Pour la 1re fois en France OPÉRA LI YUAN XI (Opéra du jardin des poiriers) Chine Le Miroir aux litchis surtitré en français 11 chanteurs et 10 musiciens (luth, flûtes, vièle, hautbois, tambours, cliquettes, gongs, cymbales) dans le cadre des Années croisées francochinoises Le Li Yuan Xi est un des genres d’opéra les plus anciens. Le nom de Li Yuan Xi, Opéra du jardin des poiriers, reprend celui du conservatoire de musique et de danse bâti dans les jardins impériaux de l’époque Tang (618-909). Il s’est constitué dans la province du Fujian dont Quanzhou, port célébré par Marco Polo, face à l’île de Taiwan, fut pendant des siècles la porte de la route maritime de la soie . Il a réussi à préserver des formes antérieures d’opéras qu’il avait intégrées et qui, sans lui, auraient disparu. Le texte du XVIe siècle de l’opéra Le Miroir aux litchis, retrouvé au Japon, est pour l’essentiel semblable à la version encore jouée de nos jours. Pour ceux qui craindraient les percussions parfois agressives de l’Opéra de Pékin, rien de tel ici : les musiques sont faciles d’accès, mélodieuses et plaisantes à l’oreille. Au-delà de l’exotisme vite appréhendé des costumes – magnifiques –, le public se retrouve en terrain connu : le Li Yuan Xi s’apparente aussi bien dans sa forme visuelle que dans ses types de caractères ou ses intrigues, à notre théâtre de tréteau moliéresque et à la commedia dell'arte. Entre maîtres et serviteurs, les enjeux sont les mêmes. Le spectateur ne sera pas dépaysé face à ces servantes maîtresses fortes en gueule, intrigantes et familières : ces suivantes-confidentes mutines et rusées, complices des amours contrariées de leurs jeunes maîtres ; ces juges-bouffons ridiculisés dans leurs fonctions et leurs rites ; ces prétendants ridicules infatués de leur personne. Les bonnes de Molière, les nourrices de Shakespeare, les entremetteuses de Goldoni et leurs apartés au public sont bien au rendez-vous… Une intrigue facile à suivre, qui va allègrement son chemin au rythme de situations de tons très variés, dialoguées, chantées et dansées, faisant harmonieusement alterner airs joyeux et ballades mélancoliques, mélodies très anciennes parfois reprises de chants liturgiques bouddhiques ou de chants traditionnels, tel le Nan Yin ou Nan Kuan présenté au Théâtre des Abbesses. 48 Channan Khan gissant la table et augmentant le nombre de cordes. Sa pureté de cœur, sa probité et une certaine candeur rendent ce musicien aussi attachant C. L. que sa musique. Jacques Pimpaneau, Pierre-Jean de San Bartolomé les Manganyiars : Anwar Khan, Channan Khan, Fakira Khan, Gafoor Khan, Moltan Khan chant Channan Khan, Ghewar Khan kamanchiya Fakira Khan, Firoz Khan dolak (percussion) Gafoor Khan, Gazi Khan kartal (ancêtre des castagnettes) les Langas : Bundu Khan, Nekou Khan chant Habib Khan sarangui (vièle) et satara (double flûte) Habitués maintenant à sillonner la France sous différentes formes (Divana, Chota Divana, etc.), les castes des Manghanyars et Langas sont, par leur art, le lien entre l’ancien raffinement poétique et musical des cours et le monde traditionnel, rural et nomade, où ils vivent aujourd’hui. La rudesse des voix qui façonnent de subtiles ornementations, est à l’image de cette caractéristique des plus riches traditions de notre planète – celles de ces sociétés rurales et nomades qui possèdent encore un haut raffinement poétique, vestige d’un riche passé. Dans ce paradis poétique qu’est l’ancien pays des rajahs (Rajasthan : mot sanskrit signifiant Pays des princes), la poésie est d’une hallucinante beauté. Entre sacré et profane, Islam précaire et hindouisme, cette poésie raconte et décrit les dieux et déesses, émanations du monde surnaturel, l’absence de l’amant, mais aussi la tristesse de la jeune mariée loin de sa famille, les bonnes et mauvaises récoltes, les rêves de pluie à venir, les naissances et les morts, les bandits et brigands du désert. Une myriade de poésies, aujourd'hui encore, en parfaite osmose avec le kamanchiya (la vièle des Manghaniyars) ou le sarangui (la vièle des Langas s'élève sinueuse et torride, et les vers du poète éclairent notre âme « comme le firmament des étoiles dans la nuit ». Ce concert exceptionnel verra la réunion de l’élite de ces paysans princiers et des plus belles voix du Rajasthan à travers deux générations de musiciens. Vivant du désert du Thar jusqu’à Jodhpur, des artistes comme Anwar Khan Manghaniyar, Bundhu Khan Langa, Nekou Khan Langa ou Moltan Khan Manghaniyar s’affronteront dans cet esprit de joute où le sentiment poétique se cisèle au gré d’une inspiration qui oscille entre le chant classique et l’âpreté d’une vie reliée à la nature. Alain Weber SAM. 15 NOV. 17H KAYHAN KALHOR kamantché Iran SHUJAAT HUSAIN KHAN sitar Inde Mêler musique persane et musique hindoustanie n’est pas chose courante. Si chacune possède sa propre identité, toutes deux ont des racines communes, conséquence, au S. Husain Khan et K. Kalhor, ph. J. Vartoogian S. Dovlatshaeva, D. Doshanbiev, ph. Kamrouz * Il partagera avec lui la scène du Théâtre de la Ville en quatuor les 29 et 30 septembre 2003. JEU. 27 NOV. 20H30 CHANTS ET MUSIQUES DU BADAKHCHAN Tadjikistan Sâhiba Dovlatshâeva chant Djonbaz Doshanbiev chant, ghijak accompagnés de cinq musiciens au rûbab, sétar, daf, dotar… Au cœur du Pamir, ce "toit du monde" à la frontière de l'Afghanistan, de la Chine et de la Kirghizie, le Badakhchan reste isolé, à cheval entre le Tadjikistan et l'Afghanistan. Là, vallées profondes et hautes chaînes de montagnes laissent encore peu de place aujourd'hui à la route qui traverse la région à 4000 mètres d'altitude. Cette province, quasiment inaccessible des siècles durant, compte sept langues différentes même si elles appartiennent toutes à la grande famille des langues indo-européennes. Ainsi ont été préservées une culture et des traditions musicales spécifiques. C'est peut-être, affirme Jean-Pierre Thibaudat, « la région Europe-Asie où le pourcentage de musiciens est le plus élevé . À tel point, poursuit-il, qu'on en arrive à se demander si ce Fonó Zenekar, ph. X, DR Moyen Âge, des échanges culturels issus de la longue domination des Mongols musulmans en Inde du Nord. Basées sur l’improvisation, elles ont en partage le ghazal (poésie chantée), même si ce terme ne recouvre pas tout à fait la même forme d’expression musicale pour chacune d’elles. Un point commun qui n’a pas échappé à l’oreille de Shujaat Husain Khan et Kayhan Kalhor. Depuis 1997, le duo fait passer en musique les liens d’amitié qui les unissent dans la vie. Septième d’une lignée ininterrompue de grands maîtres, Shujaat Husain Khan n’est autre que le fils du célèbre sitariste indien Vilayat Khan. À 6 ans, il donnait son premier concert en public. Réclamé aujourd’hui au Carnegie Hall de New York comme au Royal Albert Hall de Londres, il est l’un des meilleurs sitaristes de la jeune génération en Inde du Nord. Kayhan Kalhor, quant à lui, est un maître du kamantché, ancêtre du violon. Né en 1963 à Téhéran, il intègre à 13 ans l’Orchestre national de radio-télévision de Téhéran où, cinq ans durant, il accompagne les grands maîtres de la musique persane, Shadjariane, Nazeri ou Alizadeh*. Toujours soucieux de la découverte, il élargit sa culture musicale, étudiant la tradition kurde et, en Italie, la musique classique occidentale. Cet insolite duo utilise à merveille le langage universel de l’émotion. Délicatesse du sitar, douceur du kamantché, on ne peut que se laisser charmer et séduire par la magie et la beauté de leurs ghazals, subtils discours amoureux. Une splendeur ! J. M. n'est pas cette musique aux influences diaprées et souvent lentes qui auraient donné naissance à ces paysages insensés, tour à tour doux, charmeurs et soudain tristes. » Majoritairement ismaélites, les musiciens du Badakhchan consacrent leur répertoire aux poèmes des grands maîtres de la poésie persane tels que Rumi ou Nasser Khosrow mais aussi à des registres religieux ou populaires. Invitée du Théâtre de la Ville en avril 2000, la jeune et gracieuse Sâhiba Dovlatshâeva avait mêlé la danse à ses « chants au crescendo endiablé ». Elle revient cette saison avec Djonbaz Doshanbiev, 55 ans, chanteur et maître du ghijak, cette vièle à pique et quatre cordes, instrument traditionnel du poète. Cinq autres musiciens au daf, rûbab et sétar s'uniront à ce concert dans l'intimité d'un autre temps. J. M. LUN. 15 DÉC. 20H30 FONÓ ZENEKAR musiques de danse et chants de Hongrie Ágnes Herczku chant Gergely Agócs chant, flûte, duda (cornemuse hongroise), fugara, tárogató Tamás Gombai premier violon, kontra Gábor Szabó second violon, kontra Sándor D. Tóth brácsa, gardon Zsolt Kürtösi contrebasse, accordéon Balázs Unger cimbalom Dans les années 1970, de jeunes groupes tels que Kolinda ou Muzsikás redonnaient un nouvel élan à la tradition musicale hongroise. On se souvient de leurs tonifiants concerts où se succédaient rythmes de danse et ballades mélancoliques du bassin des Carpates. Dans cette mosaïque multiethnique se croisent musiques hongroise, slovaque, roumaine, tzigane, ruthène (carpato-ukrainienne). De 24 ans leur cadet, Fonó Zenekar (ex- Hegedös) qui voit le jour en 1997, suit les traces de leurs aînés. Tout comme leurs célèbres prédécesseurs, Béla Bartók, Zoltán Kodály et, avant eux, Béla Vikár qui, en 1896, fut le premier en Europe à utiliser le phonographe d’Edison, les sept musiciens de Fonó collectent et perfectionnent leurs connaissances au contact direct des musiciens vivant dans les campagnes. Avec eux, ils complètent leur formation, classique à la base, et entretiennent des liens d’amitié qui sont la source même de leur force communicative. Ils ne témoignent pas. Ils vivent. Et c’est bien l’âme de ces multiples traditions vocales et instrumentales qui nous est ainsi offerte avec une belle et entraînante énergie. Cette troisième génération n’a rien à envier à ses ascendants : la voix d’Agnes Herczku, 28 ans, rappelle agréablement la douceur et la pureté de Marta Sebestyén ; Gergely Agócs, excellent chanteur, est aussi l’un des rares joueurs actuels de cornemuse hongroise ; violons, gardon, accordéon, cymbalom et contrebasse complètent la formation de ce groupe dont la venue furtive à Paris en décembre 2001 pour un bal hongrois au Théâtre de Chaillot, a laissé en haleine un public déjà conquis par leur talent et leur bonheur de jouer. J. M. 49 Sheikh Habboush, F. Vernhet H. Al-Azami, ph. C. Freire J. Weiss, ph. C. Freire L. Bouchnak, ph. Birgit LUN. 12 ET JEU. 15 JAN. 20H30 JULIEN WEISS ENSEMBLE AL-KÎNDI Al-Kîndi fête ses 20 ans LUNDI 12 JANVIER avec Loutfi Bouchnak chant classique Tunisie Husayn Al-Azami mâqâm de Bagdad Irak JEUDI 15 JANVIER avec Sheikh Habboush chant Syrie transes mystiques, liturgie des confréries Qaderi d’Alep 50 M. Segueni, ph. X, DR Naître de parents franco-suisses et devenir un éminent spécialiste de la musique classique arabe : une gageure ? Une folie ? Un rêve de mille et une nuits ? Peut-être, mais pour Julien Jalal Eddine Weiss, c’est avant tout un amour immodéré pour l’éblouissant répertoire de la musique orientale, profane et sacrée, qui l’a amené à côtoyer les plus grands interprètes. Du Caire à Tunis, de Bagdad à Damas et Alep où il réside désormais une grande partie de l’année, ce sont autant de rencontres qui ont abouti en 1983 à la création de l’ensemble instrumental Al-Kîndi réunissant de brillants solistes : le luthiste alépin Mohamed Qadri Dalal, le flûtiste damascène Ziad Kadi Amin, le percussionniste égyptien Adel Shams el-Din, et le joueur de joza irakien Mohamed Gomar Al-Bawi. Au qanoun, la cithare orientale, et à la direction artistique, Julien Jalal Eddine Weiss. La voix étant le fondement même de l’âme et de l’esthétique de la musique arabe, s’impose bientôt à lui la nécessité de collaborer avec des chanteurs. À partir de 1990, participent aux concerts de magnifiques voix que le Théâtre de la Ville a régulièrement invitées depuis. Parmi eux, Loutfi Bouchnak venu de Tunis en 1995, Husayn Al-Azami venu d’Irak en 1997 et le Syrien d’Alep Sheikh Habboush dont « la puissance de la voix empreinte de foi et d’émotion » a enthousiasmé le public en décembre 2002. Trois voix qui reviendront cette saison pour fêter le vingtième anniversaire d’Al-Kîndi et son dixième passage au Théâtre de la Ville. Deux concerts pour goûter aussi les fastes de la musique orientale et célébrer le parcours insolite d’un créateur enthousiaste et passionné de rencontres improbables entre artistes de toutes les nations arabes. SAM. 24 JAN. 17H Pour la 1re fois au Théâtre de la Ville. MOHAMED SEGUENI chant, alto et direction Algérie malouf et aïssaoua de Constantine 8 artistes et chanteurs La musique arabo-andalouse, encore méconnue du public occidental, est née au Xe siècle en Andalousie sous l’impulsion du chanteur Ziriab, esthète d’une grande culture et d’un talent novateur dans bien des domaines, qui vint s’installer à Grenade après avoir été le disciple du plus grand chanteur de Bagdad. Les sultanats vaincus sous le règne d’Élisabeth la Catholique, cette musique allait devoir émigrer et se développer sur les côtes du Maghreb dès le XVIe siècle. Le malouf désigne le chant arabo-andalou pratiqué dans l’est de l’Algérie (Constantinois), en Tunisie et en Libye. Subtil dans son essence et dans la poésie ancienne qui le porte, il se différencie, entre autres du genre andalou d’Alger (san'a) par sa particularité d’incorporer des chants d’extase et de transe Aïssaoua, propres au répertoire de confréries mystiques où le soufisme joue un rôle important. Le hautbois ghaita lance des mélopées improvisées fulgurantes, et résonne comme un appel à la prière, tandis que les percussions soutiennent une rythmique fascinante par sa force d’expression où le corps libéré se met en mouvement. Tous les musiciens chantent le refrain en un chœur homophonique où l’on ressent l’appartenance à une école de pensée qui offre le monde en partage. À la fois chanteur et chef d’orchestre, Mohamed Segueni joue aussi bien de l'oud que de l‘alto. Il s’est imposé depuis une dizaine d’années auprès d’un vaste public, comme l’un des meilleurs chanteurs classiques de Constantine grâce à une voix superbe, riche en grains différenciés. Sa belle présence scénique et son énergie conviviale ont aidé à le faire connaître à la télévision nationale algérienne. Cet artiste à vocation universelle et au tempérament généreux s’est maintes fois produit avec succès à l’étranger (USA, Canada, Russie, etc.). Nous le découvrons à Paris ! C. L. SAM. 31 JAN. 17H SHAHID PARVEZ sitar Inde du Nord Déjà présenté au Théâtre de la Ville en 1999, le discret Shahid Parvez est considéré par les organisateurs et le public indiens comme l’un des sitaristes actuels de tout premier plan. On a pu juger de son talent lors la dernière édition du prestigieux Festival de Dover Lane de Calcutta où le jeune Ustad interprétait un raga de l’aube (Aheer Bhairav) d’une beauté saisissante, faisant preuve tout au long de ses improvisations, d’une fraîcheur créative combinée à une maturité sereinement atteinte. Son art, qui était déjà reconnu, est en plein épanouissement : la finesse de son jeu et l’attention constante portée à une sonorité idéale assurent la continuité lyrique du style révolutionnaire initié par Vilayat Khan avec lequel il partage un ancêtre commun. Maîtrisant à l’évidence toutes les techniques du sitar dont les plus audacieuses et parfois les plus périlleuses, il n’en laisse rien paraître, sa concentration étant portée en tout premier lieu sur le développement du raga dans le plus grand respect de celui-ci. Car il n’oublie pas que s’il joue pour un public, un musicien doit avant tout servir le raga pour en extraire l’essence même et en faire ressortir les possi- LUN. 15 MARS 20H30 musique et chant carnatiques Inde du Sud VADHYA LAHARI ensemble instrumental T.M. KRISHNA chant 1RE PARTIE : VADHYA LAHARI A. Kanyakumari violon Mambalam Siva nadaswaram Mudicondan Ramesh saraswati veena S.V. Raja Rao mridangam avec tavil et guimbarde 2E PARTIE : T.M. KRISHNA S. Varadarajan violon S.V. Raja Rao mridangam avec guimbarde Vadhya Lahari a été formé par la violoniste A. Kanyakumari qui a réuni trois instruments jamais joués ensemble. Véritable gageure, cette réunion improbable où sont combinés le souffle, le plectre et l’archet, donne une musique vive, puissante et joyeuse. Le nadaswaram accompagne de ses sons stridents bien des festivités. Très proche de la voix humaine, il est accompagné de l’indispensable tavil, redoutable tambour joué avec une vélocité extrême. La veena, dite sarawsati, est l’instrument emblématique de la musique carnatique. Bien qu’on entende encore ses sons délicats dans l’intimité des maisons des familles éduquées, elle apparaît peu en concert en Inde même. Elle reste cependant un instrument de la plus haute noblesse et celui d’une certaine élite. Le violon au son toujours continu, est l’instrument mélodique le plus joué dans le sud. A. Kanyakumari, au jeu d’une ferveur et d’une sonorité pleine, en est l’une des interprètes les plus réputées. T.M. Krishna est né en 1976 dans une famille où la musique a toujours été à l’honneur (son grand-oncle fut l’un des membres fondateurs de la Music Academy de Madras). Il commence dès quatre ans un apprentissage auprès de sa mère, qui le confie à l’âge de six ans au chanteur Seetharam Sharma avec lequel il se forme pendant dix-huit années. Doué d’une voix douce et profonde d’où émerge une impression de puissance et de souplesse, il déploie avec autorité et imagination un éventail d’une expressivité généreuse encore trop rare. C. L. LUN. 24 MAI 20H30 BADAR ALI KHAN Pakistan avec un ensemble qawwali Après les fabuleux concerts de Nusrat Fateh Ali Khan (de 1985 à 1996), Riswan et Muazam Ali Khan (janvier 1999) et Asif Ali Khan Manzoor Hussain Santoo Khan Qawwal and party (juin 2002), le Théâtre de la Ville présente un nouveau concert de qawwali. Badar Ali Khan a du pedigree : venant d’une famille qawwal depuis près de 600 ans, il eut comme grand-père un légendaire Dinna Jallundhri qui enregistra plus de 150 disques 78 tours. Son père, Mian Khan, s’était quant à lui brillamment approprié les marques de la panjabi ank, ce style qawwali caractérisé par la richesse des vocalises saregams, l’intrication de vers de différentes langues et la puissance du rythme. Mais Badar a aussi un percutant à-propos contemporain ce qui, dans le sillage de son lointain cousin Nusrat Fateh Ali Khan, le rend singulièrement apte à se fondre dans les ambiances les plus diverses de notre modernité. Certains des quelque 500 poèmes qawwalis que Badar interprète, ont été intégrés dans des films. Tout comme Nusrat, cette incroyable flexibilité charme ou irrite, intrigue sans nul doute. Imprimant lui aussi une marque très personnelle à son qawwali, Badar s’est certainement éloigné de la forme et du cadre "traditionnels" de ces chants, initialement propices à la communion avec le divin et l’extase mystique des soufis. Mais n’accompagne-t-il pas ainsi les profonds bouleversements tant musicaux que sociaux d’une société pakistanaise aux prises avec notre si fracassante – et perméable – modernité ? La réponse demeure au cœur de chacun de nous. Un maître soufi persan, Shihâbuddin Suhrawardî, nous rappelait, au XIIIe siècle, que la musique ne faisait naître dans le cœur que les sentiments qui pouvaient déjà y séjourner. Quelles émotions surgiront des vocalises échevelées de Badar Ali Khan ? Pierre-Alain Baud R. et S. Misra, ph. C. Elbaz S. Parvez, ph. F. Vernhet V. Lahari, ph. X, DR bilités émotionnelles qui constituent sa personnalité. Là réside le mystère de la musique hindoustanie, et Shahid Parvez nous aide, avec la surprenante douceur d’un enchantement, à en pénétrer les arcanes. C. L. MER. 26 MAI 20H30 RAJAN ET SAJAN MISRA chant khyal Inde du Nord Kanta Prasad Misra harmonium Subhen Chatterjee tabla Déjà invités en 1996 au Théâtre de la Ville, les frères Rajan et Sajan Misra, maintenant sexagénaires, ont acquis une solide réputation dans les années 80. Issus d’une lignée de musiciens de Bénarès, ils étudient avec leur père Hanuman Misra et leur oncle Gopal Misra, réputé alors comme l’un des meilleurs joueurs de sarangi, la vièle d’accompagnement du chant khyal. Bercés dans l’un des creusets les plus anciens de la musique hindoustanie, ils étudient, pratiquent et entendent sur place les plus grands artistes des cinquante dernières années. À l'instar des fabuleux frères Nazakat et Salamat Ali Khan du Pakistan (khyal) ou des frères Gundecha (dhrupad) ils se sont toujours produits en duo, chantant d’une même âme dans la dévotion à la déesse Saraswati, patronne et protectrice des arts. Artistes sans concession, enseignants très prisés, ils puisent dans un répertoire composé de bandish (compositions) d’une haute tenue spirituelle grâce à la qualité des thèmes abordés provenant de l’hindouisme, et au choix des raga-s les plus enclins à rehausser l’aspect sacré d’un chant souvent emprunté au dhrupad, ancêtre direct du khyal. Leur chant se développe pas à pas au cours du bhara khyal au tempo lent, déjà discrètement accompagné du tabla. Savantes improvisa- 51 tions mélodiques et rythmiques se succèdent, les oscillations puissantes et répétées surgissent (gamak), les phrasés rapides fusent comme des flèches lumineuses (taan). Le raga se conclut sur un tarana explosif, exercice rythmique jubilatoire. Viennent ensuite d’autres genres tels le thumree romantique ou le bhajan d’inspiration mystique. L’ambitus des basses aux aigus s’étire et s’amplifie, la voix puissante et parfois rugissante de Rajan est portée au maximum de ses possibilités, tandis que celle de Sajan lui répond dans des improvisations tout en finesse. Un style chaleureux et flamboyant parfois haut en couleur et toujours traversé par une haute tenue de spiritualité. C. L. On retrouve les origines du Nan Yin ou Nan Kouan (chant courtois de la Chine du Sud) dans la musique de cour de l’époque Song (960-1278). Restant un des rares témoignages de la musique chinoise authentique, le Nan Yin existe sous sa forme actuelle depuis le XVIe siècle. Il s’est développé principalement dans le port de Quanzhou, décrit par Marco Polo comme l’une des plus belles cités de son temps. Diverses recherches ont permis de découvrir un recueil de ces ballades daté de 1613. C’est grâce à une tradition ininterrompue, malgré les transformations récentes de la culture chinoise, qu’a pu être perpétuée jusqu’à aujourd’hui cette musique, d’une extrême délicatesse, expression pure de l’amour courtois. Le Nan Yin se distingue des autres formes musicales chinoises tant par le raffinement que par la complexité de ses formes. Cette pratique musicale autrefois réservée à une classe aristocratique est devenue peu à peu très populaire et demeure de nos jours comme un moyen d’expression privilégié : il existe plus de 400 groupes amateurs de Nan Yin dans la région de Quanzhou. Ces complaintes d’amour rappellent curieusement celles de nos troubadours. L’orchestration, elle aussi, n’est pas sans évoquer la richesse colorée du monde médiéval. On peut également percevoir dans l’instrumentation et les modulations de la voix, l’influence des rythmes d’Asie centrale et des pays arabes qui commerçaient avec la Chine (longues mélopées mélancoliques, danses brillantes et enlevées…). MUSIQUES DUMONDE AUX ABBESSES TARIF C DU 14 AU 26 OCT. ANGÉLIQUE IONATOS Alas pa’volar création (Des ailes pour voler) textes extraits du journal de Frida Kahlo mise en scène Omar Porras musique Christian Boissel (voir article p. 16) d’après Kristofer Schipper JEU. 4 DÉC. 20H30 ET SAM. 6 DÉC.17H P. Meyer, ph. P. Matfas/Opale A. Ionatos, ph. J. Beneich/Alamo DU 25 AU 29 NOV. ET DU 9 AU 11 DÉC. PHILIPPE MEYER L’Endroit du cœur (avec vue sur l'envers) création Nan Kouan, ph. San Bartolomé textes et chansons sur le thème de l'amour, de Maurice Scève à Jean Genet (voir article p. 17) SAM. 29 NOV. 17H NAN YIN musiques traditionnelles chinoises musiques et chants courtois Chine du Sud surtitrés en français 6 musiciens dont 3 chanteurs pipa (luth à 4 cordes), sanxian (2e luth), dongxiao (flûte droite), erxian (vièle à deux cordes), chaque chanteur use de claquettes en bois pour diriger l’ensemble 52 Pierre-Jean de San Bartolomé, dans le cadre des Années croisées francochinoises MARIZA fado Portugal 3 musiciens avec guitares portugaises et guitare classique Nouvelle icône du fado, Mariza est sans doute la seule fadiste née hors du Portugal, en 1973 au Mozambique. Sa grand-mère était noire ; comme elle, elle porte les cheveux ras, mais en blond décoloré. Arrivée très jeune dans le quartier populaire lisboète de la Mouraria, face au mythique Bario Alto, elle chante avant même de savoir lire. Son père, aficionado, lui apprend les chansons à l’aide de dessins… Adolescente, elle fréquente les rodadas, ces tournois populaires réservés aux connaisseurs. On l’entend aussi dans des clubs et des casinos interpréter du jazz, du gospel, de la soul, de la musique brésilienne comme du fado. C’est lors d’une tournée au Canada en 1998 qu’elle découvre soudain son amour et son besoin du fado. Est-ce l’éloignement ou la réaction enthousiaste du public qui la rapproche de ses racines ? Toujours est-il que le fado devient sa vie. À l’instar d’Amália Rodrigues, on peut dire d’elle que « le fado est un destin qui vous prend ». Portée par une voix chaude et prégnante, elle est vite remarquée pour ses interprétations. Sa gestuelle servie par une silhouette gracile et élancée devient un atout. L’an 2000 est un tournant : nommée « Meilleure révélation de l’année » et « Plus belle voix du fado », elle reçoit la plus belle récompense au pays. Sa notoriété monte en flèche et elle se retrouve Disque d’or. Elle tourne dans le monde entier, les médias la demandent et elle est l’invitée de Michel Drucker à Vivement dimanche. Éprise de poésie, elle met en musique avec le guitariste Jorge Fernando des textes qui chantent un Portugal ouvert et métissé. C. L. JACKY MICAELLI seconda, terza Marie Langianni terza Jean-Etienne Langianni bassu Corse Marie-Ange Geronimi seconda, terza POLYPHONIES SACRÉES ET PROFANES « J’ai chanté avant de parler », dit Jacky Micaelli. C’est, pour elle, un besoin vital. Elle chante publiquement, depuis bientôt vingt ans, la déchirure de l’âme corse. Son chant est d’une fulgurante beauté. Comme le blues, le chant corse émane, a-t-on écrit, « de l’âme d’un peuple qui clame sa révolte, sa souffrance avec toute l’énergie de son désespoir ». Il est une mémoire. Enraciné, il a donc vocation universelle, comme un roman de García Márquez ou un tableau de Chagall. Jacky Micaelli s’inscrit dans la tradition sans la figer. Ne s’approprie-t-elle pas un répertoire traditionnellement dévolu aux hommes ? Depuis ses débuts en 1983, au sein d’une association bastiaise, elle a beaucoup chanté, en Corse et ailleurs, chants sacrés et chants profanes du répertoire : à la Fenice de Venise en 1988, au Printemps de Bourges la même année, au festival de Lille sous la direction de Yannis Xenakis, à la Scala de Milan en 1990 ou bien encore au Grand Rex à Paris, invitée par Jacques Higelin. Complice des groupes polyphoniques A Cumpagnia, Tavagna, Donnisulana, elle collabore aussi avec l’ensemble Organum de Marcel Pérés. Jacky Micaelli, écrit François Picard dans Diapason, c’est « une voix forte, incisive, poignante, lentement mûrie au contact des plus grands chanteurs et instrumentistes corses ». Une voix, qui « appartient autant à la terre qu’aux nuages qui roulent ». Un chant âpre et sobre : le répertoire sacré en langues corse, latine et toscane et quelques polyphonies profanes… L’alliage précieux de trois tessitures, seconda, terza, et bassu. Pour célébrer Noël. TOURIA HADRAOUI chant Maroc malhoun avec 5 musiciens ILLUMINATION « C’est une illumination ! » s’est exclamé le poète Mamhoud Darwich. Touria Hadraoui a déjà vécu plusieurs vies : elle a étudié et enseigné la philosophie puis pratiqué le journalisme et fondé une revue ; elle a milité pour la culture et pour la femme. « Habitée, dit-elle, par le chant depuis sa plus tendre enfance », elle a rencontré le malhoun , une forme ancestrale de poésie chantée. C’est auprès du maître El Haj Benmoussa qu’à partir de 1988, elle s’est initiée à cet art. Trois ans d’apprentissage pour se familiariser avec cet « univers fabuleux ». Touria Hadraoui s’est approprié ce genre jusqu’alors apanage des hommes. Aujourd’hui, elle le chante à la manière ancienne. Comme un supplément d’âme, elle lui a instillé, dit-on, « élégance, grâce et distinction ». « Il y a une douleur dans la vie sans les livres » dit cette lectrice fervente à laquelle les livres ont ouvert les chemins de la réflexion et du rêve. Dans les écrits des prestigieux maîtres soufis, elle puise les ferments d’une quête mystique et, depuis la fin des années 90, interprète aussi ce répertoire. Entre autres, en dialecte marocain, des textes d’Al Harrak, disparu en 1844, qu’elle a parés de sa musique. Souvent, les chants soufis évoquent l’amour et le désir. L’amour divin, le désir d’une rencontre spirituelle. Mystiques et profanes à la fois, ils invitent à l’ivresse des sens, ils conviennent à l’extase, à un voyage au-delà des frontières de l’être… Des chants qui convoquent « tout un corps » et non seulement « deux yeux qui lisent ». Et « l’écho de l’aube se répercute encore dans la voix de Touria Hadraoui », écrit Abdallah Zrika. Un timbre étrange, « fragile et ample ». Véhicule des sortilèges, cette voix investit la mémoire pour tenter de pérenniser la tradition musicale. Au Théâtre des Abbesses, elle sera escortée par deux kemanja (violon), un oud, un swisen (luth) et une derbouka pour distiller malhoun et chants soufis. J. E. S. Tomiyama, ph. X, DR J. Micaelli, ph. X, DR Mariza, ph. X, DR SAM. 20 ET DIM 21 DÉC. 17H JEU. 22 JAN. 20H30 G. Appaix, ph. L. Lafolie Jacques Erwan SAM. 7 FÉV. 17H SEIKIN TOMIYAMA jiuta chant et shamisen Japon Shinzan Yamamoto shakuhachi DU 5 AU 10 JAN. 20H30 GEORGES APPAIX Non seulement… T. Hadraoui, photos X, DR 6 danseurs et 2 musiciens (voir article p. 33) CRÉATION UN CHANT INTIME. Né en 1950, Kiyotaka Tomiyama est le fils d’un « Trésor national vivant du Japon », dont il a, aujourd’hui, hérité du nom, Seikin Tomiyama. Sous sa férule, il s’initie, dès son plus jeune âge, au répertoire classique. Il étudie ensuite le langage moderne de la musique de koto à l’Université nationale des beaux-arts et de musique de Tokyo. Son identité musicale demeure cependant enracinée dans la tradition léguée par son père. Chanteur, il est aussi un instrumentiste qui exprime son talent avec divers instruments à cordes : le koto, cithare tendue de treize 53 cordes, le kokyû, vièle dotée de trois cordes, seul instrument à archet de la tradition, et le shamisen, luth pourvu d’un long manche et d’une caisse rectangulaire, dont les trois cordes sont "attaquées" au plectre. C’est un instrument qui s’illustre en plusieurs genres musicaux. Familier, depuis 1977, des tournées en Asie ainsi qu’en Europe et en Amérique, il est aussi, comme membre du groupe Atarasii Kaze (Vent nouveau), depuis 1989, d’un des artistes que la Fondation du Japon délègue volontiers en Europe. Au Théâtre des Abbesses, Seikin Tomiyama interprétera avec la complicité de Shinzan Yamamoto, né en 1963, un maître du shakuhachi, la flûte droite japonaise, une musique de chambre pour shamisen, de style Jiuta qu’il maîtrise parfaitement. Un répertoire de chants de la région de Kyoto-Osaka pour voix et shamisen, né au XVIIe siècle. Initialement exécuté dans l’intimité d’un salon – celui d’une maison ou d’un restaurant – et jamais dans l’enceinte d’un théâtre ou d’un temple, il n’exige pas que ses interprètes projettent leur voix au cœur de larges espaces, et autorise l’accompagnement au shamisen. « L’absence de contraintes, telles celles qu’imposent conventions théâtrales ou religieuses permettaient des innovations stylistiques et elles furent plus fréquentes et substantielles en ce genre qu’en tout autre », observe le musicologue Yasihiko Tokumaru. La voix de Seikin Tomiyama, qui se joue des aigus, escortée par les sonorités des instruments, installe l’auditeur dans le décor sonore d’un salon oriental. Du XVIIe au XIXe siècle, le répertoire emprunte à diverses époques. Il évoque la tristesse d’une femme condamnée à dormir seule, le vœu d’une fillette de trouver mari, la sérénité d’une religieuse, l’amour, la douleur de la séparation, le désarroi d’une courtisane… Un répertoire lyrique et sentimental qui pour autant, ne récuse pas l’humour. J. E. Toud'Sames, ph. X, DR rismes et pensées, écrits dans les deux langues, ponctueront le spectacle. Dans le fil de la tradition, Louis-Jacques Suignard et Lors Jouin ont tissé un chant breton contemporain. Kristen Nogues et Jacques Pellen, Thierry Robin, construisent une modernité riche d’influences diverses. D’autres, plus ou moins illustres, prêteront aussi leurs mots et leurs notes. La voix solo, a cappella, sera environnée de sons de la nature et de la vie quotidienne, traités et métamorphosés en musique par le talent de Sylvain Thévenard, ingénieux ingénieur du son et musicien. Quelques effets enrichiront le dispositif sonore. Son et sonorités seront comme instruments, souhaite Annie Ebrel. Jeune styliste quimpérois, Pascal Jaouen s’inspire, lui aussi de la tradition pour confectionner sa modernité. Il créera le costume de scène. Du neuf donc, édifié sur les fondements d’une tradition. Pour qu’elle vive. J. E. DIM. 21 MARS 17H TOUD’SAMES Bretagne Lors Jouin chant Jean-Michel Veillon flûtes Alain Genty basse Dom Molard percussions David « Hopi » Hopkins percussions DU 10 AU 21 FÉV. 20H30 ROMANCERO GITANO FEDERICO GARCÍA LORCA A. Ebrel, ph. V. Le Goff Lorca, © Fondation F. García Lorca musique et mise en scène Vicente Pradal (voir article p. 18) JEU. 18 MARS 20H30 ET SAM. 20 MARS 17H ANNIE EBREL Bretagne chant a cappella 54 SEULE EN SCÈNE Depuis longtemps déjà, les artistes bretons inventent un futur à une tradition héritée qu’ils perpétuent en l’enrichissant. Annie Ebrel ne déroge pas à la règle : au Théâtre de Cornouaille, scène nationale de Quimper, elle élabore un nouveau spectacle, une création que le Théâtre des Abbesses accueille ensuite. Ouverte au monde, elle convie pour la circonstance, toutes générations confondues, femmes et hommes de plume, auteurs et compositeurs, chanteurs et musiciens, bretons ou pas, à imaginer pour elle, mélodies et textes originaux. Annie Ebrel chantera en breton et en français, quelques textes. Apho- DES PARFUMS D’ORIENT Lors (Laurent) Jouin, c’est un personnage ! Qui, en Bretagne, ne connaît son talent protéiforme ? Petits et grands apprécient son humour, chantent ses mots et ses musiques. Auteur – il est, entre autres, parolier au sein du groupe les Ours du Scorff – compositeur et interprète, il s’illustre aussi comme comédien. Né à Paris dans une famille de chansonniers, il revient très jeune en Bretagne. Il s’y initie à la langue bretonne en milieu rural. En BasseBretagne, il pratique aussi le collectage de chants et de contes et, ainsi, nourrit sa verve. Il excelle dans l’interprétation du traditionnel Kan-ha-diskan, participe aux activités de diverses formations bretonnes et s’associe en duo à des chanteurs bas-bretons et gallos. Soliste reconnu au timbre singulier, il interprète des gwerziou, ces complaintes en langue bretonne. Sa discographie témoigne de la diversité et de la richesse de son répertoire : chants de marins, Kan-ha-diskan, gwerziou, chansons diverses… au Théâtre des Abbesses, sa belle voix vivifiera un répertoire en partie traditionnel (gavottes, plin …) et, pour l’essentiel, de nouvelles compositions (textes et musiques récemment écrits par Lors Jouin). « Leur poésie et leur forme, écrit-il, s’inspirent clairement d’anciens morceaux de la tradition populaire de Basse-Bretagne, les sujets abordés et les questions qu’ils suscitent sont tout à fait actuels. » Lors Jouin sera entouré de quatre complices qui avec lui constituent le groupe Toud’Sames (Tous ensemble), formation atypique qui n’utilise guère d’instruments de tradition ancienne. Initialement danseur et sonneur, Jean-Michel Veillon découvre la flûte traversière en 1977. Depuis vingt ans, son style, coloré d’in- MER. 2 JUIN 20H30 ULJAN BAÏBUSYNOVA chant épique YELDOS YEMIL chant épique, dombra SAÏANE AKMOLDA kobyz (sorte de vièle) Kazakhstan ONDAR MONGUN-OOL chant, tschansy (sorte de luth) Touva Ce concert offrira un nouveau voyage musical au cœur des steppes d’Asie centrale, terres où vivaient nomades et pasteurs avec leurs croyances chamaniques et animistes glorifiant les forces de la nature et l’esprit des ancêtres. Le Kazakhstan, immense territoire depuis les rives de la mer Caspienne jusqu’aux frontières de la Chine, a construit la richesse de son patrimoine sur l’oralité. Le chant épique ou jyraou en est le plus beau témoignage. Cet art vocal, autrefois réservé aux hommes, requiert du chanteur une mémoire phénoménale et des qualités vocales exceptionnelles : une voix de basse dont le timbre guttural surprend par son intensité et la force qu’il dégage. Uljan Baïbusynova possède ces dons magiques. Diplômée du conservatoire et de l’université de sa région natale, le delta du Syrdaria, elle suit aujourd’hui à 30 ans les traces de celle qui l’a initiée au jyraou, Chamchat Tulepova, la première Kazakh à avoir créé une école de femmes jyraou. Professeur de chant et de dombra, luth à deux cordes, Uljan Baïbossynova sera pour la troisième fois sur la scène qui l’a fait connaître en Europe avant que Peter Sellars ne l’engage dans son dernier spectacle. Deux autres jeunes Kazakhs seront à ses côtés : Yeldos Yemil, 28 ans, interprète de jyraou depuis 14 ans et virtuose du dombra, qu’il a commencé à 7 ans ; Saïane Akmolda, 29 ans, qui pratique le kobyz (sorte de vièle) avec un éblouissant jeu de doigts hérité des grands interprètes du XVIIIe siècle. À la frontière de la Mongolie, au sud de la Russie son pays d’appartenance, la petite république autonome de Touva est un des fiefs du chant diphonique. Ondar Mongun-ool est l’un des jeunes ambassadeurs de cet étonnant chant de gorge d’où jaillissent soudain les harmoniques de la mélodie chantée. Il remportait à 17 ans le premier prix du Concours international de chant diphonique. Aujourd’hui, il maîtrise une trentaine de techniques de ce style vocal et, selon la tradition, il joue en solo, s’accompagnant du tschanzy, sorte de luth qu’il fabrique lui-même. J. M. JEU. 10 JUIN 20H30 NEZAKAT TEYMUROVA chant et daf Azerbaïdjan Elsan Mansurov kamantché Aliaga Sadiyev târ Chirzad Fetelieyev zurna, clarinette, tütek, balaban Kamran Kerimov nagara (percussion) Il est un genre qui résume à lui seul tout l’Orient tant les apports persans, arabes et turcs qui le composent sont multiples ; un genre qui définit aussi la richesse musicale de l’Azerbaïdjan, ex-république soviétique au sud de la mer Caspienne : le mugham, musique modale basée sur l’improvisation, expression de toutes les variations du sentiment amoureux. Alim Qasimov (cinq fois au Théâtre de la Ville) et Aga Khan Abdoulaiev (en 2001 aux Abbesses) en furent les prodigieux interprètes. Cette saison, c’est une femme, Nezakat Teymurova qui relève le défi. Elle n’a que 30 ans et pourtant elle témoigne d’une exceptionnelle maturité. Un parcours sans faute pour cette jeune femme qui a suivi à Bakou le chemin classique de l’école, du conservatoire et de l’académie d’où elle sort en 1999. L’année suivante, elle reçoit la médaille d’honneur d’Azerbaïdjan et ses activités professionnelles la conduisent vers l’Europe et les États-Unis. Un premier CD paru en 2001 et le double album sorti en 2002 sont de purs joyaux. La puissance de son chant ponctué par le daf (grand tambourin cerclé de cymbalettes) et son agilité à se jouer des difficultés les plus redoutables sont époustouflantes. À ses côtés, quatre musiciens qui, tous, ont fréquenté l’académie de musique Uzeyir Hadjibeyli de Bakou et qui accompagneront ses premiers pas sur la scène des Abbesses : Elsan Mansurov à la vièle kamantché, aujourd’hui enseignant et bien connu du Théâtre de la Ville où il a souvent accompagné Alim Qasimov ; au târ, Aliaga Sadiyev, originaire d’Arménie ; Chirzad Fetelieyev aux zurna et balaban (sortes de clarinette), au tütek (naï) et à la clarinette ; au nagara (percussion), le jeune Kamran Kerimov qui a suivi le même enseignement que Nezakat Teymurova. Une étoile à suivre dans le ciel de la musique azéri. J. M. U. Baïbusynova, ph. Kamrouz N. Teymurova, ph. X, DR fluences orientales, enrichit nombre d’aventures musicales bretonnes. Comme ses frères Jacky et Patrick, Dom Molard est musicien. Initié à la caisse claire puis à la batterie, il s’intéresse aux percussions orientales et découvre le tabla indien. Il rythme les musiques de divers artistes bretons. Alain Genty compose pour le théâtre, le cinéma et la danse. Bassiste, il accompagne, en scène ou en studio, Didier Squiban ou Sapho, Thierry Robin ou Bernie Bonvoisin… arrangeur et réalisateur, il s’acoquine à Cheb Mami ou Tony McManus, guitariste virtuose écossais. Entre celtitude et Orient, donc, éclectisme des rencontres. David « Hopi » Hopkins (percussions) est irlandais. Celte cosmopolite, il a, au cours de ses pérégrinations, croisé musiciens traditionnels turcs, grecs ou arabes, un pianiste italien, un guitariste croate et quelques adeptes du jazz ! Breton d’adoption depuis 1992, il prête son talent à diverses formations bretonnes. Toud’Sames, tous ensemble donc autour de Lors Jouin en cette tour de Babel de la musique. Elle épice son chant de saveurs orientales. Ainsi enrichie de voyages réels ou imaginaires, la musique bretonne féconde-t-elle ses traditions et les perpétue en les régénérant sans cesse. C’est son présent, c’est aussi son avenir. J. E. 55 Théâtre de la Ville mode d'emploi 2 théâtres 1 équipe Gérard Violette directeur Brigitte Giuliani assistante de direction ADMINISTRATION Michael Chase administrateur Marie-Christine Chastaing chef service paie Solen Le Guen adjointe de l'administrateur ARTISTIQUE Serge Peyrat THEATRE DE LA VILLE Antoine Violette 2 PL. DU CHÂTELET PARIS 4 Thomas Erdos Jacques Erwan Georges Gara Soudabeh Kia Irène Filiberti directeur adjoint à la programmation directeur technique à la communication conseiller artistique conseiller musiques du monde conseiller musique conseillère musiques du monde conseillère danse photos Birgit COMMUNICATION Anne-Marie Bigorne secrétaire générale Jacqueline Magnier relations presse, publicité et documentation Marie-Laure Violette relations presse, iconographie Elisa Santos invitations RELATIONS AVEC LE PUBLIC Lydia Gaborit responsable du service Florence Thoirey-Fourcade LES ABBESSES RELATIONS PUBLIQUES "JEUNES" (étudiants, enseignement…) Isabelle-Anne Person Maud Rognion 31 RUE DES ABBESSES PARIS 18 LOCATION Marie Katz Ariane Bitrin ACCUEIL Natacha Reese responsable du service responsable du service ACCUEIL DES ABBESSES (artistes et public) Delphine Dupont responsable du service calendrier prix des places location abonnements individuels jeunes relais p.57 p.60 p.60 TECHNIQUE Serban Boureanu Jean-Michel Vanson Jean-Marie Marty Claude Lecoq Jean-Claude Paton Manuel Sanchez Frédéric Duplessier Charles Deligny Didier Hurard Pierre Tamisier Alain Frouin Marion Pépin directeur technique directeur technique adjoint régisseur général directeur de scène sous-chef machiniste chef cintrier chef électricien sous-chef électricien chef accessoiriste chef service son régisseur du son chef habilleuse TECHNIQUE DES ABBESSES Alain Szlendak directeur technique Patrice Guillemot régisseur général Georges Jacquemart régisseur son p.61 ENTRETIEN SÉCURITÉ Jacques Ferrando Jean-Claude Riguet p.62 IMPRIMERIE Robert Ainaud p.63 ISSN 0248-8248 DIRECTION, ADMINISTRATION : 16 quai de Gesvres 75180 Paris Cedex 04, Tél. : 01 48 87 54 42 directeur de la publication : Gérard Violette maquette : Maurice et Juliette Constantin correcteur : Philippe Bloch Imprimerie GRM : 8 rue des Lilas 93189 Montreuil Cedex Tél. : 01 48 18 22 50 NOVEMBRE 2003 calendrier en noir = théâtre, danse en rouge = musique SEPTEMBRE 2003 LU 15 MA 16 ME 17 JE 18 VE 19 SA 20 DI 21 LU 22 MA 23 ME 24 JE 25 VE 26 SA 27 DI 28 LU 29 MA 30 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 20h30 Le Soulier… intégr. 13h Le Soulier… intégr. 13h Alarmel Valli Le Soulier… 1re part. 18h30 Alarmel Valli Le Soulier… 2e part. 18h30 Alarmel Valli Alarmel Valli Le Soulier… intégr. 13h Alarmel Valli Le Soulier… intégr. 13h M. Reza Shajariane M. Reza Shajariane OCTOBRE 2003 THEATRE DE LA VILLE SA DI LU MA ME JE VE SA 1 2 3 4 5 6 7 8 DI 9 LU 10 MA 11 ME 12 JE 13 VE 14 SA 15 DI 16 LU 17 MA 18 ME 19 JE 20 VE 21 SA 22 DI 23 LU 24 MA 25 ME 26 JE 27 VE 28 SA 29 LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u ME 1 Le Soulier… 1re part. 18h30 JE 2 Le Soulier… 2e part. 18h30 Daniel Dobbels VE 3 Daniel Dobbels SA 4 Le Soulier… intégr. 13h Daniel Dobbels DI 5 Le Soulier… intégr. 13h Daniel Dobbels u LU 6 MA 7 Shivkumar Sharma Vandekeybus/Cherkaoui ME 8 Le Soulier… 1re part. 18h30 Vandekeybus/Cherkaoui JE 9 Le Soulier… 2e part. 18h30 Vandekeybus/Cherkaoui VE 10 Bang on a can all-stars Vandekeybus/Cherkaoui SA 11 Le Soulier… intégr. 13h Vandekeybus/Cherkaoui DI 12 LU 13 MA 14 Angélique Ionatos ME 15 Lucinda Childs Angélique Ionatos JE 16 Lucinda Childs Angélique Ionatos VE 17 Lucinda Childs Angélique Ionatos SA 18 Bhattacharya 17h Lucinda Childs Angélique Ionatos DI 19 Lucinda Childsu Angélique Ionatos u LU 20 Opéra Li Yuan Xi MA 21 Café Zimmermann Angélique Ionatos ME 22 Angélique Ionatos JE 23 Angélique Ionatos VE 24 DV8 / Lloyd Newson Angélique Ionatos SA 25 DV8 / Lloyd Newson Angélique Ionatos DI 26 Angélique Ionatos u LU 27 DV8 / Lloyd Newson MA 28 DV8 / Lloyd Newson ME 29 DV8 / Lloyd Newson JE 30 DV8 / Lloyd Newson VE 31 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Shaham / Eguchi 17h Josef Nadj Josef Nadj u Kronos Quartet Rajasthan Josef Nadj Josef Nadj Josef Nadj Kalhor / Husain Khan 17h Josef Nadj Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations … u François Verret François Verret François Verret François Verret Beaux-Arts Trio 17h François Verret Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Les Relations de Claire Xavier Le Roy Xavier Le Roy Badakhchan Xavier Le Roy Quatuor Takács 17h Xavier Le Roy Philippe Meyer Philippe Meyer Philippe Meyer Philippe Meyer Nan Yin 17h Philippe Meyer Les Relations de Claire DI 30 DECEMBRE 2003 LU MA ME JE VE SA 1 2 3 4 5 6 DI 7 LU 8 MA 9 ME 10 JE 11 VE 12 SA 13 DI 14 LU 15 MA 16 ME 17 JE 18 VE 19 SA 20 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u Merce Cunningham Merce Cunningham Merce Cunningham Merce Cunningham Akram Khan 1er prog. Akram Khan1er prog. Mariza Akram Khan 1er prog. Mariza 17h Akram Khan 1er prog. Merce Cunningham Merce Cunningham u Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj Perényi / Várjon 17h Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj u Fonó Zenekar Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj DI 21 LU 22 MA 23 éc.24 d . 5 jan Philippe Meyer Philippe Meyer Philippe Meyer oire ris vat de Pa r e r ns Co érieu sup Brice Leroux Brice Leroux Brice Leroux Brice Leroux Jacky Micaelli 17h Brice Leroux Jacky Micaelli 17h Angelin Preljocaj Angelin Preljocaj répétitions et montage Richard II 57 JANVIER 2004 MARS 2004 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u Georges Appaix Georges Appaix Georges Appaix Georges Appaix Georges Appaix 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u LU 5 MA 6 ME 7 JE 8 VE 9 Richard II SA 10 Mourja / Gous 17h Richard II Georges Appaix DI 11 LU 12 Weiss / Al-Kîndi MA 13 Richard II ME 14 Richard II Le Professionnel JE 15 Weiss / Al-Kîndi Le Professionnel VE 16 Richard II Le Professionnel SA 17 Ogrintchouk / Vizi / Aviv 15h Richard II Le Professionnel DI 18 Richard II u Le Professionnel u LU 19 Annette Dasch MA 20 Richard II Le Professionnel ME 21 Richard II Le Professionnel JE 22 Richard II Touria Hadraoui VE 23 Richard II Le Professionnel SA 24 Mohamed Segueni 17h Richard II Le Professionnel DI 25 Le Professionnel u LU 26 Zhu Xiao-Mei MA 27 Richard II Le Professionnel ME 28 Richard II Le Professionnel JE 29 Richard II Le Professionnel VE 30 Richard II Le Professionnel SA 31 Shahid Parvez 17h Kuijken… 17h Richard II Le Professionnel FEVRIER 2004 DI LU MA ME JE VE SA 1 2 3 4 5 6 7 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u Mats Ek Mats Ek Mats Ek Mats Ek Akram Khan 2e prog. Akram Khan 2e prog. Akram Khan 2e prog. Akram Khan 2e prog. Seikin Tomiyama 17h Akram Khan Kash 58 1 2 3 4 5 6 Marie Chouinard Marie Chouinard Marie Chouinard Marie Chouinard Gerhardt / Licad 17h Marie Chouinard DI 7 LU 8 MA 9 ME 10 JE 11 Beaucoup de bruit pour rien VE 12 Beaucoup de bruit pour rien SA 13 Cecile Licad 17h Beaucoup de bruit pour rien DI 14 LU 15 Lahari / Krishna MA 16 Beaucoup de bruit pour rien ME 17 Beaucoup de bruit pour rien JE 18 Beaucoup de bruit pour rien VE 19 Beaucoup de bruit pour rien SA 20 Fabio Biondi 17h Beaucoup de bruit pour rien DI 21 Beaucoup de bruit … u LU 22 MA 23 Beaucoup de bruit pour rien ME 24 Beaucoup de bruit pour rien JE 25 Beaucoup de bruit pour rien VE 26 Beaucoup de bruit pour rien SA 27 Quatuor Ysaÿe 17h Beaucoup de bruit pour rien DI 28 LU 29 Ysaÿe / Perényi / Tóth MA 30 Beaucoup de bruit pour rien ME 31 Beaucoup de bruit pour rien Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle u Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Annie Ebrel Ma vie de chandelle Annie Ebrel 17h Ma vie de chandelle Toud'Sames 17h Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Ma vie de chandelle Francesca Lattuada Francesca Lattuada AVRIL 2004 Mats Ek DI 8 LU 9 MA 10 ME 11 JE 12 VE 13 SA 14 DI 15 LU 16 MA 17 ME 18 JE 19 VE 20 SA 21 DI 22 LU 23 MA 24 ME 25 JE 26 VE 27 SA 28 DI 29 LU MA ME JE VE SA Régine Chopinot Régine Chopinot Régine Chopinot Régine Chopinot Régine Chopinot Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano u Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Romancero gitano Alwin Nikolais Alwin Nikolais Alwin Nikolais Alwin Nikolais Alwin Nikolais THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u JE 1 Beaucoup de bruit pour rien Francesca Lattuada VE 2 Francesca Lattuada SA 3 Céline Frisch 17h Francesca Lattuada DI 4 LU 5 De Keersmaeker 1er prog. MA 6 De Keersmaeker 1er prog. ME 7 De Keersmaeker 1er prog. oire ris vat de Pa r JE 8 De Keersmaeker 1er prog. e r ns Co érieu VE 9 De Keersmaeker 1er prog. sup SA 10 DI 11 LU 12 MA 13 Malavika Sarukkaï ME 14 Malavika Sarukkaï JE 15 Malavika Sarukkaï VE 16 Malavika Sarukkaï SA 17 Malavika Sarukkaï DI 18 LU 19 MA 20 Jan Fabre ME 21 Sidi Larbi Cherkaoui Jan Fabre JE 22 Sidi Larbi Cherkaoui Jan Fabre VE 23 Sidi Larbi Cherkaoui Jan Fabre SA 24 Sidi Larbi Cherkaoui DI 25 AVRIL/ LU 26 MA 27 ME 28 JE 29 VE 30 JUIN/ suite THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u Sidi Larbi Cherkaoui Sidi Larbi Cherkaoui Sidi Larbi Cherkaoui Sidi Larbi Cherkaoui 20h30 mat 15 h u La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… MAI 2004 SA 1 DI 2 LU 3 MA 4 ME 5 JE 6 VE 7 SA 8 DI 9 LU 10 MA 11 ME 12 JE 13 VE 14 SA 15 DI 16 LU 17 MA 18 ME 19 JE 20 VE 21 SA 22 DI 23 LU 24 MA 25 ME 26 JE 27 VE 28 SA 29 DI 30 LU 31 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u 20h30 mat 15 h u Emio Greco Emio Greco Emio Greco Emio Greco Emio Greco La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… u De Keersmaeker 2e prog. De Keersmaeker 2e prog. De Keersmaeker 2e prog. De Keersmaeker 2e prog. De Keersmaeker 2e prog. La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… La Visite… De Keersmaeker 3e prog. De Keersmaeker 3e prog. De Keersmaeker 3e prog. De Keersmaeker 3e prog. De Keersmaeker 3e prog. Badar Ali Khan Rajan et Sajan Misra Conservatoire… Conservatoire… La Fin de Casanova La Fin de Casanova La Fin de Casanova JUIN 2004 MA 1 ME 2 JE 3 VE 4 SA 5 DI 6 LU 7 MA 8 ME 9 JE 10 VE 11 SA 12 DI 13 LU 14 MA 15 ME 16 JE 17 VE 18 SA 19 DI 20 THEATRE DE LA VILLE LES ABBESSES 20h30 20h30 mat 15 h u La Fin de Casanova Uljan Baïbusynova La Fin de Casanova La Fin de Casanova Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch 17h Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch Pina Bausch 17h La Fin de Casanova La Fin de Casanova Nezakat Teymurova La Fin de Casanova La Fin de Casanova La Fin de Casanova u La Fin de Casanova La Fin de Casanova La Fin de Casanova La Fin de Casanova La Fin de Casanova suite THEATRE DE LA VILLE 20h30 LU 21 Pina Bausch MA 22 Pina Bausch ME 23 JE 24 VE 25 HORS LES MURS LES ABBESSES 20h30 mat 15 h u oire ris vat de Pa r e r ns Co érieu sup NOVEMBRE 2003 CITÉ INTERNATIONALE JE 20 VE 21 SA 22 DI 23 LU 24 MA 25 ME 26 JE 27 VE 28 SA 29 DI 30 20h30 Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain u mat. 15h Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain u mat. 15h DÉCEMBRE 2003 CITÉ INTERNATIONALE LU 1 MA 2 ME 3 JE 4 VE 5 SA 6 DI 7 LU 8 MA 9 ME 10 JE 11 VE 12 SA 13 DI 14 LU 15 MA 16 ME 17 JE 18 VE 19 SA 20 20h30 Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain Jardinage humain J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté … u mat 15h J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … J’ai acheté une pelle … MARS 2004 21h G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey 17h THEATRE DE LA BASTILLE ME 24 JE 25 VE 26 SA 27 DI 28 LU 29 MA 30 ME 31 G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany AVRIL 2004 THEATRE DE LA BASTILLE JE VE SA DI LU MA ME JE 1 2 3 4 5 6 7 8 21h G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany G. Ellen Barkey /Needcompany Needlapb / Needcompany Needlapb / Needcompany Needlapb / Needcompany 59 prix des places • programme distribué par les hôtesses • pourboire interdit • places numérotées TARIF A théâtre, danse re NORMAL 1 cat. 22 e 2e cat. 15 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie .............11 e TARIF B danse re NORMAL 1 cat. 25 e 2e cat. 16 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie ..........12,5 e TARIF C musique, musiques du monde, chanson danse NORMAL 1 seule catégorie............. 15 e JEUNES 1 seule catégorie............. 11 e TARIF exceptionnel Pina Bausch re NORMAL 1 cat. 29 e 2e cat. 22 e re e JEUNES 1 et 2 catégorie............. 22 e JEUNES : moins de 27 ans ou étudiant (justificatif obligatoire) location COMMENT RÉSERVER ? • par téléphone 01 42 74 22 77 du lundi au samedi de 11h à 19h (paiement possible par carte bancaire) • aux caisses : THEATRE DE LA VILLE 2 place du Châtelet, Paris 4 du mardi au samedi de 11h à 20h (lundi de 11h à 19h) LES ABBESSES 31 rue des Abbesses, Paris 18 du mardi au samedi de 17h à 20h • par correspondance : 2 pl. du Châtelet 75180 Paris Cedex 04 QUAND RÉSERVER ? • LOCATION PRIORITAIRE abonnements, cartes : 28 jours à l'avance, jour pour jour (7 jours de location réservée) • LOCATION NORMALE 21 jours à l'avance, jour pour jour renseignements tél. 01 42 74 22 77 www.theatredelaville-paris.com 60 abonnements - cartes 1. individuels 2. jeunes (individuels et relais) 3. relais 1. individuels ABONNEMENTS THEATRE-DANSE • 4 spectacles minimum • 10 spectacles minimum MUSIQUE-MUSIQUES DU MONDE : PASSEPORT MUSICAL • 4 programmes minimum, 8 places minimum, l tarifs préférentiels abonnement ABONNEMENT réductions importantes TARIF A TARIF B sur le prix des places selon les programmes TARIF C et les formules choisis. TARIF EXC. THEATRE-DANSE 4 spect. 10 spect. 14 16 11 22 e e e e 11 12,5 9,5 18,5 e e e e MUSIQUE… pass. mus. tarif normal 22 25 15 29 9,5 e e e e e l journal service à domicile du journal du Théâtre de la Ville (4 numéros par saison) donnant toutes informations (textes et photos) sur les spectacles présentés. l librairie, disques tarifs préférentiels sur les disques et les livres vendus après certains spectacles. l tarifs préférentiels hors abonnement ABONNEMENT THEATRE-DANSE 4 spect. 10 spect. TARIF A chaque abonné(e) 1 catégorie 14 e 11 e bénéficie de 2 places 2 catégorie 11 e 11 e à tarif préférentiel TARIF B “hors abonnement” 1 catégorie 16 e 12,5 e pour tous les spectacles 2 catégorie 12,5 e 12,5 e dans la limite des TARIF C 9,5 e * 9,5 e places disponibles. TARIF EXC. 22 e 18,5 e MUSIQUE… pass. mus. tarif normal 14 e 11 e 22 e 15 e re e re e 16 12,5 9,5 22 e e e e 25 16 15 29 e e e e e pour le théâtre et la danse en tarif C *11e l location prioritaire 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation (7 jours de location réservée). CARTE "PLACES À 2" 22 e la carte l tarifs préférentiels CARTE PLACES A 2 valables pour 2 places TARIF A 1 cat. pour chaque spectacle TARIF B 1 cat. dans la limite des TARIF C théâtre… places disponibles. TARIF EXC. re re tarif normal 14 16 11 22 e e e e 11 e 2 cat. 12,5 e musique 9,5 e e 2 cat. e l journal service à domicile du journal du Théâtre de la Ville l location prioritaire par correspondance : 5 SEMAINES JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation ; par téléphone et aux caisses : 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation. 22 e /15 e 25 e /16 e 15 e 29 e 61 t 2. jeunes MOINS DE 27 ANS OU ETUDIANT individuels (justificatif obligatoire) ABONNEMENTS THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum MUSIQUE-MUSIQUES DU MONDE : PASSEPORT MUSICAL TARIF C • 4 programmes minimum, 8 places minimum, l tarifs préférentiels TARIF A ET C 9,5 e • B 11 e • TARIF EXC. 18,5 e abonnement et hors abonnement chaque abonné(e) bénéficie de 2 places à tarif préférentiel “hors abonnement” pour tous les spectacles dans la limite des places disponibles. l journal service à domicile du journal du Théâtre de la Ville (textes et photos), 4 numéros par saison. l librairie, disques tarifs préférentiels disques et livres mis en vente. l location prioritaire 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation (7 jours de location réservée). CARTE "PLACES AUX JEUNES" 8 e la carte tarifs préférentiels TARIF A ET C 9,5 e • B 11 e • TARIF EXC. 18,5 e valables pour 2 places pour chaque spectacle dans la limite des places disponibles. l journal service à domicile du journal du Théâtre de la Ville (textes et photos), 4 numéros par saison. l librairie, disques tarifs préférentiels disques et livres mis en vente. t l location prioritaire par correspondance : 5 SEMAINES JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation ; par téléphone et aux caisses : 28 JOURS, JOUR POUR JOUR avant celui de la représentation. relais Vous devenez relais en prenant l'initiative de regrouper au minimum 10 personnes intéressées à souscrire un abonnement au Théâtre de la Ville. l renseignements RELATIONS PUBLIQUES "JEUNES" : tél. 01 48 87 54 42 (relais jeunes, étudiants, enseignement) Isabelle-Anne Person, Maud Rognion l souscription des abonnements relais (à partir du 26 mai) SERVICE LOCATION RELAIS tél. 01 48 87 43 05, fax 01 48 87 09 81 Marie Katz, responsable du service ; Ariane Bitrin l avantages "relais jeunes" (voir page suivante) suivi personnalisé et mise en place d'actions pédagogiques avec chacun des relais intéressés l une carte d'abonnement personnalisée par abonné(e) ABONNEMENTS THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum, 10 places minimum/prog. MUSIQUE-MUSIQUES DU MONDE : PASSEPORT MUSICAL TARIF C • 3 spectacles minimum, 10 places minimum/prog. tarifs préférentiels abonnement TARIF A, B, C 8 e • TARIF EXC. 18,5 e GROUPES TARIF A, B, C 8 e 62 (10 personnes minimum) 3. relais devenez relais Vous devenez relais en prenant l'initiative de regrouper au minimum 10 personnes intéressées à souscrire un abonnement au Théâtre de la Ville. Les relais sont les interlocuteurs privilégiés du Théâtre de la Ville. au service des relais comités d'entreprise, associations, groupes d'amis l renseignements RELATIONS AVEC LE PUBLIC (relais) : tél. 01 48 87 54 42 Lydia Gaborit, responsable du service ; Florence Thoirey-Fourcade ; Isabelle Krich, secrétariat l souscription des abonnements relais (à partir du 26 mai) SERVICE LOCATION RELAIS tél. 01 48 87 43 05, fax 01 48 87 09 81 Marie Katz, responsable du service ; Ariane Bitrin ABONNEMENTS THEATRE-DANSE • 3 spectacles minimum, 10 places minimum/prog. MUSIQUE-MUSIQUES DU MONDE : PASSEPORT MUSICAL • 3 spectacles minimum, 10 places minimum/prog. l tarifs préférentiels abonnement RELAIS réductions importantes TARIF A TARIF B sur le prix des places selon les programmes TARIF C et les formules choisis. TARIF EXC. THEATRE-DANSE 3 spect. 11 12,5 9,5 18,5 e e e e MUSIQUE… pass. mus. tarif normal 9,5 e 22 25 15 29 e e e e l avantages "relais" le relais reçoit régulièrement divers documents (journal du Théâtre de la Ville, tracts, affichettes…). le relais peut, en collaboration avec les services du Théâtre de la Ville, bénéficier d’invitations à des spectacles, de textes de pièces, de disques, participer à des rencontres avec les artistes, effectuer des visites du théâtre… l une carte d'abonnement personnalisée par abonné(e) si le relais le souhaite, il fournit au Théâtre de la Ville les noms et adresses de ses abonnés. cette carte d’abonnement personnalisée permet de bénéficier des mêmes avantages que ceux de l'abonnement individuel à 4 spectacles. AUTRES FORMULES • GROUPES (10 personnes minimum) • CARTE LIBERTÉ RELAIS 40 e la carte réservée aux comités d'entreprise et aux associations, cette carte permet de bénéficier de tarifs préférentiels et d'une location sans contrainte de nombre fixe de places par représentation, dans la limite des places disponibles. tarifs préférentiels groupes et cartes liberté relais TARIF A 14 et 11 e • B 16 et 12,5 e • C 9,5 e * e pour le théâtre et la danse en tarif C *11e 63 théâtre et danse : partenaires au 30 avril LA FIN DE CASANOVA Coproduction Sirocco Théâtre, compagnie subventionnée par la DRAC Ile-de-France – Théâtre de la Ville, Paris – Comédie de Saint-Etienne. ROMANCERA GITANO Production déléguée TNT-Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées. Coproduction TNT, Théâtre national de Toulouse MidiPyrénées – Le Théâtre, scène nationale de Narbonne – Théâtre de Cornouaille, scène nationale de Quimper – Théâtre des Treize Vents, CDN de Montpellier – Théâtre de la Ville, Paris – Association La Paloma. DV8 THE COST OF LIVING Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Festival d'Automne à Paris – Romaeuropa Festival – Julidans Festival, Stadsschouwburg Amsterdam – PACT Zollverein, Choreographisches Zentrum NRW – Hebbel Theater Berlin. Avec la participation d'Artsadmin. Avec le soutien du British Council. JOSEF NADJ IL N’Y A PLUS DE FIRMAMENT Coproduction Théâtre Vidy-Lausanne, ETE – Théâtre de la Ville, Paris – Berliner Festwochen. FRANÇOIS VERRET CHANTIER MUSIL Coproduction Théâtre national de Bretagne/TNB Rennes – Compagnie François Verret – Théâtre de la Ville, Paris – Festival d'Avignon – Théâtre des Salins, scène nationale de Martigues – Le Cargo, Maison de la culture de Grenoble. Avec le soutien du Parc de la Villette dans le cadre des résidences 2002. Avec le concours du ministère de la Culture et de la Communication dans le cadre du dispositif DICREAM. Avec le soutien à la résidence de la Fonderie, Théâtre du Radeau, Le Mans. La Compagnie François Verret est soutenue par la DRAC Ile-de-France, le ministère de la Culture et de la Communication et par le conseil général de Seine-Saint-Denis. XAVIER LE ROY PROJET Production in situ productions et Le Kwatt. Coproduction Hauptstadtkulturfonds, Berlin – Berliner Festwochen, Berlin – Gulbenkian Foundation/Capitals Lisbonne – Théâtre de la Ville, Paris – Centre de développement chorégraphique Toulouse/Midi-Pyrénées – Kaaitheater, Bruxelles – Ballet Frankfurt & TAT – Centre chorégraphique national de Montpellier/LanguedocRoussillon. Avec le soutien du Podewil, du TanzWerkstatt Berlin, du Mugatxoan-Arteleku, du Spring Dance Festival 2001 et du Panacea Stockholm 2001. MERCE CUNNINGHAM FLUID CANVAS (à Val Bourne) Pour la clôture du programme international du 50e anniversaire de la Merce Cunningham dance company. Coréalisation Théâtre de la Ville, Paris - Festival d'Automne à Paris. Coproduction Barbican Centre, Londres – Cal Performances, Berkeley. Avec le soutien de l'American Center Foundation, de l'AT&T Foundation, de Robert W. Wilson, et de Phyllis Wattis. Ce projet est subventionné en partie par les fonds public du New York City Department of Cultural Affairs. ANGELIN PRELJOCAJ NEAR LIFE EXPERIENCE Coproduction Théâtre national de Marseille, La Criée – Théâtre de la Ville, Paris – Festival Montpellier Danse 2003 – Festival d'Avignon – Le Groupe Partouche, Casino municipal Aix-Thermal. RÉGINE CHOPINOT W.H.A. Production Ballet Atlantique-Régine Chopinot – Théâtre de la Ville, Paris. MARIE CHOUINARD ÉTUDE # 1 • CHORALE Étude # 1 Production Compagnie Marie Chouinard. Coproduction Festival international de danse ImPulsTanz de Vienne – Festival Danse Canada, Ottawa. Chorale Production Compagnie Marie Chouinard. Coproduction Festival international de danse ImPulsTanz de Vienne – Centre national des Arts, Ottawa – Théâtre de la Ville, Paris – RED Reggio Emilia Danza 2003. ANNE TERESA DE KEERSMAEKER BITCHES BREW – TACOMA NARROWS Production Rosas & De Munt/La Monnaie. Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Léonard de Vinci/Opéra de Rouen. SIDI LARBI CHERKAOUI FOI Production Les Ballets C. de la B. Coproduction Schaubühne am Lehniner Platz, Berlin Théâtre de la Ville, Paris – Monaco Dance Forum Holland festival Oude Muziek & Springdance/works, Utrecht – Centre d’Arts Vooruit, Gand – Stedelijke Concertzaal De Bijloke, Gand – South Bank Centre, Londres – Tanzquartier, Vienne – PACT Zollverein, Essen/Choreographisches Zentrum NRW. Avec l’appui du ministère de la Communauté flamande. 64 EMIO GRECO RIMASTO ORFANO Production Emio Greco/PC – Stichting Zwaanprodukties. Coproduction KunstenFestivaldesArts – Kaaitheater, Bruxelles – Holland Festival, Amsterdam – Théâtre de la Ville, Paris – Oriente Occidente, Rovereto. Rimasto Orfano a reçu une subvention de recherche du Dutch Fonds voor de Podiumkunsten. Emio Greco/PC – Stichting Zwaanprodukties sont subventionnés par le Dutch Ministry de OC&W. ANNE TERESA DE KEERSMAEKER JOLENTE DE KEERSMAEKER CRÉATION 2004 Coproduction Léonard de Vinci/Opéra de Rouen. ANNE TERESA DE KEERSMAEKER ONCE Production Rosas & De Munt/La Monnaie. PINA BAUSCH CRÉATION 2003 Coproduction International Istanbul Theatre Festival – Istanbul Foundation for Culture and Arts. DANIEL DOBBELS EST-CE QUE CE QUI EST LOIN S'ÉLOIGNE DE L'ÊTRE HUMAIN? Production De l'Entre-Deux. Coproduction Festival de Marseille. La Compagnie De l'Entre-Deux est subventionnée par la direction régionale des Affaires Culturelles d'Ile-deFrance et par le ministère de la Culture et de la Communication au titre de l'aide aux compagnies chorégraphiques. SIDI LARBI CHERKAOUI-WIM VANDEKEYBUS IT Production Ultima Vez. Coproduction Les Ballets C. de la B. –Théâtre de la Ville, Paris – PACT Zollverein, Choreographisches Zentrum NRW, Essen. Une initiative de la SACD (Le Vif du sujet), en collaboration avec le Festival d'Avignon. Ultima Vez reçoit l'appui de la Communauté flamande. Avec la coopération de la Commission communautaire flamande de la région de Bruxelles-Capitale. AKRAM KHAN RONIN Production Akram Khan dance company. Coproduction Tanzwerkstatt Berlin. L'Akram Khan dance company reçoit l'appui du Arts Council England, du British Council. Chorégraphe en résidence au Royal Festival Hall. BRICE LEROUX GRAVITATIONS – QUATUOR Production dixit vzw for Continuum vzw. Coproduction Dans in Kortrijk, Stuk, Louvain – Théâtre de la Ville, Paris. Avec l'aide de la Flemish Community et de l'APAP (fondé par E.U.). GEORGES APPAIX NON SEULEMENT… Coproduction Compagnie La Liseuse – La Halle aux Grains, Blois. Avec le soutien du Théâtre de l'Agora, scène nationale d'Evry et de l'Essonne. Avec l'aide de l'ADAMI. Compagnie en résidence à La Friche la Belle de Mai à Marseille. AKRAM KHAN KAASH Coproduction South Bank Centre - The Tramway - The Vooruit - Sampad - DanceEast - Maison des Arts, Créteil Wexner Center for the Arts, Ohio State University. Avec le soutien de la Doris Duke Charitable Foundation. Avec le soutien du Quercus Trust, du Jerwood Space et de Birmingham DanceXchange. La Compagnie Akram Khan reçoit le soutien du Arts Council of England, de London Arts et du British Council. FRANCESCA LATTUADA OSTINATO Coproduction Théâtre de la Ville, Paris – Théâtre de VidyLausanne ETE – Centre national de la danse – L'Arsenal de Metz – L'Hippodrome, scène nationale de Douai – Espace Malraux, scène nationale de Chambéry – compagnie Festina Lente. La compagnie Festina Lente est subventionnée par le ministère de la Culture et de la Communication, DRAC Ile-de-France. GRACE ELLEN BARKEY NEEDCOMPANY (AND) Production Needcompany. Coréalisation Théâtre de la Bastille – Théâtre de la Ville. NEEDCOMPANY NEEDLAPB Production Needcompany. Coréalisation Théâtre de la Bastille – Théâtre de la Ville. photos couvertures : L. Philippe, Gérard Nicolas, Amyand Tanveer, H. Glendinning, J. Antonio Carrera, J.-L. Tanghe, H. Sorgeloos, Michel Le Bastard, San Bartolomé, A. Fonteray, C. Masson/Enguerand, Kamrouz, L. Philippe, Uri Omi Sidi Larbi Cherkaoui, ph. Jean-Pierre Maurin THÉÂTRE DANSE MUSIQUE MUSIQUES DU MONDE CHANSON Théâtre de la Ville 2 pl. du Châtelet Paris 4 01 42 74 22 77 theatredelaville-paris.com
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