Unité de Réflexion et d`Action des Communautés

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Unité de Réflexion et d`Action des Communautés
Janvier 2001 – 11 €
Unité de Réflexion et d’Action des Communautés Africaines
Édition : URACA
Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
Les textes réunis dans ce document ont été écrits par le Dr Moussa MAMAN,
Ethnopsychiatre, fondateur de l’URACA.
Certains sont déjà parus dans des publications de l’URACA ou à l’occasion de colloques,
d’autres restent à paraître.
Sommaire :
- 1° partie : Le pays dendi, Géographie, histoire et traditions
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Présentation du pays dendi
Carte du Bénin
Carte de la sous-préfecture de Karimama
Le mythe fondateur dendi
Le royaume de Karimama
Rituel d’intronisation d’un Laboukoye
« labou izé terey » La citoyeneté dans la tradition dendi/djerma
Histoire du village de Bello Tounga
Les représentations dendi de la personne
Les relations hommes-femmes
Le rituel virginal chez les dendis
La couvade du deuil
p3
p5
p7
p9
p 11
p 13
p 15
p 17
p 23
p 29
p 31
p 35
p 39
- 2° partie : Maladie et soin chez les dendi, religion et thérapie
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Les différentes catégories de soignants et leur implantation
dans la sous-préfecture de Karimama
Etiologies traditionnelles des maladies
La transmission fœto-maternelle des maladies
Baani zumbu kabu izé, thérapie et danses de possession
Culte de possession chez les dendis, exposé d’introduction à la cérémonie rituelle du
24/09/1994
Histoire de zataou, foley esclave
Migration et psychiatrie : expérience pilote de thérapie métisse
Patient, thérapeute et thérapie entre deux mondes
URACA - Unité de Réflexion et d’Action des Communautés Africaines - 33 rue Polonceau - 75018 Paris
Tél. 01 42 52 50 13 - Fax 01 44 92 95 35 - Email : [email protected] - www.uraca.org
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
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1° Partie :
Le pays dendi du fleuve Niger
Géographie, histoire et traditions
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Janvier 2001
LE MYTHE FONDATEUR DENDI
Article paru dans le cahier de l’URACA N°9
Les dendi ou dendi mamar Hâma sont descendants des Askiya de Gao (empire de Songhaï). Les
premiers Songhaï qu’on appelait Gabi ou Gabibi vivaient dans des îles du fleuve Niger entre Gao
et Tombouctou. Ils étaient agriculteurs.
Ils furent envahis par les Sorkos qui étaient des pêcheurs très mobiles sur le fleuve. Les Sorkos
étaient les maîtres de l’eau. Leur pouvoir était représenté par un énorme poisson qui avait un
anneau dans la gueule. Sorko et Gabi venaient adorer ce poisson du matin au soir.
Trois frères venus du Yémen (Arabie) tuèrent le poisson fétiche et recréèrent un nouveau
royaume. Celui qui tua le poisson devint roi, celui qui avait fabriqué le harpon pour tuer le
poisson devint le chef de la caste des forgerons, le troisième frère créa la caste des griots.
Ils organisèrent un grand empire avec deux grandes villes: Goungouia et Gao. Ali Kolen et
Souleymane Narr, deux princes Songhaï capturés durant la guerre contre l’empire du Mali
arrivèrent à s’échapper sous le règne de Maghan, fils de Kankan Moussa, pour arriver à Gao.
A Gao, ils déposèrent le roi, leur oncle Ali Kolen. L’aîné s’empara du pouvoir et prit le titre de
Sonni. Ainsi naquit la dynastie de Si qui allait libérer le pays et l’organiser. Sonni devint Sonni
Ali Ber, il prit Djenné après 7 ans, 7 mois et 7 jours de siège grâce à un blocus de 400 pirogues.
Il vainquit l’empire du Mali.
Après sa mort, son fils Mohamed Touré peu dynamique se fit renverser de son trône par un
général. Comme ce général n’était pas de sang royal, les femmes et les enfants se moquaient de
lui en criant à son passage: « Assikia Assikia » (il ne le sera pas, il ne le sera pas (roi)). Il décida
pour cela de s’auto-nommer Askia Mohamed Touré. Il était d’origine soninké avec beaucoup de
vigueur et d’expérience. Sa mère s’appelait Kassey, c’était la sœur de Sonni Ali Ber (Si). Selon
certains, son père s’appelait Boubacar, selon d’autres, il n’aurait pas de père et serait l’enfant
naturel de Kassey.
Askia Mohamed tua son oncle Si pour asseoir définitivement son pouvoir. Askia Mohamed était
l’enfant chouchouté par Sonni Ali Ber (Si) qui l’appelait familièrement « Maa Keina » (mon
petit). Selon la légende, il lui aurait coupé la tête.
Le petit nom « Maa Keina » est devenu Maamar.
Après cet assassinat, Maamar aurait fait un pèlerinage à la Mecque pour se confesser.
Maamar se retrouva ensuite en guerre contre les marocains. Ses guerriers Songhaï ne disposaient
que de lances face aux marocains armés de fusils. Son armée décida d’attaquer les marocains
avec d’immenses troupeaux de bœufs pour les écraser. Les bœufs en entendant le bruit des
mousquets se sont emballés sur l’armée Songhaï en créant une panique totale dans les rangs. Les
guerriers se sauvèrent de tous côtés.
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Ceux qui fuirent cette guerre en suivant le cours du fleuve vers l’aval se sont appelés: les « dendi
Songhaï » c’est à dire les Songhaï qui ont fui en suivant le cours du fleuve.
La bataille a eu lieu à Tondibi en 1591 ce qui marqua la fin de l’empire Songhaï.
Les dendis sont les descendants des Songhaï d’où le nom de dendi Songhaï puis de dendi tout
court.
Les Dendi habitent maintenant le long du fleuve Niger, à l’extrême nord du Bénin.
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LE ROYAUME DE KARIMAMA
Le royaume des dendi dont le chef lieu est Karimama, sis sur la rive droite du fleuve Niger est
limité: au Nord par le terrotoire de Say et de Dosso (Niger), à l
Le Royaume de Karimama
Le royaume des dendi dont le chef lieu est Karimama, sis sur la rive droite du fleuve Niger est
limité: au Nord par le terrotoire de Say et de Dosso (Niger), à l’Ouest, par le territoire Gourma
(Burkina Fasso), au Sud-Ouest par celui de Kandi (Bénin) , au Sud par celui d’Illo (Nigéria) et au
Nord-Est par celui de Gaya (Niger).
Actuellement le territoire est divisé en deux Sous-Préfectures: Celle de Karimama et celle de
Malanville.
La population assez jeune (20/40 ans) est de 100 000 habitants environs.
L’origine du royaume remonte à la nuit des temps, en effet, le 12 Mars 1591 a vu la chute de
l’empire Songhaï de Gao entraînant la dispersion du peuple songhaï.
Ainsi El Hadji Hanga, descendant de Maamar a du fuir la région de Gao et se réfugier à Garou.
Son fils Samsou Béri, après avoir créé les villages de Tara puis de Gaya a pu constituer le
royaume dendi avec Gaya comme capitale.
Hargani son frère lui succéda, mais chassé par son neveu, Fodi Morounfa, Hargani se trouva
contraint de se réfugier à Karimama, il mourut à Kompa sur le chemin du pèlerinage vers Gao un
an plus tard, après avoir créé la dynastie du royaume dendi de la rive droite du fleuve Niger.
Le 21 octobre 1897, Alou Faram, chef de Karimama signa un traité de protectorat avec la France.
Pour tisser encore plus cette unité, il est indispensable de revoir les anciennes fêtes du royaume
oubliées avec le temps à savoir:
* La lutte traditionnelle qui rythme la vie du royaume après les récoltes,
* Les rituels du mariage actuellement délaissés,
* Les rituels initiatiques de passage de l’adolescence à l’âge adulte qui réunissaient tous les
jeunes,
* Les rituels de pêche qui demandent la réunion de plusieurs villages,
les rituels de (Gara Gara) Nunefuruyan, ou la Gani qui fut la fête du nouvel an dendi.
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RITUEL D’INTRONISATION D’UN LABOUKOYE
Le vieux Samba Gourmantché de Karimama nous a donné les informations suivantes:
Le totem des rois de Karimama est le lion. Chaque roi a un dauphin nommé Dan Galadima.
Après la mort du roi, celui qui lui succède a droit à des cérémonies d’intronisation.
1) Tout d’abord, l’ensemble des chefs de famille de la cité se réunissent chez lui tous les soirs en
lui faisant un feu de bois et en lui tenant compagnie pendant 7 jours.
2) Ensuite, le roi est mis en couvade pendant 7 jours, seuls les intimes ont la possibilité de le voir.
3) La huitaine est le jour du rasage du roi. Une natte toute neuve est tissée pour la circonstance.
Le roi est assis sur la natte et caché sous une moustiquaire pendant le rasage. L’accomplissement
du rituel est confiée aux seules familles spécialisées héritières de cette fonction: Bana Fou boro.
Lors de cette cérémonie tous les chefs de village sont invités.
Il existe une chanson de circonstance dont le refrain est le suivant:
Bana Fou Boro, Koï dan bana, Koïka bana
4) Le roi est enturbanné, ainsi il devient définitivement roi. Dans son palais royal, il doit avoir un
tambour appelé Toubali qui ne peut résonner que lors de son intronisation ou de sa mort. Les
deux baguettes du tambour auraient été faites avec des mains d’homme séchées et décorées avec
de la peau de lion.
On glorifiait le tambour en disant:
Toubali Gourou Han ka no ibéré ssé
Toi, tam-tam (toubali), bois le fer et fais le boire à ton ennemi
D’autres instruments sont utilisés à l’occasion de l’intronisation: le Kakaki (long instrument à
vent en métal), l’algaïta (instrument à vent), le bata (calebasse recouverte d’une membrane
servant de percussion).
Un autre instrument fabriqué pour des rituels religieux s’appelle Haraye béri (grand instrument à
percussion). Lors de sa fabrication, on sacrifie un poulet rouge sur l’autel de fabrication des
instruments de musique.
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LABOU IZE TEREY »
LA CITOYENNETE DANS LA TRADITION DENDI/DJERMA
(BENIN/NIGER)
A paraître
« Labou ize terey » signifie appartenir à une communauté dont on partage les lois et à laquelle on
peut apporter quelque chose. Cela sous-entend la notion de la terre et du collectif.
Labou = terre, nation, sol, argile
Le même mot poussé à outrance aboutit au nationalisme : c’est l’extrémisme du « Labou ize
terey ». Il n’existe pas de mot pour le nommer. Seul le contexte exprime la différence du sens.
On retrouve ce même concept dans les autres langues africaines.
Le préalable consiste à rappeler que l’individu isolé en Afrique n’a pas de sens. Un être humain
n’existe que par son existence au sein d’un ou même de plusieurs groupes sociaux. La survie du
groupe passe par la participation de chacun.
Les différents niveaux de la prise de décision au sein de la population.
Le fonctionnement de chaque groupe existant obéit à des règles identiques, d’un groupe de jeunes
jusqu’à l’assemblée des chefs de village. Deux principes principaux en régissent le
fonctionnement :
La discussion est libre au sein du groupe, chacun s’exprime au cours des débats. Le groupe tente
de trouver un compromis et une parole commune. C’est cette parole que son leader ira exprimer.
En cas de désaccord et d’incapacité à trouver une parole commune le leader pourra soit trancher
si la décision doit être prise à son niveau, soit s’abstenir si l’avis du groupe doit être porté dans
une instance supérieure (conseil du village par exemple).
Le groupe doit avoir un leader qui est garant de sa cohésion et de son unité. C’est un statut, non
un pouvoir de décision. En effet, traditionnellement, le chef (de groupe, de famille, de village,
etc.) ne parle pas en son nom propre mais au nom de l’ensemble des membres de son groupe. Il
représente, on peut même dire qu’il incarne le collectif.
Ce leader est choisi selon la règle de la primogéniture. Mais il doit en avoir les capacités. S’il
s’en sait incapable, ou si le groupe l’en estime incapable, un autre sera choisi à sa place.
Au sein de la famille (qu’elle soit simple famille villageoise ou famille royale) outre la
primogéniture, le choix se fait du côté du père. En effet, la tradition dans cette culture est
patrilinéaire. Les femmes quand elles se marient vont vivre dans la famille de leur mari et
l’héritage ne se transmet que du père à ses fils. Si personne ne convient du côté patrilinéaire, on
en prend quelqu’un du côté de la mère. Si l’aînée de la famille est une femme avec un grand
charisme elle peut être nommée reine, mais ses enfants ne peuvent pas être princes héritiers, ce
sont ses neveux, enfants de ses frères qui peuvent l’être.
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1° Le premier niveau : La famille élargie
La plus petite unité de population en Afrique est la famille élargie matérialisée par la concession
familiale avec les différentes maisons en son sein. Elle comprend les différentes générations
d’une même famille, avec les maisons de tous les hommes du lignage qui sont restés dans le
même village.
Dans celle-ci le chef de famille est responsable de l’ensemble de la famille, de la concession.
C’est le patriarche, le plus âgé par génération. C’est un statut, mais pas forcément un pouvoir de
décision. En effet, traditionnellement, le chef de famille ne parle pas en son nom propre mais au
nom de l’ensemble des membres de sa famille. Il les représente et est le garant de la cohésion de
celle-ci.
Dans la famille existent des groupes de femmes et des groupes d’hommes, avec des groupes
différents par tranche d’âge. Des plus jeunes jusqu’à la génération du chef de famille. Parmi les
femmes, les plus âgées (même génération que le chef de famille), les jeunes femmes et les jeunes
filles par classe d’âge.
Le chef de famille est responsable de ces groupes, éventuellement s’il y a une caste inférieure, si
la famille a un groupe de captifs il est responsable de ce groupe là.
Un captif est un noble venu d’ailleurs qui a perdu une guerre, c’est un prisonnier de guerre qui vit
dans la famille qui l’a vaincu. On peut s’affranchir de différentes façons :
en payant un tribu à cette famille
une fille de la famille captive peut épouser un noble qui l’affranchit avant le mariage,
Si un fils de la famille où vit la famille captive veut épouser l’une des filles de celle-ci, la jeune
fille est automatiquement affranchie.
Les groupes des familles captives sont représentés au même titre que les autres.
Le chef de famille est responsable de la famille dans le système patrilinéaire où les hommes
détiennent le pouvoir. S’il y a des problèmes le chef de famille informe tous les groupes des
problèmes du village (hommes, femmes, captifs).
Chaque groupe se réunit et discute, donne son point de vue et délègue quelqu’un pour aller
donner son avis au groupe suivant, plus âgé jusqu’à arriver au dernier groupe avant le chef de
famille. Les groupes doivent s’entendrent sur un point de vue commun avant de déléguer le plus
âgé pour aller donner l’avis de l’ensemble des groupes d’hommes au chef de famille. Idem du
côté des femmes. Les groupes d’hommes et de femmes doivent trouver un consensus avant
d’aller donner l’avis du groupe au chef de famille.
Le chef de famille sera porteur de cette parole à la discussion de l’ensemble du village. Si les
groupes ne sont pas parvenus à s’entendre le chef de famille s’abstiendra à la réunion.
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2° Le deuxième niveau : Le regroupement des familles selon les catégories
sociales
Une fois la première phase terminée les chefs de famille de chaque « corporation » vont se
retrouver : pêcheurs, éleveurs, chasseurs, griots, forgerons, etc.
Chacun de ces groupes a un représentant choisi selon la règle de la primogéniture comme pour le
chef de famille. La prise de décision s’effectue selon les mêmes modalités.
Le leader de chaque groupe sera délégué pour porter l’avis collectif à l’assemblée du village. Si le
représentant du groupe décède ou qu’il n’accomplit plus sa tâche correctement, le chef du village
demande au groupe de se choisir un autre représentant. Si le groupe n’arrive pas à s’entendre sur
le choix de la personne, le chef du village tranchera.
S’il arrive que le chef fasse un choix qui déplait aux membres du groupe concerné, le groupe se
réunit et délègue quelqu’un pour dire son désaccord au chef du village. Normalement, le chef doit
suivre la décision du groupe, dans le cas contraire, on fera appel au sage du village qui devra
intervenir. Si le chef maintient sa position, on mettra les deux concurrents à l’épreuve, celui qui a
été choisi par le chef et celui qui a été choisi par le groupe. L’épreuve sera choisie en fonction de
la spécificité du groupe. Par exemple s’il s’agit d’un groupe de pêcheurs celui qui remportera
l’épreuve sera le premier qui rapportera un caïman avant l’échéance fixée.
3° Le troisième niveau : Les assemblées villageoises
Il en existe plusieurs sortes :
Le conseil du village :
Elle est présidée par le chef du village choisi selon les mêmes principes que les autres chefs de
groupe.
Le conseil du village est constitué de tous les représentants des différentes catégories de
villageois. Elle s’appelle « kata » grande maison qui peut contenir beaucoup de monde ou
« fada » mot haoussa signifiant l’endroit où il y a beaucoup de monde.
L’assemblée des chefs de famille est réunie dans le cas de décisions au niveau du village qui
concernent la vie de la population, mariage, dot, partage des champs, vente de bétail, fixation des
prix, etc.
L’avis de chaque groupe est demandé pour prendre une décision.
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L’arbre à palabre :
Dans le cas de décisions sociales, c’est tout le village qui se réunit et chacun a le droit de prendre
la parole.
C’est le cas par exemple en cas de conflit entre des familles.
Par exemple, il y a peu, dans un village des anciens se sont déplacés pour aller dans l’autre
famille avec laquelle ils étaient en conflit. Ce qui est vécu comme une véritable intrusion. Le
village s’est réunit (d’ailleurs sans le chef qui était absent) et a décidé que toute personne qui se
déplaçait pour aller faire une « attaque » à domicile devait payer une amende au chef du village.
Les sommes recueillies dans ce cadre servent de cagnotte collective au village. En général, il sert
au grenier collectif pour acheter du grain. En cas de famine, ceux-ci sont partagés entre les
familles. Il peut servir aussi à donner à manger à la famille d’un malade qui est dans l’incapacité
de cultiver son champ ou encore à soigner une personne malade.
L’assemblée villageoise :
Si c’est une décision politique, on ne passe plus par la famille, mais par les classes d’âge. Dans le
village, les jeunes filles et les jeunes garçons se retrouvent ensemble, et ainsi de suite jusqu’aux
générations les plus anciennes.
Par exemple si l’état décide d’augmenter les impôts et que la population s’y oppose.
Ainsi dans l’histoire les colons ont demandé le recrutement des jeunes pour la guerre. La
population a dit « non, on a besoin des jeunes pour cultiver ». les colons ont destitué les chefs qui
étaient porteurs des avis de la population s’était opposée à eux.
En cas de guerre c’était la population qui disait si oui ou non elle acceptait de partir à la guerre.
L’assemblée des femmes :
Les femmes se réunissent suivant leur statut conjugal. Ainsi les groupes de femmes mariées
appellent leur représentante la « saronia », de même les jeunes filles choisissent la « magajia » ou
la « zazi » parmi leur groupe. Il peut y avoir plusieurs groupes par quartier dans un gros village.
Certaines décisions ne peuvent être prises ni par l’assemblée ni par le chef du village. Ce sont
celles qui concernent le domaine des femmes (contraception, baptême, mariage, fiançailles,
naissance, etc.)
Par contre les femmes ne participent pas aux décisions de guerre. Mais si l’assemblée des
hommes décide d’aller attaquer un autre village, si elles ne sont pas d’accord elles peuvent s’y
opposer et les hommes sont obligés d’y renoncer.
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4° Le quatrième niveau : Le roi et l’assemblée des chefs de village
Le mot pour nommer le roi est « labou koye» : le chef de la terre.
Traditionnellement, le roi ne prend aucune décision seul. Il ne peut pas choisir ses conseillers qui
sont les représentants de la population.
En cas d’avis différents de chefs de village, le roi ou la cour tranchait. La cour était formée des
conseillers du roi. Elle était constituée de représentants de chaque petit royaume.
Les colonisations principales destructrices de ce système de prise de décision
Traditionnellement, le roi ne prend aucune décision seul, il tranche uniquement si les gens sont
incapables de s’entendre, il ne pouvait pas choisir ni ses conseillers, ni les chefs de village.
Les colonisations (occidentales et arabes) sont venues corrompre ce système. En effet, selon son
bon vouloir le colon a remplacé le chef ou le roi par un autre qu’il avait choisi lui-même. Ce chef
n’était plus l’émanation de la communauté, et n’avait donc plus ni légitimité si assemblée
cohérente dont il serait le porte parole. Il a donc lui aussi choisi sa cour et ses conseillers à sa
guise, ceux-ci ne représentant plus personne.
La corruption avait remplacé la démocratie à l’africaine.
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LE VILLAGE DE BELLO TOUNGA
Texte écrit par Jacqueline et Jean François FAURE
Le village de Bello Tounga est situé au nord du Bénin au bord du fleuve Niger. Nous sommes en
pays Dendi, une région qui s'étend de part et d'autre du fleuve entre les deux états du Niger et du
Bénin.
- Composition ethnique :
Les Dendis, littéralement "ceux qui ont suivi le fleuve", sont des descendants de l'empire Songhaï
du Mali, comme les Djermas qui se sont installés au Niger, ils ont descendu le fleuve pour
atteindre le nord du Bénin et s’y implanter. Dendis et Djermas constituent la majorité du village.
Il y a aussi un quartier de Haoussas (un des groupes les plus importants d’Afrique de l’Ouest, ils
ont une grande tradition commerçante) et enfin les Peuls, ce sont des nomades pasteurs d’ovins et
de bovins qui séjournent quelques mois dans un endroit puis se déplacent. Les Gourmantchés
sont les premiers habitants de la région, ils sont encore très imprégnés de leur culture ancestrale
et ne sont pas islamisés.
La région très pauvre et très mal connue, est enclavée par l'absence d'infrastructure routière. En
plein Sahel, cette zone commence à souffrir sérieusement de l'avancée du désert. La végétation et
la faune se sont considérablement raréfiés en 50 ans.
Histoire du village
Bello Tounga est un village (tounga=hameau tiré du haoussa qui a été dendisé) qui a été créé par
Bello en 1940. A l’époque, il y avait un autre village, Bazinga Tounga; ce village-là n’avait pas
été créé par Bazinga mais par Nassiri. C’était un village de pêcheurs saisonniers (nous sommes le
long du fleuve Niger), des gens qui quittaient Gaya au sud du Niger pour venir faire la pêche sur
le fleuve, dans cette région. Ils venaient pour trois mois et ensuite ils retournaient chez eux. Les
pêcheurs étaient comme des nomades.
Nassiri a été le premier à s’installer là-bas, c’est lui qui a fait venir Bazinga qui était son apprenti
pêcheur; et quand il est mort, Bazinga a pris la place et les gens ont appelé ce village Bazinga
Tounga. C’est à ce moment là, que Bello est arrivé. C’était un intellectuel car il avait fait l’école
Coranique. Il a compris que le village qui était là à Bazinga Tounga ne pouvait pas continuer à
survivre à cause des inondations, des intempéries. Il a alors dit : " On va quitter ce village, on va
créer un autre village parce qu’ici ce n’est pas un bon emplacement. " Ils ne l’ont pas écouté.
Bello est parti, et grâce à sa persévérance, il a fini par créer son propre village. C’était en 19391940 — Bello né au début du siècle — avait alors 40 ans. Il est décédé à l’âge de 97 ans.
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Quand il a créé son village, il y a eu un conflit entre le village de Bello Tounga et le village de
Bazinga Tounga. Les gens de Bazinga Tounga ne voulaient pas se déplacer pour venir s’installer
à Bello Tounga. Mais Bello s’est obstiné et a dit : " Ce village-là que je viens de créer est un
village d’avenir, si vous voulez, venez nous rejoindre. "Ainsi jusqu’en 1959, les 2 villages ne
s’entendaient pas. Il a fallu 1960 pour que le village de Bazinga Tounga vienne se joindre au
village de Bello Tounga, c’est ainsi que les 2 villages se sont jumelés. Mais comme les gens
connaissaient le mot Bazinga Tounga, l’appellation Bello Tounga a commencé à disparaître vers
1965.
En 1985, de retour au village, le fils de Bello le Dr. Maman a demandé aux villageois :
"Comment voulez-vous qu’on appelle le village parce qu’il y en a qui disent un nom et d’autres
un autre nom . Qu’est-ce-qu’il faut faire ? " Les villageois ont essayé de trouver un autre nom :
par les syllabes " ba " de Bazinga et " bel " de Bello pour faire " Babel ". Or le mot " babel " en
langue Dendi a des connotations un peu perverties et sexualisées, les gens n’ont pas voulu
entendre parler de ces 2 syllabes. Finalement les autorités locales ont dit : " Ecoutez, vous êtes en
train de vous casser la tête, ça c’est un méli-mélo que vous êtes en train de faire. C’est Bello qui a
créé son village, ceux qui se sont déplacés pour venir s’installer ici, ce sont ceux-là qui vont
perdre. Il faut appeler le village Bello Tounga. Ce n’est pas la peine de chercher d’autres noms
qui risquent de vous amener d’autres problèmes. Donc, appelez le village comme ça se faisait, il
est né avec le mot Bello Tounga, vous gardez ce nom pour que cela soit authentique. "
Ainsi le village a été officiellement reconnu par les autorités en 1988, mais il existait depuis
1940. Bello étant le fondateur du village, il était aussi le chef , mais compte tenu de sa démarche
spirituelle, il ne voulait pas être responsable. Il a donné la chefferie à plusieurs personnes.
Maintenant Bello vient de mourir et les villageois demandent à son fils le Dr. Maman de devenir
le chef du village.
Le climat, la végétation, la faune
C’est un climat sahélien donc aride. Il y a deux saisons : la saison sèche et la saison pluvieuse. La
saison sèche est la plus longue, huit mois qui vont d’octobre à mai. Quelques fois, il y a des
pluies précoces (Avril Mai). Cette année par exemple il a eu une arrière-saison avec deux grandes
pluies en Octobre, une autre année il y a eu deux pluies en mai. Mais la vraie saison des pluies
commence en juin et dure quatre mois.
La végétation : le village est dans une région qui se situe au début du Sahara, le Sahel. Cette
région est touchée de plus en plus par l’avancée du désert; la végétation (brousse et savane) et la
faune s’appauvrissent.
La faune : beaucoup d’oiseaux, des canards sauvages, des échassiers. Il y a des ragondins sorte
de castors mais plus gros, des serpents, des grands lézards, les varans par exemple, et des
hippopotames de temps en temps. Les caïmans sont très difficiles à voir car ils se cachent. Il y a
les lamantins dans le fleuve, il y a aussi les singes. Les lions rôdaient encore près du village il y a
trente ans. Aujourd’hui ils ont disparu.
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
Le village et sa population
Aujourd’hui il y a 400 habitants dont au moins 120 enfants. 66 enfants viennent d’être recrutés
pour la scolarisation (en langue française) puisque le village vient tout juste de construire son
école grâce à un don.
C’est un village modèle avec des infrastructures :
•
•
•
•
un dispensaire c’est-à-dire un Centre de Soin avec des cases à proximité pour recevoir les
familles des malades nécessitant des soins pendant plusieurs jours.
une route, ou plutôt une piste dessert le village.
un puits
une école très récemment ouverte.
Tout ceci (école, route, dispensaire) a été construit sans aucune aide de l’état du Bénin.
Il y a deux petites mosquées, la population est en grande majorité de religion musulmane. La
polygamie (union d’un homme avec plusieurs femmes) qui est légale et couramment pratiquée
dans divers pays d’Afrique, est donc dans le village une forme d’union tout à fait habituelle.
Il existe aussi des structures sociales :
•
•
le groupement des femmes qui s’occupe de la promotion des femmes.
le groupement des villageois qui s’occupe de la problématique des hommes avec les
nouvelles donnes : la promotion de la femmes, quelle est sa place par rapport à l’homme
(comment faire la pêche avec la femme ? Comment faire le jardinage, le commerce avec les
femmes sans dissocier les deux ? etc…), quel est le rôle de l’homme au niveau de la famille ?
• le groupement des pêcheurs est une structure beaucoup plus spécialisée : par exemple, tous
les jeudis, le fruit de la pêche est mis dans une caisse commune. Dans la semaine il y a un
jour qui revient à tout le monde.
Depuis quelques temps, une organisation est en place : les pêcheurs doivent donner le franc
symbolique, les marabouts aussi, les femmes… Tous les vendredis, chaque villageois(e) doit
cotiser 1 ou 2 centimes.
Les activités du village
Les villageois sont en grande majorité (à 99 %) des pêcheurs : le village est situé au bord du
fleuve Niger.
Ils font aussi de l’élevage du bétail (des ovins, des caprins) et de volailles et de la culture (le
maïs, le sorgho, le mil, le riz), il y a les arbres fruitiers (les manguiers, les jujubiers, les
tamariniers, les figuiers), les fruits sauvages, les fruits de karité dont on fait le beurre de karité.
Les gens vivent du petit commerce qui a lieu sur les marchés : commerce du poisson (frais ou
fumé), des céréales...
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
Les femmes du groupement sont formées pour fabriquer le fromage frais. Elles achètent le lait
pour faire du fromage frais et le vendre. Du fruit de la vente, une quote-part sera versée à la
communauté villageoise.
Une action de reboisement de l’île sur le fleuve en face du village est en cours : 1850 plants de
" rôniers " ont été mis. Le " rônier " est le palmier le plus résistant : les chèvres peuvent le
manger, l’eau peut l’inonder, il continue à pousser quand même.
Au bord du fleuve, les villageois fabriquent des briques en terre séchée pour la construction des
habitations.
Le mode de vie
Hommes et femmes vivent séparément et ne se retrouvent qu’à de rares moments privilégiés.
L’univers masculin est traditionnellement fait de pêche, de chasse, d’élevage, d’agriculture et
d’artisanat. L’éducation des garçons auxquels ils doivent transmettre leurs savoir-faire est
également une affaire d’hommes. Les durs travaux sont réservés aux hommes.
Par contre, le cœur de la concession et tout ce qui entoure la contraception, la maternité, la
naissance appartient aux femmes. Elles sont les chevilles ouvrières de l’ensemble de la société,
travaillant aux champs aux moment des semailles et des récoltes, éduquant les tout-petits et les
filles, nourrissant et soignant tout le monde. Dans les concessions, les femmes profitent des
moments de travail en commun pour palabrer et parler de leurs problèmes.
Les enfants restent auprès de leur mère jusqu’au moment du sevrage qui a lieu vers l’âge de 2224 mois. Après un temps de transition, l’enfant est intégré dans sa classe d’âge, soumis à la
morale qui règne entre " frères ", parmi lesquels se déroulera désormais l’essentiel de sa vie. A
tous les âges, les aînés, ascendants, collatéraux, voisins, ont aussi à éduquer l’enfant, le reprendre,
le contrôler. Ce qui n’enlève rien à la force du lien de l’enfant à sa mère.
Au village, l’enfant travaille comme tout le monde, et s’il va aux champs il ne va pas travailler
comme les grands, on ne l’oblige pas à faire des travaux difficiles.
Jusqu’en 1997, un seul enfant était scolarisé et allait à l’école dans un autre village, jusqu’alors
on laissait les enfants évoluer, faire leurs expériences, découvrir et comprendre le monde de
manière non dirigée.
En 1997, une école s’est ouverte grâce à un don qui a permis de faire une construction provisoire
en paillote (la construction définitive sera en briques et en ciment), de payer l’instituteur et
quelques fournitures scolaires. Il y avait un instituteur pour 66 enfants, beaucoup d’entre eux ont
poussé leurs parents à les inscrire. L’école en dur a été construite au cours des années suivantes.
Depuis 3 ans l’état béninois a fait des efforts en dotant l’école d’un directeur et de quelques
fournitures scolaires. Une cantine a été créée en 1997 et le P.A.M. (programme alimentaire
mondial fournit quelques denrées alimentaires.
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Les pratiques en matière de santé
Il existe au village un Centre de Santé créé par le Dr Maman, c’est une structure médicalisée mais
les gens ont aussi recours aux thérapies traditionnelles.
Les médecins traditionnels ("tradipraticiens", guérisseurs, marabouts) sont très nombreux en
Afrique avec des spécialités variées. Leurs pratiques peuvent être issues de l’Afrique millénaire
ou être dérivées de l’Islam. Profondément ancrées dans les cultures locales, leurs réponses
thérapeutiques sont en adéquation avec les représentations culturelles des maladies.
Au village, il y a des guérisseurs : des familles sont spécialisées dans les problèmes O.R.L., les
maladies du foie ou dans les problèmes de morsure de serpent.
Les Dendis pratiquent le culte des danses de possession qui est un rituel de soins très spécifique.
Des cérémonies thérapeutiques ont lieu au village, au pied de l’Arbre Sacré.
Ainsi, selon ce dont il souffre, le malade ira au dispensaire ou chez le "tradipraticien", parfois
même chez les deux.
Au dispensaire du village l’interprétation culturelle de la maladie est reconnue et est, si
nécessaire, intégrée dans le soin.
C’est au flanc du village de Bello-tounga, le lieu le plus sacré de la région (Tondi fufu) que
chaque année les gardiens du lieu (les gourmantchés) viennent faire les cérémonies du culte de
Harakoye à la demande des dendi Mamar Hama. Tous les 33 ans, a lieu la grande cérémonie au
cours de laquelle le masque sacré est porté par un homme, cheval d’un esprit qui le possède. Le
masque qui sera porté par l’initié appartient à l’esprit qui le possède. Cette cérémonies permet de
célébrer le retour des âmes qui doivent se manifester trois mois plus tard dans le ciel sous la
forme d’étoiles filantes. Si les cérémonies sont précédées d’une éclipse lunaire, l’homme cheval
possédé n’est pas obligé de porter le masque car l’éclipse l’en dispense.
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LES REPRÉSENTATIONS DENDI DE LA PERSONNE
Article paru dans le cahier de l’URACA N°6
Dans le culte des foley, la notion de personne recouvre quatre entités:
*
*
*
*
le gaa-ham, le corps physique,
le fundi, la vie, l'énergie vitale,
le biya, le double de la personne, matérialisée par son ombre,
le diya, l'âme, création de Dieu qui n'appartient qu'à lui.
Le biya peut être lourd ou léger, un individu ayant un biya lourd est naturellement protégé contre
les esprits, par contre, celui qui a un biya léger a besoin d'une protection particulière. Ayant des
activités nocturnes (il est doté d'une sorte de mécanisme de dégagement qui le rend autonome
dans sa mobilité vis à vis du corps ou gaa-ham), le biya est le siège de la production des rêves
ayant une signification dont le zima, en tant que spécialiste s'attache à décoder le sens dans le
cadre de son travail d'interprétation et de traitement de la maladie.
Le diya n'appartient pas aux esprits, mais seulement à Sidi koy c'est à dire à Dieu. Par contre, ils
peuvent soigner les trois autres entités.
Si à son tour un esprit tombe malade, il peut avoir des plaies par exemple, et c'est l'humain qui le
soigne sans le savoir:
Ainsi une femme espiègle qui n'écoutant ni les gens, ni la famille sort la nuit, est une proie
privilégiée. Un esprit malade peut se coller à elle et prendre sa force vitale.
De même, si une femme prépare le repas tard le soir, un esprit blessé peut prendre le repas chaud
comme un emplâtre. C'est pour cela que souvent, les gens qui mangent tard le soir tombent
malades et vomissent.
Un esprit malade peut aussi utiliser la force vitale d'un arbre, c'est pourquoi on trouve des arbres
complètement secs en forêt.
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LES RELATIONS HOMMES-FEMMES
Texte tiré de la Recherche : Maladies et Sida en pays dendi.
L’agent de santé, le guérisseur, le marabout et la radio
Il est une réalité difficile à appréhender par les occidentaux c'est les relations entre les hommes et
les femmes.
Hommes et femmes vivent séparément et ne se retrouvent qu’à de rares moments privilégiés.
L’univers masculin est traditionnellement fait de pêche, de chasse, d'élevage, d’agriculture et
d'artisanat. L'éducation des garçons, auxquels ils doivent transmettre leurs savoir-faire est
également une affaire d'hommes. Les durs travaux sont réservés aux hommes.
Par contre, le cœur de la concession et tout ce qui entoure la contraception, la maternité, la
naissance appartient aux femmes. Elles sont les chevilles ouvrières de l’ensemble de la société,
travaillant aux champs au moment des semailles et des récoltes, éduquant les tout-petits et les
filles, nourrissant et soignant tout le monde.
Dans une concession, les femmes profitent des moments de travail en commun pour palabrer et
parler de leurs problèmes.
Il existe dans certaines familles un phénomène nommé "koulli" (enfermées), où les femmes
presque cloîtrées ne peuvent sortir d'une maison. Cela concerne certaines femmes de marabouts
et de dignitaires très riches. Ces femmes sortent quand même, vont visiter leur famille, font du
commerce chez elles et se rendent à la Mecque. Ces comportements sont tout à fait exceptionnels,
ainsi pour Karimama, cela ne concerne pas plus de cinq familles; et cela ne reflète pas du tout le
mode de vie des femmes.
Très pauvre, cette région paysanne ne pourrait survivre sans le travail des femmes.
Hommes et femmes ont des rôles équivalents dans les religions traditionnelles. Mais l’arrivée de
l’islam a déséquilibré cette réalité en renforçant le rôle des hommes au détriment de celui des
femmes. Cela explique sans doute pourquoi les femmes de la région sont restées très attachées au
culte des "foley fori" qui leur permet de garder un rôle social déterminant. Les hommes ont été
d’autant plus facilement conquis par l'islam que les cultes ancestraux ont été interdits au moment
de la révolution.
Le langage et l’expression de la sexualité
La sexualité est loin d’être tabou mais s’exprime dans des cadres très définis.
Entre elles, au quotidien, les femmes abordent directement la sexualité:
"Mon mari m'a fait la marinade » « Bakondi » c’est à dire qu'on a fait longtemps l'amour. « Mon
mari m'a piqué plus ». « Zormé »
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Ou commentant la vie du village, les commentaires fusent du genre, j'ai appris que tel a un gros
zizi ou que tel ne fait que dormir dans le lit ou que telle personne est un « toussé-tombé », un
«tako kakan » ou alors on parlera de la longueur du pénis du mari d’une telle femme. « Telle
n’aime que ça, » etc…
Un moyen d’expression privilégié est la métaphore. Ainsi en pilant le mil, une femme peut
évoquer directement les difficultés sexuelles de son mari :
Elle claque son pilon dans le mortier sur un rythme codé connu des autres femmes qui la
soutiennent aussitôt avec le rythme de leurs pilons, et elle chantera:
« aïno, aïno, aïno, aïno
aï nofila na baba,
ai no ga gani woi sé,
aï wo si ga gani woi sé
kala dei borei ma mara »
C'est moi, c'est moi, c'est moi,
c'est moi le père de tel,
Est-ce moi qui danse pour une femme
Je ne danserai pas pour une femme,
même si les gens doivent l'apprendre.
Ou encore, lors du repas pris en commun le soir par les hommes réunis, elle envoie le plat
contenant la boule de mil avec un épi de maïs planté dans la pâte... Cette pratique date de très
longtemps et ne se voit plus de nos jours.
Ou le mari mangera la pâte avec une sauce pas du tout salée et n’osera pas demander à sa femme
pourquoi elle n’a pas mis de sel car tout le monde connaît le code...
Il a existé une tradition lors du nouvel an dendi le troisième mois après les récoltes, qui était un
jour de plaisanteries et de transgressions. Ce jour là les relations sexuelles hors mariage étaient
tolérées, tout le monde sortait. Selon les dires de certains, après avoir disparu, cette tradition tend
à revenir de façon insidieuse lors du Maouloud c'est à dire lors de la fête de la naissance du
prophète.
Ce jour là, une femme d'une caste particulière nommée Sassala va aller voir le chef du village
toute nue et elle lui dit: "viens, viens, viens, viens baiser avec moi pour fertiliser la terre, pour
donner la chance aux enfants. Viens, viens, viens faire ton devoir." Le chef du village lui donne
alors un pagne neuf pour couvrir sa nudité. Mais de nos jours ce système a disparu.
Ce même phénomène peut se voir en cas d’éclipse solaire ou lunaire. Là, la femme dit « viens,
viens, viens, viens baiser avec ta mère pour libérer le soleil (la lune) » En effet, on considère
qu'un phénomène anormal doit être combattu par un acte anormal de même qu'un médicament
sera d’autant plus efficace qu’il fera souffrir « Dori no ga dori kâ » «C'est la douleur qui enlève la
douleur ». Selon cette pensée symbolique par analogie, l'anormalité seule peut guérir l'anormalité.
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De nos jours, seuls les enfants tous sexes confondus jouent du tam-tam en scandant des
grossièretés envers les jeunes filles futures mères et symboles de la terre nourricière, les adultes
n’y participent guère.
Par contre, en dehors des cadres permettant l’expression directe, les comportements féminins
dans la région sont marqués par une grande pudeur. Il est vrai que l’univers des femmes, à
l’image de l'utérus maternel peut être comparé au ventre protecteur de la maison et de la famille,
même si le commerce et les champs les font sortir de longs moments de la journée. Leurs
échanges se font essentiellement avec leurs sœurs sociales.
Le divorce
Traditionnellement le choix des époux était fait par le maître religieux qui consultait les oracles
pour voir si les deux futurs époux étaient promis à une cohabitation harmonieuse. En cas de
conflit, le tribunal coutumier villageois pouvait conclure au divorce aussi bien à la demande du
mari qu’à celle de la femme, si le comportement du conjoint en cause ne correspondait pas aux
normes culturelles. Aucun remboursement de dot n’était demandé.
La répudiation empruntée à l’islam est quasiment inexistante et très mal vue par la communauté:
Un des sages de village ayant pratiqué la répudiation, est resté à la même place sociale, mais plus
personne n’a tenu compte de ses avis par la suite.
L’influence islamique a beaucoup pénétré la culture traditionnelle du milieu depuis le début du
siècle. Actuellement on assiste à des tentatives pour décourager les femmes de demander le
divorce en leur réclamant le remboursement de la dot au cas où elles seraient les premières à
demander la séparation. Dans les faits, le remboursement est fait par la famille de la femme, ou
par son nouveau prétendant lorsqu’elle en aura trouvé un. C'est l'un des préceptes islamiques sur
la loi matrimoniale.
En Afrique, personne ne reste célibataire. Après un veuvage ou un divorce, la femme ou l'homme
se remariera. Dans le cas d'une femme ce sera en général dans le cadre de la polygamie. On
comprend que cette structure familiale correspond à un mode de régulation sociale. Ainsi les
hommes auront souvent, en vieillissant, plusieurs femmes en même temps, alors que les femmes
auront plusieurs maris successifs au cours de leur vie. Le lévirat est très peu pratiqué dans le
milieu, quelques rares cas ont été remarqués chez les peuls.
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LE RITUEL VIRGINAL CHEZ LES DENDIS
Article paru dans le cahier de l’URACA N°9
Description du rituel virginal
Selon la légende Songhaï, à l’origine, toute fille d’origine Songhaï qui n’était pas passée par le
rituel virginal le « Gossi » ne devait jamais avoir d’enfant dans sa vie. Si elle arrivait à tomber
enceinte, l’enfant serait un être inachevé.
La préparation du rituel « Gossi » commence le matin.
Le « Gounou », maître de cérémonie, spécialiste du « Gossi », réunit chez lui toutes les fillettes
du village devant être initiées chez lui. Le nombre n’est pas limité.
Première mise en couvade
Le soir, tous les enfants sont réunis chez le « Gounou » qui les conduit derrière le village dans un
enclos construit à cet effet. Cet enclos s’appelle « Sôllô ».
Les futurs époux des filles déjà fiancées doivent apporter chacun 10 fagots de tiges de mil. Les
parents des jeunes filles qui n’ont pas de fiancé doivent apporter deux fagots de tiges de mil.
Dans le « Sôllô » les jeunes filles sont installées en cercle sur des nattes. Chacune est
accompagnée par sa tante paternelle. Pendant toute la nuit, le rituel demande que se poursuive le
rythme du tam-tam. Le son de ce tam-tam spécial « Bâtâ » attire les sorciers mangeurs d’âme qui
peuvent surgir de toute part pour venir perturber les âmes innocentes des jeunes filles. Car si
l’âme d’une fille est perturbée, elle risque d’avoir un enfant inachevé, proie facile pour les
sorciers.
Pendant ce temps, le « Gounou », maître de cérémonie doit défendre ces âmes innocentes contre
les sorciers envahisseurs. Il doit se débattre toute la nuit au milieu des filles en dansant, en priant,
en citant des litanies, des incantations etc. Des transes peuvent survenir selon les circonstances.
La veille, on a donné à chaque fille une calebasse à moitié remplie d’eau dans laquelle on a
projeté des grains de mil, le tout fermé par un éventail. Chaque fille doit avoir sa calebasse placée
à côté de sa tête. La « Falanga » (la femme maître de cérémonie), une jeune femme, veille,
comme son homologue homme, le « Gounou », au déroulement correct de la cérémonie au cours
de la nuit.
Le lendemain, on ouvre les calebasses et le mil doit germer obligatoirement. Celle par qui le
malheur arrive, c’est à dire pour laquelle le mil n’a pas germé peut être rachetée: on la fait passer
à la deuxième phase de l’initiation avec les autres. Cependant, elle doit être préparée autrement:
elle est lavée avec des décoctions magiques.
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Mais auparavant, on procède à la purification des lieux et de l’acte même de l’initiation.
Etape de purification
Le maître de cérémonie doit rester éveillé toute la nuit. Le matin de bonne heure, tous les fagots
de tige de mil sont entassés au nord de l’enclos « Sôllô ». Le matin, si tout va bien et qu’aucune
fille n’est tombée malade, on entreprend un rituel de purification par le feu. Là intervient le
pouvoir du forgeron qui doit brûler le tas de fagots grâce à son pouvoir magique devant toute
l’assistance. Il doit mettre le feu avec un tour de main magique. Le forgeron prend une pincée de
sable qu’il doit jeter sur le fagot de tiges qui doit obligatoirement s’enflammer.
On aligne tous les enfants des forgerons. Ceux-ci doivent traverser le feu à trois reprises
accompagnés du forgeron maître du feu. Seuls les enfants du forgeron sont habilités à traverser le
feu.
Après cette cérémonie de purification, toutes les filles sont regroupées dans un autre enclos rituel.
Cet enclos est situé à l’intérieur du village contrairement au premier, qui situé derrière le village
est fabriqué pour la circonstance. Le « Sôllô » (l’enclos) du village est le lieu de passage obligé
de toutes les générations initiées par le rituel virginal. Toutes les filles qui ont déjà passé le rituel
sont regroupées dans l’enclos sacré. Le lieu est préparé depuis la nuit des temps. L’espace est
tracé en cercle, puis divisé par deux diamètres. C’est au centre du cercle que les filles passent les
unes après les autres. Les tantes défont les cheveux de leur nièce qu’elles accompagnent, puis
font une raie partant du front jusqu’à l’occiput.
Deuxième phase de l’initiation
On regroupe toutes les filles en initiation dans le « Sôllô » sacré. Les unes après les autres
rentrent dans le « Sôllô » qui est en cercle traversé par deux diamètres. A l’intersection de ces
diamètres, le « Gounou » place la fille. La « Falanga » doit verser le lait d’une vache qui a mis
bas pour la première fois, au milieu du crâne de la jeune fille. De part et d’autre, le lait doit suivre
un itinéraire symétrique:
de face, le lait doit parcourir la ligne frontale, l’arête du nez, les lèvres, le menton, le sternum,
l’ombilic, la ligne pubienne en passant entre les deux grandes lèvres.
de dos, le lait doit passer sur la ligne occipitale, tout le long de la colonne vertébrale, sur le pli
interfessier pour rejoindre l’autre coulée de lait au niveau de l’organe sexuel.
En cas de déviation du lait de son itinéraire, le « Gounou » asperge le corps de la fille concernée
rapidement pour interdire aux gens mal intentionnés de connaître le niveau exact où le lait a
commencé à dévier. En effet cela pourrait entraîner une infirmité pour la jeune fille à ce niveau.
Chaque fille qui n’a pas réussi l’épreuve doit subir une cure individuelle en l’absence de tout le
monde. Le « Gounou » et la « Falanga » les revoient seuls.
Le « Gounou » a son assistant: « Gounou Ize » un petit « Gounou ».
La « Falanga » a son assistante: « Falanga Wandé » la femme de « Falanga ».
On ne peut pas être « Gounou » sans l’avoir hérité. Pour être « Falanga », il faut obligatoirement
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être enfant de « Sorko » (grand pêcheur initié). La « Falanga Wandé » est toujours enfant de
Bata Kari Izé qui était un soninké noble et griot spécialiste de Bâta, un tambour réservé aux rois
et que seuls les descendants des rois doivent utiliser lors des cérémonies spéciales.
Signification du rituel virginal
Contrairement aux idées reçues, le rituel virginal n’est pas une cérémonie de vérification de la
virginité des filles. Il consiste à réveiller les deux sens originels qui sommeillent en elles.
Selon la doctrine secrète, une insondable anxiété habite les « Waye boro » (c’est-à dire une
personne à 10 symboles), le sexe féminin en général. Pour être « boro » (une personne), la femme
qui est déjà fécondée (habitée) par les esprits de la création « Haragaye » doit être préparée,
initiée à prendre conscience du formidable changement qui doit s’opérer en elle, en direction de
ses plus intimes aspirations. La seule façon pour la femme de maîtriser l’anxiété de la création
qui l’habite est de l’initier à l’union paisible avec le TOUT universel.
Dans le rituel, le cercle symbolise le cosmos, le tout.
Les deux traits perpendiculaires rejoignant le cercle symbolisent la spiritualité. En plaçant la
future initiée au milieu du cercle, on lui permet d’émerger vers le haut, vers la perfection de son
être. Cette initiation est nécessaire car elle est porteuse de l’espoir de vie.
Aussi la femme doit-elle parfaire sa fonction de procréation pour permettre à ses descendants
d’acquérir dans le monde invisible le pouvoir d’être en tous lieux, en tous temps, de revenir au
passé, de gérer le présent ou de prospecter le futur au service de la famille, du clan de la tribu etc.
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
LA COUVADE DE DEUIL CHEZ LES DENDI
OU LE SAHOU GHNUARI
A paraître
La couvade est effectuée aussi bien par la femme que par l’homme à la suite de la mort d’un des
conjoints. Elle dure 4 mois et 4 jours pour la femme, 3 mois et 3 jours pour l’homme. Toutefois,
pour des raisons économiques, la durée a été écourtée chez l’homme et ramenée à 33 jours puis 3
jours depuis l(avènement de l’islam dans nos contrées il y a à peine plus d’un siècle. Quant à la
femme, elle continue à observer la même durée jusqu’à nos jours. La couvade ne se fait
intégralement qu’une seule fois au cours de la vie. S’il arrive à la femme d’être endeuillée une
deuxième fois à la mort de son deuxième époux suite à un remariage, la durée de la deuxième
couvade ne sera que de 4 jours. Une femme qui a divorcé de son premier mari doit faire sa
couvade à la mort de celui-ci dans son deuxième foyer durant 4 jours. Dans ce cas l’ensemble du
rituel lui est épargné.
La femme endeuillée est assistée tout au long de la couvade par ses belles-sœurs et les substituts
de belles-sœurs. Le lendemain de la mort du mari, celles-ci doivent acheter une marmite en terre
cuite avec son couvercle et 3 calebasses neuves également avec leurs couvercles. L’usage des 3
calebasses se fait dès leur achat. L’une est réservée pour les boissons, l’autre pour la nourriture et
la troisième pour les douches. Quant à la marmite, elle est utilisée pour faire bouillir les plantes
spécifiques pour la circonstance. Noûn-noûgoû est la plante utilisée, elle a une odeur très proche
de la menthe et n’est utilisée que pour un deuil.
La couvade permet à la personne endeuillée d’éviter le contact avec les visiteurs qui risquent de
lui rappeler les souvenirs du défunt ce qui pourrait entraîner dépression ou même folie car dit-on
en dendi : « la langue de certains visiteurs peut envoyer les mauvais esprits sur l’endeuillé ».
Pendant une couvade qui dure 4 mois, tous les jeudis et les vendredis, la femme est accompagnée
dans la brousse. C’est au cours de cette promenade que la cueillette des plantes s’effectue. Une
vieille femme initiée à ce travail l’accompagne. Le système consiste à initier la veuve à la
connaissances de certaines plantes utiles à la santé. Celle-ci doit être capable à la fin de connaître
l’ensemble des rituels pour faire une couvade.
Le lendemain matin du deuil, la vieille femme qui l’assiste défait les tresses de la femme, on la
dénude complètement. Ses belles sœurs l’accompagnent à la douche pour lui défaire les cheveux,
la laver lui enlever sa propre odeur pour la remplacer par celle du mari en lui faisant porter un
vêtement du défunt pendant 7 jours. Une fois la femme lavée, Elle marche avec ses
accompagnatrices à reculons jusqu'à dans la case de couvade. Là on l’habille avec un vêtement de
son mari, une paire de chaussures du mari, on lui donne la vaisselle (plat et bol) du mari et un
tissu du défunt lui est donné comme foulard. Elle doit rester 7 jours sans sortir dehors sauf pour
aller au toilettes accompagnée de ses belles et ou de sa mère ou du substitut de la mère. On dresse
trois tresses sur la tête de la veuve chiffre symbolique de l’homme. 7 jours plus tard les 3 tresses
seront défaites et la femme devra être conduite au fleuve pour une purification. Ces trois tresses
seront refaites chaque vendredi pendant tout le temps de la couvade. La femme reste toujours
entourée par ses belles-sœurs.
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Il existe trois espèces d’arbres dont on cueille les jeunes pousses mélangées à noûn-noûgoû pour
le bain et la boisson. La femme ne doit pas boire d’eau pure, elle consomme les décoctions des
plantes spécifiques. Elle garde toujours une bouillie à base de mil préparée avec les plantes à
portée de la main.
Le début de la couvade
Il faut préciser qu’avant tout mariage on demande l’argent de la porte de la case conjugale.
Le lendemain matin de la mort du mari, on enlève la porte de la case que la femme utilisera
comme lit. La femme s’y couchera sur le ventre pendant 4 nuits de suite.
Après les rituels de purification qui consistent à laver la femme avec des décoctions de feuilles,
d'écorce et de fruits sauvages « garbeys », la femme endeuillée et ses accompagnatrices rentrent
dans la case à reculons jusqu’au fond de la case. La femme est alors habillée d’un pagne blanc et
d’un morceau d’habit blanc de son défunt mari qu’elle portera comme un foulard sur la tête. Elle
portera également les chaussures de son mari pendant une semaine.
Le lendemain du décès, on lui donnera à boire le jus des jeunes pousses de garbeys. Celles-ci ont
été cueillies pour l’occasion le matin même puis pilées et passées dans une passoire afin de
recueillir le jus dans un bol dont le mari se servait pour boire. Il faut savoir qu’en Afrique, le mari
a un plat particulier dans lequel il mange, un bol dans lequel il boit, aucune femme n’a le droit de
manger ou de boire dans l’un de ces récipients. Dans cette occasion exceptionnelle, la femme doit
transgresser le tabou en buvant dans le bol de son mari, en portant ses chaussures et quelquefois
son pantalon.
La couvade proprement dite
Dès la mort du mari, la femme ne sort plus de sa case. Elle ne parle à personne sauf à ses bellessœurs et à ses parents directs. Généralement c’est à la mère ou à la belle-mère qu’elle parle.
La première nuit du deuil, on enlève la porte de la case et la femme doit se coucher à plat ventre
sur la porte au fond de sa case jusqu’au matin. Le lendemain, les belles-sœurs lui défont les
tresses et la conduisent au fleuve. Elles l’entraînent dans l’eau jusqu’au niveau du nombril. Trois
personnes la tiennent : une derrière avec les mains sur les deux épaules de la veuve, une de
chaque côté lui tenant le bras et l’avant-bras, la femme gardant le visage tourné vers l’Est.
Elles procèdent alors à une baignade, sorte de noyade en plongeant de force la veuve dans l’eau
pendant quelques minutes, puis elles la sortent de l’eau en lui posant la question suivante :
« Qu’as-tu vu dans l’eau ? ».
Cette partie du rituel est exécutée à quatre reprises au cours desquelles la femme est immergée et
émergée de force. A la sortie de l’eau elle doit agiter la tête. Elle a l’obligation de répondre au
moins une fois à la question. Elle peut dire : « j’ai vu tel poisson ou tel animal aquatique », à
partir de ce moment là, le poisson ou l’animal cité lui restera un interdit alimentaire pour
toujours. Il symbolise le degré d’intimité, d’amour qu’elle a pour son mari. Plus la chair du
poisson ou de l’animal est estimée sur le plan gastronomique, plus cela témoigne de son
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attachement à son mari.
Certaines femmes qui n’aiment pas leur mari disent qu’elles ont vu un crapaud, une grenouille ou
toute autre saleté indiquant la situation conflictuelle dans le couple ou même l’aversion qu’elle
éprouvait envers le défunt. Les belles-sœurs s’empressent de savoir ce qu’elle aura dit avoir vu
dans l’eau, la tension ne baisse que quand elles auront entendu le verdict. Même si la femme dit
avoir vu un crapaud, cela n’entachera pas la relation privilégiée avec les belles-sœurs en raison
du lien à plaisanterie qui existe entre elles.
« Le Sâhoû »
( Boro mate)
A l’ arrivée de l’islam la couvade de deuil est changée car c’est au marabout de fabriquer un grisgris blanc que la femme endeuillée doit porter sur le cou au bout de la huitaine.
A la mort du mari, la femme doit se coucher sur un lit en secko ou sur le secko lui même préparé
simplement comme un lit, ou alors sur la porte de la maison de la femme endeuillée.
Elle se couche sur ce lit pendant 4 nuits successives, ses mains ne doivent pas toucher le sol
pendant 4jours, même pour se lever la femme est aidée par d’autres personnes. La femme peut
aller puiser de l’eau au bout de 7 jours, mais elle ne doit pas emprunter le chemin normal, elle
doit prendre un autre itinéraire, si elle croise quelqu’un qui la salue, elle ne doit pas répondre.
Elle ne doit pas aller au marigot où tout le village s’abreuve, elle ne lave ses habits qu’une fois
par semaine ( chaque dimanche par exemple). Le jour du décès du mari devient le jour symbole
reservé pour puiser de l’eau, pour laver les habits etc…
Arrivée au marigot la femme lave son unique pagne de deuil, qu’elle doit encore porter même
mouillé. La sortie définitive de la couvade est le jour du rasage de la femme. On lui rase les
cheveux au niveau de la tempe et ce jour là, elle est conduite au fleuve pour être lavée par ses
belles-sœurs.
Il consiste a immerger la femme 4 fois pendant quelques minutes, les tresses défaites, en agitant
chaque fois la tête pour essorer ses cheveux. Au bout de ces 4 fois elle dira ce qu’elle a vu dans
l’eau à la demande de ses belles sœurs. (voir explication plus haut).
Le bain se prend au fleuve en présence d’un coiffeur traditionnel, mais avec l’islam cette partie
du rituel a été interdite et se fait sous forme de douche derrière la case.
Auparavant on préparait une bouillie spéciale (sosso-komandi) mélangée avec du miel, de la
potasse etc… La femme devait avoir sa part pour elle toute seule. Les autres femmes ne devaient
pas boire dans le même bol que la femme en couvade.
Le jour du deuil, normalement, on cueille une plante appelée (kio si zoumbou) et on la pile dans
un mortier. Kio si zoumbo est le jeune pousse de garbey qu’on cueille pour piler et tamiser en
recueillant le jus dans le bol du mari défunt. La femme boit donc ce jus dans le bol de son mari,
mais auparavant on lui demandera de dire la vérité à propos de sa maternité c’est à dire si elle
n’est pas enceinte car elle risque d’avorter en buvant cette décoction magique. Etre enceinte se
dit : « Est-ce que tu ne portes pas ? » (Kambéyan = porter avec soi ) Les belles sœurs insistent
beaucoup avant de donner à boire à la veuve car elle perdrait sa grossesse le jour même. La
femme enceinte ne doit pas boire cette décoction. L’islam à tout changé ; même la bouillie qu’on
faisait pour donner a boire aux visiteurs est interdite.
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Avant l’islam : le prêtre animiste qui avait procédé aux cérémonies du deuil recevait de petits
cadeaux :à savoir, des colas, de la bouillie, un peu d’argent, quelques objets en nature appartenant
au mort ( les chaussures, les gobelets, des bols etc…). C’est maintenant interdit par l’islam.
La femme en couvade va cesser de se coucher à ventre plat sur la porte de la case le 4e jour du
deuil. Puis elle restera dans sa case jusqu’au huitième où elle sortira pour être lavée par les belles
sœurs.
S’il arrive qu’une jeune fille perde son fiancé, ses belles sœurs la font passer 4 fois au dessus de
la clôture de la maison mortuaire avant de la mettre en couvade pendant la même période que la
veuve ou les veuves du défunt. Si le fiancé défunt ne s’était jamais marié, sa fiancée ne restait pas
longtemps en couvade.
Parmi les belles sœurs, seule la belle sœur ayant déjà fait une couvade a le droit de guider la
femme sinon on cherchera une tierce personne substitut de belle sœur pour accompagner la veuve
en couvade dans ses déplacements.
Chaque semaine la veuve en couvade est conduite en brousse pour cueillir des plantes pour une
utilisation rituelle c’est ce jour de la semaine qu’elle fera sa lessive au fleuve accompagnée de la
vielle femme choisie à cet effet ou de la belle sœur accompagnatrice.
Toutes les 3 semaines la veuve est également accompagnée dans la brousse pour cueillir des
plantes et procéder à la destruction de termitières.
Il s’agit de casser avec le pied la première , de la deuxième et de la troisième termitières
rencontrées sur le chemin dans la brousse. La femme doit commencer avec son pied gauche pour
la première termitière, avec le pied droit pour la deuxième et en fin avec le pied gauche pour la
troisième.
La fin de la couvade
A la fin de la couvade, la femme doit être rasée ? On enlève simplement les duvets autour du
front et des tempes. Le petit morceau de fil noir autour du cou ne peut être enlevé qu’après avoir
traversé le fleuve. Il symbolise le deuil. Les femmes qui n’auront pas pu traverser le fleuve, ne
pourront l’enlever que lorsqu’elles auront un nouveau mari. Pour pouvoir retirer le fil noir, le
prétendant devra payer une somme d’argent.
Cérémonies de deuil chez les kabu ize
Ou le koussaou Karou
A la mort de leur, les initiés se réunissent pour aller ensemble au fleuve au bord de l’eau pour
laver tous les habits du défunt. Au retour, on prépare les cérémonies du deuil. Il s’agit d’installer
le corps sur un tabouret mortuaire. C’est alors qu’on joue tous les airs des esprits qui l’ont
possédé se son vivant. Chaque esprit doit se manifester sur le cadavre les uns après les autres
selon la tradition. Le cadavre est installé au milieu du cercle entouré par les initiés et les parents.
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Dans un premier temps on lui prépare son kabu dans une jarre fermée d’un éventail rond. Selon la
légende, le kabu est l’arbre originel qui a la vertu de mettre en harmonie le monde des vivants
avec le monde invisible, et d’être le véhicule de l’âme pour le monde invisible. De son vivant
l’initié devrait s’abreuver de la décoction des éléments de cet arbre selon la personnalité de
l’individu et des esprits qui cohabitaient avec lui.
La toilette funéraire se faisait avec le kabu, les zima vont cueillir les éléments de l’arbre (feuille,
tige, écorce, racine, jeunes pousses etc…) qui ont servi à son initiation. Sinon un autre initié peut
être possédé et l’esprit indiquera les partie de l’arbre qu’il faut cueillir pour la circonstance.
On pose une jarre dans la case du défunt, sur un pieu à trois fourches, le pieu étant coupé sur un
autre espèce d’arbre.
Les élément des arbres ainsi cueillis sont mis dans la jarre à moitié remplie d’eau du fleuve (cette
eau est puisée au milieu du fleuve) puis on ajoute des gains de mil, le tout fermé par un éventail
jusqu’au matin. Pendant la veillée du deuil, on procède a une cérémonie de danse de possession.
Après la toilette funéraire, on embaume le corps avec une sorte d’encens rouge (dougou kirey)
cueilli pour la circonstance. C’est à ce moment là que le cadavre sera enroulé dans un linceul
enfumé également par la même substance.
Selon le ou les groupes d’esprits qui l’ont possédé de son vivant, en tenant compte du plus élevé
dans le panthéon des esprits, le corps sera soit étalé par terre, soit installé sur un tabouret sacré ou
sur un mortier. Cela reflète si l’esprit appartient aux esprits du ciel, de la terre, de l’eau, etc.
La cérémonie du détachement du double
Les cérémonies de la huitaine
Les cérémonies durent une semaine (7 jours). C’est lors de la septième nuit que l’on fait la
veillée. Tous les jours les initiés dansent avec deux tiges sacrées préparées pour la cérémonie.
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2° Partie :
Maladie et soin chez les dendi
Religion et thérapie
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LES DIFFERENTES CATEGORIES DE SOIGNANTS
DANS LA SOUS-PREFECTURE DE KARIMAMA
Texte tiré de la Recherche : Maladies et Sida en pays dendi.
L’agent de santé, le guérisseur, le marabout et la radio
Les tradipraticiens sont très nombreux avec des spécialités variées, ils vivent au cœur des villages
même des plus reculés. Leurs pratiques peuvent être issues de l'Afrique millénaire comme celles
des « zimas » ou des « sorkos », ou être dérivées de l'islam comme celles des « alphas » et des
cheiks. Profondément ancrées dans les cultures locales, leurs réponses thérapeutiques sont en
adéquation avec les représentations culturelles des maladies.
les guérisseurs
Sous un terme générique de « zima » signifiant « celui qui soigne », on retrouve différentes
catégories de thérapeutes. Dans le langage commun le mot « zima » emprunté au culte des danses
de possession est vulgarisé et signifie celui qui soigne en utilisant les substances végétales,
minérales ou animales.
Toute personne pratiquant une thérapeutique traditionnelle préislamique quelle qu’elle soit est
appelée « zima ».
Les principales catégories de guérisseurs sont les suivantes:
les véritables « zimas » appartenant au culte de possession,
les « sorkos » qui sont spécialisés dans les problèmes ORL et font les incantations des esprits
majeurs, en particulier celui de la foudre,
les forgerons ou « zam » qui soignent les brûlures,
les herboristes ou « touri kako »,
les « gounous » qui font les circoncisions et les scarifications,
les coiffeurs ou « wanzam » qui mettent les ventouses,
les « attacheurs », rebouteux de père en fils ou de mère en fille,
les « mo ka bey » ou les « donneurs de recettes », qui soignent grâce au savoir acquis après avoir
été eux mêmes soignés pendant longtemps pour une maladie donnée, qu’ils ont ainsi appris à
soigner sur le tas.
Dans les années cinquante, des marabouts venus du Niger prêchant la parole divine ont saccagé
les autels des cultes des anciens dans l'ensemble de la sous-préfecture. Dès lors cette pression de
l'islam s'est maintenue par les notables musulmans. Cependant, certains cultes perdurent tel le
culte de possession ou « Foley Fori ».
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les marabouts
Le marabout ou « Alfa » est un thérapeute traditionnel islamisé qui soigne avec les sciences
coraniques. Suivant les cas, sa pratique est plus ou moins syncrétique entre les techniques
traditionnelles de soins préislamiques et des techniques s
les marabouts
Le marabout ou « Alfa » est un thérapeute traditionnel islamisé qui soigne avec les sciences
coraniques. Suivant les cas, sa pratique est plus ou moins syncrétique entre les techniques
traditionnelles de soins préislamiques et des techniques s’appuyant exclusivement sur le Coran.
Son mode de consultation est plus familial on va souvent lui rendre visite le soir après avoir passé
la journée aux champs ou sur le fleuve. On lui soumet alors les difficultés rencontrées au sein de
la famille. On consulte souvent pour un autre membre de la famille qui peut être absent (La mère
demande conseil pour son fils, la femme pour son mari et vice versa...)
Il existe quatre sortes de marabouts dans la région:
Les « alpha »: ce sont les plus nombreux. Ils utilisent surtout les versets du Coran sous forme
d'écriture sur des tablettes en bois que le patient lave. Il récupère ensuite l'eau dans une calebasse
puis il la boit ou se lave avec pour se purifier.
Les « alpha zima »: Ce sont à la fois des prêtres du culte de possession et des marabouts.
Certains sont initiés avant tout avec des connaissances islamiques, d'autres sont marabouts de
formation mais conjointement les thérapeutiques traditionnelles.
Les « Dan faraïze » (mot haoussa) : Ce sont des marabouts dribbleurs qui utilisent des tours de
magie pour escroquer leurs victimes.
les « cheik » : Ils sont rares, ce sont des maîtres de l'islam qui n'utilisent que les prières.
les centres de soins
Dans la sous-préfecture, les structures médicales sont composées:
d'un centre de soins à Birni Lafia avec un infirmier et un aide soignant. Le premier village de la
Sous-préfecture, Kargui est situé à 5 km environs.
d'un centre de soins à qui se trouve à 12 km de Bimi Lafia, où travaillent un médecin-chef, un
infirmier diplômé d’état, une sage-femme contractuelle, un laborantin, et quatre aides-soignants.
- La commune de Bogo bogo, à 13 km de Karimama n’a pas d’infrastructure sanitaire.
- La commune de Kompa à 25km de Karimama et 17km de Bogo bogo a un centre de soins
avec un infirmier et deux aides-soignantes.
La commune de Mossey à 26km de Kompa n’a aucune infrastructure sanitaire pour le moment.
Le village le plus éloigné "la Mékrou" Pékinga est encore à 26 km de Mossey.
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ETIOLOGIES TRADITIONNELLES DES MALADIES
Texte tiré de la Recherche : Maladies et Sida en pays dendi.
L’agent de santé, le guérisseur, le marabout et la radio
La punition divine
"Ikwe waadu no", 'la volonté divine" désigne les maladies envoyées intentionnellement par Dieu.
Dieu ne punit pas une personne mais un groupe qui a transgressé ses lois. Là aucun mode de
prévention n’est concevable en dehors de la prière. Ces maladies sont. soignées de façon quasi
exclusive par les marabouts chez lesquels les malades passent pour faire « âwé gnharé »: la
prière thérapeutique.
Les maladies des esprits
"Gandji doori no", "la maladie du diable", c'est à dire une maladie causée par les mauvais
esprits.
Les maladies chroniques ou d’évolution lente supposent un envoûtement, un sort jeté ou un
empoisonnement. Les maladies épidémiques d’évolution rapidement fatales telles que la rougeole
ou la méningite sont « des maladies du vent » sensées être dues au passage dans un milieu donné
d’un esprit ayant les mêmes caractéristiques que celle-ci et contaminent massivement les gens les
plus faibles. Le vent étant assimilé au souffle de l’esprit, c'est à dire aux mauvaises ondes
transmises par un esprit lors de son passage dans un milieu. Ces maladies du vent sont redoutées
et obligent les gens à renforcer souvent les défenses individuelles. Par exemple au cours de
l’épidémie de méningite du début de l’année 1996, les esprits lors des cérémonies de danses de
possession ont demandé de nouer une cordelette noire à la jambe gauche. Pour le choléra qui a
sévi au même moment, ils ont demandé de faire "Kôo ba iou" "le jus de baobab meilleur que le
miel", qui désigne une préparation fabriquée à partir du fruit du baobab et de sel. On sait
d’ailleurs que le fruit de baobab est antidiarrhéique et que le sel est indispensable à la
réhydratation Ainsi les recettes ne sont pas immuables mais chaque épidémie impose
l’organisation de cérémonies au cours desquelles les esprits donnent des directives au groupe. Le
«Kôo ba iou», nom de cette recette ordonnée par les esprits, est venue remplacer le sel de
réhydratation prescrite par l'OMS.
Les maladies ordinaires
Une maladie ordinaire est appelée "doori kwaarey no" "une maladie blanche", est une maladie
naturelle. Elle peut atteindre n’importe qui et n’appelle aucun commentaire particulier.
Une telle maladie est supposée être une maladie qu’on peut éviter comme le choléra ou les
dysenteries qui s’attrapent par l’eau et qu'on évite en buvant l’eau des puits.
Ces maladies peuvent avoir divers modes de transmission.
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LA TRANSMISSION FOETO-MATERNELLE DES MALADIES
Texte tiré de la Recherche : Maladies et Sida en pays dendi.
L’agent de santé, le guérisseur, le marabout et la radio
Dans la région, ce mode de transmission congénital peut se faire de trois manières:
* Soit la mère enceinte a mangé un aliment interdit. La maladie de l’enfant reproduit alors les
caractéristiques de l’aliment ingéré. Par exemple manger du varan pourra donner une dermatose
desquamative à l’enfant. Ceci est lié à des tabous familiaux liant une famille à son génie
protecteur. La transgression du tabou alimentaire provoque ce genre de maladies.
D'autre part, si une femme enceinte sort à certaines heures interdites quand les génies, les esprits
et les djinns ont coutume de sortir et qu’elle croise leur route, l’enfant qu’elle porte pourra tomber
malade car les mauvaises ondes transmises par les esprits lors de leur passage sont sensées
traverser la barrière utérine pour atteindre le fœtus. L'esprit peut transmettre ses caractéristiques
génétiques à l'enfant qui en grandissant, aura le comportement de l'esprit. Ainsi l'autisme, les
psychoses infantiles et certaines maladies chroniques sont interprétées de cette manière.
Si pour une raison quelconque l’énergie vitale d'une femme est faible, " Tchura" l’oiseau sorcier
peut transmettre ses caractéristiques à l’enfant qui est dans son ventre. Ce sont, en particulier, les
maladies convulsivantes. La fiente de cet oiseau en tombant sur la case dans laquelle s'abrite une
femme enceinte transmet une telle maladie au fœtus. La maladie sera encore plus grave si l'oiseau
se pose sur le toit.
La mère peut transmettre une maladie à son enfant par la voie sanguine seulement à partir de
l’accouchement. C'est souvent une maladie sorcière, car le sorcier aime le sang et profite de la
fragilisation de la femme à ce moment précis. La mère transmet toujours sa propre sorcellerie à
son enfant par l’allaitement. Cette transmission peut être qualifiée de dominante dans la mesure
où l’enfant est considéré comme réellement sorcier. C'est pourquoi on ne donnera jamais son
enfant à allaiter à une femme qu’on ne connaît pas. Cela rejoint l'interprétation médicale actuelle
concernant le moment privilégié de la transmission du virus du HIV de la mère à son enfant qui
est situé au moment de l’accouchement.
La transmission sanguine se fait par le père au moment de la conception de l’enfant. Le sang
appartient au père: ainsi si son enfant fait une faute grave il lui dira: "Si tu es de mon sang, ce que
tu viens de me faire tu le paieras" "si tu as fait ça, c’est que tu n’es pas de mon sang" "tu n’es pas
l’enfant né de la ceinture de mon pantalon": on comprend là que le sperme vient du sang du père.
Dans l’imaginaire collectif quand un homme fait plusieurs fois l’amour dans une nuit, il n’a plus
de sperme, c'est du sang qui coule. Le sperme est constitué à la fois de sang et de moelle.
L’enfant est robuste quand le sang et la moelle du père sont bons. Le premier cri de l’enfant
suppose que le père est de bonne qualité. Si un homme veut un enfant robuste il ne doit pas trop
gaspiller son sperme afin de le concentrer.
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
Si le père est sorcier, il transmet de manière héréditaire qu’on pourrait qualifier de récessive son
"fluide sorcier" à son enfant qui est sensé avoir des comportements déviants mais n’est pas
sorcier lui-même. Cet enfant tout en n'étant pas sorcier devient coléreux, impulsif, etc.
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
BAANI ZUMBU KABU IZE
THÉRAPIE ET DANSES DE POSSESSION
Article paru dans le cahier de l’URACA N°6
La démarche médicale et l'initiation répondent à un objectif commun qui est de soigner. Alors
que la première est analytique et individuelle, la seconde est synthétique et collective, les danses
de possession en sont un exemple:
Elles consistent à faire appel aux "esprits" pour engendrer un processus thérapeutique qui intègre
le groupe social. La rencontre de ces deux méthodes thérapeutiques était le but de des rencontres
d'ethnomédecine qui ont eu lieu à Paris en 1994 et 1995.
En 1994 avec l'aide de la DGS et DECS, URACA a pu faire venir 20 tradipraticiens du nord
Bénin pour participer aux rencontres d'ethnomédecine et au colloque "Jour des savants, nuit des
esprits".
En 1995, quatre d'entre eux nommés Djibo SAYBOU, Aoudou MAROU, Amadou GARBA et
Nayini MAïTCHIDO avec à leur tête Mr Moussa MAMAN fondateur d’URACA, tradipraticien
et ethnopsychiatre sont revenus durant un mois pour une expérience pilote de consultations
d'ethnomédecine.
Il s'agissait de donner aux équipes médicales les moyens de répondre à la question suivante :
Comment faut-il situer la prise en charge d'un patient africain en France?
Se demander qu'est-ce qu'être guéri, soigné, qui peut guérir ou soigner et pourquoi, c'est d'abord
s'interroger sur les valeurs, les croyances et la structure de la société où ces questions sont posées.
Or le migrant est par essence à cheval entre deux sociétés, ses représentations de la maladie sont
par conséquent à cheval également entre deux systèmes culturels différents. En ce qui concerne
les africains en France ils doivent donc faire un grand écart entre des conceptions traditionnelles
magico-religieuses profondément ancrées dans leur histoire personnelle et des représentations
médicales et rationnelles, seules à être socialement reconnues et valorisées. D'où l'extrême
difficulté à exprimer les premières.
Dans le contexte de la santé mentale, l'ethnopsychiatrie a permis la prise en compte de ces
conceptions traditionnelles, ce qui est rarement le cas dans le cadre des maladies somatiques, et
particulièrement du Sida.
Le Sida met en échec les techniques modernes, donc pour ces patients imprégnés par l'équation
médiatique Sida=mort, le recours aux tradipraticiens leur offre une possibilité de garder espoir et
de donner un sens à leur malheur.
Les tradipraticiens invités font partie de l'association dendi Baani Zumbu Kabu Ize. Les dendi
sont un sous-groupe de l'ethnie djerma-songhaï qui s'étend entre le Niger, le Bénin, le Burkina
Fasso et le Mali.
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Cycle dendi : Les enfants de Hara koye : Les dendi Mamar Hâma du fleuve Niger
Janvier 2001
Baani Zumbu Kabu Ize signifie: « pour que vivent les enfants de Kabu ». Kabu est l'arbre
originel dont on utilise les pouvoirs dans l'initiation et dont chacune des parties: feuille, branche,
fleur, etc., correspond symboliquement à un esprit particulier que l'on attribue à un initié.
La religion traditionnelle fait référence à un panthéon d'esprits qui forme une véritable société
spirituelle à l'image du panthéon des dieux grecs.
Les foley ou "esprits" sont des divinités mobiles et dispersées contrairement aux génies du terroir
ou torou qui sont des divinités enracinées. Ils ont une organisation semblable à celle des hommes
dont ils sont, à la seule différence qu'ils sont invisibles, presque des doublets. Ils sont
hiérarchisés en familles liées entre elles par des relations très complexes.
Ils appartiennent à trois grandes familles: la famille de Harakoy, le génie de l'eau, la famille de
Béné koy ou Yabilam, le génie du ciel et la famille de Marou, l'esprit de la terre et du feu. Ces
"esprits", les foley, sont les enfants de Sidi koy (Dieu, celui qui est invisible). Les foley utilisent
le corps des initiés pour parler au groupe durant la transe.
Le culte des foley a son prêtre, c'est le zima. celui-ci organise les cérémonies de possession par la
transe. Toute cérémonie se fait avec la présence d'un orchestre. L'instrument principal est le
goguié, le violon, d'où le nom de may goguié, c'est à dire le violoniste. C'est le généalogiste des
foley.
Les musiciens jouent la musique de l'esprit qu'ils veulent faire venir et rappellent ses pouvoirs de
la même façon que les griots chantent les rois dans les sociétés humaines.
Le zima maître de cérémonie ou un de ses collaborateurs traduit la langue de l'esprit pour le
public. Le zima se trouve alors en position d'interprète entre le patient et l'esprit, de la même
manière que le psychanalyste est interprète entre le patient et son inconscient. On comprend donc
facilement que dans cette forme de thérapie, l'inconscient collectif remplace l'inconscient
individuel des thérapies occidentales.
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CULTE DE POSSESSION CHEZ LES DENDI
EXPOSE D'INTRODUCTION A LA CÉRÉMONIE RITUELLE
DU 24 Septembre 1994
Article paru dans le cahier de l’URACA N°6
Je voudrais vous parler brièvement du culte de possession chez les dendis. Les dendis sont un
sous-groupe des djermas-songhais qui sont également descendants des soninkés. Nous sommes
des soninkés mais perdus quelque part, en aval du fleuve car nous n’aimions pas la guerre.
Dans notre culte de possession, nous avons ce que nous appelons SIDIKOYE. SIDIKOYE c'est
l'invisible. Entre l'invisible et nous, les humains, nous avons ce que nous appelons "les esprits".
Nous n’avons pas de prophète.
Nous sommes tous des prophètes dès l'instant que nous appartenons à SIDIKOYE.
Selon la mythologie dendi personne ne peut représenter SIDIKOYE sur la terre, nous sommes
tous ses représentants.
Baani Zumbu Kabu ize est une association de ce culte de possession. Les "esprits" sont entre
SIDIKOYE et nous. C'est très difficile de les définir dans les références culturelles occidentales.
On peut faire le parallèle entre les anges du christianisme ou les malaikas des musulmans ; nous,
nous avons les esprits.
LE PANTHÉON DES ESPRITS
Regardons l'arbre généalogique du panthéon des esprits dendis. Un certain nombre de noms
doivent vous sembler bizarres. En prenant de la gauche vers la droite: ALFAGA le génie de la
médecine, en dessous SARKI le génie de la psyché.
Le plus grand le premier, Rappelle MANA SAROU, à côté de lui il y a DANDOU et TONDI.
Tout à l'heure nous allons essayer de faire appel aux esprits et de faire une mise en transe. Nous
allons faire appel aux esprits en commençant par TONDI qui vient avant HARAKOY. Nous lui
demanderons sa grâce avant de faire appel à HARAKOY puis à YABILAM et enfin ZATAOU.
Nous leur demanderons grâce avant de demander à DODO de bien vouloir se manifester. Ce
n’est pas parce que TONDI est en haut qu'il est forcément le premier à être appelé : c'est une
question de pacte. Pour faire appel à un esprit, il faut faire une sorte de contrat, mais attention,
l'esprit est lui aussi obligé de demander pardon aux autres. Ce n’est pas parce qu'on lui a
demandé de venir qu’il est le plus grand. L'ordre du diagramme n'est pas forcément l'ordre
d'arrivée des esprits. C'est très complexe.
Mais avant de commencer les cérémonies, nous sommes tenus de demander grâce aux premiers.
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L'INITIATION.
Parlons brièvement de l'initiation à cette forme de culte chez les dendis. Plusieurs itinéraires sont
possibles:
Il existe une initiation pour être thérapeute qui peut se dérouler de la façon suivante. Si vous êtes
malade, vous vous rendez dans une cérémonie de danse de possession. Ce jour là, on vous
identifie en tant que malade parce que vous avez peut-être quelques réactions qui correspondent à
des caractères spécifiques. Le groupe vous identifie. Si vous acceptez de faire une cure, on vous
soigne. Une fois que vous êtes soigné, si vous acceptez de faire partie du groupe, on vous initie.
* Deuxièmement, vous pouvez être d'une famille de "possédés", ou d'une famille qui a un
« esprit » ou un génie, si on peut appeler ça comme ça. Le génie de la famine peut sympathiser
avec vous. Dans un premier temps, il donne des signes à la famille et à vous-même, pour dire: "Je
suis là, je veux être avec toi". Dans ce cas là, il y a soins également. On vous soigne parce que
vous ne connaissez pas du tout ce qui vous arrive, le soin consiste à vous faire comprendre ce qui
vous arrive. C'est à partir de ce moment là qu'on vous fait sympathiser avec l'esprit. Et l'esprit
peut soit vous prendre comme une personne relais pour faire de la thérapie, soit vous soigner et se
limiter là, sans aller plus loin. Il sympathise avec vous, vous oriente si quelque chose ne va pas,
oriente votre famille à travers vous et ça s'arrête là.
* Il existe une autre forme d'initiation beaucoup plus profondément mystique. Ainsi par exemple,
si vous venez dans un groupe de thérapeutes par les danses de possession, on dit que vous avez eu
l'appel. Un esprit se manifeste chez quelqu'un d'autre et vous dit que vous êtes d'office membre
de l'équipe. A ce moment là, l'équipe vous prend, vous apprend les caractéristiques de l'équipe (et
non celles de l'esprit), et là, on vous apprend autre chose: la matérialisation de tous les
phénomènes extrasensoriels, ou tout ce que vous voulez. Et c'est là, à ce niveau, qu'on devient un
maître.
N’oubliez pas que ce que je vous décrit concerne précisément les dendis.
Vous pouvez également devenir maître par un autre chemin: si vous êtes malade et qu'une équipe
vous a soigné, vous avez subi une cure thérapeutique. Après cette cure, vous pouvez rentrer dans
l'équipe: vous dites "j'aime les esprits, je veux savoir". Il y a une manière de le dire, c'est
culturel. Alors, on vous apprend.
Vous rentrez dans ce cas là dans le monde le plus secret de la formation mystique dendi. Vous
arrivez au stade dont nous parlions tout à l’heure, le stade de la mentalisation. Vous devenez un
maître, vous n'avez pas besoin de rêves à ce moment là (ce que le marabout appelle esterara, et
qui consiste à faire un bout de papier, le mettre sous l'oreiller, s'endormir dessus, et dire le
lendemain ce qui s'est passé). Ici, ce n'est pas ça, on vous apprend comme chez les hindous ou
les bouddhistes à peu près, à entrer dans des différents états de conscience où vous devenez
complètement inconscient et où se manifestent les forces invisibles. Mais c'est un état que vous
recherchez vous-même.
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Ce sont des techniques particulières qu'on vous apprend, et si vous devenez maître, vous arrivez à
un niveau où la pensée humaine n'existe pas.
Si dans cet état là, une plante se présente à votre esprit, c'est celle qui soignera le malade dont
vous vous occupez. Mais auparavant, on vous aura appris, le monde végétal, le monde minéral et
tout le reste. Il faut 7 ans pour entrer dans le système de la mentalisation c'est donc réservé aux
grands initiés.
LES ESPRITS ET LA THÉRAPIE
Quand un patient vient dans l'équipe, parmi les initiés, personne ne peut savoir ce qu'il a. On fait
appel à un esprit. C'est à l'esprit de nous dire de quoi il souffre, de poser le diagnostic et de
donner les orientations thérapeutiques: à quel moment il faut aller chercher les plantes, à quelle
heure, à quel endroit, comment cueillir la plante. C'est l'esprit qui confie un malade à un
thérapeute. Alors, qu'on soit grand ou petit initié, dès l'instant où l'esprit dit que tel initié doit
s'occuper de cette personne là, tout le monde le soutient même si c'est le dernier initié du groupe.
Il devient responsable thérapeutique de ce patient et l'équipe va l'aider sans aucune arrière pensée,
parce que c'est l'esprit qui l'a dit. Aucun maître ne peut contester ce verdict, c’est l'esprit qui
oriente l'équipe, et choisit un initié parmi les autres, qu'il soit le grand maître ou le dernier. On lui
dit, voilà, c'est à toi de t'occuper de lui et le thérapeute va prendre des dispositions pour exécuter
ce que l'esprit lui a donné à faire.
Donc aucun initié ne pose de diagnostic.
Le groupe d’initiés qui est venu lors de ce colloque est tout particulièrement spécialisé en santé
mentale. D'autres groupes, par leur appartenance familiale ou leur démarche de formation
seront susceptibles de soigner des malades somatiques. Toutefois, les équipes de danses de
possession chez les dendis sont beaucoup plus souvent spécialisées en santé mentale.
Cela n'empêche pas, dans le cas où un patient se présente pour une raison quelconque sans
aucun problème de santé mentale, de le soigner: si un esprit se manifeste et dit ce qu'il faut faire,
on le fera.
On a souvent eu des réussites, on a également eu des choses qui n'ont pas très bien marché.
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HISTOIRE DE ZATAOU, FOLEY ESCLAVE
Article paru dans le cahier de l’URACA N°6
« Oh, toi, esclave, tu es fils d'un village heureux »
Une grande famine sévit. Zataou vit toute sa famille dans une situation très difficile. Il prit alors
un habit d'esclave (un cache sexe en pagne), et se fit passer pour un esclave. Il alla de porte en
porte pour piler du mil. Il ramassait le son et le ramenait à sa famille et à son village pour nourrir
les siens. Il avait compris que le son contenait tous les éléments nutritifs et il le fit manger à sa
famille.
Il allait dans les familles les plus riches. A un moment donné, les nobles ne comprirent pas
comment les familles les plus démunies résistaient aux maladies, alors qu'eux mêmes qui
mangeaient à leur faim, dépérissaient.
Comme il se présentait comme un esclave, les nobles ne pouvaient mettre en doute sa parole sous
peine de déchoir. Quand il pilait le mil dans une famille et qu'on lui demandait d'amener la boule,
il répondait « c'est le mortier qui a mangé la boule ». La famille était donc contrainte d'acheter
une deuxième part de mil et partageait son bien sans le savoir avec les plus démunis.
Il se comportait comme un idiot et demanda à son entourage: « Si vous venez me chercher dans
les familles nobles, vous direz : « avez-vous vu l'idiot, fils de Koda? (Koda=cadet) ». Les nobles
répondaient alors: « n'est-ce pas cet esclave qui vient piler chez nous? » De ce jour, sa lignée est
devenue esclave. On dit que tous les esclaves sont ses descendants.
Il existe trois façons de chanter les louanges de Zataou: Soubou kwara, zarma zarma et dendi
dendi. Ces trois traditions sont mêlées dans le texte qui suit.
- WAWA DAN KODA
L'idiot fils du cadet
- SASAGOU MAGANIN KARAFE
Un sac de mil qui maîtrise le fer
- TOUROUMI YA TCHI DAO
C'est toi le mortier qui a mangé la boule de mil
- GABI YA TOUBOU
Avoir la force c'est un héritage
- SAMO TARAYE- MO TOUBOU
Même être idiot il faut l'hériter
- BANGNA KOARA KANO IZÉ
Oh, toi, esclave, tu es fils d'un village heureux
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- KANDIA MA GWARANDI
Qui me voit me nourrit
- KAN MA NA DIA MA TCHI N’GA TE BARAKA
Qui ne me voit pas se dira ouf, j’ai eu de la chance
- A LA HOU AKBAROU NA NAYE NO
Dire « Dieu est grand », c'est avoir confiance
- DONAYE GA FOUNDI TABANDI
L'habitude ça fait souffrir le cœur
- AL KAWALI YA DJARAOU DAÏNO
Le serment est un fardeau
- KAN NA ZA MA TONANDI
Qui le fait doit le tenir
- A TCHI IN GA SI HAWOUI TÉ YAN NAN
Tu as dit que tu ne cesseras pas de faire des choses honteuses
- ZA MA BÉNÉ KOYE, YA TCHMING GA SÉ BÉRÉ
Parce que l'esprit de le foudre est ton grand frère
- BAN KAN , NA BÉRÉ KAROU GANDA
Celui qui a terrassé son grand frère
- WO DIN SI KÉNÉ MO KAMBA
Ne manquera pas de terrasser son petit frère
- A LASSI RAY GA TANGARI NO
Les calomniateurs sont des menteurs
- MO SI MOUNDI KA YA MO
Les yeux ne peuvent pas avoir des larmes pour rien
- WO SABA KAKOY WA SABA KAA KAA
Partir ensemble, revenir ensemble
- SAYE WAWA SAYE BAKO
Il faut être idiot ou étranger
- SAYE WANDA BAÏSSANI BA
Il faut être un ignare
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- GA RAWA BABU KIDI
Tu sais danser sans musique
- HARA MA WHÊÊN BA GNA SÉ
Que la musique tonne pour toi, l'esclave
- BANGNA KOYE HA LA KASHINA KA DAMBATÉ
Le grand Esclave est allé jusqu'à Kashina faire de la boxe
- GOLA GOLA KAM BÉRI ZANGA DAÏ ZOUNGAÏ YAN NO BAGNA
Un cache sexe amélioré est aussi grand que les pagnes des femmes
- SA SA GOU MAGANIN KARAFÉ
Un sac de mil est le remède du fer
- DA SAMO TÉ GABI TCHERAMAïKOMEY 1 MA BÂNI GANDA
Quand un idiot est fort, ceux qui se croient intelligents n'ont qu'à se mettre à l'écart
- BANGNA GOUNOUGWARO KAN NA HERE KOYE LO MA
Je suis le grand Esclave mangeur de gounou (maître de cérémonie) qui a surpassé les nobles,
- TOURI MIN KÂÂSSA TABARIAN DOUTCHI
Je suis aussi un mortier en terre cuite et un pilon en fer
- ZÂ BÂ BANZA BA
Je ne suis pas rouge pour rien
- ZAZA KAN NA KOUBEY LOMA
Dans la lumière du rouge, je peux manger et boire, mais c'est de l'ombre pour vous
- ZATAOU ZAZA GAMBA
Zataou, prends manges et bois du rouge, personne ne peut te voir
- BAGNA KAN DOBOU TE GWARI
Grand Esclave qui a transformé le son en nourriture
- A DAKA NAN A BARI NAN
On me pile là, on me laisse là
- TOURMI YA TCHANGNÉ DÂO
je suis le mortier qui a avalé la boule de mil.
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MIGRATION ET PSYCHIATRIE :
EXPERIENCE PILOTE DE THERAPIE METISSE
PATIENT, THERAPEUTE ET
THERAPIE ENTRE DEUX MONDES
A paraître, intervention faite aux Rencontres Francopsies Octobre 2000
Introduction
Comment soigne-t-on quand on a un grand-père « sorko » maître des génies de l'eau, féticheur de
renom, un père « alfa » thérapeute musulman célèbre ayant étudié au Nigéria et qu'on a fait
l'école des blancs qui nous a conduit jusqu'à la faculté de médecine ?
Qui est-on, quand on est né sur une petite île du bout du monde au milieu du fleuve coincée entre
le Niger et le Bénin, qu'on est passé par les capitales africaines avant d'atterrir dans le quartier de
la Goutte d'Or à Paris où on est considéré comme un thérapeute bizarre donc suspect, alors qu'on
est appelé en Afrique le blanc du village ?
Comment soigner des patients perdus dans l'entre deux, les pieds en Europe, la tête en Afrique,
des descendants d'esclave coupés de leurs racines ; des malades atteints par un nouveau mal qu'ils
ne comprennent pas ?
De quoi est peuplé le monde de l'invisible ? De l'inconscient des uns et de tous ?, des esprits de la
brousse ? Le thérapeute reste un interprète, mais que traduit-il ? Les mots de l'inconscients ou les
consignes des esprits ? Nos morts hantent-ils notre mémoire lors de deuils pathologiques ? Leurs
âmes errantes nous poursuivent-elles lorsqu'elles n'ont pas pu rejoindre le monde du repos
éternel?
Comment tisser un pont entre le pays des blancs, pays de l'individu du matérialisme et du visible,
et le pays des noirs, pays du groupe, du mysticisme et de l'invisible.
Entre une médecine occidentale à Paris, et des thérapies traditionnelles millénaires en Brousse,
thérapeute et patients se retrouvent dans un itinéraire métisse et un cadre syncrétique. Le mot
ambulatoire prend là sa pleine acception naviguant entre cultures et continents.
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Les outils thérapeutiques
Le savoir-faire occidental
Les techniques traditionnelles sorko
Chez les dendis du nord Bénin, le tradipraticien n'est et ne se considère que comme un
intermédiaire entre le monde invisible et le monde des vivants.
Il se sent investi d'une mission sociale mais sait que les esprits peuvent l'abandonner à tout
moment. Il n'a pas de pouvoir propre, il n'est que le dépositaire du pouvoir des esprits. Cela
l'oblige à tout moment à rester conforme aux normes déontologiques dictées par les esprits au
groupe des initiés. Cette humilité obligée interdit toute dérive liée au sentiment de toute
puissance.
Nous pouvons retenir quelques éléments méthodologiques dans les modes d'intervention.
Les différentes étapes d'une thérapie :
Le travail thérapeutique s'exécute en plusieurs temps.
* Lors de la première consultation le patient est vu en groupe. Cette consultation a plusieurs
objectifs: l'établissement d'un prédiagnostic et d'un lien thérapeutique avec le patient. Un
thérapeute sera désigné comme responsable du suivi de ce malade.
* Dans cette technique comme dans de nombreuses autres (marabouts, devins ... ), le thérapeute
se réveille la nuit et prend une heure pour travailler autour du cas de chaque patient. Ce travail
lui permet de donner un diagnostic plus fin et d'orienter les choix thérapeutiques. Les malades
connaissent cette modalité ce qui leur permet de ne pas se sentir abandonnés même lorsqu'ils sont
seuls chez eux. Pouvoir imaginer le thérapeute travaillant pour eux à tout moment aide les
malades à l'élaboration psychique de leur problématique.
Les différentes techniques thérapeutiques et divinatoires :
* La première consiste à penser volontairement à la problématique du patient par des états de
conscience modifiés. Ce qui correspond à peu près au travail d'élaboration du psychanalyste face
à son contre-transfert. Avec cette différence que le psychanalyste laisse son inconscient libre
d'agir alors que le tradipraticien lui donne un cadre plus précis. Lors de cette méditation, un film
peut se dérouler ou une plante peut germer à la frontière de la conscience du thérapeute. Cette
plante par exemple est fondamentalement celle qui doit soigner le malade.
Cela crée un lien entre l'inconscient du patient et celui de son thérapeute. Éventuellement ce
travail peut être répété plusieurs fois ou même de nombreuses fois en fonction de la disponibilité
du thérapeute et de la gravité de la pathologie du malade.
La technique onirique a deux aspects. soit un travail sur les rêves du thérapeute, soit sur celui du
patient.
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Les rêves du thérapeute :
Le thérapeute avant de dormir peut mentaliser l'image du patient. Les rêves qui viendront autour
de cette image donnent la ligne thérapeutique : égorger un poulet rouge, un poulet blanc. Ces
rêves sont les outils donnés au thérapeute par ses esprits tutélaires. Ces rêves sont encore plus
proches de la technique psychanalytique que les modalités précédemment 'décrites.
La technique des rêves a des effets perturbateurs car certains d'entre eux occasionnent des
troubles, surtout quand la conscience du thérapeute n'en a pas la maîtrise. C'est pour cela que la
formation du thérapeute dans ce domaine peut durer des années (7 ans). Son maître lui donne des
moyens de décoder les rêves perturbateurs pour les neutraliser afin que ses facultés soient
libérées de leur « parasitage » .
Les rêves du patient :
Ce sont, comme en occident des supports privilégiés du travail thérapeutique. Selon que ces
rêves sont orientés sur le thérapeute ou sur la problématique enjeu, le thérapeute les décode ou les
interprète et demande à son patient les sacrifices correspondants.
* La géomancie est également une technique de voyance et de thérapie. Chaque signe est soit
femelle, soit mâle, ou les deux à la fois. Le thérapeute et la disposition des signes mâles,
femelles ou bisexués, interprète celle-ci puis finit par poser le diagnostic. C'est la seule technique
où le diagnostic posé requiert l'accord du patient et où on lui demande de l'argent avant l'examen.
Ce qui n'est pas sans rappeler le rapport à l'argent des psychanalystes.
* La fabrication d'un objet transférentiel intervient plus tard dans le processus thérapeutique.
Le thérapeute pose des objets (cauris, cuir, bois ... ) disposés en vrac. Pendant la méditation,
l'esprit par sa main choisit un objet. Ensuite, le thérapeute doit "charger cet objet: il oriente sa
pensée positive sur celui-ci pour la résolution d'un problème ou l'amélioration d'un état de santé.
La technique la plus sophistiquée, réservée aux grands maîtres est la suivante:
Le thérapeute prend une écorce type papyrus et du charbon. Il se met en méditation autour de
l'image de son malade et sa main écrit automatiquement des graphiques sur l'écorce. Les
puissances invisibles s'expriment par son intermédiaire pour soigner le malade.
On peut dire également que le contre transfert s'exprime directement, de façon brute sans
traduction par la parole.
Si la figure dessinée est très évocatrice elle sera interprétée: le dessin d'un bélier ordonnera le
sacrifice d'un animal de ce type. Le dessin est ensuite découpé, plié et incorporé à l'objet
transférentiel.
Dans cette technique, la dernière étape consiste à ce que la conscience du thérapeute assimile
l'objet sur lequel elle se concentre pour en pénétrer l'essence profonde.
Le thérapeute a donc transformé en matière concrète son inconscient et son contre transfert qu'il
donne ensuite directement à son malade qui portera toujours ce trait d'union entre son thérapeute
et lui même.
URACA - Unité de Réflexion et d’Action des Communautés Africaines - 33 rue Polonceau - 75018 Paris
Tél. 01 42 52 50 13 - Fax 01 44 92 95 35 - Email : [email protected] - www.uraca.org
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On voit que dans ces techniques, les pensées, les mots, les rêves sont des outils thérapeutiques
majeurs ce qui en fait des sœurs jumelles des techniques psychanalytiques, mais s'y rajoutent des
supports matériels et symboliques tels que les objets ou les sacrifices.
Les cadres thérapeutiques
* En France
Les consultations de groupe à URACA
Elles se font dans un bureau médical dans le quartier de la goutte d'Or. Le groupe est composé de
membres de l'équipe de diverses origines aussi bien hommes que femmes, noirs que blancs. C'est
un cadre occidental ouvert à l'Afrique.
L'efficience de cette consultation repose sur la contenance du groupe qui renvoie non seulement
aux modalités du soin en Afrique, mais également à la structuration des sociétés africaines
fondées sur le groupe, la communauté et non le seul individu. L'essentiel du travail opéré porte
sur les liens: entre l'individu et la famille, la France et le pays d'origine, le groupe d'URACA et
les équipes qui nous adressent les patients (assistantes sociales, médecins, éducateurs, etc.).
Il s'agit de donner un sens à la maladie, aux symptômes quels qu’ils soient ; sens qui soit en
accord avec les représentations traditionnelles. Cela permet une sédation de l'angoisse.
Parfois, l'important est de permettre un regard sur le passé, sur les origines. Cela suffit au patient
pour renouer avec son histoire et se réinscrire dans une historicité. Dans le suivi des familles une
telle approche aide les parents à inscrire l'enfant dans leur descendance, dans son appartenance à
la famille, de l'identifier, de lui donner un sens. Elle leur permet de «reconnaître» cet enfant né
dans l'exil et qui souvent apparaît comme un étranger à sa propre famille. Cela contribue à
resituer la dynamique familiale et à faire apparaître que «le malade» n'est pas toujours celui pour
lequel on consulte.
En fonction des pathologies, le suivi peut prendre des formes différentes (durée, cadres,
accompagnants, etc.). Parfois une seule consultation suffit en autorisant le patient à penser son
histoire « à l'africaine », d'autant que l'incitation vient d'une équipe de médecins. Mais souvent, le
suivi du patient demande après un certain temps de se poursuivre dans un cadre plus africain.
Les consultations à l'hôpital
Le premier objet de ce type de consultation est de montrer au malade que l'équipe hospitalière le
considère dans sa globalité et non dans son symptôme ou sa maladie seulement. L'équipe
d'URACA la mène en présence de l'équipe hospitalière et éventuellement des tradipraticiens
venus d'Afrique au cours des rencontres d'ethnomédecine. Le patient peut alors rompre avec le
clivage entre sa culture d'origine et celle du pays d'accueil, dans lequel il s'est enfermé.
Parfois la maladie survient tellement brutalement qu'elle vient réactiver d'anciens traumatismes
soigneusement refoulés par le patient (exil ou problématiques préexistantes à la migration). A la
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maladie se surajoute une cohorte de symptômes qui ne prennent sens que par rapport au trajet du
patient et à son environnement culturel. La prise en charge ethnopsychiatrique va permettre une
élaboration de ces traumatismes par le biais du contexte culturel, des pratiques familiales...
En ce qui concerne le VIH, les consultations permettent de répondre à la question « pourquoi moi
? ». En trouvant une causalité aux évènements (la maladie), en rendant compréhensible leur
survenue, elle dégage le patient de l'angoisse décuplée par l'insensé, l'a-sensé.
Les consultations individuelles à domicile
Le domicile, c'est un petit bout d'Afrique à Paris. Le patient dans ce cadre peut exprimer plus
librement ses problématiques traditionnelles. Pour y répondre, cela nécessite l'utilisation d'outils
purement traditionnels africains ce qui est impensable dans un cadre trop occidental. Une grande
partie d'entre eux trouvent dans ce type de prise en charge les réponses qu'ils recherchent et qui
leur permettent de reprendre pied dans leur vie sociale et familiale.
Certains d'entre eux auront besoin de faire un pas supplémentaire dans leur suivi, pour eux le
suivi pourra être poursuivi en Afrique.
* En Afrique
Bani Zumbu Kabu Izé et les cérémonies de possession
La religion traditionnelle fait référence à un panthéon d'esprits qui forme une véritable société
spirituelle à l'image du panthéon des dieux grecs. Les foley ou "esprits" sont des divinités
mobiles et dispersées contrairement aux génies du terroir ou torou qui sont des divinités
enracinées. Ils ont une organisation semblable à celle des hommes dont ils sont, à la seule
différence qu'ils sont invisibles, presque des doublets. Ils sont hiérarchisés en familles liées entre
elles par des relations très complexes.
Ils appartiennent à trois grandes familles : la famille de Harakoy, le génie de l'eau, la famine de
Béné koy ou Yabilam, le génie du ciel et la famille de Marou, l'esprit de la terre et du feu. Ce
sont les enfants de Sidi koy (Dieu, celui qui est invisible). Au cours de la transe les foley utilisent
le corps des initiés pour parler au groupe.
Sous un terme générique de zima signifiant celui qui soigne, on retrouve différentes catégories de
thérapeutes. Le zima maître de cérémonie traduit la langue de l'esprit pour le public. Le zima se
trouve alors en position d'interprète entre le patient et l'esprit, de la même manière que le
psychanalyste est interprète entre le patient et son inconscient. On comprend que dans cette
forme de thérapie, l'inconscient collectif remplace l'inconscient individuel des thérapies
occidentales.
Le centre de soins et de santé de Bello Tounga
C'est un cadre africain avec un peu d'occident car on y exerce la médecine des blancs avec les
médicaments venus de France. Mais les cases d'hospitalisation sont en terre battue, et les
accompagnants du malade y résident avec lui, l'entourent, le nourrissent et lui donnent les soins
de nursing qu'il requiert.
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Ce cadre offre la possibilité d’organiser des « mises en couvades » traditionnelles qui consistent à
garder le patient dans la case ronde qui symbolise l’utérus maternel pendant une durée de 7 jours.
Pendant tout ce temps il est materné par l’ensemble du groupe des initiés, en particulier par les
vieilles femmes qui mangent, dorment avec lui, le lavent comme le font les femmes âgées à une
parturiente venant d’accoucher. Dans la case se trouve une calebasse remplie d’eau dans laquelle
on met de la poudre de 4 sortes d’arbres sacrés avec des graines de mil choisies un an auparavant.
L’eau de la calebasse symbolise le liquide amniotique Durant cette période, il ne sort de sa case
que le soir pour participer à des cérémonies de danse de possession. Au cours de celles-ci, il
danse avec les initiés pour apprendre les rythmes sacrés.
Après la sortie du patient, on ouvre la calebasse, si le mil a germé, la renaissance a eu lieu, la
couvade a réussi, tout le monde applaudit et c’est à ce moment là qu’on fait la sortie de la case.
Pour tous les patients, ce rituel permet une renaissance symbolisée par les gestes accompagnant la
sortie de la case : on attache le patient au niveau de l’ombilic par une corde tenue derrière lui par
une vieille femme symbole du cordon ombilical, de même un zima peut prendre les chaussures
que va mettre le patient pour sortir et pratiquer des gestes rituels en prononçant des paroles
sacrées pour protéger le patient qui ne piétinera pas des endroits interdits ou maléfiques. Le
patient sort en reculant comme un enfant qui naît les pieds en premier, puis on lui fera faire la
tournée des lieux sacrés, comme un enfant qui découvre son univers et agrandit son espace.
On prend le mil germé qu’on pile, on prend l’eau de la calebasse que l’on mélange avec le mil
pilé. Ce mélange sera bu tout d’abord par le zima, puis par le patient et enfin par les initiés qui
l’ont entouré.
Si le patient est possédé, l’identification des esprits perturbateurs se fera pendant la couvade
grâce aux cérémonies durant lesquelles, le patient apprendra à vivre en harmonie avec eux (il
s’agit d’un endorcisme et non d’un exorcisme). A partir de ce moment l’esprit n’est plus
perturbateur mais devient protecteur, il ne se manifeste que lorsqu’on le sollicite dans un cadre
précis et non plus de façon intempestive.
Problématiques des patients suivis en France
et venant à Bello Tounga compléter leur thérapie
Pour tous les patients venant de France, ces traitements constituent un retour aux sources, à leurs
origines, un ré-enracinement dans la terre mère. Mais ce cadre tient compte de leur histoire dans
la migration, l’exil ou l’esclavage. En effet ils sont différents de leurs frères restés sur le
continent, et le cadre qui les reçoit doit s’adapter à leurs spécificités et à leurs différences. Ce
milieu située au fond de la brousse dans une Afrique restée traditionnelle est quand même en
partie métissé ce qui permet leur prise en charge.
C’est pourquoi, on a pu voir ces dernières années des patients de différentes origines dont
certains avaient tenté des traitements dans leur pays d’origine qui avaient échoué probablement
car ils n’avaient pas su tenir compte du parcours de ces patients.
Les différentes problématiques des patients suivis en France et venant à Bello Tounga poursuivre
leur thérapie tournent autour des thèmes d’identité, d’acculturation, de possession, de déviance
sociale et de recherche de sens.
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