Alexandrie 1914-1918 - Centre d`Etudes Alexandrines
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Alexandrie 1914-1918 - Centre d`Etudes Alexandrines
Alexandrie 1914-1918 Le centenaire de la Grande Guerre est l’occasion d’évoquer Alexandrie 1914 - 1918 un pan méconnu de l’histoire d’Alexandrie, ce conflit mondial n’ayant pas épargné la ville. Cette exposition élaborée par le Centre d’Études Alexandrines, avec la participation de l’Université Senghor, et présentée par l’Institut Français d’Égypte à Alexandrie, retrace les destins croisés d’Alexandrins mobilisés, partis se battre en Europe et de soldats venus d’Europe pour combattre sur le front d’Orient. Alexandrie a joué en effet un rôle important en constituant l’une des bases arrière des Alliés aux Dardanelles : en amont du débarquement Cahier de l’Alexandrine Christine Sinano, Archives Ayoub/Centre d’Études Alexandrines l’image de la 1ère de couverture : Soldats et personnel hospitalier posant lors du repas dans les jardins de la campagne des Frères, hôpital Parmentier. Archives CEAlex. en Turquie, le 25 avril 1915, et en tant que ville-hôpital pendant les longs mois de batailles, les blessés et malades étant acheminés par les navires-hôpitaux. Documents d’archives, cartes postales, photographies, presse, sont autant de témoignages qui ont permis de reconstituer la vie des Alexandrins pendant ce conflit, d’Égyptiens enrôlés dans la guerre, mais aussi celle des Africains sub-sahariens, Australiens, Britanniques, Français, Indiens, Néo-Zélandais et Turcs qui se croisèrent à Alexandrie. Une exposition conçue par Nicole Garnier-Pelle et André Pelle, réalisée par André Pelle Centenaire de la Première Guerre mondiale Alexandrie, Institut français d’Égypte Du 13 novembre 2014 au 10 janvier 2015 Alexandrie 1914-1918 Dans le cadre de sa programmation culturelle et éducative, l’Institut français d’Égypte à Alexandrie se réjouit Une exposition conçue par Nicole Garnier-Pelle et André Pelle, réalisée par André Pelle d’accueillir l’exposition « Alexandrie 1914-1918 », produite spécialement à l’occasion des commémorations du centenaire de la Grande Guerre. Pendant trois mois, elle permettra à de nombreux publics, et notamment ceux des écoles et universités, de redécouvrir un événement majeur de notre histoire commune, resitué pour la première fois à partir de la ville d’Alexandrie. En accompagnement de cette belle exposition, l’Institut proposera des visites commentées dans les principaux lieux concernés, notamment les cimetières et les anciens hôpitaux, des conférences, des projections de films ou encore des lectures qui seront l’occasion d’amorcer une réflexion entre écrivains, artistes et citoyens des deux rives, sur l’héritage collectif laissé par ce conflit mondial, et également – on l’oublie trop souvent – proche-oriental. Loin de se réduire à une série d’événements figés dans les manuels d’histoire, la Grande Guerre, censée être « la Der des Ders », représente en effet un prisme d’analyse susceptible d’amener les générations actuelles à mieux comprendre les conflits d’aujourd’hui, en les resituant dans une perspective historique et de contribuer ainsi à se forger une vigilance critique. Centre d’Études Alexandrines/CNRS : Faruk Bilici, Professeur au département de Turc, Inalco, Chercheur en délégation au CEAlex/CNRS Colin Clement, Historien et traducteur Jean-Yves Empereur, Directeur Dominique Gogny, Historienne Marie-Delphine Martellière, Égyptologue, Ingénieur d’Étude André Pelle, Photographe, Ingénieur de Recherche Cécile Shaalan, Topographe-Cartographe, Ingénieur d’Étude Université Senghor : Jean-François Fau, Directeur du Département Culture Ce projet, amené à circuler dans d’autres centres culturels, a été réalisé grâce au travail remarquable fourni par deux partenaires incontournables et fidèles de l’Institut, le Centre d’Études Alexandrines avec l’appui de l’Université Senghor. Qu’ils en soient ici vivement remerciés ! Véronique Rieffel Directrice de l’Institut français d’Égypte à Alexandrie François-Marie Lahaye, Directeur du Département Santé Ministère de la Culture : Nicole Garnier-Pelle, Conservateur Général du Patrimoine chargée du musée Condé à Chantilly Université de Paris 7 : Anne-Marie Moulin, CNRS/UMR SPHERE (Sciences Philosophie Histoire) Institut français d’Égypte à Alexandrie : Véronique Rieffel, Directrice Réalisation PAO Mahitab Fathy, CEAlex ALPHAGRAPH - 03-4864052 Alexandrie en 1914 En 1914, Alexandrie compte un peu plus de 370 000 habitants (d’après le recensement effectué 7 ans plus tôt). Cette annéelà, après 22 ans de règne, le dernier khédive d’Égypte, Abbas Helmi II sera déposé par les Britanniques, car il soutenait trop, à leur goût, le mouvement nationaliste (ce qui n’empêchera pas le pays d’accéder à l’indépendance en 1922, sous le roi Fouad Ier). Depuis 1890, la ville est administrée par la Municipalité, corps de notables égyptiens et étrangers, qui gère le principal port d’Égypte, la grande porte du pays, pour les marchandises, mais aussi pour les voyageurs, avec toutes les compagnies de paquebots qui reliaient le pays au reste de la Méditerranée et à l’Atlantique. Alexandrie bruissait des clameurs de la Bourse du coton, de la Bourse des oignons, elle était le siège des Tribunaux mixtes (jusqu’en 1937), de la Société du Canal de Suez et aussi, une partie de l’année, du Gouvernement : pendant l’été, le souverain fuyait la canicule du Caire et se réfugiait dans le palais qu’il avait fait construire à Montazah en 1892, entraînant à sa suite tout le gouvernement, ses Ministres et le corps Plan d’Alexandrie en 1913 : on voit la forte concentration autour de la place Mancheya, à une époque où les faubourgs de l’Est ne sont guère urbanisés : Smouha est encore à la campagne. diplomatique étranger. La Municipalité gérait l’urbanisme de Publié dans l’Egyptian Directory, ca 1909. Archives Collèges de la Sainte-Famille. cette cité double, avec la vieille ville ottomane et les nouveaux quartiers européens en pleine expansion : on aménage le Quartier grec et Moharem Bey, on nivelle Chatby où l’on installe les cimetières, avec des projets d’élargissement de la corniche qui seront finalisés en 1920 ; un tramway sillonne tous les quartiers de la ville. Les institutions regroupent le Musée gréco-romain, la Bibliothèque municipale, dignes d’une mégapole méditerranéenne, des écoles dotées d’un système éducatif performant avec des établissements d’État, mais aussi une forte présence des ordres religieux enseignants pour la formation des élites en langue étrangère, le français dominant – mais aussi en allemand, en italien, en anglais –, tout un réseau d’hôpitaux qui allaient être réquisitionnés pour les besoins de la guerre. L’Égypte n’est pas officiellement en état de guerre, mais la vie des Alexandrins va être affectée par le conflit mondial, avec la montée des prix, la réduction du marché de la construction et le chômage qui en découlera. Jean-Yves Empereur Archives CEAlex. Les Alexandrins apprendront la déclaration de la guerre par les journaux : dans Al-Ahram, mais aussi dans des quotidiens publiés en grec et en italien pour les deux plus nombreuses communautés étrangères d’Alexandrie, et surtout dans la quinzaine de journaux francophones imprimés à Alexandrie, lue par toute la classe éduquée, quelle que soit sa nationalité. Les enfants des notables suivaient leurs études chez les Jésuites pour les garçons et, pour les filles, à Notre Dame-de-Sion ou à la Mère-de-Dieu. Depuis 1865, les rues d’Alexandrie étaient éclairées par la société E. Lebon qui distribuait aussi aux particuliers le gaz de ville et l’électricité. 1 Le départ des Français mobilisés sur le paquebot Lotus le 14 août 1914 Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. En France, les Chambres votent à l’unanimité l’union sacrée. Progressivement, de nombreux pays entrent en guerre : Belgique, Angleterre, Russie, Turquie… À Alexandrie, les Français d’Égypte, comme tous les citoyens français de 18 à 48 ans, sont concernés par la mobilisation générale, qui a été décrétée par la France dès le 1er août. La plupart ont déjà accompli leur service militaire en France, qui durait alors deux ans, puis trois ans à partir de 1913, et figurent sur les registres matricules des Bouches-du-Rhône, à Marseille, s’ils sont nés en Égypte. Certains, ayant omis de le faire, deviennent alors déserteurs s’ils ne se manifestent pas auprès du Consulat de France, mais une loi leur promettant l’amnistie en cas d’engagement, plusieurs vont spontanément rejoindre les rangs des Français mobilisés. Le 14 août 1914, deux paquebots de la Compagnie des Messageries Maritimes, le Lotus et le Calédonien, emportent vers Marseille les Français d’Égypte : 113 Alexandrins ne devaient pas revenir. La musique de l’Armée Britannique escortant les mobilisés. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Nicole Garnier Les mobilisés, accompagnés de leurs parents et amis, arrivent sur les quais des douanes. Union française des Anciens Combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Les mobilisés montant à bord du Lotus. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. 2 L’embarquement des mobilisés. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Le 14 août 1914, à bord du Lotus et du Calédonien, se trouvent des Français d’Alexandrie, qu’ils soient nés en Égypte, en Syrie ou en Palestine, qu’ils soient fonctionnaires français en poste à Alexandrie ou au Proche-Orient, ou qu’ils s’y soient fixés pour leur travail. Les familles et les amis accompagnent les soldats mobilisés jusqu’au port où les fanfares jouent des airs militaires. Le départ se fait dans l’enthousiasme patriotique, comme partout en France, car personne n’imagine que ce conflit va durer plus de quatre ans et faire des millions de morts. Il faut défendre le territoire national de l’invasion ennemie : après avoir envahi la Belgique, les Allemands sont début septembre aux portes de Paris, occupant le Nord et l’Est de la France, notamment l’Alsace et la Lorraine. Le voyage prendra plusieurs jours avant de rejoindre la France. Le Calédonien sera coulé plus tard pendant la guerre ; seul le Lotus refera la traversée après guerre. Le départ du Lotus. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Le Paquebot Lotus arrivant à Alexandrie. Archives A. Pelle. 3 Le départ des Français mobilisés sur le paquebot Lotus le 14 août 1914 Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. En France, les Chambres votent à l’unanimité l’union sacrée. Progressivement, de nombreux pays entrent en guerre : Belgique, Angleterre, Russie, Turquie… À Alexandrie, les Français d’Égypte, comme tous les citoyens français de 18 à 48 ans, sont concernés par la mobilisation générale, qui a été décrétée par la France dès le 1er août. La plupart ont déjà accompli leur service militaire en France, qui durait alors deux ans, puis trois ans à partir de 1913, et figurent sur les registres matricules des Bouches-du-Rhône, à Marseille, s’ils sont nés en Égypte. Certains, ayant omis de le faire, deviennent alors déserteurs s’ils ne se manifestent pas auprès du Consulat de France, mais une loi leur promettant l’amnistie en cas d’engagement, plusieurs vont spontanément rejoindre les rangs des Français mobilisés. Le 14 août 1914, deux paquebots de la Compagnie des Messageries Maritimes, le Lotus et le Calédonien, emportent vers Marseille les Français d’Égypte : 113 Alexandrins ne devaient pas revenir. La musique de l’Armée Britannique escortant les mobilisés. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Nicole Garnier Les mobilisés, accompagnés de leurs parents et amis, arrivent sur les quais des douanes. Union française des Anciens Combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Les mobilisés montant à bord du Lotus. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. 2 L’embarquement des mobilisés. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Le 14 août 1914, à bord du Lotus et du Calédonien, se trouvent des Français d’Alexandrie, qu’ils soient nés en Égypte, en Syrie ou en Palestine, qu’ils soient fonctionnaires français en poste à Alexandrie ou au Proche-Orient, ou qu’ils s’y soient fixés pour leur travail. Les familles et les amis accompagnent les soldats mobilisés jusqu’au port où les fanfares jouent des airs militaires. Le départ se fait dans l’enthousiasme patriotique, comme partout en France, car personne n’imagine que ce conflit va durer plus de quatre ans et faire des millions de morts. Il faut défendre le territoire national de l’invasion ennemie : après avoir envahi la Belgique, les Allemands sont début septembre aux portes de Paris, occupant le Nord et l’Est de la France, notamment l’Alsace et la Lorraine. Le voyage prendra plusieurs jours avant de rejoindre la France. Le Calédonien sera coulé plus tard pendant la guerre ; seul le Lotus refera la traversée après guerre. Le départ du Lotus. Union française des Anciens combattants et soldats, Alexandrie Égypte Jubilé 1919-1944, Livre d’Or, Le Périscope, 20 mai 1944. Archives CEAlex. Le Paquebot Lotus arrivant à Alexandrie. Archives A. Pelle. 3 Les Français d’Alexandrie dans les tranchées Les noms de 113 Français figurent sur les monuments aux Morts d’Alexandrie. La vie de 76 d’entre eux a pu être retracée grâce aux archives et à l’annuaire égyptien. 37 sont nés en Égypte, 21 en France, 5 en Turquie, 3 en Grèce, 2 en Syrie, 2 en Tunisie, 1 en Algérie, 1 au Maroc , 1 en Italie, 1 au Liban, 1 en Suisse, 1 est né en mer (voir carte). Les Français d’Alexandrie morts en 14-18 appartiennent pour la plupart aux classes sociales favorisées. La grande banque est présente avec Émile Masson, directeur des agences d’Égypte du Crédit Lyonnais, Georges Yver de La Bruchollerie, qui représente à Alexandrie la Banque de l’Union Parisienne, ou Forzinetti, chef de la correspondance du Comptoir d’Escompte de Paris. Parmi les commerçants qui font la richesse d’Alexandrie, on trouve un négociant-commerçant en tabacs, farines et peaux, Abram, un représentant de commerce, un négociant en charbons et manufactures, Haïm. Moïse Campos est issu d’une famille originaire de Livourne en Italie, courtiers en valeurs et marchandises. Salfati est agent d’assurances. L’industrie est représentée par Léon Glenat, de la Société Générale des Sucreries et Raffineries d’Égypte, ou P. Petit, secrétaire à l’Egyptian Salt and Soda Co Ltd. Il y a plusieurs ingénieurs comme Gorra Bey, expert agréé au Tribunal mixte. Parmi les professions libérales, citons des avocats, un médecin aide-major, un vétérinaire, un aide-pharmacien, un interprète, le libraire de la rue Shérif Pacha, Tranchées de « La Main » de Massiges (Marne). Photographie A. Pelle. Schuler, et deux étudiants, dont l’un en agriculture à Minieh. Certains appartiennent à de grandes familles alexandrines comme les Mazloum, ou encore le comte Jean de Zizinia, qui habite le quartier grec, rue des Abbassides. Signalons un artiste-peintre à Ramleh, Georges Demirgian, un dessinateur, Victor Guillet, et le frère de l’architecte Erlanger. Parmi les plus modestes, il y a un ajusteur, un garçon de restaurant, un chauffeur d’auto (dont le père est ingénieur), un expéditeur au Tribunal mixte, un commis archiviste à l’Administration du Quarantenaire, un caissier et dix employés, dont un des téléphones, un du Crédit Lyonnais, qui habite au Mex, et un employé de la Société Électrique de Tantah. Quelques rares artisans : deux cordonniers, un tailleur, Sarafian, un électricien. Le grand L’infanterie de l’armée française dans les tranchées. Archives A. Pelle. nombre de congrégations et d’établissements d’enseignement religieux explique la présence de treize prêtres, dont le R. P. Roux, supérieur de la Mission des Lazaristes, les RR. PP. Joseph Marie de Boissieu et François Garnier, enseignants au Collège des Jésuites Saint-François-Xavier. Citons aussi un professeur de sciences au lycée français, Georges Brul, et un journaliste parisien, René Metté, rédacteur français à l’Egyptian Gazette. Archives CEAlex, C. Shaalan. 4 Archives C. Fons. Archives A. Pelle. Plaque commémorative des Morts pour la France du cimetière de Chatby. Archives CEAlex, A. Pelle. La majorité sont morts au front en France (63) ou en Belgique (2), 14 dans la Marne, 8 dans la Meuse près de Verdun, 8 dans le Pas-de-Calais, 5 dans la Somme, 3 dans l’Aisne, 3 en Meurthe-et-Moselle, 3 dans les Vosges, 2 dans l’Oise, 3 en Alsace, 1 dans les Ardennes. 3 sont morts en Turquie, aux Dardanelles 2 à Seddul-Bahr et 1 à Gallipoli, 2 en Égypte, 1 en Grèce, 1 en Tunisie. 38 sont tués à l’ennemi, 14 meurent de leurs blessures, 6 sont portés disparus. 16 meurent de maladies contractées en service dans les hôpitaux de l’arrière : 2 de broncho-pneumonie en Égypte, 1 de pneumonie, 1 de tuberculose à Mansourah, 1 de typho-malaria-paludisme en Égypte, 3 de fièvre typhoïde, en Égypte, à Marseille et à Paris. Franzini meurt en mer au large de Calvi dans le torpillage du Balkan, le 16 août 1918, durant une permission. Le premier mort est Jacques Thuile, 23 ans, porté disparu le 1er septembre 1914 après un mois de guerre. Le lendemain, le libraire de la rue Shérif Pacha, Gustave Schuler, 33 ans, né à Lyon, est tué à Saint-Rémy dans les Vosges. L’année la plus meurtrière est 1914 : 14 morts en cinq mois, mais c’est 1915 qui a le record de décès en chiffre absolu : 28. Il y a 7 morts en 1916, 5 en 1917 et 15 en 1918 avec l’offensive finale. Après guerre, 4 décèdent en 1919 de maladie. René Marcel Erlanger meurt en France des suites de ses blessures, le 14 juillet 1920. Le plus jeune, Barbaza, avait 19 ans, Michel Sautereau allait avoir 20 ans un mois plus tard, Camille Poujades (en religion Frère Gabriel) venait d’avoir 20 ans, Firmin Maurel n’en avait pas 21, Hadj Karem El Cholti, petit-neveu de l’émir Abd el-Kader, en avait 25. Le plus âgé, l’interprète Charreyron, avait 49 ans, Auguste Gallois, avocat à la Cour d’Appel, en avait 46, et Moïse Campos, 43. Trois étaient engagés volontaires, Abram, Pech et le comte Jean de Zizinia. Signalons quelques héros : le R. P. Joseph de Boissieu, « agent de liaison, a été tué en portant un ordre en un point dangereux ». Le sergent Arvet-Touvet, « a fait preuve de beaucoup de courage (…) en portant la section qu’il commandait à l’assaut des tranchées ennemies ». Le caporal Jacob Bouskela « au cours des attaques, a dirigé son équipe (…) avec un calme et un sang-froid remarquables, infligeant des pertes à l’ennemi, gradé brave et courageux ». Navello « a porté les ordres en première ligne malgré les tirs les plus violents de l’ennemi ». Roch, « agent de liaison plein de courage et d’entrain, a assuré son service avec le plus grand sang-froid dans des conditions particulièrement difficiles ». Nicole Garnier Tranchées de « La Main » de Massiges (Marne). Photographie A. Pelle. Nécropole nationale de Douaumont-Vaux (Meuse). Photographie A. Pelle. Archives CEAlex, C. Shaalan. 5 Les Français d’Alexandrie dans les tranchées Les noms de 113 Français figurent sur les monuments aux Morts d’Alexandrie. La vie de 76 d’entre eux a pu être retracée grâce aux archives et à l’annuaire égyptien. 37 sont nés en Égypte, 21 en France, 5 en Turquie, 3 en Grèce, 2 en Syrie, 2 en Tunisie, 1 en Algérie, 1 au Maroc , 1 en Italie, 1 au Liban, 1 en Suisse, 1 est né en mer (voir carte). Les Français d’Alexandrie morts en 14-18 appartiennent pour la plupart aux classes sociales favorisées. La grande banque est présente avec Émile Masson, directeur des agences d’Égypte du Crédit Lyonnais, Georges Yver de La Bruchollerie, qui représente à Alexandrie la Banque de l’Union Parisienne, ou Forzinetti, chef de la correspondance du Comptoir d’Escompte de Paris. Parmi les commerçants qui font la richesse d’Alexandrie, on trouve un négociant-commerçant en tabacs, farines et peaux, Abram, un représentant de commerce, un négociant en charbons et manufactures, Haïm. Moïse Campos est issu d’une famille originaire de Livourne en Italie, courtiers en valeurs et marchandises. Salfati est agent d’assurances. L’industrie est représentée par Léon Glenat, de la Société Générale des Sucreries et Raffineries d’Égypte, ou P. Petit, secrétaire à l’Egyptian Salt and Soda Co Ltd. Il y a plusieurs ingénieurs comme Gorra Bey, expert agréé au Tribunal mixte. Parmi les professions libérales, citons des avocats, un médecin aide-major, un vétérinaire, un aide-pharmacien, un interprète, le libraire de la rue Shérif Pacha, Tranchées de « La Main » de Massiges (Marne). Photographie A. Pelle. Schuler, et deux étudiants, dont l’un en agriculture à Minieh. Certains appartiennent à de grandes familles alexandrines comme les Mazloum, ou encore le comte Jean de Zizinia, qui habite le quartier grec, rue des Abbassides. Signalons un artiste-peintre à Ramleh, Georges Demirgian, un dessinateur, Victor Guillet, et le frère de l’architecte Erlanger. Parmi les plus modestes, il y a un ajusteur, un garçon de restaurant, un chauffeur d’auto (dont le père est ingénieur), un expéditeur au Tribunal mixte, un commis archiviste à l’Administration du Quarantenaire, un caissier et dix employés, dont un des téléphones, un du Crédit Lyonnais, qui habite au Mex, et un employé de la Société Électrique de Tantah. Quelques rares artisans : deux cordonniers, un tailleur, Sarafian, un électricien. Le grand L’infanterie de l’armée française dans les tranchées. Archives A. Pelle. nombre de congrégations et d’établissements d’enseignement religieux explique la présence de treize prêtres, dont le R. P. Roux, supérieur de la Mission des Lazaristes, les RR. PP. Joseph Marie de Boissieu et François Garnier, enseignants au Collège des Jésuites Saint-François-Xavier. Citons aussi un professeur de sciences au lycée français, Georges Brul, et un journaliste parisien, René Metté, rédacteur français à l’Egyptian Gazette. Archives CEAlex, C. Shaalan. 4 Archives C. Fons. Archives A. Pelle. Plaque commémorative des Morts pour la France du cimetière de Chatby. Archives CEAlex, A. Pelle. La majorité sont morts au front en France (63) ou en Belgique (2), 14 dans la Marne, 8 dans la Meuse près de Verdun, 8 dans le Pas-de-Calais, 5 dans la Somme, 3 dans l’Aisne, 3 en Meurthe-et-Moselle, 3 dans les Vosges, 2 dans l’Oise, 3 en Alsace, 1 dans les Ardennes. 3 sont morts en Turquie, aux Dardanelles 2 à Seddul-Bahr et 1 à Gallipoli, 2 en Égypte, 1 en Grèce, 1 en Tunisie. 38 sont tués à l’ennemi, 14 meurent de leurs blessures, 6 sont portés disparus. 16 meurent de maladies contractées en service dans les hôpitaux de l’arrière : 2 de broncho-pneumonie en Égypte, 1 de pneumonie, 1 de tuberculose à Mansourah, 1 de typho-malaria-paludisme en Égypte, 3 de fièvre typhoïde, en Égypte, à Marseille et à Paris. Franzini meurt en mer au large de Calvi dans le torpillage du Balkan, le 16 août 1918, durant une permission. Le premier mort est Jacques Thuile, 23 ans, porté disparu le 1er septembre 1914 après un mois de guerre. Le lendemain, le libraire de la rue Shérif Pacha, Gustave Schuler, 33 ans, né à Lyon, est tué à Saint-Rémy dans les Vosges. L’année la plus meurtrière est 1914 : 14 morts en cinq mois, mais c’est 1915 qui a le record de décès en chiffre absolu : 28. Il y a 7 morts en 1916, 5 en 1917 et 15 en 1918 avec l’offensive finale. Après guerre, 4 décèdent en 1919 de maladie. René Marcel Erlanger meurt en France des suites de ses blessures, le 14 juillet 1920. Le plus jeune, Barbaza, avait 19 ans, Michel Sautereau allait avoir 20 ans un mois plus tard, Camille Poujades (en religion Frère Gabriel) venait d’avoir 20 ans, Firmin Maurel n’en avait pas 21, Hadj Karem El Cholti, petit-neveu de l’émir Abd el-Kader, en avait 25. Le plus âgé, l’interprète Charreyron, avait 49 ans, Auguste Gallois, avocat à la Cour d’Appel, en avait 46, et Moïse Campos, 43. Trois étaient engagés volontaires, Abram, Pech et le comte Jean de Zizinia. Signalons quelques héros : le R. P. Joseph de Boissieu, « agent de liaison, a été tué en portant un ordre en un point dangereux ». Le sergent Arvet-Touvet, « a fait preuve de beaucoup de courage (…) en portant la section qu’il commandait à l’assaut des tranchées ennemies ». Le caporal Jacob Bouskela « au cours des attaques, a dirigé son équipe (…) avec un calme et un sang-froid remarquables, infligeant des pertes à l’ennemi, gradé brave et courageux ». Navello « a porté les ordres en première ligne malgré les tirs les plus violents de l’ennemi ». Roch, « agent de liaison plein de courage et d’entrain, a assuré son service avec le plus grand sang-froid dans des conditions particulièrement difficiles ». Nicole Garnier Tranchées de « La Main » de Massiges (Marne). Photographie A. Pelle. Nécropole nationale de Douaumont-Vaux (Meuse). Photographie A. Pelle. Archives CEAlex, C. Shaalan. 5 Les Dardanelles Un Alexandrin dans les tranchées : le R. P. Garnier Jean-Claude François Garnier, né le 26 août 1887 à Cruet (Savoie), est en 1907 « étudiant ecclésiastique » en Angleterre, à Canterbury (Kent), Saint Mary’s College. Il est classé en 1908 dans le service armé ; soldat de 2e classe, il arrive au corps le 10 octobre 1907. Devenu soldat de 1re classe le 19 avril 1909, il est envoyé dans la disponibilité le 25 septembre 1908, un certificat de bonne conduite lui est accordé. Du 6 juin au 27 septembre 1910, il habite Saint-Hélier, sur l’île de Jersey (Angleterre), puis le 5 octobre à Jersey même, dans la Maison Saint-Louis. Le 8 octobre 1913, le R. P. Garnier fait sa rentrée au Collège SaintFrançois-Xavier à Alexandrie, un « collège d’enseignement secondaire, classique, moderne et commercial, rue AbdelMoncim » (1912 Egyptian Directory, p. 1381), il est régent du Collège des Jésuites d’Alexandrie et professeur de physiquechimie en 1913-1914. Lors de la mobilisation générale, il était probablement en France pour les vacances scolaires, car mobilisé le 2 août 1914, il arrive au corps le 3. Le 25 septembre 1914, infirmier militaire à l’hôpital militaire de Chambéry, il envoie à Alexandrie une carte postale représentant des chasseurs alpins se consacrant à des « manœuvres d’artillerie de montagne ». Passé au 17e R.I. le 2 février 1915, puis au 149e R.I. le 12 mars 1915, il est promu caporal le 24 mai 1915, puis sergent le 6 juin 1915. Sergent, il est porté disparu à Aix-Noulette près de Lens (Pas-de-Calais) le 26 septembre 1915, étant sorti de sa tranchée avec sa section : personne ne revint. Son décès est fixé à la date du 26 septembre 1915 par jugement déclaratif rendu le 11 mars 1921 par le tribunal de Chambéry. Mort pour la France, il avait 32 ans. Carte postale du sergent François Garnier, envoyée de l’hôpital militaire Jules Ferry de Chambéry, à son ami Charles Ayoub à Alexandrie, au collège Saint-François-Xavier, le 25 septembre 1914 : « Le jour même où je devais partir pour le champ de bataille, j’ai été nommé infirmier militaire. Je suis donc, actuellement du moins, hors de danger, loin des balles ennemies. Mais ce n’est pas pour ne rien faire. Pauvres blessés ! Que de souffrances ! » Archives CEAlex. Archives A. Pelle. Début 1915 : Britanniques et Français cherchent à sortir de l’ornière, la tactique défensive des Allemands ayant figé le front de la Belgique à la Suisse. Pour les déloger, les Alliés imaginent une attaque à revers, sur le flanc oriental, alors que les Russes appellent à l’aide contre les assauts de l’Empire ottoman. Premier Lord de l’Amirauté, Winston Churchill envisage de forcer les détroits des Dardanelles pour s’emparer d’Istanbul. En février 1915, il envoie une armada avec les plus grands cuirassés britanniques, de même que les Français qui dépêchent les bâtiments les plus modernes. Mais le 18 mars, les mines flottantes et dérivantes, les torpilles et les filets sous-marins turcs arrêtent l’incursion alliée, faisant exploser les fleurons des deux marines : canonnés par les Turcs conseillés par des instructeurs allemands depuis les hauteurs des détroits, sousmarins, dragueurs de mines, croiseurs et destroyers sont pris dans la nasse de cet étranglement de 1 500 mètres de largeur et le cuirassé français le Bouvet (118 m de longueur) heurta une mine qui le fit couler en moins d’une minute avec 648 marins. Deux bateaux anglais, les HMS Irresistible et Ocean connurent le même sort, tandis que d’autres bâtiments, tels que le Suffren et le Gaulois furent sévèrement endommagés. Cette grave défaite navale inattendue poussa le chef du War Office, Lord Kitchener – le vieux maréchal qui avait jadis pris Khartoum – à répondre aux vœux insistants de Winston Churchill d’engager des forces terrestres importantes pour forcer les lignes terrestres ennemies, mais cette retraite permit aux Ottomans de renforcer leurs batteries sur les hauteurs. Nicole Garnier Un document émouvant : la carte du R. P. François Garnier, tué au front le 26 septembre 1915. Il envoie du front à Alexandrie une carte postale des barricades dans le village d’Ablain-SaintNazaire (Pas-de-Calais) détruit par les bombardements et commente : « J’ai vu de mes yeux ce village il y a vingt jours, du haut de la colline de N.D. de Lorette. C’est la désolation. Du sanctuaire tant vénéré dans ces régions, il ne reste rien. Des trous de mine, des briques éparses, c’est tout ». Archives CEAlex. Détail de la « Carte pour suivre les opérations militaires Dardanelles, Mer de Marmara et Bosphore » de 1915. Archives BnF. Document fourni par l’auteur. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. La classe de chimie du Père Garnier. Charles Ayoub est au premier plan à gauche. Archives CEAlex. 6 Le collège Saint-François-Xavier. Archives CEAlex. « The Turkish gunners, fighting with German equipment, methods, and training, are showing the virility that the world thought they had lost forever over a century ago. » The War Illustratied, 15th May, 1915. Archives CEAlex. 7 Les Dardanelles Un Alexandrin dans les tranchées : le R. P. Garnier Jean-Claude François Garnier, né le 26 août 1887 à Cruet (Savoie), est en 1907 « étudiant ecclésiastique » en Angleterre, à Canterbury (Kent), Saint Mary’s College. Il est classé en 1908 dans le service armé ; soldat de 2e classe, il arrive au corps le 10 octobre 1907. Devenu soldat de 1re classe le 19 avril 1909, il est envoyé dans la disponibilité le 25 septembre 1908, un certificat de bonne conduite lui est accordé. Du 6 juin au 27 septembre 1910, il habite Saint-Hélier, sur l’île de Jersey (Angleterre), puis le 5 octobre à Jersey même, dans la Maison Saint-Louis. Le 8 octobre 1913, le R. P. Garnier fait sa rentrée au Collège SaintFrançois-Xavier à Alexandrie, un « collège d’enseignement secondaire, classique, moderne et commercial, rue AbdelMoncim » (1912 Egyptian Directory, p. 1381), il est régent du Collège des Jésuites d’Alexandrie et professeur de physiquechimie en 1913-1914. Lors de la mobilisation générale, il était probablement en France pour les vacances scolaires, car mobilisé le 2 août 1914, il arrive au corps le 3. Le 25 septembre 1914, infirmier militaire à l’hôpital militaire de Chambéry, il envoie à Alexandrie une carte postale représentant des chasseurs alpins se consacrant à des « manœuvres d’artillerie de montagne ». Passé au 17e R.I. le 2 février 1915, puis au 149e R.I. le 12 mars 1915, il est promu caporal le 24 mai 1915, puis sergent le 6 juin 1915. Sergent, il est porté disparu à Aix-Noulette près de Lens (Pas-de-Calais) le 26 septembre 1915, étant sorti de sa tranchée avec sa section : personne ne revint. Son décès est fixé à la date du 26 septembre 1915 par jugement déclaratif rendu le 11 mars 1921 par le tribunal de Chambéry. Mort pour la France, il avait 32 ans. Carte postale du sergent François Garnier, envoyée de l’hôpital militaire Jules Ferry de Chambéry, à son ami Charles Ayoub à Alexandrie, au collège Saint-François-Xavier, le 25 septembre 1914 : « Le jour même où je devais partir pour le champ de bataille, j’ai été nommé infirmier militaire. Je suis donc, actuellement du moins, hors de danger, loin des balles ennemies. Mais ce n’est pas pour ne rien faire. Pauvres blessés ! Que de souffrances ! » Archives CEAlex. Archives A. Pelle. Début 1915 : Britanniques et Français cherchent à sortir de l’ornière, la tactique défensive des Allemands ayant figé le front de la Belgique à la Suisse. Pour les déloger, les Alliés imaginent une attaque à revers, sur le flanc oriental, alors que les Russes appellent à l’aide contre les assauts de l’Empire ottoman. Premier Lord de l’Amirauté, Winston Churchill envisage de forcer les détroits des Dardanelles pour s’emparer d’Istanbul. En février 1915, il envoie une armada avec les plus grands cuirassés britanniques, de même que les Français qui dépêchent les bâtiments les plus modernes. Mais le 18 mars, les mines flottantes et dérivantes, les torpilles et les filets sous-marins turcs arrêtent l’incursion alliée, faisant exploser les fleurons des deux marines : canonnés par les Turcs conseillés par des instructeurs allemands depuis les hauteurs des détroits, sousmarins, dragueurs de mines, croiseurs et destroyers sont pris dans la nasse de cet étranglement de 1 500 mètres de largeur et le cuirassé français le Bouvet (118 m de longueur) heurta une mine qui le fit couler en moins d’une minute avec 648 marins. Deux bateaux anglais, les HMS Irresistible et Ocean connurent le même sort, tandis que d’autres bâtiments, tels que le Suffren et le Gaulois furent sévèrement endommagés. Cette grave défaite navale inattendue poussa le chef du War Office, Lord Kitchener – le vieux maréchal qui avait jadis pris Khartoum – à répondre aux vœux insistants de Winston Churchill d’engager des forces terrestres importantes pour forcer les lignes terrestres ennemies, mais cette retraite permit aux Ottomans de renforcer leurs batteries sur les hauteurs. Nicole Garnier Un document émouvant : la carte du R. P. François Garnier, tué au front le 26 septembre 1915. Il envoie du front à Alexandrie une carte postale des barricades dans le village d’Ablain-SaintNazaire (Pas-de-Calais) détruit par les bombardements et commente : « J’ai vu de mes yeux ce village il y a vingt jours, du haut de la colline de N.D. de Lorette. C’est la désolation. Du sanctuaire tant vénéré dans ces régions, il ne reste rien. Des trous de mine, des briques éparses, c’est tout ». Archives CEAlex. Détail de la « Carte pour suivre les opérations militaires Dardanelles, Mer de Marmara et Bosphore » de 1915. Archives BnF. Document fourni par l’auteur. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. La classe de chimie du Père Garnier. Charles Ayoub est au premier plan à gauche. Archives CEAlex. 6 Le collège Saint-François-Xavier. Archives CEAlex. « The Turkish gunners, fighting with German equipment, methods, and training, are showing the virility that the world thought they had lost forever over a century ago. » The War Illustratied, 15th May, 1915. Archives CEAlex. 7 Les Britanniques à Alexandrie À partir du 25 mars et jusqu’au 6 août, les fantassins britanniques, renforcés par d’importants contingents australiens, néo-zélandais – les ANZAC –, indiens débarquèrent avec les troupes françaises pour tenter de prendre d’assaut les canons turcs, mais en vain. La bataille des Dardanelles fut l’une des plus grandes boucheries de la Première Guerre mondiale, coûtant la vie à plus de 240 000 soldats du côté des Alliés et de 210 000 du côté turc. En janvier 1916, les dernières troupes quittèrent les Dardanelles pour Salonique, sans avoir pu forcer le verrou des Dardanelles. Pendant le conflit, Alexandrie servit de base de repli, de regroupement des troupes, de centre de soins pour les blessés, de lieu d’enterrement pour les morts. À Gallipoli, au fond des détroits, on visite aussi un immense cimetière qui témoigne de la violence de ces combats inutiles. Jamais les armées alliées ne purent s’approcher d’Istanbul. Soldats britanniques à Alexandrie. Archives L. Borel. « C'était une de ces pénibles journées d'attente, qui semblent si fréquentes dans l'armée. Les hommes ont débarqué et se sont assis sur le quai jusqu'à 4 heures, ne faisant absolument rien. Il semble y avoir eu un beau sac de noeuds quant à notre arrivée. En tout cas, nous sommes finalement partis pour le camp à environ 5 miles de la ville, sur une bande de désert entre un lac salé et la mer, avec des tas de sel et des moellons autour, à un endroit appelé Mex. Le camp était environ à un mile et demi audelà du terminus du train ». O. Creighton's Avec la 29e Division à Gallipoli. Jean-Yves Empereur « Les héros se précipitent », Les héros des Dardanelles, Les livres roses pour la jeunesse Librairie Larousse, 1916. Archives A. Pelle. Campement de Sidi Bishr. Archives CEAlex. Soldat français lisant la dernière lettre qu’il recevra de sa famille avant son embarquement. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. L’occupation britannique de l’Égypte qui suivit le bombardement catastrophique d’Alexandrie en juillet 1882 a amené, paradoxalement, au rayonnement de la ville. Tandis que l’ensemble du pays restait officiellement province de l’Empire ottoman, le « protectorat déguisé » du contrôle britannique permettait le développement des affaires et de l’immobilier. Néanmoins, le nombre de citoyens britanniques à Alexandrie, environ 5 000 selon le recensement de 1907, restait inférieur à celui d’autres communautés étrangères. Après la déclaration de guerre des Britanniques et des Français à la Turquie ottomane le 3 novembre 1914, le statut de l’Égypte et d’Alexandrie allait évidemment changer. Avec l’accord de la France, le 17 décembre 1914, l’Égypte devenait pleinement un Protectorat britannique et la suzeraineté ottomane disparaissait. Le but premier des Anglais dans le pays était de défendre le Canal de Suez, qui était vu comme l’artère vitale des communications impériales britanniques avec l’Inde et l’Orient. De plus, une fois l’armée d’occupation britannique, environ 6 000 hommes, débarquée en Europe pour combattre sur le front occidental, l’Égypte était transformée en terrain d’entraînement pour les troupes de réserve du Commonwealth et les troupes indiennes. En mars 1915, la base des forces méditerranéennes était transférée à Alexandrie depuis Moudros sur l’île de Lemnos, et la ville devenait un camp et un centre hospitalier pour les Alliés. Après la campagne de Gallipoli de 1915, Alexandrie resta un important centre hospitalier durant les opérations ultérieures dans le désert occidental contre le soulèvement Sanussi et en Palestine, et le port était occupé par des navires-hôpitaux et des transports de troupe amenant des renforts et transférant des malades et des blessés depuis les différents théâtres d’opérations environnants. Colin Clement Archives CEAlex. Baraques de Moustapha Pacha, Alexandrie. Archives CEAlex. Baraques de Moustapha Pacha, Alexandrie. Archives CEAlex. The War Illustrated, 15th May, 1915. Archives CEAlex. « Turkish troops drilling at Taxim Barracks, Constantinople, before proceeding to Gallipoli Peninsula to meet the allied forces. » The War Illustratied, 15th May, 1915. Archives CEAlex. 8 Vue aérienne du camp de Sidi Bishr. Archives CEAlex. Campement de Chatby. Archives C. Shaalan. Au revers de cette photographie sont portées ces indications : 1 : Jetée où ont lieu les défilés militaires précédant les cérémonies religieuses 2 : Le mess des sergents 3 : La gare 4 : Le fort Égyptien (le vieux phare d’Alexandrie, une des sept merveilles du monde, est censé être là) 5 : Les vieilles catacombes 9 Les Britanniques à Alexandrie À partir du 25 mars et jusqu’au 6 août, les fantassins britanniques, renforcés par d’importants contingents australiens, néo-zélandais – les ANZAC –, indiens débarquèrent avec les troupes françaises pour tenter de prendre d’assaut les canons turcs, mais en vain. La bataille des Dardanelles fut l’une des plus grandes boucheries de la Première Guerre mondiale, coûtant la vie à plus de 240 000 soldats du côté des Alliés et de 210 000 du côté turc. En janvier 1916, les dernières troupes quittèrent les Dardanelles pour Salonique, sans avoir pu forcer le verrou des Dardanelles. Pendant le conflit, Alexandrie servit de base de repli, de regroupement des troupes, de centre de soins pour les blessés, de lieu d’enterrement pour les morts. À Gallipoli, au fond des détroits, on visite aussi un immense cimetière qui témoigne de la violence de ces combats inutiles. Jamais les armées alliées ne purent s’approcher d’Istanbul. Soldats britanniques à Alexandrie. Archives L. Borel. « C'était une de ces pénibles journées d'attente, qui semblent si fréquentes dans l'armée. Les hommes ont débarqué et se sont assis sur le quai jusqu'à 4 heures, ne faisant absolument rien. Il semble y avoir eu un beau sac de noeuds quant à notre arrivée. En tout cas, nous sommes finalement partis pour le camp à environ 5 miles de la ville, sur une bande de désert entre un lac salé et la mer, avec des tas de sel et des moellons autour, à un endroit appelé Mex. Le camp était environ à un mile et demi audelà du terminus du train ». O. Creighton's Avec la 29e Division à Gallipoli. Jean-Yves Empereur « Les héros se précipitent », Les héros des Dardanelles, Les livres roses pour la jeunesse Librairie Larousse, 1916. Archives A. Pelle. Campement de Sidi Bishr. Archives CEAlex. Soldat français lisant la dernière lettre qu’il recevra de sa famille avant son embarquement. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. L’occupation britannique de l’Égypte qui suivit le bombardement catastrophique d’Alexandrie en juillet 1882 a amené, paradoxalement, au rayonnement de la ville. Tandis que l’ensemble du pays restait officiellement province de l’Empire ottoman, le « protectorat déguisé » du contrôle britannique permettait le développement des affaires et de l’immobilier. Néanmoins, le nombre de citoyens britanniques à Alexandrie, environ 5 000 selon le recensement de 1907, restait inférieur à celui d’autres communautés étrangères. Après la déclaration de guerre des Britanniques et des Français à la Turquie ottomane le 3 novembre 1914, le statut de l’Égypte et d’Alexandrie allait évidemment changer. Avec l’accord de la France, le 17 décembre 1914, l’Égypte devenait pleinement un Protectorat britannique et la suzeraineté ottomane disparaissait. Le but premier des Anglais dans le pays était de défendre le Canal de Suez, qui était vu comme l’artère vitale des communications impériales britanniques avec l’Inde et l’Orient. De plus, une fois l’armée d’occupation britannique, environ 6 000 hommes, débarquée en Europe pour combattre sur le front occidental, l’Égypte était transformée en terrain d’entraînement pour les troupes de réserve du Commonwealth et les troupes indiennes. En mars 1915, la base des forces méditerranéennes était transférée à Alexandrie depuis Moudros sur l’île de Lemnos, et la ville devenait un camp et un centre hospitalier pour les Alliés. Après la campagne de Gallipoli de 1915, Alexandrie resta un important centre hospitalier durant les opérations ultérieures dans le désert occidental contre le soulèvement Sanussi et en Palestine, et le port était occupé par des navires-hôpitaux et des transports de troupe amenant des renforts et transférant des malades et des blessés depuis les différents théâtres d’opérations environnants. Colin Clement Archives CEAlex. Baraques de Moustapha Pacha, Alexandrie. Archives CEAlex. Baraques de Moustapha Pacha, Alexandrie. Archives CEAlex. The War Illustrated, 15th May, 1915. Archives CEAlex. « Turkish troops drilling at Taxim Barracks, Constantinople, before proceeding to Gallipoli Peninsula to meet the allied forces. » The War Illustratied, 15th May, 1915. Archives CEAlex. 8 Vue aérienne du camp de Sidi Bishr. Archives CEAlex. Campement de Chatby. Archives C. Shaalan. Au revers de cette photographie sont portées ces indications : 1 : Jetée où ont lieu les défilés militaires précédant les cérémonies religieuses 2 : Le mess des sergents 3 : La gare 4 : Le fort Égyptien (le vieux phare d’Alexandrie, une des sept merveilles du monde, est censé être là) 5 : Les vieilles catacombes 9 Les Égyptiens et la guerre Le Commonwealth L’occupation britannique de l’Égypte en 1882 a entraîné l’arrivée, non seulement de citoyens du Royaume-Uni, mais aussi de populations venant de tout l’Empire. Ainsi, à la déclaration de guerre, Alexandrie abritait déjà des sujets britanniques venus d’horizons différents, dont une majorité de Malte. La ville devait en outre accueillir un afflux de soldats, principalement d’Inde, d’Australie et de Nouvelle-Zélande. Presque un demi-million de militaires issus de l’Empire britannique est passé par l’Égypte durant la Première Guerre mondiale. Initialement, ces soldats, destinés à combattre sur les fronts européens, étaient basés en Égypte en raison des difficultés d’entraînement et de logistique en Angleterre. Avec le début de la campagne de Gallipoli, ils affluèrent bientôt à Alexandrie en se rendant au combat et en revenant, en nombre croissant, dans les nombreux établissements hospitaliers de la ville. L’afflux soudain et massif de troupes causa l’explosion des prix des produits de base, rendant la vie difficile aux populations locales, et nourrit un commerce florissant de la drogue, de l’alcool et de la prostitution. La diffusion des maladies vénériennes devint un problème sérieux pour les autorités militaires et civiles, et les troupes de l’ANZAC résumaient ainsi leur nouveau pays d’accueil : « soleil, sable et syphilis ». Il y eut une réaction de colère de la part des citoyens les plus conservateurs des ports et des villes de garnison comme Alexandrie, les journaux locaux déplorant la contamination de la société par l’immoralité étrangère. Ce mécontentement allait nourrir le mouvement nationaliste qui exploserait après guerre. Bien que synonyme d’Australie et Nouvelle-Zélande, l’ANZAC (« Australian and New Zealand Army Corps ») était en fait un corps multinational. En plus des nombreux officiers britanniques commandant les différents corps et divisions, l’ANZAC comprenait la 7e Brigade d’Artillerie de Montagne Indienne, le Corps des Carabiniers des Planteurs de Ceylan et le Corps des Mules de Sion. Ce dernier corps d’armée était formé à l’origine de Juifs déportés en Égypte par les Ottomans et désireux d’assister la Grande-Bretagne dans la libération de la Palestine. Navire du Commonwealth dans le port d’Alexandrie. Archives C. Shaalan. Archives Ayoub-Boulad. Prise de vue réalisée depuis l’hôpital Pasteur d’un campement australien. Archives CEAlex. Colin Clement Officiellement, l’Égypte ne fait pas partie des belligérants de la Première Guerre mondiale. Néanmoins, sous protectorat britannique et soumis à la loi martiale, le pays tout entier va participer à la guerre. Si certains Égyptiens choisissent d’aller se battre, à l’instar de ces anciens élèves de l’asile Saint-Joseph engagés volontaires au service de la France, c’est en tant que manœuvres que beaucoup de paysans égyptiens sont enrôlés par les Britanniques pour constituer The Egyptian Labour Corps. Ces unités de travail doivent soulager les combattants de certaines contingences matérielles telles que la construction de chemins de fer, d’oléoducs, le terrassement des tranchées, l’entretien des routes, le déchargement des bateaux, l’assainissement des installations militaires… Le nombre total d’Égyptiens employés durant la guerre est discuté, mais il atteindrait plusieurs dizaines de milliers d’hommes, déployés tant au Proche-Orient, qu’à Salonique, aux Dardanelles ou encore en Europe. Beaucoup mourront de maladie, d’épuisement, fauchés dans les combats ou victimes des bombardements. Ainsi trouve-t-on, dans plusieurs cimetières britanniques en France ou en Belgique, les tombes de ces travailleurs égyptiens venus soutenir les « poilus », jusque dans la Somme, pour 7 piastres par jour. Une autre unité d’action jouera un rôle essentiel dans le succès militaire de l’armée britannique lors des campagnes du Sinaï et de Palestine, The Egyptian Camel Transport Corps, active de 1914 à 1919 et ne comptant pas moins de 170 000 chameliers égyptiens qui transportèrent des tonnes de ravitaillements dans des conditions souvent extrêmes. Enfin, en mars 1916, est créée The Egyptian Expeditionary Force, constituée de soldats britanniques et égyptiens. Envoyés en partie sur le front occidental en 1918, ces contingents sont renforcés par la suite par des troupes venant des Indes britanniques, d’Australie, de Nouvelle-Zélande, mais aussi de France et d’Italie. Dévolue à la défense de l’Égypte dans un premier temps, la EEF sera un acteur majeur dans la conquête de la Palestine et la défaite des Ottomans au Proche-Orient. Engagés volontaires pour la France de l’Asile Saint-Joseph (Externat Saint-Joseph, Moharem Bey). Archives Ayoub-Boulad. Péronne (Somme) cimetière militaire britannique de la Chapelette, trois membres de l'Egyptian Labour Corps y reposent. Photographies A. Pelle. Cimetière militaire du Commonwealth. Archives CEAlex, A. Pelle. Insigne du Egyptian Labour Corps. Des troupes de l’ANZAC aux Dardanelles. Archives Ayoub-Boulad. 10 Insigne du Camel Transport Corps. « Egyptian Labor On Dock In France ». Archives G. Grantham Bain Collection, Library of Congress. Imperial War Museums. 11 Les Égyptiens et la guerre Le Commonwealth L’occupation britannique de l’Égypte en 1882 a entraîné l’arrivée, non seulement de citoyens du Royaume-Uni, mais aussi de populations venant de tout l’Empire. Ainsi, à la déclaration de guerre, Alexandrie abritait déjà des sujets britanniques venus d’horizons différents, dont une majorité de Malte. La ville devait en outre accueillir un afflux de soldats, principalement d’Inde, d’Australie et de Nouvelle-Zélande. Presque un demi-million de militaires issus de l’Empire britannique est passé par l’Égypte durant la Première Guerre mondiale. Initialement, ces soldats, destinés à combattre sur les fronts européens, étaient basés en Égypte en raison des difficultés d’entraînement et de logistique en Angleterre. Avec le début de la campagne de Gallipoli, ils affluèrent bientôt à Alexandrie en se rendant au combat et en revenant, en nombre croissant, dans les nombreux établissements hospitaliers de la ville. L’afflux soudain et massif de troupes causa l’explosion des prix des produits de base, rendant la vie difficile aux populations locales, et nourrit un commerce florissant de la drogue, de l’alcool et de la prostitution. La diffusion des maladies vénériennes devint un problème sérieux pour les autorités militaires et civiles, et les troupes de l’ANZAC résumaient ainsi leur nouveau pays d’accueil : « soleil, sable et syphilis ». Il y eut une réaction de colère de la part des citoyens les plus conservateurs des ports et des villes de garnison comme Alexandrie, les journaux locaux déplorant la contamination de la société par l’immoralité étrangère. Ce mécontentement allait nourrir le mouvement nationaliste qui exploserait après guerre. Bien que synonyme d’Australie et Nouvelle-Zélande, l’ANZAC (« Australian and New Zealand Army Corps ») était en fait un corps multinational. En plus des nombreux officiers britanniques commandant les différents corps et divisions, l’ANZAC comprenait la 7e Brigade d’Artillerie de Montagne Indienne, le Corps des Carabiniers des Planteurs de Ceylan et le Corps des Mules de Sion. Ce dernier corps d’armée était formé à l’origine de Juifs déportés en Égypte par les Ottomans et désireux d’assister la Grande-Bretagne dans la libération de la Palestine. Navire du Commonwealth dans le port d’Alexandrie. Archives C. Shaalan. Archives Ayoub-Boulad. Prise de vue réalisée depuis l’hôpital Pasteur d’un campement australien. Archives CEAlex. Colin Clement Officiellement, l’Égypte ne fait pas partie des belligérants de la Première Guerre mondiale. Néanmoins, sous protectorat britannique et soumis à la loi martiale, le pays tout entier va participer à la guerre. Si certains Égyptiens choisissent d’aller se battre, à l’instar de ces anciens élèves de l’asile Saint-Joseph engagés volontaires au service de la France, c’est en tant que manœuvres que beaucoup de paysans égyptiens sont enrôlés par les Britanniques pour constituer The Egyptian Labour Corps. Ces unités de travail doivent soulager les combattants de certaines contingences matérielles telles que la construction de chemins de fer, d’oléoducs, le terrassement des tranchées, l’entretien des routes, le déchargement des bateaux, l’assainissement des installations militaires… Le nombre total d’Égyptiens employés durant la guerre est discuté, mais il atteindrait plusieurs dizaines de milliers d’hommes, déployés tant au Proche-Orient, qu’à Salonique, aux Dardanelles ou encore en Europe. Beaucoup mourront de maladie, d’épuisement, fauchés dans les combats ou victimes des bombardements. Ainsi trouve-t-on, dans plusieurs cimetières britanniques en France ou en Belgique, les tombes de ces travailleurs égyptiens venus soutenir les « poilus », jusque dans la Somme, pour 7 piastres par jour. Une autre unité d’action jouera un rôle essentiel dans le succès militaire de l’armée britannique lors des campagnes du Sinaï et de Palestine, The Egyptian Camel Transport Corps, active de 1914 à 1919 et ne comptant pas moins de 170 000 chameliers égyptiens qui transportèrent des tonnes de ravitaillements dans des conditions souvent extrêmes. Enfin, en mars 1916, est créée The Egyptian Expeditionary Force, constituée de soldats britanniques et égyptiens. Envoyés en partie sur le front occidental en 1918, ces contingents sont renforcés par la suite par des troupes venant des Indes britanniques, d’Australie, de Nouvelle-Zélande, mais aussi de France et d’Italie. Dévolue à la défense de l’Égypte dans un premier temps, la EEF sera un acteur majeur dans la conquête de la Palestine et la défaite des Ottomans au Proche-Orient. Engagés volontaires pour la France de l’Asile Saint-Joseph (Externat Saint-Joseph, Moharem Bey). Archives Ayoub-Boulad. Péronne (Somme) cimetière militaire britannique de la Chapelette, trois membres de l'Egyptian Labour Corps y reposent. Photographies A. Pelle. Cimetière militaire du Commonwealth. Archives CEAlex, A. Pelle. Insigne du Egyptian Labour Corps. Des troupes de l’ANZAC aux Dardanelles. Archives Ayoub-Boulad. 10 Insigne du Camel Transport Corps. « Egyptian Labor On Dock In France ». Archives G. Grantham Bain Collection, Library of Congress. Imperial War Museums. 11 Partout en Égypte, des civils se distinguent durant la Grande Guerre par leur dévouement. À Alexandrie, par exemple, dès 1914, les élèves du collège Sainte-Catherine décident l’abandon des prix au bénéfice des Œuvres de guerre françaises, pécule auquel s’ajouteront leurs oboles de chaque dimanche, et ce jusqu’en 1919. Grâce à eux, 100 000 cigarettes seront envoyées aux soldats français, ainsi que des vêtements et des chaussures destinés aux orphelins et nécessiteux européens. Sur place, ils visitent les convalescents, en particulier ceux de l’hôpital Parmentier. D’autre part, de nombreuses femmes vont revêtir leurs tenues d’infirmières et se mettre au service des malades et des blessés aux côtés des médecins, des dames de la Croix-Rouge et de tout un personnel hospitalier mobilisé pour faire face à l’afflux des rescapés durant la terrible bataille des Dardanelles. Plusieurs d’entre elles deviendront marraines de guerre. Certaines dames de la Haute Société, quant à elles, rendent régulièrement visite aux soldats hospitalisés ou cantonnés et les réconfortent en leur apportant cigarettes et douceurs, comme ils l’évoquent avec gratitude dans leur correspondance. Les camps de prisonniers turcs à Alexandrie Une partie du personnel de l’hôpital grec d’Alexandrie photographié avec des soldats anglais. Archives Ayoub-Boulad. Marie-Delphine Martellière Le personnel de l’hôpital Parmentier installé dans la maison de campagne du collège SainteCatherine. Archives CEAlex. De 1915 à 1918, à l’occasion des différentes opérations militaires ottomanes en Palestine et dans le Sinaï, plusieurs dizaines de milliers d’officiers, soldats et civils furent prisonniers et conduits par les Alliés dans différents hôpitaux et camps en Égypte. Les hôpitaux et camps les plus importants se situent au Caire et alentour : Héliopolis, Qasr al-Nil, Abbasieh, la Citadelle, Maadi et Bilbis. Mais deux de ces camps se trouvent à Alexandrie : Râs el-Tîn et Sidi Bishr. Lors de la visite de la Croix-Rouge internationale en 1917, 70 civils ottomans se trouvaient dans le premier camp à côté de 400 Austro-allemands. Ces civils logés sous les tentes étaient livrés aux Britanniques comme prisonniers de guerre par le Chérif de La Mecque alors qu’ils faisaient le pèlerinage. Quant au camp turc de Sidi Bishr, 970 officiers, soldats et civils y sont internés. Naturellement ce nombre a beaucoup varié jusqu’à l’armistice de 1918, voire jusqu’au traité de Sèvres de 1920. Des soldats illettrés apprennent à lire et à écrire. Nombreux sont ceux qui apprennent aussi des langues, notamment le français. L’une des activités préférées des officiers était la lecture de journaux, notamment Le Temps et The Times, mais aussi des journaux égyptiens. Par la suite, ces officiers ont commencé à traduire et à rédiger des articles pour les publier dans des journaux qu’ils font paraître dans le camp. Certains titres connus sont : Esaret Albümü (Album de captivité), Nilüfer (Nénuphar), Sada (La voix), Türk Varlığı (L’existence turque), Yarın (Demain). Archives CEAlex, C. Shalaan. Faruk Bilici Baraques du Camp de Sidi Bishr. Archives CICR. Diplôme Souvenir du Collège Sainte-Catherine à Alexandrie avec la mention « Abandon des prix au profit des victimes de la guerre ». Archives CEAlex. 12 Extrait du carnet du commandement du camp de Sidi Bishr illustrant les gestes quotidiens des officiers et soldats. Ici : « Au camp, le matin : appel ; départ de la poste à Istanbul ». Cemaleddin Taşkıran, Ana Ben Ölmedim, Birinci Dünya Savaş ında Türk Esirleri, Türkiye İş Bankası Kültür Yayınları, İstanbul, 2001, p. 120, p.121. Photographie fournie par l’auteur. Tea Time à l’hôpital grec d’Alexandrie, des dames de l’aristocratie alexandrine rendent visite aux blessés anglais. Archives Ayoub-Boulad. François décrit à son frère Alphonse la belle ville d’Alexandrie et l’accueil chaleureux des habitants. Archives CEAlex. Représentation théâtrale à Sidi Bishr au bénéfice des victimes à Izmir après l’occupation grecque d’Izmir, février 1920. Diplôme délivré aux soldats turcs ayant appris à lire et à écrire dans les camps en Égypte par le Haut commandement britannique. Cemaleddin Taşkıran, Ana Ben Ölmedim, Birinci Dünya Savaş ında Türk Esirleri, Türkiye İş Bankası Kültür Yayınları, İstanbul, 2001, p. 123. Photographie fournie par l’auteur. Prisonniers turcs du camp de Sidi Bishr. Archives CICR. 13 Partout en Égypte, des civils se distinguent durant la Grande Guerre par leur dévouement. À Alexandrie, par exemple, dès 1914, les élèves du collège Sainte-Catherine décident l’abandon des prix au bénéfice des Œuvres de guerre françaises, pécule auquel s’ajouteront leurs oboles de chaque dimanche, et ce jusqu’en 1919. Grâce à eux, 100 000 cigarettes seront envoyées aux soldats français, ainsi que des vêtements et des chaussures destinés aux orphelins et nécessiteux européens. Sur place, ils visitent les convalescents, en particulier ceux de l’hôpital Parmentier. D’autre part, de nombreuses femmes vont revêtir leurs tenues d’infirmières et se mettre au service des malades et des blessés aux côtés des médecins, des dames de la Croix-Rouge et de tout un personnel hospitalier mobilisé pour faire face à l’afflux des rescapés durant la terrible bataille des Dardanelles. Plusieurs d’entre elles deviendront marraines de guerre. Certaines dames de la Haute Société, quant à elles, rendent régulièrement visite aux soldats hospitalisés ou cantonnés et les réconfortent en leur apportant cigarettes et douceurs, comme ils l’évoquent avec gratitude dans leur correspondance. Les camps de prisonniers turcs à Alexandrie Une partie du personnel de l’hôpital grec d’Alexandrie photographié avec des soldats anglais. Archives Ayoub-Boulad. Marie-Delphine Martellière Le personnel de l’hôpital Parmentier installé dans la maison de campagne du collège SainteCatherine. Archives CEAlex. De 1915 à 1918, à l’occasion des différentes opérations militaires ottomanes en Palestine et dans le Sinaï, plusieurs dizaines de milliers d’officiers, soldats et civils furent prisonniers et conduits par les Alliés dans différents hôpitaux et camps en Égypte. Les hôpitaux et camps les plus importants se situent au Caire et alentour : Héliopolis, Qasr al-Nil, Abbasieh, la Citadelle, Maadi et Bilbis. Mais deux de ces camps se trouvent à Alexandrie : Râs el-Tîn et Sidi Bishr. Lors de la visite de la Croix-Rouge internationale en 1917, 70 civils ottomans se trouvaient dans le premier camp à côté de 400 Austro-allemands. Ces civils logés sous les tentes étaient livrés aux Britanniques comme prisonniers de guerre par le Chérif de La Mecque alors qu’ils faisaient le pèlerinage. Quant au camp turc de Sidi Bishr, 970 officiers, soldats et civils y sont internés. Naturellement ce nombre a beaucoup varié jusqu’à l’armistice de 1918, voire jusqu’au traité de Sèvres de 1920. Des soldats illettrés apprennent à lire et à écrire. Nombreux sont ceux qui apprennent aussi des langues, notamment le français. L’une des activités préférées des officiers était la lecture de journaux, notamment Le Temps et The Times, mais aussi des journaux égyptiens. Par la suite, ces officiers ont commencé à traduire et à rédiger des articles pour les publier dans des journaux qu’ils font paraître dans le camp. Certains titres connus sont : Esaret Albümü (Album de captivité), Nilüfer (Nénuphar), Sada (La voix), Türk Varlığı (L’existence turque), Yarın (Demain). Archives CEAlex, C. Shalaan. Faruk Bilici Baraques du Camp de Sidi Bishr. Archives CICR. Diplôme Souvenir du Collège Sainte-Catherine à Alexandrie avec la mention « Abandon des prix au profit des victimes de la guerre ». Archives CEAlex. 12 Extrait du carnet du commandement du camp de Sidi Bishr illustrant les gestes quotidiens des officiers et soldats. Ici : « Au camp, le matin : appel ; départ de la poste à Istanbul ». Cemaleddin Taşkıran, Ana Ben Ölmedim, Birinci Dünya Savaş ında Türk Esirleri, Türkiye İş Bankası Kültür Yayınları, İstanbul, 2001, p. 120, p.121. Photographie fournie par l’auteur. Tea Time à l’hôpital grec d’Alexandrie, des dames de l’aristocratie alexandrine rendent visite aux blessés anglais. Archives Ayoub-Boulad. François décrit à son frère Alphonse la belle ville d’Alexandrie et l’accueil chaleureux des habitants. Archives CEAlex. Représentation théâtrale à Sidi Bishr au bénéfice des victimes à Izmir après l’occupation grecque d’Izmir, février 1920. Diplôme délivré aux soldats turcs ayant appris à lire et à écrire dans les camps en Égypte par le Haut commandement britannique. Cemaleddin Taşkıran, Ana Ben Ölmedim, Birinci Dünya Savaş ında Türk Esirleri, Türkiye İş Bankası Kültür Yayınları, İstanbul, 2001, p. 123. Photographie fournie par l’auteur. Prisonniers turcs du camp de Sidi Bishr. Archives CICR. 13 Le Monument aux Morts turcs à Sidi Bishr Constitué d’abord autour de treize officiers capturés en 1916 en Palestine, le Monument aux Morts turcs (şehitlik = martyrium) de Sidi Bishr date de 1941, puis sera restauré en 1968. Ce cimetière abrite 500 personnes dont un tout petit groupe d’officiers, mais surtout des soldats gradés (sergents) et simples appelés, des civils, mais aussi un grand nombre d’inconnus (meçhul). En 1921, en pleine Guerre d’indépendance turque, puis récemment encore (2012), une polémique a éclaté en Turquie accusant les Britanniques d’avoir utilisé à Sidi Bishr et dans d’autres camps turcs en Égypte le crésol (Crésyl) à haute dose, ce qui aurait provoqué la cécité et la mort de milliers de prisonniers. À la lecture des stèles, l’on constate en effet qu’un grand nombre de morts est enregistré dans les années 1918, 1919 et 1920. On peut se demander alors si les mauvais traitements n’ont pas entraîné la mort de beaucoup de soldats après l’armistice d’octobre 1918. Devant la statue en forme de baïonnette plantée au sol, sont inscrits en lettres noires deux vers tirés du célèbre poème Çanakkale Şehitlerine (Aux martyrs des Dardanelles) de Mehmet Akif Ersoy (1873-1936), auteur de l’hymne national turc : Vurulup tertemiz alnından uzanmış yatıyor Bir hilal uğruna Yarab ne guneşler batıyor ! (Touché par son innocent front, il dort allongé Ô Dieu, que de soleils disparaissent pour la gloire d’une lune !) Sur la stèle en ottoman à gauche de la baïonnette est également gravé, avec une écriture hésitante, un autre poème en ottoman à la gloire du soldat turc qui appelle à la lecture d’une prière (en l’occurrence la première sourate, Fatiha « ouverture » du Coran). Visité régulièrement par des Turcs, le cimetière est le lieu chaque année de cérémonies officielles. Cette carte témoigne des préparatifs à Alexandrie en amont de la bataille des Dardanelles. Entre le 1er et le 3 avril 1915, 137 navires ont jeté l’ancre dans le port ouest d’Alexandrie. Ces bâtiments transportaient les troupes et les matériels, en attente du débarquement aux Dardanelles. Cette flotte importante était composée à 68 % de navires anglais et navires de prise, et de 16 % de navires français. Les 22 navires français du Corps Expéditionnaire d’Orient (CEO) arrivèrent à Alexandrie entre le 27 et le 31 mars 1915, après une tentative d’installation de la base du CEO dans la rade de Moudros, sur l’île grecque de Lemnos. La configuration de la rade ne favorisant pas un débarquement aisé du matériel, les navires ont été redirigés vers Alexandrie, pour permettre une jonction avec les forces anglaises qui y concentraient également une grande partie de leurs effectifs. À Alexandrie, on déchargea les cales, avant de les regarnir des mêmes approvisionnements, mais dans un ordre différent. Entre le 11 et le 23 avril, ces navires français repartirent en quatre groupes, pour Moudros pour la plupart, en vue de la préparation finale du débarquement aux Dardanelles. Certains sont des navires militaires, d’autres sont des navires réquisitionnés, comme les navires de ligne, dont ceux de la compagnie française des Messageries Maritimes (l’Armand Bréhic, l’Australien, le Dumbea et le Magellan). Enfin, parmi les navires français figure le navire-hôpital Duguay-Trouin. D’autres bateaux, présents dans le port d’Alexandrie en avril 1915, seront ensuite transformés en navires-hôpitaux, tels que le Bien-Hoa, le Charles-Roux ou le Vinh-Long. Cécile Shaalan Répartition des Corps et Unités par bateau, extrait du Journal des Marches et Opérations du CEO, Site Mémoire des Hommes. Le Duguay-Trouin, croiseur-école d'application, inauguré en 1900, est transformé en navire-hôpital en juillet 1914 avec une capacité de 660 lits. Parti de Dunkerque à la fin février 1915, il gagne Alexandrie le 30 mars. Il effectue des rotations aux Dardanelles avec des escales à Alexandrie, Lemnos, Salonique et Bizerte. Archives CEAlex. Faruk Bilici Stèle commémorative aux Morts ottomans à Sidi Bishr. Archives CEAlex, A. Pelle. Monument aux Morts turcs de Sidi Bishr. Archives CEAlex, A. Pelle. 14 Navires stationnés dans le port d’Alexandrie, les 1-3 avril 1915 Bateau de 105 m mis à flot en 1880, le Bien-Hoa devient en 1914 un ravitailleur de l’Armée Navale. Parti de Toulon le 4 mars 1915 et après escale à Bizerte, il joint Lemnos le 17 mars. Il gagne Alexandrie 10 jours après, d’où il repart le 11 avril pour Moudros. Enfin, deux semaines après, il appareille pour le débarquement en Turquie. En juin 1915, le Bien-Hoa est inscrit sur la liste des navires-hôpitaux après transformation. Il peut transporter 470 malades ou blessés répartis en deux batteries, haute et basse en fonction des pathologies, bien séparées des installations nautiques. Il sera condamné en 1923. Le sergent Ernest Marcel, natif des Vosges et enterré à Alexandrie, est mort à son bord le 14 mai 1915. Archives CEAlex. Carte de l’« État et situation des navires stationnés dans le port d’Alexandrie (Expédition des Dardanelles) les 1-3 avril 1915 », extraite de l’Atlas historique de la ville et des ports d'Alexandrie de Gaston Jondet (Le Caire, 1921, pl. LI). Archives CEAlex. Les 137 navires sont localisés, orientés et identifiés par un numéro qui renvoie à la liste des navires. Certains de ces bateaux sont à quai, tandis que d’autres ont déjà réalisé leur déchargement ou attendent une place disponible sur les quais. Ainsi le 5 avril 1915, « les autorités anglaises ayant demandé pour leur propre usage l’utilisation de certains quais, plusieurs navires en déchargement (Hérault [n°51], Armand Bréhic [n°49], Ceylan [n°52]) ont dû quitter inopinément le quai où ils se trouvaient et aller mouiller en rade, ce qui retarde notablement les opérations » (Journal des Marches et Opérations du CEO, Réf. 26 N 75/1). 15 Le Monument aux Morts turcs à Sidi Bishr Constitué d’abord autour de treize officiers capturés en 1916 en Palestine, le Monument aux Morts turcs (şehitlik = martyrium) de Sidi Bishr date de 1941, puis sera restauré en 1968. Ce cimetière abrite 500 personnes dont un tout petit groupe d’officiers, mais surtout des soldats gradés (sergents) et simples appelés, des civils, mais aussi un grand nombre d’inconnus (meçhul). En 1921, en pleine Guerre d’indépendance turque, puis récemment encore (2012), une polémique a éclaté en Turquie accusant les Britanniques d’avoir utilisé à Sidi Bishr et dans d’autres camps turcs en Égypte le crésol (Crésyl) à haute dose, ce qui aurait provoqué la cécité et la mort de milliers de prisonniers. À la lecture des stèles, l’on constate en effet qu’un grand nombre de morts est enregistré dans les années 1918, 1919 et 1920. On peut se demander alors si les mauvais traitements n’ont pas entraîné la mort de beaucoup de soldats après l’armistice d’octobre 1918. Devant la statue en forme de baïonnette plantée au sol, sont inscrits en lettres noires deux vers tirés du célèbre poème Çanakkale Şehitlerine (Aux martyrs des Dardanelles) de Mehmet Akif Ersoy (1873-1936), auteur de l’hymne national turc : Vurulup tertemiz alnından uzanmış yatıyor Bir hilal uğruna Yarab ne guneşler batıyor ! (Touché par son innocent front, il dort allongé Ô Dieu, que de soleils disparaissent pour la gloire d’une lune !) Sur la stèle en ottoman à gauche de la baïonnette est également gravé, avec une écriture hésitante, un autre poème en ottoman à la gloire du soldat turc qui appelle à la lecture d’une prière (en l’occurrence la première sourate, Fatiha « ouverture » du Coran). Visité régulièrement par des Turcs, le cimetière est le lieu chaque année de cérémonies officielles. Cette carte témoigne des préparatifs à Alexandrie en amont de la bataille des Dardanelles. Entre le 1er et le 3 avril 1915, 137 navires ont jeté l’ancre dans le port ouest d’Alexandrie. Ces bâtiments transportaient les troupes et les matériels, en attente du débarquement aux Dardanelles. Cette flotte importante était composée à 68 % de navires anglais et navires de prise, et de 16 % de navires français. Les 22 navires français du Corps Expéditionnaire d’Orient (CEO) arrivèrent à Alexandrie entre le 27 et le 31 mars 1915, après une tentative d’installation de la base du CEO dans la rade de Moudros, sur l’île grecque de Lemnos. La configuration de la rade ne favorisant pas un débarquement aisé du matériel, les navires ont été redirigés vers Alexandrie, pour permettre une jonction avec les forces anglaises qui y concentraient également une grande partie de leurs effectifs. À Alexandrie, on déchargea les cales, avant de les regarnir des mêmes approvisionnements, mais dans un ordre différent. Entre le 11 et le 23 avril, ces navires français repartirent en quatre groupes, pour Moudros pour la plupart, en vue de la préparation finale du débarquement aux Dardanelles. Certains sont des navires militaires, d’autres sont des navires réquisitionnés, comme les navires de ligne, dont ceux de la compagnie française des Messageries Maritimes (l’Armand Bréhic, l’Australien, le Dumbea et le Magellan). Enfin, parmi les navires français figure le navire-hôpital Duguay-Trouin. D’autres bateaux, présents dans le port d’Alexandrie en avril 1915, seront ensuite transformés en navires-hôpitaux, tels que le Bien-Hoa, le Charles-Roux ou le Vinh-Long. Cécile Shaalan Répartition des Corps et Unités par bateau, extrait du Journal des Marches et Opérations du CEO, Site Mémoire des Hommes. Le Duguay-Trouin, croiseur-école d'application, inauguré en 1900, est transformé en navire-hôpital en juillet 1914 avec une capacité de 660 lits. Parti de Dunkerque à la fin février 1915, il gagne Alexandrie le 30 mars. Il effectue des rotations aux Dardanelles avec des escales à Alexandrie, Lemnos, Salonique et Bizerte. Archives CEAlex. Faruk Bilici Stèle commémorative aux Morts ottomans à Sidi Bishr. Archives CEAlex, A. Pelle. Monument aux Morts turcs de Sidi Bishr. Archives CEAlex, A. Pelle. 14 Navires stationnés dans le port d’Alexandrie, les 1-3 avril 1915 Bateau de 105 m mis à flot en 1880, le Bien-Hoa devient en 1914 un ravitailleur de l’Armée Navale. Parti de Toulon le 4 mars 1915 et après escale à Bizerte, il joint Lemnos le 17 mars. Il gagne Alexandrie 10 jours après, d’où il repart le 11 avril pour Moudros. Enfin, deux semaines après, il appareille pour le débarquement en Turquie. En juin 1915, le Bien-Hoa est inscrit sur la liste des navires-hôpitaux après transformation. Il peut transporter 470 malades ou blessés répartis en deux batteries, haute et basse en fonction des pathologies, bien séparées des installations nautiques. Il sera condamné en 1923. Le sergent Ernest Marcel, natif des Vosges et enterré à Alexandrie, est mort à son bord le 14 mai 1915. Archives CEAlex. Carte de l’« État et situation des navires stationnés dans le port d’Alexandrie (Expédition des Dardanelles) les 1-3 avril 1915 », extraite de l’Atlas historique de la ville et des ports d'Alexandrie de Gaston Jondet (Le Caire, 1921, pl. LI). Archives CEAlex. Les 137 navires sont localisés, orientés et identifiés par un numéro qui renvoie à la liste des navires. Certains de ces bateaux sont à quai, tandis que d’autres ont déjà réalisé leur déchargement ou attendent une place disponible sur les quais. Ainsi le 5 avril 1915, « les autorités anglaises ayant demandé pour leur propre usage l’utilisation de certains quais, plusieurs navires en déchargement (Hérault [n°51], Armand Bréhic [n°49], Ceylan [n°52]) ont dû quitter inopinément le quai où ils se trouvaient et aller mouiller en rade, ce qui retarde notablement les opérations » (Journal des Marches et Opérations du CEO, Réf. 26 N 75/1). 15 Les soldats français à Alexandrie Les troupes françaises arrivèrent à Alexandrie entre le 27 et le 31 mars 1915. Le Journal des Marches et Opérations du Corps Expéditionnaire d’Orient (CEO) décrit leur installation : la cavalerie campa à Zaria (Zahariya) et le reste des troupes à l’extérieur de la ville dans la zone de Ramleh, alors peu urbanisée, autour du Victoria College et entre le palais de la Khédiva-Mère et Sidi Bishr. Les témoignages des soldats français à Alexandrie nous ont été livrés par leurs échanges épistolaires avec leurs proches. Ils y mentionnèrent leurs blessures et leurs soins, leur cantonnement sur le sable sous des tentes, l’aide des « dames françaises et anglaises qui apportent de tout, des cigarettes, du tabac, des bonbons, des gâteaux ». Cécile Shaalan La base du CEO fut transférée à la mi-avril 1915, de Moudros à Alexandrie, avec un état-major de base, les troupes et des services tels que génie, intendance, artillerie, santé, service vétérinaire, trésor et postes. Les soldats français restèrent à Alexandrie environ deux à trois semaines avant leur départ pour les Dardanelles, tandis que la base du CEO fut installée un mois à Alexandrie, avant d’être transférée à Moudros. Un nombre restreint demeura à Alexandrie afin d’assurer la logistique et de superviser les soins. Puis ce furent les malades ou les blessés qui furent acheminés à Alexandrie dès la fin avril 1915. Installation des troupes françaises à proximité du Victoria College. À gauche : ambulance n°1 avec les Docteurs Lebœuf et Vallerix, à droite : soldats posant avec une pièce d’artillerie (canon 75 mm). Archives CEAlex. Photo de soldats du 10 avril 1915, posant dans les sables de Ramleh, avant leur départ sur le navire la Savoie pour les Dardanelles. Archives CEAlex. Le dépôt des isolés à Alexandrie. Les dépôts des isolés sont des dépôts militaires mis en place sur tout le pourtour méditerranéen pour les soldats éloignés de leur base et plus particulièrement ceux venus de l’empire colonial. Archives CEAlex. Carte manuscrite des campements français à Ramleh, à leur arrivée à Alexandrie, fin mars 1915. Le Quartier Général installa ses bureaux dans les locaux du Victoria College, où étaient également logés les officiers ; le personnel de troupe et les animaux campèrent sur le terrain dépendant de cet établissement. Les différents bataillons sont localisés sur la carte, ainsi que les différents services, tels que « Train », « Subsistance-Boulangerie », « Génie »… Carte extraite du Journal des Marches et Opérations du CEO, Réf. 26 N 75/1, Site Mémoire des Hommes. Régiment des troupes françaises passé en revue par le Général anglais Ian Hamilton. Il pourrait s’agir de la revue du 5 avril 1915, qui a eu lieu dans la plaine sablonneuse située à 2 km à l’est du Victoria College, en bordure de la route d’Aboukir. Archives CEAlex. 16 Campement du CEO dans la région de Zaharia (Zaharya) à Alexandrie, au sud du quartier Abu el-Nawatir. Cavalerie composée du Régiment de marche des chasseurs d’Afrique. Archives C. Shaalan et archives CEAlex. 17 Les soldats français à Alexandrie Les troupes françaises arrivèrent à Alexandrie entre le 27 et le 31 mars 1915. Le Journal des Marches et Opérations du Corps Expéditionnaire d’Orient (CEO) décrit leur installation : la cavalerie campa à Zaria (Zahariya) et le reste des troupes à l’extérieur de la ville dans la zone de Ramleh, alors peu urbanisée, autour du Victoria College et entre le palais de la Khédiva-Mère et Sidi Bishr. Les témoignages des soldats français à Alexandrie nous ont été livrés par leurs échanges épistolaires avec leurs proches. Ils y mentionnèrent leurs blessures et leurs soins, leur cantonnement sur le sable sous des tentes, l’aide des « dames françaises et anglaises qui apportent de tout, des cigarettes, du tabac, des bonbons, des gâteaux ». Cécile Shaalan La base du CEO fut transférée à la mi-avril 1915, de Moudros à Alexandrie, avec un état-major de base, les troupes et des services tels que génie, intendance, artillerie, santé, service vétérinaire, trésor et postes. Les soldats français restèrent à Alexandrie environ deux à trois semaines avant leur départ pour les Dardanelles, tandis que la base du CEO fut installée un mois à Alexandrie, avant d’être transférée à Moudros. Un nombre restreint demeura à Alexandrie afin d’assurer la logistique et de superviser les soins. Puis ce furent les malades ou les blessés qui furent acheminés à Alexandrie dès la fin avril 1915. Installation des troupes françaises à proximité du Victoria College. À gauche : ambulance n°1 avec les Docteurs Lebœuf et Vallerix, à droite : soldats posant avec une pièce d’artillerie (canon 75 mm). Archives CEAlex. Photo de soldats du 10 avril 1915, posant dans les sables de Ramleh, avant leur départ sur le navire la Savoie pour les Dardanelles. Archives CEAlex. Le dépôt des isolés à Alexandrie. Les dépôts des isolés sont des dépôts militaires mis en place sur tout le pourtour méditerranéen pour les soldats éloignés de leur base et plus particulièrement ceux venus de l’empire colonial. Archives CEAlex. Carte manuscrite des campements français à Ramleh, à leur arrivée à Alexandrie, fin mars 1915. Le Quartier Général installa ses bureaux dans les locaux du Victoria College, où étaient également logés les officiers ; le personnel de troupe et les animaux campèrent sur le terrain dépendant de cet établissement. Les différents bataillons sont localisés sur la carte, ainsi que les différents services, tels que « Train », « Subsistance-Boulangerie », « Génie »… Carte extraite du Journal des Marches et Opérations du CEO, Réf. 26 N 75/1, Site Mémoire des Hommes. Régiment des troupes françaises passé en revue par le Général anglais Ian Hamilton. Il pourrait s’agir de la revue du 5 avril 1915, qui a eu lieu dans la plaine sablonneuse située à 2 km à l’est du Victoria College, en bordure de la route d’Aboukir. Archives CEAlex. 16 Campement du CEO dans la région de Zaharia (Zaharya) à Alexandrie, au sud du quartier Abu el-Nawatir. Cavalerie composée du Régiment de marche des chasseurs d’Afrique. Archives C. Shaalan et archives CEAlex. 17 Un Vierzonnais à Alexandrie L’aviation Octave Valteau est né en 1881, à Vierzon, dans le département du Cher. Il était forgeron, quand, à l’instar de plusieurs membres de sa famille, il fut appelé sous les drapeaux en 1914. Il participa certainement à la bataille des Dardanelles et séjourna, au cours de l’année 1915, à Alexandrie, d’où il envoya ces deux cartes postales à sa famille demeurant dans le quartier du Phuit-Berthault, à Vierzon-Villages (en 1937, cette commune fusionnera avec trois autres pour créer la ville de Vierzon). Peu loquace, Octave écrivit seulement quelques mots, pleins de tendresse, à sa femme et à sa fille Suzanne, alors âgée de 3 ans, et comme il est d’usage dans la correspondance militaire, sa classe : 8e d’artillerie, 31e batterie, 2e groupe. Il rentrera en France et survivra à la Grande Guerre. Il repose depuis 1935 dans l’un des cimetières vierzonnais, auprès de lui, sa femme Marie et l’un de leurs enfants, Robert. Suzanne décédée en 1953 a été enterrée non loin de lui parmi les membres de sa belle-famille. Marie-Delphine Martellière Localisation de la ville de Vierzon dont est originaire le soldat Octave Valteau Archives CEAlex, C. Shaalan. L’aéroplane est une nouveauté : certes, on avait assisté à un meeting aérien dès 1910 à Héliopolis, mais de voir débarquer dans le port d’Alexandrie ces grosses caisses estampillées « Aéroplanes M. Farman » constitue un événement, ne serait-ce que par leur nombre, une dizaine d’avions démontés : ces modèles de high-tech, équipés d’un moteur Renault de 80 ch, seront stockés sous l’œil vigilant de leurs pilotes et mécaniciens sur la plage de Ramleh, du côté du Victoria College, alors transformé en Quartier Général français. Après trois semaines d’inactivité à Alexandrie, l’escadrille repart pour l’île de Ténédos (aujourd’hui Bozcaada). Technologie encore à ses débuts, l’aviation fera de grands progrès grâce à la guerre : un pilote accompagné d’un passager, armé non pas d’une mitrailleuse (cela viendra plus tard, dès l’été 1915 dans l’aviation allemande), mais d’un simple revolver, se chargeant parfois d’une bombe de 75 kg qu’il prend à la main pour la jeter sur sa cible. Le principal objectif n’est ni d’attaquer ni de détruire, mais de pister les sous-marins, de localiser et de photographier les batteries turques installées dans les hauteurs des détroits, et de les signaler aux canonniers des cuirassés alliés qui peuvent régler en conséquence le tir de leurs énormes canons de marine, à des kilomètres de distance, afin de préparer le terrain pour le passage des bateaux et la progression à terre des troupes d’infanterie. Aux côtés des Anglais, les pilotes français rivalisent de courage et d’audace, beaucoup d’entre eux laisseront leur vie dans les eaux des Dardanelles. Jean-Yves Empereur Les Annales du 16 mai 1915. Archives A. Pelle First aeroplanes at Abou Kir. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. 1916 - Bristol fighters & Crossley tender at Abukir. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Carte d’Alexandrie Place Mohamed Aly et la Bourse envoyée par le soldat O. Valteau à sa femme. Archives CEAlex. Carte d’Alexandrie Asile des orphelins « Benaki » envoyée par le soldat O. Valteau à sa fille. Archives CEAlex. Archives CEAlex. Acte de naissance d’Octave Valteau. État civil-citoyenneté, pôle cimetière Vierzon. 18 Tombe d’O. Valteau à Vierzon, détails : plaque et palme des anciens combattants du Paris-Orléans. Photographie Sh. El Masry. Acte de naissance de Suzanne Valteau. État civil-citoyenneté, pôle cimetière Vierzon. Il est vraisemblable que ces avions soient restés en caisse pendant leur bref séjour à Alexandrie, en mars-avril 1915. Henri Dumas, l’un des 7 pilotes de cette escadrille placée sous les ordres du Capitaine Césari, écrit : « Nous avons quitté Alexandrie après y avoir passé trois semaines d’ennui, de désœuvrement et de distraction imbéciles comme peuvent en trouver des soldats lâchés dans une grande ville » (il mourra en mer Égée, aux commandes de son avion). Mais une interrogation demeure : on signale que la ville d’Alexandrie a fait l’objet d’une couverture aérienne par des avions français pendant la Première Guerre mondiale : qui sont-ils et surtout comment retrouver ces documents essentiels pour l’étude du développement de la ville à cette époque ? 19 Un Vierzonnais à Alexandrie L’aviation Octave Valteau est né en 1881, à Vierzon, dans le département du Cher. Il était forgeron, quand, à l’instar de plusieurs membres de sa famille, il fut appelé sous les drapeaux en 1914. Il participa certainement à la bataille des Dardanelles et séjourna, au cours de l’année 1915, à Alexandrie, d’où il envoya ces deux cartes postales à sa famille demeurant dans le quartier du Phuit-Berthault, à Vierzon-Villages (en 1937, cette commune fusionnera avec trois autres pour créer la ville de Vierzon). Peu loquace, Octave écrivit seulement quelques mots, pleins de tendresse, à sa femme et à sa fille Suzanne, alors âgée de 3 ans, et comme il est d’usage dans la correspondance militaire, sa classe : 8e d’artillerie, 31e batterie, 2e groupe. Il rentrera en France et survivra à la Grande Guerre. Il repose depuis 1935 dans l’un des cimetières vierzonnais, auprès de lui, sa femme Marie et l’un de leurs enfants, Robert. Suzanne décédée en 1953 a été enterrée non loin de lui parmi les membres de sa belle-famille. Marie-Delphine Martellière Localisation de la ville de Vierzon dont est originaire le soldat Octave Valteau Archives CEAlex, C. Shaalan. L’aéroplane est une nouveauté : certes, on avait assisté à un meeting aérien dès 1910 à Héliopolis, mais de voir débarquer dans le port d’Alexandrie ces grosses caisses estampillées « Aéroplanes M. Farman » constitue un événement, ne serait-ce que par leur nombre, une dizaine d’avions démontés : ces modèles de high-tech, équipés d’un moteur Renault de 80 ch, seront stockés sous l’œil vigilant de leurs pilotes et mécaniciens sur la plage de Ramleh, du côté du Victoria College, alors transformé en Quartier Général français. Après trois semaines d’inactivité à Alexandrie, l’escadrille repart pour l’île de Ténédos (aujourd’hui Bozcaada). Technologie encore à ses débuts, l’aviation fera de grands progrès grâce à la guerre : un pilote accompagné d’un passager, armé non pas d’une mitrailleuse (cela viendra plus tard, dès l’été 1915 dans l’aviation allemande), mais d’un simple revolver, se chargeant parfois d’une bombe de 75 kg qu’il prend à la main pour la jeter sur sa cible. Le principal objectif n’est ni d’attaquer ni de détruire, mais de pister les sous-marins, de localiser et de photographier les batteries turques installées dans les hauteurs des détroits, et de les signaler aux canonniers des cuirassés alliés qui peuvent régler en conséquence le tir de leurs énormes canons de marine, à des kilomètres de distance, afin de préparer le terrain pour le passage des bateaux et la progression à terre des troupes d’infanterie. Aux côtés des Anglais, les pilotes français rivalisent de courage et d’audace, beaucoup d’entre eux laisseront leur vie dans les eaux des Dardanelles. Jean-Yves Empereur Les Annales du 16 mai 1915. Archives A. Pelle First aeroplanes at Abou Kir. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. 1916 - Bristol fighters & Crossley tender at Abukir. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Carte d’Alexandrie Place Mohamed Aly et la Bourse envoyée par le soldat O. Valteau à sa femme. Archives CEAlex. Carte d’Alexandrie Asile des orphelins « Benaki » envoyée par le soldat O. Valteau à sa fille. Archives CEAlex. Archives CEAlex. Acte de naissance d’Octave Valteau. État civil-citoyenneté, pôle cimetière Vierzon. 18 Tombe d’O. Valteau à Vierzon, détails : plaque et palme des anciens combattants du Paris-Orléans. Photographie Sh. El Masry. Acte de naissance de Suzanne Valteau. État civil-citoyenneté, pôle cimetière Vierzon. Il est vraisemblable que ces avions soient restés en caisse pendant leur bref séjour à Alexandrie, en mars-avril 1915. Henri Dumas, l’un des 7 pilotes de cette escadrille placée sous les ordres du Capitaine Césari, écrit : « Nous avons quitté Alexandrie après y avoir passé trois semaines d’ennui, de désœuvrement et de distraction imbéciles comme peuvent en trouver des soldats lâchés dans une grande ville » (il mourra en mer Égée, aux commandes de son avion). Mais une interrogation demeure : on signale que la ville d’Alexandrie a fait l’objet d’une couverture aérienne par des avions français pendant la Première Guerre mondiale : qui sont-ils et surtout comment retrouver ces documents essentiels pour l’étude du développement de la ville à cette époque ? 19 Les navires-hôpitaux Le concept de bateau-hôpital remonte au XVIe siècle, avec la caraque Santa Maria créée en 1523 par l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem. Jusqu’à la Première Guerre mondiale, il s’agissait essentiellement de navires de transport de troupes qui servaient d’hôpital pour l’évacuation des blessés et l’isolement des contagieux. Dès le début des hostilités en 1914, plusieurs paquebots français furent associés à l’effort de guerre et transformés pour le transport de troupes et, pour certains, en navires-hôpitaux, comme le France, le Sphinx, l’Asie. Le France, par exemple, lancé en 1912 sur la traversée de l’Atlantique, surnommé le « Versailles des mers » et transportant plus de 2000 passagers, fut converti en croiseur auxiliaire, rebaptisé France IV et rapidement transformé et utilisé comme transport de troupes. En mars 1915, il embarque 4 000 soldats de la 156e division vers les Dardanelles qui y débarquent le 4 mai. Fin 1915, il a été converti en navire-hôpital, avec une capacité de 2 500 lits. Il servit en Méditerranée, rapatriant des blessés du front d'Orient vers le port de Toulon. D’autres nombreux bateaux-hôpitaux participèrent à l’évacuation et au transport de blessés, comme hôpitaux flottants ou comme dépôts de convalescents tels l’Amiral Duperré, l’Annam, l’Aquitaine, le Bien Hoa, le Britannia, le Burdigala, le Charles Roux, la Glaneuse, le Goliath, le Lafayette, le Lotus, le Louqsor, le Lutétia, le Tchad, le Timgad, etc. Le paquebot Lutétia. Archives A. Pelle. Le paquebot Tchad. Archives A. Pelle. 20 Alexandrie ville-hôpital The Graphic, january 8, 1916. Unloading wounded from a hospital ship at Alexandria. Archives A. Pelle Les blessés du front d’Orient sont acheminés vers l’arrière par les navires-hôpitaux pour être soignés : principalement à Moudros, Bizerte et Alexandrie. À Alexandrie, avec l’aide du Croissant-Rouge et de la CroixRouge, les cas sérieux sont transportés par ambulances (motorisées ou à cheval) dans les différents hôpitaux de la ville, tandis que les blessés plus légers peuvent être acheminés par train vers des destinations plus éloignées, telles que Le Caire ou le Delta. On compte pas moins d’une vingtaine d’hôpitaux où sont soignés indifféremment les blessés des Dardanelles et les malades des épidémies de typhus ou de fièvre typhoïde. Répartis du centre-ville à Ramleh, ce sont des hôpitaux existants (Hôpital européen, Hôpital grec, Hôpital des Diaconesses …) ou des hôpitaux aménagés dans des bâtiments prêtés ou réquisitionnés (Hôpital Pasteur, Victoria College, Casino San Stephano, École secondaire d’Abbasieh). Navire-hôpital à quai dans le port d’Alexandrie, en vue du transfert des blessés dans le train du CroissantRouge et dans les ambulances (The Sphere du 13/11/1915). Archives C. Shaalan. Chargement de patients au 17th General Hospital (Victoria College) pour le transfert au navire-hôpital, en vue d’un retour en Angleterre. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Blessés en attente d’un navire-hôpital. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Le Duguay-Trouin. Archives A. Pelle. Le Duguay-Trouin est un trois mâts goélette de 100 m de long, jaugeant 5 500 tonneaux, lancé en 1879 comme navire-hôpital sous le nom de Tonkin avec 252 lits et 310 hommes d’équipage, y compris le personnel médical et paramédical. Jusqu’en 1885, il fut affecté à l’escadre d’Extrême Orient puis désarmé jusqu’en 1900 où il servit alors de voilier-école pour l’École des aspirants de la Marine Française sous le nom de Duguay-Trouin. En 1914, il fut transformé en navire-hôpital de 660 lits. Attaché au port de Brest, il effectua de nombreuses missions, en Manche notamment en octobre 1914 pour soigner les soldats belges et anglais, et évacuer les blessés de la VIIIe armée française. En février 1915, il rejoignait la Méditerranée et le Corps Expéditionnaire Français des Dardanelles. En avril 1915, il transporta 630 blessés de la division navale franco-russe et du corps du débarquement de Gallipoli, puis évacua 1 465 blessés du Cap Helles vers Moudros et Bizerte. Jusqu’en décembre 1918, il effectua 147 rotations sanitaires entre la Méditerranée orientale, Salonique, Lemnos, Bizerte, Alger et Toulon. Il évacua 31 504 malades et blessés dont 320 décéderont. Les pathologies à bord des navires-hôpitaux, outre les traumatismes et blessures de guerre étaient principalement infectieuses et parasitaires, notamment pulmonaires et digestives dont nombre de blessés décédèrent au cours de leur transport ou à leur arrivée dans les hôpitaux d’Alexandrie. François-Marie Lahaye b. a. c. À Ramleh, hôpitaux aménagés au Casino de San Stephano (a, b) et au Victoria College (c). (The Sphere du 13/11/1915). Description de l’hôpital du Casino de San Stephano, visité le 31 mars 1915, à l’arrivée des troupes françaises à Alexandrie : « Contenance 5 à 600 lits, installés dans l’ancien Casino de Ramleh : locaux très vastes, augmentés, de nombreuses tentes pour isolement des contagieux dressées dans les jardins très étendus qui bordent la mer. Salles des opérations et pansements, radiographie, bactériologie et tous services généraux très largement installés et dotés. » Archives C. Shaalan. Blessés et personnel soignant posant devant le perron de l’Hôpital Mansour, à Hadra. Cinq soldats français, qui y sont décédés, sont enterrés à Alexandrie. Archives CEAlex. Carte de localisation des hôpitaux (fonds de plan : carte du Survey of Egypt, 1917). Archives CEAlex, C. Shaalan. 21 Les navires-hôpitaux Le concept de bateau-hôpital remonte au XVIe siècle, avec la caraque Santa Maria créée en 1523 par l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem. Jusqu’à la Première Guerre mondiale, il s’agissait essentiellement de navires de transport de troupes qui servaient d’hôpital pour l’évacuation des blessés et l’isolement des contagieux. Dès le début des hostilités en 1914, plusieurs paquebots français furent associés à l’effort de guerre et transformés pour le transport de troupes et, pour certains, en navires-hôpitaux, comme le France, le Sphinx, l’Asie. Le France, par exemple, lancé en 1912 sur la traversée de l’Atlantique, surnommé le « Versailles des mers » et transportant plus de 2000 passagers, fut converti en croiseur auxiliaire, rebaptisé France IV et rapidement transformé et utilisé comme transport de troupes. En mars 1915, il embarque 4 000 soldats de la 156e division vers les Dardanelles qui y débarquent le 4 mai. Fin 1915, il a été converti en navire-hôpital, avec une capacité de 2 500 lits. Il servit en Méditerranée, rapatriant des blessés du front d'Orient vers le port de Toulon. D’autres nombreux bateaux-hôpitaux participèrent à l’évacuation et au transport de blessés, comme hôpitaux flottants ou comme dépôts de convalescents tels l’Amiral Duperré, l’Annam, l’Aquitaine, le Bien Hoa, le Britannia, le Burdigala, le Charles Roux, la Glaneuse, le Goliath, le Lafayette, le Lotus, le Louqsor, le Lutétia, le Tchad, le Timgad, etc. Le paquebot Lutétia. Archives A. Pelle. Le paquebot Tchad. Archives A. Pelle. 20 Alexandrie ville-hôpital The Graphic, january 8, 1916. Unloading wounded from a hospital ship at Alexandria. Archives A. Pelle Les blessés du front d’Orient sont acheminés vers l’arrière par les navires-hôpitaux pour être soignés : principalement à Moudros, Bizerte et Alexandrie. À Alexandrie, avec l’aide du Croissant-Rouge et de la CroixRouge, les cas sérieux sont transportés par ambulances (motorisées ou à cheval) dans les différents hôpitaux de la ville, tandis que les blessés plus légers peuvent être acheminés par train vers des destinations plus éloignées, telles que Le Caire ou le Delta. On compte pas moins d’une vingtaine d’hôpitaux où sont soignés indifféremment les blessés des Dardanelles et les malades des épidémies de typhus ou de fièvre typhoïde. Répartis du centre-ville à Ramleh, ce sont des hôpitaux existants (Hôpital européen, Hôpital grec, Hôpital des Diaconesses …) ou des hôpitaux aménagés dans des bâtiments prêtés ou réquisitionnés (Hôpital Pasteur, Victoria College, Casino San Stephano, École secondaire d’Abbasieh). Navire-hôpital à quai dans le port d’Alexandrie, en vue du transfert des blessés dans le train du CroissantRouge et dans les ambulances (The Sphere du 13/11/1915). Archives C. Shaalan. Chargement de patients au 17th General Hospital (Victoria College) pour le transfert au navire-hôpital, en vue d’un retour en Angleterre. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Blessés en attente d’un navire-hôpital. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Le Duguay-Trouin. Archives A. Pelle. Le Duguay-Trouin est un trois mâts goélette de 100 m de long, jaugeant 5 500 tonneaux, lancé en 1879 comme navire-hôpital sous le nom de Tonkin avec 252 lits et 310 hommes d’équipage, y compris le personnel médical et paramédical. Jusqu’en 1885, il fut affecté à l’escadre d’Extrême Orient puis désarmé jusqu’en 1900 où il servit alors de voilier-école pour l’École des aspirants de la Marine Française sous le nom de Duguay-Trouin. En 1914, il fut transformé en navire-hôpital de 660 lits. Attaché au port de Brest, il effectua de nombreuses missions, en Manche notamment en octobre 1914 pour soigner les soldats belges et anglais, et évacuer les blessés de la VIIIe armée française. En février 1915, il rejoignait la Méditerranée et le Corps Expéditionnaire Français des Dardanelles. En avril 1915, il transporta 630 blessés de la division navale franco-russe et du corps du débarquement de Gallipoli, puis évacua 1 465 blessés du Cap Helles vers Moudros et Bizerte. Jusqu’en décembre 1918, il effectua 147 rotations sanitaires entre la Méditerranée orientale, Salonique, Lemnos, Bizerte, Alger et Toulon. Il évacua 31 504 malades et blessés dont 320 décéderont. Les pathologies à bord des navires-hôpitaux, outre les traumatismes et blessures de guerre étaient principalement infectieuses et parasitaires, notamment pulmonaires et digestives dont nombre de blessés décédèrent au cours de leur transport ou à leur arrivée dans les hôpitaux d’Alexandrie. François-Marie Lahaye b. a. c. À Ramleh, hôpitaux aménagés au Casino de San Stephano (a, b) et au Victoria College (c). (The Sphere du 13/11/1915). Description de l’hôpital du Casino de San Stephano, visité le 31 mars 1915, à l’arrivée des troupes françaises à Alexandrie : « Contenance 5 à 600 lits, installés dans l’ancien Casino de Ramleh : locaux très vastes, augmentés, de nombreuses tentes pour isolement des contagieux dressées dans les jardins très étendus qui bordent la mer. Salles des opérations et pansements, radiographie, bactériologie et tous services généraux très largement installés et dotés. » Archives C. Shaalan. Blessés et personnel soignant posant devant le perron de l’Hôpital Mansour, à Hadra. Cinq soldats français, qui y sont décédés, sont enterrés à Alexandrie. Archives CEAlex. Carte de localisation des hôpitaux (fonds de plan : carte du Survey of Egypt, 1917). Archives CEAlex, C. Shaalan. 21 L'Hôpital Parmentier, sous la direction du Frère Samuel, est installé dans la maison de campagne des Frères des écoles chrétiennes à Hadra, offerte aux autorités militaires dès septembre 1914. « Pendant 10 mois, du 23 avril 1915 au 3 février 1916, l’Hôpital Parmentier – ce fut son nom de guerre – abrita une moyenne de 300 blessés ou malades venant des Dardanelles ou de Salonique. Répartis dans les salles « Jeanne d'Arc », « Joffre » et « Castelnau », nos glorieux poilus de toute couleur furent l'objet des soins délicats et attentifs des Sœurs de Charité, des Dames de la Croix Rouge, des Docteurs militaires et civils et des Frères préposés à la direction de « leur » hôpital. Plus de 2400 soldats – en 75.000 journées d'hospitalisation – furent soignés à Parmentier ; tous en gardèrent un souvenir ému. » (Le Lotus, octobre 1928). Le réfectoire de l'hôpital est installé dans le jardin aux beaux jours. Alexandrie, havre des malades et des blessés Soldats et personnel hospitalier posant lors du repas dans les jardins de la campagne des Frères, hôpital Parmentier. Archives CEAlex. Extrait du périodique Le Lotus, 1928. Archives CEAlex. Hôpital Parmentier. Archives A. Pelle. Hôpital Pasteur. Archives Collège de la Sainte-Famille. L’Hôpital Pasteur est installé dans la maison de campagne des Pères Jésuites à la station de Cléopâtra (au nord de l’actuel Centre culturel des Jésuites). « Pour les Blessés. La ravissante campagne des R.R. Pères Jésuites vient d’être transformée en hôpital à la mémoire des anciens élèves du Collège St.-François Xavier tombés à l’ennemi. Les premiers frais de l’installation ont été faits par les élèves qui se sont cotisés pour acheter les lits et le matériel nécessaire à l’établissement qui a reçu le nom d’hôpital Pasteur. » (Le Delta, 17 mai 1915) Camp de convalescence de Moustapha [Pacha]. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Alexandrie s’est peuplée en plusieurs fois de malades et de blessés. D’après les registres hospitaliers, plus de la moitié des soldats est morte de maladies, pour la plupart affections « tropicales » comme la dysenterie et le paludisme. À Alexandrie se tient le 17 octobre 1915 un vrai congrès de médecine tropicale, que préside le directeur des services médicaux, en présence de Ronald Ross, prix Nobel 1902 pour sa découverte du parasite du paludisme chez le moustique, consultant auprès de l’étatmajor anglais. Pendant plusieurs mois, Ross fait des recherches à Alexandrie sur Ronald Ross la dysenterie. Cette diarrhée sanglante, le Archives de la London School of Tropical Medecine. « Gallipoli galop » des Anglais, a terrassé Photographie fournie par les soldats aux Dardanelles, mais ils l’auteur. continuent à en mourir à l’hôpital. Ross différencie la dysenterie des chaleurs de l’été et la dysenterie d’hiver. La première est due à l’amibiase. Extraite de la racine de l’ipéca, l’émétine en injection tue l’amibe, mais parfois trop tard dans un intestin déchiqueté. Aussi les médecins préconisent-ils l’émétine en prévention, discutable en raison de sa toxicité. La deuxième est due au bacille de Shiga. Le diagnostic n’est pas toujours facile et la cause du décès souvent douteuse. Comment différencier la fièvre typhoïde et la fièvre « pourprée » (typhus) ? Cette dernière est par excellence la fièvre des armées, en raison de sa transmission par le pou. La lutte passe par la désinfection des hommes et des vêtements, pour éviter la contagion dans la population alentour. Pour les blessés de guerre qui ont survécu au choc et à l’hémorragie, c’est bien souvent encore les microbes qui auront raison de leur longue résistance (ils sont pour la plupart si jeunes !) : non pas tant le tétanos que la gangrène, si l’amputation n’a pu les sauver. Devant la marée montante des malades, peu de moyens thérapeutiques, aussi les Vaccin antidysentérique de médecins, tentent le tout pour le tout, l’armée. Archives Wellcome chauffent du sang de malades pour faire du Institute, Photographie fournie par l’auteur. vaccin, injectent du sérum de convalescents pour traiter les formes graves. À l’arrière du conflit, ils refusent d’être des « guerriers désarmés ». Anne-Marie Moulin De nombreux camps ou maisons de convalescence ont été aménagés dans différents lieux de la ville, principalement dans la partie est de la ville (Moustapha Pacha, Bulkeley, Glymenopoulos, Montazah), tels que dans les résidences de Lady Godley pour les soldats néo-zélandais ou les demeures de Lady Charles Bentinck et de Mrs Douglas. Cécile Shaalan 22 « Tout le monde sans exception (à Gallipoli) vous dirait : On souhaite la blessure libératrice qui vous amènera à Alexandrie ». Jean Leymonerie, Journal d’un poilu sur le Front d’Orient, 1915, (2003, p. 110) Au dos de cette carte postale postée d’Alexandrie le 11 juillet 1915 cette phrase : « ...ma blessure n’est pas assez grave ce que je regrette beaucoup... ». Archives A. Pelle. À Gallipoli, le général anglais Ian Hamilton note dans son journal en 1915 : « Avec les hommes que nous avons perdu de maladies ces dernières semaines, nous aurions pu battre deux fois les Turcs ». Blessé des Dardanelles hissé à bord d’un navire-hôpital. Archives CEAlex. La première vague est venue de l’enfer de la péninsule de Gallipoli, entre octobre 1915 et janvier 1916, la seconde correspond à l’établissement du Front d’Orient, Alexandrie forme une base sanitaire à l’arrière de Salonique. Le Bien-Hoa, le Tchad, le Lutétia et le Duguay-Trouin ont fait la navette avec les champs de bataille. 2014, herboriste d’Alexandrie vendant de I’ipéca, en arabe el-dhahab. En 1914 on le consomme en poudre : comme vomitif et traitement des gastrites. Photographies A. Pelle. Vue aérienne de la maison de convalescence à Montazah. Archives CEAlex. Infirmières et blessés de l’hôpital grec. Archives Ayoub-Boulad. Les médecins d’Égypte ont une compétence particulière pour les maladies des pays chauds. C’est à Alexandrie que Stephanos Kartulis a identifié l’amibe (Entamoeba histolytica) en 1887 et fait le lien entre l’infection de l’intestin et l’abcès du foie. 23 L'Hôpital Parmentier, sous la direction du Frère Samuel, est installé dans la maison de campagne des Frères des écoles chrétiennes à Hadra, offerte aux autorités militaires dès septembre 1914. « Pendant 10 mois, du 23 avril 1915 au 3 février 1916, l’Hôpital Parmentier – ce fut son nom de guerre – abrita une moyenne de 300 blessés ou malades venant des Dardanelles ou de Salonique. Répartis dans les salles « Jeanne d'Arc », « Joffre » et « Castelnau », nos glorieux poilus de toute couleur furent l'objet des soins délicats et attentifs des Sœurs de Charité, des Dames de la Croix Rouge, des Docteurs militaires et civils et des Frères préposés à la direction de « leur » hôpital. Plus de 2400 soldats – en 75.000 journées d'hospitalisation – furent soignés à Parmentier ; tous en gardèrent un souvenir ému. » (Le Lotus, octobre 1928). Le réfectoire de l'hôpital est installé dans le jardin aux beaux jours. Alexandrie, havre des malades et des blessés Soldats et personnel hospitalier posant lors du repas dans les jardins de la campagne des Frères, hôpital Parmentier. Archives CEAlex. Extrait du périodique Le Lotus, 1928. Archives CEAlex. Hôpital Parmentier. Archives A. Pelle. Hôpital Pasteur. Archives Collège de la Sainte-Famille. L’Hôpital Pasteur est installé dans la maison de campagne des Pères Jésuites à la station de Cléopâtra (au nord de l’actuel Centre culturel des Jésuites). « Pour les Blessés. La ravissante campagne des R.R. Pères Jésuites vient d’être transformée en hôpital à la mémoire des anciens élèves du Collège St.-François Xavier tombés à l’ennemi. Les premiers frais de l’installation ont été faits par les élèves qui se sont cotisés pour acheter les lits et le matériel nécessaire à l’établissement qui a reçu le nom d’hôpital Pasteur. » (Le Delta, 17 mai 1915) Camp de convalescence de Moustapha [Pacha]. Archives de l'ambulancier T. H. Ashmore. Alexandrie s’est peuplée en plusieurs fois de malades et de blessés. D’après les registres hospitaliers, plus de la moitié des soldats est morte de maladies, pour la plupart affections « tropicales » comme la dysenterie et le paludisme. À Alexandrie se tient le 17 octobre 1915 un vrai congrès de médecine tropicale, que préside le directeur des services médicaux, en présence de Ronald Ross, prix Nobel 1902 pour sa découverte du parasite du paludisme chez le moustique, consultant auprès de l’étatmajor anglais. Pendant plusieurs mois, Ross fait des recherches à Alexandrie sur Ronald Ross la dysenterie. Cette diarrhée sanglante, le Archives de la London School of Tropical Medecine. « Gallipoli galop » des Anglais, a terrassé Photographie fournie par les soldats aux Dardanelles, mais ils l’auteur. continuent à en mourir à l’hôpital. Ross différencie la dysenterie des chaleurs de l’été et la dysenterie d’hiver. La première est due à l’amibiase. Extraite de la racine de l’ipéca, l’émétine en injection tue l’amibe, mais parfois trop tard dans un intestin déchiqueté. Aussi les médecins préconisent-ils l’émétine en prévention, discutable en raison de sa toxicité. La deuxième est due au bacille de Shiga. Le diagnostic n’est pas toujours facile et la cause du décès souvent douteuse. Comment différencier la fièvre typhoïde et la fièvre « pourprée » (typhus) ? Cette dernière est par excellence la fièvre des armées, en raison de sa transmission par le pou. La lutte passe par la désinfection des hommes et des vêtements, pour éviter la contagion dans la population alentour. Pour les blessés de guerre qui ont survécu au choc et à l’hémorragie, c’est bien souvent encore les microbes qui auront raison de leur longue résistance (ils sont pour la plupart si jeunes !) : non pas tant le tétanos que la gangrène, si l’amputation n’a pu les sauver. Devant la marée montante des malades, peu de moyens thérapeutiques, aussi les Vaccin antidysentérique de médecins, tentent le tout pour le tout, l’armée. Archives Wellcome chauffent du sang de malades pour faire du Institute, Photographie fournie par l’auteur. vaccin, injectent du sérum de convalescents pour traiter les formes graves. À l’arrière du conflit, ils refusent d’être des « guerriers désarmés ». Anne-Marie Moulin De nombreux camps ou maisons de convalescence ont été aménagés dans différents lieux de la ville, principalement dans la partie est de la ville (Moustapha Pacha, Bulkeley, Glymenopoulos, Montazah), tels que dans les résidences de Lady Godley pour les soldats néo-zélandais ou les demeures de Lady Charles Bentinck et de Mrs Douglas. Cécile Shaalan 22 « Tout le monde sans exception (à Gallipoli) vous dirait : On souhaite la blessure libératrice qui vous amènera à Alexandrie ». Jean Leymonerie, Journal d’un poilu sur le Front d’Orient, 1915, (2003, p. 110) Au dos de cette carte postale postée d’Alexandrie le 11 juillet 1915 cette phrase : « ...ma blessure n’est pas assez grave ce que je regrette beaucoup... ». Archives A. Pelle. À Gallipoli, le général anglais Ian Hamilton note dans son journal en 1915 : « Avec les hommes que nous avons perdu de maladies ces dernières semaines, nous aurions pu battre deux fois les Turcs ». Blessé des Dardanelles hissé à bord d’un navire-hôpital. Archives CEAlex. La première vague est venue de l’enfer de la péninsule de Gallipoli, entre octobre 1915 et janvier 1916, la seconde correspond à l’établissement du Front d’Orient, Alexandrie forme une base sanitaire à l’arrière de Salonique. Le Bien-Hoa, le Tchad, le Lutétia et le Duguay-Trouin ont fait la navette avec les champs de bataille. 2014, herboriste d’Alexandrie vendant de I’ipéca, en arabe el-dhahab. En 1914 on le consomme en poudre : comme vomitif et traitement des gastrites. Photographies A. Pelle. Vue aérienne de la maison de convalescence à Montazah. Archives CEAlex. Infirmières et blessés de l’hôpital grec. Archives Ayoub-Boulad. Les médecins d’Égypte ont une compétence particulière pour les maladies des pays chauds. C’est à Alexandrie que Stephanos Kartulis a identifié l’amibe (Entamoeba histolytica) en 1887 et fait le lien entre l’infection de l’intestin et l’abcès du foie. 23 Infirmières et marraines de guerre Les soldats des troupes coloniales morts pour la France Christine et Janie Sinano étaient deux jeunes filles de l’aristocratie alexandrine. L’aînée, Christine, avait 18 ans au début de la guerre, Janie 14 ans. La présence des soldats dans la ville était un événement considérable qui mettait la ville en effervescence. Elles habitaient 76 rue de la Porte Rosette, le jardin descendait jusqu’à la rue, principale artère de la ville où les défilés et manifestations avaient lieu. Janie Sinano a raconté ses souvenirs dans ses Mémoires d’une petite fille rangée. Dès que nous entendons les bruits de pas ou de sabots de cheval nous courons ma soeur et moi à la grille du jardin, et de là, le nez entre les barreaux, nous les regardons défiler. Qui ? Eux. Eux, ce sont les soldats hindous enturbannés, sombres, imposants. Eux, ce sont les poilus français, encore en bleu horizon, Archives CEAlex, Ayoud-Boulad. et ceux-là nous arrachent toujours de l’émotion. Eux, ce sont les Écossais dont le kilt se balance pour un ballet en cadence. Eux,ce sont les Australiens aux grands feutres, bâtis en athlète, aux moeurs de sauvage. Tous ces régiments sont entourés de cavalerie, rien n’est motorisé. Nous regardons avec stupeur les énormes bêtes aux pattes poilues, aux puissantes encolures qui traînent les fourgons, si différentes de nos chevaux arabes. Toutes ces troupes vont défendre la patrie, la liberté, abattre le Kaiser qui coupait les mains des petits Belges. Tous ces hommes vont aux Dardanelles. Combien en sont revenus ? Christine Sinano, l’aînée, échangea une longue correspondance avec un soldat français de la 15e section de l’Armée d’Orient, rattachée à l’armée concentrée près de Salonique. Il s’appelait Maurice Daumas et avait fait une demande de parrainage auprès du directeur du journal de la Bourse Égyptienne au Caire. Les premiers échanges commencent en avril 1917. La dernière lettre est arrivée à Alexandrie le 17 novembre 1918, écrite de la Serbie libérée. Il semblait sans nouvelles de sa « marraine ». Je vous ai adressé plusieurs cartes, il y a déjà longtemps et j’espérais de vos nouvelles ces jours derniers. (…) Donnez-moi longuement de vos nouvelles, vous me ferez plaisir. Nous ne savons pas ce qu’il est devenu. Christine Sinano endossa la tenue d’infirmière pour visiter les soldats blessés de retour des Archives CEAlex. Ayoud-Boulad. Dardanelles, en convalescence à l’Hôpital grec. Ils venaient d’Australie ou de NouvelleZélande, d’Irlande, d’Écosse ou d’Angleterre. Ils étaient pour un temps, mis hors des dangers de la guerre qui s’éternisait. 1 Du 5 octobre 1915 au 30 septembre 1918. 2 Du mois de mai 1920 au mois d’octobre 1921. Archives CEAlex, Ayoud-Boulad. « Je ne doute pas que par votre entremise mon appel soit entendu, et je crois pouvoir espérer que parmi les charmantes lectrices de votre journal il s’en trouvera une qui consentira, en devenant sa marraine, de jeter un rayon de soleil sur la triste vie d’un « poilu » qui dans cet espoir vous adresse ces quelques lignes. » Demande de parrainage. Archives CEAlex. Ayoud-Boulad. Dans le petit carnet de la jeune infirmière, ils ont laissé leurs traces : des mots ou des dessins, pour mémoire. When I am dead and in my grave And when my bone are rotten This little book will tell my name When I am quite forgotten. Que le nom du soldat irlandais P. Sullivan soit grâce au petit carnet de Christine Sinano, encore une fois sorti de l’oubli. Dominique Gogny 24 L’expédition des Dardanelles se solda par un échec cuisant pour les Alliés : 9 800 militaires français y perdirent la vie et 17 370 furent blessés avant d’être acheminés, pour certains, vers les hôpitaux militaires d’Alexandrie. Des blessés et des malades de l’expédition de Salonique (1), ainsi que du théâtre des opérations en Cilicie (2), furent également rapatriés vers Alexandrie où plusieurs de ces militaires originaires d’Afrique décédèrent des suites de leurs blessures ou de maladie. Trente-huit d’entre eux reposent dans le cimetière musulman d’El-Manarah, où une nécropole perpétue leur souvenir, et quatre autres au carré militaire du Cimetière Latin de Terra Santa, dans le quartier de Chatby. Il s’agit d’hommes de troupe incorporés dans les régiments de tirailleurs sénégalais, de tirailleurs malgaches et de tirailleurs somalis. Ces derniers décédèrent sûrement lors de leur rapatriement vers Djibouti, car le 1er Bataillon de tirailleurs somalis n’a pas été engagé sur les différents fronts orientaux. Une étude de l’onomastique de ces soldats permet de dresser une carte de leur origine géographique. La nécropole porte trente-huit noms et prénoms, souvent mal orthographiés en raison des difficultés à transcrire ces identités africaines. Retrouver le pays d’origine et l’ethnie de ces tirailleurs, lier chaque nom à un territoire et reconstituer les identités constitue un exercice difficile, qui comporte une certaine marge d’erreurs. Une constatation demeure : ces noms viennent, sauf quelques exceptions, d’Afrique de l’Ouest, et principalement de l’arc géographique s’étendant du fleuve Sénégal au Niger. Ainsi les prénoms Moussa (Moïse), Amady (Ahmed), Brahim (Abraham) désignent des soldats musulmans, avec parfois des variations dans la prononciation, et donc dans la retranscription. Ainsi les prénoms Ahmed et Mohamed peuvent également donner Mouhadou, Mamadou, Amadou chez les Wolofs du bassin du Sénégal, ou Mamady, Amady dans les groupes peulhs du Soudan occidental, actuellement le Niger et le Mali. Il en est de même pour Ibrahim, qui donne Ibrahima, Birahim, Ibra ou Ibou au Sénégal, et Brahim au Niger ou au Mali. Cependant, certains noms, comme par exemple celui de Babou n’ont pas pu être identifiés. Enfin, au moins un soldat, clairement identifié comme musulman, a été inhumé au cimetière chrétien de Chatby ; il s’agit de Allahere Dicko, un Peuhl d’Afrique sahélienne. Seuls cinq noms sont étrangers à l’Afrique de l’Ouest, ce sont ceux de soldats somalis et malgaches. Ces trente-huit « Morts pour la France » illustrent, par la diversité de leurs patronymes, la grande diversité du recrutement, très souvent organisé par réquisition et non par conscription, des troupes dites coloniales. Archives CEAlex, C. Shaalan. Notre armée en Orient. Les troupes sénégalaises envoyées aux Dardanelles. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. Jean-François Fau «Le brave petit Sénégalais», Les héros des Dardanelles, Les livres roses pour la jeunesse, Librairie Larousse, 1916. Archives A. Pelle. Alexandrie, le Mex en 1915 : embarquement d’un détachement de tirailleurs sénégalais pour les Dardanelles. Archives Nationales. Photographie fournie par l’auteur. 25 Infirmières et marraines de guerre Les soldats des troupes coloniales morts pour la France Christine et Janie Sinano étaient deux jeunes filles de l’aristocratie alexandrine. L’aînée, Christine, avait 18 ans au début de la guerre, Janie 14 ans. La présence des soldats dans la ville était un événement considérable qui mettait la ville en effervescence. Elles habitaient 76 rue de la Porte Rosette, le jardin descendait jusqu’à la rue, principale artère de la ville où les défilés et manifestations avaient lieu. Janie Sinano a raconté ses souvenirs dans ses Mémoires d’une petite fille rangée. Dès que nous entendons les bruits de pas ou de sabots de cheval nous courons ma soeur et moi à la grille du jardin, et de là, le nez entre les barreaux, nous les regardons défiler. Qui ? Eux. Eux, ce sont les soldats hindous enturbannés, sombres, imposants. Eux, ce sont les poilus français, encore en bleu horizon, Archives CEAlex, Ayoud-Boulad. et ceux-là nous arrachent toujours de l’émotion. Eux, ce sont les Écossais dont le kilt se balance pour un ballet en cadence. Eux,ce sont les Australiens aux grands feutres, bâtis en athlète, aux moeurs de sauvage. Tous ces régiments sont entourés de cavalerie, rien n’est motorisé. Nous regardons avec stupeur les énormes bêtes aux pattes poilues, aux puissantes encolures qui traînent les fourgons, si différentes de nos chevaux arabes. Toutes ces troupes vont défendre la patrie, la liberté, abattre le Kaiser qui coupait les mains des petits Belges. Tous ces hommes vont aux Dardanelles. Combien en sont revenus ? Christine Sinano, l’aînée, échangea une longue correspondance avec un soldat français de la 15e section de l’Armée d’Orient, rattachée à l’armée concentrée près de Salonique. Il s’appelait Maurice Daumas et avait fait une demande de parrainage auprès du directeur du journal de la Bourse Égyptienne au Caire. Les premiers échanges commencent en avril 1917. La dernière lettre est arrivée à Alexandrie le 17 novembre 1918, écrite de la Serbie libérée. Il semblait sans nouvelles de sa « marraine ». Je vous ai adressé plusieurs cartes, il y a déjà longtemps et j’espérais de vos nouvelles ces jours derniers. (…) Donnez-moi longuement de vos nouvelles, vous me ferez plaisir. Nous ne savons pas ce qu’il est devenu. Christine Sinano endossa la tenue d’infirmière pour visiter les soldats blessés de retour des Archives CEAlex. Ayoud-Boulad. Dardanelles, en convalescence à l’Hôpital grec. Ils venaient d’Australie ou de NouvelleZélande, d’Irlande, d’Écosse ou d’Angleterre. Ils étaient pour un temps, mis hors des dangers de la guerre qui s’éternisait. 1 Du 5 octobre 1915 au 30 septembre 1918. 2 Du mois de mai 1920 au mois d’octobre 1921. Archives CEAlex, Ayoud-Boulad. « Je ne doute pas que par votre entremise mon appel soit entendu, et je crois pouvoir espérer que parmi les charmantes lectrices de votre journal il s’en trouvera une qui consentira, en devenant sa marraine, de jeter un rayon de soleil sur la triste vie d’un « poilu » qui dans cet espoir vous adresse ces quelques lignes. » Demande de parrainage. Archives CEAlex. Ayoud-Boulad. Dans le petit carnet de la jeune infirmière, ils ont laissé leurs traces : des mots ou des dessins, pour mémoire. When I am dead and in my grave And when my bone are rotten This little book will tell my name When I am quite forgotten. Que le nom du soldat irlandais P. Sullivan soit grâce au petit carnet de Christine Sinano, encore une fois sorti de l’oubli. Dominique Gogny 24 L’expédition des Dardanelles se solda par un échec cuisant pour les Alliés : 9 800 militaires français y perdirent la vie et 17 370 furent blessés avant d’être acheminés, pour certains, vers les hôpitaux militaires d’Alexandrie. Des blessés et des malades de l’expédition de Salonique (1), ainsi que du théâtre des opérations en Cilicie (2), furent également rapatriés vers Alexandrie où plusieurs de ces militaires originaires d’Afrique décédèrent des suites de leurs blessures ou de maladie. Trente-huit d’entre eux reposent dans le cimetière musulman d’El-Manarah, où une nécropole perpétue leur souvenir, et quatre autres au carré militaire du Cimetière Latin de Terra Santa, dans le quartier de Chatby. Il s’agit d’hommes de troupe incorporés dans les régiments de tirailleurs sénégalais, de tirailleurs malgaches et de tirailleurs somalis. Ces derniers décédèrent sûrement lors de leur rapatriement vers Djibouti, car le 1er Bataillon de tirailleurs somalis n’a pas été engagé sur les différents fronts orientaux. Une étude de l’onomastique de ces soldats permet de dresser une carte de leur origine géographique. La nécropole porte trente-huit noms et prénoms, souvent mal orthographiés en raison des difficultés à transcrire ces identités africaines. Retrouver le pays d’origine et l’ethnie de ces tirailleurs, lier chaque nom à un territoire et reconstituer les identités constitue un exercice difficile, qui comporte une certaine marge d’erreurs. Une constatation demeure : ces noms viennent, sauf quelques exceptions, d’Afrique de l’Ouest, et principalement de l’arc géographique s’étendant du fleuve Sénégal au Niger. Ainsi les prénoms Moussa (Moïse), Amady (Ahmed), Brahim (Abraham) désignent des soldats musulmans, avec parfois des variations dans la prononciation, et donc dans la retranscription. Ainsi les prénoms Ahmed et Mohamed peuvent également donner Mouhadou, Mamadou, Amadou chez les Wolofs du bassin du Sénégal, ou Mamady, Amady dans les groupes peulhs du Soudan occidental, actuellement le Niger et le Mali. Il en est de même pour Ibrahim, qui donne Ibrahima, Birahim, Ibra ou Ibou au Sénégal, et Brahim au Niger ou au Mali. Cependant, certains noms, comme par exemple celui de Babou n’ont pas pu être identifiés. Enfin, au moins un soldat, clairement identifié comme musulman, a été inhumé au cimetière chrétien de Chatby ; il s’agit de Allahere Dicko, un Peuhl d’Afrique sahélienne. Seuls cinq noms sont étrangers à l’Afrique de l’Ouest, ce sont ceux de soldats somalis et malgaches. Ces trente-huit « Morts pour la France » illustrent, par la diversité de leurs patronymes, la grande diversité du recrutement, très souvent organisé par réquisition et non par conscription, des troupes dites coloniales. Archives CEAlex, C. Shaalan. Notre armée en Orient. Les troupes sénégalaises envoyées aux Dardanelles. Les Annales du 23 mai 1915. Archives A. Pelle. Jean-François Fau «Le brave petit Sénégalais», Les héros des Dardanelles, Les livres roses pour la jeunesse, Librairie Larousse, 1916. Archives A. Pelle. Alexandrie, le Mex en 1915 : embarquement d’un détachement de tirailleurs sénégalais pour les Dardanelles. Archives Nationales. Photographie fournie par l’auteur. 25 Les cimetières militaires français : chrétien, juif et musulman Devant l’hécatombe de la première année du conflit qui embrasait l’Europe et l’Orient, le gouvernement français promulgua, dès 1915, une loi instituant le principe de l’inhumation des soldats morts pour la France dans des sépultures individuelles, entretenues à perpétuité par l’État. Ainsi, au terme de la Grande Guerre, des cimetières militaires furent créés en France comme à l’étranger. L’Union française des anciens combattants et soldats d’Alexandrie, dans son album Le Périscope, inventorie 150 tombes réparties sur les trois cimetières militaires de la ville : carré chrétien à Chatby cédé par la Custodie de Terre Sainte, sépultures juives également à Chatby, don du Grand rabbinat d’Alexandrie, et nécropole musulmane de Khat el-Naar. Les premières tombes du cimetière chrétien furent creusées pendant la durée de la guerre, puis en 1923, chacune d’entre elles fut maçonnée d’une plaque de béton, surmontée d’une croix portant l’identité et le régiment du défunt. Entretemps, 46 dépouilles, réclamées par leur famille, furent exhumées et transférées en France, et l’absence de plaque d’identité indique à présent un Archives CEAlex, C. Shaalan caveau vide. Un médecin aspirant repose dans le carré militaire, au cœur du cimetière juif de Chatby, décédé des suites de ses blessures après l’armistice du 11 novembre 1918. Deux autres sépultures, disséminées dans le cimetière, sont désormais tombées dans l’oubli. Le 7 septembre 1919, l’inauguration de la nécropole de marbre élevée à la mémoire de trente-huit soldats des troupes coloniales eut lieu dans le cimetière musulman de Khat el-Naar, à Chatby. Puis, au mois d’avril 1933, ce monument de style néo-classique fut transféré au cimetière musulman d’El-Manarah. Ces trois carrés militaires de cultes différents, mais unis au sein du même itinéraire d’un chemin de la mémoire de la Grande Guerre, symbolisent la commémoration de ce qui devait être « la der des ders ». Jean-François Fau Cimetière militaire de Terra Santa. Archives CEAlex, A. Pelle Répartis entre les cimetières chrétien, musulman et juif, les tombes militaires françaises d’Alexandrie abritent 93 soldats français morts en 1915, 3 en 1916, 4 en 1917, 2 en 1918, 2 en 1920, et 2 en 1926. Ce pic de décès en 1915 correspond à la bataille des Dardanelles : un premier mort le 7 avril, 32 en mai, 22 en juin, 16 en juillet, 8 en août, 3 en septembre, 1 en octobre, 8 en novembre et 2 en décembre. 49 soldats au moins sont morts de leurs blessures, 2 ont fait naufrage, dont le Sénégalais Konan Konan. 36 au moins sont morts de maladie. Notons qu’en avril-mai 1915 ce sont les blessés qui prédominent, alors qu’en juin-juillet ce sont essentiellement des malades. La plupart sont décédés dans les hôpitaux d’Alexandrie : 9 à l’hôpital San Stephano, 9 à l’hôpital Desgenettes, 6 à l’hôpital Larrey, 5 à l’hôpital Mansour-Pacha, 5 à l’hôpital européen (?), 3 à l’hôpital Parmentier, 3 à l’hôpital Pasteur, 2 à l’hôpital israélite, 1 à l’hôpital des Diaconesses, 2 à l’hôpital Clot-Bey. Nicole Garnier 26 Cimetière juif d’Alexandrie. Archives CEAlex, A. Pelle Le temps de la mémoire : les Monuments aux Morts pour la France et le retour des soldats rapatriés La France célèbre ses morts dès le 14 juillet 1919 : le Consulat de France, alors installé rue Nabi Daniel dans l’actuel Institut français d’Égypte, dévoile deux plaques de marbre portant les noms des 113 Français d’Alexandrie morts pour la France (elles sont aujourd’hui dans les locaux actuels du Consulat sur la Corniche). La veille, une plaque commémorative avait été posée à bord du paquebot Lotus qui avait emmené en France en août 1914 les soldats français mobilisés (elle sera transférée en 1932 au Consulat lors de la destruction du Lotus). L’après-guerre est le temps de la création des grandes nécropoles nationales : alors qu’en France on crée des cimetières militaires près des champs de bataille, à Alexandrie, le 7 septembre 1919, on inaugure le monument du cimetière musulman de Khat el-Naar à Chatby en l’honneur des 40 soldats subsahariens morts au champ d’honneur (il sera transféré en avril 1933 au cimetière musulman d’El-Manarah), et on aménage en 1923 un carré militaire pour les 150 soldats morts dans les hôpitaux d’Alexandrie durant la campagne des Dardanelles en 1915 et jusqu’à la fermeture des hôpitaux en mars 1916. Les familles réclament le retour de leurs morts : à Alexandrie, le 23 septembre 1920, Marcel Erlanger, Croix de Guerre, mort en France des suites de ses blessures le 14 juillet 1920, est inhumé au cimetière israélite ; en septembre 1920, la dépouille de Victor Guillet, mort pour la France en août 1915, ramenée sur le Sphinx, navire des Messageries Maritimes, est inhumée au cimetière latin ; le 27 avril 1921, Gaston Tivoli, Croix de Guerre, Médaille Militaire, mort pour la France le 20 octobre 1918 dans les Ardennes, est enseveli à Alexandrie. Parallèlement, en août 1923, les familles réclament le retour en France des 46 corps de soldats enterrés à Alexandrie. Le 4 septembre 1923, une cérémonie a lieu sur les quais pour le départ sur le Sphinx des dépouilles de 64 héros, dont 46 exhumés à Alexandrie, 1 au Caire, 12 à Port-Saïd, 2 à Suez, 1 à Djeddah et 2 à Ludd. Enfin, le 22 juillet 1942, les ossements de 17 militaires décédés en 1915 sont transférés en France. Plaque commémorative dévoilée le 23 mars 1930 au Consulat de France, rue Nabi Daniel (aujourd’hui l’Institut français) : portant l’inscription IN MEMORIAM IN SPEM 1914 1918, elle est entourée de deux urnes en bronze du fondeur Susse contenant de la terre sacrée et, dans deux tubes de plomb, les noms des morts de nationalité française, tant à Alexandrie qu’en France. Tiré du Périscope, Archives CEAlex. Plaques commémoratives des Français d’Alexandrie morts pour la France posées au Consulat de France en 1919. Archives CEAlex, A. Pelle. Nicole Garnier Monument offert le samedi 23 avril 1921 par la Colonie Britannique aux Français d’Alexandrie et placé à l’entrée du cimetière latin (il sera transféré en raison de l’élargissement de la rue Fouad dans les jardins nord municipaux). Cimetière musulman d’El-Manarah. Archives N. Garnier Les Cercueils. Le Président de l’Union française des anciens combattants et soldats prononçant un discours. Le 4 septembre 1923, une touchante cérémonie a lieu sur les quais des Messageries Maritimes pour accompagner les corps de 64 héros de la Grande Guerre morts en Orient. Le Périscope. Archives CEAlex. 27 Les cimetières militaires français : chrétien, juif et musulman Devant l’hécatombe de la première année du conflit qui embrasait l’Europe et l’Orient, le gouvernement français promulgua, dès 1915, une loi instituant le principe de l’inhumation des soldats morts pour la France dans des sépultures individuelles, entretenues à perpétuité par l’État. Ainsi, au terme de la Grande Guerre, des cimetières militaires furent créés en France comme à l’étranger. L’Union française des anciens combattants et soldats d’Alexandrie, dans son album Le Périscope, inventorie 150 tombes réparties sur les trois cimetières militaires de la ville : carré chrétien à Chatby cédé par la Custodie de Terre Sainte, sépultures juives également à Chatby, don du Grand rabbinat d’Alexandrie, et nécropole musulmane de Khat el-Naar. Les premières tombes du cimetière chrétien furent creusées pendant la durée de la guerre, puis en 1923, chacune d’entre elles fut maçonnée d’une plaque de béton, surmontée d’une croix portant l’identité et le régiment du défunt. Entretemps, 46 dépouilles, réclamées par leur famille, furent exhumées et transférées en France, et l’absence de plaque d’identité indique à présent un Archives CEAlex, C. Shaalan caveau vide. Un médecin aspirant repose dans le carré militaire, au cœur du cimetière juif de Chatby, décédé des suites de ses blessures après l’armistice du 11 novembre 1918. Deux autres sépultures, disséminées dans le cimetière, sont désormais tombées dans l’oubli. Le 7 septembre 1919, l’inauguration de la nécropole de marbre élevée à la mémoire de trente-huit soldats des troupes coloniales eut lieu dans le cimetière musulman de Khat el-Naar, à Chatby. Puis, au mois d’avril 1933, ce monument de style néo-classique fut transféré au cimetière musulman d’El-Manarah. Ces trois carrés militaires de cultes différents, mais unis au sein du même itinéraire d’un chemin de la mémoire de la Grande Guerre, symbolisent la commémoration de ce qui devait être « la der des ders ». Jean-François Fau Cimetière militaire de Terra Santa. Archives CEAlex, A. Pelle Répartis entre les cimetières chrétien, musulman et juif, les tombes militaires françaises d’Alexandrie abritent 93 soldats français morts en 1915, 3 en 1916, 4 en 1917, 2 en 1918, 2 en 1920, et 2 en 1926. Ce pic de décès en 1915 correspond à la bataille des Dardanelles : un premier mort le 7 avril, 32 en mai, 22 en juin, 16 en juillet, 8 en août, 3 en septembre, 1 en octobre, 8 en novembre et 2 en décembre. 49 soldats au moins sont morts de leurs blessures, 2 ont fait naufrage, dont le Sénégalais Konan Konan. 36 au moins sont morts de maladie. Notons qu’en avril-mai 1915 ce sont les blessés qui prédominent, alors qu’en juin-juillet ce sont essentiellement des malades. La plupart sont décédés dans les hôpitaux d’Alexandrie : 9 à l’hôpital San Stephano, 9 à l’hôpital Desgenettes, 6 à l’hôpital Larrey, 5 à l’hôpital Mansour-Pacha, 5 à l’hôpital européen (?), 3 à l’hôpital Parmentier, 3 à l’hôpital Pasteur, 2 à l’hôpital israélite, 1 à l’hôpital des Diaconesses, 2 à l’hôpital Clot-Bey. Nicole Garnier 26 Cimetière juif d’Alexandrie. Archives CEAlex, A. Pelle Le temps de la mémoire : les Monuments aux Morts pour la France et le retour des soldats rapatriés La France célèbre ses morts dès le 14 juillet 1919 : le Consulat de France, alors installé rue Nabi Daniel dans l’actuel Institut français d’Égypte, dévoile deux plaques de marbre portant les noms des 113 Français d’Alexandrie morts pour la France (elles sont aujourd’hui dans les locaux actuels du Consulat sur la Corniche). La veille, une plaque commémorative avait été posée à bord du paquebot Lotus qui avait emmené en France en août 1914 les soldats français mobilisés (elle sera transférée en 1932 au Consulat lors de la destruction du Lotus). L’après-guerre est le temps de la création des grandes nécropoles nationales : alors qu’en France on crée des cimetières militaires près des champs de bataille, à Alexandrie, le 7 septembre 1919, on inaugure le monument du cimetière musulman de Khat el-Naar à Chatby en l’honneur des 40 soldats subsahariens morts au champ d’honneur (il sera transféré en avril 1933 au cimetière musulman d’El-Manarah), et on aménage en 1923 un carré militaire pour les 150 soldats morts dans les hôpitaux d’Alexandrie durant la campagne des Dardanelles en 1915 et jusqu’à la fermeture des hôpitaux en mars 1916. Les familles réclament le retour de leurs morts : à Alexandrie, le 23 septembre 1920, Marcel Erlanger, Croix de Guerre, mort en France des suites de ses blessures le 14 juillet 1920, est inhumé au cimetière israélite ; en septembre 1920, la dépouille de Victor Guillet, mort pour la France en août 1915, ramenée sur le Sphinx, navire des Messageries Maritimes, est inhumée au cimetière latin ; le 27 avril 1921, Gaston Tivoli, Croix de Guerre, Médaille Militaire, mort pour la France le 20 octobre 1918 dans les Ardennes, est enseveli à Alexandrie. Parallèlement, en août 1923, les familles réclament le retour en France des 46 corps de soldats enterrés à Alexandrie. Le 4 septembre 1923, une cérémonie a lieu sur les quais pour le départ sur le Sphinx des dépouilles de 64 héros, dont 46 exhumés à Alexandrie, 1 au Caire, 12 à Port-Saïd, 2 à Suez, 1 à Djeddah et 2 à Ludd. Enfin, le 22 juillet 1942, les ossements de 17 militaires décédés en 1915 sont transférés en France. Plaque commémorative dévoilée le 23 mars 1930 au Consulat de France, rue Nabi Daniel (aujourd’hui l’Institut français) : portant l’inscription IN MEMORIAM IN SPEM 1914 1918, elle est entourée de deux urnes en bronze du fondeur Susse contenant de la terre sacrée et, dans deux tubes de plomb, les noms des morts de nationalité française, tant à Alexandrie qu’en France. Tiré du Périscope, Archives CEAlex. Plaques commémoratives des Français d’Alexandrie morts pour la France posées au Consulat de France en 1919. Archives CEAlex, A. Pelle. Nicole Garnier Monument offert le samedi 23 avril 1921 par la Colonie Britannique aux Français d’Alexandrie et placé à l’entrée du cimetière latin (il sera transféré en raison de l’élargissement de la rue Fouad dans les jardins nord municipaux). Cimetière musulman d’El-Manarah. Archives N. Garnier Les Cercueils. Le Président de l’Union française des anciens combattants et soldats prononçant un discours. Le 4 septembre 1923, une touchante cérémonie a lieu sur les quais des Messageries Maritimes pour accompagner les corps de 64 héros de la Grande Guerre morts en Orient. Le Périscope. Archives CEAlex. 27 Le traité de paix Archives CEAlex. Le 14 juillet 1919, Le défilé de la Victoire. La foule rue Chérif Pacha. Le Périscope. Archives CEAlex. Le défilé de la Victoire. Archives Ayoub-Boulad. 28 Alexandrie 1914-1918 Dans le cadre de sa programmation culturelle et éducative, l’Institut français d’Égypte à Alexandrie se réjouit Une exposition conçue par Nicole Garnier-Pelle et André Pelle, réalisée par André Pelle d’accueillir l’exposition « Alexandrie 1914-1918 », produite spécialement à l’occasion des commémorations du centenaire de la Grande Guerre. Pendant trois mois, elle permettra à de nombreux publics, et notamment ceux des écoles et universités, de redécouvrir un événement majeur de notre histoire commune, resitué pour la première fois à partir de la ville d’Alexandrie. En accompagnement de cette belle exposition, l’Institut proposera des visites commentées dans les principaux lieux concernés, notamment les cimetières et les anciens hôpitaux, des conférences, des projections de films ou encore des lectures qui seront l’occasion d’amorcer une réflexion entre écrivains, artistes et citoyens des deux rives, sur l’héritage collectif laissé par ce conflit mondial, et également – on l’oublie trop souvent – proche-oriental. Loin de se réduire à une série d’événements figés dans les manuels d’histoire, la Grande Guerre, censée être « la Der des Ders », représente en effet un prisme d’analyse susceptible d’amener les générations actuelles à mieux comprendre les conflits d’aujourd’hui, en les resituant dans une perspective historique et de contribuer ainsi à se forger une vigilance critique. Centre d’Études Alexandrines/CNRS : Faruk Bilici, Professeur au département de Turc, Inalco, Chercheur en délégation au CEAlex/CNRS Colin Clement, Historien et traducteur Jean-Yves Empereur, Directeur Dominique Gogny, Historienne Marie-Delphine Martellière, Égyptologue, Ingénieur d’Étude André Pelle, Photographe, Ingénieur de Recherche Cécile Shaalan, Topographe-Cartographe, Ingénieur d’Étude Université Senghor : Jean-François Fau, Directeur du Département Culture Ce projet, amené à circuler dans d’autres centres culturels, a été réalisé grâce au travail remarquable fourni par deux partenaires incontournables et fidèles de l’Institut, le Centre d’Études Alexandrines avec l’appui de l’Université Senghor. Qu’ils en soient ici vivement remerciés ! Véronique Rieffel Directrice de l’Institut français d’Égypte à Alexandrie François-Marie Lahaye, Directeur du Département Santé Ministère de la Culture : Nicole Garnier-Pelle, Conservateur Général du Patrimoine chargée du musée Condé à Chantilly Université de Paris 7 : Anne-Marie Moulin, CNRS/UMR SPHERE (Sciences Philosophie Histoire) Institut français d’Égypte à Alexandrie : Véronique Rieffel, Directrice Réalisation PAO Mahitab Fathy, CEAlex ALPHAGRAPH - 03-4864052 Alexandrie 1914-1918 Le centenaire de la Grande Guerre est l’occasion d’évoquer Alexandrie 1914 - 1918 un pan méconnu de l’histoire d’Alexandrie, ce conflit mondial n’ayant pas épargné la ville. Cette exposition élaborée par le Centre d’Études Alexandrines, avec la participation de l’Université Senghor, et présentée par l’Institut Français d’Égypte à Alexandrie, retrace les destins croisés d’Alexandrins mobilisés, partis se battre en Europe et de soldats venus d’Europe pour combattre sur le front d’Orient. Alexandrie a joué en effet un rôle important en constituant l’une des bases arrière des Alliés aux Dardanelles : en amont du débarquement Cahier de l’Alexandrine Christine Sinano, Archives Ayoub/Centre d’Études Alexandrines l’image de la 1ère de couverture : Soldats et personnel hospitalier posant lors du repas dans les jardins de la campagne des Frères, hôpital Parmentier. Archives CEAlex. en Turquie, le 25 avril 1915, et en tant que ville-hôpital pendant les longs mois de batailles, les blessés et malades étant acheminés par les navires-hôpitaux. Documents d’archives, cartes postales, photographies, presse, sont autant de témoignages qui ont permis de reconstituer la vie des Alexandrins pendant ce conflit, d’Égyptiens enrôlés dans la guerre, mais aussi celle des Africains sub-sahariens, Australiens, Britanniques, Français, Indiens, Néo-Zélandais et Turcs qui se croisèrent à Alexandrie. Une exposition conçue par Nicole Garnier-Pelle et André Pelle, réalisée par André Pelle Centenaire de la Première Guerre mondiale Alexandrie, Institut français d’Égypte Du 13 novembre 2014 au 10 janvier 2015