Etude sur les avantages comparatifs et les filières d`avenir dans les

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Etude sur les avantages comparatifs et les filières d`avenir dans les
Etude sur les avantages comparatifs et
les filières d’avenir dans les DOM
Agence française de développement
Rapport final
Table des matières
Table des matières
2 Introduction générale
4 Compétitivité, avantages comparatifs, marchés pour les « filières d’avenir »
5 Atouts et handicaps : un premier socle pour aborder les problèmes de compétitivité
des DOM
6 Approche théorique et approche « terrain »
7 Les filières retenues pour analyse dans chaque DOM
8 1. Le référentiel d’analyse
9 1.1 Les problématiques des petites économies insulaires : croissance et compétitivité
9 1.2 Les approches de la convergence : théorie et applications
11 1.3 La croissance économique des SIDS par le prisme des théories de la croissance
endogène
12 1.4 La croissance des DOM : les approches structuralistes
13 1.5 Un nouveau regard sur la croissance et la compétitivité des DOM
17 1.6 Conclusion
19 2. Les missions de terrain
19 2.1 Cadrage des missions
19 2.2 Déroulement des missions
19 2.3 Structure des rapports de mission
20 3. Éléments d’analyse par filière
20 3.1 La filière Agriculture et agroalimentaire
20 3.2 La filière Énergies renouvelables et maîtrise de l’énergie
40 3.3 La filière Tourisme / écotourisme
70 3.4 La filière Bois
99 3.5 La filière Bâti tropical
4. Synthèse sur les facteurs de compétitivité et les avantages comparatifs
109 116 4.1 Guadeloupe : les filières Éco-tourisme, agriculture-Industries agroalimentaires
et Énergies renouvelables
117 4.2 Guyane : les filières Bois et Tourisme
128 4.3 Martinique : les filières Agriculture-Industries agroalimentaires et Énergies
renouvelables
134 4.4 La Réunion : les filières Bâti tropical, ENR et Tourisme
5. Conclusions
5.1 Une valeur sûre : la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
140 150 150 2
5.2 Un potentiel prometteur : l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et
d’expertise
151 5.3 Une nécessité : l’exploration raisonnée des marchés de niche
151 5.4 Une filière exportatrice « évidente » mais soumise à un contexte de forte
concurrence et de grande volatilité : tourisme / éco-tourisme
152 5.5 Les enjeux communs à l’ensemble des filières et les leviers d’action à mobiliser
152 Annexe : liste des entretiens
157 Personnes rencontrées lors de la mission en Guadeloupe :
157 Personnes rencontrées lors de la mission en Guyane :
158 Personnes rencontrées lors de la mission en Martinique :
158 Personnes rencontrées lors de la mission à La Réunion :
159 Annexe : données des douanes sur les échanges de marchandises
161 Introduction
161 Panorama général
161 Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
3
Introduction générale
L’objectif de la présente étude est, au terme du cahier des charges de l’AFD,
« d’engager une réflexion sur la compétitivité des territoires des DOM dans le contexte
international actuel et d’identifier plus précisément les potentialités de développement
d’activités (production de biens et de services) sur les marchés locaux et sur les
marchés extérieurs ».
Les handicaps dont souffrent les petites économies insulaires ont fait l’objet de
nombreux travaux dans la littérature économique depuis les années 1990, qui ont
évidemment souligné la faible compétitivité « prix » de ces économies, faible
compétitivité encore aggravée pour les DOM par leur appartenance à la sphère
économique française et européennes (salaires élevés, contraintes réglementaires, …).
Assez peu de travaux en revanche se sont intéressés, jusqu’à une période récente, aux
facteurs de compétitivité « hors prix » qu’il est possible de mettre en évidence et aux
opportunités qu’ils créent1. Par ailleurs, si les atouts dont disposent les DOM, soit
naturels (richesse environnementale et biodiversité, espace maritime, …), soit
résultant des politiques publiques nationales et européennes (capacités de recherche,
qualification des ressources humaines, aides diverses, …), sont bien soulignés, les
raisons pour lesquelles ces atouts ne se sont guère traduits jusqu’ici par la création
d’activité ont été peu analysées de façon approfondie.
Par ailleurs, un balayage rapide de la littérature (DOM aussi bien que « petites
économies insulaires » en général) montre que l’approche reste généralement macroéconomique : peu de travaux se sont intéressés aux stratégies des entreprises dans la
perspective généralement retenue par l’ « économie industrielle », à part une thèse de
2009 sur la performance des entreprises en Guadeloupe2. On retiendra surtout la très
récente étude de V. Caupin et B. Savoye (AFD), « Une entreprise dans un DOM. Est-ce
que cela change la donne ? », qui contient des observations méthodologiques
précieuses et un paragraphe sur les stratégies et trajectoires d’entreprises3, mais reste
malgré tout assez loin d’une véritable approche micro-économique.
L’objectif de fond de l’étude s’est donc accompagné d’un objectif méthodologique :
mettre en œuvre une approche « innovante » permettant d’expliquer pourquoi les
atouts évoqués ne sont pas transformés en avantages comparatifs sur le terrain et
n’ont donc pas produit d’effets en termes d’activités, d’exportations et d’emplois, en
tout cas et a minima à un niveau satisfaisant. Cette approche innovante a privilégié
dans toute la mesure du possible la dimension micro-économique, au niveau des
entreprises, de leur stratégie (ou de leur absence de stratégie), de la culture et du
comportement de leurs dirigeants, sans négliger pour autant les rapports complexes
noués (ou insuffisamment noués) entre le monde de l’entreprise et le milieu politique
1 On retiendra néanmoins : Josling (T.), Stanford University, Trade Policy in Small Island Economies :
Agricultural Trade Dilemmas for the OECS, IICA/NCFAP Workshop on Small Economies in the Global
Economy, Grenada, August 1998. En dépit de son titre, cette communication propose une approche globale
et évoque les avantages comparatifs (http://ctrc.sice.oas.org/geograph/caribbean/Jossling.pdf).
2 Ernatus (H.), Performance des entreprises dans une petite économie insulaire de la Caraïbe : le cas de la
Guadeloupe, thèse de doctorat, Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne, 2009. En dehors de la sphère des
études universitaires, on rappelle que l’élaboration de la Stratégie régionale d’innovation de la Guadeloupe a
donné lieu à une enquête conduite auprès des entreprises, enquête électronique accompagnée d’une
cinquantaine d’entretiens face à face avec des dirigeants d’entreprise ; voir aussi : Vella (S.), SMEs and
Economic Resilience Building, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states
Institute, University of Malta, 2011 ; Vella (S.), Private Sector Development and SMEs, ibid., 2007.
3 Caupin (V.) et Savoye (B.), Une entreprise dans un DOM. Est-ce que cela change la donne ? Une analyse
comparative des entreprises des DOM et de métropole, Focales 15, AFD, juin 2012.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
4
et administratif4. La traduction la plus visible d’une telle approche apparaît dans les
encadrés consacrés à des entreprises spécifiques pour chaque filière et dans chaque
DOM.
Compétitivité, avantages comparatifs, marchés pour les « filières d’avenir »
Les préoccupations qui ont conduit l’AFD à lancer la présente étude sont avant tout de
nature structurelle et renvoient aux conditions de la compétitivité dans les DOM. Il est
néanmoins important de souligner que ces conditions ont été affectées depuis 2008
sous le poids des données conjoncturelles et de la pression sur les dépenses
publiques5.
Sachant que la compétitivité coût des territoires des DOM est globalement faible pour
des raisons bien connues6, l’étude s’est plus particulièrement attachée à cerner les
avantages comparatifs qui pouvaient être analysés en termes de compétitivité hors
prix, en particulier : la différenciation des produits, généralement liée aux conditions
locales y compris aux capacités locales d’innovation :
•
soit concernant des produits et services spécifiques à la région (caraïbe, aire
amazonienne, Océan indien et l’ensemble de la bande intertropicale) qui
devront trouver leurs marchés à l’international hors région (ex. : produits
« tropicaux », produits agricoles « à contre saison », tourisme7), en tenant
compte des contraintes/avantages de l’appartenance à la zone euro et à
l’Union européenne suivant le marché visé ;
•
soit concernant des produits ou des services que les capacités mobilisables
permettront d’adapter aux besoins de la région (énergies renouvelables,
matériaux de construction, ingénierie, services liés à la santé, etc.) et qui
devront trouver place sur le marché local et sur le marché régional8, voire
pour certaines niches de produits et services sur le « grand » marché
international.
Dans ce dernier cas, on a pris garde de ne pas négliger les éléments de compétitivité
prix qui peuvent résulter des politiques publiques, nationales et européennes, de
soutien à l’innovation, aux PME, à l’export, etc., susceptibles en principe de permettre
d’abaisser les coûts –, politiques publiques qui n’existent pas ou n’existent que de
façon embryonnaire la plupart du temps dans les pays de la région, en particulier pour
ce qui est de la zone caraïbe dans les petits États insulaires voisins. Bien entendu,
l’existence de telles politiques publiques n’est pas une garantie de leur efficacité, et l’on
a pris soin d’évoquer cette question.
Les conditions de la compétitivité dans les DOM ont été abordées à la fois d’un point
de vue horizontal et d’un point de vue vertical :
•
d’un point de vue horizontal : en mettant en évidence les facteurs actuels et
potentiels de compétitivité, et à l’opposé les handicaps, en recensant et en
Sur ce point, on consultera à nouveau avec intérêt Josling, 1998, op. cit. ; voir aussi : Curmi (L.),
Governance and Small States, in: Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states
Institute, University of Malta, 2009.
5 Pour un exemple d’analyse dans la zone Pacifique : Jarayaman (T.K.), Global Financial Crisis and
Economic Downturn : Challenges and Opportunities for the Small Island Countries in the Pacific, in:
Occasional Papers on Island and Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta,
2012; Antoniou (A.), The Global Financial Turmoil and Small States, in: Occasional Papers on Island and
Small States, Islands and Small states Institute, University of Malta, 2009.
6 Voir notamment : INSEE - IEDOM - AFD (2008), L'ultra périphéricité, définit-elle un modèle de
croissance ? ; Caupin (V.) et Savoye (B.), AFD (2012), op. cit.
7 Sachant qu’il peut y avoir un lien entre tourisme et production agricole / agroalimentaire locale.
8 Sachant que les marchés régionaux peuvent être très différents en matière de demande et de solvabilité : la
proximité du Brésil ou la présence dans le bassin caraïbe autorise des perspectives et laisse apparaître des
opportunités pour certains DOM que l’on retrouvera difficilement dans la zone Pacifique, voire dans l’Océan
indien.
4
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
5
explicitant leurs déterminants, et en établissant les interactions qui peuvent
exister entre ces facteurs ;
•
d’un point de vue vertical : en travaillant sur un certain nombre de filières de
façon fine à travers l’examen des stratégies des entreprises concernées, et,
dans la mesure du possible, des relations inter-branches ou inter-filières.
Atouts et handicaps : un premier socle pour aborder les problèmes de
compétitivité des DOM
La communication de la Commission européenne de juin 2012, « Les RUP : un
partenariat pour une croissance intelligente durable », et celle d’août 2008, « Les
RUP : un atout pour l’Europe » ont mis en avant les atouts suivants de ces territoires :
le potentiel insuffisamment exploité que représentent les ressources agricoles et un
espace maritime (biodiversité marine, ressources halieutiques) ; la présence de
nombreux centres de recherche et des savoir-faire adaptés aux pays de la zone
intertropicale ; un niveau de formation/qualification élevé par rapport aux pays
environnants ; une richesse environnementale (biodiversité) ; le potentiel en matière
d’énergies renouvelables, d’éco-tourisme ; etc.
On doit cependant souligner que cette présentation vise à mettre en avant en quoi les
RUP sont un atout pour l’Union européenne plus qu’à souligner leurs atouts dans la
compétition internationale, même si les deux approches ne s’opposent pas. Elle
mérite par ailleurs d’être affinée dans la mesure où les atouts évoqués peuvent bien
constituer une base pour développer des avantages comparatifs, mais sur des marchés
différents et avec des finalités différentes :
•
ainsi, la présence de centres de recherche et le niveau de
formation/qualification élevé peuvent fournir la base d’avantages comparatifs
par rapport aux pays voisins en développement ou en émergence, qui ne
disposent pas des mêmes ressources du fait de l’absence ou de la faiblesse des
politiques publiques d’éducation et de recherche ; ces ressources peuvent ainsi
permettre le développement et l’exportation de savoir-faire, de services
d’ingénierie, etc. ; il est cependant important de noter qu’un des points
critiques de la transformation de cet atout (relativement « abstrait ») en
avantage comparatif « concret » est constitué par la traduction d’activités sans
fin lucrative (recherche et coopération internationale en matière de recherche)
en activités marchandes ;
•
ainsi encore, les ressources agricoles et halieutiques, la richesse
environnementale, la biodiversité, l’espace maritime, etc. sont des atouts
globalement communs aux pays de la région :
−
ces atouts peuvent fournir la base du développement de filières locales et
attirer des investissements extérieurs (aquaculture, éco-tourisme,
valorisation de la biodiversité) ;
−
ils peuvent aussi procurer aux centres de recherche les moyens d’une
différenciation et des opportunités d’expérimentation/prototypage,
susceptibles de faire l’objet d’une valorisation (voir ci-dessus : traduction
d’activités sans fin lucrative en activités marchandes) ;
−
les marchés potentiels peuvent être
nationaux/européens, voire internationaux ;
−
l’exploitation de leurs potentialités peut cependant se heurter à des
contraintes techniques ou règlementaires fortes ; il en va par exemple du
secteur de la pêche qui relève d’un cadre communautaire (orienté sur la
limitation de l’exploitation de la ressource) non adapté à la situation des
RUP (sous exploitation de la ressource halieutique, et pêche artisanale
vieillissante peu en capacité de tirer profit de la richesse).
aussi
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
bien
locaux
que
6
En regard, le résumé exécutif de l’étude « Growth Factors in the Outermost Regions »
soulignait que les RUP présentent toutes les caractéristiques des économies de petite
taille9 : étroitesse du marché domestique (entraînant des tendances à des situations de
monopole dans la production et le commerce), ressources domestiques rares
(naturelles et humaines), faible produit intérieur, ainsi que possibilités limitées de
diversification, incapacité à peser sur les prix internationaux, exportations limitées et
marchés à l’exportation étroits (fort niveau d’importations par rapport au PIB), haut
degré d’ouverture structurelle au commerce extérieur, coûts de transports et de
communications élevés, etc. Dans le même temps, il faut noter que la littérature sur les
« petites économies » privilégie souvent les « petits États insulaires en
développement » alors que les RUP n’ont pas le même degré d’autonomie en ce qui
concerne leur politique macro-économique, ce qui vaut en particulier pour les DOM et
les place dans une situation spécifique.
A l’éloignement du marché européen (et de sa zone monétaire), à l’insularité et à la
petite taille, à la topographie et au climat souvent difficiles, et à la dépendance
économique à l’égard d’un petit nombre de produits, il faudrait encore ajouter, comme
l’ont montré les études réalisées jusqu’ici sur les DOM : la faiblesse des services aux
entreprises (privés ou bénéficiant d’un soutien public) concernant le développement
de projets innovants (viabilité), la connaissance des marchés extérieurs, l’accès à des
investisseurs extérieurs potentiels, etc. ; et, sur un plan sociopolitique, le temps de la
décision politique généralement long et le manque relatif d’ingénierie de projets (tant
dans le public que le privé), ainsi qu’une absence de « culture de la confiance » chez les
dirigeants d’entreprise (qui les porte peu à mener des actions collectives pour explorer
les marchés extérieurs ou pour se lancer dans des projets innovants).
Approche théorique et approche « terrain »
Nous avons réalisé pour la présente étude, comme le demandait le cahier des charges,
une revue de la littérature et élaboré une synthèse des principales conclusions des
études et rapports portant sur la compétitivité et l’ouverture commerciale des
économies ultramarines. Cette revue et cette synthèse ont permis de faire le point,
dans un premier chapitre (§ 1 : Le référentiel d’analyse), sur l’approche théorique des
problèmes de compétitivité des DOM, et, au-delà, des petites économies insulaires. Ils
nous ont conduits à mettre en lumière des questionnements et à dégager des
hypothèses de travail qui ont servi de cadre de référence pour les missions de terrain
réalisées dans chaque DOM (guides d’entretien, rapports de mission).
On doit noter que l’étude « Growth Factors in the Outermost Regions », réalisée pour
la Commission européenne et précédemment citée, avait procédé de façon assez
proche. En effet, cette étude était divisée en deux volets :
•
un volet à caractère macro-économique avec une dimension théorique
comprenant : une analyse des tendances socio-économiques récentes et de
leurs facteurs sous-jacents ; l’examen de nouveaux modèles de croissance
fondés sur des potentiels non exploités ou sous-exploités ; une analyse croisée
des facteurs de croissance ; l’élaboration d’un indice de vulnérabilité ;
•
un volet « analyses de terrains » dans chacune des régions ultrapériphériques.
Dans le premier volet, le chapitre consacré aux nouveaux modèles de croissance était
très réduit et il était centré sur les énergies renouvelables, les services (maritimes,
environnement et santé, ainsi que sur l’intérêt géopolitique).
Globalement, on peut considérer que cette étude mettait avant tout l’accent sur
l’intérêt des RUP pour l’Europe et sur les handicaps qu’ils devaient surmonter, ainsi
9 Voir, à titre comparatif, pour une évaluation déjà ancienne des facteurs de vulnérabilité concernant les
petits États insulaires : Briguglio (L.), Small Island Developing States and Their Economic
Vulnerabilities, in : World Development, vol. 23, n°9, 1995.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
7
que sur leur vulnérabilité. L’analyse des facteurs de croissance portait sur les grands
indicateurs macro-économiques.
On voit donc bien la différence d’approche avec la présente étude, orientée sur la
compétitivité et sur l’ouverture commerciale, et donc sur les facteurs susceptibles de
contribuer à surmonter les faiblesses et la vulnérabilité des économies des DOM, soit
une approche à la fois théorique et pragmatique destinée à comprendre comment les
atouts identifiés depuis longtemps dans les DOM peuvent être des facteurs de
compétitivité sur les marchés locaux, nationaux, internationaux (dont les marchés
régionaux), mais ne l’ont guère été de fait jusqu’à présent de façon concrète.
Les filières retenues pour analyse dans chaque DOM
Le cahier des charges de l’étude prévoyait que serait conduite une analyse de filières
et/ou des stratégies d’entreprises, et il évoquait comme hypothèses l’industrie agroalimentaire (dont la pêche), la filière « énergie renouvelables », d’autres filières
industrielles, ou encore des filières dans le secteur des services.
Après échange avec le Comité de pilotage de l’étude et les délégations de l’AFD dans
chaque DOM, les filières suivantes ont été retenues :
•
Guadeloupe : agriculture et agroalimentaire ; énergies renouvelables et
maîtrise de la demande énergétique ; tourisme / écotourisme
•
Guyane : écotourisme ; bois ;
•
Martinique : agriculture et agroalimentaire ; énergies renouvelables et
maîtrise de la demande énergétique ;
•
La Réunion : énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique ;
tourisme ; bâti tropical.
Pour chacune de ces filières, des entretiens approfondis ont été conduits avec des
dirigeants d’entreprise de façon à comprendre au mieux les stratégies mises en œuvre
pour améliorer la compétitivité et conquérir des marchés, qu’ils soient locaux ou
extérieurs.
Comme on le voit, deux filières se retrouvent choisies dans trois DOM sur quatre,
facilitant ainsi une analyse transversale : énergies et tourisme/écotourisme.
Agriculture et agroalimentaire ont été retenus aux Antilles, Guadeloupe et Martinique.
Pour clore cette introduction générale, on rappellera que les différentes filières
analysées évoluent dans des contextes géographiques sensiblement différents, qui
affectent leur potentiel compétitif et les capacités d’exportation :
•
Guadeloupe et Martinique sont en compétition dans l’univers caraïbe avec des
pays voisins, petites économies insulaires, comme pays continentaux, qui
bénéficient en général de coûts du travail sensiblement inférieurs ; en outre,
les petits pays insulaires voisins jouissent d’un statut d’indépendance ou de
large autonomie leur permettant de développer des services financiers off
shore ; ces deux DOM sont donc soumis à une forte pression compétitive de la
part de leurs voisins (produits agricoles et tourisme notamment).
•
La Guyane est relativement isolée au milieu de voisins à faible revenu par tête,
État brésilien de l’Amapa compris, et elle est soumise à une forte pression
migratoire, avec un marché local qui reste largement à défricher.
•
Enfin, la Réunion se trouve dans un univers complexe, marqué par le triple
voisinage : de Maurice, qui est parvenu à créer un vrai processus de
développement, fondé en partie sur le tourisme ; de l’Afrique du Sud, une
puissance régionale émergente ; et de pays pauvres voire très pauvres
(Comores, Madagascar), certains étant cependant en changement rapide (ex. :
Mozambique). Cette configuration est par certains côtés proche de celle de la
Guadeloupe et de la Martinique (coût de la main d’œuvre) ; cependant,
combinée à un poids démographique important du territoire, elle ouvre des
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
8
potentialités d’exportation de services et d’ingénierie, avec dans le même
temps la présence d’un large marché local.
1. Le référentiel d’analyse
1.1 Les problématiques des petites économies insulaires : croissance et
compétitivité
Une littérature théorique et empirique importante est consacrée à l’analyse de la
croissance économique dans les petits espaces insulaires et, en particulier, dans les
départements et les régions d’Outre-mer français (DOM-ROM). Cette littérature
cherche d’une part, à étudier la nature et les mécanismes de la croissance économique
de long terme dans ces espaces et d’autre part, à identifier les déterminants de leur
compétitivité.
Les nombreux diagnostics comparatifs des trajectoires des espaces micro-insulaires et
périphériques montrent une différentiation de parcours, jalonnés de réussites et
d’échecs. Même si certains éléments d’une trame commune se dégagent, il semble
évident que ni les dotations initiales en ressources ni les avantages et/ou contraintes
géographiques ne puissent apparaître comme des conditions suffisantes pour
expliquer les diversités des processus de développement économique engagés. La
dimension institutionnelle mais aussi les choix de politique économique et de stratégie
de croissance semblent également fortement déterminants.
Depuis les travaux de Kuznets (1960) et leurs prolongements (Seers, 1964, Demas,
1965), les économistes ont identifié un certain nombre de contraintes spécifiques au
développement des petites économies insulaires (et/ou des plus petits pays : « small
nations ») qui se résument en trois grandes catégories :
En premier lieu, des contraintes liées à des effets de taille. Elles se définissent, à de
multiples niveaux, par le manque de ressources naturelles, l’étroitesse du marché
domestique, un stock capital humain limité ou l’absence d’un seuil démographique
minimal nécessaire à la mise en place rationnelle et opérationnelle d’un ensemble
d’infrastructures publiques et de réseaux de communication. Ces contraintes sont,
d’une part, à l’origine de la faiblesse des économies d’échelle, internes ou externes,
avec comme résultat, la formation d’un tissu productif essentiellement peuplé de
petites entreprises, sans forte spécialisation sectorielle, ainsi que l’absence significative
d’investissements directs étrangers (IDE). Ces contraintes expliquent, d’autre part,
l’absence d’économies de variétés, c’est-à-dire des avantages technologiques ou
pécuniaires résultant de la complémentarité des activités au sein d’une firme et/ou
d’une économie donnée (Dimou, 2004).
En second lieu, des contraintes liées à la distance considérable qui sépare ces
économies des marchés mondiaux et qui altèrent à la fois, la nature des échanges
économiques et celle des migrations humaines. L’éloignement géographique de ces
régions est soumis à une distance-accès, responsable de la rupture des charges dans
l’acheminement des produits, d’où la forte dépendance de l’activité productive vis-àvis du secteur des transports (Crusol et al, 1988, Levratto, 2006). Outre le
renchérissement de l’activité économique locale (les DOM représentent un cas rare
d’application possible – bien que pas systématique – du concept d’inflation importée),
cette dépendance a une conséquence fondamentale en matière de distribution et
d’organisation des activités locales, puisque celles-ci sont fortement tributaires de la
présence d’infrastructures de transport maritime et aérien ainsi que de services
annexes de stockage, de logistique, de conditionnement et de distribution des
marchandises (Dimou, 2006).
En troisième lieu, des contraintes liés aux caractéristiques géographiques de ces
espaces telles que le climat et la topographie plutôt que la taille (Armstrong et Read,
2000). Bien que ces caractéristiques ne représentent pas, par elles-mêmes, des
contraintes insurmontables en matière de développement économique, elles
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
9
expliquent plusieurs phénomènes persistants dans les petites économies insulaires tels
que la forte densité de population (du fait de la topographie), les spécialisations
agricoles (liées au climat), ainsi qu’un niveau élevé de risques naturels et
environnementaux dont la gestion préventive ou corrective peut s’avérer plus ou
moins coûteuse.
Ces trois séries de contraintes, relativement communes à tous les espaces insulaires,
sont à l’origine de leur fragilité et de leur grande vulnérabilité face aux chocs exogènes
extérieurs, d’une part, et des stratégies de croissance limitées dont ils disposent,
d’autre part. Le rôle de ces contraintes est analysé dans une littérature économique
récente, développée à la suite des travaux originaux de Briguglio (1995, 2007) sur la
vulnérabilité et la résilience des petites économies insulaires dénommées SIDS : Small
Island Developing States (Adrianto et Matsuda, 2004, Briguglio et al, 2009 ; Naudé,
Santos-Paulino et McGillivray, 2009a ; Santos-Paulino, 2010 ; voir aussi le rapport des
Nations Unis UNU-WIDER 2010 sur la vulnérabilité des SIDS entre 2006 et 2010).
Le niveau d’agrégation spatiale commun dans ces travaux est défini par l’insularité et
la petite taille ; or, celles-ci regroupent des situations institutionnelles et politiques
fortement différenciées qui se traduisent par des trajectoires de développement
économique divergentes. La littérature sur les SIDS traite de façon quasi-uniforme les
DOM-ROM français, les RUP européennes, les îles américaines ou australiennes, les
complexes micro-îliens du Pacifique, les îles touristiques des Antilles et/ou les
plateformes financières chypriote ou caraïbes, qui représentent pourtant un ensemble
relativement hétérogène, notamment en matière de niveau de développement
économique.
Sur le plan statistique, le travail comparatif laisse certes, apparaître deux profils socioéconomiques différents entre les territoires non-indépendants et les îles souveraines.
Ainsi, les îles politiquement dépendantes affichent des niveaux de revenu par habitant
(16 300 $) en moyenne deux à trois fois supérieurs aux îles indépendantes (6 100 $).
En termes de structure productive, la part du secteur primaire dans le PIB est
beaucoup plus faible dans les îles dépendantes (5% contre 16%), et celle du secteur
tertiaire beaucoup plus élevée (80% contre 65%). Ces différences peuvent être
interprétées par le fait que les rythmes de passage d’une économie traditionnelle vers
une économie de services sont nettement plus rapides dans les îles dépendantes que
dans les îles souveraines (Dupont, 2010).
Cependant, même lorsque l’on opère un classement selon des critères institutionnels,
les tentatives de généralisation peuvent s’avérer périlleuses : ainsi, parmi les États
indépendants, une comparaison entre l’île Maurice qui dispose d’une base industrielle
solide et développe une plateforme logistique et financière permettant de s’imposer
dans les échanges de biens et services dans le triangle Durban-Perth-Bombay et la
république de Haïti qui figure parmi les pays les plus pauvres du monde et dont
l’activité économique est fortement représentée par l’agriculture vivrière, est peu
adéquate. De la même façon, le niveau de développement dans les RUP est
fondamentalement différent, parfois y compris entre deux régions d’un même pays :
ainsi, à Madère, le PIB par habitant exprimé en PPA est supérieur à la moyenne du
Portugal, contrairement à l’autre RUP portugaise, les Açores. Dans les DOM, les écarts
de niveau de vie avec la France hexagonale sont inférieurs de 40% en moyenne, avec
des écarts néanmoins plus ou moins conséquents entre la Martinique et Mayotte, ou
encore la Guyane qui n’est pas un espace insulaire. Enfin, Hawaii affiche un niveau de
PIB par habitant supérieur à la moyenne américaine, contrairement à Guam, tandis
que Porto-Rico représente un cas rare d’une île dépendante fortement spécialisée dans
les activités industrielles à faible valeur ajoutée, telles que le textile.
Dans ce travail, nous nous focalisons plus particulièrement sur la croissance dans les
DOM français et les perspectives de compétitivité sectorielles et entrepreneuriales qui
en découlent. Ce travail est organisé en six sections, selon les approches théoriques
utilisées pour analyser les processus de croissance économique et leur validation
empirique : après la partie introductive, la seconde section examine les théories de
croissance standard et les processus de convergence ; la troisième section rappelle les
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10
approches en termes de croissance endogène ; la quatrième section présente les
approches structuralistes et les modèles qui en découlent (MIRAB actualisé, PROFIT,
SITE) ; la cinquième section tente d’apporter un regard synthétique et critique des
travaux réalisés jusque-là et cherche à engager de nouvelles perspectives de recherche
sur les filières d’avenir et la compétitivité dans les DOM ; enfin la sixième partie
résume ces perspectives dans une conclusion synthétique succincte.
1.2 Les approches de la convergence : théorie et applications
Les approches classiques de la croissance économique trouvent leurs origines dans les
travaux de Solow (1956) et de Swan (1956). Dans le modèle initial de Solow, le taux
d’épargne est entièrement exogène ; le taux de croissance de long terme repose sur la
croissance démographique et le niveau de progrès technologique. Il conduit à une
génération de modèles de croissance à deux facteurs de production (capital et travail)
qui mettent l’accent prépondérant sur l’accumulation du capital.
En économie ouverte et en admettant l’hypothèse initiale d’une libre circulation du
capital et du travail, ces modèles prévoient un processus de convergence des niveaux
de revenu et/ou du PIB par habitant entre les différentes régions. Dans ces modèles
fortement anti-interventionnistes, les politiques de relance et/ou les politiques
sectorielles n’interviennent de façon significative ni dans la détermination ni dans
l’accélération du processus de rattrapage des régions les plus développées par les
régions en retard.
Ces approches ont généré un ensemble d’applications qui s’interrogent sur les
processus de rattrapage réel des moyennes métropolitaines et européennes par les
économies des DOM, depuis la départementalisation de 1946. Sur le plan empirique,
cela conduit à tester la propriété de convergence du PIB et/ou du revenu entre des
régions et des pays, en utilisant différentes définitions du concept, à savoir la bconvergence, la s-convergence et la convergence stochastique (Fuss, 1999 ; Islam,
2003).
De façon générale, la plupart des chercheurs montrent que le taux de croissance
nominale du PIB dans les DOM et dans les RUP est supérieur à celui de la France
métropolitaine et des moyennes européennes, ce qui permet de supposer un processus
de rattrapage plus ou moins rapide10. Contrairement à la croissance extensive dans les
RUP portugaises et espagnoles, alimentée, dans les premières, par une accumulation
du capital (sous les effets des IDE) et, dans les deuxièmes, par la croissance du facteur
travail, la croissance économique de long terme dans les DOM est de nature intensive
et repose essentiellement sur des gains de productivité (Union Européenne, 2011).
Ces gains apparents de productivité sont générés, d’une part, par le développement et
la modernisation des infrastructures publiques et, d’autre part, par l’amélioration des
systèmes d’enseignement et de formation (principalement à La Réunion). Ils
concernent essentiellement le secteur public mais aussi le secteur privé via la création
d’externalités technologiques par le biais de l’investissement public en matière
d’infrastructures. Accompagnés par une croissance des salaires plus élevée, ces gains
de productivité expliquent en grande partie le paradoxe des DOM, à savoir un taux de
croissance nominale de long terme élevé, parallèlement à la persistance voire à
l’augmentation du taux de chômage sous la pression démographique.
La plupart des travaux empiriques sur les économies des DOM concluent à un
processus de rattrapage des standards métropolitains dans le long terme, avec
toutefois certains écarts persistants notamment au niveau du chômage. Le rapport sur
les modèles de croissance de long terme dans les régions ultrapériphériques, publié
par l’AFD, l’INSEE et l’IEDOM en 2007, propose une décomposition des processus de
rattrapage observés, en trois processus distincts :
10 Entre 2000 et 2009, le taux de croissance annuel moyen du PIB par habitant en Europe (UE27) a été de
2,3%, en France de 1,9%, 2,6% en Martinique, 2,9% en Guyane, 3% en Guadeloupe et 4,2% à La Réunion.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
11
•
Un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant des différents
pays européens et notamment des trois pays concernés par des RUP
insulaires, à savoir la France, l’Espagne et le Portugal ; ce processus semble,
néanmoins, moins significatif lorsque l’on applique des tests de racine unitaire
entre 2000 et 2010, avec des écarts persistants entre les pays.
•
Un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant des RUP avec
leurs métropoles respectives. Mise à part la Guyane, dans la fin des années 90,
les DOM français enregistrent des taux de croissance annuels plus élevés que
la moyenne nationale.
•
Enfin, un processus de convergence des niveaux de PIB par habitant entre les
différentes RUP européennes, certes lié aux deux processus de convergence
précédemment cités, mais aussi à des mécanismes et des trajectoires
sectorielles de croissance économique structurellement proches (tourisme,
services).
Bien que la quasi-totalité des travaux empiriques semblent conclure en faveur d’un
processus de rattrapage des standards européens, par les économies des DOM et des
RUP, ce qui conduirait à considérer qu’indépendamment des stratégies de
développement appliquées, les disparités économiques s’estompent dans le long terme
grâce aux mécanismes du marché, certaines études récentes viennent mettre en cause
l’efficacité d’un tel processus.
En travaillant sur le cas de La Réunion entre 1950 et 2006 Charles et al (2013)
appliquent des tests de racine unitaire sur des données chronologiques en intégrant
des effets de rupture structurelle (c’est-à-dire en intégrant des sauts dans les séries
chronologiques des PIB par habitant liés à des chocs exogènes, tels que l’abandon du
franc CFA en 1975), afin d’étudier la convergence stochastique de l’économie
réunionnaise avec la France métropolitaine et l’Europe (ce qui conduit à tester si la
différence entre les PIB par tête réels entre La Réunion et la France métropolitaine
suit un processus stationnaire ou pas).
L’application des tests de racine unitaire sur des séries corrigées ne montre aucune
évidence en faveur d’un éventuel processus de convergence réelle pour l’économie
réunionnaise. Dans ce cas, malgré des taux de croissance du PIB nominaux
impressionnants, la Réunion n’enregistre pas de convergence par rapport aux
standards français et européens en termes de niveau de vie. Selon les auteurs, ces
résultats, d’une part, mettent en cause le lien entre les performances globales de l’île et
les progrès du niveau de vie de ses habitants et, d’autre part, laissent supposer que le
modèle de croissance intensive s’appuyant sur une augmentation de la productivité
des facteurs de production (notamment dans le secteur public) a rapidement atteint
ses limites, une fois que l’équipement et les infrastructures publiques locales ont été
modernisés.
Ces modèles ne renseignent ni sur la compétitivité des firmes ni sur les performances
sectorielles, mais permettent de mesurer les résultats des stratégies de développement
engagées dans le long terme.
1.3 La croissance économique des SIDS par le prisme des
croissance endogène
théories de la
Face aux défauts de l’approche classique de la croissance et des théories de la
convergence, un groupe de modèles cherche à expliquer les mécanismes de la
croissance de long terme par des variables déterminées de façon endogène,
notamment par la prise en compte de l’éducation et du stock de connaissances
accumulées (qualifié comme un capital humain) mais aussi en considérant certaines
autres variables telles que le stock de capital physique ou les infrastructures de
communication et d’information (Lucas 1988).
Les théories de la croissance endogène fournissent un cadre plus adapté à l’action
institutionnelle et à la stratégie économique. Ils permettent d’enrichir
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
12
considérablement la famille des modèles de croissance mais rencontrent certains
limites quant à la détermination et la mesure des variables endogènes ; par exemple, le
stock de capital humain d’une région est généralement mesuré par le pourcentage de
personnes actives ayant une formation supérieure au baccalauréat ; or, cette définition
peut conduire à des biais d’interprétation si le niveau général d’éducation n’intervient
pas de façon déterminante dans l’organisation des activités de production (par
exemple dans une région spécialisée dans des activités fortement intensives en travail
non qualifié).
La plupart des travaux empiriques sur la croissance des petites économies insulaires
appliquent des variantes des modèles de croissance endogène. Parmi les premières
applications, il convient de citer la contribution transversale de Milner et Westaway
(1993) ou celle de Lewis et Craigwell (1998) sur la Barbade. Les modèles de croissance
endogène furent également utilisés par la Banque mondiale pour comparer les
performances de six régions / Etats insulaires (McCarthy et Zanalda, 2001), en
intégrant des variables telles que le poids du commerce extérieur, la qualité des
institutions, les investissements en capital humain ou les dépenses de gestion et de
préservation de l’environnement naturel.
Parmi ces approches, celles d’Escaith (2001) et Peters (2001) apportent des éléments
d’interprétation originaux et robustes, en ce qui concerne le caractère significatif des
variables endogènes dans le processus de croissance économique. Appliqués
respectivement sur 17 et 12 pays insulaires dans la période 1975-2000, ces travaux
conduisent à trois séries de conclusions (Dupont, 2010) :
•
en premier lieu, le taux d’investissement public a un impact positif sur la
croissance économique de long terme (ce qui semble plus ou moins attendu) ;
ceci signifie que l’amélioration des infrastructures publiques contribue
doublement à la croissance économique de long terme : d’une part, par les
effets directs sur la production et l’emploi ; d’autre part, par le transfert de
certains effets d’apprentissage (learning-by-doing) du secteur public vers le
secteur privé ;
•
en second lieu, le taux d’inflation et le taux de croissance démographique ont
un impact négatif sur la croissance de long terme. Si l’influence de la première
variable est relativement attendue, celle de la deuxième rompt avec les
hypothèses des modèles standards, selon lesquels la progression
démographique était une condition nécessaire pour la croissance économique
de long terme dans les petites économies insulaires ;
•
en dernier lieu, le taux d’ouverture a un impact négatif lorsque les valeurs
obtenues par les variables indiquant le niveau des infrastructures de
communication, le développement des NTIC et la profondeur du marché
financier local sont faibles et vice-versa ; ceci signifie que l’ouverture aux
marchés nationaux ou mondiaux a un impact positif sur la croissance,
uniquement au-delà d’un certain seuil de développement des infrastructures
et des équipements publics locaux ; une telle conclusion pourrait justifier
l’application initiale de mesures protectionnistes, telles que l’octroi de mer,
dans les premières étapes de développement économique.
Les approches empiriques de la croissance endogène permettent de mesurer les
impacts de certains choix en matière de politique économique sur la croissance de long
terme. Dans le cas des DOM-ROM, elles montrent l’importance du développement du
secteur public, de la modernisation des infrastructures, des équipements et du système
éducatif, mais également l’absence notoire d’un stock de capital privé.
1.4 La croissance des DOM : les approches structuralistes
Les approches structuralistes représentent la partie la plus volumineuse et
probablement la plus originale de la littérature sur la croissance des petites économies
insulaires et des DOM-ROM. Ces approches partent du constat d’un certain nombre de
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
13
contraintes structurelles dans le développement des DOM qui conduisent à des
trajectoires de croissance économique spécifiques (Logossah, 2007).
Ces contraintes sont d’abord celles énumérées dans l’introduction, à savoir la petite
taille des espaces insulaires, limitant à la fois les avantages d’échelle et les tentatives
de diversification (économies de variété), la rupture des charges dans l’acheminement
des marchandises, liée à l’éloignement qui conduit à une dépendance vis-à-vis du
secteur des transports et un ensemble de caractéristiques climatiques et topologiques
particulières, limitant les choix possibles de développement agricole, agro-alimentaire
ou touristique.
Lorsque l’on spécifie l’analyse de la croissance sur les DOM-ROM, il convient
néanmoins d’ajouter un ensemble de caractéristiques propres à ces espaces.
En premier lieu, le niveau des salaires et des rémunérations est sensiblement élevé en
comparaison aux autres espaces insulaires et notamment aux iles souveraines. Ce
décalage dans les coûts salariaux est lié à plusieurs facteurs :
•
une volonté politique de rattrapage social des salaires les plus faibles,
synonyme d’une augmentation plus rapide du SMIC domien, afin de les
ajuster aux normes de la France métropolitaine et de l’Europe ;
•
l’ajustement de la base des salaires du secteur public à celui de la France
métropolitaine, majorée par une prime d’éloignement et une prime
d’indexation au niveau des prix insulaires (régime de sur-rémunération) ;
•
l’augmentation des salaires nominaux à un rythme supérieur à celui de la
progression de la productivité apparente du travail, mais aussi au taux
d’évolution de l’indice des prix, ce qui rend à la fois le coût du travail peu
compétitif et les postes de travail existants attractifs pour les travailleurs
métropolitains ou européens qualifiés.
En deuxième lieu, le pouvoir d’achat des ménages est relativement élevé, du fait des
transferts sociaux permanents, notamment en provenance de la France
métropolitaine. Cette « rente administrative » (Miras, 1986 ; Poirine, 1995, Dimou,
2004) ne prend pas la forme traditionnelle de dépenses publiques effectuées par les
agents institutionnels, mais plutôt celle d’un gonflement du revenu des ménages,
permettant de soutenir la consommation finale. L’augmentation des prestations
sociales versées aux ménages connaît ainsi un rythme constamment plus rapide que
l’augmentation du revenu disponible brut.
Cette rente administrative alimente la croissance des économies domiènes par un effet
multiplicateur de la demande, mais crée un « effet d’éviction » des activités
productives tournées vers l’exportation et la compétitivité car ce sont les choix des
ménages qui, de manière directe ou indirecte, guident l’allocation des ressources. Ces
choix peuvent d’ailleurs conduire à une préférence pour les produits importés, d’où
une dépendance renforcée vis-à-vis des échanges avec la France métropolitaine.
En troisième lieu, la majorité des échanges extérieurs des DOM-ROM s’effectue avec la
France métropolitaine. Il convient de rappeler que ces échanges ne peuvent en aucun
cas être assimilés à ceux d’une île souveraine avec ses partenaires internationaux. Les
échanges entre les DOM-ROM et la France métropolitaine ne souffrent pas de la
contrainte externe et le déficit permanent de la balance commerciale n’est pas un
handicap structurel. En ce sens, il est tout à fait concevable d’opérer des choix en
faveur de la croissance économique, de la compétitivité et l’emploi qui détériorent la
balance commerciale des DOM-ROM, ce qui est impossible pour les îles souveraines.
Les approches structuralistes des économies insulaires ont généré différents modèles
de croissance parmi lesquels, le modèle MIRAB (Migrations, Remittances, Aid,
Bureaucracy) et/ou sa variante ARABE (Aide, Rente Administrative, Bureaucratie
d’Etat), appliquée dans l’étude des DOM-ROM français (Bertram, 1986 ; Poirine,
1995) sont précurseurs. Nous présentons ici les trois modèles les plus récents, à savoir
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
14
le nouveau modèle MIRAB (Bertram et Poirine, 2007, Poirine, 2011), le modèle
PROFIT (Baldacchino, 2006) et le modèle SITE (McElroy, 2006).
Le nouveau modèle MIRAB (Bertram et Poirine, 2007) est bâti sur l’hypothèse des
effets d’une rente spécifique (liée soit à une spécialisation des exportations comme
dans le cas de la nouvelle Calédonie, soit à l’existence d’une rente administrative,
comme dans le cas de la plupart des DOM) sur l’activité économique. Il admet, d’une
part, que l’existence d’un effet rente peut conduire à une mauvaise allocation des
investissements productifs, mais intègre, d’autre part, certains éléments de la théorie
de la base élargie (Davezies, 2008), en calculant un effet multiplicateur des dépenses
autonomes (exportations de biens et services, dépenses publiques, IDE) sur
l’économie locale. Contrairement au modèle initial, le nouveau modèle MIRAB
apporte un regard croisé moins déterministe sur les effets de la rente administrative.
Baldacchino (2006) considère que les petites économies insulaires, notamment les îles
dépendantes et/ou régions ultramarines européennes, puis australiennes ou
néozélandaises, mettent à profit un statut juridique spécifique (celui de l’ultrapériphéricité) pour obtenir, de façon continue, des concessions de la part de leurs
métropoles respectives en matière d’avantages de taxation, d’aides publiques ou de
subventions d’investissement.
Le modèle PROFIT (People, Resources, Overseas management, Finance and
Transport), initialement appliqué aux îles nord-atlantiques, met l’accent sur la
capacité d’un secteur privé insulaire dynamique et entreprenant, essentiellement
commercial et financier, à tirer profit du statut juridique régional pour influencer les
choix des politiques de croissance. Dans le cas des DOM, un tel modèle permet
d’interpréter l’apparition d’un ensemble d’entreprises d’import-distribution qui
jouissent de facto d’une position oligopolistique sur le marché local. Cependant, le
modèle PROFIT prévoit une diversification possible des activités, ce qui ne semble pas
se confirmer dans les DOM.
Enfin, McElroy (2006) et Oberst et McElroy (2007) construisent un modèle qui met
en évidence le rôle moteur d’un secteur touristique insulaire intensif en travail dans le
processus de croissance économique de long terme. Dans le modèle SITE (Small
Island Tourist Economy), une politique de relance touristique agressive (par les prix
mais aussi par le marketing) conduit à un décollage des économies insulaires et au
dépassement des contraintes structurelles liées à l’absence d’effets d’échelle et permet
d’entamer un processus de diversification productive, essentiellement dans les
domaines de la construction et des services. Oberst et McElroy (2007) s’appuient sur
ce modèle pour expliquer les performances de certaines économies insulaires
Caraïbes.
Dans la littérature sur les petits espaces insulaires, il n’existe pas encore de travaux de
comparaison empirique des trois modèles, bien que certains auteurs considèrent le
modèle SITE comme une application du modèle PROFIT (Parry et McElroy, 2009),
tandis que ce dernier apparait comme une version plus riche et plus complète du
nouveau modèle MIRAB. En réalité, ces modèles ne font qu’améliorer la prédictibilité
des modèles classiques opposant les stratégies de substitution des importations et de
promotion des exportations.
Dans le modèle SITE, davantage adapté aux petites économies insulaires souveraines,
le secteur du tourisme apparait comme prédominant ; les modèles MIRAB et PROFIT,
davantage adaptés aux îles non-indépendantes (et donc aux DOM), considèrent le rôle
de la rente insulaire comme déterminant des trajectoires de croissance : dans le
premier, elle génère des effets multiplicateurs, dans le second elle amorce une
trajectoire de croissance particulière avec une éventuelle diversification des activités
productives.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
15
Les travaux empiriques, associées aux approches structuralistes, proposent une
analyse keynésienne de décomposition de la demande afin d‘étudier l’influence de ses
différentes composantes sur la croissance économique11. Ces travaux cherchent à
évaluer les contributions des exportations, du marché domestique et de la substitution
des importations.
Une première série d’études empiriques a permis d’établir le rôle déterminant du
marché domestique et de la demande intérieure (alimentée par les transferts publics)
sur la croissance économique (Poirine, 1997, Dimou, 2004). Des travaux récents et
relativement robustes sur un plan économétrique permettent d’affiner ces résultats.
En utilisant des tests de racine unitaire, le test de co-intégration de Johanssen et le
test de causalité de Granger, Dupont (2010) montre que, dans le cas des DOM-ROM,
le marché domestique a un poids prépondérant dans la détermination de la croissance,
tandis que les exportations et la substitution des importations jouent un rôle minimal.
Ce résultat conforte partiellement les défenseurs des modèles MIRAB et PROFIT mais
montre essentiellement que le clivage entre substitution des importations et
promotion des exportations semble s’avérer un faux sujet. Dans cette optique, ni les
subventions et aides aux entreprises et secteurs exportateurs, ni les taxations des
importations (octroi de mer), censées protéger la production locale, sont pertinentes.
Ceci conduit à reconsidérer la validité du clivage traditionnel entre les secteurs
exposés à la concurrence (essentiellement produits agricoles et agroalimentaires,
produits de pêche, matières premières, tourisme) et les secteurs abrités (construction,
services). Dans un travail très riche sur les performances des entreprises des DOMROM, Caupin et Savoye (2012) discernent les activités présentielles (dont le produit
est consommé à l’intérieur d’un périmètre local et/ou régional) et les activités nonprésentielles (dont le produit est destiné à l’exportation).
Leurs conclusions confirment celles des très nombreuses études empiriques
monographiques (Ernatus, 2009), selon lesquelles les entreprises exportatrices des
DOM se spécialisent dans des secteurs qui bénéficient d’un avantage concurrentiel
permanent, car reposant partiellement sur une compétitivité hors coût (monopole ou
oligopole naturel dans les produits agricoles exotiques ou leurs transformations agroalimentaires, matières premières, la gestion énergétique, le tourisme tropical), tandis
que les entreprises tournées vers le marché intérieur profitent soit d’un dispositif qui
rend les importations plus chères (certains produits de consommation finale) soit des
coûts de transport inexorablement élevés qui éliminent la concurrence extérieure pour
de nombreux produits (notamment dans le domaine de la construction et des
services).
Dans leur ensemble, ces travaux conduisent à une approche duale de la croissance
économique dans les DOM, avec un secteur exposé, dont les exportations concernent
des produits qui bénéficient d’une compétitivité hors coût et un secteur abrité qui
fonctionne essentiellement selon le principe d’une compétitivité-prix mais dont la
concurrence extérieure est éliminée soit par des dispositifs juridiques, soit par des
coûts de transport élevés. Dans le secteur abrité, seule une faible partie des biens en
circulation est issue d’un processus de substitution des importations.
Il convient de rappeler ici deux conclusions de la littérature récente :
•
d’une part, sur le plan économétrique, ni les exportations ni la substitution des
importations ne jouent un rôle de relance de la croissance économique qui est
alimentée uniquement par le marché domestique dont la demande est
soutenue par la rente administrative que représentent les transferts sociaux ;
•
d’autre part, les modèles théoriques récents (new MIRAB, PROFIT, SITE)
rejettent une approche strictement dichotomique et considèrent des liens
11 A l’origine de cette démarche méthodologique, on trouve les travaux de Chenery (1986). Dans le cas des
DOM-ROM, cette méthodologie fut initialement investie par Poirine (1997).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
16
organiques entre le marché domestique et le marché international, c’est-à-dire
entre le secteur abrité et le secteur exposé.
1.5 Un nouveau regard sur la croissance et la compétitivité des DOM
La littérature récente sur les petites économies insulaires, les RUP ou les DOM-ROM
apporte de nombreux éclairages sur les sources et les mécanismes de la croissance
économique, la compétitivité des secteurs et des entreprises, mais aussi des choix de
spécialisation productive. En matière de politique économique et de stratégie de
croissance, l’action institutionnelle reste relativement « piégée » dans une conception
dichotomique de l’organisation productive avec le fonctionnement de deux secteurs,
abrité et exposé, le second étant plus ou moins important.
Nous proposons d’aborder, en dernier lieu, une analyse qui part des constats des
travaux les plus récents sur l’économie des DOM-ROM et conduit à un changement de
perspective dans la considération des processus de croissance. Cette analyse s’articule
autour de quatre idées : la désacralisation de l’équilibre commercial, la mise en cause
d’une approche dualiste de la compétitivité des entreprises et des secteurs (hors coût
pour le secteur exposé et compétitivité prix pour le secteur abrité), la recherche des
liens structurels entre filières et secteurs, générateurs d’effets multiplicateurs et/ou de
compétitivité et enfin, l’émergence de certaines filières fortement dotées en capital
humain, spécialisées dans des domaines spécifiques à l’environnement tropical et/ou
insulaire.
En premier lieu, il convient de revenir sur le rôle de la balance commerciale des DOM.
Les différents travaux empiriques –y compris dans la littérature la plus récente–, mais
aussi les acteurs institutionnels, considèrent le déficit permanent de la balance
commerciale des DOM comme un indicateur de dépendance. Une telle conclusion
n’est pas fondamentalement erronée mais peut être fortement biaisée.
D’abord, comme ceci fut rappelé précédemment, les DOM ne souffrent pas de la
contrainte externe dans leurs échanges avec la France métropolitaine, ce qui réduit le
problème du déficit commercial à un problème de déficit des échanges régionaux.
Ensuite, la prise en considération des importations « en bloc » est erronée du point de
vue de l’analyse de la croissance économique. Il est, à cet égard, indispensable de
dissocier les effets spécifiques de certains postes de demande finale comme les
exportations et les investissements. Les conclusions sont fondamentalement
différentes selon que les importations augmentent pour satisfaire la consommation
finale ou au contraire les exportations ou les investissements. Dans le dernier cas, la
croissance des importations peut impliquer une meilleure compétitivité de l’économie
locale. Ceci exige d’avoir un éclairage plus précis sur les dynamiques d’offre dans les
DOM et la possibilité de créer des filières qui ne sont pas nécessairement 100% locales
afin d’être compétitives dans les marchés internationaux. Or, une telle logique n’est
pas compatible avec les politiques de croissance actuelles impulsées par les acteurs
institutionnels de ces espaces, fortement ancrés dans les principes de l’importdistribution.
En second lieu, le clivage entre des entreprises /secteurs abrités et exposés, synonyme
d’un double régime de compétitivité, doit être reconsidéré. D’abord, contrairement
aux conclusions de la plupart des auteurs, en matière d’exportation, les DOM ne
bénéficient pas d’une compétitivité hors coût, synonyme d’un régime quasimonopolistique, mais d’un régime de concurrence monopolistique12. Ceci signifie que,
lorsque les prix restent dans une fourchette donnée, les consommateurs identifient les
produits comme spécifiques – ce qui permet de générer des économies d’échelles en
matière de production. Par contre, lorsque les prix sortent de cette fourchette, les
12 Cette notion fut essentiellement forgée dans les travaux en économie internationale et régionale de la
nouvelle économie géographique (Krugman, 1996).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
17
consommateurs ont tendance à associer le produit avec d’autres produits en
concurrence.
Le tourisme et certains produits agricoles et agro-alimentaires sont deux exemples
typiques de cette situation. Sous un prix plafond, ces produits sont spécifiques à leur
espace de production et jouissent d’une compétitivité hors coût. Au-delà de ce seuil
(psychologique ou réel chez les consommateurs), ces produits rentrent en concurrence
avec d’autres produits (autres destinations et/ou produits touristiques, autres denrées
agricoles ou agro-alimentaires). La compétitivité prix et la compétitivité hors coût
doivent, de ce fait, être combinées et non pas séparées, selon les secteurs et les filières
productives.
Cette analyse doit être renforcée par le manque d’étanchéité entre le marché
domestique et le marché d’exportation. Là encore, le tourisme est un exemple
révélateur : dans le cas de La Réunion, l’activité touristique générée depuis plusieurs
années repose davantage sur une demande interne (tourisme intra-réunionnais),
renforcée par des effets de revenu (rente administrative) que sur une demande
externe ; or, dans ce contexte, il n’est guère possible de développer un secteur et/ou
une filière sans déterminer une stratégie claire en termes d’avantages productifs qui
intègre à la fois, les avantages hors coût et la compétitivité par les prix.
En troisième lieu, dans le prolongement des modèles MIRAB (actualisé), PROFIT ou
SITE, il est indispensable de bien distinguer les mécanismes de croissance sur lesquels
une économie peut s’appuyer. On peut généralement spécifier trois processus
cumulatifs interconnectés : les effets multiplicateurs, les effets de productivité et les
effets de compétitivité :
•
les premiers, d’inspiration keynésienne, décrivent les effets d’entraînement en
amont ou en aval ainsi que les répercussions sur la formation des revenus d’un
accroissement exogène de la demande finale lié aux exportations et/ou aux
dépenses publiques ;
•
les seconds permettent de prendre en compte les dynamiques d’offre
qu’engendrent des gains de productivité liés à la mise en œuvre
d’investissements de capacité, de rationalisation ou d’innovation ;
•
les troisièmes, enfin, correspondent aux répercussions des gains de
compétitivité (prix ou volume) sur la croissance régionale, à travers la mise en
place d’un processus de substitution des importations et/ou à travers la
promotion des exportations.
La conjugaison de ces trois mécanismes conduit à un cercle « vertueux » de croissance
qui peut passer par des trajectoires industrielles différenciées (Catin, 1995). Dans les
DOM, les deux premiers processus semblent plus pertinents, tandis que le troisième
implique un changement de stratégie économique peu ou pas encore entamé.
Enfin, en dernier lieu, il convient de signaler l’émergence d’un secteur de la
connaissance, liée à la présence de structures universitaires, d’écoles d’ingénieurs et
d’instituts de recherche dans les DOM. Depuis quelques années, une partie de ce
secteur de la connaissance se détourne des filières classiques et se spécialise dans la
formation de savoirs et de savoir-faire spécifiques aux zones tropicales et aux zones
insulaires (énergies renouvelables, gestion de l’environnement marin et des lagons,
gestion de la biodiversité et conseils en agriculture tropicale, lutte contre les espèces
envahissantes, génie civil en milieu tropical, etc.).
Ces savoir-faire sont exploités encore à petite échelle, souvent au sein du marché
domestique, mais constituent les ressources potentielles pour certaines filières
émergentes qui, au-delà des clivages existants, amorcent des perspectives de
croissance à partir d’avantages comparatifs de nature technologique. Parmi les DOM,
La Réunion, par la taille de sa population et de son marché mais aussi par certains
choix politiques de longue durée, semble avoir une longueur d’avance dans ce
domaine, avec la formation, par exemple, d’ingénieurs en conception de bâtiments
HQE en milieu tropical, dont certaines compétences sont valorisées tant sur le marché
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
18
intérieur qu’à l’exportation (Australie, Nouvelle Zélande) ou avec la mise en place de
programmes de protection de la biodiversité et de lutte contre les espèces
envahissantes.
1.6 Conclusion
En guise de conclusion, il convient de rappeler les quatre conclusions /perspectives,
issues de ce travail de revue critique de la littérature sur les DOM-ROM et les petites
économies insulaires :
•
la croissance économique et l’émergence de nouvelles filières ne doit pas
nécessairement conduire à une réduction du déficit de la balance commerciale
des DOM qui ne subissent pas de contrainte externe ;
•
la pertinence du clivage dichotomique entre la compétitivité hors coût et la
compétitivité par les prix doit être revue au profit d’un régime de concurrence
monopolistique, plus réaliste en économie ouverte ;
•
il est important d’identifier les effets multiplicateurs, les effets de
compétitivité et les effets de productivité et leurs mécanismes sous-jacents,
liés à l’émergence de différentes filières productives ;
•
l’émergence d’une économie de la connaissance, spécialisée dans des
domaines d’application spécifiques à l’environnement tropical et insulaire,
conduit à l’émergence d’une nouvelle forme de compétitivité qui reste encore
peu exploitée.
Il est, néanmoins, important de signaler que ces quatre conclusions / perspectives
doivent être différenciées, selon les DOM considérés.
2. Les missions de terrain
Les missions de terrain se sont déroulées alors qu’était en train d’être achevé le
Diagnostic stratégique national des régions ultrapériphériques du contrat de
partenariat relatif aux programmes européens 2014-202013 et que les Régions
d’Outre-mer (comme d’ailleurs celles de métropole) s’apprêtaient à lancer les études
pour les stratégies de spécialisation intelligente (S3).
2.1 Cadrage des missions
Une réunion de préparation et de cadrage des missions s’est tenue le 21 mai avec pour
objectif d’effectuer une lecture commune du rapport préliminaire (Revue de la
littérature et synthèse des principales conclusions des études et rapports sur la
compétitivité et l’ouverture commerciale des DOM), et de fixer une « feuille de route »
pour les consultants en charge des missions dans les différents DOM.
Concrètement, il a paru important de bien centrer les questionnements ouverts par le
rapport préliminaire et de rappeler la nécessité de donner une grande place à
l’approche micro-économique, donc en particulier à la stratégie des entreprises et aux
relations entre ces stratégies et le jeu des acteurs publics, tel qu’il s’exprime dans les
différentes politiques publiques soutenant le développement des territoires et des
filières concernées.
2.2 Déroulement des missions
Les missions se sont déroulées ainsi qu’il est indiqué dans le tableau ci-dessous.
13 Réalisé par le consortium Technopolis |ITD| / Amnyos / Oréade Brèche pour la DéGéOM.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
19
Énergies
renouvelables
et maîtrise de
la demande
énergétique
(ENR/MDE)
La Réunion
Matthieu Lacave
Technopolis |ITD|
Semaine du 27 mai
Guadeloupe
Yann Cadiou
Technopolis |ITD|
Semaines du 27 mai /
du 3 juin
Martinique
Anne-Gaëlle Muths
Technopolis |ITD|
Agriculture et
agroalimentaire
A/IAA
X
X
X
X
X
Matériaux et
construction
tropicale
Tourisme /
écotourisme
X
X
Semaine du 3 juin
Guyane
Tsiresy
Ranaivondrambola
Erdyn
Semaine du 27 mai
Bois
X
(écotourisme)
X
(écotourisme)
X
L’organisation des missions n’a pas rencontré de problème particulier. Les délégations
régionales de l’AFD ont apporté un appui.
La liste des entretiens réalisés est fournie en annexe.
Quelques entretiens, qui n’avaient pu être réalisés durant les missions, l’ont été par
téléphone dans les jours qui ont suivi.
2.3 Structure des rapports de mission
Une réunion de debriefing a été organisée le 12 juin 2013 de façon à échanger
rapidement sur les points clés issus des missions et à initier une lecture transversale
des filières étudiées dans plusieurs DOM (agroalimentaire, énergies renouvelables et
maîtrise de la demande énergétique, tourisme/éco-tourisme).
Lors de cette réunion, a été mis au point et adopté un modèle commun d’analyse des
filières à utiliser pour chaque DOM, afin d’assurer que cette analyse soit harmonisée et
que les éléments principaux concernant les avantages comparatifs et l’ouverture
commerciale des DOM soient pris en compte de façon coordonnée.
3. Éléments d’analyse par filière
3.1 La filière Agriculture et agroalimentaire
L’analyse de la filière agriculture et agroalimentaire a été réalisée en Guadeloupe et en
Martinique, soit dans deux contextes similaires relevant de l’univers caraïbe.
3.1.1 Périmètre de la filière
3.1.1.1 Définition de la filière
Selon les définitions de l’INSEE, l’agriculture est entendue comme la filière
économique comprenant les cultures, l’élevage, la chasse, la pêche et la sylviculture. Il
s’agit d’un secteur traditionnel de la Guadeloupe. L’agroalimentaire est entendu
comme l’ensemble des activités industrielles qui transforment des matières premières
issues de l’agriculture en produits alimentaires destinées à la consommation humaine.
Nous sommes partis du postulat que l’agriculture et l’agroalimentaire constituaient,
compte-tenu de leurs interdépendances, une seule et même filière.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
20
3.1.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières
Des liens existent entre cette filière et les filières suivantes : énergies renouvelables,
transports et tourisme.
•
La filière des énergies renouvelables, et en particulier la biomasse, issue de la
culture de la canne et de la banane. La bagasse est utilisée de longue date
comme bioénergie : historiquement en effet, les distilleries fonctionnent sur
un modèle renouvelable dans la mesure où la bagasse est largement utilisée
comme bioénergie des usines de sucre et de rhum.
En Guadeloupe, depuis la récolte 2010, une prime bagasse est accordée aux planteurs
pour les cannes livrées à la sucrerie de Gardel au Moule dont la bagasse sert à produire
de l’électricité dans la centrale thermique du Moule, couplée à la sucrerie. Cette
rémunération est due au titre de la valorisation de la biomasse comme ressource
énergétique (une unité de production installée avec une puissance de 31 MW (93,5
MW bagasse-charbon). En 2012, son montant est de 11,96 euros par tonne.
Des projets devraient voir le jour pour utiliser les déchets de ces productions, afin
d’alimenter des centrales de biomasse, sachant toutefois que la production de
biomasse ne devrait pas être en capacité d’alimenter une centrale. Par ailleurs,
l’amélioration de l’efficacité énergétique dans l’agriculture (aide à la décision,
amélioration de la logistique…) pourrait contribuer à améliorer la maîtrise de
l’énergie. On estime en tout cas que la bagasse permet de couvrir entre 30 % et 50 %
des besoins en électricité des îles des DOM.
•
Les transports : la filière est génératrice de déplacements, pour les personnes
qu’elle emploie, et en lien avec le transport de la production. Les prévisions en
matière d’évolution de trafic (+ 1 à 2 % par an) mettent en lumière le risque
d’une rapide saturation du réseau routier avec les impacts négatifs liés en
termes environnemental, économique et social.
Un autre lien spécifique peut être fait avec le transport maritime, en particulier avec la
filière de la banane : au-delà de la richesse et des emplois créés par la filière banane, ce
commerce entre les DOM (Guadeloupe et Martinique) et l’Europe a une importance
déterminante pour le transport maritime et la rentabilisation des lignes de fret, de
l’Europe vers les Antilles. En effet, sans le transport des bananes (qui représentent
80 % du volume des échanges entre les Antilles et l’Europe), d’aucuns estiment qu’en
deçà de 150 000 tonnes (pour la Martinique et la Guadeloupe), la rentabilité des lignes
de transport maritime serait remise en cause14.
•
On notera également que la production de rhum et plusieurs produits labélisés
sont des produits « phares » de Guadeloupe en termes d’image et de
tourisme15.
3.1.1.3 Entreprises et acteurs rencontrés
1.
Guadeloupe
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT
•
organisations professionnelles représentatives de la filière : Association des
Moyennes et Petites Industries de la Guadeloupe ; IGUAVIE (Interprofession
Guadeloupéenne de la Viande et de l'élevage)
•
entreprises : GMA (Grands Moulins des Antilles), Jus de fruits Caraïbes,
Distillerie Séverin, Compagnie indépendante des épices, SAS Edouard (Café)
14 Source : Les déterminants de la compétitivité des filières bananes de Martinique et de Guadeloupe,
Ludovic Temple, CIRAD, 2010
15 Cf. par exemple l’association Label Guadeloupe qui a été créée en mai 2006. Elle regroupe 13 producteurs
labellisés RUP. Le label garanti la provenance des matières premières, du respect du savoir-faire
traditionnel et des normes (http://www.labelguadeloupe.fr/).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
21
2. Martinique
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DAAF, DIECCTE
•
organisations professionnelles représentatives de la filière : Association
Martiniquaise pour la Promotion de l’Industrie, Syndicat de défense de
l’appellation d’Origine « Rhum Agricole Martinique », IMAFLHOR
(interprofession fruits, légumes et produits horticoles), AMIV (Association
martiniquaise interprofessionnelle de viande), MADIVIAL (union des
coopératives d’élevages), Banamart (union des producteurs de bananes de
Guadeloupe et de Martinique)
•
structures d’appui aux entreprises : Pôle agroalimentaire régional de
Martinique, Technopole, grappe d’entreprise Innovagro
•
entreprises : Chocolats Lauzéa Frères, Café et confiture La Tivolienne,
transformation de produits maraichers Mastersalad, Rhum Neisson
L’ensemble de ces interlocuteurs a permis de couvrir une large partie des intervenants
de la filière tant en Guadeloupe qu’en Martinique, ainsi que les problématiques
propres à la plus grande partie des branches de la filière.
3.1.1.4 Données statistiques récentes disponibles
1.
Guadeloupe
En 2010, le secteur primaire représentait en 1,1 % de la création de richesse de
l’économie guadeloupéenne (2,8 % pour l’agro-alimentaire) et 1,8 % du salariat
guadeloupéen. Depuis 2008, la production agricole connaît une croissance atone, en
raison particulièrement de la baisse de la production sucrière (-12 % par rapport à
2007). La récolte 2009 a été perturbée par le mouvement social, mais également par
les fortes pluies qui ont rendu difficiles les chantiers de récolte. Les exportations agroalimentaires ont ainsi baissé de 14 %, entraînées par la chute des exportations de
canne. Toutefois, les deux dernières années ont connu deux évolutions positives :
•
la progression de la production de banane et du volume exporté (+34 % par
rapport à 2008) ;
•
la structuration de la filière fruits
(IGUAFLHOR, créée en mai 2009).
et
légumes
en
interprofession
Sur le long terme, le secteur primaire est en baisse depuis le début des années 1990 en
raison du poids croissant des activités tertiaires.
La population agricole16 totale s’élevait à 24 150 personnes en 2010, et elle a connu
une diminution globale de 32 % depuis 2000 :
•
l’agriculture mobilise moins de 2 % des effectifs salariés en Guadeloupe, mais
beaucoup de travailleurs agricoles exercent leurs activités au sein
d’exploitations familiales et ne sont pas comptabilisés ;
•
la filière agricole est dominée par la production de banane (plus de 1500
emplois directs, autant d'emplois induits17) et de canne à sucre (deuxième
activité agricole du département après la banane) ;
•
les productions locales de fruits et légumes hors banane couvrent 65 % des
besoins en 2010.
La pêche professionnelle18 en Guadeloupe totalise 878 navires dans l’ensemble de
l’archipel (Guyader et al., 2011, SIH Guadeloupe). La pêche emploie 1677 marins
16 Diagnostic territorial stratégique de la Guadeloupe (2012).
17 http://www.guadeloupe.pref.gouv.fr/Actualites/Epandage-aerien-de-la-banane-autorisation-valable-12-
mois
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
22
pêcheurs et est exclusivement artisanale. Elle ne compte aucun navire de plus de 12
mètres et s’appuie sur 95 % d’unités non pontées (« saintoises »). Au cours de la
dernière décennie, le nombre de navires a évolué de 12,7 %, alors que la puissance
totale de la flotte a progressé de 69 %.
Le secteur agroalimentaire est dominé par la filière traditionnelle de production de
rhum et de sucre, ainsi que par les activités de boulangerie-pâtisserie :
•
le secteur agroalimentaire concentre le quart des entreprises, avec une très
forte prédominance des TPE ;
•
selon l’INSEE, en 2010, il y avait 534 établissements agroalimentaires
réunissant 1661 salariés, dont 234 dans la transformation et conservation de la
viande et préparation de produits à base de viande (14 %), 220 dans la
fabrication de boissons (13 %), 166 dans la fabrication de produits laitiers (10
%) ;
•
selon l’enquête « Besoins en main d’œuvre 2013 », les intentions de
recrutement dans le secteur agroalimentaire s’améliorent ; si l’industrie
manufacturière déclare 643 projets de recrutement en 2013 (484 en 2012), les
industries agroalimentaires en annoncent 479 (628 en 2012) ;
•
en termes d’emploi, les données disponibles concernant la filière rhum, issues
du recensement agricole 2010, doivent être considérés avec une certaine
prudence, dans la mesure où il est difficile de déterminer sur une exploitation
dont la culture de la canne ne serait pas la seule production, la part de l’emploi
affectée à cette filière. De même, l’estimation des emplois indirects est
toujours difficile à réaliser.19
Tableau 1
Données et tendances-clés du secteur20
Indicateurs de contexte
SAU (2010) - ha
Variation SAU sur 10 ans
Nombre d’exploitations(2010)
Variation du nombre d’exploitations sur 10 ans
Superficie moyenne des exploitations (2010)
–ha
Variation de la superficie moyenne des exploitations
sur 10 ans
Nombre d’exploitations en agriculture
biologique 21
Progression (nombre d’exploitations en AB) 20082009 22 (%)
Superficie forestière (milliers d’ha) 24
Part de l'agriculture dans l'emploi salarié25
Part du secteur agricole dans la valeur
ajoutée 26
Part du secteur agro-alimentaire dans la
valeur ajoutée 27
Guadeloupe
31 401
-25%
7 804
-35%
France hors DOM
26 963 252
-3%
489 977
-26%
4,02
52,63
+16%
+32%
26
16 446
+23,8
En augmentation 23
64
1,80%
16 000
1,1 % (2010)
1,6% (2011) Fabr. denrées
alimentaires, boissons et
produits à base de tabac
2,8 % (2010)
Agriculture et pêche
1,8% (2011)
18 Le constat fait par le Diagnostic Stratégique Territorial 2014-2020 sur la thématique de la pêche présente
les principaux enjeux du secteur au cours des dernières années.
19 Rapport Sénat 574 présentés par MM. Georges PATIENT et Éric DOLIGÉ.
20 Sources : Evaluation à mi-parcours du CPER et des PO FEDER/FSE 2007-2013 et DST 2014-2020
21 Agence Bio, 2008-2009
22 ODEADOM, 2013
23 Agence Bio
24 Site Ministère de l’agriculture (2013)
25 Rapports annuels IEDOM, 2011
26 IEDOM 2011 et Insee, comptes nationaux - base 2005
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
23
Indicateurs de contexte
Production totale de pêche (tonnes) (2011)
Nombre de navires de pêche
Nombre de personnes employées dans le
secteur de la pêche
Nombre d’établissements dans le secteur
agroalimentaire
Nombre de salariés dans le secteur
agroalimentaire
Guadeloupe
10 000
878
France hors DOM
Agriculture, sylviculture
et pêche
434 623 (2009)
4 675
1 677
-
534
-
1 661
-
2. Martinique
En 2011, on comptait en Martinique28 4 809 installations agricoles et 4 507 emplois
salariés, avec dans les deux cas plus de 90% dans la culture et la production animale,
la chasse et les services annexes ; la sylviculture et l’exploitation forestière, ainsi que la
pêche ont un rôle moins important, avec respectivement 0,1% et 8,3% des
exploitations.
Pour la filière banane, on estime à 9 000 le nombre d’emplois directs et indirects et à
60% la part des salariés agricoles travaillant dans le secteur.
Pour la filière canne-sucre-rhum, on estime à 3 800 le nombre d’emplois directs et
indirects.
Pour la filière viande, on estime aujourd’hui à 600 le nombre d’emplois directs et à
1600 le nombre d’emplois total (directs et indirects).
Pour l’industrie agro-alimentaire, on comptait en 201029 2 795 salariés, dont : 23%
pour la fabrication de boissons10, 3% pour la fabrication de produits laitiers, 6% pour
la transformation et la conservation de la viande, 5,1% pour le travail du grain et
aliments animaux, et 55,6% pour les autres industries.
L’industrie agroalimentaire est le premier secteur industriel de Martinique (devant le
travail des métaux, la chimie et la parachimie et l’énergie) : elle représente 35% des
entreprises et 36% des salariés des entreprises de l’Association Martiniquaise pour la
Promotion de l’Industrie (AMPI)30.
3.1.2 Les enjeux identifiés
3.1.2.1 Les enjeux en termes d’emploi et de qualification des ressources humaines
Les enjeux en termes d’emploi restent relativement importants. Dans l’agriculture, les
emplois sont en recul et les principales cultures – banane et canne à sucre –
rencontrent des difficultés bien connues. Néanmoins, il faut rappeler que l’on a des
difficultés à estimer le niveau d’emploi dans les exploitations familiales (temps
partiel). Par ailleurs, le développement des cultures destinées à l’alimentation locale
représente un enjeu non négligeable. L’industrie agroalimentaire constitue quant à elle
un secteur industriel majeur dans les deux régions (environ 4500 salariés au total).
D’une façon générale, l’objectif d’une amélioration du niveau d’autosuffisance
alimentaire (voir ci-dessous § 3.1.2.3) renvoie à de réels enjeux en termes d’emploi,
dans un contexte qui reste en tout état de cause marqué par la prédominance des
services dans la structure de l’emploi.
3.1.2.2 Les enjeux propres à la structuration de la filière
27 IEDOM 2011 et Insee, comptes nationaux - base 2005
28 Le nombre total d’emplois en Martinique est de 126 500 en 2008 (données INSEE)
29 Données INSEE 2010 : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=99&ref_id=t_3902R
30 Données AMPI 2012
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
24
Il faut noter des efforts récents à cet égard. Ainsi, en Guadeloupe, trois associations
interprofessionnelles ont été créées ces dernières années, l’une en 2004, IGUAVIE
(viande et élevage), une autre en 2005, IGUACANNE (canne à sucre), la dernière en
2009, IGUAFLHOR (fruits et légumes / horticulture) ; cette dernière connaît quelques
difficultés dans son fonctionnement. En Martinique, deux organisations existent pour
la banane, Banamart et Banalliance, tandis qu’une coopérative, la SOCOPMA, a été
créée pour les fruits et légumes. La SOCOPMA fait actuellement l’objet d’une
opération de sauvetage, et se trouve en situation plus ou moins de concurrence avec la
CHM (Coopérative Horticole de Martinique), créée tout récemment.
De fait, la structuration de la filière demeure encore imparfaite tant en Guadeloupe
qu’en Martinique, pour « fluidifier » les rapports entre producteurs, industriels et
distribution.
3.1.2.3 Les réponses aux besoins du marché local et la réduction de la dépendance visà-vis de l’extérieur
L’enjeu est clairement celui d’un meilleur approvisionnement du marché local, tant en
quantité qu’en qualité et régularité, et donc celui de la réduction de la dépendance
alimentaire vis-à-vis de l’extérieur, qu’il s’agisse des importations en provenance de
métropole ou bien de celles en provenance d’autres pays, notamment des pays de la
région (ex. : Colombie pour les fruits et légumes). On rappellera que cette dépendance
est forte, voire très forte pour certaines productions, sans qu’il y ait nécessairement
d’amélioration dans la période récente. Par ailleurs, cette dépendance contribue à la
cherté du coût de la vie.
Dans une agriculture encore dominée par la banane et la canne à sucre – avec, pour
cette dernière, une production en aval qui est celle du rhum et des produits dérivés –,
un meilleur approvisionnement passe par une diversification des productions.
La culture de la banane est d’une telle spécificité que nous ne l’avons pas intégrée aux
éléments d’analyse du marché local (malgré la consommation locale de banane créole
et banane plantain). Quant à la production de canne, elle tend à baisser au fil des
années et a souffert de mauvaises conditions climatiques à répétition. Seul un tiers de
la production est transformé en sucre (ex. : en Martinique, à la sucrerie du Galion,
essentiellement pour le marché local), le reste de la production étant destinée au rhum
(cf. infra § 3.1.2.4, marchés d’exportation).
On examinera ici quatre ensembles : les fruits et légumes, la viande et produits de
l’élevage, les produits de la pêche, et les produits de l’industrie agroalimentaire.

Fruits et légumes :
Le développement du secteur des fruits et légumes répond directement à une logique
de diversification de la production agricole, en dehors des productions traditionnelles
de banane et de canne à sucre.
En Guadeloupe, la production locale couvrait 65% des besoins en 2010 et
représentait environ le tiers de la production végétale totale (banane et canne à sucre
comprises). En 2012, la production hors banane et canne à sucre se répartissait ainsi
(pour un total de 52786 tonnes) : les ¾ pour les légumes, un peu moins d’un quart
pour les fruits, et le reste (environ 4%) pour les plantes ornementales et les fleurs.
Comme indiqué précédemment, une interprofession a été créée pour faciliter le
développement du secteur et la diversification : IGUAFLHOR, qui vise à rassembler
producteurs, grande distribution et agro-transformateurs, avec l’objectif de « fournir à
la population guadeloupéenne des produits de qualité, en quantité et régularité ». Il
est intéressant de signaler que le président de l’interprofession s’est récemment
exprimé pour inviter les acteurs à se positionner dans une perspective interrégionale
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
25
« à l’échelle d’un marché d’un million d’habitants »31, avec « une mutualisation des
moyens d’achat, de production et de distribution pourront garantir un revenu décent
aux agriculteurs ».
En Martinique, la production locale est encore peu organisée. Les difficultés de la
coopérative SOCOPMA en 2011 sont venues fragiliser une filière déjà peu structurée.
En 2012, la production locale de fruits et légumes (ananas, banane créole, légumes,
tubercules, fruits) était de 16 000 tonnes et les importations en frais de 24 400 tonnes,
soit un taux d’approvisionnement du marché local par les producteurs locaux de 40%
(ce taux était de 47% en 2010 et 51% en 2011)32. L’essentiel des ventes de fruits et
légumes passe par les grandes et moyennes surface qui ont besoin pour achalander
leurs rayons de produits en qualité et en quantité régulière, ce que ne semblent pas
encore à même de fournir les producteurs locaux. Sans une meilleure organisation de
la filière permettant de conforter l’offre, les importations continueront de fournir 60%
du marché local. Il faut d’ailleurs noter que les importations viennent pour la majorité
de grandes firmes agricoles internationales (République Dominicaine, Costa Rica,
Brésil, Afrique du Sud) avec lesquelles les petites entreprises martiniquaises ne
peuvent rivaliser (sur les coûts et la régularité de la production) et d’Europe
(notamment pour les pommes et les pommes de terre qui représenteraient un quart
des importations de fruits et légumes et que la Martinique ne peut pas produire).

Viande et produits de l’élevage :
En Guadeloupe, le chiffre d’affaires du secteur de l’élevage s’élève à 50,2 millions
d’euros en 2010, représentant 19,7 % des recettes agricoles totales (part stable depuis
l’année 2000).
Le taux de couverture global est de 21,2 % ; il est cependant marqué par de fortes
disparités. Ainsi, le taux de couverture (viande congelée incluse) est de 44 % pour la
viande porcine, 34 % pour la viande bovine, 13 % pour la viande d’ovin et de caprin,
8 % pour la viande de volaille. En 2009, la couverture en viande fraîche est
respectivement de 93%, 72%, 100% pour les filières porcine, bovine et caprine33 ; le
taux de couverture de la production d’œufs atteint 75,4 % en 2010 contre 46,3 % en
200734, alors que le taux de couverture de la production de volailles est seulement de
1,1 % en 2010.
Dans ce secteur également, une interprofession, IGUAVIE (interprofession
guadeloupéenne de la viande et de l’élevage) a été créée en 2004 ; elle a pour objectif
d’atteindre l’autosuffisance alimentaire du territoire, en développant l’acquisition de
nouveaux matériels spécifiques pour les ateliers de découpe, qui viennent compléter
les actions de lutte contre l’abattage clandestin menées par les services vétérinaires ;
les conditions de mise en service d’un projet d’abattoir à Gourbeyre lancé en 2008 ne
sont cependant pas encore remplies,
L’élevage constitue ainsi, aux côtés des fruits et légumes, une deuxième filière de
diversification en Guadeloupe. La production animale n’est globalement pas en
mesure de couvrir la demande intérieure, mais tend à s’en rapprocher fortement pour
la viande fraîche et les œufs. Les importations restent donc indispensables. La filière
agricole éprouve encore des difficultés à s’intégrer dans les réseaux de distribution car
elle est trop peu structurée, en dépit de la création d’IGUAVIE.
31
http://www.interentreprises.com/fr/entretien/6046-radgi-bellone,-president-d%E2%80%99iguaflhor,gerant-de-la-sica-caribeenne-de-fruits-et-legumes--%E2%80%9Cpour-nous-sortir-de-la-crise,-nousdevenons-raisonner-a-l%E2%80%99echelle-d%E2%80%99un-marche-d%E2%80%99un-milliond%E2%80%99habitants-%E2%80%9D
32 Données DAAF : Bilan de conjoncture agricole 2012 (mai 2013).
33 Toutefois ces chiffres doivent être nuancés car ils ne prennent pas en compte l’abattage clandestin qui
concernerait 30 % de la production locale (rapport IEDOM Edition 2013).
34 http://www.odeadom.fr/?page_id=37
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
26
En Martinique, le marché de la viande (fraiche et congelée) est essentiellement un
marché d’importation (les taux d’approvisionnement du secteur sont faibles : 20%
pour les bovins, 23% pour les porcins, 6% pour les ovins et les caprins et 11% pour les
volailles). De gros efforts ont été faits par les organisations professionnelles pour
renforcer l’offre locale (en qualité avec les études sur la viande de bœuf brahman par
exemple et en quantité avec l’installation d’un nouvel abattoir de volailles en 2012) et
structurer la filière. Une part importante du marché est tenue par les produits congelés
de production industrielle (exemple des ailes et pilons de poulet importés d’Europe).
La production locale ne peut concurrencer une telle production à très bas coût et tente
de développer : une offre locale, identifiée comme telle et choisie par le consommateur
pour son origine ; une offre de produits frais : la filière bœuf par exemple a atteint ses
objectifs de couverture de l’offre de consommation de viande fraîche.
Par ailleurs, la production d’œufs permet aujourd’hui répondre à la demande locale,
alors qu’il y a 15 ans, elle importait 85% de sa consommation. Les producteurs
développent par ailleurs depuis 5 ans environ des produits innovants à destination des
professionnels (boulangerie, pâtisserie, restauration collective).

Produits de la pêche :
En Guadeloupe, la production totale de la pêche, qui s’élève à 10 000 tonnes par an, ne
suffit pas non plus à satisfaire la forte demande des consommateurs locaux (16 000
tonnes par an consommées, soit un taux de couverture de la pêche de 62 %).
L’intégralité de la production guadeloupéenne est écoulée, en frais, sur le marché local,
par des circuits de proximité (70 % de vente directe). A l’activité professionnelle, il
convient néanmoins d’ajouter une importante pêche informelle ou de plaisance qui,
bien que clandestine, dont le produit constitue un apport économique (et social) vital
pour certaines populations.
L’activité de pêche est également sous dépendance stricte de la qualité des milieux
d’où sont extraites les ressources halieutiques. L’état de santé des milieux littoraux et
des récifs coralliens se dégrade inexorablement, en raison des pressions anthropiques
croissantes et non maitrisées. L’aval de la filière (mareyage) commence à se structurer,
mais la valeur ajoutée à la production brute demeure faible.
Il est à noter que les tentatives pour développer l’aquaculture ont tourné court pour un
faisceau de raisons, en particulier la pollution au chlordécone au débouché des rivières
en mer, la méconnaissance des marchés, le manque d’investissements privés, malgré
des efforts qui ont notamment abouti au dépôt de brevets pour des casiers à immerger.

Produits de l’industrie agro-alimentaire :
En 2012, les produits-agro-alimentaires représentaient en Guadeloupe 16,3 % des
importations (soit 435 millions d’euros) et 32,7 % des exportations (soit 61 millions
d’euros). On notera que plus de la moitié de la production de rhum agricole (57 %) est
commercialisée localement »35.
En Martinique, l’offre de produits agroalimentaires produits en Martinique est
relativement limitée : elle couvre essentiellement le secteur des boissons (sodas, jus de
fruits, produits à partir de fruits locaux ou de pulpes importées du Brésil ou de
Thaïlande, eau, bière), des produits laitiers frais (dont les yaourts produits à partir de
poudre de lait importée), de l’épicerie (café, confiture) et des glaces. Certains projets
innovants comme Mastersalad/Saladinina (découpe et emballage de fruits et légumes
frais de production locale à destination des particuliers et surtout de la restauration
35 Le rhum de Guadeloupe se décline en un rhum agricole (obtenu par fermentation alcoolique et
distillation du jus de canne à sucre), eau de vie issue de la distillation du jus de canne fermenté, et en un
rhum industriel (ou de sucrerie), boisson spiritueuse obtenue par fermentation de mélasses ou de sirops
issus de la fabrication du sucre de canne. Douze unités de production sont recensées sur le territoire. En
2012, la production totale de rhum s’établit à 81 950 HAP (hectolitre d’alcool pur), soit une progression de
8,3 % sur un an (Rapport d’activité IEDOM, Edition 2013).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
27
collective) ont été récemment développés pour répondre aux nouvelles habitudes de
consommation des Martiniquais. Pour le reste, l’essentiel de l’offre de produits agroalimentaires provient de métropole.
3.1.2.4 Exporter

Métropole et Union européenne :
En Guadeloupe, la France métropolitaine représente 53,6 % des exportations de
biens. L’essentiel des exportations restantes (35,2 %) est destiné aux départements
français d'Amérique (DFA) et aux collectivités voisines de Saint-Martin et SaintBarthélemy, soit 76,2 millions d’euros. En 2012, les principaux postes d’exportation
étaient les produits des industries agroalimentaires (32,7 %), les autres produits
industriels (21,7 %) et les produits agricoles et de la pêche (19,2 %). Au total,
l’ensemble agriculture + pêche + agroalimentaire représentent donc un peu plus de la
moitié des exportations vers la France.
Les ventes de l’industrie agro-alimentaire vers l’Union européenne et la Caraïbe
restent relativement faibles, avec respectivement 12,3 et 5,3 millions d’euros des
exportations en 2012 (soit 5,7 % et 2,5 % du total). Les deux principaux partenaires
européens (le Portugal et l’Espagne) importent de la Guadeloupe des produits
agroalimentaires. Il faut ajouter que les flux d’exportation sont en partie constitués de
réexportations de produits agroalimentaires et de biens expédiés à la Martinique36.
En tendance, sur les dix ans écoulés, la structure des exportations a nettement évolué,
au détriment des produits de l’agriculture et de la pêche, qui représentaient 54,6 % des
exportations en 200237.
Pour l'essentiel, la Guadeloupe exporte du sucre, de la banane, du melon (cf. encadré)
et du rhum.
Encadré 1
Le melon paraît constituer un exemple réussi de diversification
Le melon est une filière bien structurée, dont l’origine remonte au début des années
1980, avec la création de l’Association des Producteurs de Melon. Dans sa quête de
qualité, la filière obtient en mars 2012 une indication géographique protégée « melon
de Guadeloupe » lui permettant de conforter son positionnement sur le marché local
et le marché export. Avec une production de 2 910 tonnes en 2012, la filière s’emploie
à retrouver son niveau de production d’avant l’année 2010 marquée par l’épisode des
cendres du volcan de Montserrat (7 950 tonnes en 2009). Quatrième produit exporté
en 2010 après le rhum, la banane et le sucre, le melon est majoritairement destiné à
l’hexagone, à contre-saison de la production européenne. En 2011, les exportations
s’établissent à 1 617 tonnes contre 1 601 tonnes en 2010. L’activité melonnière est
limitée par la disponibilité du foncier agricole (malgré les rotations culturales « cannemelon » pratiquées), la faible capacité de fret des compagnies aériennes, sa forte
dépendance aux conditions climatiques et également par la concurrence croissante des
producteurs marocains et sénégalais.
Source : Entretiens et Rapport IEDOM 2012, Edition 2013.
Certains autres produits, avec un positionnement spécifique, ont un marché en France
métropolitaine et dans l’Union européenne. On citera quelques produits illustratifs de
stratégies commerciales différentes :
•
pour la filière canne-sucre-rhum en 2012, le rhum est à 78,1 % un produit
d’exportation et à 21,9 % un produit de consommation locale (80 % en
2011)38. C’est essentiellement le rhum industriel qui est vendu à l’extérieur,
36 Rapport IEDOM Edition 2013.
37 Rapport IEDOM Edition 2013.
38 Rapport IEDOM Editions 2012 et 2013.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
28
avec 75,6 % des exportations en 2012, à destination des liquoristes et des
producteurs de punchs situés en métropole et en Europe – le rhum
guadeloupéen bénéficie à ce titre des efforts faits par la profession ;
•
dans le cadre du Plan banane signé le 5 décembre 2008 entre la filière banane
de Guadeloupe et de Martinique, le ministère de l’Agriculture et les
collectivités locales, la filière est engagée dans une démarche visant à adopter
de meilleures pratiques agricoles par tous les planteurs, permettre une
augmentation des bananes sous label de qualité et une meilleure valorisation
de la production39 ;
•
la production et le conditionnement du café local (cf. encadré SAS EDOUARD
– Café CAPRES) : la société EDOUARD fonde sa stratégie sur une
communication renforcée autour du café produit localement et visant à
réduire un grand déficit d’image ; il s’agit d’allier authenticité et innovation ;
l’entreprise se distingue par la diversité des saveurs proposées, le choix de
noms pour répondre à tous les goûts, un packaging moderne (l’emballage reste
debout, contient un pré-découpage pour une ouverture facile, une fermeture
ZIP et une valve fraicheur au dos) ; la chaîne de production comporte des
équipements de dernière génération assurant la préservation de
l’environnement (recyclage de la chaleur) ; bien que le marché soit encore très
majoritairement local, la stratégie à l’export vers Saint-Martin, la Martinique,
et la métropole est en cours de mise en œuvre.
•
le secteur des épices (cf. encadré La compagnie des épices) : La Compagnie des
épices est une entreprise de fabrication et de conditionnement d’épices, de
condiments et d’aromates. S’inscrivant dans une longue histoire de
l’entreprise familiale spécialisée dans le commerce de gros et dont une partie
de l’activité portait sur le commerce des épices ; l’entreprise est actuellement
positionnée à hauteur de 5 % de son chiffre d’affaires sur le marché de
métropole ; elle cherche au maximum à se fournir dans la zone caribéenne et
s’est lancée dans la plantation expérimentale de muscadiers et de roucou, afin
de maîtriser l’ensemble de la chaine de production et de créer de la valeur
ajoutée en Guadeloupe ; compte tenu de la concurrence des produits importés,
l’entreprise cherche à proposer des produits respectant des normes de qualité
maximale.
Encadré 2
épices
Exemple d’entreprise innovante : La Compagnie indépendante des
L’entreprise est implantée à Pointe-à-Pitre et connaît une croissance annuelle proche
de deux chiffres depuis plusieurs années. A l’exception de l’année 2009, l’entreprise a
constamment créé un emploi. Les bonnes épices de Monsieur Maurice est le nom
commercial de l’entreprise. Il s’agit d’une entreprise de fabrication et de
conditionnement d’épices, de condiments et d’aromates.
L’histoire des Bonnes Épices de Monsieur Maurice débute en 1948 dans le commerce
de gros avec une partie de l’activité portant sur le commerce des épices. Néanmoins,
les origines de ce savoir-faire sont bien antérieures. La démarche s’inscrit donc dans
une longue tradition familiale aujourd’hui perpétuée à travers la Compagnie
indépendante des épices. L’entreprise appuie son développement sur la maitrise de
plusieurs savoir-faire.
Le premier savoir-faire de l’entreprise est d’avoir su créer une relation de qualité avec
les producteurs et de se donner les moyens de la pérenniser. Cela permet de garantir la
fraîcheur des épices et aromates. Le deuxième savoir-faire réside dans la qualité du
service rendu aux clients, laquelle passe par la maîtrise des approvisionnements et de
39 http://www.bananeguadeloupemartinique.com
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
29
la fabrication (mélanges, conditionnement, etc.). L’entreprise cherche également à
faire preuve de créativité et est continuellement à la recherche de nouvelles saveurs.
Le projet a bénéficié du conseil régional (projet initiative jeune – PIJ) pour démarrer
l’activité. L’entreprise a ensuite régulièrement innové en installant une nouvelle chaîne
de conditionnement et en proposant des produits dans des formules de
conditionnement adaptées aux besoins des consommateurs et des industries
agroalimentaires de l’archipel. Le packaging est en en constante évolution et une veille
régulière sur les tendances nationale et internationale est régulièrement menée. De
nouveaux produits sont également régulièrement proposés (« sauce chien », mélange
de fruits locaux, etc., soit au total 116 produits déclinés en 250 références).
L’entreprise cherche au maximum à se fournir dans la zone caribéenne. Elle s’est
récemment lancée dans la plantation expérimentale de muscadiers et de roucou, afin
de maîtriser l’ensemble de la chaîne de production et de créer la valeur ajoutée en
Guadeloupe. Compte tenu de la concurrence des produits importés, l’entreprise
cherche à proposer des produits respectant des normes de qualité maximale.
Source : entretien Technopolis |ITD|, Produit PEYI n°4 – avril 2013.
Encadré 3
Exemple d’entreprise innovante : SAS EDOUARD – Café CAPRESS
La SAS EDOUARD a été créée en 2010. Sa jeune fondatrice, diplômée de l'École
Supérieure de Commerce (ESC) de Montpellier, ses deux frères et sa sœur sont issus
d’une famille positionnée depuis plusieurs générations sur le marché local du café.
S’appuyant sur l’expérience et le soutien de l’entreprise familiale, l’entreprise SAS
EDOUARD a fondé sa stratégie sur une communication renforcée autour du café
produit localement et visant à réduire un grand déficit d’image. Le nom CAPRESS est
un métissage des mots café, expresso et capresse, la femme antillaise couleur café
(représentée sur le paquet). Le projet a été mûri durant deux ans.
Il s’agit d’allier authenticité et innovation. L’entreprise se distingue par la diversité des
saveurs proposées et le choix de noms pour répondre à tous les goûts : « Harmonie »
est un métissage d’arabica et de robusta sélectionnés pour leur qualité. « Caractère »
est un café plus corsé adapté pour le matin. « Volupté » est un mélange d’arabica des
Caraïbes. Le café contient au-moins 17 % de café locaux.
Le packaging est moderne : l’emballage reste debout, il contient un pré-découpage
pour une ouverture facile, ainsi qu’une fermeture ZIP et une valve fraîcheur au dos.
La chaine de production comporte des équipements de dernière génération assurant la
préservation de l’environnement (recyclage de la chaleur) et ayant bénéficié d’une
garantie OSEO pour leur financement.
Les grands distributeurs en Guadeloupe ont été assez réceptifs de la démarche. Le
marché est encore essentiellement local : le café est disponible en petite et moyenne
surface. La stratégie à l’export à Saint-Martin, la Martinique, et dans l’hexagone est en
cours de mise en œuvre.
L’entreprise a bénéficié de la visite de Sylvia Pinel, ministre de l’Artisanat, du
Commerce et du Tourisme le 19 avril 2013.
Source : Technopolis |ITD|, Produit PEYI n°4 – avril 2013.
En Martinique, la situation est largement similaire pour la banane et la filière cannesucre-rhum.
En 2012, plus de 187000 tonnes de bananes ont été exportés de Martinique,
essentiellement vers la métropole. Un tiers environ de la production de bananes de
Martinique est vendu dans les pays de l'Union européenne hors France, dont un quart
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
30
en Roumanie, Tchéquie et dans les Pays Baltes40. La place de la banane de Martinique,
comme de celle de Guadeloupe, est fragile sur le marché métropolitain : elle fait face à
la concurrence d’autres productions (notamment d’Afrique), moins chères mais
surtout plus régulières dans leurs volumes de production et donc plus à même de
fournir le marché important de la grande distribution.
Dans la filière canne-sucre-rhum, le rhum est à 77% un produit d’exportation et à 23%
un produit de consommation locale41. Le rhum martiniquais bénéficie à ce titre des
efforts faits par la profession pour obtenir le label « Rhum agricole de Martinique –
Appellation d’origine contrôlée » et garantir la qualité des produits liée au label.
Certains produits, avec un positionnement spécifique, ont un marché en France
métropolitaine et dans l’Union Européenne.
On peut citer deux produits illustratifs de stratégies commerciales différentes :
•
Les confitures de fruits tropicaux : l’entreprise La Tivolienne, par exemple, est
située sur un marché de gamme supérieure (cf. haute teneur en fruits, faible
teneur en sucre) et envisage son développement sur le marché de métropole,
essentiellement pour les communautés antillaises (et africaines) de France
métropolitaine. Elles se trouvent cependant sur ce marché en concurrence
avec d’autres productions antillaises ou africaines.
•
Les chocolats haut de gamme (cf. encadré chocolats Lauzéa Frères) : les
Chocolats Lauzéa se sont à ce jour développés en Martinique (en Guadeloupe
et en Guyane) sur un segment de clientèle haut de gamme et une frange du
flux des touristes. Compte-tenu de l’étroitesse du marché local et du
positionnement haut de gamme des produits, le développement de l’entreprise
passe par une stratégie d’exportation vers la France métropolitaine et
l’Europe.
Encadré 4
Exemple d’entreprise innovante : Les chocolats Lauzéa
Les chocolats Lauzéa sont nés il y a 10 ans de l’idée de valoriser les saveurs tropicales
dans le chocolat et les pâtes de fruits (remplacer la noisette, la noix, la fraise, etc. par la
coco, l’arachide, la goyave, etc.).
Ce travail qui était relativement aisé pour les pâtes de fruits, s’est avéré plus difficile
pour les chocolats du fait de l’absence de production martiniquaise de cacao (la
production avait existé, avant d’être abandonnée progressivement). L’entreprise
Lauzéa intervient donc à ce jour sur la confection de bonbons de chocolat, à partir de
pâtes de cacao importées d’autres pays de la Caraïbe, grands producteurs de chocolat
comme Trinidad, Cuba, la Grenade. Cette fabrication de premier niveau sur la base de
produits importés est le niveau de la chaine du chocolat le plus facile, celui également
où la valeur ajoutée est la plus grande, et par conséquent, celui sur lequel il était plus
aisé de démarrer une activité de chocolaterie en Martinique.
Outre la qualité des matières premières et des bonbons produits, c’est la stratégie de
marketing qu’a développée l’entreprise qui a permis de positionner le produit sur un
marché haut de gamme, en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane. Ce
positionnement permet de vendre les produits à un prix élevé et donc de compenser
les coûts liés à l’importation des produits et les impossibles économies d’échelle liées à
la petitesse du marché potentiel.
L’entreprise a tenté, sans réel succès, de développer son marché au sein de la Caraïbe
mais se trouve confrontée à nombres de difficultés : formalités douanières, cout du
transport, langue et étiquetage des produits, morcellement du marché de la Caraïbe (il
s’agit d’ailleurs de juxtaposition de (très) petits marchés nationaux et non d’un marché
40 Source : UGPBAN
41 Données DAAF : Bilan de conjoncture agricole 2012 (mai 2013)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
31
de la Caraïbe) habitudes de consommation, etc. Elle souhaite aujourd’hui développer
ses produits en France métropolitaine ou en Europe, où la consommation de produits
de luxe et de chocolat est bien plus élevée que dans les DOM. Elle se trouve confrontée
cependant à l’absence d’outils d’accompagnement pour ce marché qui n’est, par
définition, pas considéré comme de l’export pour Ubifrance (comme elle était
d’ailleurs confrontée à l’absence d’accompagnement pour le marketing, alors que c’est
cette stratégie de positionnement haut de gamme qui assure l’équilibre de
l’entreprise).
L’entreprise, en association avec l’autre chocolatier de Martinique, cherche également
à développer son activité en remontant la filière du chocolat et travaillant sur l’étape
précédant la confection des bonbons, à savoir la transformation des fèves de cacao en
pâte de cacao et chocolat, à partir de fèves de cacao martiniquais. Cela implique donc
de travailler avec les producteurs pour reconstituer la filière cacaoyer en Martinique et
produire la matière première, et avec les partenaires de la recherche agronomique et
de l’innovation agroalimentaire que sont le CIRAD, la technopole et le PARM, pour
développer les techniques de transformation. L’idée était de travailler sur le cacao
comme sur la canne pour le rhum AOC et de développer le potentiel des produits par
des techniques adaptées (projet Valcao). Ces nouvelles étapes du développement de
l’entreprise sont celles où la valeur ajoutée est la plus faible, mais cette stratégie
permet de développer la filière de façon cohérente et de proposer à terme un cacao de
Martinique, utile pour la Martinique et ses producteurs, mais également pour
renforcer l’image de marque des chocolats produits en Martinique comme Lauzéa (il
n’y a pas à ce jour de cacao français). Les chocolatiers travaillant de toute façon de
préférence à partir de cru de différentes origines, l’objectif n’est pas de soutenir la
production de fèves pour les seuls transformateurs martiniquais mais de les
accompagner à terme dans une stratégie d’export. Cette stratégie, sur 8 ans, doit
permettre à terme de créer 34 emplois ETP d’après les projections de l’entreprise.

Zone régionale :
Pour la Guadeloupe, les échanges commerciaux avec la région Caraïbe (y compris
Départements Français d’Amérique) représentaient 13,2 % des importations et 37,7 %
des exportations en 2012. Les exportations à destination des États de la Caraïbe (hors
DFA) sont très faibles (5,3 millions d’euros, soit 2,5 % des exportations totales). Les
importations en provenance des États de la Caraïbe (hors DFA), d’un montant de 154
millions d’euros, pèsent 5,8 % des importations totales et celles en provenance des
DFA 7,4 %. Les échanges avec l’Amérique du Nord concernent essentiellement des
produits pétroliers en provenance de Porto-Rico et s’élèvent en 2012 à 256,3 millions
d’euros, soit 9,6 % des importations en Guadeloupe42. La situation est comparable en
Martinique.
Les enjeux d’exportation de la filière dans la Caraïbe (hors DFA) sont marginaux : en
règle générale, les productions guadeloupéennes et martiniquaises sont insuffisantes
pour fournir le marché local, la régularité des productions agricoles n’est pas assurée
et ne permet donc pas de penser à une stratégie d’exportation. De plus, les pays de la
zone sont en règle générale également producteurs des mêmes produits, avec des coûts
de production en principe nettement plus faibles.
Par ailleurs, sur les marchés des États de la Caraïbe, les produits guadeloupéens et
martiniquais se trouvent dans une situation de concurrence avec des « géants »
agricoles ou agro-alimentaires (États-Unis, Brésil) et/ou des pays à moindre coût de
main-d’œuvre (Colombie, Costa Rica, République Dominicaine, etc.), qui joue
inéluctablement en leur défaveur. De plus, l’hétérogénéité de la Caraïbe se retrouve
dans la réglementation des produits, dans les langues des emballages ou dans les
habitudes de consommation de ses habitants et les produits guadeloupéens et
martiniquais ne seraient pas forcément en bonne position sur les marchés de ces pays
42 Rapport IEDOM Edition 2013
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
32
(cf. banane créole vs. banane dollar). Enfin, les difficultés de transport au sein de la
Caraïbe (faible fréquence des liaisons et coûts très élevés) restent un obstacle
fondamental à l’export des produits martiniquais dans la zone.

Grand international :
Pratiquement le seul produit ayant à ce jour un potentiel d’export sur le « grand
international » est le rhum. C’est notamment le cas du rhum martiniquais AOC, en
raison premièrement du travail de qualité fait sur les produits, mais également des
stratégies de positionnement commercial (dans un environnement hautement
compétitif, tant sur le haut de gamme que sur une consommation de masse) et de
conquête de nouveaux marchés (cf. participation à des salons en Europe, en Asie –
Chine, Japon notamment).
Les enjeux identifiés sur ces marchés sont essentiellement liés à la capacité des acteurs
à développer des productions labélisées intégrant les exigences concernant l’origine du
produit ou des matières premières, le respect des savoir-faire traditionnels et des
normes en vigueur, ainsi que l’inscription dans une démarche de qualité et de
transparence. Pour le rhum de très haute qualité, on est sur des marchés largement
apparentés aux marchés du luxe, avec les exigences et les contraintes propres à ces
marchés43.
3.1.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs
potentiels
3.1.3.1 La question de la compétitivité prix
Dans la filière agriculture-agroalimentaire, il existe peu de produits, voire très peu, qui
soient compétitifs en termes de prix, que ce soit sur le marché local ou à l’exportation.
On notera cependant que la production locale d’œufs et de viande fraîche a fini par
s’imposer, ce qui montre qu’il existe malgré tout quelques opportunités de réussite.
3.1.3.2 Les avantages comparatifs existants
Un premier avantage comparatif très général, par rapport aux producteurs de la zone
régionale, est constitué incontestablement par l’accompagnement assuré par les
acteurs publics dans le cadre des politiques publiques régionales, nationales
et de l’UE (on appréciera plus loin leur efficacité, infra § 3.1.3.3), ainsi bien entendu
que les mécanismes de marché (garanties de prix) pour des produits spécifiques.
L’accompagnement concerne :
•
La structuration des filières agricoles en interprofessions thématiques. Ainsi,
en Guadeloupe, outre le LPG (Les Producteurs de Guadeloupe – filière
banane), les filières viandes, canne et maraîchage ont vu respectivement la
création des interprofessions IGUAVIE, IGUACANNE et IGUAFLHOR. La
structuration des filières concernées, même si elle est encore imparfaite
comme on l’a précédemment souligné, constitue un élément qui conditionne
la capacité des acteurs à lever des fonds, notamment auprès du FEADER.
•
Le soutien aux agriculteurs pour les encourager à mieux produire et à adapter
la production à la demande locale : qualité, régularité de l’approvisionnement,
distribution, commercialisation de proximité, ce dernier enjeu étant
transversal à l’ensemble de la production agricole
•
Les démarches visant à encourager la R&D, l’innovation et le développement
d’une stratégie de diversification sur des filières porteuses, qu’elles soient
traditionnelles ou nouvelles :
43 Voir la sélection de rhums antillais que l’on trouve par exemple dans la boutique Davidoff à Genève.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
33
−
en Martinique avec le Pôle agroalimentaire régional de Martinique
(PARM) qui fait partie de la Technopole de Martinique, et le Campus
agro-environnemental Caraïbe (ex-PRAM : Pôle de recherche agroenvironnemental de Martinique) ;
−
en Guadeloupe, avec les projets de création : d’une Technopole de
Guadeloupe qui devrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2013, et dont
l’agroalimentaire serait une des cibles privilégiées ; d’une halle
technologique dans le secteur de l’agro-transformation (appel d’offres en
cours).
Ces démarches devraient renforcer l’appui possible sur les compétences de recherche
présentes au niveau local et sur les capacités privilégiées d’accès à l’expertise
hexagonale ou européenne, pour favoriser à moyen terme le transfert de nouvelles
variétés (antiparasitaire par exemple) et la diversification des filières (fruit, jus, farine,
aquaculture…).
Sur le marché local, un second avantage comparatif résulte de la perception
favorable qu’ont les consommateurs locaux des produits « pays ».
Ainsi, les produits martiniquais bénéficient-ils d’une perception favorable qui repose
soit sur une qualité supérieure et une typicité effective des produits (viande de bœuf
brahman par exemple), soit sur l’image du « produit péyi » et les implications en
termes de retombées locales pour l’économie et l’emploi. L’AMPI travaille d’ailleurs
sur cette image de produits locaux et cherche à promouvoir les produits martiniquais
sous le label « PIL », produit de l’industrie martiniquaise (produit qui peuvent
recevoir ce label dès lors que la dernière transformation a été effectuée en Martinique :
les jus de fruits faits avec des pulpes de fruits importées, finalisés et embouteillés en
Martinique, peuvent ainsi être des produits martiniquais). Un sondage réalisé en 2012
indiquait que 85% des consommateurs martiniquais avaient une bonne image des
produits PIL. L’AMPI de la Guadeloupe est engagée dans une démarche similaire.
Néanmoins, pour que cet avantage comparatif joue à plein, plusieurs conditions
doivent être remplies : une qualité supérieure et une typicité effective des produits44 ;
la connaissance des producteurs de produits frais par la distribution, dans une
perspective de renforcement des circuits courts et d’approvisionnement régulier des
différents réseaux de distribution locaux.
Ainsi, en Guadeloupe comme en Martinique, la couverture des besoins en viande de
volaille fraîche n’est pas assurée car la grande majorité des poulets produits sont issus
d’élevage industriel et ne sont pas nécessairement de qualité supérieure aux poulets
importés.
Par ailleurs, concernant les fruits et légumes, la question des avantages comparatifs
renvoie également à celle de la diversification des productions. Elle concerne aussi
l’utilisation des surfaces agricoles (concurrence entre les productions et enjeu de
gestion des conflits d’usage). Ainsi, le territoire guadeloupéen bénéficie de la présence
d’un foncier agricole et d’un fort taux d’activité agricole pouvant servir de base pour la
diversification des activités et l’approvisionnement de l’industrie agro-alimentaire (jus
de fruits par exemple).
A l’export, les avantages comparatifs sont les suivants, avantages qui peuvent se
combiner :
•
Production à contre-saison pour l’exportation vers l’Europe : melon de
Guadeloupe, banane « export » (mais grâce aux aides européennes qui
permettent de compenser le handicap par rapport à la banane « dollar »).
44 Cf. : l’image du « produit péyi ».
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
34
•
Qualité et typicité des produits (melon, confiture de fruits tropicaux, café,
épices, …) : un avantage comparatif qui permet de toucher les communautés
antillaises en Europe, tout comme les touristes.
•
Positionnement sur le haut de gamme et les marchés du luxe : rhum,
épicerie fine.
Pour le rhum par exemple, même les rhums martiniquais d’entrée de gamme
se situent sur un marché de qualité supérieure aux produits concurrents :
l’essentiel du rhum de Martinique, même le rhum blanc, est du rhum de canne
quand les concurrents internationaux sont souvent des rhums de mélasse. Ce
positionnement peut cependant être un frein avec les évolutions des habitudes
de consommation vers des produits plus neutres que les rhums martiniquais
(« mixologie »). Les catégories supérieures de rhum (rhum vieux) se sont
développées sur un marché haut de gamme, en France et à l’étranger.
L’appellation AOC est un atout certain dans cette stratégie.
•
Innovation non-technologique (marché, packaging) : café, épices.
3.1.3.3 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de
nouveaux avantages comparatifs
Dans l’ensemble, les avantages comparatifs identifiés dans le paragraphe précédent
doivent être encore consolidés pour la plupart.
•
Pour
l’agro-alimentaire,
au-delà
de
la
question
des
sources
d’approvisionnement, il est également nécessaire de renforcer les capacités de
première et deuxième transformation en tenant compte de la forte
concurrence des produits importés et de la difficulté à mettre en place des
outils de production adaptés à la taille du marché.
•
Dans le cas spécifique des chocolats Lauzéa, le potentiel d’exportation n’est
pas encore développé. Il pourrait reposer sur les habitudes de consommation
des métropolitains et des européens (marché belge et suisse), sur une
distribution sélective, etc. Le produit bénéficie en effet selon son créateur
d’une image doublement positive de la Martinique (luxe et gastronomie
français et exotisme caribéen).
•
Il nous semble que la démarche conduite par la Compagnie indépendante des
épices, les Cafés CAPRESS et les Chocolats Lauzéa, est intéressante, originale
et innovante, car elle vise à dépasser les problèmes d’approvisionnement local
(seule une partie, souvent faible, de l’approvisionnement est locale) tout en
s’appuyant sur une typicité antillaise et un haut niveau de qualité, qui
devraient permettre d’échapper à la contrainte de la compétition par les prix.
Enfin, pour ce qui est de la pêche, la présence et l’accessibilité des ressources de
grands pélagiques du large offrent un potentiel de développement aux Antilles. Une
partie de la flotte artisanale exploite ces ressources grâce à des pêches sélectives,
autour des Dispositifs de Concentration de Poissons (DCP) ancrés, ce qui autorise le
redéploiement de l’effort de pêche depuis la zone côtière, fortement exploitée, vers la
ressource du large. Ce redéploiement indispensable pour la durabilité de l’activité est
néanmoins contrarié par des mesures inadaptées de la politique commune de la pêche
(PCP) et du Fonds européen pour la pêche (FEP) : arrêt des aides à la construction
neuve, interdiction du financement public des DCP ; etc. De la même façon, les
conditions locales devraient permettre un développement, ou un renouvellement des
tentatives de développement de l’aquaculture.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
35
3.1.4 Handicaps et points faibles
Au-delà des handicaps généralement mis en avant comme l’étroitesse des marchés
locaux, le coût de la main-d’œuvre, ou encore la vulnérabilité environnementale45, on
retiendra :
•
Une structuration et une professionnalisation limitée de la filière :
En Guadeloupe, celles-ci restent encore balbutiantes dans plusieurs secteurs
(volaille, pêche, fruits et légumes malgré la création d’IGUAFLHOR, ...) et l’on
constate une désaffection des jeunes générations pour les métiers concernés, en
particulier dans la pêche (profession vieillissante).
Dans la pêche, cette situation réduit les capacités d’organisation des circuits de
distribution et de commercialisation, d’amélioration de l’accompagnement des
entreprises, de renforcement de la formation des jeunes pêcheurs, de développement
de nouveaux savoir-faire, etc. Le manque de structuration et de professionnalisation
empêche aujourd’hui les acteurs d’accéder au FEP, et dans le futur à un éventuel
POSEI pêche (le sujet en cours de discussion). Par ailleurs, le secteur est confronté à la
pêche clandestine qui fait entrer des produits concurrents aux produits locaux et
légaux.
Par ailleurs, l’appui au regroupement d’entreprises bute sur la capacité à trouver des
porteurs de projet institutionnels ou représentatifs des entreprises concernées, ayant
les moyens de travailler à la préparation et au suivi du projet (ingénierie de projet), et
la capacité à créer du consensus. Le temps de développement de telles actions est
souvent très long. De fait, le nombre de porteurs de projets en mesure de répondre à
ces contraintes est limité.
En Martinique, l’organisation des filières de production agricole reste faible. Certes,
des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières années dans quelques filières
(banane, viande par exemple), mais ces avancées restent fragiles comme l’attestent les
problèmes de la SOCOPMA (filière fruits et légumes) de 2011. Ce manque de
structuration ne permet pas d’organiser la production pour répondre à la
consommation de frais (notamment dans les grandes surfaces) ou aux besoins des
industriels : l’un des points de fragilité de l’entreprise Mastersalad (salades ensachées)
est l’irrégularité de l’approvisionnement et par conséquent la variabilité du prix46. La
goyave est à l’opposé un contre-exemple et illustre les avantages de l’organisation de la
filière : alors qu’il y a une dizaine d’années, le groupe Denel (jus et confiture) traitait
80 tonnes de fruits par an, il en traite aujourd’hui 1 500. Pour arriver à ce résultat, un
travail a été mené pour organiser l’amont de la filière (plantation de vergers, création
de l’association des vergers et jardins tropicaux). De la même façon, des champs
d’ananas ont été replantés récemment, afin de relancer la production locale47 et
fournir l’usine.
•
Les aléas climatiques et à la volatilité des prix qui affectent les activités
agricoles.
•
La concurrence des pays de la zone caraïbe (Colombie, Costa Rica, République
Dominicaine, Venezuela, …) et du Brésil qui, outre des coûts de production
inférieurs, ne sont pas soumis aux normes et réglementations européennes
relatives à la qualité et à la sécurité alimentaire.
45 cf. Production de bananes et problème de la pollution des sols à la chlordécone.
46 Les aléas climatiques aggravent ces problèmes de variation des prix : le kilo de laitue est passé de 1,80€ à
près de 5€ e, juin 2013 (les pluies ont rendu impossible la production locale – la salade était importée de
République dominicaine où les infrastructures agricoles sont plus performantes)
47 Alors que la production d’ananas était de 15 000 tonnes par an dans les années 90, elle est aujourd’hui de
575 tonnes (données DAAF 2013). La hausse du prix des intrants est une des premières explications de la
chute de la productivité de la filière
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
36
•
La dépendance par rapport aux importations des intrants.
•
Des difficultés d’accès au foncier et la réduction de la SAU (du fait de
l’étalement urbain). Il est intéressant de signaler que, pour pallier cette
faiblesse, certains planteurs de bananes martiniquais exploitent également des
terres en Afrique afin de pouvoir fournir en continu le marché de la grande
distribution européenne et ainsi ne pas perdre le marché de la grande
distribution au profit des grandes agricultures exportatrices.
•
Un déficit en termes de capacités d’améliorations techniques : mécanisation,
irrigation, savoirs technico-économiques, etc.
Si la Martinique bénéficie de la présence du PARM et du PRAM, il n’existe plus en
Guadeloupe depuis 1998 de centre de transfert technologique ou plateforme
technologique labellisés par le Ministère de la Recherche. Dans le domaine agricole, il
existe toutefois les deux instituts techniques du ministère de l’Agriculture IT2 (plantes
tropicales) et IKARE (élevage). Par ailleurs, comme on l’a signalé, les projets de
Technopole et de halle technologique pour l’agroalimentaire sont en bonne voie.
•
Un manque d’outils de financement de l’amorçage des projets d’innovation
(technologique ou non)48 dans les industries agroalimentaires, la culture des
entreprises restant marquée par l’intérêt plus grand porté sur le financement
des investissements matériels, plutôt que sur l’amélioration de l’organisation
de l’entreprise, des processus de production ou de commercialisation.
3.1.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs
d’accompagnement
Les politiques publiques jouent un rôle essentiel pour la filière agricole et agroalimentaire à plusieurs niveaux :
•
Le régime des aides européennes permet aux productions locales de se
défendre face à la concurrence internationale et de maintenir l’activité.
L’organisation commune du marché (OCM) structure le marché intérieur pour
les produits agricoles, dont les bananes : bien que leur portée ait été
considérablement réduite au fil des réformes, la PAC reste dotée d’outils
d’intervention qui ont pour fonction de soutenir les prix, à commencer par une
forte protection à l’importation et complétée à titre secondaire par des
mécanismes d’intervention sur le marché intérieur.
•
La sauvegarde du foncier agricole : ainsi, en Guadeloupe, le Conseil Général
évite de vendre son foncier agricole et le loue au travers de baux présentant
des clauses environnementales strictes. Toutefois, la volonté politique liée à la
mise en place des ZAP ne fait pas encore l’unanimité et la pression foncière
liée à la réalisation des logements sociaux, malgré une bonne réserve foncière
des bailleurs, entraîne la diminution progressive de la SAU.
•
Les aides aux agriculteurs : aide à l’installation des jeunes agriculteurs ; aide à
l’investissement pour la modernisation des exploitations (cofinancement
régional des mesures du FEADER) ; formation des exploitants agricoles.
•
La structuration du secteur agricole et le renforcement des interprofessions,
déjà mentionnés à plusieurs reprises, avec des résultats inégaux et imparfaits,
mais plutôt positifs dans l’ensemble.
48 Plusieurs entreprises rencontrées ont insisté sur les points suivants : l’absence d’outils simples comme il
en existe en métropole (Prestation Technologique Réseau des Réseaux de Diffusion Technologique ou
Réseaux de Diffusion de l’Innovation) ; l’absence d’ingénieurs d’OSEO Innovation sur le territoire et d’un
fonds dédié à l’amorçage de projets innovants (les fonds de capital investissement gérés par la SAGIPAR
ciblent les entreprises établies sur des projets présentant un risque peu élevé).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
37
•
Le FEDER et le FEADER offrent différentes solutions de soutien aux
entreprises du secteur agroalimentaire (notamment pas des aides à
l’investissement ou des aides techniques importantes) facilitant l’émergence
de projets d’unités artisanales et semi-artisanales pouvant répondre à la
demande locale et aux enjeux de diversification.
•
Le soutien à des actions d’information, de communication et de
sensibilisation : observatoires économiques et sociaux (Guadeloupe : viande,
canne, maraîchage, diversification) ; actions de sensibilisation et de
communication sur les filières agricoles. Il n’y a pas cependant nécessairement
de stratégie de communication globale à l’échelle de la filière. De plus, l’impact
de ces actions multiples, notamment la participation récurrente au Salon
national de l’Agriculture (Guadeloupe) n’est pas mesuré en termes
d’indicateurs économiques (augmentation des commandes et donc du CA ;
impact sur l’emploi ; etc.). On notera en Guadeloupe la réalisation d’un état
des lieux relatif à la contamination des sols et rivières polluées à la
chlordécone (services de l’État) ; pour faire face à ce grave problème, la Région
a mis en place un plan « banane durable » ; les acteurs locaux (notamment la
Chambre d’Agriculture) se sont d’ailleurs approprié l’objectif de diminution de
50 % d’apports en intrants, à l'horizon 2018, sous l'impulsion de la politique
nationale "programme éco-phyto".
•
Le soutien de structures publiques d’aide à l’innovation comme, en
Martinique, la Technopole, le PARM (Pôle agroalimentaire régional de
Martinique), la grappe d’entreprises Inovagro, ainsi que le soutien à la R&D et
au transfert de technologie (Guadeloupe : Chambre d’Agriculture et INRA ;
Martinique : PRAM), permettent de bénéficier d’un soutien technique ou
technologique important dans la création et le développement de projets
innovants.
•
Dans le domaine des outils d’ingénierie financière, l’État a mis en place, suite
aux États Généraux de l’Outre-mer (EGOM), le FOGAP, mais cela ne règle pas
complètement les problématiques de trésorerie des entreprises. Par ailleurs,
des dispositifs existants dans d’autres régions pourraient être utilement
activés, tels que la garantie SIAGI (elle est opérationnelle en Guadeloupe pour
les entreprises artisanales, mais pas pour les entreprises agricoles).
•
Les aides à l’export sont également appréciés des entreprises, même si
d’aucuns regrettent que l’exploration du marché métropolitain ne soit pas
considéré comme de l’export. Les entreprises martiniquaises, en vertu des
dispositifs d’aide à l’export, peuvent ainsi être soutenues pour explorer le
marché de Dubaï ou Hong Kong, mais pas le marché métropolitain (malgré la
nécessité de gérer un fret transatlantique, des formalités administratives et
douanières, des délais de livraison, des habitudes de consommation
différentes qui font dire aux entrepreneurs qu’ils sont de facto dans une
situation d’export).
3.1.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ?
3.1.6.1 Globalement / sur des niches spécifiques
A court, moyen et long terme, la filière dispose d’un réel potentiel de création
d’emplois et de richesses, suivant des logiques de consolidation de l’offre locale et de
substitution à l’import, de diversification et aussi dans une perspective d’exportation
sur différentes niches car elle présente un réel potentiel de développement de produits
nouveaux.
Les principaux défis restent l’amélioration de la sécurité alimentaire et la couverture
de la consommation locale. Il s’agit d’assurer une augmentation de la production
locale pour améliorer la couverture alimentaire et la compétitivité face aux
importations. D’autres enjeux sont relatifs à la meilleure valorisation des produits à
l’exportation et à la préservation des ressources et de la biodiversité.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
38
Dans un contexte de forte dépendance aux imports, il est donc important de soutenir
la production locale en vue d’améliorer la compétitivité du secteur agricole et
l’autosuffisance alimentaire.
3.1.6.2 Quel type de stratégie d’entreprise / de filière (actions collectives) pourrait être
nécessaire pour conforter sa position ?
A l’échelle des entreprises, plusieurs stratégies d’entreprise / de filière (actions
collectives) semblent pertinentes pour la filière :
•
la participation à la structuration des filières et des interprofessions (déjà bien
engagée pour les plus importantes) ;
•
l’engagement dans des démarches de diversification, modernisation des
exploitations, amélioration de la qualité des produits ;
•
l’appui sur des démarches de mise en place de promotion des produits locaux
(démarches qualité notamment) ;
•
le développement d’innovations de marché par la création de produits
agroalimentaires d’exportation sur les marchés européens en s’appuyant tant
sur le marché des communautés antillaises (diaspora) que sur celui des
touristes ayant visité les territoires, sans que les matières premières soient
nécessairement produites localement en totalité (ex. : épices, café, chocolats) ;
•
la poursuite et l’extension de stratégies marketing haut de gamme : rhum en
premier lieu, mais aussi pour les produits innovants évoqués ci-dessus.
3.1.6.3 Quel type de soutien public pourrait être nécessaire pour conforter sa
position ?
Parmi les nombreuses possibilités proposées par les acteurs rencontrés, on retiendra
les orientations suivantes du soutien public nécessaire pour conforter la position de la
filière :
• l’appui au déblocage de la situation foncière qui est un frein important aux
activités (et même à l’accès aux aides européennes surfaciques) ;
•
le renforcement du soutien apporté à la structuration et l’organisation des
interprofessions (assistance technique performante et moyens humains
correspondants) dont les faiblesses peuvent limiter le développement de la
filière agroalimentaire ;
•
la poursuite de la modernisation des exploitations, le soutien à l’installation
des jeunes agriculteurs et pêcheurs et la formation à la transmission avec un
accompagnement individualisé ;
•
le soutien des circuits courts, des modes de culture traditionnelle (conseils,
formations et vulgarisations techniques) et à la place des produits sur les
marchés locaux (identification, labels, communication) ;
•
la mise en œuvre de services d’assistance-conseil-formation et d’une aide à la
transmission des exploitations agricoles. Le but est d’une part de rendre la
profession plus facile d’accès aux nouveaux exploitants (outils financiers, aide
au démarrage, assouplissement des démarches, appui technique) et d’autre
part de donner au statut d’agriculteur une image plus attrayante (formations,
innovation, recherche et développement, transfert de connaissance) ;
•
dans l’industrie agroalimentaire, les soutiens peuvent concerner le
développement des équipements structurants de production et de
transformation, et l’adaptation des productions locales aux besoins qui
nécessitent notamment des démarches d’appui aux innovations
technologiques (nouveaux produits) et non technologiques (packaging,
process organisationnel…) ;
•
l’accompagnement et l’aide au développement spécifique des entreprises en
milieu rural tropical : soutien aux investissements (même petits) pour la
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
39
modernisation des exploitations et des infrastructures, et pour l’adaptation
des installations aux risques naturels et sanitaires et aux aléas climatiques ;
•
le soutien à la recherche et développement et à l’accès aux réseaux de
Recherche et d’expertise technique des autres DROM, de la métropole et de
l’Europe ;
•
la création ou le renforcement des dispositifs d’aide à l’innovation
(technopole, centres techniques, PTR, etc.) venant notamment en appui aux
projets d’expérimentation ;
•
le renforcement des outils de financement des fonds propres des entreprises
pour soutenir leurs projets de développement et de diversification ; le secteur
bancaire est toujours perçu comme étant trop « frileux », surtout lors des
phases de pré-commercialisation ou de pré-industrialisation qui comportent
une part de risque ;
•
l’accompagnement du positionnement des produits sur des marchés export de
niches haut de gamme.
3.2 La filière Énergies renouvelables et maîtrise de l’énergie
La filière énergies renouvelables et maîtrise de la demande énergétique (ENR/MDE) a
été étudiée dans trois DOM : Guadeloupe, Martinique, la Réunion. Les problématiques
sont très voisines dans ces territoires : il s’agit de réduire la dépendance énergétique,
en particulier concernant les énergies fossiles, et de préserver au maximum un
environnement fragile. A ce double titre, les petits territoires et économies insulaires
fournissent un remarquable terrain d’expérimentation.
3.2.1 Périmètre de la filière
3.2.1.1 Définition de la filière
« Les énergies renouvelables (ENR) constituent une des clés de la transition
énergétique, en apportant une des réponses au défi climatique et de la sécurité
d’approvisionnement. Elles entraînent une transformation du système énergétique qui
peut se décentraliser en permettant à chaque citoyen, à chaque entreprise et à chaque
territoire de devenir un acteur de la production d’énergie sans CO2 »49.
Il existe une grande diversité d’ENR : productible hydraulique, pompages inclus ;
éolien ; énergies marines ; solaire photovoltaïque ; solaire thermique ; géothermie
profonde ; pompes à chaleur ; biomasse à partir de divers matériaux, déchets et
résidus (bois-énergie, bagasse, déchets urbains, etc.) ; biocarburants (taux
d’incorporation en pouvoir calorifique).
On s’est intéressé dans l’analyse aux différents sous-segments qui pouvaient être
développés dans chaque DOM. En outre, à la Réunion, on a pris en compte, dans le
champ de l’efficacité énergétique, le secteur des smart grids et du véhicule électrique,
qui font appel à des compétences relevant du solaire.
Dans la littérature50, la filière ENR recouvre les métiers suivants :
49 Grenelle de l’environnement Comité de filière (2009) : Énergies Renouvelables - rapport du comité de
filière énergies renouvelables, Comité national de pilotage du plan de mobilisation des territoires et des
filières sur le développement des métiers de la croissance verte 2009 Rapport à Valérie Létard, Secrétaire
d’État auprès du Ministre d’État, Ministre de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la
Mer, en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat.
50 Notamment le Rapport du comité de filière énergies renouvelables (2009) du Grenelle de
l’environnement.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
40
•
les fabricants de matériaux et d’infrastructure pour la production d’ENR (ex :
fabriquant de panneaux solaires, fabriquant de turbines pour les éoliennes,
etc.) ;
•
les installateurs et assembleurs (ex : entreprises d’installation de panneaux
photovoltaïques) ; les entreprises de maintenance de ces équipements,
notamment dans les bâtiments ;
•
les producteurs et fournisseurs d’énergie à partir de sources renouvelables
(EDF, Suez GDF, etc.) ;
•
les bureaux d’études et entreprises d’ingénierie (par exemple sur la conception
de nouveaux systèmes, tels les bureaux d’études thermiques pour du
diagnostic) ;
•
le conseil technique et les services non marchands, exercés notamment au sein
des collectivités locales par exemple dans le cadre de l’élaboration d’un plan
climat-énergie territorial ;
•
les métiers en lien avec l’aide au financement des énergies renouvelables ; en
effet un plan financier est souvent complexe à bâtir en la matière, en tenant
compte, par exemple pour des panneaux PV, des tarifs d’achat, du
renouvellement et de la maintenance des panneaux sur une longue durée qui
nécessitent des techniques d’actualisation.
3.2.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire
(ou qui pourraient l’être)
Trois secteurs apparaissent particulièrement impactés par le développement de la
filière ENR/MDE :
•
Le secteur du BTP dans son ensemble, pour tout ce qui concerne
l’approvisionnement et la consommation en énergie des bâtiments, en
particulier la filière « bâti tropical » à la Réunion (mais aussi en
Guadeloupe à travers certains domaines couverts par le pôle Synergîle). On
ajoutera qu’à la Réunion, Les grands projets d’infrastructure d’ENR en cours
de développement sur le territoire (ex : projet SWAC) auront des retombées
sur l’activité du secteur à court et moyen terme si ces projets trouvent leur
financement.
•
Le secteur industriel de la fabrication des appareils producteurs
d’énergie, moins homogène, compte tenu de la diversité de formes d’énergies
et d’équipements.
•
L’agriculture pour la biomasse, issue de la culture de la canne. La canne
combustible porte une perspective prometteuse. En substitution du charbon
dans la centrale bagasse-charbon actuelle de la Guadeloupe, ou à travers de
nouvelles unités industrielles à partir de 2015, elle doit permettre à la
biomasse, associée au biogaz de décharge, au biogaz de méthanisation dans les
exploitations agricoles et à l’incinération d’ordures ménagères, de représenter
360 GWh par an (18 % du mix énergétique). Une centrale mixte bagassecharbon vient aussi d’ouvrir à la Réunion. En Martinique, les distilleries
fonctionnent sur un modèle renouvelable dans la mesure où la bagasse est
largement utilisée comme bioénergie des usines de sucre et de rhum ; par
ailleurs, des projets devraient voir le jour pour utiliser les déchets de ces
productions, afin d’alimenter des centrales de biomasse, sachant toutefois que
la production martiniquaise de biomasse ne pourrait jamais suffire à
alimenter une centrale.
Les liens avec l’agriculture peuvent parfois être plus sophistiqués. Ainsi, à la Réunion,
Austral Energy (Groupe Akuo) a développé un concept de ferme solaire (Agri-Energy)
permettant d’utiliser l’emprise des terrains pour des productions agricoles.
L’entreprise y développe notamment le concept de serre photovoltaïque permettant
d’utiliser une grande partie des terrains pour la production de plantes et légumes.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
41
On indiquera enfin l’utilisation du bois en Guyane pour le développement d’une filière
bois-énergie.
3.2.1.3 Entreprises rencontrées : bref descriptif et évaluation de leur représentativité
1.
Guadeloupe
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT
•
entreprises : AKUO, ARCHISOLAR, AEROWATT,
GENERGIES, SUNZIL, TERANOV, VERGENT.
ALINEA
SOLAR,
2. Martinique
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, ADEME
•
organisations professionnelles : Association Martiniquaise pour la Promotion
de l’Industrie (dont un petit nombre d’adhérents seulement s’inscrit dans le
secteur des ENR ou a une réflexion en matière d’ENR dans le cadre de sa
stratégie industrielle)
•
entreprises : EDF, Solarélectric
3. La Réunion
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, NEXA (Agence régionale de
développement), ADEME, Témergie, ARER (Agence régionale de l’énergie)
•
organisations représentatives de la filière : Association pour le Développement
Industriel de la Réunion ; Syndicat des énergies renouvelables
•
entreprises : EDF ; GDF SUEZ ; Akuo Energy ; Aerowatt ; Vergnet ; Austral
Energy ; Corexsolar ; Réuniwatt ; Solarprod ; Schneider Electric ;
Convergence.
L’ensemble de ces interlocuteurs permet de couvrir une large part des intervenants de
la filière, et plusieurs problématiques propres à chaque branche de la filière. On notera
cependant que certains des interlocuteurs principaux se trouvent en métropole.
3.2.1.4 Quelques données générales sur la place des énergies renouvelables dans les
DOM51
L’ensemble des DOM dispose du statut de zone non-interconnectée (ZNI) au réseau
électrique continental. Ce statut rend compte d’un certain nombre de spécificités liées
à des contraintes structurelles communes : la non interconnexion aux réseaux
européens de transport d'électricité, l’absence de ressources fossiles, une taille ne
permettant pas le développement du nucléaire, etc.
Ces contraintes se traduisent par une dépendance énergétique qui s’est accrue ces
dernières années sous l’effet d’une augmentation de la demande (croissance
démographique et augmentation du niveau de vie), ainsi que par des émissions de
CO2 par habitant encore importantes, alors même que les énergies renouvelables ont
connu ces dernières années un important développement.
Le développement des énergies renouvelables, combiné à des efforts en termes de
maitrise des dépenses énergétiques, permet à ses régions de soutenir leur mutation
vers une économie à faible teneur en carbone, mais également de garantir leur
indépendance énergétique.
Malgré leurs contraintes structurelles, les DOM disposent d’atouts indéniables qui
résident en premier lieu dans leurs gisements en énergies renouvelables à la fois
importants et diversifiés.
51 Voir DéGéOM, Diagnostic stratégique national des régions ultrapériphériques du contrat de partenariat
relatif aux programmes européens 2014-2020, pp.38s.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
42
L’ensemble des DOM bénéficie d’un taux d’ensoleillement qui a permis un
développement important et rapide du solaire photovoltaïque et thermique. A titre
d’exemple, la part de l’énergie solaire photovoltaïque dans le mix-énergétique
guadeloupéen est passée de 0,16% en 2008 à 2% en 2011-12, alors même que la
demande en énergie a augmenté. Ce développement a été appuyé jusqu’en 2011 par
une politique tarifaire nationale de rachat de l’électricité particulièrement attractive.
L’arrêt brutal de ces dispositions (moratoire) menace aujourd’hui le développement de
la filière dans l’ensemble des DOM. Le solaire thermique a également connu un fort
développement, notamment sous l’effet de nouvelles dispositions règlementaires. La
RTA DOM13 (et ses déclinaisons régionales telles que la RT Guadeloupe) et la mise en
place de dispositifs d’aide cofinancés ADEME/Région à destination des particuliers et
des entreprises a ainsi favorisé la diffusion du chauffe-eau solaire (CES) dans les
habitats individuels et collectifs. C’est le cas particulièrement à la Réunion.
Au cours de la période de programmation 2007-2013, le développement de la
biomasse a également constitué un enjeu fort dans l’ensemble des DOM. A titre
d’exemple, la part de la valorisation énergétique de la bagasse dans le mix énergétique
réunionnais est passée de 0,53% en 2008 à 9,8% en 2011.
Comparativement, sur la même période, le développement de l’éolien terrestre (on
shore) dans les DOM a été plus limité pour deux raisons principales : des
disponibilités foncières particulièrement tendues en milieu insulaire et des contraintes
réglementaires importantes (déclarations et autorisations propres aux installations
classées ICPE, servitudes et contraintes radioélectriques, etc.). A titre d’exemple, la
part de l’énergie éolienne dans le mix énergétique martiniquais a même baissé de
0,36% en 2008 à 0,1% en 2011, la demande en énergie ayant augmenté sur la période.
Chaque DOM dispose d’un mix énergétique qui lui est propre, en fonction de ses
atouts et contraintes propres : il n’y a pas de mix énergétique type. Afin de réduire leur
dépendance énergétique, chaque DOM a opté, selon les ressources dont il dispose,
pour une diversification de ses sources d’énergies renouvelables.
La Guyane et à La Réunion disposent d’importantes ressources hydrauliques. Ce
potentiel est déjà bien exploité à travers des ouvrages de grande hydraulique, parfois
couplés à des systèmes de stockage (afin de pallier l'intermittence de certaines ENR).
Les ouvrages de petite hydraulique (au fil de l’eau, etc.) sont toutefois encore
relativement peu développés. La part de l’énergie hydraulique dans le mix énergétique
guyanais atteint 56% en 2011.
La Réunion et la Guadeloupe disposent d’importantes ressources géothermiques. Mais
ce potentiel reste encore pas ou peu exploité. La Guadeloupe accueille la seule centrale
géothermique (haute température) de France ; cette dernière a néanmoins connu
d’importants problèmes de fonctionnement au cours des dernières années. La part de
l’énergie géothermique dans le mix énergétique guadeloupéen représente seulement
3,3% en 2011, pour un potentiel estimé à plus de 20% des besoins énergétiques de l’ile.
A l’exception de la Martinique et de Mayotte, la part des ENR dans le mix énergétique
est déjà importante et supérieure à la moyenne nationale. Néanmoins, et en l’absence
de réelles solutions de stockage, la plupart des DOM ont déjà atteint le seuil de 30%
d’énergies intermittentes sur le réseau (éolien, solaire) au-delà duquel la sécurité de
l’approvisionnement en électricité n’est plus garantie.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
43
Part des énergies renouvelables
dans la production d’électricité52
Taux de dépendance énergétique53
Répartition du mix énergétique54 :
-
France
•
Réunion
•
Mayotte
Martiniqu
e
•
•
Guyane
Guadeloup
e
•
•
RUP
•
•
•
Indicateurs de contexte
Année de
référence
Tableau 2
2010
N/D
30%
56%
7%
5,3%
34%
N/D
2011
N/D
90%
75%
98%
94,7%
88,3%
54,5%
Thermique
2011
N/D
58%
39%
97%
94,7%
22%
N/D
Charbon
2011
N/D
30%
0%
0%
47%
N/D
Bagasse
2011
N/D
3,2%
1,4%
0%
0%
0%
9,8%
N/D
0%
0%
15%
N/D
0%
0%
0%
N/D
0%
0%
0,2%
N/D
0,1%
0%
0,4%
N/D
2,4%
5,3%
5,2%
N/D
0%
0%
0%
N/D
Hydraulique
Géothermique
Biogaz
Éolien
Photovoltaïque
Incinération
2011
2011
2011
2011
2011
2011
N/D
N/D
N/D
N/D
N/D
N/D
0,9%
3,3%
0%
2,7%
2%
0%
56%
0%
0%
0%
3,9%
0%
3.2.2 Les enjeux identifiés
3.2.2.1 Les enjeux en termes d’emploi
A titre de remarque préliminaire, il faut souligner que les données chiffrées sur les
entreprises et les emplois de la filière ENR/MDE sont difficilement accessibles. La
nomenclature INSEE ou Eurostat des activités économiques n’identifie pas les
énergies renouvelables comme secteur ou sous-secteur, de sorte que la classification
des emplois et des formations qui leur sont liés souffrent d’imprécisions.
Par ailleurs, il ne faut pas attendre avec les énergies renouvelables de révolution en
termes de création de nouveaux métiers, si ce n’est le métier de développeur de projet
ou de contrôleur/coordonnateur qualité. Pour le reste, les énergies renouvelables
offriront davantage d’emplois sur des métiers traditionnels avec des nouvelles
compétences, mais pas de nouveaux métiers. Les métiers seront très diversifiés et
exploiteront des ressources qui ne sont absolument pas délocalisables.
1.
Guadeloupe
Au 31 décembre 2007, l’INSEE recensait 1251 emplois pour l’ensemble du secteur de
l’énergie. Néanmoins, on peut spécifier les effectifs d’emplois concerné selon certains
segments d’ENR (données 2008) :
•
Biomasse : 40 personnes sont employées dans l’usine de la Compagnie
thermique du Moule (CTM), et la distillerie de Bologne dispose aussi d’une
unité de biomasse/biogaz (au total environ 60 emplois). Le projet d’usine
bagasse-charbon de Marie-Galante produirait 15 MW avec 60 autres emplois.
•
Géothermie : sur le territoire français, les DOM (hors Guyane) sont les
principaux sites potentiels pour le développement de la géothermie de
moyenne à haute enthalpie grâce à leur volcanisme récent) ; on trouve une
quinzaine d’emplois directs (chez CFG Services exploitant du site de la société
Géothermie Bouillante). La création d’une nouvelle centrale au nord de
Bouillante est en projet et pourrait atteindre une production de 30 MW avec
52Source : DéGéOM (Comité économique, social et environnemental, Les énergies renouvelables en Outre-
mer : laboratoire pour notre avenir, juillet 2011)
53 Source : IEDOM, Rapports régionaux, 2011
54 Source : EDF, Bilan prévisionnel de l’équilibre offre / demande d’électricité, 2012
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
44
une mise en service prévue en 2015 et quelques emplois à la clé. Les emplois
indirects dans les entreprises sous-traitantes (ex.: bureaux d’études soussol/surface, environnement), mais aussi dans les applications indirectes en cas
d’exploitation de l’eau séparée (agriculture, etc.) sont mal connus.
•
Hydroélectricité : quelques dizaines d’emplois (estimation d’après un
entretien au Conseil régional) pour une quinzaine de sites chez les
propriétaires-exploitants suivants : Force Hydraulique Antillaise, EDF
Énergies Nouvelles, EDF.
•
Éolien (une douzaine de sites) : il est envisagé d’installer 50 à 80 éoliennes
supplémentaires sur 5 à 10 nouveaux parcs éoliens) : 19 emplois dans la
société Vergnet Caraïbes (cf. Encadré 6) avec des emplois induits
(rembobinage génératrice, entretien des chariots, manutention/grutage,
transport, intérim) ; 20 emplois directs en Guadeloupe dans la société
Aerowatt.
2. Martinique
Le nombre des emplois du secteur des ENR en Martinique est encore faible et qui plus
est, variable. Si le nombre d’entreprises dans la filière était de 4 en 2004, il était passé
à 22 en 2008, avant de chuter de nouveau à 2 (deux entreprises d’une quinzaine de
salariés) aujourd’hui suite au moratoire de 2010 sur le photovoltaïque.
Selon les objectifs de la politique du Conseil régional de Martinique, extrêmement
volontariste en matière d’énergies renouvelables, l’objectif en termes d’emploi pour le
secteur est de 1 200 à 2 000 à l’horizon 2020.
3. La Réunion
Dans le cadre de la préparation du projet GERRI55, des données chiffrées ont été
avancées qui portent à 3 000 les emplois dans le secteur de l'énergie, avec un potentiel
de création de 15 000 emplois d'ici à 15 ans, et à 200 le nombre d’entreprises, en
majorité des TPE/PME. En 2008, on recense 320 emplois pour la seule filière chauffeeau solaire (pour 27 M€ de chiffres d’affaires annuels)56.
Le nombre d’emplois directement créés dans le cadre de la mise en œuvre du
PRERURE57 a été évalué à 2 500 d’ici 202558, soit 1500 dans le secteur de la MDE et
1 000 dans celui des ENR (dont 65 % pour le solaire thermique).
L’annuaire 2009 du secteur de l’énergie, réalisé par l’agence de développement
économique de La Réunion, permet de se faire une idée de la nature du tissu
entrepreneurial constitutif de la filière ENR/MDE. Cet annuaire distingue 7 secteurs
d’activités59, chaque entreprise pouvant appartenir à plusieurs de ces secteurs. Un
premier constat s’impose : la filière ENR/MDE regroupe un nombre relativement
important d’entreprises, environ 80 selon l’annuaire (dont la totalité ou une partie des
activités concernent l’énergie60).
De par leurs activités, les entreprises de la filière ENR/MDE couvrent pour la plupart
le secteur du solaire, la MDE étant le plus souvent une activité complémentaire. Ce
secteur du solaire regroupe majoritairement des entreprises développant des activités
autour du photovoltaïque et/ou des chauffe-eau solaires (CES). Si l’on considère le
55 Grenelle de l’Environnement à la Réunion : Réussir l’Innovation (ou bien : Green Energy Revolution :
Reunion Island).
Source : PRERURE Réunion – Mise en œuvre et actualisation – 30 mai 2008
57 Plan régional des énergies renouvelables et de l’utilisation rationnelle de l’énergie.
58 Source : PRERURE Réunion – Synthèse – Avril 2003
59 Solaire, éolien, bioénergie, froid, pétrole/charbon, maîtrise d’énergie, autres.
60 En moyenne les activités de ces entreprises concernent à 83 % le secteur de l’énergie, mais ce chiffre cache
de grandes disparités, la plupart des entreprises intervenant à 100 % dans le secteur de l’énergie, quelques
entreprises de l’annuaire intervenant de manière anecdotique dans ce secteur.
56
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
45
chiffre d’affaires, on trouve quelques grosses entreprises, soit des exploitants
(Compagnie thermique de Bois Rouge par exemple), soit des filiales de grands groupes
(Tenesol par exemple). Si le CA moyen est d’environ 3,5M€61, près de la moitié des
entreprises concernées réalise un CA inférieur à 1M€62. Par ailleurs, il s’agit
majoritairement de TPE : 42 % des entreprises de la filière ENR/MDE à La Réunion
ont entre 1 et 5 salariés, et 29 % entre 5 et 15 salariés.
3.2.2.2 Les réponses aux besoins du marché local et la réduction de la dépendance visà-vis de l’extérieur
Le développement des ENR répond prioritairement à des enjeux locaux pour
« approvisionner » le marché local, tout en assurant l’indépendance énergétique des
territoires tout en assurant la transition vers une économie à faible teneur en carbone.
1.
Guadeloupe
La filière ENR en Guadeloupe s’appuie sur la présence de grands groupes ou de leurs
filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez), de quelques filiales de PME nationales
(Sunzil, Akuo Energy/Austral Energy, Aerowatt, ...) et de quelques PME locales.
En 2008 on comptait environ 25 producteurs électriques répartis dans ces différents
types d’ENR :
•
géothermie (Géothermie Bouillante) ;
•
éolien (SCEC, Aérowatt, SIFF, Française des Alizés, Energie Portlands) ;
•
photovoltaïque (Tenesol Caraïbes, Apex BP Solar Caraïbes, Solar Electric, JSA
technology, Énergy Caraïbes, Quatum Caraïbes, Energipole Quantum,
Optimum Energie, Helliade Bellevue, Fian Solar, Akuo Énergy, Solar
Associates, Helios Energie Guadeloupe) ;
•
hydraulique (FHA, EDF EN).
Avec le potentiel énergétique naturel de l’archipel, la production nette d’électricité
issue des énergies vertes a progressé de 30 % entre 2000 et 201263. Le Conseil régional
affiche depuis 2008 des objectifs ambitieux en matière d’ENR avec 50 % d’énergies
renouvelables dans le mix énergétique à l’horizon 2020 ; cet objectif s’appuie sur la
production de 66 MW par les éoliennes, 90 MW par le photovoltaïque, 45 MW par la
géothermie et 27 MW par la biomasse (cf. Figure 1).
Figure 1 Mix électrique 2020 de la Guadeloupe (scénario PRERURE 2008)
Moyenne pour les 62 entreprises (sur 80) ayant indiqué leur CA.
Hors réponses non-disponibles (N/D), soit 23 % des entreprises concernées.
63 Rapport Iedom 2012.
61
62
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
46
Source : Conseil régional http://www.synergile.fr/fichiers/Eolien_210313/Conseil%20Regional%20de%20Guadeloupe%
20%20elements%20contextuels%20et%20strategiques.pdf
En 2013, la part des ENR dans la production d’électricité est de 15 %.
Si l’insularité, combinée à l’étroitesse du marché intérieur, constitue généralement un
frein pour le développement de projets industriels, celle-ci entraîne également un fort
effet incitatif pour développer de nouvelles solutions et techniques de production
d’ENR puis diffuser certaines solutions innovantes sur le marché local et au-delà (voir
infra § 3.2.5.3).
La diversité des conditions naturelles permet d’expérimenter différents modes de
production dans des conditions réelles. En 2011, un avis du CESE64 présente l’Outremer comme un « laboratoire » et une « vitrine » du savoir-faire national en matière
d’énergies renouvelables, invitant à ce qu’une « attention soit portée aux expériences
menées dans ces territoires » et à la mise en place de financements spécifiques.
La liste des partenariats actuels d’EDF en Guadeloupe montre d’ailleurs en quoi le
territoire est un réel lieu de recherche et d’expérimentation :
•
relation avec le pôle de compétitivité Capénergies et Synergîle sur la question
du stockage, de l’insertion ENR, de la prédiction ;
•
participation à des projets européens (ADRESS, Anémos) ;
•
partenariat avec Tenesol et Saft sur l’ENR garanti ;
•
etc.
EDF travaille également à la création d’une STEP marine (station de transfert
d’énergie par pompage) en bord de mer au nord de Grande- Terre, qui remplirait un
bassin situé 50 m à 80 m plus haut, grâce à l’énergie du vent et du soleil. Une réserve
de 50 MW serait ainsi disponible, facilement mobilisable. Autre voie, testée par les
acteurs comme Aerowatt, Sunzil et Vergnet notamment : doter les centrales de
batteries, qui prennent le relais lors des baisses de production. Elles pourraient, en
particulier, permettre de restituer l’électricité solaire en fin de journée.
Les retombées économiques et de production de valeur ajoutée sur le territoire
devraient se situer essentiellement à deux niveaux : en phase de mise en chantier des
infrastructures et réseaux (pour le bâtiment et la construction, ainsi que les bureaux
d’études et d’ingénierie) ; en phase de maintenance.
Le développement technique, la conception et le savoir-faire sur les techniques se
feront en grande partie par les grands porteurs de projet (EDF, GDF Suez et leurs
filiales). Des retombées peuvent également être envisagées dans le BTP ou les
transports collectifs.
Encadré 5
Aerowatt, producteur d’électricité indépendant
Aerowatt est une entreprise dont le métier est la production et la vente de l’électricité
verte à partir de l’éolien et du solaire. La société est présente à toutes les étapes de la
vie d'une centrale : recherche de sites et démarches administratives, études du
gisement éolien et solaire, études techniques, recherche de financements,
construction, exploitation et vente d'électricité. Implanté à proximité d'Orléans, le
groupe rassemble une équipe de 48 collaborateurs, dont 22 dédiés au développement
des projets.
Créée en 1966, l’entreprise est implantée de longue date dans les Outre-mer français
avec une capacité totale en exploitation au 1er janvier 2013 dans la Caraïbe de 16 MW
64 Comité économique, social et environnemental, Les énergies renouvelables en Outre-mer : laboratoire
pour notre avenir, juillet 2011
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
47
dans l’éolien et 7 MWc dans le solaire, sur une capacité totale de 121 MW dans l’éolien
(28 centrales et 21 MWc dans le solaire photovoltaïque). L’entreprise est présente en
France hexagonale, à La Réunion, Saint-Pierre et Miquelon et en Nouvelle-Calédonie.
Les premières installations ont été mises en place en 1992 sur la base d’une volonté
régionale forte et du développement d’un savoir-faire spécifique à l’entreprise, la
connaissance du vent (avec sa filiale Winergy). Trois générations d’éoliennes
construites par Vergnet SA ont été mises en place suivant une logique adaptée au
contexte insulaire et avec une mise en sécurité cyclonique.
Aerowatt a réalisé en 2011 un chiffre d’affaires de 27,5 M€, dont 20,6 M€ provenant
de la vente d’énergie verte et environ 5 % concerne l’export.
Depuis 2003, l’entreprise est qualifiée « entreprise innovante » par OSEO. Le 4 avril
2013, JMB Energie (ex-concurrent d’Aerowatt) a franchi en hausse, par suite
d’acquisitions réalisées sur le marché dans le cadre de son offre publique d’achat
simplifiée visant les titres de la société Aerowatt, le seuil statutaire et légal de 95% du
capital et des droits de vote d’Aerowatt. L’entreprise était valorisée 35,4 M€ avant
l’opération.
En 2009, Aerowatt Energies a été créée par Aerowatt (actionnaire à 65 % et opérateur
industriel) et la Caisse des Dépôts (35 %). Cette co-entreprise a vocation à détenir les
droits de propriété et d’exploitation de plusieurs parcs éoliens et solaires. En 2010, la
Caisse des Dépôts a annoncé la poursuite de sa stratégie de soutien aux projets
d’investissement dans les énergies renouvelables dans le cadre de son plan stratégique
et des objectifs fixés par les pouvoirs publics en apportant 3 M€ en fonds propres de la
Caisse des Dépôts dans Aerowatt Energies pour la réalisation et l'exploitation de 4
parcs éoliens et solaires supplémentaires. Avec cette deuxième phase d’investissement,
le portefeuille total de projets détenus par Aerowatt Energies atteint 10 centrales d’une
puissance totale de plus de 31 MW pour un apport cumulé en fonds propres de la
Caisse des Dépôts de 5,7 M€.
Le principal risque est lié à l’évolution de la règlementation, soit le changement du
prix de rachat de l’électricité.
2. Martinique
Compte-tenu de la part encore très importante des centrales thermiques au fuel et de
la faible part des ENR dans le mix énergétique martiniquais, un effort important doit
déjà être fait pour tenir les objectifs du Schéma Régional Climat Air Énergie
Martinique (50% d’ENR dans le mix énergétique à l’horizon 2020), voire du Grenelle
de l’environnement (23% d’ENR dans le mix énergétique en 2020) et de la Stratégie
Europe 2020 (20% d’ENR dans le mix énergétique en 2020).
En 2012, 1 590GWh ont été livrés sur le réseau contre 1 576GWh en 2011, soit une
croissance de 0,9% : sur cette production totale, seuls 6,3% du mix énergétique de
Martinique provient des énergies renouvelables (15,7% de la puissance installée),
contre 93,7 % (84,3 % de la puissance installée65) pour l’énergie d’origine thermique.
Il faut souligner toutefois les progrès importants intervenus au cours des derniers
mois : les ENR ont progressé de 2,7% dans le mix énergétique entre 2011 et 2012.
Cette hausse est le produit des investissements réalisés en 2010 et 2011, avant le
moratoire national sur le rachat de l’énergie photovoltaïque et la décision locale
d’interdire les fermes photovoltaïques au sol (ce choix a été fait afin de protéger la
surface agricole utile déjà menacée). La production d’énergie renouvelable a augmenté
de 83,5 % de 2011 à 2012, passant de 54,5 GWh à 100 GWh.
65 La part importante des énergies renouvelables intermittentes explique l’écart entre le poids des énergies
renouvelables dans la puissance installée et leur poids dans l’électricité effectivement produite.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
48
A la différence des autres DOM, le mix énergétique de la Martinique est peu diversifié.
En Guadeloupe en effet, le thermique reste la première source mais une part non
négligeable de la production repose sur le mélange bagasse-charbon et sur
l’hydroélectricité, tandis qu’en Guyane et à La Réunion, le thermique n’est plus la
première source d’énergies (hydraulique en Guyane, bagasse-charbon à La Réunion).
S’agissant des énergies renouvelables intermittentes, dont la production est variable et
peut affecter sensiblement l’équilibre offre-demande des systèmes non connectés, la
situation en Martinique est la suivante :
•
Le photovoltaïque (5,1 % de la production d’énergie en Martinique) : le
nombre d’installations a sensiblement progressé en 2012 (970 contre 873 fin
2011), entraînant une hausse significative de la capacité installée (cf. supra).
Ce développement est lié à la mise en place d’incitations fiscales depuis 2006
et à l’instauration d’une obligation d’achat de l’électricité solaire par les
distributeurs. Ces conditions ont toutefois été réduites au fur et à mesure
(baisse du taux de crédit d’impôt pour l’acquisition d’une installation
photovoltaïque dans la résidence principale, amendement à l’obligation
d’achat d’électricité par les distributeurs, baisse du prix de rachat du kWh) et
depuis 2008, le gestionnaire du réseau électrique est autorisé à déconnecter
les producteurs d’énergies intermittentes au-delà d’un seuil de 30 % de la
puissance appelée.
•
L’éolien (0,1 % de la production) : à ce jour, la Martinique ne compte qu’un
seul site éolien (parc de Morne Carrière au Vauclin). Un autre projet (avec
stockage) a été retenu dans le cadre d’un appel d’offre de l’État en 2010.
Le photovoltaïque et l’éolien soulèvent des questions importantes en termes
d’innovation. En effet, le développement des énergies intermittentes est à ce jour
limité car le réseau électrique ne peut absorber plus de 30% d’énergies intermittentes :
des solutions en termes de stockage doivent donc être trouvées pour renforcer la place
des ENR dans le mix énergétique.
Pour ce qui est des énergies renouvelables stables, dont le profil de production peu
fluctuant et prévisible permet de maintenir durablement une production constante,
l’incinération d’ordures ménagères est à ce jour la seule source (1,2% de la
production). Elle provient d’un seul site, l’usine d’incinération des ordures ménagères
exploitée par la Martiniquaise de Valorisation. Sa capacité de traitement devrait
fortement augmenter dans les années à venir.
D’autres projets sont à l’étude ou d’ores et déjà validés et devraient également
permettre d’accroitre la part des ENR (et notamment des ENR stables) dans le mix
énergétique martiniquais : projet de géothermie des mers développé avec le Pôle Mer
Bretagne, projet de biomasse avec la centrale du Galion qui devrait se développer sur
un mix charbon-bagasse (avec de la bagasse importée du Brésil, la bagasse
martiniquaise ne permettant pas d’alimenter une centrale de cette taille). L’enjeu est
grand pour ce dernier site de production car le ratio bagasse/charbon sera un
déterminant important de la part des ENR globales dans le mix martiniquais. Des
projets de petite hydraulique ou de géothermie sont également à l’étude : on estime
notamment que l’énergie géothermique pourrait devenir la première source d’énergie
renouvelable en Martinique d’ici 2020
La production est ainsi encore faible, alors que : les enjeux environnementaux et
économiques sont grands ; les objectifs politiques régionaux, nationaux et européens
sont ambitieux ; le potentiel de développement des ENR est grand en Martinique. La
question de l’autonomie énergétique et du développement des ENR est ainsi un enjeu
majeur du développement de l’ile. Cette idée est d’ailleurs le fondement de la politique
du Conseil régional de Martinique qui voit dans les ENR un enjeu financier important
(pour la collectivité par l’autonomie énergétique et pour les particuliers par la revente
au réseau), doublé d’une opportunité économique (création d’emplois) et d’une
nécessité environnementale.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
49
Cette politique repose sur :
•
l’habilitation législative Énergie dont la Martinique dispose depuis juillet 2011
et qui lui permet de fixer ses propres règles pour la maîtrise de la demande
d’énergie, la réglementation thermique pour la construction des bâtiments et
le développement des ENR ;
•
la création d’une agence martiniquaise de l’énergie (effective depuis mai
2012) ;
•
la création d’une société d’économie mixte sur les ENR (juin 2013).
D’après l’ensemble de nos interlocuteurs, les objectifs sont ambitieux mais
atteignables, dès lors que les moyens sont mis à disposition des acteurs, acteurs
institutionnels, entreprises et consommateurs d’énergie.
3. La Réunion
La Région Réunion affiche depuis bientôt 10 ans des objectifs ambitieux en matière
d’ENR avec 100% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique à l’horizon 2020.
Aujourd’hui, la part des ENR dans la production d’électricité est de 34% (dont une
bonne part issue de l’hydraulique, et dans une moindre mesure de la bagasse et du
photovoltaïque). Un effort particulièrement important a été mené sur l’installation de
chauffe-eau solaires avec près de 121 081 CES individuels installés, ce qui constitue la
deuxième place au niveau européen après Chypre. La région est au 3ème rang
européen en termes de puissance photovoltaïque soit 107.2 Wc/hab., et en termes de
surface de capteurs solaires thermiques installés soit 610m²/1000 hab.
La filière ENR est constituée d’environ 200 entreprises, représentant environ 3000
emplois dans le secteur de l’énergie. Elle s’appuie sur la présence de grands groupes ou
de leurs filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez et Séchilienne Sidec), de quelques
filiales de PME nationales (Sunsil, Akuo Energy/Austral Energy, Giordano,
Aerowatt….) et de quelques PME locales (Corex, Convergence, Réuniwatt…).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
50
Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)
Malgré plusieurs lois plus ou moins récentes favorisant les investissements en Outremer et notamment en matière d’ENR/MDE, on constate – au regard de l’ancienneté
de ces entreprises – que l’effet d’aubaine que l’on pouvait attendre en termes de
créations d’entreprises n’est pas évident. Ainsi, il s’agit d’entreprises « matures » : plus
de la moitié des entreprises de la filière ENR/MDE à La Réunion a été créée avant
200066.
En termes de services offerts par ces entreprises, ceux-ci sont assez divers et
globalement les besoins semblent bien couverts67. On note un nombre important de
66
67
Hors réponses non-disponibles (N/D), soit 13 % des entreprises concernées.
Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
51
bureaux d’études locaux offrant des services allant des études d’opportunité (22) à
l’ingénierie juridique (6) et financière (12) en passant par l’ingénierie technique (35).
Par ailleurs, un nombre important d’entreprises interviennent au niveau de
l’installation (31) et de la maitrise d’œuvre (24). On ne constate pas en la matière de
différences majeures selon les secteurs d’activités – solaire, éolien, bioénergie, MDE
(cf. graphes ci-après).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
52
Source : Annuaire Energie 2009 – AR (agence de développement économique de la Réunion)
On examine ci-après les différents segments de la filière dont le tableau suivant
synthétise les éléments de caractérisation.
•
Segments ENR
•
Éléments de caractérisation de la filière
•
Biomasse
•
120 emplois directs
•
20 M€
•
Acteur majeur : Séchilienne Sidec, GDF Suez
•
Filière relativement mature
•
5 emplois
•
1 seule entreprise, pas de filière
•
Pas de CA (mode projet)
•
Biocarburants
(algues)
•
•
•
•
Énergie
des
mers (SWAC,
ETM, houle…)
Éolien
Photovoltaïque
•
15 emplois industriels directs
•
Pas de CA (mode projet)
•
Acteur majeur : DCNS, une entreprise en constitution SEAWATT
•
Pas de filière à proprement parlé
•
Un impact local fort sur le niveau de dépendance énergétique
•
Des retombées économiques durant la période des chantiers, moindres
ensuite car étant autonomes les systèmes ont besoin simplement
d’opérations de contrôle et maintenance (CA potentiel de 30 à 50 M€).
•
Des verrous technologiques et industriels importants, et une filière à forte
intensité capitalistique (structuration autour de grands acteurs EDF/DCNS).
•
20 emplois
•
3 acteurs majeurs : AEROWATT, VERGNET, EDF Énergies Nouvelles,
ALIZEO
•
Peu de possibilités de développement du marché local, sauf sur le microéolien (habitat individuel, exploitation agricole)
•
VERGNET déjà très largement présent sur l’Océan Indien et l’Afrique (à
partir de sa base métropolitaine)
•
Pas de potentiel de recherche sur le territoire dans le domaine.
•
420 emplois (2011) (mais 900 détruits sur 2010-2011)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
53
•
Smart grids
•
50 M€ de CA
•
Une vingtaine d’entreprises
•
Potentiel d’export faible à court terme sauf sur les approches de production
délocalisées pour l’autoconsommation (ingénierie/service)
•
Une vingtaine d’emplois (CA 2M€ environ)
•
2 acteurs majeurs : EDF, Schneider Electric (PEGASE), quelques start-ups
•
Une filière transversale liée à toutes les filières de l’énergie (solaire, éolien,
énergie des mers…) tant au niveau de la production que du stockage
•
Un potentiel d’intégration au secteur du bâtiment (bâtiment à forte
performance énergétique)
Source : Etude sur la caractérisation des filières de la croissance verte à La Réunion, DEAL, 26
octobre 2012 (Aprim & Associés).

Le solaire :
La situation de la filière solaire/PV à La Réunion a connu une phase critique après la
révision du tarif de rachat de l’électricité solaire par le Gouvernement en 2010-2011.
Le secteur a connu une véritable bulle avec la mise en place de tarifs avantageux de
rachat (40 à 60 ct € du KWh) et une fiscalité incitative pour les particuliers (déduction
de 50% des impôts). La révision de ce cadre incitatif aurait détruit près de 900 emplois
et provoqué la fermeture d’une dizaine d’entreprises.
Cela a donné lieu à l’émergence d’une filière, fragmentée cependant entre de
nombreuses petites entreprises spécialisées dans l’installation de PV pour l’habitat
individuel ou collectif. De réels savoir-faire locaux ont émergé, mais essentiellement
sur l’installation. La filière aval de recyclage du PV reste à ce stade encore peu
développée, la majorité des déchets étant exportée en container.
Les entreprises qui ont survécu à la crise sont aujourd’hui essentiellement
positionnées sur de la maintenance, et tentent de développer davantage de valeur
ajoutée sur des niches au croisement avec d’autres filières, agriculture et bâtiment à
faible impact énergétique notamment. C’est le cas par exemple de projets pour le
développement de matériaux placés en surimposition de toitures pour l’amélioration
du rendement de panneaux PV en milieu tropical (COREX), ou de pompes solaires
pour l’irrigation des terres, et de centrales Agri-Energy (Akuo) permettant la
production d’huiles essentielles, ou dans le domaine des smart grids (Milener, Pegase,
etc.).
Par ailleurs, l’avenir de la filière passe également, selon les acteurs rencontrés, non
plus par l’installation de grandes fermes photovoltaïques dont le business model a été
mis à mal par la révision du tarif de rachat, mais par la mise en place de petites unités
de production couplées à des solutions de stockage chez les particuliers (solution
d’autoconsommation) ou les entreprises (secteur tertiaire). La Région Réunion a mis
en place un dispositif d’aide portant à la fois sur l’installation de PV et la pose de
batteries chez les particuliers pour développer le marché local.
Sur ce produit, les technologies existent (batterie plomb, batterie sodium-souffre…), et
le savoir-faire est présent à La Réunion y compris dans des PME locales : COREX,
Sunsil (ex-Tenesol), Giordano, Dijou, etc.

Les chauffe-eau solaires :
Il y a eu la constitution d’une vraie filière avec une maîtrise de l’emboutissage,
assemblage, installation, maintenance qui représente aujourd’hui près de 600 emplois
(entretien avec les services de la Région) pour une quinzaine d’entreprises.
La raison tient au fait qu’il s’agit de solutions lowtech, facilement maîtrisables par les
PME locales, nécessitant peu de R&D et à faible intensité en capital. Par ailleurs, le
développement du secteur a fait l’objet d’une intervention (subventions) fortement
soutenue par la collectivité régionale, sur une longue période, avec un business model
attractif privilégiant la location-vente aux particuliers plutôt que la vente (bien adapté
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
54
aux revenus réunionnais), et appuyé par la règlementation thermique qui impose
depuis 2012 des CES dans toute construction neuve (RT-DOM), y compris les
habitations collectives.

La biomasse :
La filière biomasse est relativement dynamique, principalement orientée autour de
l’utilisation de la bagasse (déchets agricoles de la canne à sucre) et du mélange de la
bagasse et du charbon (2 centrales thermiques mixtes bagasse-charbon assurant 17%
de l’électricité de l’Ile) avec des compétences locales. Elle représente 120 emplois
directs locaux. Le principal opérateur est la Séchilienne Sidec qui a développé à partir
de l’expérience réunionnaise un savoir-faire distinctif et exporte son modèle aux
Caraïbes et à Maurice.
La filière tente aujourd’hui de se diversifier en utilisant les déchets verts. Avec 140 000
tonnes de déchets verts produits annuellement (entretien ADEME), les perspectives de
développement sont prometteuses. Une partie de ces 140 000 tonnes est aujourd’hui
transformée en compost, mais cette production n’est plus écoulée car trop chargée en
métaux. Une alternative prometteuse semble être la valorisation énergétique de ces
déchets, d’autant que le groupe Séchilienne Sidec travaille activement dans le
domaine, et qu’AKUO Energy (présent à La Réunion via sa filiale Austral Energy) y
développe des savoir-faire68. Par ailleurs, un autre projet de centrale fonctionnant à
base de déchets verts est porté par GDF Suez.
L’ADEME et le Conseil régional appuient différents projets dans le domaine : un projet
porté par Séchilienne Sidec avec Enertime (une entreprise métropolitaine) pour
développer de petites unités de production de biomasse d’1 MGW ; un projet sur la
méthanisation des déchets organiques avec Séchilienne Sidec et le groupe Ho Schung
Environnement (HSE).
Le développement de la filière bute cependant sur le manque d’organisation de la
collecte de tri des déchets verts pour produire la biomasse. Il y a un vrai enjeu à
développer une plateforme de collecte/tri et prétraitement de la biomasse avant sa
valorisation énergétique pour assurer la sécurité de l’approvisionnement.
Il y a aussi un vrai savoir-faire spécifique à développer dans ce domaine avec un
potentiel d’export sur les pays de la bande intertropicale. Par ailleurs, il y a des
possibilités également pour envisager de mettre en place des filières
d’approvisionnement depuis l’extérieur vers la Réunion en produit vert pour alimenter
des centrales de production biomasse.
Des études sont également en cours pour étudier le potentiel d’une filière bois-énergie
dans les Hauts, qui disposent d’un potentiel de 87 000 tonnes de bois énergie, dont
45 000 tonnes facilement accessibles. L’étude en cours vise à évaluer et qualifier la
ressource, identifier les technologies d’exploitation à mettre en place, les coûts de
transport et la rentabilité économique d’une exploitation.
Enfin, un projet se développe autour des biocarburants à partir d’algue (Albius), porté
par l’entreprise BIOALGOSTRAL (5 emplois fin 2012) en partenariat avec Akuo, qui
entend exploiter le process mis au point par l’entreprise allemande IGV sur l’ensemble
de la bande intertropicale. La Réunion servirait de point d’expansion de l’entreprise
pour développer sur place la production d’algues et la fabrication de biocarburant.
Le projet fait l’objet d’un financement dans le cadre des investissements d’avenir avec
un budget total de l’ordre de 60 millions d’euros. Il fait partie de la dizaine de projets
financés au niveau national et européen sur la production de carburants à partir
d’algue. Un des sous-produits de la production d’algues, outre le biocarburant, est
également leur valorisation pour des applications agroalimentaires et cosmétiques.
68 AKUO Energy développe des projets relatifs à la biomasse en Métropole, en Picardie notamment.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
55
L’agence régionale NEXA est entrée au capital de la société à hauteur de 80% afin de
lui apporter les fonds propres nécessaires au développement du projet. Un accord de
partenariat serait en cours de signature avec la Séchilienne Sidec pour
l’approvisionner en biocarburant.
A ce jour, on ne peut parler de filière dans la mesure où il n’y a qu’un seul opérateur, et
pas de feuille de route stratégique sur le sujet de la valorisation des micro-algues. Par
ailleurs le projet dans son état actuel se situe encore relativement en amont de la
chaîne de la valeur, et ne mobilise pour le moment que peu de compétences et savoirfaire locaux.

Les « smart grids » :
Dans le domaine de la gestion intelligente des réseaux électriques (smart grids), il
existe à la Réunion une poignée de PME, souvent de jeunes pousses, actives dans le
domaine de la prévision de la production d’électricité solaire ou de la comptabilité de
l’efficacité énergétique des bâtiments. Par ailleurs, l’opérateur national (producteur et
distributeur à la Réunion) est également actif.
Il existe en effet deux projets d’envergure d’expérimentation et/ou de démonstration
portés par EDF :
•
Le projet MILENER. Il vise à tester les réseaux électriques intelligents en
milieu insulaire pour permettre une meilleure intégration des énergies
intermittentes décentralisées (comme le solaire) aux systèmes électriques et,
plus globalement, assurer une meilleure gestion énergétique. Porté par EDF, il
associe également 6 partenaires industriels (BPL Global, Delta Dore, Edelia,
Saft, Schneider et Tenesol). Le projet est financé au titre des investissements
d’avenir (Appel à manifestations d’intérêt de l’ADEME « Réseaux électriques
intelligents »).
•
Le projet PEGASE « Prévision des énergies renouvelables et garantie active
par le stockage d’énergie » (retenu dans le cadre de l’Appel à manifestations
d’intérêt de l’ADEME « Expérimentations liées aux infrastructures de
recharge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables »).
Le projet PEGASE réunit neuf partenaires (Aerowatt, EDF EN, EDF R&D, EDF SEI,
EP-LMD, Météo France, Sidec, l’Université de la Réunion) avec pour objectif de
développer les méthodes et outils de :
−
prévision court terme (jusqu’à 48 heures) et très court terme (jusqu’à
quelques heures) de gabarits de production de parcs photovoltaïques et
éoliens à partir de moyens de prévisions météorologiques ;
−
gestion de l’information pour être en mesure de gérer l’ensemble des flux
de données en temps réel et rendre ainsi le réseau électrique plus
intelligent ;
−
gestion du stockage d’énergie par batterie NaS (sodium-soufre) pour
corriger les écarts de production avec la prévision photovoltaïque et
éolienne tout en permettant des services à différents horizons temporels
allant du transfert d’énergie (quelques heures) au réglage de fréquence
(quelques secondes).
Cette expérimentation permettra de coupler, pour la première fois en France, une
ferme photovoltaïque et/ou éolienne (de 3 à 10 MW) avec un moyen de stockage par
batterie NaS (1 MW) suivant un plan de production qui intègrera la prévision de
production. Elle permettra aussi de tester une gestion foisonnée de plusieurs centrales
renouvelables en temps réel, avec le stockage d’énergie.
Cependant, le nombre d’acteurs locaux du domaine est relativement limité. Ils ne sont
pas tous bien connectés aux projets d’envergure portés par EDF. Il n’est pas certain
que ces « grands projets » permettent de développer le savoir-faire local.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
56
Par ailleurs, les quelques PME locales, souvent innovantes, du domaine sont
confrontées à la problématique de leur financement des fonds propres. C’est ainsi que
le groupe de Convergence, propriétaire de Teéo, a installé le siège de cette dernière à
Lyon pour commercialiser son logiciel sur le marché métropolitain, en partie faute de
solution de financement de son développement à La Réunion.

Segments de la filière basés sur un savoir-faire développé à l’extérieur avec
des retombées potentiellement importantes pour le territoire : SWAC,
véhicule électrique :
Un autre ensemble de segments des ENR est présent en mode projet à La Réunion
sans toutefois que, derrière ces segments, l’on puisse identifier des entreprises locales
ou des savoir-faire développés localement. Toutefois, ces projets peuvent
potentiellement avoir des retombées économiques pertinentes pour le territoire et
contribuer à développer du savoir-faire à terme.
•
Les projets de SWAC (Sea Water Air Conditioning), production de froid à
partir de l’exploitation du différentiel de température de la mer
Trois projets sont en cours de développement : un projet porté par GDF Suez pour
alimenter en climatisation l’agglomération de la Communauté intercommunale du
Nord (CINOR) : ce projet est aujourd’hui en phase de recherche des financements ; un
projet porté par EDF pour la climatisation d’un hôpital dans le sud de l’Ile sur la
commune de Saint Pierre ; un projet sur la commune du Port pour la mise en place
d’une unité de production de froid sur la zone industrielle contiguë au port.
Le projet porté par GDF Suez est le plus ambitieux par son ampleur (150 M€) ; outre
l’unité de production de froid, il s’accompagne de la construction du réseau de
distribution du froid sur 23 km.
La technologie SWAC est déjà mise en pratique en Polynésie (un hôtel) et à Hawaï, où
elle est déjà bien développée. Le verrou pour le développement de ces projets est donc
moins dans la technologie à mettre en œuvre que dans le business model susceptible
d’assurer la rentabilité économique des projets. Une partie des revenus sera générée
par un tarif d’évitement des consommations électriques (pour la climatisation), qui
reste encore à fixer. Une autre partie de la faisabilité des projets est également
conditionnée par les financements publics mobilisables. Le projet de SWAC de GDF
porte sur environ 87 M€ d’aide demandée (dont 70 M€ sur la partie réseau du projet).
Les retombées économiques et de production de valeur ajoutée sur le territoire
interviendront essentiellement : en phase de mise en chantier des infrastructures et
réseaux (pour le bâtiment et la construction, ainsi que les bureaux d’études et
d’ingénierie) ; il est estimé que 40 à 50% des travaux se feront par recours à des
entreprises locales ; en phase de maintenance.
Le développement technique, la conception et le savoir-faire sur la technique se feront
essentiellement par les porteurs de projet (EDF, GDF Suez et ses filiales…).
Cependant, les promoteurs des projets (en particulier GDF Suez) soulignent que des
retombées potentielles pourront voir le jour au travers de la valorisation des eaux de
mer millénaires (eaux chargées en nutriments) rejetées par la centrale de production
de froid, avec des applications dans le domaine de l’aquaculture, de la cosmétique (une
telle valorisation existe déjà à Hawaï), et du tourisme. Des partenariats sont en
discussion sur la partie valorisation avec l’Université (étude du potentiel de
valorisation).
De manière indirecte, les projets de SWAC peuvent également conforter les expertises
locales en matière de génie climatique des bâtiments. En effet, dans le cadre de ces
projets, le coût du froid produit devrait être facturé à un prix proche de celui de
l’électricité nécessaire pour produire du froid. Dès lors, la mise en place des SWAC
doit s’accompagner de travaux sur l’isolation des bâtiments et les systèmes de gestion
électriques des bâtiments desservis afin de limiter les pertes et d’optimiser la
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
57
consommation des futurs clients. Il y a donc potentiellement des retombées sur la
filière du « bâti tropical ».
•
La « mobilité verte »
La Région ambitionne également de développer la mobilité verte à la fois par une offre
de transport collectif en site propre pour encourager l’utilisation de véhicule collectif
comme alternative à la voiture individuelle, mais également, parce que la voiture
restera un mode privilégié de transport dans les années à venir, via le développement
de la voiture électrique. Le projet VERT (cofinancement ADEME/Région/FEDER) en
partenariat avec Renault vise à répondre à ce dernier défi en testant des flottes de
véhicules électriques sur des bornes de recharge alimentées en électricité produite à
partir de PV (sur le modèle de l’autoconsommation chez les particuliers pour
l’alimentation électrique de l’habitat). Le coût total du projet est de 3,7 M€
(subvention des investissements d’avenir de 860 k€). Outre EDF, le consortium réunit
Sunzil, Schneider Electric, Total, ADAMELEC et le groupe GBH (importateur et
distributeur de Renault pour le déploiement des bornes de recharge dans les
concessions et hypermarchés du groupe).
Le démonstrateur est constitué par :
•
un parc de 18 véhicules électriques de type Kangoo et Fluence de Renault ;
•
des bornes de recharge développées par Schneider Electric ;
•
des générateurs photovoltaïques fournis par Tenesol dont la puissance est
adaptée en fonction, notamment, des besoins du profil « utilisateur » en
puissance de recharge quotidienne ; une batterie « tampon » permet de
garantir la disponibilité de l’énergie pour les recharges et la bonne intégration
au système électrique ;
•
des sites de recharge complémentaire, dans trois stations service Total. Ces
sites donnent aux utilisateurs l’assurance de pouvoir recharger leur véhicule
en secours ;
•
des entreprises expérimentatrices (flottes des véhicules), motivées par un rôle
de précurseur sur le déploiement des véhicules électriques dans l’île.

•
Segments plus hypothétiques : énergie thermique des mers (ETM),
PELAMIS (énergie de la houle), géothermie, éolien
Le projet d’énergie thermique des mers (ETM) porté par DCNS
Le projet d’ETM, à la différence du SWAC, est encore en phase de recherche et
développement technologique. Parmi les verrous technologiques figurent le
développement du sous-système moteur du dispositif ainsi que les techniques de
pompage en eau profonde pour assurer un débit suffisant.
L’enjeu est aujourd’hui pour DCNS de disposer d’un premier démonstrateur pour
attaquer ensuite le marché mondial sur les sites propices.
En termes de retombées économiques pour le territoire, la construction du
démonstrateur ETM peut faire appel aux compétences locales en matière de
chaudronnerie et de charpente marine. Elle est estimée à 1 million d’heures de travail.
La Région Réunion serait en co-maîtrise d’ouvrage avec DCNS sur le projet. Le
scénario d’unité d’ETM est déjà intégré dans le mix énergétique de la Réunion à
l’horizon 2030.
La question du financement et du modèle économique est un verrou important,
d’autant que la Réunion et la Martinique sont en « concurrence » pour accueillir ce
projet. A la Martinique, le coût du projet est estimé à 350 millions d’euros.
Les discussions avec les acteurs font aujourd’hui apparaître de fortes divergences sur
l’opportunité d’un tel projet à La Réunion. Toutefois, une convention de partenariat de
recherche a été signée entre la Région Réunion, DCNS et l’Université, le 22 mars 2012
pour engager un partenariat de recherche sur l’énergie thermique via le prototype à
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
58
terre livré en février 2012 par DCNS à la Région Réunion. La convention vise à
encadre le programme de R&D du prototype à terre, reproduction à échelle réduite du
système de production électrique d’une future centrale ETM. L’Université apporte des
capacités scientifiques pour travailler sur le système énergie.
•
Le projet PELAMIS (énergie de la houle)
Il est porté par EDF en partenariat notamment avec l’entreprise COREX. Le projet a
été accompagné au démarrage par l’ADEME et a fait l’objet d’un dossier de
candidature aux investissements d’avenir, non retenu cependant car trop orienté vers
le développement industriel, sans programme de recherche et développement
technologique. Depuis, le projet a été reconfiguré pour intégrer une composante de
R&D sur une technologie de stockage associé au PELAMIS. Cependant, le financement
du pilote n’est pas encore bouclé (20 M€ d’investissement), faute de tarif de rachat de
l’électricité suffisamment attractif pour assurer la rentabilité des investissements.
•
La géothermie
La Réunion devrait disposer logiquement d’un potentiel de géothermie important du à
la présence du volcan. Cependant, l’évaluation du potentiel bute aujourd’hui sur
l’inscription du volcan et du parc au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO,
et l’engagement pris d’interdire la géothermie dans le cœur du parc. Des discussions
sont en cours pour relancer des études exploratoires.
Il n’y a pas de filière sur le domaine.
•
L’éolien
L’éolien est une filière de niche. Les sites porteurs sont déjà exploités, avec deux
fermes éoliennes (18 MGW), et la présence de 3 acteurs, filiales de groupes
métropolitains : Aerowatt (conception et installation), Vergnet (équipement et
maintenance), EDF Énergies Nouvelles.
Les possibilités de développement du marché local sont donc limitées (contraintes
géographiques fortes).
A l’export, Vergnet est déjà fortement présente, depuis son siège en Métropole, elle
possède une position de leader de la fourniture de fermes éoliennes clé en main dans
l’Océan Indien avec une technologie d’éoliennes repliables (risque cyclonique). Elle
dispose de 700 éoliennes en Afrique et dans l’Océan Indien.
3.2.2.3 Exporter
Le potentiel d’exportation concerne porte essentiellement sur du savoir-faire et de
l’ingénierie technique, et secondairement sur de l’expertise en matière de définition de
stratégie et de politique publique énergétique.
Les entreprises intervenant dans les DOM et susceptibles de commercialiser savoirfaire et ingénierie sont souvent les mêmes ou appartiennent aux mêmes groupes (voir
ci-dessous l’exemple de Vergnet SA).
Jusqu’à présent, l’exportation d’expertise en matière de stratégie et de politique
publiques reste à l’état de potentialité.
1.
Guadeloupe
Une étude et un projet interrégional peuvent être signalés dans cette perspective :
•
L’étude GEOEXPORT portant sur une identification plus précise des compétences
françaises aptes à être mobilisées pour la réalisation de projets, notamment à
l’export (ADEME/AFPG/SER). Les objectifs sont d’analyser la chaîne de valeur
pour la géothermie, d’identifier les compétences, les forces/faiblesses, les besoins,
d’établir un plan d’action opérationnel avec notamment la création d’un ou de
deux pôles français conduits par des acteurs industriels et/ou financiers de
premier plan, la structuration d’une offre française sous forme de « packages »
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
59
complets couvrant l’ensemble des phases du cycle d’un projet, une déclinaison sur
deux ou trois projets concrets.
•
Le projet INTERREG « Géothermie Dominique » accordant une place importante
à l’intégration environnementale et à l’acceptabilité des projets. Ce projet vise à
préparer les conditions pour la mise en œuvre d’un programme caribéen de
développement de la géothermie et à aider à positionner une offre française sur la
zone. Néanmoins, EDF semble avoir décidé d’abandonner le projet de centrale
géothermique de 130 MW à la Dominique pour des raisons liées « aux contraintes
financières du projet ».
Encadré 6
Vergnet SA et sa filiale en Guadeloupe Vergnet Caraïbes
Vergnet SA avec un CA d’environ 68 M€ en 2011, regroupe environ 300
collaborateurs, avec 9 implantations dans le monde (France, Caraïbes, Pacifique,
Océan Indien, Afrique) pour deux métiers : la conception et la fabrication d’éoliennes
rabattables, avec un CA de 55 M€, essentiellement à l’export ; et la production d’eau en
zones désertiques pour un CA de 13 M€. Le parc installé est d’environ 750 éoliennes.
Vergnet a deux sites de production : l’un à Ormes (Orléans), siège du groupe Vergnet ;
l’autre à Béziers pour la production de pales. Le capital est détenu à hauteur de 15 %
par la famille Vergnet, 27 % par le FSI (entré en 2011), et 40 % en flottant Euronext.
L’offre de Vergnet comprend toute une gamme d’éoliennes rabattables de 200 kW à 1
MW.
•
GEV MP de 275 kW : parc installé de 350 éoliennes pour des centrales de 1 à 10
MW ;
•
GEV MP de 200/275 kW : version non cyclonique pour l’éolien de proximité ;
•
GEV HP de 1 MW pour les centrales de +10 MW.
La « niche » de Vergnet peut se caractériser par :
•
des sites difficiles, avec peu d’infrastructures et peu de moyens logistiques ;
•
des conditions climatiques extrêmes.
Vergnet a remporté un succès commercial important en Éthiopie (120 MW). Les
départements et territoires d’Outre-mer constituaient jusqu’à présent un marché
quasiment exclusivement Vergnet (350 éoliennes), avec des filiales maintenance aux
Antilles (18 personnes), La Réunion (15 personnes) et Nouvelle-Calédonie (24
personnes).
Vergnet a proposé des innovations technologiques dans le cadre de l’appel d’offres
« éolien terrestre dans les DOM et en Corse » : une gamme d’éoliennes
anticycloniques ; une électronique de puissance ; un système de prévision ; un
stockage de l’électricité.
Le résultat de l’appel d’offres n’a pas été à la hauteur de son ambition puisque Vergnet
n’a été retenu que sur trois projets (deux en Guadeloupe et un en Martinique), en
partenariat avec Aerowatt, soit un total de 19 MW alors qu’elle escomptait 45 MW.
Les DOM apparaissent comme des zones privilégiées pour les fabricants d’éoliennes
pour y obtenir leurs premières références industrielles, avant d’exporter leurs
produits. C’est ainsi que Vergnet a installé seulement 20 % de sa production en France
(essentiellement en Guadeloupe et à la Réunion), 17 % dans le Pacifique, 58 % en
Afrique, 2 % dans les Caraïbes hors DOM, 2 % en Europe (hors France).
L’Outre-mer est pour Vergnet une vitrine importante pour son activité, à l’exportation,
et un élément important de crédibilité pour son actionnaire public, le FSI (BpiFrance).
Source : Éolien et photovoltaïque : enjeux énergétiques, industriels et sociétaux, Rapport à
Monsieur le Ministre du Redressement productif et Madame la Ministre de l’Écologie, du
Développement durable et de l’Énergie établi par le CGEIETet le CGEDD, Septembre 2012.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
60
2. Martinique
Le marché des ENR en Martinique est à ce jour, compte-tenu de la maturité de la
filière, un enjeu uniquement pour le marché local : la filière n’est pas encore assez
développée pour envisager une logique d’exportation de technologies ou de services.
Néanmoins, des perspectives existent à plus long terme et pourront être développées
sur la base de la structuration de la filière en Martinique. La politique du Conseil
Régional vise notamment à développer les savoir-faire en Martinique et tirer avantage
de l’avance en termes de technologies et de services liés aux ENR pour exporter
l’expertise martiniquaise dans la zone : le « modèle » d’un schéma de production et de
consommation d’électricité dans un contexte insulaire caribéen (riche en potentiel
photovoltaïque notamment, doté également de possibilités pour la biomasse mais
fragilisé par les contraintes climatiques – cyclones notamment – et géographiques –
séismes) peut être exporté dans les autres territoires de la Caraïbe, qu’ils s’agissent de
petites iles ou de zones isolées comme dans le Nord du Brésil.
Selon nos interlocuteurs, la Martinique a eu une avance technologique sur les autres
pays de la région, avance qu’elle a perdue à mesure que la filière des ENR en
Martinique était fragilisée. La production décentralisée d’énergie photovoltaïque et
l’injection dans le réseau qui se font depuis peu en métropole étaient diffusées en
Martinique dès 2003. Les travaux sur l’autoconsommation des bâtiments, la gestion
des sites isolés ou la question de la revente au réseau sont des points traités de longue
date par les entreprises martiniquaises. Les différentes mesures défavorables au
secteur du photovoltaïque auraient freiné le traitement des questions de stockage des
énergies intermittentes.
3. La Réunion
Les activités des entreprises du secteur de l’énergie, selon les chiffres 2009 de l’Agence
régionale de développement (NEXA), concernent très peu l’export : seulement 12 %
déclarent mener des activités à l’export. Il s’agit évidemment des plus grosses d’entres
elles : Séchilienne Sidec, Tenesol, COREM, Vergnet, COREX, SAGEES, CIFER
(Dijoux), COTEL, Alisea, etc.
L’export concerne essentiellement du savoir-faire et de l’ingénierie technique dans les
domaines suivants :
•
la biomasse bagasse et bagasse-charbon (Séchilienne Sidex) sur la Caraïbe et
Maurice, avec une compétence et un savoir-faire local ; le projet de GDF Suez de
faire un projet pilote de valorisation énergétique des déchets verts confirme le
potentiel à l’export de cette filière ;
•
les chauffe-eau solaires : le potentiel est considéré comme non négligeable ;
Maurice encourage aujourd’hui le développement du CES, qui jusqu’à maintenant
était d’origine chinoise essentiellement et de fiabilité moyenne ; l’Afrique du Sud
fait de même ; les avantages comparatifs que propose La Réunion dans ce
domaine tiennent essentiellement à la qualité de fabrication et à la sécurité des
CES (normes) ; le coût de fabrication n’est toutefois pas compétitif face aux
produits chinois à Maurice et en Afrique du Sud ; cela a conduit une entreprise
comme le groupe Dijou à implanter directement sur place en Afrique du Sud une
unité de fabrication afin de produire aux normes locales et aux prix locaux ;
•
les fermes photovoltaïques adossées à des exploitations agricoles – concept Agri
Energy d’Akuo – dans les Antilles avec des projets de développement sur
l’ensemble des systèmes insulaires de la bande intertropicale ; cependant, cette
exportation de services et d’ingénierie se fait principalement à partir du siège
parisien de la société en valorisant le savoir-faire développé et acquis à La
Réunion.
Le potentiel à l’export est considéré comme élevé, sans toutefois qu’il y ait encore des
projets concrétisés, dans le domaine des biocarburants (Bio Algue Austral) et du
concept d’autoconsommation chez les particuliers et les entreprises dans le domaine
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
61
du solaire (petite solution de production photovoltaïque avec des solutions de
stockage). Les marchés visés sont notamment ceux des systèmes insulaires de la bande
intertropicale ou des zones non (ou mal) interconnectés aux réseaux électriques. Par
ailleurs, le marché est appelé à se développer particulièrement dans les pays
émergents comme la Malaisie ou la Thaïlande (où des entreprises japonaises sont déjà
présentes et proposent des solutions de petite production solaire couplée à du
stockage). Les acteurs considèrent qu’il y a un réel potentiel à l’export, non pas des
produits eux-mêmes, mais de l’ingénierie et du savoir-faire dans les îles de la zone.
Dans le domaine des smart grids, les quelques savoir-faire présents sont en phase de
développement et s’adressent à des marchés plutôt matures avec une priorité donnée à
l’accès au marché métropolitain auprès des grands opérateurs d’électricité.
Dans le domaine du véhicule électrique (VERT), des SWAC, et de l’ETM, le potentiel à
l’export est évidemment important. Toutefois, il s’agit davantage de projets
d’expérimentation/démonstration porté par de grands industriels nationaux, sans
nécessairement le développement d’un savoir-faire local spécifique potentiellement
exportable.
•
concernant le SWAC, le potentiel pour la Réunion se situe davantage au niveau du
savoir-faire en termes de valorisations qui pourront être faites autour des projets
de SWAC ; l’exportation des systèmes de production de SWAC sera en fait assurée
par les industriels porteurs des projets ;
•
concernant le véhicule électrique, les résultats de cette expérimentation ont
vocation à être utilisés sur les territoires ayant des caractéristiques similaires,
notamment les Régions ultrapériphériques (RUP), mais aussi toutes les zones
présentant une combinaison similaire d’attrait pour les véhicules électriques et de
réseau fragile et/ou au mix électrique fortement carboné.
Un autre domaine potentiel d’export concerne l’exportation de l’expertise en matière
de définition de stratégie de politique publique énergétique. Le projet réalisé par
l’ARER sur Mayotte de définition de scénarii de développement des ENR en
alternative aux énergies fossiles pourra être répliqué dans les îles voisines,
particulièrement dans les territoires couverts par la programmation du FED (sur la
future programmation 2014-2020, les enjeux de l’économie décarbonée devraient être
un des piliers de l’intervention du FED) et avec l’avantage de pouvoir privilégier, dans
la construction des mix énergétiques, des solutions développées à La Réunion avec des
compétences et des savoir-faire locaux.
3.2.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs
potentiels
3.2.3.1 La question de la compétitivité prix
L’exportation de matériels semble peu réaliste, du fait des coûts de production, et tant
que des normes aussi rigoureuses que les normes françaises et européennes, ne sont
pas adoptées dans les pays cibles, comme le montre l’exemple du groupe Dijou pour
les chauffe-eau solaires avec la création d’une unité de production en Afrique du Sud.
En revanche, le problème ne se pose pas dans les mêmes termes pour l’exportation de
savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise.
3.2.3.2 Les avantages comparatifs existants
Les avantages comparatifs sont globalement les suivants :
•
Le rôle de la commande publique : si ce rôle est surtout important pour le
marché local, il permet aussi de développer un savoir-faire et une expertise
susceptibles d’être exportés dans les pays de la bande intertropicale, et en
particulier dans les pays insulaires ou les territoires continentaux isolés (ex. : dans
le Nord du Brésil).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
62
•
Le soutien des politiques et dispositifs publics qui abaissent les coûts
d’expérimentation, de développement et d’installation, et parfois aident à
structurer la filière en mettant l’accent sur la R&D et l’innovation, comme avec
Synergîle en Guadeloupe et Témergie à la Réunion.
•
Un contexte insulaire, géographique et climatique propice au
développement de nouvelles techniques et technologies de production d’ENR et de
gestion des réseaux électriques. Les contraintes de l’intermittence sur la gestion du
réseau électrique imposent le développement de solutions de stockage, une
optimisation de la gestion des réseaux, et une diversité dans le mix énergétique au
niveau de la production d’électricité. Par ailleurs les ressources naturelles locales
servent de point d’appui pour diversifier le mix énergétique (exemple de la
biomasse69). Toutefois, il ne faut pas surestimer cet avantage comparatif, dans la
mesure où d’autres territoires ayant des niveaux de développement équivalent ou
supérieur évoluent dans un contexte similaire. On peut notamment citer l’exemple
d’Hawaï.
•
Une présence ancienne de filières économiques sur les énergies
renouvelables et la présence de grands opérateurs industriels
nationaux et internationaux (EDF, GDF et dans une moindre mesure
Vergnet, etc.) qui développent des projets d’expérimentation/démonstration de
nouvelles technologies et procédés industriels. Les savoir-faire développés à
l’occasion de ces expérimentations le sont essentiellement à l’intérieur de ces
entreprises et de leurs filiales, tandis que l’irrigation du tissu économique et la
mobilisation des capacités scientifiques locales demeurent limitées. Toutefois, des
partenariats locaux existent, et ces projets participent de l’image du territoire au
plan national et international pour en faire un territoire d’excellence énergétique.
Par ailleurs, ils offrent des opportunités en termes de valorisation des retombées
des projets, dans le champ de l’agriculture ou du bâtiment par exemple.
•
Une part relativement élevée d’ENR dans la production d’électricité
avec un mix énergétique déjà diversifié à la Réunion et en Guadeloupe, ce
qui sert de démonstrateur des capacités du territoire et de ses entreprises à se
diriger vers l’indépendance énergétique.
•
L’existence de savoir-faire locaux sur des technologies et procédés
industriels (biomasse, chauffe-eau, modèle d’autoconsommation en PV avec
solution de stockage…) qui sont adaptés au milieu tropical et au contexte insulaire,
et avec une intensité technologique facilement maîtrisable et peu chère à
développer pour les pays émergents. A cela s’ajoute la possibilité de jouer sur la
qualité française et européenne dans l’environnement régional, face à la
concurrence de produits chinois ou indiens peu chers mais peu fiables (ex. : CES à
Maurice).
3.2.3.3 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de
nouveaux avantages comparatifs
Le potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants réside à notre avis
dans un renforcement de la capacité d’expertise locale par un approfondissement des
relations entre les groupes nationaux présents sur place, les PME et les équipes de
R&D locales ; même si l’on sait bien que les capacités de recherche se trouvent pour la
plus grande partie en métropole (grands groupes, pôles de compétitivité), il y a une
capacité d’expertise à renforcer au niveau de l’expérimentation et du développement
technologique ; pour ce faire, Synergîle en Guadeloupe et Témergie à la Réunion
offrent de précieux points d’appui.
De nouveaux avantages comparatifs pourraient être créés en assurant :
69 Cf. l’Etat des lieux réalisé par le Conseil régional en 2010 : Valorisation énergétique de la biomasse en
Guadeloupe - État des lieux et perspectives.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
63
•
un effort construit de marketing associant entreprises, recherche et pouvoirs
publics pour promouvoir au niveau international tant le savoir-faire, l’expertise et
l’ingénierie sur les technologies développées en matière d’ENR/MDE que
l’expertise en matière de stratégie et politiques publiques visant à assurer
l’indépendance énergétique de petits territoires insulaires ou de territoires
continentaux isolés ;
•
le développement de capacités de réponse à des appels d’offres dans ce domaine,
qu’il s’agisse d’appels d’offres proprement nationaux, ou bien d’appels d’offres sur
financements internationaux (FED, Banque mondiale, Banque interaméricaine de
développement, Banque africaine de développement, etc.).
3.2.4 Handicaps et points faibles
Les handicaps et faiblesses des ENR varient d’une source d’énergie à l’autre. Pour le
photovoltaïque et l’éolien, le principal handicap est technologique et dépend des
solutions à venir pour le stockage de l’énergie. Pour le photovoltaïque, le grand enjeu
est la réglementation, les mesures incitatives et les dispositifs d’accompagnement : le
cadre de l’énergie photovoltaïque, après avoir été porteur, est devenu tellement strict
ces dernières années que nombre d’entreprises ont fait faillite.
Ces considérations générales mises à part, le principal point faible de la filière à l’heure
actuelle concerne le fait que l’impact sur le territoire en termes de création
d’entreprises, d’emploi et de valeur ajoutée demeure relativement limité et qu’il est
reste de toute façon assez mal connu.
Au-delà de ces constats, on peut relever un certain nombre de handicaps et de points
faibles plus ou moins spécifiques à chaque territoire.
1.
Guadeloupe
La Guadeloupe est actuellement en limite de capacité de production électrique. Et les
délestages ponctuels opérés par EDF rendent nécessaires aux yeux de tous une
augmentation de la puissance disponible.
Cependant, plusieurs freins au développement de la filière, à la fois dans une logique
de réponse à la demande locale et d’expansion géographique, peuvent être identifiés :
•
le développement de la filière ENR repose sur une approche en mode projet dans
plusieurs segments (biomasse, STEP Marine, éolien…) et relève davantage du
domaine du potentiel que de la réalité économique traduite en termes de création
d’entreprises, d’emplois et de création de valeur ajoutée ;
•
la filière ENR est fortement dépendante des évolutions des prix de rachat de
l’électricité par EDF ;
•
dans le solaire et l’éolien, l’essentiel de l’activité est constituée par de la
maintenance ; il n’y a pas de fabrication de matériels sur place ; toutefois des
activités de recherche et développement sont conduites actuellement ;
•
dans l’éolien :
−
la présence de radars limite le développement (Radar de Météo France) ;
malgré les études scientifiques en cours sur l’effet des éoliennes sur les
mesures, les technologies de pales transparentes aux radars permettraient
sans doute une bonne coexistence entre radars et éoliennes ;
−
l'aménagement pose certains problèmes d’aménagement : besoin de
support des panneaux plus solides qu'en métropole pour répondre aux
normes parasismiques et anticycloniques (à l’inverse cela oblige à mettre
en place des solutions innovantes, telles que les éoliennes rabattables dans
le cas de passage d’un cyclone).
2. La Réunion
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
64
Différents freins au développement de la filière, à la fois dans une logique de réponse à
la demande locale et d’expansion géographique, peuvent être identifiés :
•
La filière ENR dans son ensemble reste fragmentée, malgré la présence du cluster
TEMERGIE. Ainsi :
−
Le niveau de coopération et de mutualisation interentreprises et entre les
entreprises et les acteurs de la recherche est insuffisant. Les entreprises
restent peu accompagnées sur la veille marché et technologique, la
participation à des salons en Métropole, la formation, etc.
−
Dans le secteur de la biomasse, qui est un gisement à fort potentiel
identifié par l’ensemble des acteurs rencontrés, le manque de
structuration de la filière de collecte, tri et prétraitement constitue un
verrou pour développer de futurs projets biomasse
Sur de nombreux segments, le développement de la filière se fait aujourd’hui en mode
projet et ressort davantage du domaine du potentiel que de la réalité économique
traduite en termes de création d’entreprises, d’emplois et de création de valeur
ajoutée. C’est notamment le cas des énergies marines (énergie thermique des mers,
énergie de la houle, SWAC…) qui pour la plupart d’entre elles sont encore en phase de
développement technologique, pour laquelle la Réunion peut servir de terrain
d’expérimentation puis de démonstration.
•
La production de valeur ajoutée sur le territoire par la filière dans son ensemble
demeure encore aujourd’hui faible :
−
Dans le solaire et l’éolien, l’essentiel de l’activité est constitué par de la
maintenance. Il n’y a pas de production sur place. Toutefois des activités
de recherche et développement sont conduites actuellement à l’Université
(laboratoires Piment et L2P) et dans quelques PME régionales autour
notamment de la prévision de la production d’énergie solaire (Réuniwatt),
des solutions de stockage individuel adossées à des petits systèmes de
production (Corex, …), et des solutions de gestion des réseaux (smart
grids) (Teéo, …).
−
Dans le domaine des énergies marines, les projets sont à forte intensité
capitalistique nécessitant un portage par de grands acteurs industriels qui
maîtrisent en interne le développement des technologies, sans que cela
profite nécessairement au développement des PME locales du secteur.
3.2.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs
d’accompagnement
Les acteurs, en particulier les entreprises interrogées, font ressortir un certain nombre
de points critiques sur le rôle d’accompagnement joué par les politiques publiques
dans le domaine :
•
Les cadres règlementaires et financiers nationaux ne correspondent pas toujours
aux spécificités des DOM. C’est le cas notamment du tarif de rachat de l’électricité
fixé nationalement sans adaptation aux contraintes insulaires, ou des projets
démonstrateurs dans le cadre des investissements d’avenir, qui ne donnent pas de
manière spécifique une place aux DOM.
−
Il y aurait lieu par exemple de développer une politique régionale
d’expérimentation permettant de tirer l’offre de solutions et de conforter
le développement d’un marché local.
−
Néanmoins, une réglementation spécifique à l’outre-mer, en matière de
thermique, acoustique et aération, la RTAA-DOM, est parue le 17 avril
2009 : pour le thermique, elle impose notamment l’installation de
chauffe-eaux solaires à hauteur de 50 % au moins des besoins.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
65
•
Les projets en cours de développement réclament des efforts financiers
conséquents de la part du secteur public ; or, ces projets sont parfois dans une
logique de concurrence, sans qu’il y ait une très forte visibilité sur les filières
prioritaires à soutenir de la part des acteurs publics.
•
Le financement des fonds propres des entreprises pour soutenir leur projet de
développement et de diversification apparaît en général insuffisant, avec un
secteur bancaire considéré comme ne jouant pas le jeu. Ce point est
particulièrement ressenti par les acteurs lors de la phase de pré-commercialisation
ou pré-industrialisation, comportant une part de risque élevé.
•
On dénote un manque de visibilité sur la stratégie à l’international poursuivie par
les acteurs publics du développement économique : pays cibles, secteurs cibles
accompagnés, animation de l’international en région, etc.
En Guadeloupe, on peut également citer les éléments spécifiques suivants :
•
La loi N°2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outremer, (LODEOM) donne désormais la compétence « Réglementation thermique
dans le bâtiment, économies d’énergie » à la Région Guadeloupe (utilisation de
l’article 73 de la Constitution). Cette innovation unique en France doit permettre
d’adapter plus facilement les normes à la réalité de la Guadeloupe dans un souci
d’exemplarité ; le 27 juillet 2011 a été renouvelée l’habilitation en matière
d'énergie de la Région Guadeloupe, seule collectivité de France à avoir mis en
œuvre la faculté de délibérer dans ce domaine de la loi.
•
La région a adopté en juin 2008, le PRERURE (Plan énergétique régional
pluriannuel de prospection et d’exploitation des énergies renouvelables (ENR) et
d’utilisation rationnelle de l’énergie, qui fixe comme ambition pour 2020 un
objectif d’utilisation de 50 % d’énergies en ENR. Le PRERURE repose sur les trois
orientations fondamentales suivantes :
•
−
le rééquilibrage du soutien financier de la région en faveur de la maîtrise
de l’énergie (MDE), alors que jusqu’à présent les énergies renouvelables
ont bénéficié de la grande majorité des aides régionales (photovoltaïque
notamment) ;
−
la combinaison des outils d’intervention en faveur de l’efficacité
énergétique ;
−
le renforcement des partenariats (Région - ADEME - EDF).
Par ailleurs, les pouvoirs publics, soucieux du développement de l’énergie éolienne
et photovoltaïque, ont mis en place depuis quelques années des dispositifs de
soutien sous forme de tarifs de rachat garantissant l’équilibre économique de la
production, et, plus récemment, d’appels d’offres (cas de l’éolien en mer et du
photovoltaïque de puissance). Cependant des incertitudes pèsent sur les
évolutions des tarifs de rachat.
3.2.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ?
La filière ENR/MDE dans son ensemble est une filière d’avenir pour les DOM dans la
mesure où elle répond à une demande locale pour assurer l’autonomie et la sécurité
énergétique du territoire. Tous les grands projets en cours de développement portés
par les grands industriels visent bien à changer profondément la nature du mix
énergétique actuel, en s’affranchissant de la problématique des sources intermittentes
d’énergie.
Le développement de la filière est un enjeu de court et de moyen terme :
•
à court terme, il ‘agit de développer l’offre régionale, consolider la filière et mettre
les acteurs en position d’atteindre les objectifs fixés en termes de part des ENR
dans le mix énergétique ;
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
66
à plus long terme, il s’agit d’envisager les perspectives d’export de savoir-faire,
d’ingénierie et d’expertise.
•
Le développement de démonstrateurs est un enjeu clé pour disposer d’exemples
concrets à l’international (stratégie d’Aérowatt, Vergnet, etc.).
Pour les énergies intermittentes comme l’éolien, l’ensemble « éolien + stockage +
prévisions » peut très probablement aussi trouver un marché à l’exportation, et
notamment dans les îles. Les futurs projets promus par des développeurs français ne
se feront pas exclusivement avec des fabricants français, mais pourront aussi utiliser
des éoliennes de fabricants étrangers. Il n’en reste pas moins que le développement de
l’éolien dans les DOM favorise incontestablement le maintien et le développement
d’une filière française de l’éolien terrestre en zones cycloniques non interconnectées,
puisque la plupart des projets y sont réalisés aujourd’hui par des sociétés françaises,
avec des fabricants français.
1.
Guadeloupe
Pour aller au-delà de 30 %70 d’ENR dans le mix énergétique, les orientations pour
l’avenir pourraient être les suivantes :
•
développer les ENR stables à puissance garantie – biomasse, géothermie,
hydraulique, énergie des mers – sachant que :
−
la production des ENR dépend de la source d’énergie (géothermie : 8 000
h par an ; hydraulique : de 4 à 8 000 h par an selon les sites ; bagasse : 2 à
4 000 heures par an, dans la saison de coupe de la canne à sucre ; éolien :
2 200 h par an ; Photovoltaïque : 1 500 h par an) ;
−
10MW de géothermie sont équivalents à 36 MW d’éolien et 53MW de
photovoltaïque ;
•
faire participer toutes les ENR aux services systèmes à travers les réglages de
fréquence et de tension ;
•
stocker les ENR intermittentes sachant que les rendements varient d’une solution
à une autre (batteries : rendement de 70 à 80 % ; STEP marine : rendement de 70
à 80 % ; air comprimé : rendement de 50 % ; pile à combustible : rendement de
30 %) ; un moyen de stockage est en effet nécessaire car les énergies renouvelables
en grande quantité engendrent des discontinuités non acceptables sur le réseau ;
•
adapter la charge à travers un asservissement de certains usages à la production et
l’utilisation de compteurs communicants ;
•
poursuivre les travaux de R&D, en partenariat avec les laboratoires et les
producteurs.
2. Martinique
La production est encore faible alors que les enjeux environnementaux et
économiques sont grands, les objectifs politiques régionaux, nationaux et européens
sont ambitieux et que le potentiel de développement des ENR est considérable. Il y a
donc de fortes marges de développement.
70 La limite des 30% est intégrée dans l’arrêté ministériel du 23 avril 2008 relatif aux prescriptions
techniques de conception et de fonctionnement pour le raccordement à un réseau public de distribution
d’électricité : « Toute installation de production visée par les dispositions du I de l’article 19 et mettant en
œuvre de l’énergie fatale à caractère aléatoire telles les fermes éoliennes et les installations
photovoltaïques peut être déconnectée du réseau public de distribution d’électricité à la demande du
gestionnaire de ce réseau lorsque ce dernier constate que la somme des puissances actives injectées par de
telles installations atteint 30 % de la puissance active totale transitant sur le réseau. Les circonstances
dans lesquelles ces déconnections peuvent être demandées sont précisées dans la convention de
raccordement et les modalités selon lesquelles elles sont effectuées le sont dans la convention
d’exploitation. »
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
67
Le soutien public attendu par les entreprises porte notamment sur les mesures
réglementaires relatives aux ENR (arbitrage entre la protection de la SAU et possibilité
d’installer des fermes photovoltaïques par exemple, tarif de rachat de l’électricité avec
des solutions techniques adaptées aux conditions climatiques de Martinique, etc.), les
mesures incitatives pour les particuliers (cf. aide pour l’installation de panneaux
photovoltaïque ou chauffe-eaux solaires) ou la stimulation de la commande publique
(cf. équipement des lycées).
L’habilitation législative, comme en Guadeloupe (voir ci-dessus § 3.2.8) est, de l’avis
de tous, un élément essentiel du développement des ENR car il permettra à la
Martinique de répondre en fonction de considérations et d’enjeux locaux (et non sur la
base d’un cadre national, fort peu adapté aux spécificités martiniquaises : noninterconnexion du réseau, coût de l’électricité mais également potentiel naturel des
ENR à développer).
Encadré 7
Le photovoltaïque en Martinique : cas de l’entreprise Solarélectric
Solarélectric est une entreprise « fabricant et installateur de solutions solaires » créée
en 2002 et qui s’est développée depuis 2003 dans les DOM. Ses métiers sont la
fabrication de panneaux solaires, la conception d’installations « clés en main », la
production de kits résidentiels complets pour les installateurs, la mise en œuvre de
grands projets défiscalisants dans les DOM.
L’entreprise s’est développée dans les DOM à la fois sur la base du potentiel naturel de
ces territoires et sur les contraintes spécifiques des systèmes d’alimentation en
électricité (non-interconnexion au réseau et nécessité de développer des systèmes pour
des petits territoires). Elle a bénéficié également de dispositifs d’aides spécifiques
(défiscalisation).
L’entreprise a ainsi connu au cours des années 2000 un grand essor qui lui a permis
de consolider et développer ses activités, notamment de R&D et de travailler aux
solutions de stockage d’une énergie intermittente comme le solaire.
Différents obstacles sont cependant venus entraver cette marche (fin de la
défiscalisation, baisse du prix de rachat de l’électricité, moratoire sur les installations,
etc.). Si Solarélectric a pu maintenir son activité (notamment grâce à des activités
connexes et à des projets financés via le FEDER ou l’ADEME), la grande majorité des
autres entreprises du secteur, des installateurs avant tout, ont fait faillite. Il reste à ce
jour en Martinique deux entreprises de taille dans le secteur de l’énergie
photovoltaïque (contre 22 en 2008).
Les nouvelles dispositions régionales prévues sur les énergies renouvelables
(habilitation législative, agence martiniquaise de l’énergie, société d’économie mixte,
etc.), ainsi que le travail d’innovation sur les techniques, les produits et les services,
devraient permettre à l’entreprise de retrouver de son niveau d’activité.
3. La Réunion
L’enjeu pour la Réunion est d’assortir les objectifs de sécurité et d’autonomie
énergétique d’une ambition et d’une réalité économique, c'est-à-dire d’être en capacité
de développer des compétences, des savoir-faire et des emplois locaux et de la valeur
ajoutée produite localement, et cela de manière pérenne. Les grands projets (ETM,
SWAC, PEGASE, PELAMIS, …) en cours fourniront des heures de travail pour le
secteur du BTP lors de la réalisation des chantiers, et quelques-unes pour assurer le
contrôle et la maintenance des installations. Sauf à mieux arrimer les PME locales et
les compétences scientifiques locales, le développement de savoir-faire locaux et leur
maintien sur place sont plus hypothétiques. Les secteurs de la biomasse, des chauffeeau solaires (avec l’obligation d’équiper les nouvelles constructions et logements
collectifs) et du petit photovoltaïque à usage individuel sur un modèle
d’autoconsommation sont sans doute à court terme davantage porteurs de savoirfaire, de création d’emplois et de valeur ajoutée sur le territoire.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
68
Dans une optique d’expansion régionale, la filière ENR est également d’avenir mais
sous l’angle exclusivement d’exportation de services et d’ingénierie, et d’expertise.
Pour cela, le développement de démonstrateurs à la Réunion est un enjeu clé pour
disposer d’exemples concrets à l’international. C’est la voie qu’ont emprunté des
sociétés comme Akuo, Vergnet, Séchilienne Sidec qui s’appuient sur les projets
développés dans les îles françaises pour entamer une stratégie d’expansion à
l’international.
•
Segments ENR
•
Export
•
Biomasse
•
Potentiel d’exportation de l’ingénierie liée à la mise en place de centrales
bagasse, bagasse/charbon, et de centrales de valorisation des déchets verts
(projet en cours sur Maurice de la Séchilienne Sidec)
•
Exploration possible de filières d’importation de déchets verts
•
Biocarburants
(algues)
•
Possibilité, à partir du site réunionnais, d’implanter des unités de production
d’algues dans des contextes climatiques similaires
•
Énergie
des
mers (SWAC,
ETM, houle…)
•
Possibilité d’exporter l’ingénierie liée à la valorisation des eaux millénaires
dans
le
cadre
du
projet
SWAC
(aquaculture,
cosmétique,
thermalisme…)….sous réserve de structurer le volet valorisation des
retombées des SWAC à la Réunion
•
L’export des procédés SWAC, PELAMIS, ETM se fera par les grands groupes
industriels directement sans nécessairement de retombées pour la Réunion.
•
Éolien
•
Pas de savoir-faire particulier à La Réunion. VERGNET est déjà largement
présent à l’export
•
Photovoltaïque
•
Potentiel d’export d’ingénierie et de services sur les approches de production
délocalisées pour l’autoconsommation
•
Smart grids
•
Potentiel d’export à moyen terme, une fois les technologies maturées, et
principalement orienté vers les pays matures, la Métropole en particulier.
Encadré 8
Une start up réunionnaise : Réuniwatt
Réuniwatt est une jeune start-up réunionnaise qui développe un système de prévision
de production d’électricité solaire adapté aux zones insulaires non interconnectées,
permettant de gérer les intermittences de la production d’électricité à partir de sources
solaires.
L’entreprise a été lauréate du concours des entreprises innovantes du ministère de la
Recherche. Elle a bénéficié de l’Incubateur régional et accueille actuellement un
doctorant pour une thèse CIFRE. Elle travaille étroitement avec les chercheurs du
laboratoire PIMENT de l’Université.
Elle compte aujourd’hui 6 salariés, contre 2 il y a un an, et un VIE à Maurice
accompagné par le Conseil régional.
Le marché visé est d’abord celui des opérateurs photovoltaïques en milieu insulaire
(par exemple des producteurs comme Akuo Energy, Séchilienne Sidec, etc.). Le
marché local réunionnais et le marché des autres RUP et PTOM sont visés en premier
lieu. Un troisième marché visé est celui des opérateurs électriques et de réseau (RTE,
ERDF…). Un dernier marché est celui des opérateurs de smart grids pour proposer des
solutions intégrées de stockage avec des techniques de prédiction des pointes de
production.
Encadré 9 Le marché émergent de l’analyse des dépenses énergétiques des bâtiments
Teéo (Télégestion Efficacité Énergétique Optimisée)
Teéo a mis au point un logiciel de mesure des dépenses énergétiques d'un bâtiment, et
veut saisir l'opportunité des nouvelles normes pour s'imposer en métropole.
Implantée depuis mars 2011 dans le quartier Lyon Confluence et depuis le début de
l'année à Paris, la société entend se positionner sur le marché émergent de l'analyse
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
69
des dépenses énergétiques des bâtiments. Née à La Réunion en 2008, l'entreprise
appartient au groupe local Convergence (électricité industrielle),
Le logiciel développé se connecte sur les compteurs d'eau et d'électricité ou de gaz
et centralise ces données de consommation, converties en euros. Les mesures sont
accessibles via Internet, en temps réel. Les anomalies sont rapidement détectées :
climatiseurs qui fonctionnent inutilement, fuites d'eau...
La solution est commercialisée sous forme d'abonnement annuel, le produit a déjà
séduit diverses administrations et entreprises industrielles insulaires.
L’entreprise compte aujourd’hui 5 salariés pour un chiffre d'affaires de 750000 euros.
Le marché est porteur avec la nouvelle norme ISO 50001 qui nécessite des mesures de
performance énergétique.
L’entreprise entend à terme rester indépendante des fabricants de matériels
électriques (de type Schneider Electric) pour se positionner comme « tiers de
confiance » en comptabilité énergétique.
3.3 La filière Tourisme / écotourisme
L’analyse de la filière tourisme a été retenue pour la Réunion, tandis que, pour la
Guadeloupe et la Guyane, l’analyse a été plus spécifiquement focalisée sur l’écotourisme. Néanmoins, l’analyse de l’écotourisme renvoie à certaines problématiques
communes à l’ensemble de la filière tourisme, comme le transport aérien ou encore la
concurrence de pays à coûts du travail inférieurs.
Notre approche consiste à considérer le tourisme comme une activité exportatrice de
services.
Contrairement à ce que l’on vient de voir pour la filière ENR/MDE, les contextes sont
très différents suivant les DOM étudiés, Guadeloupe, Guyane et la Réunion.
En Guadeloupe, la filière s’appuie sur une réelle tradition, mais elle a subi des à-coups
considérables dans son développement et elle est confrontée à la concurrence des îles
de la Caraïbe qui sont à même d’offrir des prix plus attractifs (ex. : la République
Dominicaine) ou des prestations haut de gamme. Dans ce contexte, l’éco-tourisme
constitue une niche qui est en train d’être explorée par les acteurs de la filière.
La situation de la Guyane est sensiblement différente, dans la mesure où le tourisme
n’a véritablement démarré que dans les années 1980 et où la filière n’est pas
structurée, dans un environnement régional où le tourisme reste une activité peu
importante (nord du Brésil, Suriname, Guyana71).
Enfin, la filière tourisme à la Réunion est caractérisée par l’importance particulière du
tourisme affinitaire (même si le tourisme affinitaire joue un rôle significatif aussi dans
les deux autres DOM) et du tourisme domestique, ainsi que par la concurrence de
Maurice qui bénéficie de coûts inférieurs et a développé avec succès une stratégie de
positionnement sur le moyen-haut de gamme (les Seychelles étant sur le très haut de
gamme).
3.3.1 Périmètre de la filière
3.3.1.1 Définition de la filière
La chaîne de la valeur de la filière tourisme se compose d’une grande diversité
d’acteurs autour de différentes fonctions et acteurs :
•
Hébergement
•
Restauration
71 La situation est un peu différente pour le Venezuela, notamment avec le site de Canaïma et les tepuys.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
70
•
Transport
•
Agences de voyage et réceptifs
•
Tour opérateurs
•
Locations de voiture
•
Entreprises de loisirs et commerce plus largement
•
Gestionnaires de sites naturels (parcs par exemple)
En règle générale, la quasi-totalité des acteurs est présente sur place à l’exception des
tours opérateurs (basés en métropole essentiellement).
Il est utile de bien cerner ce que l’on entend par écotourisme. Le terme a été fondé
par l'archéologue Hector Caballos-Lascurain en 1983. Même si la définition de la
Société Internationale de l'Écotourisme (The International Ecotourism Society TIES)72 fait référence chez les professionnels, il n'existe pas de charte officielle ou de
marque déposée sur le terme d’« écotourisme », et le terme peut donc être librement
utilisé par tous les acteurs de l'industrie touristique, parfois à mauvais escient.
L'écotourisme est défini par la TIES comme « un voyage responsable dans des zones
naturelles qui conserve le milieu et soutient le bien-être des populations locales »
(TIES, 1990).73 Il rassemble toutes les formes de tourisme axées sur la nature
(observations..) et les cultures traditionnelles qui règnent dans les zones naturelles. Il
comporte une part d’éducation et d’interprétation de l’environnement (faune, flore…).
L’écotourisme repose sur quatre principes :
•
la valorisation de la préservation et de la protection de l’environnement et de la
biodiversité en minimisant les impacts ;
•
la contribution équitable au développement économique local en améliorant les
opportunités d’emploi local ;
•
la prise en compte des besoins des communautés hôtes en recherchant une
meilleure compréhension de la nature, de la société et de la culture locale ;
•
la promotion d’une expression touristique authentique et responsable.
L'écotourisme (ou agritourisme, tourisme vert, tourisme sportif…) est une forme de
tourisme en expansion, qui vise à réduire ou annuler les dégâts écologiques lors du
voyage. C'est un tourisme proche de la nature, axé sur des activités respectueuses de
l'environnement, où le touriste est logé dans des hébergements responsables
(ecolodges, chez l'habitant, gîtes, etc.) et avec une philosophie stricte de préservation
de l'écosystème.74
L’écotourisme se pratique dans la nature, en petits groupes au sein de petites
structures, alors que le tourisme durable est une notion plus large qui veut dire
« développement durable du tourisme », et qui concerne également les hôtels dans les
villes ou les compagnies de transport par exemple.
L’estimation des marchés repose notamment sur la capacité à recenser le nombre de
groupe accueillis par an dans la région, sachant que les groupes d’écotouristes restent
généralement plus du double de temps que d’autres touristes à l’intérieur du territoire,
dépensent plus et sont composés de 2 à 3 personnes en moyenne.
72 La Société Internationale d’Écotourisme est le réseau mondial de l’écotourisme qui regroupe plus de 90
pays et des affiliations avec plus de 40 associations régionales et nationales d’écotourisme.
73 GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT - Comité de filière Tourisme, Rapport du Comité national de
pilotage du plan de mobilisation des territoires et des filières sur le développement des métiers de la
croissance verte, 2009.
74 http://www.ecotourisme.info/
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
71
La filière éco-tourisme s’inscrit complètement dans la stratégie de la Guadeloupe de ne
pas développer le tourisme de masse, notamment face aux différentiels de prix des
territoires voisins (Dominique, Cuba…), mais plutôt de s’orienter vers un accueil haut
de gamme avec des services plus lisibles et à plus fortes valeur ajoutée. Concernant la
Guyane, cette filière apparaît comme la plus à même de développer les activités
touristiques sur le territoire, de par les caractéristiques bien particulières qu’il offre.
3.3.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières
Le tourisme génère d’importants effets directs et indirects sur les autres branches de
l’économie locale (commerce, transport, services,…) en termes de valeur ajoutée et de
créations d’emplois.
Deux grands secteurs apparaissent directement impactés par le développement de
l’écotourisme :
•
l’agriculture, la pêche et l’agroalimentaire : les produits agricoles et issus de l’agrotransformation peuvent fournir, comme on l’a indiqué en traitant de la filière
agroalimentaire, un point d’appui marketing de la destination touristique
(tourisme gastronomique), mais également trouver de nouveaux débouchés
auprès de la clientèle touristique qui génère de nouveaux revenus ;
•
le bâtiment et la construction, et en particulier le bâti tropical durable, peuvent
également être impactés par l’activité touristique, que cela soit en termes de
construction d’infrastructures touristiques, ou bien de positionnement marketing
de l’offre touristique (concept global de tourisme vert ou de tourisme respectueux
de l’environnement).
3.3.1.3 Entreprises rencontrées
1.
Guadeloupe
•
acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional, DIECCTE, DRRT
•
organisations représentatives de la filière : le Parc national, l’association
Guadeloupéenne d'Écotourisme (A.G.E.) et le Comité du Tourisme des îles de
Guadeloupe
•
entreprises : Gîte Mabouya, Caraïb'Bay Hôtel, Anse Caraïbe plongée
2. Guyane
Nous avons mené de manière croisée l’analyse de la filière tourisme et l’évaluation de
la pertinence du positionnement éco-touristique.
L’étude s’est appuyée sur la rencontre de deux niveaux d’acteurs :
•
Des acteurs ayant des activités structurantes de la filière :
−
CTG (Comité du Tourisme de Guyane, en charge de la promotion et du
marketing de la destination Guyane)
−
ATOUT France (Agence Nationale de développement touristique de la
France)
−
Chambre de Commerce et d’Industrie (CCIG : rencontre avec le
responsable du pôle tourisme, chargé de l’appui opérationnel des
entreprises)
−
Le Parc naturel régional (PNRG : établissement public participant à la
valorisation des espaces ruraux, principalement sur la bande littoral)
−
Compagnie des Guides de Guyane (association) : la compagnie des guides
de Guyane a un positionnement structurant fort du secteur en travaillant
notamment sur un large volet professionnalisation ; elle peut constituer
un exemple pour le reste de la filière.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
72
Certains acteurs participant à l’essor de la démarche nature/durable/écotouristique :
•
−
Point Information touristique de Cayenne : le futur Office du Tourisme de
la « ville porte » de la Guyane.
−
AMAZONIE DÉCOUVERTE (ecolodge) : ce lodge durable s’est installé à
Roura ; il envisage le développement d’une offre basée sur la découverte
du fleuve
−
GUYA'RANDO (guide de Guyane) : cette société avait initialement un
positionnement traditionnel (randonnée en forêt) ; elle innove aujourd’hui
en développant des offres culturelles (histoire) dans Cayenne
−
JAL Voyages (agence de voyage) : JAL Voyages est un acteur historique de
l’éco-tourisme Guyanais ; elle propose en effet depuis plus de 25 ans une
offre éco-touristique reconnue nationalement
−
KWATA (association) : Kwata agit sur pour la sensibilisation et l’éducation
du grand public au thème de la biodiversité ; l’association est notamment
connue pour ses activités en lien avec les tortues marines
3. La Réunion :
•
acteurs institutionnels : AFD, SGAR, Conseil Régional, IRT (Ile de la Réunion
Tourisme)
•
Club du tourisme : association des professionnels du tourisme réunionnais
•
entreprises : Bourbon Voyages, Hôtel & Co
3.3.1.4 Données statistiques disponibles
1.
Guadeloupe
Les données chiffrées sur les entreprises de la filière éco-tourisme sont difficilement
accessibles. La nomenclature INSEE ou Eurostat des activités économiques n’identifie
pas l’éco-tourisme comme secteur ou sous-secteur d’activité, de sorte que la
classification des emplois et des formations qui leur sont liés souffrent d’imprécisions.
Les indicateurs habituellement suivis par l’INSEE sont les suivants : taux
d'occupation ; nombre de nuitées ; durée moyenne du séjour ; part des nuitées
étrangères ; nombre d'hôtels ouverts selon le nombre d'étoiles ; nombre mensuel de
chambres offertes. L'enquête « fréquentation hôtelière » est réalisée chaque mois
auprès de l'ensemble des hôtels homologués de la région. Les indicateurs concernent
les hôtels75 hors Iles du Nord.
Les chiffres clés de 2013 de la fréquentation touristique en Guadeloupe en 2011-2012
sont les suivants :
•
417 000 touristes de séjour ont été accueillis en 2011 (soit une hausse de 6,5 % par
rapport à 2010 et des données comparables à celles de 2008) ;
•
5,3 millions de nuitées ont été recensées en 2011 (soit une hausse de 3,6 % par
rapport à 2010, mais ce chiffre est inférieur aux résultats des années 2006 à
2008) ;
•
alors que les nuitées hôtel en 2006 et 2007 représentaient près de la moitié des
nuitées, leur part dans le total des nuitées est en constante diminution au profit de
celles dans les gîtes et locations ; ce résultat est a priori en ligne avec la politique
75 Les hôtels sont classés ou homologués tourisme par arrêté préfectoral après délibération de la
commission départementale d'action touristique. Ils sont classés en six catégories, de 0 à 5 étoiles, en
fonction de leur confort, de leur équipement et de leurs services. Les critères de classement sont stricts et
ont été définis par arrêté du 14 février 1986. Pour être qualifié d'« hôtel de tourisme », un établissement
hôtelier doit comporter au moins 5 chambres.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
73
régionale d’aide à la construction et à la montée en gamme des gites et
meublés76 ;
•
la provenance des touristes sur les marchés France, Allemagne et Suisse ont
respectivement augmenté entre 2011 et 2012 de 4 %, 44 % et 47 %, tandis que le
marché italien s’est effondré de 46 % ; le marché extérieur a progressé au total de
3%;
•
la dépense totale est estimée à 419 millions d’euros en 2011 (contre 238 millions
d’euros en 2006), avec une dépense moyenne de 2058 euros par ménage et par
séjour et de 1000 euros par personne et par séjour ;
•
la durée moyenne des séjours est de 13 jours et 46 % des touristes viennent en
Guadeloupe pour la première fois.
La fréquentation des meublés de tourisme pose des problèmes plus complexes que
celle des hôtels, car ils sont beaucoup plus nombreux et ils sont peu souvent classés et
labélisés. Le Comité du tourisme effectue actuellement un travail dans ce domaine, car
ils constituent le principal vecteur de la progression du tourisme en Guadeloupe.
Globalement, on assiste à une reprise après la crise de 2008-2009, également portée
par les troubles induits par les « révolutions arabes », mais avec une tendance
marquée en faveur des gîtes et locations.
A défaut de données spécifiques à l’écotourisme pour les raisons indiquées plus haut,
l’analyse de l'annuaire http://ecotourisme.lespages.fr, qui est un service de
Voyageons-autrement.com et des sites http://www.guadeloupe-ecotourisme.fr et
http://www.ecotourisme-guadeloupe.org, permet d’identifier une quarantaine de
structures présentes sur le territoire dans l’écotourisme.
Les structures de la filière écotourisme concernent l’hébergement, les activités
culturelles et sportives. Elles sont géographiquement réparties de la manière suivante :
•
Anse Bertrand : trois structures (Le Domaine de Belle Plaine, Le Tapeur, Les
Attelages du Comté) ;
•
Bouillante : six structures (Ecobalades Guadeloupe, Cases Créoles de Gwo Caillou,
Habitation Massieux, Rêve et Alizé, Canopée) ;
•
Baie Mahaut : une structure (Jacky Action Sport) ;
•
Capesterre Belle Eau : une structure (Le Jardin de Cantamerle) ;
•
Deshaies : deux structures (Caraïb'Bay Hôtel77, Les bungalows Arsenault) ;
•
Goyave : une structure (Le jardin d'eau) ;
•
Petit Bourg : une structure (Palmaretum) ;
•
Pointe à Pitre : une structure (Nature Expérience) ;
•
Pointe Noire : 10 structures (Le Parc aux Orchidées, Le Parc des Mamelles, Anse
Caraïbe plongée, Gite Beaugendre, KAZ Créole, Rocher Caraïbe, Parc aquacole,
Rêve de sable, Anse Caraïbe plongée78, Nautica plongée) ;
•
Port Louis : une structure (Eden Plongée) ;
•
Saint Claude : deux structures (Vert Intense, Zion Trek) ;
•
Sainte Rose : quatre structures (La Créolina, Nico Excursion, Alavama, Habitation
Matouba) ;
76 Parallèlement l’hôtellerie est à un croisement : bien que des efforts de qualité aient été accomplis, il
devient nécessaire et impératif qu’elle se renforce en quantité et en qualité.
77 Encadré .
78 Cf. Encadré .
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
74
•
Saint François : une structure (Esprit caraïbe) ;
•
Trois Rivières : deux structures (Gites "an-TIKAZ-la", Le parc archéologique des
roches gravées) ;
•
Vieux habitants : quatre structures (Domaine de Vanibel, Bungalows Les
Cocotiers, Objectif plongée, La Grivelière) ;
•
Terre de Bas les saintes : une structure (Rêve de Robinson).
2. Guyane
Le tourisme guyanais a fait ses débuts quantifiables dans les années 1980. C’est
aujourd’hui une filière établie qui accueille annuellement environ 110 000 visiteurs
(chiffre 2009), représente la 2ème source de richesse du territoire (9% du PIB) 79 et
contribue à hauteur de 26% à l’effort d’exportation80. Les estimations de l’effet sur
l’emploi de cette filière établissent une participation à hauteur de 6 000 postes qui se
répartissent dans divers secteurs et des structures de tailles très variables, dont une
majorité de micro-entreprises et de TPE. Il est à noter que la filière touristique
guyanaise n’a pas de structure, et qu’un nombre non négligeable81 d’acteurs travaille
dans l’économie parallèle.
Selon les données disponibles auprès de la CCIG, la fréquentation de la Guyane est en
croissance constante depuis 2005. Même si le flux touristique a connu une légère
contraction conjoncturelle en 2009 avec 110 000 visiteurs, cette contraction est
survenue après un pic historique de plus de 140 000 visiteurs en 2007. Les chiffres
pour 2011 ne sont pas connus, mais tout laisse penser que le tourisme récepteur
dispose encore d’un potentiel de valorisation sur les segments des touristes
affinitaires, d’agrément et les croisiéristes82. En complément de ce tourisme entrant, le
marché local (agrément et affaires) est également important, car il représente environ
20 % de l’activité de la filière. Avec une croissance démographique annuelle de 4%, la
valeur absolue de ce flux d’activité devrait croître quasi-mécaniquement.
Tout comme en Guadeloupe, et pour les mêmes raisons, on ne dispose pas de données
spécifiques à la filière écotourisme.
3. La Réunion
Sur une longue période, les chiffres de la fréquentation touristique à La Réunion
marquent une progression en dents de scie avec une stagnation entre 2000 et 2005,
un pic de baisse en 2006 et un pic de hausse en 2011. En 2011, La Réunion accueillait
471 268 touristes extérieurs, nouveau record de la destination. La croissance dans les
activités touristiques a contribué à la reprise de l’activité économique en 2011 avec un
montant global de la dépense évalué à 388,7 M€, sur l’ensemble de l’année. Cela
venait après 3 années difficiles, consécutives à la crise sanitaire du chikungunya.
En 2012, suite à la crise économique, la fréquentation est en diminution pour s’établir
aux alentours de 446 500 touristes83. Cette dynamique heurtée marque la forte
dépendance du tourisme réunionnais vis-à-vis de la métropole.
Sur la même année 2012, le tourisme au plan mondial a connu une progression de 4%.
A Maurice, une destination touristique en concurrence avec la Réunion (dans une
certaine mesure au moins), la situation est restée stable (+0,1%), la diminution forte
des touristes français de métropole (-13%) ayant été compensée par l’accroissement de
79 Selon le travail de retraitement de données réalisé par ATOUT France en Guyane
80 Le tourisme orienté vers la Métropole et le Antilles est considéré comme une activité d’exportation.
81 Mais non quantifiable.
82 En favorisant la famille et de manière plus modérée les groupes.
83 Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013 (INSEE/Observatoire du Tourisme de
La Réunion).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
75
touristes réunionnais et la clientèle des pays émergents (+59% de Russie, +38% de
Chine).
Source : Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013
Le tourisme à la Réunion est principalement affinitaire (visite famille, amis) depuis
2004. Le tourisme d’agrément représente environ 40% des flux (contre 65% en
Guadeloupe), et il marque le pas en 2012. Le tourisme d’affaires représente environ
10% en moyenne.
Source : Le Tourisme à La Réunion en 2012, Insee Partenaires, avril 2013
Le mode d’hébergement principal, par suite de la diminution tendancielle du tourisme
d’agrément, est aujourd’hui la famille et les amis loin devant les hôtels.
Le secteur de l’hôtellerie et de l’hébergement a été durement affecté par la crise du
chikungunya, celle-ci ayant fait reculer la fréquentation des hôtels de 40%, entraînant
des fermetures temporaires ou définitives d’établissement, et la reconversion d’hôtels
en résidences hôtelières. La conséquence en est qu’aujourd’hui l’hôtellerie classée
compte 4500 lits contre 5900 lits en 2006, 50 hôtels contre une soixantaine avant la
crise. Cela dit, la faible capacité hôtelière de la Réunion était déjà une réalité avant
2006. A titre de comparaison, la Réunion compte deux fois de moins de lits que la
région Limousin, et se positionne au dernier rang des régions françaises en termes de
densité hôtelière (0,5 lits pour 100 habitants).
Dans le même temps, l’offre non homologuée (gites, chambres d’hôtes, meublés de
tourisme, villages-vacances, etc.) a connu une croissance forte, et propose 9000 lits, le
double des hôtels classés. Elle génère en revanche très peu d’emplois (380 en 2011).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
76
Source : IRT, Fréquentation touristique 2011 à La Réunion
3.3.2 Les enjeux identifiés
3.3.2.1 Les enjeux en termes d’emploi et de qualification des ressources humaines
1.
Guadeloupe :
Le diagnostic territorial stratégique de Guadeloupe (2012) rappelle que « malgré une
amélioration de sa situation économique avec une croissance de son PIB au cours de
ces dernières décennies, l’archipel guadeloupéen connaît toujours un sous-emploi et
son corollaire le chômage. Aussi, pour le prochain programme, l’accent doit être mis
sur le développement économique local en renforçant la qualification et en soutenant
d’avantage les secteurs porteurs d’emploi, tels que les métiers de la mer, le tourisme,
l’artisanat ou la croissance verte ».
L’emploi salarié lié au tourisme est estimé à 5,4 % de l’effectif salarié total (contre 4,9
% pour la Martinique), dont un tiers dans l’hébergement (la restauration étant le
deuxième secteur d’activité concerné par le tourisme).
En 2009, 5 000 entreprises avaient une activité liée au tourisme, sachant que quatre
entreprises sur dix sont des restaurants et cafés, et qu’une entreprise sur quatre exerce
son activité dans le secteur du transport. Le ratio entre la quarantaine d’entreprises
précédemment identifiées et les 5000 entreprises recensées dans le secteur du
tourisme montre bien dans quelle mesure l’écotourisme est en Guadeloupe une filière
de niche.
Le secteur de l’hébergement et de la restauration, qui représente 7,9 % du tissu
d’entreprises guadeloupéen au 1er janvier 2012, est le principal employeur touristique
de la région (7 067 salariés, soit 9,0 % du total). En 2012, 8,9 % des nouvelles
entreprises créées en Guadeloupe l’ont été dans ce secteur (444 créations).
Les données sur le tourisme laissent apparaitre une progression de la richesse
produite du territoire en lien avec la diversification vers l’écotourisme, même si
l’appareil statistique dans ce domaine n’est pas développé et ne permet pas d’identifier
clairement le nombre d’emplois dans la filière « écotourisme ».
2. Guyane :
L’écotourisme recèle probablement un potentiel de création d’emplois significatif.
Selon les estimations d’ATOUT France, un doublement de l’activité de la filière
s’accompagnerait de la création de près de 9 000 nouveaux emplois. Ces derniers se
répartiraient sur l'ensemble de la filière, notamment dans les métiers conventionnels
tels que les transports, l’hôtellerie, les loisirs et la restauration. Ces emplois
nécessiteraient des niveaux de qualification variables mais généralement plutôt
faibles, du CAP au Bac+2.
Dans le contexte démographique guyanais actuel, où le taux de croissance annuel de la
population de 4% est associé à un fort taux de chômage (21%), l’opportunité de créer
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
77
autant d’emplois rapidement accessibles (formations courtes) ne doit pas être
négligée. Il est alors important pour la région de s’investir dans le développement de
cette filière.
3. La Réunion :
L’activité touristique à La Réunion constitue depuis les années 70 un axe de
diversification de l’économie régionale. Elle est considérée par l’ensemble des acteurs
comme porteuse de développement économique (voir par exemple le Diagnostic
Stratégique Territorial 2014-2020 de La Réunion). Elle figure comme une priorité
régionale 2010-2014 de la collectivité régionale. Celle-ci a mis en place ainsi une
nouvelle politique touristique portant notamment sur la structuration de l’offre
touristique, le repositionnement de la « marque » Réunion, qui bénéficie du
classement récent des « Pitons, Cirques et Remparts » au patrimoine mondial de
l’humanité par l’UNESCO, et le renforcement de la coopération régionale autour de la
marque « Iles Vanille ». L’objectif affiché est d’accueillir 600 000 touristes à l’horizon
2015.
Ce chiffre est sans doute beaucoup trop ambitieux au regard de la dynamique actuelle
du secteur et des capacités d’accueil de l’île.
Les activités liées au tourisme emploient 6 750 salariés au 1er janvier 2011, soit 3,2%
de l’emploi total, ce qui est relativement faible comparativement aux autres régions
françaises, et notamment aux Antilles (5,4% en Guadeloupe, 4,9% à la Martinique). La
Réunion se classe parmi les dernières régions françaises juste devant le Nord-Pas-deCalais, la Picardie ou la Haute-Normandie.
Cependant, le nombre d’emplois en 2011 a retrouvé son niveau d’avant la crise du
chikungunya en 2006 (+ 500 emplois).
Source : Emplois Touristiques 2011, CEROM-AFD-IEDOM-INSEE, Décembre 2012
Le secteur de l’hôtellerie et de l’hébergement est le premier secteur d’emploi
représentant 27% de l’emploi touristique, en forte diminution sur la période 20062011 (-15%). L’emploi est principalement porté par l’hôtellerie classée (80% des
emplois) qui représente une cinquantaine d’hôtels, dont très peu d’hôtels 4*
(généralement les plus pourvoyeurs d’emplois, et les plus attractifs).
Viennent ensuite les secteurs des loisirs (23%) et de la restauration (21%). Le secteur
des loisirs a connu une très forte croissance sur la même période 2006-2011 (+20%) à
l’instar du secteur des transports aériens et services aéroportuaires (+21%) et des
transports intérieurs et locations de voiture (+46%).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
78
3.3.2.2 Le marché local
La question du marché local de la filière « écotourisme » renvoie à celle de l’utilisation
par les guadeloupéens de l’offre de services locale. Il n’existe pas d’études sur cette
question à notre connaissance pour ce qui est de la Guadeloupe.
On doit néanmoins préciser qu’en termes de qualification des produits touristiques, le
CTIG a récemment travaillé sur une déclinaison de l’offre touristique d’activités :
balnéaire, culture, vert, et gastronomique. L’objectif était de valoriser une offre
d’activités non homogène en interne pour les guadeloupéens et en externe pour les
touristes. Le Conseil régional effectue également un travail avec l’Union des
professionnels de l’animation touristique en vue de structurer et fédérer les acteurs
autour de produits bleus, produits verts, produits gastronomiques, etc.
En Guyane, comme on l’a indiqué précédemment, le marché local est loin d’être
négligeable, car il représente environ 20 % de l’activité de la filière, et, avec une
croissance démographique annuelle de 4%, il semble naturellement appelé à croître en
valeur absolue.
A la Réunion, l’activité touristique s’adresse en partie aux résidents. Il n’existe
cependant pas d’études récentes sur cette question à notre connaissance.
Le compte satellite du tourisme pour 2005 réalisé par le CEROM indiquait (avant la
crise de 2006) que sur les 806 millions d’euros de dépenses des touristes
comptabilisés, près de 57% avaient été réalisées par la clientèle locale, principalement
auprès des agences de voyage (pour sortir du territoire notamment), du commerce et
de la restauration (tourisme sur place). Le rapport constatait qu’en agrégeant les
dépenses des résidents à celles des touristes affinitaires, cela représentait plus de 75%
des dépenses touristiques.
Par ailleurs, les professionnels du tourisme rencontrés sont unanimes à considérer que
la clientèle touristique locale n’est pas à négliger. La Réunion, avec bientôt plus d’un
million d’habitants, dispose d’une masse critique non négligeable de consommateurs
de produits touristiques. Les hôteliers avancent que la clientèle locale représente déjà
presque 30% de leur clientèle totale (principalement sur les catégories 3*). L’enjeu sur
cette clientèle est double :
•
elle est difficile à capter et à fidéliser, une très forte concurrence existe entre les
structures ;
•
la concurrence de Maurice est de plus en plus forte pour les maintenir sur place.
Néanmoins, l’enquête IPSOS de septembre 2012 commandée par l’IRT montre que la
Réunion est une destination de plus en plus privilégiée par les résidents, 10% du panel
ayant déclaré passer leurs vacances à la Réunion, contre 7% en 2006.
3.3.2.3 Le tourisme comme activité exportatrice
1.
Guadeloupe :
Le tourisme est l’une des rares activités exportatrices de la Guadeloupe puisqu’elle
représente une part importante des recettes d’exportations (60 % en 2008). En 2005,
la contribution du secteur touristique au PIB régional était estimée par l’INSEE à 5 %.
La prise en compte des données concernant le tourisme fait quasiment doubler le taux
d’exportation du territoire (2,9 % à 6 % en 2008).
A nouveau, il faut souligner qu’il est impossible de fournir des données spécifiques
concernant l’écotourisme.
Selon l’enquête de l’INSEE sur les flux touristiques en 2010-20112, la majorité des
visiteurs sont des touristes d’agrément (63 %). La part des touristes affinitaires (31 %),
venus voir leur famille ou des amis, faiblit légèrement mais demeure importante. Le
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
79
tourisme d’affaires reste en revanche marginal84. Plus d’un visiteur sur deux réalise
durant son séjour une excursion dans les autres îles de l’archipel. Ainsi, un tiers des
touristes ont visité les Saintes, 17 % se sont rendus à Marie-Galante et 9 % à la
Désirade.
La crise économique mondiale et les perturbations sociales de février 2009
(intervenues en pleine saison touristique) ont donné un sérieux coup de frein à
l’activité touristique, alors même qu’après la crise du début des années 2000
s’amorçait une reprise depuis fin 2006 et début 2007. Quelques chiffres traduisent ce
constat : -16 % du nombre de touristes en provenance de la métropole, diminution des
séjours en hôtels (-30 % de clients), chute du taux d’occupation (- 8 points) en 2009.
L’année 2010 a été une année de transition pour le tourisme guadeloupéen : sans
revenir aux niveaux constatés en 2008, on a assisté au redémarrage dans certains
secteurs d’activité touristique. Le nombre de passagers à l’aéroport Pôle Caraïbe a
augmenté de 6 % par rapport à l’année 2009. Dans l’hôtellerie, la fréquentation s’est
améliorée : 17 % de clients supplémentaires, 12 % de nuitées en plus et un taux
d’occupation des chambres en progression de 4,5 points.
Le marché extérieur a progressé au total de 3 % entre 2011 et 2012, avec une
augmentation de 4% des touristes français, de 44% des touristes allemands et 47% des
touristes suisses (alors que le marché italien s’effondrait, sans doute du fait de la crise
qui a frappé le pays). La dépense totale des touristes est estimée à 419 millions d’euros
en 2011 (contre 238 millions d’euros en 2006), avec une dépense moyenne de 2058
euros par ménage et par séjour et de 1000 euros par personne et par séjour.
Tableau 3
2012)
Nombre de nuitées par mois (2008-2012) – en milliers (décembre
Tableau 4
Évolution du nombre de croisiéristes (2008-2012)
Source : Guadeloupe Port Caraïbe, Rapport IEDOM 2012 (édition 2013).
Le tourisme de croisière a également progressé depuis l’année 2007. Avec plus de
300 000 croisiéristes ayant fréquenté la destination, pour la saison 2012- 2013, les îles
de Guadeloupe confirment leur redressement et leur percée sur ce secteur depuis
l’année difficile de 2010 - cf. Figure 2).
84 Rapport Ideom 2012, Edition 2013.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
80
Figure 2
Guadeloupe
Évolution 2006-2013 du nombre de croisières dans les îles de
Source : CTIG 2013.
2. Guyane :
Comme on l’a précédemment indiqué, la filière tourisme dans son ensemble contribue
à hauteur de 9% au PIB et à hauteur de 26% aux exportations.
Tout comme en Guadeloupe, il est impossible de fournir des données spécifiques à
l’écotourisme.
3. La Réunion :
Le tourisme est là encore l’une des rares activités exportatrices de la Réunion. Les
exportations de biens représentent moins de la moitié des exportations totales de La
Réunion telles qu’elles sont retracées dans les comptes économiques régionaux établis
par l’Insee. En effet, la « correction territoriale » apportée par les comptables
nationaux dans l’évaluation des grands agrégats économiques conduit à considérer
comme des exportations les consommations faites sur le territoire par les touristes.
Les exportations liées à cette correction s’élèvent à 314,8 millions d’euros en 2012,
contre 306,8 millions d’euros pour les exportations de biens (dont plus de 50% sont
des produits issus de l’agro-transformation).
Les recettes du tourisme extérieur sont composées à la fois des dépenses effectuées
avant le séjour mais revenant directement à la Réunion (achat de forfaits à une agence
ou un organisme de voyage, acompte sur réservation), et des dépenses au cours du
séjour. Les premières représentaient 44,5 M€ en 2011, les secondes représentent en
2012 environ 315 M€. La baisse de la fréquentation et de la dépense moyenne et la
diminution du tourisme d’agrément (plus consommateur d’hébergement hôtelier ou
de gîtes) expliquent la baisse par rapport à 2011 (344 M€). Le budget global par
ménage est de l’ordre de 2500 €.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
81
Le marché principal se porte sur la métropole de manière très prédominante (81%),
viennent ensuite l’Europe (5,2% en hausse sur 2011), puis l’Ile Maurice (3,8% en léger
recul sur 2011), le reste représentant 10% du flux. La baisse de la fréquentation sur
2012 a concerné toutes les provenances, à l’exception de la zone Océan indien
(Mayotte, Maurice, Comores, Madagascar, Seychelles, Afrique du Sud), qui représente
10% des touristes et se maintient sur 2012.
A titre de comparaison, le tourisme sur Maurice offre un profil complètement
différent. Avec 965 000 visiteurs en 2012, les touristes issus des BRICS représentent
près de 20% des flux.
Pour remplir l’objectif officiellement fixé de 600 000 touristes extérieurs (à un
horizon plus lointain sans doute que 2015), La Réunion est clairement confrontée à un
double enjeu :
•
le maintien de sa position sur son marché « naturel » métropolitain ;
•
la diversification de sa clientèle sur les marchés secondaires que sont les autres
pays européens et les pays émergents, qu’ils soient dans l’Océan indien et ou dans
le sud-est asiatique, ou la Russie.
C’est en partie ce à quoi tend à répondre le concept marketing des « Iles Vanille » qui
réunit Madagascar, Mayotte, les Seychelles, Maurice, les Comores et la Réunion (les
Maldives n’y figurent pas). L’objectif est de réunir ces îles au sein d’une même
destination afin de leur conférer davantage de visibilité au plan international et de
capter des marchés sur lesquels elles émergent à peine. L’ambition est de développer
la complémentarité des offres et des positionnements respectifs, via des offres
combinées, et de s’appuyer pour cela sur une amélioration de la desserte aérienne et
un allègement des formalités administratives.
En incluant les Maldives, la destination « Océan indien » représente 2,6 millions de
touristes extérieurs annuellement, soit moins de 1% du tourisme mondial, avec deux
groupes d’îles aux profils très différents : (i) des îles orientées vers le tourisme
affinitaire et incluant une forte dépendance vis-à-vis de la clientèle française
métropolitaine (Réunion, Madagascar, Mayotte) ; (ii) des îles ayant fait le choix d’une
relative spécialisation économique sur le tourisme exploitant leur capital naturel,
accueillant majoritairement du tourisme d’agrément et disposant d’une clientèle plus
diversifiée, même si l’Europe y représente entre 65 et 75% des touristes (Maurice,
Seychelles, Maldives).
Au sein de ce groupe, le profil touristique de la Réunion est marqué par les tendances
suivantes :
•
La croissance de la fréquentation touristique à La Réunion est comparativement
beaucoup plus faible que dans les autres îles. Maurice et les Maldives ont connu
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
82
une croissance de 30% sur les années récentes, les Seychelles une croissance plus
modérée mais régulière et maîtrisée.
•
A l’instar de Madagascar et de Mayotte, La Réunion est en très grande partie à
l’écart de la diversification vers les marchés émergents : Chine, Inde, Russie,
principalement. Si ces pays ne représentent qu’un peu plus de 15% des touristes de
ces îles, leur croissance est très forte (+61% en provenance d’Asie pour Maurice,
Maldives et Seychelles, et +23% en provenance de Russie). Maurice et Maldives
ont absorbé l’essentiel de la croissance apportée par ces marchés émergents.
Aujourd’hui Maurice dispose par exemple de deux rotations quotidiennes de la
compagnie Emirates à destination du hub de Dubaï.
•
La Réunion envoie un nombre croissant de touristes (résidents réunionnais) à
Maurice (115 000 arrivées en 2011). Elle concentre 80% des flux inter-îles (pour
un total de 230 000 touristes inter-îles).
•
Avantages comparatifs identifiés actuellement et avantages comparatifs potentiels
3.3.2.4 La question de la compétitivité prix
Globalement, on peut dire qu’aucun des trois DOM étudiés n’est en principe compétitif
au niveau des prix pratiqués, pour l’essentiel du fait des coûts de main-d’œuvre, mais
aussi à cause des prix relativement élevés des produits agroalimentaires, ce dernier
point nous ramenant aux problèmes évoqués à propos de la filière agriculture /
agroalimentaire. Le coût du transport aérien joue lui aussi un rôle, du fait d’une
concurrence limitée sur les destinations concernées.
Le constat doit sans doute être nuancé pour la Réunion, si l’on considère la
concurrence de Maurice ou des Seychelles, destination relativement chère pour la
première, très chère pour la seconde. Dans ce cas, ce n’est plus le prix qui joue, mais la
qualité et la spécificité de l’offre.
Par ailleurs, dans la mesure où l’analyse est concentrée sur l’écotourisme en
Guadeloupe et en Guyane, on peut considérer que, là aussi, la qualité et la spécificité
de l’offre peuvent compenser le handicap des prix élevés.
3.3.2.5 Les avantages comparatifs existants
1.
Guadeloupe
Les entretiens ont permis de mettre en lumière plusieurs avantages comparatifs pour
l’écotourisme, dont certains, il est vrai, sont des avantages comparatifs qui concernent
l’ensemble de la filière, mais ont un impact positif sur l’écotourisme :
•
la richesse de la biodiversité de la Guadeloupe (faune, flore…), les
opportunités données par le fait que la Guadeloupe constitue un archipel et
dispose d’un littoral varié (activité de nautisme…), et la présence du parc naturel ;
la Guadeloupe est le seul archipel de la Caraïbe à avoir autant de profils
géomorphologiques ; elle dispose d’une grande spécificité, celle d’avoir cinq
réserves naturelles dans lesquels les territoires ont pu être préservés on y compte
aussi de nombreuses traditions culturelles ;
•
la très forte proximité avec la France hexagonale qui constitue le marché
privilégié du territoire : en 2009, les résidents de France métropolitaine
représentent 95 % des touristes de séjour ;
•
le développement de nouveaux modes d’hébergement (comme déjà
indiqué) : la part de la clientèle hôtelière est en baisse et représente 34 % des
touristes et seulement 21 % des nuitées ; à l’inverse, la clientèle en gîte et location
progresse (31 %) tout comme celle des touristes « affinitaires », en séjour dans la
famille ou chez des amis (33 %) ; ces deux derniers modes d’hébergement, qui se
caractérisent par des durées de séjour plus longues, notamment l’hébergement en
famille (18 jours en moyenne), totalisent 72 % des nuitées ;
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
83
•
le fonctionnement de la gouvernance d’ensemble : le Conseil régional est
reconnu comme pilote du plan d’actions sur le tourisme ; la collaboration entre le
Conseil régional et ses partenaires semble fonctionner plutôt bien et elle se
caractérise par une bonne articulation des missions de chacun ;
•
un certain nombre d’actions phares marquantes montrent la pertinence des
ambitions et des axes recommandés par les schémas régionaux ; ces différentes
actions ont permis d’accompagner la reprise du secteur touristique entamée à
partir de 2010, même si le niveau de 2008 n’a pas encore été entièrement retrouvé
(cf. supra), ainsi peut-on citer :
−
la structuration et la montée en gamme de l’offre en hébergements
touristiques ; le parc hôtelier guadeloupéen qui avait été durement touché
par la crise économique et les grèves de 2009 a pu monter en gamme ; par
ailleurs le nombre important de gites nouvellement crées permet de
compenser le nombre de structures d’hébergement qui ont dû fermer
durant la période de crise du secteur (2009-2010) ;
−
l’accueil des croisiéristes a progressé ; la Guadeloupe a connu un fort
développement de l’activité de croisière entre 2005 et 2007 (+25 % en
2007) pour se stabiliser ensuite sur la période 2008-2010 (36 000
croisiéristes environ par an) ; l’aménagement d’infrastructures dédiées à
l’arrivée des bateaux sur le port de Pointe à Pitre et la mise en relation des
commerçants et artisans locaux avec les croisiéristes ont permis
d’accroitre les capacités d’accueil des croisiéristes et de tirer profit de leur
passage en Guadeloupe, et amorcé une percée dans ce secteur ; la
coordination instaurée entre le Comité du Tourisme, le port et l’aéroport
paraît avoir porté ses fruits ;
−
pour ce qui est des transports, l’aide au cabotage a permis de
partiellement compenser les surcoûts de transport de marchandises et de
personnes vers les îles de l’archipel qui peuvent ainsi mieux tirer profit du
tourisme ; le Conseil régional a également soutenu l’aménagement des
terminaux, la mise en place d’une billetterie nominative, et l’organisation
d’horaires de transport réguliers ;
−
en matière de politique communale, on peut souligner la signature de
conventions d’objectifs de développement touristique prioritaires avec
sept territoires : ces conventions permettent d’encourager les communes à
s’engager dans le développement touristique de leur territoire ; le Conseil
régional cofinance les projets et programmes d’activités touristiques
définis dans le cadre de ces conventions ;
−
la signature d’un contrat de destination entre les acteurs du tourisme et
d’une importante campagne de promotion, d’une durée de huit mois et
d’un montant d’1,2 million € ;
−
l’adaptation de l’ingénierie financière des projets a permis de rendre les
aides publiques plus accessibles aux petits porteurs de projets, ceci est
particulièrement vrai pour les projets de gîtes qui se sont multipliés ces
dernières années (et fortement soutenus dans le cadre du PO FEDER) ;
−
la mise en place d’une Licence Tourisme à l’Université Antilles-Guyane.
Encadré 10
Caraïb'Bay Hôtel à Deshaies
Caraïb'Bay est un hôtel aujourd’hui 3 étoiles présent en Guadeloupe depuis une
dizaine d’années. Le Caraïb’Bay Hôtel se situe sur la commune de Deshaies, dans la
partie sous le vent de la Basse-Terre. Il est situé au sein d'un jardin tropical de 11 000
m² où se côtoient une grande variété de plantes et d’arbres exotiques.
L’hôtel est constitué de bungalows peu chers et de trois villas en location (location
Guadeloupe). Il met à disposition 12 duplex et emploie 10 salariés (la masse salariale
représente 42 % du CA).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
84
Disposant au total d’une capacité d’accueil de 60 occupants, il affiche aujourd’hui une
vraie identité et un engagement citoyen à Deshaies : promotion du tourisme écoresponsable, mise en place d’un tri-sélectif (avant l’heure), utilisation de peinture à
l’eau de chaux dans les bâtiments, développement d’extensions en bois dans le sens
des alizées afin de limiter l’usage de la climatisation…
L’entreprise a bénéficié de cofinancements du FEDER et d’un accompagnement OSEO
pour réaliser différentes installations : chauffe-eau solaire, climatisation classe A,
rénovation de villas, construction d’un mur anti-bruit, le changement de meubles…
Toutefois, malgré les aides et dispositifs mis en place, l’entreprise a pu rencontrer des
difficultés pour obtenir des prêts bancaires (même avec 70 % de subventions
publiques) et il a fallu que l’entreprise dispose d’une bonne trésorerie.
L’hôtel de charme est membre de l'Association guadeloupéenne d'écotourisme (AGE),
dont tous les membres répondent à des critères précis mais surtout à état d'esprit
commun. L’entreprise réalise également d’importants efforts pour être référencée sur
le plus grand nombre de site Internet assurant la promotion de l’écotourisme. Elle
communique comme les autres membres de l’association AGE sur l’offre à disposition
en Guadeloupe en matière d’écotourisme. Comme la Guadeloupe est perçue par le
gérant comme une destination dont le prix est élevé en comparaison de Cuba ou de la
Dominique (qui bénéficient de coûts de production plus faible et peuvent ainsi
disposer d’un nombre plus important de salariés), le gérant a décidé de passer à une
offre « all inclusive », avec la recherche de nouvelles activités à proposer, un effort
important sur le contact humain, …
Pour le gérant, le territoire dispose aujourd’hui de nombreux atouts : la richesse de sa
biodiversité, un Lycée des métiers de l’hôtellerie à Gosier et Sainte-Anne qui accueille
plus de 5000 personnes, une grande campagne de promotion interne (permettant de
développer la culture du tourisme en Guadeloupe) et externe (spots télévisés,
campagnes d’affiche 4x3, etc.).
Encadré 11
Anse caraïbe plongée à Pointe Noire
Anse Caraïbe Plongée est club de plongée subaquatique tournée vers l’écotourisme.
L’entreprise offre la possibilité de faire des baptêmes, des découvertes pour les niveaux
1, 2, 3 et 4, ainsi que des formations pour les niveaux 1, 2, 3 agrées et validées par la
FFESSM ou PADI.
Le Club de plongée est situé sur la plage Caraïbe à Pointe Noire. Il a été créé en 2000.
L’offre de services proposés vise à limiter au maximum l’impact sur l'environnement
marin. L’entreprise propose des séjours de plongée intégrés : location de gîte, voiture à
disposition à l’aéroport, forfait plongée incluant des plongées en Guadeloupe et dans
les îles voisines : les Saintes ou Marie-Galante. Elle communique également beaucoup
sur l’offre à disposition en Guadeloupe en matière d’écotourisme, notamment celle
proposée par les entreprises membres de l’AGE.
L’entreprise réalise d’importants efforts pour être référencée sur le plus grand nombre
de sites Internet assurant la promotion de l’écotourisme et regrette qu’aucun tour
opérateur ne fonde sa stratégie en Guadeloupe en s’appuyant sur les principes de
l’écotourisme.
2. Guyane
Malgré son niveau d’activité important, la filière touristique guyanaise est encore en
cours de construction. Cette situation présente l’avantage d’offrir une grande flexibilité
dans les choix structurants et stratégiques destinés à stimuler la croissance de cette
activité. Des atouts certains permettront au département de se démarquer de ses
concurrents régionaux et même internationaux.
Le premier avantage comparatif saillant de la Guyane, qui lui offre un positionnement
tactique au niveau mondial, est d’être l’unique territoire européen en
Amazonie. Cette situation confère au territoire des avantages de poids, notamment
sur un public occidental. On peut particulièrement citer l’appartenance à la zone euro,
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
85
un sentiment certain de sécurité (stabilité politique, sécurité des biens et des
personnes, équipements et services de santé aux standards européens.
Le second avantage renvoie à la place du tourisme spatial. Le tourisme lié au
spatial en Guyane est sans équivalent dans le monde85. C’est une des raisons
principales de la venue en Guyane qui capte la majorité du flux touristique d’affaires
ainsi qu’une bonne partie du flux touristique d’agrément. 86 Cette position conduit
parfois à considérer Kourou comme un marché captif au sein même de la Guyane. Le
spatial elle joue toutefois aussi un rôle important dans le développement touristique
des autres parties de la Guyane. Le CSG et le CNES participent ainsi beaucoup au
développement de sites et d’activités extra-spatiales. Par exemple, ils sont
propriétaires de sites tels que le zoo de Guyane et les îles du Salut, très prisés pour le
tourisme de nature.
3. La Réunion
Les entretiens ont permis de mettre en lumière plusieurs avantages comparatifs :
•
L’inscription par l’UNESCO des « Cirques, pitons et remparts » au
patrimoine mondial de l’humanité confirme la présence d’un patrimoine
naturel exceptionnel et fournit un argument marketing discriminant pour la
région. Ce point est largement reconnu par les professionnels du secteur et les
institutions rencontrés. Cependant, dans le même temps, l’inscription par
l’UNESCO et le Parc national imposent des obligations de respect
environnemental des sites qui peuvent constituer un frein à leur exploitation à des
fins touristiques.
•
Au-delà de l’inscription à l’UNESCO, la richesse du territoire du point de
vue de sa biodiversité, de son patrimoine culturel, historique,
gastronomique, est mise en avant comme un élément permettant d’offrir une
palette diversifiée d’activités touristiques.
3.3.2.6 Potentiel pour renforcer les avantages comparatifs existants ou développer de
nouveaux avantages comparatifs
En ce qui concerne la Guadeloupe, il y a sans doute un effort à faire pour
promouvoir davantage l’identité caraïbe, tant en ce qui concerne les ressources
naturelles et la biodiversité que la dimension culturelle. Le tourisme en Guadeloupe
reste encore très « banal » ou « généraliste » et le développement de l’écotourisme
passe sans doute par davantage de sophistication dans la construction d’une image
forte de l’archipel Guadeloupe.
La Guyane dispose de sérieux atouts à valoriser dans le cadre d’un positionnement
nature ou éco-touristique. La région se distingue aussi bien au niveau international
que régional. Ses atouts à renforcer et valoriser se situent notamment sur :
•
Une offre « naturelle » diversifiée et de qualité :
La Guyane s’appuie sur un environnement très largement protégé (réserves naturelles,
parcs, …) pour proposer de nombreuses activités en lien avec la nature. La politique de
protection environnementale, parfois extrême, permet aujourd’hui à la Guyane de
jouir d’une biodiversité riche et intacte à travers les activités en forêt (découverte en
lodge, carbet ou autonomie) ou en mer (pêche sportive), les randonnées pédestres sur
des circuits et sentiers de la bande littoral, les randonnées fluviales ou encore les
activités de découvertes de la nature (comme les sites de ponte des tortues)87.
85 Il est possible d’assister à des lancements de fusées dans de bonnes conditions de visibilité.
86 Kourou absorbe presque 50 % du flux total de touristes (estimation des acteurs locaux).
87 La Guyane possède les plus importants sites de ponte des tortus luths.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
86
Les sites accessibles se distinguent alors par leur caractère exceptionnel en
comparaison des autres zones géographiques du monde. Régionalement, la qualité de
ces sites est bien supérieure à ce qu’on peut trouver au Brésil ou au Suriname. Cette
situation avantageuse est de nature à favoriser le tourisme de nature et le tourisme
vert.
•
Une diversité culturelle importante :
Le mélange important de populations en Guyane offre de nombreuses cultures à
découvrir. Historiquement, les Amérindiens et Bushinenge sont à la base des
«cultures guyanaises et amazoniennes ». S’y sont ajoutés les nombreux Créoles,
Indiens d'Inde, Chinois, Hmongs, Haïtiens, Surinamiens, Brésiliens, Blancs
descendants de colons… apportant avec eux la diversité.
Une telle diversité favorise la découverte culturelle et historique de « plusieurs
Guyanes ». Cet axe, souvent négligé, fait partie intégrante de l'écotourisme. La
Guyane peut alors se démarquer de la plupart des zones touristiques mondiales, à
l’exception peut-être du Brésil qui réunit une même diversité, sur un territoire tout de
même beaucoup plus vaste.
A la Réunion, existent des opportunités pour tirer parti des îles voisines afin de
capter de la clientèle plus internationale : européens non francophones, russes et
asiatiques. Si l’offre de séjours combinés « Réunion » avec « Maurice » ou les autres
îles de l’Océan indien) diminue tendanciellement depuis une dizaine d’année (45% de
l’ensemble des arrivées à La Réunion en 1996 contre 25% en 2010), il y a des
possibilités pour exploiter le potentiel de clientèle présent à Maurice à partir de
produits de type « excursions » (une visite de 2 jours sur la Réunion autour du volcan
pour un tourisme basé à Maurice, vendue par son tour opérateur dans son pays
d’origine, ou directement sur place à Maurice). Les Maldives et les Seychelles ne le
permettent pas faute de liaisons aériennes.
Le marché sud-africain est également prometteur. La fin de l’obligation de visa est un
avantage certain pour développer ce marché.
3.3.3 Handicaps et points faibles
Globalement, et mis à part le handicap constitué par un manque de compétitivité en
termes de prix, la filière tourisme/écotourisme souffre de deux handicaps communs
aux trois DOM étudiés : une insuffisante structuration de la filière – que l’on peut aller
jusqu’à qualifier de défaut d’une organisation de type cluster – et des liaisons
aériennes exclusives avec Paris.
Au-delà de ces deux handicaps, il est nécessaire d’aller plus avant dans le détail pour
chacun des trois DOM dans la mesure où, ainsi qu’on l’a indiqué, les contextes sont
très différents.
1.
Guadeloupe
Outre les facteurs structurels reconnus dans le Traité fondateur de l’Union européenne
et les effets de la crise de 2009, plusieurs autres facteurs nuisent au développement du
tourisme en Guadeloupe88 :
•
L’offre d’hébergement est vieillissante bien que, depuis 2004, un effort important
ait été consenti sur la modernisation et la montée en gamme de l’hébergement
touristique. Des structures sont exemplaires de ce point de vue comme : Creole
Beach, Toubana, Club Med, Pierre et Vacances, etc.
88 Dans une note de juillet 2011 sur le tourisme en Guadeloupe, l’INSEE dresse un état des lieux du
tourisme, de ses forces et de ses faiblesses. Nous en reprenons ici les principaux éléments. Note INSEE
juillet 2011 : Le tourisme : la Guadeloupe et le tourisme : un sentiment d’inachevé
http://www.insee.fr/fr/insee_regions/guadeloupe/themes/etudes_detaillees/diag971/diag971_08.pdf
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
87
•
L’image du tourisme en Guadeloupe doit encore être renforcée, notamment en
matière d’accueil et de services :
−
le positionnement marketing doit être consolidé en s’appuyant sur les
importants efforts réalisés à l’externe et à poursuivre par le CTIG et sur la
présence du Lycée professionnel, car le tourisme dans la Caraïbe est un
marché très concurrentiel ;
−
les clients potentiels connaissent moins le contenu de la destination
Guadeloupe et le territoire manque d’un produit différencié.
•
Le nombre de création d’entreprises dans le secteur est en baisse selon les
dernières données disponibles. Néanmoins, les récentes évolutions non
enregistrées dans les statistiques paraissent plus favorables : en 2009, 820
entreprises ont été créées dans les secteurs d’activité liés au tourisme, un chiffre
cependant en baisse de 10 % par rapport à l’année précédente. Le nouveau statut
de l’auto-entrepreneur n’a pas suffi à résorber les effets des crises économique et
sociale. Il faut aussi remarquer que les entreprises (notamment celles qui ont
investi) ont réussi à mieux résister à la crise et il y a pu y avoir des maintiens
d’emplois là où ailleurs, les entreprises ont largement licencié.
•
L’offre d’hébergement reste très concentrée : 82 % des 12 100 lits recensés sont
situés sur deux territoires, le Grand centre et l’Est Grande-Terre. Les communes
de Gosier, Sainte-Anne et Saint-François y abritent la plupart des structures
hôtelières. Il faut cependant intégrer dans l’analyse les meublés de tourisme et les
villas à la location. Ainsi, en termes de capacité d’hébergement, le nord BasseTerre devient un territoire très dynamique. Il ne faut toutefois pas s’attendre au
développement de grands hôtels dans le nord de Basse-Terre et Grande-Terre.
Dans ces zones, l’approche est centrée sur le développement des meublés de
tourisme ou les petits hôtels de charme du fait de l’identité touristique de ces
zones.
•
La Guadeloupe est en retrait par rapport aux autres îles de la Caraïbe, sachant
cependant que la Guadeloupe n’a pas comme stratégie de développer le tourisme
de masse, exposé à la forte concurrence de pays voisins tels que Cuba ou la
République Dominicaine. En 2008, selon la Caribbean Tourism Organization
(CTO), la Guadeloupe est classée au 12e rang des destinations touristiques dans les
Antilles (grandes et petites Antilles). Avec 433 000 touristes, elle se place derrière
ses voisines de la Martinique (481 000), St Martin (475 000) et devance Sainte
Lucie (295 000) et la Dominique (80 000). Par comparaison, les deux premières
destinations touristiques antillaises, la République Dominicaine et Cuba
accueillent six millions de visiteurs. Si la plupart des pays de l’espace Caraïbe sont
tributaires de la clientèle nord-américaine, la clientèle des USA ne représente que
6 % des touristes en Guadeloupe. Cependant ces données doivent être interprétées
avec précaution dans la mesure où, par exemple, en Martinique, on compte
systématiquement les plaisanciers, alors qu’en Guadeloupe, les chiffres sont ceux
de l’Insee qui ne compte que les touristes en provenance de Paris.
•
L’absence de liaisons aériennes directes avec les principales capitales européennes
(à l’exception de Paris) et avec les États-Unis et les aléas concernant la mise en
place d’une desserte au départ de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, destinée à
renforcer l’attractivité de la Guadeloupe sur les marchés européens. Après plus
d'un an et demi d'exploitation, la compagnie aérienne Air France a annoncé en
début d’année 2013 la fin de la desserte de la Guadeloupe et de la Martinique au
départ de Roissy pour la mai 2013. Les raisons avancées de cet arrêt sont les
suivantes : le faible taux de remplissage, l'atonie des marchés italiens et espagnols,
notamment dans un contexte de crise économique et financière. C'est la troisième
fois en l'espace de quelques années qu'Air France se voit contrainte d'arrêter ses
rotations vers les Antilles françaises au départ de Roissy.
•
Enfin, concernant plus spécifiquement le volet écotourisme :
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
88
−
La structuration de la filière écotourisme n’est pas encore aboutie,
notamment dans la mesure où les associations d’acteurs en place n’ont pas
les mêmes définitions de la filière et des principes qui doivent la régir. En
dehors de quelques sites Internet maintenus par les associations en place,
il n’existe pas de marketing spécifique pour cette filière (la filière est
néanmoins citée à deux reprises dans le diagnostic territorial stratégique
2014-2020).
−
En dehors de l’organisation de formations aux labels de qualité, aucune
action de formation structurante n’a été réalisée, ni sur l’ensemble de la
filière tourisme, ni sur la filière écotourisme. La CCI et le Conseil régional
ont organisé des formations aux labels de qualité principalement destinées
aux personnels des structures d’hébergement.
−
Le manque global de développement d’une logique de cluster du tourisme
permettant, d’inscrire plus généralement l’écotourisme (qui dispose d’ores
et déjà d’un certain nombre d’acteurs positionnés sur ce segment) dans
l’ensemble des segments de la filière tourisme : tourisme de pleine nature,
tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif,
tourisme de mariage et de lune de miel, tourisme d’affaires…). En effet, il
n’existe pas à notre connaissance d’études de marché, ni de cadre
politique pertinent en Guadeloupe pour mettre en œuvre une politique
différenciée du tourisme, s’appuyant sur une logique de développement de
cluster pouvant donner lieu au développement d’un réel écosystème
d’affaires, alors même que ce type de cluster est le ciment de la chaîne de
valeur informationnelle, le support de la compétitivité des acteurs et de
l’attractivité des destinations touristiques.
Tous ces handicaps convergent et contribuent à amoindrir l’attractivité et la
compétitivité de la destination Guadeloupe, qui pourtant dispose de nombreux atouts.
2. Guyane
Les handicaps et points faibles spécifiques à la Guyane sont les suivants :
•
Une communication insuffisante pour la destination Guyane :
L’offre existante est sans conteste importante et diversifiée ; elle manque toutefois de
visibilité. La consommation par le touriste, aussi bien étranger que local, est dès lors
pénalisée. Une des raisons est que cette diversité de l’offre n’est pas accompagnée d’un
répertoriage (et d’une qualification) systématique. Par ailleurs, elle ne bénéficie pas
non plus d’une synergie suffisante entre les différents acteurs de la filière89.
Si l’offre est peu visible, c’est aussi le cas pour la Guyane en tant que destination : on
constate en effet un manque important de promotion de la destination. Cette lacune
peut s’expliquer par le manque d’investissement public, notamment financier90. À ce
manque de communication vers l’extérieur, s’ajoute la communication souvent
préjudiciable provenant de l’extérieur. La Guyane peine ainsi à sortir de son image
d’ « enfer vert » liée à la présence historique du bagne. Cette image donne lieu à un
dénigrement et une communication alarmiste injustifiée, notamment par les
Métropolitains.
•
L’absence d’un observatoire fiable sur le tourisme :
Il y a peu de données fiables sur le tourisme en Guyane, notamment sur la
fréquentation effective des hôtels, la consommation de biens et services ou l’ampleur
89 L’exemple typique est celui de l’hôtelier faisant la promotion des activités récréatives locales.
90 Selon ATOUT France, l’investissement public en faveur du tourisme en Guyane est cinq fois inférieur à
celui constaté dans les autres DOM et jusqu’à dix fois inférieur à celui constaté en France Métropolitaine.
(Euros par habitant)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
89
du tourisme local. Ce manque d’éléments objectifs est un véritable handicap pour la
filière en termes d’investissement : il n’est en effet pas possible d’évaluer les risques
pour convaincre des investisseurs. Cela est d’autant plus pénalisant que les banques
ont une activité d’investissement (quasi-)nulle en Guyane.
•
Une dispersion des forces:
Si la filière n’est pas structurée, c’est aussi parce que les branches qui la composent ne
le sont pas elles-mêmes (hôtellerie, restauration, transports ou agences de voyage). Il
est en effet important de souligner que sans structuration des différentes branches, la
filière aura du mal à s’organiser et à s’étoffer91. On constate donc que les acteurs
communiquent peu sur la stratégie d’ensemble de leurs branches respectives, au
travers de syndicats forts ou de groupements professionnels par exemple.
Certes, des initiatives appuyées par des institutions publiques (CTG, CCIG…)
émergent, mais elles sont encore limitées (Offices du Tourisme, guides, hébergeurs…).
Cette difficulté résulte du manque de dynamisme interne au sein des branches92
couplé à une faible professionnalisation : les différentes branches sont en effet
composées majoritairement de très petites entreprises qui se concentrent
principalement sur des problématiques de mise en conformité aux différentes normes
et règlements (parfois élémentaires)93 ou de gestion d’une trésorerie fragile par
exemple.
On peut identifier par ailleurs un certain nombre de menaces qui pèsent
spécifiquement sur le développement futur de l’écotourisme :
•
la sécurité dans l’intérieur des terres ;
•
la présence d’orpailleurs clandestins dans les terres dégrade les conditions de
travail des acteurs du tourisme et leur compétitivité : ces derniers subissent en
effet souvent des vols d’équipements (pirogues, moteurs) ;
•
le protectionnisme local : l’éco-tourisme est destiné à promouvoir une
consommation écologique et durable et la découverte des cultures ; certaines
populations situées dans des zones d’intérêt touristique ont déjà montré leur
hostilité à l’égard de la mise en place de structures touristiques sur leur territoire ;
ainsi, malgré la connotation positive du concept d’éco-tourisme qui prévaut au
niveau occidental, il ne suscite pas forcément l’engouement des populations
locales (peur du voyeurisme, de corruption culturelle…).
3. La Réunion
La majorité des professionnels du tourisme rencontrés ne considère pas le prix du
transport aérien comme un réel handicap comparatif : ils considèrent en effet que la
Réunion est une destination long courrier, et à ce titre coûtera nécessairement cher
dans les années à venir (hausse du prix des carburants), au même titre que les autres
destinations de l’aire régionale. Il n’est pas assuré que cette vision optimiste soit
recevable si elle ne s’accompagne pas d’une stratégie touristique ciblée de façon
appropriée.
Un handicap essentiel réside bien en effet dans le positionnement de l’offre touristique
de la Réunion par rapport aux autres destinations long courrier qui existent dans la
zone. Il s’agit avant tout d’un problème de : (i) définition du positionnement de la
marque Réunion (ce que l’on « vend ») ; (ii) puis de mise en adéquation du message
91 Il n’y a en effet pas de représentants capables de porter d’une voix les choix et visions de son secteur pour
mettre en œuvre des actions d’envergure.
92 Le défaut de dynamisme s’illustre par exemple dans le secteur de l’hôtellerie par la durée attendue avant
de s’attaquer au problème du manque de lits. Un hôtel est en cours de construction à Cayenne, le premier
depuis près de 20 ans.
93 Les restaurateurs travaillent actuellement sur la mise aux normes de leurs établissements.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
90
avec l’offre touristique sur place, car le coût du transport aérien implique une attente
des consommateurs pour, une fois sur place, disposer de services de qualité en rapport
avec le prix du billet ; (iii) et d’organisation du secteur dans son ensemble.
Les principaux handicaps mis en avant sont ainsi les suivants :
•
Le positionnement marketing de l’offre touristique réunionnaise apparaît comme
fluctuant au fil des années.
Le positionnement marketing a souvent varié au cours des 10 dernières années, à tel
point que les acteurs rencontrés ont du mal à indiquer quels sont la marque, la
signature et le positionnement de l’offre réunionnaise. Il y a sans doute un besoin de
stabiliser le marketing de l’île pour mieux construire son identité et la
complémentarité avec les îles voisines (Maurice, Seychelles en particulier).
L’enjeu est de créer une image et de s’y tenir dans un contexte concurrentiel fort avec
les îles voisines, et de définir des cibles prioritaires.
•
La proximité de destinations de tourisme balnéaire (Maurice, Maldives,
Seychelles), qui offrent un produit « tropical » correspondant à une demande de la
clientèle européenne non francophone, et de manière croissante à la clientèle
asiatique (voyages de noces par exemple auprès des clients chinois et indiens).
Par ailleurs, le différentiel de compétitivité-prix avec ces îles au niveau de
l’hébergement fait qu’elles sont moins exposées aux exigences des encadrements
sociaux et environnementaux.
Enfin, même si le tourisme asiatique croit fortement sur Maurice, les deux
destinations s’adressent à une même clientèle européenne, et dans le contexte de
ralentissement actuel de l’activité, sont dans une situation de concurrence accrue.
•
L’offre d’hébergement vieillissante et le manque de capacité d’accueil en termes
d’hôtellerie, sans que de grands acteurs de l’hôtellerie internationale se soient
positionnés sur cette destination. Cette absence des grands acteurs internationaux
est sans doute un frein pour promouvoir plus largement la destination. Elle se
conjugue à un positionnement de l’hôtellerie classée sur une offre moyenne
gamme. Seuls 5 hôtels fin 2011 (sur 50) étaient classés au moins 4*.
Par ailleurs la faible capacité d’accueil hôtelier ne permet pas de répondre aux
demandes éventuelles de tours opérateurs pour de grosses commandes (500
chambres). Le secteur n’a pas la masse critique pour cela.
Ces mêmes structures hôtelières, aujourd’hui peu nombreuses, vivent d’une partie de
la clientèle locale, du tourisme d’affaires et d’agrément (le taux d’occupation serait
supérieur selon nos interlocuteurs à la moyenne nationale94); elles ne sont pas
toujours incitées à développer une stratégie de diversification via des partenariats avec
les tours opérateurs en France ou en Europe.
•
La fragmentation de la « filière » tourisme. Elle s’appuie sur une multitude
d’opérateurs sur différents sous-segments, sans qu’une organisation et des actions
collectives soient réellement menées entre les professionnels. Il n’y a pas
d’instance de dialogue récurrent entre les professionnels des loisirs, de
l’hébergement, les réceptifs et les transporteurs.
Le Club Tourisme est toutefois un pas en avant vers cette structuration, mais avec une
réelle difficulté à initier des démarches mutualisées et partagées par l’ensemble des
acteurs de la chaîne de la valeur.
•
Les compagnies aériennes (trois) disposent d’une clientèle captive de réunionnais,
et de touristes affinitaires et d’affaires qui les incite peu à développer des stratégies
94 Aux environs de 70 à 75% selon nos interlocuteurs. Le taux d’occupation moyen en France est de 65% au
deuxième semestre 2012 (L’industrie hôtelière française en 2012, KPMG).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
91
touristiques durables en partenariat avec des tours opérateurs métropolitains ou
européens. Le marché principal de l’aérien est en effet constitué des résidents
réunionnais, auxquels s’ajoute la clientèle touristique affinitaire. Par ailleurs, la
dépendance vis-à-vis de la liaison aérienne vers Paris constitue un frein à la
diversification de la clientèle européenne non francophone.
•
L’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) est
encore insuffisamment développée parmi les professionnels (achat en ligne
notamment), en particulier dans les activités de loisir. C’est un enjeu d’autant plus
important que l’Internet a changé les comportements des consommateurs et a
contribué largement à développer les voyages sur mesure.
3.3.4 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs
d’accompagnement
1.
Guadeloupe
Le développement d’un tourisme durable constitue un axe fort de la stratégie
économique du territoire.
Dans le cadre de l’axe « T » comme Tourisme du Schéma Régional de Développement
Économique, de nombreuses actions ont été menées pour répondre aux différentes
problématiques identifiées. Ces actions sont pour partie mises en œuvre directement
par le Conseil régional ou indirectement via le CTIG, et pour partie opérées par des
partenaires tels que la DIECCTE. On note que les acteurs interrogés se réfèrent
exclusivement au Schéma de Développement et d'Aménagement Touristique (SDAT)
comme cadre d’orientations stratégiques en matière de tourisme. Le SRDE a servi de
fondement aux réflexions menées dans le cadre de l’élaboration du SDAT en 2009
ainsi que pour la définition d’une feuille de route sur le tourisme. Le PO FEDER a eu
pour mérite de développer les investissements productifs au niveau des gîtes,
contribuant ainsi, comme on l’a déjà indiqué, au développement significatif de la part
des gîtes dans le nombre de nuitées en Guadeloupe.
La Région est reconnue comme pilote du plan d’actions sur le tourisme. La
collaboration entre le Conseil régional et ses partenaires fonctionne plutôt bien et se
caractérise par une bonne articulation des missions de chacun.
Le SDAT définit sept territoires géo-touristiques ayant chacun une identité touristique
territoriale spécifique, qu’il convient de développer tout en gardant la cohérence
globale de l’archipel. Pour ces territoires, le SDAT entend notamment :
•
favoriser la diversification de l’offre et la montée en gamme ;
•
développer les infrastructures de nautisme (accueil des croisiéristes haut de
gamme, grande plaisance ou plaisance) et renforcer le positionnement sur le
nautisme ;
•
valoriser les sites naturels et encourager
environnementales dans les projets touristiques.
l’adoption
de
démarches
La politique régionale du Tourisme se définit aussi à travers quatre axes principaux95 :
•
l’accompagnement des organismes de promotion et d’animation touristique
(offices du Tourisme et syndicats d’initiative) : aide attribuée pour leur
programme d’activités annuel, et programme d’aide à la normalisation de leurs
structures ;
•
la modernisation de l’industrie hôtelière : La Région reconnaît cette action comme
obligatoire, pour permettre à la Guadeloupe de disposer, désormais, d’un parc
95 Cf. SDAT Guadeloupe 2012.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
92
d’hébergements plus diversifié et compétitif, la concurrence de nos voisins de la
Caraïbe se faisant de plus en plus ressentir ;
•
le soutien à l’aménagement et au développement de l’offre de produits
touristiques : l’action régionale a pour objectif de proposer, aux acteurs locaux du
tourisme, qui sont les communes et les associations, un soutien à l’investissement
pour favoriser le développement d’un tourisme durable et intégré ; la filière
« écotourisme » n’est pas identifiée en tant que tel à ce stade, mais plusieurs gîtes
liés à la filière ont pu profiter des investissements publics réalisés ;
•
la promotion externe de la destination de la Guadeloupe : l’objectif premier de la
Région a été de restructurer l’Office du Tourisme de la Guadeloupe, afin de lui
permettre de continuer à mener sa mission de promoteur sur les différents
marchés, et de renforcer, ainsi, la notoriété de la destination Guadeloupe à
l’étranger.
Des efforts de structuration de l’offre d’hébergement touristique ont donc été entrepris
par le Conseil régional avec l’État et le CTIG afin d’assurer la mise aux normes et
améliorer la qualité des produits :
•
une réforme des classements des hôtels a permis une mise à niveau des hôtels aux
standards internationaux ;
•
les structures d’hébergement et d’activités touristiques ont été encouragées à
obtenir des labels de qualités tels que le label « qualité du Tourisme » accordé par
le CTIG, le label « tourisme handicap » ou les labels « clé vacances » et « gîtes de
France » pour les gites ;
•
le PO FEDER 2007-2013 a axé l’accompagnement de l’offre touristique sur la
montée en gamme de l’hébergement ; ainsi des subventions sont accordées aux
entrepreneurs pour la construction de nouveaux hébergements, la rénovation ou
l’extension d’établissements existants, ou la réalisation d’aménagements
périphériques type : salle de sport ou de massage, SPA, Jacuzzi, mur antibruit,
achat de mobilier, etc. ;
•
l’aide sur fonds régionaux représente jusqu’à 35 % de l’investissement ; combinée
avec les Fonds européens, elle va jusqu’à 50 % voire 75 % de l’investissement ;
parmi les critères d’éligibilité à cette aide l’établissement demandeur doit avoir au
minimum deux étoiles en vue de passer à trois ou quatre étoiles.
Le travail de structuration de l’offre d’hébergement touristique et d’amélioration de la
qualité de l’offre est considéré comme un grand succès par le Conseil Régional et ses
partenaires (État et CTIG) qui se sont beaucoup impliqués dans cette action.
La Région effectue un suivi de l’offre d’hébergement touristique à travers un outil
permettant de cartographier sur le territoire l’offre d’hébergement et les catégories
correspondantes. Le suivi de l’offre se fait à partir des données sur les établissements
demandeurs de subventions, et aussi sur les chiffres d’enregistrement des
établissements aux référentiels de qualité. Le secteur informel (important pour ce
concerne les gites et chambres d’hôtes) n’est pas suivi. La DIECCTE a également un
outil interne de suivi de l’offre d’hébergement.
Ce travail de structuration de l’offre doit se poursuivre. La Région et ses partenaires
devraient assurer un contrôle permanant des organismes au-delà de l’attribution des
labels (inspections, suivi client, etc.). Actuellement, le label n’est suivi que trois ans
après son attribution. La DIECCTE envisage par ailleurs d’élargir le label « qualité
tourisme » à l’animation touristique.
2. Guyane
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
93
La règlementation est en général bénéfique à la préservation de la biodiversité.
Cependant, la sur-règlementation peut avoir un effet inverse. C’est le cas notamment
avec certaines règles édictées au niveau de l’État qui sont aujourd’hui considérées par
certains acteurs96 comme une source de difficultés. Il arrive en effet parfois que ces
règles et normes soient prises en réaction à des évènements ponctuels97 ou ne tiennent
pas compte des contraintes locales et de l’existant. 98
Encadré 12 JAL Voyages
JAL voyages est une société indépendante vieille de plus de 30 ans. Elle compte
aujourd’hui entre dix et vingt collaborateurs qui accueillent annuellement plus de
10 000 touristes et réalisent un chiffre d’affaire de l’ordre d’un million d’euros.
Cette PME est un acteur incontournable de l’éco-tourisme guyanais. Elle est reconnue
nationalement, grâce notamment aux éco-lodges des marais de Kaw alliant
tourisme/découverte de la nature et préservation active de la biodiversité (JAL
Voyages a par ailleurs participé à des ouvrages éducatifs et de sensibilisation à
l’écotourisme).
Son gérant, monsieur Jean-Louis Antoine, entrevoit un triplement de l’activité, et
mécaniquement une croissance des effectifs de l’entreprise, dans les 5 années à venir.
Il croit en effet aux bienfaits de l’élargissement du marché en Guyane, notamment par
l’accueil des frontaliers et des croisiéristes, souhaité par une majorité des acteurs du
tourisme.
La société envisage ainsi d’investir massivement, et particulièrement dans la
construction de nouvelles infrastructures ou le rachat de campements abandonnés. A
défaut de financements bancaires, ces projets, pouvant dépasser un million d’euros
d’investissement, seraient principalement financés par des fonds propres et le
concours des financements européens.
JAL Voyages, comme d’autres acteurs, voit toutefois aujourd’hui l’ensemble de son
activité menacé par de nouvelles règlementations, particulièrement celle obligeant les
sites isolés à fournir de l’eau puisée dans un puits (règlementation européenne), et la
décision préfectorale de reclasser les marais de Kaw en réserve.
La règlementation sur l’approvisionnement en eau est aujourd’hui difficilement à
satisfaire dans les marais de Kaw car il faudrait alors réaliser un forage à plusieurs
centaines de mètres des lodges. De manière pratique, cela signifierait la mise en place
d’une logistique spécifique pour cet approvisionnement qui, au-delà d’être coûteuse,
aurait paradoxalement un impact non négligeable sur l’environnement.
Le reclassement des marais, est quant à lui un coup de massue pour cette activité
d’écolodge. En effet elle conduira, à terme, à l’interdiction de la navigation et de la
présence des lodges sur les marais, mettant alors en péril plusieurs emplois.
La filière tourisme ne dispose à l’heure actuelle d’aucune stratégie réelle de
développement, ce qui s’explique par un manque de concertation au niveau
institutionnel99. Les résultats de cette situation sont notamment la promotion
défaillante de l’offre (précédemment soulignée), le manque de structuration de la
filière et un dispositif d’aides peu lisible.
96 Exemple : les règlementations sur l’approvisionnement en eau dans les sites isolés sont issues de normes
européennes. Les sites isolés doivent désormais fournir de l’eau de boisson et de toilette issue de forages.
Les pratiques consistant à purifier l’eau de rivière ne sont plus admises alors que l’eau est faiblement
contaminée en Guyane. Aucun financement n’est prévu pour répondre à ces nouvelles contraintes.
97 Exemple : arrêté de non circulation dans une zone à la suite de l’égarement de randonneurs.
98 Exemple : des reclassements de sites (réserves …) mettant en péril des activités éco-touristiques.
99 Le tourisme est en effet piloté par différentes strates publiques : locales, régionales, nationales.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
94
La structuration stratégique permettrait une optimisation du système d’offre par
synergie entre les secteurs : en Guyane, la conséquence du manque de stratégie est par
exemple l’inexistence d’offres complètes (package all-inclusive).
La filière actuelle se résume pour l’instant à une somme d’expériences isolées et non
coordonnées dont les résultats, s’ils ne sont pas négligeables – la filière tourisme est la
deuxième source de richesse en Guyane –, pourraient être optimisés. Ce défaut de
structuration rend la filière fragile, notamment face à la croissance du tourisme dans
les pays voisins100.
Les aides, en plus d’être insuffisantes, sont surtout trop dispersées et ne répondent pas
à une action d’ensemble. Les acteurs de la filière ont une bonne perception des efforts
publics, mais ne savent que rarement où se tourner pour trouver de l’appui (financier
ou même technique).
Quelques initiatives sont menées par différents acteurs institutionnels de la filière
mériteraient d’être appuyées et multipliées, permettant ainsi d’améliorer la
structuration de réseaux professionnels et la professionnalisation des acteurs. Parmi
les plus marquantes, nous pouvons citer :
•
les démarches de professionnalisation et d’assistance à la mise aux normes du
secteur de la restauration engagées par la CCIG ;
•
la démarche qualité engagée par le CTG, pour la fédération et l’amélioration de la
qualité des hébergements.
3. La Réunion
Le tourisme est affiché comme un secteur prioritaire porteur de développement
économique en région par les différents documents programmatiques.
Le Schéma Régional de Développement Économique de la Réunion (SRDE) adopté le
21 février 2013 entend mieux valoriser la richesse de l’île à des fins touristiques. Pour
cela, les priorités suivantes ont été définies :
•
Le soutien aux professionnels du tourisme pour favoriser le développement d’une
offre de qualité. En conséquence la région a redéfini le contour de ses instruments
d’intervention en faveur du secteur : taux d’intervention plus important,
élargissement de la base d’éligibilité des dépenses, augmentation du plafond de
subvention, élargissement des secteurs éligibles, ainsi que l’inclusion, pour
chacune des aides, d’un volet dédié à la certification ou à la labellisation
touristique.
•
La dynamisation des initiatives publiques dans le domaine des aménagements
touristiques, via une politique d’appel à projets. L’objectif est de d’améliorer les
conditions d’accueil et de développer de nouveaux sites touristiques majeurs.
•
L’accompagnement du secteur par les institutionnels du tourisme. L’objectif est de
mieux associer les professionnels à la gouvernance de la politique touristique,
autour notamment de quatre filières : le balnéaire, la randonnée, le tourisme de
nature et les loisirs touristiques.
•
Le soutien aux actions collectives et groupements de professionnels dans le
domaine du tourisme. L’objectif est de favoriser la mutualisation et la coopération
interentreprises pour la réalisation de projets communs et innovants (nouveaux
produits ou marchés par exemple).
100 Le Suriname est en train de se positionner en tant que hub régional, ce qui pourrait conduire à capter
une partie du flux de touristes. Le tourisme guyanais est actuellement en « mode rattrapage » (notamment
sur la capacité d’accueil qui rend difficile la vente de la destination, notamment pour les groupes).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
95
Le développement de la coopération régionale autour du concept « Iles Vanille »
avec pour objectif de capter une partie de la clientèle internationale de Maurice.
•
Le secteur fait l’objet d’un soutien continu depuis au moins deux générations de
programmes européens FEDER. Le PO FEDER 2007-2013 inclut ainsi une ligne « aide
aux entreprises touristiques » qui ne cible pas uniquement le secteur hôtelier (les gîtes
sont également concernés par exemple). En octobre 2012, la programmation a porté
sur 30 projets pour un montant de 5,76 M€, dont 5,43 M€ portant sur des opérations
de création, extension ou rénovation d’hôtels. Au côté du FEDER, le Conseil régional
intervient en cofinancement. Sur les opérations hôtelières, ce sont près de 3,62 M€ qui
ont été apportés par la Région.
L’État apporte également un soutien au secteur via l’exonération de cotisations
sociales patronales (LODEOM, applicable depuis le 1er juillet 2010), ou via le dispositif
de défiscalisation qui permet de réduire l’assiette fiscale (montant hors taxes de
l’investissement net de subvention). Par ailleurs, l’aide passe aussi par des dispositifs
de type Prêt Participatif à la Rénovation Hôtelière (OSEO/AFD) pour les hôtels de 15
ans et plus.
3.3.5 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ? Dans quelle mesure ?
1.
Guadeloupe
Plus que le tourisme en général, la filière écotourisme est une filière d’avenir, mais une
filière de niche, dans la mesure où il existe d’ores et déjà un écosystème d’acteurs (au
moins une quarantaine d’entreprises) positionnés sur ce marché.
Cette filière offre une grande opportunité pour le territoire du fait de la nécessité de
devoir sortir aujourd’hui d’une logique de compétitivité-coût pour s’engager dans une
dynamique de compétitivité-hors coût, axée principalement sur la qualité et
l’originalité des services offerts sur le marché.
Dans ce cadre, quatre mots-clés sont à retenir, différenciation, diversification,
spécialisation et labellisation, pour conduire un développement touristique
économiquement viable, écologiquement soutenable, humainement et éthiquement
convenable, et avec comme soubassement un contenu typiquement et spécifiquement
local du produit. De ce fait :
•
la destination Guadeloupe devra sans doute tenter de convertir une partie des
touristes de masse en touristes d’intérêts spéciaux (écotourisme, tourisme de
pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme sportif,
tourisme de mariage et de lune de miel, tourisme d’affaires…) sur la base de la
mise en place de cluster(s) « tourisme », tout en attirant d’autres visiteurs ;
•
en matière de promotion, elle devra sans doute continuer d’œuvrer pour
développer une meilleure visibilité et lisibilité de la destination sur le marché du
tourisme international et éviter une guerre des prix avec les autres concurrents de
la Caraïbe, guerre dans laquelle elle est perdante d’emblée, en raison de la forte
intensité de main-d’œuvre caractérisant les activités touristiques et du niveau
généralement plus élevé des coûts salariaux et plus généralement des coûts de
production101 aux Antilles françaises ;
•
il importe également de suivre une démarche plurisectorielle pour exploiter les
synergies entre les différents acteurs de la filière du tourisme et plus largement
avec les autres secteurs d’activité liées car cela permet de limiter la dépendance à
l’égard d’un marché extrêmement volatile.
101 Cf. Louis Dupont, Analyse empirique de la relation entre tourisme et compétitivité : l’exemple des
antilles françaises, The George Washington University, novembre 2012.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
96
Par ailleurs, au-delà des progrès déjà réalisés au cours des dernières années, certaines
actions ont rencontré des freins ou auraient sans doute besoin d’être renouvelées pour
aller plus loin :
•
l’accompagnement de l’évolution des qualifications des personnels : en dehors des
formations aux labels de qualité principalement destinées aux structures
d’hébergement, peu d’actions structurantes ont été mise en œuvre sur le plan de la
formation professionnelle continue destinée au secteur du tourisme ;
•
l’offre touristique n’est pas encore suffisamment commercialisée via Internet ; le
CTIG travaille actuellement à la mise en place d’un outil de web marketing
valorisant l’ensemble de l’offre d’activités et d’hébergement touristique de
l’archipel avec une possibilité de paiement en ligne ;
•
la situation de l’hôtellerie guadeloupéenne reste en situation de grande fragilité
économique et financière (voir le rapport de l’Inspection générale des Finances,
« Médiation de l’hôtellerie en Guadeloupe et en Martinique », Ministère de
l’Économie et Ministère du Budget, 2011) ;
•
enfin, pour aller plus loin dans l’aide à la décision et l’évaluation des politiques
publiques mises en place, il serait nécessaire de mettre en place un système de
suivi des indicateurs de réalisation (quantitatifs et qualitatifs) du SDAT ou du
SRDE partagé par le Conseil régional et leurs principaux partenaires. Ces
indicateurs devraient a minima contenir des données concernant l’emploi, et être
segmentées de façon à suivre efficacement l’évolution des différents segments de
la filière tourisme, en particulier l’écotourisme.
2. Guyane
La filière tourisme dans son ensemble peut être considérée comme une filière d'avenir
pour la Guyane. Cette activité est pourvoyeuse d'emplois et créatrice de richesses. Elle
occupe par ailleurs déjà une place prépondérante dans l’économie guyanaise.
D’ici 10 ans, il est envisageable de doubler l’activité touristique, ce qui mécaniquement
multiplierait les emplois (+ 9 000 d’ici 10 ans) 102 et les structures d’accueil touristique
(hôtels, lodges, zones aménagées…). Au sein de la filière tourisme d’ensemble,
l’écotourisme a une place éminente du fait des caractéristiques mêmes du territoire.
Pour atteindre ce résultat, le positionnement103 de la Guyane doit toutefois être
remanié :
•
l’attention doit prioritairement porter sur le confort et l’accessibilité pour les
familles, en « adoucissant » notamment l’image aventurière (masculine et
solitaire) de la Guyane ;
•
le tourisme de nature et le tourisme durable sont plus flexibles pour l’ensemble de
la filière et devront garantir le respect et la valorisation de la biodiversité et de
l’environnement ;
•
le positionnement éco-touristique peut être promu dans les zones protégées
(parcs, réserves…) ou indigènes (en prenant en compte toutefois les éventuelles
résistances culturelles).
Au-delà du travail sur le positionnement, les actions urgentes et importantes à mettre
en place consistent à :
•
Définir une stratégie d’ensemble :
102 Estimation ATOUT France.
103 Le département est aujourd’hui fortement positionné sur le tourisme de nature, d’aventure sportive et de
haute technologie (spatial), mais dispose aussi d’implantations historiques axées sur l’éco-tourisme (ex :
marais de Kaw).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
97
Sans stratégie, la filière sera contrainte de progresser par tâtonnements. Le dernier
« Schéma Régional de Développement du Tourisme et des Loisirs » de Guyane datait
de 1998. Sa mise à jour en 2012 traduit la volonté politique d’agir, lors de la prochaine
période de programmation PO-CPER – et même au delà— avec une stratégie
cohérente pour la filière.
•
Mobiliser plus de moyens en faveur de la filière :
Il est important que la Guyane puisse bénéficier du même soutien pour le
développement de sa filière touristique que les autres DOM ou la métropole. Cela
correspond, selon les chiffres d’ATOUT France, à un quintuplement des budgets
annuels alloués. Ce soutien deviendra plus lisible une fois la stratégie de la filière
effectivement établie.
•
Inciter à la structuration de la filière :
La structuration de la filière est cependant aussi de la responsabilité individuelle des
entreprises. A terme, elle doit permettre une optimisation du système d’offre.
3. La Réunion
La filière tourisme est clairement une filière d’avenir à La Réunion, et c’est une filière
porteuse d’emplois localisés sur le territoire. Le potentiel existe (richesse du
patrimoine naturel, historique, gastronomique, etc.), mais il n’est pas encore
pleinement exploité.
Les acteurs se retrouvent pour considérer qu’il y a lieu de franchir un cap. Pour cela,
de nombreux verrous subsistent et sont bien identifiés.
Il y a sans doute lieu d’abord de mieux définir le positionnement de l’offre touristique
réunionnaise dans la concurrence régionale et internationale. Comparativement aux
destinations voisines, la Réunion ne peut se vendre comme une destination
« tropicale » en tant que telle, destinée à accueillir en masse des touristes. Elle a sans
doute davantage à gagner à la construction et à la promotion de niches touristiques
diversifiées sur le marché européen, jouant sur ses différents atouts (écotourisme,
tourisme de pleine nature, tourisme historique et culturel, tourisme de santé, tourisme
sportif, tourisme d’affaires, etc.).
Cela suppose de conduire un travail partenarial avec l’ensemble des acteurs pour créer
des univers thématiques propres à chaque niche afin d’adapter le discours marketing,
de cibler les clientèles et les pays cibles d’émission. L’adoption de démarches de type
cluster avec les professionnels du tourisme, telle qu’elle est promue par le SRDE, est
sans doute pertinente.
Il y a peut-être lieu également de décliner ce positionnement sur chacun des territoires
composant l’île afin de donner une identité touristique à chacun des territoires
(spécialisation), non seulement en vue de diffuser l’activité sur tout le territoire,
d’éviter les phénomènes de concentration, mais aussi de faire de la programmation et
de l’aménagement touristique en impliquant les collectivités territoriales de l’île.
D’autres îles (Corse, par exemple, pour rester dans le cadre français, et Guadeloupe
dans une mesure encore modeste – voir ci-dessus) ont promu non sans intérêt de
telles démarches.
Dans ce schéma-là, la coopération régionale représente une réelle opportunité pour
diversifier la clientèle touristique d’agrément de la Réunion. Le partenariat avec
Maurice peut être équilibré. D’un côté, la Réunion peut tirer parti du concept d’ « Iles
Vanille » en captant des clients européens non francophones et asiatiques de Maurice
sur des courts séjours d’excursion. De son côté, Maurice peut profiter de la manne
touristique en provenance de la Réunion, et notamment des touristes résidents
réunionnais. Il reste cependant à donner à ce concept un vrai contenu pratique avec
les professionnels du secteur, et en particulier avec les transporteurs aériens
(partenariats entre compagnies).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
98
Ces efforts doivent également s’accompagner d’une montée en gamme de
l’infrastructure d’hébergement, en particulier de l’hôtellerie, mais également des gîtes
et autres hébergements touristiques (politique de labellisation et certification).
On ne doit pas oublier, en tout état de cause, que La Réunion reste, comparativement
aux Antilles ou au Golfe Persique et à l’Afrique du Nord, une destination lointaine
(11h00 d’avion) et qui, par conséquent, restera chère (hausse du prix du carburant
aérien). Il est dans ces conditions difficile d’envisager un positionnement touristique
de masse. Ce n’est d’ailleurs pas l’orientation suivie par les acteurs sur place.
Sont nécessaires en conséquence :
•
Une stratégie de diversification en direction de niches de marché : tourisme
culturel, tourisme sportif, tourisme de séminaire, tourisme affinitaire,
écotourisme, etc.
•
Une stratégie de positionnement ciblé pour mieux diversifier les clientèles :
−
le marché francophone belge et suisse à court terme, en « vendant » la
destination comme sur le marché français ;
−
vis-à-vis des cibles de clientèle européennes non francophones, un effort
de différenciation par rapport à Maurice et aux Maldives (ne pas se
positionner comme une destination « tropicale » normale) en offrant les
paysages et la nature, autour de l’argument du Volcan et des Cirques
(UNESCO) ;
−
vis-à-vis du potentiel de clientèle asiatique, via le concept des « Iles
Vanille », c'est-à-dire vendre la Réunion par le biais des autres îles
(Maurice et Maldives notamment) ; il n’y a pas en effet de dessertes
aériennes directes (passage par Maurice obligatoire), l’offre réunionnaise
est atypique par rapport à la demande asiatique (voyages de noces), les
formalités de police sont complexes (sauf via un réceptif à Maurice).
3.4 La filière Bois
La filière bois a été uniquement analysée en Guyane où la ressource est
particulièrement abondante, mais très sous-exploitée.
3.4.1 Périmètre de la filière
3.4.1.1 Définition de la filière
Histoire et positionnement
Le massif forestier tropical humide amazonien couvre plus de 90% du territoire
Guyanais, ce qui représente une superficie de près de 8 millions d'hectares et fait du
bois la ressource la plus visible et l'une des plus abondantes en Guyane. Par ailleurs,
avec près de 1300 essences répertoriées sur une même zone administrative, cette
ressource est aussi l'une des plus diversifiées au monde.
La particularité de la forêt guyanaise est d'appartenir en exclusivité à l'État,
contrairement à ce qu'on observe en métropole. La gestion durable de ce patrimoine
naturel a en majeure partie été confié à l'ONF (Office National des Forêts) de
Guyane104. Dans ce cadre, les prélèvements ne peuvent s'effectuer que sur les aires
aménagées du domaine forestier permanent, représentant une superficie totale de 2,4
millions d'hectares. Parmi les 90 essences commerciales existantes, l'office autorise
104 5,5 millions d'hectares, exception faite du massif du Parc Amazonien.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
99
annuellement l'exploitation de 47 d'entre elles pour un volume maximum de 215 000
m3105.
L'exploitation industrielle du bois est une activité relativement récente, qui n'a
réellement débuté que dans les années 1960-1970, avec l'installation des premières
exploitations forestières. Aujourd'hui, la filière bois représente la quatrième activité
économique du département et elle est devenue une des activités clés pour l'emploi et
la création de valeur par l'industrie Guyanaise, avec 210 entreprises employant
environ 900 personnes.
La croissance démographique soutenue de la Guyane (4%) conduit à des besoins
spécifiques. Le bois permet de répondre à certains de ces besoins fondamentaux,
notamment pour la construction de logements et la fourniture d’énergie électrique.
Ces points sont les deux raisons saillantes ayant conduit à l’étude de la filière bois et de
son organisation.
Une production pour un marché local, et concentrée sur un débouché, la construction
La récolte annuelle de bois en Guyane est estimée à environ 75 à 80 000 m3. Après une
première transformation, environ 30 000 m3 de bois scié et raboté sont fournis au
marché.
Plus de 90% de ce produit de première transformation sont absorbés par le marché
local où son utilisation est dédiée à trois grands secteurs :
•
BTP (environ 85%) :
Le bois scié est principalement destiné à la réalisation de charpentes, menuiseries et
revêtements pour la construction de logements, bâtiments scolaires et administratifs,
structures d'ouvrages d'art… La demande est particulièrement importante
•
Ebénisterie (environ 8%) :
L'industrie (ou l’artisanat) de l’ameublement est faiblement développé en Guyane du
fait de coûts de production peu concurrentiels. Ainsi, les produits d’importation
occupent une place prépondérante car ils correspondent davantage au pouvoir d'achat
et habitudes de consommation locaux. L’ébénisterie Guyanaise se positionne de fait
sur des niches haut de gamme.
•
Caisserie / emballage (environ 7%) :
Les exportations guyanaises de bois ne sont pas négligeables. A l'heure actuelle, il
s’agit cependant d’une activité encore accessoire pour la filière et qui concerne quasiexclusivement les bois sciés, 95% des exportations en 2009. Les principaux
destinataires de ces produits se situent sur le marché national français, en fait celui
des Antilles françaises, la Guadeloupe et la Martinique représentant plus de 90% des
volumes exportés en 2009.
Une filière concentrée sur quelques secteurs forts
En lien avec les marchés les plus développés, les secteurs forts de la filière sont ceux
de :
•
l'exploitation forestière ;
•
du sciage-rabotage ;
•
de la menuiserie et charpente.
L'artisanat apporte aussi une valeur non négligeable à l’économie de la filière bois.
Toutefois, le secteur est encore trop fragmenté pour que son activité fasse l’objet
d’une véritable évaluation.
105 Cela représente 15 400 ha exploitables annuellement.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
100
Ces secteurs sont majoritairement constitués de TPE et de micro-entreprises, avec
quelques PME dont la taille excède rarement 15 personnes. Par ailleurs, la présence de
quelques entreprises appartenant à de grands groupes, n’éclipse pas le fait que les
structures sont majoritairement indépendantes.
3.4.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire
(ou qui pourraient l’être)
Un lien nouveau se développe avec la filière de l'énergie. La biomasse permet de
générer de l'énergie, notamment sous forme électrique et calorifique. En Guyane, le
choix est fait de favoriser la synergie entre la filière bois et celle de la biomasse. En
effet, il est possible de combiner leurs activités de manière complémentaire, ce qui de
manière opérationnelle se traduit par la valorisation énergétique des produits
connexes de la filière bois (sous-produits non exploités) dans des brûleurs générant de
l'électricité.
En contraste avec ce qu’on observe en général dans la filière bois, les cinq entreprises
représentantes du secteur de l’énergie des filiales de grands groupes : ABIODIS
(Groupe Fabbri), EDF EN (Groupe EDF), ENDEL (Groupe GDF-Suez), NEOEN
(Groupe Direct Énergie) et VOLTALIA (famille Mulliez – groupe Auchan).
3.4.1.3 Entreprises rencontrées
En 2009, la MFBG106 dénombrait 210 entreprises génératrices d’environ 900 emplois
directs et d’un revenu de près de 60 millions d'euros classant cette filière à la 4ème
place des activités économiques en Guyane. La filière bois, et son lien étroit avec la
filière biomasse énergie, ont été analysés au fil des rencontres avec, outre les
institutions publiques structurantes et en position de vigie (ONF, DAF, SGAR), les
acteurs économiques privés suivants :
•
L’interprofessionnelle du bois/MFBG :
Ce groupement est un organe représentant l’ensemble de la filière bois. Il est organisé
en collèges de métiers qui discutent et échangent sur les voies de développement de la
filière.
•
Société Forestière Amazonia (exploitation forestière) :
La SFA est la société la plus active du secteur de l’exploitation forestière. Elle
développe des outils performants pour augmenter l’efficacité de la récolte du bois. Son
engagement auprès du secteur permet à l’ensemble de gagner en professionnalisme.
De manière interne, la société travaille sur de nouveaux modes de management qui
favorisent la fidélisation des ouvriers. Cette société pourrait être un exemple pour le
secteur et un moteur pour la filière.
•
Scierie du Larivot (sciage et rabotage) :
La Scierie du Larivot est l’une des plus grandes de Guyane. Son positionnement
intégré permet d’avoir une vision complète de la chaîne de valeur et illustre la
tendance (regroupement exploitation forestière/scierie).
•
CBCI (menuiserie et charpente) :
CBCI appartient au groupe VEOLIA. La société se positionne sur les marchés à haute
valeur ajoutée, et utilise pour cela du matériel à la pointe de la technologie. On peut
voir que ce positionnement n’est pas forcément le plus adapté lorsque la demande est
principalement publique avec des chantiers à faible valeur ajoutée (crise des finances
publiques).
•
Charpente Réalisation Industrielle (CRI) (menuiserie et charpente) :
106 La Maison de la Forêt et du Bois de Guyane.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
101
CRI est une société indépendante. Elle montre un dynamisme intéressant, notamment
dans le développement de nouveaux marchés (à l’export ou pour le marché local) avec
l’élaboration de nouveaux produits utilisant le bois guyanais (des maisons en kit).
•
Voltalia (biomasse) :
Voltalia est la première société à disposer d’une centrale biomasse opérationnelle en
Guyane. Nous avons donc ici un premier retour opérationnel de la coopération entre la
filière bois et la filière biomasse.
3.4.2 Enjeux identifiés
3.4.2.1 Un marché local du bâtiment à satisfaire
Le bois occupe une place importante dans le BTP Guyanais où il est utilisé pour la
réalisation de structures entrant dans la fabrication de logements, bâtiments
administratifs et éducatifs, ouvrages d'art...
La demande la plus forte, et non totalement satisfaite, se situe actuellement au niveau
des logements. En effet, les collectivités guyanaises doivent annuellement mettre sur le
marché près de 3 500 nouveaux logements sociaux pour satisfaire les besoins locaux.
Elles ne parviennent à réaliser que 40% de cet objectif et une des raisons de ce retard
provient des chantiers freinés par l’insuffisance de bois scié sur le marché local. La
production guyanaise annuelle de bois pour le bâtiment est estimée à 25 000 m3, un
volume qui répond parfois difficilement à la demande (sections, essences, quantités…)
des maitres d’ouvrage107.
Une telle situation incite dans certains cas – rares pour le moment – le secteur de la
construction à importer du bois afin de compléter ses approvisionnements. Si le BTP
s’oriente aujourd’hui principalement vers les résineux traités européens, des produits
de substitution qui soulèvent quelques questions quant à leur résistance en milieu
tropical, la filière ne néglige pas la présence d’un autre concurrent potentiel : le Brésil.
En effet, même si pour l’instant ce pays se positionne sur le marché de l’ameublement,
il pourrait aussi se montrer compétitif dans le secteur de la construction, grâce
notamment à des bois similaires et des coûts de production moins élevés.
À terme, le risque pour la filière est donc de voir ces importations complémentaires se
transformer en importations de substitution.
L’enjeu prioritaire pour la filière est donc de parvenir à satisfaire son marché local,
afin de préserver ses débouchés et, in fine, ses emplois.
3.4.2.2 Une croissance de la filière biomasse à soutenir
La production guyanaise de biomasse à vocation énergétique est pour l’instant
exclusivement issue des scieries. La filière biomasse collecte annuellement 30 000
tonnes108 de produits connexes valorisés dans la production électrique. Un tel volume
de bois permet actuellement l’alimentation d’une unité de 2 MWe, produisant
annuellement 12 GWh.
La filière biomasse ne peut toutefois pas dépendre de la seule production de connexes
par les scieries. En effet, si ces dernières parvenaient à doubler leur production de bois
sciés, elles ne réussiraient à fournir que 70 000 tonnes de biomasse, soit la
consommation de deux centrales à de 2 MWe. La filière peut heureusement espérer
compter sur un autre gisement annuel, certes moins accessible, mais sûr et plus
conséquent, provenant109 :
107 Ces derniers sont conseillés par leurs maitres d’œuvre.
108 Sur 35 000 m3 générés par l’ensemble des scieries de Guyane.
109 Voir le rapport « Étude technico-économique sur les possibilités de la biomasse pour l’alimentation
électrique de la Guyane » réalisé en 2007 par l’ONF et le CIRAD.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
102
•
des bois détruits lors de l’extraction du bois d’œuvre (environ 320 000 tonnes) ;
•
de l'ouverture de pistes en forêt (environ 23 000 tonnes) ;
•
des déboisements agricoles et urbains (environ 275 000 tonnes).
Ce gisement de près de 620 000 tonnes permettrait l’alimentation d’unités de
production totalisant 41 MWe sur tout le territoire, pour une production électrique
annuelle d’environ 250 GWh.
La problématique de l’exploitation de cette ressource, notamment de son
acheminement vers les usines de production électrique, reste entière. Cette
exploitation nécessitera une forte coordination de la filière bois, particulièrement à
son interface avec la filière biomasse.
Les destins des deux filières sont liés en tout état de cause. En effet, d’un côté la filière
bois a besoin de voies supplémentaires de création de valeur afin d’améliorer sa
compétitivité, et de l’autre, même si les nouvelles centrales de transformation de la
biomasse parvenaient à se délier de l’activité des scieries, la filière biomasse serait
toujours dépendante du secteur incontournable de l’exploitation forestière.
L’enjeu est évidemment de taille car :
•
La production électrique par biomasse permettrait de répondre au besoin de
transition énergétique de la Guyane. La mobilisation du gisement de biomasse
précédemment mentionné pourrait, d’ici 2020, permettre de couvrir une part
importante de la demande guyanaise en énergie électrique (baisse de la
dépendance énergétique et amélioration du bilan carbone).
•
Le développement de la filière biomasse permettrait aussi de développer l’emploi.
La construction d’une dizaine d’unités de production de 2 MWe conduirait par
exemple à créer 100 à 200 emplois (directs et indirects).
3.4.3 Avantages comparatifs identifiés actuellement ou potentiels
La Guyane subit la menace latente de l’importation de bois européens et brésiliens
(ceux-ci bénéficiant de coûts de production inférieurs. La filière bois dispose toutefois
d’atouts sérieux pour résister à cette concurrence.
3.4.3.1 Une commande publique motrice et support de la filière
La commande publique (logements sociaux, infrastructures) constitue le moteur de
l’économie de cette filière. Même s’il reste du chemin à parcourir pour combler tous les
besoins du BTP, l’offre de la filière bois convient tout de même bien au besoin. Le
caractère récurrent et soutenu de la demande prémunit la filière des aléas et risques
généralement constatés dans des marchés fluctuants et permet alors à la filière de
s’organiser plus sereinement et efficacement.
Au-delà de cet effet support, la présence d’un marché public intérieur fort est aussi une
protection précieuse contre les importations brésiliennes. En effet, les commandes
publiques privilégient les produits labellisés et marqués CE. Sur ce dernier point, le
marquage (CE) des produits est rendu obligatoire depuis 2008 pour tous les bois de
structure utilisés sur le territoire national. L’ensemble des scieurs et charpentiers
français s’investissent dans l’obtention de cette certification ; ce qui ne sera pas
forcément intéressant pour de nouveaux entrants brésiliens.
3.4.3.2 La certification de la filière
L’ensemble du domaine forestier permanent de Guyane est actuellement labellisé
PEFC (et bientôt FSC) ; c’est une grande première pour un territoire de l’Outre-mer
qui donne l’opportunité à l’ensemble des produits issus du bois de Guyane de pouvoir,
un jour, arborer ces labels. Ces derniers sont un gage de la qualité et de la durabilité de
la gestion de la ressource forestière. Ils auront donc un impact fortement positif sur
l’image et les débouchés des produits du bois, aussi bien sur la scène nationale
qu’internationale.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
103
À court/moyen terme, les produits du bois guyanais pourront s’aligner sur l’image
durable que présente déjà la majorité des bois européens et bénéficieront d’une
meilleure image que les bois brésiliens (dont la forêt est à moins de 1% certifiée). Ce
souci affiché pour le développement durable sera un moyen de lutter contre
l’introduction de bois étrangers sur le marché local mais aussi sur le bassin
d’exportation principal de la Guyane (Antilles).
Néanmoins, pour bénéficier du droit d’utilisation du label PEFC (ou FSC), l’ensemble
de la chaîne de valeur devra se conformer à la norme PEFC. À l’heure actuelle, seules
deux entreprises sont parvenues à obtenir leur labellisation ; l’ensemble de la filière
bois se mobilise toutefois pour permettre la certification du plus grand nombre dans la
filière (échéance prévue : 5-10 ans).
3.4.3.3 Une ressource importante, variée, et adaptée aux milieux tropicaux
Le bois issu de la forêt guyanaise est mieux adapté que le bois européen dont le
comportement est insuffisamment documenté en milieu tropical. A cela s’ajoute le fait
que la ressource forestière est abondante et très diversifiée.
D’une part, la forêt exploitable représente une superficie de près de 2,4 millions
d’hectares dont la gestion raisonnée offre à la région une visibilité à long terme (> 30
ans) sur ses disponibilités en bois. Cela facilite en théorie la planification de la récolte.
D’autre part, la forêt guyanaise dispose de 1200 essences de bois différentes, dont 70
sont actuellement utilisables commercialement110. La diversité des essences
disponibles améliore le potentiel de variété de l’offre111 et elle constitue un avantage
certain par rapport à l’offre européenne (environ 300 essences).
3.4.4 Handicaps et points faibles
3.4.4.1 Un système d’approvisionnement fragile
L’approvisionnement en bois est le principal facteur limitant le développement de la
filière. Cette situation est notamment due aux moyens disponibles pour l’extraction
puis l’acheminement des grumes.
Les exploitants forestiers sont seuls habilités à extraire du bois en forêt. Le niveau de
production qu’ils réalisent n’est toutefois pas suffisant pour couvrir la demande de
l’ensemble de l’aval de la filière. Cela a pour conséquences majeures le fonctionnement
en sous-régime de certaines scieries et l’impossibilité pour les charpentiers-menuisiers
de répondre à l’ensemble des commandes.
Les principales causes, intrinsèques au secteur, de ce faible niveau de productivité
sont :
•
Un nombre insuffisant d’acteurs :
La Guyane compte actuellement moins de 15 exploitants forestiers. Cette activité étant
économiquement risquée, elle présente un faible attrait (relatif) pour l’investissement.
•
La fragilité de la majorité des acteurs en place :
Les exploitations forestières guyanaises sont principalement des TPE montrant une
grande fragilité financière. Les moyens mis en œuvre pour satisfaire aux exigences112
élevées de la gestion durable de la forêt sont alors souvent réduits, ce qui nuit à
l’efficacité de l’activité.
110 La qualité du bois fourni est généralement mieux adaptée aux marchés soumis à des conditions
climatiques de type tropical humide.
111 La mobilisation de nouvelles essences nécessiterait toutefois un travail relativement long de validation
selon les systèmes normatifs en place.
112 Les acteurs ont une obligation de résultat.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
104
Le fait le plus marquant de la mise en place de la gestion durable est l’établissement de
la charte d’exploitation à faible impact. Elle a entrainé une forte augmentation du
besoin en stockage (saisonnalité) et en ressources technologiques, notamment pour la
géolocalisation de précision (5 tiges à retrouver par hectare) ; ce qui a participé à la
disparition de nombreuses petites structures.
Une fois extrait, le bois doit être acheminé vers des scieries qui sont souvent
concentrées dans les grandes zones urbaines. Les infrastructures sont parfois
inadaptées pour optimiser le coût de cette opération. Par exemple, les ponts ont une
résistance trop faible, ce qui oblige à multiplier les convois.
Encadré 13 une PME indépendante : la société forestière Amazonia
La SFA est une PME indépendante positionnée dans le secteur de l’exploitation
forestière et le transport de grumes. Cette société en croissance réalise actuellement un
chiffre d’affaire annuel de l’ordre de 1,5 millions d’euros. Elle se positionne par ailleurs
comme première exploitation forestière en Guyane avec à son actif en 2012 la
réalisation de près de 33% des extractions de grumes guyanais. Par ailleurs, SFA est
aussi la seule exploitation forestière à bénéficier des labels PEFC et EFI en Guyane.
La société forestière Amazonia a su mettre de nombreux atouts de son côté pour
surmonter deux des principaux freins généralement rencontrés par les exploitants
forestiers : le déficit en ouvriers spécialisés et le manque d’outils de pointe.
Pour pallier le problème de main d’œuvre du secteur, SFA participe activement à la
formation des ouvriers du secteur, en coopération notamment avec le centre de
formation de Matiti. En interne, elle travaille aussi de manière intensive à
l’amélioration des conditions de travail, notamment l’ergonomie des postes et les
conditions de vie sur les camps, afin d’assurer la fidélité de ses employés. Cela permet
aujourd'hui à la société de compter sur une dizaine d’éléments spécialisés et fidélisés
qui participent à la pérennisation de son activité.
SFA possède s’appuie aussi fortement sur une politique d’innovation agressive, ce qui
lui permet de posséder actuellement l’outil de production le plus avancé de Guyane.
Cet outil a été développé en interne grâce à de forts investissements financiers et
humains (département R&D interne). SFA participe toutefois aussi au développement
du secteur, comme l’illustre sa forte coopération avec l’ONF pour fournir à l’ensemble
des acteurs un outil de base performant avec un SIG (Système d’Information
Géographique) de haute précision.
La Société Forestière Amazonia a indéniablement un rôle moteur et exemplaire dans
son secteur. Ce rôle la pousse à entretenir son leadership, notamment au travers de
l’innovation et d’une démarche qualité continue. Dans un avenir proche, SFA ne pense
pas augmenter significativement de taille ; elle peut toutefois envisager une croissance
de son revenu grâce à des outils sans cesse améliorés et permettant une productivité
sans égal dans le secteur.
3.4.4.2 Faible lisibilité du marché et inadéquation offre-demande
Le débouché principal du bois guyanais est le BTP. Or, le lien entre la filière bois et ce
secteur est souvent compliqué à établir, du fait notamment d’un manque de
communication. Ainsi les opérateurs de la filière bois souffrent-ils souvent d’un
manque de lisibilité du marché car les commandes, du fait d’un défaut d’anticipation
des chantiers, ne tiennent pas compte des contraintes de la filière (notamment sur la
saisonnalité de l’exploitation forestière).
Par ailleurs, bien que la Guyane propose 70 essences commerciales, seule une minorité
de ces essences a la faveur des maitres d’œuvre. Cet état de choses conduit à une
pression intense sur ces ressources spécifiques et à une difficulté croissante pour
répondre à la demande, tant en termes de quantité (nombre) que de qualité (nature et
taille) de grumes.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
105
Une des missions de l’interprofessionnelle du bois consiste à améliorer l’adéquation
offre-demande en communiquant notamment sur les contraintes amont de la filière et
les nouvelles essences en cours d’essai et de validation/normalisation (via la MFBG).
3.4.4.3 Des secteurs formés par des entreprises de trop petite taille
La filière bois est constituée de peu de PME, dont la taille excède d’ailleurs rarement
15 personnes. Quelques-unes d’entre elles bénéficient de l’adossement à de grands
groupes, mais cette configuration n’est pas représentative. La faible proportion de
PME empêche la filière d’acquérir la masse critique qui pourrait lui permettre de :
•
améliorer sa capacité d’autofinancement :
Cette caractéristique est d’autant plus dommageable que l’effort bancaire d’appui à
l’investissement ou au financement de la trésorerie (pour les stocks) est inexistant en
Guyane.
•
devenir plus attractive auprès de la main d’œuvre locale :
La filière souffre pour l’instant d’un défaut d’attrait auprès des jeunes, ce qui risque de
conduire à un défaut de main d’œuvre locale pour absorber la croissance prévue de
l’activité.
3.4.4.4 Un équilibre financier précaire de la filière
La compétitivité coût de la filière semble artificiellement maintenue par deux
phénomènes principaux :
•
La vente à perte du bois sur pied :
L'ONF supporte de lourds frais d’exploitation qu’elle ne reporte pas toujours sur le
prix de vente aux exploitants forestiers. Les frais d’ouverture de pistes sont un des
principaux postes de dépenses menaçant l’équilibre financier de cet acteur clé de la
filière ; la fin programmée de ces opérations n’est pourtant pas prévue avant une
trentaine d’années.
•
Un soutien financier public prépondérant :
Le financement privé en Guyane est très faible. Ainsi le modèle financier et la
compétitivité de la filière se basent-ils de manière prépondérante sur les outils publics
(financiers et fiscaux) dont le renouvellement peut être remis en cause. La menace liée
aux choix politiques de programmation des fonds européens, mais surtout au
remaniement possible de la « défiscalisation », est bien réelle.
La compétitivité coût est décisive pour la filière. Sa remise en cause, ajoutée au
manque de capacités de production, serait une porte ouverte aux produits de
substitution européens et brésiliens, aussi bien sur le marché local que sur le bassin
d’exportation prioritaire de la Guyane (les Antilles).
3.4.4.5 Des normes parfois inadaptées
Globalement, la normalisation a plutôt eu un impact positif sur la filière en forçant la
professionnalisation du milieu (marquage CE, gestion durable). Néanmoins, les règles
de dimensionnement des éléments de structure (charpentes) restent à ajuster. En
effet, les modes de calcul européens des structures peuvent être vécus comme une
menace pour la filière car ils conduisent à des demandes parfois difficiles à satisfaire
localement, et incitant donc potentiellement à l’importation. Le sentiment est que la
spécificité locale n’est pas toujours prise en compte et que les bois tropicaux sont
actuellement exploités de manière inadaptée113.
113 Les bois tropicaux présentent des densités spécifiques (résistance et assemblage), de moins fortes
sections et des irrégularités plus fréquentes (limitant les sections et longueur de produits sciés accessibles)
en comparaison des bois européens.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
106
Un travail d’adaptation de ces règles est en cours, notamment en coopération avec la
DAAF qui travaille activement à la remontée au niveau européen des spécificités
régionales.
3.4.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et les dispositifs
d’accompagnement
3.4.5.1 Un vaste dispositif d’aides publiques
Le soutien public par la demande, précédemment souligné, est complété par un
important dispositif d’aides. Globalement, les acteurs semblent satisfaits de ces
dispositifs, dont l’utilisation pourrait, selon certaines voix, être mieux contrôlée afin
d’en optimiser l’effet.
Les dispositifs les couramment mobilisés et venant en support d’investissements
privés assez fragiles sont :
•
Les dispositifs européens :
Ce sont principalement les fonds FEADER pour les exploitations forestières et les
fonds FEDER pour le reste de l’industrie. Ces deux fonds ont principalement servi à la
modernisation des équipements. Ils sont complétés par le FSE, soutenant la formation
dans différents centre spécialisés (CFPA, RSMA, …).
3.4.5.2 Les dispositifs nationaux :
Le dispositif d’allégement fiscal est l’un des principaux leviers du développement et du
renforcement de la compétitivité industrielle de la filière bois (et du reste de l’industrie
guyanaise). Il est complété par des dispositifs plus modestes tels que les apports du
CIOM, de la DATAR/FNADT et du FED.
•
Les dispositifs mis en place par les collectivités :
Les collectivités soutiennent la filière par des investissements directs. Malgré des
efforts non négligeables, ces initiatives locales semblent souvent peu lisibles tant sur
leur portée que leur intensité.
•
Les dispositifs de soutien parapublics :
Le soutien apporté par l’AFD et OSEO, avec un système de cautionnement, est parmi
les plus remarquables et les plus appréciés.
Il faut cependant noter que la période de programmation de la majorité de ces fonds
arrive à échéance en 2013. La filière est donc actuellement en attente des nouveaux
arbitrages touchant la Guyane pour la période de programmation 2014-2020. Par
ailleurs, la menace de suppression des dispositifs d’incitations fiscales est vécue avec
angoisse par l’ensemble de la filière.
3.4.5.3 Quelques acteurs institutionnels incontournables
Au-delà des aspects financiers (financement et demande motrice du marché), le
secteur public semble relativement peu interagir avec la filière bois.
Pour des questions n’ayant pas trait à des financements, pour lesquels les guichets
sont multiples, deux interlocuteurs forts semblent toutefois incontournables pour
améliorer l’organisation de la filière : la DAAF (Direction de l’Alimentation, de
l’Agriculture et de la Forêt) et l’ONF (Office National des Forêts) :
•
La DAAF travaille à faire remonter au niveau européen les requêtes de prise en
compte de la spécificité locale (au niveau règlementaire particulièrement).
•
L’ONF est quand à lui l’acteur incontournable de la filière, car seul gestionnaire de
la forêt. Il participe à l’organisation de la filière et à la professionnalisation des
acteurs, particulièrement les exploitants forestiers.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
107
3.4.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ?
La filière bois constitue une véritable filière d’avenir pour l’économie guyanaise,
notamment sur un positionnement « bois durable » permis par le label PEFC. Elle
occupe déjà une place prépondérante dans l’économie et présente des atouts forts pour
poursuivre son développement.
3.4.6.1 La filière bois : expertise, dynamisme et structuration.
La filière s’appuie sur des entreprises ayant une expertise forte des métiers du bois et
dont la majorité présente plus de 10 ans d'expérience (chacune dans leurs secteurs
respectifs) : ces acteurs expérimentés peuvent et doivent devenir les moteurs de
l’amélioration de la filière.
Cette expertise est complétée par un dynamisme individuel non négligeable des
acteurs. Il se caractérise par de l’innovation technologique et de l’innovation de
marché. Des solutions qui seront bénéfiques pour l’ensemble de la filière sont ainsi en
cours de développement localement. On peut par exemple citer les développements en
cours sur :
•
les systèmes de cartographie et de planification d’itinéraires qui permettront
l’amélioration de l’exploitation forestière ;
•
les techniques de réalisation de lamellé-collé en bois tropicaux qui permettront
l’amélioration de l’adéquation offre-demande ;
•
la fabrication de maisons en kit à base de bois tropical de Guyane qui ouvriront le
marché privé (tourisme, logement).
Enfin, de manière collective, la coopération entre les différents acteurs permet une
meilleure communication, facteur de développement de la filière. Cette coopération
est illustrée par la création de l’interprofessionnelle du bois (2009) où l’ensemble des
professionnels de la filière, regroupés en collèges, sont représentés. Plus récemment
un outil opérationnel de l’interprofessionnelle, la MFBG, qui réalise des essais et
travaille sur la normalisation des bois de Guyane, a été mise en place.
3.4.6.2 Un potentiel de création d’emploi important (à l’échelle de la Guyane)
Les objectifs de la filière sont pour l’instant réalistes avec une exploitation ciblée de
100 000 m3, soit un accroissement de la production de l’ordre de 33%. Cette
intensification de la production devrait entraîner un développement de l’ensemble de
la filière et notamment des secteurs de l’exploitation forestière, du transport et de la
logistique des grumes, ainsi que de la maintenance des outils.
Pour la seule exploitation forestière, un rapport de l’ONF de 2007 prévoyait déjà la
création de plusieurs dizaines d'entreprises, apportant à la Guyane des
investissements financiers de l’ordre de 30M€, et près de 300 nouveaux emplois
directs et durables en 10 ans.
3.4.6.3 Deux axes prioritaires à travailler
Pour parvenir à répondre aux enjeux de la filière précédemment mentionnés (marché
du bois d’œuvre et de la biomasse), la filière bois doit aujourd’hui renforcer la capacité
du chaînon limitant actuellement la chaîne de valeur et améliorer l’adéquation entre
l’offre et la demande.
•
Le renforcement de la capacité de l’exploitation forestière ne peut se faire qu’avec
une meilleure professionnalisation du secteur : celui-ci manque globalement
d’efficacité sur des problématiques d’ordre technique (outils vieillissants, difficulté
de recrutement …) et financier (professionnalisation de la gestion financière,
consolidation de la trésorerie pour le financement des stocks …).
•
L’amélioration de l’adéquation offre-demande est accessible par une meilleure
communication sur les qualités du bois de Guyane auprès des maitres d’œuvre et
d’ouvrage (inciter à la diversification de la demande), ainsi que par la qualification
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
108
active d’un nombre d’essences plus élevé (proposer une meilleure diversité de
solutions).
Ces deux pré-requis conditionnent l’intensification de l’activité de la filière aussi bien
pour répondre au marché du bois d’œuvre que le marché de la biomasse.
3.5 La filière Bâti tropical
La filière « bâti tropical » a été retenue pour la Réunion. Il convient cependant de
souligner qu’elle aurait pu l’être également en Guadeloupe dans la mesure où quelques
laboratoires de recherche travaillent dans ce domaine, qui est par ailleurs aux marges
du pôle Synergîle.
3.5.1 Périmètre de la filière
3.5.1.1 Définition de la filière
Globalement, la filière peut être définie comme comprenant la création, la
restauration, la rénovation ou la réhabilitation de bâtiments, avec prise en compte des
spécificités tropicales (avec les risques afférents : cyclones, termites, …) et des
problématiques actuelles de développement durable et de maîtrise de l’énergie (dans
un environnement où la ressource énergétique est rare et chère).
Concrètement, la filière bâti tropical ou bâtiment à faible impact environnemental
dans un contexte tropical recouvre deux grands champs d’activités :
•
les matériaux et la construction : c'est-à-dire les matériaux bio-sourcés issus de
ressources végétales renouvelables, recyclables et générés à partir de ressources
locales ; et les acteurs du bâtiment qui mettent en œuvre ces matériaux ;
•
les systèmes énergétiques qui regroupent les équipements contribuant à la
maitrise de l’énergie (par exemple : équipements de régulation, services
d’optimisation de la consommation énergétique…), l’utilisation d’énergies
renouvelables (ENR) dans le bâtiment (photovoltaïque intégré dans le bâti,
chauffe-eau solaire) au travers des équipements permettant leur intégration au
bâti. Cela inclut également les services de diagnostic énergétique.
La chaîne de la valeur de la filière peut être décomposée autour des métiers suivants :
•
les fabricants et/ou distributeurs de matériaux pour la construction ;
•
les fabricants, distributeurs et/ou installateurs d’équipements contribuant à la
maîtrise de l’énergie ;
•
les entreprises de bâtiments et travaux publics ;
•
les services d’ingénierie et de conception (bureaux d’études, architectes) ;
•
les aménageurs et promoteurs publics et privés ;
•
les propriétaires de patrimoine bâti, en particulier les collectivités publiques (par
exemple la Région pour le parc de lycées).
3.5.1.2 Liens éventuels avec d’autres filières prises en considération sur le territoire
(ou qui pourraient l’être)
La filière bâti tropical entretien des liens étroits avec la filière ENR dans sa
composante photovoltaïque, chauffe-eau solaire et smart grids. La filière bâti tropical
est sans doute d’ailleurs l’un des points d’appui essentiels de la diversification des
acteurs du solaire.
3.5.1.3 Entreprises rencontrées : bref descriptif et évaluation de leur représentativité
L’éventail des interlocuteurs rencontrés permet de couvrir l’ensemble des intervenants
de la filière, ainsi que les problématiques propres à chaque branche de la filière.
Ont été rencontrés :
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
109
•
des acteurs institutionnels : SGAR, Conseil Régional
•
des organisations représentatives de la filière : Association pour le Développement
Industriel de la Réunion (ADIR), NEXA, Société Immobilière du Département de
la Réunion (SIDR), École d’architecture du Port, CIRBAT
•
des entreprises : CBO Territoria, Pierre & Bois, Socotec Réunion
3.5.1.4 Quelques chiffres et données de contexte
On rappelle qu’au niveau national, la filière bâtiment dans son ensemble (incluant les
phases de construction et d’usage des bâtiments) représente 310 000 entreprises, et
1,3 millions d’emplois. A La Réunion, le secteur représente 17 000 emplois directs et
un chiffre d’affaires de l’ordre de 1,3 milliards d’euros en 2011. Ces effectifs restent
nettement en dessous du plus haut point atteint en octobre 2008 (près de 25 000
salariés)114. Les TPE dominent très fortement : 94% des entreprises ont moins de 10
salariés (dont 63% aucun), et 1% seulement a plus de 50 salariés.
Les années 2009 et 2010 auront marqué une chute sévère et historique de l’activité du
BTP, suite au choc économique. L’allègement des règles de défiscalisation, le recul de
la commande publique, la fin des grands chantiers ont pesé sur la construction dès
octobre 2008.
L’année 2011 se solde par un chiffre d’affaires du BTP estimé autour de 1,35 milliard
d’euros. La situation a cessé de s’aggraver, mais le bilan économique reste critique. Le
logement social et l’augmentation de la commande publique intervenue en 2011 ont
permis un regain de l’activité (graphique1).
En effet, la production de logements sociaux a fortement augmenté depuis 2009,
portée par de nouveaux modes de financement et de production.
Côté financement, la Loi de développement économique pour l’outre-mer (LODEOM)
permet de compléter la ligne budgétaire unique (LBU) par un investissement en
défiscalisation.
Côté production, depuis 2008, les bailleurs ont eu la possibilité, dans le cadre du plan
de relance, d’acquérir des opérations en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA)
auprès d’opérateurs privés. Le logement social représente aujourd’hui plus du quart de
l’activité de la filière.
114
INSEE,
Le
BTP
se
stabilise,
http://www.insee.fr/fr/insee_regions/reunion/themes/revue/revuehs12/revuehs12_BTP.pdf
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
2012,
110
En revanche, la production de logements privés, hors opérations vendues aux bailleurs
sociaux, a poursuivi sa baisse en 2011.
La commande publique de manière générale (en bâtiment et travaux publics) aura
connu en 2011 un regain d’activité. Comparativement aux années 2000 – 2008, au
cours desquelles la commande publique représentait environ la moitié de l’activité de
la construction, sa part a très fortement augmenté depuis deux ans pour représenter
plus de 65 % de l’activité de la filière en 2011.
3.5.2 Enjeux identifiés
Les enjeux en termes d’emploi sont évidemment importants, du fait du poids du BTP
dans l’économie régionale.
On insistera donc ici pour l’essentiel sur les enjeux en termes de marchés.
3.5.2.1 Marché local
L’enjeu majeur de la filière BTP dans son ensemble, et de la filière bâti tropical en
particulier, est avant tout la réponse à la demande intérieure, sous la conjugaison de
trois facteurs :
•
les besoins en logement du territoire (1500 logements sociaux / an en 2007-2008,
4500 / an en 2011) et les besoins en équipements structurants (croissance
démographique) ;
•
les changements de règlementation fixant de nouvelles exigences (c’est le cas par
exemple dans le domaine des chauffe-eau solaires imposés pour toute
construction neuve par la RTAA-DOM) ;
•
l’état du patrimoine bâti qui présent un retard important en matière de
consommation énergétique ; en effet :
« Un bâtiment tertiaire moyen sur l’Île consomme un équivalent de 100 à 150
kWh/m2/an d’énergie électrique alors que les exigences européennes de 2012 en
matière de bâtiment basse consommation précisent que tous les bâtiments devront
consommer en métropole 50 kWh en énergie primaire, soit 22 kWh/m2/an d’énergie
électrique. Lorsqu’elles sont appliquées à La Réunion, ces exigences descendent à 15
kWh/m2/an »115. Il y a donc un enjeu de rénovation du patrimoine existant. En
matière de chauffe-eau solaire dans le logement social, la Société immobilière du
Département de la Réunion (SIDR, société d’économie mixte) a équipé 9500
logements depuis 2000 pour un parc de 22000 logements).
Pour mémoire, les projections au plan national menées dans le cadre du Grenelle de
l’Environnement font état d’un potentiel de création nette de valeur et d’emplois de
l’ordre de 10% sur la filière BTP dans son ensemble116.
La filière « bâti tropical » dispose d’un fort potentiel de développement intérieur avec
des acteurs actifs tout au long de la chaîne de la valeur.
Dans le domaine des matériaux, les matériaux traditionnels sont principalement
importés (béton, placoplâtre, bois…). La biomasse locale (déchets végétaux) est très
peu exploitée pour la construction, tandis que la filière biomatériaux n’existe pas.
Bourbon Isolation Écologique importe de la ouate de cellulose recyclée. Haclave Océan
Indien développe l’intégration de scories (pierre de lave) en fort pourcentage dans le
béton permettant de fournir un matériau fabriqué localement, renouvelable et
recyclable. Ce projet est toutefois en phase préindustrielle de développement sur la
base d’un procédé breveté, mais connaît des difficultés pour se financer. D’autres
115 Etude sur la caractérisation des filières de la croissance verte à La Réunion, DEAL, 26 octobre 2012
(Aprim & Associés).
116 Les filières industrielles stratégiques de l’économie verte, CGDD, mars 2010
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
111
projets sont à l’étude (en phase de R&D) sur l’utilisation du Chryptomeria (bois local)
pour de l’aggloméré (sans que cela ait nécessairement un fort potentiel de
développement faute de ressources suffisantes), et du bambou à croissance rapide
(École d’Architecture).
Dans le domaine des systèmes énergétiques, Schneider Electric distribue ses
équipements, ses solutions et services pour optimiser la transmission, la conversion et
la gestion de l’énergie. TEEO développe aussi des systèmes de gestion électrique. Les
entreprises du solaire (COREX par exemple) développent des solutions de production
d’électricité solaire à partir de photovoltaïque couplé à du stockage chez les
particuliers.
Par ailleurs, un savoir-faire se développe sur les techniques de construction
spécifiques au milieu tropical (par exemple pour la ventilation naturelle des bâtiments
en alternative à la climatisation). Arcelor Mittal Réunion développe sur place des
systèmes de ventilation sous les toitures, l’École d’Architecture a déposé des brevets
sur des systèmes de tours d’extraction (mis en œuvre dans le cadre de la ville nouvelle
aménagée par CBO Territoria sur la commune de Sainte-Marie) ; Eco Tôle Réunion
réalise des études et des pliages de « tôles tropicales ».
Dans le domaine de la climatisation, l’ADEME a accompagné un projet du PREBAT
sur la climatisation des locaux tertiaires (notamment bibliothèque, amphithéâtre…) en
vue d’en réduire l’usage, voire de le supprimer en utilisant des principes constructifs
adaptés au climat tropical. Autour de ce projet, l’ADEME a structuré un réseau
d’acteurs associant les architectes, les BET (LEU par exemple), les entreprises locales
de construction, CBO Territoria (aménageur).
Côté aménageur, la SIDR développe des projets de bâtiment durable dans le domaine
du logement social. CBO Territoria, société d’aménagement privée, développe un écoquartier sur le site Beauséjour (Commune de Sainte Marie) qui inclut la pose de CES,
des équipements de stockage de froid sur les bâtiments professionnels, des systèmes
de circulation de l’air dans les bâtiments et d’économie de consommation en eau, etc.,
intégrés dès la phase de conception du bâtiment et du quartier dans son ensemble, ce
qui permet dans une certaine mesure de maîtriser les coûts (même si cela reste 10 à
15% plus cher que les constructions normales).
Dans le domaine de la recherche et développement et de la formation, la Réunion
dispose également d’acteurs dédiés.
A l’Université, deux laboratoires, le PIMENT et le LPBS, sont concernés et conduisent
notamment des projets ANR (programme PREBAT et HABISOL).
La Chambre des Métiers a créé le CIRBAT, labélisé pôle d’innovation pour les TPE et
l’Artisanat par le Ministère de l’Industrie (DGCIS) sur le bâti tropical. Le CIRBAT
effectue des travaux de recherche appliquée et dispose d’un matériel de test et de
contrôle mis à disposition des acteurs privés (par exemple dans le domaine du
traitement contre les termites).
De son côté, l’IUT a développé un pôle de formation dans le domaine de la maîtrise de
l’énergie et des ENR ; tandis que l’école d’ingénieurs ESIROI propose une spécialité
« ingénieur construction durable ».
L’École d’Architecture (110/120 étudiants pour 35 enseignants) est également très
active et bien reconnue sur le domaine. Antenne de l’ENSAM (Montpellier), elle
travaille régulièrement avec les acteurs locaux (SEM, CBO Territoria, les collectivités,
les bureaux d’étude….) et a noué des accords de coopération avec le CEA sur
l’intégration au bâti des panneaux solaires. Depuis peu, l’École développe des
collaborations à l’échelle de l’Océan Indien.
Des travaux sont conduits également dans le domaine de la certification.
L’ACERBAT, en lien avec le CIRBAT, travaille à la certification « tropicalisée » de
matériaux et procédés de construction, et tient à jour une « matériauthèque ». Les
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
112
industriels ont créé le label GEOCERT qui certifie que les produits sont adaptés à
l’environnement climatique réunionnais (humidité, U.V., cyclones et termites).
ACERBAT (Association pour la Certification des Entreprises Réunionnaises du
BATiment) est issue du programme d’action du contrat de filière et elle a été fondée en
2010 par les partenaires locaux (ADIR, Chambre des Métiers, CERBTP). Elle est
positionnée comme un organisme d’évaluation de la conformité des produits et
services du bâtiment en milieu tropical auprès des organismes de certification locaux
et nationaux. Elle porte le projet d’un centre d’expertise technique du bâtiment
(objectif visé : un CSTB pour les matériaux adaptés au climat tropical) favorisant la
mise en œuvre, l’innovation et l’adaptation des règles de construction au contexte
local. Elle a donc comme objectifs de permettre le développement industriel de
procédés et matériaux nouveaux et leur usage dans la production des bâtiments
publics et privés.
L’association est gestionnaire des marques de qualité des produits et services
GEOCERT® et artisan Qualité® et elle a mis en place des partenariats avec des
instances de normalisation et des organismes techniques et scientifiques, afin de
participer activement, en liaison avec les acteurs locaux, à l’adaptation des textes
normatifs.
L’association sert donc de relais local d’information des certifications existantes à la
Réunion, met à disposition des moyens d’évaluation locaux nécessaires pour assurer
les contrôles prévus dans les référentiels de certification (identification des auditeurs
et inventaire des installations d’essais), et propose des adaptations des référentiels de
certification aux contraintes environnementales locales en complémentarité avec la
certification concernée pour valoriser cette adaptation au contexte réunionnais (en
associant la marque GEOCERT®).
Par ailleurs, le Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement (CAUE974)
anime un centre de Ressources Qualité Environnementale du Cadre Bâti, enviroBATRéunion qui vise à diffuser les bonnes pratiques, organiser des formations à
destination des acteurs du BTP et des collectivités, et des ateliers techniques avec la
profession.
3.5.2.2 Marché extérieurs
Les acteurs identifient clairement de belles opportunités à l’international pour le
savoir-faire réunionnais dans le domaine du « bâti tropical durable ».
Des besoins communs émergent sur tout le pourtour de l’Océan indien, notamment
dans le domaine de la maîtrise énergétique des bâtiments. Les programmes intégrés
nationaux et les programmes intégrés régionaux du FED flèchent les investissements
sur des bâtiments plus durables.
La Réunion dispose de l’ensemble des acteurs sur la chaîne de la valeur et est donc en
capacité de proposer des offres intégrées de services, de la conception à la réalisation,
intégrant les aspects matériaux et gestion énergétique des bâtiments. Il reste
cependant à : (i) développer localement cette offre de services autour d’opérations
exemplaires ; (ii) structurer cette offre, et la promouvoir dans une approche globale à
l’échelle du bâtiment ou d’un quartier.
Dans le domaine des chauffe-eau solaires, ce potentiel commence à se réaliser avec le
projet d’implantation du groupe Dijou en Afrique du Sud pour la production de CES,
et le positionnement de Solar Prod sur le marché mauricien. Dans les deux cas, la
stratégie adoptée est la production locale de CES dans les pays visés (Solard Prod
fabrique à la Réunion) pour être compétitif vis-à-vis de la concurrence chinoise.
Par ailleurs, l’École d’Architecture est à l’initiative de l’association IONAS (Indian
Ocean Network of Architecture Schools) qui regroupe des écoles d’architecture
d’Afrique du Sud, de Malaisie, de Singapour, d’Inde et d’Australie. L’initiative
démarre, l’objectif à terme est de développer les échanges d’étudiants, les échanges de
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
113
connaissances (à travers des projets communs). Un accord est également signé avec
Maurice pour la mise en place d’un Master à l’Ile Maurice.
L’ADEME anime également un programme d’échanges avec Maurice (issu d’un accord
intergouvernemental signé par le Gouvernement mauricien et le Ministère français de
l’Outre-mer) sur l’efficacité énergétique des bâtiments et pour faire du transfert de
savoir-faire vers les architectes et les bureaux d’études mauriciens (organisation de
séminaires thématiques en présence d’acteurs mauriciens mais également de sudafricains).
La mise en place de ces réseaux d’experts est a priori prometteuse pour générer dans le
court-moyen terme des échanges d’affaires.
3.5.3 Avantages comparatifs actuels ou potentiels
Sur le marché local, la construction durable « tropicalisée » revient 10 à 15% plus cher
(comme c’est le cas en métropole) à condition d’adopter des approches intégrées dès la
conception des ouvrages, ce qui permet ainsi de maîtriser les coûts.
Toutefois, les avantages comparatifs de l’utilisation de ce type d’approches se situent à
différents niveaux :
•
utilisation de ressources locales pour les matériaux, à la place d’intrants importés
(exemple des scories de lave à la place du béton), avec la possibilité de développer
des filières locales de production ;
•
réduction de la facture énergétique des bâtiments (avec un amortissement du
surcoût sur de longues périodes, généralement sur 15 à 20 ans) ;
•
participation à la réduction des émissions de CO2 et à l’adoption de démarches
environnementales (exemple de la limitation de l’usage conforme aux exigences de
la règlementation et des objectifs de l’UE).
A l’international, l’avantage comparatif de la Réunion sur le bâti tropical tient à la
présence d’acteurs tout au long de la chaîne de valeur de la filière, potentiellement en
capacité de proposer des offres de services intégrés.
Elle tient également à un potentiel de recherche et développement dans le domaine lié
aux travaux de l’université et de l’École d’Architecture, ainsi que du pôle CIRBAT.
Les travaux sur la certification des matériaux (CIRBAT et ACERBAT) constituent
également des avantages intéressants pour proposer des référentiels et des normes de
certification aux pays voisins susceptibles d’utiliser les matériaux utilisés à La
Réunion.
En revanche, il est clair que l’exportation de produits fabriqués à La Réunion (de type
CES) n’est pas suffisamment compétitive vis-à-vis de la concurrence des produits
chinois dans la zone. L’alternative est l’implantation dans les pays de la zone pour
développer des unités de production.
3.5.4 Handicaps et points faibles
La filière est cependant confrontée à différents freins qui pénalise son développement
tant sur le marché local que dans une logique d’expansion à l’international :
•
les acteurs du « bâti tropical » demeurent encore peu nombreux et isolés sans
interaction suffisante entre eux, ce qui fait qu’ils irriguent encore peu la filière BTP
dans son ensemble ;
•
la plupart des projets en cours portant sur des innovations concernent
majoritairement des constructions nouvelles, alors que les besoins de rénovation
sont très importants ;
•
les projets démonstrateurs de bâtiments passifs ou à énergie positive sont encore
peu nombreux, faute d’une dynamique suffisante ; l’approche globale et
transversale des problématiques MDE, et plus largement de la construction
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
114
adaptée aux contraintes tropicales est encore peu mise en œuvre, même si les
différents acteurs de la chaîne sont présents.
•
•
le sujet est encore insuffisamment porté par la commande publique pour initier
cette dynamique et conforter les compétences et savoir-faire développés
localement ; le domaine de la rénovation thermique du parc de logements sociaux
pourrait fournir un point d’appui pertinent pour initier à une grande échelle le
regroupement des acteurs et consolider la croissance de la filière ; on notera que
l’agence AFD de Saint-Denis étudie actuellement la question sur une cible de 5600
logements sociaux sur la période 2014-2020 et a d’ores et déjà identifié 5 postes de
travaux qui pourrait intéressés la filière :
−
les travaux de remise aux normes (réhabilitation de façades, travaux de
confort…) ;
−
les travaux relatifs à l’énergie et à l’eau (pour maitriser les consommations
d’énergie et d’eau dans les parties communes) ;
−
les CES (obligatoires) ;
−
la résidentialisation (travaux par exemple sur la mise en valeur des parties
communes) ;
−
et le désamiantage ;
l’inertie est également forte sur l’usage de nouveaux matériaux de la part des
fabricants de béton et des importateurs de matériaux pour la construction.
A l’international, les freins sont importants :
•
les entreprises du domaine sont petites et peu structurées en interne pour aller à
l’export, d’autant que le marché local suffit pour le moment à les faire vivre ;
•
les barrières règlementaires et de certification sont importantes, d’où l’importance
de développer une expertise réunionnaise spécifique sur la certification et de se
mettre en réseau avec des organismes similaires dans les territoires voisins pour
influer sur la production des normes ;
•
le manque de structuration de l’offre réunionnaise et le déficit d’approche
mutualisée entre les acteurs freine le développement sur des territoires voisins
prometteurs comme Maurice.
3.5.5 Evaluation du rôle joué par les politiques publiques et dispositifs
d’accompagnement
Le caractère incitatif des politiques publiques en région est jugé insuffisant. Les
acteurs plaident pour une politique régionale de la commande publique qui fasse
davantage de place à la question du bâti tropical.
Par ailleurs, la visibilité des aides à l’export et d’accompagnement à l’international est
jugée faible.
3.5.6 La filière considérée est-elle une filière d’avenir ?
La filière bâti tropical est clairement une filière d’avenir porteuse d’emplois locaux,
avec une possibilité d’exportation de services et d’ingénierie. D’ores et déjà, des
pionniers se positionnent à l’international dans les CES, mais aussi quelques bureaux
d’études techniques.
La Réunion dispose d’acteurs situés sur l’ensemble de la chaîne de la valeur de la
filière, y compris sur la partie R&D et certification. Elle est en capacité de drainer un
secteur d’activité majeur de l’île, le BTP dans son ensemble, et de jouer du croisement
avec les acteurs « solaristes » en région et les quelques PME positionnées sur les
smart grids.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
115
Cependant, son développement nécessite différents types d’accompagnements et
d’actions :
•
Il y a lieu d’accompagner une démarche de structuration de type « cluster » autour
d’une feuille de route pour la filière afin de coordonner les différents acteurs qui
ressortissent de différents domaines : BTP, smart grids, ENR mais également
matériaux et gestion des déchets (recyclage des matériaux de construction). Cette
structuration constitue le préalable à une démarche cohérente d’approche des
marchés régionaux (Maurice, Seychelles en particulier).
•
Il y a lieu de développer des compétences pour les phases de construction
(utilisation de nouveaux matériaux, intégration des pratiques MDE), mais
également dans les phases d’exploitation et de maintenance des systèmes de
gestion intelligente des parties énergétiques des bâtiments, et dans le domaine de
la certification, de l‘audit et du conseil.
•
Il y a lieu de mener une politique d’accompagnement public incitative et de long
terme, notamment via la rénovation thermique du patrimoine public, et l’inclusion
dans les marchés publics de lots ciblés sur des champs d’activités en relation avec
le bâti tropical. De telles actions seront structurantes pour amener les gros
opérateurs à s’intéresser au bâtiment tropical durable, et appuyer le
développement des savoir-faire locaux. Pour cela, les entreprises du secteur
considèrent qu’il y a des actions de sensibilisation à l’égard des maîtres d’ouvrage
pour comprendre les approches des coûts globaux des projets sur 10 à 15 ans, et
non pas raisonner sur le simple surcoût de construction immédiat.
•
Il y a lieu également d’appuyer les actions de R&D sur de nouveaux matériaux en
particulier sur l’usage de la biomasse pour la construction, et en relation avec ces
travaux de soutenir les processus de certification (ACERBAT), et le financement
de l’industrialisation des procédés (financement de l’amorçage).
•
Il y a lieu enfin de diffuser les pratiques pour qu’elles irriguent l’ensemble du
secteur. Des grands du secteur de la construction sont pour le moment absent de
ces évolutions (ex : le groupe Apavou).
4. Synthèse sur les facteurs de compétitivité et les avantages
comparatifs
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
116
4.1 Guadeloupe :
les
filières
Éco-tourisme,
agroalimentaires et Énergies renouvelables
agriculture-Industries
La filière Eco-Tourisme en Guadeloupe
Points clés de la filière
Points clés
Maturité
Émergente
Potentiel
de
création d’emplois
Fort – Moyen (effets directs importants sur les autres
branches de l’économie locale : commerce, transport,
services,
et
surtout
l’agriculture,
la
pêche
et
l’agroalimentaire, ainsi que le bâtiment et la construction, et
en particulier le bâti tropical durable)
Perspective
Moyen terme
Positionnement
Régional
Demande
Demande spécifique
mesurable à ce stade
dans
l’éco-tourisme
difficilement
Données sur le Tourisme en général : 417 000 touristes de
séjour ont été accueillis en 2011 pour une dépense totale
estimée à 419 millions d’euros
On estime néanmoins que les groupes d’écotouristes restent
généralement plus du double de temps que d’autres touristes
à l’intérieur du territoire, dépensent plus et sont composés de
2 à 3 personnes en moyenne
Importance de la
filière économique
Filière considérée comme le premier secteur économique
L’emploi salarié lié au tourisme est estimé à 5,4 % de l’effectif
salarié total dont un tiers dans l’hébergement (la restauration
étant le deuxième secteur d’activité concerné par le tourisme)
Les données sur le tourisme laissent apparaitre une
progression de la richesse produite du territoire en lien avec
la diversification vers l’écotourisme, mais l’appareil
statistique dans ce domaine n’est pas développé et ne permet
pas d’identifier clairement le nombre d’emplois dans la filière
Excellence
scientifique
Mise en place d’une Licence Tourisme à l’Université AntillesGuyane
Observatoire pour observer et analyser les tendances (CTIG)
Dynamisme
l'innovation
de
A ce stade, la dynamique porte surtout sur un travail effectué
par le comité du Tourisme pour réaliser un diagnostic
déclinant offre touristique d’activités (balnéaire, culture, vert,
gastronomique…)
Les investissements sont centrés sur la rénovation et la
création d’hébergements
Partenariat Région Guadeloupe - CCI –IG - CCI du Var pour
la transposition d’un label environnemental dans le cadre du
programme « Itinéraire Eco 3 »
Feuille de route et
Le schéma de développement et d’aménagement touristique
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
117
objectifs
terme
long
(SDAT) de la Guadeloupe a été approuvé par la collectivité
régionale lors de l’assemblée plénière du 24 septembre 2009.
Cet outil d’aide à la décision permet de définir les grandes
orientations de développement touristique en précisant ses
implications en termes de développement économique et
d’aménagement du territoire. Office du Tourisme de la
Guadeloupe
Signatures de conventions d’objectifs de développement
touristique par territoire
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière Eco-­‐Tourisme en Guadeloupe Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 3 Feuille de route et objecBfs long terme 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
118
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
•
•
•
•
Richesse de la biodiversité de la
Guadeloupe
Forte proximité avec la France
hexagonale qui constitue le marché
privilégié du territoire
Structuration et la montée en gamme
de l’offre en hébergements /
développement de nouveaux modes
d’hébergement
Gouvernance d’ensemble en place et
fonctionnant plutôt bien
Nombreuses actions phares montrant
la pertinence des ambitions et des
axes recommandés par les schémas
régionaux avec une déclinaison de la
stratégie par territoire
La présence d’acteurs positionnés sur
le segment de l’éco-tourisme
Etc.
Opportunités
Faiblesses
•
•
•
•
•
•
L’offre globale d’hébergements est
vieillissante malgré les progrès
réalisés et elle reste très concentrée
Absence de liaisons aériennes
directes avec les principales capitales
européennes (à l’exception de Paris)
La structuration de la filière
écotourisme n’est pas encore aboutie
Aucune
action
de
formation
structurante n’a été réalisée, ni sur
l’ensemble de la filière tourisme, ni
sur la filière écotourisme, en dehors
de l’organisation de formations aux
labels de qualité
Manque global de développement
d’une logique de cluster du tourisme
Etc.
Menaces
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
119
d’emploi et de valeur élevé
Offre globale de structures touristiques (musée, parcs et jardins, etc.)
Présence de nombreux commerces : centre commerciaux, marchés, boutiques, échoppes…
marchés, boutiques, échoppes…
Commercialisation et promotions assurée
(hors pouvoirs publics) par le CTIG et agence de
voyages
hébergement,
restauration, guides touristiques,
fournisseurs de services de divertissement,
transports et location de voiture.
Présence d’une quarantaine d’entreprises au-moins
dans le secteur eco-tourisme
régionale (Air Antilles Exress)
Desserte routière : la Conseil Général incite à la création de 11
groupements de transporteurs (près de 70 lignes de bus)
Desserte maritime : Grand port maritime de la Guadeloupe
(ex Port autonome de la Guadeloupe) – e rang national en termes
de passagers
Formations : quelques initiatives (hôtellerie, restauration…)
Appui des pouvoirs publics : CTIG, Chambre de Commerce et d’Industrie des
Îles de Guadeloupe, Syndicat d’initiatives, Parc national de la Guadeloupe…
•
•
•
•
•
Existence d'un gisement de clients à
« convertir » (habitants, croisiéristes,
touristes régionaux, une partie des
touristes de masse…) en touristes
d’intérêts spéciaux (écotourisme,
tourisme de pleine nature, tourisme
historique et culturel, tourisme de
santé, tourisme sportif, tourisme de
mariage et de lune de miel…)
Développement d’une logique de
cluster du tourisme permettant
d’inscrire
plus
généralement
l’écotourisme dans l’ensemble des
segments de la filière tourisme
Développement
d’une
meilleure
visibilité et lisibilité de la destination
sur
le
marché
du
tourisme
international en évitant une guerre
des prix avec les autres concurrents de
la Caraïbe
Engagement dans une démarche
stratégique
plurisectorielle
pour
exploiter les synergies entre les
différents acteurs de la filière
tourisme/Eco-tourisme
et
plus
largement avec les autres secteurs
d’activité
Renforcement de l’image du tourisme
en
Guadeloupe
(positionnement
marketing…).
•
•
•
Maintien dans une logique de
compétitivité-coût et prise de retard
dans le développement d’une
dynamique de compétitivité-hors
coût, axée principalement sur la
qualité et l’originalité des services
offerts sur le marché
Perte
d’attractivité
liée
au
vieillissement
des
structures
d’hébergements
Perte de visibilité de l’offre
touristique liée aux faiblesses de la
commercialisation
d’une
offre
différenciée, diversifiée, spécialisée
et labellisée
La filière Agriculture – Agro-alimentaire en Guadeloupe
Points clés de la filière
Points clés
Maturité
Mature
Potentiel
de
création d’emplois
Fort
Perspective
Court terme, Moyen terme, Long terme
Positionnement
Régional
Demande
Les enjeux sont ceux de la sécurité alimentaire et d’un
meilleur approvisionnement du marché local, tant en
quantité qu’en qualité et régularité, et donc celui de la
réduction de la dépendance alimentaire vis-à-vis de
l’extérieur, qu’il s’agisse des importations en provenance de
métropole ou bien de celles en provenance d’autres pays.
Une situation contrastée en terme d’autosuffisance pour
quatre ensembles : fruits et légumes ; viande et produits de
l’élevage ; produits de la pêche et produits de l’industrie
agroalimentaire.
Une perception favorable qu’ont les consommateurs locaux
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
120
des produits dits « pays »
Lien important avec la filière des énergies renouvelables (en
particulier la biomasse) et celle des transports (risque d’une
rapide saturation du réseau routier)
Importance de la
filière économique
Environ 4 % de la valeur ajoutée (secteur agricole : 1,1 % en
2010 ; secteur agro-alimentaire : 2,8 % en 2010).
Le secteur agroalimentaire concentre le quart
entreprises, avec une très forte prédominance des TPE.
des
L’emploi salarié dans l’agriculture est mal connu.
Excellence
scientifique
Des compétences de recherche
local (INRA, CIRAD, BRGM…).
présentes
au
niveau
Des équipes de recherche reconnues en agronomie présentes
sur le territoire
Dynamisme
l'innovation
de
De nombreux exemples de projets innovants, par exemple à
l’export
Projet de création d’une Technopole de Guadeloupe qui
devrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2013, et dont
l’agroalimentaire serait une des cibles privilégiées
Projet de création d’une halle technologique dans le secteur
de l’agro-transformation
Feuille de route et
objectifs
long
terme
La stratégie a notamment été portée par le SRDE adopté en
2006 et actuellement en cours d’évaluation.
Elle s’est aussi appuyée sur la SRI adoptée fin 2009.
Les travaux portant sur la prochaine génération de stratégies
régionales en matière d’innovation sont en cours de
réalisation en Guadeloupe (SRI-SI ou S3 impulsées par la
Commission européenne) ; en Guadeloupe, la SRI 2009
accordait une place importante à la filière.
La stratégie est aussi en cours de mise à jour dans le cadre de
la préparation des Programmes opérationnels 2014-2020.
Leviers du développement à court et moyen terme
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
121
Socle du développement à moyen terme Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
122
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Dynamisme de l'innovaBon De nombreux avantages comparatifs, notamment à l’export autour des éléments suivants : la production
à contre-saison, la qualité et typicité des produits, le
positionnement sur le haut de gamme et les
marchés du luxe, l’innovation non-technologique
(marché, packaging)
Atouts de la région 5 4 3 2 1 0 Une filière fortement portée par la demande
locale (enjeu de sécurité alimentaire,
autosuffisance) perception favorable qu’ont
les consommateurs locaux des produits
« pays »
Feuille de route et objecBfs long terme Des projets significatifs en cours de
réalisation (technopole, halle technologique)
Des exemples de filières dans lesquelles le
taux de couverture a significativement été
augmenté (cf. filière viande)
Desserte aérienne : 3 compagnies internationales (Air
Caraïbe, Air France, Corsair) et 1 compagnie régionale (Air
Antilles Exress)
Desserte routière : bonne qualité des routes
Desserte maritime : Grand port maritime de la Guadeloupe
(ex Port autonome de la Guadeloupe)
La Filière Agriculture-­‐Agro-­‐alimentaire en Guadeloupe Socle du développement à court terme Demande Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Infrastructures : aéroport international, infrastructures routières et maritimes.
Formations : nombreuses initiatives, notamment portées par les
interprofessions en cours de structuration
Appui des pouvoirs publics : Interprofessions, organismes de recherche
(CIRAD, INRA…), Instituts Techniques nationaux, Chambre d’Agriculture…
Atouts
•
•
•
•
•
Présence d’un foncier agricole et d’un
fort taux d’activité agricole pouvant
servir de base pour la diversification
des activités et l’approvisionnement
de l’industrie agro-alimentaire
Accompagnement performant assuré
par les acteurs publics dans le cadre
des politiques publiques régionales,
nationales et de l’UE
• structuration des filières agricoles
en interprofessions thématiques
(Les Producteurs de Guadeloupe,
IGUAVIE,
IGUACANNE
et
IGUAFLHOR
• soutien aux agriculteurs et aux
pêcheurs pour les encourager à
mieux produire et à adapter la
production à la demande locale
Perception favorable qu’ont les
consommateurs locaux des produits
« pays »
De nombreux exemples de projets
innovants sur lesquels il est possible
de capitaliser (par exemple à l’export
autour des éléments suivants : la
production à contre-saison, la qualité
et
typicité
des
produits,
le
positionnement sur le haut de gamme
et les marchés du luxe, l’innovation
non-technologique :
marché,
packaging)
Etc.
Faiblesses
•
•
•
•
•
•
•
•
Opportunités
•
•
•
•
Présence
et
accessibilité
des
ressources de grands pélagiques du
large offrant un potentiel de
développement
Renforcement des capacités de
première et deuxième transformation
en tenant compte de la forte
concurrence des produits importés et
de la difficulté à mettre en place des
outils de production adaptés à la taille
du marché
Structuration des filières et des
interprofessions (déjà bien engagée
pour les plus importantes)
Engagement dans des démarches de
diversification, modernisation des
exploitations, amélioration de la
qualité des produits
Apparitions de difficultés d’accès au
foncier et réduction de la Surface
Agricole Utile (du fait de l’étalement
urbain)
Désaffection des jeunes générations
pour certains métiers concernés
(pêche, agriculture…)
Forte
exposition
aux
aléas
climatiques et à la volatilité des prix
affectant les activités agricoles
Structuration et professionnalisation
des acteurs de la filière encore
limitées
Déficit en termes de capacités
d’améliorations
techniques
:
mécanisation, irrigation, savoirs
technico-économiques, etc.
Manque d’outils de financement de
l’amorçage des projets d’innovation
(technologique ou non) dans les
industries
agroalimentaires,
la
culture des entreprises restant
marquée par l’intérêt lié au
financement des investissements
matériels,
plutôt
que
par
l’amélioration de l’organisation de
l’entreprise,
des
processus
de
production ou de commercialisation
Forte exposition à la concurrence des
pays de la zone caraïbe et du Brésil :
coûts de production inférieur,
moindre importance des normes et
réglementations européennes liés à la
qualité et à la sécurité alimentaire
Etc.
Menaces
•
•
•
•
Diminution progressive de la SAU
Poursuite de la réduction de la portée
des outils de la PAC ayant pour
fonction de soutenir les prix (forte
protection
à
l’importation,
mécanismes d’intervention sur le
marché intérieur)
L’appui
au
regroupement
d’entreprises continue de buter sur la
capacité à trouver des porteurs de
projet
institutionnels
ou
représentatifs
des
entreprises
concernées, ayant les moyens de
travailler à la préparation et au suivi
du projet (ingénierie de projet), et sur
la capacité à créer du consensus.
Etc.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
123
•
•
•
•
Emergence de projets d’unités
artisanales et semi-artisanales avec
l’appui du FEDER et du FEADER
(aides à l’investissement ou aides
techniques importantes)
Poursuite et l’extension de stratégies
marketing haut de gamme
Développement d’une stratégie de
communication globale à l’échelle de
la filière
Etc.
La filière Énergies renouvelables en Guadeloupe
Points clés de la filière
Points clés
Maturité
Émergente
Potentiel
de
création d’emplois
Moyen - fort (on estime le potentiel à plusieurs centaines
d’emplois directs : le nombre d’emplois directement créés
dans le cadre de la mise en œuvre du PRERURE a été évalué
à 2 500 d’ici 2025, soit 1500 dans le secteur de la MDE et
1 000 dans celui des ENR, dont 65 % pour le solaire
thermique)
Perspective
Court et moyen terme :
- à court terme, il ‘agit de développer l’offre régionale,
consolider la filière et mettre les acteurs en position
d’atteindre les objectifs fixés en termes de part des ENR dans
le mix énergétique ;
- à plus long terme, il s’agit d’envisager les perspectives
d’export de savoir-faire, d’ingénierie et d’expertise.
Positionnement
Régional
Demande
- La filière est portée par la demande locale : l’enjeu est
d’assurer l’autonomie et la sécurité énergétique du territoire.
- Comme les autres DROM, la Guadeloupe dispose d’un mix
énergétique qui lui est propre (Géothermie : 3,3 % ; Bagasse :
3,2% ;
Eolien :
2,7
%;
Photovoltaïque :
2
%;
hydroélectricité : 0,9 % en 2011)
- Les ENR contribuent à hauteur de 30 % de la production
d’électricité
- Trois secteurs apparaissent particulièrement impactés par
le développement de la filière en Guadeloupe : BTP,
fabrication des appareils producteurs d’énergie, l’agriculture
pour la biomasse
Importance de la
filière économique
- 1251 emplois pour l’ensemble du secteur de l’énergie au
31/12/2007 d’après l’INSEE (périmètre plus vaste que celui
de la filière Energies renouvelables)
- Données chiffrées sur
difficilement accessibles.
les
entreprises
et
emplois
- La filière s’appuie sur la présence de grands groupes ou de
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
124
leurs filiales sur le territoire (EDF, GDF Suez), de quelques
filiales de PME nationales (Sunzil, Akuo Energy/Austral
Energy, Aerowatt...) et de quelques PME locales.
- Les énergies renouvelables offriront davantage d’emplois
sur des métiers traditionnels avec des nouvelles
compétences, mais pas de nouveaux métiers.
- Le potentiel d’exportation concerne porte essentiellement
sur du savoir-faire et de l’ingénierie technique, et
secondairement sur de l’expertise en matière de définition de
stratégie et de politique publique énergétique.
Excellence
scientifique
Présence du pôle Synergile et d’un réseau de membres
significatifs
La liste des partenariats actuels d’EDF en Guadeloupe
montre en quoi le territoire est un réel lieu de recherche et
d’expérimentation
Dynamisme
l'innovation
de
La Guadeloupe est un territoire de recherche et
d’expérimentation par excellence : les contraintes de
l’intermittence sur la gestion du réseau électrique imposent
le développement de solutions de stockage, une optimisation
de la gestion des réseaux, et une diversité dans le mix
énergétique au niveau de la production d’électricité
Feuille de route et
objectifs
long
terme
La région a adopté en juin 2008, le PRERURE (Plan
énergétique régional pluriannuel de prospection et
d’exploitation des énergies renouvelables (ENR) et
d’utilisation rationnelle de l’énergie, qui fixe comme
ambition pour 2020 un objectif d’utilisation de 50 %
d’énergies en ENR.
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière Énergies renouvelables en Guadeloupe Atouts de la région Socle du 5 développement à court terme 4 Feuille de route et objecBfs long terme 3 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
125
Potentiel de création d’emplois et de valeur
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
•
Part déjà relativement élevée d’ENR
dans la production d’électricité avec un
mix énergétique déjà diversifié
Existence de savoir-faire locaux sur des
technologies et procédés industriels
Présence
ancienne
de
filières
économiques
sur
les
énergies
renouvelables et la présence de grands
opérateurs industriels nationaux et
internationaux (EDF, GDF et dans une
moindre mesure Vergnet, etc.) qui
développent
des
projets
d’expérimentation/démonstration de
nouvelles technologies et procédés
industriels
Rôle important de la commande
publique : fort soutien des politiques et
dispositifs publics qui abaissent les
coûts
d’expérimentation,
de
développement et d’installation, et
Faiblesses
•
•
•
•
L’impact sur le territoire en termes
de création d’entreprises, d’emploi
et de valeur ajoutée demeure
relativement limité et reste de toute
façon assez mal connu
Capacités de production électriques
actuellement limitées (délestages
ponctuels opérés par EDF)
Le développement de la filière ENR
repose sur une approche en mode
projet dans plusieurs segments
(biomasse, STEP Marine, éolien…)
et relève davantage du domaine du
potentiel que de la réalité
économique traduite en termes de
création d’entreprises, d’emplois et
de création de valeur ajoutée
La filière ENR est fortement
dépendante des évolutions des prix
de rachat de l’électricité par EDF.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
126
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Une présence ancienne de filières économiques sur les énergies renouvelables et la présence de grands opérateurs industriels nationaux et internationaux La présence d’une expertise locale et de réelles
possibilités d’approfondissement des relations entre
les groupes nationaux présents sur place, les PME et
les équipes de R&D locales
Un grand nombre de partenariats entre les acteurs
révélant en quoi le territoire est un réel lieu de
recherche et d’expérimentation
L’insularité entraîne un fort effet incitatif pour
développer de nouvelles solutions et techniques de
production d’ENR puis diffuser certaines solutions
innovantes sur le marché local et au-delà.
Le rôle important de la commande publique
permettant de développer un savoir-faire et une
expertise susceptibles d’être exportés dans les pays
de la bande intertropicale, et en particulier dans les
pays insulaires ou les territoires continentaux isolés
Infrastructures : 25 producteurs électriques (2008) répartis dans la géothermie,
l’éolien, le photovoltaïque, l’hydrolique…
Appui des pouvoirs publics : Grands groupes ou leurs filiales, Synergile, Agence
de développement économique…
•
parfois aident à structurer la filière en
mettant l’accent sur la R&D et
l’innovation, comme avec Synergîle
Etc.
•
•
Les cadres règlementaires et
financiers
nationaux
ne
correspondent pas toujours aux
spécificités des DOM. C’est le cas
notamment du tarif de rachat de
l’électricité fixé nationalement sans
adaptation
aux
contraintes
insulaires,
ou
des
projets
démonstrateurs dans le cadre des
investissements d’avenir, qui ne
donnent pas de manière spécifique
une place aux DOM.
Etc.
Opportunités
•
•
•
Contexte insulaire, géographique et
climatique propice au développement
de nouvelles techniques et technologies
de production d’ENR et de gestion des
réseaux électriques.
Renforcement
de
la
capacité
d’expertise
locale
par
un
approfondissement des relations entre
les groupes nationaux présents sur
place, les PME et les équipes de R&D
locales.
Le potentiel d’exportation porte
essentiellement sur du savoir-faire et
de
l’ingénierie
technique,
et
secondairement sur de l’expertise en
matière de définition de stratégie et de
politique publique énergétique.
Menaces
•
Les menaces varient d’une
source d’énergie à l’autre :
• photovoltaïque et l’éolien : le
principal
handicap
est
technologique et dépend des
solutions à venir pour le
stockage de l’énergie ;
• photovoltaïque : trois grands
enjeux ou inconnues dans la
durée
(réglementation,
mesures
incitatives
et
dispositifs
d’accompagnement)
• éolien : la présence de radars
limite le développement de
cette source d’énergie
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
127
4.2 Guyane : les filières Bois et Tourisme
La filière Bois en Guyane
Points clés de la filière
La filière Bois en Guyane : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
En maturation
de
création
Perspective
Moyen
Moyen terme
Positionnement
Local/Régional
Demande
La totalité de la production est actuellement
absorbée par les besoins du marché. Cette
demande provient principalement du secteur du
BTP.
Le marché pourrait absorber les 215 000 m3 de
bois que la filière a le droit d’extraire
annuellement, soit un potentiel de croissance de
volume supérieure à 100%.
Importance
économique
de
la
filière
Excellence Technique
Dynamisme de l'innovation
Feuille de route et objectifs
long terme
4ème filière économique de Guyane
Expérience importante des acteurs du domaine
(les entreprises ont généralement plus de 10
ans).
De nombreuses sociétés travaillent sur le
développement de nouvelles offres de produits
réalisés à partir de bois Guyanais (élargissement
des débouchés).
Groupes
de
travail
au
l’interprofessionnelle du bois
niveau
de
Leviers du développement à court et moyen terme
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
128
La Filière Bois en Guyane Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 3 Feuille de route et objecBfs long terme 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Infrastructures : Routes nationales sur la bande littoral, quelques routes vers le
centre des terres, de nombreuses pistes ouvertes par l’ONF.
Formations : Quelques formations pertinentes au RSMA (Formation aux métiers
de la scierie), au Centre de Formation d’Apprentis Agricoles de Matiti et au Lycée
Professionnel des Métiers du Bâtiment de Balata
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
129
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
SERVICES ASSOCIÉS
Exploitation de biomasse pour la
fourniture d’énergie électrique
COMMERCIALISATION
Pas d’acteurs dédiés du type grossistes
négociants…
PRODUCTION
Première transformation du bois :
Scieurs et raboteurs
Seconde transformation du bois :
Menuisiers, charpentiers, couvreurs,
ébénistes.
APPROVISIONNEMENT
ONF, gestionnaire unique de la
ressource forêstière.
Exploitants forêstiers, transporteurs.
Appui des pouvoirs publics : DAF, SGAR…
Atouts
Faiblesses
•
La filière peut compter sur une
demande intérieure motrice. (La
région Guyane a pour objectif de
réaliser de plus 1 500 nouveaux
logements sociaux par an.)
•
La filière repose sur des
entreprises
d’expérience
(supérieur à 10 ans pour la
plupart)
•
La forêt de Guyane est déjà
certifiée PEFC (bientôt FSC), les
entreprises sont en cours de
certification et pour fournir des
produits labélisés.
•
Le système d’approvisionnement
est fragilisé par la santé
économique et le nombre limité
d’exploitants forestiers.
•
L’offre et la demande ont parfois
du mal à se retrouver (le bois
produit ne convient pas toujours
à la demande et la demande ne
convient pas toujours aux réalités
de la filière bois).
•
Aucun secteur de la filière ne
possède de leader.
•
Manque
qualifiée.
Opportunités
•
•
de
main
d’œuvre
Menaces
La forêt guyanaise possède
environ
70
essences
commercialisables. Seulement dix
(environ) sont pour l’instant
qualifiées, notamment pour le
domaine du BTP.
La filière pourrait connaitre un
essor important si elle parvient
interagir convenablement avec le
secteur biomasse.
•
La filière est pour l’instant
compétitive grâce aux soutiens
publics (tarifs avantageux du bois
sur pieds, subventions…)
•
Les normes européennes utilisées
en Guyane pour le l’exploitation
du bois ne tiennent pas compte
des spécificités locales.
•
Défaut d’attrait des métiers du
bois auprès de la jeunesse et des
personnes en reconversion.
La filière Tourisme en Guyane
Points clés de la filière
La filière Tourisme en Guyane : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
Émergente
de
création
Perspective
Moyen terme
Positionnement
Régional
Demande
Importance
économique
Fort
110 000 visiteurs annuels en 2012, avec un
potentiel de doublement d’ici 2020.
de
la
filière
2ème filière économique (9% du PIB, en
réintégrant les comptes satellites du tourisme)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
130
Excellence Technique
Peu de formations spécialisées
Pas d’observatoire pour observer et analyser les
tendances
Dynamisme de l'innovation
Feuille de route et objectifs
long terme
Quelques
offres
caractéristiques
de
la
destination (Séjours sur les marais, pêche
sportive, observation des tortues luths…)
Schéma régional de développement du tourisme
et des loisirs (en cours de validation)
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière Tourisme en Guyane Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 3 Feuille de route et objecBfs long terme 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence Technique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
131
SUPPORT
Infrastructures : 1 aéroport international,
développées sur la bande littorale.
infrastructures
routières
surtout
SERVICES ASSOCIES
Présence de nombreux commerces :
centre commerciaux, marchés, boutiques,
échoppes…
COMMERCIALISATION
Commercialisation et promotions
assurée (hors pouvoirs publics) par Offices
du
Tourisme,
Point
d’information
Touristique et quelques Agences de Voyage
PRODUCTION
Présence de l’ensemble des métiers
fondamentaux
du
tourisme :
hébergement,
restauration,
guides
touristiques, fournisseurs de services de
divertissement
(centres
nautiques,
associations de découverte, musées, …),
transports et location de voiture.
APPROVISIONNEMENT
Desserte aérienne : 2 compagnies
internationales et 1 compagnie régionale
Desserte routières : quelques artisans
Taxi, et peu de transports routiers
Appui des pouvoirs publics : CTG, Atout France, CCI, Parc Amazonien de Guyane,
Parc Naturel Régional de Guyane
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
Faiblesses
•
Biodiversité unique et préservée
•
•
Présence de la base spatiale de
Kourou
Communication insuffisante pour
la promotion de la destination
•
Positionnement en tant que
territoire européen : véhicule une
image globalement positive sur la
sécurité
(des
biens,
des
personnes, sanitaire, financier…)
Défaut d'une feuille de route
stratégique forte (pour l'instant)
appuyée
politiquement
et
financièrement par les pouvoirs
locaux
•
Structuration inexistante de la
filière (peu d'interactions et de
synergies
entre
acteurs
complémentaires)
•
Absence d'un observatoire du
tourisme donnant de la crédibilité
à la destination (pour les
investisseurs) et permettant aux
acteurs
d’anticiper
sur
les
•
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
132
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Formations : quelques initiatives en cours de développement (pour l’hôtellerie et la
restauration et les guides)
tendances
Opportunités
•
Filière
en
construction :
possibilité de positionnement en
tant que modèle régional de
tourisme vert et durable
•
Existence
d'un
important
gisement de clients à convertir
(habitants, croisiéristes, touristes
régionaux)
Menaces
•
Réglementation mettant en péril
des activités économiques (même
historiques)
•
Protectionnisme local faisant
barrière
au
développement
touristique dans certaines parties
du territoire
•
Dégradation inquiétante de la
sécurité à l’intérieur des terres
(présence de l’orpaillage illégal)
•
Capacité d'accueil insuffisante
(incapable
d'absorber
un
accroissement de la demande)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
133
4.3 Martinique : les filières
Énergies renouvelables
Agriculture-Industries
agroalimentaires
et
La filière Agriculture et agroalimentaire en Martinique
Points clés de la filière
La filière Agriculture et agroalimentaire en
Martinique : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
Filière très ancienne mais encore peu structurée
de
création
Elevé
Perspective
Court et moyen terme
Positionnement
Local et métropolitain essentiellement
Demande
Marché local : 400 000 habitants, 490 000
touristes par an
Marché métropolitain (dont les diasporas
antillaises et africaines pour certains produits)
Marché mondial (de luxe, pour quelques
produits : rhum)
Importance
économique
de
la
filière
5% du PIB de la Martinique (INSEE 2009), 5,6%
des salariés (Pôle emploi 2010)
Excellence scientifique
Secteur d’activités parmi les plus innovants de
Martinique et les plus dotés de structures
d’appui (PARM, Technopole, IT2C, INRA, etc.)
Dynamisme de l'innovation
L’un des plus forts secteurs d’innovation de
Martinique : innovation sur les produits
agricoles, sur la transformation, sur le
positionnement marketing
Feuille de route et objectifs
long terme
Programme
Martinique
de
développement
rural
de
Leviers du développement à court et moyen terme
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
134
La filière agriculture et agroalimentaire en MarOnique Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 Feuille de route et objecBfs long terme 3 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
135
Potentiel de création d’emplois et de valeur
Potentiel : importance de la biodiversité agricole, végétale et animale
Développement de certains produits
en lien avec le tourisme (« typicité
caribéenne »…)Présence de nombreux
commerces :
centre
commerciaux,
pour
Perspectives internationales
quelques produits de niches
Demande locale non encore satisfaite
(en quantité et en qualité)
Développement d’une industrie agroalimentaire fondée sur la production et la
consommation
localesPrésence
de
l’ensemble
des
métiers
fondamentaux
du
tourisme :
Structuration progressive de la filière
et
organisation
des
structures
interprofessionnelles
Desserte aérienne : 3 compagnies internationales
(Air Caraïbe, Air France, Corsair) et 1 compagnie
Potentiel
favorable
naturel
riche
et
climat
Appui des pouvoirs publics : implication du Conseil régional pour la production
locale vivrière et l’innovation dans l’agro-alimentaire, PARM, Technopole
Infrastructures : aéroport international, infrastructures routières et maritimes,
rénovation et création d’hébergements.
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
•
Filière historique de production
de l’île ; agroalimentaire comme
première industrie et premier
secteur d’innovation
Richesse de la biodiversité
Potentiel climatique élevé et
ressource en eau suffisante
Soutien des politiques publiques
pour la préservation des terres
cultivables
Faiblesses
•
•
•
•
•
Conditions
météorologiques
pouvant extrêmes
Vieillissement des salariés de la
filière
et
problématique
importante de la reprise des
exploitations agricoles
Etroitesse du marché local
Concurrence extrêmement forte
des produits d’importation (à des
coûts ne permettant pas à la
Martinique d’être compétitive)
Habitudes de consommation
(pomme et pomme de terre :
produits agricoles les plus
consommés de l’île dont la
production locale n’est pas
possible)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
136
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevéPotentiel de création
Formations : trois lycées agricoles (trois formations BTSA sur le végétal, l’animal
et l’agroalimentaire), formation professionnelle
Opportunités
•
•
•
•
•
Menaces
Marché intérieur à conquérir
Potentiel
d’exportation
de
certains produits sur certaines
clientèles (diasporas caribéennes
ou africaines en métropole) ou
certains produits (positionnement
du rhum sur le marché du luxe
international)
Organisation progressive des
filières
et
des
structures
interprofessionnelles agricoles
Développement de nouvelles
habitudes
de
consommation
(image positive renforcée de la
production locale)
Potentiel de production de
bioénergie
•
•
•
•
•
Diminution
des
surfaces
agricoles utiles
Pollution des sols (chlordécone)
Rivalité historique entre les
surfaces dédiées aux cultures
vivrières
et
aux
cultures
d’exportation (banane, sucre)
Structuration encore fragile des
filières et faibles coopération
entre les acteurs
Fragilité des entreprises locales
(petites entreprises à faible
trésorerie),
faible
capacité
d’innovation
La filière Energies renouvelables en Martinique
Points clés de la filière
Les énergies renouvelables en Martinique : points
clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
Filière naissante
de
création
Moyen
Perspective
Moyen terme
Positionnement
Local, voire régional
Demande
Croissance élevée de la consommation d’énergie
en Martinique dû à un dynamisme économique
soutenu.
Emissions de gaz à effet de serre, actuellement
élevées, à diminuer (importance des produits
pétroliers dans la production d’électricité mise
en cause).
Importance
économique
de
la
filière
Une vingtaine d’entreprises dans le secteur du
photovoltaïque en 2000, deux aujourd’hui
Excellence scientifique
Bon niveau, espace de recherche appliquée
Dynamisme de l'innovation
Application locale de produits et services
développés dans les autres régions d’outre-mer
et en métropole
Feuille de route et objectifs
long terme
Le Schéma Régional Climat Air Energie, conçu
par le Conseil Régional et l’Etat, fixe comme
objectif : 50% des d’énergies renouvelable à
l’horizon 2020
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
137
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière ENR en MarOnique Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 3 Feuille de route et objecBfs long terme Demande 2 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Non-interconnexion des réseaux et fortes émissions de gaz à effet de
serre qui imposent de trouver des solutions nouvelles
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
Potentiel d’exportation dans la
Caraïbe des techniques et services
développés en réponse aux potentialités et
contraintes locales
Compétences locales pour l’installation
et l’entretien du photovoltaïque
Demande locale croissante
Forte capacité d’adaptation au contexte
locale des techniques ENR produites,
Développement
de
produits
et
services en phase avec es contraintes
d’insularité, du climat, d’éloignement, etc.
Potentiel naturel élevé sur les
différentes ENR (solaire, géothermie des
mers, biomasse, etc.)
Appui des pouvoirs publics : Forte implication du Conseil Régional (cf.
habilitation législative énergie), agence martiniquaise de l’énergie, SEM Energie
138
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Formations : création d’une école d’ingénieurs en lien avec l’UAG spécialisée dans
le secteur des matériaux et de l’environnement, formation technique et formation
continue (installation PV, etc.)
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
•
Atouts naturels de la Martinique
(ensoleillement)
Potentiel naturel pour l’énergie
thermique des mers
Potentiel de production de
biomasse (quoique insuffisant)
Expériences
et
techniques
développées dans d’autres régions
d’outre-mer transposables à la
Martinique
Faiblesses
•
•
•
Opportunités
•
•
Développement
du
photovoltaïque et de l’énergie des
mers.
Développement de production
d’électricité à partir des déchets,
de
petites
installations
hydrauliques, de biomasse, de
géothermie
et
d’énergie
thermique des mers.
•
Progrès techniques sur le stockage des énergies intermittentes •
Développement
de
solutions
techniques adaptées au contexte
local (PV en toiture, petites
productions, etc.)
Leviers d’action des politiques
publiques pour soutenir la filière :
défiscalisation tarif de rachat de
l’électricité
•
•
Faiblesse
naturelle :
zone
cyclonique
(qui
empêche
l’installation
de
champ
d’éolienne en mer par exemple et
impose
des
contraintes
techniques
pour
le
photovoltaïque)
Non adaptation des politiques
publiques
aux
spécificités
locales, donc application d’une
législation
parfois
contreproductive.
Fragilité des entreprises du
secteur (de 20 entreprises dans
le
photovoltaïque
à
2
aujourd’hui)
Menaces
•
•
•
Protection de la surface agricole
utile (pour l’agriculture, qui
empêche l’installation de fermes
photovoltaïques)
Politiques publiques aléatoires
(tarifs de rachat, moratoire sur le
photovoltaïque, etc.)
Concurrence de les terres
agricoles pour Potentiel en
énergies renouvelables limité, et
mal connu (ex : géothermie).
Accords de coopération avec le Para pour l’importation de biomasse Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
139
4.4 La Réunion : les filières Bâti tropical, ENR et Tourisme
La filière Bâti Tropical à la Réunion
Points clés de la filière
La filière Bâti Tropical à la Réunion : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
A consolider
de
création
Potentiel de requalification des emplois dans le
BTP (plus forte valeur ajoutée) ; et création
d’emploi dans le secteur de l’ingénierie et des
services en particulier. Les projections au niveau
national font état d’une création nette de valeur
et d’emplois de 10% (CGDD)
Perspective
Moyen terme
Positionnement
Marché local réunionnais en premier lieu pour
répondre aux exigences de réduction de la
consommation d’énergie
Demande
Demande croissante, mais qui doit être impulsée
par les acteurs de la commande publique
(opérations exemplaires)
Importance
économique
de
la
filière
17 000 emplois directs et un CA de 1,3 milliards
d’euro en 2011 pour le secteur du BTP
Excellence scientifique
Deux laboratoires (PIMENT et LPBS) sont
impliqués, conduisent des travaux financés par
l’ANR, et nouent des partenariats avec des
groupes et PME locaux.
Dynamisme de l'innovation
Une dynamique entrepreneuriale autour de
petites PME locales, et de groupes implantés
localement en association avec la recherche. Des
moyens d’essais et de plateformes techniques à
la chambre des métiers autour du pôle CIRBAT.
Feuille de route et objectifs
long terme
L’accent est moins mis sur le bâti tropical que
sur les ENR dans les documents de
programmation stratégique. Cela dit les travaux
relatifs à la stratégie de spécialisation
intelligente l’identifient comme domaine de
spécialisation
Leviers du développement à court et moyen terme
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
140
La Filière BâO Tropical à la Réunion Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 Feuille de route et objecBfs long terme 3 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
141
Une de formation initiale et continue déjà
bien étoffée pour répondre à la montée en
qualification
Des savoir-faire techniques locaux, et des
connaissances développées localement qui
présentent un réel avantage comparatif à
l’échelle régionale
Une présence d’acteurs tout au long de la
chaîne de la valeur, en petit nombre et peu
organisés, mais dynamiques
Une filière orientée vers la réponse à une
demande
intérieure
potentiellement
importante :
besoins
en
logement
important, état du patrimoine bâti
déficitaire,
nouvelle
règlementation
thermique
Formations : une offre de formation diversifiée à l’IUT, à l’Ecole d’ingénieur
(ESIROI), à l’Ecole d’Architecture, mais également à la Chambre des Métiers
(CIRBAT)
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
Des acteurs actifs à la Réunion
tout au long de la chaine de la
valeur :
producteur
de
matériaux,
système
énergétique
du
bâtiment,
technique de construction,
climatisation,
aménageurs,
concepteurs, R&D, formation,
etc.
Des acteurs de la R&D et de la
formation reconnus et ouverts
sur des partenariats avec les
entreprises
locales,
et
disposant
de
plateformes
techniques ouvertes (CIRBAT)
Des compétences en cours de
développement autour de la
certification (ACERBAT) et de
Faiblesses
•
•
•
•
Des acteurs du « bâti tropical »
encore peu nombreux et isolés sans
réelle
démarche
de
cluster
(mutualisation)
Encore peu de démonstrateurs de
bâtiments passifs ou à énergie
positive, ou à l’échelle de quartiers
Un thème encore insuffisamment
porté par la commande publique
pour initier la dynamique et
conforter les savoir-faire locau (ex :
rénovation thermique du parc de
logement social)
Difficulté à faire émerger de
nouveaux matériaux locaux (scories,
déchets
végétaux,
etc.)
en
substitution au tout béton
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
142
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Appui des pouvoirs publics : les compétences en bâti tropical figurent au rang
des thématiques de la future stratégie de spécialisation intelligente, mais le
développement de la filière dépendra largement de la place accordée au bâti tropical
dans la commande publique pour mettre sur le marché et testé à grande échelle de
nouvelles techniques.
la
normalisation
indispensables à la diffusion
des nouvelles techniques et
procédés
Opportunités
•
•
•
Menaces
Des besoins en rénovation des
bâtiments, et en logement qui
devraient tirés la demande
pour du bâti tropical
Potentiel à l’exportation en
particulier (i) en matière de
certification
et
de
normalisation
(pour
« vendre »
les
normes
réunionnaises
et
faciliter
l’entrée des entreprises sur les
marchés
extérieurs) ;
(ii)
d’ingénierie et de conception
du bâti tropical (des échanges
existent déjà au niveau de
l’ADEME
et
de
l’Ecole
d’Architecture)
Utilisation
de
ressources
locales pour des matériaux de
substitution au béton
•
•
Difficulté à susciter la demande
auprès des MO (+10 à 15% de
surcoût) faute d’approches intégrées
et globales sur le long terme
(l’amortissement est sur le long
terme 20 à 25 ans).
Implication encore limitée des
majors nationales et locales dans le
développement du bâti tropical pour
assurer une diffusion des procédés
chez les artisans du secteur
•
La filière ENR à la Réunion
Points clés de la filière
Les énergies renouvelables à la Réunion : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
Maturité de certains sous segments (biomasse,
PV, CES)
de
création
Important
Perspective
Moyen terme
Positionnement
Régional dans le domaine de l’ingénierie
(Maurice, Afrique du Sud)
Demande
Croissance élevée de la consommation d’énergie
(croissance démographique, élévation du niveau
de vie).
Taux de dépendance énergétique restant élevé
(88% contre 54,5% au plan national).
Importance
économique
de
la
filière
200 entreprises, 3000 emplois (avec des
perspectives estimées à 15 000 emplois d’ici à 15
ans)
Excellence scientifique
Bon niveau, espace de recherche appliquée
Dynamisme de l'innovation
Développement de vrais savoir-faire locaux qui
ont pu trouver (ou pourront) des applications
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
143
dans d’autres régions d’outre-mer notamment
(ex : centrales agri-energy ; utilisation de la
bagasse, valorisation des déchets verts, smart
grids)
Feuille de route et objectifs
long terme
Un objectif ambitieux affiché depuis 10 ans :
100% d’énergie renouvelable dans le mix
énergétique à l’horizon 2020.
La part actuelle des ENR dans la production
d’électricité est de 34% (principalement
hydraulique, et bagasse et PV dans une moindre
mesure).
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière ENR à la Réunion Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 Feuille de route et objecBfs long terme 3 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
144
Non-interconnexion des réseaux et fortes émissions de gaz à effet de
serre qui imposent de trouver des solutions nouvelles pour approvisionner le
marché local (lutter contre la dépendance)
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
D’ores et déjà, des expériences à
l’export des services et de l’ingénierie
technique, en particulier sur Maurice
et l’Afrique du Sud
Présence de grands industriels
nationaux et internationaux (EDF,
GDF,
DCNS,
mais
également
Séchilienne
Sidex)
pour
le
développement
de
projets
d’expérimentation/démonstration
Des segments basés sur un savoirfaire local et des entreprises locales
avec du potentiel de développement
local : solaire, CES, biomasse smart
grid
Une
diversité
des
conditions
naturelles
permettant
d’expérimenter différents modes de
production dans des
conditions
réelles
Appui des pouvoirs publics : Fort partenariat local et continuité de la stratégie
depuis 10 ans, structuration de la filière en cours autour du cluster Temergie
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
Un
contexte
insulaire,
géographique
et
climatique
propice au développement de
nouvelles
techniques
et
technologies
de
production
d’ENR et de gestion des réseaux,
applicables
à
la
bande
intertropical ou aux systèmes
insulaires (test-bed approach)
Présence de tissu de PME/TPE, et
de filiales de groupes nationaux
Des savoir-faire locaux sur des
technologies
et
procédés
industriels (biomasse, chauffeeau, modèle d’autoconsommation
en PV avec solution de stockage)
avec
une
intensité
technologiquement
facilement
maîtrisable et peu chère à
développer
pour
des
pays
émergents.
Faiblesses
•
•
•
Relative fragmentation de la
filière ENR dans son ensemble,
malgré la présence du cluster
TEMERGIE
Pratique de coopération et de
mutualisation inter-entreprises
et avec les acteurs de la recherche
encore insuffisant développés
avec pour enjeu de mieux arrimer
le savoir-faire local aux grands
projets de démonstration en
cours (SWAC, ETM, PELAMIS,
VERT…)
Des cadres règlementaires et
politiques
nationaux
ne
correspondant pas toujours aux
spécificités locales (tarif de
rachat, PIA)
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
145
Opportunités
•
•
•
•
Menaces
Réorientation en cours du secteur
du PV sur des niches à plus forte
VA (que la pause et la
maintenance) croisant d’autres
filières telles que l’agriculture
(Agri-énergy, pompes solaires
pour l’irrigation…) ou le bâtiment
(smart grid), et le développement
de solutions de stockage couplée à
de petites unités chez les
particuliers
Diversification en cours de la
filière biomasse autour de
l’utilisation des déchets verts ;
mais également autour des biocarburants
De grands projets portés par des
acteurs industriels extérieurs avec
des retombées en termes de mise
en chantier et de maintenance
Des expériences à l’export du
savoir-faire sur des technologies
d’ores et déjà maîtrisées – PV,
CES, biomasse (Maurice, Afrique
du Sud)
•
•
Multiplicité de grands projets en
cours
de
développement
réclamant des efforts financiers
du secteur public conséquents, et
qui sont parfois dans une logique
de concurrence dans la recherche
des financements
Financement des fonds propres
des PME innovantes pour
soutenir
leur
projet
de
développement
et
de
diversification jugé insuffisant
La filière Tourisme à la Réunion
Points clés de la filière
La filière Tourisme à la Réunion : points clés
Maturité
Potentiel
d’emplois
A
consolider,
un
insuffisamment exploité
de
création
potentiel
encore
Potentiellement fort avec des effets directs
importants sur les autres branches de l’économie
locale : commerce, transport, services, et surtout
l’agriculture, la pêche et l’agroalimentaire, ainsi
que le bâtiment et la construction, et en
particulier le bâti tropical durable
Perspective
Moyen-Long terme
Positionnement
Positionnement
de
l’offre
touristique
essentiellement sur le marché métropolitain
Demande
446 500 visiteurs en 2012, pour un objectif
affiché de 600 000 visiteurs en 2015, et 1 million
en 2020 (SRDAT)
Importance
économique
de
la
Excellence scientifique
filière
6 750 salariés dans le secteur soit 3,2% de
l’emploi total (parmi les dernières régions
françaises sur cet indicateur)
Observatoire du Tourisme de l’IRT pour analyser
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
146
les tendances et les marchés (notamment à
l’échelle de l’Océan Indien)
Dynamisme de l'innovation
Utilisation des TIC encore insuffisamment
développée parmi les professionnels des activités
de loisir
Feuille de route et objectifs
long terme
Schéma Régional de Développement et
d’Aménagement Touristique (2000), et SRDE
(2013)
Leviers du développement à court et moyen terme
La Filière Tourisme à la Réunion Atouts de la région 5 Socle du développement à court terme 4 Feuille de route et objecBfs long terme 3 2 Demande 1 0 Dynamisme de l'innovaBon Socle du développement à moyen terme Importance de la filère économique Excellence scienBfique Potentiel de création d’emplois et de valeur
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
147
Infrastructures : 1 aéroport international, infrastructures routières surtout
développées sur la bande littorale, mais une faible capacité hôtelière (en
décroissance)
Formations : une offre de formation diversifiée
Synthèse Atouts-Faiblesses-Opportunités-Menaces
Atouts
•
•
•
Inscription par l’UNESCO des
« Cirques,
pitons
et
remparts » au patrimoine
mondial de l’humanité, un
argument
marketing
discriminant pour la région.
Richesse du territoire du point
de vue de sa biodiversité, de
son
patrimoine
culturel,
historique,
gastronomique,
permettant d’offrir une palette
diversifiée
d’activités
touristiques.
Une activité source de revenus
à l’export non négligeable
Faiblesses
•
•
•
•
•
•
Positionnement marketing de l’offre
touristique réunionnaise fluctuant
Proximité de destinations de
tourisme
balnéaire
(Maurice,
Maldives, Seychelles), qui offrent un
produit « tropical » correspondant à
une demande de la clientèle
européenne non francophone, et de
manière croissante à la clientèle
asiatique
Offre
d’hébergement
hôtelière
vieillissante et insuffisante
Fragmentation de la « filière »
tourisme
Manque de stratégies touristiques
des compagnies aériennes (clientèles
captives)
Usage
des
TIC
pour
la
commercialisation de l’offre et des
activités de loisir
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
148
Potentiel de création d’emploi et de
valeur élevé
Présence de nombreux commerces :
centre commerciaux, marchés, boutiques,
échoppes…
Commercialisation et promotions
assurée (hors pouvoirs publics) par l’IRT et
quelques agences de voyage et réceptifs
Présence de l’ensemble des métiers
fondamentaux du tourisme (sauf TO)
: hébergement,
restauration, guides
touristiques, fournisseurs de services de
divertissement
(centres
nautiques,
associations de découverte, musées, …),
transports et location de voiture.
Desserte
routières globalement
de
bonne qualité (peu d’artisans taxi et de
transports collectifs)
Desserte aérienne : 3 compagnies
desservant principalement Paris
Appui des pouvoirs publics : le tourisme est une priorité régionale de la
mandature 2010-2014, l’IRT assure la promotion du territoire
Opportunités
•
•
•
Clientèle
locale
non
négligeable
(1
million
d’habitant à terme) qui offre
un
potentiel
de
développement sous réserve
de les fidéliser et d’être
attractif par rapport à Maurice
Regroupement des îles Océan
Indien autour du concept des
« Iles Vanille » en vue de
développer
la
complémentarité des offres et
des positionnements respectifs
via des offres combinées :
potentiel de la Réunion pour
développer à partir de Maurice
des « excursions » de 2 ou 3
jours (plus difficile au départ
des Maldives et Seychelles
faute de dessertes directes)
Potentiel de diversification de
l’offre autour d’une stratégie
de différentes niches avec des
univers thématiques propres
adaptés aux différentes cibles
(avec
une
déclinaison
territoriale)
Menaces
•
•
•
Dépendance forte à l’égard de la
métropole, et un territoire à l’écart
du virage de la diversification vers
les BRIC et les pays émergents
asiatiques (à la différence de
Maurice)
Forte concurrence de Maurice,
exacerbée par la crise mondiale
(Maurice dépend aussi en partie de
l’Europe), y compris pour attirer des
touristes réunionnais (flux en
augmentation)
Montée
en
gamme
de
l’infrastructure d’hébergement en
particulier de l’hôtellerie qui reste à
accomplir
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
149
5. Conclusions
5.1 Une valeur sûre : la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur
S’il est un élément sur lequel l’accord se fait très généralement, c’est bien l’objectif de
réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur. Encore faut-il bien s’entendre sur
les conditions dans lesquelles cette réduction de la dépendance est profitable à
l’économie des DOM et à leur développement : les prix des produits et services locaux
ne doivent pas être plus élevés que ceux des produits importés ; la qualité et la
régularité de l’approvisionnement doivent être garanties.
L’enjeu est bien celui d’assurer un développement des territoires à travers la réduction
de la dépendance, et non pas celui du déficit commercial, car la balance commerciale
est un problème d’ordre national, et non local.
Quatre filières sont à même de contribuer à la réduction de la dépendance vis-à-vis de
l’extérieur : agriculture / agroalimentaire ; ENR/MDE ; bois ; bâti tropical.

Agriculture / agroalimentaire :
On est ici dans un enjeu majeur dans la mesure où le déficit alimentaire reste
important et où la concurrence des produits importés à bas coût est très forte, en
particulier sur la viande congelée et sur les fruits et légumes.
L’exemple de la viande fraîche et des œufs montre qu’il est possible, dans certaines
conditions, d’améliorer la situation, puisque dans ces deux secteurs, l’autosuffisance
est atteinte ou presque.
Par ailleurs, outre la qualité et la régularité de l’approvisionnement (qui supposent
une bonne structuration et une bonne intégration de la filière), la stratégie marketing
des produits « pays » semble se révéler efficace (préférence des résidents pour les
produits locaux).

Énergies renouvelables et maîtrise de la dépense énergétique :
L’enjeu est à nouveau majeur pour de petits territoires insulaires ou isolés, à la fois en
termes de niveau d’indépendance énergétique et aussi de préservation de
l’environnement (bilan carbone). Au niveau stratégique et du côté des décideurs
politiques et acteurs institutionnels, il s’agit de choisir le bon mix énergétique, tenant
compte du jeu entre énergies intermittentes et énergies stables ainsi que des
techniques de stockage, des diverses opportunités technologiques et des différents
business models (dont certains intègrent un prix de rachat de l’électricité produite par
les particuliers).
La Guadeloupe et la Réunion sont déjà parvenues à un taux significatif d’ENR dans le
mix énergétique, tandis que la Martinique est en situation de rattrapage.
Enfin, la maîtrise de la demande, notamment à travers les smart grids, domaine dans
lequel la Réunion a déjà entrepris un effort important, constitue une dimension
importante de la filière.

Bois :
La richesse en bois de la Guyane fait de cette ressource un élément significatif de
réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur à la fois en ce qui concerne les
matériaux de construction et la production d’énergie (bois-énergie).
Il reste cependant beaucoup d’efforts à faire pour que la contribution du bois joue un
rôle vraiment déterminant : organisation de la filière, développement de la commande
publique, promotion.

Bâti tropical :
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
150
La filière peut contribuer quelque à la réduction de la dépendance dans la mesure où
elle conduit à une maîtrise de la consommation énergétique et à une utilisation de
matériaux produits localement.
5.2 Un potentiel prometteur : l’exportation de savoir-faire, d’ingénierie et
d’expertise
Ce potentiel a commencé, quoiqu’encore modestement, d’être exploité dans la filière
ENR/MDE, à partir de la Guadeloupe vers la Dominique et surtout à partir de la
Réunion vers Maurice ou la Nouvelle-Zélande. Il existe de réelles perspectives qui
relèvent néanmoins pour une bonne part de groupes métropolitains – qu’il s’agisse de
très grands groupes comme EDF ou de groupes plus modestes mais très spécialisés
dans les ENR. La vraie question est de savoir comment impliquer davantage les PME
des DOM dans des consortiums intervenant à l’exportation.
L’exportation d’expertise en matière de stratégie énergétique et de politiques
publiques (mix énergétique) n’est pas effective, mais la piste mériterait d’être explorée.
Il en va de même pour le savoir-faire et l’ingénierie en matière de bâti tropical, y
compris de matériaux de construction pour la bande intertropicale.
L’étude n’a pas permis d’aborder directement le secteur des services liés à la
connaissance, mais les missions que nous avons conduites récemment dans les
DOM indiquent qu’il y a là aussi un potentiel de marché, souvent à travers des
marchés publics, par exemple dans le domaine de la protection de la biodiversité ou
des systèmes d’alerte en matière de maladies transmises par des vecteurs. Encore fautil avoir une bonne connaissance des appels d’offres sur financements internationaux
(Banque mondiale, BID, BAD, FED, etc.) ou de ceux lancés par des grandes
fondations.
5.3 Une nécessité : l’exploration raisonnée des marchés de niche
Parmi ces marchés de niche, on trouve d’abord les services à forte valeur ajoutée
ou à fort contenu de connaissance que nous venons d’évoquer dans le
paragraphe précédent.
La filière où les opportunités d’exploration raisonnée de marchés de niche sont
également importantes est bien entendu la filière agriculture / agroalimentaire.
Si les opportunités sont très faibles voire inexistantes sur le marché de la zone caraïbe,
elles sont à développer sur le marché métropolitain et européen.
A l’heure actuelle, le marché de niche « traditionnel » est celui du rhum. Il s’agit d’un
marché complètement international (hors, bien entendu, ce qui relève de la
consommation locale) pour lequel l’objectif de développement futur doit être un
positionnement haut de gamme, voire très haut de gamme (qualité et typicité), par
différenciation d’avec les marques appartenant aux grands groupes multinationaux. La
Martinique est déjà assez bien préparée à cette démarche, la Guadeloupe l’est
probablement moins.
Sur le marché métropolitain et européen, le développement des marchés de niche
commence de reposer sur des démarches associant contre-saison (melon de
Guadeloupe), typicité et qualité des produits (café, épices, chocolats, …), innovation
non technologique (marché, packaging), et positionnement haut de gamme. Cette
démarche peut utiliser comme levier la clientèle métropolitaine des communautés
antillaises et celle des touristes ayant fréquenté les DOM.
Quelques-unes des entreprises engagées dans ces démarches ont une stratégie que l’on
peut qualifier de « stratégie Jambon de Parme ». Cette stratégie, mise au point à partir
des années 1920 à Parme, a consisté à établir ce que nous appelons aujourd’hui une
appellation d’origine contrôlée sur la base d’une charte des producteurs
historiquement la première démarche de type AOC), tout en ouvrant
l’approvisionnement en viande de porc à une zone géographique très large, dépassant
non seulement le terroir de Parme, mais même l’Émilie-Romagne. Une telle stratégie,
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
151
qui est celle de la Compagnie des Épices ou encore des chocolats Lauzéa, nous paraît
très adaptée au contexte des DOM, marqué par des capacités inévitablement réduites
d’approvisionnement local. Son plein succès requiert néanmoins que l’image
spécifique des DOM, en l’occurrence de la Guadeloupe et de la Martinique, soit
fortement définie et positionnée en métropole et en Europe en termes de marketing,
ce qui n’est pas véritablement le cas aujourd’hui.
Enfin, l’écotourisme est typiquement un marché de niche susceptible d’être
développé (voir ci-dessous § 5.4).
5.4 Une filière exportatrice « évidente » mais soumise à un contexte de forte
concurrence et de grande volatilité : tourisme / éco-tourisme
En principe, le tourisme doit constituer par excellence la filière exportatrice des DOM,
du fait de leurs atouts climatiques et de la sécurité qu’ils offrent en étant français et
européens (stabilité politique, sécurité sanitaire, appartenance à la zone euro, etc.). On
y ajoutera, avec l’évolution des clientèles touristiques l’atout de la biodiversité et des
richesses naturelles, en particulier pour la Guyane qui n’est pas par ailleurs aussi
attractive pour le tourisme classique que les autres DOM.
A l’heure actuelle, le tourisme dans les DOM, après le choc initial de la crise, suivi de
troubles sociaux, bénéficie des crises dans les destinations méditerranéennes
(printemps arabes) qui provoque un transfert des clientèles touristiques vers des
destinations sans problème. Il reste que, sur la durée, la fréquentation touristique
dans les DOM est en dents de scie et que la bonne formule pour asseoir les différents
DOM comme des destinations touristiques bien reconnues et bien identifiées n’a pas
encore été trouvée.
Les DOM sont en effet confrontés dans leur aire régionale respective à la
concurrence de :
•
destinations de masse à bas prix (République Dominicaine, Mexique/Cancún) ;
•
destinations à forte identité en termes politico-culturels (Cuba) ou en termes de
positionnement (Costa-Rica et de plus en plus Panamá pour l’écotourisme) ;
•
destinations haut de gamme (Bahamas, Maurice, Maldives), voire très haut de
gamme (Seychelles).
Dans un tel contexte concurrentiel, les DOM souffrent d’un fort déficit de
positionnement stratégique et de construction d’une identité/image reconnue sur le
marché international (donc, bien entendu, hors tourisme affinitaire).
Du même coup, les investissements dans les équipements et l’hébergement se font
plus ou moins bien et dans un climat d’incertitude par rapport aux clientèles
susceptibles d’être ciblées.
Dans le cas particulier de l’écotourisme, qui représente à n’en pas douter un marché
potentiel important à l’échelle des territoires concernés, la compétitivité prix compte
sans doute moins que la compétitivité hors coût (notamment, la forte spécificité d’un
territoire en matière de flore et de faune, son caractère préservé et/ou îlien, etc.), ce
qui peut permettre aux DOM de concurrencer les pays qui, comme Costa-Rica, ont
déjà une bonne longueur d’avance sur ce marché. Là encore cependant, l’identité et
l’image restent encore largement à construire, et les hébergements et services adaptés
(en qualité et spécificité) à réaliser.
5.5 Les enjeux communs à l’ensemble des filières et les leviers d’action à
mobiliser
Au terme de cette étude, il convient de faire un retour tant sur le référentiel d’analyse
qui nous a servi de cadre de réflexion que sur les principales problématiques évoquées
dans les termes de référence.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
152
En premier lieu, on voit bien à travers l’analyse des filières retenues que les thèmes de
la compétitivité et de l’ouverture commerciale ne doivent pas être vus à travers le
prisme de la balance commerciale : l’enjeu est bien de trouver des opportunités de
diversification et de croissance soit sur le marché domestique des DOM eux-mêmes,
soit sur les marchés extérieurs, quels qu’ils soient (métropole, autres pays de l’UE,
zone régionale, …), de façon à enclencher un mécanisme vertueux de développement.
L’équilibre de la balance commerciale est un problème national, non le problème des
DOM.
En second lieu, le « cercle vertueux » de la croissance peut passer par des trajectoires
différenciées avec des processus cumulatifs interconnectés renvoyant aux effets
multiplicateurs, aux effets de productivité et aux effets de compétitivité (supra § 1.5) :
•
•
les premiers, d’inspiration keynésienne, décrivent les effets d’entraînement en
amont ou en aval ainsi que les répercussions sur la formation des revenus d’un
accroissement exogène de la demande finale lié aux exportations et/ou aux
dépenses publiques :
−
ils peuvent résulter : d’un développement et d’une diversification de la
filière tourisme (notamment écotourisme) ; de l’exportation de savoirfaire, d’ingénierie et d’expertise dans le domaine ENR/MDE et dans celui
du bâti tropical ; plus marginalement de l’exportation accrue de produits
agricoles et agroalimentaires ;
−
complémentairement, ils peuvent résulter de l’effort de RDTI – public et
privé – consenti dans quelques domaines : à nouveau ENR/MDE et bâti
tropical, mais aussi agronomie, biotechnologies, santé, etc. ;
les seconds permettent de prendre en compte les dynamiques d’offre
qu’engendrent des gains de productivité liés à la mise en œuvre d’investissements
de capacité, de rationalisation ou d’innovation :
−
•
ils peuvent résulter à terme des progrès réalisés dans le domaine
ENR/MDE, en y comprenant en particulier l’utilisation des déchets
naturels (bagasse, bois-énergie) et bâti tropical ;
les troisièmes, enfin, correspondent aux répercussions des gains de compétitivité
(prix ou volume) sur la croissance régionale, à travers la mise en place d’un
processus de substitution des importations et/ou à travers la promotion des
exportations :
−
ils peuvent résulter des progrès réalisés dans la production agricole et
agroalimentaire locale, la production d’ENR et une meilleure maîtrise de
la demande énergétique, l’utilisation du bois produit localement pour la
construction et la production d’énergie (Guyane) ;
−
ils peuvent également résulter de l’exportation de produits ou de services
de niche en bénéficiant de facteurs de compétitivité hors coût (spécificité,
typicité, positionnement haut de gamme), tout en restant dans une
fourchette de prix qui ne conduise pas les consommateurs vers des
produits ou services de substitution.
Comme on le voit, nous restons prudents dans la formulation, en signalant que ces
trois types d’effets « peuvent » se produire.
En troisième lieu, en effet, une problématique essentielle soulevée dans les termes de
référence de l’étude était la suivante : pour quelles raisons les atouts des DOM
généralement reconnus – présence de centres de recherche, niveau de
formation/qualification élevé, ressources agricoles et halieutiques, richesse
environnementale, biodiversité, espace maritime –, qui constituent potentiellement
des avantages comparatifs, ne se sont pas concrétisés jusqu’ici, ou en touts cas ne se
sont concrétisés qu’insuffisamment, en termes de développement.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
153
Les travaux de terrain permettent de mettre en lumière trois principaux facteurs
explicatifs qui peuvent se traduire en autant de leviers d’action : le déficit
de positionnement en termes de marché ; l’insuffisante structuration des
filières ; un effort limité de capitalisation sur et de promotion de
l’ingénierie, des savoir-faire et de l’expertise.

Le déficit de positionnement en termes de marché :
On constate de façon générale dans les filières analysées le manque d’une stratégie de
positionnement suivie avec constance, mise en œuvre effectivement et évaluée dans
ses résultats. Ce manque renvoie bien entendu à la responsabilité des décideurs
politiques, mais ce serait une erreur de leur en faire porter la responsabilité exclusive :
la plupart des acteurs institutionnels, dont les organisations patronales, en portent
aussi leur part. Les DOM sont en manque d’une identité forte, faute d’une stratégie de
positionnement stabilisée et soutenue collectivement par l’ensemble des acteurs.
Un tel constat est, comme on l’a déjà souligné, particulièrement frappant dans le
domaine du tourisme.
Il s’accompagne d’une connaissance généralement faible des marchés potentiels à
l’extérieur des territoires concernés, laquelle ne facilite évidemment pas les choix
stratégiques ni pour les entreprises, ni pour les acteurs politiques et institutionnels.
L’impression prévaut souvent que la mondialisation, ou mieux la globalisation des
marchés, n’a pas encore pleinement pénétré la culture des acteurs locaux (grands
groupes de distribution mis à part).
La faiblesse de la connaissance des marchés et le déficit de positionnement entraînent
des répercussions négatives sur la recherche d’investisseurs. Comme nous avons pu le
constater dans le cadre d’une autre étude117, des projets d’entreprise ont du mal à
trouver des financements faute d’un positionnement clair.
Un effort important est donc à faire pour clarifier le positionnement stratégique des
filières (et de leurs différents segments) sur la base d’une connaissance des marchés
potentiels nettement améliorée.
Du même coup, les stratégies de spécialisation intelligente (S3) qui sont aujourd’hui
lancées devraient porter une attention particulière à ce problème.

L’insuffisante structuration des filières :
Le constat d’une insuffisante structuration des filières revient de façon systématique,
quelle que soit la filière analysée, même s’il est incontestable que des progrès ont été
réalisés au cours des toutes dernières années, comme on a pu le voir dans l’étude.
Cette insuffisante structuration s’accompagne souvent d’une fragilité élevée dont elle
est en partie la cause.
Elle renvoie à ce qui est fréquemment qualifié d’ « hyper-individualisme » ou de ce
que nous préférons appeler la manque d’une « culture de la confiance » à la fois entre
les différentes catégories d’acteurs – politiques, administrations, entreprises et leurs
organisations, université/recherche – et entre entreprises d’une même filière.
Même dans la filière bâti tropical à la Réunion, pourtant relativement bien organisée,
on constate que les interactions sont encore insuffisantes.
La réponse réside sans doute dans un effort pour engager une démarche de type
« cluster » sur la base du couple coopération/concurrence (« co-opetition »). Il ne peut
s’agir que d’une démarche de moyen terme destinée à construire les relations de
117 Etude de faisabilité de la Technopole de Guadeloupe réalisée par Technopolis |ITD| pour la Région
Guadeloupe.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
154
confiance entre acteurs118 qui sont actuellement défaillantes, et qui est évidemment
inséparable d’une stratégie de positionnement à la fois claire et suivie dans la durée.

Un effort limité de capitalisation sur et de promotion de
l’ingénierie, des savoir-faire et de l’expertise :
On a pu constater, dans l’analyse de la filière ENR/MDE, que commençaient à se
développer des exportations de savoir-faire et d’ingénierie (à la Réunion notamment et
aussi en Guadeloupe). Ces exportations restent néanmoins surtout le fait de groupes
nationaux installés dans les DOM. Il y a encore peu de capitalisation au profit des
entreprises proprement locales, et dans la filière bâti tropical qui pourrait offrir des
perspectives.
D’une manière plus générale, l’émergence déjà soulignée (supra § 1.5) d’un secteur de
la connaissance, lié à la présence de structures universitaires, d’écoles d’ingénieurs et
d’instituts de recherche, a commencé en partie à se détourner d’une focalisation quasiexclusive sur les filières classiques et à se spécialiser dans la formation de savoirs et de
savoir-faire spécifiques aux zones tropicales et aux zones insulaires (énergies
renouvelables, gestion de l’environnement marin et des lagons, gestion de la
biodiversité et conseils en agriculture tropicale, lutte contre les espèces envahissantes,
génie civil en milieu tropical, etc.). Ces savoir-faire, encore exploités à petite échelle,
souvent au sein du marché domestique, sont susceptibles de favoriser l’émergence de
nouvelles filières à partir d’avantages comparatifs de nature scientifique et
technologique : protection de la biodiversité, lutte contre les espèces envahissantes,
systèmes d’alerte à certaines maladies (« vector-borne diseases »), etc.
Le développement de ce secteur de la connaissance suppose :
•
la connaissance fine des marchés potentiels ;
•
la capitalisation en termes économiques et entrepreneuriaux sur les actions et
programmes sans but lucratif (PCRD, INTERREG), en prenant appui sur les
réseaux générés par ces mêmes programmes, par des connexions efficaces entre
milieux académiques et entrepreneurs ;
•
les outils financiers appropriés (ingénierie financière) ;
•
des actions de promotion spécifiques et un travail systématique sur les appels
d’offres sur financements internationaux.
Comme on le voit, on retrouve comme conditions de réussite, la connaissance des
marchés et le positionnement stratégique, ainsi que la confiance entre les différentes
catégories d’acteurs reposant sur une démarche de type « cluster ».
Là encore, les stratégies de spécialisation intelligente (S3) pourraient alimenter
utilement non seulement la réflexion, mais aussi le développement d’instruments et
d’actions de politiques publiques.
On conclura en rappelant que la présente étude a permis de mettre en lumière des
stratégies d’entreprise qui surmontent ou tentent de surmonter les
facteurs de blocage, notamment :
•
entreprises qui se positionnent sur des niches de marché en acceptant de
s’approvisionner pour partie à l’extérieur de leur territoire – et se libèrent ainsi
des contraintes locales ;
•
entreprises qui jouent
(agroalimentaire) ;
le
jeu
de
l’intégration
avec
les
producteurs
118 Dans tous les travaux relatifs aux clusters, l’accent est mis à juste titre sur le rôle clé d’une « culture of
trust ».
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
155
•
entreprises qui font le choix d’une forte valeur ajoutée et de l’innovation constante
(y compris non-technologique).
De tels exemples doivent être à la fois soutenus et promus, même si le risque d’échec
peut être parfois élevé.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
156
Annexe : liste des entretiens
Personnes rencontrées lors de la mission en Guadeloupe :
•
•
•
•
Institutionnels :
−
Agence Française de Développement – Guadeloupe : PALACH Aurélie
−
Agence Française de Développement – Guadeloupe : DAIJARDIN Muguette
−
Agence Française de Développement – Guadeloupe : BOISSELET Bertrand
−
Préfecture de région – SGAR : BERTHON Eric
−
Préfecture de région - DIECCTE/Chargé de mission S3 : DEGAILLANDE
Ludovic
−
Préfecture de région – DRRT : FILS-LYCAON Bernard
−
CR Guadeloupe - Direction de la stratégie et des interventions économiques :
VARDE Sylvie
−
CR Guadeloupe - Direction de l'environnement et du cadre de vie : BON André
−
CR Guadeloupe - Direction de l'environnement et du cadre de vie : JULESSORET Céline
−
CR Guadeloupe - Direction de l'agriculture, de la pêche et du développement
rural : JETIL Marie-Ange
Filière ENR et MDE :
−
AKUO : MONROUX François
−
ARCHISOLAR : MAQUIABA Jean-Luc
−
AEROWATT : DUPUY Eric
−
ALINEA SOLAR : BESTAUX Jean-Christophe
−
GENERGIES : MEZIERE Andrès
−
SUNZIL : VIAL-COLLET Alain
−
TERANOV : CHOURAKI Jacques
Filière agriculture et agroalimentaire :
−
Association des Moyennes et Petites Industries de la Guadeloupe / GMA
(Grands Moulins des Antilles) : DESALME Franck
−
Jus de fruits Caraibes : GIACOMIN Laurent
−
Distillerie Séverin : MARSOLLE José
−
Compagnie indépendante des épices : MATAS Stéphane
−
Iguavie : SHITALOU Elie
−
SAS Edouard : EDOUARD Laurie
Filière tourisme :
−
AGE (Association Guadeloupe Ecotourisme) / Anse Caraïbe plongée : JASOR
Christine
−
Gîte Mabouya / Caraïb'Bay Hôtel : LONGUET Benoit
−
Comité de Tourisme des îles de Guadeloupe : ROSIER Willy
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
157
Personnes rencontrées lors de la mission en Guyane :
•
•
•
Institutionnel :
−
Préfecture de région – SGAR : PANCHOUT Julien
−
CR Guyane - Direction de l'agriculture et de la forêt : DALLE Julie
Filière bois :
−
Maison de la Forêt et du Bois de Guyane :BONJOUR Isabelle
−
Office National des Forêts (ONF) : BINET David
−
Société forestière Amazonia : GUTH Aline
−
Scierie du Larivot : TALAGRAND Olivier
−
Charpente Bois et Couverture Industrialisées (CBCI) : RIGHES Mars
−
Construction Réalisation Industrielle (CRI) : VAN CHAM Lai
−
Voltalia (biomasse) : CYRILLE Alain
Filière éco-tourisme :
−
Comité du Tourisme de Guyane (CTG) : BATHILDE Alex
−
Comité du Tourisme de Guyane (CTG) : BAILLS Marie-Claire
−
Parc Naturel Régional : GIFFARD Pascal
−
ATOUT France : BIRONNEAU Didier
−
CCI Guyane : DONATIEN Linda
−
Compagnie des guides de Guyane : AUCLAIRE Frédéric
−
Office de tourisme de Cayenne : CAFFIER Catherine
−
Amazonie découverte : VASSEUR Joëlle
−
Guya'rando : AUCLAIRE Frédéric
−
Jal voyages : ANTOINE Jean-Louis
−
Kwata : DE THOISY Benoit
Personnes rencontrées lors de la mission en Martinique :
•
•
Institutionnel :
−
Agence Française de Développement – Martinique : BOUGAULT Hervé
−
Agence Française de Développement – Martinique : ARDON Philippe
−
Préfecture de région – DIECCTE : CHARLERY-ADELE Jean-Max
−
CR Martinique : MOUTAMALLE Lise
−
Préfecture de région – SGAR : MAFFRE Philippe
−
CR Martinique - Direction de l'environnement : BEJGANE Marwane
−
DAAF : HOFFERER Sabine
Filière ENR et MDE :
−
ADEME : BORDAGE Michel
−
EDF : BOISSEAU Christophe
−
EDF : YP-TCHA BAVIER Evelyne
−
Solarelectric : JEDRE Ludovic
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
158
−
•
Agence martiniquaise de l'énergie : BELLEMARE Laurent
Filière agriculture et agroalimentaire :
−
IMAFLHOR : LAVIOLETTE André
−
AMIV (Viande) : DEGRAS Philippe
−
Madivial (Viande) : MILIA Ange
−
Madivial (Viande) : JEAN-LOUIS Pierre
−
AMPI (industrie) : CRESTOR Richard
−
Banamart : MONTEUX Bernard
−
Rhum Neisson / Syndicat de défense de l'appelation AOC du Rhum
Martinique : NEISSON Claudine
−
Rhum Neisson / Syndicat de défense de l'appelation AOC du Rhum
Martinique : PADERNA Jean-Claude
−
PARM : ROCHEFORT Katia
−
Technopole-CACEM : GESTEL Gilles
−
Chocolats Lauzéa : LAUZÉA Thierry
−
La Tivolienne : TOUSSAY Hervé
Personnes rencontrées lors de la mission à La Réunion :
•
•
•
Institutionnel :
−
Agence Française de Développement – Réunion : DUBERNET Marc
−
CR Réunion – Tourisme : FRUTEAU Colette
−
CR Réunion - Développement durable : DIEUDONNE Jules
−
Préfecture de région – SGAR : THIBIER Fabrice
−
Préfecture de région – SGAR : KREMER Olivier
−
Préfecture de région – DIECCTE : BLIN Thierry
Transversal :
−
Association pour le Développement Industriel de la Réunion : DELMONT DE
PALMAS Françoise
−
NEXA : HOLSTEIN Philippe
−
NEXA : BIGEY Gaston
−
NEXA : LORION Frédéric
Filière ENR et MDE :
−
ADEME : BEUTIN Philippe
−
ARER : EZAVIN Pierre-Yves
−
Temergie : ROSA Anthony
−
Syndicat des énergies renouvelables / Aérowatt : BORCHIELLINI Serge
−
EDF : BURIEZ Nicolas
−
GDF SUEZ : BASSAC Eric
−
Akuo Energy : BALLANDRAS Jean
−
Vergnet : RIVARD Marc
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
159
•
•
−
Austral Energy : ARCELIN Steve
−
Corexsolar : GALBOIS Patrice
−
Réuniwatt : SCHMUTZ Nicolas
−
Solarprod : MOUNOUSSAMY Valère
−
Schneider Electric : GUEFFIER Antony
−
TEEO / Convergence : VIENNE Dominique
Filière matériaux et construction tropicale :
−
Société immobilière du Département de la Réunion : JOUANEN Philippe
−
Société immobilière du Département de la Réunion : GAERTNER Hervé
−
Ecole d'architecture du Port : ROSIER Pierre
−
CIRBAT : MOUROUVAYE Alçay
−
CIRBAT : PICHARD Chloé
−
CBO Territoria : WUILLAI Eric
−
Pierre & Bois : NAZE Pierre-Philippe
−
Socotec Réunion : LAURENT Alain
Filière tourisme :
−
Ile de La Réunion Tourisme (IRT) : VINCENT Raoul
−
Bourbon Voyages : FRECAUT Catherine
−
Hôtel & Co : MANSON Fabrice
−
Club du tourisme : CHATEL Katherine
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
160
Annexe : données des douanes sur les échanges de marchandises
Introduction
Les données de la balance commerciale présentées dans cette section concernent les
principaux produits échangés en niveau d'agrégation spécifique A129119, données
établie par la Direction générale des Douanes et droits indirects.
Ces données ne retracent que les échanges de marchandises et non de
services120. Les données douanières répondent donc difficilement aux
exigences de l’étude concernant les filières stratégiques étudiées pour les
quatre DROM (tourisme-écotourisme, énergie renouvelable et maîtrise de
l’énergie, bâti tropical…), hormis dans les cas des secteurs agriculture
(données par type de produit disponibles), pêche et agroalimentaire.
Panorama général
Le total cumulé des exportations de La Réunion, Martinique, Guadeloupe et Guyane
en 2012 était de 670 millions d’euros, alors que les importations représentent 5,7
milliards d’euros, ce qui se traduit par des soldes commerciaux déficitaires (5 milliards
d’euros en 2012 contre 4,2 milliards en 2011), avec des taux de couverture très faibles
(cf. Figure 3 et Tableau 5). Entre 2011 et 2012, les exportations des quatre DROM ont
reculé de 13 % tandis que les importations ont augmenté de 14 %.
Guadeloup
e Guyane MarBnique Réunion Figure 3
Importations et exportations dans les quatre DROM en 2011 et 2012
Solde -­‐1718 -­‐1927 1924 2136 Import 206 209 Export Solde -­‐1239 -­‐1097 1274 1128 Import 35 31 Export Solde -­‐1273 Import 792 399 497 Export Solde 2012 -­‐295 1672 2011 -­‐822 -­‐927 852 960 Import 30 33 Export -­‐3000 -­‐2000 -­‐1000 0 1000 2000 3000 119 La direction des Douanes utilise plusieurs niveaux d'agrégation spécifiques de la nomenclature NAF-CPF
révision 2 (2008), nommée « nomenclature agrégée ». Les statistiques produits sont généralement
présentées selon trois niveaux d'agrégation : A17, A38 et A129. Cette nomenclature est gérée par l'INSEE et
remplace la Nomenclature économique de synthèse (NES) en 2009. Les données sont établies sur la base
d’échanges FAB/FAB (Cf. http://lekiosque.finances.gouv.fr/imagesdouane/source1.htm)
120 Les principales séries du commerce extérieur de la France sont non seulement corrigées des variations
saisonnières, mais également estimées pour tenir compte des déclarations tardivement adressées à la
douane. Les échanges FAB/FAB prennent en compte une estimation des flux sous les seuils déclaratifs.
Les données régionales et départementales du commerce extérieur sont établies, en retenant, en principe, le
département de production ou de consommation des marchandises. Cependant, pour des raisons d’ordre
pratique notamment, on admet que soit indiqué le département de départ ou d’arrivée des marchandises.
Ainsi, par exemple, les importations de produits pétroliers se concentrent sur quelques départements
seulement (cf. http://lekiosque.finances.gouv.fr/Appchiffre/regionales/surcadre_regionales.asp).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
161
Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs
brutes de collecte en millions d'euros.
Tableau 5
Importations et exportations en 2011 et 2012
Guadeloupe
2011 2012
Guyane
2011 2012
Martinique
2011 2012
Réunion
2011 2012
Exportations
AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture
C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA)
C2 - Produits pétroliers raffinés et coke
C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et
informatique
C4 - Matériels de transport
C5 - Autres produits industriels
CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures
CC - Bois, papier et carton
CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques
CF - Produits pharmaceutiques
CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers
CH - Produits métallurgiques et produits métalliques
CM - Produits manufacturés divers
DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries
extractives, électricité, déchets
JZ - Produits de l’édition et de la communication
Total
Importations
AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture
C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA)
C2 - Produits pétroliers raffinés et coke
C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et
informatique
C4 - Matériels de transport
C5 - Autres produits industriels
CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures
CC - Bois, papier et carton
CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques
CF - Produits pharmaceutiques
CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers
CH - Produits métallurgiques et produits métalliques
CM - Produits manufacturés divers
DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries
extractives, électricité, déchets
JZ - Produits de l’édition et de la communication
Total
Solde
AZ - Produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture
C1 - Produits des industries agroalimentaires (IAA)
C2 - Produits pétroliers raffinés et coke
C3 - Équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et
informatique
C4 - Matériels de transport
C5 - Autres produits industriels
CB - Textiles, habillement, cuir et chaussures
CC - Bois, papier et carton
CE - Produits chimiques, parfums et cosmétiques
CF - Produits pharmaceutiques
CG - Produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers
CH - Produits métallurgiques et produits métalliques
CM - Produits manufacturés divers
DE - Hydrocarbures naturels, autres produits des industries
extractives, électricité, déchets
JZ - Produits de l’édition et de la communication
Total
5
2
5
-
1
-
1
-
3
7
3
12
1
130
1
1
133
5
3
3
19
25
3
3
22
10
10
9
2
2
4
1
9
8
2
2
2
2
467
9
2
5
1
351
16
1
2
12
1
2
2
1
5
2
1
1
1
12
19
1
1
5
1
1
4
5
9
21
1
1
7
1
2
5
5
5
4
1
6
15
10
24
27
33
30
497
399
31
35
1
209
206
13
81
420
17
82
351
6
36
104
7
37
53
13
63
306
13
69
348
39
217
590
40
236
633
124
80
135
103
118
94
306
210
95
191
25
31
17
50
33
35
76
208
22
35
20
52
44
35
398
104
7
6
32
1
23
21
15
1 198
273
8
6
189
26
30
14
93
183
19
20
28
1
51
33
31
90
179
16
20
28
54
32
30
403
500
54
72
55
3
118
116
82
218
509
55
75
62
1
122
110
84
34
37
9
1
351
479
75
75
1
960
1
852
792
1
1 672
1
1 128
1
1 274
5
2 136
4
1 924
-13
-76
-418
-17
-77
-351
-6
-35
-104
-7
-36
-53
-13
-60
-299
-13
-66
-336
-38
-87
-589
-39
-103
-628
-121
-77
-116
-78
-115
-91
-284
-200
-85
-182
-25
-31
-15
0
-48
-29
-34
-67
-200
-22
-35
-18
0
-50
-42
-33
69
-95
-7
-6
-30
-1
-23
-16
-14
-847
-257
-8
-5
-187
0
-26
-18
-13
-91
-181
-19
-20
-28
-1
-51
-33
-30
-85
-177
-16
-20
-27
0
-54
-31
-29
-391
-481
-53
-71
-50
-2
-117
-112
-77
-209
-488
-54
-74
-55
0
-120
-105
-79
-29
-33
-8
5
-336
-469
-51
-48
-1
-927
-1
-822
0
-295
-1
-1273
-1
-1097
-1
-1239
-4
-1927
-4
-1718
Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs
brutes de collecte en millions d'euros.
La structure des importations des quatre DROM est dominée par les
produits manufacturés : les Produits pétroliers raffinés, Autres produits
industriels et Matériels de transport (Centre Spatial de Guyane) constituent les trois
principaux produits d’importation des quatre DROM (soit un total de 58 % des
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
162
importations) - cf. Tableau 5. Les exportations sont encore moins diversifiées
que les importations : les Matériels de transport (Centre Spatial de Guyane), les
Produits des industries agroalimentaires (IAA), les Produits pétroliers raffinés et coke
et les Produits Hydrocarbures naturels, autres produits des industries extractives,
électricité, déchets constituent les trois principaux produits d’exportation des quatre
DROM (soit un total de 81 % des exportations).
Figure 4
Répartition par secteur des importations et exportations de quatre
DROM en 2011 et 2012
Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs
brutes de collecte en millions d'euros.
Des exportations et importations des quatre DROM géographiquement
concentrées sur quelques pays.
Pour les cas de la Guadeloupe et de La Réunion, la moitié des exportations sont
concentrées dans les cinq premiers pays d’exportations. Les exportations sont encore
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
163
plus concentrées géographiquement dans les cas de la Martinique (72 %) et de la
Guyane (85 %) - cf. Tableau 6.
Tableau 6
Principaux pays d’exportation (hors hexagone) de quatre DROM, tous
secteurs confondus
REGION
Guadeloupe
Guyane
Martinique
Réunion
Pays
Total
Polynésie française
Antilles néerlandaises
Espagne
Pays NDA
Allemagne
Autres
Total
Pays NDA
Luxembourg
Allemagne
Suisse
Trinité et Tobago
Autres
Total
Etats-Unis
Belgique
Pays NDA
Antilles néerlandaises
Trinité et Tobago
Autres
Total
Vietnam
Espagne
Madagascar
Mayotte
Inde
Autres
Total en milliers d'euros %
29575
100%
1
4069
14%
2
3276
11%
3
2636
9%
4
2215
7%
5
2209
7%
51%
398760
100%
1
152000
38%
2
119000
30%
3
26580
7%
4
21337
5%
5
20130
5%
15%
37950
100%
1
15009
40%
2
5101
13%
3
2751
7%
4
2249
6%
5
2097
6%
28%
206245
100%
1
25074
12%
2
23838
12%
3
20432
10%
4
20181
10%
5
14334
7%
50%
Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs
brutes de collecte en milliers d'euros.
Pour les cas de la Guadeloupe et de La Réunion, plus du tiers des importations
proviennent des cinq premiers pays d’importation. Pour la Guyane et la Martinique, la
dépendance vis-à-vis de quelques pays est encore plus marquée puisque ce sont
respectivement 85 % et 78 % des importations qui proviennent des cinq premiers pays
d’importation (cf. Tableau 7).
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
164
Tableau 7
Principaux pays d’importation (hors hexagone) de quatre DROM, tous
secteurs confondus
REGION
Pays
Guadeloupe Total
Etats-Unis
Autres pays
Iles vierges des USA
Chine
Trinité et Tobago
Autres
Guyane
Total
Corée du Sud
Allemagne
Italie
Etats-Unis
Suisse
Autres
Martinique Total
Norvège
Etats-Unis
Autres pays
Allemagne
Royaume-Uni
Autres
Réunion
Total
Singapour
Chine
Autres pays
Afrique du Sud
Allemagne
Autres
Total en milliers d'euros %
852302
100%
1
243445
29%
2
98582
12%
3
92854
11%
4
68854
8%
5
49625
6%
35%
1671701
100%
1
997341
60%
2
199582
12%
3
105486
6%
4
68933
4%
5
57014
3%
15%
1274187
100%
1
424966
33%
2
318735
25%
3
120441
9%
4
67879
5%
5
62546
5%
22%
1923247
100%
1
539868
28%
2
210037
11%
3
169221
9%
4
119980
6%
5
116157
6%
40%
Sources et notes : Directions des douanes. Données CAF-FAB hors matériel militaire, valeurs
brutes de collecte en milliers d'euros.
Etude sur les avantages comparatifs et les filières d’avenir dans les DOM
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