sécurité - Muséum d`histoire naturelle du Havre
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sécurité - Muséum d`histoire naturelle du Havre
• 1,50 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO9727 LUNDI 20 AOÛT 2012 WWW.LIBERATION.FR SÉCURITÉ A Amiens mardi, lors de la venue de Manuel Valls. PHOTO THOMAS HUMERY DE QUOI LA GAUCHE A PEUR? ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC MANUEL VALLS Attaqué par la droite, le ministre de l’Intérieur défend sa politique de sécurité, qu’il veut en lien avec la justice. Somalie: une paix En chantier: sans repères Paris enfin tout Les députés doivent élire aujourd’hui le président somalien, ouïe pour la dans un pays stabilisé après vingt ans de guerre civile. Mais, face à l’insécurité et à la pauvreté, philharmonie le renouveau reste fragile. ET AUSSI NOS SÉRIES, BD, QUIZ… 8 PAGES CAHIER CENTRAL REPORTAGE, PAGES 67 La donation Lambert met le haut de l’art à Avignon Basquiat, Buren, Barceló… le fonds du collectionneur confié à l’Etat est présenté pour la première fois. PAGES 1819 IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,20 €, Andorre 1,50 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,60 €, Canada 4,50 $, Danemark 26 Kr, DOM 2,30 €, Espagne 2,20 €, EtatsUnis 5 $, Finlande 2,60 €, GrandeBretagne 1,70 £, Grèce 2,60 €, Irlande 2,35 €, Israël 19 ILS, Italie 2,20 €, Luxembourg 1,60 €, Maroc 16 Dh, Norvège 26 Kr, PaysBas 2,20 €, Portugal (cont.) 2,30 €, Slovénie 2,60 €, Suède 23 Kr, Suisse 3 FS, TOM 410 CFP, Tunisie 2,20 DT, Zone CFA 1 900 CFA. DOUGLAS GORDON. COLLECTION YVON LAMBERT CAHIER PAGES 25 2 • EVENEMENT ÉDITORIAL Par SYLVAIN BOURMEAU Défaite La gauche a peur. Effrayée de passer pour angélique aux yeux des téléspectateurs du 20 heures de TF1, elle apparaît comme tétanisée dès lors qu’il s’agit de sécurité. Roger Gicquel est mort, mais cette phrase – «la France a peur» –, qu’il prononça un soir de 1976 en ouverture du journal télévisé à la faveur d’un fait divers, agit depuis comme un spectre. Quelques mois plus tard, la droite adoptait ce qui apparaît aujourd’hui encore comme le socle de la plupart des politiques conduites depuis en la matière : le sinistre rapport Peyrefitte, qu’une gauche alors en meilleure forme intellectuelle combattit avec ardeur. Vingt ans plus tard pourtant, en 1997, lors d’un colloque à Villepinte, elle rendit les armes par la voix du très républicain ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement, qui n’hésita pas à décréter la sécurité «concept de gauche». A deux mois du tristement célèbre premier tour de l’élection présidentielle de 2002, le candidat honteusement socialiste Lionel Jospin alla même plus loin : en qualifiant de «naïveté» la croyance qu’il regrettait avoir jusque-là entretenu dans l’existence de causes sociales de la délinquance, il entérinait la défaite absolue de la gauche dans cette bataille des idées. Pourtant, rien n’y fait, en dépit (et surtout à cause) de cette surenchère sécuritaire, la gauche apparaît toujours comme laxiste. Revenue au pouvoir après une campagne qui sut raisonnablement oublier cette question, il est plus que temps qu’elle s’arrache du piège idéologique tendu par la droite. Qu’elle renoue avec ses principes et la priorité absolue au social. Qu’elle démontre clairement que le réalisme se situe du côté de ceux qui jamais ne cherchent à attiser les peurs en confondant, par exemple, insécurité et sentiment d’insécurité. LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 Au terme d’une semaine éprouvante pour la gauche en matière de sécurité, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, fait le point sur ses objectifs et répond aux critiques de la droite: «Un seul talisman, la République, un seul discours, la fermeté» Par FABRICE TASSEL et PATRICIA TOURANCHEAU E n pleine polémique estivale sur les questions de sécurité, entre l’expulsion des Roms, l’explosion d’Amiens et les batailles de chiffres, Manuel Valls, ministre de l’Intérieur, répond pied à pied aux critiques dans Libération et détaille point par point sa politique. Pouvez-vous expliquer votre doctrine en matière de sécurité, sachant que l’angélisme, c’est fini, et que la gauche se veut décomplexée sur ces questions? Justement. Je pense que les questions de sécurité se meurent des «doctrines» et des instrumentalisations en tout genre. En la matière, chacun a une INTERVIEW responsabilité: les politiques, les associations, les médias. Quand, à Amiens, les forces de l’ordre sont attaquées à la chevrotine, au mortier, au cocktail Molotov… quand une école, un gymnase, des voitures sont incendiées… quelle autre réponse faut-il apporter que L’ESSENTIEL LE CONTEXTE Relativement absentes lors de la campagne présidentielle, les questions de sécurité ont resurgi à la faveur de l’actualité estivale. L’ENJEU Manuel Valls défend une politique très ferme, qu’il qualifie de républicaine. celle de la République et de l’ordre républicain? L’action que nous menons veut mettre fin, précisément, à «l’endoctrinement» généralisé qui agite, depuis dix ans, les questions de sécurité et qui ne fait qu’attiser les polémiques en ajoutant systématiquement de l’huile sur le «feu insécuritaire». Un seul idéal, un seul talisman pour le gouvernement: la République. Un seul esprit: l’apai- REPÈRES MANUEL VALLS w 13 août 1962 Naissance à Barcelone. w 1980 Adhésion au PS. w 1997 Chargé de communication de Lionel Jospin à Matignon. w 2001 Elu maire d’Evry. w 2002 Devient député de l’Essonne. w 2011 Candidat à la primaire socialiste (il recueillera 5,6% des voix). w 2012 Ministre de l’Intérieur. Cent jours après son élection, François Hollande a consacré mardi son premier déplacement dédié à la sécurité à Pierre feuduVar, où deux femmes gendarmes avaient été abattues deux mois plus tôt par un ancien condamné. Il y a tenu un discours très ferme sur la récidive. Mercredi, le ministre de l’Intérieur a été dépêché par l’Elysée et Matignon à Amiens, où de violents affrontements ont opposé la veille des jeunes gens et les forces de l’ordre. Hué à son arrivée, Manuel Valls n’a eu de mots que pour les 17 policiers blessés et n’a pas su rassurer les habitants. EXPULSIONS DE ROMS Plusieurs démantèlements de camps de Roms, notamment autour de Paris, Lyon et Lille, suivis de l’expulsion des occupants, ont relancé la polémique sur le traitement de ces citoyens euro péens en provenance de Roumanie et de Bulgarie. Une réunion interministé rielle se tient mercredi à Matignon. sement. Un seul discours face aux troubles: la fermeté. Vous sentez-vous isolé dans le rôle du père Fouettard et du premier flic de France au sein du gouvernement? Là encore, ne cédons pas aux images d’Epinal sécuritaires, sinon on ne progresse pas. Celui qui ne constate pas que la gauche a entamé un profond virage sur la question passe à côté du principal : la gauche au pouvoir, avec François Hollande et Jean-Marc Ayrault, assume pleinement les prérogatives régaliennes de l’Etat. Et j’irai même plus loin : nous entendons démontrer, dans la durée, notre capacité à faire mieux que la droite pour assurer la sécurité des Français. Oui, je suis le premier flic de France, mais je suis aussi le ministre des grandes libertés publiques, le ministre de l’organisation de l’Etat sur l’ensemble du territoire. J’ai la charge des questions d’immigration, d’intégration et d’asile. Je suis enfin le ministre des cultes, et je veux donner toute sa force au principe de la laïcité. Toutes ces missions impliquent d’agir avec tempérance et fermeté. Comment sortir de l’antisarkozysme, se démarquer de la politique sécuritaire de droite alors même que celle-ci dit que la vôtre n’en est qu’une copie? Mais ça n’est pas mon combat. Je ne fais pas du sarkozysme l’alpha et l’oméga du débat politique. La droite, pour continuer à exister, veut nous y rabattre systématiquement. C’est à elle de faire son bilan si elle veut se renouveler. C’est son problème, son urgence. Quant à nous, aux responsabilités, il nous revient de tracer notre chemin avec sérénité. Où placez-vous le curseur entre prévention et répression? Qui dit curseur dit séparation, et donc logique manichéenne. La droite ne cesse de vouloir dissocier les deux… Vous parlez de curseur, mais une politique de sécurité réfléchie et cohérente ne dissocie pas prévention et répression. Ce sont deux leviers complémentaires et indissociables. Sur des questions qui touchent aux libertés et aux droits de l’homme, vous paraissez en recul par rapport à certaines Suite page 4 • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 3 Manuel Valls à Amiens, le 14 août, au lendemain de la nuit d’émeutes qui a agité la ville. PHOTO THOMAS HUMERY Zones prioritaires, lutte antidrogue… après avoir donné des gages aux policiers, le ministre lance ses chantiers. Valls, l’atout sécurité du PS abat ses cartes A rrivé en terrain miné Place Beauvau, face à des manifs de policiers en colère, des gendarmes laissés pour compte et des commissariats exsangues ayant perdu plus de 10000 postes en cinq ans, Manuel Valls a d’abord voulu «gagner la confiance» de ses troupes pour rétablir «l’ordre républicain», mais aussi rapprocher la police de la population. Ainsi, face à la résistance des syndicats de police pour délivrer un récépissé lors des contrôles d’identité, le ministre de l’Intérieur a-t-il renoncé à ce projet de la gauche:«Je ne veux pas imposer un dispositif qui tournerait au ridicule et serait inopérant.» Mais, dans sa feuille de route aux commissaires de police et aux officiers de gendarmerie, Valls a bien préconisé de «veiller à proscrire les contrôles d’identité abusivement répétés ou réalisés sans discernement» et a de- mandé à ses services de plancher sur l’idée d’un simple «reçu» à remettre aux intéressés. Tout en se montrant inflexible sur la déontologie –«sanctionnez toute forme de familiarité et de tutoiement, qui dégradent les relations entre les forces de l’ordre et les citoyens»–, le premier flic de France a promis de les soutenir face à l’adversité et multiplie, depuis, les déplacements au chevet de policiers blessés ou de familles de gendarmes décédés. «Audace». Attendu par ses hommes sur la brûlante question de la «protection juridique» des fonctionnaires mis en examen (celle d’un policier de Noisy-le-Sec pour le meurtre d’un récidiviste avait fait descendre les flics dans la rue), Manuel Valls a dû leur donner des gages: maintien du salaire ou réaffectation jusqu’à leur relaxe ou leur condamnation. Ainsi, le patron de l’antenne police judiciaire de Grenoble et le chef de l’antigang de Lyon, mis en examen dans l’affaire Neyret – ex-numéro 2 de la PJ de Lyon tombé pour corruption et trafic de stup –, vont être réintégrés, l’un en Guyane, l’autre dans les Yvelines. Le ministre a également «arrêté la saignée» des effectifs en préservant 1 800 postes voués par la droite à la disparition en 2013, mais ne cache pas en aparté que l’apport des 500 nouveaux flics reste «modeste». En parallèle, plusieurs chantiers ont été lancés. Le principal étant la création en septembre de 50 à 60 zones de sécurité prioritaires, adaptées à des territoires ciblés, dont 15 ont déjà été définis, pour «mettre le paquet là où il faut et pour ce qu’il faut», puis instaurer une nouvelle forme de police de proximité dans ces quartiers. Reste à trouver «les jeunes commissaires qu’il faut pour porter cette politique» dans les directions départementales de sécurité publique. Valls a déjà enjoint les futurs chefs de service à nouer des «relations apaisées et constructives» avec les magistrats en organisant des «conférences Intérieur-Justice» dans les régions, à faire «preuve de créativité» et «d’audace», «notamment en communication» pour «expliquer l’action de la police à nos concitoyens, aux acteurs locaux et aux maires», car «le capital image de l’institution se construit surtout en local». Parechocs. Aux yeux du ministre, la lutte contre le trafic international de stupéfiants constitue un «objectif majeur». Il se voit déjà, non sans vantardise, «couper toutes les routes de la drogue, avec les Espagnols». Excusez du peu. «Personnalité capable de prendre les chocs» comme tout bon ministre de l’Intérieur selon les mots d’Alain Bergounioux, historien du PS, Valls incarnerait en quelque sorte le pare-chocs de la gauche contre les reproches d’angélisme. Rompu à encaisser les coups et à les rendre, il revendique son rôle de père Fouettard sans pour autant jouer les va-t-en-guerre. Décidé à «rester très ferme sur les interdits», notamment le cannabis, qu’il n’est pas question à ses yeux de dépénaliser, et les camps illicites de Roms, qu’il fait démanteler, il souhaiterait voir abrogé le délit de solidarité avec les étrangers en situation irrégulière dans le futur texte de loi. Son ambition : «Je veux faire la démonstration qu’un ministre de l’Intérieur peut à la fois affirmer l’autorité de l’Etat républicain et préserver les libertés publiques.» PATRICIA TOURANCHEAU 4 • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 EVENEMENT promesses de campagne, tel le fameux récépissé délivré lors des contrôles d’identité… Il ne faut pas confondre l’objectif et les moyens. L’engagement de campagne du président de la République est de lutter contre les contrôles au faciès. Le récépissé est un moyen, possible parmi d’autres – la fin du tutoiement, l’usage du matricule, l’utilisation de caméras – pour aborder cette question qu’il ne s’agit en aucun cas d’ignorer. Le code de déontologie sera en outre prochainement révisé, précisé. Il y va de l’autorité des forces de l’ordre: mieux respectées et ellesmêmes toujours respectueuses des citoyens, elles seront plus efficaces. Le recul sur le récépissé reflète-t-il votre crainte de mécontenter les policiers et leurs syndicats, devenus tout-puissants sous Sarkozy? Je me dois d’être à l’écoute des partenaires sociaux, pluralistes et plus représentatifs qu’ailleurs. Pourquoi s’en plaindre ? Mais, sur ce sujet, il faut avant tout faire preuve de pragmatisme, d’efficacité et de respect des libertés. La question des fichiers, qui appelle des réserves de la Cnil [Commission nationale de l’informatique et des libertés, ndlr] à propos du récépissé, devrait aussi interpeller, non? Sur les Roms, se dirige-t-on vers une levée des mesures transitoires qui leur permettraient d’accéder à un emploi? Cette piste est, par nature, un dossier interministériel : attendez donc que la réunion conduite par Jean-Marc Ayrault mercredi ait eu lieu. Aviez-vous pris la mesure de l’ampleur des dégâts, du fossé entre la population et la police avant votre déplacement à Amiens? Comment allez-vous vous y prendre pour retisser du lien entre les jeunes et la police? Nous payons, à Amiens comme ailleurs, le refus dogmatique de toute police de proximité, la politique systématique du chiffre, la baisse des effectifs, qui ont conduit à établir une distance de plus en plus grande entre la police et les citoyens, particulièrement dans les quartiers populaires. Ecoutez le maire d’Amiens expliquant que quelques jeunes caïds, âgés de 12 à 30 ans, veulent faire la loi dans certains quartiers, et que le droit à la sécurité n’y est plus assuré ! En m’y rendant, j’ai entendu des critiques, auxquelles je dois répondre –une enquête administrative est en cours. Mais j’ai aussi écouté des riverains, pour beaucoup déjà frappés par le chômage et parfois la désespérance sociale, qui voient leur tranquillité quotidienne sapée par des comportements inadmissibles et qui condamnent fermement les violences dont ils ont été les témoins. Patiemment, méthodiquement, j’entends travailler avec policiers et gendarmes sur la relation au public en inSuite de la page 2 ROMS : AUBRY FÂCHÉE ? Manuel Valls a démenti samedi, lors d’un déplacement à Pignans (Var), tout conflit avec Martine Aubry au sujet des Roms. Un article du Parisien, publié le même jour, évoquait la colère de la première secrétaire du Parti socialiste, qui n’aurait «pas du tout apprécié d’être mise devant le fait accompli avec le démantèlement d’un camp de Roms» à Lille au début du mois. Le ministre précise: «Nous avons, avec les élus de la communauté urbaine de Lille, fait évacuer deux campements illicites. La préfecture a été en contact permanent avec le cabinet de Martine Aubry.» Cette dernière s’exprimera sur les Roms dans la semaine, alors que mercredi se tient à Matignon une réunion interministérielle sur le sujet. tervention. Mais je veux aussi sortir des clichés et des idées reçues. Tous les jeunes ne sont pas hostiles à la police et, inversement, le recrutement de la police a beaucoup évolué. Je veux m’attaquer à la délinquance car elle est une injustice supplémentaire pour les plus modestes, mais je sais que la seule réponse de sécurité n’est pas suffisante : c’est pour cela que la jeunesse, la formation et l’emploi sont les grandes priorités de ce quinquennat. Concrètement, comment les zones de sécurité prioritaires (ZSP) vont-elles fonctionner? Elles sont faites, avec une sélectivité assumée, pour s’investir encore davantage dans les territoires les plus gravement perturbés par la délinquance. D’une part, en y conjuguant tous les savoir-faire professionnels –présence, sécurisation, investigation, renseignement, prévention – afin de répondre efficacement aux actes identifiés, notamment ceux dont se plaignent le plus les habitants. D’autre part, en complétant l’action policière par un partenariat local resserré (justice, polices municipales, élus, bailleurs sociaux, établissements scolaires, services publics locaux…). Sur ce dossier, Christiane Taubira et moi travaillerons main dans la main. En outre, je souhaite que les ZSP soient des dispositifs conçus et pilotés à l’échelon local. Un cadre monolithique et rigide décrété depuis Paris serait inefficace. Le choix des quinze premières ZSP n’a-t-il pas aussi obéi à une volonté de faire plaisir aux gendarmes et à des élus de gauche? Etrange question ! Les premières ZSP permettront d’amorcer le dispositif. Elles concernent aussi bien des villes de droite que de gauche. D’autres s’ajouteront dans les prochains mois. Tout le monde sait aussi que la délinquance périurbaine est différente de celle des grands ensembles. Des «ZSP gendarmerie» ont donc été définies sur des secteurs prioritaires relativement aux autres territoires de la gendarmerie, par exemple là où les cambriolages ont explosé. Comment motiver des policiers parmi «les plus aguerris» pour aller travailler dans ces zones de sécurité prioritaires? Les policiers et les gendarmes que je croise quotidiennement ont le sens du service public. Leur engagement et leur courage forcent souvent le respect. Effectivement, il faut des fonctionnaires d’expérience et mieux encadrés au sein des équipes intervenant dans les secteurs difficiles. Les choix de recrutement en tiendront compte. Pour la reconnaissance, il existe toute une palette de leviers possibles, des systèmes de promotions à l’indemnité exceptionnelle. Mais, de tout cela, je discuterai d’abord avec les représentants des policiers et des gendarmes. Avez-vous les moyens budgétaires de votre politique? M. Hortefeux vient lui-même de l’avouer: si ses amis étaient restés au pouvoir, 4000 postes de policiers et de gendarmes auraient été supprimés en 2013, en plus des 10 700 déjà détruits en cinq ans. Ces 4000 emplois seront non seulement préservés, mais 500 postes par an seront créés, réservés au terrain. Ferez-vous des économies en fermant des sous-préfectures pour les basculer vers les ZSP? Ne mélangeons pas tout ! L’avenir du réseau territorial des sous-préfectures n’a strictement rien à voir avec la répartition des forces de sécurité. Quelle méthode allez-vous appliquer pour démanteler les trafics dans les cités et l’économie souterraine? Allez-vous vous démarquer de celle de Guéant-Sarkozy? La ténacité et la fermeté vis-à-vis des trafiquants, en refusant absolument la stigmatisation des quartiers et de leurs habitants. Nombre des personnes soulignent que ces trafics nuisent gravement à leur existence. Les ZSP, c’est aussi cela: amener la police judiciaire, les GIR [groupes d’intervention régionaux, ndlr] et le renseignement à travailler avec les commissariats de sécurité publique sur des objectifs territoriaux concrets. La lutte contre les trafics d’héroïne, de cocaïne et de cannabis, dont les réseaux de distribution font des habitants des quartiers populaires les premières victimes, se joue aussi au niveau européen. Allez-vous appliquer le plan d’équipement en vidéosurveillance lancé par la droite? Une caméra n’est ni de droite ni de gauche! La vidéo est un simple outil qui ne fonctionne bien que couplé avec une présence humaine. Il faut se donner les moyens à la fois d’exploiter les images en temps réel et d’orienter l’action des équipes sur le terrain. Protéger l’espace public est une grande ambition de la gauche, car il est le lieu où se rencontrent les citoyens. Assurer la sécurité des transports publics, c’est garantir la libre circulation de ceux qui n’ont pas les moyens de se déplacer autrement, comme de ceux qui choisissent les modes de déplacement doux et écologiques. • «Nous payons le refus dogmatique de toute police de proximité, la politique systématique du chiffre, la baisse des effectifs.» Le 14 août à Amiens, après les heurts entre jeunes et policiers. PHOTO PHILIPPE HUGUEN. AFP LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 EVENEMENT • 5 D’Amiens à Sevran, les édiles exposent leur convictions pour éviter une logique sécuritaire. Les maires français contre le «tout-répressif» L es maires sont en première ligne en matière de sécurité, notamment depuis la loi de mars 2007, qui les a placés au centre des politiques de prévention. Cinq d’entre eux font part de leurs attentes. «Remettre du bleu sur le terrain» MICHEL DESTOT (PS, GRENOBLE) «La demande des maires de grandes villes, de gauche ou de droite, est double [Michel Destot est président de l’Association des maires de grandes villes de France, ndlr]. D’abord, il y a besoin de remettre sur le terrain du bleu, et du bleu visible. Aujourd’hui, la police que voit la population est une police d’intervention, la BAC, qui est en civil. Il faut que la police soit visible, et qu’elle soit plus à l’écoute de la population, qu’elle ait les moyens de répondre en temps réel. Cela peut paraître sim- pliste, mais les citoyens, nous l’entendons tous les jours, se plaignent de ne pas avoir de réponse rapide lorsqu’ils composent le 17. La deuxième priorité devrait être la lutte contre le sentiment d’impunité. Il y a trop de temps entre l’acte et la sanction, ce qui crée un sentiment d’incompréhension et de défiance. Cela passe par des moyens pour la justice, ne serait-ce que, déjà, des greffiers pour désembouteiller les tribunaux.» «Ne pas stigmatiser les quartiers» GILLES DEMAILLY (PS, AMIENS) «Une partie de la population ne fait pas confiance à la police. C’est pour ça qu’il faut des policiers en contact avec la population. On connaît les personnes qui posent des problèmes, les multirécidivistes. C’est sur eux qu’il faut concentrer les efforts et les moyens. La confiance, il faudra du temps pour la restaurer. Le combat pour la sécurité est un combat difficile. J’habite à 500 m des quartiers Nord d’Amiens, je vois les guetteurs, les voitures qui tournent au ralenti. La pression sur les habitants est constante. Ils subissent. Mardi, pendant que le ministre était là, j’ai appris qu’un gardien d’immeuble de l’Opac avait été menacé pour qu’il donne les clés d’une cave. On a dépassé les limites depuis longtemps. Je ne suis pas pour le tout-répressif. Et je crois qu’il faut faire attention à ne pas stigmatiser ces quartiers. Mais, sans le retour de l’ordre et de la sécurité, tous les efforts financiers que nous avons faits pour la rénovation urbaine seront réduits à néant.» «Adapter le suivi policier et judiciaire» GÉRARD COLLOMB (PS, LYON) «Ce que j’attends du ministre de l’Intérieur, c’est une réponse sur un double plan. D’abord, il ne faut rien laisser passer grâce à un suivi policier et judiciaire adapté. La fermeté est nécessaire. Mais il faut aussi que la politique se donne des perspectives, et en offre aux citoyens. On ne peut pas être que dans la répression. Offrir de l’espérance, pas forcément dans l’instant mais pour les trois ou quatre ans à venir, est crucial. Cela passe par de la rénovation urbaine, une politique de transport hyperactive, la réinsertion des quartiers dans une dynamique globale, comme nous l’avons fait à Vaulx-en-Velin. Manuel Valls ne doit pas être seul, ou il risque de se retrouver dans une logique sécuritaire.» «Mutualiser les polices» STÉPHANE GATIGNON (EELV, SEVRAN) «Contrairement à une idée beaucoup véhiculée, on met aujourd’hui beaucoup d’argent dans la sécurité. En plus de la police nationale, avec la municipalisation des tâches de sécurité, les collectivités locales investissent énormément. Mais en fonction de leurs moyens. Et l’on assiste à une rupture dramatique de l’égalité des citoyens face à la sécurité. Certaines communes disposent d’une police municipale dotée de moyens considérables alors qu’elles n’en ont pas forcément besoin quand d’autres, comme Sevran, n’ont rien. Cela ne peut pas durer. Je crois qu’il faut penser à la territorialisation de la police, avec une mutualisation police nationale-polices municipales, à l’échelle de grandes régions. On gagnerait sur la question fondamentale des effectifs et de leur déploiement sur le territoire. Cela passe par une réforme institutionnelle. Les zones de sécurité prioritaires? C’est du déjà-vu. Il faut être plus radical.» «Mettre fin aux quartiers-ghettos» THIERRY MANDON (PS, RISORANGIS) «J’attends d’abord une nouvelle conception de notre politique en matière de logement social, afin de mettre fin aux quartiers-ghettos et de créer de la diversité. C’est le préalable si nous voulons reprendre la main dans certains quartiers en matière de sécurité. Ensuite, et cela concerne la police et la justice, il faut que les premières condamnations, pour des actes de délinquance légère, soient rapides et effectives. Un mois avec sursis, cela ne veut rien dire pour les jeunes de certains quartiers. Enfin, il faut une meilleure articulation entre la police municipale et la police nationale. Les deux ont des infos de qualité qui peuvent être utiles pour leurs homologues, mais qui ne sont pas assez partagées.» Recueilli par ALICE GERAUD et FABRICE TASSEL Pour le think tank, le PS doit mieux communiquer. Terra Nova contre les complexes t si, dans les ambigus rapports entre la gauche et la sécurité, tout n’était qu’affaire de confiance ? Et si la gauche n’était pas aussi laxiste que la droite (et une partie de la gauche) le dit? C’est la thèse d’un rapport écrit en février par Jean-Jacques Urvoas, député PS du Finistère et président de la Commission des lois à l’Assemblée, pour le compte de Terra Nova. Censé incarner la feuille de route du candidat Hollande en matière de sécurité, le document est intéressant à réexaminer alors que l’excandidat est désormais en mesure d’appliquer ses préconisations. Urvoas rappelle que la gauche a, depuis trente ans, bâti un corpus idéologique et des outils pour lutter contre l’insécurité, mais a toujours peiné à les assumer ou les E La loi de sécurité de mars 2007 a accru le rôle des maires. PHOTO MARC CHAUMEIL. appliquer : «Si échec il y a, il se situe moins sur le plan de la doctrine ou des pratiques que sur celui de la communication politique. Par essence, les socialistes ne vouent de culte exclusif ni à la prévention ni à la répression. Mais ils considèrent qu’une politique qui, au nom d’arrière-pensées idéologiques, s’affranchirait de l’un ou de l’autre serait inéluctablement vouée à l’échec.» On devine qu’en matière de communication le vainqueur a été Sarkozy, qui a su exploiter des axes développés à gauche (sous Jospin par exemple, avec Chevènement et Vaillant) et les habiller dans un tourbillon législatif et une politique frénétique de «coups de menton médiatiques». Mais, maintient Urvoas, le triptyque de la gauche «prévention-dissuasion-punition» était posé dès 1981. Pourtant, do- mine ce sentiment d’échec –confessé par Jospin en 2002 («J’ai pêché un peu par naïveté»)–, et ce procès en «négation du réel» qui colle à la gauche, entretenu par la droite. Justement, écrit Urvoas, «l’écueil serait d’accepter l’affrontement avec la droite sur son terrain, en reprenant ses concepts, ses idées, ses mots. L’atout de la gauche, c’est son indéniable savoirfaire en matière de sécurité». Mais l’échec est aussi en partie dû au manque de clarté du discours du PS, qui a accrédité la thèse d’une division à gauche. Les bases existent, écrit Urvoas: police de proximité, intégration de la sécurité dans une politique sociale plus large, territorialisation, évaluation du travail d’une police au service des citoyens et non de l’Etat… Il ne reste qu’à les appliquer. F.Ta. 6 • MONDE LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 A Mogadiscio, lendemains de paix difficiles Après vingt ans de conflits et alors que les députés doivent élire aujourd’hui le président somalien, la ville renaît, malgré l’insécurité et la pauvreté. Par STÉPHANIE BRAQUEHAIS, Envoyée spéciale à Mogadiscio D e la cuisine s’échappe une droit peut varier selon son apparteodeur de poulet grillé. Les nance clanique et familiale. Mogadiscio, clients commencent à affluer ville martyrisée par vingt ans de guerre dans le restaurant et s’atta- civile, renaît peu à peu au milieu des blent dans la cour en attendant l’iftar ruines. Dans les rues fréquentées par de (repas du soir pendant le ramadan). nombreux piétons, les bâtiments effonDans le quartier Hodan, à Mogadiscio, drés, criblés d’impacts de balles, et alors que la nouvelle Asjouxtent des façades de masemblée doit élire son présiREPORTAGE gasins fraîchement peintes. dent aujourd’hui (lire ci-conSur l’axe Maqa al-Muqaratre), le «village» est devenu un mah, un immeuble en construction de rendez-vous d’habitués. Le proprié- plus de quatre étages est censé devenir taire, Ahmed Jama Mohamed, a vécu de un centre commercial. nombreuses années à Londres où il gé- A chaque période d’accalmie, la capitale rait plusieurs restaurants. Il y a quelques somalienne a toujours connu de brefs mois, il a décidé de revenir sur sa terre renouveaux. Mais, pour une fois, il n’y A Mogadiscio, le 15 juillet. natale. Sourire aux lèvres, il se concen- a plus de combats du tout. Le seul préLes habitants n’ont ni tre sur la préparation de mashmash, bei- cédent date de 2006 pendant le court électricité ni eau. gnets de farine, d’eau et de sirop, frits règne des tribunaux islamiques qui PHOTO FARAH ABDI. AP à la poêle. «Quand j’ai vu que la paix était avaient rétabli la sécurité, encourageant revenue, j’ai décidé de tenter ma chance.» les investissements. Cependant, MogaIl pense vendre ce qui lui reste en Gran- discio reste une ville dangereuse, et Ahde-Bretagne, car il a déjà investi dans med Jama le sait. Malgré un optimisme dangereuse qu’avant, estime un journacinq établissements de la capitale soma- affiché, il a vécu un épisode qui en aurait liste somalien sous couvert d’anonymat. lienne. «Il y a plus d’opportunités com- fait renoncer plus d’un. Il se trouvait au On ne sait pas qui est qui. J’ai peur dès que merciales ici que dans une Europe en théâtre national, début avril, lorsqu’une je sors de chez moi.» crise», ajoute-t-il avec humour. kamikaze s’est fait exploser, faisant une L’incurie des forces de sécurité est poinLes insurgés islamistes shebab ont été dizaine de morts. Sur le front, il porte tée du doigt. Mais l’armée, tout comme repoussés à plus de 50 kilomètres de une légère cicatrice qui lui rappelle cha- la police, est sous-équipée et rémunérée Mogadiscio par les forces de l’Union irrégulièrement. Au poste africaine (17 000 soldats) et, pour la «C’est encore plus dangereux de police du quartier, le première fois depuis des années, la ca- qu’avant. On ne sait pas qui est qui. major Ali Mohamed Salal pitale n’est plus divisée par une ligne de raconte avoir attendu son J’ai peur dès que je sors de chez moi.» front. Sharmarke Shirwa, âgé d’une salaire pendant plus de trentaine d’années, lunettes de soleil de Un journaliste somalien huit mois avant finalement marque, est venu commander un plat d’en toucher une partie il y à emporter. «Je suis parti de Mogadiscio que jour à quel point les shebab, même a quelques semaines. Dans un des buquand j’étais tout petit et je n’en ai prati- sur la voie de la défaite militaire, restent reaux, il montre, d’un air goguenard, quement pas de souvenir, dit-il avec un capables de mener des attaques une machine à écrire rouillée qui sert de accent américain très prononcé. Je terroristes. pièces de rechange pour les deux qui suis revenu pour rénover les anciennes Des habitants du quartier de Bakara, ex- fonctionnent encore. Dans le parking propriétés de mes parents… Je voudrais bastion et poumon économique des est garé le seul véhicule disponible. Un lancer un hôtel.» insurgés islamistes, racontent que de énorme impact de balle a fait en partie nombreux combattants sont encore voler le pare-brise en éclats. «Nous SUSPICION. De nombreux Somaliens de présents, dissimulés dans la population. manquons de tout. Quand il y a un incident la diaspora reviennent à Mogadiscio Depuis le début de l’année, les assassi- quelque part, nous y allons à pied car nous pour récupérer des maisons qui appar- nats se sont multipliés – politiques, n’avons pas de voitures. On ne fait tenaient à leur famille. En l’absence commerçants, journalistes– et les res- qu’éteindre le feu quand on peut, comme d’Etat depuis plus de vingt ans, les titres ponsables ne sont jamais inquiétés. Pour des pompiers», admet-il. Deux pièces de propriété, dont beaucoup ont dis- certains observateurs, ces crimes sont obscures font office de cellules et sont paru, ont moins de valeur que le droit loin d’être tous imputables aux insur- occupées par quatre prisonniers. «Ces coutumier. En théorie, chacun sait qui gés. Du coup, l’impunité crée un climat deux-là sont des voleurs, et les deux autres possède quoi. Mais l’application de ce de suspicion. «Mogadiscio est encore plus des soldats du gouvernement arrêtés pour indiscipline. Nous ne prolongeons pas les gardes à vue au-delà de quarante-huit heures», affirme le major avec aplomb. Quelques minutes après cette déclaration, les prisonniers s’empressent d’exprimer leurs doléances: «Nous sommes là depuis dix jours, nous n’avons rien fait, et personne ne nous apporte à manger.» En l’absence de système judiciaire digne de ce nom, les personnes arrêtées croupissent dans leur cellule. SQUATTEURS. Le gouvernement de transition, dont le mandat s’achève aujourd’hui, affiche un bilan catastrophique. La population n’a pas accès aux services de base – électricité et eau potable– et la capitale abrite, selon l’ONU, environ 200 000 déplacés dans des camps où règnent insécurité, détournement des aides et viols. Ces populations ont fui la famine de l’année dernière et n’ont nulle part où aller. D’autres ont investi des bâtiments publics, mais sont sous la menace d’expulsion, sans compensation, par le gouvernement qui a annoncé vouloir reprendre possession des édifices qui appartenaient à l’Etat avant la guerre civile. Fatima fait sa lessive au pied de l’escalier d’un bâtiment de l’ancienne uni- LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 MONDE • 7 Le nouveau Parlement, à peine nommé, est déjà soupçonné de corruption. Un fragile renouveau A KENYA versité nationale. «Nous vivons au jour REPÈRES le jour, parfois on arrive à manger, d’autres fois non.» Elle habite dans une A ARABIE pièce avec, pour tout mobilier, une SOMALIE S natte et un lit d’enfant. Son mari, solPopulation (2010) Y YÉMEN dat, n’a pas été payé depuis sept mois et 9,1 millions hab. s’est reconverti en chauffeur de taxi. Superficie Golfe d’Aden Dans le couloir aux murs troués par les 627 340 km2 Somaliland obus, Asha Jama, malade, est assise, PIB par hab. (2010) immobile, sur une chaise. «Je suis une 452 euros ÉTHIOPIE cible, on peut me tuer car j’étais militaire Croissance dans l’armée. Le gouvernement doit nous SOMALIE du PIB (2010) reloger dans un lieu protégé.» De nom+ 2,6 % breux bâtiments publics ont déjà été Espérance de vie Mogadiscio 50,4 ans nettoyés de leurs squatteurs. Asha n’a qu’une peur, devoir rejoindre un camp Illerisme Océan Indien 62,2 % de déplacés et qu’un jour les shebab 500 km Sources : Banque mondiale, CIA, GT AmeriqueLatine:Mise en page 1 17/08/12 15:42 Page 1 Pnud 2010 laFCretrouvent pour la tuer. • 275 C’est le nombre de députés qui ont été désignés pour former la nouvelle Assemblée somalienne. Indépendante depuis 1991, la Soma lie a adopté le 1er août une nouvelle Constitution. L’élection du président parachève un processus parrainé par l’ONU et la communuté internatio nale destiné à remplacer les institu tions de transition datant de 2004. vec l’élection, prévue aujourd’hui, du président somalien par la nouvelle Assemblée s’achève le mandat du gouvernement de transition, créé en 2004 à l’issue de la conférence de Mbagathi, au Kenya. En dépit d’une avancée incontestable sur le plan militaire contre les shebab (insurgés islamistes affiliés à Al-Qaeda), due aux soldats de l’Amisom, la force de l’Union africaine, le gouvernement est marqué par une corruption endémique. Un rapport du panel d’experts de l’ONU estime ainsi que 70% des revenus de l’Etat ont été détournés ces dernières années. Une feuille de route a été établie en 2011 pour créer de nouvelles institutions pour la Somalie (excluant le Somaliland, région du Nord qui s’est proclamée indépendante en 1993 mais n’est pas reconnue par la communauté internationale). Une conférence a été organisée à Londres en février dernier pour répéter le message : en août, le gouvernement doit partir. Dans un premier temps, 135 elders (chefs coutumiers) ont été choisis pour mettre en place une Assemblée constituante ainsi qu’un Parlement. Début août, une Constitution, en rédaction depuis sept ans et qui a coûté des millions de dollars, a donc été adoptée. Les chefs coutumiers ont ensuite désigné 275 députés suivant un principe complexe où la quasi-totalité des postes étaient réservés à parts égales aux quatre principales familles claniques (Darod, Hawiye, Rahanweyn et Dir) et le reste à une coalition de clans minoritaires. Les candidatures de députés ont été examinées pendant plusieurs jours par un comité technique marqué par des soupçons de corruption (plusieurs sources estiment que l’achat d’un siège a pu atteindre 40 000 euros), mais aussi des intimidations et des interférences des officiels du gouvernement. Malgré ces dérapages, la communauté internationale a continué de marteler que la date du 20 août était non négociable. Cependant, de nombreux experts sur la Somalie sont de plus en plus pessimistes sur l’éventualité d’un changement. Un analyste estime qu’il s’agit d’un «processus fictif», car les principaux candidats sont ceux qui étaient déjà au pouvoir, tandis qu’un autre juge que cette tentative ne vaut pas mieux que les précédentes. Depuis la chute de Siyad Barré, en 1991, 15 conférences nationales ont eu lieu pour tenter de mettre en place un gouvernement central. Hier, un communiqué conjoint incluant notamment l’ONU, l’Union africaine, l’Union européenne, les EtatsUnis ou encore la Turquie a rappelé qu’il était «essentiel que le nouveau Parlement, sélectionné et non élu, coupe les relations avec les chefs de guerre», mais aussi avec les personnalités corrompues, et respecte le quota d’un tiers de femmes. VOYAGES ATLANTIQUES : REGARDS CROISES Grande traversée Amérique du Sud Archives, débats, documentaires par Xavier d'Arthuys 9h-12h / du lundi 20 au vendredi 24 août franceculture.fr en partenariat avec S.B. (à Mogadiscio) 8 • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 MONDEXPRESSO 10000 VU DE BERLIN Par EMMANUELLE CHAZE personnes ont manifesté samedi à Prague (Républi que tchèque) pour la deuxième édition du festi val gay et lesbien Prague Pride. Venus défendre les droits des homos, trans, bi et appeler à la tolérance, les participants, munis de sifflets, se sont rassem blés place Venceslas, au cœur de la capitale. Le nouvel aéroport de la capitale allemande en pleine «débâcle» l faut se méfier des idées reçues. Ainsi, quand on pense à l’Allemagne, il est d’usage d’imaginer ponctualité et rigueur. Las, les Berlinois s’acharnent à faire mentir le cliché en ce qui concerne l’un des plus grands projets architecturaux de l’Allemagne réunifiée : la construction de l’aéroport international de BerlinBrandebourg (BBI). Ce projet ambitieux, né peu après la chute du Mur, n’en finit pas d’être sujet à controverse. Entre polémiques liées aux nuisances sonores occasionnées par les nouveaux couloirs aériens et divers retards de mise en fonction, tantôt dus à un défaut de sécurité, tantôt à un trou imprévu d’un milliard d’euros grevant un budget initial de 4,7 milliards, la date de mise en fonction, initialement prévue cet été, est constamment repoussée depuis fin 2011. A tel point que ce projet d’«aéroport du futur» – selon le site officiel – est épinglé comme une véritable «débâcle» par le magazine Spiegel. I Le nouvel aéroport n’a pas encore ouvert mais pèse déjà bien lourd dans le portefeuille des autorités locales et du contribuable brandebourgeois. Cela sans que la construction pharaonique de telles infrastructures ne soit vraiment comprise par les riverains. Afin de justifier un LIBYE Deux attentats à la voiture piégée ont eu lieu hier dans le centre de Tripoli, faisant 2 morts et 4 blessés. Le ministère de l’Intérieur a attribué ces violences aux partisans de l’ancien régime de Muammar al-Kadhafi. SYRIE Le nouveau médiateur international, Lakhdar Brahimi, doit s’excuser auprès du peuple syrien pour avoir affirmé qu’il ne savait pas si le moment était venu pour demander le départ du président Bachar al-Assad, a déclaré hier l’opposition. AFGHANISTAN Un Afghan en uniforme de la police a tué un soldat de l’Otan hier dans le sud du pays, a annoncé l’Isaf, ce qui porte à 40 morts le bilan de telles attaques dites «fratricides» pour 2012. projet aussi ambitieux, il a fallu prévoir de fermer les deux aéroports intra-muros de Berlin, Tempelhof, déjà hors service depuis 2008, dans le sud de la ville, et Tegel, dans le nord. Ce dernier, tout à fait fonctionnel, est donc en sursis et ne fermera ses portes que lorsque le BBI ouvrira enfin les siennes, «en 2013», est-il précisé sur le site du projet. Dans un contexte économique morose, le projet nécessite de constantes rallonges budgétaires. L’aéroport de Tempelhof a, quant à lui, été recyclé en immense terrain de jeu, réserve naturelle, lieu de mémoire (avant de servir de base de ravitaillement pour Berlin-Ouest, il a également abrité un camp de travail nazi pendant la Seconde Guerre mondiale) et autre salle d’exposition ou de concert. Ironie du sort, alors que la date de mise en service est passée de 2012 à un très flou «en 2013», les touristes empruntant actuellement les moyens de transports berlinois sont informés par une voix optimiste sortant d’un haut-parleur des lignes à prendre «pour se rendre à l’aéroport de Brandebourg». Les riverains opposés au projet peuvent, quant à eux, dormir tranquille ; le calme ne leur sera pas ôté de sitôt. • CÔTED’IVOIRE Des inconnus ont attaqué samedi à Abidjan le siège du parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, le Front populaire ivoirien, faisant trois blessés. Des assaillants s’en sont aussi pris aux locaux du groupe éditant le journal le Temps, également proche de Gbagbo. SOUDAN Trente-deux personnalités officielles, dont un ministre, ont été tuées hier dans le crash de leur avion au Kordofan du Sud. BELGIQUE Des milliers de personnes ont manifesté, hier à Bruxelles, contre une possible libération conditionnelle de Michelle Martin, l’ex-femme du meurtrier pédophile Marc Dutroux, après seize ans de prison. Julian Assange, hier à l’ambassade d’Equateur de Londres. PHOTO CARL COURT. AFP A Londres, Assange s’épanche au balcon WIKILEAKS Le cyberactiviste est apparu, hier, à la «Les Grecs doivent se tenir à ce qu’ils ont promis. Il n’y a pas de marge de manœuvre, ni en termes de temps ni en substance.» Volker Kauder chef du bloc parlementaire conservateur d’Angela Merkel au Bundestag, hier au magazine Der Spiegel L’HISTOIRE fenêtre de l’ambassade d’Equateur, où il est réfugié. UNE LOI FAIT u balcon de l’ambassade équatorienne de la capitale britannique où des centaines de personnes l’attendent depuis des heures, il apparaît confiant, décontracté, élégant, les cheveux courts et vêtu d’un pantalon noir, d’une chemise bleue et une cravate aubergine. Une clameur de joie dans la foule, des applaudissements, des cris de soutien et les flashs des appareils photos : le «Julian show» peut commencer. Pour sa première apparition publique depuis le mois de mars, le fondateur de WikiLeaks –retranché dans l’ambassade du pays sud-américain depuis soixante et un jours – n’a pas manqué de remercier hier la foule venue le soutenir depuis que l’Equateur lui a accordé l’asile politique, jeudi. «Je suis ici car je ne peux pas être plus près de vous. Merci d’être D là», lance-t-il de son balcon. Nouveaux applaudissements dans la foule des supporteurs de Julian Assange – un mélange éclectique de membres du mouvement Occupy, de mouvements proliberté d’expression, de manifestants contre la guerre en Irak et en Afghanistan et autres activistes de tout poil– augmentée d’une cinquantaine de policiers, de touristes, de centaines de médias du monde entier et de SudAméricains très remontés. Car l’Equateur, comme toute l’Amérique latine, a très peu apprécié que les autorités britanniques menacent de rentrer de force dans l’ambassade afin d’y arrêter l’Australien. Le Royaume-Uni explique être dans l’obligation d’extrader Assange vers la Suède pour qu’il y répondre aux questions des juges liées à des agressions sexuelles sur deux ex-collaboratrices de WikiLeaks –des faits qu’il nie vigoureusement. Au final, le Royaume-Uni s’est mis à dos l’Equateur et une dizaine de pays latinos qui le soutiennent. En dix minutes de discours, le cyberactiviste a dénoncé ceux qu’il accuse d’étouffer la liberté d’expression : «Les Etats-Unis doivent renoncer à leur chasse aux sorcières contre WikiLeaks.» Message à l’encontre de ceux qui, finalement, sont tenus responsable de toute cette affaire: les tribulations d’Assange visent en effet à éviter une hypothétique extradition vers les Etats-Unis, où il pourrait être condamné pour espionnage – passible de la peine de mort – après avoir publié sur le site WikiLeaks des centaines de millier de câbles diplomatiques ultra-confidentiels. Correspondance à Londres CHARLOTTE KAN FUMER LES COFFEESHOPS NÉERLENDAIS Des adversaires d’une nou velle loi restreignant la vente au PaysBas de has chisch à des étrangers ont lancé samedi une «campa gne cannabis» en vue des prochaines élections légis latives. Ils demandent aux électeurs de voter pour les partis favorables à la vente libre de cette substance. Leurs promoteurs, parmi lesquels des propriétaires de coffeeshops, s’oppo sent à la loi sur la «carte cannabis» entrée en vigueur le 1er mai dans le sud du pays et devant être étendue au reste des Pays Bas début 2013. Cette loi prévoit de faire des coffee shops des «clubs fermés» comptant au maximum 2000 membres domiciliés au PaysBas et âgés de plus de 18 ans. RETOUR SUR LES VIOLENCES RELIGIEUSES EN INGOUCHIE ET AU DAGUESTAN A Ramadan sanglant dans le Caucase russe La fin du ramadan, ou Ouraza baïram, a donné lieu ce week-end à une flambée de violences dans le Caucase russe, dont la population est majoritairement de culte musulman. Hier matin, un kamikaze a commis un attentat-suicide pendant les funérailles d’un policier, tué la veille par balle, dans une maison située dans le district de Malgobek, dans le nord de l’Ingouchie. Sept policiers, collègues du défunt, ont été tués. Quinze autres personnes, dont on ignore encore s’il s’agit de policiers, ont été blessées. Le président d’Ingouchie, Iounous-bek Evkourov, a dénoncé les incroyants qui «se protègent derrière le nom de Dieu» et ignorent les fêtes religieuses. La veille au soir, deux hommes masqués avaient ouvert le feu dans une mosquée chiite au Daguestan voisin, faisant un mort et sept blessés. Juste avant le début du ramadan, le mufti modéré du Tatarstan, en Russie centrale, avait été blessé dans un attentat et son adjoint tué. Pour le politologue Alexeï Makarkine, les attaques perpétrées lors des fêtes religieuses sont le fait d’islamistes radicaux. FRANCE LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 • 9 Par QUENTIN LAURENT Envoyé spécial à FrangyenBresse (SaôneetLoire) Frangy-en-Bresse, «Arnaud» défend le redressement, et le ministre Montebourg ressasse l’antienne du changement. Hier, le ministre du Redressement productif était de retour dans son fief de Saône-etLoire dont il a été l’élu durant plus de quinze ans. L’occasion pour lui de revenir sur la mission de rétablissement économique du pays que se sont donnée les socialistes, tout en taclant une fois de plus Nicolas Sarkozy et «le piteux état» dans lequel il a laissé l’économie. «Ah ! m’sieur l’ministre» «Ah non, moi c’est Arnaud!» rétorque d’emblée l’ancien député. Arrivé tout sourire, il donne du «salut» à gauche à droite, serre les RÉCIT mains et signe des autographes. Pour l’accueillir, un parterre de têtes grisonnantes, une envahissante odeur de merguez et un soleil de plomb. Plus d’un millier de personnes sont réunies sur le terrain de football pour célébrer la 40e fête de la rose. Créée par Pierre Joxe en 1973, elle marque une sorte de prérentrée socialiste, à moins d’une semaine de l’université d’été de La Rochelle. A La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, avec Arnaud Montebourg, hier à FrangyenBresse. PHOTO JEFF PACHOUD. AFP «DU TEMPS». Traditionnel organisateur de cette fête, Arnaud Montebourg avait cette année cédé les rennes à Cécile Untermaier, nouvelle députée qui a hérité – et gagné– l’ancienne circonscription de Montebourg. Ce dernier avait décidé de ne pas se représenter aux législatives après l’élection de François Hollande. Trois mois après la victoire de la gauche à la présidentielle, c’est encore «le changement» que Montebourg a décidé d’ériger en étendard. «La France ne peut pas se redresser sans passer par la case changement», a-t-il ressassé. Il s’est évertué à défendre l’action du gouvernement, balayant d’un revers de manche de polo imprimé de sueur les critiques sur les A Frangy, Montebourg, cent jours et sans reproche Le ministre du Redressement productif recevait, hier dans son fief, sa collègue Marisol Touraine. L’occasion d’évoquer le thème du changement. las Sarkozy dans le dossier syrien. «Il veut nous proposer une guerre, mais il a, lui, oublié de mener la guerre à la réduction des «Ce n’est pas en cent jours qu’on plans sociaux», a dénoncé Montebourg. Il a change les choses. Il faut cinq son réquisiannées pleines pour reconstruire poursuivi toire, sorte de service […] notre industrie.» après-vente de l’action ministérielle, exigeant Arnaud Montebourg hier à la Fête de la rose notamment «la fin du cent premiers jours du quinquen- laisser-faire» en matière économinat. «Ce n’est pas en cent jours que. Et s’est lancé dans un plaiqu’on change les choses. Il faut cinq doyer contre «les excès financiers», années pleines pour reconstruire pierre par pierre notre industrie.» REPÈRES Une manière de faire passer l’idée, comme le disait François Mitterrand, qu’«il faut donner du temps CÔTE-D'OR au temps». Un refrain largement JURA repris par Marisol Touraine. La miSAÔNEET-LOIRE nistre de la Santé et ex-strauss-kahnienne était cette année l’invitée Frangy-en-Bresse d’honneur de la fête. ALLIER Les deux membres du gouverneMâcon AIN ment ont profité de cette tribune 25 km RH. LOIRE pour fustiger l’immixtion de Nico- faisant part de la volonté du gouvernement de «conduire la France sur la route de la troisième révolution industrielle». «Le ministère du Redressement productif, c’est le ministère du patriotisme économique», a lancé le chantre de «la démondialisation». Et d’en appeler à la «responsabilité industrielle des actionnaires financiers de l’entreprise», pour qu’ils se comportent «en capitaines d’industrie plutôt qu’en rentiers actionnariaux». Un enchaînement de formules qui lui avait valu des critiques, à droite mais également au sein des rangs de la gauche. Le sénateur écologiste JeanVincent Placé a récemment déclaré qu’il n’était «pas convaincu par le style» de Montebourg, arguant qu’il laissait penser qu’il allait «résoudre les problèmes par la parole». Egalement interrogé sur les déclarations virulentes de Jean-Luc Mélenchon sur le début du quinquennat (lire page suivante), Montebourg a préféré botter en touche pour ne pas attiser la polémique. «Tout le ARNAUD MONTEBOURG MARISOL TOURAINE w 30 octobre 1962 Naissance. w 1990 Avocat au cabinet w 7 mars 1959 Naissance. w 19881991 Conseillère de de Georges Kiejman. w 1997 Député de SaôneetLoire. w 2008 Président du conseil général de SaôneetLoire. w 2012 Ministre. Michel Rocard à Matignon. w 1997 Elue députée. w 2011 Présidente du conseil général d’IndreetLoire. w 2012 Ministre. monde doit participer au changement, apporter sa pierre à l’édifice», a-t-il simplement esquivé. ROMS. D’aucuns accusent Montebourg d’avoir mis de l’eau dans son rosé depuis l’an dernier. «Il a maigri, blague Paul, 79 ans. Mais c’est normal, ils lui ont pas donné le boulot le plus facile, hein!» «Je ne pense pas tant que ça qu’il a mangé son chapeau en rentrant au gouvernement», explique Mehdi, jeune sympathisant socialiste venu de Paris. «Enfin, c’est surtout qu’il est rentré dans sa fonction de ministre et, à partir de ce moment-là, c’est normal qu’il suive la feuille de route de François Hollande», reconnaît-il. «Mais c’est vraiment sur les cinq ans qu’on pourra voir le changement», tempère son ami Florian, plus critique envers le gouvernement sur le récent démantèlement d’un camp de Roms à Lille (lire aussi page 4). Et de déplorer : «On pensait que ce serait différent de Sarkozy.» • 10 Passez l’été avec Libé… • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 FRANCEXPRESSO L’HISTOIRE L’AMOUR UN PEU RAPIDE DE LIONNEL LUCA Valérie Pécresse, Eric Ciotti et Laurent Wauquiez, hier, en HauteLoire. PHOTO T. ZOCCOLAN. AFP Offre « SPéCIAL éTé » 3 mois pour 49 € au lieu de 119€ 58 % de réduction Bulletin d’abonnement À découper et renvoyer sous enveloppe affranchie à Libération, service abonnement, 11 rue Béranger, 75003 Paris Oui, je profite de l’offre « spécial été » de Libération : O 3 mois pour 49 € au lieu de 119 € (-58%) O 2 mois pour 39 € au lieu de 79,20 € (-50%) O 1 mois pour 26 € au lieu de 39,60 € (-34%) O 3 semaines pour 18 € au lieu de 27 € (-33%) Important : si vous souhaitez recevoir Libération sur votre lieu de villégiature (France métropolitaine uniquement), veuillez renseigner ci-dessous votre adresse personnelle, et sur un papier libre vos dates de congés ainsi que l’adresse de votre lieu de vacances ou appelez le 01 76 49 27 27 et précisez le code AETE12 (règlement par carte bancaire uniquement). Nom : Prénom : Adresse : Code postal : abbbc Ville : Téléphone : ac ac ac ac E-mail : @ ac Ci-joint mon règlement : O Chèque à l’ordre de Libération O Carte bancaire N° abbc abbc abbc abbc Expire le ac ac mois Cryptogramme Date année abc Signature obligatoire : les 3 derniers chiffres au dos de votre carte bancaire ac ac abbc LES GENS DROITE Les soutiens du candidat déclaré à la tête de l’UMP ont gravi hier le mont Mézenc, en Haute-Loire. jusqu’à 2 mois pour 39 € 1 mois pour 26 € 3 semaines pour 18 € LesamisdeFillonn’ont paspeurdel’escalade A trop tweeter… Le député (UMP) des AlpesMariti mes Lionnel Luca s’est mélangé les pinceaux samedi soir en envoyant sur Twitter un message privé qu’il croyait adresser à sa compagne, une gaffe dont il s’est excusé hier. «Je te laisse rentrer et te pré parer. Je t’aime», a écrit Luca. Quelques heures plus tard, un second mes sage du viceprésident du conseil général des Alpes Maritimes venait dissiper ce malentendu: «Leçon d’humilité: ne jamais envoyer un SMS perso à son conjoint pendant que l’on tweete… un peu d’amour dans un monde de brutes, après tout?» AETE12 *Cette offre est valable jusqu’au 31 décembre 2012 exclusivement pour un nouvel abonnement en France métropolitaine. La livraison du quotidien est assurée par porteur avant 7h30 dans plus de 500 villes, les autres communes sont livrées par voie postale. Les informations recueillies sont destinées au service de votre abonnement et, le cas échéant, à certaines publications partenaires. Si vous ne souhaitez pas recevoir de propositions de ces publications cochez cette case a canicule et la période estivale n’y changeront rien: les candidats, déclarés ou putatifs, à la présidence de l’UMP ou leurs amis ne cessent de s’agiter. Ce matin, Bruno Le Maire, ex-ministre de l’Agriculture, confirme sa candidature dans le Figaro. Et, hier, les supporteurs de François Fillon, officiellement candidat à la succession de Nicolas Sarkozy, ont tenu à dire tout le bien qu’ils pensent de leur champion. Réunis par l’ex-ministre Laurent Wauquiez dans son département de la HauteLoire pour une ascension du mont Mézenc, ils ont fait assaut de flatterie : Fillon, «c’est l’homme d’Etat qui, demain, peut nous redonner le goût de la victoire», a lancé le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti. Avant de renchérir à propos des qualités de l’ancien Premier ministre face à son rival, le secrétaire général du parti, Jean-François Copé. Ce dernier a fait savoir, samedi en Corse, qu’il officialisera dimanche prochain, dans les Bouchesdu-Rhône, sa candidature à la présidence du parti, un secret de polichinelle. Cheville. Peu en reste face à Eric Ciotti, Laurent Wauquiez a souligné qu’il fallait désormais «reconstruire l’UMP» : «Et, pour ça, on a besoin de François Fillon.» L’ex-ministre a souligné que son leader «saura diriger l’UMP en la rassemblant, pas L a expliqué que, contrairement à Fillon, il a souhaité attendre en raison «de sa volonté de prendre le temps HAUTE-LOIRE d’installer une opposition». Il Le Puy-en-Velay en a profité pour écarter le CANTAL Mont Mézenc scénario d’une guerre des ARDÈCHE chefs qui pourrait déchirer le LOZÈRE 25 km parti: «L’UMP connaîtra une campagne électorale et non de façon clanique». une bagarre.» Rien ne détourne ces fillo- Accords. Pour l’heure, les nistes. Pas même une étude sondages n’en font pas le fad’opinion. Invitée à com- vori pour la direction du menter un sondage du Jour- parti. Toujours selon le Journal du dimanche(1) montrant nal du dimanche, 48% des une certaine nostalgie des sympathisants UMP souhaisympathisants UMP pour tent François Fillon comme Sarkozy – 53% voudraient dirigeant de l’UMP, contre qu’il soit le candidat de la 24% pour Jean-François droite en 2017 –, Valérie Pé- Copé. NKM recueille 7%, cresse a en effet avancé: «Le suivie par Xavier Bertrand (5%), Bruno Le Maire (2%) et «L’UMP connaîtra une Christian Escampagne électorale trosi (1%). Autre et non une bagarre.» enseignement de JeanFrançois Copé samedi en Corse cette enquête d’opinion : 52% premier défenseur du bilan des sympathisants sont faSarkozy, c’est Fillon, puisqu’il vorables à des accords élecen est le coauteur.» Nathalie toraux UMP-FN aux élecKosciusko-Morizet, elle tions locales (municipales, aussi candidate, a souligné à cantonales, régionales), 48% cet égard que l’absence de n’y étant pas favorables. Un Sarkozy créait «un très grand sujet des plus clivants au sein vide à droite». A l’origine, du premier parti d’opposiFillon devait faire sa rentrée tion, dont ni François Fillon hier, en Haute-Loire, mais ni Jean-François Copé ne une fracture à la cheville lors pourront faire l’économie d’un accident de scooter sur dans leur bataille. l’île de Capri, fin juillet, l’a PASCAL VIROT (1)Sondage de l’Ifop réalisé contraint au repos forcé. Son adversaire continue du 9 au 13 août auprès de 2000 personnes interrogées quant à lui, sa campagne de en ligne (les sympathisants terrain. En déplacement à UMP représentent 20% de Ajaccio, Jean-François Copé l’échantillon). PUY-DE-DÔME LOIRE MÉLENCHON S’EN PREND À HOLLANDE Il n’a pas abandonné sa posture d’éternel critique visàvis de François Hol lande. Pour sa rentrée, l’ancien candidat à la prési dentielle qualifie de «creux» et de «presque rien» les cent premiers jours du chef de l’Etat. Dans le Journal du diman che, JeanLuc Mélenchon estime que «Hollande a désamorcé le contenu insurrectionnel du vote de la présidentielle. Il l’a dilué dans les sables des plages du Var. Comme si l’élection s’était résumée à une ques tion de personnes: un nor mal à la place d’un agité et tout serait dit. Eh bien, non. Et on ne parviendra pas à nous faire confondre nor mal et sociallibéral!» L’ex postulant malheureux à l’Elysée et à l’Assemblée nationale regrette aussi la frilosité du pouvoir: «Pour quoi ne pas avoir passé la loi sur les licenciements boursiers? […] Et la loi ban caire? Il fallait marquer un rapport de force avec la finance! […] Il faut faire le boulot maintenant! L’ater moiement continu laisse les mains libres à la finance! Assez temporisé!» PHOTO AFP LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 FRANCEXPRESSO Ceweek-end,lacanicule afrappéauplushautdegré MÉTÉO Les températures ont battu des records, mais amorcent une baisse. UN CHAUFFEUR DE BUS EN EXAMEN APRÈS UN ACCIDENT MORTEL À LYON Le chauffeur du bus, soupçonné d’avoir écrasé sans s’arrê ter le conducteur d’un scooter, âgé de 19 ans, près de la place Bellecour à Lyon, samedi aprèsmidi, a été placé en garde à vue hier. Ce conducteur des Transports en com mun lyonnais (TCL) était hier soir en cours d’audition dans les locaux de la police. L’exploitation des «systèmes GPS», des vidéos situées dans le bus et dans la rue, ainsi que le passage au crible du bas de caisse des cinq bus pouvant être impliqués, en raison de leurs horaires, ont révélé des «éléments intéressants» qui ont permis d’identifier le véhi cule en cause, selon la police. «L’enjeu de cette garde à vue est de savoir si le conducteur s’est rendu compte de l’accident», a ajouté une source policière, précisant qu’il s’agissait d’un bus articulé. Selon les premiers éléments de l’enquête, «une perte d’équilibre du conducteur» du deux roues est à l’origine de l’accident. Le jeune homme serait tombé sous les roues du bus sans que son scooter «soit heurté» par le véhicule des TCL. La jeune victime, qui por tait un casque, a été tuée sur le coup. NUIT Un homme de 46 ans est mort noyé samedi à Clairac en Lot-et-Garonne, après une baignade nocturne dans les eaux du Lot avec des amis. 33 DÉPARTEMENTS TOUCHÉS Moselle Meurthe- Baset-Moselle Rhin Haute- Vosges Marne HautHaute- Rhin Saône CôteNièvre d'Or Doubs Cher Territoire Indre Saônede Belfort et-Loire Jura Allier Creuse HauteRhône Ain Charente Vienne Puy- Loire de-Dôme Corrèze Isère Dordogne Yonne Lot-etGaronne Lot Tarn-etGaronne Gers Tarn HauteGaronne e mémoire de Montgivrains, puisque c’est ainsi que l’on appelle les 1 714 habitants de Montgivray, on n’avait jamais connu pareille folie thermométrique: il a fait 42,3° C, samedi après-midi, dans cette commune de l’Indre, située entre La Châtre et Châteauroux. Il s’agit d’un chiffre inédit dans la moitié nord de la France depuis que les mesures de température existent, selon Météo France. Du coup, Montgivray en a profité pour mettre à jour sa fiche sur Wikipédia avec ce record local, et les clients de l’Hôtel du lion d’argent, à deux pas de la bourgade, ont D Vigilance orange (jusqu’à 16 heures aujourd’hui) Source : Météo France pu déguster une pertinente «formule fraîcheur». Pelouses. Ce week-end, on a cherché le frais dans une bonne partie de l’Hexagone, où 33 départements restaient hier en vigilance orange avec des températures fricotant avec les 40° C (41,5 à Châtillon-sur-Seine en Côte-d’Or). «Ils ont trop chaud pour boire», se désolait samedi soir un patron de bistrot parisien déserté par ses habitués, partis traquer un peu de fraîcheur au bord du canal de l’Ourcq et sur les pelouses de la Villette. Les sites de Paris Plages ont été pris d’assaut alors que les transats devaient être défini- tivement repliés pour cette année en soirée. «On sait qu’on va avoir du mal à faire partir les gens à 20 heures», reconnaissait une responsable de la communication de la mairie, affirmant que ses services se sont «posé la question» d’une prolongation de l’édition 2012 avec la canicule. Mais l’option n’a pas été retenue pour des raisons logistiques. «On n’a jamais connu une canicule post-15 août aussi forte», estimait, hier, le prévisionniste de Météo France Etienne Kapikian. Même la nuit, dit-il, le thermomètre est resté collé au plafond : «On a battu quelques records de douceur nocturne. Au sommet de l’aiguille du Midi [massif du Mont-Blanc, ndlr], à 3 800 m, la température n’est pas descendue audessous de 5 degrés.» Le précédent (4 degrés de température minimale) datait de 1998. Sans battre de record, il n’a jamais fait dans la nuit de samedi à dimanche moins de 27,3° C à Nice, et 23° C à Toulouse. Face à cette chaleur, le niveau 2 du plan canicule a été décrété dans 34 départements (la Charente-maritime, sans être en vigilance orange, a décidé d’appliquer la procédure). Déclenché au coup par coup par les préfets, il prévoit de regrouper les personnes âgées dans les pièces fraîches des établissements les hébergeant, de veiller à leur hydratation et de rester en lien, au niveau communal, avec celles qui sont isolées. A Frangy-en-Bresse (Saôneet-Loire), où elle était l’invitée d’honneur de la fête de la rose d’Arnaud Montebourg (lire page 9), la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a jugé que la «situation» était «parfaitement calme», soulignant qu’il n’y avait «pas d’alerte sanitaire» et assurant que le ministère restait «extrêmement attentif». Eclat. La France restera aujourd’hui en vigilance orange canicule, mais les températures amorceront une baisse par l’ouest. Malgré des minimales encore élevées au lever du jour sur une grande partie du pays, les maximales baisseront d’un cran par rapport aux jours précédents. Elles resteront quand même d’un niveau élevé sur le sud et l’est du pays. Côté ciel, les nuages viendront contrarier l’éclat du soleil. Le ciel couvert et humide le matin sur le nordouest et le nord laissera un ciel bien nuageux en journée. JACKY DURAND 11 L’HISTOIRE PISCINE Une fillette de 2 ans et demi s’est noyée vendredi soir près de Tarbes (HautesPyrénées) dans la piscine de la propriété de son grandpère. A Bergerac, en Dordogne, samedi. Le département a été placé par Météo France en vigilance orange. PHOTO FRED DUFOUR. AFP • FEU Environ 150 000 m3 de bois ont été détruits dans la nuit de samedi à dimanche à Bruyères-sur-Oise (Val-d’Oise) dans un incendie qui n’était toujours pas éteint dans la matinée d’hier. Le bois était rangé à l’extérieur d’une entreprise. Le feu, qui s’est déclaré vers 22 heures, a requis l’intervention d’une centaine de pompiers, durant toute la nuit et hier matin. SANGATTE Le cadavre d’une femme âgée d’une quarantaine d’années, rejeté par la mer, a été découvert tôt, hier matin, sur la plage de Sangatte, près de Calais (Pas-deCalais). La femme n’avait pas de papiers d’identité sur elle. Une enquête a été confiée au commissariat de police de Calais. HOMICIDE L’agriculteur de 51 ans soupçonné d’avoir tué le nouveau compagnon de sa femme avec son tracteur vendredi dans son champ à Couvertpuis (Meuse) a été déféré, hier, au parquet de Nancy, qui a demandé sa mise en examen pour meurtre et son emprisonnement. LA FIN DU RAMADAN CÉLÉBRÉE HIER Le ramadan s’est achevé hier (comme ici à Marseille, lors d’une prière au parc Chanot) avec la fête de l’AïdelFitr, qui marque la fin de ce mois sacré de l’islam. Dans un message aux musulmans de France, François Hollande leur a adressé «tous [ses] vœux de bonheur, de santé et de réussite». «Je souhaite que cette fête du pardon, du partage et du souci de l’autre, contribue à la concorde, dont notre nation a tant besoin», a indiqué le Président, tout en soulignant le caractère «indéfectible» de la laïcité, «qui assure la liberté de conscience comme elle garantit la liberté religieuse». Selon un sondage paru il y a un an, 71% des musulmans de France (60% en 1989) observent le jeûne tous les jours du ramadan. PHOTO CLAUDE PARIS. AP 12 • ECONOMIE LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 REPÈRES Fondée en 1932, la maison Ricard est devenue le groupe PernodRicard en absorbant son rival en 1975. Numéro 2 mondial des spiritueux avec 7,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires et plus de un milliard de profits en 2011, le groupe emploie 18000 salariés dans le monde, dont 15% en France. w 1989 Rachat des vins australiens Jacob’s Creek. w 1993 Jointventure avec Havana Club (rhum). w 2001 Revente d’Orangina et rachat de Seagram. w 2005 Double de taille avec le rachat du géant des spiritueux Allied Domecq. w 2008 Acquisition du suédois Absolut Vodka. «L’internationalisation du groupe s’est faite avec Patrick. Mon stagiaire a su reprendre le flambeau.» Charles Pasqua qui a travaillé chez Ricard de 1952 à 1967, hier dans le JDD JDD: «Il n’y a jamais eu de grève à Pernod-Ricard : il donnait tellement à ses salariés…» Il avait pourtant débuté sous la férule d’un dénommé Charles Pasqua, alors homme de confiance de son père. FLACONS. C’est entre le Vieux-Port et Bandol que la saga familiale avait commencé en 1932, quand le marchand de vins Paul RiPatrick Ricard, en juillet 2011. Le groupe possède aussi le whisky Chivas, les champagnes Mumm ou le rhum Havana Club. PHOTO KHANH RENAUD. SIPA card, surfant sur la prohibition de l’absinthe, avait eu l’idée de génie de proposer une anisette prête à servir. De l’alcool à 45°, de l’anis, une touche de réglisse… Jusque-là chaque bistrot préparait son propre breuvage. Son fils, Patrick, a vu bien plus grand que ce «petit jaune» célébré toute l’année à Marseille et dès les premiers rayons de soleil dans le reste l’Hexagone, mais peu siroté en dehors de nos frontières. A partir de la marque Ricard, navire amiral du groupe (avec le groupe Pernod racheté en 1975), ce grand patron «qui ne la ramenait Par JEANCHRISTOPHE FÉRAUD de succession prématurées». La date des obsè- de la réussite française dans le monde». Au pa- pas» – dixit l’ami du CAC 40 François Piques n’avait pas encore été fixée par la fa- radis des bistrotiers, cela doit faire sourire ce nault– avait édifié un empire de spiritueux. a patrie du pastaga a les boules. Elle mille et aucun conseil d’administration n’a grand timide qui n’aimait pas les mondani- Se lançant à l’assaut du monde à coup d’aca perdu son papa, plus exactement le été convoqué pour l’heure. Une chose est tés. L’autodidacte –il avait arrêté ses études quisitions audacieuses (Seagram en 2001, fils prodigue de l’inventeur du petit sûre, Patrick, qui déclarait au Point, il y a pile en troisième, son paternel considérant que Allied Domecq en 2005, Absolut en 2008). jaune : Patrick Ricard, président du un an: «J’ai la forfanterie de penser que je n’ai l’entreprise familiale était la meilleure école Aux quatre coins de la planète, des centaines groupe Pernod-Ricard et héritier de Paul pas été radicalement mauvais», voulait un d’un héritier– se moquait du Paris des énar- de millions de consommateurs descendent Ricard, est mort vendredi à l’âge de 67 ans. Ricard sinon rien pour lui succéder. ques et des dîners en ville, leur préférant la sans le savoir des flacons appartenant au A l’heure de la sieste et à quelques jours de Méditerranée et la compagnie de son bateau Français: whisky Chivas, Jameson ou Glenlila Fête de l’Huma, dont la maison Ricard fut PATERNALISTE. Bien que père de trois en- et du gibier. Ce qui ne l’empêchait pas vet, cognac Martell, gin Beefeater, rhum Halongtemps partenaire… Il avait été transféré fants, dont deux œuvrant dans le groupe vana Club, vodka Absolut, à l’hôpital Sainte-Anne de Toulon après avoir –Paul-Charles, 29 ans, «international brand C’est près de Bandol que la saga familiale mais aussi champagnes été terrassé par une crise cardiaque dans son manager» chez Mumm, et Lorraine, aux reMumm ou Perrier-Jouët… avait commencée en 1932, quand le hamac dans sa propriété de l’île de lations publiques chez Ricard SA –, Aujourd’hui, la France ne marchand de vins Paul Ricard, surfant sur Bendor au large de Bandol (Var). compte plus que pour 10% du PROFIL ce sera sans doute son neveu AlexanA la tête du groupe familial dedre Ricard, 40 ans, qui reprendra le la prohibition de l’absinthe, avait eu l’idée chiffre d’affaires. puis 1978, Patrick Ricard avait pris du recul flambeau. Il l’a préparé à cette charge en le de proposer une anisette prête à servir. Patrick Ricard, qui devrait reen 2008, gardant un œil acéré sur la stratégie, bombardant l’an dernier à la tête du réseau poser aux côtés de son père mais laissant la gestion des affaires au quoti- de distribution. Et Alexandre est déjà mem- d’aimer l’art et l’opéra. Taiseux mais pas sur l’île des Embiez, laisse derrière lui une dien à son fidèle bras droit: Pierre Pringuet, bre du comité exécutif. bourru, plus paternaliste que social («Je «world company» en pleine forme (l’action le directeur général de Pernod-Ricard, un «Patron visionnaire», «réussite exemplaire»… crains que l’ISF ne me pousse à quitter la a bondi de 65% en trois ans). Le capital de polytechnicien qui a fait l’essentiel de sa car- Tout le week-end, le monde politique et éco- France» déclarait-il en 2007), l’homme était Pernod-Ricard est verrouillé par la famille rière dans l’entreprise. De ce point de vue, la nomique a rivalisé d’hommages. Le ministre proche de l’UMP mais savait que ses alcools (14,3% des actions et 20% des droits de vote) continuité à la tête du géant français des spi- de l’Economie, Pierre Moscovici, a déploré étaient bus «par tout le monde, à gauche et son allié belge Albert Frère. A priori, l’emritueux –le numéro 2 mondial derrière le bri- «une lourde de perte pour la communauté des comme à droite». Ce boss à l’ancienne était pire anisé n’est pas soluble dans une OPA. tannique Diageo– était déjà assurée. Hier, à entrepreneurs français dont notre pays a tant apprécié de ses collaborateurs. Ami proche, Patrick voulait en faire le numéro 1 mondial la direction de Pernod-Ricard, un ruban noir besoin en cette période de crise». Son collègue Michel Montana, pilier du journal commu- des vins et spiritueux. Ce sera à la troisième sur le jaune, on jugeait «toutes les questions Montebourg a salué un patron «emblématique niste la Marseillaise, rappelait hier dans le génération Ricard de relever ce défi. • PatrickRicard,anissoit-il Le fils de l’inventeur du pastis et président du groupe Pernod-Ricard est mort vendredi à 67 ans, laissant derrière lui un empire serein. L LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 «Nous devons demeurer au sein de la zone euro, parce que c’est l’unique choix qui peut nous protéger d’une pauvreté que nous n’avons encore jamais connue […]. Nous avons l’Etatprovidence le plus onéreux de la zone euro, nous ne pouvons plus le préserver à coup d’emprunts.» ECONOMIEXPRESSO MyFerryLink,uneautre pairedeManche 13 LES GENS MARITIME Deux des trois navires de l’ex-SeaFrance doivent reprendre la mer aujourd’hui. PIERRE MOSCOVICI MAINTIENT SES OBJECTIFS DE CROISSANCE POUR 2013 Yannis Stournaras ministre grec des Finances, hier L’HISTOIRE DES FRUITS ET LÉGUMES EN ORDRE DE MARGE Distribution de fruits et légumes «au juste prix». La confédération syndicale agricole des exploitants (Modef) va écouler mer credi, place de la Bastille à Paris et dans 27 villes de banlieue, 40 tonnes de tomates, salades, melons, prunes et autres nectarines directement sortis du semi remorque au prix produc teur. Objectif: dénoncer «les marges abusives» de la grande distribution. «Les circuits longs développés par la grande distribution dégradent les fruits et légu mes, éloignent le consom mateur de l’agriculteur, et les grandes surfaces pren nent des marges abusives inacceptables», a expliqué le Modef. Dans le cadre de cette opération, le kilo de tomates devrait être vendu 1,5 euro (contre 2,5 euros minimum dans les hypers qui l’achètent aux produc teurs entre 75 et 80 centi mes). Le secrétaire général du Modef, Raymond Girardi, mise sur ce coup de pub pour interpeller l’Etat et l’amener «à jouer son rôle pour protéger le pouvoir d’achat des agri culteurs et des consomma teurs». Le chaland, lui, appréciera cette petite aubaine en temps de crise. • Arrivée des bateaux de My Ferry Link au port de Calais, le 10 août. PHOTO JP BRUNET. MAXPPP ls doivent partir tôt ce matin de Calais, la fleur à la proue, dans l’espoir de «reconquérir le détroit» du Pas-de-Calais. Le Berlioz et le Rodin, deux des trois navires de l’ex-SeaFrance –la filiale de la SNCF liquidée en janvier –, doivent reprendre la mer pour Douvres (Angleterre), l’un à 5 h 30, l’autre vers 7 heures. Sous le nouveau nom anglo-saxon de la compagnie, My Ferry Link, mais repeints en bleu-blancrouge. Rachetés par Eurotunnel en juin, ils restent en effet sous pavillon français. Féroce. A bord, quelques routiers et la nouvelle direction sont attendus, alors que les bateaux ont une capacité de 1900 passagers et 120 camions chacun. «Nous n’attendons pas de miracles, l’objectif dans l’immédiat est de mettre des navires en service, pour dire qu’on existe, que My Ferry Link n’a rien de virtuel», explique Jean-Michel Giguet, le président du directoire de la nouvelle société d’exploitation constituée en coopérative ouvrière (Scop) et for- I mée par les anciens de SeaFrance. Et ensuite? Il faudra se battre face à une concurrence féroce. Depuis l’arrêt de SeaFrance, le britannique P&O Ferries a augmenté sa flotte, et Louis Dreyfus Armateurs, associé au danois DFDS, a mis en service deux navires. «Nous avons tout l’hiver pour préparer la saison 2013 et retrouver une activité normale», encore, pour parvenir à ce niveau, il faudra qu’un troisième bateau, le Nord-Pasde-Calais, soit remis en service cet automne. «Proximité». Quelles armes compte utiliser My Ferry Link pour relever le défi ? «D’abord, la qualité et le confort des navires, qui ont fait leurs preuves et ont été repeints et nettoyés», répond Jean-Michel Giguet. «Ensuite, et surtout, l’extrême «Notre objectif est de mettre motivation du des navires en service pour personnel, dire qu’on a rien de virtuel.» constitué de 85% à 90% JeanMichel Giguet président d’ex de Seadu directoire de My Ferry Link France. Et une indique Jean-Michel Giguet. gestion de proximité, avec une Cet ancien de Brittany Fer- direction qui soutient plus ries vise de «12% à 14%» de qu’elle ne contrôle.» parts de marché pour le fret Preuve du nouvel état d’eset de «8% à 10%» pour l’ac- prit : le transfert du siège de tivité passagers… contre 18% Paris à Calais. Impossible, en réalisés par SeaFrance l’an revanche, d’utiliser l’arme dernier. low-cost qui «ne veut rien Côté effectifs, il espère envi- dire dans le maritime, car touron 520 emplois en France et tes les compagnies doivent 70 en Angleterre en 2013, partir du même port». Prix de contre 395 emplois aujour- la traversée : environ d’hui. Loin des 880 postes 50 euros. que comptait SeaFrance. Et CORALIE SCHAUB La crise n’a pas pris de vacances, le gouvernement un peu. Mais le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici, sonne l’heure de la rentrée gouvernementale avant même le premier Conseil des ministres, mercredi: «Le désen dettement est un impératif afin de conserver notre souve raineté et la maîtrise de notre destin», martelaitil hier dans les colonnes du JDD. Bref, au moment de s’attaquer au mur du budget 2013, pas question de dévier d’un pouce de l’objectif: ramener le déficit public français à 3% à la fin de l’an prochain (contre 4,5% cette année). La tâche s’annonce ardue puisqu’il s’agira de trouver 33 milliards d’euros en réduction de dépenses et impôts nouveaux. Alors que la croissance est au point mort cette année, le patron de Bercy maintient la prévision du gou vernement d’une progression du PIB de 1,2% pour 2013. Une révision en baisse «n’est pas d’actualité» et une faible hausse de la croissance «n’est pas une fatalité». Les éco nomistes sont sceptiques, mais Pierre Moscovici y croit: «Dès lors que nous sommes capables de relancer la dyna mique en Europe et en France, nous avons un réel poten tiel de croissance en 2013.» En attendant, l’heure est au tour de vis dans les dépenses publiques et au «redresse ment [lire hausses d’impôts, ndlr] dans la justice». PHOTO AP 1000 C’est, en milliards de dollars (810 milliards d’euros), le montant faramineux de la dette étudiante aux Etats Unis, selon une étude présentée, hier, au congrès de l’Association sociologique américaine. Les diplômés, qui doivent emprunter aux banques pour financer leurs chères études, sont sortis de l’université avec une dette moyenne de 25250 dollars (20468 euros) en 2010. BANQUE Bob Diamond, l’ancien directeur général de Barclays emporté en juillet par le scandale de la manipulation de taux interbancaires, a vivement contesté samedi un rapport de la commission des finances du Parlement mettant en cause la sincérité de son témoignage. BIÈRES Le numéro 1 mondial AB Inbev va devoir convaincre les autorités américaines qu’il peut racheter la fameuse bière mexicaine Corona, l’une des plus vendues au monde, sans nuire à la concurrence. DOUX Les offres de reprise du pôle frais du volailler doivent être «améliorées», a indiqué samedi le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, qui regrette le flou autour du plan de continuation des dirigeants du groupe. Cinq offres de reprise partielle de Doux frais, en liquidation judiciaire, ont été déposées au tribunal de commerce de Quimper (Finistère), menaçant plus d’un millier d’emplois sur 1 700. Et aussi: un tour d’horizon des expressions à la con, une librairie branchée à Milan, un quiz spécial cagoles… Le barnum de l’auditorium La plasticité physique et acoustique de la salle abritera tous les effectifs et styles de musique imaginables. PHOTO ATELIERS JEAN NOUVEL. ARTEFACTORY [EN CHANTIER] Tout l’été, déambulation au cœur de constructions, réelles ou imaginaires. Aujourd’hui, la salle de concert de la philharmonie de Paris. Par ÉRIC DAHAN LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr D epuis le boulevard périphérique, juste avant d’arriver à la porte de Pantin, le chantier semble pharaonique. Encore faut-il y prêter attention. Combien de Parisiens continuent de demander, II • EN CHANTIER dix-sept ans après son inauguration, quel est le bâtiment, adjacent à ce chantier, sur lequel est pourtant écrit en toutes lettres : Cité de la musique ? Le chantier en question, c’est celui de la philharmonie de Paris. Cette salle de concert faisait partie du projet initial de Maurice Fleuret et Jack Lang pour la Cité de la musique, mais sa construction fut abandonnée en 1987. Le terrain servit donc, jusque récemment, de parking aux visiteurs du Zénith, situé non loin dans le parc de la Villette. Quant aux mélomanes, ils continuèrent à aller écouter leurs orchestres favoris dans des salles non prévues à cet effet, comme le théâtre des Champs-Elysées, le théâtre du Châtelet ou la salle Pleyel, construite en 1927 pour abriter des concerts, mais dont l’acoustique –bien que considérablement améliorée en 2005– n’est toujours pas idéale. Alarmes et inquiétudes L’absence d’une salle de concert digne de ce nom dans une capitale qui se targue d’être la plus belle ville du monde, sinon la plus visitée, est révélatrice de l’inculture musicale de nos élites. Au XIXe siècle, Berlioz se plaignait déjà de l’absence d’une salle de concert à Paris. La France est, de fait, un pays de mots et d’idées, et la musique, contrairement au théâtre, offre peu d’occasions d’empoignades idéologiques sur la société. A l’annonce, il y a cinq ans, de la décision conjointe de l’Etat, représenté par Nicolas Sarkozy, et de la ville, représentée par Bertrand Delanoë, de financer à parts égales (158 millions d’euros chacun), avec la participation de la région Ile-de-France (20 millions), la construction d’un grand auditorium, certains se sont alarmés : cet équipement dont le premier bénéficiaire sera l’Orchestre de Paris, résident principal, est-il bien nécessaire? D’autres se sont inquiétés du vieillissement du public de la musique symphonique, qui pose deux problèmes : celui du remplissage d’une nouvelle salle de 2 400 places et celui du public qui la remplira, sachant que celui des beaux quartiers, soit de Pleyel et du théâtre des Champs-Elysées, ne se déplacera pas nécessairement porte de Pantin, et considérant symétriquement que les riverains de la porte de Pantin, côté Paris comme côté banlieue, ne sont pas encore répertoriés comme mélomanes endurcis. Sur ces questions, Laurent Bayle, actuel directeur de la Cité de la musique et de Pleyel et président du conseil d’administration de la philharmonie de Paris, s’est déjà exprimé. Pour lui, l’offre crée la demande. Si l’on ne propose rien de nouveau, il ne faut pas s’attendre à un renouvellement du public, tant générationnel que social. Aussi spectaculaire que soit le bâtiment construit par Jean Nouvel, ce chantier, qui marque une étape dans le développement du Grand Paris, n’est donc pas qu’architectural. Ce qui s’y construit, c’est le Paris culturel de demain dans lequel la musique jouera à parts égales avec la peinture –qui ne manque pas, elle, d’établissements prestigieux où être exposée. C’est un fait, les grands orchestres adu- La future grande salle de concert pourra accueillir jusqu’à 3650 personnes. PHOTO ATELIERS JEAN NOUVEL. ARTEFACTORY lés par les mélomanes sont tous rattachés à une salle de concert. Qui a déjà entendu le philharmonique de Vienne, le Concertgebouw d’Amsterdam, le philharmonique de Berlin et le Gewandhaus de Leipzig dans leurs salles respectives peut en témoigner : ces formations ont forgé leur son dans des télévision jugée ringarde, s’échangent toutes sortes de fichiers gratuits et croisent, miracle de la Toile, la musique classique, sans même l’avoir cherchée. Parallèlement, l’opéra, victime de son succès médiatique, de metteurs en scène incompétents et de chanteurs médiocres montés en épingle, est peutêtre en train de mourir, ce qui est une chance pour la pure musique. Ces deux facteurs pourraient expliquer que, dans de nombreuses villes d’Europe (Londres, Munich, Barcelone, Madrid, Rome, Saint-Pétersbourg, etc.) et du monde, notamment aux Etats-Unis et au Japon, on construise des auditoriums pour la musique symphonique. De Frank Gehry à Jean Nouvel en passant par Jacques Herzog et Pierre de Meuron, Christian de Portzamparc, Rem Koolhaas et Renzo Piano, on ne compte plus les grands architec- Alterner musique de chambre, baroque, symphonique, contemporaine, rock… acoustiques remarquables. Lorsqu’ils se produisent à Paris, ces orchestres sont physiquement et acoustiquement à l’étroit, ils sonnent courts de souffle, pauvres en couleurs, ou au contraire épais et criards. Heureusement, cela va changer. Avec l’arrivée d’Internet, l’hégémonie de la culture pop s’est fissurée: les jeunes ne regardent plus la LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr tes qui ont récemment concouru pour la construction d’une ou de plusieurs salles de concert. Un lieu de socialisation L’enjeu de ces nouveaux auditoriums n’est pas seulement d’offrir des conditions d’écoute optimales au public, de confort pour les musiciens et de s’assurer une rentabilité économique en disposant de salles de répétition suffisantes pour enchaîner des programmes. C’est aussi et surtout d’être des lieux de socialisation et d’éducation, où l’on peut voir des expositions, acheter des livres ou des disques, se restaurer, s’informer sur la musique grâce à une médiathèque et des ateliers d’initiation. Fort de son expérience à la Cité de la musique, qui comprend déjà deux petites salles de concert et un musée de la musique, le projet de Laurent Bayle pour la philharmonie de Paris se veut exemplaire. Selon lui, «les politiques artistiques établies EN CHANTIER Du haut de ses 37 mètres, la philharmonie de Paris couronnera l’activité artistique du parc de la Villette. PHOTO ATELIERS JEAN NOUVEL. ARTEFACTORY Une représentation de la grande salle de répétition. PHOTO ATELIERS JEAN NOUVEL. ARTEFACTORY en France depuis la fin des années 90 consistant à offrir aux jeunes une programmation spécifique n’ont pas suffi à créer un engouement pour la musique symphonique. Le cœur du projet pédagogique de la philharmonie ne reposera donc pas sur de simples concerts ou spectacles éducatifs mais sur des ateliers de pratique produits à grande échelle pour sensibiliser les enfants à la musique par un contact direct avec les instruments et le son. Il s’appuiera sur la magie du monde orchestral et tentera de relever trois défis majeurs : démocratiser l’éducation musicale, créer le public de demain et ouvrir les orchestres sur la cité». Lauréat du concours international organisé en 2007, Jean Nouvel a dû imaginer un bâtiment de 20000 m2 qui non seulement réponde à cet ambitieux projet, mais s’inscrive dans le parc de la Villette. Du haut de ses 37 mètres, la philharmonie de Paris couronnera donc l’activité artistique du parc qui, en plus des deux salles de la Cité de la musique (une de 900 places et une autre de 250 places), contient les trois salles du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, le Zénith (6 300 places), la salle Charlie-Parker (1600 places) de la Grande Halle, le Trabendo (600 places), le Cabaret sauvage (1000 places), le Théâtre Paris-Villette (150 places), le Tarmac (156 places), la salle de projection de la Géode (400 places), l’amphithéâtre GastonBerger de la Cité des sciences et de l’industrie (900 places) et le Grand Studio du Centre national de la danse à Pantin (139 places). Choisis parmi 98 candidats, Jean Nouvel et ses ateliers ont convaincu le jury par leur capacité à répondre à plusieurs exigences majeures : le confort du public et sa proximité physique avec les musiciens, la plasticité physique et acoustique de la salle devant accueillir tous les effectifs instrumentaux et styles de musique imaginables, le respect des nouvelles normes énergétiques et environnementales, et la prise en compte de tous les handicaps possibles (moteurs, visuels, auditifs) pouvant affecter les utilisateurs. «Boîte à chaussures» Si la philharmonie de Berlin, conçue par Hans Scharoun et inaugurée en 1963, a longtemps servi de mètre étalon des salles de concert, avec son agencement des sièges «en vignoble» autour de l’orchestre, elle n’a pas totalement supplanté l’ancien modèle dit de «boîte à chaussures», l’une des raisons étant la distance entre les sièges les plus haut placés et l’orchestre, et la difficulté, en l’absence de balcons, de multiplier les réflexions précoces et latérales du son, garantes de la clarté acoustique de la salle. Le projet conçu par Jean Nouvel et lancé en 2009 réalise donc un compromis entre l’architecture frontale des auditoriums type philharmonie de Vienne, et celle, organique et enveloppante, de la philharmonie de Berlin. La LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr • III plus grande distance entre les spectateurs et la scène a été ramenée à 32 mètres, et la création d’un volume acoustique extérieur à celui, actif, de 30500 m3 assurera une réponse tardive du son qui, combinée aux réflexions précoces, créera une sensation d’enveloppement et de bain sonore. Cette enveloppe volumétrique, en plus d’être un cocon isolant des bruits extérieurs, recevra, comme un cyclorama, des éclairages différents en fonction des programmes. A cela, il faut ajouter pléthore de réflecteurs acoustiques –«nuages» fixes, «nez» de balcons, murs «rubans» situés derrière le public, canopée réglable en hauteur et autres panneaux sous le plafond redirigeant latéralement les sources sonores afin d’éviter le dangereux effet de dôme. La lecture du copieux rapport acoustique préliminaire de Harold Marshall, conseillé par le fameux Yasuhisa Toyota, montre à quel point il n’y a pas de modèle convenant à tout type de musique, mais que l’on peut, en conduisant des tests sur des maquettes informatiques et physiques, répondre à beaucoup d’exigences – la principale étant d’assurer la même acoustique à tous les auditeurs et d’offrir aux orchestres symphoniques un temps de réverbération idéal de 2,3 secondes, qui peut être allongé pour les concerts d’orgue ou de musique sacrée afin de simuler l’acoustique d’une église. Dès son ouverture, cette salle-instrument permettra donc d’alterner, dans une même journée, musique baroque, symphonique, de chambre, contemporaine, rock, jazz ou world, en déplaçant le plateau et en rétractant des rangées de gradins pour accueillir jusqu’à 3650 personnes. Posé sur une butte artificielle, le vaisseau futuriste de neuf étages, dont cinq pour la salle de concert et deux pour le parking en soussol, sera visible de jour comme de nuit avec sa vêture en fonte d’aluminium, ses écailles en inox miroitantes et son écran vertical, haut de 52 mètres, affichant le programme. On pourra y accéder directement par une sortie de périphérique, ou par l’une des différentes entrées terrestres, selon que l’on utilise les transports en commun ou que l’on vienne à pied par le parc. Avec son assemblage de plans obliques formant rampes, emmarchements et parvis, la philharmonie sera une invitation à la promenade. Dans la continuité des «folies» rouges de Bernard Tschumi balisant le parc, le complexe abritera une «grotte», soit un jardin horizontal sous le bâtiment, ponctué de bassins, de rideaux d’eau, de fontaines et de grands traits de lumière naturelle, permettant aux promeneurs de se protéger des intempéries. Enfin, le toit, véritable belvédère accessible à tous, offrira un point de vue unique sur le parc, Paris et sa banlieue. Le soir de l’inauguration de la philharmonie, en septembre 2014, nul doute que nombre de musiciens de l’Orchestre de Paris et de mélomanes s’y exclameront : «Il était temps !» • [DEMAIN: LA FONDATION BARNES À PHILADELPHIE] IV • SÉRIE [BROUILLON DE CULTURE 1/6] Conseils au romancier qui sommeille en vous. Par ÉDOUARD LAUNET Laissez parler votre sensibilité C’ est l’été: profitez-en pour écrire votre premier roman. Nous vous fournissons la première phrase (primée par le prix américain Lyttle Lytton du pire incipit) ainsi que quelques conseils. «Monica avait explosé, et j’avais sur les bras une drôle d’énigme, ainsi que des fragments de son pancréas.» Il est clair qu’une telle introduction doit vous orienter vers un roman noir, pas dans la rédaction d’un traité d’anatomopathologie. Quoique: la description de morceaux de pancréas peut intéresser un certain public. Il y a sûrement plein de détails intéressants à donner : tant de gens sont incapables de distinguer un pancréas d’une rate ou d’un foie, entiers ou en miettes. Notez tout de même qu’un polar a de meilleures chances de se vendre. Monica a donc explosé, et, inévitablement, le lecteur ne va pas tarder à se demander : «Comment ? Pourquoi ? A quelle heure?» Vous devrez apporter des réponses précises à chacune de ces questions, mais pas nécessairement tout de suite. Peut-être même pouvezvous carrément éluder le «pourquoi»: il est bon parfois de laisser planer un certain mystère. En revanche, il est impératif de présenter Monica au lecteur. Est-ce, ou plutôt était-ce une belle fille? Disons, c’est une suggestion, que c’était une grande rousse de 45 ans, célibataire, fille d’un huissier de justice et d’une éducatrice spécialisée, locataire d’un deux-pièces dans le XIe arrondissement de Paris, fagotée comme un sac, assez bonne partenaire au lit, diplômée de sociologie, sans emploi. Enfin, avant l’explosion. Et vous, le narrateur, qui êtes-vous dans cette histoire ? Une femme, un homme, un avocat, un démineur, un flic ? Un peu de tout ça à la fois ? Et quelle est votre relation à Monica : amant, frère, cousin issu de germain ? S’il y a eu vie commune, il serait bon d’en rappeler deux ou trois épisodes. La fois, par exemple, où vous avez étranglé le chat de Monica avec son soutiengorge (à elle) parce qu’il avait pissé dans vos chaussons. Etait-ce un meurtre ou un accident? Et pourquoi l’incipit parle-t-il d’énigme? Il faut ici laisser parler votre sensibilité et votre imagination. Personnellement, nous poursuivrions une piste «Farces et attrapes». Vous (le narrateur) avez offert à Monica un cigare explosif, ou peut-être un coussin péteur, articles qui font toujours rire. Mais la charge a été extrêmement mal dosée dans le cigare, ou introduite par erreur dans le coussin: en principe, le coussin péteur couine mais ne pète pas vraiment. Monica a désormais la moitié du visage en moins, ou bien elle est amputée d’une fesse, et l’explosion a été assez forte pour toucher le pancréas ainsi que d’autres organes internes. Vous étiez sur les lieux du drame puisque vous avez sur les bras des fragments de son pancréas. Décrivez ce moment de stu- peur, la fumée qui se dissipe, l’odeur, vos éventuelles blessures si vous étiez très près. Détaillez vos impressions. «J’ai peur que Monica ne soit gravement blessée» est une réflexion que vous pouvez vous faire in petto. Mais il y a sans doute plus original. Ensuite, il est possible de donner une coloration sociale au roman. Vous partez en Chine, où l’article a été fabriqué, pour tenter de trouver le ou les responsables de ce carnage. Vous découvrez les horribles conditions de travail dans l’usine JokeShop Inc., en lisière d’une ville improbable de la province du Guandong. Placez ici une scène de sexe nécessairement torride avec la responsable des relations extérieures de l’entreprise. Et n’oubliez pas de mentionner que la fonction exocrine du pancréas consiste en la sécrétion d’enzymes dans le duodénum par le canal de Wirsung. [DEMAIN: CONSTIPATION ET ATTERRISSAGE] [EXPRESSIONS À LA CON 1/6] Dans les médias, avec la boulangère, au bureau, nos conversations sont ponctuées de dérives à répétition. Focus sur nos tocs de langage. Q uiconque a passé plus d’un quart d’heure dans une entreprise en qualité de salarié sait à quel point on peut y pratiquer un métalangage hermétique pour le profane. Chaque terme, chaque expression possèdent une infinité d’interprétations selon les circonstances dans lesquelles a lieu la conversation, de la position hiérarchique de celui qui use et abuse de ce charabia par rapport à celui qui doit en subir l’écoute et de la perversité des rapports humains qui unissent les deux personnages. Ou plutôt les opposent. Prenons l’exemple éclairant de «définir le périmètre». Généralement prononcée par les membres de la caste supérieure de l’entreprise à l’attention de la piétaille, cette locution n’est qu’un simple paravent capable de masquer des situations diverses, voire opposées. C’est en ces termes qu’un chef d’entreprise peut expliquer qu’il est sur le point de foutre à la porte 95% de ses employés car, compte tenu de l’augmentation spectaculaire du chiffre d’affaires de sa boîte, il n’a pas d’autre choix que de construire une usine trois fois plus vaste au Mexique. Evidemment, il est très affecté par cette décision, d’ailleurs il a renoncé à reprendre deux fois des profiteroles à midi, mais il doit faire preuve d’une volonté inflexible. Dans ce cas, «redéfinir le périmètre» signifie que les anciens employés n’en font pas partie. Autre exemple, un dirigeant devant faire face aux idées audacieuses de ses Par BRUNO ICHER Définir le périmètre jeunes loups de subordonnés. Cas de figure récurrent, il ne comprend pas une broque de ce dont on lui parle. Evidemment, il ne peut pas admettre qu’il est largué et, de surcroît, il doit donner des gages de sa qualité d’écoute. Il lui suffit alors de prendre un air intéressé mais perplexe, suggérant à ses interlocuteurs qu’ils sont bien gentils mais qu’ils ne mesurent pas les conséquences de leur proposition, puis de lâcher un énigmatique : «Il faut redéfinir le périmètre.» Tandis que l’auditoire se perdra en conjectures, le chef d’entreprise devrait avoir le temps de faire une demi-douzaine de parcours de golf. Les variantes sont si nombreuses qu’il convient de consulter un de ces guides LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr de management qui meublent les rayons des mauvaises librairies. «Concernant un projet lié aux systèmes d’information, le périmètre total est l’identification et le recensement des applications/modules impactés par le projet.» Voila qui est soudain très clair. [DEMAIN: «J’AI ENVIE DE DIRE»] • V PHOTO [MÉTAMORPHOSES ULTIMES 1/6] Vanités vitaminées DIMITRI TSYKALOV Né en 1963 à Moscou. Vit à Paris. Série: «Skulls» (courtesy galerie Rabouan Moussion). Rens.: www.dimitritsykalov.com Dimitri Tsykalov, peintre et sculpteur de formation, préfère l’antimatière. Il puise dans son réfrigérateur et dans les rayons des supermarchés la chair vivante de sa sculpture –il a aussi réalisé une puissante série à base de viande crue («Meat»). Dans les tableaux classiques de vanités, il y avait un crâne posé à côté de fruits ou de fleurs. Là, Tsykalov fait d’une pierre deux coups, en résumant le concept même de nature morte : le crâne est le fruit. Ces photo- LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr graphies pleines d’humour noir nous renvoient des portraits grimaçants. Pour le photographe russe, nos étals de supermarchés si bien fournis sont comparables à des cimetières. Et notre avenir à tous est la pourriture. Amer. VI • FEUILLETON Escale hype milanaise [LES PLUS BELLES LIBRAIRIES D’EUROPE 1/6] De la vénérable institution au concept store, balade parmi des rayonnages singuliers. Aujourd’hui, le 10 Corso Como. Par CLÉMENT GHYS I l est assez facile de louper le 10 Corso Como et de tourner de longues minutes dans cette voie piétonne du nord de Milan à la recherche d’un indice, d’un panneau. Même si le lieu est répertorié par toutes les revues de la branchouillerie internationale et que, c’est bête comme chou, son adresse lui sert de nom. Petit conseil pratique: pour trouver l’entrée, suivre le cortège de dames très chics en talons (de 12, s’il vous plaît), des shopping bags à ne plus savoir qu’en faire dans les mains, et dépasser la porte cochère, encastrée dans le mur végétal extérieur. Vous voilà dans un patio-café où une foule déjeune sur des petites tables. Ça discute (en italien, franglais, japonais ou arabe) chiffons, expos, vacances, business. Mais, au fait, on est où? Dans un concept store, comparable à Colette à Paris ou Dover Street Market à Londres, qui vend fringues (de la dernière folie Prada à l’audace du créateur japonais Junya Watanabe), livres, gadgets, meubles, et où l’on peut voir des expos, manger et même dormir. Beaucoup pour un seul endroit? C’est l’idée. Magazine vivant A l’étage, dans la librairie, on trouve pêle-mêle des classiques, des ouvrages de Susan Sontag, de Roland Barthes, des magazines dans le coup et une quantité astronomique de coffee table books, ces beaux livres de photos hors de prix. A côté, dans l’espace de la galerie, s’achève une expo de tirages originaux du Tchèque Frantisek Drtikol et débute «Photo Vogue», qui regroupe les travaux de 101 jeunes photographes. «Ici, c’est le cœur du 10 Corso Como», confie Carla Sozzani dans son bureau aux murs couverts de clichés en noir et blanc encadrés. Cette sexagénaire über-chic (toujours en Azzedine Alaïa) a fondé ce lieu il y a vingt-deux ans. Blonde botticellienne, issue d’une famille de la très viscontienne haute société, elle a été journaliste de mode, notamment à Vogue Italia (sa propre sœur, Franca, dirigeant aujourd’hui la revue) et a lancé le Elle local dans les années 80. «Après avoir travaillé dans la presse pendant vingt ans, j’ai eu envie de changer de support. A l’époque, tout était très figé. Il n’y avait rien qui mêlait la mode, le design, les livres, le cinéma, la cuisine… J’ai donc eu l’idée de créer un lieu qui serait comme un magazine vivant.» Le patiocafé, à l’entrée de la librairieconcept store. PHOTO DR Tout est à vendre, y compris le mobilier du magasin. Les ouvrages sont déposés sur des tables. PHOTO DR LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr FEUILLETON «Un mélange d’univers autrefois distincts qui, aujourd’hui, se coagulent.» [POUF] Oh, fan de ta race! Boulègue de là avec tes questions. Qu’estce qu’elle a, ma cagole? Par EMMANUÈLE PEYRET dit-on «bite» 1 A.Comment en langue cagole? C’est le vier. B. C’est le bier. C. C’est le fier. Quel est le cri de ralliement 2 des cagoles, rue Saint-Fé ou à centre Bourse? A. Ayiiiiiiiiiiii. B. Ayééééééé. C. Aïeuuuu. D’où vient le mot cagole? 3leurs A. Du nom du tablier de aïeules, le cagoulo, cachant les hardes à l’usine, cachant aussi une petite vertu due à des salaires de misère. B. De casse-gueule en argot toulonnais, qualifiant leur look parfois, euh, hasardeux. C. De caguer, déféquer (cf. : «Tu me fais caguer»). cagole est plutôt… 4peuLaA.nunucho Une gentille fifille un vulgos. B. Une sacrée fumelle aux attributs un brin soulignés. C. La vraie icône d’un féminisme revendiqué (même si pas forcément conscient). a écrit des textes 5A.Qui définitifs sur les cagoles? FOG. B. Serge Scotto. C. Régis Bertrand. meilleure cagole est… 6B.LaA.A EnToulon, Paca. Marseille, Nice et alentour. C. Ni après Arles, ni audessus d’Aix. Oui, mais les chaussures? 8pilotis A. N’importe quoi sur et à franges. B. Des compensées lamées à franges. C. Des Poupoutin, achetées au cul du camion à Jason 9. Oui, mais les accessoires? 9blanc. A. La créole en plastique B. Des leggins bigarrés. C. Des bijoux que la montre de Sarkozy à côté, elle fait chic et discret. Oui, mais la coueffure? 10 A. Rouge avec des nattes afro. B. Blonde avec des mêcheu. C. Décolorée avec des coquillages. pétasse est à la cagole ce 11A.Laque… Pavarotti est à l’opéra. B. Marc Levy est à Flaubert. C. M est à Johnny H. Laquelle n’est pas une 12A. «Qui blague de cagoles? trop baise bouffe des poils». B. «On note un grand nombre de décès par électrocution avec la langue collée aux prises de courant. Il semblerait que le sujet ait compris pouvoir y prendre du jus.» C. «Patricia, putaing, j’ai le stérilet qu’est rouillé, je fais pipi marron, j’ai chopé le tatanosse.» Que signifie le mystérieux 13A. C’est «c’est le ouaille»? un mystère. B. C’est un putain de Comment s’habiller pour faire cagole? A. Toujours en blanc avec franges et mailles, plastique et doré. B. En peau de bête, mais uniquement le soir, sinon ça fait vulgaireu. C. N’importe quoi de fluo, années 80, ras la moule. 7 bordel. C. C’est le Macumba des cagoles. La cagole, fierté nationale 14 française, est entrée au dictionnaire… A. Des roberts. B. Du Robert. C. En 2012. Réponses: 1. a; 2. a; 3. a et c; 4. a, b et c; 5. a ,b et c; 6. a ,b et c; 7. a ,b et c; 8. a, b et c; 9. a, b et c; 10. b et c; 11. a ,b et c; 12. a (de Desproges); 13. b; 14. b et c. 500 m En 1990, elle déniche, d’univers (mode, deGare centrale dans cette rue alors très sign, gastronomie…) MILAN popu, un ancien atelier qui se coagulent, forLibrairie d’imprimeur qu’elle mant une culture cos10 Corso Como transforme en galerie mopolite où règnent Castello Sforzesco CENTREd’art. Six mois plus l’élégance et le supposé VILLE tard, dans le même bâbon goût – «lifestyle», Théâtre Milan de la Scala Duomo timent, elle installe une en anglais. L’endroit a ITALIE (cathédrale) Place librairie et un petit café beau être silencieux, on du Dôme Palais Royal dans un ancien espace entend toujours le bruit de stockage Coca-Cola. En bas, le ga- d’une caisse enregistreuse. «Ici, tout est rage Renault devient boutique de mode. à vendre !» s’amuse la propriétaire, Les habitants s’amusent de l’arrivée de Tout, y compris le mobilier du magasin, cette jeune femme traînant avec elle conçu par Kris Ruhs, son compagnon une faune nouvelle. «Tout le monde était designer. Et l’on peut même passer une enthousiaste, les gens participaient, nuit dans 3 Rooms, le bed & breakfast m’aidaient. Il y avait un épicier qui venait de haut vol situé à l’étage. m’apporter des spaghetti quand je passais mes nuits à travailler. Je crois que je les Luxe érudit faisais rire, c’était un endroit nouveau, extravagant. Tous se demandaient ce que Car si le 10 Corso Como a l’étiquette, je faisais, s’ils pouvaient entrer.» méritée, de lieu pointu, il n’en reste pas Les premiers clients s’étonnent de la moins une formidable machine finandisposition du lieu. Dans la librairie, les cière. Et pour s’en rendre compte, il faut ouvrages ne sont pas rangés dans des quitter la librairie, descendre dans la étagères mais déposés sur des tables, boutique et voir les membres de cette Carla Sozzani détestant «l’idée de devoir nouvelle haute société que constitue la prendre quelque chose dans un mur et se hype dépenser des fortunes en habits, tordre le dos pour attraper un bouquin. Là, chaussures et autres accessoires. Carla les livres sont à portée de main, on peut les Sozzani multiplie les opérations de regarder de manière plus reposée.» Inspi- cobranding, s’associant à des marques rée par ces librairies américaines rem- pour commercialiser des miniplies de canapés, elle installe des fau- collections. Depuis Milan, elle gère aussi teuils «pour que les clients puissent des magasins du même nom qu’elle a passer des heures à bouquiner». Elle af- ouverts à Séoul et Tokyo. Mais alors, les firme que «beaucoup de gens viennent et livres et les expos là-dedans ? Un alibi n’achètent rien. Ce sont souvent des étu- culturel ? «Il faut trouver un équilibre. diants qui n’ont pas les moyens. Ils pas- Gagner de l’argent, c’est bien. Mais il faut sent des journées assis à tout regarder. aussi savoir en perdre. Comme lorsque J’adore cette idée, On me dit souvent : j’organise des lectures de portfolios de jeu“Mais s’ils abîment un livre très cher ?” nes photographes, que je leur offre des caEt alors ? C’est pas si grave.» Tout aussi dres. Si l’on pense que chaque mètre carré surprenants, ces fauteuils installés de- d’un lieu doit ramener de l’argent, on fait vant les caisses. Au 10 Corso Como, que fausse route.» On la croit d’autant plus l’on achète un petit livre de poche ou un que c’est justement cette direction-là, manteau Comme Des Garçons, on s’as- moins tape-à-l’œil, plus discrète, érusied et on papote un moment. Et la pro- dite même, que prend le luxe contemporain. En vingt-deux ans, la rue Corso Como a beaucoup changé, le numéro 10 drainant d’autres boutiques, plus banales, parfois vulgaires, toutes en musiques assourdissantes et vendeurs de priétaire, à la jeunesse un peu hippie, de jeans élimés. De l’ancienne époque, comparer son luxueux concept store seule subsiste une quincaillerie, dont la aux «souks du monde arabe et aux mar- propriétaire, une dame âgée toujours en chés indiens»… tablier, salue Carla Sozzani tous les maAu début des années 90, quand est tins. Si la fondatrice du 10 Corso Como fondé le 10 Corso Como, la ville est en regrette que «les choses aient changé à crise. Les années 80 viennent de ce point dans le quartier», elle voit d’un s’achever et, avec elles, l’ère du «Milano bon œil ces grandes tours en construcda bere». Littéralement «Milan à boire», tion non loin de là, ce «mini-Dubaï», l’expression décrit la décennie où se que l’on aperçoit depuis le toit du sont montés les grands groupes du luxe 10 Corso Como. Une terrasse ocre, juste (Armani), où le monde de la mode était au-dessus de la librairie, devenue un synonyme de drogues, de caprices de lieu de promenade des Milanais. Une top-models, de partouzes… Et où esplanade fleurie où, le jour se coul’argent de la mafia n’était jamais très chant, on a l’heureuse surprise de voir loin. Cette période, «très vulgaire», débarquer un couple d’amoureux, lui dixit Carla Sozzani, est stoppée net par en maillot de foot et elle en débardeur, l’opération anticorruption «Mains pro- 18 ans à peine, main dans la main. Dispres», qui fit tomber une partie de l’es- cutant sans doute de mode et de phototablishment milanais. «J’ai ouvert à un graphie, mais pas seulement. • moment assez difficile, très indécis. Mais 10, Corso Como, 20154, Milan. ce que je voulais était tellement le contraire Rens.:www.10corsocomo.com du Milano da bere que les gens curieux sont venus immédiatement.» Curieux, [DEMAIN: DAUNT BOOKS, oui, mais de quoi ? De ce mélange À LONDRES] • VII QUIZ LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr VIII • CHRONIQUES [HÉROS D’UN LIVRE] [SOIZIC CONSEIL SERVICE] Le témoin d’Albacete Ethnique ta mère I MARC SEMO «Ma Guerre d’Espagne», de Sygmunt Stein, traduit par Marina AlexeevaAntipov, éd. du Seuil, 263 pp., 19€. «J e suis fashion-ethnique depuis toujours, mais là ! Entre le short cherokee, la tunique ouïghour et le blouson en ours vivant, je ne sais plus…» (Suzanna S., Southfork) Je réponds: OK, anyway, mais c’est votre choix et vous l’assumez, car je sais aussi (dossier Stasi 35452) que vous êtes carnivore. Vous avez donc un sujet de conversation avec l’ours vivant qui vous sert de blouson, mais avez-vous songé à la vache assassinée qui a servi au cuir de votre short et aux nonnes aveugles qui ont cousu votre tunique et ont connu un sort encore plus affreux? KILLOFFER l croyait trouver sur les fronts de la République espagnole de quoi ranimer sa foi ébranlée par les procès de Moscou. Sygmunt Stein, militant communiste juif tchèque engagé dans les Brigades internationales et nommé commissaire à la propagande à Albacete, narre l’envers du mythe: exécutions arbitraires et procès staliniens contre les supposés trotskistes, les banquets orgiaques de commissaires incompétents. Staline avait peur de la révolution espagnole et du rêve démocratique qu’elle incarnait. Il la laissa se faire écraser. «Staline n’a pas seulement détruit la vie mais aussi la foi de millions de gens», écrit l’ex-militant dans ce livre publié en yiddish dans les années 50 et resté jusqu’ici inédit en français. Une éclairante postface de l’historien Jean-Jacques Marie complète ce témoignage accablant sur André Marty, le patron des Brigades surnommé «le boucher d’Albacete». Il fut exclu du PCF dans les années 50. SOIZIC VON FESSENHEIM [VIVE LE BONHEUR] Comment lutter? C’ est pourtant pas compliqué. Il suffit, quand on vous marche sur les pieds, de donner un bon coup de tatane dans la gueule et on verra si l’insolent persiste et n’y regardera pas à deux fois avant de vous flanquer deux doigts dans les yeux malgré les très belles lunettes de soleil qu’il a fallu beaucoup de sueur de front pour se les payer au prix où les escrocs écoulent leur marchandise. Il reste bien d’honnêtes petits marchands de lunettes à la sauvette, mais ils ne peuvent pas lutter contre les lobbys. G.L. et M.L. deux strips par jour pour le prix d’un LIBÉRATION Lundi 20 août 2012 www.liberation.fr Par YASSINE et TOMA BLETNER 14 • SPORTS LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 Par GRÉGORY SCHNEIDER Envoyé spécial à Lorient L e foot moderne recèle une variété de chausse-trapes que l’on n’imagine pas. A un bout du spectre : le stade Armand-Cesari de Bastia et ses quatorze rapports des délégués de la Ligue sur dix-huit matchs la saison passée. A l’autre bout : le stade du Moustoir à Lorient, où les champions de France montpelliérains se sont fait tordre (2-1, deux buts bretons dans les arrêts de jeu) samedi. Le coach héraultais, René Girard, en a oublié de s’exprimer devant la presse, pour la première fois depuis 2009. Certains présents se sont insurgés. Pas nous : un entraîneur qui ne parle pas, c’est aussi un entraîneur qui ne ment pas. Et puis, le Moustoir, ce n’est pas simple. Il y a d’abord les spectateurs : le dernier fumigène tiré qui remonte aux années Mitterrand, des petites têtes blondes partout pour le public le plus familial de France, un rêve de marketing footballistique. C’est au cœur de la seconde période, quand Montpellier menait tranquillou, que l’affaire nous est vraiment tombée dessus: une vieille dame, 80 ans bien sonnés, s’est penchée par-dessus une rambarde pour nous expliquer le foot. Ça donnait : «Ce terrain synthétique, c’est du plastique. Et ils l’ont arrosé [pour accélérer le jeu, ndlr]. Donc, les joueurs doivent se casser la figure. Et bien c’est ce qu’ils font depuis le début : ils se cassent la figure.» Moins qu’ailleurs: le foot sur synthétique se pratique debout, sans tacle, ce qui donne au joueur lorientais un côté immaculé en rapport avec le cadre où il s’exprime. M’enfin, on a médité là-dessus, Montpellier en a pris deux et on est parti se faire sous-titrer l’affaire par l’entraîneur morbihanais, Christian Gourcuff. «MÉRITE». On a croisé quelques joueurs locaux : timides d’approche, plus confiants ensuite, des types qui ne croisent pas un micro tous les jours. Yann Jouffre: «Dans le foot, on a ce qu’on mérite.» Gourcuff arrive. C’est beaucoup pour le Burkinabé Alain Traoré, auteur de l’égalisation samedi: «Alain n’a pas fait un immense match samedi… La défense n’est pas exempte de reproches… Traoré a joué trop vite… Ça doit être beaucoup mieux collectivement… La première relance n’était jamais rythmée…» Le tout tranquillement: le type qui suit son idée. On a maintes fois entendu des entraîneurs évoquer le style pour noyer le poisson les soirs de défaites. On n’avait jamais vu un coach escamoter un résultat favorable pour souligner des carences au cœur du jeu et, surtout, dire ce qu’il a vu. A cet instant, le discours de Gourcuff n’arrangeait personne. L’image et les mots en contrepoint de la victoire plutôt qu’en illustration : invendable dans un paysage A Lorient, la victoire des bonnes manières Vainqueurs de Montpellier (2-1), les Merlus animent le début de saison. où chaque match doit tenir en un fontaine pour les «Gunners» montage de quatre-vingt-dix se- d’Arsenal, qui avait fait hurler tout condes et trois phrases. le foot français au pillage, a transMais Gourcuff s’en fout. Ça fait formé le gaillard en une sorte de vingt et une saisons qu’il cornaque symbole ; celui de l’ingratitude et les Merlus, si l’on excepte une pa- de l’argent roi. On se rappelle l’un renthèse de deux saisons à Rennes de ses formateurs, des trémolos et à Doha : ça donne le dans la voix, filmé à droit de penser – et de REPORTAGE Clairefontaine: «Jérémy, faire – autrement. Les c’est Marco Van Basten», présents ont attendu que ça passe. l’attaquant néerlandais classissime Patiemment : l’attaquant Jérémy des années 80-90. L’affaire reAliadière, auteur du second but sa- monte à 1999. Aliadière n’est pas medi, devait succéder à Gourcuff devenu Van Basten : les blessures, sur l’estrade. Et Aliadière a une his- 14 matchs par an (c’est peu) et des toire. Son départ à 16 ans de l’Insti- clubs anglais de moins en moins setut national du football de Claire- lects, Arsenal, West Ham, Wolwer- hampton… et Lorient à 29 ans, un peu le coup de la dernière chance. Le natif de Rambouillet (Yvelines) est revenu sur son parcours dans l’Equipe : «A 16 ans, tu ne pars pas pour l’argent. Des journalistes venaient me voir à la sortie du collège, je lisais que mes parents m’avaient vendu… Des conneries.» TENDRESSE. Puis : «J’avais l’impression que les gens en France ne m’aimaient pas, parce que j’étais parti jeune. J’ai été surpris qu’on ne dise que du bien de moi.» Samedi, Aliadière a parlé du jeu lorientais : le souci de récupérer le ballon haut comme partout, un bloc compact comme partout, des redoublements de passes et du jeu au sol comme chez les équipes riches –ce que Lorient n’est pas. Il était paisible, urbain: un Anglais, excentricité discrète – les tatouages, le diamant à l’oreille gauche– comprise. Mais il y avait le regard : noir, brillant, profond; le même que celui du gamin apeuré qu’il fut dans une autre vie. Du coup, on a senti flotter dans l’air une certaine tendresse. Aussi invisible que ce qui traîne dans la tête de Gourcuff les soirs de victoire. Ou le charme discret d’une soirée au Moustoir. • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 SPORTS • 15 CARNET naissanCes Le Lorientais Lamine Kone (en orange), samedi, face à Montpellier. PHOTO JEANSÉBASTIEN EVRARD. AFP Après la deuxième journée de Ligue 1, quatre clubs se disputent le haut du tableau, tout en restant dans une phase de réglage. 14 août 2012 Maud Le Campion et François Ayme Thalie Ayme 136 rue de Charonne 75011 Paris Ces quatre leaders qui se cherchent encore Q uatre équipes se partagent la tête du championnat avec deux victoires en deux matchs, coquetterie estivale qui fait plus parler les fans que les joueurs eux-mêmes. Revue de détail. L’Olympique lyonnais et le mercato Etrange ambiance samedi à Gerland après le succès (4-1) devant Troyes: un buteur (Michel Bastos) qui pleure sur le terrain, un joueur cadre (Cris) au discours triste, un autre buteur (Bafétimbi Gomis) qui se réfugie dans le silence… La raison: le président de l’OL, Jean-Michel Aulas, veut liquider d’ici à la clôture du marché des transferts, le 4 septembre, «les pharaons» et «les dinosaures de vestiaire» qui, selon lui, plombent le club lyonnais. Cris, un «pharaon»: «Nous avons montré que l’effectif est très concentré sur les matchs, à l’image de Michel Bastos, Gomis, moimême… Pour l’instant, on est là. Il faut oublier un peu le mercato.» Le Sporting Club de Bastia et la fièvre Le promu corse et sa «bonne tête de 20e de Ligue 1» (le mot est du coach, Frédéric Hantz) fait son chemin dans une sorte de frénésie : après son rocambolesque déplacement à Sochaux le week-end dernier (victoire 3-2), Whabi Kazhri et consorts ont battu Reims (2-1) à Furiani dans un feu d’artifice d’expulsions rémoises et sur un but inscrit au bout des arrêts de jeu devant un public en furie… et une tribune vide, le prix à payer pour la pluie d’objets divers qui s’étaient abattus sur les joueurs guingampais au printemps. Le milieu Pierre Cahuzac, un local: «Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais pas cru ça possible.» L’attaquant Anthony Modeste, nouveau venu : «Il y a véritablement une atmosphère particulière ici. Je suis heureux d’être désormais du côté du Sporting car, quand vous êtes adversaires et que vous débarquez dans ce stade, vous êtes déstabilisés. Ce public est incroyable.» L’Olympique de Marseille et ses abonnements La semaine précédant la victoire d’hier contre Sochaux (2-0) a vu l’entraîneur phocéen, Elie Baup, et six joueurs rendre visite à une association de supporteurs, histoire de s’acheter un peu de paix sociale: la Marin est né campagne d’abonnements va mal, la faute à une saison passée ratée –13 défaites de suite au printemps– et à un recrutement inexistant, certaines pointures (César Azpilicueta, Stéphane M’Bia) étant de plus sur le départ. Le milieu Morgan Amalfitano: «Il faut donner aux supporteurs envie de revenir. Il ne faut pas qu’ils nous lâchent.» Baup : «Il faut que l’on diffuse un plaisir communicatif. Le résultat n’est pas le seul élément déclenchant d’un échange fort avec les fans.» A Marseille ? Il les a bien regardés, les supporteurs ? Les Girondins de Bordeaux et Lazare Huitième victoire étalée sur deux saisons devant Rennes (1-0), hier, pour les marine et blanc sur les ailes de leur meneur de jeu, Fahid ben Khalfallah, disparu depuis deux ans. Blessé ? Non. Perdu dans des contrées rémunératrices et exotiques ? Non plus. Le Tunisien (29 ans) était là, au Haillan, à s’entraîner mal et à jouer plus mal encore. Jusqu’à cet été où, brusquement, il a été bon. Ben Khalfallah a dit cette semaine n’avoir aucune explication. C’est quand même un métier bizarre. G.S. "Edmond Colosimo est ravi de vous annoncer la naissance de son petit frère Siméon Né à Saint-Mandé le 4 aôut, les parents Rachel et Romain sont épuisés" ConférenCes Université d'été de l'Ecole des Ingénieurs de la Ville de Paris du 27 au 30 août 2012 : Numérique et Génie urbain. Les villes et les grandes métropoles s'appuient très largement sur le numérique pour soutenir des projets de développement et renouveler les services offerts au public. Le point sur les progrès apportés aux services urbains et à la vie au quotidien dans nos villes par les smart grid, smart metter, smart home et les technologies numériques ainsi que les nouveaux développements à attendre au cours des prochaines décennies. Ouverts aux doctorants et chercheurs. EIVP 15 Rue Fénelon 75010 Paris, mailto : [email protected] REPÈRES «Il faut du caractère et du courage, deux qualités difficiles à développer chez un joueur. Donc il faut peutêtre changer les hommes.» Christophe Galtier coach de Saint Etienne battu (12) samedi à Toulouse 13 C’est le nombre de minutes passées sur le terrain par Yoann Gourcuff samedi. Touché au genou, le Lyonnais passe une IRM aujourd’hui. «Cette semaine, le coach Claude Puel nous avait demandé un brin de folie. Mais sans tirer, c’est dur de mettre des buts.» Joris Delle goal niçois dans l’Equipe, après un 00 sinistre à Valenciennes 2e journées Le classement 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 POINTS JOUÉS GAGNÉS NULS PERDUS MARQUÉS ENCAISSÉS DIFF. 6 6 6 6 4 4 4 4 4 3 1 1 1 1 0 0 0 0 0 0 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 1 1 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 1 1 1 1 1 1 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 1 1 1 0 0 1 1 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 1 1 2 2 2 2 2 2 5 3 5 4 4 3 3 2 1 1 1 2 2 0 2 2 1 0 2 1 1 0 3 2 3 2 2 1 0 1 0 2 3 1 4 4 3 2 5 5 4 3 2 2 1 1 1 1 1 0 1 0 1 1 2 2 2 2 3 4 Lyon Marseille Bastia Bordeaux Lorient Lille Toulouse Nancy Valenciennes Brest AC Ajaccio ParisSG Montpellier Nice SaintEtienne Evian TG Reims Rennes Sochaux Troyes Vendredi LilleNancy: 11 Pour Lille: Kalou (41e), pour Nancy: Bakar (33e) Samedi LyonTroyes: 41 Pour Lyon: Gomis (51e et 90e), Bastos (65e), Lopez (88e). pour Troyes: Bahebeck (48e) BastiaReims: 21 Pour Bastia: Modeste (62e sp), Ilan (90e). Pour Reims, Fauvergue (6e) ValenciennesNice: 00 LorientMontpellier: 21 Pour Lorient: Traoré (90e), Aliadière (90e). Pour Montpellier: Herrera (37e). ToulouseSaintEtienne: 21 Pour Toulouse, Capoue (35e), Ben Yedder (59e). Pour SaintEtienne, Gradel (90e). BrestEvian TG: 10 Pour Brest, Baysse (90e). Dimanche BordeauxRennes: 10 Pour Bordeaux, Obraniak (75e). MarseilleSochaux: 20 Pour Marseille, Gignac (54e), Fanni (90e). Le Carnet Vous organisez un colloque, un séminaire, une conférence… Contactez-nous Réservations et insertions la veille de 9h à 11h pour une parution le lendemain Tarifs 2012 : 16,30 € TTC la ligne Forfait 10 lignes 153 € TTC pour une parution (15,30 € TTC la ligne supplémentaire) Abonnés et associations : -10% Tél. 01 40 10 52 45 Fax. 01 40 10 52 35 Vous pouvez nous faire parvenir vos textes par e.mail : [email protected] AjaccioPSG: résultat non parvenu Meilleurs Buteurs 2 buts: Maoulida (Bastia), Modeste (Bastia), Obra niak (Bordeaux), Aliadière (Lorient), Gomis (Lyon), Ibrahimovic (ParisSG), Ben Yedder (Toulouse). Programme de la 3e journée Vendredi 24 août 21 heures: Evian TGLyon. Samedi 25 17h: NiceLille. 20h: ReimsSochaux, NancyToulouse, ValenciennesAC Ajaccio, Troyes Lorient, RennesBastia. Dimanche 17h: Montpellier Marseille, SaintEtienneBrest. 21h: PSGBordeaux. La reproduction de nos petites annonces est interdite Le Carnet Christiane Nouygues 0140105245 [email protected] 16 • REBONDS LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 L'ŒIL DE WILLEM Par DANIEL SCHNEIDERMANN L’immolé oublié du mois d’août Vous vous souvenez des assistés ? Des n’est pas une information, on a tout de horribles assistés qui font la honte de la même d’autres sujets. Jusqu’au jour où France et les belles couvertures du ça le devient. Figaro Magazine et du Point, avec des Oui mais voilà. Quand bien même un montages photos de drapeaux tricolores journaliste déciderait-il d’enquêter, et de hamacs? Des ignobles assistés qui il ne trouverait pas de sources. La direcs’achètent des écrans plats avec l’argent tion de la CAF ne répond que par mail, des allocs ? Eh bien le Point et le Figaro et au compte-gouttes. C’est normal. Magazine ne l’ont peut-être pas su, Ils n’ont pas de quoi être fiers. En outre, mais un assisté s’est immolé, le 8 août, on est au cœur du mois d’août, dans les locaux de la les grands chefs sont Caisse d’allocations fasans doute absents, et MÉDIATIQUES miliales de Mantes-lace ne sont pas les adJolie, dans les Yvelines. Les paiements joints de permanence qui vont s’embêde son RSA étaient interrompus de- ter avec cette tuile, où il n’y a que puis le mois de mai, et on lui demandait des coups à prendre. pour la quatrième fois des pièces justifi- Ah tout de même, si. Par mail, donc, la catives qu’il n’avait pas. L’homme est direction nuance auprès des rares jourmort quatre jours plus tard. L’agence de nalistes insistants : ce n’est pas quatre la CAF a fermé symboliquement pour fois, qu’on lui avait demandé des pièces une durée d’une semaine, et a rouvert supplémentaires, mais deux. le 16 août. Les syndicats de la CAF ne parlent pas Si la nouvelle n’est pas arrivée jusqu’au davantage. Les syndicats, c’est la Point et au Figaro Magazine, ce n’est pas source habituelle de rechange, quand de leur faute. Cette immolation a fait la direction ne dit rien, ou pour recoubeaucoup moins de bruit que les effrac- per la version de la direction. Avec les tions de distributeurs bancaires à la syndicats, on a des informations. Mais fourchette. Dans l’impitoyable compé- les syndicats, dans le cas présent, doitition pour être le fait-divers du 15 août, vent se sentir mal à l’aise. Celui qui a il n’y a pas photo à l’arrivée. L’effrac- demandé pour la quatrième fois au suition à la fourchette remporte haut la cidé des pièces justificatives, ce n’est main la médaille d’or. L’effraction à la pas le directeur de la CAF. C’est un emfourchette, ça titille aussitôt les imagi- ployé. Qui a appliqué des consignes, nations. Mais comment font les effrac- certes, mais un employé. teurs à la fourchette ? Pourquoi re- On imagine aisément les raisons du plient-ils deux dents de la fourchette? malaise des syndicats. Quelles sources On imagine aussitôt la vulnérabilité des alternatives reste-t-il aux journalistes pauvres billets pré-positionnés dans la curieux ou désœuvrés qui voudraient «paupière» du distributeur (ça s’ap- vraiment comprendre pourquoi on pelle ainsi). Le Parisien se fend même s’immole pour un RSA ? Les syndicats d’une infographie, si jamais les lecteurs d’assistés? Mais on sait bien qu’il n’y a souhaitaient eux aussi se diversifier pas de syndicats d’assistés, pas davandans l’effraction à la fourchette. tage que de syndicats de chômeurs, ou L’immolé n’a même pas de nom. Et on de syndicats de pauvres, tout simplene saura pas pourquoi il s’est aspergé de ment. Il parait que l’immolé vivait dans white-spirit. Une pauvre dépêche une caravane, dans un camping. Il n’y d’agence, reprises étiques, service mi- a pas de syndicats de bénéficiaires du nimum sur France 2, rien sur TF1, RSA vivant dans des caravanes. aucun direct à signaler sur BFM TV, ni Mais pourquoi s’acharner ? Les sujets (insistons) dans le Figaro Magazine ou d’enquête se bousculent. Parlez-nous dans le Point. des mesures anticanicule, ce sera plus A priori, pourtant, ce fait divers loser concernant. Et imaginons qu’il s’est avait aussi ses chances. Une immola- suicidé parce que son écran plat ne rention, c’est spectaculaire. Et sur le lieu trait pas dans sa caravane. même que l’on souhaite mettre en accusation, la CAF : le choix est particulièrement éloquent, il évoque évidemment la vague de suicides à France Télécom. SUR LIBÉ.FR On pense aussi à la révolution tunisienne et à une autre immolation par le Retrouvez Daniel Schneidermann feu, à Sidi Bouzid, dans le sud. Là aussi, et nos autres chroniqueurs à par les médias français avaient mis du tir de la semaine prochaine dans le temps à réagir. Un type qui s’immole journal et sur Libé.fr. dans un trou paumé du sud tunisien, ce • Numériser la radio, c’est le sens de l’histoire Par BRUNO DELPORT Directeur général du groupe NovaPress E n 1981, en libérant les ondes, François Mitterrand m’a permis de réaliser mon rêve et de faire de la radio mon métier. A l’époque, Europe 1, RMC, RTL trouvaient la FM sans intérêt et laissaient déjà passer le train (rattrapé par l’ouverture de la bande 104-108 Mhz plus tard). Résultat de cette libéralisation, des centaines de radios en tout genre. On dira que la quantité ne fait pas la qualité, il n’empêche: comparé à celui de 1981, le paysage de 2012 est riche. Mais de manière inégale sur le territoire. De nombreuses radios spécifiques sont bloquées dans leur développement par pénurie de fréquences analogiques. Les auditeurs de province ont un choix bien moindre qu’à Paris. Or, en 2012, notre pays peut avoir l’offre radio étendue qu’il mérite. Avec la radio numérique terrestre (RNT). Et, comme en 1981, les grandes radios freinent, bloquent. La différence avec 1981, c’est qu’elles sont rejointes par NRJ, groupe qui a le plus profité de 1981. Avec les mêmes arguments. Trop cher, économiquement risqué, technologiquement dépassé (et ce sont des radios qui émettent en grandes ondes qui le professent!), sans intérêt pour les auditeurs, disent-elles. Il s’agit surtout pour elles d’éviter une plus grande concurrence et de maintenir leur profitabilité dans une période d’incertitude économique. Bref, rien de bien neuf ou de surprenant. Mais quel rapport avec l’intérêt public? Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) continue d’œuvrer à cet intérêt public qui consiste à vouloir offrir le plus de pro- grammes radio au plus grand nombre, comme pour la télévision. Dans cette logique, il a publié son calendrier des appels à candidature pour la RNT. Comme il y a trente ans avec la FM analogique, les grands groupes jouent la chaise vide, espérant couler la RNT, avec diffusion de chiffres approximatifs, mélangeant charges et investissements, l’idée étant d’embrouiller au maximum un dossier simple. Ils y ajoutent la radio par IP comme étant le futur, comme si les questions économiques de la 4G étaient réglées, sans compter les risques sanitaires liés à la multiplication et la puissance des antennes relais. La numérisation de la radio, c’est le sens de l’histoire. Sa diffusion en numérique terrestre, c’est la garantie pour l’auditeur de conserver les atouts du média radio : mobilité, gratuité et anonymat d’écoute avec, en prime, plus de diversité, un meilleur son et toutes les fonctionnalités offertes par le numérique. La radio est un média toujours jeune et d’avenir. Plus de 80% de la population l’écoute chaque jour. En voiture, au bureau, à la maison. Aujourd’hui avec des récepteurs classiques, demain avec tous les objets nomades qui pourront intégrer une simple puce supplémentaire. Comme en 1981, un nouveau paysage radiophonique est à portée de main. Aujourd’hui avec le service public et les radios privées dynamiques, demain avec les grands groupes qui nous rejoindront. Enfin, la RNT c’est aussi plus d’emplois pour celles et ceux qui, comme moi il y a trente ans, rêvent de pouvoir travailler un jour dans la radio. J’espère que la présidence actuelle saura accompagner cette nouvelle histoire. LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 ANNONCES REPERTOIRE FORMATION [email protected] Contact: Tél: 01 40 10 52 11 [email protected] Contact: Tél: 01 40 10 51 66 a Votre serViCe Carnet de déCoration DIVERS RÉPERTOIRE ANTIQUITÉS/BROCANTES DIVERS VENTE Part. 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Seulement des draps bleus pour embrasser enfin l'aube ensemble. MJT 06 07 03 23 16 DECORATION Les rendez-vous oabjets rt Restauration d’ d’ Vernis au tampon, cuir, marqueterie. Achat et vente d’objets anciens Contact VERO Chandlee 06 41 93 47 70 Min. a rejoint mes bras. Belle, la vie. Puisse t-elle... Mon Biquet 16/08 feliz cumpleanos plaisir de partager chaque jour avec toi. biz Bitxo Vente maison MEUBLÉS (11) Urgent particulier PROVINCE à aménager Pantin 93 3.500 € / m2 http://www.scipaulbert.com teL. : 07.60.19.25.83 MAISONS DE VILLE CHARTRES (28) Maison 130m2, 7mns Gare TER (50 mns paris-MONTP) 4 chbres. Part. 06.71.88.40.84 Adresse : .................................................................................................. Groupe d'habitat partagé écolo cherche foyer intéressé par location sociale autogérée dans le haut Montreuil. 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Ta Kikinette IMMOBILIER Montmartre Abbesses Loue Appt 2 P. charme 40m² Lit double + berceau dans bel immeuble, 1.200€/mois Tel : 06.48.25.12.34 Formul’A vous propose des formations de : CAP en 1 ou 2 ans BP en 1 ou 2 ans [email protected] Contact: Tél: 01 40 10 51 66 achète 33 t & 45 t + Platines disques réponse assurée 06 08 78 13 60 • vd immeuble 160 m2 sur nivx, situé au centre de Port la Nouvelle, donnant sur le port de plaisance au coeur du village. L'immeuble est composé de 4 appartements : 2 studios de 20 m2 1 t2 de 48 m2 1 t3 de 50 m2 tous déja loués à l'année et récemment rénovés (plomberie, électricité, toiture, peinture...) Px : 199 000 € GES : D (de 21 à 35) Classe énergie : E (de 231 à 330) AGENCES S'ABSTENIR [email protected] TEL. 06.09.27.63.60 EXCEPT ! 20' de La Rochelle (St Sauveur) Pav F4 110 m2 pl. pied, séj. 40m2 chem. insert. cuis. US amén. équip. 3 ch. + plac. 2 terr. 3 gges. Prox comm. Joli parc boisé 1.300m2, ds bourg ts comm. prox. forêt, calme Px : 165.000 € Tél. : 06.27.32.61.97 du 2e semestre 2012 Des suppléments I en cahier central Un contenu éditorial I dédié RH ou à la formation 25 septembre Spécial Emploi Les secteurs qui recrutent 23 octobre Jeunes Diplômés 13 novembre Handicap 03 décembre Spécial Formation Contact : Mustapha Ouamrane - 01 40 10 52 11 [email protected] 17 18 • CULTURE LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 Un des 35 portraits de la série des Américains d’Andres Serrano présents à Avignon, ici Chloë Sevigny (cicontre). Cidessous: les sabots de bois de Basquiat; une partie de la série Central diagonal de Robert Mangold. PHOTOS COLLECTION YVON LAMBERT Yvon Lambert, sur le fonds d’Avignon ARTS La luxuriante donation du galeriste français à l’Etat s’expose enfin: Basquiat, Twombly, Serra, Boltanski, Kiefer, Buren… , LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 CULTURE • 19 Par PHILIPPE LANÇON Envoyé spécial à Avignon O n entre dans l’hôtel de Caumont comme un voilier dans une bouteille de champagne. Millésimée, elle est longtemps restée au frais : le galeriste Yvon Lambert fête, à 66 ans, la donation des 556 œuvres qu’après vingt ans de péripéties et négociations plus ou moins retorses il vient de faire à l’Etat. Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, et François Hollande sont venus, pendant le Festival d’Avignon, consacrer l’événement. Lambert le fête en exposant une partie des trésors dans ce splendide hôtel particulier du XVIIIe siècle. Le peuple de France et d’Avignon est convié à la cérémonie depuis le 7 juillet. L’hôtel particulier voisin, anciennement école des beaux-arts, dont l’acquisition était pour le galeriste une condition sine qua non, fera l’objet d’une extension après 2015. Les œuvres exposées sont des merveilles connues et reconnues de Jean-Michel Basquiat, Cy Twombly, Miquel Barceló, Richard Serra, Christian Boltanski, Andres Serrano, Anselm Kiefer, Nan Goldin… On ne les avait jamais vues réunies et aussi bien mises en scène. C’est Isabelle Huppert qui joue la maîtresse de maison: cinq portraits d’elle, en gros plan, dessina dessus de petites choses où il est, entre autres, question de Moby Dick. Dans un conte, Andersen imagine qu’une fée distribue des sabots magiques: ceux qui les chaussent voient leur vœu le plus cher exaucé. Les sabots de Basquiat ont porté chance au galeriste, mais on ne peut les chausser. «Who do you think you are?» Des touristes, des va-nupieds. Plus loin, dans un magnifique atelier, des enfants dessinent sur des sabots, comme Basquiat. Ils se drogueront peut-être, plus tard. Leurs parents ne le savent pas. Une autre formidable salle est celle des portraits de stars cuites sous la cendre par Douglas Gordon. «Brûlés en miroirs», Pierre Fresnay, Charlotte Rampling, Jean Seberg, Antonin Artaud et tant d’autres rejoignent une éternité indivise où les visages ont un peu cramé, mais pas trop, comme si quelqu’un avait éteint le feu avant l’oubli complet : ces œuvres ont été conçues en 20062008 pour Avignon et son festival. OXYMORE. Quelques mètres, et c’est l’immense et longue pièce bleue où sont installées les grandes photos en couleur des Américains d’Andres Serrano. La série a débuté après le 11 septembre 2001, par le capitaine des pompiers de Ground Devant l’hôtel de Caumont, trois Zero. Elle s’est poursuivie pendant banderoles rouges à lettres blanches deux ans. Elle compte 42 portraits, de l’Américaine Barbara Kruger: connus ou inconnus, pris légère«Vivez comme nous», «Mourez ment en contre-plongée: on regarde comme nous», «Aimez comme nous». des héros, mais pas trop ; on est en démocratie. Trente-cinq portraits datant de 2005, par Roni Horn, figurent près sont ici, dans ce qui fut la bibliothèque de de l’entrée. D’autres séries de cinq de l’ac- l’université d’Avignon. Mausolée vivant, très trice par le même artiste sont déposées à des coloré, presque joyeux. Le bleu du mur, si vif, endroits tactiques de l’exposition. A chaque est d’une étrange austérité. C’est le féroce fois, ce caméléon cruel a une couleur psycho- bleu du ciel. logique différente, la dépression, le plaisir, le L’escalier, encore, et, plus haut, la grotte de rêve, comme si elle était assez méchante, ou Claude Lévêque : un néon rouge filant sous assez folle, pour changer sans cesse d’âge et des voûtes, vers l’infini, dans un brouillard de vie. La star qui contrôle son image s’est et un ronflement artificiels, comme si l’on imposée jusqu’au cœur de la plus importante voyageait, en suivant le fil rouge, jusqu’au donation faite à l’Etat français depuis un siè- centre de la terre. «Who do you think you cle. Plus tard, quand elle arrivera dans l’au- are?» Le professeur Otto Lidenbrock dispadelà, Dieu et ses saints ne vont pas rigoler : raissant dans un volcan islandais, grâce à elle tiendra tous les grands rôles de la Bible. l’artiste nivernais au nom de hiérarque papal. Ici, sous les combles, étaient naguère stockés PERRUQUES. Devant l’hôtel, trois banderoles les livres de l’université. On retrouve des lirouges à lettres blanches de l’Américaine vres dans la salle des Barceló : un homme Barbara Kruger, datant de 2004, enjambent fume, dans des couleurs sombres, dans une la rue: «Vivez comme nous», «Mourez comme bibliothèque épaisse peinte en 1984. A côté, nous», «Aimez comme nous». Kruger orga- le même, toujours fumant, est dans une barnise l’inquiétante manifestation des pronoms que quittant son île des Baléares pour rejoinpar lesquels on existe et dans lesquels on se dre la France : c’est le peintre, jeune, allant dissout. Son immense affiche de 1997 ac- par la matière vers son avenir et sa gloire. Le cueille le visiteur dans le hall à perruques : tableau est fait d’huile et de sable, comme la «Who [en énorme, ndlr] do you think you mer quand elle est calme, puis agitée. are ?» Derrière, une main en noir et blanc Entre-temps, on a vu des Twombly platonitient une photo mal définie. Le geste est va- ciens, peints en Grèce, des toiles rayées de gue, le cri interpelle. Qui pensons-nous être? Daniel Buren première période, posées à Des visiteurs, privilégiés ou non. Qui grim- même le sol, vierges comme des concepts ou pent maintenant l’escalier tournant autour des coups de poing dans la gueule, un cercle d’un néon vertical de Jenny Holzer, sorte de peint de Robert Mangold et un autre du Lirampe de pompier carrée sur laquelle défile tuanien Zilvinas Kempinas, fait d’une bande un poème traduit par Jacques Roubaud. En magnétique flottant dans l’air comme un haut, c’est chez Basquiat. cerceau autour du corps d’une danseuse abIl y a l’affiche peinte en 1988 pour l’exposition sente. Une baie vitrée ouvre sur l’atelier des du 108, rue Vieille du Temple, où est située la enfants. Sur le mur du fond, de beaux porgalerie Lambert à Paris. Basquiat a collé des traits à la Vik Muniz, faits par les gosses avec vignettes de Vache qui rit (dont celle de toutes sortes de matières, dont de la marmeMowgli, qui dans son esprit lui correspondait, lade –comme pour mieux retourner la phrase et que les bêtes de la jungle appelaient la gre- ordinaire des défilants devant une œuvre nouille nue). Drogué, il appréciait les protéi- qu’ils ne voient littéralement pas: «Mon fils nes bon marché. En vitrine, une paire de sa- en fait autant.» Il en ferait autant si rien en bots de bois qu’il rapporta d’Amsterdam pour lui ne grandissait, sauf son génie. Il pourrait se faire pardonner d’y avoir disparu, juste- faire les oiseaux noirs montés en mobile du ment dans la drogue. Il les offrit à Lambert et Mexicain Carlos Amorales, qui pendent entre les murs où un rouge sang coule à l’envers, vers le haut, comme en apesanteur. «FLUX». Parmi d’autres splendeurs, une toile de Kiefer, artiste à la fois si littéraire et si physique (mais les deux ne s’opposent pas): Cette obscure clarté qui tombe des étoiles (1996). Le vers est le plus célèbre oxymore de la langue française. C’est le Cid qui le prononce: «Cette obscure clarté qui tombe des étoiles/ Enfin avec le flux nous fait voir trente voiles.» Un essaim de graines de tournesol noires s’échappe de la fleur peinte, en hommage à Van Gogh, comme si la couleur allait germer un jour de cette toile sombre. L’artiste allemand venait de s’installer à Barjac, dans le Gard, non loin des paysages du Néerlandais. L’œuvre sème sa puissance à tous vents. On entend vibrer l’essaim comme par l’oreille coupée. Peu avant la fin du parcours, un portrait d’Yvon Lambert par Twombly paraît signifier que le galeriste est là, entre deux portes, qui guette ses souvenirs, ses succès et nos réactions. Vous ne le verrez pas : ce n’est qu’un fil bleu, pas même une silhouette, déposée par le minimalisme de l’artiste devant l’entrée de sa galerie, comme le cheveu d’une femme absente sur un oreiller –une sorte de sommeil transparent et radioactif. • LES CHEFSD’ŒUVRE DE LA DONATION YVON LAMBERT 5, rue Violette, Avignon (84). Jusqu’au 11 novembre. Rens.: 0490165620, www.collectionlambert.fr. UNE DONATION ÉPINEUSE «Donner une collection n’est pas chose facile en France.» Yvon Lambert en juillet FUTUR DÉMÉNAGEMENT Cela faisait vingt ans qu’Yvon Lambert voulait donner sa collection à l’Etat. Des négociations avaient échoué en 1994 et, depuis 2000, la collection demeurait à l’hôtel de Caumont, à Avignon. Après avoir failli renoncer, Lambert a obtenu de l’Etat en novembre la garantie de pouvoir doubler la surface d’exposition de la collection en annexant l’hôtel de Montfaucon, bâtiment voisin. 8 millions C’est la somme, en euros, que l’Etat paiera pour que l’hôtel de Montfau con (qui abrite l’école des beauxarts) soit transformé en musée. Le coût du déménagement et de la réinstallation de l’école reviendra aux collectivités. "Un film sombre et solaire." LE 22 AOÛT LIBÉRATION 20 • LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 CULTURE -40% C’est la baisse de fréquentation, par rapport à 2011, du festival de musiques électroniques Creamfields, dans sa version andalouse, avec une affiche qui rassem blait du 10 au 11 août les mammouths Yuksek, Orbital ou The Chemical Brothers. Creamfields aura également lieu près de Liverpool, du 24 au 26 août. Les murs du 5Pointz en conserve 5Pointz, l’antre historique des tagueurs new-yorkais depuis vingt ans, va céder la place à des immeubles d’habitation. Le propriétaire de cette ancienne usine du Queens promet de garder la trace de «La Mecque du graffiti», avec une galerie et des «murs d’art» dans une zone piétonne. «La Vie des jeunes» revient Le dessinateur Riad Sattouf annonce pour octobre chez l’Association la parution du troisième tome de sa série best-seller la Vie secrète des jeunes. Première case diffusée sur Twitter : un parent scotché à son portable qui tient son bébé hilare comme si c’était un sac à patates. Les bibliothèques belges taxées Le ministre belge de l’Economie en charge des droits d’auteur a demandé aux bibliothèques publiques une mise en conformité avec la réglementation européenne, avec effet rétroactif depuis 2004. Les sociétés d’auteurs espèrent empocher de 5 à 8 millions d’euros, soit trois fois plus qu’avant. AUSSITÔT VU «MAPPING CYPRUS», BRUXELLES À L’HEURE CHYPRIOTE Bruxelles est en Europe, et Chypre préside l’Europe, donc l’histoire de Chypre est fêtée à Bruxelles. Où, à tra vers de rares et sublimes icônes, un peu de musique et une foultitude de cartes, on apprend tout sur l’île et, entre autres, sur la famille de Lusignan (dans la Vienne, dont les habitantes sont des Mélusines) qui y régna avant les Vénitiens, les Ottomans, puis les Anglais. La rencontre du style byzantin tardif et de la peinture occidentale y fut déterminante pour l’histoire de l’art de notre Renaissance. Témoins ces Douze Apôtres (photo) de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle, qui mixent la courbure des corps de l’époque des Paléologues avec l’humanisation vénitienne des visages. É.Lo. (à Bruxelles) PHOTO CHURCH OF CHRYSELEOUSA «Mapping Cyprus: Crusaders, Traders and Explorers.» Bozar, rue Ravenstein 23, 1000 Bruxelles. Rens.: www.bozar.be. Jusqu’au 23 septembre. DISPARITION La romancière et essayiste, chantre LA BD élégante de l’histoire, est morte, hier, à 61 ans. Catherine Lépront, vertige final L a romancière Catherine Lépront est morte hier matin à Paris. Elle avait 61 ans, luttait depuis dix ans contre une insuffisance respiratoire. Auteur d’une vingtaine de romans et recueils de nouvelles, d’essais sur les peintres Caspar David Friedrich et Ingres, elle avait eu le prix Goncourt de la nouvelle pour Trois Gardiennes en 1992. Elle était aussi lectrice pour les éditions Gallimard où elle avait publié en 1983 son premier roman, le Tour du domaine. En 1997, elle est passée au Seuil. C’est au Seuil qu’est paru l’Anglaise, l’hiver dernier, roman où Catherine Lépront évoque un de ces paysages de bord de mer qu’elle a toujours affectionnés, où des traditions familiales, morales et esthétiques qui semblaient immuables achèvent de se déliter. Le personnage de l’Anglaise incarne une menace d’intrusion. Pour le lecteur, elle est une silhouette évoquée jusqu’à l’épuisement par les différents protagonistes. «De multiples sujets, de multiples perspectives sur un même fait, seul le roman peut obtenir ça», expliquait Catherine Lépront à Libération en 2001, lors de la parution du très musical Café Zimmer- Catherine Lépront, en 2008. PHOTO H. HANNAH. OPALE moins secrètement dans le présent. Les camps staliniens (le Cahier de moleskine noire du délateur Mikhaïl), la guerre d’Algérie (le Beau Visage de l’ennemi) ou, surtout, la persécution des «Je ne me vois pas, dissimulée Juifs (Namokel, sans doute son derrière un personnage, plus beau livre, prétendre tout savoir du en 1997) sont monde que j’essaie de saisir autant de clés et de thèmes. en le décrivant.» Peu soucieuse CatherineLéprontà Libération en 2001 de linéarité, Camann. C’est une partition à la therine Lépront disait éviter fois savante et humaine que «le point de vue réducteur, dessinent ses romans, d’Un autoritaire parce qu’il est unigeste en dentelle à Disparition que, de l’auteur omniscient; je d’un chien. Les traumatismes ne me vois pas, dissimulée derdu XXe siècle imprègnent les rière un personnage, prétendre consciences. Le récit, obses- tout savoir du monde que j’essionnel, circulaire, est pris saie de saisir en le décrivant» dans un vertige temporel, le (Libération du 15 septempassé affleurant plus ou bre 2001). Sa brève expé- rience d’infirmière quand elle était jeune a nourri Des gens du monde (Seuil, 2004). Elle a évoqué sa famille dans le Passeur de Loire (Gallimard, 1990), consacré à son grandpère, directeur de la Santé de 1940 à 1945, puis médecin du travail au Creusot (Saôneet-Loire) où elle est née. Réputée pour l’élégance de ses longues phrases, Catherine Lépront était aussi douée d’une fantaisie fulgurante. Un portrait, au hasard, dans Partie de chasse au bord de la mer : «Ludivine Sertilange, une grenouille de bénitier, arrive sans faire de bruit. Elle s’agenouille au pied du lit. Elle n’a pas de cils. Il est vrai qu’elle n’en a pas besoin : elle ne sue ni ne pleure. C’est une sainte.» CLAIRE DEVARRIEUX CHLOÉ POIZAT SOIGNE SON «BAL DE TÊTE» Chloé Poizat invite à son Bal de tête une foule étrange: corps décapités, hommechouette, zèbre à jambes de femme. Illustra trice de presse et de livres, l’auteure s’est astreinte à réaliser un des sin par jour, sans ligne déterminée. Elle en a ras semblé une centaine dans un petit bouquin aux pages épaisses, qui for ment une balade graphi que fascinante. Chloé Poizat martyrise ses per sonnages pour reposer incessamment la question du corps, de ses limites et de son intégrité. Les gravu res sont en noir et blanc, rehaussées de quelques touches d’un rouge puis sant. Un homme décapité court après sa tête, qui gît deux pages plus loin, san glante, sur un poste de télévision. Une femme au visage béant paraît rire avec la créature de la page suivante, mihomme mico chon. Surréaliste, pulsion nel, ce livre n’en offre pas moins un trait précis et harmonieux. Un bel objet absurde à feuilleter, de préférence avant de (ne pas) dormir. A.L. «Bal de tête», de Chloé Poizat, Cornélius, 100pp., 18€. «Nous n’avons pas, pour l’instant, les moyens de financer les copies.» Le producteur Pedro Duarte commentant l’asphyxie du cinéma portugais après l’arrêt des subventions de l’Institut du cinéma et de l’audiovisuel « Le grand retour du groupe mythique de Lisa Gerrard et Brendan Perry » nouvel album DISPONIBLE EN CD DIGIPACK, DOUBLE VINYLE ET DIGITAL EN CONCERT le 27/09 au Grand Rex - COMPLET meteo du 20:LIBE09 19/08/12 15:17 Page1 LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 A LA TELE CE SOIR SUDOKU SUPÉRIEUR TF1 FRANCE 2 FRANCE 3 CANAL + 20h50. Les experts : Manhattan. Série américaine : Cadeau empoisonné, Mort Imminente, Jeux d’enfants, Dent pour dent. Avec Gary Sinise, Mélina Kanakaredes. 0h00. Preuve à l’appui. Mariage en noir, La seconde mort, Une dernière fois. Série. 2h25. Sept à huit. 20h35. Cold case : Affaires classées. Série américaine : Confusion mentale, Libertyville, Le bal des débutantes. Avec Thom Barry, John Finn. 22h50. David Nolande. 2 épisodes. Série. 0h40. Journal de la nuit. 0h55. Au clair de la lune. 20h35. Match, l’album des Français. 2e volet. Documentaire. 22h35. Météo. 22h40. Soir 3. 23h10. Strip-tease. Documentaire. 0h00. La femme invisible, d’après une histoire vraie. Film. 1h30. Soir 3. 2h00. Plus belle la vie. Série. 20h55. Mad dogs. Série britannique : La proposition de Maria, Rebelote, Le village des damnés. Avec John Simm, Max Beesley. 23h05. Spécial investigation. Tabloïds : le pouvoir du scandale. Documentaire. 0h00. L’œil de Links. Série. 0h25. Scream 4. ARTE 20h50. To be or not to be, jeux dangereux. Comédie américaine d’Ernst Lubitsch, 95mn, 1942. Avec Carole Lombard, Jack Benny. 22h25. Europa. Comédie dramatique européenne de Lars Von Trier, 107mn, 1990. Avec Jean-Marc Barr, Barbara Sukowa. 0h15. Les Robinson de Mantsinsaari. PARIS 1ERE 20h40. Graffiti 80. Coulez le «Rainbow Warrior» (1984-1985). Documentaire. 22h10. Graffiti 80. À l’Est, du nouveau (1988-1989). Documentaire. 23h40. Le prisonnier Série britannique : Il était une fois, Le dénouement. Avec Patrick McGoohan. 1h20. Programmes de la nuit. M6 20h50. L’amour est dans le pré. Documentaire présenté par Karine Le Marchand. 22h50. Nouveau look pour une nouvelle vie. Pierre et Sarah. Magazine présenté par Cristina Cordula. 0h05. Belle toute nue. Élodie et Angela. Magazine. 1h35. Jericho. Série. TMC 20h45. Le Roi Scorpion 3 : combat pour la redemption. Téléfilm de Roel Reiné. Avec Billy Zane, Ron Perlman. 22h22. La malediction de la momie. Film d’aventures américain de Russell Mulcahy, 88mn, 1998. Avec Jason Scott Lee, Louise Lombard. 0h25. Face au predateur. FRANCE 4 20h35. Du jour au lendemain. Comédie française de Philippe Le Guay, 93mn, 2005. Avec Benoît Poelvoorde. 22h15. Camping à la ferme. Comédie française de Jean-Pierre Sinapi, 90mn, 2004. Avec Roschdy Zem. 23h45. Manu Payet au Bataclan. FRANCE 5 20h35. Dangers dans le ciel. Approche finale Vol Korean Airlines 801. Documentaire. 21h25. Je ne devrais pas être en vie. Face à face avec les requins. Documentaire. 22h15. C dans l’air. Magazine. 23h25. Avis de sorties. 23h30. Superscience. Documentaire. W9 GULLI 20h50. Flic ou voyou. Policier français e Georges Lautner, 120mn, 1979. Avec Jean-Paul Belmondo, Michel Galabru. 22h25. Le guignolo. Comédie française de Georges Lautner, 90mn, 1980. Avec Jean-Paul Belmondo, Mirella D'Angelo. 0h20. Smallville. 20h45. Merlin. Série britannique : Le cristal de Néahtid, Les sortilèges de Morgause, L’attaque du grand Dragon. Avec Colin Morgan, Bradley James Il. 23h10. Un drôle d’ami. Téléfilm américain. Avec Ice T, Siri Baruc. 0h00. Dessins animés. Jeunesse. NRJ12 DIRECT 8 NT1 DIRECT STAR 20h35. Les braqueuses. Comédie française de Jean-Paul Salomé, 90mn, 1993. Avec Catherine Jacob, Clémentine Célarié. 22h25. Sexes faibles. Comédie française de Serge Meynard, 90mn, 1992. Avec François Cluzet, Valérie Lemercier. 0h00. Hollywood girls. 20h50. Quartier général. Mon bébé vient au monde trop tôt : e combat pour la vie. 22h30. Quartier général. Coulisses d’une maternité : l’aventure de la vie. Magazine. 0h15. Quartier général. 2h00. Je m’occupe du café. 20h45. Les frangines. Téléfilm de Laurence Katrian. Avec Arielle Dombasle, Isabel Cruz. 22h30. Faites entrer Fabrice Éboué. Spectacle. 0h05. Le mariage de Moundir. Divertissement. 1h45. Johnny Hallyday : Olympia 2000. Spectacle. 20h40. Star report. Qatar, l’irrésistible ascension économique. Magazine présenté par Claire Arnoux. 21h50. Star report. Tout pour servir les stars. Magazine. 22h50. Star report. Paris, la guerre des palaces est déclarée. Magazine. 23h55. Star story. Cet été, vos journaux voyagent avec vous. SPÉ OFFRE CIA 24 LE É OU QUOTI TÉ D 12 M AGA IENS ZINE S 12 € epresse.fr • JEUXMETEO iPad® iPhone® Android® PC/Mac® 2 8 LIBÉRATION www.liberation.fr 11, rue Béranger 75154 Paris cedex 03 Tél. : 01 42 76 17 89 1 7 3 9 Tirage du 18/08/12: 185 369 exemplaires. Membre de OJDDiffusion Contrôle. CPPP:1115C80064.ISSN 0335-1793. Nous informons nos lecteurs que la responsabilité du journal ne saurait être engagée en cas de non-restitution de documents L T A S 5 8 I I U U L I A A T S 4 MOT CARRÉ 3 5 7 9 2 8 1 4 6 N E P T U G C 4 8 1 7 3 6 9 5 2 U I C G E N A P T 2 9 6 5 1 4 3 7 8 G A P T C I A N E U 9 7 3 4 6 2 8 1 5 N C I T G E U 8 4 2 1 5 7 6 9 3 P U G N A C I T E 1 6 5 3 8 9 7 2 4 T E A I U P C N G 6 1 8 2 7 5 4 3 9 E A N U P I T G C T P A C G E U N G U E N T P I A 7 2 9 6 4 3 5 8 1 I 5 3 4 8 9 1 2 6 7 C I A P LE CŒUR À L’OUVRAGE LUNDI LE MATIN Beau temps chaud au sud, un peu plus nuageux en se dirigeant vers le nord. L’APRÈS-MIDI Baisse de la température au nord. Toujours aussi chaud ailleurs. Le ciel peut prendre un aspect orageux. 0,3 m/18º Lille 0,1 m/17º Caen Paris Strasbourg Brest Orléans Dijon Nantes 0,1 m/18º Limoges Lyon Bordeaux 0,3 m/22º Nice Montpellier Toulouse Marseille Ajaccio 0,3 m/24º 0,1 m/26º FRANCE MIN/MAX FRANCE 18/28 16/25 15/22 16/29 21/31 23/31 19/35 Lille Caen Brest Nantes Paris Nice Strasbourg MIN/MAX SÉLECTION 19/34 15/36 17/34 21/32 21/36 18/34 23/32 Dijon Lyon Bordeaux Ajaccio Toulouse Montpellier Marseille MIN/MAX 25/32 19/31 20/35 19/27 21/34 20/37 17/28 Alger Bruxelles Jérusalem Londres Berlin Madrid New York MARDI MERCREDI Évolution orageuse au nord-est du pays. Plus sec et ensoleillé en descendant vers le sud. Chaud et orageux du centre au nordest. Soleil et fortes chaleurs persistent au sud-est. Temps rafraîchi près de la Manche. 0,3 m/18º 0,3 m/18º Lille Lille 0,1 m/17º 0,1 m/17º Caen Caen Amaury médias 25, avenue Michelet 93405 Saint-Ouen Cedex Tél.01 40 10 53 04 [email protected] Petites annonces.Carnet. IMPRESSION POP (La Courneuve), Midi-print (Gallargues) Nancy Print (Nancy) Ouest-Print (Bournezeau), Imprimé en France I P P 0,1 m/20º PuBLICITÉ Directrice générale de LIBERATION MEDIAS Marie Giraud Libération Medias. 11, rue Béranger, 75003 Paris. Tél. : 01 44 78 30 68 O T 3 7 Rédacteurs en chef adjoints Michel Becquembois (édition) Pascal Virot (politique) Jacky Durand (société) Olivier Costemalle et Richard Poirot (éditions électroniques) Jean-Christophe Féraud (éco-terre) Mina Rouabah (photo) Marc Semo (monde) Sibylle Vincendon et Fabrice Drouzy (spéciaux) ABONNEMENTS Marie-Pierre Lamotte & 01 76 49 27 27 [email protected] abonnements.liberation.fr Tarif abonnement 1 an France métropolitaine : 348€. S S I 2 Directeurs artistiques Alain Blaise Martin Le Chevallier Directeur administratif et financier Chloé Nicolas Directeur commercial Philippe Vergnaud [email protected] Directeur du développement Pierre Hivernat P U 1 4 1 6 4 Directeurs adjoints de la rédaction Stéphanie Aubert Sylvain Bourmeau Eric Decouty François Sergent Directrice adjointe de la rédaction, chargée du magazine Béatrice Vallaeys Rédacteurs en chef Christophe Boulard (technique) Gérard Lefort Fabrice Rousselot Françoise-Marie Santucci (Next) T L 9 3 6 SUDOKU Associée unique SA Investissements Presse au capital de 18 098 355 €. Président du directoire Nicolas Demorand Philippe Nicolas Directeur de la publication et de la rédaction Nicolas Demorand Directeur délégué de la rédaction Vincent Giret L 5 8 7 3 Edité par la SARL Libération SARL au capital de 8726182 €. 11, rue Béranger, 75003 Paris RCS Paris : 382.028.199 Durée : 50 ans à compter du 3 juin 1991. Cogérants Nicolas Demorand Philippe Nicolas MOT CARRÉ N O I S 6 9 21 Paris Paris Strasbourg Brest Strasbourg Brest Orléans Orléans Dijon Nantes Dijon Nantes 0,6 m/20º 0,6 m/20º Lyon Lyon Bordeaux Bordeaux 0,3 m/23º 0,3 m/23º Toulouse Nice Montpellier Toulouse Marseille Marseille 0,1 m/25º 0,3 m/25º Soleil Éclaircies Nuageux Couvert Averses Pluie Orage Neige -10°/0° 1°/5° 6°/10° Nice Montpellier 11°/15° 16°/20° 21°/25° Faible Modéré fort 26°/30° 31°/35° Calme Peu agitée Agitée 36°/40° • Par Carlos Giménez 22 BD LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 BD • 23 31/36 RÉSUMÉ DES ÉPISODES PRÉCÉDENTS Années 60, sous la dictature de Franco. Pepe, dessinateur de BD doué pour tout, fonde avec ses potes un groupe de rock’n’roll. Même sans drogue, il leur faut du sexe. Sauf que Pepe est gay et que l’époque ne rigole pas avec ça. En librairie à partir du 27 septembre A suivre... LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 LIBÉRATION LUNDI 20 AOÛT 2012 PORTRAIT DE VILLE (12/12) LA VILLE ANONYME (FRANCE) Nulle part et chez moi Par NATHAN SAINTCAMES Illustration LAURENCE BÉRIOT M a ville n’a pas de nom. Ou plutôt elle en porte plusieurs. Ce pourrait être Châteauroux, Blois ou Arras, ce serait la même chose. Et pourquoi pas une ville du Sud ? Millau, Antibes ou Agen, peu importe. Elle fait partie de ces innombrables cités de province qu’on a tous traversées au moins une fois en se disant «tiens, ça a l’air charmant ici!» et puis on n’y est jamais revenu. Pour quoi faire ? Pour tout un chacun, ma ville ressemble à toutes les autres, pour moi elle est unique. C’est ma ville anonyme. Dans ma ville anonyme, les gens évitent les mendiants comme partout. On a droit aux mêmes marginaux percés et tatoués avec leurs chiens crasseux. Ils nous insultent méchamment quand on refuse de leur donner de la monnaie. Ma ville a aussi son clochard attitré. Il arpente nos deux boulevards en chantant Hugues Aufray, ivre selon ses moyens du moment. Tout le monde le connaît et les jeunes se foutent de lui joyeu- sement. Quand il en a marre, il baisse son pantalon taché et urine devant les gens. Il peut tout aussi bien se soulager les intestins si les circonstances lui sont favorables. Ma ville anonyme a bien sûr un joli petit centre au charme provincial, avec ses boutiques aux noms improbables comme «Pazapa» ou «Aparthé». Nos commerçants sont les mêmes poujadistes qu’ailleurs, jamais contents, qui râlent sans arrêt et parlent de la crise à tout bout de champ. Et les clients aiment ça. Ma ville anonyme a son lot de cafés, restaurants et bars. On les connaît tous par cœur, on y voit toujours les mêmes têtes, les mêmes jours, aux mêmes heures. C’est à la fois rassurant et effrayant. Devant son café ou sa bière, on se dit qu’on n’est pas comme son voisin de comptoir et qu’un jour on sera loin de tout ça. Mais on y retourne chaque semaine, comme tous les habitués… Ma ville anonyme possède un seul parc dans son centre-ville. Malheureusement, il est situé à côté du lycée et envahi constamment par de jeunes désœuvrés. Ils passent leur temps vautrés dans l’herbe à fumer, ou sur les bancs à se bé- coter. Certains s’amusent avec les canards, parfois vertement. Finalement, ce sont ces derniers que je préfère dans ce parc. Ma ville anonyme, comme toute cité d’un territoire rural, est peuplée de réactionnaires qui aiment les vaches et l’authenticité. Résultat: le maire est à droite, il va à la messe tous les dimanches et il cumule les mandats. Il paraît qu’il est sympa en public mais détestable avec ses collaborateurs. Bref, un vrai politique. Ma ville anonyme est moderne: elle a le haut débit. Il a fallu que notre maire monte à Paris pour ça. Il est presque rentré en héros quand on a su qu’on serait raccordé au monde de la Toile à grande vitesse. Du coup, la municipalité fait des initiations à Internet dans les maisons de retraite. Ça distrait les vieux en attendant la fin. Ma ville anonyme a son lot d’embouteillages tous les matins et tous les soirs à la même heure. En province on est parfois plus idiots qu’à Paris: on vit sans les avantages de la capitale mais on est capables d’en supporter les inconvénients. Ma ville anonyme c’est aussi son journal local : un des UN AUTRE REGARD derniers quotidiens si petit en France, une vraie fierté. Depuis quatre ans, On y trouve les horaires des Libération et l’Association pour l’aide lotos, les dates des concours aux jeunes auteurs (Apaj) de pétanque et le plus intéorganisent un concours ressant : les séances du de reportages sur le cinéma. Le plus drôle dans thème du voyage réservé notre journal, c’est l’orthoaux moins de 30 ans, graphe. Il y a des fautes parparrainé par Erik tout, même dans les titres et Orsenna. Le thème de parfois à la une ! Les jourl’année était «Portraits nalistes de ma ville sont de villes», une approche personnelle et originale comme les autres : s’ils d’une cité, d’un quartier étaient bons, ils ne seraient ou de ses habitants… plus là. Ma ville anonyme c’est également son club sportif fétiche. Ils sont des milliers qui chaque dimanche viennent déverser le fiel de toutes les frustrations de la semaine sur l’équipe adverse ou sur l’arbitre, suivant l’ampleur du score. Je me joins à eux allègrement en proférant un flot d’insultes surprenant. Quand le match se termine, je rentre chez moi, tranquille et apaisé, qu’on ait gagné ou perdu. Ma ville anonyme a sa grande fête populaire estivale. Adolescent, j’attendais cet événement avec la fièvre d’un jeune premier emmenant une demoiselle au bal. Aujourd’hui, il est de bon ton d’ignorer cette manifestation populaire pour ringards et de ne pas y aller. Au final, cela permet de distinguer les gens bien comme il faut, des autres… Ma ville anonyme a aussi ses codes petits bourgeois. Ma ville anonyme a bien sûr son entreprise familiale qui fait vivre la cité. Apparemment, elle nous sauve de la misère et si elle disparaissait, ma ville dépérirait aussitôt. C’est la croyance incontestée de tout un chacun. Alors tous les habitants vouent une reconnaissance innée et héréditaire à cette fameuse famille bienfaitrice et millionnaire. J’ai travaillé une fois dans la grande entreprise de ma ville, un été pour me faire de l’argent. C’était comme toutes les usines : répétitif, abrutissant, aliénant et ennuyeux à mourir. Ma ville anonyme compte évidemment son intellectuel de référence. Il s’agit d’un professeur reconnu, très vieux bien sûr, qui vit la plupart du temps à Paris. Il donne des cours dans des universités prestigieuses en France et siège sous la coupole avec d’autres intellectuels comme lui. A chaque débat local inextricable, on lui demande son avis en dernier recours. Son jugement fait souvent autorité parmi la population qui l’admire. Il est le fils de la cité qui a réussi dans le grand monde. Je ne l’ai vu qu’une fois et si on ne m’avait pas dit qui il était, je l’aurais pris pour un vieillard sénile… Qu’est-ce qu’il y a à voir dans ma ville anonyme? L’ordinaire du quotidien avec ses banalités, la médiocrité humaine omniprésente, l’envie sournoise de tous d’être différent et la croyance sourde d’être meilleur que les autres. On y voit un échantillon d’humanité singulière et représentative. On y voit les gens. Ma ville anonyme, c’est nulle part et c’est chez moi. L’endroit que je veux quitter à chaque instant mais où je sais que je reviendrai toujours. C’est le berceau de mes rêves et la scène de ma réalité. Ma ville anonyme, je l’aime et je la hais mais c’est ma ville. •