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«Le Monde Argent» Immobilier, épargne : comment optimiser sa retraite Supplément Mercredi 12 octobre 2011 - 67e année - N˚20753 - 1,50 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Le ton se durcit entre les deux finalistes de la primaire PS Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Erik Izraelewicz Jean Dujardin, muet et ultracontemporain t « The Artist », de Michel Hazanavicius, sort mercredi 12 octobre Page 24 t Hollande prêt à riposter aux attaques d’Aubry t Urbains, ruraux, populaires, aisés: qui vote pour quel socialiste ? Notre radiographie électorale L es résultats encore partiels du scrutin du dimanche 9 octobre permettent d’analyser la base électorale des candidats socialistes. Où l’on découvre qu’à Paris l’Est a voté pour Martine Aubry et l’Ouest pour François Hollande, lequel recueille aussi la préférence des villes moyennes, alors que les grands centres urbains ont favorisé sa concurrente. L’électorat d’Arnaud Montebourg, aujourd’hui très convoité, a été important dans les territoires désindustrialisés et les banlieues. Pendant ce temps, les deux finalistes ne se font plus de cadeaux et préparent le débat décisif France 2 – Le Monde, mercredi 12 octobre. p Lire pages 10-11 et 22 Jean Dujardin et Bérénice Bejo dans « The Artist ». PETER LOVINO La drôle de guerre des soldats Onze coptes écrasés par les A Romainville, les poubelles français en Afghanistan blindés de l’armée égyptienne volent par pneumatique Religion Les témoignages et les autopsies révèlent l’extrême brutalité de la répression, dimanche, d’une manifestation de la minorité chrétienne. P. 3 et 4 Bonne nouvelle : le Danemark rouvre la porte UK price £ 1,50 P ar les temps qui courent, lorsqu’un Etat européen modifie sa politique d’immigration, c’est en général pour aller dans le sens de restrictions accrues. La décision, au Danemark, du nouveau gouvernement de rouvrir ses frontières et d’assouplir le régime d’accueil des étrangers est une initiative suffisamment rare et courageuse, dans un pays qui compte 9,8 % d’immigrés et de citoyens d’origine étrangère, pour être saluée. Formé le 3octobre par la première ministre sociale-démocrate Helle Thorning-Schmidt, dont le bloc de gauche a remporté les élections du 15septembre, le nouveau gouvernement danois rassemble plusieurs partis. C’est sous la pression de deux de ces partis, une formation d’extrême gauche et un parti centriste, que Mme Thorning-Schmidt a été amenée à changer de cap sur l’immigration. Parmi les mesures annoncées, la plus spectaculaire est la levée des contrôles aux frontières, dont le rétablissement, au mépris des règles de Schengen, avait été annoncé au printemps. Le ministère de l’immigration est purement et simplement supprimé et ses services répartis entre ceux de la justice et des affaires sociales. Le système de permis à points pour le regroupement familial est abrogé. Les procédures de demande de permis de séjour, de natura- Editorial lisation et de regroupement familial vont être simplifiées. Par ailleurs, dans un geste qui n’est pas directement lié à la politique d’immigration mais dont la valeur symbolique n’a échappé à personne, l’équipe de Helle Thor- Le regard de Plantu ning-Schmidt compte, pour la première fois au Danemark, un ministre issu de l’immigration, Manu Sareen, d’origine indienne, titulaire du portefeuille de l’égalité, des cultes et des affaires nordiques. Toutes les restrictions ne sont pas levées. Ainsi, l’interdiction d’épouser un étranger de moins de 24 ans, visant à empêcher les mariages forcés, est maintenue. Mais le revirement général modifie fondamentalement les termes du débat sur l’immigration. Il faut dire que le Danemark, depuis dix ans, était allé très loin dans le sens du durcissement. Sous l’influence de l’extrême droite, ce pays, pourtant connu pour sa tradition de tolérance et d’ouverture, était même devenu le régime le plus fermé d’Europe aux étrangers, regardé avec envie par certains gouvernements de droite qui n’arrivaient pas à en faire autant chez eux, mais dénoncé par les organisations de défense des droits de l’homme. La Suède voisine s’était inquiétée de la détérioration des conditions d’accueil des étrangers et du ton général du débat sur l’immigration au Danemark. Cet ostracisme était devenu de plus en plus difficile à vivre pour les Danois qui ne s’identifiaient pas à l’image donnée par l’extrême droite. Grand traumatisme dans le subconscient national, l’affaire des caricatures de Mahomet, publiées en 2005 par un quotidien danois, s’était aussi inscrite dans un contexte général de dégradation des relations des Danois avec les étrangers. Ce nouveau départ est une bonne nouvelle pour les Danois – et pour le reste de l’Europe. p Lire page 6 Environnement Cette ville de banlieue parisienne inaugure un système inédit en France : la collecte souterraine, par aspiration, des déchets. A 70 km/h. P. 8 Shiatsu et acupuncture font leur entrée à l’hôpital Santé Une vingtaine de services des hôpitaux parisiens utilisent désormais les techniques de la médecine chinoise ancestrale. Cette discipline, qui fait la part belle à l’acupuncture, aux massages thérapeutiques et aux pratiques psychocorporelles, est utilisée en complément de traitements au long cours. Pour un meilleur confort des patients. P. 27 ArnAud MOnTEBOurG A nos lecteurs D eux jours de suite, Le Monde n’est pas paru. Une partie des personnels de l’imprimerie du journal, à Ivry-sur-Seine, a empêché la publication de votre quotidien. C’est la première fois dans l’histoire du Monde que le journal n’est pas en état de faire le compte rendu et de proposer ses analyses à l’occasion d’un scrutin national qui est aussi un moment important de la vie démocratique du pays. Ces personnels s’opposent au plan de modernisation de l’impression engagée par l’entreprise pour mieux servir ses lecteurs. Nous présentonsnos excuses à nos acheteurs en kiosque, abonnés, diffuseurs et annonceurs pour les désagréments occasionnés par ce mouvement social. Les éditions non parues sont disponibles, gratuitement, sur notre site Lemonde.fr p Ce\x q\i s’iUtéYesseUt à sa voix KevYaieUt K’aboYK s’iUtéYesseY à ses iKées. Flammarion Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,50 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,50 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA, Photo Philippe Matsas © Flammarion Défense La crainte de subir des pertes avant l’élection présidentielle a fait évoluer la stratégie française : une pause dans les opérations a été décidée. Reportage. P. 21 0123 page deux Mercredi 12 octobre 2011 Le «père perdu» de Steve Jobs Reportage Avec l’ouverture à la concurrence, le renouvellement de dix I Opération drague dans les barrages français l n’était pas invité à l’enterrement, le 7 octobre, qui s’est déroulé dans l’intimité familiale. Mais il dit que, dans la période récente, il avait envoyé des messages à son fils. «Bon anniversaire », « J’espère que ta santé s’améliore »… Abdulfattah (dit « John ») Jandali était le géniteur de Steve Jobs. Mais, lundi 10 octobre, il faisait avec sa progéniture la « une » du Wall Street Journal, qui l’a retrouvé. L’homme vit à Reno (Nevada) et, à 80 ans, il reste toujours actif, dirigeant plusieurs hôtels-casinos et les 450 salariés qui y travaillent. Oui, il est bien l’homme qui, en 1954, a conçu avec une étudiante nommée Joanne Schieble un enfant né l’année suivante. Syrien, né dans la ville d’Homs, il suivait des cours de relations internationales à l’université de Madison, dans le Wisconsin (sa thèse portera sur les efforts des Nations unies pour imposer des normes d’indépendance nationale). Elle étudiait l’orthophonie. Mais son père n’accepta ni sa liaison ni la venue de ce bébé, celui qu’elle – et son amant, de fait – allaient abandonner au couple Clara et Paul Jobs. La maman souhaitait pour son enfant une famille dotée des moyens immédiats de l’élever. Lorsqu’il évoquait cet abandon, Steve Jobs, publiquement, expliquait toujours que sa mère biologique, qui n’était pas mariée, n’avait pas eu beaucoup d’autres choix. Ce n’est qu’en 2005 que M. Jandali a appris qu’il était son géniteur. Le quotidien de la finance ne nous dit pas comment, en particulier si cela fut le résultat d’une recherche en paternité de sa célèbre progéniture. Depuis, il ne l’a jamais rencontré – il n’a concessions hydroélectriques très rentables attire les géants de l’énergie, qui viennent à la rencontre des élus. Exemple dans la très convoitée vallée d’Ossau d’ailleurs pas entretenu plus de relations avec Mona Simpson, la sœur de Steve, que le couple avait conçu lors d’un séjour en Syrie avant leur séparation définitive. Mais, dit-il au reporter qui l’interroge dans l’un des restaurants des complexes qu’il dirige, Steve lui avait quelquefois répondu ces derniers temps. Un mot seulement : « Merci. » Il ne sait plus pourquoi il a envoyé, un jour, un premier courriel. « Sans doute parce que, lorsque j’ai su sa maladie, ça m’a touché. (…) Mais nous n’avions aucun contact. Si j’avais dû lui parler, je n’aurais pas su quoi lui dire. » Ressemblance Devenue écrivain, Mona, la sœur de Steve Jobs, a intitulé l’un de ses romans, publié en 1993 : The Lost Father (« le père perdu »). Le fondateur d’Apple, lui, n’a jamais fait publiquement référence à lui, pas même sous forme d’allégorie. Sur les photos de jeunesse, Steve Jobs ressemble cependant énormément à l’homme qui l’a engendré. Personne, dans la famille, n’a prévenu M. Jandali de sa disparition. Il l’a appris incidemment, mercredi 5 octobre, lorsqu’un de ses employés est entré dans son bureau et l’en a informé. Ce ne fut « pas un choc », tant il s’y était préparé. Mais il dit avoir tenté, exceptionnellement, de joindre sa fille, Mona Simpson, qui n’a pas rappelé. « C’est son droit », admet-il. Abdulfattah Jandali utilise un iPhone 4. Il dit avoir commencé de ne jurer que par Apple très longtemps avant de savoir qu’il était le père du « génie » qui l’a inventé. p Sylvain Cypel (New York, correspondant) Les indégivrables Xavier Gorce La Société hydroélectrique du Midi (SHEM), filiale de GDF Suez, exploite quatre barrages dans la vallée d’Ossau, dont celui de Fabrèges. GUILLAUME BONNAUD/« SUD OUEST » Vallée d’Ossau Envoyé spécial T out sourire sur le perron ombragé de la mairie de Laruns (Pyrénées-Atlantiques), où il est entouré du maire Robert Casadebaig et du député 100 % bayrouiste Jean Lassalle, Gérard Mestrallet pose pour la photo qui sera publiée le lendemain dans La République des Pyrénées. Ce mardi 4 octobre, le PDG de GDF Suez est en campagne dans la vallée d’Ossau. Mais que vient faire le patron de ce mastodonte de l’énergie, qui pèse près de 85 milliards d’euros de chiffre d’affaires, au fin fond de cette vallée verdoyante ? Soustraire à l’appétit de ses concurrents – EDF et de grands hydrauliciens européens – une petite concession appartenant depuis 1929 à une de ses filiales, la Société hydroélectrique du Midi (SHEM). « C’est un petit bijou de technologie, de savoir-faire et d’ancrage dans le territoire », dit-il en sirotant une bière belge, attablé dans un restaurant local. Une question l’irrite depuis de longs mois : pour- «Les barrages hydroélectriques, c’estune de nos seules richesses etelle a au moins l’avantage de ne pas être délocalisable» Robert Casadebaig maire de Laruns (Pyrénées-Atlantiques) Société éditrice du « Monde » SA Président du directoire, directeur de la publication Louis Dreyfus Directeur du « Monde », membre du directoire, directeur des rédactions Erik Izraelewicz Secrétaire générale du groupe Catherine Sueur Directeurs adjoints des rédactions Serge Michel, Didier Pourquery Directeurs éditoriaux Gérard Courtois, Alain Frachon, Sylvie Kauffmann Rédacteurs en chef Eric Béziat, Sandrine Blanchard, Luc Bronner, Alexis Delcambre, Jean-Baptiste Jacquin, Jérôme Fenoglio, Marie-Pierre Lannelongue (« M Le magazine du Monde ») Chef d’édition Françoise Tovo Directeur artistique Aris Papathéodorou Médiateur Pascal Galinier Directeur du développement éditorial Franck Nouchi Conseil de surveillance Pierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président 0123 est édité par la Société éditrice du «Monde» SA Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 149 017 497 ¤. Actionnaire principal: Le Monde SA. Rédaction 80,boulevardAuguste-Blanqui,75707ParisCedex13Tél.:01-57-28-20-00;télécopieur:01-57-28-21-21 Abonnements partéléphone:de France32-89 (0,34¤ TTC/min);de l’étranger:(33)1-76-26-32-89 ouparInternet:www.lemonde.fr/abojournal La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0712 C 81975 ISSN 0395-2037 Président : Louis Dreyfus Directrice générale : Corinne Mrejen PRINTED IN FRANCE 80, bd Auguste-Blanqui, 75707 PARIS CEDEX 13 Tél : 01-57-28-39-00 Fax : 01-57-28-39-26 Imprimerie du Monde 12, rue Maurice-Gunsbourg, 94852 Ivry cedex quoi cette concession, qui produit 230 mégawatts (MW), est-elle « la première à être soumise à la concurrence » ? Et non pas une de celles d’EDF, qui accapare plus de 80 % de la production hydroélectrique française ? Le petit monde de l’hydroélectricité était jusqu’à présent un long fleuve tranquille. Lors des rares renouvellements de concessions, l’Etat accordait la priorité à l’exploitant du moment, le plus souvent EDF. Cet acteur écrasant n’a laissé qu’une portion congrue (17 %) aux seconds rôles, la Compagnie nationale du Rhône (CNR) et la SHEM, absorbées par GDF Suez. Jusqu’àce que le gouvernement – sous la pression de la Commission européenne – ne soit obligé de lancer en avril 2010 le processus d’ouverture à la concurrence dans dix vallées des Alpes, des Pyrénées et du Massif central. Avec 5 300 MW, c’est 20 % de la puissance hydraulique qui sera ainsi remise sur le marché à l’horizon 2015, avant que les 20 000 MW restants ne le soient dans les années suivantes. Cesouvrages, amortis depuis belle lurette et fonctionnant grâce à une « houille blanche » gratuite, sont des « machines à sous » où l’on gagne presque à tous les coups. Les centrales hydroélectriques sont lancées en période de pointe de la consommation, quand l’électricité est chère, alors que le coût du kilowattheure (kWh) produit est le moins cher (avec celui de la géothermie). Il devance même le nucléaire. Gérard Mestrallet ne veut pas perdre le « petit bijou » d’Ossau. Ni les 19 barrages au fil de l’eau de la CNR, qui jalonnent le cours du Rhône. Il a même l’ambition d’en prendre à son meilleur ennemi, Henri Proglio, le PDG d’EDF. « Nous avons aujourd’hui 3 800 MW, nous voulons accroître notre portefeuille de 1 500 à 2 000 MW à l’horizon 2016. L’équivalent d’un réacteur nucléaire EPR de troisième génération », annonce-t-il. Des capacités qu’il faudra bien prendre à son grand concurrent qui, lui non plus, ne veut rien lâcher ! Pour l’heure, le patron de GDF Suez déploie les grands moyens et les petites attentions. Il n’est pas homme à laisser les choses au hasard. Et le choix de FontRomeu (Pyrénées-Orientales) pourla vingtième édition du Raid GDF Suez, qui a réuni du 15 au 18 septembre les sportifs « maison » venus du monde entier, ne doit rien au hasard. Le groupe exploite un petit barrage tout proche, dans la vallée de la Têt, et Gérard Mestrallet voulait montrer l’ancrage local du groupe. Il en a même profité pour réunir les édiles politiques et les élus des chambres consulaires (agriculture, commerce…) autour d’un débat public sur l’énergie. Rien ne vaut le contact avec les maires et les conseillers généraux ou régionaux, qui pèseront à chaque fois que le gouvernement devra décider le maintien ou le remplacement de l’ancien exploitant. Chaque mot est pesé. Et quand Gérard Mestrallet parle au maire de Laruns d’« ancrage territorial », le cœur de l’élu ne fait qu’un bond dans ce bout de France où l’on se bat jour après jour pour sauver les emplois et les services publics. « Une petite usine, un collège…, égraine Jean Lassalle. La vie, quoi. » Lui,qui afait une grève de la faim mémorable, au printemps 2006, pour sauver l’usine Toyal dans la vallée d’Aspe, le sait. M ais les « petits maires » ne s’en laissent pas conter. Il faut les séduire, jouer la proximité, afficher un bon bilan. Apporter un plus pour qu’ils puissent ensuite plaider la cause du mieux-disant. « J’ai vu passer de nombreux candidats, raconte Robert Casadebaig, les Suisses, les Norvégiens, les Suédois… Ah, j’oubliais les Allemands ! » Le maire de Laruns se dit ouvert à de nouveaux arrivants, avant de laisser tomber duhaut duperron de sa mairie, un brin ironique, cet avertissement de bon sens : « Nous, nous savons avec qui nous sommes mariés. On sait ce qu’on peut perdre, on ne sait pas ce qu’on peut gagner. » Ce qu’il peut perdre, ce n’est pas la trentaine d’emplois dans les usines et barrages de la vallée ; leur production annuelle peut assurer la consommation d’une ville comme Bordeaux et ils continueront de produire de l’électricité. Mais qui sait si un nouveau concessionnaire ne préférera pas sous-traiter la maintenance des usines hydroélectriques de la SHEM, aujourd’hui assurée par un atelier intégré de 46 salariés ? Gérard Mestrallet en a fait le tour en se voulant rassurant. Et la presse a renvoyé de sa visite un écho qui a dû sonner doucement à ses oreilles : « Un patron du CAC 40 accro à l’électricité de l’Ossau », écrivait le lendemain L’Eclair en manchette. Presque tous les candidats à la reprise des concessions des dix vallées sont « de grands hydrauliciens », comme on dit dans le milieu : l’allemand E.ON, l’italien Enel, le suisse Alpiq, le suédois Vattenfall, le norvégien Statkraft… « Cela se jouera sur le partenariat, l’accompagnement, dit le maire de Laruns. Les barrages hydroélectriques, c’est une de nos seules richesses et elle aau moins l’avantage dene pas être délocalisable. » Mais qu’est-ce que le patron de GDF Suez lui a proposé ? « Oh, rien de précis. On a parlé développement du territoire », répond-t-il. La pression des riverains, les critiques des écologistes et les exigences des élus locaux ont changé la donne. Tout est bon pour créer des activités, pourvu qu’elles soient respectueuses de l’environnement. L’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) affirme qu’elle sera « vigilante » sur l’engagement des groupes d’énergie, convaincue qu’un bon partage des usages de l’eau entre la production d’électricité, l’irrigation agricole, la pêche et les sports aquatiques est un facteur de développement économique durable. L e gouvernement a décidé que les élus concernés participeront à l’élaboration du cahier des charges qui sera soumis aux concessionnaires. Parmi les exigences déjà formulées, on note que l’Etat imposera une augmentation de 10 % de la puissance produite. Ce qui contribuera à permettre à la France d’atteindre l’objectif de 23 % d’énergie renouvelable en 2020. En attendant, EDF et GDF Suez se livrent à une concurrence aussi farouche que discrète.Laguerre desdeux géantsa commencé, début 2011, sur les bords de la Dordogne, où 1 650 MW exploités par EDF sont remis en jeu. Henri Proglio et Gérard Mestrallet sont allés au-devant des élus. Sans oublierde courtiser le premierd’entre eux, François Hollande, qui préside le conseil général de Corrèze. C’est bilan contre bilan. GDF Suez met en avant ses succès à la CNR et à la SHEM, notamment l’intégration sociale réussie de salariés d’EDF et son souci de développement durable. Henri Proglio rappelle que son groupe est numéro cinq mondial du secteur et qu’il a de grandes ambitions à l’international, comme le prouve la construction du barrage de Nam Theun, au Laos. Obnubilé par la culture productiviste de ses ingénieurs, EDF a longtemps négligé les gisements d’activité et d’emplois qui existent en amont et en aval de ses quelque 400 barrages. Et parfois même l’entretien. Le groupe a dû lancer, en 2007, un plan SuperHydro (560 millions d’euros) pour rénover des ouvrages vieillissants, voire dangereux. La guerre des barrages ne se livrera pas seulement entre EDF et GDF Suez. On voit mal – Gerard Mestrallet le reconnaît luimême – comment Paris pourrait refuser l’entrée d’un grand groupe européen. Pour le gouvernement, l’enjeu politique est mince : l’Etat n’aura pas à prendre ses décisions avant 2014-2015, bien après l’élection présidentielle. p Jean-Michel Bezat 0123 Mercredi 12 octobre 2011 international 3 Les coptes imputent à l’armée le carnage duCaire Selon les familles des victimes, les militaires ont délibérément réprimé dans le sang la manifestation du 9 octobre Reportage La minorité chrétienne la plus forte du Moyen-Orient Le Caire Correspondance Le nombre de coptes en Egypte est estimé à 7 millions de fidèles, soit 10 % de la population égyptienne. Ils constituent la plus importante minorité chrétienne dans le Moyen-Orient. Près de 90 % d’entre eux suivent le rite orthodoxe, sous la tutelle du pape Chenouda III. Il existe aussi une petite communauté catholique et une autre protestante, avec 200 000 fidèles chacune. A ssises sur le bord du trottoir, des femmes vêtues de noir crient leur douleur, effondrées sur des cercueils qui luisent au soleil devant les grilles de l’hôpital copte du Caire. A même le bois lustré,desfeuillesdepapiergrossièrementscotchéesindiquentaufeutre noir le nom des victimes tombées lors des affrontements entre coptes et forces de l’ordre qui ont fait 24 morts et 329 blessés, selon le ministère de la santé, dans la nuit de dimanche 9 à lundi 10 octobre. Au lendemain de ces émeutes meurtrières, de petits groupes se fraient un chemin entre les voitures calcinées qui jonchent la rue Ramsès, jusqu’aux grilles de cet hôpital du centre-ville, sous les regards attentifs des officiers de la sécurité centrale, déployés aux alentours. Certains viennent chercher le corps de leurs proches, d’autres identifier un cadavre ou simplement manifester leur solidarité aux victimes et leur angoisse. « Tantaoui terroriste ! » «Notre fils est mort ! Notre fils est mort, pourquoi ? », hurle une mère agenouillée devant le cercueil de son fils. « Tais toi, tu nous fais honte, il est mort en martyr ! », la rabroue un homme. Au milieu des plaintes déchirantes, des jeunes brandissent des crucifix, découvrant des bras tatoués de Sainte Vierge et de croix. Ils conspuent le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, le chef du Conseil supérieur des forces armées (CSFA), qui dirige le pays par intérim depuis la chute du président Hosni Moubarak, en février. « Tantaoui terroriste, Tantaoui salafiste !» Ilestà peine 11heures etunefoule compacte se presse déjà au portail de l’hôpital, brandissant des téléphones portables et des appareils photo. A l’accueil, une jeune femme voilée rassure les journalistessurla nature destraumatismes: Rassemblement d’Egyptiens, lundi 10 octobre, lors des funérailles des coptes tués dans les heurts avec la police, dimanche, au Caire. MAHMUD HAMS « Essentiellement des blessures superficielles et des fractures. » Dans son dos, une infirmière arborant une croix autour du cou fait la moue et hausse les sourcils : « Blessures à la tête, visages écrasés méconnaissables, cadavres impossibles à identifier, cerveaux rapportés dans des mouchoirs », chuchote-t-elle en désignant du menton le local dévolu à la morgue. Sept corps ygisent sous des drapshumides, dans des sacs plastique emplis de glace. Plusieurs reposent à même le sol dans des flaques de sang séché. Les visages sont tuméfiés et pour certains complètement écrasés. Thérèse Qallin est venue voir le cadavre de son neveu. « Son cerveau est sorti de sa tête, ses bras et «Dissensions religieuses et manipulation politique» Entretien Le Caire Correspondance Célèbre militant de gauche, le pédiatre Alaa Shukrallah est membre de l’Initiative égyptienne contre les discriminations, ONG de défense des droits de l’homme. Pourquoi cette recrudescence des violences communautaires dans l’Egypte post-Moubarak ? On peut parler à la fois de violences spontanées et de manipulation politique. Les dissensions entre chrétiens et musulmans existent depuis longtemps et l’angoisse des coptes augmente dans un contexte d’insécurité généralisée. Cela fait près de quarante ans que le régime égyptien attise les sentiments sectaires, au moment où un discours islamiste fondamentaliste se répand dans la région. Mais les faits prouvent que cette violence est aussi organisée, alors que la révolution a été un mouvement spontané. Pourquoi les généraux au pouvoir auraient-ils intérêt à déstabiliser le pays ? Des forces au sein de la clique au pouvoir utilisent de tels incidents pour casser le mouvement révolutionnaire, qui n’est pas satisfait par le processus actuel et demande plus de réformes. Ces affrontements peuvent être exploités pour diviser la rue égyptienne et pousser le jeune musulman moyen à soutenir une reprise en main des activi- tés politiques par les forces de l’ordre. Des gouvernements étrangers ont aussi un intérêt à ce que le chaos se répande, notamment l’Arabie saoudite. Celle-ci finance à coups de millions de livres égyptiennes des groupes salafistes ouvertement hostiles aux coptes, qui ont participé aux affrontements. ses mains sont complètement cassés et son torse est en lambeaux. Il avait 40 ans. Il s’appelle Ayman Sabri. Notez ! Notez ! Photographiez ! Les médias de ce pays nous ignorent! », dénonce-t-elle. A la demande de nombreuses familles, des autopsies sont pratiquées sur 14 corps, qui aboutiront à lafindelajournéeàunconstataccablant:3mortspardesrafalesdeballes et 11 par écrasement sous des chenilles de blindés. Par-delà les lamentations, les témoignages se recoupent pour accuser l’armée égyptienne d’avoir perpétré un crime organisé contre des manifestants pacifiques, venus demander une protection renforcée de la police et de la justice ainsi que l’instauration d’une loi qui leur permette de construire des églises sans autorisation présidentielle. Les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux montrent des blindés fonçant sur la foule, des corps troués de balles ou égorgés. Plusieurs personnes affirment avoir vu desmilitaires jeter des cadavres dans le Nil. Condoléances de l’armée «C’était une manifestationpacifique », assure Azza, qui a rejoint le cortège dimanche vers 17 heures. « Les gens ne savaient même pas renvoyer une grenade lacrymogène. L’armée a laissé les manifestants se positionner devant l’immeuble de la télévision d’Etat, et puis les a assaillis de toutes parts. Elle a tiré dans le tas, et des chars Morgan Sportès Lutter contre les discriminations anticoptes doit-il être une priorité ? C’est urgent. Il faut les autoriser à construire des églises sans avoir besoin d’un décret présidentiel, supprimer la mention de la religion sur les cartes d’identité, qui est une source de discrimination dans l’accès à l’emploi. Rétablir aussi une réciprocité dans les conversions (les chrétiens peuvent se convertir à l’islam, mais l’inverse est interdit par la loi). Seule une démocratie véritable peut nous permettre d’échapper à la violence communautaire. Quel rôle joue l’Eglise copte ? Le pape Chenouda a toujours recherché la protection du régime en place. Lors de la révolution, il n’a pas pris position en faveur des révolutionnaires, et les coptes n’étaient pas présents en masse dans les manifestations, contrairement aux chrétiens anglicans. Mais Moubarak jouait un jeu pervers qui consistait à se présenter comme le protecteur des coptes tout en attisant la violence sectaire quand il se sentait menacé. p Propos recueillis par C. T. ont roulé sur les gens », continue-t-elle, dans un sanglot. D’aprèslestémoins,lesmanifestants auraient d’abord été la cible de jets de pierres au cours de leur marche à travers le centre-ville, depuis la corniche du Nil jusqu’au siège de la télévision d’Etat (Maspero), devant lequel ils se sont installésvers 16 h30. Dépasséepar l’affluence, l’armée aurait attaqué le sit-in vers 18 heures, rejointe plus tard par des policiers en civil et environ 3 000 baltagiya (« hommes de main ») arrivés du quartier de Boulaq, situé derrière Maspero. Ces derniers se sont ensuite éparpillés dans la ville, molestant des coptes avec, semble-t-il, la complicité des militaires. Hani Bushra, un copte de natio- nalité américaine, pris à partie dimanche soir par un groupe de 30 personnes prêtes à le lyncher, affirme avoir vu l’armée collaborer avec des groupes de baltagiya qui arrêtaient des coptes pour les frapper en criant : « Chrétiens, où êtesvous ? L’islam est là !» Rompant un pesant silence, le CSFA a présenté, lundi, ses condoléances aux familles des victimes tout en imputant la responsabilité des événements – qui auraientcausé la mort de 3 militaires – à des « fauteurs de troubles non identifiés ». « Nous refuserons toujours de répondre à de telles provocations visant à semer la discorde entre l’armée et le peuple », dit le communiqué officiel, diffusé à la télévision nationale. Le cabinet du premier ministre a également été chargéde mettre sur pied unecommission d’enquête. Les coptes du mouvement Masperoréclamentaujourd’hui l’arrestation des officiers responsables de l’attaque. Mais ils se heurtent à l’incrédulité d’une large partie de la population, peu encline à mettre l’arméeencause.Surlafoid’unsondageréalisélundidanslecentre-ville, le quotidien indépendant Al-Masry Al-Youm écrivait que « l’honorable citoyen égyptien » attribue la responsabilité des violences de préférence à « des caciques de l’ancien régime » et à « des mains étrangères ». Ou aux coptes eux-mêmes. p Claire Talon « Brut, factuel, intelligent et saisissant.» Philippe Labro, Le Figaro «Ce roman est vivement recommandé aux amateurs de littérature comme à tous les citoyens.» Benoît Duteurtre, Marianne « Comme pour le Titanic, on a beau connaître la fin, on tourne les pages de Tout, tout de suite, hypnotisé.» Jérôme Dupuis, L’Express «À travers ce livre, le regard d’Ilan Halimi a trouvé le mien, et il m’a touché aux larmes.» Didier Decoin, Le Monde des livres «Morgan Sportès ne porte pas de jugement. Mais son terrible récit est éloquent.» SÉLECTION : Bernard Pivot, Le Journal du Dimanche PRIX GONCOURT PRIX RENAUDOT PRIX INTERALLIÉ « C’est un devoir de lire ce livre.» Natacha Polony, On n’est pas couché fayard 4 0123 international Mercredi 12 octobre 2011 Attentat du souk duCaire en 2009: l’enquête piétine L’assassinat de Mechaal Tamo met à l’épreuve la retenue des Kurdes de Syrie La justice française s’inquiète de l’impact du «printemps arabe» sur la lutte antiterroriste L L e printemps arabe va-t-il contribuer à améliorer la coopération antiterroriste internationale ou, au contraire, la faire reculer ? Cette interrogation transparaît dans plusieurs dossiers instruits en France et notamment dans l’enquête sur l’attentat à la grenade du Caire, le 22 février 2009, qui a coûté la vie à une Française de 17 ans, en balade dans le Khan Al-Khalili, le plus touristique des souks égyptiens. Dans les jours qui suivirent, la sécurité d’Etat arrêtait sept personnes, dont une Française d’origine albanaise, Dude Hoxha. Après avoir été interrogée et torturée, selon ses avocats, elle avait été expulsée vers la France le 10 mars 2010. La justice française, saisie de l’attentat,a poursuivi les investigations confiées à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Le 10 novembre 2010, Mme Hoxha était de nouveau placée en détention puis mise en examen pour « financement d’un réseau terroriste et association de malfaiteurs ». Selon les enquêteurs, elle aurait agi pour Khaled Moustapha et Ahmed Sediq, deux Egyptiens soupçonnés d’être les chefs d’un groupuscule djihadiste connu sous le nom de Jaish Al-Islam (L’Armée de l’islam) opérant entre la bande de Gaza et l’Egypte. Jamais arrêtés par la police égyptienne, ils seraient toujours en Egypte. Créé en avril 2006 dans la bande de Gaza par Momtaz Doghmush et fort d’une centaine de membres, selon les archives d’Interpol, ce groupe revendique alors son affiliation à la mouvance Al-Qaida sans pour autant en faire véritablement partie, faute d’activité réelle et surtout à cause de la forte opposition sur le terrain des forces du Hamas. Le 17 juin 2008, le frère de Momtaz est tué par l’armée israélienne et le groupe perd dans le même temps la protection et le financement du clan familial. L’Armée de l’islam se serait alors exilée au Caire où elle aurait confié sa destinée à Khaled Moustapha et Ahmed Sediq qui vont tenter de relancer les activités du groupe. D’après les autorités françaises, Mme Hoxha aurait été enrôlée, par le biais du site de discussion sur Depuis le début du soulèvement, cette minorité et le régime Assad se ménagent mutuellement Internet Paltalk, par Khaled Moustapha. Elle vivait au Caire depuis 2005 et aurait hébergé des sympathisants de ce mouvement dans son appartement dans la capitale égyptienne. Par ailleurs, elle aurait transmis au chef de L’armée de l’islamdes fondsestimés à 10000dollars (7 400 euros). Face aux enquêteurs, elle a admis avoir reçu cette somme mais affirme l’avoir dilapidée. Par ailleurs, si elle reconnaît son adhésion au « djihad défensif », elle dément avoir su que cet argent aurait servi à financer un groupe terroriste et à préparer un attentat. Enfin, elle nie avoir participé à l’approvisionnement en arme de cette cellule islamiste.Pour éclairer son rôle, la justice française a adressé, le 10 juillet 2009, une commission rogatoire internationale aux autorités égyptiennes. A ce jour, selon le parquet de Paris, cette demande, renouvelée au printemps 2011, est toujours sans réponse. Filières de recrutement Les enquêteurs souhaitent, notamment, approfondir leur connaissance de filières de recrutement entre la France et l’Egypte. Le parcours de Dude Hoxha illustre en effet les modes d’organisation d’une certaine mouvance islamiste radicale. Dans ses déclarations devant la justice française, elle explique avoir été convaincue, en 1998, de se rendre en Egypte et de participer à des collectes de fonds par un imam prônant le djihad. «On constate dans de nombreux dossiers, explique une source au siège d’Interpol, à Lyon, qu’il existe des liens anciens et constants entre le milieu islamiste radical au Caire et les banlieues parisienne et lyonnaise. » Le constat est identique à la DCRI où certains craignent que les révolutions arabes ne favorisent pas, comme, on aurait pu le penser, la lutte contre le terrorisme. L’un des avocats de Mme Hoxha, e M Pascal Garbarini, qui a déposé une demande de remise en liberté mardi 11 octobre, s’indigne de cette situation. « Il est surprenant que l’Egypte l’ait libérée et que la France la maintienne en détention pour des faits non établis. Nous faisons les frais des dysfonctionnements de la coopération judiciaire. » p Jacques Follorou ’assassinat de Mechaal Tamo, un responsable politique kurde très engagé dans la révolution syrienne, marque-t-il un tournant dans la mobilisation contre le régime de Bachar Al-Assad, qui craint cette communauté de 3 millionsdepersonnes(10% delapopulation) très organisée ? L’annonce de la mort de M. Tamo, tué par des inconnus, vendredi 7 octobre à Kamechliyé (nord-est), a immédiatement entraîné des manifestations. Samedi, 50 000 personnes ont assisté à ses funérailles à Kamechliyé, au cours desquelles deux manifestants ont été tués. Dimanche, les manifestations se sont étendues à Derbassiyeh, Malikiyeh et Amouda, où une statue géante de Hafez Al-Assad, le père de l’actuel chef de l'Etat, a été saccagée. Au même moment, des manifestants kurdes s’en prenaient aux ambassades de Syrie à Vienne, Berlin et Genève, hissant même le drapeau kurde à Londres. Malgré cette flambée de violence, le pouvoir syrien, qui nie toute responsabilité dans l’assassinat de M. Tamo, a fait preuve d’une retenue remarquable au regard de la violence déployée ailleurs. Depuis le début des troubles, le 15 mars, il ménage la communauté kurde, qu’iladurementmatéedansunpassérécent,notammenten2004,lorsqu’un soulèvement avait été réprimé dans le sang et l’indifférence. Cette prudence s’explique par le fait que la douzaine de partis kurdes disposent de militants disciplinés et de relais extérieurs, en Irak ouenTurquie. Ainsi,l’Uniondémocratique (PYD), le plus organisé et le plus important des partis kurdes syriens, est proche du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) turc, un mouvement armé interdit, en guerre contre Ankara. Un millier de Kurdes syriens seraient présents dans la principale base du PKK, qui compte 3 000hommes dans le djebel Al-Qandil, au nord du Kurdistan irakien. Leur retour au pays mettrait en difficulté l’armée syrienne, minée par les désertions et épuisée par les protestations. Zones de peuplement kurde TURQUIE Kamechliyé Amouda Derbassiyeh Alep Malikiyeh SYRIE Homs L I BA N Damas IRAK Deraa J O R DA N I E 150 km ARABIE SAO U D I T E Mais pour l’instant, le PYD et les autres formations kurdes ont décidé de ne pas entrer en conflit ouvert avec le régime. « Le PYD n’a aucune sympathie pour ce régime basé sur le nationalisme arabe, analyse Ignace Leverrier, ancien diplomate. Mais il le sait affaibli et cherche à en tirer le maximum avant qu’il ne tombe. » Le PYD n’a pas oublié que la Syrie a livré Abdullah Öcalan, le chef du PKK, à la Turquie en 1998, mais la méfiance à l’égard du reste de l’opposition, dominée ccélér L e chef d’état-major de l’armée israélienne qui appelle les ministres à voter contre le premier d’entre eux, Benyamin Nétanyahou; Shass, le parti ultra- orthodoxe, qui menace de provoquer une crise gouvernementale; la majorité des internes en médecine en instance de démissionner… Décidément, le printemps social ationetdécélérationparfaitementcontinues. Espace Suffren 40 ter, av. de Suffren Paris 15 e Tél. : 01 53 58 10 00 Michel Ange Avec la transmission séquentielle continue DSG, vos vitesses passeront en un clin d’œil, sans débrayage et sans décélération. Terminé les à-coups, le plaisir de conduire atteint les sommets de la perfection. R.C. PARIS B 421 389 453 97, rue Michel Ange Paris 16 e Tél. : 01 40 71 12 12 et 52, av. du Général Leclerc Boulogne-Billancourt Tél. : 01 55 60 24 00 par les islamistes et les nationalistes arabes, reste tenace. Dès les premières semaines de manifestations, le pouvoir, qui prend garde à ne pas tirer à balles réelles dans les villes kurdes, a annoncé qu’il accorderait la nationalité aux quelque 300 000 Kurdessyriensprivésdepapiersd’identité. Le processus est en cours pour 60 000 d’entre eux. Plus étonnant, legouvernementatolérél’ouverture par le PYD de trois centres culturels (à Alep, Kamechliyé et Malikiyeh) et de quatre écoles en langue kurde. Inimaginable il y a peu. Jeu régional complexe La moitié des 640 militants du PYDdétenus dans les geôles syriennes ont été libérés. Et le chef du PYD, Salem Muslim, officiellement recherché, est réapparu au grand jour pour participer, le 17 septembre,àDamas,àuneréuniond’opposants tolérée par le régime. M.Muslim est devenu vice-président du Comité national pour le changement démocratique, un regroupe- ment d’opposants concurrents du Conseil national syrien (CNS), qui a la faveur des Occidentaux. Des partis kurdes sont membres du CNS, pas en leur nom propre mais via la déclaration de Damas, signée en 2005 par plusieurs formations d’opposition. C’était le cas de Mechaal Tamo, un franc-tireur plus populaire auprès des jeunes manifestants kurdes que sur la scène politique où il ne pouvait s’appuyer sur un parti important. LeComité national pour le changement démocratique, lui, demande le démantèlement de l’appareil répressif mais pas le départ du président Assad. Cette position reste-t-elle tenable après l’assassinat de M. Tamo ? Cela dépendra de la ruekurde,maisaussid’unjeurégional complexe auquel se mêlent l’Iran, l’Irak, dont les chefs kurdes ne veulent pas mettre en péril leurs acquis en s’impliquant dans l’aventure syrienne, et la Turquie, hostile à Bachar Al-Assad mais plus encore à un réveil kurde à ses frontières. p Christophe Ayad Le chef de l’armée israélienne «vote» contre M.Nétanyahou www.volkswagen.fr A Quelque 50 000 Kurdes ont assisté, le 7 octobre, à Kamechliyé, aux obsèques de Mechaal Tamo, responsable politique assassiné. REUTERS Polo 1.6 TDI 90 DSG La boîte de vitesses séquentielle sans à-coups Cycles mixtes / urbains / extra-urbains de la gamme Polo (l/100 km) : de 3,4 à 6,1 / de 4,1 à 8,2 / de 3,0 à 5,1. Rejets de CO2 (g/km) : de 89 à 143. Modèle présenté : Polo 'Sportline' 1.6 TDI 90 DSG - 5p. , avec options pack Design 2012, système de navigation et peinture métallisée. Cycle mixte (l/100 km) : 4,3. Rejets de CO2 (g/km) : 112. Das Auto : La Voiture. israélien n’a pas pris fin avec le démantèlement du camp de tentes du boulevard Rothschild de TelAviv, le 3octobre. Stricto sensu, le premier ministre a remporté une victoire : dimanche 9 octobre, seuls 8 ministres se sont prononcés contre l’adoption du rapport Trajtenberg, censé constituer la réponse politique à la révolte de la classe moyenne et des étudiants contre la vie chère, entamée à la mi-juillet. Si 21 ministres ont finalement apporté leur soutien à M.Nétanyahou, ce succès laissera des traces. Et d’abord dans les relations entre ce dernier et le général Benny Gantz, patron de l’armée. Car le rapport Trajtenberg est financé par une ponction annuelle de 3milliards de shekels (environ 600 millions d’euros) sur les crédits militaires, un budget quasi sacro-saint en Israël. Alors dimanche, le ministre de la défense, Ehoud Barak, est venu au conseil des ministres flanqué du général Gantz, lequel a joué son rôle, enjoignant chacun de voter contre M.Nétanyahou. En substance: vu l’accumulation de menaces au Proche-Orient, il serait irresponsable de baisser la garde en réduisant les crédits militaires. « Personne ne sait ce qui va se passer demain. Vous voulez que nous nous préparions pour le scénario du pire ? Où voulez-vous que nous fassions des économies ? Sur Iron Dome ? », a lancé le général, faisant référence au système anti- missile destiné à détruire les roquettes du Hamas et du Hezbollah. Et M.Barak d’enfoncer le clou : « Rappelez-vous la guerre du Kippour en 1973, et la seconde guerre du Liban en 2006. Des coupes budgétaires drastiques avaient été opérées sans discernement. » M.Barak exagérait un peu : si Tsahal avait été mal préparée pour ces deux conflits, c’est surtout à cause d’une faillite du renseignement. Un premier pas M.Nétanyahou est resté impavide. Il s’était assuré le soutien des cinq ministres d’Israël Beitenou, le parti ultranationaliste du ministre des affaires étrangères, Avigdor Lieberman, grâce à une poignée de cadeaux politiques. Ce faisant, il a pris le risque de s’aliéner le soutien des quatre ministres de Shass. Pour autant, même si les chefs étudiants rejettent le rapport Trajtenberg en exigeant un « vrai budget social», ce vote est un premier pas. M.Nétanyahou agit dans l’urgence: lundi soir, après des atermoiements, il a recommandé que des augmentations de salaire soient consenties aux jeunes médecins. Sans être sûr que ce soit suffisant pour éteindre cet autre foyer du printemps social : quelque 700internes des hôpitaux, mécontents de leur rémunération, avaient symboliquement démissionné dans la journée… p Laurent Zecchini (Jérusalem, correspondant) 0123 international Mercredi 12 octobre 2011 La perestroïka birmane se confirme par la remise en liberté de 6300 prisonniers La Birmanie connaît actuellement un vent de réforme qui pourrait changer la nature du régime Bangkok Envoyé spécial D epuis des semaines, la rumeur courait dans Rangoun que le gouvernement birmanpourrait élargir les quelque 2 100 prisonniers politiques détenus sous l’« ancien régime », avant que la junte au pouvoir s’autodissolve en mars pour laisser la place à un gouvernement civil dominé par d’anciens militaires. Mardi 11 octobre, la télévision d’Etat birmane a annoncé la libération, à partir de mercredi – jour du départ en Inde du président Thein Sein pour sa première visite officielle à New Delhi –, de plus de 6 300 « prisonniers », sans préciser si ce chiffre visait les seuls détenus politiques. Le régime a déjà remis en liberté, dans le passé, des prisonniers de droit commun en fin de peine. Quelques heures auparavant, la Commission nationale pour les droits de l’homme, mise en place en septembre par le gouvernement, avait réclamé, dans un quotidien officiel, la libération des « prisonniers de conscience » afin de répondre aux appels de la communautéinternationale.Lundi,desresponsables gouvernementaux avaient indiqué à l’Agence FrancePresse qu’une amnistie incluant des prisonniers politiques aurait lieu dans les jours suivants. Cette annonce semble acter la réalité d’un processus de libéralisation dont le rythme s’accélère. Au mois d’août, le président de la République et la chef de l’opposi- tion,Aung San Suu Kyi, se sont rencontrés. Plus tard, le président a invité les exilés à revenir au pays. Puis il a tendu la main en proposant l’ouverture d’un dialogue aux chefs des mouvements de guérilla des groupes ethniques en lutte Un haut responsable a évoqué un assouplissement, voire même l’abolition pure et simple de la censure aux frontières. Le gouvernement a ensuite annoncé la mise en place d’une commission des droits de l’homme. La semaine dernière, un haut responsable a même évoqué un assouplissement, voire l’abolition pure et simple de la censure. Différentes mesures censées préparer le terrain à des réformes économiques plus larges, telle la récente revalorisation des retraites, ont également été prises. La libération des prisonniers constitue un point d’orgue de cette ouverture politique. Fin septembre, le gouvernementdeNaypyidaw, capitalepolitique de la Birmanie, a par ailleurs prisunedécisionencoreinimaginable il y a quelques semaines : la suspensiondelaconstructiond’unbarrage hydroélectrique sur le fleuve Irrawaddy par une compagnie chinoise, sous prétexte que le projet était impopulaire. Officiellement, les prisonniers Taipeh et Pékin célèbrent à part la révolution de 1911 Cent ans après, la Chine propose une réunification, Taïwan une démocratisation Hongkong Correspondance A vingt-quatre heures près, les deux rives de la mer de Chine ont chacune salué officiellement les 100 ans de la révolution de 1911, qui a vu naître, sous l’impulsion de Sun Yat-sen, la République de Chine, « première démocratie d’Asie ». L’occasion pour les deux « nations » de souligner leur héritage commun. Mais si le président chinois, Hu Jintao, a appelé les deux rives à travailler ensemble à une « réunification pacifique», le président taïwanais, Ma Ying-jeou a, de son côté, appelé la Chine continentale à accepter l’existence de la République de Chine, nom officiel de Taïwan. Pékin ne doit pas oublier « les idéaux de notre père fondateur » et « s’engager pleinement vers la liberté, la démocratie et la juste répartition des richesses », a déclaré, lundi 10octobre, à Taïwan, le président Ma Ying-jeou. La veille, le président chinois avait déclaré à Pékin : « Réussir une réunification pacifiqueservirait aumieuxlesintérêts fondamentaux de tous les Chinois, y compris de nos compatriotes de Taïwan. » Taïwan a d’abord servi de refuge aux troupes de Tchang Kaï-chek à la fin de la guerre civile, en 1949. Mais si les nationalistes du Kuomintang ont fini par renoncer à leur grand projet de reconquérir la Chine, la Chine communiste n’a jamais renoncé à réunifier sa «province rebelle » à la patrie chinoise «par la force si nécessaire ». En attendant, un rapprochement économique sans précédent s’est amorcé depuis le retour du Kuomintang au pouvoir à Taïwan en 2008. Après huit ans de séparatisme (2000-2008) promu par le président Chen Shui-bian, le Kuomintang a gagné les élections présidentielle et législatives avec un projet d’apaisement avec Pékin. La reprise de la croissance (plus de 10 % en 2010) est attribuée à la nouvelle intégration économique : vols directs, afflux des investissements taïwanais en Chine continentale, accord de libre-échange, nombre croissant d’hommes d’affaires taïwanais s’installant en Chine… Apaisement militarisé Aujourd’hui,1,5milliondecontinentaux visitent chaque année Taïwan. Outre les trésors du Musée nationaldupalais,quiabrite lescollections impériales emportées par Tchang Kaï-chek, nombreux sont ceux qui s’émerveillent de ce qu’ils voient à la télévision : des débats politiquesvifs,descritiquesdugouvernement. Jamais, depuis 1949, les deux peuples n’ont été autant en contact. D’ici à 2020, la Chine pourraitabsorber60%desexportations taïwanaises. Reste qu’en appelant la Chine à «prendre acte de l’existence factuelle de la République de Chine », « le président Ma Ying-jou, tout Kuomintangqu’il soit, réaffirme qu’il ne cédera pas sur la question de la souveraineté », observe le professeur Jean-Pierre Cabestan, spécialiste de Taïwan. L’apaisement entre les deuxrives demeure cependant fortement militarisé, comme l’ont rappelé les deux énormes commandes d’armement passées aux Etats-Unis depuis 2010. Ma Yingjeou prépare en ce sens l’élection présidentielle de janvier 2012. Il devance pour le moment Tsai Ingwen, sa rivale, qui a choisi d’ignorer les célébrations du centenaire de 1911. p Florence de Changy politiques n’existaient pas. Ce sont des journalistes, des avocats, des militants des droits de l’homme. Certains sont détenus depuis le mouvement démocratique de 1988 ou la révolte des moines, en 2007. Leurlibérationpermettraitd’enclencher un processus menant à la levée des sanctions économiques imposées par les Etats-Unis et l’Union européenne. Un observateurexpliquaitrécemmentauMonde à Rangoon qu’un «mécanisme » devraitêtretrouvéparlegouvernement afin d’expliquer les raisons de ce grand pardon. Et de déterminerquiseraientlespremiersbénéficiaires d’une mesure devant logiquement intervenir par étapes. Le secrétaire d’Etat adjoint américain chargé de l’Asie orientale et des pays du Pacifique, Kurt Campbell, a déclaré lundi à Bangkok au cours d’une conférence que les récentsdéveloppementsdelasitua- tion au Myanmar – nom officiel de la Birmanie – montraient les changements « spectaculaires » en cours. M. Campbell, qui a récemment rencontré à Washington le nouveau ministre birman des affaires étrangères, Wunna Maung Lwin, a estimé que la nature du dialogue entrele gouvernementetAung San Suu Kyi était « de bonne tenue ». A propos d’une éventuelle levée des sanctions, il a dit que les Etats-Unis « répondront par des mesures appropriées en proportion des décisions prises » par le gouvernement birman. Nyan Win, porte-parole de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), la formation politique d’Aung San Suu Kyi, a estimé pour sa part, lundi, avoir bon espoir que les centaines de membres du parti encoresous lesverroussoientbientôt libres. p Antoine Clapik 5 Royaume-Uni Le gouvernement enquête sur le ministre de la défense LONDRES. La pression s’est accrue sur le ministre de la défense du gouvernement de David Cameron, lundi 10 octobre. Liam Fox est accusé par la presse d’avoir laissé s’immiscer dans les affaires de l’Etat un ami proche. Adam Werritty, qui fut le colocataire de M. Fox et son témoin de mariage, aurait profité de ses liens avec le ministre de la défense pour se faire passer pour son conseiller, carte de visite à l’appui. Devant la Chambre des communes, M. Fox a reconnu que, depuis mai 2010, son ami de longue date avait été présent « en marge » de 18 voyages à l’étranger et qu’il l’avait reçu 22 fois dans ses bureaux du ministère de la défense. M. Fox a présenté des excuses aux députés mais il leur a assuré qu’Adam Werritty n’aurait tiré aucun profit matériel de ces nombreux déplacements. C’est ce que doit déterminer un rapport diligenté par le plus haut fonctionnaire britannique et secrétaire général permanent du 10 Downing Street, Sir Gus O’Donnell. – (Corresp.) p France-Palestine Mahmoud Abbas bientôt à Paris BOGOTA. Le ministre palestinien des affaires étrangères, Ryad Al-Maliki, a annoncé, lundi 10 octobre, à Bogota, une réunion entre le président palestinien Mahmoud Abbas et son homologue français Nicolas Sarkozy sur la demande d’adhésion d’un Etat de Palestine à l’ONU dans les prochains jours. Il a indiqué que la rencontre aurait lieu « le 13 ou le 14 » octobre. M. Abbas effectue une tournée internationale pour l’adhésion de l’Etat palestinien aux Nations unies. – (AFP.) Afghanistan Un rapport confirme la torture des prisonniers KABOUL. Les services de renseignement afghans torturent systématiquement leurs prisonniers dans certaines de leurs prisons, s’est alarmée, lundi 10 octobre, l’ONU dans un rapport. La mission de l’ONU en Afghanistan indique avoir des « preuves » que les détenus y sont pendus par les poignets aux murs, frappés avec des câbles électriques ou des bâtons pour obtenir des confessions et informations. – (AFP.) 6 0123 international & europe Mercredi 12 octobre 2011 A la tête du Liberia, Le nouveau gouvernement danois me M Johnson-Sirleaf assouplit la politique d’immigration Après dix ans de durcissement de la législation sur les étrangers, la nouvelle majorité de gauche brigue un supprime le permis à points pour le regroupement familial et le ministère de l’immigration deuxième mandat Stockholm Correspondance Auréolée du prix Nobel, la présidente est contestée dans un pays ravagé par la pauvreté S ’il est une qualité que même ses quinzeadversaires à l’élection présidentielle de mardi 11 octobre attribuent unanimement à la présidente sortante, Ellen Johnson-Sirleaf, c’est son pragmatisme. Elle vient de le confirmer au dernier jour d’une campagne électorale qualifiée d’« animée mais globalement pacifique » par l’organisation de défense des droits de l’homme américaine The Carter Center. Auréolée par le prestige du prix Nobel de la paix qui lui a été attribué le 7 octobre, aux côtés de deux autres femmes, Mme Johnson-Sirleaf s’est bien gardée d’évoquer une seule fois cet honneur durant sesmeetings de campagne. La petite-fille d’un puissant chef coutumier connaît la vacuité de l’argument sur ses terres natales. Cette diplômée de l’université américainede Harvard, âgée de 72 ans, préside un pays où « la moitié des électeurs sont illettrés, un tiers de la population ne peut pas se nourrir et vit dans une pauvreté abjecte », rappelle Charles Brumskine, l’un des seize candidats à l’élection présidentielle. « Rien ne les intéresse moins qu’un prix Nobel dont ils ne savent même pas ce que c’est », résume-t-il. Pour lui, ce prix montre surtout « l’énorme décalage » entre la façon dont la présidente Les observateurs annoncent un résultat serré. Mais personne ne s’avance à dire que la présidente sortante court à la défaite est perçue à l’étranger et celle dont elle l’est dans son propre pays. Ce ne sont pas les propos de campagne d’un candidat battu par avance mais bien l’expression d’un sentiment général. La course présidentielle (organisée le même jour que les scrutins législatifs et sénatoriaux) se joue sur un autre terrain, à des années-lumière de l’enceinte confinée et policée du comité Nobel de Stockholm. Un terrain sur lequel la nouvelle nobélisée pourrait bien retrouver face à elle, au second tour prévu pour le 8 novembre, Winston Tubman (70 ans), un ancien et austère fonctionnaire international. Egalement diplômé de Harvard, neveu du 19e président libérien William Tubman (1895-1971), membre de l’élite dite des Américano-Libériensconstituée par les descendants des esclaves affranchis aux Etats-Unis qui fondèrent le Liberia en 1847, M. Tubman peut compter sur la popularité de son colistier, George Weah. L’ex-star mondiale du football, conscient que son statut d’autodidacte en politique le handicapait, s’est mise un peu en retrait après son échec au second tour de la présidentielle de 2005. Six ans plus tard, le ticket Tubman-Weah promet de battre Ellen Johnson-Sirleaf, ironisant sur l’utilité électorale de son prix Nobel : « un lot de consolation » pour sa future défaite. Les observateurs annoncent un résultat serré. Pour autant, personne ne s’avance à dire que la présidente sortante court à la défaite. Certes, ses adversaires peuvent piocher à loisir dans le trou sans fond des espoirs déçus des Libériens. Mais en 2005, Ellen JohnsonSirleaf, première femme jamais élue présidente sur le continent noir, a hérité d’un pays pulvérisé par quatorze années de guerre civile (1989-2003) : 250 000 personnes tuées par les conflits (sur une populationtotale de quelque 3millions d’habitants), des dizaines de milliers de handicapés, des hordes d’enfants soldats à resociabiliser, des infrastructures ravagées, une économie à genoux… « Je n’ai pas de baguette magique », s’est défendue la « dame de fer » du Liberia durant la campagne en appelant les électeurs à la patience. Et malgré cela, son bilan est loin d’être négatif. Grâce à sa réputation de sérieux et de probité tirée de ses années passées dans le circuit de grandes banques ou d’institutions internationales et à la tête du ministère libérien des finances, le pays a attiré 16 milliards de dollars (environ 12 milliards d’euros) d’investissements étrangers au cours des cinq dernières années, notamment dans les secteurs des mines et du pétrole. Elle a obtenu l’effacement de 5 autres milliards de dollars de dette ; lancé les chantiers de construction de routes, d’écoles, d’hôpitaux ; enregistrera une croissance de 6,9 % du PIB en 2011 (supérieure à la moyenne des 5,2 % prévus pour les pays d’Afrique subsaharienne). Et surtout, le pays connaît la paix depuis maintenant huit années, même si les experts s’inquiètent de l’insécurité dans l’Est, frontalier de la Côte d’Ivoire. Tant de choses accomplies, donc, mais pas assez pour que la vie des Libériens en ait été radicalement changée. Pour preuve, le pays n’a gagné, depuis 2005, que deux places dans l’indice des Nations unies pour le développement humain et végète toujours dans les tréfonds de ce classement (162e sur 169). « Nous sommes maintenant capables de créer 20 000 emplois par an », a promis Ellen Johnson-Sirleaf, alors que seuls 15 % de la population disposent formellement d’un emploi. p Christophe Châtelot LIBERIA SIERRA L EO N E GU I N É E Voinjama Sanniquellie Gbarnga CÔTE D ' I VO I R E Monrovia Buchanan Zwedru Greenville Harper OCÉAN ATLANTIQUE 150 km Chef de l'Etat Ellen Johnson-Sirleaf Superficie 111 000 km2 Population (hab.) 3,7 millions Croissance 5,1 % IDH 0,3 (162e rang) Ressources Production agricole (77 % du PIB) Minerai de fer Minerai d’or Bois hévéa Diamant Pétrole Cuivre SOURCE : CIA - The World Factbook L e nouveau gouvernement danois, dirigé par la socialedémocrate Helle ThorningSchmidt et issu, lundi 3 octobre, de la victoire de la gauche aux élections législatives du 15 septembre, commence à prendre des premières décisions qui vont dans le même sens: celuid’un assouplissement de la politique d’immigration. Il s’agit d’un changement radical, car pendant dix années d’exercice du pouvoir par la droite, soutenue par l’extrême droite et parfois par les sociaux-démocrates, le Danemark a adopté les règles les plus strictes de l’Union européenne. « Auparavant, les étrangers étaient vus comme une menace et les fonctionnaires étaient entraînés à refuser les demandes de permis de séjour, explique au Monde Liv Holm Andersen, porte-parole sur l’intégration du Parti radical, l’un des deux petits partis de la nouvelle majorité de gauche qui a imposé cette nouvelle orientation.Il nes’agit pas d’ouvrir lesfrontières en grand, mais désormais, tout va changer. L’époque où l’extrême droite imposait le ton du débat dans ce pays est révolue. » Parmilesmesures prisesces derniers jours, certaines ont valeur de symbole. C’est le cas de la suppression du ministère de l’immigration, dont les fonctionnaires seront répartis entre ceux de la justice et des affaires sociales, de la simplification et de la transparence des critères pour la demande de permis de séjour, de citoyenneté et de regroupement familial, de l’abandon du rétablissement des contrôles aux frontières, tel qu’il avait été imposé ce printemps par l’extrême droite. Le système de permis à points pour le regroupement familial, qui excluait les gens sans formation supérieure et, de facto, de nombreux étrangers de pays ciblés, est supprimé. C’est ce texte qui avait commencé à faire basculer l’opinion et le Parti social-démocrate l’an dernier. Autres décisions à forte valeur symbolique, l’abrogation du terme de « ghettos », lancé officiellement pour traiter en priorité certains quartiers difficiles, et la nomination au poste de ministre de l’égalité, des cultes et des affaires nordiques d’un ministre radi- cal d’origine indienne. « Le monopole de DF [le Parti du peuple danois, extrême droite] est terminé, se félicite Bashy Quraishy, un vétéran de la lutte antiraciste au Danemark. C’est un grand jour pour les étrangers et pour les Danois progressistes, car DF a tenu le gouvernement en otage pendant dix ans. Même les deux partis de l’ancien gouvernement, les libéraux et les conservateurs, prennent désormais leurs distances vis-à-vis Ce changement de politique ne s’est effectué que sous la pression des deux petits alliés, au centre et à l’extrême gauche de l’extrême droite. C’est très positif. » Seul l’ancien ministre libéral de l’immigration, Soren Pind, s’est fendu d’un commentaire cinglant, déclarant que la nouvelle politique signifiait «l’ouverture des frontières et des caisses ». « Nous avions vraiment besoin de changement. Nous ne pouvions plus continuer dans cette rhétorique allant toujours vers plus de restrictions, estime Yildiz Akdogan, anciennedéputéesociale-démocra- te d’origine turque qui, lorsqu’elle était au Parlement jusqu’à cet automne,étaitl’unedesraresàcritiquer les décisions de son parti. Il était parfois très dur pour moi de défendre cette politique que je trouvais souvent stupide.» Ce changement de politique ne s’est effectué que sous la pression des deux petits alliés, l’un au centre et l’autre à l’extrême gauche, qui onttous deux affichélesplus fortes progressionsauxélectionslégislatives et dont le soutien est indispensable pour former une majorité de gauche. « Nous allons revenir à un traitement raisonnable de ces questions,noteJacobBjerregaard,porteparole des sociaux-démocrates sur lesquestionsd’immigrationetd’intégration. La politique sera plus juste et équilibrée mais nous maintiendrons la règle des 24 ans [le mariage avec un étranger est impossible si l’un des conjoints a moins de 24 ans] qui a empêché beaucoup de mariages forcés.» Le Parti social-démocrate, suivi plus tard par le Parti socialiste populaire, avait cédé à cette surenchère stigmatisant les étrangers par peur d’être jugés mous par l’électorat. Bon nombre des lois sur l’immigration ont ainsi été votées par les sociaux-démocrates. C’est la conséquence du débat qui a divisé le Parti social-démocrate alors au pouvoir durant les années 1990, lorsque les édiles de cette sensibilitépolitiquedesbanlieuesdeCopenhagueréclamaient des réactionsau fur et à mesure que l’immigration grossissait et que l’extrême droite ponctionnait leurs électeurs. Cette frange du parti l’a emporté à partir des années 2000. « Depuis quelques jours, c’est à nouveau plus facile d’être socialdémocrate au Danemark », avoue, soulagé, un proche du nouveau gouvernement. p Olivier Truc L’alternance au Danemark La majorité Le bloc de gauche a remporté les élections du 15 septembre avec 50,3 % des voix. Le Parti social-démocrate, (24,9 %, plus mauvais score depuis 1905), est allié au gouvernement avec le Parti socialiste populaire (9,2 %) et le Parti radical (9,5 %). L’unité (extrême gauche) a fait une percée avec 6,7 % des voix. L’extrême droite En 2001, les libéraux et les conservateurs n’avaient pu former un gouvernement, sous la direction d’Anders Fogh Rasmussen, qu’avec le soutien parlementaire de l’extrême droite, au prix d’un durcissement des lois concernant les étrangers. La première ministre danoise sociale-démocrate Helle Thorning-Schmidt, à Copenhague, le 4 octobre, lors de son premier discours au Parlement. THOMAS LEKFELDT/AP PHOTO/POLPHOTO L’Unicef reproche au Royaume-Uni d’avoir emprisonné massivement des mineurs après les émeutes d’août Les peines prononcées ont fait bondir de 8% le nombre de moins de 18 ans en détention Londres Correspondant L e Royaume-Uni détient le taux de détention le plus élevé de mineurs des pays d’Europe occidentale. Les émeutes ont encore aggravé le traitement réservé par les tribunaux aux enfants et aux adolescents. D’après des chiffres provisoires publiés par le ministère de la justice lundi 10 octobre, parmi les mineurs accusés d’avoir participé aux émeutes, un quart a été maintenu en détention en attendant la tenue d’un procès. Plus inquiétant encore selon l’Unicef (le Fonds des Nations unies pour l’enfance), parmi les adolescents privés de liberté à la suite des émeutes, 45 % n’avaient jamais eu maille à partir avec la justice avant les quatre jours de chaos du mois d’août, ni avertissement, ni condamnation. L’Unicef estime que ces placements en détention provisoire vont à l’encontre de la Convention pour les droits de l’enfant signée par le Royaume-Uni en 1991. D’après l’article 37, « les enfants ne devraient être incarcérés qu’en dernier recours », a rappelé hier l’Unicef. « Les gens qui ont été attaqués, volés et dont les biens ont été détruits ont eu peur (…), a reconnu la branche britannique de l’organisation. Pour autant, en réponse à ces événements, notre système judiciaire ne doit pas violer les droits des enfants. » Le rappel à l’ordre de l’Unicef au gouvernement de David Cameron a été salué par les organisations qui font campagne pour une réforme du système pénal britannique. Le directeur de la Howard League, Andrew Neil, estime que le taux élevé d’incarcération des mineurs impliqués dans les émeutes est le résultat direct d’une justice expéditive. « Les tribunaux ont fait défiler les suspects à toute vitesse, en oubliant de prendre en compte la spécificité des moins de 18 ans et en mettant de côté le principe de proportionnalité des peines », résume-t-il. Sévérité des peines La sévérité des peines infligées par les juges aux mineurs est jugée d’autant plus déplorable qu’elle met à mal une évolution positive aux yeux des défenseurs des droits des mineurs : la baisse progressive du nombre de détenus de moins de 18 ans observée depuis 2008. En avril, l’Angleterre et le Pays de Galles comptaient 1 890 mineurs incarcérés, soit un tiers de moins qu’il y a trois ans. La baisse observée était telle que l’agence chargée de la justice des mineurs, Youth Justice Board, avait prévu de fermer 700 places de prison réservées aux moins de 18 ans et de les convertir en cellules pour adultes. A la tête de la campagne « Out of trouble », lancée en 2007 pour réduire le nombre de mineurs emprisonnés au Royaume-Uni, Penelope Gibbs espère que les émeutes ne sont qu’un « couac temporaire » qui ne remettra pas en cause la forte baisse constatée depuis 2008. Deux mois après les émeutes, la sévérité des peines infligées contre les émeutiers a déjà entraîné une augmentation de 8 % de la population carcérale des mineurs par rapport au mois de juin. Mais les organisations de défense des mineurs comptent sur plus de clémence de la part des juges lors des audiences en appel. Jeudi 6 octobre, à Manchester, Joshua Penney, 17 ans, a vu sa peine divisée par deux. En première instance, le jeune homme au casier judiciaire vierge avait été condamné à huit mois de prison ferme pour avoir volé une bouteille d’alcool dans un supermarché au plus fort des émeutes. – (Intérim.) p 8 planète 0123 Mercredi 12 octobre 2011 Le défi de l’accès universel à l’énergie Alors que 1,3 milliard d’humains ne reçoivent pas l’électricité, une conférence internationale s’est tenue à Oslo Oslo Envoyé spécial P lus de 1,3 milliard de personnes – près de 20 % de la population mondiale – ne bénéficient pas, aujourd’hui, d’un accès à l’électricité. Ce chiffre a été présenté par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) à l’occasion de la conférence « Energie pour tous », qu’elle organisait, lundi 10 et mardi 11 octobre, à Oslo, avec la Norvège. Et cette situation a des conséquences économiques, sociales et sanitaires. L’une d’elles est que 2,7 milliards d’habitants de la planète ne disposent pas de moyens modernes et « propres » de cuisiner. L’utilisation de bois et de charbon de bois entraîne ainsi une pol- lutiondes habitations etde lanourriture,qui provoque près de 1,5million de morts par an, tout en accentuant la déforestation et les dérèglements climatiques. Face à ces problèmes, le déficit d’accès à l’énergie devient un chantier mondial, qui sera notamment au cœur des discussions de Rio + 20, la conférence sur le développement durable prévue en juin 2012 au Brésil. L’accès universel à une énergie propre est la clé pour répondre à « tous les défis globaux », a lancé, lundi à Oslo, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. La pauvreté, le changement climatique, la rareté de l’eau, la santé, la crise alimentaire ou encore l’égalité des chances pour les femmes dans la société : tous ces problèmes ont un lien Le sommet Rio+20 devra prendre des engagements La conférence des Nations unies sur le développement durable Rio+20, prévue en juin 2012 au Brésil, sera l’occasion pour la communauté internationale de prendre des engagements en faveur d’un « accès universel à l'énergie », selon son coordinateur, Brice Lalonde. Organisé vingt ans après le Sommet de la Terre, qui s’était déjà tenu à Rio de Janeiro, le sommet doit aboutir à une « vision d'ensemble » sur le développement, d’ici à 2030, selon l’ancien ministre de l’environnement français. Pour le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, Rio+20 sera aussi « l’occasion de mobiliser autour de l’initiative pour le développement d'une énergie propre » lancée par son organisation. fort avec l’absence d’accès à l’énergie,selon le diplomate, qui a raconté, au passage, avoir personnellement vécu cette pénurie dans sa jeunesse en Corée, où il étudiait « à la lumière de la bougie ». L’accès à l’énergie n’est pas inscrit dans les objectifs du Millénaire pour le développement définis dans le cadre des Nations unies en 2000. L’ONU a cependant désigné 2012 « Année internationale pour une énergie durable pour tous ». L’accès universel à l’énergie n’aurait pas de conséquences négatives importantes sur le climat. Il n’accroîtrait les émissions de CO2 que de 0,7 %, selon l’AIE. L’équipement des populations privées d’énergie est en marche, mais pas à un rythme suffisant, selon les intervenants à la conférence d’Oslo. L’AIE estime qu’en 2009 près de 9,1 milliards de dollars (6,7 milliards d’euros) ont été investis dans le monde pour développer l’accès à une « énergie moderne ». Cela a permis à 20 millions de personnes d’accéder à l’électricité et à 7 millions d’être dotées d’équipements de cuisine « sains », à base de biomasse. L’Agence a évalué les politiques d’aide à l’accès à l’énergie en cours ou annoncées. Les investissements attendus sont de l’ordre de 296 milliards de dollars entre 2010 et 2030, soit une moyenne annuelle de 14 milliards de dollars. Cela ne suffirapas pour assurer l’accès universel à l’énergie en 2030, d’après l’AIE, étant donné, notamment, l’augmentation de la population mondiale. « Il faudrait, pour y arriver, multiplier pratiquement par cinq le montant investi en 2009, et arriver à des investissements de l’ordre de Quelque 2,7 milliards d’habitants de la planète ne disposent pas de moyens modernes et «propres» de cuisiner 48 milliards de dollars (35 milliards d’euros) par an », affirme Fatih Birol, économiste en chef de l’AIE, qui ajoute qu’une telle somme « ne représenterait que 3 % des investissements mondiaux prévus dans l’énergie ». Reste à mobiliser des fonds puis à trouver, sur le terrain, le meilleur dispositif. Quelles formes de financement adopter pour diriger efficacement les milliards nécessaires au développement de l’accès uni- versel à l’énergie ? Les participants à la conférence d’Oslo avaient des avis variables sur la question. Sur les montants investis en faveur de l’accès à l’énergie en 2009, 34 % provenaient des institutions multilatérales, 30 % des pays concernés, 22 % d’acteurs privés et 14 % de l’aide bilatérale. Jens Stoltenberg, le premier ministre norvégien, a présenté une nouvelle plate-forme de partenariat international baptisée Energy +. Déjà très présente dans les initiatives internationales pour lutter contre la déforestation et ses effets négatifs sur le climat à travers le mécanisme REDD (Reducing Emissions from Deforestation and Degradation), la Norvège veut essayer de reproduire l’approche de ce dernier, c’est-à-dire un soutien financier dépendant du suivi et du contrôle des résultats obtenus par les pays aidés. Mais les difficultés de mise en place de REDD montrent qu’il faudra, pour Energy +, essayer de trouver des mécanismes simples et approuvés par tous. Une autre propositionqui émergeait à Oslo était l’association des financements publics et privés, l’idée étant d’attirer les fonds privés avec le levier de l’argent public. Cela dit, pour attirer les acteurs pri- vés, « il faut surtout des projets rentables commercialement, avec un modèle économique solide », soulignait Carlos Pascual, du département d’Etat américain. L’austérité qui pèse actuellement sur les finances publiques ne facilite pas les choses. Mais l’aide bilatérale ou multilatérale n’est qu’un des éléments qui permettent de faire prendre la greffe. Le jeune entrepreneur indienHarish Hande, dont la société « à vocation sociale » Selco équipe en systèmes d’énergie solaire foyers et entreprises en Inde, est critique envers ceux qui pensent qu’une augmentation des aides est une réponse suffisante. « Si l’Inde est arrivée aujourd’hui à de bons résultats dans sa campagne pour le développement de l’accès à l’énergie, c’est que, depuis plusieurs décennies, un tissu de banques rurales qui prêtent sur le long terme a été mis en place. Ce réseau n’existe malheureusement pas dans de nombreux pays d’Afrique », remarque-t-il. Près de 85 % des personnes privées d’accès à l’énergie dans le monde habitent dans des zones rurales, et plus de 95 % soit en Afrique soit dans les régions d’Asie en développement. p Bertrand d’Armagnac Romainville inaugure un système automatisé de collecte pneumatique des déchets L’installation, qui concerne 2600 logements et 5800 habitants de cette commune de Seine-Saint-Denis, constitue une première en France P lus de locaux à ordures, plus de pollution visuelle et olfactive,plus de camions poubelles obstruant les rues, mais une aspiration souterraine et invisible. Samedi 15 octobre, Romainville seralapremière commune françaiseà inaugurer un système automatisé de collecte pneumatique des déchets : 2 600 logements et 5 800 habitants de deux quartiers de cette commune de Seine-SaintDenis, en pleine rénovation urbaine, sont concernés. Au pied de leurs immeubles et sur la voirie, 106 bornes de collecte ont été installées, pour recueillir séparémentlesemballagesrecyclables et les déchets ménagers. Sous terre, quatre kilomètres de tuyaux achemineront les déchets vers un terminal. Le procédé est entièrement clos : les déchets triés et déposés par les habitants dans les bornes, fermées par des trappes, seront momentanément stockés dans des cuves. Lorsqu’un poids minimal sera atteint, les sacs seront aspirés, à une vitesse de 70 km/h, par la création d’un courant d’air dans le réseau, jusqu’au terminal. Les sacs y seront séparés de l’air « porteur » et les poubelles tomberont dans des compacteurs qui les compresseront à l’intérieur de conteneurs hermétiquement clos. L’air porteur sera filtré avant d’être relâché dans l’atmosphère. De là, une fois par jour, la collecte sera acheminée par camion vers un incinérateur ou un centre de recyclage, mais le nombre de kilomètres parcourus par les camions devrait être divisé par trois par rapport à un système classique. La commune de Romainville a confié le marché à Veolia Propreté, partenaire du suédois Envac, concepteur de la collecte pneumatique. La Suède pionnière L’opération est d’autant plus emblématique qu’elle concerne deux cités, Cachin et Gagarine, construites dans les années 1950, qui cumulaient tous les handicaps des banlieues sinistrées. Située près du cœur de ville, Cachin, avec ses grandes barres HLM, était totalement enclavée. Avec le soutien de l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), la voirie a été repensée, des barres d’immeubles détruites, des établissements publics réinstallés, pour tenter d’en faire un quartier « classique ». La France vient tardivement à ce système de collecte écologique. La première installation a vu le jour il y a cinquante ans, en Suède. La plupart des grandes villes sué- A Romainville, deux des 106 bornes de collecte des déchets, et, à droite, les tuyaux qui acheminent les sacs au terminal. NICOLAS KRIEF POUR « LE MONDE » Un réseau souterrain de collecte des ordures ménagères Rejet d’air Déchets ménagers Vanne d’entrée d’air TERMINAL DE COLLECTE Déchets recyclables Salle de filtration Cyclone BORNES DE COLLECTE SITUÉES DANS LA RUE OU DANS LES IMMEUBLES Evacuation des déchets par camion Turboextracteur Composteur Conteneur Les déchets sont aspirés à 70 km/h par un réseau de conduits jusqu’au terminal de collecte Vannes de stockage SOURCE : VEOLIA doises en sont équipées. Ce fut, ensuite, au tour de l’Europe du sud : en 1992, à l’occasion des Jeux olympiques, Barcelone s’est dotée du système, imitée par Bilbao, Valence, Séville, Carthagène. Envac totalise 600 installations dans le monde. En pratique, ce système de collecte peut accueillir jusqu’à quatre flux de tri. Seuls le verre et les déchets encombrants en sont exclus, pour éviter d’endommager les canalisations. En France, les communes ont hésité face au coût d’investissement. Narbonne avait envisagé de recourir à l’innovation suédoise avant de se désengager. A Romainville, l’investissement est de 8,3 millions d’euros. Mais la ville ne prendra en charge que 2,5 millions, le reste étant financé par l’agglomération et des subventions, notamment de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Pour les usagers, la note devrait diminuer, grâce à l’économie effectuée sur les sorties de poubelles et l’entretien des bacs roulants, assurés par des gardiens ou des sociétés spécialisées. La mairie estime que la collecte pneumatique pourrait générer pour les copropriétés riveraines une économie de charges allant jusqu’à 120 euros par an. « Du point de vue de l’impact sur l’environnement et de la qualité de l’habitat, les gains ne sont pas dis- cutables, estime le maire (DVG) de Romainville, Corinne Valls. Deux tiers de flux de camions en moins, moins de gaz à effet de serre, la suppression pour les immeubles de locaux de poubelles, lieux de désagréments, la suppression pour les ouvriers, derrière les camions bennes, de tâches pénibles, ingrates et accidentogènes, et un meilleur tri sélectif par une disponibilité du service vingt-quatre heures sur vingtquatre, 365 jours par an. » L’édile espère étendre le nombre de logements concernés. Le terminal peut accueillir les déchets générés par 6 000 logements. Dès 2013, la commune voisine des Lilas devrait se relier au dispositif. D’autres chantiers débutent ou sont en cours d’achèvement en Ilede-France : l’écoquartier du fort d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-deSeine) ou celui des Batignolles, à Paris. A Vitry-sur-Seine (Val-deMarne), c’est une filiale de Suez Environnement, Sita, qui devrait réaliser son premier chantier de ce type. Seul impératif : un sous-sol pas trop encombré. p Sophie Landrin 0123 planète Mercredi 12 octobre 2011 Avec le projet Futurol, la France mise sur les biocarburants de seconde génération 9 Marée noire Une «catastrophe écologique» en cours sur la côte néo-zélandaise Une unité pilote de bioéthanol extrait de résidus végétaux et de cultures non alimentaires, inaugurée dans la Marne, doit déboucher sur une production industrielle à l’horizon 2016 Pomacle-Bazancourt (Marne) Envoyé spécial D ans de vastes hangars sont stockés des bottes de paille, des tiges de miscanthus (sorte de roseau parfois appelé « herbe à éléphant »), des rondins de saule et de peuplier. D’autres bâtiments sont réservés aux copeaux et résidus de bois, aux déchets agricoles tels que la pulpe de betterave et la bagasse de canne à sucre, ou au switchgrass (une grande herbacée sauvage). Il y a là toute la palette de la biomasse lignocellulosique susceptible d’être transformée en carburant « vert ». C’est cette transformation que va expérimenter l’usine pilote Futurol, inaugurée mardi 11 octobre, sur la zone d’activité des communes de Pomacle et Bazancourt, dans la Marne. Fédérant une dizaine de partenaires publics et privés, dont l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), le projet, d’un coût de 76,4 millions d’euros (financés à 40 % par Oseo, établissement public de soutien à l’innovation), marque l’entrée de la France dans le champ émergent des biocarburants de deuxième génération, extraits de cultures non alimentaires. Il s’agit, à ce stade, d’un démonstrateurde 5 000 m2, capable de produire 180 000 litres de bioéthanol par an. Vingt fois moins que le prototype industriel qui doit lui succéder en 2015, sur l’un des sites du groupe sucrier français Tereos, à Lillebonne (Seine-Maritime) ou à Origny-Sainte-Benoîte (Aisne). Et 1 000 fois moins que les unités de taille commerciale qui pourraient voir le jour à partir de 2016. D’ici là, la centaine de chercheurs associés au programme vont tester en grandeur réelle, en Plusieurs « démonstrateurs » en préparation en France Futurol n’est pas le tout premier démonstrateur français de production de biocarburants de 2e génération. Il existe déjà, sur le site de Pomacle-Bazancourt, un pilote de la société CIMV intégré au programme européen Biocore, mais il est consacré à la valorisation de la biomasse végétale non seulement en carburants, mais aussi en pâte à papier, plastiques, colles ou additifs alimentaires. Plusieurs autres projets, BioTfuel, Gaya et Syndiese, visant à produire du biodiesel ou du biométhane à partir de biomasse lignocellulosique, devraient se concrétiser en 2013. La France se replace ainsi dans une course scientifique et industrielle encore très ouverte. Plus de 150 démonstrateurs sont déjà en exploitation ou en projet dans le monde, notamment aux EtatsUnis, mais aucun n’a atteint le stade de la production industrielle. les optimisant, chacune des étapes du processus de production mis au point en laboratoire. Cela pour les différents types de végétaux utilisés. La matière première, décrit Benoît Trémeaux, secrétaire général de Futurol, est d’abord broyée, pour être rendue homogène. Elle Il s’agit, à ce stade, d’un démonstrateur de 5 000 m2, capable de produire 180 000 litres de bioéthanol par an circule ensuite de cuve en cuve, où elle subit un prétraitement thermique ou chimique, puis une hydrolyse en présence d’enzymes qui cassent les chaînes complexes de la cellulose et de l’hémicellulose en molécules simples. Le mélange est alors mis à fermenter avec des levures qui le convertissent en alcool. L’éthanol est enfin obtenu après un passage en colonne de distillation. « L’originalité de notre approche est sa polyvalence, explique M. Trémeaux. L’utilisation de matières premières diversifiées (résidus agricoles, coproduits forestiers, taillis à rotation courte, plantes dédiées) permettra aux futurs sites de production de s’approvisionner localement, en toute sai- son. C’est un gage de viabilité économique et de limitation de l’impact sur l’environnement. » L’un des obstacles auxquels se heurtent les biocarburants de deuxième génération est en effet celui de la disponibilité de la ressourcevégétale: quandil s’agituniquement de paille, par exemple, cette ressource peut être compromise par une sécheresse. D’où l’importance d’une diversification. Mais la filière doit aussi démontrer sa rentabilité. Car les investissements sont lourds et les prix de revient très supérieurs à ceux des agrocarburants de première génération, dont le coût avoisine aujourd’hui, pour le bioéthanol, 50 centimes le litre. « La moitié du chemin est faite, assure Dominique Dutartre, président de Futurol. Depuis le démarrage du projet, le coût de revient a été divisé par deux. Il faut encore le réduire de moitié, en gagnant sur tous les postes de la chaîne de production, pour devenir compétitif. » Reste à établir le bilan environnemental des carburants verts de deuxième génération. Bien que ceux-ci aient l’avantage, par rapport aux agrocarburants de première génération, de ne pas mettre en concurrence cultures énergétiques et cultures alimentaires, ils ne s’imposeront que s’ils font la démonstration qu’ils sont aussi, en terme d’émissions de gaz à effet de serre, plus vertueux. p Pierre Le Hir Entre 130 tonnes et 350 tonnes de fioul lourd se sont déjà échappées du Rena, le porte-conteneurs battant pavillon libérien qui s’est échoué, le 5 octobre, sur le récif Astrolabe, à une vingtaine de kilomètres du port de Tauranga, et des nappes de pétrole ont atteint, lundi 10 octobre, la côte néo-zélandaise. Des boulettes de pétrole ont été retrouvées sur la plage de Mount Maunganui (photo), un site touristique de la baie de Plenty abritant baleines, dauphins et oiseaux marins. Les autorités redoutent que la coque du bâtiment, qui contient 1 700 tonnes de fioul, réparties dans quatre cuves principales dont l’une fuit, se brise. Les opérations de pompage engagées en fin de semaine dernière ont été contrariées par l’arrivée d’une tempête, avec des vagues de 5 mètres de haut et des vents violents qui ont obligé à évacuer les trente-six spécialistes intervenant sur le Rena. « Il s’agit de la catastrophe écologique maritime la plus grave qu’ait connue la Nouvelle-Zélande », a déclaré, mardi, le ministre de l’environnement néo-zélandais, Nick Smith. – (AFP.) p JASON EGNEW/AFP Climat L’Union européenne reste ouverte à la prolongation du protocole de Kyoto Les ministres de l’environnement, réunis en conseil à Luxembourg, lundi 10 octobre, pour arrêter la position officielle de l’Union européenne (UE) lors de la conférence des Nations unies sur le climat prévue fin novembre à Durban (Afrique du Sud), ont confirmé que l’UE restait ouverte à la prolongation du protocole de Kyoto au-delà de 2012. Les Vingt-Sept posent toutefois une condition de taille : que l’ensemble des pays signataires de la convention climat des Nations unies s’engagent, à terme, dans un traité contraignant. Ils souhaitent également que la seconde période de Kyoto ne se prolonge pas au-delà de 2020. france 10 0123 Mercredi 12 octobre 2011 La primaire du PS et du PRG Radiographie électorale d’un scrutin inédit Dimanche 9octobre, Martine Aubry a séduit un électorat plus urbain et plus à gauche que celui de François Hollande Ausoir du premier tour de la primaire, François Hollande a dépassé la majorité absolue dans six départements : la Corse-du-Sud, l’Aude, leCantal etles trois départements de la région Limousin, parmilesquels la Corrèze, dont il préside le conseil général et où il a obtenu 86 % des voix. La France de M. Hollande est avant tout celle des villes petites et moyennes situées à l’ouest d’une diagonale Le Havre-Marseille et dans le quart nord-est du pays. UneFrance de vieux bastionssocialistes, mais aussi d’anciennes terres de mission où le PS s’est solidement implanté depuis le dernier tiers du XXe siècle, dans l’ouest et le centre en particulier. A l’échelle départementale, le vote en faveur du député de la Corrèze est plus souvent celui des villes de second rang que celui des métropoles. Dans le Rhône, par exemple, M. Hollande est devancé par Mme Aubry à Lyon, malgré le soutien du maire, Gérard Collomb. Il est en revanche en tête à Villefranche-sur-Saône et à Tarare. A Metz, Mme Aubry le devance de 3 points, mais à Briey, Toul et Lunéville, les trois sous-préfectures de Meurthe-et-Moselle, M. Hollande est largement en tête, d’au moins 15 points. Très bien implanté dans les villes moyennes, le député de la Corrèzel’est aussi dans les beaux quartiers des grandes métropoles. C’est vrai à Paris ou à Lyon. Mais aussi à Marseille où, dans les 7e, 8e et 9e arrondissements, il creuse l’écart avec la maire de Lille. Cela ne veut pas dire, pour autant, qu’il n’est que le candidat d’un électorat aisé. Par exemple, dans des communes populaires de Seine-et-Marne, comme Lognes, Noisiel ou Savigny-le-Temple, François Hollande totalise autant de voix que Martine Aubry et Arnaud Montebourg réunis. Aubry forte dans les grandes villes Si François Hollande a l’avantage dans les villes moyennes, Martine Aubry est, sans conteste, la candidate des grandes métropoles. Dans sa ville de Lille, elle a avoisiné, dimanche, les 70 %. A Paris, Grenoble et Rouen, villes dont les maires la soutiennent, elle arrivelargement en tête, tout comme à Strasbourg et Lyon, municipalités socialistes dont les maires sont partisans de François Hollande. Au soir du premier tour, Mme Aubry n’a dépassé la majorité absolue que dans un seul département, le Nord, où elle a obtenu 55 % des suffrages (contre 26 % à M. Hollande). A la différence de son rival, ses zones de force sont concentrées dans la vallée de la Seine, la région lyonnaise ainsi qu’en Ile-de-France. Dans ces régions urbanisées et industrialisées, les deux candidats sont souvent au coude-à-coude. C’est généralement dans les territoires les plus à gauche – et aussi là où le vote écologiste est le plus fort – que Mme Aubry creuse l’écart avec M. Hollande. Dans le Finistère, par exemple, le « Trégor rouge » lui est en grande partie acquis. A Morlaix, représenté à l’Assemblée nationale par son amie Marylise RÉSULTATS DES DEUX CANDIDATS ARRIVÉS EN TETE AU PREMIER TOUR DE LA PRIMAIRE PAR DÉPARTEMENT, en % (sur 94 % des bureaux de vote) moins de 20 de 20 à 29 de 30 à 39 François Hollande plus de 50 de 40 à 49 * pas de données Martine Aubry Pas-de-Calais Pas-de-Calais Nord Nord Somme SeineMaritime Calvados Manche Sarthe LoireAtlantique Maine-etLoire Loiret Loir-etIndre- Cher et-Loire CharenteMaritime Charente Hauts-de-Seine Landes PyrénéesAtlantiques HauteGaronne HauteSavoie HauteLoire Ardèche Drôme Lozère Tarn Hérault Polynésie française La Réunion Mayotte Nouvelle-Calédonie * Lebranchu, la maire de Lille devance ainsi François Hollande de 11points. A quelques kilomètres au nord, dans le Léon, politiquement plus conservateur, la situation est différente: dans le canton de SaintPol-de-Léon, dont le conseiller général est divers gauche, Mme Aubry a 10 points de retard sur M. Hollande. Un peu plus à l’ouest, à Plouzévédé, canton tenu par la droite depuis toujours, l’avance de M. Hollande est de 20 points. Montebourg face à la France du «non» Plébiscité en Saône-et-Loire, dont il préside le conseil général depuis 2008 et où il a recueilli 65 % des voix au premier tour, Arnaud Montebourg a réalisé ses meilleures percées dans l’est et le sud-est de la France. Crédité de 17 % à l’échelle nationale, il dépasse les 20 % dans une quinzaine de départements, situés principalement en Bourgogne, dans la région RhôneAlpes et en Provence - Alpes-Côted’Azur. Le chantre de la « démondialisation » a séduit, dimanche, un électorat très hétérogène. Dans un * Loir-etIndre- Cher et-Loire Charente HauteVienne Côte-d'Or Landes Var PyrénéesAtlantiques HauteCorse * Français de l’étranger département comme le Vaucluse, où il est 5 % au-dessus de sa moyenne nationale, il fait ainsi ses meilleurs scores dans des bourgs où le Front national atteint ses niveaux parmi les plus élevés, comme Camaret-sur-Aigues, Cheval-Blanc ou Robion. A Orange, ville gouvernée par l’extrême droite depuis 1995, il arrive en deuxième position, derrière M. Hollande. Dans les Hautes-Alpes, le vote en faveur d’Arnaud Montebourg est de nature différente. Dans ce département où l’UMP est majoritaire, le député de Saône-et-Loire dépasse les 30 % dans plusieurs cantons ruraux très enclavés et tenus par la droite. A Briançon, où la mairie est socialiste, il est en revanche nettement distancé par M. Hollande et Mme Aubry. Seul candidat à avoir voté « non » au référendum européen de 2005, M. Montebourg a, d’une façon générale, réalisé des scores trèsélevésdans des territoiresfrappés par la désindustrialisation ou menacés de désertification. Bien qu’ayant peu fait campagne dans les banlieues des grandes agglomérations, il y a obtenu, dimanche, des scores assez impor- Ces chiffres masquent toutefois de fortes disparités. Dimanche, deux Paris se sont clairement opposés : c’est dans les arrondissements les plus à gauche que Martine Aubry et Arnaud Montebourg ont réalisé leurs meilleurs scores, Les arrondissements les plus à gauche ont enregistré une forte participation à la primaire du 9octobre et dans les arrondissements les plus à droite que François Hollande et Manuel Valls ont obtenu leurs meilleurs résultats. Martine Aubry, ainsi, enregistre ses meilleures performances dans les 10e, 11e, 18e, 19e et 20e arrondissements. Dans ces bastions de gauche, la maire de Lille obtient des scores compris entre 39,3 % HauteSavoie Savoie Lozère Ardèche Drôme Tarn Hérault HautesAlpes Alpes-de-Haute- AlpesVaucluse Provence Maritimes Gard Bouchesdu-Rhône Var HauteCorse Aude HautesPyrénées Ariège Corsedu-Sud Pyrénées-Orientales Guadeloupe La Réunion Mayotte Guyane Martinique Nouvelle-Calédonie * tants. En revanche, contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, il n’a pas réalisé de percée significative dans des bastions communistes. Dans les deux départements présidés par le PCF, l’Allier et le Valde-Marne, ses résultats sont à peine supérieurs à sa moyenne nationale. Royal ne séduit pas les quartiers populaires Pour Ségolène Royal, le résultat estsévère:en2006, les110000suffrages qu’elle avait obtenus auprès desadhérents du PS luiavaient permis d’être investie dès le premier tour avec 60 % des voix. Cette fois, les 160 000 électeurs qui ont voté pour elle représentent moins de 7 % des sympathisants de gauche ayant participé au premier tour de la primaire. C’est en Poitou-Charentes, dont elle préside le conseil régional depuis 2004, que Ségolène Royal enregistre ses meilleurs résultats. Même là, cependant, l’ex-finaliste de la présidentielle 2007 ne triomphe pas : avec 15 % des voix, elle est largement devancée par François Hollande, légèrement distancée * Polynésie française (dans le 18e) et 41,8 % des voix (dans le 20e). Ces arrondissements, où se mêlent classes moyennes et classes populaires, sont également ceux où Arnaud Montebourg est le mieux placé. Comme Martine Aubry, c’est dans le 20e arrondissement que le député de Saône-et-Loire fait son meilleur résultat (18,7 % des voix). Ces arrondissements de gauche sont aussi ceux où la participation a été la plus élevée : elle y a dépassé 15 % du corps électoral, le maximum ayant été atteint dans le 10e arrondissement, où 18,5 % des électeurs ont voté. François Hollande, de son côté, obtient ses meilleurs scores dans les arrondissements huppés de l’ouest parisien. Le député de la Corrèze frôle ainsi les 40 % dans le 8e, dépasse légèrement les 39 % dans le 16e et avoisine les 38 % dans les 6e et 7e arrondissements. Dans ces mêmes arrondissements, Manuel Valls a d’excellents résultats : dans le 16e, le mai- * Français de l’étranger Saint-Pierre-et-Miquelon par Martine Aubry, et fait presque jeu égal avec Arnaud Montebourg. Se présentant comme la «porteparole du peuple qui souffre », Mme Royal a misé, plus que tous les autres candidats, sur la mobilisation des quartiers populaires, espérant y réaliser d’aussi bons scores qu’en 2007. Le pari est manqué, même là où elle a fait campagne et malgré l’accueil souvent très chaleureux qui lui a été réservé. Par exemple à Vaulx-en-Velin (Rhône), où elle était arrivée en têtedu premiertour de laprésidentielle avec 40 % des voix, et où elle s’est rendue le 13 septembre, seulement 9 % des sympathisants de gauche ont souhaité qu’elle les représente de nouveau en 2012. Dans cette municipalité communiste de la banlieue lyonnaise, M. Hollande et Mme Aubry sont arrivés en tête, avec des scores comparables à leur moyenne nationale. Valls en pointe dans les quartiers aisés Sans surprise, Manuel Valls a fait un très bon score dans son fief. A Evry, ville dont il est maire depuis 2001, il arrive ainsi large- A Paris, l’Est vote Aubry, l’Ouest préfère Hollande PARIS n’est pas la France. Dimanche 9 octobre, la capitale a voté plus massivement (13,4 % de participation, soit 8 points de plus que la moyenne nationale), mais différemment du reste du pays. Avec 37,5 % des voix, Martine Aubry y arrive en tête – six points de plus que sa moyenne nationale. Avec 31,7 % des voix, François Hollande est deuxième – 7 points de moins qu’ailleurs. Troisième avec 16,2 % des voix, Arnaud Montebourg obtient un résultat très proche de celui qu’il fait dans l’ensemble du pays. En revanche, l’ordre d’arrivée entre Manuel Valls et Ségolène Royal est inversé. A Paris, le député de l’Essonne a près de trois points de plus que la présidente du conseil régional de Poitou-Charentes (8,4 % des voix contre 5,7 %) : à l’échelle nationale, elle le devance d’un point (7% contre 6 %). Dans la capitale, JeanMichel Baylet obtient un score deux fois inférieur à sa moyenne nationale: 0,5% des voix. Jura Isère HauteLoire Aveyron HauteGaronne Territoire de Belfort Loire Rhône Puy-deDôme Corsedu-Sud Saint-Pierre-et-Miquelon Saône-etLoire Ain Cantal Tarn-etGaronne Gers Bouchesdu-Rhône Doubs Creuse Lot Lot-etGaronne Haut-Rhin HauteSaône Allier Bas-Rhin Vosges HauteMarne Nièvre Corrèze Val-de-Marne Aube Indre Gironde Hauts-de-Seine Meurtheet-Moselle Yonne Cher Dordogne HautesAlpes PyrénéesOrientales Martinique Seine-etEssonne Marne Loiret Paris Ariège Guyane Eure-etLoir DeuxSèvres Vienne CharenteMaritime AlpesAlpes-de-HauteVaucluse Provence Maritimes Gard Guadeloupe Maine-etLoire Savoie Aude HautesPyrénées Seine-Saint-Denis Loire Rhône Aveyron Gers LoireAtlantique Moselle Meuse Marne Yvelines Ille-et- Mayenne Vilaine Sarthe Vendée Isère Cantal Tarn-etGaronne Morbihan Aisne Ardennes Oise Val-d'Oise Eure Orne Jura Ain Calvados Côtes-d’Armor Territoire de Belfort Doubs Saône-etLoire Puy-deDôme Finistère Haut-Rhin HauteSaône Creuse Lot Lot-etGaronne Val-de-Marne Bas-Rhin Vosges HauteMarne Nièvre Cher Dordogne Gironde Meurtheet-Moselle Côte-d'Or Allier HauteVienne Manche Moselle Meuse Yonne Corrèze Paris Aube Indre DeuxSèvres Vienne Vendée Seine-Saint-Denis Eure-etLoir Mayenne Ille-etVilaine SeineMaritime Ardennes Marne Yvelines Seine-etEssonne Marne Côtes-d’Armor Morbihan Val-d'Oise Eure Orne Finistère Aisne Oise Somme INFOGRAPHIE LE MONDE Hollande, le vote des villes moyennes François Hollande séduit l’ouest, Martine Aubry le nord SOURCE : PARTI SOCIALISTE M ardi11 octobreendébut de matinée, deux jours après le premier tour de la primaire socialiste, la haute autorité, chargéed’encontrôlerlebondéroulement, n’avait validé les résultats que de 8 992 bureaux de vote, sur un total de 9 502 (soit 2 560364 bulletins). A défaut d’une photographie complète, il est néanmoins possible de dresser une carte assez précise des forces et des faiblesses de chacun des six candidats. ment en tête, avec 39,6 % des voix, devant François Hollande (22,8 %) et Martine Aubry (18,5 %). Dans la première circonscription de l’Essonne, dont il est député depuis 2002, il est également en pole position, même s’il creuse moins nettement l’écart avec ses concurrents. Elu dans une banlieue difficile, M.Valls n’a pas du tout été plébiscité dans les quartiers populaires. Au contraire : c’est dans les quartiers huppés des grandes villes, où la gauche est mal implantée, qu’il fait quelques-uns de ses meilleurs scores. A Paris, il dépasse ainsi les 15 % des voix dans les 7e, 8e et 16e arrondissements ; et à Neuilly-surSeine (Hauts-de-Seine), ses 23 % le hissent en deuxième position, derrière François Hollande. S’il tire profit, auprès descatégories socioprofessionnelles supérieures, d’un discours « social-libéral » valorisant la liberté d’entreprendre, fustigeant l’assistanat et célébrant un certain pragmatisme, M. Valls est en revanche, des cinq candidats du PS, celui qui a le moins séduit la France des petites villes et des campagnes. C’est dans le Cantal, la Corrèze, la Creuse et la Dordogne qu’il est à la peine. Baylet rencontre unfaible écho re d’Evry totalise 18,2 % des voix, dans le 7e et le 8e, il frôle les 17 %. Si les Parisiens ont voté dans le même sens que leur maire et sa première adjointe, Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo, tous deux soutiens de Martine Aubry, ils n’ont pas, en revanche, voté systématiquement comme le maire de leur arrondissement. Dans le 18e arrondissement, Daniel Vaillant a ainsi appelé à voter pour François Hollande : le député de la Corrèze y est devancé de 10 points par la maire de Lille. Il devait d’ailleurs s’y rendre, mardi 11 octobre, pour mobiliser les électeurs en sa faveur en vue du second tour. Dans le 4e arrondissement, la maire, Dominique Bertinotti, était la directrice de campagne de Ségolène Royal : avec 5,8% des voix, la présidente du conseil régional de Poitou-Charentes a obtenu dans cet arrondissement, dimanche, un score exactement identique à sa moyenne parisienne. p T. W. Si la métropole avait voté comme Saint-Pierre-et-Miquelon, JeanMichel Baylet serait qualifié pour le second tour. Le président du Parti radical de gauche (PRG) y réalise son meilleur score : 39 % des voix, devant M. Hollande et Mme Aubry. Mais cela ne représente que 106 voix. Au total, seuls 15 000 électeurs ont voté, dimanche, pour M. Baylet. L’honneur est sauf : c’est dans le Tarn-et-Garonne, département dont il est sénateur et président du conseil général, qu’il enregistre son meilleur résultat en métropole (15 %). Ailleurs, ses scores sont modestes : à l’exception de la Haute-Corse, où il totalise 14 % des voix, les départements où le PRG est bien implanté ont peu voté pour lui. Même dans les terres de tradition radicale du sud-ouest, il ne dépasse pas 2 % des voix. p Thomas Wieder n Sur Lemonde.fr Les cartes détaillées des résultats du premier tour de la primaire 0123 Politique Mercredi 12 octobre 2011 11 La primaire du PS et du PRG AubryetHollandecajolent leséliminésdupremiertour, maisnesefontplusdecadeaux Très courtisé, Arnaud Montebourg fait monter les enchères entre les deux finalistes. Ségolène Royal entend encore peser sur la campagne Débat en direct, mercredi, sur France 2 et Lemonde.fr Les deux candidats finalistes pour la primaire, Martine Aubry et François Hollande, participeront, mercredi 12 octobre à 20 h 35, à un débat sur France 2, en partenariat avec Le Monde. Ce débat sera diffusé et commenté en direct sur Lemonde.fr, avec les analyses et commentaires de la rédaction. gepossible»,a-t-ilsoulignésurFrance3.Sonéquipeprésentedéjàl’addition: « En reportant de façon arithmétique la moitié des voix de Royal et un tiers de celles de Montebourg, on va finir à 53% contre 47 %», veut croire André Vallini, proche de M. Hollande. Calcul contesté par l’équipe de Mme Aubry : « La science électorale, ce n’est pas la même chose que la science mathématique », dément Christophe Borgel. Mme Royal à « équidistance » Le suspense demeure. Mme Royal, qui a rencontré M.Montebourg et Mme Aubry, et qui s’est entretenue avec M. Hollande, se situe toujours à « équidistance » entrel’ancienetlanouvellepremière secrétaire, indique son équipe. Elledevraitdélivrerdansles48heures « des consignes claires ». Avec le souci de ne pas disparaître. Mais c’est surtout M. Montebourg qui semble en mesure de déverrouiller un scrutin serré. Le député de Saône-et-Loire le sait, qui a l’intention de faire fructifier son capital. Le héraut de la démondialisation, pour qui les deux « impétrants » représentent « les deux faces de la même pièce », travaille à la rédaction d’une lettre ouverte leur demandant de prendre position surdes points de son programme. «Nous publierons les échanges de correspondance, a-t-il précisé. Je préfère des engagements clairs et écrits. » Le cœur de M.Montebourg, qui pourrait ne pas prendre position, balance, comme celui de ses équipes. Aquilino Morelle, son directeur de campagne, résume : « Un tiers des troupes sont pour ne pas prendre position, un autre estime qu’il faut voter Aubry car elle est plus proche de nous et un dernier tiers se prononce pour Hollande car il peut rassembler la gauche.» Ce dernier a multiplié les signes àl’égarddudéputédeSaône-et-Loire. « Moi, j’entends les préoccupations des électeurs d’Arnaud Montebourgsurlamondialisation,lesdérives de la finance, a dit M. Hollande, qui s’est entretenu lundi avec M.Montebourg. On ne va pas mettre toutes les banques sous tutelle, maiscellesquidemandentlaparticipation de l’Etat doivent être sous contrôle partiel de l’Etat. » La tension monte entre les deux finalistes. Martine Aubry, qui effectuait, mardi, un raid éclair dans la Creuse, où se rend le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, continue d’insister sur le flou supposé des positions de son adversaire : « J’ai dit Arnaud Montebourg, ici dimanche soir, après le vote, travaille à une lettre ouverte aux deux finalistes, leur demandant de prendre position sur des points de son programme. CHRISTOPHE MORIN/IP3 POUR « LE MONDE » qu’ilavaitchangéd’avissurl’éducation nationale, il a changé d’avis sur [l’abrogationdelaloisurletéléchargement illégal] Hadopi, sur la règle d’or(…). Je continueraià lui poser ces questions », a insisté la maire de Lille sur TF1. « Le problème n’est pas d’être coriace ou pas coriace, a répli- qué François Hollande. C’est d’être crédible ou pas crédible.» M.Hollandesemblerésoluàcroiser le fer. « Jusqu’ici, on avait évité de répondre aux attaques, précise Stéphane Le Foll. Maintenant, plus question de laisser les procès continuer à se répandre. » Démonstra- tion du sénateur de l’Isère André Vallini : « Martine a un vrai défaut de crédibilité pour la présidentielle, et une personnalité agressive qui ne peut pas rassembler. » Le débat entre les deux finalistes, mercredi sur France 2, s’annonce cordial. p David Revault d’Allonnes EDF 552 081 317 RCS PARIS, 75008 Paris – R éunions à la chaîne, discussions en série entre finalistes et éliminés, appels du pied des premiers aux seconds… Les grandes manœuvres ont pris un tour intense, lundi 10 octobre, au lendemain du premier tour de la primaire. Après Manuel Valls, rallié dès dimanche soir à François Hollande avec ses 6 % des voix, JeanMichel Baylet (moins de 1 %), patron des radicaux de gauche, a lui aussi pris parti pour le député de Corrèze. Le président du PRG a fait «le choix de la proximité politique», indique son équipe. Même si les échanges auraient surtout porté sur « des propositions de circonscriptions pour le PRG » aux législatives, souligne Stéphane Le Foll, lieutenant de M.Hollande. Maisl’essentiel estailleurs.Dans lesparts du marché électoraldésormais détenues par Ségolène Royal (7 %) et surtout Arnaud Montebourg (environ 17 %). Fort de sa pôle position, avec 39,2 % des suffrages, contre30,7%àMartineAubry,FrançoisHollandepense êtreenmesure d’aimanter ces électeurs. « Avec près de 40 %, je suis largement en tête, j’ai neuf points d’écart et la capacité de pouvoir rassembler pourgagnersur laplusgrandemar- Les écologistes s’invitent dans le second tour A L’OCCASION des premières journées parlementaires d’Europe Ecologie-Les Verts, qui se déroulaient lundi 10 octobre à Rambouillet (Yvelines), les Verts ont montré qu’ils avaient lu Gramsci et en avaient saisi les conclusions. «Nous avons la majorité culturelle», a assuré Cécile Duflot, secrétaire nationale du parti, avant d’évoquer « le chemin de croix » qu’est toujours, pour les écologistes, l’accès à l’Assemblée nationale. Pour passer de la «majorité culturelle» au pouvoir tout court, face à une «social-démocratie qui a trouvé ses limites», il faut frapper fort. Frapper fort : c’est la leçon que l’état-major d’EE-LV a tiré de la primaire socialiste. L’écart moins net que prévu entre les deux principaux candidats leur permet de faire monter les enchères, et ils ne s’en privent pas. Le ton avait été donné un peu plus tôt par Eva Joly, qui avait ironisé sur les « vieilles formations », avant de lancer un très applaudi « le vrai changement, c’est nous ! ». Avis à la social-démocratie agonisante : EE-LV leur prépare une addition salée. Martine Aubry a eu, si l’on en croit les dirigeants verts, la préférence de leurs militants qui sont allés voter mais, quel que soit le candidat investi, les Verts n’ont pas d’état d’âme. Harlem Désir, premier secrétaire par intérim du PS, venu assister à une table ronde sur le rassemblement à gauche pour 2012, n’a pas tardé à s’en apercevoir. La primaire est certes un succès, mais la personnalisation qu’elle induit n’enthousiasme pas leurs partenaires potentiels. Harlem Désir choisit d’éviter ce terrain pour recentrer le débat : « Quel que soit le résultat du deuxième tour, a-t-il affirmé, le candidat sera bien au rendez-vous avec les écologistes. » Cécile Duflot, tout sourire, a déroulé les exigences écologistes. En premier lieu, plus de «caporalisme» entre partenaires. M.Désir, qui a du métier, a applaudi mollement, les yeux dans le vague. «Et c’est la dernière fois, je dis bien la dernière, que nous demandons un partage des circonscriptions. L’introduction de la proportionnelle, c’est la meilleure solution !», a dit Mme Duflot. Harlem Désir, souriant, a dodeliné de la tête. Stratégie de l’édredon « La sortie du nucléaire, ce n’est pas de notre part un caprice ni une posture identitaire, c’est une évidence. Si vous ne l’acceptez pas, il n’y aura pas de participation au gouvernement. Ma main droite ne signera pas un accord avec toi sans un calendrier de sortie», a lancé la secrétaire nationale d’EE-LV, avant d’ajouter, d’une voix douce : « J’espère vraiment qu’un socialiste ne prendra pas le risque d’une défaite en 2012… » Harlem Désir, lui, a continué dans sa stratégie de l’édredon : sourires, regard dans le vide, applaudissements. Il a répondu qu’il n’y avait entre partenaires, concernant la sortie du nucléaire, que des « différences de rythme », avant d’oser un « ensemble, nous allons faire franchir un pas à la France ». Mollement applaudi. p Anne-Sophie Mercier sait par ce fil s a p n o Et si votre passi L’électricité est au cœur de nos loisirs, que l’on soit jeune… ou un peu moins, comme Colette et Claude, éternels fans de tennis. Les usages de l’électricité ne cessent d’évoluer ; nos moyens de la produire font de même, pour continuer de satisfaire tous les besoins. Ainsi, nous développons les énergies renouvelables, qui représentent près de 20 % des capacités de production du groupe EDF. edf.com L’énergie est notre avenir, économisons-la ! 12 0123 Politique Mercredi 12 octobre 2011 A l’Assemblée nationale, un fourre-tout législatif dont les lobbies font leur miel La proposition de loi dite de «simplification» modifie le droit du travail et de la Sécurité sociale A ttention ! Le texte dont la discussion commence mardi 11 octobre à l’Assemblée nationale est une sorte d’« objet législatif non identifié ». Sous le doux euphémisme de « proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives », il comporte en réalité de multiples dispositions qui touchent à la fois au droit du travail, aux codes des collectivités territoriales, de la construction et de l’habitat, aux régimes sociaux et fiscaux. Il modifie les conditions d’exercice dans le secteur agricole, le tourisme, le transport, l’expertise comptable, la presse et les médias… Un véritable fourre-tout, qui compte pas moins de 90 articles au départ, et pourrait, à l’arrivée, en comporter beaucoup plus. Les lobbies de toutes sortes s’activent en coulisses pour profiter de cette « voiture-balai législative », selon l’expression d’Alain Vidalies (PS), pour y glisser, le plus discrètement possible, les amendements ou propositions qu’ils n’ont pas réussi à faire passer pendant la législature. A l’origine, un rapport du président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann (UMP), remis le 6 juillet au président de la République. Objectif : « Desserrer les contraintes excessives qui pèsent sur les entreprises, mais aussi sur les artisans, les agriculteurs et les professions libérales. » Le rapport préconisait quelque 280 mesures. Bon nombre d’entre elles ont été transcrites dans cette proposition de loi déposée le 28 juillet et inscrite par le gouvernement à l’ordre du jour prioritaire dès la reprise des travaux parlementaires. « Desserrer les contraintes » passait donc, dans la proposition de loi de M. Warsmann, par une « harmonisation » des seuils d’effectifs des entreprises pris en compte pour certaines réductions de coti- La CGT souhaitait des appels à la grève mardi 11 octobre, mais la CFDT n’a pas suivi S Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois de l’Assemblée. CHRISTOPHE MORIN/IP3 PRESS/MAXPPP sations sociales, en modifiant, ni plus ni moins, le droit de la Sécurité sociale. La commission des affaires sociales, saisie pour avis, s’en est alarmée, jugeant un peu délicat de toucher ainsi aux règles sociales au détour d’une proposition dite de « simplification ». « Il est incontestable que notre droit appelle une simplification. Cela étant, prenons garde de ne pas verser dans le simplisme », a prévenu Dominique Dord (UMP), rapporteur pour avis, relevant que ces dispositions priveraient la Sécurité sociale de plusieurs dizaines de millions d’euros de ressources. « La nécessité de protéger les recettes de la Sécurité sociale l’emporte à nos yeux sur l’impératif d’harmonisation des textes », a insisté M. Dord, plaidant pour la suppression de ces articles. « La commission des affaires sociales a réglé une partie des difficultés, note M. Vidalies, mais il en reste encore en pagaille et d’autres vont probablement surgir sous forme d’amendements “venus de nulle part”. » Il n’en manque pas, en Beaucoup tentent de glisser des amendements qu’ils n’ont pas réussi à faire passer pendant la législature effet. Pioché dans le tas, par exemple, au titre des « dispositions diverses », le relèvement à 15 000 euros du seuil à compter duquel les marchés publics doivent être soumis à appel d’offres et mise en concurrence. Le texte permet aussi d’aug- menter le temps de travail sur une période donnée sans modifier le contrat de travail. Certaines propositions de loi recaléesrefont leurapparitionsous forme d’amendement : comme la propositiondel’ex-députéJean-FrédéricPoisson en 2010,alors écartée, visant à augmenter le quota d’heures complémentaires non majorées dans le cadre du temps partiel, ou celle de Frédéric Lefebvre visant à faciliter le télétravail en cas de maladie ou de grossesse. D’autres amendements, plus inattendus, ont été déposés par des députés de l’UMP soudain inspirés par la revente et la récupération de métaux ferreux et non ferreux. « Heureusement, cette fois, le Sénat pourra jeter un regard averti sur ce texte et le corriger », se rassure M. Vidalies. p Patrick Roger En2012,le patronatdel’industrieveut pesersurl’élection L’UIMM prépare un arsenal de mesures concrètes et tente de rendre le secteur « plus attractif » L ’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM)veutreprendresaplace sur la scène patronale. Et elle entend participer au débat public de 2012 en présentant, sans doute en février, « des propositions chiffrées, concrètes et d’application immédiate»pourrenforcerla compétitivité sociale des entreprises industrielles. Désireuse de redorer son blason après l’affaire des retraits d’espèces destinés, selon son ancien dirigeant, Denis Gautier-Sauvagnac, «à fluidifier les relations sociales», l’UIMM veut à la fois défendre la place de l’industrie dans l’économie française – « Nous sommes dans une certaine urgence», dit son président, Frédéric Saint-Geours – et ne pas laisser le monopole des propositions au Medef, dont la présidente, Laurence Parisot, a été élue La journée d’action des syndicats s’annonce a minima pour la première fois en 2005 avec le soutien des services. Quatre groupes de travail ont étémisenplacedepuisunan.L’économiste Pierre Cahuc anime celui surlemarchédutravailetlaflexicurité ; Jacques Bichot, professeur à l’universitéLyon-III,traitedufinancement de la protection sociale ; Philippe Vivien, directeur des ressources humaines d’Areva, planche sur l’enjeu des compétences; le sociologue Jean-François Amadieu réfléchit aux moyens d’améliorer le dialogue social. Orientation des jeunes « Nous aurons des choses à dire sur la complexité des organisations patronales et sur les différents niveaux de la négociation sociale, comme sur la reconstruction d’un paritarisme de gestion », assure M. Saint-Geours. Des économistes comme Gilbert Cette ou Stéphane Carcillo, des hauts fonctionnaires comme Jean-Denis Combrexelle, directeur général du travail, et Bertrand Martinot, délégué général à l’emploi, des consultants comme Pierre Ferracci, président du groupe Alpha, des responsables d’entreprises et des syndicalistes participent à ces travaux. Après moult auditions, ils doivent déboucher sur un rapport permettant d’établir un diagnostic assez largement partagé. A charge pour les industriels d’y puiser les mesures qu’ils souhaiteront défendre et voir appliquer. « Depuis trente ans, l’ensemble de la société a peu à peu tourné le dos à nos métiers. Le courant à remonter est fort. Nous n’avons pas utilisé tous les canaux d’action et de conviction », déplore M. Saint-Geours. L’UIMM, qui tra- vaille depuis plus de dix ans sur l’orientation des jeunes et le développement de l’alternance, peine toujours à « réenchanter » les métiers industriels. Consciente de ces difficultés récurrentes, elle enverra à la mi-octobre trois autobus sillonner les routes de France pour aller, avec le ministère de l’éducation nationale, à la rencontre des collégiens, des lycéens et de leurs parents. Des campagnes grand public sont aussi à l’étude pour rendre l’industrie « plus attractive ». Parallèlement, le patronat de la métallurgie est – avec Louis Gallois, président exécutif d’EADS, le Cercle de l’industrie et le Groupe des fédérations industrielles –, l’un des fondateurs de La Fabrique de l’industrie, un think tank lancé officiellement lundi 10 octobre. p Claire Guélaud i l’on en croit un sondage Louis Harris, réalisé pour la CGT et publié le 5 octobre, 69 % des salariés soutiennent la journée de mobilisation nationale décentralisée organisée par cinq syndicats – CGT, CFDT, UNSA, FSU, Solidaires – mardi 11 octobre, pour dire «non à l’austérité » et réclamer « un meilleur partage des richesses». Pourtant, à six mois de l’élection présidentielle, cette journée nationale d’action, la première depuis novembre 2010, a peu de chances de rester dans les annales. C’estàl’initiativedeBernardThibault, qui voulait donner des gages aux « durs » de sa centrale après l’échec de la mobilisation contre la réforme des retraites, que cette journée a été organisée, à quelques jours des élections, le 20 octobre, dans la fonction publique d’Etat et dans la fonction publique hospitalière.Maislesecrétairegénéraldela CGT, qui voulait des appels à la grève, s’est heurté à un refus catégorique de son homologue de la CFDT, François Chérèque. Pour M.Chérèque, le mécontentement et l’inquiétude des salariés sont indéniables, notamment sur le pouvoir d’achat et l’emploi, mais une période préélectorale est rarement propice à la mobilisation. Le secrétaire général de la CFDT veut « être à l’écoute » des salariés et juge, comme il l’a dit sur Canal+ le 10 octobre, qu’« il est particulièrement injuste de faire payer d’abord aux salariés le plan de rigueur ». «L’objectif, a-t-il ajouté, est de sensibiliser l’opinion au cas où il faudrait aller plus loin.» M. Thibault reconnaissait, dans La Nouvelle Vie ouvrière du 9 septembre, que « la résignation et le sentiment d’impuissance peuvent en effet gagner les esprits ». Mais, affirmait-il, «si on ne bouge pas, les choses ne s’amélioreront pas, elles s’aggraveront». «Sans nier l’importance des élections, a répété M. Thibault dans son tour de France des régions,la terren’arrêtepasde tourner en attendant. » L’intersyndicale ne se remet pas de son échec sur la réforme des retraites (même si les syndicats ont amélioré leur image dans l’opinion) et ne masque plus ses divisions. La CFTC et la CFE-CGC l’ont quittée. FO, qui a organisé le 20 septembre une journée d’information passée inaperçue, joue cavalier seul. « Les salariés sont mécontents, a assuré Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de FO, mardi 11octobre sur i-Télé, maisils veulent un mouvement avec des chances de gagner quelque chose. » « Flashmob » côté CFDT Près de 200 défilés sont organisés mardi 11 octobre à travers la France,dont134unitaires. M.Chérèque ne participera pas à la manifestation parisienne, mais à une « flashmob » (mobilisation éclair). M.Thibault défilera à Marseille. Les grèves devraient affecter essentiellement, de façon limitée, la SNCF et les transports urbains. Dans l’éducation nationale, où une journée de mobilisationa déjà eu lieu le27 septembre, le ministère n’attend que 2,45% de grévistes dans le premier degré. Dans plusieurs secteurs, comme l’énergie, les arrêts de travail lancés par la CGT et Solidaires ontpourbutdepermettreaux salariés de manifester. En d’autres termes, cette journée de mobilisation, soutenue par le Parti socialiste et le Front de gauche, risque surtout de mettre en lumière l’état de faiblesse des syndicats. p Michel Noblecourt Présidentielle M.FillonrecommandeàM.Morin de«nepasseprécipiter» Devant une vingtaine de parlementaires du centre – sur les quelque 55 que celui-ci regroupe en théorie – réunis lundi 10 octobre à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), François Fillon a mis en garde ceux qui militent pour une candidature d’Hervé Morin à l’élection présidentielle de 2012. « On ne m’ôtera pas de l’idée que, plus la majorité s’éparpille, plus l’électorat s’éparpille », a souligné le premier ministre. Tout en estimant « légitime » qu’une formation souhaite avoir son candidat à l’élection présidentielle, il a recommandé à ses interlocuteurs de « ne pas se précipiter ». « Les circonstances ne se prêtent pas à des aventures personnelles qui peuvent avoir des conséquences importantes pour la majorité », a conclu M. Fillon. Les parlementaires du Nouveau Centre – qui seront reçus mercredi 19 octobre à l’Elysée – ont décidé de repousser à fin janvier-début février la tenue d’un congrès qui décidera de soutenir, ou non, la candidature d’Hervé Morin, afin de « lui laisser le temps de convaincre ». Ou de s’effacer. p P. Rr. Parlement Christian Jacob estime que l’on prête à la Droite populaire « beaucoup plus qu’elle n’en fait » Dans un chat sur Lemonde.fr, lundi 10 octobre, Christian Jacob, président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, a relativisé l’action du collectif Droite populaire au Parlement. «On lui en prête beaucoup plus qu’elle n’en fait en réalité », assure ce proche de Jean-François Copé. Quant au statut des bi-nationaux, thème sur lequel le député Lionnel Luca a obtenu l’organisation d’une convention par l’UMP, Christian Jacob juge le «système équilibré » et «ne voit pas l’intérêt de le remettre en cause ». LE DÉBAT DES PRIMAIRES présenté par David Pujadas MERCREDI 12 OCTOBRE À 20H35 en partenariat avec france2.fr Société 0123 Mercredi 12 octobre 2011 13 Avec le dispositif «Eclair», les collèges et lycées difficiles testent l’autonomie Prèsde300établissementsexpérimentent ledernier avatardel’éducation prioritaire.Nouveauté: lapossibilitéde choisirles enseignants C ’est un établissement scolaire de 340 âmes, dans une ville qui en compte 12 000. Un lycée professionnelréputé «difficile », au cœur d’un territoire industriel en crise. A Clément-dePémille, à Graulhet dans le Tarn, la moitié des élèves sont issus de milieux défavorisés. « On est classé dernier lycée professionnel de l’académie », rapporte son proviseur, Yves Gouyen. Avec tous les maux que connaît l’éducation prioritaire : échec scolaire, absentéisme, décrochage… Pas étonnant que le recteur de l’académie de Toulouse l’ait choisi pour expérimenter, à la rentrée, le programme Eclair (Ecoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite). Eclair, c’est la nouvelle étiquette accolée à l’éducation prioritaire, après « Clair » en 2010-2011 (sans le « e » de « écoles »), après les « réseaux ambition réussite » (RAR), les « réseaux de réussite scolaire » (RRS), les « réseaux d’éducation prioritaire » (REP)… Les ministres de l’éducation nationale aiment à laisser leur marque sur la carte de l’éducation prioritaire. L’acronyme choisi par l’actuel ministre Luc Chatel est sans doute plus accrocheur ; il n’en reste pas moins que les principes sont à peu près les mêmes – innovation pédagogique, partenariats locaux, réseaux d’écoles primaires et de collèges… Une nouveauté tout de même, et pas des moindres : dans les 297 collèges et les28 lycées Eclair,le chef d’établissement choisit tous ses personnels. Il « participe à [leur] affectation » en émettant un « avis » sur les candidatures à l’issue d’un « entretien de recrutement» etétablit des« lettres demission » pour trois ans, indique le « Vademecum Eclair » publié par le ministère de l’éducation nationale en juin. En matière de ressources humaines, Eclair est un laboratoire d’expérimentations. Ces nouvelles fonctions, les chefs d’établissement s’en emparent, peu à peu. A la rentrée, Yves Gouyen a recruté six personnes. «Les fiches de postes, les entretiens, j’ai découvert ça cette année », raconte cet ancien professeur d’éducation physique et sportive, parailleurs secrétairedépartemental du SNPDEN-UNSA,premier syndicat des chefs d’établissement. Pour les recrutements, il a établi ses propres critères : « Je suis attentif au regard que portent les candidats sur les élèves en perdition. Ce que je veux, c’est des personnes qui y croient. » A Graulhet, tous les postes vacantsontétépourvus.Mais nombrede chefsd’établissement témoignentd’unvéritablecasse-tête, faute de candidats. Le problème n’est « Recruter des volontaires permet d’avoir une équipe soudée autour d’un projet commun » Alain Ouvrard principal du collège Youri-Gagarine, à Trappes pas nouveau. « En vingt ans de boîte, j’ai connu une dizaine d’établissements difficiles. Et c’est une constante : les gens sont réticents à venir y travailler », rapporte Laurent Sabatier, principal du collège Edmond-Rostand, à Marseille. Le recrutement par les chefs d’établissement changera-t-il la donne ? Bernard Toulemonde, inspecteurgénéral honoraire de l’éducation nationale, avait tenté de donner l’impulsion en 1992, lorsqu’il était conseiller du ministre Jack Lang, en créant les « établissementssensibles ».«Onalaissé tom- ber deux ans plus tard, pour la simple et bonne raison que personne ne voulait y aller ! », se souvient-il. Vingt ans après, il déplore toujours que « en gros, la moitié des jeunes enseignants [soient] expédiés dans deux académies – Créteil et Versailles–, surles posteslesplus difficiles, désertés par les anciens ». Dans les établissements Eclair, à la rentrée, 65 % des postes « profilés» ont été pourvus par des enseignants titulaires, selon les chiffres officiels. Pour les 35 % restants, il a fallu faire appel à des remplaçants (20 %), voire à des contractuels (10 %). Par ailleurs, les chefs d’établissement sont nombreux à témoigner que les motivations des candidatssontplus d’ordrepersonnel (rapprochement de domicile par exemple) que professionnel. Quant à l’incitation financière, elle équivaut à peu près à l’ancienne prime « ZEP », soit 96 euros par mois, à laquelle se rajoute une « part variable » déterminée par le chef d’établissement. « Il faudrait payer beaucoup plus », considère M. Toulemonde. Leproblème se posemoins pour le recrutement des chefs d’établissement. Sans doute parce que la professionest globalementfavorable à son « autonomie ». « Recruter des volontaires permet d’avoir une équipe soudée autour d’un projet commun », soutient Alain Ouvrard, principal du collège Youri-Gagarine, à Trappes (Yvelines) et membre du SNPDEN. Au lycée André-Malraux de Montataire (Oise), Isabelle Klépal Yves Gouyen, proviseur du lycée professionnel de Graulhet (Tarn), le 7 octobre. P. GROLLIER/TEMPS MACHINE POUR « LE MONDE » se réjouit d’avoir pu « présenter aux candidats la réalité de l’établissement, ses difficultés, sa dynamique. Quand on arrive dans un lycée comme le mien, mieux vaut être préparé ». Le métier s’en trouve valorisé : « Nos tâches se complexifient, nos responsabilités s’accroissent. Tout cela est passionnant », renchérit Mme Klépal. Reste à convaincre les enseignants, très réfractaires à ces nouvelles règles de ressources humaines. Car postuler dans un établissement Eclair, cela signifie « sortir » OFFICIELLEMENT, depuis la rentrée, les réseaux ambition réussite (RAR) n’existent plus. Les 250collèges et 1 720 écoles qui les composaient ont été intégrés dans le nouveau dispositif d’éducation prioritaire baptisé Eclair (Ecoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite). Officiellement seulement. Car selon la première enquête de terrain sur Eclair, publiée par l’Observatoire des zones prioritaires (OZP) début octobre, les RAR sont toujours bien là… sous la nouvelle appellation. Les projets pédagogiques et les partenariats locaux, mis en place à partir de 2006, perdurent; les écoles et le collège d’un réseau continuent à travailler de concert. Bien qu’ils ne figurent pas dans le programme Eclair, les personnels spécifiques aux RAR – les « coordonnateurs » d’un réseau et les « professeurs référents », chargés d’impulser les projets – poursuivent leurs missions. «Deux nouveaux contrats ambition réussite pour la période 2011-2014 ont été signés à la rentrée, ce qui montre que certains recteurs font de la résistance», signale Marc Douaire, le président de l’OZP. Mais alors, quelle est la réalité du dispositif Eclair, né des Etats généraux de la sécurité à l’école en avril 2010? L’OZP, après avoir récolté les témoignages d’une centaine de coordonnateurs et d’enseignants référents de RAR dans douze académies, dresse un constat sévère. «Deux strates se superposent: celle de la communi- Au. C. Aurélie Collas Justice Le parti présidentiel défend les médecins et concentre les efforts sur la maîtrise des dépenses D cation – on veut montrer, à l’approche de l’élection présidentielle, que l’école prend un virage libéral – et celle du terrain, où rien ne change vraiment », observe M.Douaire. Une analyse que partage le syndicat majoritaire des chefs d’établissement, le SNPDEN-UNSA, sous la voix de son secrétaire général, Philippe Tournier: « Une fois de plus, on donne l’illusion du mouvement en changeant d’étiquette, mais en utilisant l’existant. » p mée en communication de crise… «Partout où Eclair est passé, il y a eu comme un coup de tonnerre ! », ironise Isabelle Klépal. Yves Gouyen évoque des «mots durs », des « relations tendues » : « Je me suis senti bienseul… Mais que voulez-vous, on touche là au fonctionnement d’un établissement tel qu’il existe depuis des décennies ! » Il a donc fallu rassurer, expliquer, convaincre. M. Gouyen avait, pour cela, un argument de taille : « Eclair nous permet de maintenir nos moyens, qui ont été divisés par deux en cinq ans. » Eclair dépassera-t-il un jour les frontières de l’éducation prioritaire ? L’idée d’une autonomie octroyée aux chefs d’établissement fait son chemin, sur le terrain, dans les textes, dans les discours politiques. La droite en a fait l’un des axes de son projet pour l’école en 2012. A gauche, on préfère parler d’autonomie « pédagogique » accordée aux enseignants afin qu’ils s’adaptent mieux aux élèves. Quelle que soit l’issue du scrutin de la présidentielle, une chose est certaine : l’autonomie des établissements a de beaux jours devant elle. p Un simple changement d’étiquette? Santé: l’UMP lance des pistes pour l’après-2012 éremboursement de médicaments, incitation des médecins à s’installer dans les déserts médicaux, poursuite de la maîtrise des dépenses. A la veille de la convention santé de l’UMP, qui devait se tenir mardi 11 octobre, son secrétaire général, Jean-FrançoisCopé, a présenté, lundi, les propositions du parti en vue d’alimenter le programme de son futur candidat à l’élection présidentielle. Une occasion de tacler le PS, au lendemain du premier tour de sa primaire. « Nous voulons nous inscrire en faux contrela vision apocalyptique du système de santé véhiculée par les socialistes », a déclaré M. Copé. Depuis 2007, « la qualité des soins ne s’est pas dégradée, l’hôpital n’est absolument pas menacé, le nombre des médecins n’a pas diminué», a-t-il ajouté. Ce que martèle l’UMP, au contraire, c’est que le système de santé français se classe parmi les meilleurs, que la couverture par l’assurance-maladie est parmi les plus élevées, et que du bilan de Nicolas Sarkozy, il faut retenir la réduction des déficits des hôpi- du mouvement national d’affectation, fondé sur un barème qui fait la part belle à l’ancienneté. Une atteinte à leur statut, perçoiventils. Les inquiétudes sont aussi politiques : les enseignants craignent qu’enadhérant àuneexpérimentation qui ne concerne pour l’instant qu’un établissement sur près de 35, ils mettent le doigt dans un engrenage qui les conduirait vers une école « libérale », dénuée de tout cadrage national. Résultat : la gestion des ressources humaines s’est vite transfor- taux et la maîtrise de l’évolution des dépenses de soins. Insistant sur la volonté du PS de contraindre des médecins à exercer dans les zones où il en manque – sujet qui divise les socialistes eux-mêmes –, M. Copé n’a pas hésité à forcer le trait : « Non, les médecins ne sont pas des gens cupides, obsédés par les dépassements d’honoraires », qui choisiraient tous « la Côte d’Azur ». L’UMP n’a pas l’intention de déplaire aux professionnels. Ellecontinueradedéfendrela liberté d’installation, et propose de leur redonner du « temps médical » en les déchargeant de certaines tâches. Pour en finir avec leur mauvaise répartition sur le territoire, elle compteinciter lesmédecins à s’installer dans les zones sous-dotées, notamment en développant les maisons de santé, qui passeraient de 250 en 2012 à 1 000 en 2017, et en triplant l’offre de bourses pour les étudiants.Desoutilsqui, pourl’instant, n’ont pas permis d’améliorer la situation. Beaucoup des 45 propositions développées par Philippe Juvin, députéeuropéen et chefdes urgences de l’hôpital Beaujon de Clichy (Hauts-de-Seine), sont le prolongement de ce qui a déjà été amorcé. L’UMP veut ainsi poursuivre le développement du dossier médical personnel et régler la question des dépassements d’honoraires, ce que le gouvernement n’a pas réus- «Les médecins ne sont pas cupides, obsédés par les dépassements d’honoraires» Jean-François Copé secrétaire général de l’UMP siàfairedepuiscinqans. Elleproposeaussiunerévisiondelaloidesanté publique de 2004. Ce qui était prévu pour 2009. Surtout,lepartide NicolasSarkozy n’appelle pas à une réforme du systèmedesanté,maisà lapoursuite de la maîtrise des dépenses, sans soulever la question des recettes pour financer l’assurance-maladie. Il propose notamment de revoir ce qui doit être pris en charge par la solidarité dans le cadre d’états généraux des dépenses de santé. S’inscrivant dans la réflexion généralequisuitl’affaire duMediator, l’UMP insiste sur la nécessité de réduire la consommation de médicaments, et de baisser leurs prix, notamment pour les génériques, comme le préconise l’assurance-maladie. Elle prône aussi la poursuite du déremboursement des médicaments au service médical rendu insuffisant, déjà bien avancé, mais se montre prête à aller plus loin, estimant qu’il faut concentrer la prise en charge « sur les remboursements vraiment efficaces » . Soit une remise en cause de la vignette orange. Enfin, l’UMP propose « d’optimiser » les dépenses d’affections de longue durée, avec des mises à jour annuelles des entrées et sorties du dispositif, compte tenu des progrès de la médecine. Cette prise en charge à 100 % coûte de plus en plus cher à la « Sécu » mais concerne près de 10 millions de personnes.Le sujetest doncdélicat, à quelques mois de la présidentielle. p Laetitia Clavreul «Fadettes» du «Monde»: le numéro deux du renseignement entendu Le numéro deux de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), Frédéric Veaux, a été interrogé en qualité de témoin assisté, lundi 10 octobre, par la juge Sylvia Zimmermann dans l’affaire de l’espionnage téléphonique du Monde. Les services du contre-espionnage, sur ordre de l’Elysée, s’étaient, en juillet 2010, procuré les fadettes (facturations téléphoniques détaillées) de notre collaborateur Gérard Davet, pour découvrir ses sources dans l’affaire Woerth-Bettencourt. Le 3 octobre, le commissaire divisionnaire Stéphane Tijardovic, qui avait adressé au nom de la DCRI la réquisition à Orange, avait été entendu, lui aussi comme témoin assisté, par la juge Zimmermann. M. Tijardovic a expliqué à la magistrate avoir agi sur instruction de M. Veaux. Sont également convoqués d’ici à la fin octobre Bernard Squarcini, patron de la DCRI, et Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale. p Sondages de l’Elysée: décision de la cour d’appel le 7novembre La cour d’appel de Paris dira, lundi 7 novembre, si un juge d’instruction peut enquêter sur le contrat conclu en 2007, sans mise en concurrence, entre l’Elysée et une société de conseil pour la réalisation de sondages, dirigé par Patrick Buisson. Le parquet de Paris avait classé sans suite une première plainte en 2010 au motif que l’immunité dont bénéficie le chef de l’Etat durant son mandat devait « s’étendre aux actes effectués au nom de la présidence de la République par ses collaborateurs ». Saisi d’une nouvelle plainte pour favoritisme déposée par l’association Anticor, le juge Serge Tournaire a estimé, a contrario, que l’immunité présidentielle devait être « interprétée strictement et ne saurait bénéficier de manière automatique aux tiers, collaborateurs ou non du chef de l’Etat ». Dans ses réquisitions écrites, le parquet général a soutenu que l’immunité devait « prendre en compte l’intervention possible de collaborateurs du cabinet pour l’accomplissement des tâches de la fonction présidentielle ». – (AFP.) p A GAGNER économie 0123 Mercredi 12 octobre 2011 15 En hausse En baisse Les cours du jour ( 11/10/11 , 09h47 ) M6 – La chaîne privée a enregistré, en septembre, japon – L’excédent des comptes courants du sa meilleure audience de l’année, à 11,3 % contre 10,9% un an plus tôt, a indiqué Médiamétrie, lundi 10octobre. TF1 a cumulé 24,1% d’audience (13,5% un an plus tôt), contre 13,5% pour France 2 (15,2% il y a un an) et 9,4 % pour France 3 (10,2 %). Japon a chuté de 64,3 % en août sur un an, à 3,88 milliards d’euros, a indiqué le gouvernement, mardi 11 octobre. Cette baisse est due à un alourdissement de la facture énergétique, lié à l’arrêt de la plupart des réacteurs nucléaires. Euro Or Pétrole Taux d’intérêt Taux d’intérêt 1 euro Once d’or Lightsweet crude France Etats-Unis 1,3593 dollar (achat) 1661,00 dollars 85,13 dollars 2,787 (à dix ans) 2,085 (à dix ans) Le «triple A» de la France survivra-t-il à la crise? L’approche de l’élection présidentielle constitue, pour les agences de notation, un risque de dérapage L a solidarité affichée entre le président Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel pour renflouer les banques mises à mal par la crise des dettes souveraines pourraitelle coûter à la France son « AAA » ? L’Elysée peut s’en inquiéter : cette note équivalente à un 20/20 accordée à un crédit souverain par les agences de notation Moody’s, Standard & Poor’s (S & P) et Fitch, est le sésame pour qu’un Etat puisse emprunter à bon compte sur les marchés. Paris est déjà endetté à hauteur de 86% du PIB en 2011 selon FMI. Un ratio plus faible que la Grèce mais plus élevé que l’Espagne Une nécessité pour la France qui doit émettre 8,6 milliards d’euros d’obligations d’ici à décembre et 179milliardsen2012pourrenouveler son stock de dette. D’autant que, à quelques mois de l’élection présidentielle, M. Sarkozy ne veut sans doute pas être « le » président qui aura fait perdre à la France son triple A et l’aura installée en position d’infériorité vis-à-vis de l’Allemagne. Dans l’immédiat, Paris n’a aucune inquiétude à se faire. Lundi 10 octobre, les agences ont toutes confirmé leur notation, assurant que les sommes évoquées pour le sauvetage de Dexia (36,5 % des 90 milliards d’euros de garanties de financement à la banque) ne changeaient pas la donne. Moody’s n’y voit qu’un « impact limité ». Et Fitch rappelle que l’effort reste, au maximum, limité à 1,6 % du produit intérieur brut (PIB) français. Mais qu’en sera-t-il si Paris devait débourser entre 15 et 30 milliardsd’euros pour recapitaliserses Au cœur de la notation d’un pays CRITÈRES D’OBTENTION DE LA NOTE AAA D’UN PAYS CLASSEMENT AAA DES PAYS SELON L’ORGANISME Vulnérabilité du pays au risque événementiel et à une crise brutale du crédit MOODY’S Allemagne Australie Autriche Canada Danemark Etats-Unis Finlande France Guernesey Hongkong Ile de Man Liechtenstein Luxembourg Norvège Nouvelle-Zélande Pays-Bas Royaume-Uni Singapour Suède Suisse SOURCE : MOODY’S SOURCES : MOODY’S, STANDARD & POOR’S a Facteur 1 Solidité économique du pays a Facteur 2 Solidité institutionnelle du pays a Facteur 1 + Facteur 2 Résilience économique du pays a Facteur 3 Solidité financière du gouvernement a Facteur 4 banques? Auxyeuxde certainséconomistes,la France est déjà sur lefil du rasoir. Depuis cet été, « elle est danslaseringue»desagences,assure même un économiste, visiteur du soir de l’Elysée. Depuis la dégradation des EtatsUnis par S & P en août, la note française semble imméritée : dans son rapport sur les Etats-Unis, l’agence soulignait d’ailleurs qu’en 2015 la France serait plus endettée que la première économie mondiale avec une créance publique de 83 % de son produit intérieur brut (PIB) contre 79 % pour les Etats-Unis. Paris, qui n’a pas présenté un budget a l’équilibre depuis 1975, est déjà endetté à hauteur de 86 % du PIB cette année selon le Fonds monétaire international (FMI). Un ratioplusfaiblequelaGrèceenquasi-faillitemaisplusélevéquel’Espa- STANDARD & POOR’S gne, autre « maillon faible » de la zone euro. La France est aussi l’un desrares membresdu clubdes« triple A » à souffrir d’un déficit de sa balance commerciale. Surtout, le déficit public, qui contribue à faire grossir la dette année après année, estimé à 5,7 % du PIB par l’Etat (5,9 % par le FMI) est parmi les plus élevés de la zone euro. Et le plan d’économies (12 milliards de niches fiscales et sociales supprimées) pour faire passer ce ratio à 4,5 % en 2012, est assis sur une perspective de croissance de 1,75 %. A ce jour, aucun économiste n’est aussi optimiste. Autrement dit, les recettes de l’Etat seront certainement moins importantes que prévu. S’il faut, en plus, débourser plusieurs dizaines de milliards d’euros… La solution serait-elle d’avoir Médiane des pays notés AAA Les indicateurs français DÉFICIT RATIO DETTE/PIB CROISSANCE DU PIB en % du PIB en % en % 2,4 7,7 82,8 6,2 85,8 52,5 1,6 1,7 2010 2011* PART DE LA DETTE FRANÇAISE DÉTENUE PAR LES ÉTRANGERS, en % 2,2 66,2 % 2010 2011* 2010 2011* SOURCE : STANDARD & POOR’S, *FÉVIER 2011 recoursauFondseuropéendestabilité financière (FESF) pour renflouer les banques ? Dotée de 440 milliards d’euros, la force de frappe de ce fonds créé pour venir au secours des Etats fragiles pourrait être démultipliée si les Etats membres arrivent à se mettre d’accord. L’effort serait alors partagé. Mais il n’est pas sûr que tous les pays de la zone euro, notamment l’Allemagne, y soient prêts. En outre, ce serait une « fausse économie», juge Gilles Moëc,économiste chez Deutsche Bank. A ses yeux, détourner un outil qui peine déjà à atteindre son objectif premier risquerait d’entamer la confiance des marchés. D’autant que, pour M. Moëc, le AAA de la France ne serait pas menacé par une recapitalisation même importante de ses banques. Injecter de l’argent représente certes une dépense exceptionnelle pour l’Etat, mais, en contrepartie, celui-ci récupère un nouvel actif qu’il pourra un jour valoriser. Et en cas de dérapage des finances publiques, la France dispose d’un système politique à même de pouvoir réagir vite, souligne M.Moëc, contrairement à l’Italie et aux Etats-Unis, dont l’action des gouvernements est paralysée par l’opposition. Finalement, le AAA français serait donc davantage menacé par le laxisme budgétaire dont pourrait faire preuve l’Etat à l’approche du scrutin présidentiel. Dans son dernier rapport, S & P pointe ce « risque » politique qui pousserait le gouvernement à renonceràune rigueur accruepour éviter la grogne sociale. p Claire Gatinois SOURCE : AFP Le sommet de la zone euro repoussé de cinq jours Le sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro, prévu le 18octobre, a été reporté au 23. La décision a été prise, lundi 10 octobre, par Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, au lendemain de l’entretien infructueux entre le président Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel. Les avis divergent sur les modalités de recapitalisation des banques et l’ampleur de la restructuration de la dette grecque. Berlin plaide pour une décote supérieure aux 21 % fixés en juillet. « Nous discutons sur plus », a dit, lundi, Jean-Claude Juncker, président de l’Eurogroupe, évoquant 50 % à 60 %. En Allemagne, évoquer la sortie d’Athènes Erste Bank affectée par la crise de la dette de la zone euro ne fait plus recette et par des dépréciations d’actifs Les dirigeants du Parti libéral (FDP) et de la CSU, alliés de la CDU d’Angela Merkel, ont, pour l’heure, mis leur euroscepticisme en berne Berlin Correspondant Q uelques heures après avoir reçu Nicolas Sarkozy à Berlin, dimanche 9 octobre, Angela Merkel est partie avec une délégation de patrons allemands renforcer les échanges commerciaux avec le Vietnam et la Mongolie. En ces temps de crise en Europe, la chancelière allemande mise plus que jamais sur le savoir-faire de l’industrie allemande à l’exportation. Si le sommet avec le président de la République française n’a pas apporté de solution concrète aux problèmes de la zone euro, la chancelière a eu au moins une satisfaction avant son départ : sur le front politique intérieur, les tensions autour du sauvetage de la Grèce ont perdu en intensité. Les dirigeants du Parti libéral (FDP) et de la CSU bavaroise, alliés de la CDU d’Angela Merkel au sein de la coalition, ont renoncé à évoquer publiquement une faillite de la Grèce et sa sortie de la zone euro. Philipp Rösler, président du Parti libéral, vice-chancelier et ministre de l’économie, qui avait mis le feu aux poudres en évoquant mi-septembre une « faillite ordonnée » de la Grèce, s’est même rendu à Athènes les 6 et 7octobre pourvoir comment les chefs d’entreprise allemands pouvaient participer à la relance de la croissance grecque. Cinglante défaite Peu aimé – c’est un euphémisme – en Grèce, le ministre s’est bien gardé de toute déclaration intempestive.Celan’apasempêchéleprésident d’IG Metall, Berthold Huber, de comparer le ministre, lundi 10 octobre, à un « homme qui vérifie avec une allumette s’il y a encore de l’essence dans le réservoir de la voiture». La cinglante défaite de son parti aux élections locales de Berlin le 18septembre a pourtant appris au ministre à ne plus jouer avec le feu. Tenir un discours eurosceptique n’a pas été payant. Pour Mme Merkel, un autre feu couvait, au sein de la CSU. Un des principaux opposants allemands à l’euro, Peter Gauweiler, figure historique du parti chrétien bavarois, était candidat pour être vice-président du parti. Réunis en congrès, les membres de la CSU ne lui ont pas donné cette tribune et ont élu, samedi 8 octobre, l’autre candidat, Peter Ramsauer, ministre des transports de Mme Merkel. HorstSeehofer,leprésident de la CSU, a, lui, été réélu avec près de 90 % des voix. L’accalmie politique pourrait n’être que de courte durée. Le site internet du Spiegel a révélé dimanche 9 octobre que la direction de la CDU préparait une motion visant à renforcerlesinstitutionseuropéennes, notamment en créant un « commissaire à l’épargne », chargé de vérifier l’orthodoxie des dépenses publiques dans la zone euro. La CSU ne l’entend pas de cette oreille. «On a besoin de davantage destabilitéetdedisciplinebudgétaire, pas de nouvelles instances ni de nouveaux commissaires », a rétorquéAlexander Dobrindt,secrétaire général de la CSU. Au sein du FDP aussi, les discussions s’annoncent vives. Les eurosceptiques tentent d’ores et déjà de s’opposeràl’étape suivante:lacréation d’un mécanisme permanent de stabilité (MES) qui doit prendre le relais du Fonds européen de stabilité financière. p Frédéric Lemaître La banque autrichienne a prévenu qu’elle sera déficitaire cette année de 700millions à 800millions d’euros Vienne Correspondante P our affronter les turbulences qui menacent la zone euro, mieux vaut trancher dès maintenant dans le vif. La plus dynamique des banques autrichiennes cotées en Bourse, la Erste – qui est aussi la plus engagée en Europe de l’Est –, a créé un choc en annonçant, lundi 10 octobre, que ses pertes annuelles devraient être de l’ordre de 700 millions à 800 millions d’euros en 2011, en raison de dépréciations sur son portefeuille d’obligations en provenance de pays européens en crise, sur des filiales en Europe de l’Est et sur des garanties sur crédits. Il y a quelques jours, la banque espérait encore engranger près de 850 millions d’euros de bénéfices netsd’iciàlafinde l’année.Sousl’effet de la surprise, son action a perdu 17% à la Bourse de Vienne, avant de se stabiliser à – 13,6 %. Elle a entraîné dans sa chute le titre de l’autre banque autrichienne d’envergure internationale, la Raiffeisen. Premier établissement bancaire à profiter de l’aide de 1,22 mil- liard d’eurosofferte par l’Etat autrichien lors de la crise financière de 2008, Erste a dû en différer d’au moins un an le remboursement. Elle va proposer à ses actionnaires de renoncer à tout dividende en 2011, alors qu’elle avait doublé, en mai, les émoluments versés à son conseil d’administration pour l’année précédente. Son directeur, AndreasTreichl, a justifié les mesures drastiques décidées au cours du week-end par la nécessité de se préparer à des « temps très durs ». Impôt exceptionnel Si Erste s’est déjà délestée d’une bonne part de son exposition en Irlande et en Europe du Sud (Grèce, Italie, Portugal, Espagne), elle doit revoir à la baisse ses avoirs en Roumanie et, surtout, en Hongrie où elle déplore « les interventions politiques(…)croissantes»dugouvernement de Viktor Orban. Celui-ci avait imposé, en 2010, un impôt exceptionnel aux banques et aux multinationales de l’énergie, des télécommunications et de la grande distribution. Il a ensuite nationalisé les fonds de pension privés (un pactole de 11 milliards d’euros). Fin septembre, dans le souci de protéger les 800 000 ménages hongrois endettés en devises, le Parlement de Budapest a voté une loi qui permet de rembourser ces emprunts à un taux de change préférentiel, les banques épongeant la différence avec le prix du marché (supérieure à 20 % pour le franc suisse). Les pertes du secteur bancaire en Hongrie à la suite de cette conversion de la dette des particuliers pourraient aller jusqu’à 1 milliard d’euros. Erste a ainsi dûdéprécier sa filiale hongroise à hauteur de 312 millions d’euros et inscrire 415 millions de provisions dans ses comptes afin de couvrir le « risque politique » que représente la Hongrie, soulignait-elle lundi. Signe de la perte de confiance des investisseurs, le forint hongrois a baissé de 9 % en un mois. Et le secteur de la grande distribution et des services redoute les effets pervers d’une hausse imminente de la TVA (de 25 % à 27 %), qui vise à renflouer les caisses de l’Etat hongrois, mais risque de décourager les consommateurs. p Joëlle Stolz 16 0123 décryptages L’ŒIL DU MONDE Mercredi 12 octobre 2011 301 Valeur nette des dix premières fortunes mondia 780 Montant du fonds d’aide européen FESF (fonds européen de stabilité financière) 31 dont Bernard Arnault, première fortune française 54 dont Bill Gates 158 dont engagement de la France 70 FESF d’origine (mai 2010) 357 Dette grecque à fin 2011 110 Aide à la Grèce 137 Déficit public français à fin 2010 556 Revenus pétroliers des pays de l’OPEP en 2010 22 Budget annuel des Nations unies 237 Valeur estimée du commerce m de drogues illégales (2010) 57 Chiffre d’affaires d’Apple 61 Valeur estimée de Facebook 40 dont héroïne dont bénéfice 1 12 dont bénéfice 87 Marché mondial du vin 16 dont France 223 Dépenses de santé en France (2009) Fonds de l’OPEP pour le changement climatique 30 Coût des JO de Pékin 18 Déficit 2011 de la Sécurité sociale française 15 Bonus des banquiers de Wall Street (2010) 96 Aide aux pays en développement des Etats de l’OCDE (2010) Le graphiste britannique, pionnier du data-journalisme, propose, pour «Le Monde», une comparaison ludique etpédagogique des chiffres extraits de l’actualité économique 15 dont France 2 38 Valeur de ce qui a été vendu sur eBay en 2010 Lesmilliardsdela crisegrecquevuspar DavidMcCandless 0123 les 17 décryptages L’ŒIL DU MONDE Mercredi 12 octobre 2011 1047 Coût de la guerre américaine contre le terrorisme 44 Estimation en 2003 du coût de la guerre en Irak 200 Besoins estimés de recapitalisation des banques européennes 229 Coût de la reconstruction au japon après le tsunami 132 Dépenses d’éducation en France 67 Marché mondial du café (2010) mondial 38 Budget français 2011 de la défense 15 Coût de la mission pour Mars 651 Chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique mondiale (2010) 102 Dette des pays africains envers l’Europe et les Etats-Unis (2008) 15 8 dont problèmes d’érection B ritannique, 40 ans, lunetteux, allure hybride de designer branché et de savant fou, David McCandless est un virtuose. L’un des pionniers d’un art balbutiant : le data-journalisme. Né du besoin de trier dans la profusion et la confusion des informations qui circulent sur Internet, ce « journalisme de données » combine recherche consciencieuse de chiffres incontestables, audace graphique, clarté et mise en perspective. Si le data-journalisme s’épanouit sur la Toile, il ne rechigne pas à s’exprimer sur papier. David McCandless vient de sortir son premier livre en français : Datavision (Robert Laffont, 224pages, 23euros), qui est en fait la traduction remise à jour d’un ouvrage paru en 2009 en Grande-Bretagne. Le livre est un parfait condensé de ce nouveau type de journalisme infographique épuré, qui associe des informations essentielles et dérisoires et qui les fait com- prendre en un clin d’œil. « Le choix des sujets et des chiffres est dicté autant par ma curiosité que par mon ignorance, explique David McCandless. Ce sont juste des questions auxquelles je cherche des réponses.» A l’occasion de la sortie de Datavision, Le Monde a proposé à David McCandless de réaliser cette double page spéciale. Le data-journaliste a choisi de partir d’une donnée omniprésente dans l’actualité et pourtant assez abstraite : le montant de la dette grecque. Mais plutôt que de la comparer classiquement à d’autres dettes, il a choisi d’en faire la base d’une confrontation ludique et pédagogique. David McCandless propose une « promenade » au milieu des milliards, des chiffres que chacun a lus ou entendus au gré des informations glanées au cours des dernières semaines et qui, mis côte à côte, nous en apprennent finalement beaucoup sur le monde dans lequel nous vivons. p Eric Béziat 4 dont cadeaux aux médecins dont antidépresseurs en milliards d’euros Dépensés Gagnés Militarisés Accumulés Dus Donnés Afin d’ajuster les blocs à la marge, certaines proportions ne sont pas exactement respectées. Sources : « Le Monde », CNN, BBC, Forbes et autres médias 18 0123 économie Mercredi 12 octobre 2011 «On s’en sortira», veulent croire les Irlandais Après trois années de récession, l’ancien «Tigre celtique» a renoué avec une croissance fragile Dublin Envoyée spéciale L es indicateurs économiques ont beau confirmer que la reprise est là, eux restent méfiants. « Nous, on ne voit rien venir ! », lâchent-ils un peu dépités, mais sans cesser de sourire. Après trois années de récession, l’île a renoué avec la croissance : au premier trimestre, le produit intérieur brut (PIB) a progressé de «Encore deux budgets d’austérité et la confiance repart!» Antoin Murphy professeur d’économie à l’université de Dublin 1,9 %, puis de 1,6 % au second. Si l’Irlande n’est pas redevenue le « Tigre celtique » d’avant la crise de 2008, elle a su tirer profit des 85 milliards d’euros que lui ont octroyés l’Union européenne et le Fonds monétaire international, il y a un an. Une aide destinée à combler le déficit public (32 % du PIB) provoqué par le renflouement des banques irlandaises, ruinées par la spéculation immobilière. La population, elle, semble un peu sonnée par le plan d’austérité dugouvernement. Baisses de salaire. Suppressions d’emplois dans le secteur public. Hausses des impôts et des taxes. Coupes sombres dans les budgets sociaux… Ce traitement de cheval, échelonné sur plusieurs années, paraît sans fin aux Irlandais. Chacun redoute le prochain tour de vis, attendu pour décembre. A l’occasion du nouveau budget, le gouvernement pourrait décider d’économiser 4 milliards d’euros, au lieu des 3,6 annoncés. « L’hiver sera rude pour les plus démunis », prévoit Brid O’Brian, responsable de l’Organisation nationale irlandaise des sansemploi. Les dernières statistiques sur la pauvreté datant de 2009, on ne connaît pas encore l’impact exact de toutes ces coupes. A défaut d’avoir trouvé un emploi en bonne et due forme, Kathleen Murphy, habitante du Dans les rues de Dublin. DEREK SPEIRS/« THE NYT »-REDUX-REA comté de Wiclow, proche de Dublin, donne des cours de cuisine à des particuliers. « Quand la crise est arrivée, le nombre de mes inscrits à chaque session a dégringolé de moitié. Suivre des cours du soir, et encore plus de cuisine, c’est devenu un luxe ! », explique cette mère de famille de 42 ans. Au même moment, Brian, son mari, contremaître dans le bâtiment, s’est retrouvé au chômage, le secteur de la construction subissant de plein fouet l’explosion de la bulle immobilière. Frappé quelques mois plus tard par des problèmes de santé, Brian s’est vu octroyer une pension d’invalidité. Toute la famille vit de ce maigre revenu. Mais cette subvention n’a pas échappé au plan d’austérité : elle vient d’être amputée de 12 %. « Depuis la crise, mes revenus ont chuté de 50 %. Je travaille désormais douze heures par jour, six jours sur sept pour m’en sortir », explique un chauffeur de taxi, sans chercher à se faire plaindre. Sa fille, dit-il, est « étranglée » par les dettes qu’elle a contractées en 2004 auprès des banques pour acheter 290 000 euros « une mai- son qui n’en vaut plus aujourd’hui que 115 000 ». Pour cet homme d’une cinquantaine d’années, l’Irlande n’est « pas encore tirée d’affaires ». Mais « on s’en sortira ! » affirme-t-il avec énergie. «Les Irlandais sont plus pragmatiques que déprimés, » remarque Alan Dukes, président de l’AngloIrish Bank. Ils se disent : “ Nous avons eu une dizaine d’années de prospérité. Il y a un prix à payer ! ” » Pour cet ex-ministre des finances, la reprise vantée aujourd’hui à Dublin est «relative ». Ce qui le soucie, ainsi que de nombreux autres experts, c’est que la croissance de l’île repose presque exclusivement sur ses exportations. L’Irlande s’est ainsi transformée « en une économie à deux vitesses », souligne Alan McQuaid, économiste chez Bloxham. D’un côté, il y a les multinationales installées dans l’île, exportatrices de produits high tech tels que des ordinateurs, ainsi que de produits chimiques et pharmaceutiques. Bien que menacées par le ralentissement de l’économie mondiale, ces entreprises sont en bonne santé. De l’autre côté, il y a les entrepri- ses irlandaises, qui, elles, broient du noir. Elles dépendent d’une consommation intérieure rendue atone par les mesures d’austérité successives et la peur de la population face à l’avenir. Le pire est-il passé pour l’Irlande ? « Je le crois. Mais comment en convaincre ceux qui sont écrasés par des dettes ou au chômage ? La La vague d’émigration se poursuit et même s’amplifie. Quelque 40000 Irlandais ont encore quitté l’île en 2010 reprise de la consommation est essentielle mais elle est loin d’être garantie », souligne John FitzGerald, professeur à l’Economic and social Research Institute (ESRI) « Encore deux budgets d’austéritéet la confiance repart!» pronostique Antoin Murphy, professeur d’économie à l’Université de Dublin.Pour lui, l’Irlande va rebondir grâce à « la troisième généra- tion Internet » : Google, Facebook, Intel, Twitter, toutes ces sociétés qui s’installent à Dublin et dont le marché croit « à une vitesse exponentielle ». L’île va rester ce qu’elle est de longue date : « la tête de pont » entre la Silicon Valley et l’Europe, selon M. Murphy. Et l’attractivité de l’Irlande ne tient pas seulement au taux d’imposition extrêmement bas (12,5 %) qu’elle offre aux entreprises, dit-il, mais à la flexibilité de sa force de travail, à sa compétitivité, et enfin à l’absence de bureaucratie. « Sarkozy nous accuse d’être un paradis fiscal ! Ça ne manque pas de piquant quand on sait qu’un quart des entreprises du CAC 40 ne sont pas taxées ! » s’esclaffe de son côté Brian Lucey. Pour cet enseignant en finances au Trinity College de Dublin, l’Irlande doit penser davantage à elle si elle veut se sortir durablement de la crise. Plutôt que de continuer à renflouer sans fin « des banques moribondes », comme le lui imposent ses partenaires de l’UE, afin d’empêcher que le système bancaire européen soit contaminé par la crise, les responsables irlandais feraient mieux, estime-t-il, d’utiliser ces fonds pour s’attaquer au fléau du chômage. De 4 % pendant les années fastes, le taux des sans-emploi est passé à 14 %. Chez les jeunes, il dépasse même les 20 %. Plus grave : le nombre de chômeurs de longue durée a augmenté de 24 % en un an. Conséquence : la vague d’émigration se poursuitet même s’amplifie. Quelque 40 000 Irlandais ont encore quitté l’île en 2010. Si les parents vivent douloureusement le départ de leurs enfants, les jeunes, au contraire, le considèrent comme une opportunité à saisir. Le principal motif d’inquiétude, en fin de compte, c’est la situation en Europe. « Combattre un problème à l’intérieur de nos frontières, nous avons prouvé que nous en étions capables, souligne Thomas Molloy, journaliste économique à l’Irish Independant. Mais que faire si l’économie européenne s’écroule ? Ca nous angoisse. On se dit tous : “ainsi, nous aurions fait tous ces sacrifices pour rien ?” » p ce que l’on voit et ce que l’on ne voit pas ». Thomas Sargent vient de recevoir le prix Nobel pour avoir précisé que ce que l’on ne voit pas est souvent diffus. Christopher Sims pour avoir avancé que ce que l’on ne voit pas est souvent aléatoire et difficilement modélisable par l’économétrie. p Jean-Marc Daniel Nicole Vulser Florence Beaugé Les Américains Thomas Sargent et Christopher Sims ont reçu le prix Nobel d’économie lundi 10octobre L On peut affirmer que ce choix a renoué avec la quintessence de la science économique moderne ri Thomas Sargent, ce qui se passe sur le Vieux Continent ne pose «pas de questions nouvelles pour la théorie économique. La difficulté, c’est la politique ». L’économiste prône de suivre la voie choisie par les Etats-Unis pour résoudre la crisebudgétairedesestreizeEtatsfondateurs après l’indépendance de 1776 : ils décidèrent de restaurer leur crédibilité en unissant leurs budgets avec la Constitution de 1787. Cetteannée,lesPrix Nobel d’économie sont des macro-économistes. Comme ils sont américains et qu’ils ont un parcours académique exemplaire, on peut affirmer que ce choix a renoué avec la quintessence de la science économique moderne. Leurs travaux sont nés dans les années 1970 de la volonté des économistes d’alors de renouveler les certitudes keynésiennes ébranlées par la stagflation. L’économie néo-classique du XIXe siècle avait théorisé l’équilibre entre l’offre et la demande sur tous les marchés. Celle du XXe siècle, organisée autour du keynésianisme, a théorisé le cycle, c’est-à-dire lasuccessionde phasesdecroissanceet derécession,l’ampleur dechaque cycle pouvant être limitée par la politique économique. Dépassant ces deux approches, les deux lauréats, que l’on peut rattacher à l’école de la « nouvelle macroéconomie classique », se sont demandé, chacun à sa manière – Sims en spécialiste de l’analyse mathématique des séries temporelles, Sargent en théoricien des anticipations rationnelles et analyste de l’histoire économique – si les économistes ne se fourvoyaient pas en donnant une cohérence logique à des enchaînements nés du hasard ou des justifications savantes à des erreurs malheureuses. Ils se sont également interrogés sur la façon dont les éléments de long terme et de court terme inter-réagissent. Christopher Sims, au fond, et Thomas Sargent, le 10 octobre à Princeton (New Jersey). WILLIAM THOMAS CAIN/GETTY IMAGES ThomasSargent a publié en 1981 avec Neil Wallace un texte – Some unpleasant monetarist arithmetic– devenu une référence quiillustre sa démarche. Le raisonnement est le suivant: supposons que la Banque centrale durcisse sa politique monétaire pour se défaire de l’inflation. Les taux d’intérêt montent, provo- quantun ralentissement économique.L’Etatrépondparuneaugmentation de son déficit budgétaire dont la charge finit par être insupportable. Conséquence, les autorités économiques n’ont d’autre solution que de provoquer… une nouvelle vague d’inflation. Comme l’écrivait Frédéric Bastiat au milieu du XIXe siècle, « il y a J ean-Louis Scherrer, le couturier qui habillait Jackie Kennedy, Sophia Lauren et Raquel Welch de somptueuses robes à imprimés ou à pois, assiste depuis une vingtaine d’années, sans pouvoir s’en mêler, aux péripéties de la marque qui porte son nom. Cette griffe, fondée en 1962 a été rachetée à l’homme d’affaires Alain Duménil par le groupe français JSB International, détenu par trois frères, Jean, Serge et Bruno Bensoussan. L’opération a été annoncée, lundi 10 octobre. Son montant reste confidentiel. JSB International est spécialisé dans l’immobilier d’entreprise et l’import-export de produits de luxe. Peut-être tout simplement parce que sa mère était une fidèle cliente du couturier, Bruno Bensoussan souhaite « donnerà la griffeun nouveau souffle, en se concentrant sur la gestion des licences ». JSB a acquis le portefeuille de licences (lunettes, maroquinerie, mode homme, cadeaux) et espère relancer dès l’an prochain le prêt-à-porter féminin. Il négocie avec des producteurs et des distributeurs pour redémarrer dans l’Hexagone la fabrication de ces collections. Le nouveau repreneur se donne pour objectif de « rentabiliser la marque d’ici à cinq ans ». La licence des parfums (dont les trois fragrances historiques, « Jean-Louis Scherrer », « Scherrer 2 » et « Nuits Indiennes ») avait, elle, déjà été cédée, voici cinq ans, à un groupe britannique. Procès retentissants L’histoire de cette griffe a été très mouvementée et émaillée par des procès retentissants concernant la vente et l’utilisation du nom de son créateur. Danseur de formation, Jean-Louis Scherrer avait dû, très jeune, avant de sortir du conservatoire de Paris, abandonner le métier auquel il se destinait pour se reconvertir après un grave accident. « A l’hôpital, je dessinais des croquis, des modèles de vêtements féminins pour m’occuper », dit-il. Non sans talent puisqu’il travaille très rapidement, de 1956 à 1959, aux côtés de Christian Dior et Yves Saint Laurent. Il présente sa première collection en 1963 dans une ancienne cave à vins de la rue du faubourg Saint-Honoré à Paris. Plusieurs financiers vont se succéder pour l’épauler : d’abord Francis Francis, un Américain, qui avait bâti sa fortune dans le pétrole puis, de façon plus pacifique, le groupe de cosmétiques Orlane. Celui qui a relancé la mode du pantalon large à la fin des années 1980 s’est ensuite allié, en avril1990,augroupejaponaisSeibu et à Hermès. A l’apogée de son aventure, l’entreprise qui porte son nom emploie plus de 150 personnes et ses boutiques essaiment dans les principales capitales du luxe. Le contrat de directeur artistique de M. Scherrer était prévu jusqu’en 2000. Mais Seibu « a inventé une faute grave à mon encontre. J’ai été licencié en 1992 », explique-t-il sans cacher une « désillusion énorme ». « Les Japonais ont une vision de la mode un peu différente de la nôtre. Nous avions été partenaires pendant dix ans, avec vingt-sept boutiques au Japon. J’ai ensuite gagné mon procès, mais même si j’ai eu des dommages-intérêts, j’ai perdu ma situation, ma vie, mon nom », regrette-t-il. Depuis 2002, le dernier repreneur, Alain Duménil – mis en examen dans le dossier de la liquidation de Stephane Kelian en 2005 – avait enterré la marque au fil des années. Il avait d’abord décidé d’arrêter les défilés haute couture, fermé les dernières boutiques JeanLouis Scherrer et licencié les salariés de la griffe en 2008. p Petite leçon de macroéconomie aux dirigeants de la zone euro ors d’une conférence de presse à Princeton, lundi 10 octobre, les deux lauréats du prix Nobel d’économie 2011 – Thomas Sargent et Christopher Sims – ont donné une petite leçon de macroéconomie aux dirigeants de la zone euro. « Il y a tout à fait la place pour que [les économistes] donnent des conseils aux politiques », a assuré Christopher Sims. De fait, a renché- Mode: nouveau propriétaire pour la marque Scherrer 0123 économie & Médias Mercredi 12 octobre 2011 19 Sous l’œil de l’Elysée, Après la démission d’Eckhard Cordes, le groupe Hersant le groupe Metro cherche un pilote Le premier groupe de distribution allemand sort miné par quatre ans de restructurations se rapproche du belge Rossel Berlin Correspondance L e Groupe Hersant Médias (GHM), lourdement endetté, pourrait bientôt passer sous le contrôle du groupe de presse belge Rossel, selon une information de RTL. Une réunion a eu lieu, lundi 10 octobre à Bercy en présence des représentants des deux groupes et des banques créancières pour étudier ce rapprochement. Une nouvelle réunion, vendredi 14 octobre, devrait permettre de conclure un accord entre les deux parties, selon PresseNews,quiaboutiraitàlacréationd’uneholdingdétenue àparité par GHM et Rossel. Dirigé par Philippe Hersant, GHM est ce qui reste de l’empire bâti dans les années 1980 par Robert Hersant. Il est aujourd’hui engagé à hauteur de 300 millions d’euros, dont 80 millions de créances auprès de la famille Hersant et 200 millions de dette bancaire. Le groupe de presse a réalisé des acquisitions coûteuses au cours des dix dernières années, en achetant la Comareg en 2003 et le pôle des journaux du Sud en 2007, avec La Provence et Nice-Matin. Or, avec Internet, le marché de la presse d’annonces gratuites s’est effondréen 2008,et la Comarega été placée en redressement judiciaire en novembre 2010. GHM souffre également d’une structure éclatée en quatre pôles, qui empêche toute synergie notamment en termes d’imprimerie. Les journaux du pôle Sud publient La Provence, Nice Matin, Var Matin et Corse Matin. Le pôle Est contrôle L’Est éclair, Libération Champagne, L’Union de Reims et l’Ardennais. Le pôle normand comprend Paris Normandie. Enfin, le pôle outre-mer, qui fait partie du noyau historique du groupe Hersant, inclut France Antilles, France Guyane, Les Nouvelles calédoniennes, La Dépêchede Tahitiet LesNouvelles de Tahiti. Le comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) de Bercy a fortement encouragé GHM à trouver un partenaire. Cette opération s’est faite sous l’œil vigilant de l’Elysée, très attentif au devenir de la presse régionale. Selon RTL, Bercy aurait demandé aux banques de GHM de renoncer à 125millions d’euros de dettes. Depuis plusieurs mois, le groupe Rossel, propriétaire du quotidien Le Soir de Bruxelles et de La Voix du Nord à Lille, cherche à investir dans la presse quotidienne régionale française. En juin, Bernard Marchant, administrateurdélégué du groupe Rossel, déclarait au Monde qu’il regardait avec attention toutes les opportunités. Etape supplémentaire « La presse régionale est l’un des médias les plus performants, mais il faut qu’il y ait des effets de taille critique et des alliances, insistait-il. A terme, il faudrait deux à quatre groupes en France, guère plus. Nous regardons plutôt les journaux proches de notre zone. » Sollicité lundi soir par l’AFP à Bruxelles, Bernard Marchant a laissé entendre qu’un accord était bien en préparation entre les deux entreprises de presse, tout en soulignant qu’il ne s’agissait pas d’un rachat de Hersant par Rossel. Le groupe belge avait tenté de réaliser un montage du même ordre avec le groupe Centre-Presse La Montagne fin juin. Le projet avait finalement échoué, le groupe de Clermont-Ferrand renonçant à conclure l’accord. Le rapprochement entre Groupe Hersant Médias et Rossel marque une étape supplémentaire dans une concentration de la presse quotidienne régionale qui semble inéluctable. On voit se dégager aujourd’hui six grands pôles. D’abord le groupe EBRA (Est-Bourgogne-RhôneAlpes), propriété du Crédit Mutuel, qui contrôle une dizaine de quotidiens dans le grand Est ; ensuite, le groupe Ouest France, dirigé par François-Régis Hutin. Viendrait ensuite la nouvelle entité formée par le groupe Rossel et GHM, dont onne connaîtpas encore lepérimètre exact. Puis, le groupe SudOuest, propriété de la famille Lemoine, qui cherche un investisseur, et le groupe Centre-Presse La Montagne. Enfin, le groupe Amaury, qui publie Le Parisien. p E ckhard Cordes quitte le navire Metro, au milieu de la tempête qu’il a lui-même semée. Après plusieurs semaines de rumeurs sur son départ, suivies d’un court retour en grâce, l’enfant terrible du capitalisme allemand n’a pas pu résister à la pression. Dimanche 9 octobre, il a déclaré ne plusdisposer de la confiance nécessaire pour poursuivre son mandat, qui devait s’achever en 2012. Selon la presse allemande, il pourrait partir aussitôt qu’un remplaçant sera trouvé. Celui-ci devra reprendre la barre d’un groupe en plein désarroi, après quatre ans de restructurations tous azimuts. A l’ouverture de la Bourse de Francfort lundi matin, le titre a dévissé de près de 7%. Ironie de l’histoire, la démission de M. Cordes intervient à la veille 19 000 postes supprimés Malgré une politique des prix toujours plus offensive, Saturn et Media Markt ont vu leurs parts de marché rabotées mois après mois par le géant Amazon et les dizaines de sites Internet de vente de matériel électronique. Depuis lundi, Saturn vend directement sur son site, tout en offrant la possibilité à ses clients de rendre ou d’échanger leurs produits dans un des 235 magasins ouverts en Europe. Un atout qui pourrait faire la différence au moment des fêtes, espère la direction. Avec Media Markt, qui devait être mis en ligne début2012,legroupeprévoitderéaliser 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur Internet d’ici à 2016. Cela suffira-t-il à apaiser l’ambiance chez Metro ? A en croire les syndicats, il faudra du temps pour que le personnel se remette des grands projets de M.Cordes, connu pour sa détermination à tailler dans les coûts. Depuis son arrivée en 2007, 19 000 postes ont été supprimés. Objectif : économiser 1,5 milliard d’euros et recentrer le groupe, fort de 280 000 salariés dans le monde et 68 milliards de chiffred’affairesannuel, sursafiliale Cash & Carry. Mais l’ex-PDG de Mercedes a multiplié les déconvenues. Ni son projet de vente des chaînes de supermarchés Kaufhof et Real, ni sa tentative pour mettre en Bourse l’enseigne Saturn n’ont abouti. Biensûr,la criseest passée parlà. Et le groupe a réalisé en 2010 un résultat historique. Mais les actionnaires ont vu le titre Metro perdre en quatre ansla moitié de sa valeur. Et certains ont peu goûté la politique d’acquisitions de M.Cordes. Acculé par la réduction de ses marges en Europe occidentale, Metro doit aujourd’hui mener à bien sa stratégie d’expansion vers les pays qui promettent une forte croissance: l’Asie centrale, d’abord, puis l’Inde et la Chine, où les enseignes du groupe de Düsseldorf sont quasi inexistantes. Qui succédera à M. Cordes ? Dans la presse allemande, plusieurs noms sont en lice. Outre Olaf Koch, directeur financier chez Metro et Thomas Hübner, actuellement directeur Europe chez Carrefour, le Français Joël Saveuse, ancien de Carrefour et de La Redoute, est régulièrement cité. p Cécile Boutelet © Cinétévé - Medhi - Karim Moui - En cours de concentration, la presse régionale pourrait s’organiser autour de six pôles du lancement du site de vente en lignede Saturn, l’une des deux filiales de Metro (avec Media Markt) spécialiséedans le matériel électronique. Le retard pris par Metro sur cechapitreavait étéaucœurdescritiques adressées à M. Cordes cet été par les actionnaires, alors que les résultats du groupe ont plongé de façoninattendueausecondtrimestre 2011. Xavier Ternisien Presse «France Soir» pourrait arrêter son édition papier Le quotidien France Soir pourrait arrêter son édition papier pour ne paraître que sur Internet, selon une source proche du dossier. La décision devrait être annoncée lors d’un comité d’entreprise, vendredi 14 octobre. Cette mesure s’accompagnerait d’un plan social prévoyant le départ de 80 salariés (sur 120). Seuls 30 journalistes et 10 employés administratifs resteraient dans Les Editions du nouveau France-Soir. A la suite d’une assemblée générale, lundi, les salariés ont décidé d’empêcher la parution du numéro de mardi. Fin août, le quotidien a été placé sous procédure de sauvegarde pour une période de quatre mois. Cette mesure permet de continuer l’activité tout en gelant le paiement des créances. Les pertes du quotidien, racheté en janvier 2009 par Alexandre Pougatchev, fils d’un milliardaire russe, se situent entre 1 et 2 millions d’euros par mois. Ses ventes sont en moyenne de 72 513 exemplaires, entre juillet 2010 et juin 2011 (source OJD, diffusion France payée). ILS ONT TOUT DONNÉ POUR LA LIBERTÉ UNE SÉRIE DOCUMENTAIRE DE BERNARD GEORGE PRODUITE PAR CINÉTÉVÉ 20.40 «Le Monde» absent des kiosques Pour la deuxième édition consécutive, Le Monde n’a pas été imprimé, lundi 10 octobre, à la suite d’un mouvement social dans son imprimerie d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Une assemblée générale devait avoir lieu mardi à 10 heures à l’imprimerie sur la suite à donner au mouvement. Cette grève fait suite à un projet de restructuration de l’imprimerie, la direction du Monde ne souhaitant garder qu’une rotative sur trois à Ivry et effectuer une partie du tirage en région. Cette réorganisation prévoit la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi qui doit se traduire par le départ de plus de 150 personnes sur un quelque 230 salariés. Une partie des salariés, entre 35 et 40, devrait être reclassée dans un centre d’impression opéré par le groupe Riccobono ; d’autres seront pris en charge dans le cadre du plan « Imprime », signé avec la presse quotidienne nationale en 2009, qui prévoit le maintien de 85 % de leur salaire pendant trois ans grâce aux aides de l’Etat. LES 12, 19 ET 26 OCTOBRE DOSSIER SPÉCIAL SUR WWW.ARTE.TV/COMBATTANTS Regardez la bande annonce Un livre et un coffret DVD en partenariat avec 20 0123 économie Mercredi 12 octobre 2011 Pertes et profits | Chronique par Stéphane Lauer Autojustification Face à Amazon, la Fnac contre-attaque sur le marché français des liseuses Associé au canadien Kobo, le distributeur a dévoilé ses nouvelles ambitions, mardi 11 octobre Dexia L e refrain « c’est pas moi, c’est les autres », entonné par les dirigeants de Dexia au lendemain de l’annonce de son démantèlement paraît un peu court pour comprendre la déconfiture de la banque franco-belge. Pierre Mariani, l’administrateur délégué de Dexia et Jean-Luc Dehaene, son président, se sont livrés, lundi 10octobre, à un exercice d’autojustification, qui a de quoi laisser sur leur faim salariés, actionnaires et collectivités locales. Les faillites bancaires ne sont pas si fréquentes pour que l’on puisse décliner toute responsabilité comme a tenté de le faire le tandem, qui dirige Dexia depuis 2008. Premier bouc émissaire pointé du doigt: l’ancienne direction, menée par Pierre Richard. Nous n’avons pas hérité d’une banque, ont plaidé en substance les deux hommes, mais d’un fonds spéculatif. Difficile de leur donner tort. Mais en acceptant leur mission, ils connaissaient la situation que leur avaient laissée leurs prédécesseurs. C’est la raison même pour laquelle les Etats belge et français les avaient mandatés. On ne reproche pas à un pompier d’avoir allumé l’incendie, mais on peut s’interroger sur les moyens qu’il mobilise pour le circonscrire. Le travail mené par la direction de Dexia (vente d’actifs, dégonflement du bilan) est incontestable. Mais il est légitime de se demander si M. Mariani n’a pas trop tardé à restructurer et suffi- samment profondément. Pourquoi avoir laissé en place une partie du management de la gestion des risques et des activités internationales, malgré ses responsabilités sous la précédente direction ? N’aurait-il pas fallu mettre un terme plus rapide à la martingale trouvée par M. Richard, consistant à financer à court terme des prêts à long terme, qui a conduit Dexia dans le mur ? Avec deux ans de plus et sans la crise de la dette souveraine, Dexia aurait été sortie d’affaire, répond la direction, pointant un second bouc émissaire : le gouverne- Il est légitime de se demander si Pierre Mariani n’a pas trop tardé à restructurer ment, et en particulier Christine Lagarde, alors ministre de l’économie, qui avait demandé à Dexia de ne pas céder ses titres de dette souveraine, afin de ne pas aggraver la crise grecque. « Le groupe a fait preuve de naïveté en acceptant ces recommandations», estime M.Mariani. N’estce pas plutôt les marges de manœuvres, qui ont manqué à l’ex-directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère du budget de 1993 à 1995 ? Mais ça, M. Mariani ne pouvait pas l’ajouter à son plaidoyer vis-à-vis de celui l’a placé à la tête de Dexia. p lauer.blog.lemonde.fr Le président de Krief dans le collimateur de la justice Louis Petiet a été mis en examen dans le cadre du rachat en 2008 de la société de textile DMC L e président du groupe Krief, Louis Petiet, a été mis en examen dans une affaire relative à la société DMC, un ancien fleuron de l’industrie textile française. M. Petiet est par ailleurs visé par une plainte dans un autre dossier concernant aussi DMC. Révélée, lundi 10 octobre, par Les Echos, la mise en examen remonte au mois de mars. Elle a été prise par le juge d’instruction Jacques Bourguignon dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour « abus de biens sociaux » et « présentation de compte inexact », précise-t-on au parquet de Mulhouse. D’après ce dernier, la mise en examen porte sur des faits qui concernent « DMC SAS, constituée après la reprise d’éléments d’actifs de DMC SA ». Les agissements susceptibles de poser problème seraient notamment liés à la reprise de fonds de commerce. M. Petiet avait repris, en 2008, avec l’appui d’autres investisseurs, deux entités du groupe DMC : DMC tissus (devenue ensuite SAIC Velcorex) et DMC SA. « Il s’agit d’une procédure ancienne, fait valoir M. Petiet. Nouspensons qu’elle n’a aucun fondement et qu’aucun préjudice n’a été commis au détriment de qui que ce soit. » DMC est une « entreprise magnifique », souligne-t-il, qui affichait, fin 2010, « dans son bilan consolidé, 29 millions d’euros de fonds propres ». M. Petiet, 54 ans, est à la fois un entrepreneur et un élu local dans l’Eure, où il fut responsable départemental de l’UMP. Il a débuté en 1981 comme consultant chez Bernard Krief Consulting, une société de communication et de conseil auprès des entreprises qu’il a par la suite acquise à la barre du tribunal de commerce de Paris. Convaincu qu’il est possible de « réindustrialiser la France, y compris dans des métiers traditionnels », il a acheté, à partir du milieu des années 2000, des parts dans des PME, souvent en difficulté. Plusieurs rachats se sont soldés par des échecs. Début mars 2010, M. Petiet a dû se retirer de l’industriel de l’automobile Heuliez, moins d’un an après s’en être emparé. Cette décision a été prise sous la pression du gouvernement, lassé de constater que le président de Krief n’avait pas injecté les sommes promises pour relancer l’entreprise. « Escroquerie au jugement » Quelques semaines plus tard, SAIC Velcorex a été mise en liquidation judiciaire, faute d’avoir reçu le cash dont elle avait besoin pour poursuivre son activité. Le spécialiste de l’isolation industrielle Isotherma, sauvé en 2008 par Krief, a fermé ses portes deux ans plus tard. Une information judiciaire a été ouverte par le parquet du Havre au sujet de cette entreprise : lors de sa liquidation judiciaire, plusieurs représentants du personnel avaient prétendu que des irrégularités avaient été commises par des managers. La société Blanchard, candidate à la reprise de DMC SA, en 2008, mais dont l’offre avait été rejetée au profit de celle de M. Petiet, a également déposé, en juin, une plainte contre ce dernier pour « escroquerie au jugement ». Le tribunal de commerce s’est prononcé sur la base d’un « mensonge », affirme Me Antoine Beauquier, l’avocat de Blanchard. D’après lui, Krief s’était engagé à apporter des fonds dans l’affaire, mais les sommes n’ont jamais été débloquées. p Bertrand Bissuel L a bataille s’engage sur le marché français des liseuses électroniques. Alors que les lecteurs français n’ont pas encore pris le goût de lire romans ou BD sur ces lecteurs numériques, de nombreux acteurs sont prêts à les inciter à changer leurs habitudes. Et espèrent les convaincre de faire de la liseuse un de leurs cadeaux de Noël de prédilection. Parmi eux, l’américain Amazon, qui lance son Kindle à l’assaut du marché hexagonal. Mais aussi la Fnac qui dévoile, mardi 11 octobre, ses nouvelles ambitions en annonçant un partenariat avec le canadien Kobo. Ou encore le japonais Sony. Sans oublier des outsiders, comme le français Bookeen. Amazon, le géant du commerce en ligne, a dégainé le premier, le 7 octobre. L’entreprise qui détient près de la moitié du marché des liseuses aux Etats-Unis, veut étendre ses prérogatives en Europe. Elle a choisi une politique de prix très agressive pour tenter de prendre très vite des parts de marché. Son Kindle sera commercialisé, à partir du 14 octobre, au prix de 99 euros. Mais à ce tarif, difficile de trouver des réseaux de distribution disposés à jouer le jeu. D’où pour l’instant, un seul canal de vente : celui du propre site Internet d’Amazon. Cette stratégie impose aussi de privilégier un modèle rustique : les clients français ne se verront pas proposer les produits les plus sophistiqués de la gamme commercialisés aux Etats-Unis, mais un modèle d’entrée de gamme, doté d’un écran non-tactile. Le géant américain, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 34 milliards de dollars en 2010, compte sur sa force de frappe pour développer un marché balbutiant. LaFnacavaitbienlancé,ilyaquasiment un an, avec sa propre liseuse, le Fnacbook, mais sans rencontrer le succès espéré. Le distributeur s’était allié à la société Sagem pourconcevoirunesolutiontechnique. Mais parvenir à résoudre l’équation d’une offre de produits et de services attractive s’est avéré plus complexe que prévu. La société, dirigée désormais par Alexandre Bompard, a décidé de repartir à l’attaque avec un autre partenaire, le canadien Kobo. Cette société qui a développé une offre de livres en ligne téléchargeables sur « smartphones », tablettes ou ordinateurs a conçu sa propre liseuse. En juin, elle a lancé aux Etats-Unis un modèle à écran tactile à un prix, là encore très agressif, de 129 dollars (95 euros). Réseaux de libraires En outre, Kobo fait le lien entre sa plate-forme de lecture numérique et les réseaux sociaux, afin que les lecteurs échangent leurs commentaires et recommandations. Elle revendique 3,6 millions de membres inscrits. Cet acteur s’est associé à des réseaux de libraires pour se développer en Amérique du Nord. Il revendique 10 % du marché de la lecture numérique aux Etats-Unis. Depuis quelques mois, il souhaite se développer en Europe et cherche des partenaires. Sa route a croisé celle de la Fnac en France. Mais Amazon et la Fnac ne sont pas seuls en lice. Le géant japonais Sony, un des pionniers de ce marché de la lecture numérique, poursuit l’aventure avec son Reader. Et France Loisirs propose le Oyo. Face à ces poids lourds, une PME française, Bookeen, tente de jouer sa carte. Fondée en 2003, elle a lancé son premier modèle en 2007. « Nous avons vendu 120 000 exemplaires en Europe », affirme Michael Dahan, cofondateur de la société. En novembre, elle commercialisera le Cybook Odyssey, à écran tactile et affichage rapide à un prix proche de 130 euros. Toutes ces initiatives prouvent que, malgré le succès des tablettes numériques, le marché des liseuses existe. Avec leur écran à encre électronique noir et blanc pour le confort de lecture, leur autonomie et leur prix accessibles, elles trouvent leur public. Selon le cabinet d’études IDC, il pourrait se vendre 27millions deliseuses dans lemonde en 2011, soit un quasi-doublement du marché en un an. p Laurence Girard Conjoncture et entreprises Transports La SNCF va étendre le contrôle à l’embarquement Finance La SNCF va étendre peu à peu en 2012 sur le réseau TGV le contrôle des billets à l’embarquement pour lutter contre les agressions à bord des trains, a annoncé, lundi 10octobre, la directrice de la relation clients, Patricia Lacoste, à l’issue d’une réunion avec les syndicats sur la sûreté. Déjà en place à Marseille, ce dispositif va être testé sur l’axe Paris-Rennes début 2012, puis au cours de l’année sur les quatre lignes TGV. «Nous constatons que 60 % des agressions à bord sont le fait de voyageurs sans billet », selon Mme Lacoste. – (AFP.) Central Huijin Investment, un des bras financiers du fonds souverain chinois CIC, a indiqué, lundi 10 octobre, avoir augmenté sa participation dans les quatres plus importantes banques publiques du pays, dont il est déjà le premier actionnaire : Industrial & Commercial Bank of China (ICBC), Agricultural Bank of China, Bank of China et China Construction Bank. Une opération destinée à soutenir les cours en Bourse de ces valeurs, affectées, malgré l’importante croissance chinoise, par les inquiétudes sur la zone euro et par leur forte exposition à la dette des collectivités locales. Les banques sont également affectées par le resserrement monétaire mené par Pékin pour juguler l’inflation, notamment des prix de l’immobilier. Central Huijin Investment n’a pas donné d’indication sur le nombre d’actions achetées, mais a précisé que ces opérations se poursuivraient. – (Bloomberg, Reuters.) Pékin contraint d’aider ses banques Média Le patron du groupe allemand Bertelsmann va quitter son poste Le patron du géant allemand des médias Bertelsmann, Hartmut Ostrowski, va quitter son poste le 1er janvier 2012, soit un an plus tôt que prévu, a indiqué le groupe allemand lundi 10 octobre. M. Ostrowski, 53 ans, cédera sa pla- ce au directeur financier Thomas Rabe, 46 ans, pour devenir président du conseil de surveillance. Bertelsmann – présent dans l’audiovisuel (groupe RTL), la presse (Gruner + Jahr)… – a expliqué ce changement pour « des raisons personnelles ». – (AFP.) Conjoncture Les Japonais reprennent confiance L’indice général de confiance des Japonais s’est établi à 38,6 points Marchés Finance Le délit d’initié de l’affaire Pechiney jugé fin avril en correctionnelle Cinq financiers soupçonnés d’avoir commis un délit d’initié lors du rachat de Pechiney par Alcan en juin 2003 comparaîtront Spiritueux Le PDG de Belvédère remplacé par son numéro deux Le groupe de spiritueux Belvédère (anisette Marie Brizard, vodka Sobieski, whisky William Peel…), en proie à de graves difficultés, a annoncé, mardi 11 octobre, le remplacement de son PDG, Jacques Rouvroy, par son directeur général et cofondateur Krzysztof Trylinski. Belvédère, dont la dette s’élève à 375 millions d’euros, a été placé en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Nîmes en septembre. – (AFP.) Retrouvez l’ensemble des cotations sur notre site Internet :http://finance.lemonde.fr LES BOURSES DANS LE MONDE 11/10, 9h47 VALEURS DU CAC40 Mardi 11 octobre 9h45 Valeur en septembre, selon le résultat d’une enquête gouvernementale publiée mardi 11 octobre. Après la catastrophe du 11mars, il était tombé à 33,1 points en avril. – (AFP.) les 30 avril, 2, 7 et 9 mai 2012 devant le tribunal, a décidé, lundi 10 octobre, la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Après des mouvements inhabituels dans le mois précédant le lancement du rachat par Alcan, l’Autorité des marchés financiers (AMF) avait lancé une enquête et condamné sept personnes à une amende de 4 millions d’euros. Parallèlement une enquête judiciaire avait été lancée. – (AFP.) Pays Dernier cours Cours préc. ACCOR .........................◗ 21,41 AIR LIQUIDE .......................◗ 90,77 ALCATEL-LUCENT ...........◗ 2,02 ALSTOM ............................◗ 25,40 ARCELORMITTAL................ 13,76 AXA ....................................◗ 11,51 33,19 BNP PARIBAS ACT.A ........◗ BOUYGUES .......................◗ 25,74 CAP GEMINI ......................◗ 27,16 CARREFOUR .....................◗ 17,41 CREDIT AGRICOLE ............◗ 5,44 DANONE ............................◗ 45,34 21,70 EADS ...................................◗ EDF ......................................◗ 22,89 ESSILOR INTL ....................◗ 52,15 FRANCE TELECOM ............◗ 12,91 GDF SUEZ ...........................◗ 23,64 LAFARGE ...........................◗ 28,30 L’OREAL ............................◗ 76,75 LVMH MOET HEN. ............◗ 109,80 MICHELIN...........................◗ 47,08 PERNOD RICARD...............◗ 62,34 PEUGEOT............................◗ 17,96 PPR .....................................◗ 104,50 PUBLICIS GROUPE ...........◗ 33,45 RENAULT............................◗ 26,96 SAFRAN ..............................◗ 24,82 SAINT-GOBAIN..................◗ 32,95 SANOFI ...............................◗ 49,77 SCHNEIDER ELECTRIC .....◗ 45,25 SOCIETE GENERALE .........◗ 20,98 STMICROELECTR. .............◗ 5,34 SUEZ ENV. ..........................◗ 10,79 TECHNIP.............................◗ 63,23 TOTAL .................................◗ 35,33 UNIBAIL-RODAMCO ........◗ 143,80 VALLOUREC .......................◗ 47,50 VEOLIA ENVIRON. .............◗ 11,11 VINCI...................................◗ 34,65 VIVENDI ..............................◗ 16,20 21,85 90,99 2,06 25,44 13,76 11,53 32,48 25,80 26,87 17,54 5,38 45,56 21,80 22,77 53,48 12,99 23,83 28,30 77,00 110,10 46,94 62,59 18,15 104,00 33,31 26,86 24,82 33,17 50,06 45,18 20,75 5,44 10,81 63,45 35,91 144,25 47,68 11,01 34,40 16,23 % var. /préc. % var. 31/12 Plus haut -2,01 -35,71 -0,24 -4,09 -1,80 -7,43 -0,16 -29,07 n/d -48,96 -0,13 -7,55 2,17 -30,29 -0,23 -20,20 1,06 -22,26 -0,71 -35,40 1,19 -42,72 -0,49 -3,58 -0,48 24,40 0,51 -25,44 -2,49 8,25 -0,62 -17,22 -0,78 -11,94 n/d -39,67 -0,32 -7,62 -0,27 -10,80 0,30 -12,34 -0,40 -11,40 -1,05 -36,78 0,48 -12,18 0,41 -14,23 0,39 -38,02 -0,02 -6,34 -0,66 -14,40 -0,59 4,00 0,15 -19,20 1,11 -47,82 -1,69 -30,93 -0,28 -30,19 -0,35 -8,49 -1,60 -10,90 -0,31 -2,84 -0,38 -39,57 0,95 -49,20 0,71 -14,84 -0,18 -19,78 36,20 100,65 4,47 45,32 28,55 16,16 59,93 35,05 43,38 31,98 12,92 53,16 25,39 32,75 57,72 16,65 30,05 48,76 91,24 132,65 68,54 72,78 33,60 132,20 41,84 50,53 30,50 47,64 56,82 61,83 52,70 9,73 15,99 78,14 44,55 162,95 89,58 24,30 45,48 22,07 Plus bas Divid. net Code ISIN 18,60 0,62 T FR0000120404 80,90 2,35 T FR0000120073 1,74 0,16 T FR0000130007 21,91 0,62 T FR0010220475 10,46 0,16 A LU0323134006 7,88 0,69 T FR0000120628 22,72 2,10 T FR0000131104 20,88 1,60 T FR0000120503 21,98 1,00 T FR0000125338 14,65 1,08 T FR0000120172 4,01 0,45 T FR0000045072 41,92 1,30 T FR0000120644 17,55 0,19 T NL0000235190 17,89 0,58 S FR0010242511 46,60 0,83 T FR0000121667 11,12 0,60 A FR0000133308 18,32 0,67 S FR0010208488 22,29 1,00 T FR0000120537 68,83 1,80 T FR0000120321 94,16 1,40 S FR0000121014 40,20 1,78 T FR0000121261 56,09 0,67 A FR0000120693 14,51 1,10 T FR0000121501 90,50 3,50 T FR0000121485 29,10 0,70 T FR0000130577 22,07 0,30 T FR0000131906 21,41 0,50 T FR0000073272 26,07 1,15 T FR0000125007 42,85 2,50 T FR0000120578 35,94 3,20 T FR0000121972 14,31 1,75 T FR0000130809 3,96 0,09 A NL0000226223 10,02 0,65 T FR0010613471 52,85 1,45 T FR0000131708 29,40 0,57 A FR0000120271 124,05 2,70 D FR0000124711 38,34 1,30 T FR0000120354 9,38 1,21 T FR0000124141 29,49 1,15 S FR0000125486 14,10 1,40 T FR0000127771 Cours en euros. ◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'animation. Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2011. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité. Indice Dernier cours % var. Maxi 2011 Mini 2011 PER CAC 40 3141,58 11/10 -0,63 4169,87 16/2 2693,21 23/9 9,10 DAX Index 5841,81 11/10 -0,09 7600,41 2/5 4965,80 12/9 9,00 ROYAUME UNI FTSE 100 index 5385,47 11/10 -0,25 6105,77 21/2 4791,01 9/8 8,40 ETATS-UNIS Dow Jones ind. 11433,18 11/10 2,97 12876,00 2/5 10404,49 4/10 11,10 FRANCE ALLEMAGNE JAPON Nasdaq composite 2566,05 11/10 3,50 2887,75 2/5 2298,89 4/10 15,80 Nikkei 225 8773,68 11/10 1,95 10891,60 17/2 8227,63 15/3 12,90 PER - Price Earning Ratio (ou cours/bénéfice) : cours de Bourse divisé par le bénéfice par action estimé pour l'exercice courant. PER : FactSet JCF Estimates ; données : la Cote Bleue. n/d : valeur non disponible. (Publicité) SICAV ET FCP 0123 LA BOUTIQUE SÉLECTION publiée sous la responsabilité de l'émetteur Dernier cours connu le 11/10 à 9h Valeur Cours en euro date valeur CM-CIC EUROPE 20,36 7/10 Du lundi au vendredi 9 h 30 à 18 h Samedi 10 h à 14 h Fonds communs de placements CM-CIC EURO ACTS C 16,15 7/10 CM-CIC SELECT.PEA 6,63 7/10 CM-CIC MID EUROPE 17,99 7/10 CM-CIC TEMPERE C 162,32 7/10 CM-CIC DYN.EUROPE 29,30 7/10 CM-CIC FRANCE C 27,12 7/10 CM-CIC EQUILIBRE C 65,91 7/10 CM-CIC DYNAM.INTLE 24,60 7/10 CM-CIC OBLI C.T.D 132,69 10/10 CM-CIC MID FRANCE 29,74 7/10 ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ 80, boulevard Auguste-Blanqui - 75013 Paris 01 57 28 29 85 - http://boutique.lemonde.fr/ 0123 décryptages REPORTAGE Mercredi 12 octobre 2011 Des soldats français sur la base de Tora, le 27 septembre. ALBERT FACELLY POUR « LE MONDE » Drôledeguerre à Tora Paris a décidé d’une pause dans les opérations menées par son armée en Afghanistan. Alors que le calendrier du retrait se précise, les soldats ont compris qu’il fallait un «niveau de pertes compatible» avec l’état de l’opinion à quelques mois de l’élection présidentielle Nathalie Guibert Tora (Afghanistan) Envoyée spéciale L e calme domine la vallée de Tizine. Nul taliban, dans ces gorges perdues du district de Surobi, à l’est de la région de Kaboul. Le dernier événement notable, l’explosion d’une bombe artisanale sous une voiture de la police afghane, a eu lieu en 2010. Autant dire une éternité. Dans ce cul-de-sac argileux, ravagé par les crues dès l’automne, les villageois ont planté du maïs pour leurs bêtes, et du cannabis. Ces taches vert vif sont posées bien à l’écart des passages, minés depuis l’occupation soviétique. La sécurité règne à Tizine. Ce mercredi 28 septembre, c’est pourtant une colonne de trente blindés afghans, français et américains, couverts par les drones et les avions de l’OTAN, qui prend la piste défon- cée menant à Teree-Kaley, village des plus reculés. Dans cette région sous responsabilité française, l’heure est à la « transition ». Les forces afghanes doivent maintenant se placer en première ligne pour assurer la sécurité du pays d’ici à 2014. Les Occidentaux, rester en appui. Les forces françaises sont entrées dans une drôle de guerre. Car la « transition » masque un changement majeur : Paris a décidé d’une pause dans les opérations. Le coup de frein a été confirmé par l’Elysée après un gros accrochage le 7 septembre en Kapisa, région voisine sous mandat français. Un lieutenant est mort, vingt soldats ont été blessés. Rompant avec ses habitudes, l’état-major donnait alors un bilan des pertes ennemies. Paris espère que la calme Surobi figurera dans la prochaine liste des régions transférées par l’OTAN au gouvernement afghan. L’annonce du président Karzaï est attendue fin octobre. En préparation, l’armée afghane a dirigé, du 1er au 6 octobre, une vaste opération de fouilles dans le district. Des combats ont eu lieu. Quinze insurgés ont été tués, un Français blessé. Militaires et policiers ont quitté au matin la base de Tora, au nord, vers Tizine. Une mission de reconnaissance. A Teree-Kaley, ils réunissent les chefs de village pour préparer une visite du sous-gouverneur local. « Je le coache. Je fais de la politique. Il faut amener l’Etat afghan dans les vallées », résume le colonel Lionel Jeand’heur, qui commande depuis juin en Surobi le groupement 15-2, constitué autour du 152e régiment d’infanterie de Colmar (Haut-Rhin). Un dossier urgent doit avancer, celui de l’installation de la « police locale ». Dans tout l’Afghanistan, les forces spéciales américaines arment ces milices de villages censées combler les trous laissés par la police et l’armée nationales. Elles comptent déjà 8 000 hommes, il pourrait y en avoir 30 000. Celles de Surobi auront la PANCHIR Mahmud KAPISA PARWAN Vallée d’Uzbin Kaboul Tora Surobi LAGHMAN KABOUL Tizine Jagdalak WARDAK Jalalabad NANGARHAR LOGAR AFGHANISTAN 50 km « french touch ». Les maleks (notables) de Tizine font plutôt bon accueil : « Ici, tous sont policiers, des petits jusqu’aux grands », dit l’un d’eux. Depuis début septembre, le 15-2 n’est plus au feu comme il le fut chaque jour de l’été. Ni en Surobi, où les militaires sont prêts depuis des mois à passer la main. Ni en Kapisa, où l’on en n’est pourtant pas là. Dans les vallées de Tagab, d’Alasay ou de Bedraou, les insurgés sont plus violents que jamais. Les deux groupements français ont compté 17 morts entre juin et septembre, dont 5 à la veille du 14-Juillet. La saison la plus meurtrière depuis 2001. A ppelées pour la mission du jour à Tizine, les unités stationnées à l’orée de la vallée de Tagab sur le poste de Ghan, à portée de vue de Tora, de l’autre côté des eaux turquoise du lac Naghlu, n’étaient pas sorties depuis cinq semaines. « Protection des forces », tel est le mot d’ordre. Le général commandant le contingent français vient d’être relevé, six mois plus tôt que prévu. Sur le terrain, tous ont compris qu’il fallait « un niveau de pertes compatible » avec l’état de l’opinion à quel- ques mois de l’élection présidentielle. « On nous a expliqué qu’il y avait des élections en France, note un soldat à Tora. On ne sort plus. Les trois premiers mois, on a fait le boulot, hypermotivés. On a été préparés pour ça ! Dès le jour de notre arrivée, on est allés au combat. Depuis fin août, c’est terminé. Maintenant, on nous demande de ne plus faire parler de nous. » Et de pester : « Les insurgés vont reprendre ce que nous avions gagné. » Les chefs évoquent une « pause nécessaire » après trois mois de combats éreintants. Mais la pause devient la règle, l’action l’exception. On se prend à penser au retour, alors qu’il reste encore trois mois à faire. Officiellement, la mission a « évolué comme prévu ». « On n’est pas là pour rester cent ans, résume, à Kaboul, le général Gilles Fugier, chef d’état-major de la force internationale. On ne va pas prendre les décisions politiques à la place des Afghans. Plus on reste, plus on s’use. Nous avons fait notre part du boulot. » Le calendrier du retrait se précise : 200 légionnaires vont partir fin octobre, écourtant leur mandat. En décembre, la relève du 15-2 comptera 200 hommes de moins. Et ainsi de suite jusqu’à la fin 2012. La force française sera alors passée de 4 000 à 3 000 hommes. L’état-major redessine la carte des positions françaises. Fin août, trois postes de la route Vermont, l’axe stratégique qui mène directement de Jalalabad au nord du pays, ont déjà été cédés. Mais que veut dire la pause, quand la situation paraît toujours aussi volatile, l’adversaire insaisissable ? Le lieutenant Mickael L. a ouvert les itinéraires durant tout l’été en Kapisa avec son détachement cynophile. Dans cette « zone verte », où, profitant de la densité de la végétation, une poignée d’insurgés peut tenir en échec deux compagnies entières, « j’ai eu l’impression de me battre contre un fantôme », confie-t-il. « Ça tire, ça tape, on les cherche et on ne les trouve pas. Ils connais- 21 sent leur terrain par cœur. Cela fait trente ans qu’ils font la guerre, ils ont connu les Russes, la guerre civile, et maintenant ils sont face à nous. Ce ne sont pas eux qui apprennent, c’est nous. Le feu, je l’ai vécu plus comme une frustration. C’est ça : ne pas avoir trouvé mon ennemi ! Quand vous réussissez à les traiter, les corps ne sont plus là. Vous ne savez jamais ce que vous avez réussi à faire. » A Teree-Kaley, la discussion avec les maleks s’est animée quand les militaires ont vanté les mérites du gouvernement de Kaboul. « Cela fait 50 fois que les gens viennent ici et que leurs paroles s’envolent », a rétorqué un ancien. « On est à côté du gouvernement, mais s’il ne pense pas à nous, nous devrons quitter le village et les talibans prendront notre place », a menacé un autre. Une mission similaire, menée début septembre dans la vallée de Jagdalak, a été moins bien accueillie. La colonne a été arrosée de six roquettes, des villageois ont été blessés, de nombreuses armes saisies. Les démonstrations de force ont encore cours, à l’heure de la « transition ». La Surobi est « calme à condition que l’on reste vigilant et que le gouvernement de Kaboul soit présent », souligne le lieutenant-colonel Philippe S. Les fonds de vallée restent à l’insurrection. Elle tient les passages vers les provinces limitrophes du Pakistan. L’OTAN ne va plus l’y chercher. Ainsi s’établit l’équilibre sécuritaire. Ce 28 septembre, pour parcourir les 20 kilomètres qui séparent Ghan de Tora, les éléments du génie et les blindés du 15-2 ont mis quatre heures. Une bombe artisanale les a bloqués à quelques centaines de mètres de la base. A 2 kilomètres, c’est un groupe muni de lance-roquettes qu’il a fallu éloigner. En Kapisa, « la situation est plus dure car il y a de plus en plus de monde en face », explique un officier. Durant l’été, saison des combats, des renforts talibans sont arrivés d’Inde et du Pakistan. Les actions ont été plus violentes que jamais. Le 20 septembre, dans la vallée de Bedraou, les hélicoptères d’attaque français ont détruit un cinquième véhiculesuicide depuis le mois de mai. Les militaires estiment que pour prendre les vallées d’Alasay et de Bedraou, « nids d’insurgés », il faudrait 8 000 hommes. Autour, dans les provinces frontalières du Pakistan, les forces spéciales américaines « nettoient » pourtant avec minutie le terrain. Mais l’est de l’Afghanistan est devenu une zone névralgique, depuis qu’une forte pression a été mise sur les talibans dans le sud du pays. Selon l’OTAN, les pourtours de Kaboul représentaient un quart des « événements sécuritaires » du pays en 2010 ; c’est un tiers depuis janvier. Les capitaines saluent le travail de leurs soldats. Ils ont le sentiment du devoir accompli et en attendent la reconnaissance. Ils partent aussi avec un goût d’inachevé. « Il faut être lucide sur l’Afghanistan, estime Cyrille C., du régiment de spahis de Valence. J’ai dit à mon successeur que ce n’est jamais la fin. Il ne faut pas baisser la garde.» Plusieursnecachent pasleurpessimisme: « En 2014, ce sera la guerre civile. » «Ils ont connu les Russes, la guerre civile, et maintenant ils sont face à nous. Ce ne sont pas eux qui apprennent, c’estnous. Le feu, je l’ai vécu plus comme une frustration» Mickael L. lieutenant Le colonel Jeand’heur aimerait que ses hommes, avant leur départ en décembre, voient arriver enfin la route qui désenclavera la vallée d’Uzbin. Ce serait « une façon de voir le travail concrétisé », reconnaît-il. De quoi donner du sens, aussi. En France, le nom d’Uzbin ne charrie qu’une horreur, l’embuscade qui tua dix soldats en août 2008. Les Français vont maintenant se tenir prêts à intervenir, depuis leurs bases. En Kapisa, 400 insurgés font face à 5 000 hommes des nouvelles forces afghanes. « Si la 3e brigade afghane veut faire le travail, cela devrait être à sa portée », assure le général Fugier. Si elle le peut. Dans leurs cours de contre-insurrection, les officiers français ont appris qu’il fallait sortir de ses positions pour ne pas s’affaiblir. « Avec 800 des nôtres concentrés là, si l’armée nationale afghane n’assure pas, craint l’un d’eux, on aura Diên Biên Phu sur Tora. » p 22 0123 décryptages ANALYSES Mercredi 12 octobre 2011 Les pièges du duel Aubry-Hollande L a primaire socialiste, qui va opposer au second tour, dimanche 16 octobre, Martine Aubry et François Hollande, est celle de tous les paradoxes. Paradoxe de voir que la finale va se jouer entre deux anciens premiers secrétaires du Parti socialiste qui, à l’origine, étaient réticents à l’idée d’une primaire pour choisir le (la) candidat(e) à l’Elysée. Paradoxe encore de voir s’affronter deux personnalités qui, depuis 1997, ont toujours été dans la même majorité au PS. Deux réformistes qui, en 2005 lors du référendum sur l’Europe, étaient dans le même camp du « oui». Paradoxe enfin de voir une primaire réussie par son ampleur – 2,5 millions de votants – qui risque de se solder par une victoire chiche, sur le fil, privant peut-être le vainqueur de l’élan qu’il aurait dû récolter. Les deux promoteurs de cette primaire inédite – Ségolène Royal et Arnaud Montebourg – ont été éliminés au premier tour. La première subit une défaite aussi humiliante qu’injuste alors qu’elle a imposé cette démocratie participative et fait intégrer dans le projet du PS nombre de ses idées. Le second a créé la surprise en arrachant une solide troisième place qui le met en position d’arbitre alors qu’il a axé sa campagne sur le rejet des « deux candidats officiels», comme il les appelait, aujourd’hui en finale. Paradoxal, le duel Aubry-Hollande recèle de nombreux pièges. Le plus évident est le débat qui opposera, mercredi 12 octobre, les duellistes. Pour emporter les suffrages, ils vont devoir mettre en exergue ce qui les différencie, au risque de voir le choc frontal tourner au pugilat et le vainqueur sortir sonné, affaibli, face à une droite qui en fera aussitôt ses choux gras. Le 9 octobre au soir, la maire de Lille, dans un discoursbien charpenté, est allée jusqu’àl’extrême limite de son attaque. Mme Aubry a fustigé implicitementla«gauchemolle»dontellesoupçonne le député de Corrèze d’être le héraut, mettant en avant son « expérience », affirmant que « le courage, ce n’est pas de courber l’échine » à chaque écueil. « Je n’administrerai pas le système, a-t-elle proclamé, je le transformerai. » En face, M. Hollande se dit prêt à « tout faire pour Analyse P ar Mic he l N oble c ourt Editorialiste qu’il n’y ait pas d’affrontement ». «Ma pugnacité, assure-t-il, je dois l’exercer par rapport à la droite. » Mais pourra-t-il essuyer de nouveaux assauts sans réagir ? Les duellistes se fixent les mêmes impératifs, voulant tous les deux incarner « le changement » et « le rassemblement », chacun entendant faire la preuve qu’il est le plus apte à battre Nicolas Sarkozy. Tous deux ont des atouts et des faiblesses. Mme Aubry est plus à gauche, plus sociale aussi, même si elle a eu sur les 35 heures des rapports tumultueux avec les syndicats, notamment la CFDT. Sa fibre sociale est une vraie force. Mais elle devra démontrer qu’elle n’est pas aussi « étatiste » que le prétend son rival et qu’elle veut aussi s’appuyer sur la négo- Nul ne peut exclure que des électeurs de la gauche de la gauche et du centre viennent arbitrer le match ciation et la société civile alors que M.Hollande veut développer la démocratie sociale. La gauche « forte » de Mme Aubry repose sur une alliance hétérogène, celle-là même, incluant alors M.Hollande, qui l’aportée à la tête du PS en novembre 2008. De Jacques Delors à Benoît Hamon, en passant par Dominique Strauss-Kahn – qui a fait savoir qu’il avait voté pour elle –, Bertrand Delanoë, Laurent Fabius, Jean-Christophe Cambadélis, Michel Destot, l’arcréunittouteslescouleursduPS.Ilmarieaussi des oxymores. M. Fabius, dans Le Monde du 28 août 2010, assignait à la gauche le respect d’un « triangle fondamental : effort-progrès-justice ». « Il n’y aura pas de redressement sans effort, proclamait l’ancien premier ministre. Cet effort sera important. Il prendra du temps. Il concernera tous les domaines. » Dans le même camp,M.Hamon affirme,dansson livreTourner la page (Flammarion, 310 p., 18 euros), que la detteest « illégitime». «Il est impossible pourla gauche, écrit-il, de se présenter au suffrage des Français et d’exiger qu’ils payent cette facture. » Pour incarner le changement à gauche et rendre son message plus crédible, Mme Aubry aura donc à faire des choix entre les positions parfois contradictoires de ses soutiens. A contrario, M. Hollande, soutenu par un bloc réformiste plus homogène, doit sans doute à la plus grande crédibilité que lui accordent les sondages le fait d’être arrivé en tête. Mais pour attirer les électeurs de M.Montebourg ou de Mme Royal – quelles que soient leurs consignes, qui n’auront pas le même effet mécanique que dans un congrès du PS –, il devra « gauchiser » son discours réaliste teinté de rigueur. Même piège sur la question du rassemblement. L’ambition de Mme Aubry est de réunir les 53,5 % qui, en totalisant ses voix avec celles de M. Montebourg et de Mme Royal, ont voté le 9 octobre pour « un vrai changement ». Elle a plusd’atoutsquesonrivalpourséduirelesécologistes et la gauche de la gauche. A contrario, les sondages montrent qu’elle est moins attractive que M.Hollande pour les électeurs du centre qui se sont éloignés de M.Sarkozy. C’est sur la capacité de l’une et de l’autre à battre M. Sarkozy que devrait s’opérer le choix du 16 octobre.Nul ne peut exclureque des électeurs de la gauche de la gauche et d’autres du centre, n’ayant pas voté le 9 octobre, viennent arbitrer lematch. Mais unautre défi attend levainqueur. Au lendemain du vote, il faudra que le PS se rangeenordredebatailleetdansl’unitéderrière celle ou celui qui l’aura emporté, ce qu’il n’a pas su faire en 2007 avec Mme Royal. Ce sera encore plus impératif avec un résultat serré. Raison de plus pourque lesduellistesévitentunpugilat –qu’espère sans doute M. Sarkozy – qui laisserait des séquelles difficiles à surmonter en six mois de campagne. p [email protected] Ecologie | Chronique Hervé Kempf Protectionnisme D ans les années 1960, quand Rachel Carson ou Jean Dorst attirèrent les premiers l’attention sur la destruction accélérée de l’environnement, on commença à parler de «protection de la nature». Les écologistes sont effectivement des protecteurs de la nature, c’est-à-dire d’un état de la biosphère qui permette à l’humanité une vie digne et pacifique. Ces temps-ci, le protectionnisme économique revient en force, comme en témoigne le succès d’Arnaud Montebourg et de sa «démondialisation » à la primaire socialiste, ou le nouveau livre de François Ruffin, Leur grande trouille (Les liens qui libèrent, 240p., 18euros), qui plaide avec force pour des taxes aux frontières. Si ce sont des raisons sociales qui animent ce courant d’idées, il trouve de fortes résonances du côté de l’écologie politique, qui promeut depuis des années la « relocalisation » des activités et critique les effets néfastes sur l’environnement du développement du commerce mondial. Le point de jonction entre les deux approches se trouve dans les normes environnementales. La légitimité de freiner l’importation de produits dont la fabrication génère un impact environnemental trop élevé est peu contestable. Mais les rapports de forces entre grands blocs économiques, d’une part, et l’idéologie libreéchangiste, d’autre part, empêchent le progrès concret du protectionnisme environnemental. On “ DARROUSSIN EXTRAORDINAIRE # # # ” LE FIGARO La flâneuse du RER “ BIEN JOUÉ ! ” I LIBÉRATION “ FORMIDABLE ” LE PARISIEN “ DARROUSSIN IMPRESSIONNANT ” 20 MINUTES “ SAISISSANT ” LE JDD “ PROFONDÉMENT HUMAIN ” ELLE l est plusieurs manières de prendre le RER. On peut y voir un outil d’aliénationquotidienne,unebétaillèreoùs’entassent 3,2 millions de personnes exilées toujours plus loin de Paris par la spéculation immobilière. Cette foule, corps comprimésetvisages fermés,estalorsramenée à un troupeau indifférencié. On peut aussi y voir une inépuisable matière humaine. C’est le parti pris d’Anne-Louise Sautreuil. Cette journaliste a passé un an entre guichets, escaliers, couloirs et wagons, à la rencontre des usagers-clients-voyageurs. Elle s’est autorisée la flânerie sans but et le plaisir de parler au hasard à un inconnu. Nulle prétentionsociologiqueàcelivre,justel’envie d’une virée bohème sur les rails. RER mon amour. Un an sur les rails, Anne-Louise Sautreuil, Fayard, 232 p., 16 ¤ “ POIGNANT ” TÉLÉRAMA “ PUISSANT ” PARIS MATCH JEAN-PIERRE DARROUSSIN Debon matin JEAN-MARC MOUTOUT L’écologie politique promeut depuis des années la «relocalisation » des activités tent relativement peu de gaz à effet de serre, c’est parce qu’ils ont délocalisé une partie de leur industrie. Par exemple, chaque Français n’émet pas 6,7 tonnes de gaz carbonique, comme le dit la statistique officielle, mais 9 tonnes, comme l’a calculé l’Insee en tenant compte des produits importés. Un protectionnisme écologique est souhaitable. Mais il doit être clair que l’effet bénéfique en emplois locaux aura pour contrepartie une moindre disposition des produits manufacturés à bas coûts, donc une baisse de la consommation matérielle collective. p [email protected] Lectures LES FILMS DU LOSANGE PRÉSENTENT UN FILM DE peut penser que l’évolution politique de l’Europe fera avancer le débat. D’autant que l’Union européenne peut arguer de sa modération relative en termes d’émissions de gaz à effet de serre et de ses efforts pour « verdir » son économie. Le projet d’une taxe énergie européenne aux frontières pourrait ainsi être un élément de la présidentielle française. Cependant, comme le commerce, l’idée doit être analysée dans les deux sens. Si les Européens émet- VALéRIE DRéVILLE XAVIER BEAUVOIS YANNICK RENIER ACTUELLEMENT De cette promenade à travers les quatre saisons et les cinq lignes du RER, elle nous ramène des portraits empathiques qui défilent dans une série de chapitres écrits serré. Ces femmes qui tricotent, ces amoureux qui s’embrassent derrière un pilier, ces chanteurs talentueux ou ces joueurs de crincrin, ces touristes paumés avec leurs valises, ces lecteurs compulsifs, ces oisifs qui attendent on ne sait qui, ces poètes contrariés forment par touches pointillistes un joli brin d’humanité. Oui, il est mille manières de prendre le RER. On peut le prendre comme cette aveugle qui le traduit en bruits et sensations physiques. Comme cet homosexuel d’une cité qui y a trouvé un outil de liberté afin d’échapper au machisme social. Comme ces joyeux drilles qui ont fait de leur wagon une boîte de farces et attrapes. On peut le prendre à Bourg-la-Reine ou à Villiers-leBel, à Roissy ou à Bondy, à Gare-du-Nord ou à Luxembourg, puisqu’il est un des derniers endroits où se mêlent les populations, un des derniers points où la France qui se lève tôt croise celle qui se couche tard.Onpeutmême nepasleprendre,commecesmarchandsdesgaleriescommerciales, ce vendeur à la sauvette toujours prêt à déguerpir avec son étal ou ce SDF perdu dans son voyage immobile. Anne-Louise Sautreuil a également enquêté. Elle a suivi le conducteur, le policier, le contrôleur ou le médiateur. Avec patience, elle a débusqué le tagueur, le pervers,lefraudeur, lavictime d’agressiongratuiteetla bandequil’aamochée. Elleraconte sans fard les mauvaises rencontres, les bagarres, et la peur qui l’a prise au ventre certaines fois. Si cette violence latente est assez bien décrite, d’autres tares du RER sont éludées. Les pannes à répétition, la phobie des retards, l’entassement humain, le sentiment d’être transbahuté dans des conditionsdégradantesnesontqu’évoqués.Pensécommeunmodededéplacementprivilégié dans les années 1970, le RER est au bord de l’implosion, trop vétuste, surchargé. Certains habitués pourront avoir le sentiment que n’est décrit là que le RER des heures creuses ou celui qui passe justement sur la voie d’en face, à moitié vide. Cette vision à rebours, cette description à hauteur d’homme, n’en est que plus intéressante. p ¶ 3,2 millions de personnes empruntent chaque jour le réseau express régional d’Ile-de-France. La journaliste Anne-Louise Sautreuil (28 ans) a accompagné leur voyage quotidien Benoît Hopquin Rectificatifs&précisions Apple Le graphique sur les ventes d’iPhone (Le Monde du 4 octobre) comportait une erreur. Les ventes au 4e trimestre 2010 atteignaient 14,1 millions et non 7,4. ritals reprennent le chemin de l’exil», il existe depuis 2009 un «musée national (…) consacré » à l’émigration situé place de Venise, à Rome (Le Monde du 4 octobre). Musée Contrairement à ce que nous avons écrit dans l’article « Les France Contrairement à ce que nous avons écrit dans l’article sur le congrès des HLM (Le Monde du 1er octobre), le secrétaire d’Etat au logement, Benoist Apparu, n’a pas voyagé dans le même avion que Martine Aubry, François Hollande et Jean-Louis Borloo. M. Apparu a pris un autre avion, plus tard dans la matinée. 0123 décryptages DÉBATS Mercredi 12 octobre 2011 23 Comment éviter un populisme numérique Ne dénigrons pas le Pakistan Islamabad est en première ligne face au terrorisme Serge Champeau Professeur de chaire supérieure en philosophie Paul Mathias Ex-directeur de programme au Collège international de philosophie D e nouvelles pratiques intellectuelles et sociales sont rendues possibles par les évolutions d’Internet. Toutes vont dans le sens d’un renforcement des pouvoirs des citoyens. Les nouvelles techniques de reproduction et de partage des contenus culturels permettent, par exemple, de faire d’ores et déjà valoir des exceptions gratuites ou payantes au droit d’auteur qui contribuent à défendre un droit d’accès à des œuvres dont la destination essentielle est d’atteindre le public le plus large possible. Quant aux nouveaux outils numériques d’expression et de diffusion sur Internet, ils renforcent les contre-pouvoirs. Chacun sait, cependant, que les contre-pouvoirs liés àl’utilisation desréseaux font naître, àleur tour, un fort sentiment de défiance – qui va nourrir certaines dérivespopulistes et autoritaires. La revendicationd’un large accès aux œuvres numériques peut se pervertir en téléchargement illégal, défendu par certains sur la base d’arguments travaillés avec précision, mais combattu par les professionnels de la culture. Diverses pratiques de piratage, également, peuvent favoriser le mouvement vers une transparence plus grande des pouvoirs, mais inquiètent les entreprises, les consommateurs et, en fin de compte, les citoyens. Ainsi le risque se fait-il jour que l’équilibre libéral des pouvoirs ne se dégrade enaffrontementspartisansetstériles, enconflitsd’intérêtspersonnelsetenmarchandagesdivers,etn’aboutisse, à terme, à de nouveaux populismes ou à un nouvel autoritarisme. Il semble cependant, en observant ce qui se passe en France avec la loi Hadopi et dans d’autres pays avec d’autres instances relativement analogues, que quatrelignes de force apparaissent progressivement : 1 – dans une démocratie, la régulation des contrepouvoirs ne peut pas et ne doit pas être confiée au pouvoir étatique, et elle ne peut pas relever non plus des seules instances d’autorégulation. Partout, les autorités indépendantes semblent l’outil le mieux approprié : « autorités publiques indépendantes » en France, independent watchdogs en Grande-Bretagne, la forme exacte de ces institutions dépend du contre-pouvoir en question et des traditions nationales. L’important est que ces autorités indépendantes puissent lutter contre les deux formes jumelles du populisme: d’une part, en renforçant le pouvoir des citoyens et en faisant reculer le discours réactif « apolitique » ; d’autre part, en limitant les excès et perversions des contre-pouvoirs et en faisant reculer le discours réactif qui dénonce ces contre-pouvoirs comme autant de menaces ; 2 – le mode d’action structurante de toute autorité indépendante de régulation consiste à inciter les usagers à adopter des comportements qui ne mettent pas en danger les contre-pouvoirs. Elle cherche principalement à montrer ce que peut être une pratique à la fois créative et stabilisée des réseaux et de leur offre de ressources et fait par conséquent œuvre de pédagogie. Utopie par Serguei Pour ce qui concerne Internet, une nouvelle culture émergedesréseaux etilfaut sedonnerlesmoyensinstitutionnels d’apprendre à exploiter les richesses parfois inattendues:en textes,en images,en sonsde toutesorigines ; 3 – des autorités indépendantes de régulation ont ainsi pour objectif seulement de limiter la défiance, d’établir par conséquent un équilibre entre défiance et confiance. Il est sain que les nouvelles pratiques de partage des contenus rendues possibles par Internet, que les nouvelles formes de journalisme, que l’open data movement [données publiques libres de droits] s’accompagnentde défiance.Aussi bien ducôté deceuxqui s’inquiètent d’une remise en cause, toujours possible, de ces contre-pouvoirs, que du côté de ceux que les excès des contre-pouvoirs inquiètent. Le public ne s’y trompe pas, même s’il n’est pas prêt à accepter n’importe quelle forme de régulation ou de répression de ses usages numériques; 4 – ces instances de régulation indépendantes doivent enfin être comprises comme un espace public où les nouveaux problèmes et les nouvelles solutions peuvent être formulés librement de manière à éclairer le législateursurles enjeuxd’avenir enl’aidantàconstruire de futurs équilibres juridiques et administratifs. Dans un contexte où l’évolution des techniques exige des réactualisations permanentes de la loi, Hadopi s’est ainsi adjoint des « Labs » appelés à réfléchir sur les Asif Ali Zardari Président du Pakistan A La défiance s’avère essentielle au fonctionnement de nos sociétés: elle renforce la vigilance des citoyens, suscite l’émergence de contre-pouvoirs équilibrés et ajustés grands enjeux économiques, sociaux ou intellectuels des pratiques informatiques – en toute publicité et dans une parfaite transparence. Economistes, juristes, sociologues, philosophes et, plus généralement, citoyens de diverses sensibilités et compétences, nous sommes ainsi plusieurs à participer à ces débats et à les animer. En ce qui concerne la tâche plus spécifique des philosophes, elle peut se déployer selon deux axes : d’une part, en relation avec les spécialistes des autres disciplines, il importe de construire une interprétation d’ensemble de la régulation des contre-pouvoirs ; d’autre Serge Champeau part,il estindispensabled’analyser, auplus prèsdespratient un blog tiques culturelles contemporaines et sans jamais perconsacré dre de vue les possibilités du droit existant, les nouaux questions veaux types d’objets culturels (le livre numérique, le de gouvernance streaming, etc.) et les nouveaux types de sujets et (sergechampeau. agents (la personne privée, l’auteur, etc.), afin de favoriwordpress.com). ser des formes équilibrées d’exercice du contre-pouPaul Mathias, voir que constitue Internet. responsable S’agissant du domaine relevant de la compétence du laboratoire de d’Hadopi,cesformesderégulationserontcelles quiperla Hadopi mettront aux citoyens de consolider leurs contre-pou« Internet et voirs, de conquérir de nouvelles libertés et de les exersociétés », cerenfin avecune claire consciencedeleursresponsabiest l’auteur lités – en apportant ainsi la preuve que, dans une sociéde « Des libertés té démocratique, confiance et défiance ne sont pas fatanumériques » lement contradictoires, mais peuvent s’équilibrer en (PUF, 2008). un rapport harmonique. Sur un fond de confiance dans les valeurs et les institutions démocratiques, la défiance s’avère en effet essentielle au fonctionnement de nos sociétés: elle renforce la vigilance des citoyens, suscite l’émergence de contre-pouvoirs équilibrés et ajustés et restaure, en retour, la confiance civile et politique. p ¶ u Pakistan, ce sont les terroristes qui menacent notre pays et les Etats-Unis qui ont le plus profité de la récente agression verbale de la part de certains Américains contre le Pakistan. Cette stratégie détériore les relations américano-pakistanaises et met en péril des objectifs communs : vaincre le terrorisme, l’extrémisme et le fanatisme. Il est temps de modérer les discours et de renouveler le dialogue de fond entre alliés. Le Pakistan se trouve sur de nombreuses lignes de faille. Pour nous, le terrorisme n’est pas qu’une statistique. Depuis le Moyen-Orient jusqu’en Asie du Sud, un ouragan de changement est en train de transformer des sociétés fermées. La concurrence entre la politique incendiaire de l’extrémisme et celle, plus tempérée, de la démocratie moderne est déjà ouverte dans chaque village, où abondent des téléphonesportables,danschaquesalle declasse, dans chaque talk-show télévisé. La modération doit l’emporter. Nos motivations sont simples. Nous avons une population énorme de jeunes aux choix existentiels limités. Notre tâche est de transformer ce défi démographique envictoire pourla démocratieetlepluralisme. Notre vision d’un Pakistan nouveau est fondée sur une conception du monde où nous menons la guerre contre l’extrémisme et le terrorisme comme notre propre combat, dans chaque quartier et jusqu’au dernier homme, même si nous manquons de ressources pour être à la hauteur de notre engagement. Quand le Pakistan recherche un soutien, il est aussi en quête des relations commerciales qui le rendront viable, et non d’une aide qui le ligotera. Lorsque nous prêtons notre fusil, nous nous attendons à des résultats qui nous renforcent. Pourtant, pendant que le Pakistan subit les ravages du réchauffement planétaire, avec des inondations quiont laissé des millions de nos citoyens à nouveau sans abri, nous constatons, à la place du dialogue qui existait avec notre allié stratégique le plus proche, qu’on nous sermonne, au lieu de nous écouter. Cette attitude a choqué la nation,quiestla première victimedela tornade terroriste dans la région. Pourquoi ? Après les attentats du 11 septembre 2001, la démocratie la plus puissante du monde a compromis ses valeurs fondamentales pour plaire à un dictateur au Pakistan. Depuis, nous avons perdu 30000 civils innocents et 5 000 militaires et policiers victimes de ces militants que le gouvernement américain nous accuse aujourd’hui de soutenir. Nous avons subi plus de 300 attentatssuicidescommispar lesforces qui sontcensées avoir trouvé refuge de notre côté de la frontière. Et environ 100 milliards de dollars (73,7 milliards d’euros) de pertes, dépensés directement pour la guerre et des dizaines de milliards de dollars en plus en investissements à l’étranger. La guerre est menée à la fois en Afghanistan et au Pakistan, mais Washington n’a presque rien investi de notre côté de la frontière, alors qu’il dépensait des centaines de milliards de dollars de l’autre côté. Nous combattons une idéologie qui se nourrit de la brutalité et de la coercition, qui a pris la vie de notre ministredes minorités, Shahbaz Bhatti, et celle du gouverneur Salman Taseer, parmi des milliers d’autres.Et nous avons vu notre plusgrand leader, la mère de mes enfants, assassiné par un complot commandité par le même courant militant qu’on nous accuse maintenant de tolérer. Le Pakistan comme les Etats-Unis ont tous deux besoin des leçons de l’histoire. L’Asie centrale et l’Asie du Sud sont des régions pleines de complexités et de nuances où de dangereuses erreurs se reproduisent et où de nombreux empires ont été mis en échec. Au cours des dix années que l’OTAN a passées dans les parages, l’Alliance n’a même pas tenté d’enrayer le plus grand trafic mondial de stupéfiants qui alimente l’activité terroriste. Pourtant, nous luttons pour combattre le raz de marée de l’extrémisme qui frappe le Pakistan chaque jour à partir des zones placées sous le contrôle de la coalition internationale en Afghanistan. On nous accuse d’abriter des extrémistes. Mais les Etats-Unis établissent des liens et engagent des négociations avec les mêmes groupes. La rue pakistanaise grouille de questions. Mon peuple me demande : notre sang est-il si bon marché ? Les vies de nos enfants n’ont-elles aucune valeur ? Faut-il quenoussoyons lesseuls à combattredans notre région tous ceux que d’autres cherchent désormais à accepter ? Et pour combien de temps encore devons-nous épuiser nos forces en combattant un ennemi que la puissance de la coalition internationale de l’OTAN n’a pas réussi à éliminer ? Pendant que les Etats-Unis se préparent à retirer leurs forces terrestres d’Afghanistanet à quitter notre région, nous essayons de nous préparer aux réalités de l’aprèsretrait. La communauté internationale a abandonné l’Asie centrale et l’Asie du Sud il y a une génération et cela a déclenché la catastrophe dans laquelle nous sommes à présent plongés. Quoi qu’il advienne, ce sont nos générations futures qui devront faire face à la tempête. Nous devons vivre dans le voisinage, alors pourquoi est-ce déraisonnable que nous soyons préoccupésparlasituation immédiateet,àlongterme, par notre frontière occidentale ? L’histoire ne nous pardonnera pas si nous n’assumons pas notre responsabilité. Nous avons perdu 30000civils innocents et 5000 militaires et policiers victimes de ces militants que les Américains nous accusent de soutenir Quel est l’avenir des relations entre les Etats-Unis et le Pakistan ? Nous sommes partenaires dans un monde où les émissions et les bombes ne connaissent pas de frontières. Nous combattons une menace commune. Nous partageons les mêmes valeurs démocratiques et des rêves d’une Asie centrale et d’une Asie du Sud modérées, modernes, pluralistes et démocratiques. Nous apprécions tous les deux que le commerce, la création d’emplois et d’industries vont tarir des recrues pour la cause des extrémistes. Mais nous n’avons toujours pas vu le Congrès américain donner son accord pour créer les Reconstruction Opportunity Zones destinées à aider les plus précaires. Nous partageons des lignes politiques communes, mais notre discours nous a conduits sur des voies divergentes. Les récentes accusations contre nous sont un sérieux revers pour l’effort de guerre et pour nos intérêts stratégiques communs. Cela ne veut pas dire que les Pakistanais cesseront de regagner leur territoire, pouce par pouce, sur les extrémistes, même sans l’aide des Etats-Unis. Nous sommes un peuple tenace. Nous ne permettrons pas que la religion se transforme en élément déclencheur du terrorisme ou de la persécution. Mais lorsqu’on se prive d’élaborer des stratégies en commun, ou lorsqu’on sermonne un allié plutôt que de le consulter, tous les deux en pâtissent. Plus tôt nous arrêterons cette escalade verbale et coordonneronsnos ressourcescontre lefanatisme qui gagne du terrain, plus tôt nous pourrons restaurer la stabilité de ce pays pour lequel tant d’hommes continuent de se sacrifier. p f Sur Lemonde.fr L’intégralité de cette tribune ¶ Veuf de l’ex-premier ministre du Pakistan Benazir Bhutto, assassinée en 2007, Asif Ali Zardari a été élu, en 2008, chef de l’Etat. Figure du retour des civils au pouvoir après le coup d’Etat militaire de 1999, son pays doit, depuis, faire face à une dégradation de ses relations avec les Etats-Unis, qui l’accusent de collusion avec les talibans. culture 24 ppp excellent 0123 Mercredi 12 octobre 2011 ppv à voir pvv pourquoi pas vvv à éviter Après «OSS 117», Hazanavicius goes to Hollywood Avec «The Artist» – succès cannois –, le réalisateur revisite à sa manière le cinéma d’antan. Muet, mais parlant The Artist L ppv e fait que Michel Hazanavicius réalise un film muet, en noir et blanc, tourné à Hollywood, avec Jean Dujardin dans le rôle principal, ne surprendra pas ceux qui connaissent son travail. Cette tambouille improbable propre à faire bondir tout cinéphile qui se respecte porte en effet, et en profondeur, l’empreinte de son auteur. Formé à la télévision, celuici a lié son destin à Jean Dujardin en le mettant en scène dans les deux adaptations parodiques des romans de Jean Bruce, OSS 117, Le Caire nid d’espions, et OSS 117, Rio ne répond plus. Une dizaine d’années plus tôt, il avait réalisé, pour Canal+, un premier longmétrage vite devenu culte, La Classe américaine, monté à partir d’extraits du catalogue de la Warner et dans lequel il faisait parler des Desa boîte à jouets, il sort, au gré de ses lubies, le sourire de Rudolph Valentino, les mouvements de Gene Kelly... acteurs américains, comme John Wayne ou Robert Redford, dans un français grand-guignolesque. Les OSS 117 étant des films de commande, on leur associa plus spontanément les noms de leurs producteurs, les frères Altmayer, et de Jean Dujardin, que celui du réalisateur qui resta dans l’ombre. Mais depuis la sélection de The Artist à Cannes, et bien que Jean Dujardin ait reçu un prix d’interprétation pour cela, le nom Hazanavicius est devenu plus familier. Il pourrait le devenir plus encore si le film se retrouvait, comme on commence à le dire, en compétition pour les Oscars. Rétrospectivement, ce destin, exceptionnel pour une comédie française, trouve de nombreuses explications, à commencer par le fait qu’étant muette, et tournée à Hollywood, elle n’a en apparence rien de français. Le muet permet en outre d’associer aux acteurs Jean Dujardin, l’acteur fétiche de Michel Hazanavicius, a reçu le Prix d’interprétation au Festival de Cannes pour son rôle dans « The Artist ». PETER LOVINO français Jean Dujardin et Bérénice Béjo des stars américaines comme John Goodman ou James Cromwell dans les rôles secondaires, sans que se pose la question de la barrière linguistique. L’histoire, par ailleurs, est connue, elle a fait ses preuves. A peu de chose près, c’est celle de Chantons sous la pluie, autrement dit celle de la révolution sonore du cinéma racontée à travers les destins croisés de deux acteurs hollywoodiens : George Valentin (JeanDujardin,dontlejeu hyperexpressif s’épanouit à merveille dans le cadre du muet), une star au faîte de sa gloire à la fin des années 1920 qui va brutalement sombrer dans l’oubli, et Peppy Miller (Bérénice Béjo, pétillanteà souhait), une starlette qui commence dans le même temps une fulgurante ascension. La réussite du film tient à la manière joyeuse dont Michel Hazanavicius s’empare du cinéma d’antan avec les outils du cinéma d’aujourd’hui. Plus qu’un voyage dans le temps, The Artist est une plongée dans l’histoire du cinéma qu’il transforme, un peu comme aime à le faire Quentin Tarantino, en un gigantesque terrain de jeu. Leprogramme estdonnédès la première image, quand s’affiche le logo de la Warner en noir et blanc, comme dans un film des années 1930, mais avec la netteté clinique de l’image numérique. Tout le film tient dans ce décalage, comique le plus souvent, entre la familiarité des références et la bizarrerie de l’usage qui en est fait. Il commence dans une grande salle de cinéma, pendant une projection où tout le monde fume et personne ne parle. Le premier gag intervient quand les lumières se rallument, et que les lèvres commencent à bouger sans que l’on entende le son d’une voix : dans un gag qui pourrait avoir été conçu par Philippe Katerine (on pense souvent pendant le film à la chanson Louxor J’Adore « Et je coupe le son…/Et je remets le son ! »), le film se révèle aussi muet que le film dans le film. De son coffre à jouets, Michel Hazanavicius sort, au gré de ses lubies, le sourire de Rudolph Valentino, la moustache de Douglas Fairbanks, les mouvements de Gene Kelly… Il fusionne les scénarios de Chantons sous la pluie et de Sunset Boulevard, y ajoutant une réplique de la célèbre mascotte canine de Pathé Marconi, « la voix de son maître ». Comme Tarantino l’avait fait dans Inglourious Basterds, le cinéaste français instrumentalise les propriétés inflammables du nitrate pour donner un peu de panache à sa tragédie. Car il faut bien l’avouer, une fois tous les gags cinéphiles exploités, quand la comédie bascule dans le drame, l’émotion est ce qui fait défaut. Malgré le jeu impeccable de ses acteurs – de Dujardin en particulier, qui passe insensiblement de l’outrance du muet à un registre beaucoup plus subtil – et alors que sur fond de révolution sonore se noueunehistoired’amour douloureuse et passionnée, rien ne vibre à l’écran. Comme si, en s’appropriant l’âge d’or du cinéma, l’image numérique la figeait dans un bain de formol. p Isabelle Regnier Film français de Michel Hazanavicius. Avec Jean Dujardin, Bérénice Béjo. (1 h 40). De Canal+ au grand écran, l’escroc qui aimait les détournements en tout genre LA VEILLE de notre rencontre, le 4 octobre, Michel Hazanavicius a présenté The Artist en ouverture du Festival Lumière de Lyon devant 4 000 spectateurs. Ce festival est dédié à l’histoire du cinéma. The Artist est un film muet, en noir et blanc et projeté au format 1.33, mais il n’a échappé à personne qu’il a été présenté à Cannes en mai. On ne sait si le service de répression des fraudes sera saisi de la présentation d’une production récente dans un étal de films anciens, mais ce statut de long-métrage de contrebande sied bien au réalisateur. Quand l’envie lui est venue de faire un film muet, il s’est dit qu’il y avait « un truc d’escroc à faire ». Il développe le plan machiavélique qui lui était venu à l’esprit : « Je prends ce format, ce procédé qui fonctionne ultra-bien, je fais un film quatre-vingts ans après en bénéficiant non seulement de la technologie, mais aussi de toute l’histoire du cinéma, de la sophistication de la narration, et j’essaie d’en faire un film populaire. » Un détournement, en somme, procédé qui guide la partie la plus Direction Olivier Py Le Métier de critique. Journalisme et philosophie avec Éric Loret Jeudi 17 novembre à 18h30 Responsable l’écrivain ? avec Gisèle Sapiro quatre traversées à suivre... Odéon-Théâtre de l’Europe – Salon Roger Blin Tarif unique 5€ / 01 44 85 40 40 • theatre-odeon.eu Licence d’entrepreneur de spectacles 1039306 Jeudi 13 octobre à 18h30 visible du parcours de Michel Hazanavicius. Etudiant dans une école d’art, il détourne des affiches et des publicités. Gagman chez les Nuls, sur Canal+, il détourne des images d’actualité pour le Faux journal. Et quand on propose à Alain Chabat (à l’époque premier Nul d’entre les Nuls) de réaliser un long-métrage détournant des séquences existantes, la vedette décline et propose le nom de son lieutenant. Incongrus La filmographie de Michel Hazanavicius commence donc par Le Grand Détournement (également connu sous le nom de La Classe américaine), montage virtuose d’extraits de classiques du catalogue Warner, doublés par des dialogues incongrus, diffusé sur Canal+ en 1993. La rareté du film (qui est resté inédit en VHS ou en DVD) a contribué à son statut légendaire. Une bonne dizaine d’années plus tard, les producteurs d’OSS 117 font appel à Michel Hazanavicius, devenu réalisateur publicitaire à succès, mais dont le premier long-métrage (Mes amis, 1999) a été un échec commercial. De même que La Classe américaine commençait par un avertissement (« Attention, ceci n’est pas un film sur le cyclisme »), le réalisateur tient à préciser la nature des deux OSS 117 : « J’y mets un profond respect de l’objet détourné. J’en respecte la forme. Si on me demande, la trouvaille OSS, c’est qu’au lieu de reconstituer l’objet filmé – les décors, les costumes – j’ai reconstitué l’objet filmant – le découpage, la structure de lumière, la machinerie, le montage. » Cette élaboration savante aboutit à des films qui ne sont pas des parodies (un mot qu’il exècre) ni des collages de références. « Les gens vont sans cesse chercher des références. Un jour, un spectateur qui intervenait après deux autres qui avaient demandé si telle ou telle séquence se référait à tel ou tel film m’a demandé si les croix gammées (dans OSS 117, Rio ne répond plus) faisaient référence à Hitler. Cela m’a fait rire. » The Artist procède d’une autre intention que les OSS. Pour Michel Hazanavicius, chaque film porte une promesse. Après avoir promis de faire rire (et tenu ce serment), il veut émouvoir. Au départ, il pense situer son film à Berlin et faire coïncider l’arrivée du cinéma parlant avec celle des nazis au pouvoir. «Le film se terminait par la balle que le héros se tirait dans la bouche. Et puis, très rapidement, je me suis dit que je ne pouvais pas demander aux gens de venir voir un film muet en noir et blanc avec cette fin, il fallait un film positif, lumineux. » Pour mener à bien cette entreprise, il a fallu convaincre un producteur, en l’occurrence Thomas FRANCOIS LO PRESTI/AFP Langmann, et partir pour Hollywood entouré d’une garde rapprochée composée de Jean Dujardin, de Bérénice Béjo, du chef opérateur Guillaume Schiffman et du compositeur Ludovic Bource. Que des images Michel Hazanavicius n’a pas rencontré de grande difficulté à tourner un film muet avec des acteurs habitués à donner de la voix : « Je donne beaucoup d’indications par rapport au cadre. J’essaie que les émotions, le jeu, la performance, rentrent le plus possible dans un cadre visuel. J’ai tendance à être assez mécanique : “Arrêtetoi là, tourne la tête.” Pour moi, la vraie direction d’acteur, c’est au montage. Parce qu’ils sont à votre disposition, qu’ils ne vous répondent pas et qu’ils n’ont plus d’ego parce que ce ne sont plus que des images. » Au bout de trois films inspirés d’histoires fausses, Michel Hazanavicius voudrait revenir vers le réel. « Je n’ai pas une boutique où on fait de faux films d’époque », proteste-t-il avant qu’on ait eu le temps de l’accuser de quoi que ce soit. Le monde réel, il l’a déjà pratiqué, en tant que cinéaste. Mes amis était inspiré de ses expériences à la télévision. Il a coécrit et coproduit Tuez-les tous, un documentaire sur le Rwanda, dans lequel la politique française dans la région des Grands Lacs était vivement critiquée, au point de susciter un droit de réponse d’Edouard Balladur après sa diffusion sur France 3, en 2004. Cette conscience aiguë du monde tel qu’il va surgit d’ailleurs à des moments plus ou moins incongrus. Dans OSS 117, au détour d’une plaisanterie d’une grande acuité politique (qui d’autre peut se vanter d’avoir fait rire avec le portrait de René Coty ?) ou par une allusion au sort de la Géorgie soviétique tout au début de The Artist. Ce prochain film sera donc « débarrassé d’un enjeu formel trop visible, plus proche de l’humain, plus simple ». A moins d’un détournement. p T. S. 0123 cinéma Mercredi 12 octobre 2011 ppp excellent ppv à voir pvv pourquoi pas vvv à éviter Elle rêvait d’un autre monde Les films de la semaine Un film-allégorie dans lequel une planète jumelle de la Terre promet la rédemption nRetrouvez l’intégralité de la critique sur Lemonde.fr Another Earth ppvà voir E Another Earth ppv n rentrant éméchée, au volant de sa voiture, de la soirée au cours de laquelle elle a fêté son admission dans une grande école, Rhoda Williams, une jeune étudiante, tue accidentellement une femme et un enfant. Elle effectue plusieurs années de prison. Libérée, elle se fait engager, sans révéler son identité, comme femme de ménage chez l’homme dont elle a tué la famille. Celui-ci est plongé dans une profonde dépression. Au même moment, les savants découvrent l’existence d’une nouvelle planète, désormais visible depuis la Terre. On découvre qu’il s’agit d’un double de la Terre et donc de tout ce qui y vit. Chaque être humain ayant donc son propre équivalent « là-haut ». Postulerl’existence d’unereproduction parfaite de la Terre avait déjà été le prétexte du film de Robert Parrish, réalisé en 1969, Danger planète inconnue. Mais cette idée est ici exploitée d’une tout autre façon, loin des prescriptions de ce qui constitue ce que l’on appelle la science-fiction cinématographique. Quel rapport, d’ailleurs, entre cette hypothèse fantaisiste et le parcours du personnage principal du film de Mike Cahill, assoiffé de rédemption ? Valeur métaphorique Another Earth est le récit d’une quête, celle d’un rachat impossible. L’héroïne du film est en effet à la recherche d’un pardon dont elle sait qu’il relève de l’impensable. Cette conscience devient de plus Film américain de Mike Cahill (1 h 32). The Artist Film français de Michel Hazanavicius (1 h 40). pvvpourquoi pas Après le sud Film français de Jean-Jacques Jauffret (1 h 30). Le film de Mike Cahill postule l’existence d’une reproduction parfaite de la Terre. TWENTIETH CENTURY FOX planète bleue. Or Rhoda Williams est à la recherche d’un autre réel, différent de celui qu’elle vit : la « possibilité d’un autre monde » dans lequel le drame n’aurait pas eu lieu. Pourra-t-elle, comme elle l’espère, rejoindre ce lieu utopique d’un être meurtri et retrouver, peut-être, la duplication de sa famille disparue ? On le voit, la logique s’efface ici devant l’allégorie. La fable que constitue le film se veut une représentation de cette inclination, si humaine, qui consiste à vouloir effacer la réalité, ou la contourner, pour lui substituer ce qui pourrait avantageusementla remplacer,faire comme si le réel avait un double. La grande qualité du film de Mike Cahillrésided’abord dans l’originalitéde son récit, dans le télescopage de cette métaphore avec la peinture, émouvante, d’un drame humain, remarquablement et subtilement interprété par l’actrice principale (Britt Marling). Another Earth est la description imagée et imaginaire d’une hypothèse impossible, une hypothèse qui n’aurait que le monde artificiel qui se déploie sur l’écran de la salle de cinéma pour s’énoncer. p Jean-François Rauger Film américain de Mike Cahill. Avec Britt Marling, Matthew-Lee Erlbach, DJ Flava. (1 h 32.) Autopsie d’une société qui laisse ses êtres s’asphyxier Les parcours de quatre personnages convergent vers le pire sous un soleil caniculaire Après le sud P pvv remier long-métragede JeanJacques Jauffret, Après le sud est un drame moderne adapté d’un fait divers. Dans un aprèsmidi caniculaire du sud de la France, quatre parcours se croisent : ceux de Luigi (Ulysse Grosjean), un adolescent en conflit avec son père ; de Georges (Yves Ruellan), vieil homme esseulé ; d’Amélie (Adèle Haenel, L’Apollonide), petite amie de Luigi et caissière ; et d’Anne (Sylvie Lachat), la mère d’Amélie. Dans des paysages rougis par la bauxite, sous la lumière violente du Sud, ces quatre vies quotidiennes,seméesde blessures etd’humiliations, vont converger vers une tragédie. Jean-Jacques Jauffret se risque à une énième histoire de destins croisés qui tournent mal. Le film souffre de cette structure narrative, dont la formule, qui confine à l’exercice de style, a beaucoup été déclinée après le succès des fims d’Alejandro Inarritu. Le réalisateur renouvelle ici le genre en répétant les événements sous des angles de vue différents, en fonction du personnage choisi comme vecteur. Une violence d’autant plus insoutenable qu’elle restecontenue Après le sud n’explique pas les raisons du drame qu’il met en scènemais vaen montrer la complexité, la trajectoire. En déroulant son action pendant les six heures qui précèdent la tragédie, le film dévoilel’âprequotidiendesesquatrepersonnages. Amélie est rabaissée par des clients, Luigi est écrasé par son père, Anne se sent humiliée par sa corpulence… Mais c’est l’affront quesubitGeorgesquiestleplus terrible : parce qu’il a volé un CD de Mozart qu’il n’a pas les moyens de s’acheter, il se fait humilier par des vigiles quilui demandent de se déshabiller alors même que le CD est dans la poche de son manteau. Bafoué, Georges voudra se venger… Sur n’importe qui… Auplus près des corps, le réalisateur filme le malaise de ces personnages dans une mise en scène sobre, dépouillée et précise. On est ébranlé par certaines scènes d’une violence d’autant plus insoutenable qu’elle reste contenue (l’humiliation de Georges, la crise de boulimie d’Anne) et, par contraste, par la beauté des paysages méditerranéens filmés en plans larges. On est saisi aussi par l’interprétation d’Yves Ruellan, qui incarne George tout en tension, et celle de Sylvie Lachat, qui rend son personnage gracieux et fragile malgré sa corpulence. Le montage, construit en spirale avec des temporalités qui se croisent et reviennent, comme un thème musical, offre des variations intéressantes et fait respirer ce film ambitieux et souvent virtuose mais qu’une volonté de maîtrise étouffante empêche de tenir toutes ses promesses. A la fin du film, après le drame, le réalisateur n’évitera pas une symbolique judéo-chrétienne trop voyante. Toutefois, ces figures emblématiques ont le mérite d’éloigner le récit du simple fait divers. En prenant un envol quasi religieux, le film s’ancre dans une dimension universelle plus stimulante. p Sophie Walon Film français de Jean-Jacques Jauffret. Avec Adèle Haenel, Ulysse Grosjean, Yves Ruellan. (1 h 32.) Warner met ses incunables à la «MOD» C haque amateur de cinéma porte en lui (en elle) une liste de films désirés et hors d’atteinte. Dans un monde parfait, il suffirait d’exprimer le souhait de voir un film muet de John Ford, une série B mexicaine ou Let It Be pour être exaucé. Dans ce monde-ci, la vidéo à la demande a fait beaucoup pour apaiser les frustrations. Les cinéphiles qui ont le goût des possessions matérielles peuvent maintenant goûter aux joies des disques MOD (manufactured on demand). Le procédé a déjà fait ses preuves aux Etats-Unis. Grâce à lui, il suffit de commander à l’éditeur un exemplaire des Gens de la pluie de Francis Ford Coppola ou de La Toile d’araignée de Vincente Minnelli, sur Internet. Le disque sera alors fabriqué et livré. Pour l’amateur français, l’éditeur aura pour nom Warner Bros. La filiale française du studio de Burbank est la première à proposer chez nous cette solution. L’opération a été lancée discrètement pendant l’été sur le site Warnerbros.fr, et une trentaine de titres sont disponibles, qui ont tous en commun de n’avoir jamais été édités en DVD. Aux Etats-Unis, The Warner Archive est accessible depuis 2009 et propose 800 titres, des longs-métrages bien sûr, mais aussi des séries télévisées. Ned Price, le responsable du fonds de la major américaine, explique que celui-ci est presque inépuisable. Composé des catalogues des studios Warner, MGM, Allied, RKO, Lorimar et New Line, il compte plus de 6 000 longsmétrages, 65 000 épisodes de séries télévisées, 1 532 courtsmétrages d’animation. Modestement, Ned Price soutient que tous les grands studios ont pour préoccupation la préservation et la mise en valeur de leur fonds, mais il est généralement admis que la Warner a pris une longueur d’avance. D’ailleurs la Columbia passe par le site de Warner Archive pour commercialiser ses DVD faits sur commande. Remastérisés Aux Etats-Unis, la mise sur le marché de nouveaux titres est en partie décidée par les internautes qui proposent de nouveaux titres sur le site de la collection. On n’en est pas encore là en France : la première vague proposée sur le site de la Warner a été choisie par les spectateurs de la chaîne TCM (groupe Warner) à partir d’une liste qui leur a été proposée. A l’avenir, promet Michaël Nathan, qui supervise cette opération, les internautes auront leur mot à dire et les DVD seront fabriqués à partir de matériaux de meilleure qualité (aux EtatsUnis, une partie des titres que propose la Warner Archive ont été remastérisés). D’ici trois à quatre mois, les cinéphiles français devraient pouvoir choisir entre 60 titres. Ensuite, de nouvelles collections seront lancées. L’une d’elles devrait proposer des films « pre-Code ». En langage de cinémathèque, on désigne ainsi les films hollywoodiens réalisés avant l’entrée en vigueur du code Hayes qui imposa le puritanisme de 1930 à 1968. Il suffira alors d’envoyer un e-mail pour que Mae West arrive chez vous. p T. S. nThe Thing Film américain de Matthijs Van Heijningen (1 h 43). Des scientifiques norvégiens basés dans l’Antarctique découvrent une créature congelée qui se réveille et s’échappe. The Thing remplit son programme de frayeur, de suspense et d’action de façon relativement efficace. Mais une grande partie des péripéties et des inventions plastiques (les métamorphoses de la créature) ont déjà été vues dans la version de John Carpenter et avec plus de style. p J.-F. R. nUn monstre à Paris nBeauty en plus vive à mesure qu’elle parvient à sortir l’homme de sa torpeur puis à le séduire. Comment pourtant lui annoncer qui elle est vraiment ? Au cœur de ce drame, l’idée d’une duplication de la Terre, d’une reproduction du monde des hommes, de ce qui est, en fait, unique, prend soudain une valeur fortement métaphorique. Le scénario imagine qu’à partir du jour de la découverte de cette autre Terre, celle-ci aurait progressivement cessé de n’être qu’un pur reflet. Désormais, le miroir serait brisé et il n’y aurait plus de duplication stricte des événements mais un décalage, une bifurcation des causalités et des effets sur cette autre 25 Film sud-africain d’Oliver Hermanus (1 h 40). François, notable afrikaner, père et mari dévoué, dissimule son homosexualité, qui lui inspire un dégoût de lui-même. Lorsqu’il rencontre Christian, un éphèbe de 23 ans, il est consumé par la passion. Beauty aborde la difficulté d’être homosexuel dans une société conservatrice et la force du refoulé, thèmes plus heureusement traités par le passé. Beauty souffre d’un rythme un peu mou et d’un discours trop simpliste. p S. W. nL’Apparition de la Joconde Film français de François Lunel (1 h 20). Un écrivain de retour des EtatsUnis est pressé par son éditeur de donner une suite à l’un de ses anciens succès. Installé dans un palace parisien, il est atteint du syndrome de la page blanche, jusqu’à ce qu’une SDF le visite, qui prétend être la Joconde. Un récit qui fait droit à la fantaisie, sans en tirer tous les partis. p J. M. nEl Bulli Documentaire allemand de Gereon Wetzel (1 h 48). Une plongée dans les coulisses du restaurant El Bulli, dirigé par le pape de la cuisine moléculaire, le chef espagnol Ferran Adria. Durant les six mois de fermeture annuelle de l’établissement, avec quelques fidèles, il met au point la carte de la prochaine saison. Le film est consacré à cette préparation, mais sa dévotion pour son sujet fait oublier l’intelligibilité qu’il doit à son spectateur. p J. M. nOxygène Film belge de Hans Van Nuffel (1 h 38). Tom est un adolescent atteint de mucoviscidose, condamné à court terme. Il brûle sa vie par les deux bouts, avant de rencontrer Xavier et Eline, qui partagent son destin et vont lui apprendre à y faire face le moins mal possible. Un film qui n’évite pas les facilités liées au genre, mais qu’une certaine sincérité rend touchant. p J. M. Film d’animation français de Bibo Bergeron (1 h 27). Une chanteuse de cabaret, une créature mutante, un préfet de police mégalomaniaque : parents, rassurez-vous, on n’a pas ressuscité Fantômas, tous ces ingrédients sont inoffensifs, passés à la moulinette d’un scénario plutôt incohérent, au filtre d’une animation en relief très classique. Reste à savoir si vos enfants aiment entendre Vanessa Paradis interpréter des compositions de M. p T. S. nCloud Rock, mon père Film documentaire américanosuisse de Kaleo La Belle (1 h 35). Cloud Rock, 70 ans, est un hippie qui n’a jamais renoncé à son idéal : prendre des drogues, être libre, coucher avec qui il veut… Kaleo, 35 ans, le fils de Cloud Rock, n’a vu son père que deux fois depuis l’âge de 3 ans. Un jour, Cloud Rock propose à Kaleo une randonnée à vélo entre Seattle et Portland. Kaleo accepte et décide de filmer son père au cours de ce road-movie à vélo où l’on voit se confronter une icône des sixties, fier de son individualisme et de sa liberté, et son fils, qui l’accuse de l’avoir abandonné… p S. W. vvvOn peut éviter nLe Dernier Week-End Film français d’Ali Borgini (1 h 47). Conçu à l’initiative de Pôle emploi, Le Dernier Week-end est, à l’origine, une expérience destinée à « évaluer les compétences » des comédiens demandeurs d’emploi. Si l’on peut comprendre ce qui a poussé la troupe à vouloir faire un film de fiction reconnu comme tel, sanctionné par une véritable sortie en salles, cela ne doit pas occulter le fait que le cinéma est d’abord une affaire de regard, et de désir. p I. R. Nous n’avons pas pu voir Beur sur la ville, film français de Djamel Bensalah (1 h 39). Les Trois Mousquetaires, film français de Paul W. S. Anderson (1 h 50). Les meilleures entrées en France Nombre de semaines d’exploitation Nombre d’entrées (1) Nombre d’écrans Evolution par rapport à la semaine précédente Total depuis la sortie Bienvenue à bord 1 486 229 525 _ 486 229 Drive 1 394 835 246 _ 394 835 La Nouvelle Guerre des boutons 3 252 634 584 –4% 1 072 680 Identité secrète 2 160 860 311 – 34 % 456 298 La Guerre des boutons 4 152 169 577 0% 1 247 250 Dream House 1 130 964 319 _ 130 964 Un heureux événement 2 111 522 382 – 27 % 317 911 Le Skylab 1 106 155 184 _ 106 155 Sex List 1 80 040 208 _ 80 439 Habemus papam 5 50 135 338 –2% 574 803 Source : Ecran Total (1) Période du 5 au 9 octobre inclus Les jeunes n’hésitent pas à s’entasser dans des voitures qui vont très vite, alors que leurs aînés préfèrent prendre leurs aises dans de grands bateaux de croisière qui fendent placidement les flots. La preuve : le démarrage de Drive laisse de la gomme sur le goudron, avec une moyenne impressionnante de 1 605 spectateurs par salle, pendant que Bienvenue à bord se contente de réunir 926 passagers par cabine. Pendant ce temps, les enfants continuent de se disputer, et les deux Guerres des boutons suivent des parcours comparables. A ce jour, les deux films totalisent 2,3 millions de spectateurs et affichent une belle stabilité. Parmi les autres sorties du 5 octobre, Le Skylab fait mieux qu’Apollo 18, qui se classe 16e avec 39 262 entrées. La NASA devrait se pencher sur le boxoffice français. 26 0123 cinéma Mercredi 12 octobre 2011 ppp excellent ppv à voir pvv pourquoi pas vvv à éviter Un film sec comme l’effraction, rapide et laconique telle une mise à sac «Le Voleur», de Louis Malle est à l’image du livre de Georges Darien qui l’a inspiré tiré un film au titre homonyme, réalisé (et tièdement reçu) en 1967. Tout en dévorant les autres romans de Darien (épatants !), j’apprends l’heureuse coïncidence de sa reprise en salles, mercredi 12 octobre, après trente-quatre ans d’absence au cinéma, et une ultime diffusion télévisuelle en 1992. On doit cette initiative à Sébastien Tiveyrat (Swashbuckler Films), distributeur séditieux qui assume la double inconvenance de ne pas posséder de téléphone portable et d’aimer passionnément Georges Darien. Le déclic a eu lieu au Festival de La Rochelle en juillet 2011, où le film fut projeté devant un public enthousiaste de 1 500 personnes, en présence de son scénariste Jean-Claude Carrière. Il sort aujourd’hui dans une salle parisienne (le Reflet Médicis), ainsi que dans le réseau Utopia, à Bordeaux, Toulouse, Avignon et Montpellier. Je me précipite aussi sec pour découvrir ce beau film, l’un des plus incontestables de Louis Malle. Sec comme l’effraction, froid comme un pied-de-biche, rapide et laconique comme une mise à sac. Jean-Paul Belmondo y incarne ROGER-VIOLLET Jean-Paul Belmondo et Charles Denner dans « Le Voleur », réalisé par Louis Malle en 1966. DR Georges Randal, jeune orphelin d’ascendance bourgeoise, dépouillé par son oncle et tuteur de toute sa fortune. Le jeune homme, tournant au dandy vengeur, se tourne alors vers la rapine, qu’il pratique sans état d’âme, avec une «MAGNIFIQUEMENT INTERPRÉTÉ PAR MARIE-JOSÉE CROZE» NEXT LIBÉRATION «UN THRILLER INTIME, ADULTE ET CHAUFFÉ À BLANC» LE MOUV’ haine considérable pour les valeurs morales d’une société qu’il méprise. Rien d’un Arsène Lupin donc : un brise-fer, un fracasseur de meubles précieux, un saccageur qui rêve « de désosser la carcasse bourgeoise ». Rien non plus d’une bonne âme progressiste : la destruction lui tient lieu de cause, avec la conscience paradoxale de tirer subsistance de ce qu’il veut détruire. Randal est l’effroi fait homme, le pur symptôme d’une société gangrenée par l’hypocrisie, le mercantilisme, la corruption, la démagogie. Une clique édifiante l’entoure dans ses œuvres, constituée d’un curé nihiliste (Julien Guiomar), d’un monteen-l’air cynique (Paul Le Person), d’un truand anarchiste (Charles Denner, grandiose) et d’une cohorte de femmes plus charmantes, manipulatrices et ensorceleuses les unes que les autres (Marie Dubois, Geneviève Bujold, Bernadette Laffont, Françoise Fabian…). Film passionnant, à plus d’un titre. Il est autant le portrait de la France sclérosée de 1967, que, selon son propre aveu, celui de Louis Malle. Issu d’une famille de richissimes industriels (les Béghin), Malle choisit avec le ciné- Ce film est autant le portrait de la France sclérosée de 1967 que, selon son propre aveu, celui de Louis Malle LAURENT LAVOLÉ PRÉSENTE MARIE-JOSÉE CROZE UN FILM DE SANTIAGO AMIGORENA www.rezofilms.com LE 19 OCTOBRE AU CINÉMA ma une émancipation violente de son milieu, sans parvenir pour autant à s’intégrer dans sa famille d’adoption, trop scandaleux pour les anciens, trop sage pour les modernes. Ce déchirant entredeux qui marque son destin en fait un cinéaste solitaire et douloureux, à l’élégance altière, dont Georges Randal figure, en effet, un possible alter ego. Cette solitude fut plus encore celle de Darien, dont la reprise du film de Malle devrait inciter à la relecture. L’homme, sur le plan biographique, demeure un relatif mystère, dont l’hypothèse la plus savoureuse est qu’il ait vécu un temps la vie de son héros. Né Georges Hippolyte Adrien en 1862, il meurt en 1921, déjà oublié. Entre ces deux dates, une vie d’insoumission et d’exil, qui lui fait tâter du bataillon disciplinaire en Tunisie, côtoyer les milieux anarchistes, puis devenir candidat, malheureux, de l’impôt unique lors de diverses échéances électorales vers la fin de sa vie. Il écrit, plus essentiellement, sept romans, une dizaine de pièces de théâtre, et moult pamphlets dans les revues anarchistes, un courant auquel il serait erroné de le réduire. En vérité, Darien n’est d’aucun parti, et l’ennemi de tous. Entre le révolté Jules Vallès, qui semble auprès de lui sorti du couvent des oiseaux, et l’imprécateur Léon Bloy, dont il ne partage nullement la passion mystique, son œuvre, exaltation féroce de l’individu dans la lignée du philosophe allemand Max Stirner, fustige toutes les institutions et toutes les communautés. L’armée, l’Eglise, le Parlement, et jusqu’au peuple dont il écrit, en 1903, dans la feuille anarchiste L’Enne- mi du peuple : « Qu’est-ce que le peuple ? C’est cette partie de l’espèce humaine qui n’est pas libre, pourrait l’être, et ne veut pas l’être ; qui vit opprimée, avec des douleurs imbéciles ; ou en opprimant avec des joies idiotes ; et toujours respectueuse des conventions sociales. C’est la presque totalité des pauvres, et la presque totalité des riches. C’est le troupeau des moutons et c’est le troupeau des bergers. » André Breton, après Jarry et Apollinaire, contribuera à faire sortir de l’ombre ce loup solitaire des Lettres françaises, dans l’œuvre duquel il lit « le plus rigoureux assaut que je sache contre l’hypocrisie, l’imposture, la sottise, la lâcheté ». L’éditeur Jean-Jacques Pauvert rééditera ainsi en 1955 Le Voleur, incontestablement son chefd’œuvre. On en extrait pour le plaisir ces quelques lignes, propices à une méditation contemporaine : « Ah si les détroussés des entreprises financières, les victimes de l’arbitraire gouvernemental, avaient pris le parti d’agir contre les auteurs, en chair et en os, de leurs misères, il n’y aurait pas eu, après ce désastre, cette iniquité, et cette infamie après cette ruine (…). Mais ce sont les institutions, aujourd’hui, qui sont coupables de tout ; on a oublié qu’elles n’existent que par les hommes. Et plus personne n’est responsable, nulle part, ni en politique, ni ailleurs… » p Jacques Mandelbaum Claude BEBEAR, Jacques et Patricia BEMBERG, Gonzague de BLIGNIERES, Charles de CLERMONT-TONNERRE Laurent DUMAS, Bernard GAULT, Dominique de LA ROCHEFOUCAULD, Francis-Charles POLLET SA ERSA, SMILE INVEST et Les 3 ÉPIS présentent Licence n° 6101 - création : www.comquest.fr - Crédit photos : Fréderic Piot - *0,34e/mn T ous ceux qui auront passé, sous un fielleux crachin, leurs vacances en CharenteMaritime durant le mois de juillet vous le diront : rien ne restera, que l’humide ennui, de cet été. Que n’ont-ils eu l’idée de glisser dans leur bagage Le Voleur, de Georges Darien, précieuse antiquité de 1897 ! Le livre, inscrit à mon programme prévisionnel de lecture depuis une vingtaine d’années, dormait honteusement sur mon étagère, incessamment relégué par les urgences du moment. Quelle erreur ! Une langue d’une étonnante modernité, un ton d’une liberté picaresque, une rage élégante contre l’iniquité de la société, un personnage de bourgeois qui se retourne contre sa classe en la dévalisant méthodiquement : ce bâton de dynamite littéraire et politique, allumé voici plus d’un siècle sous la IIIe République, aurait aussi bien pu s’écrire de nos jours. Cet aveu de méconnaissance d’un des plus réjouissants romanciers français qu’il m’ait été donné de lire, en entraîne un autre, plus fâcheux pour le critique de cinéma : j’avais aussi perdu de vue que le réalisateur Louis Malle en avait L’écrivain français Georges Darien (1862-1921). RobeRt Hossein a gagné son paRi La Nouvelle République des Pyrénées un spectacLe d’enveRguRe MondiaLe Le MiRacLe RobeRt Hossein Le Petit Journal France Soir spectacLe « géniaL » toucHé paR La gRâce Mgr Podvin Porte-parole des Évêques de France Télé Obs 10e taRiF uniQue LOC. : 0 892 050 050* - 0 892 68 36 22* www.viparis.com - www.fnac.com 2 PLACE DE LA PORTE MAILLOT 75017 PARIS - MÉTRO PORTE MAILLOT LA SEMAINE A DU SENS | WWW.PELERIN.INFO & vous 0123 Mercredi 12 octobre 2011 27 Le Plaza Athénée ouvre ses cuisines Avis aux passionnés de gastronomie et des arts de la table, le Plaza Athénée, à Paris, ouvre les portes de ses cuisines et de ses restaurants, mercredi 12 octobre. L’occasion de découvrir, autour d’ateliers, tous les métiers et savoir-faire, la gestuelle, les tours de main et les astuces des professionnels, de la cuisine au vernissage à tampon en passant par la conciergerie, l’art floral, la sommellerie, la pâtisserie… Si le palace parisien est le seul à ce jour à avoir reçu le label « Entreprise du patrimoine vivant » (EPV) dans la catégorie gastronomie, cette marque de reconnaissance – créée en 2006 par le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie – rassemble aujourd’hui près de 1 000 entreprises labellisées. Certaines d’entre elles ouvrent aussi leurs ateliers de création, il suffit pour cela de prendre la « Route des EPV », reliant les sites du patrimoine manufacturier français, qui sillonne l’Hexagone dans quelque 23 régions. p Mélina Gazsi (PHOTOS MONETTA) Journée du patrimoine vivant du Plaza Athénée. Patrimoinevivant-plaza-athenee.fr Route des EPV. Patrimoine-vivant.com Les médecines chinoises s’infiltrent à l’hôpital Acupuncture, shiatsu et pratiques psycho-corporelles sont utilisés en complément de traitements au long cours Santé L’acupuncture est par exemple utilisée pour traiter la douleur en obstétrique ou en gynécologie notamment. Le qi gong est proposéaux personnesobèsesdansleservice de nutrition de la Pitié de JeanMichel Oppert. « Notre but est d’identifier quels traitements peuvent être efficaces en intégrant la médecine chinoise à la prise en charge conventionnelle », souligne le Dr Catherine ViensBitker, chargée de cette question à C ela fait des années que Sabine (le prénom a été changé) a des vertiges. Elle est pour cela suivie dans le service d’othorhino-laryngologie (ORL) du professeur Georges Lamas à l’hôpital parisien de La Pitié-Salpêtrière. Après deux séances de shiatsu, la sensation de « tête flottante » qui l’incommode a disparu. Le shiatsu, littéralement « pression des doigts», est une technique d’origine japonaise. C’est une médecine énergétiquequi viseà rétablir l’harmonie du corps en agissant sur les méridiens, selon les principes de la médecine traditionnelle chinoise. Sabine fait partie de la trentaine de patientsde ce service à avoir suivi des séances de shiatsu. « Cette pratiquevise à apporter uncomplément, voire un réconfort aux patients qui sont en souffrance. La rééducation classique ne soigne pas tous les symptômes : acouphènes, raideurs de la nuque, stress », explique Sophie Jamet, infirmière diplômée en rééducation vestibulaire, à l’origine du projet, qui a démarré il y a un an. Les patients ont droit à trois séances gratuites, puis trois dans un dispensaire proche. Parallèlement, unefois parmois, desmassages sont proposés au personnel. La prochaine étape serait d’évaluer scientifiquement ces données, indique Céline Kilhoffer, cadre de santé. Si les bienfaits du shiatsu sont réels, il reste à les évaluer. Une étude, en cours d’écriture de procédure, sur l’apport dushiatsu pour atténuer la fatigue liée à certaines pathologies neurologiques comme la sclérose en plaques (SEP),la maladie de Parkinson ou la sclérose latérale amyotrophique (SLA), devrait démarrer au second semestre 2012 dans le cadre d’un A Paris, une vingtaine de services de l’AP-HP intègrent cette médecine ancestrale Une leçon de shiatsu à l’école de massage André Nahun, à Paris.. ELEONORE HENRY DE FRAHAN/ARGOS programme hospitalier de recherche clinique (PHRC), à l’initiative du docteur Nadine Le Forestier, neurologue à La Pitié-Salpêtrière. «Cette pratique, qui se veut complémentaire des traitements au long cours, ne pourra être introduite que si elle est officialisée par une recherche thérapeutique rigoureuse », explique le docteur Le Forestier. L’idée est néelorsque ce médecin a reçu un courrier de la fille d’une de ses patientes, décédée. « Cette femme, atteinte de SLA, a vu ses douleurs atténuées par le shiatsu et a eu une fin de vie plus paisible », précise Bernard Bouheret, praticien et enseignant de shiatsu depuis trente ans. L’expérience est également positive pour les parents d’enfants adoptés. Le ISABELLE GIORDANO 11h - Les Affranchis Avec tous les mercredis la chronique de Sandrine Blanchard du journal franceinter.fr pédiatre Frédéric Sorge proposait, lorsqu’il était à Saint-Vincent-dePaul, d’apprendre aux parents adoptifs à toucher leurs enfants avecla techniquedu shiatsu.Il souhaite poursuivre l’expérience à l’hôpital Necker. Le shiatsu fait partie des nombreux traitements complémentaires qui font leur entrée dans les hôpitaux. Une vingtaine de services des hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (APHP) intègrent la médecine chinoise, médecine ancestrale. Elle recouvre quatre grandes disciplines : la pharmacopée, l’acupuncture, les massages thérapeutiques (tui na, shiatsu), et les pratiques psychocorporelles (qi gong et tai-chi). la direction de la politique médicale de l’AP-HP. « Cela peut être très utile en prévention secondaire des maladies chroniques, poursuitelle. J’ai suivi une femme atteinte d’uncancer du sein en chimiothérapie. Elle avait des picotements très forts au bout des doigts, de fortes douleurs dans les mains, et perdait ses ongles. Après une séance de shiatsu et de l’acupuncture, la douleur a disparu, les picotements sont devenusgérables etelle n’a plusperdu ses ongles », explique Maxime Rigobert, praticien de shiatsu. « 50 % des patients en oncologie et 75 % des personnes souffrant d’une maladie chronique ont recours à des médecines complé- mentaires. Elles ont de bons effets, sont sans toxicité majeure et coûtent moins cher », explique le professeur Jean-Raymond Attali, de la Fédération mondiale des sociétés de médecine chinoise (WFCMS). « Le shiatsu atténue les effets de la chimiothérapie, comme la fatigue ou les nausées », explique Bernard Bouheret. « L’usage montre que cela marche. Il faut maintenant mettre en évidence cette efficacité», ajoute le Dr Viens-Bitker. Neuf projets de recherche ont été retenus dans le PHRC d’Ile-deFrance, qui en compte 900. Un colloque sur la médecine chinoise en milieu hospitalo-universitaire s’esttenu le 16septembre àLa PitiéSalpêtrière. Les médecines dites complémentaires constituent en outrel’undes pointsduplan stratégique 2010-2014 de l’AP-HP. « Le but est de faire de ces thérapies des actes du quotidien, pour la santé de nos patients », a affirmé Mireille Faugère,directricegénéralede l’APHP, lors de ce colloque. Les réticences restent fortes. Le professeur André Grimaldi, diabétologue, a vivement raillé ce colloque. « Notre rôle est d’avancer dans la connaissance de ces médecines, sans a priori », concède le docteur Catherine Viens-Bitker. Malgré les freins, le mouvement est lancé. p Pascale Santi nSur le Web medecinechinoise.aphp.fr Réguler ses émotions et gérer son stress avec la méditation LA MÉDITATION, outil thérapeutique ? Christophe André, psychiatre et auteur de Méditer, jour après jour (L’Iconoclaste, 300p., 24,90 ¤), est un des pionniers de l’introduction de cette pratique en milieu hospitalier. Il l’utilise depuis 2004 à l’hôpital Sainte-Anne, à Paris, dans la prévention des rechutes de troubles anxieux et dépressifs. Dans son service, le psychiatre organise des sessions de huit à dix semaines à raison de 2 h 30 hebdomadaires. «La méditation dite de pleine conscience est un outil d’entraînement de l’esprit qui vise à réguler ses émotions et diminuer la fréquence des ruminations négatives», explique-t-il. La méditation est sortie du champ de la spiritualité pour devenir véritablement un outil de soins à partir du milieu des années 1990, aux Etats-Unis. En France, cette approche suscite encore de la méfiance. Méfiance par rapport à l’efficacité, par rapport à la laïcité – la méditation peut être une porte d’entrée dans les sectes –, et par rapport aux traitements classiques. « La méditation de pleine conscience a été validée par tout un corpus de publications dans des revues scientifiques et dans ses formes codifiées à l’hôpital, c’est un outil laïque », développe Christophe André. Il conseille pour les patients qui consultent en ville de se référer aux praticiens répertoriés sur le site de l’Association pour le développement de la pleine conscience (association-mindfulness.org). « Solution miracle » «En France, nous avons trente ans de retard par rapport aux EtatsUnis», considère Lisa Letessier, psychologue clinicienne à l’hôpital Georges-Pompidou, à Paris. Recrutée en 2010 par le professeur Silla Consoli, chef du service de psychiatrie de liaison, pour faire des thérapies comportementales et cognitives et de la méditation de pleine conscience, elle travaille avec tous les services de l’hôpital. «Ces séances aident les personnes qui souffrent de maladies chroniques à se réancrer dans le présent, ainsi qu’à se réapproprier leur corps, leurs émotions et leurs pensées », explique-t-elle. Les groupes sont composés de personnes atteintes de cancers, mais aussi de patients souffrant de pathologies cardiaques. En méditant, ils arrivent à mieux gérer le stress, les douleurs et la tristesse que procure la maladie. «Cette prise en charge vient en complément d’autres thérapies, prévient Lisa Letessier, ce n’est pas une solution miracle.» Professeur de néphrologie à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, à Paris, Corinne Isnard Bagnis compte introduire, au printemps 2012, un programme de méditation dans son service pour les patients atteints de pathologies rénales afin d’améliorer leur confort de vie. « Je souhaite le faire dans un cadre de recherches évaluées de telle sorte que la communauté médicale puisse en profiter », conclut-elle. p Martine Laronche 28 disparitions 0123 Mercredi 12 octobre 2011 Dessinateur Guitariste Bert Jansch Jean Gourmelin F igure-clé de la renaissance folk britannique des années 1960, révélé par ses disques solos et comme cofondateur du groupe Pentangle, le guitariste virtuose, chanteur et auteur écossais Bert Jansch a influencé plusieurs générations de musiciens, jusqu’à sa mort, le 5 octobre, à Londres, d’un cancer du poumon, à l’âge de 67 ans. D essinateur, mais plutôt de concepts, de rêves éveillés et d’énigmatiques allégories. Illustrateur, mais plutôt de paradoxes angoissants et autres questions en suspens. Humoriste, mais d’un humour plutôt glaçant. Depuis l’an 2000, sa vue, amenuisée par la maladie, avait progressivement abandonné Jean Gourmelin, qui ne travaillait plus. Mais son œuvre prolifique, notamment pour la presse et l’édition, continuait à travailler pour lui et ses dessins à perdurer dans la conscience graphique de ses contemporains. 3 novembre 1943 Naissance à Glasgow (Ecosse) 1965 Premier album « Bert Jansch » 1967 Création du groupe Pentangle 5 octobre 2011 Mort à Londres 23 novembre 1920 Naissance à Paris De 1953 à 1969 Collaboration avec le maître verrier Max Ingrand à Vendôme (Loir-et-Cher) 1969 Grand Prix de l'humour noir 1962 Parution de son premier dessin dans la revue « Bizarre » Septembre 2008 Exposition rétrospective au Centre Pompidou 9 octobre 2011 Mort à Meudon (Hauts-de-Seine) La dernière grande exposition de Jean Gourmelin s’est tenue à la chapelle SaintJacques, à Vendôme (Loir-et-Cher), la ville de ses débuts d’artiste,qui lui rendait hommage il y a quelques jours à peine, du 14 au 25septembre. Comme s’il s’était agi de l’ultime page à noircir avant la délivrance, il n’y aura pas survécu longtemps. Agé de quatre-vingt-onze ans, le dessinateur s’est éteint dans la nuit du samedi 8 au dimanche 9 octobre, à Meudon (Hauts-de-Seine), dans la maison de retraite qui l’accueillait depuis deux ans. Vertige du vide et fuite du temps Né le 23 novembre 1920 à Paris, seul enfant d’une famille modeste, Jean Gourmelin commence à dessiner, encouragé par un professeur, dès l’école primaire. En 1935, sa famille quitte la capitale pour Vendôme, où son père s’installe comme grainetier et où lui-même seraformé aux techniques du papier peint et de la gravure sur bois par le peintre Charles Portel. Après un retour à Paris à partir de 1940, notamment pour étudier aux Arts décoratifs, il revient en 1945 à Vendôme, où il commence une collaboration de vingt-trois années, en tant que salarié, chez le célèbre verrier Max Ingrand. Sans les signer, Jean Gourmelin dessine alors certains vitraux de la cathédrale de Rouen, des châteaux d’Amboise et de Blois. Au fil des années, une série de rencontres amicales va peu à peu l’encourager à prendre son envol en tant que dessinateur, peintre, aquarelliste, illustrateur… D’abord son cousin, Claude Serre, égale- Jean Gourmelin dans son atelier, en 1994. LOUIS MONNIER/RUE DES ARCHIVES ment employé de Max Ingrand et qui deviendra lui aussi un célèbre dessinateur de presse. En 1951, le graveur, critique d’art et typographe Maximilien Vox. Puis, en 1961, l’écrivain Jacques Sternberg et, en 1963, Louis Pauwels, fondateur de la revue Planète, qui fera connaître ses dessins à un large public. Mais c’est en 1962 que paraît son premier dessin, dans la revue Bizarre, de l’éditeur Eric Losfeld. Après le brillant succès rencontré par sa première exposition personnelle à la galerie parisienne Le Tournesol, en 1967, il abandonne le vitrail et s’impose enfin comme dessinateur de presse, bientôt couronné par le Grand Prix de l’humour noir, en 1969. Tout en publiant sesalbums et en multipliant les expositions personnelles, il touche au décor de cinéma, à l’affiche, à l’illustration, et va collaborer très longuement, jusqu’à la fin des années 1990, à de nombreux titres, dont Le Point, Le Figaro, HaraKiri, Pilote, Elle, Le Monde, Le Monde diplomatique… Les matières minérales avec leurs aspérités, le vertige du vide et la fuite du temps composent l’univers d’où il fait surgir et évoluer ses personnages hiératiques, toujours en position instable ou absurde. Un univers souvent comparé, bien que de sty- le graphique différent, avec celui de Roland Topor, son collègue en humour noir. « Le plus difficile, avait écrit un jour Philippe Soupault, cité dans le catalogue de l’exposition rétrospective que le Centre Georges-Pompidou lui a consacrée en 2008, c’est de découvrir où Gourmelin veut nous conduire. On peut se pencher longtemps sur l’œuvre de cet infatigable dessinateur. Le danger, c’est qu’il peut nous entraîner loin, très loin de notre réalité et du quotidien. Ainsi la méditation sur l’œuvre de Gourmelin est un enrichissement. » p suit ses études secondaires chez les jésuites à Beyrouth, avant de devenir comédien au Théâtre du Soleil, la troupe d’Ariane Mnouchkine. Il revient ensuite à Jérusalem dans les années 1970, se dote du patronyme Abou Salem et crée Al-Hakawati (« le conteur», en arabe), à la fois compagnie et salle de théâtre, en rénovant le Nuzha, un cinéma désaffecté. Pionnier de la production théâtrale palestinienne, ilse fait rapidement connaîtreenmettantenscènedenombreusespièces, tant du répertoire arabe, comme l’épopée de Gilgamesh, qu’occidental, avec des œuvres signées Tchekhov, Brecht ou Dario Fo. Sous sa direction, Al-Hakawati tourne aussi bien dans les territoires occupés qu’en Israël et à l’étranger. Touche-à-tout, passionné par l’expérimentation, il se frotte au cinéma, avec un documentaire sur Jérusalem, Gates to the City et à l’opéra, avec la mise en scène de L’Enlèvement au sérail, de Mozart, présenté à Salzbourg. « Il mettait un point d’honneur à être à l’avant-garde culturelle, dit son ami Ilan Halévy, un juif palestinien, qui fut représentant du Fatah, le parti fondé par Yasser Arafat, auprès de l’Internationale socialiste. Mais il s’est toujours heurté à un sentiment de méfiance de la part des élites locales, qui avaient tendance à le regarder comme un semi-étranger. C’était l’une des raisons de son mal être. Le fait que l’OLP et le Fatah lui aient repris les locaux d’AlHakawati, pour en faire le théâtre national palestinien l’avait également affecté. » Au début des années 2000, de retour à Jérusalem après quelques années en France, François Abou Salem se lance dans la mise en scène d’Une mémoire pour l’oubli, le douloureux monologue de Mahmoud Darwich. « Avec son côté passionnel, il s’est abîmé dans ce texte, raconte Hoda Al-Imam, l’une de ses proches. Il s’est immergé profondément, sûrement trop, dans la tragédie de la Palestine ». Lors de ses funérailles, le cercueil de François Abou Salem était recouvert du drapeau de son pays d’adoption. p génération – Pete Doherty, Beth Orton, Devendra Banhart, Joanna Newsom, Fleet Foxes, Midlake – lui tresse des louanges et enregistre avec lui (« The Black Swan », son dernier album, en 2006). Se découvrant atteint d’un cancer au poumon en 2009, il repartira en tournée en première partie de NeilYoung,auprintemps2010,aprèsl’ablation d’un demi-poumon et une chimiothérapie. Le 1er août 2011, Bert Jansch avait donné son dernier concert, au Royal Festival Hall de Londres, au sein d’un Pentangle à nouveau reformé. p Benjamin Barthe Stéphane Davet Luc Cédelle Comédien et metteur en scène François Abou Salem L a fièvre et l’inquiétude qu’il investissait dans son travail avaient fini par miner son existence:l’homme de théâtrefranco-palestinien François Abou Salem, âgé de 60 ans, a mis fin à ses jours, samedi 1er octobre, en se défenestrant. Son corps a été retrouvé en contrebas de l’immeuble où il résidait, à Teereh, un faubourg de Ramallah. François AbouSalem aété inhumé,mercredi 5 octobre, au pied des remparts de la vieillevilledeJérusalem,aprèsunecérémonie dans l’ancien théâtre de la compagnie Al-Hakawati qu’il avait contribué à fonder etune messeau couventde l’Ecole biblique et archéologique française de Jérusalem. «C’est une perte cruelle pour la patrie dont il se revendiquait avec une énergie et une fierté farouches : la Palestine », a déclaré dans un communiqué le ministre de la culture français, Frédéric Mitterrand, qui a saluéla«très grande culture »etla«sensibilité» du metteur en scène. C’est à la fin des années 1950 que Fran- çois Abou Salem, né François Gaspar, découvre Jérusalem. Son père, le FrancoHongroisLorand Gaspar,chirurgienetpoète de renommée internationale, prend à cette époque la direction de l’hôpital SaintJoseph,situédanslazoneorientaledelaVil- 1951 Naissance 1998 Le président Yasser Arafat lui remet le prix Palestine pour l’ensemble de son travail théâtral 5 octobre 2011 Mort à Ramallah lesainte, sous tutelle jordanienne. Samère, Francine, une sculptrice, et sa sœur Patricia sont également du voyage. Arrivée en Palestine pour des raisons professionnelles, la famille Gaspar va très vite développer de profondes affinités avec ce pays. Au lieu d’être inscrit au lycée français, le jeune François Gaspar est scolarisé dans le système éducatif arabe, où il acquiert une parfaite maîtrise de cette langue. Il pour- Né à Glasgow, le 3 novembre 1943, Bert Jansch fréquente très tôt la scène folk de sa ville et celle d’Edimbourg, où il découvre des artistes comme la chanteuse Anne Briggs ou le guitariste Davey Graham. La première lui donne le goût du répertoire traditionnel britannique ; le second influera grandement un jeu de guitare en picking–lepoucerythmantlacordebassependant que les autres doigts égrainent la mélodie –, autant marqué par le blues, le jazz, les sonorités orientales que les musiques de la renaissance élisabéthaine. Egalement admirateur des bluesmen Big Bill Broonzy et Brownie McGhee, le jeune homme débarque à Londres au début des années 1960, menant une vie de bohème tout en perfectionnant un style qui l’impose dans les clubs folk de la ville. En 1965, il enregistre dans une cuisine son premier album, « Bert Jansch », qui révèle l’originalité de sa technique instrumentale, la grande qualité de ses chansons et l’attachante rudesse d’une voix à la limite de la maladresse. « Son premier album était épique, confiera Neil Young, un de ses fans les plus fervents, spécialement Needle of Death, une chanson si belle et révoltée. » S’ils n’obtiennent pas de succès grand public, ses premiers albums sont des coups de foudre déterminants pour des artistes appelés à devenir des légendes du folk – Nick Drake, Donovan – ou du rock, comme Jimmy Page, le guitariste de Led Zeppelin, qui, à l’instar de Neil Young, considérait l’Ecossais comme un « Hendrix du folk ». En 1967, son amitié avec le guitariste JohnRenbourn–auteuravecluidejolisdisques en duo – aboutit à la création du groupePentangle.Auxcôtés delachanteuse Jacqui McShee, du contrebassiste Danny Thompson et du batteur Terry Cox, ils formeront ainsi, jusqu’en 1972, une des principales attractions de la nouvelle scène folk britannique (Fairport Convention, Steeleye Span…), en se distinguant par un mélange de jazz et de mélodies médiévales qui connaîtra son apogée avec l’album Basket of Light (1969). Aprèsavoirété deux ansfermier auPays de Galles, Bert Jansch reprend sa guitare, sans retrouver la flamme de ses débuts. La faute sans doute à un alcoolisme dont il ne guérira qu’en 1987. Alors que Pentangle se reforme à l’époque pour trois nouveaux disques et des tournées internationales, il peut constater que son influence perdure malgré les éclipses. Des guitaristes comme Johnny Marr des Smiths ou Bernard Butler du groupe Suede revendiquent leur admiration. Dans les années 2000, une nouvelle AFP 0123 ! "# $# % &#% ' # ( )# * # # # * # * +# ,# - . // 012 * # * # * # # 12 * 3 # . // /42 . // 51# 1 6 7 # # . AU CARNET DU «MONDE» Naissance Milo est heureux de faire part de la naissance de sa sœur Le président de l’université Paris-Sorbonne Et l’ensemble de la communauté universitaire, ont la tristesse de faire part du décès de François-Georges DREYFUS, professeur émérite d’histoire contemporaine, survenu le 24 septembre 2011. Reza Majd, son époux, Juan et Shahrzad Benet, Alexandre et Shaun Benet, ses fils et belles-filles, Tanya, Alexandra, Teymour, Charles, ses petits-enfants Et toute la famille Farmanfarmaian, ont la tristesse de faire part du décès de la princesse Leila FARMANFARMAIAN MAJD, survenu le lundi 3 octobre 2011. Les obsèques auront lieu le vendredi 14 octobre, à 16 heures, au cimetière du Montparnasse, 3, boulevard EdgarQuinet, Paris 14e. La direction générale d’Electricité de France, Ses collègues et amis, ont la tristesse de faire part du décès de Jean GALLAND, directeur délégué du service des énergies insulaires à EDF, survenu le 4 octobre 2011, à l’âge de cinquante-neuf ans. Ils expriment à sa famille leurs sentiments de condoléances. Electricité de France, 22-30, avenue de Wagram, 75008 Paris. Denise GENCE à Paris, le 20 septembre 2011. Anniversaire de naissance Il fallait bien que l’on dise au Monde l’immense bonheur et la fierté de t’avoir. A tes vingt ans, est décédée le 28 septembre 2011, à Paris. L’inhumation a eu lieu à Vouvray (Indre-et-Loire), près des siens. (Le Monde du 5 octobre.) Paris. Sa famille Et ses proches, Romy, à la belle vie que tu mérites, à tes bonheurs et à l’amour infini que l’on te porte. Pascal et Geneviève Lamy, Jean-Hugues Lamy et Frédérique Seltz, Marc et Isabelle Lamy, ses fils et belles-filles, Jacqueline Rousseau-Dujardin, sa sœur, Julien, David, Quentin, Alice, Marie, Perrine, Marthe, Hugo, Simon, Gaspard et Robin, ses petits-enfants, Alexandre, Stanislas et Pénélope, ses arrière-petits-enfants, Lucette, Sa famille Et ses amis, ont la douleur de faire part du décès de Mme Denise LAMY, née DUJARDIN, officier de la Légion d’honneur, président de chambre honoraire au tribunal de commerce de Paris, vice-président honoraire de la chambre de commerce de d’industrie de Paris, survenu dans la paix, au Boisgeloup, le 7 octobre 2011. Elle a rejoint son époux, Nina, Laura Matesco et Stefano Ferri. [email protected] ont la tristesse de faire part du décès de Jacques LAMY et leur fils, Eric dans le souvenir des siens. La cérémonie religieuse aura lieu le mercredi 12 octobre, à 11 heures, en l’église Saint-Gervais-Saint-Protais de Gisors. Cet avis tient lieu de faire-part. Les Annonciades, Le Boisgeloup, 14, rue du Chêne d’Huy, 27140 Gisors. Cruis (Alpes-de-Haute-Provence). Danielle, sa compagne, Virginie, sa fille, Arnaud, son fils et son épouse, Armelle, Victor, son petit-fils, Olivier, son beau-fils, Ta maman et ton papa. Jean-Jacques LEDUC, Chantal GILLE, Décès survenu le samedi 8 octobre 2011, dans sa quatre-vingt-onzième année. Téodor COSMA, pianiste et chef d’orchestre, grand officier de l’ordre du Mérite Culturel Roumain, s’est éteint dans sa cent deuxième année, le 6 octobre 2011. Un hommage lui sera rendu, le vendredi 14 octobre, à 15 h 15, au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, salle Mauméjean. ! "# $ % &' ( De la part de Vladimir, son fils, Brigitte, sa compagne, Michel, son petit-fils Et de tous ses proches. Marie-Gabrielle Denizet-Valot, Marie-Cécile (†) et Jean-Louis Gay, (†), Marie-Françoise et Jean-Pierre Boust, Marie-Laure Denizet (†), Rémi Denizet (†), Bénédicte Denizet, Marie-Geneviève Denizet, Marie-Dominique Meyer, Vicenta Denizet et Jacques Noels, ses enfants, Ses quatorze petits-enfants, Ses neuf arrière-petits-enfants Et les familles Denizet et Perron, ont la tristesse de faire part du décès de Mme Jean DENIZET, " #$ %&! '() * +, -./ " % )(' ( %! )(' (()' Chantal repose à la maison de retraite Anselme Payen, 9, place Violet, Paris 15e. Fleurs naturelles blanches uniquement. Cet avis tient lieu de faire-part et de remericiements. Pompes Funèbres Marbrerie Geoffroy. Tél. 05 49 29 20 40 Jean Hany, son époux, Olivier Riffaud-Longuespé et Agnès, Philippe Riffaud-Longuespé et Marianne, Eric Hany et Sabine, ses enfants, Robin, Alexis, Florian, Baptiste et Romain, ses petits-enfants, ont l’immense douleur de faire part de la disparition de Nicole HANY, née LONGUESPÉ, historien de l’art, conservateur honoraire des antiquités et objets d’art, docteur en histoire de l’art, docteur en histoire, ancienne élève de l’École du Louvre, chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres, née Annette PERRON, ! Les cérémonies religieuses auront lieu les mercredi 12 octobre, à 14 h 30, en l’église Saint-François-Xavier, Paris 7e et jeudi 13 octobre, à 14 heures, en l’église Notre-Dame de Clussais (DeuxSèvres). survenu le 5 octobre 2011, à l’âge de quatre-vingt-treize ans. Elle a rejoint dans la paix son époux, Jean DENIZET, officier de la Légion d’honneur. La cérémonie religieuse a été célébrée ce mardi 11 octobre, à 10 heures, en l’église Saint-André de l’Europe, 24 bis, rue de Saint-Pétersbourg, Paris 8e. Cet avis tient lieu de faire-part. Famille Denizet, 48, rue de Moscou, 75008 Paris. survenue le 1er octobre 2011, à Troyes, dans sa soixante-dix-huitième année. La cérémonie religieuse a eu lieu le 4 octobre, en la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Troyes. Cet avis tient lieu de faire-part et de remerciements. « Je vois les reflets d’une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. (...) après quoi je descendrai hardiment, le crucifix à la main, dans l’éternité. » Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, Livre XLII. 21, rue Jean-Louis Delaporte, 10000 Troyes. M. Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l’Aménagement du Territoire, a la tristesse de faire part du décès, à l’âge de soixante-quatorze ans, de Jean MOULIAS, chef du service de l’Inspecteur général de l’Agriculture honoraire, officier de la Légion d’honneur, chevalier de l’ordre national du Mérite, commandeur du Mérite agricole, ancien directeur général de la SOPEXA, ancien directeur général de l’ONIC. Ses obsèques ont eu lieu le 9 octobre 2011, dans l’Aude, dans la stricte intimité familale. Le président Et les membres du conseil de la Société française d’onomastique, ont l’immense tristesse de faire part du décès de Mme Marianne MULON, membre fondateur de la Société. M. Claude Bonnard son époux, Julien et Raphaëlle, Agnès, Jean, ses enfants, Romain et Marion, Mathilde, Samuel, Luc, ses petits-enfants, Maryse Bonnard, sa belle-fille, Claire, Anne et Ky-Vong, Denis et Fabienne, Thérèse et Damon, Clément, ses beaux-enfants Axel et Matthieu, Marie, Gabrielle, Adam, ses beaux-petits-enfants, Mme Claude Plancke, sa sœur, Richard, Bruce, ses neveux et leur famille. ont la tristesse de faire part du rappel à Dieu, survenu le 18 septembre 2011, de Mme Rosine BONNARD, née PLANCKE. La messe et l’inhumation ont eu lieu en présence de la famille, d’anciennes collègues sages-femmes et d’amis. Cet avis tient lieu de faire-part. 79, boulevard Exelmans, 75016 Paris. ont la douleur de faire part du décès de survenu le 30 septembre 2011. 29 carnet Mercredi 12 octobre 2011 Les obsèques ont eu lieu dans l’intimité familiale. Dijon. Montmirey-la-Ville (Jura). Mme Gabrielle Lefranc, son épouse, Marc, Dominique, Anne et leurs conjoints, ses enfants, Aurélie, Alexandre, Charles, Coralie, Maëva, ses petits-enfants, Ses beaux-frère, Belle-sœur, Ainsi que toute la famille, ont la tristesse de faire part du décès du colonnel (e.r.) Robert LEFRANC, commandeur de la Légion d’honneur, Phyllis Springer Sipahioglu, son épouse, Besi Cecan, sa sœur, Ayhan Cecan, son beau-frère, Nazan, sa nièce, Ipek et Yasemin, ses petites-nièces, Ziya et Tunc Cecan, ses neveux, Condoléances sur registre. Cet avis tient lieu de faire-part et de remerciements. 24, rue de Gray, 21000 Dijon. Hedda Faucheux, sa compagne, Annie Laffillé-Mayer, sa fille, Alexis Laffillé, son petit-fils Et toute sa famille, ont la profonde tristesse de faire part du décès de Jacques Daniel MAYER, survenu le 3 octobre 2011, à Arith (Savoie), dans sa quatre-vingt-quinzième année. Selon sa volonté, les obsèques ont été célébrées dans l’intimité. Hedda Faucheux, Les Labies, 73340 Arith. Annie Laffillé-Mayer, 111, rue de Reuilly, 75012 Paris. Jacqueline, Véronique, Bruno Ainsi que toute leur famille, remercient chaleureusement pour l’affection qu’ils leur ont témoignée, tous ceux qui se sont associés à leur peine lors du décès de Robert MEYNADIER. Anniversaires de décès Il y a trois ans, le 12 octobre 2008, disparaissait, Hélène CALEF, pianiste. « Nos morts ne nous apprennent rien d’autre sinon qu’on les aimait. Ils ne nous donnent rien, sinon la vie pour laquelle on les pleure à jamais, eux qui ont su aimer et qui furent si vivants. » Tous ceux qu’elle a enchantés se souviennent. Elle continue d’habiter nos vies. Sa famille Et ses amis. Le troisième concert à sa mémoire sera donné le samedi 15 octobre, à 20 heures, au temple Saint-Marcel, 24, rue Pierre-Nicole, Paris 5e (Brahms Debussy - Faure - Poulenc - Rachmaninoff - Rossini). Confirmez votre présence à l’adresse : [email protected] Le 12 octobre 2009, disparaissait Alain CROMBECQUE. Tu es en permanence présent dans nos cœurs. Tes amis. Souvenir Le dimanche 9 octobre 2011, est le treizième anniversaire du départ de Goldka LANGBORT. Souvenez-vous ! Messe anniversaire Il y a vingt-cinq ans, Anne CELLIER nous quittait tragiquement. Une messe anniversaire sera célébrée en son nom, le 14 octobre 2011, à 18 h 30, en l’église Notre-Dame de Consolation, 23, rue Jean Goujon, Paris 8e. Conférence ont la douleur d’annoncer la disparition de Göksin SIPAHIOGLU, journaliste, photographe, né en Turquie, fondateur de l’agence Sipa Press, chevalier de la Légion d’honneur, survenue le 5 octobre 2011, à l’hôpital Américain, à l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Un hommage lui sera rendu le jeudi 13 octobre, à 11 heures, au théâtre de l’Odéon, Paris 6e. (Le Monde du 7 octobre.) survenu le 9 octobre 2011, à l’âge de quatre-vingt-dix ans. Les obsèques auront lieu en l’église Sainte-Jeanne-d’Arc de Dijon, le jeudi 13 octobre, à 10 heures, suivies de l’inhumation au cimetière de Montmireyla-Ville, à 15 heures. Nîmes. Rousses. Paris. Robert, Pierre, Louis TETREAU, L’UniverCité, le cycle de conférences de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, le jeudi 13 octobre 2011, à 18 h 30, « Du silence faisons table rase ? le 17 octobre 1961, histoire d’une réapparition », conférence de Jim House, animée par Sylvie Thénault. Palais de la Porte Dorée, 293, avenue Daumesnil, Paris 12e. Renseignements : [email protected] chevalier de l’ordre du Mérite maritime, a refermé le grand livre de sa vie, dimanche 2 octobre 2011, dans sa cent deuxieme année. De la part de Françoise Gorin, Micheline Saldo, Dominique Hernu, Nancy et Alain Delletery, Anita et Bernard Tetreau, ses enfants Ses petits enfants et arriere petitsenfants. Les obsèques ont eu lieu dans l’intimité familiale. Moulin de l’Aubier, 17450 Fouras. Le 26 septembre 2011, dans sa soixante-douzième année, Claude TISSIER, directeur du Travail honoraire, chevalier dans l’ordre national du Mérite, est décédé à son domicile. 6, rue Maryse Bastié, 69008 Lyon. Remerciements La famille Et les amis de Gabrielle BECKER-PALLOT, trop tôt disparue, remercient toutes les personnes qui leur ont témoigné leur soutien dans ces moments douloureux. Communication diverse L’Institut du chiffre et du droit organise un week-end patrimonial à Paris, le vendredi 11 et samedi 12 novembre 2011. Douze heures de formation sur les thèmes entreprise libérale et gestion de patrimoine familial. « Aucun principe n’oblige un contribuable à payer le maximum possible d’impôts et de cotisations sociales » professeur Maurice Cozian, sous la présidence du docteur Jean-Jacques Saragoussi, avec des conférenciers et animateurs prestigieux : Claude Abrial, Géraud Chambeiron, Philippe Dietrich, Rémi Dumas, Henri Hovasse, Philippe Rebattet, Philippe Reigne, Thierry Revet. renseignements et inscriptions : Mme Jocelyne Deperrier, Tél. : 06 18 99 14 35 Fax. : 01 47 01 12 87 courriel : [email protected] Faculté de consulter gratuitement : http://www.buzdig.com/icd http://buzdig.com/icd/gpm Assemblée générale Le centre international de recherche et de développement de l’haptonomie réunira le 6 novembre 2011, à partir de 9 h 30, son assemblée générale dans ses locaux, 9 bis, villa du Bel Air, Paris 12e. 30 météo & jeux < -10° -5 à 0° -10 à -5° 0 à 5° 5 à 10° 10 à 15° 35 km/h 14 16 20 km/h PARIS Brest DStrasbourg Metz 14 17 Nantes 11 18 10 18 Clermont-Ferrand Limoges Odessa 12 22 15 24 Montpellier Nice Marseille 16 31 11 27 16 26 17 29 13 25 Lever 18h52 Coucher 08h32 Aujourd’hui Jeudi La situation changera peu : les hautes 14 17 pressions du proche Atlantique ne nous protègeront pas de l'humidité en provenance de la Manche. Ainsi, le 12 20 ciel s'annonce très nuageux sur une grande moitié Nord, avec même quelques bruines éparses ici et là de la Bretagne à l'Alsace. Le soleil fera en 13 21 revanche de plus amples apparitions sur la moitié Sud avec des températures encore très estivales. Jours suivants Vendredi Samedi Ajaccio 55 km/h Lever 08h05 Coucher 19h07 Saint Wilfried Coeff. de marée 83/84 Anticyclone D Beyrouth Rabat Tripoli Tripoli Dépression Front chaud Front froid Occlusion Thalweg En Europe Températures à l’aube 1 22 l’après-midi Tunis Tunis Jérusalem Le Caire “Jova” ce puissant ouragan va toucher la côte ouest du Mexique Perpignan 18 29 Ankara Athènes Alger A Toulouse Istanbul 1020 Séville Bucarest Sofia Rome Barcelone Barcelone Grenoble Biarritz Budapest Zagreb Belgrade Madrid 11 26 Moscou Kiev Berne Lisbonne Lisbonne Bordeaux 20 km/h Riga Copenhague 1010 Milan 4 19 13 20 St-Pétersbourg D 0 Munich Vienne A 1025 Chamonix 10 Lyon10 10 22 10 20 1005 Helsinki Bruxelles Paris 11 18 Dijon Poitiers 20 km/h Londres 1000 Besançon 15 18 L’espace d’un instant 995 10 0 12 17 13 19 12 15 10 18 12 19 12 23 14 24 Amsterdam Athènes Barcelone Belgrade Berlin Berne Bruxelles Bucarest Budapest Copenhague Dublin Edimbourg Helsinki Istanbul Kiev La Valette Lisbonne Ljubljana Londres Luxembourg Madrid Moscou Nicosie Oslo Prague Reykjavik aversesmodérées 13 largementdégagé 12 largementdégagé 20 souventdégagé 11 largementdégagé 9 cielvoilé 10 pluiemodérée 14 souventdégagé 8 éclaircies 12 largementdégagé 10 averseslocales 14 8 éclaircies largementdégagé 4 souventdégagé 13 11 éclaircies 19 beautemps 19 beautemps 6 souventdégagé 14 averseslocales 12 faiblepluie 15 beautemps aversesmodérées 6 21 beautemps 4 beautemps 12 pluiemodérée aversessporadiques 5 14 22 27 23 14 18 16 19 19 13 17 12 10 18 15 23 31 22 19 14 30 10 25 13 14 9 Riga Rome Sofia Stockholm Tallin Tirana Varsovie Vienne Vilnius Zagreb 6 16 7 3 5 12 10 14 6 7 11 25 20 11 9 23 11 17 10 22 18 16 26 25 20 12 30 25 29 25 18 24 20 13 10 16 29 24 32 27 27 17 31 31 36 28 20 32 28 20 19 24 averseslocales largementdégagé éclaircies largementdégagé averseslocales largementdégagé averseslocales aversessporadiques averseslocales souventdégagé Dans le monde Alger beautemps Amman largementdégagé Bangkok risqueorageux Beyrouth risqueorageux Brasilia risqueorageux Buenos Aires trèsnuageux Dakar largementdégagé Djakarta averseslocales Dubai beautemps Hongkong souventdégagé Jérusalem risqueorageux Kinshasa risqueorageux Le Caire beautemps Mexico éclaircies Montréal éclaircies Nairobi averseslocales New Delhi New York Pékin Pretoria Rabat Rio de Janeiro Séoul Singapour Sydney Téhéran Tokyo Tunis Washington Wellington largementdégagé pluiemodérée averseslocales largementdégagé beautemps souventdégagé souventdégagé risqueorageux souventdégagé beautemps souventdégagé largementdégagé aversesmodérées éclaircies 24 35 16 19 12 23 15 26 13 26 21 27 8 19 25 31 12 18 17 24 17 22 21 27 21 22 13 16 Cayenne Fort-de-Fr. Nouméa Papeete Pte-à-Pitre St-Denis risqueorageux risqueorageux averseslocales aversesmodérées risqueorageux averseslocales 24 28 21 26 25 22 Outremer 32 30 24 27 30 24 Météorologue en direct au 0899 700 703 1,34 € l’appel + 0,34 € la minute 7 jours/7 de 6h30-18h Dimanche Nord-Ouest 9 19 5 18 4 19 Ile-de-France 8 17 6 18 4 19 Nord-Est 4 15 4 16 1 18 Sud-Ouest 9 23 10 25 8 24 Sud-Est 12 25 10 23 9 23 Le 21 juillet 2011, la navette Atlantis se posait sur la piste américaine du Centre spatial Kennedy, après un ravitaillement de l’ISS. Ce 33e vol était l’ultime de la navette spatiale, après l’arrêt du programme Space Shuttle (tinyurl.com/4393vy4). « La fin d’une ère » que le photographe américain Neil Dacosta a interprétée d’une façon bien sombre. Le ciel lui est-il tombé sur la tête ? Si Atlantis est mise à la retraite, il n’en est rien pour les astronautes américains, qui feront dorénavant la navette à bord des vaisseaux russes Soyouz. Mais, pour le photographe, ce renoncement est un deuil et l’horizon des astronautes si maussade que la seule issue pour eux est d’en passer par le suicide. Funeste destinée qu’il a mise en scène et que son viseur a immortalisée (tinyurl.com/3rq8owl) : engoncé dans son scaphandre spatial dont il ne s’est pas résolu à se défaire, un astronaute parcourt le New York Times qui consacre sa « une » à son dernier envol. Sur le mur de la pièce où il est assis, des clichés d’un âge d’or révolu. Puis tout bascule, des « mises à mort » se succèdent : notre homme, au moral plombé, est alité après une absorption de somnifères, agenouillé, casque dans le four de la gazinière, électrocuté dans son bain à l’aide d’un grille-pain, enchaîné à un bloc de ciment prêt à faire le grand saut dans une rivière… Si Dacosta ne manque pas d’air, je commence à en manquer. La dérision a des limites et là « Maurice, tu pousses le bouchon un peu trop loin » ! Vision plus optimiste – et de loin – celle du collectif de photographes Hunter Freeman (tinyurl.com/3fk8uwr). Même astronaute, toujours affublé de sa combinaison spatiale, mais, droit dans ses bottes et déterminé à garder les pieds sur terre et la vie sauve. Il est photographié dans une station-service à faire le plein d’essence de son véhicule immatriculé « Shutlmn » (pour « Shuttle Moon »), sinon dans les rayons foisonnants d’un supermarché à faire des emplettes. Des scènes incongrues dans un tel accoutrement mais jovialement terre à terre. p Courriels Présidentielle Une permanence institutionnelle Depuis l’élection du président de la République au suffrage universel, on a tendance à donner une importance primordiale au rapport direct entre le président et le « peuple » français, ce que confirme parfaitement le candidat aux primaires du PS François Hollande, qui rappelle très souvent ce lien direct à établir. Cette position est une dérive totale par rapport à ce que devrait être une démocratie. Malheureusement, cela ne semble pas devoir changer avec l’arrivée éventuelle au pouvoir d’un candidat « de gauche », car chaque nouveau président, de droite ou de gauche, entend bien continuer à profiter de la concentration des pouvoirs dans ses seules mains et tout diriger sans contrôle démocratique, même de son propre parti d’origine. On notera, par ailleurs, l’absence de débat lors de la primaire sur le changement indispensable des institutions de la Ve République pour une VIe qui devrait être plus démocratique, selon les promesses électorales habituelles en la matière… Marcel Ramin, Paris Les soirées télé Les jeux Mots croisés n˚11-243 Sudoku n˚11-243 Solution du n˚11-242 Mardi 11 octobre TF 1 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 1 12 8 I 9 II III 5 IV 6 V VI VII VIII IX X Horizontalement I. Pas très douée, même si elle noircit beaucoup de papier. II. Pour pousser bien au fond de la bouche. Point de départ. III. Accord au sud. Arturo sur scène. Mît au point. IV. Coupe du monde. Ne peut pas venir à manquer. V. Suit le vu. Passe et repasse. VI. Irisé et laiteux. Met en opposition dans le texte. VII. Petite nappe en campagne. Fait monter la violence dans la fosse. VIII. Envahissent nos assiettes. Donnas une appréciation. IX. Fournisseur à éviter. Sa gomme fait le ménage. X. L’art de remettre la charpente en bon état. Solution du n° 11 - 242 Horizontalement Mercredi 12 octobre 2011 C’est tout Net! Marlène Duretz > 35° Minsk 101 5 Amsterdam Berlin Varsovie Prague Dublin 13 16 Orléans 100 5 Edimbourg 1020 13 15 Rennes 15 18 Oslo Stockholm 5 1 10 13 17 14 17 13 16 30 à 35° 990 A D Châlonsen-champagne 14 17 15 17 www.meteonews.fr 14 17 Caen 25 à 30° D Reykjavik Amiens Rouen 20 à 25° 12.10.2011 12h TU Lille Cherbourg 15 à 20° En Europe Mercredi 12 octobre Grisailles au Nord, estival au Sud 13 16 0123 écrans I. Coordinateur. II. Ecroulement. III. Na. Mélopée. IV. Draa. Ne. RMI. V. Riviez. Ragot. VI. Inondé. Egide. VII. Lacé. La. Rées. VIII. Associé. Ss. IX. Ost. Oté. Gîte. X. Nièpce. Fêlés. Verticalement 1. Ne fera jamais dans la finesse. 2. Nouveaux coups de ciseaux. 3. Droit et vert au cimetière. Equipât le bâtiment. 4. Exploration dans les profondeurs. Article. 5. Laisse passer. Fait du neuf. 6. Bicolore en plein centre. Enseignent en remontant. 7. Mieux vaut ne pas le perdre. Forme d’avoir. 8. Rejetées. Noble indien. 9. N’a plus aucune valeur au travail. Informas. 10. Entre les mains de l’adroit gaucho. Bouts de lit. 11. Perdais les eaux. Paresse sous les tropiques. 12. Divisé à plusieurs reprises. Philippe Dupuis Verticalement 1. Cendrillon. 2. Ocarina. Si. 3. Or. Avocate. 4. Romaines. 5. Due. Ed. Soc. 6. Ill. Zélote. 7. Néon. Ace. 8. Ampère. 9. Tee. Agrégé. 10. Energie. Il. 11. Ut. Modeste. 12. Vitesses. 4 6 7 5 2 3 5 1 4 9 8 6 7 2 6 2 8 3 5 7 4 1 9 7 4 9 2 1 6 3 8 5 2 6 7 8 3 4 5 9 1 5 1 3 7 2 9 8 6 4 9 8 4 1 6 5 2 3 7 1 7 2 6 4 3 9 5 8 4 3 5 9 8 1 7 2 6 8 9 6 5 7 2 1 4 3 Facile 21.00 Football. Euro 2012 (qualifications, groupe D) : France - Bosnie-Herzégovine. En direct du Stade de France, à La Plaine-Saint-Denis. 23.00 Appels d’urgence. Courses-poursuites, accidents : missions à haut risque pour motards d’élite (95 min). 20.35 Complément d’enquête. Loto 20.35 Marie-Octobre. 3, 15, 16, 45, 47 ; numéro chance : 7. Dix ans de « Complement d’enquête » : ces enquêtes qui ont changé la France. 22.40 Réunion de famille. Magazine. 0.45 Journal, Météo. 1.05 Pépé le Moko ppp Film Julien Duvivier. Avec Jean Gabin, Mireille Balin, Gabriel Gabrio (France, 1937, N., 90 min). Joker : 4 835 749. Les résultats du Loto sont publiés dans nos éditions datées dimanche-lundi, mardi, mercredi et vendredi. Tous les jours Mots croisés et sudoku. Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13 Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ; télécopieur : 01-57-28-21-21 Courrier des lecteurs : par télécopie : 01-57-28-21-74 ; Par courrier électronique : [email protected] Médiateur : [email protected] Abonnements : par téléphone : de France 32-89 (0,34¤ TTC/min) ; de l’étranger : (33) 1-76-26-32-89. Sur Internet : www.lemonde.fr/abojournal/ Tarif 1 an : France métropolitaine : 394 ¤ Internet : site d’information: www.lemonde.fr finances : http://finance.lemonde.fr Emploi : www.talents.fr/ Immobilier: http ://immo.lemonde.fr Documentation : http ://archives.lemonde.fr Collection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40 Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60 20.50 Mentalist. Série. Plus rien à perdre (S3, 13/24, inédit) U. Trou noir U. Esprit, es-tu là ? (S2, 3 et 5/23). 23.20 Dexter. Série. Droit devant. Ame sœur (S2, 11 et 12/12, inédit). Avec Michael C. Hall V (110 min). 20.35 Sélection naturelle. Téléfilm. Régis Musset. Avec Frédéric Diefenthal, Sam Karmann, Hélène Degy (Fr., 2011) U. 22.15 Avant-premières. Invités : Michel Hazanavicius, Bérénice Béjo, Bruno Solo, Danièle Delorme, Miossec. 0.05 Journal, Météo. 0.20 Des mots de minuit (120 min). FRANCE 3 FRANCE 3 Téléfilm. Josée Dayan. Avec Nathalie Baye, Xavier Beauvois, Samuel Labarthe (Fr., 2008). 22.25 Soir 3. 22.50 Ce soir (ou jamais !). Présenté par Frédéric Taddeï (120 min). Rapports : 5 bons numéros et numéro chance : pas de gagnant ; 5 bons numéros : 165 868,80 ¤ ; 4 bons numéros : 1 683,80 ¤ ; 3 bons numéros : 12,90 ¤ ; 2 bons numéros : 5,50 ¤. Numéro chance : grilles à 2 ¤ remboursées. TF 1 FRANCE 2 FRANCE 2 toute la 1 5 3 8 7 Complétez grille avec des chiffres allant de 1 à 9. 4 5 2 Chaque chiffre ne doit être utilisé qu’une 1 2 8 3 seule fois par ligne, colonne et par 9 8 2 7 1 par carré de neuf cases. Réalisé par Yan Georget (http://yangeorget.blogspot.com) Résultats du tirage du lundi 10 octobre. Mercredi 12 octobre CANAL + 20.50 Une famille très moderne Film Josh Gordon et Will Speck. Avec Jennifer Aniston, Jason Bateman (Etats-Unis, 2010). 22.30 Simon Werner a disparu... pp Film Fabrice Gobert. Avec Ana Girardot, Jules Pélissier, Laurent Delbecque (2010, 90 min) U. 20.35 Histoire immédiate. La Face cachée de Hiroshima. 22.05 Débat. 22.30 Soir 3. 23.00 L’Ombre d’un doute. Jack l’Eventreur : son vrai visage (70 min). CANAL + 20.50 Soirée Citizen Gay. Harvey Milk ppp Film Gus Van Sant. Avec Sean Penn, Emile Hirsch (EU, 2008) U. 23.00 Outrage. Documentaire (2009, v.o.) U. 0.25 Marga Film Ludi Boeken. Avec Veronica Ferres, Armin Rohde, Lia Hoensbroech (All., 2009, 95 min) U. ARTE ARTE 20.39 Thema - Syrie : permis de tuer. 20.40 Syrie, dans l’enfer de la répression. Documentaire. Sofia Amara (France, 2011). 21.35 Syrie, le crépuscule des Assad. Documentaire. Christophe Ayad et Vincent de Cointet (France, 2011). 22.50 Breaking Bad. Série. Crash. Tensions. Sur le fil (S3, 1 à 3/13). 1.10 Cut up. Variations sur la famille (50 min). M6 20.45 Desperate Housewives. Série. Les Personnes seules. Ceux qui se comportent mal (S7, 12 et 13/23, inédit). 22.30 Les Français, l’Amour et le Sexe. Documentaire (S2, 1 et 2/8 ; S1, 1 et 2/8, 190 min) W. 20.40 Les Mercredis de l’Histoire. Les Combattants de l’ombre. [1 et 2/6]. Les Difficiles Débuts de la Résistance (1939-1941). La Résistance s’organise (1941-1942). 22.25 Le Dessous des cartes. A quoi sert l’intelligence économique ? Magazine. 22.40 Delta pp Film Kornél Mundruczó. Avec Felix Lajko, Orsolya Tóth, Lili Monori (Hongrie, 2008, v.o.). 0.10 La Lucarne - People, I could have been and maybe am. Documentaire (2010, v.o., 55 min). M6 20.45 D & CO, une semaine pour tout changer. Magazine. 1.20 Vanished. Série. La Boîte noire (S1, 6/13, 55 min) U. 0123 0123 Mercredi 12 octobre 2011 Au fait, Steve créait-il des «jobs»? Lettre de Wall Street Sylvain Cypel O ui, il fut un «génie ». «Un prophète laïc», a titré le supplément dominical du Wall Street Journal. Steve Jobs avait « transformé la pomme d’Eve, symbole d’une humanité pécheresse, en une icône pour les vrais croyants en la technologie». A New York, les vitrines Apple sont couvertes de Post-it avec des mots d’amour; devant, les trottoirs regorgent de bougies et de pommes croquées. Peut-on décemment écorner sans risque l’œuvre d’un homme ainsi quasi déifié sans s’attirer les foudres des «croyants» ? Pourtant, quel que fût son sens exceptionnel pour «capter » cette alchimie complexe et mouvante que constitue le lien entre l’innovation technologique et les attentes des consommateurs et proposer ensuite des « produits » adéquats, Jobs symbolisait aussi tout un chemin de l’économie américaine qui, désormais, fait débat. Le jeu de mots est facile, mais Jobs portait-il bien son nom? En vingt ans, le fondateur-phénix d’Apple (limogé puis resurgi pour sauver l’entreprise) a fait d’une «pomme» à la dérive la seconde capitalisation boursière mondiale, grosse comme IBM et Microsoft réunis. Dans le même temps, la firme est devenue l’exemple de ce qui est de plus en plus perçu outre-Atlantique comme le fondement de tous les maux: l’Amérique ne produit plus ! La part des biens qu’elle fabrique par rapport à ceux qu’elle consomme a reculé de deux tiers en cinquante ans. Et le problème n’est pas seulement vrai des sous-vêtements, des chaussures, du mobi- lier d’appartement ou du petit électroménager. Cette évolution touche aussi le cœur de sa puissance: le high-tech. Apple en est l’incarnation. Le 15 décembre 2010, le même Wall Street Journal publiait un article intitulé « Made in China, vraiment ? ». Son auteur, Andrew Batson, y exposait la part prise par divers pays dans la fabrication d’un iPhone, innovation s’il en est. Se fondant sur une étude de l’Asian Development Bank Institute, il montrait que, dans ce produit phare, les usines chinoises travaillant pour Apple, qui ne font qu’assembler ses pièces, ne constituent que 3,6% du coût de sa fabrication. Il en concluait que l’apposition du sigle « Made in » était trompeuse (le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, avait déjà observé que le critère « Made in» pour évaluer les échanges commerciaux est «devenu obsolète »). Mais l’intérêt de l’étude se situait aussi ailleurs. Si l’on se fonde sur la valeur des composants et du travail investis pour fabriquer un iPhone, montrait-elle, le Japon y contribue pour 34%, l’Allemagne 17%, la Corée du Sud 13 %, le «reste du monde » (une douzaine d’autres pays) 36 %, dont les Etats-Unis (Apple inclus) pour… 6 %, à peine plus que l’apport chinois. En réalité, la part d’Apple se résume à la conception et à la commercialisation, les deux fonctions en bout de chaîne qui sont, aujourd’hui, les plus lucratives, mais qui génèrent moins d’emplois «américains» (et, pour la distribution, bien plus précai- res). Bref, même dans l’innovation chère à Barack Obama pour relancer l’emploi, la machine américaine ne fabrique plus. Tyler Cowen, professeur d’économie à l’université George Mason (Virginie), a proposé en début d’année une théorie iconoclaste dans un livre court (100 pages) mais dense, diffusé seulement sur Internet pour 3,99dollars (2,99 euros) et intitulé La Grande Stagnation. Son sous-titre dit les craintes d’un déclin économique qui inquiète le pays, et que les succès d’Apple n’ont pas enrayé : comment l’Amérique a épuisé tous les fruits mûrs de l’histoire moderne, est tombée malade et parviendra à s’en relever. L’ouvrage a suscité Le fondateur d’Apple symbolisait aussi unchemin de l’économie américaine qui, aujourd’hui, fait débat débats et polémiques. Et le critique de The Economist a reflété le sentiment le plus répandu: « Je ne suis pas d’accord avec tout ce qui y est écrit, mais…» Mais il mérite réflexion. L’une des idées maîtresses du livre est que non seulement les Etats-Unis, en devenant une société de services, ont mangé leur pain blanc avec la disparition des grandes industries qui ont fait sa puissance de 1870 à 1970, mais que ce qui fonde sa puissance actuelle – son leadership 31 technologique, sa capacité d’innovation – est en crise. Son élément moteur, la croissance exponentielle du secteur communicationconnexion, détruit beaucoup plus d’emplois qu’il n’en crée chez ceux qui le promeuvent. Jamais les gens n’ont été autant informés ni n’ont écouté autant de musique, pourtant, les producteurs d’informations et de musique y sont industriellement en perdition. Selon TylerCowen, cette révolution est «un mythe ». Elle améliore l’existant, mais ne révolutionne rien. «L’électricité, le tout-à-l’égout, l’automobile, la radio, la machine à écrire » générèrent l’éducation de masse et d’innombrables emplois directs et induits dans les nations qui en furent les initiatrices. «Prenez l’omniprésent iPod, lance-t-il, il a engendré moins de 14000 emplois aux Etats-Unis. Tout Google, c’est 20 000 emplois, Twitter, 300 au plus. » Et les « jobs» américains de l’iPod sont surtout dans la distribution. Manière de dire: une blague, comparé à l’impact social qu’offrirent Ford, Bell, General Electric ou encore les grands vaccins et les antibiotiques. Bref, la fausse « révolution» du virtuel et du numérique serait aussi une source d’emplois très virtuelle. Dans une Amérique avide aujourd’hui de retrouver le chemin des « bons emplois», il n’est pas outrageant de constater que c’est de cette économie-là que Steve Jobs fut aussi un génie. p [email protected] C’est tout vu! | Chronique télé par Isabelle Talès Habemus Borgia L es voilà donc, ces Borgia « made in Canal+ » : une histoire européenne racontée à la façon d’une série américaine, avec un casting international et une promotion digne d’un film de cinéma. Des mois qu’on attendait, et on allait voir ce qu’on allait voir, lundi 10 octobre, avec la diffusion des deux premiers épisodes. Pour qui a appris la généalogie des Capétiens grâce aux Rois maudits (Claude Barma, 1972), pour qui a déjà vu des Borgia « made in Antenne 2/SFP » (Alain Dhénaut, 1977), avec un scénario et des dialogues de Françoise Sagan, il est hors de question de se laisser impressionner. Les Borgia sont une famille en or – et de soufre –, il n’y a qu’à se pencher sur leur histoire et celle de leur temps (fin XVe- début XVIe) pour trouver les turpitudes nécessaires à un bon scénario. Et puis, les costumes sont Renaissance, les décors italiens. La série écrite par l’Américain Tom Fontana et réalisée par l’Allemand Oliver Hirschbiegel profite de tout cela, avec de gros moyens : il ne manque pas un rubis à la tiare du pape ; il y a ce qu’il faut d’or, de soie et de pourpre cardinalice ; on n’a pas trop le temps de détailler les fresques murales, mais on ressent presque le froid des sols de marbre… et au milieu coulent le sang, plus quelques autres fluides corporels. Mais c’est presque trop. L’histoire galope de scène en scène sur un rythme ternaire : politique, violence, sexe… et ça recommence. Comme s’il fallait tout montrer dans un grand livre d’images là où les feuilletons des années 1970, avec deux chevaux et toujours le même château au fond du paysa- ge, s’attachaient peut-être davantage à raconter des personnages. Bon, assez de nostalgie ! Car ils sont furieusement modernes, ces Borgia-là. Ils sortiraient un portable, planqué sous leur cape entre la dague et la fiole de poison, qu’on n’en serait pas autrement surpris. Le père, Rodrigo, tire les ficelles d’une papauté vraiment pas irréprochable, avec l’aide de deux de ses fils : Juan, l’hypercondottiere, et César, pas très droit dans son haut-de-chausses, qui pratique l’autoflagellation (au propre, évidemment). La fille, Lucrèce, pas encore pute – ça viendra peut-être – et surtout pas soumise, refuse d’apprendre à broder, se promet de dîner à la même table que son futur mari et peine à trouver sa place dans la famille Dès jeudi 13 octobre Ilssontfurieusement modernes,ces Borgia-là.Ilssortiraient unportablede sous leurcape,qu’onn’en seraitpassurpris illégitime et recomposée de son diable de père. Commissions et rétrocommissions se payent en ducats ; s’ils ont besoin de cash, ils vont voir les Médicis. En politique, les arguments sont plus primaires que citoyens, mais Rodrigo peut aussi jouer les rassembleurs : « Les complots doivent s’arrêter, nous devons agir ensemble », lance-t-il au beau milieu d’un débat de cardinaux… Toute ressemblance ou similitude avec des événements en cours ne serait due qu’à un excès de consommation de journaux télévisés. p A ne pas manquer sur 0123.fr a Live Le débat télévisé Aubry-Hollande Les deux finalistes de la « primaire citoyenne » s’affrontent mercredi soir 12octobre sur France 2. Suivi en direct du débat. Décryptage et analyses. N°1 REQUIEM / TE DEUM 2 CD + 1 livret de 40 pages La musique sacrée a inspiré aux grands compositeurs leurs pages les plus intenses, auxquelles les plus grands interprètes ont toujours voulu se confronter. Le Monde vous convie à ces rencontres historiques, au sommet absolu de l’art et de l’émotion, avec sa nouvelle collection « Le Monde de la musique sacrée ». Autant d’enregistrements rares et mythiques, gravés pour l’éternité. Chaque jeudi, découvrez, en plus du Monde, un album comprenant deux CD entièrement remastérisés et un livret illustré de 40 pages sur chaque œuvre et son interprétation. 1 VERDI REQUIEM - TE DEUM - Dès le 13 octobre 2 BACH PASSION SELON SAINT JEAN - Dès le 20 octobre 3 BEETHOVEN MISSA SOLEMNIS - MESSE EN UT - Dès le 27 octobre 4 BERLIOZ GRANDE MESSE DES MORTS - L’ENFANCE DU CHRIST - Dès le 3 novembre 5 MOZART MESSE EN UT - REQUIEM - Dès le 10 novembre 6 BRAHMS UN REQUIEM ALLEMAND - QUATRE CHANTS SÉRIEUX - Dès le 17 novembre 7 HELMUT WALCHA (orgue) RÉCITAL BACH - Dès le 24 novembre 8 DVORAK REQUIEM - CHANTS BIBLIQUES - Dès le 1er décembre 9 HAENDEL LE MESSIE - Dès le 8 décembre 10 FAURÉ REQUIEM - DURUFLÉ REQUIEM - MOTETS - Dès le 15 décembre p Le Monde daté mardi 11 octobre 2011 : uniquement sur Lemonde.fr 123 PHOTOS - © NILS-UDO a Chat Comment l’Inde regarde le monde Débat, jeudi 13 octobre à 14 h 30, avec Sanjay Subrahmanyam, professeur d’histoire indienne à UCLA (université de Californie à Los Angeles). a Portfolio « Je n’avais pas revu l’Afghanistan… » Quinze ans après son dernier séjour, le photographe Albert Facelly, envoyé par Le Monde en Afghanistan, raconte les changements qui l’ont marqué. VERDI 11 BACH MESSE EN SI - Dès le 22 décembre 12 BRUCKNER TE DEUM - MESSE N° 2 - SYMPHONIE N° 9 - Dès le 29 décembre 13 HAYDN LA CRÉATION - Dès le 5 janvier 14 ALFRED DELLER (contre-ténor) PURCELL - BACH - COUPERIN - Dès le 12 janvier 15 CHANTS SACRÉS BUXTEHUDE - GOUNOD - RAVEL… - Dès le 19 janvier 16 ERNEST BLOCH SERVICE SACRÉ - DARIUS MILHAUD SERVICE SACRÉ - Dès le 26 janvier 17 SCHUBERT MESSES ET AIRS SACRÉS - Dès le 2 février 18 SPIRITUALS MARIAN ANDERSON - PAUL ROBESON… - Dès le 9 février 19 MOTETS FRANÇAIS DU XXe SIÈCLE POULENC - SCHMITT - CAPLET - Dès le 16 février 20 LE SACRÉ À L’OPÉRA PUCCINI - WAGNER - VERDI - GOUNOD… - Dès le 23 février PLUS D’INFORMATIONS www.lemonde.fr/boutique ou 3289 (0,34 TTC/min) Offre de lancement réservée au double CD-livret n° 1 : 5,90 en plus du Monde. Chaque double CD-livret suivant sera vendu au prix de 9,90 en plus du Monde. Offre réservée à la France métropolitaine, sans obligation d’achat du Monde et dans la limite des stocks disponibles. Visuels non contractuels. Crédits photos : Volume N°1 : NILS UDO - ALPINIAS - MARTINIQUE , ANTILLES 1991 - Ilfochrome sur aluminium, 124 x 104 cm, 8 exemplaires – Volume N°2 : NILS-UDO - SANS TITRE GENEVRIER, SORBES, BRANCHES DE NOISETIER, OSIERS.AIX-LA-CHAPELLE, ALLEMAGNE 1999. Fujiflex sur aluminium, 124 x 124 cm, 6 exemplaires. Illustration dos du volume : NILS-UDO - SANS TITRE LIT DE RUISSEAU, FLEURS DE LISERON , ILE DE LA REUNION , OCEAN INDIEN 1990. Ilfochrome sur aluminium,124 x 124 cm 8 exemplaires. Courtesy Galerie Pierre-Alain Challier CHAQUE JEUDI EN PLUS DU MONDE Boursorama, SA au capital de 35 083 246,40 € - RCS Nanterre 351 058 151 - TVA FR 69 351 058 151 - 18, quai du Point du Jour 92100 Boulogne-Billancourt. Désormais, la bourse est accessible à tous : 1,99 € l’ordre jusqu’à 500 € (Forfait Découverte), sans aucuns frais supplémentaires : pas de frais d’entrée, pas de droit de garde, pas d’abonnement, pas de frais d’inactivité. 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