L`an passé, j`étais en classe unique de maternelle où j`ai beau

Transcription

L`an passé, j`étais en classe unique de maternelle où j`ai beau
IUFM DE BOURGOGNE
CONCOURS DE RECRUTEMENT: professeur des écoles
LES EFFETS D'UN ENTRAÎNEMENT
REGULIER EN CONSCIENCE PHONOLOGIQUE
DANS UNE CLASSE DE GRANDE SECTION
VERGEY MONTUELLE, Lucie
Directrice de mémoire : Mme Nadège Doignon
ANNEE 2005
N° de dossier: 04STA00283
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Table des matières
INTRODUCTION ......................................................................................................................1
I) PARTIE THEORIQUE : LA CONSCIENCE PHONOLOGIQUE :................................ 3
I.1) Définition :.................................................................................................................. 3
A) la syllabe.................................................................................................................. 3
B) L'attaque et la rime.................................................................................................. 3
C) Le phonème..............................................................................................................4
D)Comment les enfants apprennent à lire.....................................................................5
I.2) Développement de la conscience phonologique chez l’enfant....................................6
A) Développement du langage oral...............................................................................6
B) Développement de la conscience phonologique par rapport à l'apprentissage de la
lecture ...........................................................................................................................6
a. La syllabe...........................................................................................................7
b. Les phonèmes.................................................................................................... 8
c. Existe-t-il un lien entre la conscience phonologique et l'apprentissage de la
lecture ?.................................................................................................................... 9
I.3) Ce que disent les programmes officiels 2002 :........................................................ 11
I.4) Projet de l'enseignement des réalités sonores de la langue....................................... 13
II) Méthodologie et situation d'apprentissage en grande section de maternelle ................. 14
II.1) pré-test : point de départ de chaque élève................................................................ 14
II.2) les séances mises en places pour mener cet apprentissage...................................... 17
A) Identification de l'unité phonologique étudiée :.....................................................18
B) Production de mots contenant l'unité phonologique étudiée:.................................20
C) Manipulations des unités phonologiques............................................................... 22
D) Difficultés rencontrées avec les autres groupes..................................................... 24
III) Conséquences de cet apprentissage évaluées grâce à un post-test................................. 25
III.1) Réalisation du post- test après deux semaines et demies d'entraînement............... 25
III.2) Résultat du post test................................................................................................26
A)Présentation globale des résultats........................................................................... 27
B) Présentation des résultats par groupe..................................................................... 27
CONCLUSION......................................................................................................................... 30
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INTRODUCTION
L’an passé, j’enseignais en classe unique de maternelle. J’ai beaucoup
travaillé avec les jeux de langue et plus particulièrement les jeux sur les sons, les
comptines, les rimes…Les jeux de sons m’ont particulièrement posé problème. Il
paraît simple de prime abord d’étudier les sons en grande section. Ce n’est pourtant
pas le cas. En effet certains élèves rencontrent de véritables difficultés. Ils
n’entendent pas les sons.
Lors de mon stage en pratique accompagnée, j'ai rencontré des difficultés
analogues. L'enseignante de CP qui m'accueillait a constaté qu'il était indispensable
aux élèves de CP de développer une conscience phonologique. Elle a remarqué que
les élèves qui ne maîtrisaient pas les réalités sonores de la langue avaient des
difficultés pour apprendre à lire. Dans cette optique, elle a décidé de travailler
régulièrement avec ses élèves sur la conscience phonologique, en début d'année.
Afin de garder sa méthode de travail et de mettre en place mes premières situations
d'apprentissage, j'ai décidé d'organiser différents jeux qui avaient pour objectif de la
développer. Les élèves devaient identifier un phonème précis qui était le phonème
[Ə]. Lors de ces situations d'apprentissage, j'ai rencontré deux types de problèmes.
Les premiers étaient liés à l'organisation des séances (consigne, ritualisation de
l'ardoise...) et les seconds à la difficulté des élèves à percevoir les sons. Cette
dernière difficulté était analogue à celle rencontrée lors de mon année en grande
section de maternelle.
Il est pourtant nécessaire de faire acquérir aux élèves une conscience
phonologique. Les programmes officiels de 2002 le stipulent clairement « les élèves
doivent prendre conscience des réalités sonores de la langue » .
Cet apprentissage aide l’élève à comprendre les relations entre les
phonèmes et les graphèmes, leur permettant par la suite de comprendre le principe
alphabétique. Ils peuvent ainsi entrer dans le monde de la lecture et de l’écriture. La
maîtrise du principe alphabétique permet aux élèves de décoder les mots qu'ils ne
connaissent pas. Pour cela, les apprentis lecteurs se servent dans un premier temps
de la médiation phonologique qui permet d'établir des correspondances entre les
phonèmes et les graphèmes. Ils décomposent les mots qu'ils souhaitent lire en
unités graphiques et les codent en unités phonologiques.
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Cependant l’apprentissage de la lecture ne repose pas uniquement sur l’habileté des
élèves à entendre les sons afin de décoder des mots. L’enseignement de la lecture
est beaucoup plus complexe, il repose aussi sur l'habileté des élèves à comprendre
ce qu'ils lisent et à travailler des unités plus grandes que le mot telles que la
phrase. Dans le cadre de ce mémoire, nous nous intéresserons uniquement à la
conscience phonologique.
Nous pouvons alors nous demander comment faire acquérir cette
conscience
phonologique aux élèves et comment l'améliorer. Pour cela, nous
verrons dans un premier temps ce qu'est la conscience phonologique et comment
elle se développe. Puis dans un second temps la méthodologie mise en place en
grande section de maternelle. Et enfin quel résultat, nous avons obtenu après cette
situation d'apprentissage.
I) PARTIE THEORIQUE : LA CONSCIENCE PHONOLOGIQUE :
I.1) Définition :
La phonologie est la science qui explique les systèmes de sons des langues
et leurs règles de fonctionnement. Elle ne définit pas les mots sémantiquement mais
elle permet de les différencier les uns par rapport aux autres.
La conscience phonologique est l’habileté à entendre, identifier et manipuler les
sons isolés de la langue parlée. Elle est la conscience de toute unité linguistique
telle que les syllabes, les rimes, et les
phonèmes. Elle permet des opérations
mentales sur le langage parlé comme par exemple, la segmentation des mots en
syllabes, la suppression du premier phonème d’une syllabe…
Il existe différentes unités phonologiques que les enfants doivent prendre
conscience.
A) la syllabe
La syllabe est une unité d’articulation. Chaque mouvement articulatoire
permet la production d’une syllabe. Ainsi le mot bateau est composé de deux
syllabes ([ba] [to]). On ne considère pas les [ə] muet à la fin d’un mot comme une
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nouvelle syllabe. La syllabe peut elle-même être divisée en deux unités plus petites :
l’attaque et la rime.
B) L'attaque et la rime
L’attaque est la consonne ou le groupe de consonnes initiale de la syllabe.
La rime quant à elle correspond à l’ensemble des phonèmes qui succède à l’attaque.
Elle se définit par le noyau vocalique et éventuellement la ou les consonnes qui
suivent ( dans « ba », [a] est la rime et [b] est l'attaque). Ces deux unités peuvent
aussi être divisées en unité plus petite, appelée phonèmes.
C) Le phonème
Le phonème est la plus petite unité phonologique existante. Elle permet de
différencier un mot. Il existe deux catégories de phonèmes : les voyelles et les
consonnes produites par des obstacles que l’air rencontre dans la bouche, le nez et
la trachée.
Il existe dans la langue française trente huit sons répartis en seize
voyelles (a, e, i, u, ə...) et dix huit consonnes (b, p, m....).
Les voyelles sont elles-mêmes divisées en trois catégories : les buccales
produites par le passage de l’air dans la bouche, les nasales émises par le passage
de l’air dans le nez et les semi-voyelles ( y, oi, oin, il...) produites grâce à la
projection des lèvres vers l’avant et à la production de souffle. L’air rencontre des
obstacles aux niveaux des cordes vocales seulement. Les voyelles sont plus faciles
à entendre car leurs sons musicaux sont très discernables.
Les consonnes sont plus difficilement identifiables car elles représentent un
bruit supposant toujours une voyelle pour la rendre perceptible. Elles sont ellesmêmes divisées en trois catégories :
-
Les consonnes occlusives nasales [m, n, l, ŋ] sont produites par le voile du
palais qui une fois abaissé permet à l’air expiré de vibrer dans les fosses
nasales
-
Les consonnes occlusives orales : Il existe deux consonnes labiales [p,b]
produites par le mouvement des lèvres, deux consonnes dentales [t,d]
produites par les mouvements de la langue contre les dents et trois gutturales
[k,g,ks] produites par l’articulation du dos de la langue vers le palais
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Les consonnes constrictives [f,v,s,r, z,∫ ] sont émises par les lèvres qui se
-
resserrent en se projetant vers l’avant.
Exemple de décomposition du mot tard:
l
T
attaque
l
T
consonne
TARD
1 syllabe
m
ARD
rime
l
m
A
RD
4 phonèmes
voyelle
consonnes
Cette conscience phonologique se développe progressivement chez l'enfant.
D)Comment les enfants apprennent à lire
Selon U. Frith (1985), l'enfant apprend à lire en trois étapes distinctes. Ainsi l'élèves
doit développer d'abord le stade logographique, puis le stade alphabétique et enfin le stade
orthographique.
Pendant le stade logographique, l'enfant reconnaît certains mots globalement. Il
repère certains indices, certaines particularités du mot « lu » . Ces indices peuvent être de
plusieurs ordres : logo publicitaire, couleur, forme des lettres... Cette « lecture » permet la
reconnaissance d'un nombre limité de mots et avec de grandes incertitudes. En effet cette
lecture s'apparente davantage à de la devinette. Dans ce stade, l' élève peut reconnaître un mot
sans connaître les lettres qui le composent, il ne peut jamais lire seul un mot nouveau.
Le stade alphabétique, permet à l'élève d'associer progressivement les graphèmes et
les phonèmes. Dans un premier temps, l'élève découvre que les mots parlés sont composés de
différentes unités langagières telles que la syllabe. Il découvre ensuite que chaque son
correspond à une lettre. Il codera alors de manière aléatoire l'oral par des lettres écrites. Plus
tard, il établira les bonnes correspondances entre les phonèmes et les graphèmes. Cette phase
exige que l'élève connaisse les lettres de l'alphabet et qu'il ait acquis un minimum de
conscience phonologique. A ce stade , les élèves peuvent lire tous les mots
orthographiquement réguliers. Au cours de mon mémoire, je m'intéresserai uniquement à ce
stade.
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Le dernier stade d'acquisition de la lecture est le stade orthographique. Il s'agit ici
d'une lecture experte, c'est l'étape supérieur de la reconnaissance des mots. L'élève utilise alors
d'autres stratégies de lecture et construit progressivement un répertoire lexical de mots. Ce
stade permet à l'élève d'accéder directement au sens de ce qu'il lit sans passer par la médiation
phonologique.
I.2) Développement de la conscience phonologique chez
l’enfant
A) Développement du langage oral
Avant d'acquérir une conscience phonologique, l'enfant doit développer son
propre langage. Très tôt, après leur naissance, les bébés produisent des sons
caractéristiques de leur langue. Ces sons sont produits en nombre varié mais leur
assemblage est limité par la capacité croissante à produire les sons entendus.
Les bébés communiquent d'abord par leurs pleurs qui indiquent ce qu'ils
souhaitent. Cependant, ces pleurs sont davantage compris à partir du contexte dans
lequel ils sont émis qu'à partir d'un son précis. A partir de un ou deux mois, ils
produisent des gazouillis, qui sont des sons autres que des cris. Ces gazouillis
ressemblent au son [uh]. Vers trois mois, leurs sons augmentent véritablement. Vers
six mois, ils commencent à combiner quelques consonnes et voyelles leur
permettant de produire des syllabes. Ces syllabes sont souvent répétées dans des
séquences telle que [bababa]. Il s'agit de babillage, ces intonations ressemblent de
plus en plus à celles de la langue maternelle. Les premières productions verbales du
bébé se situent dans la continuité du développement du babillage. Les sons
caractéristiques du babillage des bébés et leurs premiers mots tendent à être
similaires. Les sons [b], [p], [n], [d], [m] sont les plus fréquents. Pour cette raison, les
mots utilisant ces sons ( comme maman, papa…) sont parmi les premiers mots que
les enfants apprennent. Les langues comme le français se sont accommodées de
ces limites langagières en choisissant des mots faciles à prononcer pour désigner
les objets que les enfants utilisent le plus souvent (comme dada pour cheval).
A la fin de la première année, les bébés produisent de plus en plus de sons
propres à leur langue maternelle au détriment des sons non caractéristiques de
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celle-ci. Autour de leur première année, la majorité des enfants produisent leurs
premiers mots.
B) Développement de la conscience phonologique par
rapport à l'apprentissage de la lecture
Après avoir parlé une langue plusieurs années, la plupart des enfants n’ont
pas conscience qu’ils combinent plusieurs sons distincts pour parler. Il semble
difficile pour les jeunes enfants de détecter les syllabes, les phonèmes… Des
chercheurs comme Liberman (1974) , Fisher (1974), Sprenger- Charolles (1989)…
ont démontré cette difficulté chez des enfants de quatre à sept ans.
a. La syllabe
Les chercheurs se sont d’abord intéressés à l’identification syllabique car la
syllabe structure le langage oral. Elle est la véritable unité de segmentation de la
parole, notre langage oral français est construit de syllabes. Il s'agit de l'unité
langagière la plus large et la plus facile à repérer. Pour cette raison, c'est l’unité
privilégiée utilisée par l’enfant pour développer sa conscience phonologique.
Ainsi Gombert (1990), dans son ouvrage, indique que les chercheurs se sont
davantage intéressés à l’identification consciente par l’enfant des syllabes finales d'
un mot qu' à l'identification des syllabes situées dans une autre position. Pour
réaliser cette tâche, les enfants doivent répéter des mots comme chapeau et
mouton pour savoir lequel se termine comme drapeau. Cependant ces études ne
sont pas des preuves que les enfants possèdent une conscience phonologique. En
effet
les
chercheurs
ont
proposé
aux
enfants
des
mots
très
proches
phonologiquement (râteau, bateau; poupée, coupée, soupé...), les enfants pouvaient
alors reconnaître le mot cible par analogie globale et non en analysant la dernière
syllabe. La seule expérience qui peut se rapporter à une discrimination
phonologique de la syllabe est celle de Liberman (1973). Il demande à des enfants
de 4 à 7 ans de répéter des mots à plusieurs syllabes puis pour chacun de ces
mots de taper sur la table autant de fois qu’il y a de syllabes dans le mot. Selon son
étude, la réussite à ce type d’exercices s'améliore en fonction de l'âge des enfants :
–
les enfants de 4 à 5 ans échouent,
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–
les enfants de 5 à 6 ans réussissent à 17 %
–
les enfants de 7 ans obtiennent 90 % de réussites.
Dans une tâche de reconstitution syllabique c'est à dire où les élèves
doivent supprimer une syllabe et reconstituer un nouveau mot avec les syllabes
restantes ( exemple : dromadaire devient drodaire si on supprime la syllabe
médiane), les résultats des enfants restent très médiocres:
- Les enfants de 4-5 ans réussissent uniquement si on détache les syllabes les
unes des autres.
- Pour les 5-6 ans les résultats dépendent de la longueur des mots.
Selon ces résultats, il apparaît que l’enfant de moins de 5 ans est dans
l’incapacité de développer une conscience syllabique. Pourtant Slobin (1978) a fait
des études sur sa propre fille. Celle-ci était capable à trois ans de segmenter un mot
qu’elle avait inventé en syllabe. De même Gombert (1990) démontre que les
capacités de reconnaissance syllabique s’améliorent si on les travaille. Ainsi, on
accepte généralement que la conscience phonologique s'acquiert autour de 4-5
ans.
b. Les phonèmes
Les difficultés semblent augmenter davantage avec l’identification des
phonèmes. Les arguments qui expliquent ces difficultés sont les suivants. Un
phonème est transcrit à l’écrit par un graphème composé d’une ou plusieurs lettres.
Le même phonème peut être transcrit par plusieurs graphèmes composés de
différentes manières et il ne peut pas être prononcé isolément. Le français comporte
trente huit phonèmes alors que notre système alphabétique est composé de vingt
six lettres qui permettent de transcrire quatre vingt treize graphèmes.
Liberman (1973) a mené une étude analogue à celle des syllabes pour les
phonèmes. Il donne des tâches identiques pour discriminer le phonème. Il demande
à des enfants de 4 à 7 ans de répéter des mots puis pour chacun de ces mots de
taper sur la table autant de fois qu’il y a de phonèmes dans le mot. Les résultats
sont:
–
–
–
nuls chez les enfants de moins de cinq ans,
de 17 % de bonnes réponses à 6 ans
de 70% de bonnes réponses à 7 ans.
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Selon ces résultats, il semblerait que la conscience phonologique ne se
développe qu’à partir de six ans. On pourrait alors supposer que celle-ci ne se
développe qu'à partir de l’apprentissage de la lecture.
c. Existe-t-il un lien entre la conscience phonologique et
l'apprentissage de la lecture ?
Cependant tous les chercheurs ne sont pas d’accord sur les causes du
développement phonologique. Certains pensent que la conscience phonologique se
développe avant l’apprentissage de la lecture, alors que d’autres pensent qu’elle se
développe en même temps.
Certains chercheurs comme Alegria et Morais (1979) suggèrent que la
capacité phonologique pourrait être une simple conséquence de l’apprentissage de
la lecture. La lecture de mots nouveaux ou difficiles est possible grâce au décodage
phonologique. Les lecteurs établissent alors une correspondance entre les
graphèmes et les phonèmes. La répétition de cette tâche par l'apprenti lecteur
entraînerait ce dernier à reconnaître les phonèmes de manière automatique. Alegria
et Morais (1979) supposent alors que la capacité à décomposer la syllabe est une
condition nécessaire à l’apprentissage de la lecture, alors que la conscience des
phonèmes en est une conséquence. L’élève, qui apprend à faire la correspondance
entre la lettre et le phonème, apprend d’une part à différencier la lettre étudiée des
autres lettres de l’alphabet et d’autre part à l’isoler dans les syllabes qui composent
les mots qu’il doit lire. Il déchiffre alors phonétiquement les mots qu’il lit. Les élèves
qui ont appris à lire avec une méthode à entrée syllabique obtiennent de bon
résultats dans les exercices phonologiques de suppression de consonnes (exercice
où l'on demande aux élèves de supprimer une consonne et de recomposer le mot
sans cette consonne). Cependant l'argument suivant démontre que l'apprentissage
de la lecture ne permet pas à tous les élèves de développer une conscience
phonologique. En effet des élèves de 10 ans, mauvais lecteurs, obtiennent de moins
bons résultats que des élèves de 6-7 ans dans les tests de phonologie. Pourtant, on
ne peut pas dire que les enfants de six sept ans ont une grande expérience en
lecture et que c’est pour cette raison qu’ils ont de meilleurs résultats.
Share, Jorm, MacLean et Matthews (1984), quant à eux, pensent qu’il est
indispensable de faire acquérir une conscience phonologique aux élèves dès la
maternelle. Dans leurs différents travaux, ils montrent que la capacité phonologique,
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et plus précisément la capacité à segmenter les mots en syllabes et en phonèmes,
est un bon indicateur sur les performances à venir des élèves lors de l’apprentissage
de la lecture. Selon eux, cette capacité n’est pas nécessaire à l’apprentissage de la
lecture mais est un facteur facilitant. La conscience phonologique est un pré-requis à
la lecture. Elle est aussi un bon indicateur pour le futur apprenti lecteur. Elle se
développe donc avant l'apprentissage de la lecture. Content (1984) montre aussi
dans son article sur le développement de l’habileté d’analyse phonémique de la
parole, que cette dernière joue un rôle non négligeable dans l’apprentissage de la
lecture. Il montre que cette habileté ne se manifeste que très rarement avant six ans
(âge où celle-ci est indispensable), mais qu’elle pourrait exister avant car un enfant
de moins de six ans a tous les éléments pour la développer. Il est ainsi
indispensable de la travailler.
Gombert (1990) montre que les résultats en segmentation phonémique
peuvent
être
améliorés
de
façon
importante
après
une
courte
session
d’apprentissage. Pour montrer cela, il étudie deux groupes d’enfants âgés
respectivement de 4 à 5 ans et de 5 à 6 ans. Il leur demande de supprimer la
consonne initiale de mots inventés. Le pourcentage de réussite est très faible. Il
divise ensuite la totalité des enfants en deux groupes : l’un recevra un apprentissage
explicite sur la manipulation phonologique et l’autre non. A la fin de la période
d’apprentissage, les enfants réalisent un second test. Les résultats chez les enfants
de quatre ans (qu’ils aient ou non suivi un apprentissage) restent inchangés alors
qu’ils augmentent considérablement chez les enfants de cinq et six ans qui ont reçu
un apprentissage. Les enfants sont donc capables dès cinq ans de développer leur
conscience phonologique s’ils reçoivent un apprentissage explicite. Avant cinq ans,
les premières conduites de segmentations apparaissent, mais il s’agit davantage
d’une manipulation liée à l’intuition que d'une véritable réflexion sur les composants
du langage oral. On a ainsi démontré que les enfants qui obtenaient de bons
résultats aux tests phonologiques apprenaient mieux et plus rapidement à lire. Fox et
Routh (1975) ont étudié différents groupes d’enfants : des enfants qui obtenaient de
bons résultats et des enfants qui avaient de moins bons résultats aux tests
phonologiques. Quelques années plus tard, le premier groupe d’enfants entre
facilement dans l’apprentissage de la lecture et devient de bon lecteur, alors que le
second rencontre davantage de difficultés.
La conscience phonologique apparaît donc comme un véritable indicateur et
un pré requis indispensable à l’apprentissage de la lecture. Mais celle-ci se
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développe également grâce à l'apprentissage de la lecture. La conscience
phonologique est donc à la fois un pré requis et une conséquence de l'apprentissage
de la lecture . Pour cette raison, il est indispensable de la développer chez l’élève
dès la maternelle, les programmes officiels de 2002 le stipulent clairement.
I.3) Ce que disent les programmes officiels 2002 :
Comme nous l'avons vu ci-dessus, les chercheurs sont majoritairement
d’accord sur le fait que les enfants doivent développer leur conscience
phonologique. Dans cette optique, les auteurs des instructions officielles 2002 ont
consacré un paragraphe à cet apprentissage dans les programmes de la maternelle
intitulé : « prendre conscience des réalités sonores de la langue » et plusieurs
paragraphes dans les programmes de l’élémentaire.
Ainsi il est obligatoire de mettre en place des situations d'apprentissage pour
permettre aux élèves de développer leur conscience phonologique en maternelle.
Les
programmes mettent en évidence les difficultés des élèves à percevoir les
éléments phonémiques de notre langage. Pour apprendre à lire, il est essentiel que
les futurs apprentis lecteurs arrivent à comprendre notre système alphabétique qui
repose sur une correspondance graphème phonème. Pour cette raison,
il est
obligatoire à l’école maternelle d’aider les élèves à développer leur conscience
phonologique. Les programmes recommandent pour cet enseignement une
approche ludique reposant essentiellement sur la poésie, les comptines et les jeux
de langue… Ainsi les enfants pourront découvrir le rythme, la forme et les sonorités
de la langue. Ces apprentissages doivent être courts et fréquents afin de donner aux
élèves un entraînement régulier.
A l’école élémentaire et plus précisément au cycle 2, les instructions
officielles
insistent
sur
le caractère
obligatoire
d’enseigner
la
conscience
phonologique lors de l’apprentissage de la lecture. En effet pour apprendre à lire, les
élèves doivent apprendre à comprendre les textes et apprendre à identifier les mots.
Dans le cadre de ce mémoire, seule l’identification des mots nous intéresse. Les
instructions officielles expliquent que cette identification, dans un premier temps, est
fondée essentiellement sur la compréhension du principe alphabétique qui repose
sur la correspondance entre les graphèmes et les phonèmes. Le principe
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alphabétique met en liaison les mots écrits et les mots oraux. Il requiert trois prérequis indispensables qui sont :
–
la connaissance de la lettre : les élèves doivent identifier la lettre écrite, la
nommer et savoir le son qu'elle produit.
–
le repérage des phonèmes dans les mots prononcés à l'oral
–
la mise en liaison des connaissances sur les lettres et sur les phonèmes.
Par exemple, l'élève doit savoir que le b correspond à la lettre qui s'appelle b et
qu'elle produit le son [b].L’utilisation de cette transcription phonologique vise
simplement à aider l’élève qui souhaite déchiffrer un mot. En effet quand un élève ne
peut pas lire un mot automatiquement, il doit recourir au déchiffrage qui passe par
l’identification des graphèmes et des phonèmes qui leur correspondent. Une fois que
l’élève a reconnu les unités graphiques, il les encode phonétiquement puis les
assemble syllabe par syllabe afin de reconstituer le mot. Ce travail est difficile pour
les élèves c’est pourquoi les instructions officielles expliquent que les élèves doivent
mémoriser les principaux assemblages syllabiques. Les élèves ont déjà acquis un
certain nombre de connaissances sur cette transcription graphème-phonème en
maternelle mais il est indispensable de continuer cet enseignement afin que les
élèves le comprennent dans toute sa complexité.
De plus il est recommandé d’ évaluer chaque élève en conscience
phonologique avant tout apprentissage de la lecture afin de savoir où chaque élève
se situe dans ce domaine. Ensuite les enseignants doivent mettre en place des
situations d’apprentissage en fonction des besoins des élèves. Il est indispensable
que chaque élève ait un bon niveau en conscience phonologique pour apprendre à
lire. Ils doivent reconnaître les unités distinctives composants les mots comme la
syllabe, l’attaque, la rime et le phonème. Ils doivent savoir écrire phonétiquement un
mot nouveau, savoir en analyser les composantes phonétiques…
Dans un premier temps, les législateurs, grâce aux résultats empiriques des
recherches menées, recommandent d’utiliser la syllabe comme élément de
référence tout en mettant en garde les enseignants contre les spécificités régionales.
Ils proposent pour cet enseignement des exercices similaires aux exercices de
Liberman comme frapper les syllabes d’une chanson, ajouter des syllabes, les
inverser…
Dans un second temps, à partir de cinq ans, les législateurs, s'appuyant sur
l'avis des chercheurs, incitent les enseignants à conduire les élèves dans une
réflexion plus soutenue en leur faisant prendre conscience des similitudes qui
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existent entre les syllabes. Il est alors recommandé d’utiliser les rimes des mots en
poésie. Les élèves peuvent ensuite travailler sur l’invention de rimes qui conduit à
créer leur propre poésie, la substitution ou l’introduction de syllabes…
Au fur et à mesure de ces jeux, les enfants se rendront compte que les mots
sont constitués d’unités plus petites que la syllabe : le phonème. Les élèves doivent
aussi apprendre à segmenter les mots en syllabes et en phonèmes. Cette
segmentation s’apprend de façon ludique. Ensuite les enseignants multiplient les
exercices permettant de : «catégoriser les unités sonores, d’élaborer des règles de
tri, de classer les unités sonores». Ces différentes manipulations visent à rendre
l’analyse phonologique automatique chez l’enfant.
Les instructions officielles, comme l'ont démontré les chercheurs, insistent
sur le fait que l’analyse phonologique est un préalable à la lecture mais aussi une
conséquence de l’apprentissage de la lecture. Il n’est donc pas exigible en fin de
grande section de savoir décomposer parfaitement le langage oral en unités
phonémiques.
L’enseignement de la conscience phonologique est donc obligatoire en
maternelle comme en cycle 2. Pour cette raison, plusieurs académies ou écoles (par
exemple l'académie de Caen) ont cherché comment travailler la conscience
phonologique en classe.
I.4) Projet de l'enseignement des réalités sonores de la
langue.
Les chercheurs et les législateurs des instructions officielles s'accordent
pour remarquer qu'il est possible d'entraîner les élèves en conscience phonologique
afin de les faire progresser. Dans cette optique, plusieurs académies ou écoles ont
mis en place de véritables séquences d'apprentissage afin de développer chez
l'élève de véritables capacités en conscience phonologique. Ainsi l'académie de
Caen propose une situation d'apprentissage où les élèves travaillent de manière
régulière en conscience phonologique. Elle propose de partir du niveau des élèves
et de les faire travailler en groupe. Les élèves travaillent alors de manière ludique sur
les différentes unités du langage (la syllabe, la rime et le phonème). Les tâches
proposées sont diverses. Les élèves doivent identifier,
manipuler et
supprimer
différentes unités langagières. De manière régulière, les élèves subissent des
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évaluations pour voir leur progression. La plupart des élèves font de véritables
progrès.
Lors de mon stage en pratique accompagnée, j'ai rencontré de véritables
difficultés dans l'enseignement de la conscience phonologique en CP, difficultés
liées d'une part à l'organisation des séances et d'autre part à la difficulté des élèves
à percevoir les sons. Je vais m' intéresser dans
le cadre de ce mémoire,
uniquement aux problèmes liés à la perception des sons. Beaucoup d'élèves ne les
entendent pas. Cependant les chercheurs et les instructions officielles de 2002 ont
démontré qu'il était possible de faire progresser les élèves en conscience
phonologique. Je me suis alors demandé si un entraînement régulier en conscience
phonologique pouvait véritablement les faire progresser. Pour cette raison, j'ai
décidé de mettre en place dans la classe de grande section où j'étais en stage une
situation d'apprentissage sur les réalités sonores de la langue. Cette dernière était
composée de trois étapes. Dans un premier temps, j'ai demandé aux élèves de
réaliser un pré-test qui évaluerait les compétences de chaque élève sur les
différentes unités langagières tels que la rime, la syllabe et le phonème. Dans un
second temps, les élèves ont reçu un entraînement régulier en conscience
phonologique. Et enfin, ils ont réalisé un post-test pour que je puisse évaluer leurs
compétences en fin d'apprentissage. Les résultats de ce dernier me permettront par
la suite de savoir si les élèves ont ou non progressé en conscience phonologique
après un entraînement régulier.
Méthodologie et situation d'apprentissage en grande
section de maternelle
II)
II.1) pré-test : point de départ de chaque élève
Gombert (1990) explique que l’enseignement réfléchi de la langue débute
avant le début de la scolarité obligatoire. Il explique qu’il est indispensable de
développer
la
conscience
phonologique
des
enfants
avant
de
débuter
l’apprentissage de la lecture. Il insiste tout de même sur l’hétérogénéité qui peut
exister dans ce domaine dans les classes d’écoles maternelles. Pour cette raison,
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j’ai décidé d’essayer de mettre en place, dans la classe de grande section où j’étais
en stage au mois de décembre, un enseignement adapté à chaque élève. Cette
classe était composée de vingt-cinq élèves âgés de quatre à cinq ans.
J’ai mis alors en place un pré-test afin d'évaluer les compétences de chaque
élève en conscience phonologique. Dans ce test, quatre niveaux de langage sont
évalués : la syllabe [po], la rime [ar], le phonème voyelle [a] et le phonème consonne
[s]. Ces unités langagières n'ont pas été choisies de manière aléatoire, j'ai choisi des
unités qu'ils n'avaient pas encore étudiées notamment pour les sons [a] et [s]. Le
son consonne étant difficile à percevoir, j'ai choisi une consonne que l'on pouvait
accentuer en tenant le son [sssss]. Chaque unité phonologique représentait un
exercice. Dans chaque exercice, les élèves devaient trouver dans quel mot on
entendait le son cible. Les quatre exercices étaient analogues. Ils étaient constitués
de quatre images dont trois images où le son cible était présent et une image où il
était absent. Dans les exercices sur les phonèmes, le son cible était une fois en
début de mot, une fois au milieu et une fois à la fin. (le pré test est consultable en
feuille annexe).
Ce test fut passé collectivement le premier jour. Les élèves ont d'abord dit ce
qu'ils voyaient sur la fiche afin que tous aient la même dénomination de l'objet
représenté. Les quatre exercices ont été réalisés les uns après les autres, à chaque
fois je redonnais la consigne. Pour le premier exercice, j'ai donné la consigne
suivante : «Mets une croix sous le dessin si tu entends [po], vous pouvez répéter les
mots tant que vous le souhaitez» La consigne est restée la même pour tous les
exercices, seul le son changeait. A part cette consigne succincte, je ne leur ai donné
aucune autre explication. Je voulais voir quelles stratégies ils utilisaient. Le fait
d’avoir réalisé le test en même temps pour l’ensemble de la classe m’a rendu cette
tâche difficile. Il m’était impossible d’être présente auprès de tous les élèves pour
vérifier leur stratégie. J’ai tout de même pu constater que certains élèves oralisaient
les mots alors que d’autres ne les répétaient pas. Un élève découpait oralement le
mot, il prononçait alors le mot chapeau ainsi [cha] [po]. Cet élève a de manière
générale obtenu de bon résultat.
Les résultats de ce test étaient très disparates. (des exemples de travaux
d’élèves sont consultables en feuilles annexes.)
Page: 16
nombre d'élèves ayant tout juste (25 élèves)
Shéma 1 : résultats du pré-test
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
Syllabe [po]
Rime [ar]
Phonème [a]
Phonème [s]
unités phonologiques
Comme nous pouvons le constater dans le schéma 1, les résultats sont très
disparates. La syllabe et la rime sont des unités majoritairement acquises alors que
les phonèmes ne sont pas acquis à ce stade de l'année. Les résultats de ce test de
conscience phonologique semblent en total accord avec les recherches expliquées
dans la première partie. La majorité des élèves de cinq ans perçoivent les syllabes
mais pas les phonèmes. Seule une minorité d’élèves semble percevoir les
phonèmes voyelle et très peu d'élèves perçoivent les phonèmes consonnes. Au vu
de ces résultats, j'ai décidé de constituer quatre groupes de travail, composés au
maximum de huit
élèves afin d'individualiser au maximum les échanges et de
solliciter les réponses de chacun.
Dans le pré-test, quatre élèves ont eu tout juste aux trois premiers exercices
sur la syllabe, la rime et la voyelle. Pour cette raison, j’ai décidé de travailler avec
eux sur le phonème consonne et plus précisément sur le phonème [f]. En
maternelle, les phonèmes consonnes ne font pas partie des acquis exigibles de fin
de grande section. Toutefois, j'ai choisi de travailler avec ces élèves sur le phonème
[f] car la discrimination des voyelles semblait acquise. Nous appellerons ce groupe,
le groupe A. Treize élèves ont obtenu de bons résultats pour la discrimination des
syllabes et des rimes mais ont eu de mauvais résultats pour la discrimination des
phonèmes. J'ai choisi de travailler alors avec eux sur un phonème voyelle car il est
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plus facile à identifier pour des élèves de grande section que le phonème consonne.
J’ai alors décidé de travailler sur la reconnaissance du phonème [o], il s'agira des
groupes B et C car ils travaillaient sur l' album Emile le crocodile. Les élèves avaient
déjà rencontré le son [o] dans cet album. Le mot crocodile sera donc notre référent.
Les derniers élèves ont obtenu des résultats «moins bons» dans les quatre
exercices. Avec ce groupe, j’ai alors décidé de travailler sur les unités les plus
larges : la rime et la syllabe. Il s'agira du groupe D.
tableau 2 : récapitulatif des différents groupes
groupe
Nombre
d'élèves
Unités langagières travaillées
A
4
Le phonème consonne [f]
B
6
Le phonème voyelle [o]
C
7
Le phonème voyelle [o]
D
8
La syllabe et la rime.
Avant de commencer un apprentissage sur le phonème [o] avec les groupes
B et C et sur le phonème [f] avec le groupe A, je leur ai donné un nouveau test
d'évaluation sur le phonème [o]. Ce pré test avait une démarche analogue au
précédent. Les élèves devaient mettre une croix sous les images où l'on entendait le
son [o]. Les résultats sont médiocres. Les quatre élèves du groupe A n'ont pas eu
les résultats attendus (ils avaient obtenu de bons résultats lors du premier pré-test
sur le phonème [a]). J'ai alors hésité sur le phonème à travailler à savoir si je devais
garder le phonème consonne ou travailler sur le phonème [o] comme les autres.
J'ai, tout de même décidé de continuer sur la consonne comme prévu car le nombre
d'erreurs restait tout de même limité.
II.2) les
séances mises en places pour mener cet
apprentissage
Afin d’aider les élèves de cette classe à développer leur conscience
phonologique, j’ai décidé de consacrer deux séances de quinze minutes par jour à
la découverte des réalités sonores de la langue. Cependant j’ai rencontré des
difficultés au niveau de la mise en place de ces différents enseignements. Je n’avais
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pas assez de temps dans la journée pour travailler avec les quatre groupes en
atelier. Or les chercheurs ont remarqué qu'il était indispensable de travailler la
conscience phonologique au moins quinze minutes par jour si on souhaite que les
élèves fassent de véritables progrès. J’ai alors décidé de travailler collectivement le
matin sur la rime et par groupe l'après-midi. Il est vrai que la rime semblait acquise
chez les élèves des deux premiers groupes mais ces exercices permettraient de
réinvestir leur savoir.
La
démarche
restera
la
même
pour
travailler
les
quatre
unités
phonologiques. Celle-ci repose uniquement sur l'oral. Aucun lien avec l'écrit ne sera
réalisé à moins que les enfants n'en proposent un. L'analyse de la langue ne se fera
pas de manière systématique et restera avant tout une approche ludique.
Les objectifs de ces séances sont divers. Il s'agit avant tout d'affiner la
maîtrise de la langue orale mais aussi de préparer l'enfant à entrer dans le monde
de l'écrit à travers l'utilisation de la phonologie.
Les différentes unités phonologiques seront étudiées selon une démarche
analogue. Cette démarche s'appuie sur la recherche de Content (1974) qui propose
d'entraîner les élèves à la conscience phonologique en réalisant quatre tâches
précises. Il s'agit d'abord de demander aux élèves de repérer un son précis dans un
mot, de compter le nombre de son dans une expression, de faire des manipulations
phonétiques (supprimer, ajouter ou substituer un segment à un autre ou d'inverser
des syllabes) et enfin de catégoriser des mots selon un critère phonologique précis.
En fonction de cette recherche, j'ai décidé de mettre en place une démarche
pédagogique qui se déroule en trois phases plus ou moins longues :
–
identification de l'unité phonologique étudiée (rime, syllabe, phonème)
–
production de mots comprenant l'unité phonologique étudiée
–
manipulations phonétiques
J'ai choisi de travailler ces différentes phases dans cet ordre car elles
suivent une progression croissante. L'identification des unités phonologiques est la
tâche la plus facile alors que les manipulations de celles-ci correspondent aux plus
compliquées.
Pour toutes les unités travaillées, les tâches seront identiques. Pour cette
raison, je développerai ici, uniquement la démarche et les exercices réalisés avec le
groupe B sur le phonème [o].
Page: 19
A) Identification de l'unité phonologique étudiée :
L'identification de l'unité
phonologique choisie se faisait à travers
l'apprentissage d'un chant. J'ai décidé d'utiliser une chanson pour repérer les sons
car elle permet aux élèves d'identifier les sons cibles, de les intégrer et de se
construire un répertoire de mots où le son cible est présent.
Par exemple, pour l'identification du son [o], les élèves du groupe B devaient
écouter attentivement la chanson suivante : le petit chat Roméo. Je leur ai d'abord
demandé ce qu'ils avaient entendu et compris. Ensuite, je leur ai demandé d'
écouter à nouveau attentivement la chanson et de repérer un son qui revenait
souvent. L'objectif de cet exercice était pour les élèves de repérer un son commun,
le son [o], dans l'ensemble de la chanson. La plupart des élèves ont repéré des
mots mais pas de similitude dans ces mots. Cet exercice était trop compliqué pour
eux, le son [o] ne se détachait peut-être pas assez des autres sons des mots pour
qu'ils le repèrent . Pourtant de nombreux de mots comprenaient le son [o] (Roméo,
portait, beau, chapeau, aux restaux, corbeau, saxophone, oiseaux, berlingots). Je
leur ai alors demandé s'ils avaient entendu le son [o] dans la chanson. C'est
seulement après avoir donné cette nouvelle consigne, que les élèves m'ont donné
les mots de la chanson qui comprenaient le son [o]. Nous avons écouté une nouvelle
fois cette chanson et ils devaient lever le doigt chaque fois qu'ils entendaient le son
cible. Cette tâche a été réalisée sans difficulté. Il est vrai que l'ensemble des mots
avait été énoncé auparavant collectivement. Cette première séance s'est terminée
par l'apprentissage du chant. Je souhaitais que les élèves s'approprient
véritablement le son [o]. En apprenant cette chanson, ils auraient un répertoire de
mots comprenant ce phonème.
Une autre séance avait pour objectif de faire ressentir aux élèves le son.
Pour cela, j'ai répété les sons en accentuant les mouvements faits par ma bouche.
Je souhaitais qu'ils visualisent le son. Ensuite je les ai interrogé sur ce qu'ils
ressentaient dans leur corps quand ils prononçaient cette unité. Ils ont alors
remarqué pour le son [o] que la bouche était ouverte, que les lèvres allaient vers
l'avant et qu'il y avait peu d'air qui sortait. Chaque élève a répété le son cible en
insistant sur la position de la bouche. Je souhaitais aussi que les élèves ressentent
corporellement le son. Les élèves devaient se déplacer dans l'espace en fonction
des sons qu'ils entendaient. Ils
dansaient sur le chant Kéo. Ils
se déplaçaient
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uniquement quand ils entendaient le son [o]. Ce son revenait très souvent car il
compose le tempo de cette chanson. Une fois les déplacements acquis, les élèves
devaient se passer un objet quand ils entendaient le son [o]. Les élèves ont bien
repéré le phonème [o] dans cette situation.
Une fois le travail corporel effectué en lien avec la prononciation des unités
phonologiques, j' ai mis en place une autre situation d'apprentissage d'identification
des unités choisie. Dans celle-ci, les élèves devaient repérer des sons cibles à
l'intérieur de mots. Pour cela, nous avons joué au loto des mots. Chaque élève
disposait d' une plaque de jeu avec une image ( un crocodile) comportant le son
cible. Des images retournées étaient disposées sur la table. Chacun leur tour, les
élèves piochaient une image pour trouver si elle comportait ou non le son [o]. Si
l'image comportait le son [o], l'élève pouvait la déposer sur sa plaque et rejouer. Si
l'image ne comportait pas le son souhaité l'image était reposée sur la table. Le
gagnant était celui qui avait le plus d'images sur sa plaque. Les premières fois, je
jouais avec eux. Quand le jeu fut compris, je le laissais à disposition des élèves pour
qu'ils jouent quand ils avaient terminé leurs activités ou pendant les moments
d'accueil. Ainsi les élèves jouaient régulièrement à ce jeu tout en étant autonome. Je
vérifiais à la fin de la partie s'ils avaient joué correctement. Les élèves ont continué
de jouer régulièrement avec ces jeux même quand nous étions passés à la phase
suivante. Il profitaient des moments d'accueil pour jouer sans tenir compte de leur
groupe. Je les laissais jouer même s'il ne s'agissait pas d'un jeu concernant l'unité
phonologique sur laquelle ils travaillaient.
Je n'avais pas prévu de calendrier précis pour passer d'une phase à l'autre
car je souhaitais que chaque phase soit assimilée avant de passer à la phase
suivante. Comme mon stage ne durait que trois semaines et que je voulais observer
la réaction des élèves exécutant chaque tâche, j'ai réduit à deux le nombre de
séances consacrées à chaque phase de travail.
Au bout des deux séances, j'ai décidé de passer à la deuxième phase
d'apprentissage c'est à dire à la production de mots contenant l'unité phonologique
étudiée.
Page: 21
B) Production de mots contenant l'unité phonologique
étudiée:
Les productions de mots étaient essentiellement réalisées à travers le jeu du
panier. Je disais aux élèves que j'allais au marché acheter des objets qui
comportaient l'unité étudiée. L'objectif de ce jeu était de produire des mots qui
contenaient le phonème étudié. La consigne était la suivante : au marché, j'achète
des objets qui ont, par exemple, le son [o]. Afin d'être claire, je leur ai donné
l'exemple suivant : dans mon panier, je mets des tomates. Les élèves des différents
groupes ont réalisé cette tâche avec plus ou moins de difficulté. Les élèves ont tout
d'abord pensé à acheter les objets qui se trouvaient dans les différents jeux. Ainsi ils
ont acheté des crocodiles, des oranges...
La difficulté est apparue quand les élèves avaient cité tous les objets
présents dans les jeux. Pourtant il restait de nombreux mots non utilisés comme
vélo, cochon... Ces difficultés peuvent résulter d'un problème de vocabulaire car les
élèves ne pensent peut-être pas forcément aux mots qui contiennent ce son. Il est
difficile de sélectionner spontanément des mots dans sa mémoire. Pour cela les
élèves doivent avoir un répertoire de mots directement utilisable. Afin d'aider les
élèves qui avaient des difficultés à trouver des mots qui contenaient le son [o], je leur
proposais des devinettes où la solution contenait le phonème [o]. De même, les
élèves avaient à disposition quelques images accrochées au tableau dont les mots
comprenaient le son [o].
Les élèves ont aussi rencontré des difficultés au niveau de l'irrégularité des
sons en rapport avec leur graphème. En effet il y avait dans la classe une élève qui
se prénommait Ondine. Une élève a fait la remarque que dans Ondine, il y avait le
son [o] car on le voyait dans son prénom. Ondine a réagi en disant qu'on n'entendait
pas le [o] dans son prénom. J'ai alors demandé aux élèves si on disait « Odine ou
Ondine ». Tous se sont mis d'accord pour dire qu'on prononçait [ondine]. J' ai alors
expliqué que dans certains mots les lettres étaient mariées et donc qu'elles
changeaient de son. Ainsi le mariage du o et du n s'écrivait on et se prononçait [‫]כ‬.
Lors de cette séance, j'ai utilisé l'écrit car cela était sollicité par les élèves. J'ai alors
profité de l'occasion pour leur indiquer que certaines lettres changeaient de son
quand elles se mariaient.
Page: 22
Au bout de deux séances, je suis passée à la tâche suivante qui consistait à
manipuler le phonème [o]. Les jeux de loto de mots restaient tout de même à la
disposition des élèves lors des moments d'accueil ou quand les élèves avaient
terminé leur travaux.
C) Manipulations des unités phonologiques
Les tâches de manipulations sont diverses : ajout, inversion ou suppression
d'unité phonologique. Dans un premier temps, il s'agira d'ajouter le phonème [o] à un
mot. Ainsi le mot chat devient le mot ochat si on ajoute le phonème [o]. A partir de ce
moment, les élèves ont rencontré de véritables difficultés. Ma consigne « ajoute le
son [o] au début du mot chat » ne leur paraissait pas claire. J'ai alors donné la
réponse comme exemple. J'ai dit « si j'ajoute le son [o] au mot chat, j'obtiens le mot
ochat ». J' ai proposé des mots monosyllabiques et bisyllabiques. Certains élèves
ont trouvé la réponse mais cela restait très difficile et je n'arrivais pas à leur faire
comprendre ce que je voulais exactement. Une certaine incompréhension persistait.
Ils ne comprenaient pas le sens des mots et cela les déstabilisait. Les élèves
habitués à travailler avec de vrais mots étaient peut-être troublés par le fait que je
leur demandais de fabriquer des pseudo-mots.
J'aurai peut-être du changer de
consigne et leur proposer d'inventer de nouveaux mots à partir de mots que l'on
connaissait déjà. Ainsi j'aurais pu leur demander d'inventer un nouveau mot à partir
du mot râteau et leur donner
l'exemple orâteau. De plus , j'aurais du utiliser
uniquement des mots monosyllabes afin de ne pas complexifier la tâche. Après
plusieurs tentatives infructueuses, j'ai travaillé sur l'inversion de syllabes. Les élèves
continuaient tout de même à travailler en petit groupe car il a été démontré qu'un
travail en conscience phonologique est plus efficace s'il est réalisé en effectif
restreint.
Lors de mon stage, je pensais que l'inversion des unités phonologiques était
encore plus difficile que l'exercice précédent. La suite de mon travail m'a démontré le
contraire, il est apparu que les tâches les plus complexes sont celles de suppression
et d'ajout d'unités phonologiques. Je n'ai pas eu le temps de proposer aux groupes
B et C ces deux dernières tâches avec le phonème [o] car je souhaitais réaliser un
post-test pour connaître les conséquences de cet apprentissage au niveau de la
conscience phonologique. J'ai alors travaillé avec tous les élèves sur l'inversion de
Page: 23
syllabes, j'ai décidé qu'ils réaliseraient leur tâche progressivement. Tous les mots
que je proposais pour cet exercice étaient composés de deux syllabes. Le premier
mot énoncé pour chaque groupe était le mot lapin car nous avions travaillé de
nombreuses fois sur ce mot et les élèves ne devaient rencontrer aucune difficulté de
discrimination des syllabes. Dans un premier temps, je leur donnais un mot et ils
devaient trouver le nombre de syllabes qui composait ce mot. Dans un deuxième
temps, je leur demandais quelles syllabes composaient ce mot. Pour le mot lapin, les
élèves n'ont rencontré aucune difficulté pour repérer que le mot lapin était composé
de deux syllabes, la syllabe la et la syllabe pin. Dans un troisième temps, je leur ai
demandé d'inverser les syllabes. Je n'ai alors obtenu aucune réaction de leur part,
j'ai alors dit : «si j'inverse les syllabes du mot lapin j'obtiens alors un nouveau mot qui
est le mot pinla». Un élève m'a alors dit que j'avais retourné le mot. J'ai donc
proposé un autre mot à cet élève qui a réussi cet exercice sans difficulté. Comme la
majorité des autres élèves n'avait pas l'air de comprendre, je lui ai demandé
d'expliquer sa manière de faire. J'espérai que ses camarades comprendraient mieux
avec ses explications. Le résultat fut très mitigé, une minorité d'élèves a compris ses
explications et a su réaliser le travail avec des mots simples, déjà étudiés lors des
séances précédentes (comme moto, loto...). Les autres élèves ne réussissaient pas
à isoler les éléments pour les combiner d'une autre manière.
L' exercice consistant à supprimer des unités phonologiques fut la dernière
tâche demandée. Il s'agissait à mon avis de l'exercice le plus difficile. Cependant il
s'est avéré que ce ne fut pas le cas. Pour cet exercice, j'ai continué de travailler avec
les différents groupes sur la syllabe. Au départ, les élèves ont rencontré quelques
difficultés en raison de ma consigne : enlever la dernière syllabe du mot lapin. J'ai
alors transformé la consigne par l'instruction suivante : ôter la dernière syllabe en
donnant l'exemple suivant « si j'enlève la dernière syllabe du mot lapin, j'obtiens le
mot la ». J' ai ensuite donné le mot moto. Je leur ai demandé quel était la dernière
syllabe de ce mot. Sans difficulté, les élèves m'ont répondu la syllabe to. J'ai ensuite
demandé quel mot nous obtenions si on supprimait cette syllabe. Léo m'a répondu
sans difficulté que nous obtenions le mot mo. J'ai continué de proposer d'autres
mots mais les autres élèves ne répondaient pas. J'ai alors supposé qu'ils ne
connaissaient pas la réponse. J'ai tout de même demandé à Léo de reformuler la
consigne. La grande majorité des élèves ne réagissait toujours pas. J'ai alors changé
de consigne en utilisant celle de Liberman (1974) «répéter le mot bateau en entier,
puis répéter juste un petit bout ». Ainsi les élèves ont directement répondu en disant
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ba. Après avoir fait plusieurs essais avec des mots à deux syllabes, je leur ai donné
des mots composés de trois syllabes. Je demandais aux élèves de supprimer un
morceau de mot sans ajouter d'autres précisions. Les élèves supprimaient toujours
la dernière syllabe. Ainsi, ils ont répondu correctement à la question qui était de
supprimer la syllabe finale.
L' ensemble de la démarche (exercices d'identification, de production et de
manipulation) était identique pour les autres groupes mis à part que nous utilisions
une unité phonologique différente : la syllabe pour le groupe D, la rime en collectif et
le phonème consonne pour le groupe A. Avec ces différents groupes, j'ai rencontré
diverses difficultés liées à l'apprentissage de la conscience phonologique.
D) Difficultés rencontrées avec les autres groupes
Les autres groupes ont rencontré des difficultés analogues lors de la
production de mots comprenant l'unité étudiée, notamment pour la production de
rime. Je souhaitais que les élèves en collectif réalisent un poème avec les prénoms
de la classe. Ce poème est consultable en feuille annexe. En lisant ce poème, nous
pouvons constater que les élèves ont parfois confondu la dernière syllabe et la rime
( exemple : Jonaz mange des ananas). Lors de mes séances, j'aurais du davantage
différencier la syllabe et la rime. Je n'aurais peut-être pas du accepter les vers qui
comprenaient une syllabe finale identique à la syllabe finale du mot précédent. J'ai
peut-être sans le vouloir engendré ce genre de réponse car je n'ai pas précisé que la
rime se composait dans cet exemple uniquement du son as.
L'identification du phonème consonne pour le groupe
A fut un échec. Il
devait repérer le son [f] dans la chanson funambule. Vu la taille réduite du groupe,
les conditions étaient encore plus favorables à l'écoute de la chanson. Les élèves
ont bien entendu certains mots, ils ont compris le sens de la chanson mais ne
réussissaient pas à percevoir le son consonne. Après deux ou trois tentatives, j'ai
décidé de changer de méthode. Je leur montrais des cartes avec des images où le
son [f] était présent. Je leur ai alors demandé de me dire le nom des images puis de
trouver le son commun. Ce son n'était toujours pas perçu. J'ai alors décidé de leur
donner directement le son. Je leur ai fait répéter en le tenant longtemps, en
l'accentuant dans des mots mais les élèves ne percevaient toujours pas ce son. Ils
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n'arrivaient pas à l'entendre. Devant plusieurs tentatives infructueuses, j'ai décidé de
ne pas persister dans cette voie. En effet, dans les programmes officiels, l'étude des
phonèmes consonnes n'est pas indiquée. Les chercheurs comme Alegria et Morais
(1979) ont d'ailleurs démontré que les enfants de moins de six ans ne pouvaient pas
entendre les sons consonnes. Il était alors beaucoup trop tôt pour ces enfants de
grande section, même s'ils avaient des facilités, de travailler sur le phonème
consonne. J' ai alors décidé de reprendre avec eux le même travail que les groupes
B et C sur le phonème [o]. Une fois qu'ils avaient rattrapé le niveau de ces derniers,
j'ai remanié les groupes afin d'avoir trois groupes plus homogènes au niveau de
l'effectif. J'ai préféré garder trois groupes car les éditions de la Cigale ont constaté
qu'un travail sur la conscience phonologique était plus efficace dans des groupes
composés de sept élèves maximum. Les nouveaux groupes étaient constitués de la
manière suivante:
Tableau 3 : nouvelle répartition des élèves dans les groupes
groupe
Nombre
d'élèves
Unités langagières travaillées
A
5
Le phonème consonne [f] et la rime
B
6
Le phonème voyelle [o] et la rime
C
6
Le phonème voyelle [o] et la rime
D
8
La syllabe et la rime.
Malgré les quelques difficultés rencontrées, les élèves de cette classe ont
suivi un entraînement régulier en conscience phonologique pendant mon stage. Pour
cela, ils étaient confrontés à différents types d'exercices (identification, production et
manipulation). Afin de savoir si cet entraînement fut efficace, j'ai proposé un posttest. A travers celui-ci, je voulais savoir si les élèves avaient progressé entre le prétest et le post-test.
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III) Conséquences de cet apprentissage évaluées grâce à un posttest
III.1) Réalisation du post- test après deux semaines et
demies d'entraînement
A la fin de mon stage, j' ai choisi d'évaluer tous les élèves sur le même posttest que le pré-test afin de savoir s'ils avaient progressé en conscience
phonologique. En effet la comparaison des résultats obtenus par les élèves me
permettra de vérifier si un entraînement en conscience phonologique est bénéfique.
Ce post-test était identique au pré-test : les élèves devaient identifier quatre unités
phonologiques différentes ( la syllabe [ba], la rime [‫]כ‬, le phonème [ã] et le phonème
[∫]). J'ai décidé de ne pas utiliser les mêmes sons que dans le pré-test afin d' éviter
que les élèves se souviennent des réponses et que cela fausse les résultats. Les
unités langagières utilisées n'ont pas été choisies de manière aléatoire, j'ai choisi
des unités qu'ils n'avaient pas encore étudiées notamment pour les sons [ã] et [∫]. Le
son consonne étant difficile à percevoir, j'ai choisi de nouveau une consonne que
l'on pouvait accentuer en tenant le son [∫∫∫∫]. Chaque unité phonologique représentait
un exercice. Dans chaque exercice, les élèves devaient trouver dans quel mot on
entendait le son cible. Les quatre exercices étaient analogues. Ils étaient constitués
de huit images. Le nombre de mots qui contenait le son cible variait d'un exercice à
l'autre. ( un exemple de post-test est consultable en feuille annexe). De plus j'ai
décidé d'évaluer tous les élèves sur l'identification du phonème [o] à travers un test
analogue aux précédents. Cela me permettrait de vérifier pour les groupe A, B et C
que le travail effectué sur ce phonème était acquis et pour le groupe D de regarder si
un entraînement sur la syllabe pouvait améliorer les résultats des élèves dans la
perception des phonèmes.
Lors de l'évaluation, les élèves ont tous oralisé les mots ce qui n'était pas le
cas lors du premier test. Une majorité d' enfants a décomposé les mots en syllabe.
Mais aucun élève n'a cherché à ressentir le son dans sa bouche. Ceci montre que je
n'ai pas assez insisté sur les sensations que l'on ressent quand l'air passe dans
notre corps pour prononcer les mots. Pourtant la plupart des élèves a réalisé ce test
sans trop de difficulté et aucun n'a été troublé par le travail demandé.
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III.2) Résultat du post test
Comme dans le pré-test, les résultats obtenus dans ce post-test restent très
disparates. Ils sont présentés dans les tableaux ci-dessous
nombre d'élèves ayant tout juste ( 25 élèves)
A)Présentation globale des résultats
Shéma 4 : résultat du post-test
25
22,5
20
17,5
15
12,5
pré- test
post-test
10
7,5
5
2,5
0
syllabe
rime
phonème
voyelle
phonème
consonne
unités langagières étudiées
L'analyse des résultats du post-test montre que les performances ont
augmenté entre le pré-test et le post-test dans toutes les unités phonologiques. En
effet le schéma 4 montre que les performances ont augmenté entre le pré-test et le
post-test pour l'identification de la syllabe ( 68%- 96%). Elles ont aussi augmenté
pour l'identification de la rime (68%-92%), pour l'identification du phonème voyelle
(16%-65%) et pour l'identification du phonème consonne (12%-36%).Cependant les
performances varient en fonction de l'unité sur laquelle portait l'exercice. Nous
pouvons ainsi constater que c'est l'exercice sur le phonème vocalique qui montre le
plus grand progrès alors que les exercices sur les autres unités connaissent des
progrès analogues.
Page: 28
Au vu de ces résultats nous pouvons constater que pratiquement tous les
élèves ont progressé entre le pré-test et le post-test. La présentation des résultats
obtenus dans les différents groupes va permettre d'analyser le progrès de chaque
élève dans l'identification des différentes unités phonologiques en fonction du type
de entraînement suivi.
B) Présentation des résultats par groupe
Les élèves des différents groupes n'ont pas travaillé la même unité
phonologique. Ils ont été répartis dans les groupes en fonction des résultats obtenus
lors du pré-test. La comparaison de ces deux tests va donc me permettre de
connaître les résultats obtenus en fonction de l'unité travaillée pendant les séances
d'entraînement. Je vais donc présenter ici les résultats dans des tableaux différents
en fonction que les élèves ont eu un entraînement sur le phonème ou sur la syllabe.
J'ai décidé de regrouper les résultats des groupes A, B et C dans le tableau cidessous car ils ont travaillé de façon identique et sur la même unité phonologique (le
phonème [o]).
nombre d'élèves ayant tout juste (17 élèves)
Shéma 5: résultat du post-test et pré-test pour les groupes A, B et C
18
16
14
12
10
résultat du pré-test
résultat du post-test
8
6
4
2
0
syllabe
rime
phonème
voyelle
phonème
consonne
unités langagières étudiées
Page: 29
L'analyse du schéma 5
nous montre que les performances ont
augmenté entre le pré-test et le post-test. ( syllabe: 68%-100%, rime: 68%-100%,
phonème voyelle: 16%-88% et phonème consonne: 12%-35%).. Les résultats
obtenus par ces élèves dans l'identification du phonème [ã] sont satisfaisants. La
majorité de ces élèves a amélioré leur conscience phonologique entre le pré-test et
le post-test (16%-88%). Deux élèves n'ont pas eu tout juste mais ont tout de même
fait moins d'erreurs. Ils ont repéré tous les mots cibles mais ont coché un mot
phonologiquement très différent. Il semble alors que l'entraînement suivi par les trois
groupes d'élèves fut bénéfique pour la manipulation de l'unité du phonème
vocalique.
Nous pouvons aussi remarquer que certains élèves des groupes A, B et C
ont progressé dans l'identification des phonèmes consonnes. Nous pouvons donc en
déduire que le fait d'entraîner régulièrement des élèves sur une unité phonologique
précise peut entraîner une généralisation de ce travail de conscience phonologique
sur les autres unités phonologiques.
nombre d'élèves ayant tout juste (8 élèves)
Shéma 6 : résultat du post-test pour le groupe D
7
6,5
6
5,5
5
4,5
4
3,5
3
2,5
2
1,5
1
0,5
0
résultat du pré-test
résultat du post-test
syllabe
rime
phonème
voyelle
phonème
consonne
unités langagières étudiées
Le groupe D a bénéficié d'un entraînement spécifique en conscience
phonologique sur la syllabe. L'analyse du schéma 6
nous indique que les
performances entre le pré-test et le post-test ont augmenté de manière considérable
pour toute les unités phonologiques hormis le phonème consonne ( syllabe : 0%87,5%, rime : 0%-75%, phonème voyelle : 0%-75% , phonème consonne : 0%-0%).
Dans le groupe D, seulement un élève n' a pas eu tout juste. Cet élève n'a
d'ailleurs pas réussi à identifier les autres unités phonologiques. Cet élève absent
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pendant la majeure partie de mon stage n'a pas reçu un entraînement régulier en
conscience phonologique. Il n'a donc pas pu progresser grâce à l'entraînement mis
en place. Les autres élèves ont tous amélioré leurs performances dans le repérage
de la syllabe. Nous pouvons donc en déduire que l'entraînement suivi par le groupe
D fut bénéfique.
Les résultats obtenus pour l'identification de la rime sont aussi très
encourageants. En effet, seuls, deux élèves du groupe D n'ont pas eu tout juste.
Nous retrouvons ici l'élève précédemment cité. D'un point de vue général, nous
pouvons dire que la remédiation suivie par l'ensemble de la classe sur la rime a été
bénéfique pour la majorité des élèves. Pour l'élève qui a suivi l'entraînement mais qui
n'a pas eu tout juste, il aurait peut-être été préférable de travailler en petit groupe sur
la rime comme nous l'avons fait pour la syllabe.
Nous pouvons aussi constater grâce au tableau numéro 6 que certains
élèves du groupe D ont aussi amélioré leurs performances dans l'identification de ce
phonème. Pourtant aucun de ces élèves n'avaient suivi d'entraînement pour
l'identification de ce phonème. Nous pouvons donc en déduire que la majorité des
élèves, qui a suivi un entraînement en conscience phonologique sur la syllabe et la
rime, a progressé aussi dans le repérage des unités phonologiques plus petites
comme le phonème voyelle.
On peut donc conclure que le fait d'entraîner
régulièrement des élèves sur une unité phonologique entraîne une généralisation de
ce travail de conscience phonologique sur les autres unités phonologiques.
Grâce à un entraînement régulier, la majorité des élèves de cette classe a
progressé en conscience phonologique. Nous pouvons donc en déduire qu'un
entraînement régulier de trente minutes par jour est bénéfique pour l'acquisition
d'une conscience phonologique.
CONCLUSION
Les chercheurs et les instructions officielles ont démontré qu'il est
indispensable que les élèves développent leur conscience phonologique afin de
pouvoir entrer dans le monde de la lecture et de l'écriture. En effet celle-ci est à la
fois une conséquence et un pré-requis de l'apprentissage de la lecture. A travers les
difficultés rencontrées lors de mon stage accompagné, je me suis demandée
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comment la développer chez les élèves. Il est alors apparu qu'un entraînement
régulier, en petit groupe, qui portait sur des tâches d'identification, de production et
de manipulation d'unités phonologiques permettait à l'élève d'acquérir une
conscience phonologique. De plus dans certains cas, l' entraînement sur une unité
phonologique ciblée permet aux élèves d 'améliorer leur capacité à repérer des
unités phonologiques plus petites.
L'entraînement mis en place dans la classe de grande section où j'étais en
stage fut bénéfique pour la majorité des élèves. Pour améliorer la performance des
élèves les plus en difficulté, il aurait peut-être été préférable que je transforme
certains aspects de mon enseignement. J'aurais peut-être du insister davantage sur
la perception du son à travers le corps et notamment la bouche. Pour cela j'aurais
peut-être du utiliser un miroir pour qu'ils voient la forme de leur bouche quand ils
prononçaient le son. Ils auraient alors pu sentir le son et non seulement l'entendre.
En soutien à cela, j'aurais pu utiliser des gestes comme dans la méthode BorelMaysonny, méthode qui associe un son a un geste. Cette méthode pourrait aider
l' élève à visualiser les sons. De plus il aurait été préférable de travailler la rime en
petit groupe comme nous l'avons fait pour la syllabe et le phonème. Un entraînement
plus long se serait révélé aussi plus bénéfique.
Pour ma pratique professionnelle, ce travail m'a permis de constater qu'il
était indispensable de faire acquérir une conscience
phonologique aux élèves.
Cependant cet enseignement doit être adapté à chaque élève. J'ai aussi remarqué
qu'il était obligatoire de connaître le niveau de chaque élève en conscience
phonologique avant de commencer à enseigner la lecture. Il est, en effet, impossible
que les élèves apprennent à déchiffrer des mots s'ils ne possèdent pas les deux prérequis du principe alphabétique qui sont la connaissance du nom des lettres et la
conscience phonologique.
De même il faut connaître le niveau en conscience phonologique des élèves
en difficulté de lecture. En effet la non possession de la conscience phonologique
peut être une cause des difficultés de lecture de certains enfants. Un entraînement
en conscience
phonologique peut améliorer la lecture de certains enfants. Les
tâches d'identification, de production et de manipulation d'unités phonologiques
peuvent donc être encore utilisées chez les élèves mauvais lecteurs en déficit de
conscience phonologique même s'ils sont en fin de cycle III.
Page: 32
Bibliographie
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arise spontaneously – cognition n° 7- pages 321-323
Content,A. (1985) – Le développement de l'habileté d'analyse phonétique de la
parole- L'année psychologique-n°85- pages 73 à 99
Fox, Bet Routh Dk (1975) Analyzing spoken language into words, syllabes and
phonèmes: A developmental study- Journal of Psycholinguistics Research – n°4pages 331 à 342
Gombert, J-E. (1990) – le développement métalinguistique-Presses universitaires de
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Jaffré,J-P, Sprenger-Charolles,L. et Fayol,M (1993) -Les actes de la villette- Nathan
pédagogie Paris
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Journal of Experimental Child Psychology n°18- pages 201-212
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reading acquisition- Journal of Educational Psychology n°7-, pages 1309-1324
Sprenger-Charolles, L. (1989)- L'apprentissage de la lecture et ses difficultésRevue Française de pédagogie- n°87, pages 77-99
Page: 33
Feuilles Annexes
Page: 34
Page: 1
Page: 2
Page: 3
Les grandes sections jouent avec leurs prénoms
Pierre reste sur la terre
Alex suce son index
Donovan joue avec un âne
Donovan marche avec une canne
Maxence lance une lance
Maxence va à la pompe à essence
Rémy mange du pain de mie
Valentin lit un Tintin
Valentin fabrique du pain
Alex joue avec le chien Rex
Pierre lance une pierre
Donovan est dans une caravane
Rémy joue avec Noémie
Léo nettoie les veaux
Ondine mange une tartine
Sacha s’occupe d’un chat
Lynda-Nina boit de l’orangina
Oriane mange une banane
Léo mange des berlingots
Julie fait son lit
Ondine mange des clémentines
Oriane nettoie les ânes
Ondine boit de la grenadine
Emma regarde le film au cinéma
Elie mange des raviolis
Julien n’a peur de rien
Noémie aime sa mamie
Julien dort avec son dalmatien
Pierre-Alexandre dessine dans les cendres
Axel attend le père Noël.
Arthur mange de la confiture
Elodie mange un radis
Jonas casse une tasse
Ludwig mange une figue
Yoan voit un âne
Jonas mange un ananas
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LES EFFETS D'UN ENTRAÎNEMENT
REGULIER EN CONSCIENCE PHONOLOGIQUE
DANS UNE CLASSE DE GRANDE SECTION
RESUME:
La conscience phonologique est à la fois une conséquence et un pré-requis
de la lecture. Pour cette raison, il est indispensable que les élèves la maîtrisent.
Au cours de ce mémoire, nous observerons à travers une situation de classe en
grande section les conséquences d'un entraînement régulier en conscience
phonologique.
MOTS CLES:
–
conscience phonologique
–
grande section
–
lecture
–
phonème
–
syllabe
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