Reptilia, Chelonii, Testudinidae - Association du refuge des tortues
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Reptilia, Chelonii, Testudinidae - Association du refuge des tortues
Note sur la reproduction en captivité de Cinixys rongée, Kinixys erosa (Schweigger, 1812) (Reptilia, Chelonii, Testudinidae) DAVID MANCEAU, JÉRÔME MARAN Résumé : Un groupe de Kinixys erosa constitué d’une femelle et de trois mâles est élevé dans un même terrarium. Dans la nuit du 13 au 14 septembre 2007, la femelle a pondu douze œufs déposés dans un trou qu’elle a creusé à l’aide de ses pattes arrière. Les œufs ovales et à coquille dure mesurent entre 37 et 40 mm de long pour une largeur de 34 à 37 mm, une hauteur comprise entre 31 et 33 mm et pèsent de 25 à 28 grammes. Ils sont répartis dans trois couveuses paramétrées distinctement. Sur douze œufs, un seul est arrivé à terme. La jeune tortue a éclos après 152 jours d’incubation. À sa naissance, le juvénile mesure 36 mm de long pour une largeur de 32 mm, une hauteur de 19 mm et pèse 17 grammes. Son alimentation distribuée quotidiennement est constituée de vers de terre, foie de génisse, banane, champignon, mangue, tomate, courgette, pissenlit, trèfle et endive. Mots-clés : Kinixys erosa, Testudinidae, reproduction, captivité. 1. Introduction Dans un précédent article paru dans la revue Chéloniens, les auteurs de cette note ont rapporté les conditions de maintenance en captivité d’un couple de Kinixys erosa (Maran & Manceau, 2006). Ces informations émanaient du travail de l’un des deux auteurs (D.M.) qui se consacre depuis un certain nombre d’années maintenant à l’élevage de plusieurs espèces de tortues terrestres du genre Kinixys. Ses efforts ont récemment abouti à la naissance d’un Kinixys erosa. Cette réussite est d’autant plus méritante que la reproduction de la Cinixys rongée en captivité est rare ou du moins peu documentée (Blackwell, 1966 ; Brown & George, 1994 ; Harvan, 2007 ; McKeown, 1998 ; Vetter ; Woods). Cette note fait état des conditions de maintenance et de reproduction d’un groupe de Kinixys erosa en captivité. de long, 0,95 cm de profondeur et 0,50 cm de hauteur. Il est constitué d’agglomérés enduits de deux couches de vernis marin et recouverts d’une bâche à bassin appliquée au sol et remontant sur les côtés. La façade est en plexiglas. Le substrat est composé d’un mélange de deux à trois centimètres d’épaisseur de tourbe, de terreau et d’écorce de pins. L’ensemble est recouvert sur un tiers de la surface par de la mousse de forêt. La zone aquatique proposée aux tortues est profonde de trois centimètres et mesure 0,45 m de long sur 0,36 m de large. La température de l’eau oscille entre 25 °C le jour et 20 °C la nuit. Une lampe infrarouge blanche de 100 watts ainsi qu’un spot de 60 watts suffisent à chauffer l’ensemble du terrarium en demeurant allumés de 9 heures à 19 heures. Pendant les premières années, le chauffage du terrarium des Cinixys rongées était assuré par un câble chauffant enterré dans le substrat. Par la suite, ce câble a été remplacé par des spots. Ce changement provoque une plus grande activité des tortues. La luminosité est plus importante que dans le précédent terrarium ainsi que dans leur habitat naturel (forêt tropicale). Néanmoins, les tortues ont toujours la possibilité de se cacher sous la mousse ou dans les abris mis à leur disposition. L’hygrométrie oscille entre 80 et 100 %. Elle est assurée par de fréquentes vaporisations d’eau tiède. Ces conditions demeurent identiques tout au long de l’année. Pour l’instant, aucune variation d’humidité ou de température n’est effectuée en cours d’année. Dossières et plastrons des adultes : De gauche à droite : femelle, mâle n° 3, mâle n° 2 et mâle n° 1. 2. Méthode 2.1 Spécimens étudiés Le groupe d’élevage se compose d’une femelle et de trois mâles dont deux à peine matures. La femelle a été acquise en décembre 2002, le mâle adulte en décembre 2003 et enfin les deux petits mâles en juin 2006. Les dimensions et le poids de chaque spécimen sont reportés dans le tableau 1. 2.2 Conditions d’élevage À leur arrivée dans l’élevage, toutes les tortues bénéficient d’une période de quarantaine de six mois à un an durant laquelle chaque spécimen est isolé. Une fois cette période passée, les Cinixys rongées sont réunies dans le même terrarium qui mesure 3 m Tableau 1 : dimensions (en millimètres) et poids (en grammes) des spécimens étudiés. 46 • Chéloniens 11 • septembre 2008 Chéloniens 11 • septembre 2008 • 47 2.3 Alimentation Le régime alimentaire comprend une variété importante d’aliments d’origine végétale et animale distribués une à deux fois par semaine : fruits (banane, kiwi, orange, melon, pastèque, poire, pomme), légumes de saisons (courgette, endive, salade, tomate, concombre), champignons, herbes sauvages, insectes présents naturellement dans la mousse de forêt (cloportes, perce-oreilles, millepattes etc.), escargots, vers de terre et souriceaux. Depuis l’été 2007, des petits poissons décongelés sont également proposés avec succès. De manière plus exceptionnelle, la pâtée pour chat est distribuée aux Cinixys qui en raffolent. En revanche, les grosses blattes sont ignorées par les tortues. 3. Résultats 3.1 Comportement Les tortues demeurent la majeure partie de la journée dans leur cachette. Elles se déplacent relativement peu et ne deviennent vraiment actives que sous l’effet de l’arrosage abondant du terrarium. La distribution de la nourriture entraîne également un déplacement temporaire des tortues. Leur activité n’est pas strictement diurne ou nocturne mais elle peut être qualifiée d’opportuniste. Les animaux s’activent dès qu’ils en ressentent le besoin aussi bien le jour que la nuit. Les tortues sont beaucoup moins craintives qu’auparavant, même si elles n’affectionnent pas particulièrement les manipulations qui représentent une source de stress récurrent. Contrairement aux observations rapportées par certains auteurs sur l’agressivité entre les mâles maintenus dans un même terrarium (Vetter ; McKeown, 1998), la cohabitation des trois reproducteurs n’a pas engendré jusqu’à ce jour de manifestation hostile particulière. Le seul affrontement observé s’est déroulé lors de l’introduction des deux mâles subadultes dans le terrarium occupé par le couple adulte. La femelle a tenté à plusieurs reprises de repousser l’un des deux mâles subadultes en utilisant sa carapace comme boutoir. Ce comportement a duré quelques jours et ne s’est plus renouvelé par la suite. La prise alimentaire ne semble pas être une source de conflit particulier. 3.2 Accouplement Le couple adulte a été placé dans le même terrarium dans le courant de l’année 2004. Au début de l’année 2007, son transfert dans un nouveau terrarium plus grand et chauffé différemment a marqué le début des premiers accouplements. Les deux mâles subadultes ont rejoint par la suite le couple. Les accouplements sont assez fréquents avec le mâle n° 1, plus rarement avec le n° 2 et de manière exceptionnelle avec le n° 3 qui est le plus petit mâle des trois. Les tentatives d’accouplements se déroulent toute l’année, le plus souvent après une vaporisation du terrarium. Le pourtour des narines du mâle semble virer du jaune au rosé pendant la période d’accouplement. Les jeunes mâles ont cherché à s’accoupler lorsque la longueur de leur plastron a atteint 18 cm. À ce moment, ils pesaient 850 grammes. Aucune parade d’accouplement n’a été notée pour le moment. Le mâle grimpe rapidement sur la partie postérieure de la carapace de la femelle. Il se maintient grâce à ses membres antérieurs qui s’agrippent au niveau de la charnière de la femelle. Cette partie sensible s’est mise parfois à saigner à cause de l’obstination du mâle à s’y cramponner énergiquement. Pendant la copulation, le mâle conserve la gueule ouverte en émettant un cri semblable à un soufflement rauque. Ce cri est plus rauque chez le mâle n° 1 que chez les mâles n° 2 et n° 3. Pendant le coït, la femelle parvient souvent à traîner le mâle sur plusieurs mètres. 3.3 Ponte Lorsqu’elle est sur le point de pondre, la femelle présente tous les signes caractéristiques d’une tortue gravide : elle s’agite beaucoup et demeure longuement dans la partie aquatique du terrarium. La palpation permet aisément de sentir les œufs aussi bien à droite qu’à gauche des fosses inguinales. En juillet 2007, la femelle est isolée dans la partie gauche du terrarium où le bac de ponte est installé. Ce dernier est constitué d’une caisse encastrée dans le sol du terrarium et rempli d’un mélange de tourbe et de terreau. Une simple planche sépare les mâles de la femelle. Très rapidement, elle se met à creuser avec ses membres avant, à l’extérieur du pondoir comme à l’intérieur. Son activité débute aux environs de 16h 00 jusqu’à 20h 00 et se déroule de plus en plus souvent dans le pondoir. Elle creuse La femelle creuse avec les pattes avant pour chercher un site de ponte adéquat. Accouplement entre le mâle n° 1 et la femelle juste après leur installation dans le nouveau terrarium. 48 • Chéloniens 11 • septembre 2008 Chéloniens 11 • septembre 2008 • 49 avec ses membres antérieurs jusqu’à former une cuvette tout en reniflant régulièrement le substrat. Pendant deux mois, ces tentatives sont vaines et n’aboutissent à aucune ponte. La femelle continue quand même à s’alimenter. Un câble chauffant a été installé au fond de la caisse servant de pondoir. Dès lors, le substrat, en plus d’être humide et chaud en surface, devient également chaud en profondeur. Le 13 septembre 2007, soit quatre jours après cette modification, la femelle creuse une cavité à l’aide de ses membres antérieurs. Cette première étape achevée, elle pivote sur elle-même et entame le creusement de la chambre de ponte en s’aidant cette fois-ci de ses membres arrières. La Cinixys rongée y dépose 12 œufs et rebouche le nid. Le creusement du nid a débuté à 17h 00 et s’est poursuivi jusqu’à 00h 30. Les œufs ovales et à coquille dure mesurent entre 37 et 40 mm de long pour une largeur de 34 à 37 mm, une hauteur comprise entre 31 et 33 mm et pèsent de 25 à 28 grammes (voir tableau 2). 3.4 Incubation Les œufs ont été déterrés et placés immédiatement dans trois incubateurs paramétrés différemment. - L’incubateur n° 1 : bain marie simple, température constante à 29 °C, hygrométrie à saturation, Vermiculite® humide et œufs enterrés sur un tiers. - L’incubateur n° 2 : incubateur à bain marie mais avec une hygrométrie contrôlée à 70-80%, température constante à 29 °C, Vermiculite® humide et œufs enterrés sur un tiers. - L’incubateur n° 3 : même aménagement que pour l’incubateur n° 2 mais de l’eau est versée dans l’aquarium intérieur et les œufs sont placés dans un pot de terre rempli de tourbe. Les œufs sont couverts de feuilles mortes. La tourbe qui absorbe l’eau est donc toujours humide. La température est de 30 °C le jour et 28 °C la nuit sur des périodes égales de 12h. 3.5 Éclosion Sur les douze œufs placés en couveuse, un seul (le numéro 4) arrive à terme dans l’incubateur n° 1. La jeune tortue est éclose après 152 jours d’incubation. Les autres œufs ne sont pas embryonnés. Certains ont explosé alors que d’autres ont pourri. Il est à noter que l’épaisseur des coquilles n’est pas identique sur tous les œufs. Le 16 février 2008, le nouveau-né perce sa coquille à l’aide de sa caroncule. Il sort de l’œuf deux jours après affublé d’un sac vitellin de taille importante qui a été résorbé en douze jours sans que le juvénile ne se soit alimenté. À son éclosion, la jeune tortue très vive mesure 36 mm de long pour une largeur de 32 mm, une hauteur de 19 mm et un poids de 17 grammes. Incubateur n° 1. Incubateur n° 2. Incubateur n° 3 sans les feuilles qui recouvrent les œufs. Eclosion : Deux jours après avoir commencé à percer la coquille Sac vitellin : Un jour après l’éclosion Deux jours après l’éclosion Tableau 2 : Dimensions (en millimètres) et poids (en grammes) des œufs. 50 • Chéloniens 11 • septembre 2008 Chéloniens 11 • septembre 2008 • 51 vendre) pour leur travail éditorial. David Manceau tient à remercier particulièrement le groupe d’élevage Kinixys de la FFEPT (Fred, Marc et Sandrine) sans oublier son épouse Cécile pour sa patience. Toutes les photos sont de David Manceau. Auteurs Dix jours après l’éclosion Un mois après l’éclosion 3.6 Élevage du juvénile Le juvénile est maintenu sur un papier Sopalin® humide placé dans une boîte sans couvercle. Cette dernière est conservée dans l’incubateur dont la température varie entre 27 et 29 °C pour une hygrométrie à saturation. Il est baigné quotidiennement pendant trois minutes. La nourriture proposée est constituée de vers de terre, foie de génisse, banane, mangue, pissenlit, trèfle et endive. Le juvénile s’alimente pour la première fois le 5 mars soit 18 jours après son éclosion et 6 jours après la résorption du sac vitellin. Ses premiers excréments sont trouvés le 13 mars. Les données concernant l’évolution de sa croissance sont reportées dans le tableau 3. À partir du deuxième mois, le juvénile est installé dans un terrarium de 30 x 30 x 60 cm. Le substrat est constitué d’une couche humide de 4 à 8 cm de tourbe. Un quart de la surface est recouvert de mousse de forêt et un autre quart de feuilles mortes. Une grande écorce d’arbre sert d’abri. Une coupelle d’eau est mise à sa disposition. Le chauffage est assuré 24h/24h par un câble chauffant de 25 watts branché sur un thermostat à 25 °C au sol. Un spot de 25 watts allumé de 10h00 à 16h00 fournit à la jeune tortue un point chaud de 35 °C. Elle est active principalement pendant la journée. Elle se déplace dans l’eau, s’alimente et profite des différents points chauds pour se thermoréguler. En revanche, la tortue cesse son activité la nuit venue en demeurant à demi enterrée dans la tourbe humide sous les feuilles mortes. ◗◗ Remerciements Les auteurs tiennent à remercier pour leur aide précieuse les personnes suivantes (par ordre alphabétique) : Marc Asensio, François Chassain (Brest), Claude Nottebaert, Aline Turbin (Lille) sans oublier Ghislaine Guyot Jackson (Tallahassee,USA), François Charles (Pavant) et Jean-Jacques Delaruelle (Mont- David Manceau : [email protected] Liste de discussion sur les Kinixys www.group.yahoo/group/kinixys. Site internet du groupe d’élevage de la FFEPT : www.ffept.org/GEK Jérôme maran : L’Association du Refuge des Tortues Mairie de Bessières 26, place du Souvenir F-31660 Bessières. Courriel : [email protected] Dossière : Deux jours après l’éclosion Reçu juin 2008, accepté juillet 2008. Vingt et un jours après l’éclosion Bibliographie • Blackwell, K. 1966. Coital behaviour of the African tortoise, Kinixys erosa. Brit. J. Herpet. 3(11): 289-290. • Brown, P. & George, W. 1994. Brief observations on husbandry and rearing of two groups of Kinixy sp. Testudo 3(3): 49-53. • Harvan, M. 2007. The genus Kinixys. Radiata 16 (4) : 11-27. • Maran, J. & Manceau, D. 2006. Note sur la maintenance en captivité de Kinixys erosa (Schweigger, 1812) (Reptilia, Chelonii, Testudinidae). Chéloniens n°3, 35-39. • McKeown, S. 1998. Forest hinge-backed tortoise (Kinixys erosa). Reptiles, 24-30. • Vetter, H. Schildkrötenlexikon Heft 21. StachelrandGelenkschildkröte (Kinixys erosa).Stutz-Gelenkschildkröte (Kinixys homeana). 29 pages. • Woods, A. Kinixys erosa (Schweigger, 1812), a captive breeding experience. http://www.tortoise-trust.org/articles/erosa.html. Deux mois après l’éclosion Tableau 3 : Croissance du juvénile (dimensions en millimètres et poids en grammes). À l’âge de deux mois la jeune tortue est installée dans un terrarium composé d’une couche de tourbe humide. 52 • Chéloniens 11 • septembre 2008 Le nouveau-né âgé de deux mois se nourrissant ver de terre. Chéloniens 11 • septembre 2008 • 53
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