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p. 1 MAGAZINE numéro 55 été 2010 p. 2 exposition du septembre au novembre 2010 p. 3 Cher lecteur, Ça devait finir par arriver : le numéro de Magazine que vous tenez entre les mains est le dernier dans sa version gratuite. Heureusement, le prix ne sera pas le seul à apparaître, il s’accompagnera d’une nouvelle formule, avec plus de pages, plus de mode et quelques surprises qu’on vous réserve… Pourquoi ce changement ? Pour jouer un tour aux habitudes (les nôtres, les vôtres) et continuer à faire le même magazine, mais de manière différente – le lot de la presse, finalement. i s e n u o r m ilie Renard on d’Em i t i s o prop se Ricard une ’entrepri d n o i at Fond x i r P 12 e l r pou Mir oir m rd.co a c i r e trepris www.fondation-en Neïl Beloufa • Julien Bismuth •Isabelle Cornaro • Benoît Maire • Mick Peter • Soraya Rhofir •Ernesto Sartori • Jessica Warboys Parce qu’on nous reprochait d’ignorer la province (c’est faux !), par snobisme de surcroît (absolument pas…). Parce que nous avons souvent été critiques envers les images de mode et que nous aimons nous mettre au pied du mur. Prenez donc des vacances, nous vous préparons une bonne raison de rentrer. PS : Pour le rendez-vous, c’est mi-septembre, en kiosque, en librairie et même sur un site, mais nous n’avons pas encore choisi le nom. édito p. 5 – p. 8 – Brèves – p. 52 – Rencontre Yves est le méchant. Le personnage qui fait que notre fiction – p. 10 – 5 magazines Gentlewoman / Foam / Exit / Portfolio / I like my style de l’actualité peut fonctionner, avec ressorts et renversements. Yves est trader. Par Mathias Ohrel – p. 20 – Biographie Tous les commissaires actuels se réclament d’Harald Szeemann. Nous sommes allés regarder quelques points biographiques qui Exit la minijupe (snif), place au short et donc retour dans les ont fabriqué cette aura. années 70, dont nous vient cette géniale inspiration. par Marlène Van de Casteele par Florence Tétier – p. 54 – Mood Board – p. 22 – Images – p. 66 – Commissariat Les images de mode masculine ont une rhétorique connue (le Mâle Aurélie Voltz est discrète, mais elle fait son chemin dans différentes ou l’androgyne). Que se passe-t-il quand le couple de photographes institutions, entre Paris et Berlin. Son approche intuitive provoque du moment s’y colle avec la campagne Lanvin ? une singularité dans ses accrochages et des propositions par Céline Mallet inattendues. par Emmanuelle Lequeux – p. 24 – Interview Etat des lieux de la photographie avec le commissaire Hervé Mikaeloff, dans un système où marché, mode et art devaient Portfolio d’Audrey Corregan & Erik Haberfeld – p. 60 – Nathalie D. redéfinir les règles. par Cédric Saint André Perrin – p. 72 – Projection Même si l’individualisme en est la partie visible, c’est la solidarité et le contrat qui fondent une société. Démonstration. – p. 28 –Flamboya par Sylvain Ohrel Portfolio Viviane Sassen – p. 38 – Off record – p. 74 – Points de vue Bien qu’on passe tout notre temps médiatique à parler d’iPad, Une exposition de photographie et trois visiteurs qui se croisent de Kindle, d’e-books, les livres continuent d’être publiés, y compris sans se voir, mais n’en pensent pas moins. ceux de photo, dont l’économie reste toujours mystérieuse. par Rachel Nullans Le moment d’en évoquer les mécanismes et ressorts, à visage couvert. par Angelo Cirimele Voilà, un magazine des années 30 qui servait l’image. – p. 76 – Rétrovision par Pierre Ponant – p. 42 – Hunting and Fishing Portfolio de Paul Kooiker – p. 50 – Design La maison, rien de plus banal et terre à terre. Et pourtant, elle est l’enjeu de déplacements symboliques, de mode et de modes de vie, qu’on pense préempter. par Pierre Doze DIGITAL LAB - JANVIER.FR sommaire – p. 79 – Agenda – p. 82 – Adresses p. 6 p. 7 5 nominés, 1 seul vainqueur #55 canal + Prix du Client de l’année 2009 Directeur édiorial ANGELO CIRIMELE Directeur artistique de ce numéro ERIK HABERFELD AUDREY CORREGAN audreycorregan.com, PAUL KOOIKER paulkooiker.com courtesy Galerie Van Zoetendaal, Amsterdam, VIVIANE SASSEN vivianesassen.com Photographies PIERRE DOZE, EMMANUELLE LEQUEUX, CÉLINE MALLET, RACHEL NULLANS, MATHIAS OHREL, SYLVAIN OHREL, PIERRE PONANT, CÉDRIC SAINT ANDRÉ PERRIN, Contributeurs FLORENCE TÉTIER, MARLÈNE VAN DE CASTEELE Traduction KATE VAN DEN BOOGERT Design original YORGO TLOUPAS Couverture PAUL KOOIKER SUISSE SANS ET SUISSE TEXT — BP FOUNDRY bpfoundry.com, LYDIAN BT bitstream.com Typographie Remerciements MAXIME BUECHI, PATRICIA DOUKAN, NATHALIE DUBUISSON, FUNNY BONES, SYLVAIN FOULON Secrétaire de rédaction ANAÏS CHOURIN Imprimeur SIO-94120 FONTENAY-SOUS-BOIS Editeur ANGELO CIRIMELE Email [email protected] Correspondance ACP 32, BD DE STRASBOURG 75010 PARIS, +33 (0) 616 399 242 Abonnement/Subscription MAGAZINE EST GRATUIT, MAIS VOUS POUVEZ AUSSI LE RECEVOIR CHEZ VOUS OU AU BUREAU Abonnement France 1 AN / 5 NUMÉROS / 40 EUROS Abonnement hors France 1 AN / 5 NUMÉROS / 50 EUROS ENVOYEZ VOTRE RÈGLEMENT EN CHÈQUE À L’ORDRE D’ACP À L’ADRESSE SUIVANTE : ACP – Magazine 32, boulevard de Strasbourg 75010 Paris you are what you read Le Club des Directeurs Artistiques remet pour la première fois le Prix du Client de l’année. Les nominés étaient Canal +, Louis Vuitton Malletier, Sécurité Routière, Sonia Rykiel pour H&M, TF1. Merci à tous les clients audacieux, innovants, volontaires... p. 8 Dans la série « les top models sont aussi des designers », Natalia Vodianova, qui dessinait déjà sa ligne de lingerie pour Etam, va cette fois collaborer avec le diamantaire De Beers pour une collection prévue pour cet été. De son côté, Audrey Marnay dessinera une collection printemps-été pour Claudie Pierlot, en 2011. In the series ‘top models are designers too’, Natalia Vodianova, who already has a lingerie collection with Etam, will collaborate with De Beers diamonds, for a collection out this summer. And Audrey Marnay is to design a summer collection for Claudie Pierlot in 2011. Le quotidien payant de Bolloré devrait paraître en juin. Bolloré’s newsstand daily should be out in June. Une rétrospective Tsumori Chisato serait en préparation, pour fêter les 20 ans de la marque, dans un lieu qui ne serait pas encore défini. A Tsumori Chisato retropective is in the pipeline, to celebrate the brand’s 20th birthday, in a venue that has yet to be confirmed. Le festival de l’affiche de Chaumont (du 31 mai au 30 juin) accueillera une exposition de H5 avec la projection du film Logorama, mais aussi un cimetière de logos, tombés sur le front de la guerre économique. The Chaumont poster and graphic design festival (31 May-30 June) will include an exhibition by French design collective H5 featuring a projection of their film Logorama, but also a cemetery of logos, fallen on the front of the economic crisis. La cité de la mode de Marseille a inauguré une Maison de la création, qui accueillera les 7 lauréats d’un concours ouvert aux jeunes créateurs des pays méditerranéens, pour les accompagner dans les différentes étapes de la création d’une collection. Infos sur citemedmode.com Marseille’s fashion institution has opened a ‘Maison de la Création’, which will welcome 7 winners of a competition open to young designers from Mediterranean countries, in order to accompany them through the different stages of the creation of a collection. More information on citemedmode.com Maintenant que tous les journaux papier ont leur site Internet, c’est au tour des sites de penser à leur version papier : après la tentative chaotique de Bakchich et les incursions de Mediapart, c’est Rue89 qui va lancer son mensuel Revue89, dès juin. Now that all newspapers have their website, it’s the turn of websites to reflect on a paper version: after the chaotic attempts by Bakchich, and the incursions from Mediapart, Rue89 are launching the monthly Revue89, from June. 2010 semble placée sous le signe de la grande conso pour Karl Lagerfeld, qui enchaîne les collaborations : après le design de la bouteille de Coca Cola Light, c’est pour Optic 2000 qu’il dessine une ligne de lunettes (solaires et optiques), disponible dès juin. 2010 is a mass market year for Karl Lagerfeld who is ratcheting up collaborations: following the design of the Coca Cola Light bottle, he’s now designing a collection of glasses (sun and corrective) for Optic 2000, available from June. Un livre consacré aux photographes Inez van Lamsweerde et Vinnodh Matadin paraîtra à la rentrée (Steidl). A monograph on photographers Inez van Lamsweerde and Vinnodh Matadin will be published in September (Steidl). p. 9 Alors qu’il a été nommé à la tête du musée Galliera, Olivier Saillard prendra son temps pour élaborer sa programmation : première exposition attendue en 2012. Though he has already been elected director of the Musée Galliera, Olivier Saillard is taking his time developing his programme: the first exhibition is expected for 2012. Un nouveau festival de photographie verra le jour à Deauville début novembre : « Planches contact » présentera une exposition de Lise Sarfatai et de Charles Fréger, ainsi qu’une commande sur la ville, passée à 5 étudiants de l’Ecal (Lausanne). A new photography festival is launching in Deauville at the start of November: ‘Planches Contact’ will present an exhibition by Lise Sarfatai and Charles Fréger, as well as a municipal commission to 5 students from ECAL (Lausanne). Après Martin Margiela, c’est Jean-Paul Gaultier qui va aménager la suite Elle Déco de la Cité de l’architecture. À l’opposé du rush des collections semestrielles, c’est un projet qui s’inscrit dans le temps : jusqu’en octobre 2011 ! Following Martin Margiela, JeanPaul Gaultier is to decorate the Elle Déco suite at the Cité de l’Architecture. In contradiction to the rush of the twice-yearly collections, the project will continue until October 2011! Le nouveau DA de Télérama est Loran Stosskopf (DA de Magazine #39). Premières inflexions graphiques attendues à la rentrée. Télérama’s new Artistic Director is Loran Stosskopf (AD of Magazine #39). First graphic inflections are expected for September. Après des passages par Jalouse puis DS, Elisabeth Lazaroo arrive à Paris Match, en charge de la rubrique Style de vie. After stints at Jalouse then DS, Elisabeth Lazaroo joins Paris Match, in charge of the Life style section. On pourra découvrir (et acquérir) près de 200 dessins de Sonia Rykiel à la galerie Catherine Houart (6e), du 4 juin au 24 juillet, alors qu’une nouvelle ligne Rykiel sera dessinée pour H&M et également commercialisée en juin. One can discover (and buy) almost 200 drawings by Sonia Rykiel at the Catherine Houart gallery (6th), from 4 June-24 July, while a new Rykiel line from H&M will also be on sale in June. Suivant l’exemple de Fantastic Man, qui a proposé une déclinaison féminine avec The Gentlewoman, Fairy Tale vient de publier Madame Fairy Tale. Infos sur vier5.de Following the example of Fantastic Man, which proposed a version for women readers with The Gentlewoman, Fairy Tale has just published Madame Fairy Tale. More information on vier5.de Après avoir mis fin à leur aventure sous forme de magazine, les éditeurs finlandais de Kasino A4 reviennent avec un livre : Kasino Creative Annual, ouvrage thématique (premier numéro sur les cheveux…). Infos sur wearekasino.com After having ended their adventure in magazine form, the Finnish editors of Kasino A4 are back with a book: Kasino Creative Annual, a thematic publication (first issue on hair…). More information on wearekasino.com Le logo de Marithé+François Girbaud ferait l’objet d’un lifting ; à voir dans les visuels de la prochaine campagne. Marithé+François Girbaud’s logo is getting a makeover; the new version will be visible in the next campaign. Le bureau de style Nelly Rodi présentera fin juin une installation dans le pavillon Paris Ile–de-France de l’exposition universelle de Shanghai et organisera le 8 juillet une journée de l’innovation à l’Ecole du Louvre. Trend agency Nelly Rodi will present an installation in the Paris Ile-de-France pavilion at Shanghai’s world expo in late June, and will organise an ‘innovation day’ at the Ecole du Louvre on the 8 July. Le Renard, nouveau lieu parisien et nocturne a été récemment inauguré. Ancien cabaret art déco, ce restaurant karaoké a le mérite de ne pas fermer ses portes avant 5 heures et d’être central : 12, rue du Renard (4e). A new Parisian nightspot Le Renard has recently opened. Formerly an Art Deco cabaret, this karaoke restaurant has the advantage of staying open till 5am and a central location: 12, rue du Renard (4th). La prochaine édition du festival Evento à Bordeaux sera confiée au commissaire italien Michelangelo Pistoletto. Rendez-vous à l’automne 2011. The next edition of the Evento Festival in Bordeaux will be headed by Italian curator Michelangelo Pistoletto. See you there in autumn 2011. Un nouveau catwalk a fait son apparition en mai : le tapis rouge de Cannes. On a pu voir pour la première fois des modèles de robes Gucci plus proches de la couture que du prêt-à-porter. Le phénomène donnera lieu à une ligne « Gucci Première », pour laquelle aucun défilé n’est prévu, puisque la presse reprend si largement les images de la montée des marches… Le calendrier Pirelli 2011 sera photographié par Karl Lagerfeld. The Pirelli calendar 2011 will be shot by Karl Lagerfeld. A new catwalk appeared in May: the red carpet in Cannes. Gucci dresses closer to couture than to prêt-à-porter appeared there for the first time. The phenomenon has produced a new line ‘Gucci Première’, for which no catwalk presentation is planned, since the red carpet receives such wide press coverage anyway… C’est le 28 juin que sera connu le (riche) lauréat de l’Andam, dont la bourse s’élève à 220 000 euros. Le choix sera opéré sous le haut patronage de Carine Roitfeld et Renzo Rosso, entre autres… The (wealthy) winner of the Andam Prize, with its purse of 220,000 euros, will be announced on 28 June. The selection will be made under the patronage of Carine Roitfeld and Renzo Rosso, amongst others… Une nouvelle biennale va voir le jour à Dublin en juin 2011. Quatre commissaires : Christine Macel, Hans Ulrich Obrist, Okwui Enwezor et Rachel Thomas, pour une édition consacrée au silence. A new biennale will open in Dublin in June 2011. Four curators: Christine Macel, Hans Ulrich Obrist, Okwui Enwezor and Rachel Thomas, and an edition dedicated to silence. Le Détail en typographie, de Jost Hochuli, est le premier d’une série de textes consacrés au design graphique que les éditions B42 vont publier. Infos sur editions-b42.com Le Détail en typographie, by Jost Hochuli, is the first in a series of texts dedicated to graphic design that the Editions B42 are soon to publish. More information on editions-b42.com Après le rachat de l’agence Art + Commerce, l’agent de mannequins IMG devient le partenaire privilégié des « Paris Fashion Days », un salon organisé par Prêt A Porter Paris et qui se tiendra au Palais Brongniart (la Bourse) les 4 et 5 juillet. After buying the agency Art + Commerce, the modeling agency IMG is to be the exclusive partner of ‘Paris Fashion Days’, a trade fair organised by Prêt A Porter Paris, and which will take place at the Palais Brongniart (the Bourse) on 4-5 July. Le Jeu de Paume publie son magazine en ligne, essentiellement constitué de prolongements des diverses activités du lieu. jeudepaume.org/lemagazine The Jeu de Paume is publishing an online magazine, essentially composed of extensions of the museum’s diverse activities. jeudepaume.org/lemagazine Bice Curiger, la curatrice zurichoise et éditrice de Parkett, sera la commissaire de la prochaine biennale d’art de Venise (2011), où la France sera représentée par Christian Boltanski sous un commissariat de Jean-Hubert Martin. Bice Curiger, the Zurich curator and editor of Parkett, is the curator of the next Venice Biennale (2011), where Christian Boltanski will represent France under the curatorship of JeanHubert Martin. La manifestation « Monumenta » pourrait se doter d’un directeur artistique et quitter le Grand Palais. ‘Monumenta’ may take on an artistic director and quit the Grand Palais. I Heart Magazine est un nouveau trimestriel dont le concept est d’envoyer dans une ville rédacteurs et photographes pour y réaliser le contenu du numéro. Première escale : Austin (Texas). Le projet est porté par Eleonore Klar (ex-Modzik) et Bastien Coulon. Rendezvous en kiosque fin juin. brèves I Heart Magazine is a new concept magazine (trimestrial) which sends its journalists and photographers to a different city to produce the content for each issue. First stop: Austin (Texas). Eleonore Klar (ex-Modzik) and Bastien Coulon are behind the project, on newstands in June. Rappel de quelques mouvements : Martin Bethenod a quitté la Fiac pour le Palazzo Grassi et la vénitienne pointe de la Douane, laissant la direction de la foire à Jennifer Flay ; Stefano Tonchi a quitté T, le supplément style du New York Times, pour la rédaction en chef de W, dont les équipes devraient être renouvelées. Reminder of a few changes: Martin Bethenod has left the FIAC for the Palazzo Grassi in Venice, leaving the direction of the fair to Jennifer Flay; Stefano Tonchi has left T, the New York Times’ style supplement, for editorship of W; expect the editorial teams to change at both publications. Le municipal musée Carnavalet proposera en octobre une exposition sur l’histoire de la maison et de la famille Vuitton : malles, bagages et joie du voyage… In October, the municipal museum the Carnavalet will present an exhibition on the history of Vuitton, the brand and the family: trunks, bags and the joy of travel… Une boutique éphémère Carven sera installée chez Didier Ludot, dans les jardins du Palais Royal, du 6 juillet au 31 août. A pop-up Carven store will set up in Didier Ludot, in the gardens of the Palais Royal, from 6 July31 August. p. 10 The Gentlewoman p. 11 – Fantastic Man faisant l’interview d’Amanda Lear faisait preuve d’humour et d’à-propos –, et la succession des sections cherche la démonstration. Les textes sont intéressants sans être renversants ; C’est peut-être un cadeau empoisonné que de se voir proposer dommage, car la médiocrité des propositions sur ce segment de de créer le pendant féminin de Fantastic Man – référence de presse nous avait fait attendre un peu plus d’audace. Côté forme, ces cinq dernières années dans la presse de style. Pourtant, le des idées brillantes donnent du souffle à ce premier numéro : la layout est toujours élégant, avec une idée de cadre virtuel en typo série « Cruising » rassemble des portraits serrés, au téléobjectif, de (rubrique, titre, folio), le noir et blanc est toujours bien représenté, femmes se retournant ; une collection de chignons en noir et blanc ; même si le papier mat a fait place au satin. Mais une entêtante des natures mortes délicates et précises. Deux autres sections sensation de sécheresse se dégage de The Gentlewoman, attirent aussi l’attention : « Several referencies », un cahier de notes confirmée par une série mode en salle de musculation des plus de 8 pages fonctionnant comme un commentaire du magazine, et glaçante. Selon le même principe que son prédécesseur masculin, « Tips », 3 pages de texte dans lesquelles des people livrent une The Gentlewoman est une galerie de femmes remarquables : idée de cadeau. Il est intéressant de noter que ces deux sections Phoebe Philo, Jenny Holzer, Kazuyo Sejima (curatrice de la de textes courts se trouvent en milieu et fin de magazine et non prochaine biennale d’architecture de Venise) et bien d’autres. Mais plus au début, jouant le rôle d’apéritif, signifiant que le rythme des l’absence caractérisée d’hommes dans le paysage n’apporte rien magazines (semestriels au moins) est en train de changer. Angleterre, semestriel, 144 p., nº 1, 230 x 300 mm, 7,50 euros. Editor in chief: Penny Martin Creative director: Jop Van Bennekom Fashion director: Jonathan Kaye Associate editor: Gert Jonkers Publisher: Top Publishers. thegentlewoman.com Extrait Princess Julia has been out every night for the past 34 years The beloved mother of London’s underground, Princess Julia has moved seamlessly through every important scene since punk, witnessing every high and low. Julia is a DJ of a rather uplifting nature who knows just how to entertain a dance floor with her fun, unselfconscious sets. She is also the co-editor of her own music fanzine, The P.i.X, an innovative monthly freesheet that folds out into a poster. But Julia’s role in the demimonde is much broader than all this. Fantastically good company, she constantly encourages and nurtures those who wish to follow her very individual example, maintaining a curiosity for new talent and for those who aspire to be something other than the norm. Julia is an extraordinary raconteur who knows how to wield a loaded pause to devastating effect, and she has recently taken to the stage and started spoken-word performances. In fact, her life story is so hysterical that there is a talk of it being made into a musical. A classic of her own design, Julia is never without a fully made-up face. My first memory of Princess Julia is at a Buzzcocks gig at the Lyceum of the Strand, maybe late ’77 or early ’78. I was standing with Tracie O’Keefe and Debbie Wilson from Seditionaries when Julia walked past. The notoriously scrappy Tracie aimed a kick at her arse. I figured it was something to do with London’s punk hierarchy. The Seditionaries girls were queen bees, Julia was an arriviste. Or maybe not. Turns out she was best friends with Kiki, who was going out with Paul Cook, the Sex Pistol’s drummer. Anyway, Julia clearly irritated Tracie, so she stood out for that. […] Tim Blanks, p. 95 p. 12 Foam p. 13 En tout huit portfolios, qui sont autant d’acceptions du même thème. La photographie de Foam n’est pas celle de l’actualité, au sens des magazines des années 70 et de ses grands reporters, mais son Quand un musée projette de publier un magazine, le contenu approche ouvre des fenêtres sur la contemporanéité, faisant le semble tout trouvé : les expositions que propose le lieu, pari que seules de nouvelles formes et écritures photographiques agrémentées de textes critiques. C’est cette formule qu’avait pourront rendre la complexité du monde présent et encore choisie Foam, le musée de la photographie d’Amsterdam, mais indéchiffré. Foam aime aussi les jeunes (photographes) et propose il l’a abandonnée dès le 3e numéro. Depuis, le magazine est un un concours annuel dont les lauréats seront ensuite publiés espace en soi, pensé de manière curatoriale, comme un espace dans le numéro « Talents ». Conçu à Amsterdam, le magazine en deux dimensions – la publication n’étant pas la plus mauvaise n’oublie pas d’être aussi un objet, alternant les papiers au gré des manière de montrer la photographie –, réunissant autour d’un portfolios. Choix éditorial ou pure fantaisie ? Un peu des deux, plus thème propositions photographiques et textes critiques. Dans ce un deal avec un papetier qui comprend la mention des différents 22 numéro, le thème « Peeping » (ou Epier) combine des captures papiers utilisés, constituant ainsi la page la plus regardée par les d’écran du site Google Maps, figurant aussi des passants (et graphistes… Encore une idée de publicitaire ? Absolument, car c’est reposant la question : qui est le photographe ?), des images de la une joint venture entre Vandejong, une agence de pub, et le musée police secrète tchèque, d’autres de soldats américains endormis… Foam, qui a mis au point le magazine. Sinon, en France, il y a De l’air e et Polka – mais c’est parce qu’on aime trop les années 70… Pays-Bas, trimestriel, 220 p., nº 22, 230 x 300 mm, 17,50 euros. Editor in chief: Marloes Krijnen Editorial adviser: Kathy Ryan Creative director: Pjotr de Jong Editors: Marcel Feil, Pjotr de Jong, Marloes Krijnen, Sara Despres Publisher: Foam magazine. foammagazine.nl Extrait Olga Sviblova on Rebuilding a National Identity A philosophy and psychology graduate, Moscow-born Olga Sviblova, became the Director of the Moscow House of Photography in 1996. She organizes numerous photography shows at the House every year and has established an ever-growing archive of Russian photo art that now contains over 80,000 original prints and negatives. Sviblova has curated countless shows including the Rodchenko exhibition at the Hayward Gallery in 2008 (on view at Foam Fotografiemuseum in Amsterdam until 17 March) and has organized the international festivals Photobiennale and Fashion and Style in Photography in Moscow every two years since 1996. The Rodchenko Moscow School of Photography and Media Arts, which was launched in 2006 was her brainchild. In June 2010 the Moscow House of Photography will be moving to a new location – an 8,500 square metre building on Ostozhenka Street in the centre of Moscow. —You studied philosophy and psychology and were a street sweeper for a few years in your twenties; now you are the director of the Moscow House of Photography. Quite a path – when did you first get interested in photography? —I’ve been involved with Russian underground artists since 1982-83. I was a curator to begin with and then made two documentary films. The first one was about Konstantin Melnikov, a Russian architect, in 1986. […] Anne-Céline Jaeger, p. 22 p. 14 p. 15 ou même Frédéric Chaubin esquissent la richesse du thème et Exit l’évolution des enjeux de sa représentation. Quelques essais viennent nourrir la réflexion et ont la bonne idée de livrer une Exit a aussi choisi le principe thématique pour rassembler de version anglaise en plus de l’espagnole. Basée à Madrid, Exit est (longs) portfolios de photographie contemporaine. D’une approche une revue internationale tant par le choix de ses contributeurs que plus classique et peut-être plus universitaire qu’audacieuse par son comité scientifique. Grâce à quelques subventions (comme éditorialement, Exit n’en demeure pas moins une publication chaque magazine de photo), Exit paraît deux fois par an, depuis à retenir. Exemple avec ce deuxième numéro consacré à près de vingt ans, et publie aussi des livres. l’architecture, cette fois à travers le regard des artistes. Le magazine en fait l’occasion de problématiser ce point de rencontre entre photographie et architecture : la taille du représenté, de l’objectivité au motif, de la maquette au bâtiment… les approches aussi variées que celles de Gabriele Basilico, Thomas Demand Espagne, semestriel, 192 p., nº 37, 210 x 260 mm, 27,45 euros. Editor: Rosa Olivares External editor: Sergio Rubira Advisory committee: Celia Diez Huertas, Marta Gili, Felipe Hernandez Cava, Martha Langford, Alberto Sanchez Balmisa, Urs Stahel, Paul Wombell Publisher: Olivares & associates. exitmedia.net Extrait Media as modern architecture Thomas Demand sees the media as architecture, in his words “as a vast landscape, a virtual domain with its cities of scandals, its towers of superstars, and its marsh of murders.” This may explain why he builds it, why he takes images from the world of the media – photographs of crime sites, most notably – and builds them as full-scale constructions in paper and cardboard, strong enough to stay up only until the photograph is taken, after which he destroys the original model. The new photographs join the media world that originated them. A forensic image of the German politician Uwe Barschel, found dead, fully dressed, in the bathtub of a hotel in Geneva and published on the cover of Der Stern in 1987, becomes Demand’s photograph Badezimmer of 1997; the hallway leading to serial killer Jeffrey Dahmer’s apartment in Milwaukee becomes Flur (1995); the tunnel in Paris where Princess Diana and Dodi Al-Fayed were killed in 1997, which was repeatedly photographed and televised worldwide, becomes the site for Tunnel (1999), a two-minute 35-millimeter film loop; a security-camera image of an escalator in London that was passed by muggers before they committed a murder becomes Rolltreppe (2000); a press photograph of the presidential election recount in Palm Beach Country, Florida, on the 16th of November 2000, becomes the photograph Auszählung (2001); the kitchen in Saddam Hussein’s hideaway house in Tikrit, Iraq, becomes Küche (2004); and so on. […] Beatriz Colomina, p. 128 p. 16 Portfolio p. 17 ou de la publicité. Pour fêter ce cinquantième opus, Portfolio demande à autant de photographes une double page de leurs plus récents travaux, ce qui donne lieu à un tour d’horizon créatif En l’espace de vingt ans, la pratique, la fonction et l’impact social (et insulaire), sur un papier parfaitement imprimé. Quelques de la photographie ont considérablement évolué. De la presse textes critiques offrent une perspective à l’histoire récente, papier à Internet, du reportage à la mode, de l’argentique au notamment trois lectures de la même exposition charnière « Three numérique… ce 50 e numéro de Portfolio vise à faire le point. Publié Perspectives on Photography: Recent British Photography », à Edimbourg, c’est avant tout le magazine de la photographie qui a eu lieu en 1979 à Londres. Dans son approche assez britannique, qu’elle appartienne à la famille de l’art, du reportage classique, Portfolio rappelle que si les images sont peut-être le bien qui circule le plus aisément aujourd’hui, c’est l’ancrage des Ecosse, semestriel, 128 p., nº 50, 245 x 295 mm, 16,75 euros. Editor: Gloria Chalmers Design: Patricia Bartie Publisher: Portfolio Photography Workshop. portfoliocatalogue.com Extrait Changing Perspectives Thirty years ago, London’s Hayward Gallery held its first survey show of British photography. Entitled ‘Three Perspectives on Photography’, it brought together work of a broad and diverse nature and, although not the first major photography show at the gallery, it was the first to provide an overview of contemporary British photographic practice. It was 1979, a year of significant political and social change. The USA and China had re-established full diplomatic relations, whilst John Paul II visited his native Poland becoming the first Pope to visit a Communist country. In Cambodia the murderous regime of Pol Pot and his ‘killing fields’ came to an end. Ayatollah Khomeini seized power in Iran. Egypt’s President Sadat and Israel’s Prime Minister begin signed a peace treaty. Idi Amin fled Uganda. A blackled government took power in the former Rhodesia, and the Sandinistas assumed control in Nicaragua, whilst Margaret Thatcher was elected Britain’s first woman Prime Minister. In Iraq, Saddam Hussein became President and in Iran the hostage crisis began. It was a watershed period, a time of transition. The generation raised in the 1960s was now able not just to react to the dominant culture but to begin to shape it from within, particularly in media and the arts. And whilst the Hayward show may pale in significance against such a maelstrom of world events, it was an interesting and important marker of the transitional state and status of photography within British visual culture. It confirmed that a point has been reached, a stopping-off point on a journey – not a destination. The show’s disparate content was strongly indicative of the shifts within British society which had fed through into the cultural agenda during the decade. Photography was already showing itself as an art form that could respond effectively at both aesthetic and issue-based levels. And the way in which it was being created and critiqued was in the process of change. Paul Hill, one of the show’s curators, has described the response: “Because of its diverse perspectives – political and artistic – it did leave its mark on those who regarded the medium’s plurality as its greatest asset…” […] Dewi Lewis, p. 112 photographes dans une réalité (locale, donc) qui leur procurera un regard singulier. p. 18 I like my style p. 19 avec un appareil photo numérique, un peu de temps et une envie de partager sa passion du style. Le process est très participatif (chaque contribution est signée d’un username, qu’on peut donc Depuis quelques mois, les signes avant-coureurs du mouvement retrouver sur le réseau) et le résultat, foisonnant. Ça aurait pu « les people, ça commence à bien faire » se sont déjà manifestés à ressembler à un bric-à-brac, mais Alex Wiederin a dû mettre un travers quelques magazines (comme Pop) et autant de campagnes peu d’ordre et probablement organiser la fantaisie des typos. Donc, de publicité (comme Céline), comme exposé dans Magazine no 54. beaucoup de spontanéité, pas mal de textes, mais surtout l’opposé Et I like my style vient apporter sa pierre à l’édifice. Passé le titre, du glamour fabriqué au kilomètre par les Vogue et autre Bazaar. fier et autoréférent, un « this could be you ! » trône au centre de la On avait failli oublier que la rue pouvait être créative, quelque couverture et donne le ton. Ce trimestriel de 260 pages fonctionne part entre Balenciaga et H&M. Soyons précis : il ne s’agit pas de comme une série de collections : des looks urbains, des hobbies, la version trimestrielle d’un énième Sartorialist ou Facehunter, des critiques (de séries mode !) et pas mal de mots. Serait-on qui traquent les silhouettes les plus lookées au sortir des défilés, revenu au ID des années 80, qui descendait dans la rue Nikon en mais bien des gens qui s’habillent avec un certain soin, sans être main pour documenter l’inventivité des jeunes londoniens ? Pas fashion victims pour autant. Un dernier twist : I like my style va de la exactement, mais ça en a le goût et en est probablement la version nouvelle technologie (le blog) vers l’ancienne (le papier) ; le résultat moderne. I like my style est avant tout un « réseau », c’est-à-dire un est surprenant et risque de faire vieillir pas mal de publications, si blog alimenté par moult… comment dire… gens comme vous et moi, le mix fraîcheur + information reste à ce niveau. Allemagne, trimestriel, 264 p., nº 1, 165 x 240 mm, 12 euros. Editors in chief: Eva Munz, Adriano Sack Art director: Judith Banham, Middlecott design Creative toublemaker: Alex Wiederin Publisher: Ilikemystyle. ilikemystyle.net Extrait My boyfriend’s wardrobe Oslo, Saturday, January 30 , 2010, 8:30am I am sitting in the business class lounge in the Oslo airport waiting for my flight back to New York and emailing my boyfriend, Mark Jan Krayenhoff van de Leur, who is quite definitely still asleep in our Chelsea apartment. It is just about this time that the clubs in west Chelsea get out, and no doubt there are some loud drunken vocalizations in the street that will cause him to stir in his sleep and will perhaps wake him completely. I imagine him sitting up on the edge of the bed, naked, and it is in this state-undressed and groggy, with his long white beard feathering down his chest-that he lends himself to this, my tale of his very particular approach to fashion. I first read Roland Barthes’ Système de la mode circa 1972 in French, as it had not yet been translated into English, and I have to say it was the title that excited me more than the length book itself. It’s a title that is ideally suited to Mark and his relation to his clothes. Mark has two seasons: summer and winter; and two forms: office and casual. There are no items ofclothing that coexist between business and casual, although there is the occasional piece of clothing shared by winter and summer. It is the office attire that most concerns me here. An outfit is like a sentence, perhaps even a paragraph. It is constructed from a suit and a shirt, punctuated by a tie and shoes, and joined by belt and socks. Summer consists of eight suits and winter consists of eighteen. […] AA Bronson, p. 52 Texte, Marlène Van de Casteele p. 20 Harald Szeemann 1933 – Naissance à Berne. 1953 – Etudiant dilettante à Berne puis à Paris, il ne sait que choisir entre la musique, la littérature, l’archéologie, le journalisme, la pataphysique et le théâtre — « J’ai fait le minimum, quoi ! » 1957 – De sa rencontre avec Arnold Rüdlinger, ex-directeur de p. 21 « … parce que voilà, il y avait Beuys qui mettait sa graisse dans les coins, Heizer qui défonçait les trottoirs, Weiner qui ôtait un mètre carré de mur à l’intérieur du musée, et ainsi de suite… » La Ville met donc un terme à ce « chaos structuré ». 1974 – Il se prend alors à rêver d’un monde sans institutions, 1985 – Son poste sur mesure de « curateur indépendant d’une agence sans structure juridique, d’un musée imaginaire… « Je permanent » désormais labellisé, il organise de grandes n’avais plus envie de reprendre une institution… Mais je voulais en expositions rétrospectives d’artistes dont il a depuis longtemps même temps continuer à faire des expositions. C’est comme ça soutenu le travail (Cy Twombly, Walter De Maria, Bruce Nauman…) que j’ai dû trouver des thèmes que j’étais le seul à pouvoir faire ! » et, poussé par son intérêt grandissant pour la sculpture, se met en Ainsi présente-t-il dans son appartement bernois (rebaptisé pour quête de lieux non institutionnels, de dimensions monumentales, l’événement « Galerie Toni Gerber ») « une chambre de torture au à investir : la chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière à Paris, service de la beauté » ; exposition obsessionnelle sur son grand- le Deichtorhallen de Hambourg, la Halle Tony Garnier à Lyon père coiffeur, génie de la mise en plis. « Grand-père, un aventurier permettent enfin aux œuvres de respirer… et de flotter dans les comme vous et moi », titre l’exposition, vecteur de subjectivité. airs, comme des « poèmes dans l’espace », se plaît à penser « le Si untel met toute son énergie dans la mise en plis, un autre dans faiseur d’exposition », dans son costume de metteur en scène. « Si la politique ou la littérature, Szeemann monte des expositions, ma vie était seulement d’aller, comme un jury, voir des millions de voilà tout. « Un musée des obsessions, on ne peut pas le faire, tableaux, et dire ça, ça me plaît, ça, ça ne me plaît pas... Non ! ça c’est un musée dans la tête… Donc tout ce que je fais, ce sont c’est de la mécanique ! Moi j’aime les détours de la pensée vécue des rapprochements par rapport à une chose qu’on ne peut pas pour arriver à une chose à la fois évidente et poétique… » la Kunsthalle de Berne, naît sa passion pour l’art contemporain. Par faire… » Pour aller au fond de sa pensée bouillonnante, il fonde une son intermédiaire, il se fait recommander auprès du Kunstmuseum agence pour le travail intellectuel à la demande (Agency Spiritual 1996 – Des expériences sensibles, presque spirituelles, des de Saint-Gall pour assurer le commissariat de l’exposition Guestwork), dont il est le seul « employé »… expositions-créations soumises à une véritable éthique de la « Peintres-poètes/Poètes-peintres », section contemporaine : « J’ai Berne, on avait très peu d’argent. […] C’était le moment vraiment commencé à faire des expositions plutôt par hasard. […] J’ai vu que de l’aventure, il ne s’agissait plus tellement de faire des expositions 1978 – Le temps des expériences existentielles a sonné. c’était pour moi un moyen d’expression idéal, parce qu’avant j’avais de tel ou tel, mais de travailler directement avec les artistes. » Indépendant, il peut jouer le jeu de l’offre et de la demande présente la réalité », clame-t-il dans son hymne à l’exposition, à sa guise, prêt à déposséder les expositions de leurs lieux Ecrire les expositions, qui recueille des dizaines de textes, proses institutionnels. Ce faisant, il s’affuble en saisonnier exportable, et poésies, produits pendant près de quarante années d’activité frénétique. fait du théâtre, j’écrivais des textes, je faisais de la musique, je profession : « Ma vie est au service d’un médium, et ce médium n’est pas l’image qui est elle-même réalité, mais l’exposition qui jouais, je faisais les décors, et ainsi de suite, mais ça m’emmerdait 1969 – « Naturellement, à un moment donné, en 69, avec au fond ! » “Quand les attitudes deviennent forme”, c’est devenu scandaleux proposant aux institutions des expositions clés en main, telles aussi pour la ville : parce que voilà, il y avait Beuys qui mettait sa « Les machines célibataires » et « Les mamelles de la vérité », graisse dans les coins, Heizer qui défonçait les trottoirs, Weiner premier et deuxième volets d’un triptyque mythologique. « C’était 2005 – Quarante années d’engagement inconditionnel, qui ôtait un mètre carré de mur à l’intérieur du musée, et ainsi de un nouveau type d’exposition, où on essayait de visualiser vraiment consacrées à dégager les résonances complexes qui peuvent 1960 – Après avoir soutenu sa thèse sur « Les débuts de l’illustration moderne du livre, par les Nabis », il est élu, six mois plus tard, directeur de la Kunsthalle de Berne — « J’ai été le plus suite… » La Ville met donc un terme à ce « chaos structuré ». Mais autre chose, un fonctionnement de l’esprit, un modèle à penser naître entre les œuvres, les artistes et les lieux, auront raison jeune directeur de musée du monde ! » Une structure de quatre la provocation a du bon : à peine le temps de savourer sa liberté et à vivre… » Après avoir initié une série d’expositions autour des de sa santé. Le « penseur sauvage » disparaît sans avoir pu personnes (une secrétaire à mi-temps, une caissière et un retrouvée, il se fait nommer par le maire de Kassel secrétaire utopies politiques et sociales présentes dans le canton du Tessin, il réaliser les deux expositions – « La Mamma » et « Il Sole » – qu’il concierge) où il se fait la main à raison de dix expositions par an ; général de la Documenta, session 1970-1972. « Au début, il se met à acheter (à ses frais) tous les documents trouvés au cours projetait depuis la fin des années 70 et qui auraient ainsi formé le tout pour un maigre salaire. Aussi doit-il prêter son cerveau à la voulait que je réorganise – pour faire quelque chose d’utile – les de ses recherches pour les exposer de façon permanente sur une une trilogie de thèmes fondamentaux (le célibataire, la mère, le galerie municipale de Bienne à raison de quatre expositions par an. archives, le centre de documentation… Mais après six mois, j’ai colline des utopies, que sera le Monte Verità, aujourd’hui mémorial soleil). « À travers ces histoires temporaires, j’ai fait des musées 10 + 4 = 14 : « Je ne sais jamais combien d’heures je travaille… ça dit que je pensais que c’était plus important de faire l’exposition. pour la paix. « J’ai dit bon, moi je fais mes musées, et si un jour qui n’existaient pas, des musées d’idées : pas des musées avec ne m’intéresse pas, il faut seulement que ce soit bien ! Je laisse les C’est après qu’ils ont trouvé ce titre de « secrétaire général ». J’ai il y a une sorte de jonction et qu’on veuille faire une sorte de centre des chefs-d’œuvre mais le chef-d’œuvre remplacé par ce qui est derrière le chef-d’œuvre ! » autres compter ! » 1963 – Tel est son secret pour faire d’un musée un centre de trouvé ça pas mal : c’est comme à l’ONU et au Parti communiste ! » culturel, eh bien à ce moment-là, au lieu de se rencontrer dans Après la Documenta, des démêlés avec les autorités municipales un Hilton idiot, le Monte Verità peut servir pour des symposiums, de Kassel – « Naturellement, il y a eu aussi des problèmes sur cette société idéale… Parce que c’était ça au fond : le musée création pluridisciplinaire, le sixième sens (détecteur de jeunes psychologiques, parce que c’était la première fois que cette comme moyen d’expression d’une exposition, pour montrer les talents) en plus… Joseph Beuys, Richard Serra, Daniel Buren, Sarkis grande exposition n’était pas faite par un comité mais organisée choses comme si la société idéale avait vraiment existé. » « Avec le – encore indésirables dans les autres musées – accrochent leurs par un seul responsable : alors pour pas mal de gens j’avais violé Monte Verità, tu as visualisé le bordel qu’on a dans la tête, nous, les « intensités d’intention » aux murs palimpsestes, avant d’envahir les les règles ! » – ainsi que des difficultés financières (il est accusé artistes – un jour on est végétarien, un jour on se saoule à mort, un rues de Berne (Christo et Jeanne-Claude emballent la Kunsthalle en d’être responsable d’un large déficit budgétaire que les autorités jour on est anarchiste, l’autre jour on est mystique, un jour on fait 1968). Monographies, thématiques de l’art brut ou de l’avant-garde, le somment de rembourser, le poussant à la faillite) confortent des mathématiques, un autre jour autre chose… », lui répond son mode, théâtre, design, cinéma, tout y passe... « À la Kunsthalle de l’encore employé Szeemann « Sans Musée Fixe » dans son intention ami Mario Merz. de sortir des sentiers battus. ◊ Citations extraites de Harald Szeemann, un cas singulier, entretien, Nathalie Heinich, Paris, L’Echoppe, 1995. biographie Texte, Céline Mallet p. 22 À propos d’un baiser POUR LA CAMPAGNE LANVIN HOMME PRINTEMPS-ÉTÉ 2010, LE COUPLE DE PHOTOGRAPHES INEZ VAN LAMSWEERDE ET VINOODH MATADIN DEVIENT AUTEUR ET SUJET, ET S’EXPOSE EN p. 23 Mais pour que l’homme intègre pleinement le cirque de la mode, il faut qu’il s’hystérise, qu’il accepte de devenir objet passif du désir. […] C’est de cette résistance dont parlent aussi les photographes. 1 bariolée, attire d’abord le regard, l’étrangeté monstrueuse dont elle se pare la repousse rapidement en un second plan d’irréalité. Et c’est pour mieux le faire apparaître lui, d’une part plus proche et tangible dans sa beauté, d’autre part éminemment singulier dans son désir, lui qui s’abouche avec cette créature à la séduction si peu consensuelle. Alors voilà, pour cet été 2010, Lanvin propose de l’homme une image tout à fait désarmante : celle d’un homme singulier et désirant au-delà des clichés, un homme un vrai, les épaules douces, ni caricature ni éphèbe, en coordonnées de noir mat et brillant, drapé dans un quant-à-soi inassignable. Pour tout sujet féminin qui se refuserait à rejoindre les armées de walkyries 2 bêtement offertes sur leurs talons trop hauts, cette résistance QUATRE IMAGES. ILS SE LIVRENT NOTAMMENT À UN SINGULIER feutrée et mystérieuse apparaît en dernière instance comme un BAISER, ASSEZ BRUTAL DANS LA FORME, MAIS QUI EN RAPPELLE privilège subitement enviable. UN AUTRE, QUE LE DUO PROPOSAIT DANS LES ANNÉES 90… saison au corps féminin. S’esquissent comme deux mondes … lorsque leurs créatures numériquement manipulées parallèles, à l’image – précisément pour la maison Lanvin – du commençaient à envahir galeries et pages de mode. Beautés discret Lucas Ossendrijver, sous l’ombre tutélaire du maître adulé hybrides, transgenres, glacées et glaçantes malmenaient alors et chouchou médiatique Alber Elbaz. Mais pour que l’homme la réalité des corps, interrogeaient les codes du glamour et de la intègre pleinement le cirque de la mode, il faut qu’il s’hystérise, qu’il beauté. Et pour l’image intitulée Me Kissing Vinoodh (passionately), accepte de devenir objet passif du désir : une tentation risquée ce qui aurait pu être la captation sensuelle de la romance du couple et à vrai dire bien peu en vogue selon les vieux, mais persistants, prenait des airs, via le trucage numérique, de double assassinat. réflexes culturels. C’est de cette résistance dont parlent aussi Seul le visage d’elle apparaissait mais littéralement dévoré, les photographes. Une autre image de la campagne montre amoché par le profil effacé de son compagnon l’embrassant, pour ainsi Vinoodh Matadin se cachant le visage de ses mains, sur une représentation plus qu’ambivalente du désir, et des rapports lesquelles est tracé grossièrement un sourire au bâton de rouge, masculin-féminin. signe « glamour » sarcastique venant bousculer la posture du ◊ photographe qui s’offre et se refuse à la fois. C’est au moins un même étonnement que suscite le « baiser » 2010, la sophistication du trucage en moins, l’effet théâtral en plus. Et si Il n’a pas tort d’hésiter. Car la plupart des campagnes publicitaires Vinoodh réapparaît, c’est dans un contraste franc : lui, la silhouette de mode résolvent par ailleurs assez mal l’affaire de la sobre et sombre, tandis qu’elle est prise dans le tourbillon d’une représentation masculine. Qu’y voit-on grosso modo ? Deux figures fantaisie expressionniste, le corps entièrement peint de magenta types, a priori contradictoires mais au fond complémentaires zébré de blanc. Corps comme écorché, ou épiderme consumé et aussi abstraites l’une que l’autre. Soit d’un côté l’hyper mâle au millième degré, profil rapace et cheveu noir de jais, Van dominant, hyper actif et bodybuildé, soit de l’autre un éphèbe pris Lamsweerde apparaît bien moins femme que démon femelle. dans un devenir jeune fille, un adolescent cultivant une douce Lui, en retour, reste humblement humain trop humain, et docile, androgynie, les yeux vagues, machine célibataire sous influence délicatement consentant face à cette harpie vorace et flamboyante. Gus Van Sant. Les tensions masculin-féminin, la mode peut Van Lamsweerde s’institue de fait en un drôle de faire-valoir qui encore les résorber sous le signe de l’androgynie lorsqu’elle fait flirte volontiers avec la laideur et l’effroi. mine de déployer un groupe mixte de très jeunes gens, mais dont 3 l’homogénéité lisse ramène l’un et l’autre sexe au même ; de Calvin Ce contraste théâtral peut s’offrir comme un commentaire de Klein à Givenchy, ces campagnes présentent plusieurs figures mais quelques réalités de mode. On se rappelle en effet que la mode pour un seul et même Narcisse, qui exclut de facto toute différence. masculine, et partant les codes du glamour masculin, reste encore et toujours en retrait par rapport à la mode féminine ; Il faut le reconnaître, rien de tout cela ne se passe dans cette que le vocabulaire de la mode masculine reste relativement image. Au contraire, puisqu’elle pense et exacerbe un écart, une pragmatique, eu égard aux reconfigurations fantastiques, différence de traitement assez radicale, qui plus est loin des fantasmatiques et spectaculaires que la mode fait subir chaque clichés habituels. Car si Van Lamsweerde, toute d’extériorité 1 Me Kissing Vinoodh (passionately) Inez Van Lamsweerde et Vinoodh Matadin 2 et 3 Campagne Lanvin Homme Printemps-été 2010 images p. 24 Propos recueillis par Cédric Saint André Perrin Hervé Mikaeloff p. 25 Certains photographes de mode n’ont-ils pas acquis une véritable légitimité artistique ? — À quelques rares exceptions près, pas vraiment. Inez Van Lamsweerde avait débuté une double carrière, art et mode, au début des années 90 – je pense d’ailleurs qu’elle avait quelque chose à dire artistiquement à cette époque –, mais lorsqu’elle a scellé sa collaboration avec Vinoodh Matadin, un ancien styliste, elle s’est focalisée sur la mode. Le cas de Wolfgang Tillmans est inverse : alors que ses premiers clichés de street style furent publiés dans ID, il prit par la suite la décision de devenir plasticien […] Mais, il faut bien comprendre que la valeur commerciale [publicitaire, ndlr] d’un photographe n’a rien à voir avec une quelconque cote sur le marché de l’art. amateurs parisiens. Des gens qui se rendant au spa, venant bruncher le week-end… pourraient « éventuellement » acquérir une œuvre en prenant le temps de la découverte. Quel est le profil type du collectionneur de photographie ? — Déjà, il y a très peu de collectionneurs spécifiquement attachés à la photographie. Et très peu de photographes prennent place dans les collections privées importantes. D’une façon générale, HERVÉ MIKAELOFF EST CONSULTANT EN ART ET COMMISSAIRE et délaissa, à quelques exceptions près, la mode. Philip-Lorca la photographie contemporaine intéresse principalement les D’EXPOSITION INDÉPENDANT. APRÈS DES DÉBUTS À LA diCorcia demeure un phénomène un peu à part : il a une place dans fondations, les entreprises et les banques. FONDATION CARTIER POUR L’ART CONTEMPORAIN, IL PARTICIPE l’art contemporain et collabore régulièrement avec le magazine AU LANCEMENT DE LA GALERIE EMMANUEL PERROTIN AVANT W pour des séries d’esprit cinématographique. Ce sont à ma DE S’OCCUPER DE LA COLLECTION DE PHOTOGRAPHIE connaissance les seuls à avoir quelque peu percé dans le domaine CONTEMPORAINE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS. IL CONSEILLE de l’art. AUJOURD’HUI LVMH À TRAVERS LA FONDATION LOUIS VUITTON ET DÉVELOPPE UN PROJET D’ESPACE D’ART AU SEIN DE L’HÔTEL ROYAL MONCEAU, QUI OUVRIRA À LA RENTRÉE PROCHAINE. IL AVISE ÉGALEMENT DE NOMBREUX COLLECTIONNEURS PRIVÉS DE PAR LE MONDE. Que penser alors de photographes qui, de Juergen Teller à Karl Lagerfeld en passant par Mario Testino, multiplient livres et expositions ? — Il existe peu de lieux d’exposition dédiés à la photographie à Paris… — Pourquoi cet intérêt de la part des grandes entreprises ? — Parce que c’est tout de même moins cher que la peinture et que ce médium se prête plus facilement à la communication. On peut Des lieux comme le Petit Palais ou l’Hôtel de la Monnaie présentent aisément utiliser une photographie pour illustrer un rapport annuel, de plus en plus de photographie, car ils ont compris qu’elle attire du voire une campagne publicitaire… c’est plus délicat avec une toile. public, mais leur pratique relève de l’événementiel. Côté musées, Les galeries sont devenues des sortes de vitrines pour les programmation et leurs expositions couvrent de larges champs Le numérique a bouleversé la donne… — photographes de mode. Ça fait chic d’exposer à New York les d’expression. À Paris, on manque surtout de galeries spécialisées Pour ma part, je pense que le passage de l’argentique au derniers clichés de Charlotte Rampling et compagnie shootées comme on en trouve à New York ou à Londres. Il existe une numérique a fait beaucoup de mal à la photographie. Dans la pub, nues dans les salles du Louvre. Mais même si ces clichés se clientèle qui s’intéresse à la photo, mais ces gens ne savent pas la DA ou la mode, bien sûr que le numérique se justifie, mais pas La photo a 150 ans et sa place dans le champ de l’art n’a eu de vendent entre 7 000 $ et 15 000 $, entre les frais de production et où aller. C’est la raison qui nous pousse à développer un espace en art. Le numérique permet certes de plus belles images, mais Quelle est la place de la photographie dans l’art d’aujourd’hui ? — le Jeu de Paume et la Maison européenne proposent une vraie cesse d’évoluer depuis le xix siècle. Elle a d’abord eu une influence la marge de la galerie, ils ne représentent pas la véritable source d’exposition largement ouvert à la photographie au sein du Royal en tant qu’œuvre cadrée, la photographie est morte. L’ADN de la majeure sur la peinture, libérant les impressionnistes de l’obligation de revenus de ces photographes. Ce genre de coup leur permet Monceau. Une galerie ouverte aux photographes issus de la mode, photographie d’art repose sur l’idée de compositions spécifiques, de réalisme, influençant certains peintres dans leurs sujets. plutôt d’entretenir une certaine image. Les tirages papier jouent de la pratique architecturale et, bien entendu, aux plasticiens. de tirages de qualité édités en petite quantité… Autant de choses Au début du xxe, cubistes et surréalistes utilisèrent des clichés d’une prétendue rareté de leur œuvre, alors que leurs clichés pour leurs collages… Le marché de la photographie demeura sont par ailleurs largement diffusés dans la presse et à travers la pourtant longtemps restreint à quelques amateurs. Il fallut publicité. Autant de données empruntées au système de l’art qui Une galerie dans un hôtel ? — attendre les années 80 que des artistes comme Cindy Sherman font fantasmer un certain public et permettent de valoriser des Oui, plutôt que de faire un « art hotel » classique en commandant adoptent les principes de composition des peintres pour que honoraires publicitaires. Mais il faut pourtant bien comprendre que des œuvres à des artistes dans une ambiance définie par un leurs photographies, pensées comme des œuvres, prennent de la la valeur commerciale d’un photographe n’a rien à voir avec une décorateur – comme on en trouve un peu partout à travers le L’avenir de la photo demeure-t-il indissociable de l’imprimé ? — valeur. La photographie explosa véritablement par la suite dans les quelconque cote sur le marché de l’art. monde –, nous avons décidé, avec Alexandre Allard, le directeur Oui et non. Certes, la photographie peut être diffusée à travers artistique du Royal Monceau, d’ouvrir une galerie et d’exposer des moult médias non imprimés (sites, blogs, etc.), mais pour qu’une pièces à travers l’hôtel, dans les suites par exemple. Ces œuvres photographie pénètre véritablement le marché de l’art et qu’elle seront à vendre à travers la mise en place de ce que nous appelons laisse une trace historique, il faut qu’elle soit vue dans des un « Art Concierge » ; un professionnel au fait du marché de l’art, en expositions, présentée dans des galeries… ce qui suppose des permanence présent pour guider les clients. tirages. Cet aspect exclusif est d’autant plus déterminant que je ne e années 90 lorsque nombre de collectionneurs, jusqu’alors attachés prit alors une importance prépondérante. Et le soufflé est un peu Certains artistes ont pourtant une valeur sur les deux marchés. — retombé juste avant la crise, il y a deux ans. Il est vrai qu’à force de médiatisation, d’expositions sexy et à la peinture, s’y intéressèrent. L’école de Düsseldorf, avec des artistes comme Thomas Ruff, Thomas Struth et Andreas Gursky, Pourquoi ce retournement de situation ? — de coups, quelqu’un comme David LaChapelle a acquis une justifiant la valeur des clichés. Peut-être pas tout de suite, mais à terme, je pense que les artistes reviendront vers l’argentique. photographie comme média – je pense à des gens comme Nan À qui pensez-vous vous adresser ? — On avait très certainement surestimé la place de la photographie ; Goldin – vivent davantage de leurs campagnes publicitaires que de Paradoxalement, nous ne tablons pas trop sur une clientèle tous les gens appuyant sur un déclencheur se disaient artistes. la vente de leurs tirages en galerie. internationale de passage à l’hôtel mais davantage sur des On ne savait plus très bien où étaient les frontières entre art, photographie et mode. véritable cote artistique. Mais la plupart des artistes utilisant la crois pas au e-commerce dans le domaine de l’art. interview p. 26 Comment envisagez-vous le futur de la photographie ? — Quand on voit qu’Irving Penn expose à la National Portrait Gallery de Londres et que Paris se prépare à accueillir une exposition Helmut Newton, force est d’admettre que la photographie continuera d’être relativement populaire. En revanche, je ne pense pas que ce média aura une place prépondérante dans le domaine artistique ces prochaines années. Le développement de nouveaux médias, Internet, iPad et consorts, ne mènera sans doute pas à une revalorisation de la Internet ne pourrait-il pas se révéler être un nouvel espace de découverte ? — p. 27 […] L’ADN de la photographie d’art repose sur l’idée de tirages de qualités, éditées en petites quantité… autant de choses justifiant la valeur des clichés. Peut-être pas tous de suite, mais à terme, je pense que les artistes reviendront vers l’argentique. Oui. Ce sont d’ailleurs des collectionneurs de mobilier vintage qui s’intéressent aujourd’hui à la photographie ancienne. C’est un phénomène nouveau, car le boom de la photographie est d’abord passé par des œuvres contemporaines plasticiennes. Le vintage n’a encore qu’une très faible cote ; elle ne peut donc qu’augmenter. Les tirages d’un artiste comme Pierre Molinier ne valent que quelque dizaine de milliers d’euros, alors que tout le monde s’accorde à le reconnaître comme une grande figure de la photographie. En peinture, pour 10 000 euros, on ne peut pas espérer acquérir une signature. Quelle échelle de valeur entre peinture et photographie ? — Difficile à dire. Disons que dans les catalogues de vente, les estimations varient de 1 à 20. Vingt fois plus pour de la peinture… Et Je différencie vraiment photographie et image. Les images, il y en a partout, mais je ne vois pas ce qu’un cliché vu sur un site ou sur un dans sa relation à la photographie. Hedi Slimane l’avait également encore, ce sont toujours les mêmes photographes qui passent en iPhone a d’artistique. Le Web demeure un médium de transmission, compris à ses débuts dans la photographie, quand il présentait salles des ventes. Seule une vingtaine de noms bénéficient d’une il ne crée pas de valeur. Entre une photo sympathique diffusée sur des systèmes de fragmentations en galerie – qui avaient très véritable cote. Facebook et un cliché majeur e-mailé en basse définition par une bien marché à l’époque. Mais pour des raisons économiques, son galerie : quelle différence ? Si on ne connaît pas l’œuvre originale, si travail a aujourd’hui davantage évolué vers celui de photographe de on ne connaît pas l’artiste, si on ne connaît pas sa cote : que peut- mode… on en penser ? Rien à attendre d’Internet, donc ? — De jeunes photographes ont-ils émergé sur la scène artistique ? — Des sites, des blogs diffusant des photos il y en a plein, mais je Peu. trouve surtout qu’ils les dévalorisent. Les images sont aujourd’hui Et le rapport entre photographie contemporaine et vintage ? — Une photo d’Andrea Gursky peut valoir plus d’un million de dollars, alors que l’on peut trouver de très beaux tirages d’époque de Man Ray à 150 000 $. Cela n’intéresse pourtant pas les mêmes clients… Pour des collectionneurs d’art contemporain habitués à de grands formats sur leurs murs, se retrouver avec des vintages de la centaines ou milliers de dollars pour avoir sur son mur un cliché Certains jeunes photographes vous touchent, pourtant… — juste en un peu plus grand que sur son iPhone. Et puis faire de très Les images hédonistes de Ryan McGinley me séduisent. Tout Sent-on poindre une reprise du marché ? — beaux tirages, avec une bonne imprimante, c’est tout à fait possible comme les portraits très formels, mais pourtant surréalistes, de Le marché de la photographie a plus souffert que le marché de de nos jours. Je ne suis pas certain que les gens fassent vraiment la Loretta Luxe, qui m’évoquent des visages de Goya ou Vélasquez. l’art. Les affaires reprennent, mais seuls quelques artistes sortent différence entre une impression laser et le tirage d’un labo. Comme Le questionnement sur l'identité sociale et individuelle développé leur épingle du jeu. Les grands ! Les clients sont à nouveau plus pour la musique ou le cinéma, beaucoup de photos sont aujourd’hui dans l’œuvre de Charles Fréger est vraiment intéressant. Mais en enclins à acheter de la peinture, car le marché est devenu plus en libre-service sur le net. terme de cote, il y a réellement un souci, car le marché est très conservateur. devenues tellement immédiates, si accessibles, si répandues, que je comprends qu’un collectionneur rechigne à payer des dizaines, Comment les artistes réagissent-ils à cette nouvelle donne ? — réduit en France. De nouveaux artistes pourraient certes émerger, mais pour ce qui est des transactions, je crois que l’on va surtout redécouvrir et revaloriser des travaux réalistes des années 50, des expérimentations picturales 70s ou postmodernistes 80. Wolfgang Tillmans a par exemple très bien compris que ce qui Des œuvres d’artistes qui n’ont pas vraiment de cote aujourd’hui. faisait le « plus », la force de son travail, ce n’était pas ses clichés Ou infime. en eux-mêmes mais le jeu de composition, de juxtaposition entre ses images. Ses œuvres relèvent de l’installation conceptuelle davantage que de la simple photographie. Il a su évoluer vers des choses plus plastiques. C’est sans nul doute un des plus malins taille d’une carte postale, c’est tout de même moins valorisant. Voyez-vous poindre un phénomène vintage, comme il en existe dans le mobilier ? — ◊ p. 28 Flamboya — Photographie - Viviane Sassen Propos recueillis par Angelo Cirimele p. 38 Économie du livre de photographie p. 39 Comment fonctionnent des éditeurs comme Taschen ou Phaidon ? — Ce que font les deux éditeurs que vous citez est très « marketé », on peut retrouver leurs livres dans le monde entier à des prix très abordables ; ça donne des objets grand public intelligents, c’est pas mal ! Au pire, ça fait des table books, mais puisqu’il y a des tables… Pour certains livres, Taschen, Phaidon, et même Steidl, proposent une édition de luxe, ou un tirage limité à 200 ou 300 exemplaires avec une boîte par exemple, et surtout vendue sur leur site Internet, donc court-circuitant le réseau classique et permettant d’amortir immédiatement une partie de l’investissement. Parce que dans l’économie du livre, 50 % va à la diffusion (diffuseurs, distributeurs et LA PÉRIODE EST TOURMENTÉE POUR LA PHOTOGRAPHIE. librairies), et finalement, la marge de l’éditeur est dérisoire ; pour dire JAMAIS TANT DE CLICHÉS ONT CIRCULÉ DANS DES GALERIES, les choses simplement : on ne gagne pas d’argent en éditant des DES MAGAZINES, DES LIVRES ET SUR INTERNET, QUAND livres d’art. L’ÉCONOMIE DE CE SECTEUR RESTE SUR DES BASES INSTABLES. […] La mode, ça ne se regarde pas dans les livres, ça supporte mal ce déplacement du magazine au livre. Et quand des photographes comme Teller ou Testino font des livres, il n’y a finalement que très peu de mode dedans. Dans cette catégorie du livre d’art (mais aussi des catalogues d’exposition, des livres de photographie), le prix de vente n’a donc rien à voir avec le prix de revient. Qui paye donc les livres ? Institutions, artistes, galeristes ? — Il n’y a que des cas particuliers, mais des éditeurs comme Assouline ont un département édition classique – qui ne doit pas être rentable, comme c’est le cas pour tous les éditeurs –, et un département catalogue pour les marques de luxe, qui compense. Steidl doit fonctionner sur un modèle assez proche. Editer un livre d’art aujourd’hui ce n’est donc pas chercher à gagner de l’argent mais à donner un signe ? Un galeriste avec l’artiste auquel il croit, un photographe pour signifier son importance… — FANTASMANT LA DEMANDE À VENIR D’INTERNET, NOUS AVONS Une maison d’édition, est-ce une danseuse ? — CHOISI D’ÉVOQUER LE LIVRE DE PHOTOGRAPHIE, SON MODÈLE Clairement, si on veut gagner de l’argent, on fait autre chose – et ÉCONOMIQUE, SON RÉSEAU DE DIFFUSION, SA RAISON D’ÊTRE. il se trouve que certains éditeurs contemporains avaient déjà fait Montrer les pages d’un livre sur un site Internet ne nuit-il pas à ses ventes ? — À VISAGE COUVERT, BIEN ENTENDU. fortune dans un autre domaine… Je crois que les personnes qui se En règle générale, non. Mais si c’est un « coup », un livre l’ordre de 5 %, donc dérisoires si on parle d’un photographe de mode, lancent dans cette aventure sont des malades de livres, d’écrit et de d’opportunité qui surfe sur une actualité people par exemple, on qui gagne 1 000 fois plus sur une campagne de publicité. Mais le rencontres avec des gens. Après, si on peut en plus laisser une trace ne se risquera pas à en montrer l’intégralité. Et puis il n’y a pas que livre sera pour lui une sublime carte de visite pour séduire d’autres dans le monde de l’édition, tant mieux… le contenu, il y a aussi la part de fétichisme à posséder des livres, clients, des marques, des magazines… mais aussi des galeries. Les qu’on n’ouvre pas tous les jours. […] Le fait est qu’il existe un marché, livres rendent des images visibles et les extraient du contexte du y compris pour des livres à 100 ou 120 euros, et Internet permet magazine, qui reste commercial et promotionnel. Dans certains cas, de constituer ce petit réseau qui rendra sinon profitable au moins c’est aussi un marché parallèle, car on peut vendre les tirages d’un viable l’édition de tels livres. travail plus personnel. Que pensez-vous de la démarche d’un Juergen Teller, qui a toujours habilement navigué entre les livres (Go Sees), les magazines, les campagnes de publicité (Marc Jacobs) et les expositions ? — ALORS QUE TOUS LES REGARDS SE TOURNENT VERS LE FILM, Dans une période où le numérique devient omniprésent, pour réaliser des images, les faire circuler ou les montrer, comment se porte le livre d’art ? — Internet a-t-il changé la donne pour la diffusion des livres d’art ? — Les royalties, pour le photographe à qui on consacre un livre, sont de Il ne se porte pas aussi mal qu’on pourrait le penser. Du moins, il s’en Oui et non. C’est très pratique pour envoyer une newsletter à un produit beaucoup… Mais si on regarde bien les colophons, on se réseau qu’on sait déjà intéressé, qu’on soit à Paris ou à Santa Fe ; ça rend vite compte que beaucoup de livres sont édités à travers des rend donc visible la production sur les cinq continents. Ensuite, ça partenariats, essentiellement avec des musées, des institutions, des permet à un éditeur d’avoir des billes dans un réseau parallèle aux galeries… Prenons par exemple Revelations, le livre de Diane Arbus, libraires. Parce que notre vision française, de surcroît parisienne, est qui est très réussi. Si on est attentif, on voit dans un coin qu’il est en trompeuse : en France, grâce à la loi Lang, il y a des libraires. Alors réalité publié en relation avec une exposition qui va circuler dans qu’à Londres, à part la Photographers Gallery, il n’y a pas de librairie sept ou huit grands musées aux Etats-Unis et en Europe. spécialisée en livres de photo, et à New York, c’est aussi quasiment Best-sellers mis à part, l’économie du livre d’art est un peu particulière : elle obéit davantage à l’offre qu’à la demande. Autrement dit, peu importe qu’il y ait des lecteurs en bout de chaîne, l’essentiel est de produire… — terminé… Ce sont les chaînes comme Barnes & Noble qui ont pris le Effectivement, le segment des livres de photo est un marché proviennent de commandes pour la publicité ou les magazines, relais. d’offre et non de demande. Par exemple, aujourd’hui, il n’y a plus et sont proposées avec une nouvelle lecture dans le cadre d’un vraiment de livre sur Nadar ou Boubat, mais c’est sur Doisneau livre. Et qu’on aime ou non son travail, c’est l’un des rares dont qu’on a ressorti des bouquins récemment, bien qu’il en existe les images supportent cette double inscription. […] Parce que la déjà vingt-cinq… parce qu’il y avait une actualité et qu’il vend mode, ça ne se regarde pas dans les livres, ça supporte mal ce Comment ce type de partenariat se met en place ? — Ce qui m’intéresse le plus, c’est que les images de ses derniers livres Concrètement, en accord avec le curateur, un musée commande (et Comment en est-on arrivé là ? — règle) des textes et acquiert ensuite des exemplaires, ce qui diminue Les marges réalisées en vendant des livres de photo sont faibles, toujours. Maintenant, si un éditeur a un coup de cœur, il publiera déplacement du magazine au livre. Et quand des photographes d’autant les frais et les risques d’invendus de l’éditeur. Beaucoup de de l’ordre de 25 % ou 30 %, ce qui, sur un livre à 40 dollars, ne va un livre et ne va pas se demander pendant des lustres si ça va comme Teller ou Testino font des livres, il n’y a finalement que très livres sont édités avec ce type de montage. Car, contrairement à la chercher loin… pendant que le prix du mètre carré en centre ville a marcher… D’ailleurs, un éditeur qui ne chercherait que des succès peu de mode dedans. […] Quand on regarde des images d’Irving littérature, où on publie énormément de livres et on voit ensuite ceux explosé. Donc les gens – surtout s’ils sont loin du centre ville d’une commerciaux, en somme des « coups », n’y parviendrait pas Penn, de Richard Avedon ou d’Helmut Newton, on oublie que c’était qui marchent, produire un « beau livre » coûte beaucoup plus cher : capitale – achètent sur Internet. forcément. Il y a heureusement du mystère dans le succès d’un livre parfois des commandes de Bazaar ou de Vogue ; elles transcendent et un temps qui peut être très long… la commande, et je crois que c’est à ça qu’on reconnaît des grands la photogravure, l’impression, un bon papier… photographes. off record p. 40 Quels photographes contemporains sont aujourd’hui capables de transcender cette commande ? — Steven Klein, dont certains travaux personnels sont intéressants ; Mario Sorrenti, si son travail est bien édité… Quelles professions ont besoin d’un livre aujourd’hui ? Photographes, artistes, graphistes ? — Un livre, c’est la garantie d’une visibilité très importante, beaucoup plus qu’une exposition dans une galerie, qui s’adresse finalement à peu de gens ; alors qu’avec le réseau de passionnés à travers p. 41 Mais le livre sera pour [un photographe] une sublime carte de visite pour séduire d’autres clients, des marques, des magazines mais aussi des galeries. […] Dans certains cas, c’est aussi un marché parallèle, car on peut vendre les tirages d’un travail plus personnel. le monde et ce qu’Internet permet, le livre me semble beaucoup plus performant, car il circule mieux et s’inscrit dans un temps long. […] Le livre est aussi un moyen d’expression pour certains beaucoup d’images pauvres peuvent produire quelque chose de riche à la fin, mais ça reste nombriliste et ennuyeux. Un livre doit aussi garder une trace et donner un éclairage scientifique sur son sujet. Mais avec le virage récent opéré par l’art, de l’éducation à l’événement, les catalogues d’exposition sont devenus les comptes rendus d’un spectacle et non plus la démarche de réflexion qui devrait présider à l’élaboration d’un livre. On pensait le livre comme le rempart à l’accélération du temps numérique, mais il est aussi pris dans le tourbillon, à sa manière. — C’est effectivement de plus en plus rare qu’un livre soit une réelle photographes, y compris jeunes, pour qui c’est le seul médium ; fait régulièrement des livres à 100 ou 200 exemplaires en print relecture de l’œuvre d’un artiste ou d’un photographe. Et le fait que d’ailleurs Henri Cartier-Bresson disait que la photographie, ça ne à la demande… Ça reste des quantités qui s’écoulent facilement les approches scientifiques intéressantes ne donnent pas lieu aux se regarde pas dans les magazines ou sur les murs mais dans et ça donne même des collectors. D’ailleurs, les bons livres de meilleures ventes n’arrangera rien. les livres. C’est une approche qui nous vient essentiellement de photo deviennent rapidement des collectors, car ce sont de petits la photographie japonaise, dans laquelle il y a très peu de tirages, tirages ! car les appartements sont minuscules et ne permettent pas d’accrocher un tirage au mur. Ils ont développé le livre et l’écriture particulière qui y est rattachée. Et pour les marques de mode ? — Les marques de luxe cultivent un côté précieux que je relie naturellement au livre ; on ne peut pas se contenter d’Internet, de films et de DVD… Le livre suppose un certain recul, du rituel ; c’est un objet qu’on ouvre et qu’on referme, dans lequel on entre et avec lequel on fait corps. Et l’auto-édition ? Ça existe ou c’est un fantasme ? — Il y a beaucoup de photographes de mode qui travaillent sur des Parlons un peu chiffres : à partir de combien d’exemplaires peut-on dire qu’un livre de photographie s’est bien vendu ? — En France, 1 000 exemplaires, c’est un bon niveau. Ça veut dire qu’il a bénéficié de pas mal de relais dans la presse. Justement, quels magazines sont de bons prescripteurs ? — Je sais que certaines personnes travaillent à une nouvelle forme de présentation des images, qu’on pourra télécharger, qui sera comme valeur ajoutée et de curiosité du rédacteur, qui parvient à faire des gens qui continueront à le regarder. On peut avoir un tirage découvrir des livres inconnus à ses lecteurs. d’Avedon et un écran plat, même dans la même pièce ! Ça a surtout produit une saturation d’images. Ça me fait penser aux soirées diapo des années 70, quand les gens rentraient de qu’ils chargent des iconographes de documenter un thème, une vacances, enchaînant des images pauvres, sans grand intérêt, marque ou une tendance. […] Dans un autre genre, Stephen Shore à part de figurer le cousin, l’oncle ou le G.O. Je sais bien que est devenu très facile d’éditer 10, 20 ou 50 livres à la demande, Quel avenir prédisez-vous au livre et quel sera notre rapport à lui ? — ce moment. Et le livre de photographie continuera à exister avec ne sortent pas et les stylistes non plus, c’est pour cette raison n’ont finalement pas besoin d’un éditeur au sens classique… il reviennent, en Italie notamment. une sorte de diaporama avec un son ; ça expérimente beaucoup en six lieux dans le monde… De toute façon, les rédactrices de mode gravure et une idée de maquette ou des amis DA. Je pense qu’ils « mais » ! La mode semble toutefois passée, et pas mal d’éditeurs tirage, car un titre comme Paris Match n’apporte rien, mais de puisque finalement, ils sont destinés à être distribués dans cinq ou de lisibilité à leur travail ; ils ont des images avec une bonne Oui… mais on ne peut pas vérifier la qualité. Il y a toujours un Télérama, Le Monde, Libération… Ce n’est pas une question de Après la vague des snapshots il y a une dizaine d’années, leurs successeurs, l’appareil numérique et le blog, ont-ils apporté quelque chose photographiquement ? Un style ? — commandes et qui veulent faire un livre pour donner davantage Imprimer en Chine, c’est vraiment moins onéreux qu’en France ? — ◊ p. 42 Hunting and Fishing — Photographie - Paul Kooiker p. 43 p. 44 p. 45 p. 49 Texte, Pierre Doze p. 50 La maison des autres LE DESIGN SE DÉBAT AVEC LA NOTION D’USAGE. IL SERAIT DU CÔTÉ DU DOCUMENTAIRE. MAIS L’ATTRAIT EXERCÉ PAR UNE MAISON TROPICALE EN ALU OU UN OBJET INDUSTRIEL ARCHAÏQUE A DÉJÀ TRANSFORMÉ SON OBJET. IL EST PASSÉ DU DOCUMENTAIRE À LA FICTION. p. 51 […] Cet ordre esthétique du docu-déco, celui de la valeur documentaire muant artefact ornemental, se lira dans le mobilier industriel exposé et vendu dans la vaste boutique Merci, ou chez de plus modestes archéologues-marchands. de plus modestes archéologues-marchands de ces sécrétions chiens. Il finit cruellement déchiqueté. Le mythe ne cesse de mobilières de l’âge industriel occidental révolu. C’est celui qui l’emporter sur la raison logique : face à ces images du design, habite la nouvelle vie des luminaires Gras ou Jieldé, des meubles nous sommes privés de logos. Nous voilà cerfs, incapables Tolix et de tous ceux qui suivront bientôt. Quelle étrangeté, la de rendre compte de la déesse nue. Mais nous saurions sûrement vie des autres. L’eskimo, le pariah, le fugéien, l’ouvrier. Le design sa beauté, ce qui est rassurant (encore faudrait-il qu’elle ne soit est, par sa nature même, essentiellement documentaire. Mais pas hideuse). Et pour les chiens, ceux que j’entends souvent le documentaire est devenu fiction. Le design est terre à terre aboyer, on verra plus tard. dans ses préoccupations : il vient toujours parler d’usages. De manière remarquable, il est devenu projection d’une image de ces ◊ usages et de leurs modes d’emploi – l’intérêt envahissant des artistes pour un objet en rapport avec le design, dans son dessin, sa fabrication ou sa perfection technique, ne parle pas d’autre chose. Projection que l’on verra proposée en mille variantes sur le champ domestique, là où les designers ont des possibilités plus rapides de devenir brillants et de se montrer sur une scène mieux -1 La foire de design et d’art contemporain de Miami, où prend place cette petite scène, a accueilli cette année à Miami quatorze galeries de design (le nombre le plus faible depuis sa création il y a cinq ans). Art Miami/Basel se tiendra à Bâle du 16 au 20 juin 2010, proposant un scénario nouveau pour sa partie design. Sur le stand de la galerie Seguin (1), une vidéo montre la procédure éclairée. Ils font eux-mêmes aussi partie de cette image, en tant de montage d’une structure d’habitat d’urgence de Jean Prouvé. qu’avatar marketing ou auteur responsable, selon le sens attribué -2 Croquis techniques animés, photographies d’installation en à la signature, selon leurs capacités physiques et talents oratoires -3 parallèle. Une réclame désuète pour Meccano, l’odeur du tabac à l’incarner. L’image est celle d’un rêve qui se développe dans le gris, visions de moustaches et de casquettes, bleus de travail en cadre éminemment symbolique de la maison – le bureau s’y prête Vitra Haus, Weil am Rhein, Allemagne. Extrait des Métamorphoses d’Ovide, in Forêts, essai sur l’imaginaire occidental de Robert Harrison, Champs Flammarion. toujours très mal, ou alors c’est la maison qui en devient un, parée noir et blanc. Que pense Naomi Campbell, accompagnée de son ami russe et oligarque, lorsqu’elle s’arrête devant cet écran ? Que de la part des pouvoirs publics auxquels cette proposition est des arguments démagogiques vantant une activité d’esclave qui se voit-elle dans ce projet, quels sont les adjectifs qui la traversent ? adressée, et qu’il atterrit, cinquante ans plus tard, dans une foire serait transformée en loisir d’affranchi, pénible escroquerie. Bouleversée par l’intelligence des articulations de la charpente ? miamiesque, en voisin de Néerlandais baroques qui montrent une Sans voix devant l’élégance du trait, l’équilibre des proportions, théière de plusieurs mètres tapissée de mosaïque miroir, que se C’est bien cette maison magiquement envisagée comme horizon la légèreté dynamique du squelette, le schéma de montage ? passe-t-il ? qui peut seule expliquer la passion décidément pas normale d’une foule qui se presse dans tous ces salons, avec des enfants Pense-t-elle à des enchères récentes, à l’un de ces acquéreurs glorieux, ou aux Congolais à qui une maison tropicale Prouvé de Ce qui semble être dit, c’est que l’un et l’autre sont des anomalies, et des animaux, dans une atmosphère ivre d’après match. La plus a été soustraite dans des conditions qui ne méritent pas d’être qu’ils sont deux représentants de la confrérie du Facteur Cheval. maison, perspective ultime, fantasme insubmersible de l’humanité racontées ? Le choix de cette caricature n’est sûrement pas le plus Associés dans la seule mesure où les réunit un autre facteur, celui qui cherche toujours un abri, est la grande image à l’intérieur pertinent. Trop facilement navrant. Et Naomi Campbell a peut-être de leur immédiate fongibilité. Les uns par choix délibéré – creuser de laquelle viennent se ranger d’autres images plus petites, simplement mal aux pieds, elle a peut-être envie à cet instant d’un le sillon ambigu du design-art, tant qu’il ne cesse de ressembler toutes imprégnées de sa puissance. La récente construction Coca Zéro et c’est tout. à un gisement aurifère. Les autres par voie de conséquence, des architectes Herzog & De Meuron pour l’entreprise Vitra (2), résultat de la combinaison de la spéculation, de la mode, de la inaugurée en mars dernier, en parle avec grande précision. Si elle Mais nous nous trouvons sur les lieux de la caricature et il est communication maîtrisée et d’une rareté plus ou moins artificielle. ne recule pas devant l’archétype de la silhouette du parallélépipède raisonnable de la lire. Alors, oui, décidément étranges, ces images Il faudrait sûrement encore se pencher sur les prodiges de surmonté d’un chapeau, celui de la maisonnette dessinée par de Prouvé qui semblent venir d’un autre monde et d’un autre magie mis en œuvre à de multiples niveaux, ceux qui permettent l’enfant sans imagination, si elle est répétée plus de dix fois sur le temps, tous deux très éloignés, appartenant surtout à une culture de transformer, à ce point, valeur d’usage en valeur d’échange, profil des façades multipliées, c’est qu’il est décidément fort et trop devenue exogène. Aussi mystérieuses que l’Opéra de Paris, celui contenu politique en frise décorative, logement d’urgence en pool efficace pour être évacué. Ils y associent une structure intérieure qui est palais millefeuille d’une capitale bourgeoise fantastique. house dans les Hamptons. Prouvé trouve ici une traduction de labyrinthique, où l’expressionnisme entre en collision avec cette Les réalisations démentes auxquelles s’est livré son architecte l’ordre du glissement accompli par le ready made sur le terrain silhouette schématique. Stupeur. Cette maison du Dr Caligari est Garnier – si l’on considère le degré le plus poussé d’un contrepoint artistique, mais en termes de design cette fois. Décontextualisé, aussi un temple, un immense nœud, une mystique moderne. décoratif et mondain aux préoccupations des designers rigoureux nettoyé, stérilisé, là où mutation et mutilation deviennent sœurs de du siècle suivant – s’inscrivent dans un registre de la bizarrerie sang, il peut devenir une pure image. Lorsqu’Actéon voit la déesse Artemis nue, elle lui annonce : « Maintenant, va raconter que tu m’as vue sans voile. ou de la curiosité qui peut se poser en repère symétrique. Une projection tout aussi étrange. Lorsqu’un ingénieur à petite Cet ordre esthétique du docu-déco, celui de la valeur documentaire Si tu le peux, j’y consens. » (3) Elle métamorphose au même moustache décide de répondre aussi efficacement que possible muant artefact ornemental, est celui qui se lira dans le mobilier moment le fier chasseur Actéon en cerf, humainement conscient à une question très pressée, qu’il se heurte à la cécité persistante industriel exposé et vendu dans la vaste boutique Merci, ou chez mais zoologiquement muet. Il est bientôt poursuivi par ses propres design Texte, Mathias Ohrel p. 52 Yves de PARFOIS MON TÉLÉPHONE SONNE ET, PENDANT QUELQUES p. 53 […] « De l’argent va partir en fumée, tout le monde est mouillé jusqu’au cou, dépensez, dépensez !!! » raccrocher, Yves m’a conseillé de faire un tour sur le site qu’il consulte le plus : http://contreinfo.info. J’ai fait un tour : des papiers inquiets de Noam Chomsky (les USA sont « très semblables à l’Allemagne de Weimar ») aux chroniques de Martin Wolf, Joseph Stiglitz, Chevènement ou Rocard, en passant par « Chirac n’a rien compris au Liban » par Michel Aoun et des contributions de SECONDES, AVANT D’ENTENDRE SA VOIX DE CARDINAL nombreux Prix Nobel, j’ai trouvé une mine d’infos contre les idées JOUISSEUR, J’ENTENDS EN SOURDINE LES ORDRES MASCULINS reçues. Mais peu d’espoir. QUI FONT L’ATMOSPHÈRE PARTICULIÈRE DES SALLES DE MARCHÉS. « DÉSOLÉ, JE VIENS DE TROUVER TON MESSAGE. Nikos, philosophe grec du PAF, rappelait mardi dans l’émission de TU DEVRAIS APPELER SUR CE NUMÉRO, C’EST LE SEUL AUQUEL Taddeï que « Zeus a engrossé Europe sous un platane ». Moi, je JE RÉPONDS », ENCHAÎNE MON AMI YVES. retiens ce que me dit Yves : bientôt nous ferons tous partie du 1 % des plus riches. Ceux qui à eux seuls représentent plus de 15 % du revenu national français. C’est-à-dire plus rien. Heureusement, Il est pressé, bien sûr. Certainement sur-stressé par les marchés sur la journée. Sur les taux, les mouvements sont de bien plus mai, en France, c’est aussi Roland-Garros. « Balles neuves », dit « très très tendus » sur lesquels il fait (combien sont-ils dans grosse ampleur. Les clients sont terrorisés. La fin de semaine va Yves. Vive le troc. ces équipes à gagner des bonus en millions ?) des opérations être déterminante : soit les marchés considèrent que la BCE et auxquelles je n’ai rien compris. Pourtant Yves paraît toujours très les autres ont pris des mesures suffisantes – les Etats grecs et calme avant qu’arrive un « je te rappelle », qui ne sera suivi d’effet espagnols vont devoir restructurer leur dette –, soit la Grèce sort, que plusieurs jours après. Son ton ne laisse rien deviner de ce et à ce moment-là c’est compliqué. Ça va renforcer l’euro à moyen qu’il pense. Ce n’est pas de la dissimulation, juste le flegme quasi terme, les marchés diront qu’on s’est débarrassé des plus faibles. britannique de ce Breton dont le bateau, le nom à rallonge et les Mais tu te rends compte que le 19 mai la Grèce doit rembourser mains extra larges imposent le respect à tous les marins. Un grand 10 milliards, avec à peine un milliard et demi en caisse ? Et on parle garçon à l’épaisse mèche rousse, taiseux et solitaire, curieusement de 10 milliards sur les 240 qu’ils doivent… » ◊ seul occupant de sa chambre dans les dortoirs du lycée militaire de Saint-Cyr-l’Ecole où nous envisagions le bac. Un jeune lord Franchement, je ne me rends pas compte du tout. Depuis que j’ai dont le charisme opérait manifestement sur les adjudants, qui compris que les Etats avaient des milliards par centaines pour les feignaient de ne pas voir les élégantes transformations de son banques et rien pour les pauvres, je n’essaie plus de comprendre treillis réglementaire. ce que sont les milliards. Je souhaite que, comme l’annonce Yves, Quand nous avons dîné ensemble l’automne dernier, Yves m’a tout le monde est mouillé jusqu’au cou, dépensez, dépensez !!! », raconté très placidement ce qu’il pensait : « Le chaos n’est pas répond Yves pour que je comprenne quelque chose. Et je réalise maintenant, ce sera en mai. Après celles des banques, viendront que mon pote dans la finance ne dit pas du tout comme Michael les milliards ne signifient plus rien. « De l’argent va partir en fumée, les faillites des Etats. Il n’y aura pas d’autre solution que l’hyper- Douglas dans le Wallstreet d’Oliver Stone, il y a déjà vingt-cinq inflation. Ce que l’on a ne vaut plus rien, et c’est bien : tout le monde ans : « I create nothing! I own. » Qu’il n’est pas non plus comme le repart à zéro. » Yves sait bien que je n’ai pas de bateau, pas de regretté Bérégovoy, qui disait que l’inflation est un impôt pour les maison, pas d’appartement, pas de Range Rover, pas de compte en pauvres. Mais convaincu que nous allons tous perdre ce que nous banque ni rien à perdre. Mais ce n’est pas pour me caresser dans croyons avoir. L’ironie lucide de sa vision du monde, sa prédiction le sens du poil gauchiste qu’il annonce la faillite du capital. Il pense de l’hyper-inflation généralisée peut sembler cynique aux naïfs ou vraiment que nous allons faire la queue devant les banques pour aux « intellos » qui « croient encore qu’on existe » quand « notre récupérer des billets qui ne vaudront plus rien. salut, celui de l’Europe, qui ne représentera en 2020 que 6 % de la population mondiale, ne tient plus qu’à l’envie d’un pays de racheter Nous sommes jeudi de l’Ascension. Les marchés sont indécis : un peu de dette européenne ». ils ne savent pas s’ils montent ou s’ils descendent. Un jeudi froid, gris et vide à Paris, comme un trou au milieu de cette semaine « Je te rappelle. » Cette fois, je soupçonne que l’urgence n’est pas de mai 2010 où la presse chronique la mort annoncée de l’euro. sur son écran. Il m’a confié plus tôt qu’il se retenait ces jours- « Regarde seulement les indices boursiers : 8,81 de hausse ci parfois plus de cinq heures pour aller pisser. Mais avant de rencontre Illustrations, Florence Tétier p. 54 p. 55 Shorts (1970 ) 1 Tunique en laine blanche et combinaison short noire en dessous, Louis Féraud. L’Officiel no 576, 1970 2 Catherine Bach dans « Sherif fais moi peur », 1979 2 4 6 3 Blouson en popeline, short en popeline et pull blouson ajouré, 3 5 1 4 L’Officiel no 669, 1981 5 Elle, 1979 6 Veste et short de toile blanche, corsage marine et ceinture en daim, l’ensemble Christian Dior. Elle, 1974 mood board Propos recueillis par Emmanuelle Lequeux p. 56 Aurélie Voltz Vous avez notamment collaboré à l’élaboration de « La beauté », exposition culte réalisée pour Avignon en l’an 2000, aux côtés du commissaire Jean de Loisy. Que vous a-t-il appris ? — Jean de Loisy avait créé une association intitulée Song Lines, une mine de stagiaires qui travaillaient sur les prémisses de « La beauté » en explorant une multitude de pistes de réflexion. Je travaillais par exemple sur l’art brut et les formidables créations p. 57 […] Hier encore, derrière Alexanderplatz, j’ai découvert un lieu qui semblait un bar des années 30, avec une chanteuse en gants de satin, un pianiste en queue de pie, et des néons démodés, jouant devant une foule assise dans de vieux sofas, avec, au fond, un restaurant improvisé et des serveurs en gants blancs. SON PARCOURS ? COMME UN RÉSUMÉ DE LA VIE ARTISTIQUE plastiques de certains malades mentaux. Ce que je retiens de lui, DES QUINZE DERNIÈRES ANNÉES. DE SES ANNÉES DE c’est son exhaustivité, sa générosité. Avec lui, tout semble ouvert FORMATION À L’ÉCOLE DU LOUVRE À SON ÉTAPE BERLINOISE, et possible, c’est une leçon qui m’a ensuite beaucoup servi. Il y a AURÉLIE VOLTZ A CÔTOYÉ LES PLUS GRANDS COMMISSAIRES : aussi une clarté dans son propos qui m’a toujours fascinée. Nous auparavant cachés par des white cubes. Je voulais révéler la J’avais besoin de grandir, et je sentais que le MAMVP ne m’offrait plus JEAN DE LOISY, SUZANNE PAGÉ, HANS ULRICH OBRIST, JÉRÔME avions avec le groupe beaucoup de discussions très ouvertes, qui créativité énorme de cet espace, plutôt que l’obturer. de perspectives en ce sens. J’ai donc intégré l’équipe du Palais de SANS, NICOLAS BOURRIAUD. MUSÉE D’ART MODERNE DE LA passaient d’une idée à l’autre, d’un pays à l’autre. Cela partait dans VILLE DE PARIS, PALAIS DE TOKYO, PUBLIC : ELLE A PARTICIPÉ tous les sens, mais c’était une vraie respiration. Ce qu’il transmet AUX AVENTURES LES PLUS EXCITANTES DES ANNÉES 90 ET 2000. admirablement, c’est une attention à tout ce que tu vois et sens. AVEC NOUS, ELLE REVIENT SUR CE QU’ELLE EN A RETENU Parallèlement, il m’a proposé de l’assister sur son exposition ET ÉVOQUE LES PROJETS QUI L’ONT MENÉE DE FOIRES EN Alberola au musée d’Art moderne de la Ville de Paris (MAMVP), où MUSÉES : DE SA COLLABORATION AVEC LA FAIR GALLERY POUR Au MAMVP, vous avez assisté Laurence Bossé et Hans Ulrich Obrist. Quels projets vous ont marquée ? — je suis ensuite restée quelques années. Ces deux personnalités sont très différentes. Laurence m’a apporté Disons à moitié. En tout cas, j’ai eu plus de responsabilités. sa grande tranquillité de réflexion, Hans Ulrich sa folie. Il est dans L’essentiel, c’est que je pouvais enfin diriger une exposition avec une boulimie d’artistes, de démarches et de disciplines. C’est un son budget, ce qui n’arrivait jamais au musée de la Ville de Paris, moteur énorme, débordant d’énergie, un vrai laboratoire. Cela m’a dont la gestion par Paris Musées nous interdisait d’être au plus près passionnée d’être à ses côtés pendant ces années. Pour lui, tout de la chose financière. Au Palais, j’avais la possibilité de faire des Il y a une part terrifiante dans ce personnage, qui te dit que tu as est digne d’intérêt, tout jeune artiste peut retenir son attention, choix dans une programmation déjà établie par ses deux directeurs, tout à apprendre et que tu ne sais rien. Mais elle a une rigueur il est de ceux qui ne regardent pas la biographie pour se forger un Jérôme Sans et Nicolas Bourriaud. Il était important pour eux de incroyable, elle ne laisse rien passer. Elle m’a notamment appris avis, je pense que cette attitude est essentielle. Il a une capacité à maîtriser les choses de A à Z. J’avais bien sûr une petite force de à écrire, bannissant toute langue de bois. Comme Hans Ulrich toujours renouveler son regard, à ne pas rester dans sa génération, proposition, mais sans pouvoir m’épanouir totalement comme Obrist, qu’elle a fait venir au musée, elle est très intuitive, à tous une énorme volonté de transmission. Ensemble, nous avons fait commissaire. J’ai été en tout cas très heureuse de participer à les niveaux, en termes de programmation comme de mise en de très belles rencontres, avec Olafur Eliasson, Gabriel Orozco, l’aventure de cette ouverture, il y avait une formidable énergie, une espace. Je crois moi-même beaucoup à cette façon d’être. Suzanne Pipilotti Rist. Je me souviendrai toujours de la présence incroyable équipe très soudée, un véritable investissement de chacun. Pagé, en quelque sorte, m’a autorisée à être à l’écoute de cette de David Hammons, qui a bouleversé une après-midi nos bureaux intuition. Et tout simplement, elle m’a appris à regarder, car elle a de 5 mètres carrés. Et de Gregor Schneider, très fou, très solitaire, un œil incroyable, notamment pour les accrochages. Pour moi, une très rocambolesque. Ogre de travail, il dormait aussi, le jour, exposition se fait à 90 % précisément à ce moment-là. dans les salles d’exposition, y mangeait les conserves qu’il avait FRIEZE À SA MAGNIFIQUE PROPOSITION D’ACCROCHAGE DE LA COLLECTION DU CAPC, À DÉCOUVRIR JUSQU’À SEPTEMBRE. LE FABULEUX DESTIN D’UNE INTUITIVE DU COMMISSARIAT. Quand vous avez commencé votre carrière, il y a une quinzaine d’années, le concept même de commissaire indépendant n’existait pas encore vraiment, et peu de formations s’offraient aux étudiants dans cette perspective, hormis celle du Magasin de Grenoble. Vous avez donc choisi d’étudier à l’Ecole du Louvre, sans pour autant aller jusqu’au bout, c’est-à-dire le concours de conservateur. Pourquoi ce choix ? — Vous avez vécu au MAMVP les dernières années de direction de Suzanne Pagé. — amenées. Son côté très bestial influait sur la façon de communiquer indépendant, je me voyais plutôt rattachée à une institution. Avant Vous concevez vos expositions quasiment in situ, en prenant avant tout en compte la réalité d’un lieu. — même ma sortie de l’Ecole du Louvre, j’ai donc enchaîné des tonnes Un bon accrochage, c’est une harmonie, un dialogue entre les de jeunes commissaires l’oublient, et pensent que dès leur sortie de de stages, qui me permettaient de me retrouver dans une situation pièces et l’espace, cette correspondance doit être d’une justesse l’université ils sont prêts à monter de grandes expositions. de travail au quotidien. Je suis passée par des galeries d’art chinois, extrême. Si une très belle pièce est en discordance avec son par l’hôtel Drouot, et par la galerie Durand-Dessert, qui m’a offert environnement, mieux vaut ne pas la mettre. Je choisis donc les mon premier job. pièces en fonction de l’espace, en m’inspirant à la fois de ses Je ne me voyais pas passer par les voies officielles, je ne me sentais pas rat de bibliothèque, j’avais besoin de concret immédiatement. Mais je n’envisageais alors pas une carrière de commissaire qualités plastiques et de son histoire. Volumes, lumière, matériaux, anecdotes, tout peut aider à la mise en place d’un projet. Dans ma dernière exposition, actuellement au CAPC, j’ai voulu refaire parler la pierre, le bois, la lumière, tous ces éléments qui étaient avec lui ; ce fut en tout cas une expérience unique. Souvent, quand je rêve de travail, je me vois encore dans les salles du MAMVP. C’est le lieu où j’ai tout appris. Je crois que ce temps de formation est incompressible et inestimable, et je trouve regrettable que beaucoup De votre bureau du MAMVP, vous voyiez le lieu d’en face, le futur Palais de Tokyo, en train de commencer sa révolution. Et vous n’avez pas résisté à l’appel. — Tokyo. Je sentais que là-bas, il y avait une vraie possibilité de devenir curateur à part entière. Cela s’est-il avéré ? — En parallèle, vous vous êtes lancée dans l’aventure de Public, espace alternatif de l’impasse Beaubourg qui a marqué la scène parisienne à la fin des années 90 et au début des années 2000. C’est Boris Achour, l’un de ses créateurs, qui vous a contactée pour prendre la relève de la première équipe. Pourquoi avoir accepté alors que vous aviez une place dans l’institution ? — J’avais besoin d’une fenêtre ouverte, quelque chose qui me ressemble. Pour Public, j’ai travaillé avec Emilie Renard et Giovanna Zapperi. Le début de l’aventure a été assez difficile, car cela m’a mis en porte-à-faux avec Suzanne Pagé, qui refusait absolument que son équipe s’investisse dans des projets personnels. Public devenait ainsi une activité clandestine. Avec la première équipe, commissariat p. 58 le lieu était vraiment actif tous les week-ends, avec performances, chorégraphies, projections. J’y ai développé quelque chose de plus classique, autour des artistes que j’estimais. J’ai ainsi fait mes premières armes de commissaire indépendante en exposant par exemple Guillaume Leblon, Pierre Malphettes ou Haegue Yang. Notre réalité budgétaire était très modeste, nous étions tous bénévoles, mais c’était un vrai laboratoire. J’espère que le livre que nous préparons aujourd’hui, qui rassemblera toute l’histoire de ce lieu, pourra en témoigner. Votre vie personnelle vous a ensuite conduite à Berlin pendant six années, jusqu’à cet été 2010, où Paris vous voit revenir. Berlin, capitale de l’art contemporain, est-ce un mythe ou une réalité ? — p. 59 […] Je pense qu’après toutes ces années de haute technologie, de fascination pour le support vidéo, on ressent le besoin d’un retour à quelque chose de plus humain, plus essentiel. Ce n’est pas un hasard si les artistes font un come-back vers la céramique, le tapis, la broderie… toutes ces pratiques artisanales. de foire, l’essentiel est souvent sur les murs, très chargés, et les Inventaire des objets ayant appartenu à la jeune fille de Bordeaux, a un environnement saturé de sculptures. été un déclic, avec ses vastes vitrines qui présentent une multitude Vous l’avez pris comme un véritable exercice de style ? — de choses anodines. Elle m’a tout de suite fait songer aux ATP, à ces dispositions d’objets liés à des personnes, des professions. La fermeture de ce musée en 2005 m’avait beaucoup chagrinée. D’où cette idée de relire la collection du musée avec cette typologie en D’autant plus que j’étais parfois confrontée à des artistes vers tête. Salle des rivières, salle de l’astronomie, salle des légendes lesquels je ne serais pas allée naturellement. Mais je me suis et traditions orales, salle d’armes… J’ai repris certains titres, j’en ai attachée à les comprendre. Je voulais vraiment une exposition inventé d’autres. Pendant que je préparais l’exposition, j’ai visité d’œuvres, pas d’artistes. Mais j’ai eu quelques difficultés à le musée d’Histoire naturelle de Bordeaux qui, avant de récents imposer ma vision aux galeristes : ils ont un regard beaucoup plus travaux, était vraiment resté dans son jus xixe siècle. Et je lui ai conceptuel ou politique que moi, qui suis peut-être plus dans la emprunté beaucoup de ses vitrines de bois pour le CAPC. Enfin, poésie. Le résultat ressemblait à un intérieur très subjectif, où je à la collection, j’ai mêlé des emprunts au Frac Aquitaine, et invité mettais en scène des œuvres à double fond. Elles perdaient leur 18 jeunes artistes dénichés pour beaucoup à Berlin. signification propre pour en trouver une autre. On m’a souvent dit que cela ressemblait à l’installation d’un seul artiste, et il est vrai La réalité y est aussi excitante que le mythe. Pendant six ans, je n’ai que j’ai cherché quelque chose de très homogène, même si chaque fait que découvrir des gens, des artistes, des lieux. Je ne connais pièce nous faisait rentrer dans une histoire différente. aucune ville aussi excitante, avec un flux aussi permanent. Certes, La très grande pièce de Christian Boltanski créée en 1973, espaces sont laissés libres pour la circulation. J’ai préféré privilégier Pierre Huyghe réalise actuellement une série de performances filmées dans ce musée des ATP, le Centre Pompidou Metz lui rend hommage à travers une très belle vitrine de visages. Comment expliquez-vous ce regain d’intérêt pour cette muséologie que tout le monde jugeait ringarde il y a dix ans ? — la ville fourmille de petits lieux indépendants, de project spaces, Tous vos projets réalisés à la galerie Jean Brolly, au musée de l’objet de Blois ou à la maison populaire de Montreuil sont donc allés puiser dans cet immense réservoir berlinois. Revenons sur l’un d’eux, réalisé pour Frieze, en 2007, à la demande de la Fair Gallery. — Votre dernière exposition, au CAPC jusqu’en septembre, est née d’une proposition de sa directrice Charlotte Laubard. Cette dernière vous a invitée à imaginer un accrochage de la collection restée depuis longtemps dans les réserves du musée. Comment avez-vous travaillé ? — c’est un puits sans fond absolument fou, un trésor pour nous, The Fair Gallery est une structure qui n’existe que durant les foires, J’ai eu une vraie carte blanche, sur 1 500 mètres carrés. Je me hasard si les artistes font un come-back vers la céramique, le tapis, les commissaires. Cela m’a extrêmement nourrie, comme si je émanation de quatre galeries décidées à s’allier dans ces moments suis plongée dans les réserves. Ce qui m’a tout de suite frappée, la broderie… toutes ces pratiques artisanales. mangeais tous les jours, et j’ai beaucoup puisé dans ces structures particuliers : gb agency, de Paris, Jan Mot, de Bruxelles, Hollybush c’est qu’il y avait beaucoup d’œuvres que je ne connaissais pas, alternatives, dans lesquelles les artistes sont beaucoup plus actifs Gardens, de Londres, et Raster, de Varsovie. Ensemble, ils voulaient beaucoup d’artistes disparus. C’était une vraie redécouverte des qu’en France. Elles ne sont jamais identifiables, on ne sait jamais imaginer un nouveau format de présence dans les foires. Plus années 80, sans doute les grandes années de cette collection. J’ai ce qu’elles sont vraiment, elles ouvrent soudain, ferment au bout que de galeristes, il s’agit profondément de curateurs qui ont en travaillé par coups de cœur, en tentant de ne tenir compte ni du Grâce à ces procédés, l’exposition est comme un hors-temps, une parenthèse. — d’un mois, rouvrent ailleurs, se transforment tour à tour en bar, permanence envie de réinventer des schémas. En témoigne leur nom des artistes ni de leur carrière. Ainsi est née une liste, mais Je m’attache beaucoup au fait que l’on soit dans un temps lieu d’expo, salle de concert. Hier encore, derrière Alexanderplatz, programmation, déjà très curatée. Pour Frieze, ils ont fait appel à qu’en faire ? suspendu, qu’on prenne de la distance par rapport à aujourd’hui, j’ai découvert un lieu qui semblait un bar des années 30, avec une moi pour réaliser une exposition qui devait mêler leurs artistes sur chanteuse en gants de satin, un pianiste en queue de pie, et des leur stand commun. C’était une très belle invitation. historiques ou contemporaines y sont rares et il n’y a vraiment pas l’équivalent du Centre Pompidou, ou du MAMVP – je pense à ce qui a été fait à l’ARC par exemple. Autre problème, il est impossible d’y développer quoique ce soit financièrement. Tous mes projets m’ont toujours été amenés par mon réseau français, excité par le fait que j’amène quelque chose venu d’ailleurs. Mais néons démodés, jouant devant une foule assise dans de vieux sofas. Je me trouvais en fait dans l’ancien centre culturel hongrois, réhabilité récemment, avec, au fond, un restaurant improvisé et des serveurs en gants blancs, et où je m’étais rendue pour assister à la conférence d’une artiste norvégienne qui travaille sur l’odorat ! Ce qui était remarquable dans cette proposition, c’est qu’elle ne se prostituait pas du tout au contexte très marchand et hype de Frieze, elle se voulait plutôt radicale. — J’avais conçu ces 48 mètres carrés véritablement comme un musée, un petit territoire que je me suis appropriée, et j’ai fait comme si j’étais ailleurs, en m’abstrayant de la foire. Sur les stands C’est alors que vous est venue la belle idée d’emprunter au défunt musée des Arts et Traditions populaires (ATP), qui se trouvait au jardin d’acclimatation, ses typologies désuètes de salles, imaginées par l’ethnologue français GeorgesHenri Rivière. Vous avez glissé de l’art populaire (céramiques, rituels, mobilier) à l’art contemporain. Comment est né ce glissement ? — Je pense qu’après toutes ces années de haute technologie, de fascination pour le support vidéo, on ressent le besoin d’un retour à quelque chose de plus humain, plus essentiel. Ce n’est pas un notre réalité politique et sociale. Cela en gêne d’ailleurs plus d’un, on me reproche parfois ce côté trop universaliste. Mais je voulais gommer dans ces années 80 ou 90 ce qui les rattache à leur temps, les regarder autrement, sans leur contexte. Ce qui ne veut pas dire qu’on leur soustrait tout leur sens. Les œuvres de Combas, par exemple, très présentes dans la collection, me semblent figées dans leurs années 80, les en abstraire ne peut que les ouvrir. Au début, je ne les ai même pas regardées, puis je suis revenue dessus, et je les ai vues différemment. Pour finalement les inclure à l’exposition. Si j’essaie de me réapproprier formellement les œuvres, je tente néanmoins de les laisser parler sans leur imposer un discours. Je veux qu’elles respirent. ◊ Berlin ne brille pas par ses institutions, les grandes expositions p. 60 Nathalie D. — Photographie - Audrey Corregan & Erik Haberfeld Texte, Sylvain Ohrel p. 72 Le souvenir de la solidarité p. 73 qui saute à nos yeux, mais qui a largement échappé aux maquis des Glières et le Fouquet’s n’est pas évident, si le lien entre contemporains de l’Evénement, et pour des raisons précises. Car résistance et jetons de présence est a priori ténu, c’était pourtant à si la ferveur du présent et l’amour de la nouveauté inspirèrent de l’époque ceux-là qui commémoraient celles-ci. Une partition de la nombreux publicistes jamais avares d’analyses et toujours prêts à comédie de la mémoire interprétée par ceux qui avaient tout mis en proposer une lecture des derniers codes sociaux en cours, le solde œuvre pour tourner la page. des références révolues s’était avéré un exercice à la fois plus rare et plus dangereux. Une pratique douteuse parce que largement La radicalisation des objectifs de la classe des grands possédants monopolisée par de vieux professeurs passionnés d’eux-mêmes avait bien amené certains de leurs représentants à clamer haut L’ÉPOQUE N’A PAS TOUJOURS ÉTÉ ULTRA INDIVIDUALISTE. DES et occupant les ondes du service public pour y déverser leurs et fort leur détestation des barrières au relativisme héritées de CONDITIONS HISTORIQUES TRAGIQUES ET PAS SI ÉLOIGNÉES angoisses réactionnaires dans des bas de soie d’universitaires. l’immédiate après guerre. Mais leur haine d’une alternative au AVAIENT MÊME RÉPANDU LA CONSCIENCE INTIME QUE LA Un exercice d’autant plus délicat qu’il vous affublait par son capitalisme, qui avait selon eux vécu, s’habillait la plupart du temps SOLIDARITÉ ENTRE LES HOMMES, FUSSENT-ILS SI DIFFÉRENTS, instrumentation politique de compagnons de route des plus d’une déférence ostentatoire. Le vintage et la Grande Histoire ÉTAIENT UNE BASE INDISPENSABLE POUR TOUTE SOCIÉTÉ. douteux. À l’heure de la manipulation symbolique comme nécessité faisaient toujours recette. Et si leur détermination à faire voler MAIS LA MÉMOIRE COURTE AVAIT ENCORE MARQUÉ UN POINT. professionnelle, la réaction avait inévitablement fini en niche en éclats un anti-individualisme institutionnel rendu possible communicationnelle au service de la carrière. Un endroit où il ne par la force tragique de l’histoire s’était parfois montrée à visage faisait pas bon frayer. découvert, l’essentiel du démembrement à l’œuvre s’était opéré non pas discrètement mais au contraire sous la protection d’une En 2012, la France vivait et quittait la plus longue période de paix consécutive de son histoire. Les trente-neuf ans suivant la chute Quelles qu’en soient les raisons, force est de constater que la célébration gesticulatoire qui avait tout d’un détournement de de l’Empereur comme les quarante-trois précédant la Première disparition orchestrée des valeurs établies par ceux qui avaient mémoire. En réalité, bien que ce dynamitage masqué sous les Guerre mondiale étaient désormais loin des soixante-sept qui connu la contrainte et l’effroi formidables de la guerre ne fut que oripeaux de la glorification ait connu une forte accélération et une la séparaient de son dernier armistice. Soixante-sept ans, une marginalement prise en compte au moment des faits. Car en 2012, radicalisation au tournant des années 10, l’ouvrage ne s’était pas vie d’homme. Soixante-sept ans, l’âge légal de la retraite cette le Français qui avait eu 15 ans en 1945 en avait 82, l’âge de son fait en un jour. Les attitudes et idéaux des élites émergeantes année-là. A part quelques exceptionnels parrains dont les griffes espérance de vie. En 2012, les derniers témoins tournaient la page, dans les années 80, et leur montée en puissance s’envisageaient pouvaient encore servir, les hommes et les femmes désormais et avec eux disparaissait le souvenir direct d’un universalisme comme un mouvement progressif dont 2012 n’était que le point aux manettes étaient, pour la première fois de l’histoire de France, occidental non relativiste, hérité d’une grande frayeur. La nausée final. Quand le sens du tragique perdit tout ancrage mémoriel dépourvus de tout souvenir de guerre. Ce premier et unique et le vertige des années 50, l’enthousiasme de 68 et même la vivant, la catastrophe n’était plus loin. À l’époque, on ne pouvait pas sevrage total avec l’expérience de la nécessité s’avéra décisif. ferveur industrieuse des années 70 portaient encore – parfois le savoir puisque c’était la première fois. malgré les dénégations de leurs inspirateurs – la trace d’un idéal L’histoire est une science dangereuse puisqu’elle s’exerce sans fondé sur une connaissance intime de la nécessité. Un doute Cette génération, qui avait grandi dans un monde post-industriel processus expérimental et sur un matériel déjà existant. Et la qui ressemblait à une certitude. Et même ceux qui, en définitive, où plus rien n’était vraiment nécessaire, était venu refermer la tentation des explications a posteriori en fait à la fois la saveur en avaient peu souffert, parce qu’ils avaient connu les heures parenthèse enchantée d’un universalisme tardif qui avait fait une et le péril. De fait, pour nous qui nous situons de l’autre côté de noires, portaient en eux une connaissance intime et irréversible singularité française. Comme l’idée de Nation, dont elle avait la barrière du temps, 2012 est une année si particulière qu’elle de la notion de solidarité objective. On y trouvait là un relativisme contribué à maintenir l’illusion, cette fleur de septembre du génie donne naturellement lieu à bien des interprétations. La chute circonscrit par la connaissance de l’injustice. Un relativisme français était morte, n’en déplaise aux lecteurs de Marianne. Tout de la démocratie parlementaire et la guerre civile sur laquelle en somme tempéré et qui n’était pas encore considéré à la fois était vrai, rien n’était faux, et le libre jeu des intérêts était désormais elle a débouché, avant sa substitution par une organisation en comme le dernier héritage du génie occidental et son stratagème la seule justice possible. Mais fonder un ordre social sur le principe communes, ont fait l’objet de beaucoup d’analyses. On a parlé de pour ignorer sa mort clinique. selon lequel rien n’est vrai étant un exercice qui n’est possible la faillite inéluctable des élites, de l’emballement de la stimulation […] Mais fonder un ordre social sur le principe « rien n’est vrai » n’est un exercice possible qu’au prix d’une police permanente, et le quadrillage sécuritaire allait à vive allure. qu’au prix d’une police permanente, le quadrillage sécuritaire des désirs par la communication marchande, aussi de la crise Certes, le passage de témoin entre les générations ne s’était allait à vive allure. Il fallait bien contenir les dangers inhérents à la fatale des institutions dynamitées par le faux culte de l’individu ; on pas fait en un jour, et une clairvoyance minimale avait permis dimension subversive implicite d’une telle proposition. Pas assez a même parlé de la vengeance des Aztèques. Bref, de nombreux à quelques observateurs de pointer, plusieurs années avant la vite néanmoins, puisque, finalement, le 10 mai 2012, eut lieu l’Apéro arguments ont été avancés pour comprendre la soudaineté bascule, une évolution qui annonçait une rupture inéluctable. Mais Clash Géant et toutes les répercussions que nous lui connaissons. et l’ampleur de la métamorphose d’une société qu’on disait la perception de la séparation à l’œuvre fut largement obscurcie paradoxalement figée. Mais tout est allé si vite. par une frénésie commémorative dont tout indique qu’elle servait précisément de paravent à un solde de tout compte. S’il est Si ces propositions ne sont pas toutes farfelues, elles méritent aujourd’hui difficile de comprendre le lien entre Guy Môquet et les d’être conjuguées avec l’hypothèse générationnelle. Un argument grands seigneurs du capitalisme à la française, si le rapport entre le ◊ projection Texte, Rachel Nullans p. 74 Les Petits Métiers – Irving Penn p. 75 Un webmaster — comme s’il fusionnait les deux approches. Mais je ne sais pas si c’est cet aspect de son travail que je préfère. Il est évident qu’il sait Quels étranges noms de métiers… Rémouleur, marchand de capturer les personnalités, mais ce qui capte ici mon attention, au- concombres, vendeur de peau de chamois… 1950, c’était hier. Paris, delà de la photographie en elle-même, c’est le côté exotique de ces New York, Londres, trois villes opposées et pourtant similaires portraits : ce garde-champêtre de Montmartre avec son chapeau à grâce à cette foule, à ces artisans urbains. Et en même temps, il se la Napoléon me déroute, surtout si je l’imagine dans le Montmartre lit sur les visages de chacun, dans la pose, un trait caractéristique d’aujourd’hui… Mais je trouve que la véritable valeur de cette série de sa nationalité : les Français esquissant des sourires timides, les c’est d’être le témoignage d’un monde disparu et ça me gêne, Anglais arborant fièrement les insignes de leur profession et les dans l’appréciation que je peux en avoir. Il est évident que Penn Américains heureux de passer à la postérité par la photographie. maîtrise parfaitement la lumière, ce qui donne cette atmosphère On peut donc faire le même métier dans trois régions du monde particulière. D’un point de vue technique, c’est absolument parfait, mais ne pas le vivre de la même façon. Et puis les extraire de c’est acquis, il est l’un des maîtres de la photographie du xxe siècle. FONDATION HENRI CARTIER-BRESSON leur quotidien, les faire poser dans un studio, c’est transformer Mais il y a tellement de choses qui se superposent dans cette DU 5 MAI AU 25 JUILLET 2010 ce qui aurait pu être un reportage sociologique en un portrait exposition que je ne sais plus ce que je regarde : le témoignage psychologique. Je regarde ces visages de personnes que je n’ai d’une époque disparue ? une recherche sociologique ? le travail jamais vues, ces métiers que je n’imaginais même pas avoir pu d’un grand photographe ? Il me semble que l’exposition ne joue que exister, et je les regrette. J’imagine les rues de Paris bruyantes des sur cette nostalgie, sur le souvenir d’une société qui n’est plus. Et cris de ces hommes et femmes, parsemées de leur silhouette, et je trouve que cette nostalgie – que Penn ne pouvait pas imaginer Je me souviens qu’enfant je les voyais passer ces joueurs d’orgue il se dégage une atmosphère particulière. « Les petits métiers », si vive – interfère avec le véritable sentiment que font naître ces de Barbarie, rémouleurs, vitriers… et je les avais oubliés. Le monde un drôle de nom quand j’y réfléchis. Quand je les regarde, je ne images : face à ces cent portraits, je me sens perdu, submergé par a tellement changé, je ne m’en suis pas aperçu. Ces photos me me dis pas que ces gens font des petits métiers, je les vois fiers des métiers aux noms parfois vides de sens pour moi. C’est peut- ramènent à cette époque où les métiers s’affichaient sur les et arrogants, fiers de leur savoir, leur uniforme comme blason. être sévère, mais cette nostalgie qui surgit de partout m’insupporte hommes. Je me revois enfant regardant passer le laitier avec Quand je croise des gens dans la rue, je ne peux jamais identifier de plus en plus. On a compris que c’était mieux avant ! À la fin, elle ses bouteilles en verre dans lesquelles était recueilli ce lait bien leur profession, rien ne distingue les hommes les uns des autres… me fait rejeter ce travail. Je n’aime pas quand ce sentiment naît en blanc, et j’aimais écouter le son de l’orgue de Barbarie quand il se À cette époque, chacun portait les attributs de sa profession sur regardant une œuvre, quelle qu’elle soit ; j’ai toujours l’impression dispersait dans le quartier, les enfants accouraient vers la machine lui, la relation au travail était donc forcément différente de celle qu’il prend trop de place et ne laisse pas à d’autres sentiments, et fixaient ces partitions étranges devenir de la musique… La ville d’aujourd’hui. Il n’y avait pas de honte à exercer un métier qui plus subtils, la possibilité de se faire sentir. Alors oui, les « petits n’était pas la même, la vie non plus, d’ailleurs. En regardant ces aujourd’hui serait certainement désigné par une périphrase pour métiers » ont disparu, mais doit-on toujours faire la liste des choses photographies, je redeviens l’enfant d’un monde qui n’est plus. ne pas froisser les ego. Je dois avouer que c’est troublant toutes qui disparaissent ? Ça me renvoie que mon enfance est partie avec ce monde-là, qui ces photographies, ces portraits, je n’arrive pas à me figurer ce comme elle ne reviendra plus. Je ne pensais pas pouvoir regretter que devait être le monde à cette époque, pourtant pas si lointaine. cette époque. Je ne dis pas qu’elle était plus intéressante que celle J’ai comme une nostalgie de ce monde-là, il me semble qu’avec que nous vivons, mais, soudainement, je la trouve plus poétique. toutes ces figures, ces métiers ancrés dans la ville, Paris devait être Ces « petits métiers » qui donnaient un charme à la ville, une âme, moins froide, moins anonyme, ces gens dans les rues, devant leur même. Oui, il s’agit de cela : l’âme d’une rue, d’un quartier… Paris boutique, devaient créer des liens, tisser des relations aujourd’hui était moins grande, chaque quartier avait ses caractéristiques disparues ou virtuelles. Un retraité — […] À cette époque, chacun portait les attributs de sa profession sur lui, la relation au travail était donc forcément différente. Il n’y avait pas de honte à exercer un métier qui, aujourd’hui, serait certainement désigné par une périphrase, pour ne pas froisser les ego. ◊ propres, on voyageait en traversant la Seine… Ces hommes et femmes faisaient le lien. Je le trouve touchant ce réparateur de n’a plus eu de place dans cette société qui s’est métamorphosée Un photographe — en moins de cinquante ans en mettant sur la touche ces petites C’est étonnant de voir ce travail d’Irving Penn, moi qui le gens qui la composaient depuis des siècles. Cela me rend triste, connaissais davantage comme un grand nom de la photographie ému, toutes ces figures rieuses et fières, ces hommes et femmes de mode… Vogue, ses photos de mannequins parisiens ou ses qui proposaient leur savoir-faire… Comment ai-je pu les oublier ? portraits de mondains cultureux… Je me demande pourquoi il s’est Pourquoi n’ai-je pas remarqué le vide qu’ils ont laissé ? tout à coup intéressé à ces petits métiers, au point de les faire faïence. Qui fait encore réparer sa faïence ? Qu’est-il devenu, lui qui poser comme des stars dans son atelier. D’un autre côté, cette série reflète assez bien l’admiration qu’il avait pour Atget et Sander, points de vue p. 76 Texte, Pierre Ponant Voilà DANS LES ANNÉES 30, LA PHOTOGRAPHIE SE RÉVÈLE ÊTRE L’UN DES MÉDIUMS DE LA MODERNITÉ PERMETTANT UNE p. 77 […] Voilà est édité par Zedpublications, une société sous contrôle de Gaston et Raymond Gallimard créée pour lancer des hebdomadaires dont Détective et Marianne… tout en protégeant la librairie Gallimard et la fameuse NRF d’éventuels échecs commerciaux. de photoreportage, dont s’inspirera, en 1938, le patron du Times exclusivement des agences Trampus, Keystone ou France- à New York, Henry Luce, pour créer Life. Lucien Vogel fait partie Presse. La maquette, très aléatoire dans sa grille, affirme des de ces directeurs de revue qui sollicitent des images originales. principes modernes dans le rapport textes/images tout en restant Vu couvre ainsi, outre des reportages de société, les sujets ludique dans son rapport au lettrage des titres. Une expression qui s’imposent à l’actualité, comme la montée du nazisme en vernaculaire qui n’hésite pas à faire appel à « l’œil amateur ». Dans Allemagne ou la guerre civile en Espagne. Vu s’inspire de ces un numéro de 1936, la rédaction sollicite les lecteurs pour envoyer magazines illustrés que furent le Berliner Illustreite Zeitung et « des documents sur la vie », en affirmant : « […] peu importe l’Arbeiter Illustreite Zeitung, où officie John Hartfield en tant que l’aptitude rédactionnelle, littéraire ou le degré d’instruction ». photomonteur engagé. Les unes de Vu sont ainsi composées Nous ne leur demandons pas de faire des phrases, mais d’exposer par des photomontages d’Alexander Liberman, qui gère aussi simplement, sans littérature, même de façon abrégée, exactement une maquette moderne et inventive, puisant dans les théories ce qu’ils ont fait, vu, entendu, vécu. Plus professionnelles sont du constructivisme. Précurseur en France, Vu ouvre la voie les collaborations d’auteurs des reportages lointains comme où s’engouffrent de nouvelles publications. Le 28 mars 1928, ceux de Joseph Kessel, qui parcourt l’empire colonial, révélant le premier numéro de Voilà paraît avec pour sous-titre : des traditions et un exotisme qui restent le privilège de quelques « L’hebdomadaire du reportage ». Voilà est édité par Zed- explorateurs et aventuriers, ou ceux d’Albert Londres, beaucoup Une nouvelle presse périodique voit le jour. Avec des maquettes publications, une société sous contrôle de Gaston et Raymond plus polémiques. Des écrivains comme Georges Simenon se modernes et parfois inspirées des avant-gardes graphiques, Gallimard créée pour lancer des hebdomadaires dont Détective et prêtent à l’exercice, telle une enquête sur l’Europe en 1933. Jean PERCEPTION ESTHÉTIQUE ET SOCIALE DU QUOTIDIEN. AU TERME D’UN PROCESSUS RELATIVEMENT COURT, ENTRE LES ANNÉES 10 ET 20, L’USAGE DE LA PHOTOGRAPHIE INVESTIT PROGRESSIVEMENT LES COLONNES DE LA PRESSE GÉNÉRALISTE. La presse grand public augmente sa diffusion face à un lectorat qui s’intéresse de plus en plus à l’actualité immédiate et internationale. l’influence de ces magazines d’information devient décisive sur En particulier Keystone et France Presse, qui disposent de la Marianne… tout en protégeant la librairie Gallimard et la fameuse Prevost, Paul Allard, Claude Blanchard, Pierre Hamp, May Reeves… le comportement social et culturel de ses lecteurs. Le politique technologie téléphotographique. NRF des éventuels échecs commerciaux. L’hebdomadaire de faits sont les principaux signataires des enquêtes de société ou des divers Détective rencontre un très grand succès et résume la ligne portraits de « people ». Ainsi que le grand reporter Pierre Scize, Entre 1930 et 1934, une vingtaine d’agences photographiques éditoriale et la stratégie économique des Gallimard : mélanger collaborateur de L’Œuvre, du Canard enchaîné, du Figaro, de Vu, nouvelles voient le jour à Paris. La plupart sont fondées par des élitisme et grand public dans un éclectisme essentiel. qui couvre tous les fronts de l’actualité, des scandales politico- s’en empare et l’invention récente du photomontage joue un rôle important dans l’écriture et la lecture des idéologies. Avec l’illustration photographique, la presse périodique offre à photographes et journalistes, émigrés d’Europe centrale ou son lectorat les documents les plus récents et les plus rares. Mais d’Allemagne, ayant fui la montée des régimes autoritaires et du Voilà est dirigé par Georges Kessel puis, en 1933, par le critique espagnole. La guerre en Espagne devient un catalyseur. Les cinq au-delà du simple objectif de séduire ou de convaincre, le but nazisme. Parmi celles-ci, Alliance Photo, fondée en 1934 et dirigée d’art Florent Fels, ancien rédacteur en chef des revues Action (entre principaux magazines, ou illustrés photographiques, publiés à affiché par les groupes de presse est l’augmentation des tirages. par Maria Eisner, qui contracte de jeunes photographes encore 1920 et 22) puis de l’Art Vivant (voir Magazine #53). Imprimé en Paris vont envoyer une cinquantaine de journalistes au cœur du L’évolution des techniques va y contribuer. Si, depuis le début du inconnus – Robert Capa, Gerda Taro, David Seymour ou encore grand format, 30 x 43 cm, en sépia, avec une pagination variant de conflit. Un déluge de feu et d’images envahit la presse française. Si siècle, on peut imprimer simultanément et à moindre coût, le texte Henri Cartier-Bresson. Le talent de ces photographes est servi par 16 à 20 pages, Voilà paraît chaque samedi. La première période l’hebdomadaire de Gaston Gallimard reste sur une ligne sociétale et l’image, l’héliogravure – inventée par Karl Klietsch en 1875 – va l’innovation technologique et l’utilisation d’appareils adaptés aux privilégie des unes proposant un sommaire sous la forme d’un et ne prend pas ou peu de positions politiques, d’autres supports s’imposer (tout comme l’offset) au bénéfice d’une plus grande contraintes du photojournalisme de terrain : le Rolleiflex ou le Leica. photomontage. Florent Fels opte pour des unes avec un visuel affirment un engagement et des convictions plus radicales. Le précision dans la diffusion imprimée des images. La demande, L’industrie photographique, qui a compris les enjeux économiques, unique illustrant un des reportages. Des commandes sont passées magazine Regards en fait partie. En 1939, comme beaucoup sans cesse croissante, d’une illustration de l’actualité immédiate produit des appareils de plus en plus performants, légers et à François Kollar, Alban, Brodsky, Hans Namuth et Robert Capa. d’autres journaux, Voilà interrompt sa parution. pousse les patrons de presse à s’intéresser à la transmission maniables, adoptés par la nouvelle génération de créateurs : Mais les photographies des pages intérieures proviennent presque des visuels et de leur commentaire. L’emploi du téléphone Germaine Krull, André Kertész, Gisèle Freund… La sensibilité de par les correspondants internationaux des grands quotidiens l’émulsion photographique augmente, le format 35 mm s’impose, apporte un style nouveau au reportage écrit. L’invention, en 1913, favorisant des prises de vue de plus en plus rapides et permettant par l’ingénieur Belin, du bélinographe permet, par ailleurs, la un changement radical d’esthétique et de style. Le mode de transmission d’une photographie par fil ou par radiotélégraphie. fonctionnement du marché de la photographie demeure néanmoins Les reporters emportent avec eux la « valise bélinographe » qui, artisanal… Si les agences s’enrichissent rapidement, notamment en 1933, ne pèse que 17 kg. Ce nouveau rôle de la photographie par la vente de clichés d’archive, les photographes vivent souvent incite ses concepteurs à se doter d’un modèle économique pour dans des conditions précaires. Mais leur force provient de leur faire face à ses commanditaires. Les agences de presse vont y capacité à opérer dans des domaines extrêmement variés. Capa, pourvoir. A Paris, au début des années 20, le marché est partagé Brassaï ou Kertész proposent directement leurs images aux entre les vieilles agences, fondées au xix siècle, comme Havas, magazines. Des images nouvelles qui vont trouver leur lectorat à la new-yorkaise Associated Press, la londonienne Reuter, et travers ces supports qui révolutionnent le rapport texte/image. e celles plus récentes, Rol, Meurisse et Trampus. Mais les plus Créé en 1928 par Lucien Vogel, le magazine Vu en est un des performantes sont les agences photographiques qui s’adaptent exemples et peut être considéré comme le premier des magazines aux exigences de qualité formulées par la presse périodique. financiers ou des bas-fonds des grands ports à la guerre civile rétrovision ◊ p. 78 21-24 octobre 2010 grand palais & louvre, paris p. 79 Juin Sa 5.06 Ma 1.06 The Decapitation of Money Présentation des travaux menés lors de la résidence de Goldin + Senneby, deux artistes suédois, qui ont invité d’autres artistes à éprouver leurs théories sur la finance mondiale, en entremêlant fiction et réalité. Kadist Art Foundation, jusqu’au 25.07 Art Mode + Design Défilé Présentation d’une collection de Jasmin Santanen, dans un décor de design finlandais. Vente privée le lendemain. Institut finlandais, 16h Me 2.06 Art Parkett Le Centre donne une carte blanche à la revue Parkett. Table ronde, projection et discussions avec la curatrice de la prochaine biennale de Venise. Centre culturel suisse, jusqu’au 4.06 Art Parcours Saint-Germain 30 artistes invités pour cette 10e édition à investir boutiques, hôtels et places du quartier, sur le thème « Colours of sound ». Saint-Germain, jusqu’au 17.06, parcoursaintgermain.com Semaine de la critique Reprise de cette section cannoise sur les écrans parisiens. Cinémathèque, jusqu’au 6.06 Ve 4.06 Mode Dessins de Sonia Rykiel Dessins, carnets et notes de la styliste qui dévoile 40 ans de papiers intimes. Galerie Catherine Houard, jusqu’au 24.07 Reed Expositions Art + Architecture Perspectives L’architecte Odile Deck et l’artiste Camille Henrot investissent l’espace Vuitton, sous le commissariat d’Hervé Mikaeloff. Espace Louis-Vuitton, jusqu’au 5.09 Organisé par Partenaire Officiel Me 9.06 Voyage dans ma tête La collection de coiffes d’Antoine de Galbert. 400 pièces non occidentales pour parer la tête. Maison Rouge, jusqu’au 26.09 Fête Nationale Exposition nationale russe Célébration de la fête nationale et du savoir-faire russe, une sorte de foire de Moscou sous la nef. Grand Palais, jusqu’au 16.06 Design Designer’s Days Une foule d’expositions en quelques jours, de boutiques en galeries, sans oublier la Cité de la mode et du design. En ville, jusqu’au 14.06, infos sur designersdays.com Cinéma Je 3.06 Cinéma fiac.com Art A perte de vue Cycle de films avec paysages, étendues, horizons, perpectives… Forum des images, jusqu’au 1.08 Je 10.06 Mode Ecole d’Anvers Défilé annuel des étudiants de la section mode de l’Académie d’Anvers. Des défilés, mais aussi une ambiance et des rencontres pendant trois jours. Académie des beaux-arts d’Anvers, jusqu’au 12.06 antwerp-fashion.be Ve 11.06 Art Dynasty Une exposition en deux lieux rassemblant 40 (jeunes) artistes que l’art a à l’œil. Musée d’Art moderne + Palais de Tokyo, jusqu’au 5.09 Sa 12.06 Table ronde Le rôle de directeur artistique dans l’entreprise. Carrefour, Citroën, Betc luxe… Moult intervenants pour traiter de cette question, en plein Designers Days. IFM, 10h à 12h30 Art Zone Botanique Temporaire Exposition organisée par le collectif Glassbox sur le thème animal/végétal au sein de la Cité internationale + performances et interventions. Cité internationale, jusqu’au 4.07 Di 13.06 Foire Art Basel Le thermomètre du marché de l’art. Sinon, il y a Miami pour le design, aux mêmes dates. Bâle, jusqu’au 20.06 Je 17.06 Architecture Meilleurs diplômes 2010 Remise des diplômes 2010 et exposition à l’Ecole spéciale d’architecture. Ecole spéciale d’architecture, 19h Ve 18.06 Cinéma Pocket films Festival de films réalisés avec un téléphone portable, 6e édition, déjà. Forum des images, jusqu’au 20.06 Ma 22.06 Photo Cinéma Table ronde sur le cinéma iranien Réalisateurs et comédiens iraniens dressent un état des lieux de la création cinématographique perse, assez vivante ces dernières années. Cinémathèque, 17h30 Ma 15.06 Nouvel accrochage Les images de la nouvelle Russie, les polaroïds d’Anna et Bernhard Blums, et les cathédrales de Cyril Porchet de l’Ecal. Vernissage. MEP, jusqu’au 29.08 Edition Le meilleur du court Florilège des meilleurs courts métrages néerlandais produits cette année et parfois primés. L’Entrepôt, 20h Dick Higgins et Something Else Press Une maison d’édition de livres d’artiste existant depuis 1964, ses productions historiques et d’autres plus actuelles. Immanence, jusqu’au 3.07 Me 16.06 Me 23.06 Cinéma Cinéma Air Doll de Kore-Eda Hirokazu, Japon, 2009, 125’. Une poupée adulte prend vie et bouleverse la vie de ses rencontres. Par un réalisateur injustement méconnu. En salles Art Les Interlocuteurs Des œuvres dont le matériau est la parole : interviews, chorale, lectures, performances, etc. La Vitrine, jusqu’au 3.07 agenda Photo Valérie Jouve Un travail récent réalisé en Israël et en Palestine, toujours sur des questions d’humain et de l’espace. Centre Pompidou, jusqu’au 13.09 Photo Slideluck Potshow Projection de séries de 40 photographes sur le thème de la première fois + rencontre et soirée proposées par Nathalie Belayche. Comptoir Général, 19h network.slideluckpotshow.com p. 80 Je 24.06 Art Design Things Uncommon Une exposition autour du designer Noam Toram, qui interroge le design (et nos besoins) à partir du cinéma, sous un commissariat d’Alexandra Midal. Le lieu du design, jusqu’au 21.08 Miroirs noirs Une exposition conçue par Vincent Romagny avec entre autres Christophe Brunnquell, Pierre Leguillon, Mïrka Lugosi, Gyan Panchal, Bruno Perramant, Clément Rodzielski, AnneLaure Sacriste. Fondation Ricard, jusqu’au 26.06 Ve 25.06 Mode Carte Blanche à Vanessa Bruno Dans le cadre du festival Paris & Création, la styliste française est invitée à présenter une exposition. Art ou mode ? Galerie des Galeries, jusqu’au 14.08 Ma 29.06 Photo Bruno Serralongue Des travaux connus et un nouveau sur le Kosovo, interrogeant actualité, représentation et médias. Jeu de Paume, jusqu’au 12.09 Derniers jours Cinéma Le court en dit long Ce 18e festival de courts métrages présente la scène belge : indépendants, écoles, subventionnés… Centre Wallonie-Bruxelles, jusqu’au 5.06 Photo World Press Photo 2010 Ce qui se fait de mieux en photojournalisme, à découvrir avant Visa pour l’image. Galerie Azzedine Alaïa, jusqu’au 17.06 Architecture InDetails Le cabinet suisse Devanthéry & Lamunière présente trois réalisations : Philip Morris, la faculté des sciences de la vie de Lausanne et la tour de la TSR à Genève. La galerie d’architecture, jusqu’au 19.06 Art Myriorama Exposition personnelle d’Estelle Hanania, photographe et lauréate du festival de Hyères, qui présente des images de masques et de personnages imaginaires. Fat galerie, jusqu’au 30.06 Juillet 1.07 Dessin L’histoire de l’Europe en 160 caricatures Le dessin de presse à travers Le Soir et Courrier International. Centre Wallonie-Bruxelles, jusqu’au 6.10 28.07 16.07 Foire Design Parade 5e édition de ce festival qui s’installe à son rythme dans le paysage. Hyères, jusqu’au 4.07 3.07 Festival Rencontres photographiques d’Arles Rendez-vous estival et photographique. Vernissages et fêtes la première semaine. Arles, jusqu’au 19.07 Août Derniers jours Derniers jours Photo Pieter Hugo « Selected Works » pour des séries sur les supporters, le catcheurs et les scouts. Colette, jusqu’au 3.07 Art Diplômés 21 jeunes artistes diplômés et félicités par le jury aux Beaux-Arts de Paris. Beaux-Arts de Paris, jusqu’au 11.07 Art Lucian Freud Derniers jours de cette exposition qui a connu un vif succès et fait l’unanimité. Centre Pompidou, jusqu’au 19.07 Bouroullec Exposition « Lianes - Roches – Conques » d’Erwan et Ronan Bouroullec, composée de lampes étagères et display. Galerie Kreo, jusqu’au 22.07 Photo Les Petits Métiers Exposition d’Irving Penn, voir rubrique Points de vue pour les détails. Fondation Henri Cartier-Bresson, jusqu’au 25.07 Photo 15.07 Art Moscou Un circuit de 4 jours de découvertes dans la capitale russe. Musée d’Etat ou galeries privées, et rencontre de collectionneurs. Art Process, jusqu’au 18.07 art-process.com Visa pour l’image La Mecque du photojournalisme. Perpignan, jusqu’au 12/09 Trieste, jusqu’au 17.07 Design 2.07 Festival Festival International Talent Support (ITS) 10e concours mode et photo rassemblant de nombreux participants internationaux et soutenu par Diesel. Les Halles de Baltard Présentation de 100 images d’époque sur les Halles de Baltard, de leur construction en 1853 à leur destruction en 1973. Vente le 31 des reproductions exposées. Le Louvre des Antiquaires, jusqu’au 31.07 Art Dreamlands Le modèle du parc d’attraction dans les villes contemporaines, à travers le cinéma, la photo, le dessin… Centre Pompidou, jusqu’au 9.08 Photo Willy Ronis, une poétique de l’engagement Hommage au photographe centenaire après sa disparition à travers 150 clichés, dont certains inédits. Monnaie de Paris, jusqu’au 22/08 Mode Yves Saint Laurent Rétrospective consacrée au couturier retraçant 40 ans de création : 300 modèles, ainsi que des dessins, des documents et des films organisés par les commissaires Florence Müller et Farid Chenoune. Petit Palais, jusqu’au 29.08 Art Corps et décors Le travail de Rodin mis en regard de celui de Wim Delvoye, le classique versus le contemporain. Musée Rodin, jusqu’au 22.08 Graphisme La Poste vue par… l’école Olivier de Serres. Une sorte d’application, normalement moins éprouvante que la visite des diplômes. La Poste du 34, bd de Vaugirard, jusqu’au 21.08 ◊ Galerie Yvon Lambert 108, r. Vieille-du-Temple - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 71 09 33 Galerie Serge Le Borgne 108, r. Vieille-du-Temple - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 74 53 57 Artazart 83, q. de Valmy - 10e Mo République 01 40 40 24 00 Galerie Loevenbruck 40, r. de Seine - 6e Mo Saint-Germain 01 53 10 85 68 Les Arts Décoratifs 107, r. de Rivoli - 1er Mo Palais-Royal 01 44 55 57 50 Galerie Madé 48, r. de Lancry - 10e Mo République 01 53 10 14 34 Art Process 52, r. Sedaine - 11 M Voltaire 01 47 00 90 85 Galerie Kamel Mennour 47, r. Saint-André-des-Arts - 6e Mo Saint-Michel 01 56 24 03 63 La Bank 42, r. Volta - 3e Mo Arts-et-Métiers 01 42 72 06 90 Galerie de Multiples 17, r. Saint-Gilles - 3e Mo Saint-Paul 01 48 87 21 77 e o Beaux-Arts de Paris 13, q. Malaquais - 6e Mo Saint-Germain 01 47 03 54 58 Galerie Nelson Freeman 59, r. Quincampoix - 4e Mo Rambuteau 01 42 71 74 56 Bétonsalon 9, espl. Pierre Vidal-Naquet - 13e Mo Bibliothèque 01 45 84 17 56 Galerie Emmanuel Perrotin 76, r. de Turenne - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 16 79 79 Centre culturel suédois 11, r. Payenne - 3e Mo Saint-Paul 01 44 78 80 20 Galerie Pozzi Bertoux 115-117, r. Lafayette - 10e Mo Poissonnière 09 51 02 51 88 Centre culturel suisse 32 + 38, r. des Francs-Bourgeois - 3e Mo Rambuteau 01 42 71 44 50 Galerie Praz-Delavallade 28, r. Louise-Weiss - 13e Mo Bibliothèque 01 45 86 20 00 Centre Pompidou piazza Beaubourg - 4e Mo Rambuteau 01 44 78 12 33 Galerie Vanessa Quang 7, r. des Filles-du-Calvaire - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 44 54 92 15 Centre Wallonie-Bruxelles 127, r. Saint-Martin - 4e Mo Rambuteau 01 53 01 96 96 Galerie Almine Rech 19, r. de Saintonge - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 45 83 71 90 Cinémathèque 51, r. de Bercy - 12e Mo Bercy 01 71 19 33 33 Galerie Michel Rein 42, r. de Turenne - 3e Mo Chemin-Vert 01 42 72 68 13 Cité de l’Architecture 1, pl. du Trocadéro - 16e Mo Trocadéro 01 58 51 52 00 Galerie Thaddaeus Ropac 7, r. Debelleyme - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 72 99 00 Cité internationale 17, bd Jourdan - 14e Mo Cité-Universitaire Galerie Léo Scheer 14-16, r. de Verneuil - 7e Mo Saint-Germain 01 44 55 01 90 Cneai Ile des impressionnistes - 78400 Chatou 01 39 52 45 35 Galerie Vallois 36, r. de Seine - 6e Mo Saint-Germain 01 46 34 61 07 Colette 213, r. Saint-Honoré - 1er Mo Tuileries 01 55 35 33 90 Galerie Anne de Villepoix 43, r. de Montmorency - 3e Mo Arts-et-Métiers 01 42 78 32 24 Comptoir général 80, q. de Jemmapes - 10e Mo République 01 44 88 20 45 Galerie Xippas 108, r. Vieille-du-Temple - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 40 27 05 55 De la Ville Café 34, bd de Bonne-Nouvelle - 2e Mo Bonne-Nouvelle 01 48 24 48 09 Grand Palais 3, av. du Général Eisenhower - 8e Mo Champs-Elysées-Clemenceau 01 44 13 17 17 Ecole spéciale d’architecture 254, bd Raspail - 14e Mo Raspail 01 40 47 40 47 IFM 36, qu. d’Austerlitz - 13e Mo Gare-d’Austerlitz 01 70 38 89 89 Espace Louis Vuitton 60, r. de Bassano - 8e Mo George-V 01 55 80 33 80 Immanence 21, av. du Maine - 15e Mo Montparnasse 01 42 22 05 68 L’Entrepôt 7, r. Francis-de-Pressensé - 14e Mo Pernety 01 45 40 07 50 Institut culturel mexicain 119, r. Vieille-du-Temple - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 44 61 84 44 La Fabrique 51, av. Jean-Jaurès - Montrouge Mo Porte-d’Orléans 01 44 61 76 76 Institut finlandais 60, r. des Ecoles - 5e Mo Odéon 01 40 51 89 09 Fat galerie 5, r. Dupetit-Thouars - 3e Mo République 01 44 54 00 84 Institut néerlandais 121, r. de Lille - 7e Mo Assemblée Nationale 01 53 59 12 40 Fondation Cartier 261, bd Raspail - 14e Mo Denfert-Rochereau 01 42 18 56 50 Jeu de Paume - Concorde 1, pl. de la Concorde - 8e Mo Concorde 01 47 03 12 50 Fondation Henri Cartier-Bresson 2, imp. Lebouis - 14e Mo Gaîté 01 56 80 27 00 Kadist Art Foundation 19bis, r. des Trois-Frères - 18e Mo Abbesses 01 42 51 83 49 Fondation Ricard 12, r. Boissy-d’Anglas - 8e Mo Concorde 01 53 30 88 00 The Lazy Dog 25, r. de Charonne - 11e Mo Bastille 01 58 30 94 76 Forum des images porte Saint-Eustache - 1er Mo Halles 01 44 76 63 00 Le Lieu du design 74, r. du faubourg Saint-Antoine - 12e Mo Ledru-Rollin 01 40 41 51 02 Galerie Azzedine Alaïa 17, r. de la Verrerie - 4e Mo Hôtel-de-Ville 01 40 27 85 58 Le Louvre des antiquaires 2, pl. du Palais-Royal - 1er Mo Palais-Royal 01 42 97 27 27 Galerie Martine Aboucaya 5, r. Sainte-Anastase - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 76 92 75 Maison de la culture du Japon 101, q. Branly - 15e Mo Bir-Hakeim 01 44 37 95 01 Galerie Anatome 38, r. Sedaine - 11e Mo Bastille 01 48 06 98 81 Maison Rouge 10, bd de la Bastille - 12e Mo Quai-de-la-Rapée 01 40 01 08 81 Galerie Air de Paris 32, r. Louise-Weiss - 13e Mo Bibliothèque 01 44 23 02 77 MEP 5-7, r. de Fourcy - 4e Mo Pont-Marie 01 44 78 75 00 Galerie Marcelle Alix 4, r. Jouye-Rouve - 20e Mo Pyrénées 09 50 04 16 80 Monnaie de Paris 11, q. de Conti - 6e Mo Pont-Neuf 01 40 46 56 66 Galerie Art Concept 13, r. des Arquebusiers - 3e Mo Saint-Sébastien-Froissart 01 53 60 90 30 Musée d’Art moderne 11, av. du Président-Wilson, 16e - Mo Iéna 01 53 67 40 00 Galerie d’architecture 11, r. des Blancs-Manteaux - 4e Mo Saint-Paul 01 49 96 64 00 Musée Rodin 79, r. de Varenne, 7e - Mo Varenne 01 44 18 61 10 Galerie E.L Bannwarth 68, r. Julien-Lacroix - 20e Mo Belleville 01 40 33 60 17 Palais de Tokyo 13, av. du Pdt-Wilson - 16e Mo Iéna 01 47 23 54 01 Galerie Anne Barrault 22, r. Saint-Claude - 3e Mo Saint-Sébastien-Froissart 01 44 78 91 67 Passage de Retz 9, r. Charlot - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 48 04 37 79 Galerie Carlos Cardenas 43, r. Quincampoix - 4e Mo Rambuteau 01 48 87 47 65 Petit Palais av. Winston-Churchill - 8e Mo Champs-Elysées-Clemenceau 01 53 43 40 00 Galerie M & T de La Châtre 4, r. Saintonge - 3e Mo Saint-Sébastien-Froissart 01 42 71 89 50 Le Plateau 33, r. des Alouettes - 19e Mo Jourdain 01 53 19 84 10 Galerie Philippe Chaume 9, r. de Marseille - 10e Mo République 01 42 39 12 60 Point éphémère 200, q. de Valmy - 10e Mo Jaurès 01 40 34 02 48 Galerie Chez Valentin 9, r. Saint-Gilles - 3 M Chemin-Vert 01 48 87 42 55 Spree 16, r. de La Vieuville - 18e Mo Abbesses 01 42 23 41 40 e o Galerie Lucile Corty 2, r. Borda - 3e Mo Arts-et-Métiers 01 44 78 91 14 Surface to air 108, r. Vieille-du-Temple - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 49 27 04 54 Galerie Crèvecœur 4, r. Jouye-Rouve- 20e Mo Pyrénées 09 54 57 31 26 La Vitrine 24, r. Moret - 11e Mo Ménilmontant 01 43 38 49 65 © STUDIOPIU’ Communication S.r.l / MAGIS, Voido (design Ron Arad) © DR 12 Mail 12, r. du Mail - 2e Mo Etienne-Marcel Agnès b. 1, r. Dieu - 10e Mo République 01 42 03 47 99 preview, femme/woman: © Jupiterimages / chaise/chair: EMU, Re-Trouvé (design Patricia Urquiola) p. 82 p. 83 Galerie Chantal Crousel 10, r. Charlot - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 77 38 87 Galerie Magda Danysz 78, r. Amelot - 11e Mo Filles-du-Calvaire 01 45 83 38 51 Galerie Patricia Dorfmann 61, r. de la Verrerie - 4e Mo Hôtel-de-Ville 01 42 77 55 41 Galerie Les Filles du Calvaire 17, r. des Filles-du-Calvaire - 3e Mo Filles-du-Calvaire 01 42 74 47 05 Galerie des Galeries 40, bd Haussmann - 9e Mo Chaussée-d’Antin 01 42 82 34 56 Galerie gb agency 20, r. Louise-Weiss - 13e Mo Bibliothèque 01 53 79 07 13 Galerie Laurent Godin 5, r. du Grenier-Saint-Lazare - 3e Mo Rambuteau 01 42 71 10 6 Galerie Marian Goodman 79, r. du Temple - 3e Mo Rambuteau 01 48 04 70 52 Galerie Alain Gutharc 7, r. Saint-Claude - 3e Mo Saint-Sébastien-Froissart 01 47 00 32 10 Galerie Eva Hober 9, r. des Arquebusiers - 3e Mo Saint-Sébastien-Froissart 01 48 04 78 68 Galerie Catherine Houard 15, r. Saint-Benoît - 6e Mo Saint-Germain Galerie du Jour 44, r. Quincampoix - 4e Mo Rambuteau 01 54 54 55 90 Galerie Kreo 31, r. Dauphine - 6e Mo Odéon 01 53 10 23 00 adresses 3-7 septembre 2010. salon international du design pour la maison September 3-7, 2010. international home design exhibition Paris Nord Villepinte. www.nowdesignavivre.com Salon réservé aux professionnels. Trade only. Organisation SAFI, filiale des Ateliers d’Art de France et de Reed Expositions France. SAFI - 4, passage Roux. 75850 Paris Cedex 17. France. Tel. +33 (0)1 44 29 02 00. Fax. +33 (0)1 44 29 02 01. [email protected] p. 84 Bracelet et pendentif en argent. Hermes.com