Mise en page 1 - ZZ Productions
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MONTE CRISTO Adapté et mis en scène par HENRI FESCOURT Musique originale de Marc-Olivier Dupin Sommaire ■ Monte-Cristo, fiche technique et artistique ................................................3 ■ Cinea-Cine pour tous, n°135, 15 juin 1929 (p. 27)..................................7 ■ Cinemonde, 6 juin 1929 ....................................................................8 ■ Monte-Cristo, Claude Beylie et Francis Lacassin......................................10 ■ Henri Fescourt, un pionnier méconnu ....................................................11 ■ Signé Henri Fescourt, Francis Lacassin....................................................12 ■ La griffe cinématographique, Un Entretien avec Henri Fescourt ....................17 ■ Henri Fescourt, auteur : scénariste et/ou réalisateur ....................................19 ■ Affiche suédoise (Coll.° FilmMuseum, Amsterdam ©DR) ............................28 ■ Jean Angelo, Cinéa-Ciné pour tous, n°104, 1er mars 1928 (1° Couv.) ......29 ■ Jean Angelo [bio.], Cinéa-Ciné pour tous, n°104, 1er mars 1928 (p.16) ........30 ■ Jean Angelo, Cinéa-Ciné pour tous, n°131, 15 avril 1928 (1° Couv.) ......31 ■ Jean Angelo, Cinéa-Ciné pour tous, n°117, 15 septembre 1928 (p. 22) ......32 ■ Gaston Modot par Henri Fescourt ..........................................................34 ■ Lil Dagover, Philippe Pelletier ..............................................................39 ■ Marie Glory, Yvan Foucart, avec le concours de Mireille Beaulieu ............41 ■ Un journal [des journaux] de tournage ....................................................43 ■ Boris Bilinsky, René Clémenti-Bilinsky ....................................................47 ■ Louis Nalpas : seigneur du Ciné-Roman, Lenny Borger ................................50 ■ Louis Nalpas, producteur ....................................................................52 ■ Mémoire(s) pour une restauration : non-film/film........................................54 ■ La cinématographie française, 23 mars 1929, annonce publicitaire ............56 ■ Marc-Olivier Dupin, le compositeur et chef d’orchestre ............................57 ■ Journal du compositeur........................................................................58 ■ Générique de la restauration ................................................................63 Dossier compilé et édité par Jacques Poitrat / [email protected] assisté de Clélia Sainton (Université Paris VIII, Paris-St Denis) avec le concours de Lenny Borger MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO de Henri Fescourt (1928-1929) - France G é n é r iq u e ■ ■ ■ Scénario et adaptation : Henri Fescourt d'après le célèbre roman d'Alexandre Dumas et Auguste Maquet Réalisation : Henri Fescourt assisté de Armand Salacrou, Henri Debain, Isabelle Brabo, Jean Godard Images (panchromatiques) : Julien Ringel, Henri Barreyre, Goesta Kottula (et Maurice Hennebain), assistés de Paul Fabian ■ Photographies de plateau : Maurice Hennebain, Sacha Masour (et G. L. Manuel Frères) ■ Costumes : Boris Bilinsky (maquettes), exécutés par la Maison Granier ■ Décors : Boris Bilinsky (maquettes), exécutés par Louis Bertin Moreau ■ Effets spéciaux (Décors) : Paul Minine & Nicolas Wilcke ■ Régie : Léon Courtois, Fernand Tanière, Henri Pauly (et André Daven ) ■ Armateur (du Pharaon) : Marius Valoussière ■ Montage : Jean Louis Bouquet ■ Direction technique & Administration générale : Franck Daniau Johnston ■ Administrateur : Mouquet ■ Direction artistique (producteur) : Louis Nalpas ■ Production : Films Louis Nalpas ■ Ventes internationales : Grands Films Européens 1 MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO de Henri Fescourt (1928-1929) - France In te r p r é ta ti o n Jean Angelo Lil Dagover Gaston Modot Marie Glory Pierre Batchef Jean Toulout Edmond Dantès /Abbé Busoni /Comte de Monte-Cristo Mercédès /Comtesse de Morcerf Fernand de Mondego /Comte de Mortcerf Valentine de Villefort Vicomte Albert de Mortcerf Monsieur de Villefort Bernhard Goetzke Henri Debain Tamara Stezenko Diane Farèze Ernest Maupain Robert Mérin Armand Pouget Jack Taylor (boxeur) Michèle Verly François Rozet Tina Meller Henri Volbert Jean Godard Albert Bras Eliane Tayar Olga Spessivtzeva4 et le corps du ballet de l’Opéra-Comique La baronne Wrangel, Nadia Kozine, Gueirarot Henri Janvier, Safonoff, Ravitch, Eugène Gaïdaroff5 et Raymond Narlay, Émilien Richaud Abbé Faria Caderousse Haydée, fille de Tebelin la meilleure amie de Valentine de Villefort2 Monsieur Morrel Benedetto /Prince André Cavalcanti le père Dantès Ali Julie Morrel Maximilien Morrel la danseuse catalane le gouverneur du château d’If le joaillier Joannès le notaire une spectatrice à une avant-scène à l’Opéra3 spectatrices à l’Opéra spectateurs à l’Opéra 1.L’Intransigeant, 2 septembre 1928. 2.Ciné-Revue, Mon ciné, 12 décembre 1929 (incl. III.°). 3.L’Intransigeant, 17 novembre 1928. 4.Olga Spessivtzeva (1895-1991). > www.cndp.fr/balletrusse/portraits/olga.htm 5.A. P. Barancy, Avenir, novembre 1928. MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO de Henri Fescourt (1928-1929) - France ■ Tournage : 15 septembre 1928 > 20 mars 1929. Extérieurs : Marseille et environs (Château d’If), Aix en Provence, Toulon, Arles, Martigues (Miroir aux Oiseaux), Île Sainte-Marguerite, Pont du Gard. Studios : Société des Studios de Billancourt (Michel Feldmann, Dir.)6 1928/1929 • F. • 35 mm. • 1/1,33 • N. & B. • 5 740 m. • 2 parties • Muet. Présent° corpo. : Lundi 27 mai 1929, à 9:45 (1 part.) et 14:45 (2 part.) à l'Empire. ■ Distribution en France : Les Productions Réunies (Fernand Weil) Sortie en Salles : 25 octobre 1929 (1 partie) et 1 novembre 1929 (2 partie) Censure ministérielle : Visa n° 38 162 ■ Distribution en Allemagne (1929) : Terra United Artists /Der Graf von Monte Christo Prüf Nr. : 22 585 & 22 607 (2 680 + 2 339 = 5 019 m.) ■ Distribution en Hollande : City Film NV (Den Haag) /De Graaf van Monte Christo Sortie en Hollande : 26 septembre 1929 (3 812 m.) ■ Distribution en Italie (1929) : Il Conte di Montecristo ■ Distribution en Grande-Bretagne : [Gainsborough Pictures ] /The Count of Monte-Cristo ■ Distribution en Espagne : El Conde de Montecristo ■ Distribution en Suède : A.-B. Biografernas, Stockholm (Endamratt : Sofus Berg-Film) Sortie en Suède : 14 octobre 1929 /Greven av Monte Cristo (3 114 m.) ■ Sortie au Japon : 8 mai 1930 / e ■ e e e 7 8 9 ■ Restauration inédite de la version originale (Neg. A) - 1999/2006 : ZZ Productions ® 112 049, avec la participation d’ARTE France & de l’ONDIF et avec le concours du GosFilmoFond de Russie et des Archives Françaises du Film / Centre National de la Cinématographie. – Laboratoire : DIGimage 1928-29/2006 • F • D-Ciné. • 1/1,33 • N. & B. part.t Teinté (4) • [5 230 m.] • 218 min. env. (123 min. + 95 min./21 i./s.) • Stéréo (5.1) 2 époques : Edmond Dantès & Le Comte de Monte-Cristo + Le Châtiment Musique : Marc-Olivier Dupin (2005), interprétée par l’ONDIF, sous sa direction. 6. Robert Saint-Paul, Photo-Ciné, 15 janvier 1929. 7.+ > www.cinemacontext.nl 8.+ > www.filmoguia.com 9.Cinéa-Ciné pour tous, n° 114, 1er août 1928 [p. 8]. N. B. : Les noms et/ou informations entre [ … ] reprennent des sources non avérées. MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO de Henri Fescourt (1928-1929) - France u moment de ses fiançailles, le marin Edmond Dantès est arrêté et jeté dans la prison du château d'If sur la dénonciation de son rival auprès de la belle Mercédès : Fernand Mondego. Sur les indications d'un camarade de captivité, l'abbé Faria, et après s'être évadé, il découvre le trésor de l'île de Monte Cristo, immensément riche et connu sous le nom de comte de Monte Cristo, Dantès se venge de ses ennemis mais protège ceux qui furent bons pour lui et leur vient mystérieusement en aide. A Principales autres versions : 10 The count of Monte Cristo de Joseph A. Golden & Edwin S. Porter (1913), avec James O’Neill. ■ Le comte de Monte Cristo de Henri Pouctal (1917), avec Léon Mathot. ■ Monte Cristo de Emmett Flynn (1922), avec John Gilbert. ■ The count of Monte Cristo de Rowland V. Lee (1934), avec Robert Donat. ■ Le comte de Monte Cristo de Robert Vernay (1942), avec Pierre William Wilm. ■ Le comte de Monte Cristo de Robert Vernay (1953), avec Jean Marais. ■ Le comte de Monte Cristo de Claude Autant Lara (1961), avec Louis Jourdan… ■ 10.+ Uwe Jacobs [filmographie constituée par…], Les œuvres d’Alexandre Dumas père adaptées à l’écran > www.dumaspere.com + Philippe d’Hugues, Monte-Cristo, entre vérité et fiction (Les héros favoris du Cinéma), Le Figaro, jeudi 15 août 2001 [p. 15] + Gérard Lefort, Le comte de Hollywood (Les milles et une vies d’Alexandre Dumas), Libération [Un été 2002], sam. 20 et dim. 21 juillet 2002 [p. II] N. B. : Les noms et/ou informations entre [ … ] reprennent des sources non avérées. MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO restera-t-il encore longtemps le chef d’œuvre inconnu ? onte-cristo (1929), film tenu en très haute estime par Alain Resnais, qui le vit de nombreuses fois dans sa jeunesse, et que plusieurs historiens de l'écran s'accordent à considérer comme l'œuvre la plus importante de Fescourt, avec Les misérables ? Nul doute que Dumas ne l'ait mieux inspiré que Richepin. Vignaud ou Kistemaeckers. En confrontant sa version avec les adaptations précédentes de Pouctal (1917. avec Léon Mathot) et d’Emmett Flynn (1922. avec John Gilbert), Jean Frick écrit dans Mon Ciné1 : « La tâche d'Henri Fescourt était difficile, puisqu'il devait réaliser une oeuvre de technique moderne avec un scénario invraisemblable qu'il ne pouvait guère moderniser. Aussi le tour de force qu'il a réalisé est il des plus louables. Le mouvement caractérise cette nouvelle production. Son style est excellent et la mise en scène est somptueuse toutes les fois que l'action l'a nécessité... Monte-Cristo mérite de remporter un grand succès populaire. » De son coté, le critique de La Cinématographie Française souligne qu'« Henri Fescourt a prouvé son goût et son sens artistique eu faisant d'un poncif littéraire une œuvre visuelle pleine de charme »2. Robert Vernay, qui tournera en 1942 et en 1953 deux nouvelles versions du fameux roman de Dumas (avec Pierre Richard Wilm, puis Jean Marais), et qui était alors jeune critique à Cinémagazine, est plus élogieux encore : « Dans des tableaux comme ceux de la soirée à l'Opéra ou la fête chez le comte, écrit il, se trouve une charmante évocation de la vie aristocratique de 1845 les crinolines, les habits chamarrés des hommes, le décorum qui présidait à ces réceptions donnent aux images une sorte de grâce vaporeuse... »3. À coup sûr, ce Monte-Cristo fut le couronnement de la carrière muette de Fescourt : les photogrammes qui nous sont parvenus témoignent d'un sens aigu de la composition, d'une somptuosité architecturale éblouissante, d'une finesse de touche évoquant l'art du ballet. Monte-Cristo restera-t-il encore longtemps le chef d'oeuvre inconnu ? Claude Beylie et Francis Lacassin Anthologie du Cinéma © L’Avant-Scène & C.I.B., 1968 M 1.Mon Ciné, 8 août 1929. 2.La Cinématographie Française, 31 mai 1929. 3.Cinémagazine, 7 juin 1929. MONTE-CRISTO HENRI FESCOURT un pionnier méconnu (1880-1966) ’espère que vous conservez la foi et J Le cinéma n’a pas été ma raison d’être, mais si aucune exigence intérieure ne me poussa vers lui, il a, tout phénomène accidentel qu’il fût, déterminé ma vie et m’a valu des moments heureux. 1.La fondation de l’Institut des Hautes Études Cinématographiques, il en devient l’un des professeurs. Parmi ses élèves (de la promotion 1942-44) figurent Yannick Bellon, Pierre Malfille et Alain Resnais. Pendant la même période, il fonde et dirige un « cours de formation du comédien d’écran » , installé rue PierreDemours, qui recevra jusqu’à soixante-huit élèves et comptera parmi ses professeurs Ève Francis, la veuve de Louis Delluc. De 1943 à 1946, succédant à Germaine Dulac, décédée, il occupe également une chaire à l’École Technique de Photographie et de Cinéma de la rue de Vaugirard. C’est seulement le 4 janvier 1953 qu’il rompra ses derniers liens avec la profession cinématographique en quittant la Commission de contrôle des films, où il représentait le Syndicat des Techniciens depuis juillet 1945. Dès le printemps 1944, il avait occupé les loisirs de sa semi-retraite à composer deux gros ouvrages. Le premier, traitant de l’évolution des techniques, Du Cinématographe au Cinéma, devait paraître en 1950 à la Nouvelle Édition sans la faillite de cette maison. Le second, La Foi et les Montagnes, irremplaçable recueil de souvenirs, a été publié en 1960 et fut couronné par le Prix Armand Tallier (qui avait été l’un de ses interprètes dans Mathias Sandorf). Cet ouvrage a fait redécouvrir Henri Fescourt à la jeune génération, dont il était luimême un observateur très attentif. Claude Beylie et Francis Lacassin, L’historien et le théoricien/Henri Fescourt (1880-1966). Anthologie du Cinéma © L’Avant-Scène – C.I.B, 1968 cette immense curiosité pour tout ce qui s’écrit et se tourne et se joue,» écrivait François Truffaut à Henri Fescourt quelques mois avant la mort de celui ci. La foi, la curiosité, le besoin de séduire, de comprendre, de participer, d’être dans le coup : tout cela, qui a caractérisé jusqu’à la dernière minute l’auteur de La Foi & Les Montagnes © PM, Paris – 1959 (Prix Armand Tallier 1961), est dû pour une large part à un enthousiasme et une exubérance naturels, inséparables de ses origines méridionales. C’est à Béziers (Hérault) que naît le 23 novembre 1880, à onze heures du soir, Marcellin-Henri Fescourt, de Marie-Louis-Charles Fescourt, professeur au collège, et dame Marie-Jeanne-Charlotte Magrou, sans profession, son épouse. Après des études de droit, il est d’abord critique musical, journaliste (Intransigeant) puis auteur dramatique. Il débute au cinéma, en 1912, comme scénariste chez Gaumont, où Louis Feuillade, languedocien comme lui, l’accueille et l’encourage. Il passe bientôt à la réalisation. Sa carrière s’épanouit après la guerre dans les cinéromans, sous l’autorité de Louis Nalpas. En 1925, il tourne une somptueuse adaptation, en quatre époques et 32 bobines, des Misérables (avec Gabriel Gabrio, Sandra Milovanoff et Jean Toulout). Le parlant lui sera fatal…1 Il est décédé le 13 août 1966 à Neuilly sur Seine. MONTE-CRISTO Signé Henri Fescourt igné : Henri Fescourt1. Un nom cherché en vain dans l’Histoire du cinéma de Georges Sadoul la Bible de cette époque avant de le découvrir dans une note en bas de page. Quelques paragraphes chez Jeanne et Ford. Rien dans l’ouvrage de Bardèche et Brasillach. Cette amnésie quasi totale confirmait les doutes que j’avais éprouvés, en fréquentant l’avenue de Messine, quant à la crédibilité des ouvrages retraçant l’histoire du cinéma. Je n’incrimine pas les historiens. Pour avoir tenté d’imiter leur tache, j’en sais la difficulté. Les premiers d’entre eux ont essuyé les plâtres. Partis du néant, ils ont travaillé avec les moyens du bord. Le plus souvent : leurs souvenirs et quelques archives personnelles. Ou, dans le meilleur des cas, à partir d’épaves – photos, films ou documents échappées par hasard à la destruction. Ils ne pouvaient rien dire des auteurs et œuvres dont ils n’avaient pas eu personnellement connaissance et qui n’avaient pas laissé de trace. Il faut se méfier de l’esclavage du souvenir. Il tend à figer des échelles de valeurs anciennes et des appréciations passées alors que les idées changent et courent de plus en plus vite. Je pressentais que l’histoire du cinéma ne trouverait sa rigueur que le jour ou elle serait écrite par des générations dépourvues de souvenirs donc réduites à tenir compte des moindres débris et contraintes a une froide objectivité. Surtout l’exemple de Fescourt m’aidant à le croire le passé cinématographique m’apparaissait comme un iceberg dont seule une faible superficie émergeait à la vue. Impossible de soumettre S l’histoire du cinéma à une échelle de valeurs tant que le passé n’aurait pas été entièrement dégagé, comme disent les archéologues. Comment le dégager ? Comment opérer de grandes découvertes archéologiques dans le domaine des images périssables et qui subsistaient seulement dans des mémoires prêtes à s’éteindre ? Tel était mon état d’esprit, lorsqu’en 1959, au fond de la cour d’un immeuble lyonnais, je projetais et je re-projetais, fasciné, le Mandrin d’Henri Fescourt. Le film datait de 1924 ; je souhaitais en inclure quelques images dans mon court-métrage Mon ami Mandrin. Qu’était devenu Fescourt, était il en vie ? Grâce à l’érudit lyonnais Raymond Chirat, qui travaillait alors à un monumental index du Film parlant français de 1930 à nos jours,2 j’ai retrouvé sa trace. Quelques semaines plus tard, une lettre venue d’une maison de retraite de la banlieue parisienne m’annonçait gentiment : “Si un peu de mon Mandrin peut revivre à travers le vôtre, j’en serai ravi.” Tel fut mon premier contact avec un homme qui devait bouleverser l’orientation de ma vie ; avec qui je devais entretenir pendant sept ans un sentiment qui, malgré la différence d’âge, ressemblait à de l’amitié. Il se préparait à publier, l’année suivante, ses souvenirs. Par l’enthousiasme et la passion qui l’inspirent, l’ouvrage mérite bien son titre : la Foi et les Montagnes ou le Septième Art au passé.3 Il demeure pour moi un exemple, le modèle du passé vivant, de l’enthousiasme mis au service du témoignage. Il avait l’art de faire revivre les morts et d’en faire les amis du lecteur. Il éclairait MONTE-CRISTO ... Signé ... Henri Fescourt aussi les histoires du cinéma en bien des points qu’elles laissaient obscurs : il démentait des légendes celle de La vie telle qu’elle est et, d’une succession de films morts et de génériques synoptiques, il avait su faire jaillir des hommes vivants et montrer, tantôt avec émotion, tantôt avec humour, le combat qui les opposait aux montagnes du commerce et de la finance. Cet ouvrage n’est pas seulement le portrait d’une époque ou le récit d’une carrière, mais le livre de raison d’une conversion au monde des images, du développement de sa foi, de sa participation à la croisade pour le septième art. Rien en effet ne prédisposait à la carrière de réalisateur de films ce jeune Méridional né à Lunel en 1880. Élève de Vincent d’Indy à la Schola Cantorum, il se destinait à la musique mais, pour vivre, étant licencié en droit, il avait tâté du barreau à Paris avant de passer du cabinet du ministre au secrétariat d’un théâtre et, tout en ayant fait jouer deux ou trois pièces, il avait échoué à la rédaction de l’Intransigeant. Pour ce journal, vers 1910, il était allé interviewer Benoît Lévy qui, dans l’indifférence générale, soutenait les idées qui préludèrent à la formation du film d’art. Elles ne convainquirent pas non plus Fescourt, car c’est seulement dans l’hiver 1911-1912 que, pour remédier à des plaies d’argent, il écrivit sur le conseil d’un ami des scénarios de films – “plus c’est bête, mieux c’est payé”. Et il s’en alla les porter chez Gaumont ou plutôt à son directeur artistique, Louis Feuillade, auprès duquel l’avait recommandé un viticulteur de Lunel. Feuillade lui acheta quelques scénarios et finit par lui conseiller de les mettre lui même en scène. En un chapitre savoureux et mémorable, Fescourt a raconté comment Léon Gaumont entérina cette décision. En février 1912 donc, Henri Fescourt réalisa, d’après un scénario écrit par lui même, la Méthode du professeur Neura, le premier de la cinquantaine de films qu’il mit en scène pour Gaumont jusqu’en août 1914. Après la guerre, il demeura attaché jusqu’en 1929 à la Société des Cinéromans et réalisa surtout des films à épisodes : en 1919, Mathias Sandorf, chef d’œuvre du trucage mis au service de l’image poétique ; Rouletabille chez les bohémiens ; Mandrin qui, par son lyrisme généreux, son souffle épique et le dynamisme de ses images, s’affirme comme un véritable western français. Citons encore les Misérables et surtout son dernier film muet, Monte-Cristo, dont Alain Resnais avoue que sa beauté plastique le fascina. Après le parlant, Fescourt tourna en Suède, en Angleterre, en Afrique du Nord et en France bien sûr, où il réalisa en 1942 son dernier film : Retour de flamme où débutaient Roger Pigaut et Renée Saint Cyr. Toutes les grandes vedettes d’autrefois ont figuré au générique de ses films : René Navarre, Yvette Andreyor, Jean Toulout, Joë Hamman, Sandra Milowanoff, Renée Carl, Gaston Modot. Certains de sesassistants ont fait carrière dans des directions diverses : Jean Faurez, Armand Salacrou et Jean Louis Bouquet, bien connu des amateurs de littérature fantastique. Au début, Fescourt allait chez Gaumont comme on va à l’usine, mais il se mit à aimer son métier et enfin prit conscience de la puissance et de la vocation artistique de ce moyen MONTE-CRISTO ... Signé ... Henri Fescourt d’expression encore balbutiant. En 1920, il participe aux côtés de Canudo à la fondation du CASA, ce club des amis du septième art, où, en des soirées mondaines et choisies, des comédiennes récitaient des scénarios en forme de poème, à moins que ce ne fût le contraire. Le plus souvent, les réunions prenaient chez Poccardi4 la forme d’un dîner, à l’issue duquel les maîtres d’hôtel offraient une rose à chaque dame. Mais il se lia d’amitié aussi avec Germaine Dulac, Louis Delluc, Marcel L’Herbier, et à leur exemple prit la parole et la plume pour défendre ses idées. Avec eux et avec d’autres, il fonda le Ciné Club de France qui fut l’embryon de l’actuelle Fédération française des ciné clubs. En 1926, alors que l’avant garde s’enlisait sur la voie du cinéma sans sujet, il lança un pamphlet en trois épisodes, l’Idée et l’Écran, écrit en collaboration avec Jean Louis Bouquet, dont les vues, l’avenir l’a prouvé, étaient courageuses et prémonitoires. À peine à la retraite en 1942, Henri Fescourt devint professeur de la première promotion de l’IDHEC (1942-1944). Dans le même établissement, il dirigea un centre de formation du comédien que d’obscures raisons administratives firent fermer. Il entra alors à l’ETPC où il occupa, jusqu’en 1946, la chaire de cinéma laissée vacante par la mort de Germaine Dulac. Il représenta pendant quinze ans le Syndicat des techniciens du film à la commission de contrôle des films où il fit la connaissance d’André Bazin. Il vota systématiquement contre toutes les mesures de censure proposées, excepté une seule en quinze ans qui selon lui était justifiée. Il résilia ses fonctions en 1950, “lassé de s’être si longtemps prêté à une telle duperie”. Il se consacra alors à la rédaction de La Foi et les Montagnes. Couronné du prix Armand Tallier – ancien interprète de Fescourt –, ce livre fit redécouvrir à la jeune génération un homme auquel les histoires du cinéma, comme à beaucoup d’autres, n’ont pas donné la place qu’il méritait. Dès lors et jusqu’à l’intervention chirurgicale qui précéda sa fin, la petite chambre de sa maison de retraite reçut la visite des critiques, journalistes et historiens venus jusque de l’étranger. Il aimait réunir à déjeuner les jeunes réalisateurs, les jeunes critiques. Le repas était alors un feu d’artifice de souvenirs, de mots, d’anecdotes, de prévisions et de jugements très pertinents sur le cinéma muet... et aussi sur le cinéma des années soixante. Paraissant vingt ans de moins que son âge, Fescourt ne s’était pas muré dans le passé même s’il en avait été le meilleur peintre. Se multipliant en interviews, conférences et articles dans les revuettes, il se montrait attentif à l’évolution de la “nouvelle vague”, très admirateur d’Alain Resnais qui, en 1942, avait été son élève à l’IDHEC. Bien que diminué par la maladie, il avait consacré sa dernière sortie aller voir Pierrot le Fou de Jean Luc Godard et ce film l’avait impressionné. Grâce à lui, j’ai compris les tenants et aboutissants du passé du cinéma, j’ai appris le pourquoi des choses, pénétré dans les coulisses des chefs d’œuvre, vu revivre des hommes qui survivaient sous la seule forme d’une mauvaise photo¬graphie ou d’une laconique notice biographique. Guidé par Fescourt, j’ai redécouvert MONTE-CRISTO ... Signé ... Henri Fescourt des pionniers, des personnalités extraordinaires pour la plupart disparus depuis : Jean Ayme, le Grand Vampire ; Joë Hamman, compagnon de Buffalo Bill ; Yvette Andreyor, la fiancée de Judex ; les héritiers Feuillade ; la prolifique et (injustement) méconnue Alice Guy. De ces rencontres exaltantes, je revenais ébloui et, mon tour, j’en éblouissais mon entourage. Jusqu’au jour où, en 1961, Pierre Billard que je connaissais avant même la fondation de la revue de la Fédération française des cinéclubs en 1954 me demanda d’en faire profiter aussi ses lecteurs. Je n’avais jamais écrit une seule ligne sur le cinéma et ma vie de cinéphile trouvait enfin un sens. De simple voyeur ou consommateur d’images, je devenais un sauveteur. Le moindre loisir, le moindre voyage était consacré à une course de vitesse pour raviver les sources orales avant que leurs dépositaires, vaincus par l’âge, ne disparaissent. Et ce furent onze ans d’extraordinaires enquêtes policières ou archéologiques à travers la France, l’Europe, l’Amérique, l’Afrique du Nord pour retrouver un visage, un nom, un titre, la photo du cheval de Joë Hamman, la digue devant laquelle Alfred Machin a tourné L’or qui brûle5, la date de naissance de Josette Andriot, l’interprète de Protéa. Ainsi, j’arrivais à éclairer tel chapitre obscur de l’histoire du cinéma, à identifier un visage sans nom, réhabiliter un genre méprisé, exhumer un inconnu aussi précieux qu’un sarcophage pharaonique, placer un autre sous son véritable éclairage. Tâche exaltante, longue et surhumaine. Chacun de ces articles donnés à Cinéma 61 et ailleurs n’était pour moi que le brouillon du chapitre d’un ouvrage d’ensemble dont j’ai arrêté le plan en 1963. Consacré aux films dont les histoires du cinéma ne parlent pas mais que tout le monde allait voir burlesques, mélodrames, films policiers, il s’appellera Histoire du cinéma illettré. J’aurais aimé en faire l’hommage à Fescourt qui, à son insu aussi, m’a aidé à le composer. C’est lui qui m’a incité à écrire sur l’histoire du cinéma. Son exemple autant que ses conseils ont dirigé mes émerveillements, riches en conséquences. Avec Janine André Bazin, nous avons même réalisé, avec sa participation, une série d’émissions de télévision6 qui peut être ne partageront pas son tombeau. Décidé à ne plus quitter sa retraite, il voulut nous offrir à elle et à moi un déjeuner d’adieu. “Je n’ai pas l’intention de m’incruster plus longtemps, à partir d’un certain âge c’est de l’insolence…” Pour renouer avec le passé, il nous invita chez Poccardi mais, à l’encontre de tous les repas qui le précédèrent, il se dégagea de celui ci une indéniable mélancolie. Les magnifiques miroirs au cadre doré lui renvoyaient le visage inconnu des maîtres d’hôtel pressés, qui avaient depuis longtemps perdu l’habitude d’offrir des roses à leurs clientes... Par sa jeunesse d’esprit et sa verdeur physique, Fescourt faisait oublier son âge. Il n’a pu attendre et a choisi un jour de l’été 1966, où tous ses amis étaient en vacances, pour s’en aller sans les déranger... Mais il continue d’inspirer l’étrange entreprise de réhabilitation que je me suis imposée : elle tient à la fois de l’enquête policière, de la fouille archéologique et du travail de fourmi. MONTE-CRISTO ... Signé ... Henri Fescourt À vrai dire, je me demande si cette tâche trouvera son terme avant celui de ma propre vie. Plutôt que de promettre indéfiniment un concerto mythique, je me suis résigné, dès 1972, à publier les modestes arpèges destinés à le préparer. Textes témoins d’une course de vitesse contre l’oubli, fragments d’un puzzle incomplet : leur publication ne sera pas tout à fait inutile si elle 1.Sur cet auteur, voir Henri Fescourt par Claude Beylie et Francis Lacassin, coll. “L'Anthologie du cinéma”. 1967 2.Devenu par alluvions successives un irremplaçable Catalogue des films français de 1908 à 1949, dont l'ultime décennie, 1908-1918, est éditée par la Cinémathèque française en 1995. 3.Paul Montel éditeur, 1960, Réédité par les éditions d'Aujourd'hui dans la collection “Les Introuvables”. 4.Célèbre restaurant italien des grands boulevards. 5.Voir mon ouvrage, Alfred Machin, coll. “L'Anthologie du cinéma”. 1968 6.Le Cinéma raconté par un témoin. Cette série, jamais diffusée, dort dans les sarcophages de l’Institut national de l'audiovisuel. permet de faire naître de nouvelles vocations, comme la magie d’une rencontre a éveillé la mienne. Alès, novembre 1971 Aix les Bains, septembre 1993 Francis Lacassin Pour une contre-histoire du cinéma © Institut Lumière/Actes-Sud, 1994 (p. 20-25) MONTE-CRISTO La Griffe Cinématographique. 15 juin 1929. A propos de Monte-Cristo U n e n tr e ti e n a ve c Henri Fescourt ous aurions voulu au lendemain de la présentation de Monte Cristo rencontrer le bel artiste qui a adapté et mis en scène d’une façon exquise l’œuvre de Dumas et Maquet. Mais Henri Fescourt n’est pas facile à voir ni à joindre. Vous croyez le trouver dans sa propriété près de La Varenne, en ce moment toute fleurie de roses, et le hasard vous le fait rencontrer quelques jours après à Chantilly. Du reste, très affable et fort gai, il n’est pas l’homme distant que certains se plaisent à le représenter ; en aucune façon, il ne cherche à échapper à notre interview. Ceci soit dit sans offenser sa modestie : il n’affecte nullement de repousser les compliments que nous lui adressons ; car, il est de toute justice de le féliciter pour la virtuosité avec laquelle il a transformé une œuvre qui, en d’autres mains que les siennes, eût pu ne constituer que l’adaptation d’un mélodrame démodé. Son art en a fait une sorte de roman d’aventures extrêmement brillant, d’une émotion à certains moments réellement profonde et d’une fantaisie pleine de légèreté et de grâce françaises. – C’est, nous répond en souriant Henri Fescourt, qu’il a dans le talent de Dumas une variété infinie d’éléments très précieux. Pour ne pas nous trouver en infériorité d’esprit vis à vis de lui, nous répliquons du tac au tac : – De toutes façons, applaudissons que vous ayez choisi les meilleurs d’entre eux. Nous ne N vous cachons pas, en tout cas, que les lettrés ont apprécié la compréhension, dont vous avez fait preuve dans l’évocation de cette époque 18301840. Depuis les belles scènes provinciales chez l’armateur Morrel, en passant par celle de la Carconte, la plus profonde du film, jusqu’à l’étincelante représentation de l’Opéra et la soirée chez le comte de Monte-Cristo Henri Fescourt nous interrompt ici. – Vous êtes, nous dit il, un intervieweur délicieux. Il est toutefois équitable de dire que, si le film a paru présenter quelque agrément, c’est que j’ai eu derrière moi un homme, à qui je me plais à rendre hommage Louis Nalpas. En effet, le fait d’avoir entrepris un sujet tel que Monte-Cristo témoigne d’une belle audace de la part d’un producteur. Car enfin qu’est ce que Monte-Cristo ? sinon l’histoire d’un homme qui, ayant découvert un trésor fabuleux, émerveille Paris et tout l’Orient par son faste et sa splendeur. Ce faste et cette splendeur sont le thème visuel même de toute une partie du film. Pour que cet éblouissement, continue le brillant réalisateur, franchisse l’écran, si j’ose ainsi dire, et soit sensible au spectateur, il fallait obligatoirement que le producteur s’astreignit à un sérieux effort financier. Vous pouvez dire que Louis Nalpas a su ce qu’il voulait et qu’il ne s’est pas arrêté en chemin. Je suis content de le déclarer ici. MONTE-CRISTO ... La Griffe Cinématographique. 15 juin 1929. A propos de Monte-Cristo U n e n tr e ti e n a ve c ... Henri Fescourt Laissez moi également mentionner les admirables interprètes, dont j’ai été entourés, et tous mes opérateurs. Mais surtout, je m’en voudrais de ne pas citer d’une manière toute spéciale trois de mes collaborateurs principaux. En premier lieu, M. [Franck] Daniau-Johnston, administrateur général du film et directeur technique. Je ne dirai de lui qu’un mot : je souhaite à tous les metteurs en scène, mes amis, de l’avoir à leurs côtés. En deuxième lieu, Boris Bilinsky un artiste splendide, qui a marqué dans les costumes et les maquettes de ses décors, si fidèlement établis par Bertin Moreau, les moindres de mes intentions. Et enfin Henri Debain, qui, indépendamment de son grand talent d’interprète, n’a cessé de faire preuve dans l’exécution du film d’un dévouement absolu, – Combien de temps a duré la réalisation de Monte-Cristo ? – Nous avons commencé les prises de vues aux environs du 15 septembre ; elles ont été terminées vers le 20 mars suivant, j’ai entrepris les travaux d’adaptation et de découpage en fin juin dernier. Il a fallu se presser ; ceux ci furent terminés au commencement du mois d’août. – Vous aviez dit, vers cette époque que Monte-Cristo serait un film d’une seule séance ? – En effet, d’après le plan primitif. Mais au moment où je remis le découpage à Louis Nalpas, celui-ci me demanda, pour des raisons commerciales, de développer le scénario de telle façon que la projection durât deux soirées. Le film devait avoir tout d’abord 3 000 mètres il en a actuellement un peu plus de 5 000. Je crois du reste que pour un pareil sujet cette longueur est préférable. La réalisation du film qui avait été prévue pour cinq mois à cause de grandes difficultés techniques et matérielles à surmonter, fut prolongée d’un mois environ. Sur ces paroles l’éminent réalisateur des Grands et des Misérables, qui vient d’ajouter à la couronne du film français le nouveau fleuron de Monte-Cristo, nous quitte très aimablement, non sans nous avoir fait part de certains travaux intéressants auxquels il se livre concernant le film sonore. Louis Saurel MONTE-CRISTO HENRI FESCOURT Auteur : scénariste et/ou réalisateur p h ie E s s a i d e fi lm o g ra 1 1942 ■ Retour de flamme 2 Adapt.° et Dial. : Jean d'Ansenne/Jean-Louis Bouquet, d’après le roman de J.-Hervé Lauwyck – Musique : Louis Beydts – Prod.° : Général Films/Abel-Films (Bruxelles) 1942 ■ Face au destin [448 – 84 min.] Adap.° : Alfred Machard, d’après le roman de Charles Robert-Dumas – Scén. et Dial. : Jean des Vallières. Ass-réal. : Joe Hamman – Musique : Jean Lenoir et Mahieddine Prod.° : Diffusions Intellectuelles. Avec, entre autres, François Rozet (Le Lieutenant). 1939 ■ Vous seule que j'aime [1296 – 95 min.] … alias C’est vous seule que j’aime Scén. et Dial. : Alfred Machard, Max Eddy – Ass-réal. : Joe Hamman – Musique : Vincent Scotto. – Prod.° : Films Félix Meric. – Avec, entre autres, Joë Hamman [fig.°]… 1938 ■ Bar du Sud 3 [118 – 91 min.] ... alias Southern Bar (English title) Adapt.° : Jacques Chabannes, d’après André Beucler – Dial. : Jean Mamy Musique : [Henri Verdun,] Jacques Dallin et Jane Bos – Prod.° : Films Claude de Bayser. Avec , entre autres, Joë Hamman (Denis)… 1937 ■ L’Occident [875 – 100 min.] Remake de sa version muette de 1928 ... alias The West (English title) Adapt.° et Dial. : Jacques Chabannes, d’après la pièce Henry Kistemaekers Ass-réal. : Joe Hamman – Musique : Jane Bos. – Prod.° : Productions Claude Dolbert. Avec, entre autres, Joë Hamman… 1933 ■ Casanova 4 [197] de René Barberis … alias Les Amours de Casanova Scén. et Dial. : Henri Fescourt – Décors : Boris Bilinsky. Prod.° : M.J. Films (Jean de Merly) Compilation réalisée grâce à : 1. • Henri Fescourt (1880-1966), Claude Beylie et Francis Lacassin/Anthologie du Cinéma – Tome III [n° 26] © L’Avant-Scène – C.I.B., 1968 • Catalogue des Films Français de Fiction de 1908 – 1918, Raymond Chirat, avec la coll° de Éric Le Roy © Cinémathèque Française, 1995 • Catalogue des films français de long métrage – films de fiction 1919-1929, Raymond Chirat, avec la coll° de Roger Icart © Cinémathèque de Toulouse, 1984 • Catalogue des films français de long métrage – films sonores de fiction 1929-1939 [2e édition] © Cinémathèque Royale de Belgique, 1981 MONTE-CRISTO 1931 ■ Service de nuit [1117 – 75 min. – ?/4/32]6 Version française du film suédois de Gustav Edgren, Trötte Teodor, d’après la pièce de Neal et Ferner, Théodore est fatigué. … alias Théodore est fatigué … alias Les Nuits de Papa Adapt.°: Pierre Mandru – Dial. : Louis Yvré – Ass.-réal. : Jean Lorette et Maurice Thaon. Images : J. Julius [Julius Jaenzon] – Montage : Maurice Thaon – Tournage à Stockholm.7 Prod.° : Les Etablissements Jacques Haïk (Paris)/Film AB Minerva (Stockholm). 5 1931 ■ Serments 8 [11159 – 102 min. – ?/10/31]10 Version française du film suédois de Gustav Molander, En Natt11 … alias Le Rebelle Scén. : Ragnar Hylten-Cavallius – Adapt.° et Dial. : Pierre Maudru – Images : J. Julius [Julius Jaenzon]12 – Musique : Tchaïkowski – Montage : Maurice Thaon –Tournage à Stockholm. – Dir.° Prod.° : Anderson13 – Prod.° : Etablissements Jacques Haïk (Paris)/Film AB Minerva (Stockholm). 1930 ■ La Maison de la Flèche 14 [706 – 82 min. – ?/12/30]15 Un film parlant français. …alias The House of the Arrow (Engl. version de Leslie S. Hiscott) Scén. : Pierre Maudru, d’après le roman d’Alfred Edward Woodley Mason. Montage : Maurice Thaon. – Tournage : Studio Twickenham (Londres) et ext. à Dijon. Prod.° : Les Établissements Jacques Haïk (Paris)/Twickenham Film Studios (Londres). 1929 ■ Monte-Cristo 16 [620 – 5 740 m. – 25/10/29 et 1/11/29] Film en 2 époques – cf. infra. 1928 ■ L'Occident [668 – 2 000 m. – 26/9/28] ... alias The West (English title) … alias Idän kirot (Titre finlandais) 17 Adapt.° : Henry Kistemaekers, d’après sa pièce. – Ass-réal. : Armand Salacrou. Montage : Jean-Louis Bouquet – Tournage [mars-juin 1928], ext. au Maroc : Bou-Sbire, Mogador, Marrakech.18 Prod.° : Les Films de France/Sté des Cinéromans. 1927 ■ La Maison du Maltais 19 [542 – 1 635 m. – 11/1/29] d’après le roman de Jean Vignaud ... alias Sirocco Montage : Jean-Louis Bouquet. – Tournage, ext. en Tunisie : Sfax et Gabès.20 Prod.° : Les Films de France/Sté des Cinéromans. – Avec Tina Meller (Safia)... MONTE-CRISTO 1926 ■ La Glu [417 – 27/05/27] d’après le roman de Jean Richepin … alias Larmes d’enfant … alias Colette Ass-réal. : Louis Saurel22 – Montage : Jean-Louis Bouquet. Prod.° : Les Films de France/ Sté des Cinéromans. Avec, entre autres, François Rozet (le gars Marie-Pierre) 21 1926 ■ Les Larmes de Colette [516 – 25/3/27] de René Barberis – Scén. : Henri Fescourt23 Prod.° : Les Films de France/Sté des Cinéromans 1925 ■ Les Misérables [603 – 12 000 m. – 32 bob. – 25/12/25]25 Film en 4 époques : Prologue et Fantine/Cosette/Marius/L'épopée rue Saint-Denis. … alias Die Elenden (Titre allemand) Adapt.° : Henri Fescourt [et Arthur Bernède], d’après le roman de Victor Hugo Ass-réal. : René Barberis, Henri Debain, René Arcy-Hennery Montage : [Henri Fescourt et] Jean-Louis Bouquet – Tournage ext. : Digne, Toulon, Grasse, Nice et Montreuil sur Mer – Dir. Prod.° : Louis Nalpas – Prod.° : Films de France/Sté des Cinéromans.26 – Avec, entre autres, Jean Toulout (Javert), François Rozet (Marius Pontmercy), Émilien Richaud/Emilien Richard (Bamatabois)… 24 1925 ■ Un fils d'Amérique [374 – 1 750 m. – 6/3/25] d’après la pièce de Pierre Veber et Marcel Gerbidon ... alias A Son from America (English title) Ass.-réal. : Henri Debain – Prod.° : Films de France Avec, entre autres, Henri Debain (Robert Pascaud), Albert Bras (Pascaud Père)… 27 1924 ■ Les Grands [43329 – 1 900 m. – 19/12/24]30 d’après la pièce de Pierre Veber, Serge Basset Ass-réal. et Montage : Henri Debain – Prod.° : Films de France Avec, entre autres, Henri Debain (M. Bon, l’économe) et Jacques Prévert (le futur polytechnicien)… 28 1923 ■ Mandrin 31 [553 – 7 000 m. – 15/2/24]32 Comédie historique en 8 chapitres : Le révolté/L'exempt Pistolet/L'étrange escamoteur/ L'éloge de Mandrin/Le château de Mr Voltaire/La grâce du Roy/La trahison/Justice) Scén. : Arthur Bernède – Assis-réal. : René Barberis – Montage : Jean-Louis Bouquet Dir. Prod.° : Louis Nalpas – Prod.° : Sté des Cinéromans (Jean Sapene) MONTE-CRISTO 1922 ■ Rouletabille chez les bohémiens [821 – 8 430 m. – 13/10/22] Ciné-roman en 10 épisodes : Le Livre des Anciens/L'Arrestation/L'Instruction/ La Poursuite/La Page déchirée/L'Enlèvement/A Server Turn/La Pieuvre/Révélation / Le Retour, d’après Gaston Leroux – Tournage, ext. aux Saintes-Maries de la Mer, Arles, Eze, Tourettes sur Loup, Saint-Paul de Vence et environs de Nice Décors : Charles Sanlaville. – Prod.° : Sté des Cinéromans.34 Avec, entre autres, Joë Hamman35 (Hubert de Lauriac)… 33 1921 ■ La Bambola del miliardario. Film italien. [1 247 m.] … alias Poupée du milliardaire (Titre français) 36 37 Scén. : Jean Bouchor. – Tournage à Turin (Italie) – Prod.° : Audax Film. 1921 ■ La Nuit du 13 [66539 – 1 740 m. – 17/6/21]40 Drame en 5 parties. Prod.° : Compagnie Générale Cinématographique (Jean Benoît-Levy41). – Avec, entre autres, Jean Toulout (Dr. Arnolf)… 38 1921 ■ Mathias Sandorf 42 [57843 – 2 400 m. – 15/7/2144 (Version / Cirque d’hiver45 : 1h30)] Film en 9 épisodes, d’après Jules Verne – Assis-réal. : Jean-Louis Bouquet Tournage ext. : Provence (Entrevaux et Saint-Paul de Vence) – Décors : Gaston Lavrillier46 Montage : Mario Nalpas – Prod.° : Films Louis Nalpas (Nice) Avec, entre autres, Jean Toulout (Silas Toronthal), Gaston Modot (Carpéna), Armand Tallier (Pierre Bathory)… 1919 ■ Un toast à la lune [Inachevé] Prod.° : Film d’Art (Direction Artistique : Jacques Baroncelli) 47 1916 ■ [L'instinct est maître] 1915 ■ Quand même [5717 – 855 m.] Grand drame patriotique. Réal. : Henri Pouctal – Scén.° : Henri Fescourt Prod.° : Renée Carl 1915 ■ La Menace [4382 (Terminé par Henri Pouctal) – 1 600 m.] Film d’espionnage. Prod.° : Film d’Art (Direction : Louis Nalpas) Prod.° : Étab.ts Gaumont (mars 1912 – août 1914)48 Édition : CCL (Comptoir Ciné Location) 1914 ■ Fille de Prince [2695 – 1 080 m.] Un prologue et 2 parties : À Menton, les deux victimes/La bonne Madame Scèn. d’après le roman de Pierre Sales MONTE-CRISTO 1914 ■ Les Sept Suffragettes de Saint-Lolo [6318 – 179 m.] 1914 ■ Fleur d’Éxil [2806] 1914 ■ Deux Femmes... un Amour [1885 – 465 m. – 24/07/14] 1914 ■ Le Scrupule [6260 – 350 m. – ?/5-27/7/14] … alias Le Scrupule de Monsieur Dumontel 1914 ■ Le vrai Bonheur [7555] 1914 ■ Peine d'Amour [5140 – 702 m. – 15-16-17/06/14] Drame en 2 parties – Scén. d’après le roman de Pierre Sales 1914 ■ Petit Cœur d'Enfant [5186 – 312 m. – ?/6/14] 1914 ■ Maman [4143 – 300 m. – ?/5/14] 1914 ■ Les trois Ombres [6861 – 820 m. – 20/2/14] 1914 ■ L'affaire du Collier noir [65 – 682 m. – ?/5/14] 1913 ■ La Mariquita [4251 – 1 978 m. – ?/1/14] Drame en 5 parties : L’Orpheline/Les Années passèren/Au Cap, à l’assaut de l’or/ Revanche – Scén. d’après le roman de Pierre Sales Avec, entre autres, Gaston Modot (Mineur au Cap)… 1913 ■ La Marquise de Trévenec [4259 – 1 565 m.] Cinq tableaux : Un Drame/Les Conséquences d’un drame/Au Maroc, l’embuscade/ Le Destin/Les Remords/Épilogue. – Scén. d’après Pierre Sales 1913 ■ Le Percepteur hypnotisé 49 [5156] Comédie. 1913 ■ L’Agence Pigeaunneau [84 – 136 m. – 30/09/13] 1913 ■ Cubiste par Amour [1639 – 171 m. – ?/7/13] Comédie. 1913 ■ Le Fiancé impossible [2630 – 245 m. – ?/7/13] 1913 ■ Le Mardi gras [4184 – 210 m.] 1913 ■ Les joyeuses Noces de Saint-Lolo [3646 – 181 m. – ?/6/13] Comédie. 1913 ■ Quatre me suffiront [5724 – 158 m. – ?/5/13] MONTE-CRISTO 1913 ■ Le mauvais Locataire [4325 – 158 m. – ?/5/13] 1913 ■ La Perle égarée [5170 – 313 m. – 18/04/13] … alias La Perle bleue 1913 ■ Pourquoi ? [5576] 1913 ■ Jeux d'Enfants [3573 – 292 m.] 1913 ■ Le Départ dans la Nuit [1775 – 682 m.] Drame policier : Le piège/Les preuves/L'aveu. 1913 ■ Les deux Médaillons [1914 – 299 m. – 27/05/13] Avec, entre autres, Émilien Richaud (Brichaud)… 1914 ■ La Voix qui accuse [3742/7513 – 644 m.] Drame en 2 parties : Gaston Béraut/L'Aiguille émeraude. Avec Émilien Richaud… 1913 ■ Un Obus sur Paris Drame d’anticipation en 2 parties.50 … alias La Mort sur Paris 1913 ■ Le Crime enseveli [1621 – 563 m. – ?/3/13] – Décors : Garnier. 51 1912 ■ Le petit Restaurant de l'Impasse Canin [5208 – 167 m. – ?/2/13] Comédie. 1913 ■ Enfin seul ! [2279 – 202,5 m. – ?/01/13] 1912 ■ Paris - Saint-Pétersbourg, Minuit 35 52 [5057 – 297 m. – ?/?/13] 1912 ■ Le Chèque [1197 – 324 m. – 31/01/13] 1912 ■ La Loi de la Guerre [3935 – 276 m. – 17/01/13] 1912 ■ L'Ennemie [2301 – 259 m. – 10/01/13] 1912 ■ La Lumière qui tue [3976 53 – 407 m. – ?/1/13] Drame. 1912 ■ Le Regard [5828 – 206 m – ?/12/12] 1912 ■ Son Passé [6439 – 662 m. – 27/12/12] Comédie dramatique en 2 parties et un prologue. Scén. : Henri de Brisay. – Avec Armand Tallier (Jean d’Armoy)… MONTE-CRISTO 1912 ■ La Peur des Bandits [5299 – 192 m. – 27/12/12] 1912 ■ L’Amazone [142 – 305 m. – 11/11/12] Drame. …alias L’Amazone masquée 54 1912 ■ Le Mensonge [4398 – 312 m. – ?/11/12] Drame. 1912 ■ Les Rivales [6020 – 296 m. – ?/12/12] Drame. 1912 ■ L’Innocence est récompensée [3710 – 130 m. – ?/10/12] 1912 ■ Le Bonheur perdu 55 [775 – 312 m. – (2)1/10/12] Drame. 1912 ■ Un Vol a été commis [7144 – 224 m.] Drame. 1912 ■ La Bienfaitrice [688 – 279 m. – ?/09/12] Comédie. 1912 ■ Suzanne et les Vieillards [6599 – 304 m. – ?/9/12] 1912 ■ Le Ténor [6670 – 211 m. – ?/8/12] Comédie. 1912 ■ Un grand Seigneur 56 [7074 – 319 m. – ?/8/12] Comédie. 1912 ■ Fantaisie de Milliardaire 57 [2494 – 320 m. – ?/7/12] Comédie sentimentale. 1912 ■ Le Naufragé [4729 – 311 m. – 12/07/12] 1912 ■ L'Homme giflé 58 [3260 – 242 m. – 17/06/12] Comique. 1912 ■ Une Perle délicieuse [261 m.] Comédie en couleurs. 1912 ■ Les Risques du Flirt [6008 – 194 m. – ?/6/12] Comédie. 1912 ■ Un Mari à l'Essai [4189 – 207 m. – ?/6/12] Comédie. 1912 ■ La Méthode du Professeur Neura 59 [4451 – 211 m. – 24/05/12] Comique. 1912 ■ Bébé colle des Timbres [7730 (Série Bébé) – 137 m. – 17/5/12] MONTE-CRISTO o g ra p h ie N o te s / E s s a i d e fi lm 1 Ces notes sont (sauf autre indication) d’Henri Fescourt in La foi & Les montagnes ou le 7e Art au Passé © Publications Photo-Cinéma Paul Montel, Paris, 1959 “Qu’on me laisse ici me glorifier…” [p. 348] 1. 2.De même, je serai discret sur les cinq ou six derniers films de ma carrière. Je n’en garde loin de là aucune mauvaise conscience [p. 422] 3.Bar du Sud, auquel André Beucler collabora, recueillit une critique de bon aloi et fut, au dire du distributeur, M. Lhez, un de ceux qui lui rapportèrent le plus d’argent. [p. 422] 4.Casanova, projet d’un producteur indépendant, Jean de Merly. Mais des troubles de santé, séquelles de la guerre, se reproduisirent chez moi. Je tombai malade et dus me tenir éloigné des studios pendant quatre années au mois. [p. 396] 5.Une bande de remplissage : la version française d’un vaudeville scandinave ? Service de Nuit, farce innocente qui contenait des inventions réellement lourdes. [p. 392] 6.“Bien qu’une partie importante de ce film ait été tournée par Fescourt en Suède avant Serments, quelques raccords et le montage définitif ne furent achevés qu’à l’hivers 1931, aux studios de Courbevoie. Nous le citons donc après Serments.” Claude Beylie et Francis Lacassin, Henri Fescourt © Anthologie du Cinéma, Op. cit. 7.J’étais venu à Stockholm pour réaliser une œuvre dramatique, Serments, à laquelle, chez Haïk, on attachait de l’importance. Je ne me rappelle plus quel incident obligea à en remettre l’exécution à deux mois et demi plus tard.[p. 392] 8.Serments ne manquait pas de mérites, ne serait-ce que celui d’un effort vers une alliance harmonieuse du son et de l’image… [p. 395] 9.Épisode révolutionnaire fictif, d’un conflit armé entre la Finlande et la Russie soviétique, entre blancs et rouges… 10.Copie/AFF-CNC - Liste des films nitrates de la collection de la Cinémathèque suisse sauvés par d’autres cinémathèques. >www.cinematheque.ch/F/filmsnitratessauves.htm 11.Le film suédois mesura 2.800 mètres, le film français 2.200. Ils coïncidèrent parfois et divergèrent le plus souvent. [p. 393] 12.« M. Julius ». L’opérateur qui avait tourné la Charrette Fantôme de Sjöström. [p. 391] 13.De tout nôtre cœur, nous chantions les louanges de notre Svenska merveilleuse et de M. Anderson, son directeur général. Voilà des producteurs comme nous les comprenions ! [p. 395] 14.Ma Maison de la Flèche, policier cent pour cent et cent pour cent parlant, il fut ques- tion que je tournerai dans les studios de Boulogne-Billancourt. Mais, comme on ne s’entendit pas sur les dates où je pourrais en disposer, on m’envoya en Angleterre. [p. 384] 15.Copie/AFF-CNC - Liste des films nitrates de la collection de la Cinémathèque suisse sauvés par d’autres cinémathèques. >www.cinematheque.ch/F/filmsnitratessauves.htm 16.La deuxième version française de MonteCristo que j’eus la chance d’enlever sans maladresse, pour le compte de Louis Nalpas. Qu’on me laisse ici me glorifier : on voyait dans ce Monte-Cristo un bateau de 1815, entrer, voiles déployées, dans le vieux port de Marseille en pleine activité de 1929 sans qu’il fut possible au public de percevoir le moindre mouvement moderne sur les quais ou en rade, le moindre vapeur, le moindre canot à moteur, le moindre tramway, la moindre auto, le moindre globe électrique. La prise de vues ne fut pas facile. Cette production réunissait une constellation de vedettes européennes autour de Jean Angelo (Edmond Dantès), Lil Dagover, Bernard Goetske, Jean Toulout, Pierre Batcheff, Mary Glory, Michèle Verly, Gaston Modot, Henri Debain, etc… Jean Angelo, homme splendide cachait sous une apparence glacée, une âme chaude et exquise. Monte-Cristo fut son dernier film. Il mourut une année plus tard dans ce qu’on ignore, un état de pensée presque mystique. Monte-Cristo fut aussi la dernière des superproductions muettes dans le monde. [p. 348] 17.L’Occident, d’après la pièce d’Henry Kistemaekers, film fastueux, mon ultime production aux Cinéromans. Ma conception du jeu d’écran ne coïncida pas avec celle de la vedette, Claudia Victrix, épouse influente de Jean Sapène. La version parlante que je tirai, plus tard, du même sujet valait mieux que la version muette. De celle celle-ci je garde le souvenir que j’eus pour assistant l’attachant et un peu frénétique Armand Salacrou qui, à ses moments perdus, songeait à devenir metteur en scène de films. [p. 347] 18.J’ai encore à l’esprit nos promenades marocaines de Bou-Sbire, de Mogador, et, à Marrakech, nos propos nocturnes dans les jardins de la Mamounia… [p. 347] 19.L’intérêt de la Maison du Maltais consisterait en ce qu’afin de représenter sans retouche la réalité des rues d’une petite ville tunisienne, je fis jouer mes acteurs, du moins pour la partie qui se déroule à Sfax, en pleine vie familière. [p. 347] 20.Je m’en allais en Tunisie et réalisai la Maison du Maltais de Jean Vignaud, à Sfax, ville des olives et du jasmin, (« Yasmina ! Yasmina ! » crient, un œillet à l’oreille, les marchands de bouquets) et à Gabès aux remparts roses et dont les hauts dattiers se mirent dans un oued… [p. 347] 21.Je partis en Bretagne, tourner La Glu de Jean Richepin. Là, je donnai cours à mon amour des sites sauvages. Peut-être suis-je parvenu à exprimer ce noble pays selon une intéressante vision encore qu’un caprice du temps m’empêcha d’enregistrer aucun effet de brume. Le soleil n’arrêta pas de briller. Cherchait-il à honorer en moi le Méridional ? [p. 346] 22.Louis Saurel, qui, déserteur du cinéma, devait, quelques années plus tard, se faire un nom estimé dans travaux historiques. [p. 346] 23.Claude Beylie et Francis Lacassin / Henri Fescourt © Anthologie du Cinéma, op. cit. 24.Les Misérables de Victor Hugo dont le succès, qui fut mondial, dépassa, pour donner au cliché sa valeur expressive exacte, toutes les prévisions. [p. 343] 25.Restauration 1985 / CF [Tome II, p. 84], à partir d’une copie flam d’origine. 26.Dans le cadre des Cinéromans, les Films de France constituaient une branche où ne seraient réalisés que des films exigeant un effort artistique et financier spécial. [p. 344] 27.Une comédie, le Fils d’Amérique, mal reçue par la presse, peut-être avec raison. Je me relevai de cette déconsidération par un coup heureux : les Misérables... [p. 344] 28.On accueillit bien mon travail. Les Grands furent même celui de tous mes films qui réunit une quasi unanimité d’éloges. [p. 343] 29.Dans un collège, un bon élève amoureux de la femme du directeur est en butte à la jalousie d’un cancre… 30.Sauv. en 1994… Persistance des images © Cinémathèque Française, 1996 [p. 243] 31.Mandrin, on en devait le scénario à Arthur Bernède. J’avais jusqu’alors supposé que les invraisemblances et les exagérations, nombreuses dans les histoires de cet auteur, étaient le fait d’une imagination de romancier populaire. Je constatai qu’il ne négligeait en rien le souci de se documenter. [p. 343] 32.Restauration 1986 / CF [Tome I, p. 71], à partir du négatif flam d’origine. MONTE-CRISTO 33.Rouletabille de Gaston Leroux relatait une légende mouvementée qu’il avait recueillie chez les gitans espagnols, une drôle de chanson de geste, extravagante et vagabonde. [p. 342] 34.Je fus engagé aux Cinéromans et j’y restais de 1922 à 1929. Durant ces huit ans, j’y réussis un paradoxe : je ne réalisai que deux filmsfeuilletons dans cette maison spécialiste justement des films-feuilletons. [p. 342] 35.Parfois, je voyais apparaître sur le plateau une espèce de long oiseau migrateur au corps mince. Il tournait avec discrétion un film téméraire où des lions en fureur se ruaient sur lui, en tournait un autre, moins périlleux où, tombant d’un cheval au triple galop, il roulait sur un sol plein de pierres, évitant à un quart de seconde près une auto lancée en bolide. Puis, on le perdait de vue. Un matin, il réapparaissait, et ainsi de suite. C’était Joë Hamman, cavalier de haut style, une des figures frappantes des années 1907 à 1914. [p. 109] Un jour, en 1922, en tournant Rouletabille que je mettais en scène, le cheval que montait Hamman se cassa une jambe. Un vétérinaire, aussitôt mandé, déclara cette blessure sans remède : il valait mieux abattre la bête. On eût cru que le cheval sentait la compassion de son cavalier. En mourant, il poussa une plainte, et son regard angoissé ne se détachait pas de celui d’Hamman. Celui-ci fut malade en rentrant le soir. [p. 112] 36.Film que je réalisai à Turin pour un producteur italien et qu’à ma stupéfaction, je vis classer dans une Histoire du Cinéma parmi les riches et vaines superproductions (son coût avait été de 185.000 lires soit au change de 1921, 95.000 frs, - la raison de cette méprise en doit être que la distribution confrontait plusieurs interprètes de nationalités différentes). [p. 342] 37.www.anica.it/archivio.htm 38.La Nuit du 13 aurait dû se classer parmi les films recommandables. Il ne fut que ce qu’on appelle un bon film. La faute en revient à moi seul. Elle vaut que je la rapporte en ce qu’elle définit à merveille l’ «esprit cinéma ». Il régnait déjà. Il vous submerge et vous finissez par y participer. … [p. 202] 39.Un homme, détenteur d’un pouvoir interne occulte, pour se venger de deux amants assassins, envahit leurs âmes. Il ébranle leurs nerfs, organisant chez eux des angoisses confuses, le désarroi de la volonté, des pressentiments sombres, porte ainsi à son comble leur épouvante en même temps qu’il provoque chez eux une haine réciproque et obsédante, etc… [p. 202] 40.Restauration 1986 / CF [Tome I, p. 81], à partir du négatif flam d’origine. 41.Pour cette Nuit du 13, - titre si souvent copié depuis, recopié et imité – un sort favorable me donna comme animateur de la production un homme instruit du cinéma, de conseil sûr, loyal, Jean Benoît-Lévy, neveu d’Edmond Benoît-Lévy et futur réalisateur de la Maternelle. [p. 202] 42.Le récit visait moins au lyrisme qu’au simple exposé d’aventures. Le sujet, transposition par Jules Verne de Monte-Cristo, était destiné à être tourné en sept épisodes. [p. 194] 43.Romuald Joubé interprète le rôle titre. L'histoire se passe en Europe centrale. Sandorf est un opposant au régime. Un jour, pourchassé par la police, il se jette à l'eau. On retrouve ses vêtements et l'on en déduit qu'il est mort. Des années plus tard, un homme richissime et étrange, Antékirtt, fait escale sur son yacht... 44.Cinquante-quatre cinémas voulurent présenter Mathias Sandorf en première semaine. Le film fut acquis par l’Amérique, phénomène exceptionnel, à cette époque, en France. [p. 198] 45.Enfin la bande, divisée en épisodes, fut remontée pour être projetée en une seule et longue séance, en exclusivité, au Cirque d’Hiver. Le spectacle teint l’affiche sept mois. [p. 198] 46.En France, grâce à l’imagination et l’adresse, on savait donner une apparence de grand film à des œuvres réalisées chichement. En l’espèce, le mérite de la réussite de Mathias Sandorf revint pour la plus large part à la virtuosité de Gaston Lavrillier. Peut-être, cet homme de valeur n’a-t-il pas été, lui aussi, suffisamment apprécié chez nous. [p. 196] 47.[Ce sujet] devait fournir plus tard, le thème des Cinq Gentlemen Maudits que tourna d’abord Luitz-Morat et dont Julien Duvivier fit un film parlant. Je l’adaptai, le transposai dans le monde des médiums… [p. 176] 48.Je suis resté trente mois à l’usine, de mars 1912 à août 1914. J’y ai vu se succéder à peu près vingt metteurs en scène à l’essai ; six se sont maintenus. Le petit personnel appelait les nouveaux venus : les condamnés à mort. [p. 76] 49.Ne la cherchez pas dans les cinémathèques ! On la jugea indigne, on la détruisit, on l‘effaça du souvenir des hommes. [p. 69] 50.Œuvres méconnues et inconnues du cinéma français, CINEMA, n° 18, mai 1957 [p. 85] 51.Dans ce film (qui servit aux débuts cinématographiques du tragédien Yonnel), on voyait sauter la tour de Montlhéry. [p. 241] 52.Une jeune et jolie femme abandonne son mari. A en croire le cinéma, le théâtre et la littérature de ce temps-là, les foyers conjugaux reposaient sur les bases les plus chancelantes. Mais, dans mon film, la faute était aggravée ; l’épouse avait abandonné son enfant. [p. 67] 53.Je résolus, avec La Lumière qui tue, d’évoquer l’épopée de ces chercheurs que guette le sournois cancer des rayons, se transmettant sans faiblir, sans grandiloquence, le flambeau de la science et la consigne de l’abnégation. … Le très jeune artiste qui tint le rôle du disciple fut un des premiers acteurs tués en 1914 : Maurive Vinot. [p. 68] 54.Un officier très épris d’une jeune étrangère. C’est tout. Nul besoins d’autres explications. [p. 67] 55.Une jolie femme a épousé un officier de marine, homme de devoir, un peu embêtant. Elle s‘est éprise d’un comédien à la mode. Finalement, elle déserte le foyer conjugal pour suivre l’homme de théâtre brillant. Le marin va chercher un dérivatif à sa peine au Maroc que la France était en train de conquérir. Le temps passe… Lorsque le comité directeur prit connaissance de ce film, il éprouva, me fit-il savoir, une sensation d’originalité ». par malheur un accident survint au négatif et à la première copie : toutes les scènes du Maroc (tournées dans la forêt de Fontainebleau) furent détruites... [p. 65] 56.Un sujet plus périlleux : Un grand seigneur. Un employé de grand magasin, un calicot, ayant gagné un million à la loterie, préfère le dépenser en huit jours plutôt que le placer à petits intérêts… la bande vit le jour, auréolée de curiosité et, en fin de compte, rivalisa presque de succès avec Fantaisie de Milliardaire [p. 65] 57.J’obtins avec Fantaisie de Milliardaire, un succès qui me valut une détente de visage de M. Gaumont avec approbation de tête. Une jeune fille milliardaire, courtisée par des prétendants que, seule, sa fortune séduit, se fait engager en secret comme dactylographe afin de découvrir l’homme qui l’aimerait pour elle-même. [p. 64] 58.Après trois autres bandes banales, L’homme giflé, le Mari à l’essai et Les risques du flirt… [p. 64] 59.Mon film, la Méthode du professeur Neura, d’une longueur de 120 mètres, présenté aux puissances de la maison, ne m’attira pas énormément de compliments, mais je ne fus pas expulsé, ce qui me remplit d’aise car on m’allouait soixante-quinze francs par semaine. [p. 64] MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO JEAN ANGELO nous parle de "Monte Cristo " – de l'ancien et du nouveau l y a de curieuses coïncidences dans la destinée des artistes. En 1914, Louis Nalpas, alors directeur artistique du Film d'Art confiait à Jean Angelo le premier rôle d'un grand filin à épisodes tiré du Comte de Monte Cristo, d'Alexandre Dumas. En 1928, Louis Nalpas, directeur des films Louis Nalpas, confie au même Angelo le même rôle. Admirons en passant la belle obstination de Louis Nalpas, fidèle à ses amitiés et à ses admirations. Quant à Angelo, que nous retrouvons, après quatorze années de labeur et de triomphe, en pleine possession de son talent, quel pouvait bien être son état d'esprit devant ce retour à ses lointains débuts ? Nous le trouvons assez ému à l'idée de reprendre ce merveilleux rôle où toute sa jeunesse romantique s'exalta. – La proposition de Louis Nalpas, me dit-il, réveilla en moi bien des souvenirs, mais en quatorze ans, le cinéma a subi une telle évolution que j'ai du faire abstraction de toutes mes résolutions passées. Je ne vous étonnerai pas en vous disant que je ne conçois pas du tout le rôle aujourd'hui comme autrefois. D'abord le métrage lui même réduit aujourd'hui aux dimensions d'un grand film d'exclusivité. soit environ 4.000 mètres, oblige tout le monde, réalisateur et artistes, a un travail de synthèse auquel ne nous astreignaient guère les nombreux et filandreux épisodes des « serials » de jadis. Et puis nous, artistes, nous devons concevoir nos rôles plus en profondeur, plus en expression qu'autrefois où le jeu I cinégraphique se distinguait encore assez mal du jeu théâtral. – Pourriez vous me rappeler les circonstances de ce premier Monte Cristo où Léon Mathot prit votre succession et où il recueillit tant de succès ? – C'est en juin 1914 que Louis Nalpas fit donner le premier tour de manivelle sous la direction de Pouctal. Nous avions tourné quelques intérieurs dans la prison du château d'If et obtenu de tourner les extérieurs dans l’île de Monte Cristo, mais à la condition que nous nous arrêterions de tourner quand les touristes se présenteraient. Or il y avait des arrivées de touristes à chaque instant, de sorte MONTE-CRISTO ... JEAN ANGELO nous parle, de "Monte Cristo " ... – de l'ancien et du nouveau que nous tournions environ quinze minutes toutes les heures. Naturellement, nos costumes étranges intriguaient beaucoup les excursionnistes peu familiarisés à cette époque avec la prise de vues. Cependant on savait que nous tournions Monte Cristo et les réflexions allaient leur train. « Tu vois, celui là, avec sa grande barbe blanche, c'est l’abbé Faria, disait une dame ». – Et vous, Monsieur, me dit une autre dame, est ce vrai que vous êtes... Louis XVI ! – Oh ! Louis XVI ! répliqua une grosse matrone, il n'est jamais venu là. D'ailleurs, il ne s’occupait que de serrures ! Nous nous amusions. Un de nos régisseurs, nommé Lully, s'était habillé en prisonnier et nous le faisions passer aux yeux des touristes naïfs pour « le dernier prisonnier du château d'If ». Juin et juillet passèrent. Le travail, malgré tout. avançait. Mais la tragique affaire de Sérajevo avait brouillé l'horizon. Je voyais autour de nous Allemands et Autrichiens regagner en hâte leur pays, rappelés par des ordres mystérieux. Je dis à Pouctal : – Il faut rentrer à Paris. Nous réintégrâmes la capitale vers la fin de juillet, ayant entièrement terminé le premier épisode de notre film. Quelques jours après je partais rejoindre mon corps. C'était la guerre et je ne pensais plus à Monte Cristo que le Film d Art devait reprendre quelque temps plus tard avec Mathot. – Et aujourd'hui ? – La période de préparation du film est terminée. Henri Fescourt qui dirige la mise en scène vient de partir pour Marseille, nous précédant de quelques jours. Bilinsky a composé les costumes et Bertin les décors. Je passe les derniers jours qui me restent avant de partir chez mon tailleur, mon bottier, mon perruquier. La question costumes est importante et je tiens à l'authenticité. Il y a deux époques, la premiere 1815, la seconde 1838. « Que vous dirai je encore ? Le film sera très romantisé, comme il convient, avec une accentuation très orientale de la partie fantaisiste et décorative ». Sur ces mots, l'excellent artiste me quitta. Il avait rendez vous chez son tailleur, chez son bottier, chez son perruquier, et aussi, hélas ! chez son dentiste, car les immenses trésors de Monte Cristo ne le mettent pas à l'abri des petits ennuis humains. Jean Angelo se doit de nous donner là sa meilleure composition. Robert Trévise. Cinéa-Ciné pour Tous, n° 117, 15 septembre 1928, p. 22 MONTE-CRISTO 1 GASTON MODOT par Henri Fescourt (1887-1970) e ne me pardonnerais pas de me taire sur la personnalité de Gaston Modot.Ce n’est pas un metteur en scène officiel. Il aurait pu l’être car il a su réaliser un film, le Supplice de l’Espérance, d’après Villiers de l’Isle Adam, aux promesses multiples. Pas davantage un auteur catalogué de scénarios bien qu’il en ait conçu plusieurs : le dernier en date, à ma connaissance, est Nous, les Gosses, en collaboration avec Hilero, qu’exécuta brillamment Louis Daquin, en 1941, pour ses débuts de réalisateur. Enfin, quoique, de 1911 à nos jours, Modot ait tenu des rôles d’importance dans je ne sais combien de films, quelque chose empêche de dire qu’il est un acteur. En lui existe je ne sais quoi de très à part qui interdit de l’appeler un professionnel. Professionnel le classerait. Or, il est inclassable. Mais rien ne serait plus faux que de voir en lui un amateur. Comment le définir ? Il vit et fait ce qui lui plait. On connaît son masque dur, aux mâchoires fortes, au front bombé, éclairé par deux petits yeux, sa silhouette sèche, à la tête droite, aux bras courts, sa démarche vive. Il est né parisien, en 1887, près du parc Montsouris, mais de descendance bretonne et peut-être, plus loin, ibérique. Une sévérité espagnole marque en effet sa physionomie. Il a fréquenté l’école primaire, peu surveillé par son tuteur, ayant perdu, tout jeune, son père et sa mère. J 1.[NDLE] Gaston Victor MODOT est né à Paris, le 31 décembre 1887 et décédé au Raincy (93), le 19 février 1970. Le temps de cette époque dont il garde le meilleur souvenir est celui où son existence se passait dans les rues. De rue en rue, de quartier en quartier, de camarade en camarade, il finit par atteindre Montmartre. Ce fut sur la Butte que, dès son adolescence, il se fixa. Il avait trouvé des amis à sa convenance, car, comme il le dit lui-même, il voulait s’instruire par fréquentations. De seize à vingt ans, on le vit, fidèle du Lapin agile, en la compagnie de peintres, de sculpteurs, de littérateurs, d’acteurs et de musiciens parmi lesquels Picasso, Braque, Modigliani surtout, Francis Carco, Roland Dorgelès, André Salmon, Pierre Mac Orlan, Charles Dullin, etc… MONTE-CRISTO ... ... GASTON MODOT par Henri Fescourt Il écrivait, peignait d’instinct, jouait de la guitare, dévorait des livres et ne manquait pas les expositions d’avant-garde. Sacrifiant à l’oisiveté, il portait de temps en temps aux journaux des dessins qu’on lui payait dix francs ou des contes qu’on lui payait vingt-cinq. C’était un bohème résolu, au milieu de gens de talent, dans ses goûts. Cela dura jusqu’à vingt ans. Sous les drapeaux, il songe à tirer au flanc tout en donnant l’impression de l’activité. Il imagine d’organiser à la caserne des soirées récréatives : café-concert, music-hall, théâtre, etc... Il se manifeste acteur, décorateur, metteur en scène. Ces séances étaient suivies par la troupe, au point que, pour assister aux représentations, les soldats désertèrent les mauvais lieux. Sa période militaire achevée, le démobilisé regagna la Butte et reprit l’existence ancienne, soustraite aux contraintes. Or le cinéma lui plaisait. Il se trouva qu’un ancien camarade de régiment, Castanet, assidu des séances récréatives, était opérateur chez Gaumont. Il invita Modot à venir le voir, rue de la Villette. Celui-ci se rendit au studio2 où il lui fut donné d’assister à une séance exaltante : dans un décor solidement cloué au parquet, une douzaine de garçons bien bâtis, d’une agilité et d’une résistance inouïes, bondissaient au milieu d’une tornade d’objets lancés du plafond et dont certains, tels qu’une armoire de chêne, une poutre, un fourneau de fonte, étaient très lourds. Il ne s’agissait pas, pour les interprètes, de se dérober à ces projectiles, mais au contraire de se placer sur 2.Par fraude car l’accès du plateau était interdit à tout visiteur étranger. leur point de chute, de les recevoir de plein fouet et de s’écrouler sous eux. L’entrain et le plaisir visibles avec lesquels cet exercice était exécuté devait dégager un fluide contagieux puisque Gaston Modot ne se retint pas d’exprimer son admiration au metteur en scène, Jean Durand, Celui-ci crut comprendre que son interlocuteur brûlait d’en faire autant : « Si le cœur vous en dit... » proposa-t-il. Le lendemain, le débutant se trouvait sur le set, parmi les Pouittes. Ceux-ci, qui se serraient les coudes, n’aimaient pas les nouvelles recrues : on ne sait jamais ! Comme ils étaient remplis d’émulation, ils se préparèrent, en se surpassant, à triompher de l’intrus. Battaille, une des vedettes, le fameux Zigoto, s’approcha de l’inconnu : « Tu es acrobate ? » lui demanda-t-il. – « Non ! » répondit Modot. La surprise cloua Battaille sur place. La scène à tourner était inquiétante. Les Pouittes, poursuivis par un ennemi, devaient s’enfuir par une fenêtre, selon le procédé du « saut-du-lion », c’est-à-dire qu’il fallait sauter en donnant au corps une position horizontale, à la manière des quadrupèdes. Un matelas était placé hors du décor à quelques distance pour accueillir les acrobates au moment de leur chute. Modot, toujours d’instinct, savait courir, boxer, nager, sauter. Il s’élança et tomba sans trop de mal sur le matelas. Battaille reconnut sa souplesse. Il constata pourtant que le nouveau venu avait « planté un chou », façon technique d’exprimer qu’il avait touché le sol avec la tête. MONTE-CRISTO ... ... GASTON MODOT par Henri Fescourt A la scène suivante, on évita de compliquer sa tâche. On se borna à le faire passer, un cigare aux doigts et en chassant la fumée par le nez, sous un piano droit qui dégringolait d’un étage, Gaston Modot, dont l’épaule fut éraflée, se félicita des bons moments qu’il passait et manifesta toute la joie qu’il éprouvait à embrasser cette riante carrière. Adopté par les Pouittes, il progressa dans l’art des cascades. Dès lors, il n’y eut pas d’expédition de la troupe dont il ne fit partie. Jean Durand ne tournait pas, je le rappelle, que des farces acrobatiques. Il réalisait aussi des films d’aventures. Là, le jeu cessait d’être burlesque et il le fallait près de la vie. Par la compréhension immédiate qu’il eut de l’interprétation cinématographique, Gaston Modot, direct, concentré, plein d’autorité, fut vite considéré comme un des bons acteurs de chez Léon Gaumont. 1914 éclata. Blessé à la bataille de la Marne, il fut réformé. La troupe des Pouittes dispersée à jamais. Il tourna avec Maurice Mariaud un film d’après Georges Ohnet, Nemrod et Cie, peu intéressant. Quelque temps après, il fit la connaissance de Louis Nalpas que l’on ne manque jamais de rencontrer dès il s’agit d’une personnalité de valeur. Il parut à cette date au Film d’Art dans Mater Dolorosa d’Abel Gance, dans le Monte-Cristo de Pouctal. Lorsque Nalpas quitta Paris et alla monter à Nice la Sultane de l’Amour, un des premiers artistes qu’il appela fut Gaston Modot. Il lui demanda d’incarner un guerrier barbare, comptant qu’il aurait grande allure à cheval, portant haut sa tête énergique. Cette création classa le jeune artiste, immédiatement remarqué par Louis Delluc qui voyait clair. On put craindre que ce succès ne le vouât à la couleur locale, au pittoresque et à la violence. Mais le metteur en scène, Charles Burguet et Louis Nalpas le connaissaient bien. Comme on allait réaliser des comédies à la villa Liserb, et qu’on avait engagé pour les interpréter une jeune artiste en qui on plaçait de la confiance, Gaby Morlay, on lui choisit Gaston Modot pour partenaire. Les deux films qu’il tourna avec elle et dont il avait imaginé les sujets furent : Un ours et le Chevalier de Gaby. Car, on le sait, il était scénariste. Il avait fourni à Jean Durand un grand nombre de thèmes comiques et dramatiques. Je n’énumérerai pas toutes les bandes qu’il interpréta par la suite. Leurs metteurs en scène n’étaient pas les premiers venus. Il vaut la peine de citer la Fête Espagnole de Louis Delluc, Mathias Sandorf réalisé par Henri Fescourt, le Miracle des Loups, réalisé par Raymond Bernard, Carmen de Jacques Feyder, le deuxième Monte-Cristo d’Henri Fescourt, le Navire des Hommes Perdus réalisé en Allemagne par Gaston Tourneur et où Marlène Dietrich paraissait déjà, l’Opéra de Quat’sous de Pabst où Florelle conquit la vedette, l’Age d’Or de Luis Bunuel, la Bandera d’après Mac Orlan et Pépé le Moko de Julien Duvivier, la Grande Illusion, la Vie est à nous et la Règle du Jeu de Jean Renoir, les Enfants du paradis, scénario de Prévert réalisé par Marcel Carné. Ce fut dans Pépé le Moko, où on l’apercevait parmi MONTE-CRISTO ... ... GASTON MODOT par Henri Fescourt les suivants de Jean Gabin, silencieux joueur de bilboquet silhouette qui frôlait l’insignifiance, mais à laquelle son talent prêtait un relief redoutable – dans la Bandera et dans la Règle du Jeu où il jouait le garde chasse, qu’il se fit le plus remarquer. Il donna sa mesure dans l’Age d’Or. Luis Bunuel, après le Chien Andalou, donna l’Age d’Or en 1930. Ce film eut une carrière arrêtée car des manifestations accueillirent sa sortie publique. Certaines convictions furent froissées. La sexualité des images fut jugée malséante. La police interdit la projection. Bunuel ne s’était pas posé toutes ces questions. Il s’agissait dans son esprit d’un franc défilé d’états de conscience anciens, submergés dans les abîmes du moi et réapparaissant à la surface. L’auteur manifesta une telle exigence de l’authenticité qu’il amena ses acteurs à Figueras, son pays natal, en Espagne, où tout enfant, un certain ordre d’émotions l’avait secoué. Le film consistait donc en une résurrection de moments affectifs dans un climat d’irrespect. Gaston Modot y tint le principal rôle. Concrétiser, en actes et en gestes dont la projection accuse puissamment le dessin, des imaginations surgies des ténèbres exigeait une justesse de ton difficile. Bunuel avait trouvé en Modot l’interprète rêvé. Tout ce qu’il fait est exact, la nuance toujours rendue : sa façon de se retourner lorsqu’il aperçoit une affiche représentant des jambes de femmes, d’écraser un scorpion sur le sol d’un coup de talon rageur comme s’il assouvissait une vieille vengeance... Et la célè- bre scène des gifles : dans une réception, la maîtresse de maison verse une liqueur. Par mégarde, elle éclabousse de quelques gouttes le smoking de Gaston Modot. Elle se confond en regrets, se désole, s’accuse, très mondaine. L’invité, interloqué, regarde tout d’abord sa manche tachée, puis fixe la dame, se domine un éclair de seconde, puis, exaspéré, flanque deux soufflets à la maladroite. Il a libéré sa fureur, partie comme une décharge électrique. Ailleurs il a quitté la soirée et, en compagnie l’une jolie femme, s’est isolé dans un jardin, aux pieds d’une statue. En cet instant, un chef d’orchestre chauve abandonne ses musiciens qui exécutent de la musique classique et, traversant l’assemblée, se dirige d’un pas somnambulique vers le jardin, tels ces êtres nés de nos rêves. Il va vers le couple assis sur un banc, en proie à de chaudes passions. Aussitôt qu’elle aperçoit le vieux monsieur, la jeune femme, fascinée, abandonne Gaston Modot qu’elle embrassait avec gourmandise et va, avec un plaisir accru, déposer un baiser ardent sur la bouche barbue et grisonnante du chef d’orchestre, lui-même secoué de désirs. Modot se dresse, prêt à s’interposer. Mais, en se dressant, son crâne heurte un vase d’argile suspendu et aussitôt sa tête et tout l’écran retentissent de sonorités douloureuses qui persisteront jusqu’à la fin de la séquence. L’effet mécanique du rire, décrit par Bergson, est mathématiquement obtenu. On sait l’importance que prend l’humour dans le surréalisme. Mais, pour le surréaliste Luis Bunuel, ce choc vise moins au comi- MONTE-CRISTO ... ... GASTON MODOT par Henri Fescourt que qu’à un déchaînement sonore, tempête psychique, vertige de bruits et de fureurs mentales. Cependant la victime n’a pas tressailli. Pas un mouvement de souffrance, pas un pli de physionomie, mais une expression de stupéfaction irritée devant la scène amoureuse qui se déroule. Sans avoir connu aucun professeur, Modot s’est, dans ces cas malaisés, égalé aux meilleurs. Il lui a suffi, selon son propos, de s’instruire par le contact humain, ce qui implique des dons peu communs. Il a mis en œuvre une vertu d’inspiration là où beaucoup de comédiens, modelés par l’enseignement scolastique, eussent été moins bien servis. J’ai cru devoir m’arrêter sur ce curieux artiste, une de ces personnalités, comme 3.+ Francis Lacassin, Gaston Modot, du burlesque au surréalisme, Pour une contre-histoire du cinéma, Op. cit. [p.287-300] celle de Joë Hamman et d’Henri Debain, d’un talent divinatoire et inexplicable. On en trouvait souvent dans le vieux cinéma où confluaient des êtres divers, depuis la danseuse de corde, jusqu’au peintre, au musicien, à l’écrivain (Antonin Artaud) en passant par le camelot et le mannequin de maison de couture.3 Henri Fescourt La foi & les montagnes, op. cit. [p.349-352] MONTE-CRISTO ... LIL DAGOVER (1887-1980) arie Antonia Siegelinde Martha Lillets Seubert, naît le 30 septembre 1887 à Malduin (Pati), sur l’île de Java Java (Dutch West Indies > Indonesie) où son père est exploitant forestier pour le gouvernement germanique. Dans son enfance, la jeune Marie voyage en Angleterre, en France et en Suisse. Adolescente, elle poursuit ses études dans la prestigieuse école pour jeunes filles de Tübingen. La très jolie jeune femme épouse en 1917, le vieil acteur autrichien Fritz Daghofer et tourne quelques films sans intérêt sous le nom de Lil Dagover. Elle divorce en 1919, puis rencontre le metteur en scène Robert Wiene qui lui offre le rôle de Jane dans son magnifique film Le cabinet du docteur Caligari. La même année, Fritz Lang l’engage pour deux films importants de sa période muette : Les araignées, avec Carl de Vogt et Madame Butterfly, avec Paul Biensfeldt. Lil Dagover s’impose, en Allemagne, comme l’une des plus grandes stars féminines des années vingt, avec une constante régularité, elle participe à plusieurs grands succès, et tourne, avec les réalisateurs les plus réputés : Fritz Lang pour Les trois lumières (1921), ainsi que F.W. Murnau pour Le fantôme (1922) et Tartuffe (1926); mais également pour Ludwig Berger, Carl Froelich et Wilhelm Thiele. En 1925, le grand Max Reinhardt l’invite à jouer sur scène au Festival de Salzbourg. On la voit également M dans des productions françaises, telles que : La grande passion (1927) d’André Hugon, MonteCristo (1928) de Henri Fescourt et Le tourbillon de Paris (1928) de Julien Duvivier. Le passage du cinéma muet au cinéma parlant n’inquiète aucunement cette grande actrice. Sa diction parfaite et son naturel s’adaptent à merveille aux nouvelles technologies. Tout au long des années trente, elle continue sans difficulté, de voguer sur le chemin du vedettariat. En 1931, Lil Dagover tourne pour la Warner Bros : La femme de Monte-Carlo sous la direction de Michael Curtiz. Après le succès mitigé de cette unique expérience hollywoodienne, l’actrice préfère retourner dans son pays. Elle travaille énormément, et se voit décerner en 1937, par le ministre nazi Joseph Goebbels, le Prix d’Artiste d’Etat pour son interprétation dans La sonate à Kreutzer de Veit Harlan. Durant la seconde guerre mondiale, la star met un frein volontaire à sa carrière cinématographique, préférant se produire sur scène. Au début des années cinquante, elle réapparaît dans des rôles MONTE-CRISTO ... LIL DAGOVER ... secondaires, parmi lesquels : la Comtesse Waldenberg dans Rote rosen, rote lippen, rote wein (1952) de Paul Martin, la Baronne Hermine von Velden dans Der fischer von Heiligensee (1954) de Hans H. König et l’Impératrice dans Mayerling (1956) de Rudolf Jugert. En 1952, Lil Dagover reçoit un Prix d’Argent du cinéma germanique pour son interprétation dans Son altesse royale de Harald Braun. Dix ans plus tard, la même académie l’honore d’un Prix d’Or pour l’ensemble de sa carrière. Pour satisfaire une demande personnelle de Maximilian Schell, l’actrice fera une ultime apparition dans Légende de la forêt viennoise (1979). Lil Dagover s’éteint discrètement le 23 janvier 1980 à son domicile de Munich, en Allemagne. Philippe Pelletier www.cineartistes.com MONTE-CRISTO MARIEC’estGLORY à dire la grâce et la féminité ensemble* Si le souvenir de Marie Glory reste encore aussi présent dans la mémoire des cinéphiles, c’est parce qu’elle fut durant une longue décennie l’une des comédiennes les plus populaires et les plus appréciées du cinéma français. Curieusement, c’est son engagement patriotique durant la seconde guerre qui sera la cause de l’ingrat oubli des producteurs. En effet, elle fut l’une des rares actrices à avoir rejoint les Forces Françaises Libres du Général de Gaulle. Un peu à l’image de Jean Gabin, de Claude Dauphin et de Jean-Pierre Aumont. À la différence, qu’eux ont réussi leur retour cinématographique sans trop de difficultés. aymonde [Louise Marcelle] Toully qui allait mieux se faire connaître sous le pseudonyme davantage artistique de Marie Glory, naît le 3 mars 1905 au domicile de ses parents, place des Halles, à Mortagne-au-Perche, où le papa tient un salon de coiffure tandis que maman donne libre cours à sa passion pour la peinture. Peu après, la petite famille quitte les forêts domaniales et les bocages ornais pour Rouen, où Marie, encore Raymonde, passe son adolescence et effectue ses études au Lycée Jeanne d’Arc. À 18 ans, chaperonnée par maman, elle gagne la capitale et s’inscrit à un cours de danse afin de perfectionner les premiers rudiments acquis à Rouen. Elle participe même à un concours de beauté où elle décroche la deuxième R place. Son joli minois lui permet de poser pour des cartes postales ainsi que pour des affiches publicitaires dans le cadre de “la grande exposition de blanc” ayant lieu chaque année dans les grands magasins. C’est nantie de ces “précieux” passeports qu’elle hante les plateaux d’un cinéma encore muet et qu’elle participe à quelques figurations avant de tourner ses premiers films sous le nom d’emprunt d’Arlette Genny. C’est Marcel L’Herbier qui sera le véritable artisan de son envol. En 1928, il lui confie face à Brigitte Helm l’un des principaux rôles de L’Argent, une adaptation réussie du roman de Zola. C’est L’Herbier toujours, qui pour la circonstance, la rebaptise définitivement Marie Glory. *L[ucie] Derain, « On tourne “Monte-Cristo” », La Cinématographie Française, novembre 1928 MONTE-CRISTO ... ... MARIEC’estGLORY à dire la grâce et la féminité ensemble* Ce succès immédiat lui permet d’enchaîner avec le second Monte-Cristo cinématographique dans lequel Jean Angelo, grande vedette de l’époque, assume le rôle-titre.1 En 1930, elle tourne son premier film parlant L’Enfant de l’amour en retrouvant L’Herbier dont c’est aussi la première réalisation sonore. Ce film est suivi durant cette décennie d’une succession de réussites avec des comédies sentimentales fort prisées qui alimentent les songes éblouis de nos parents… … En 1964, Pierre Cardinal la dirige pour une ultime apparition dans un téléfilm de l’ORTF, Les beaux yeux d’Agathe. Elle comprend que pour elle le cinéma est bien fini et qu’il s’agit, à présent, d’assumer une reconversion. Ce qu’elle trouve en ouvrant un salon de coiffure à Paris (faut-il y voir quelques gènes paternels ?) Finalement, en 1973, elle décide de descendre sur la Côte d’Azur, à Cannes, afin de s’y fixer définitivement. Elle s’installe dans un coquet appartement à deux minutes de la mer, près de la Croisette, apparemment sans trop de regrets pour son passé cinématographique… bien que, amusée, elle confiait récemment à un journaliste de NiceMatin2 : “Si on me proposait un rôle aujourd’hui, je le refuserai… et d’ajouter avec un clin d’œil complice … sauf si mon partenaire s’appelle Robert Redford !” Aujourd’hui, toujours cannoise, [doyenne du cinéma français] elle a fêté ses cent [un] ans dans la maison de retraite qui l’a accueillie. Yvan Foucart3, avec le concours de Mireille Beaulieu et Jean-Louis Milla (Souvenance cinéphiles) Essai de filmographie (limitée au cinéma muet) 1924 ■ Le miracle des loups de Raymond Bernard (figuration) sous le pseudonyme d’Arlette Genny 1924 ■ Monsieur le directeur de Robert Saidreau 1925 ■ Les dévoyés de Henri Vorins 1927 ■ La maison sans amour d’Emilien Champetier 1927 ■ Miss Helyett de Georges Monca et Maurice Kéroul sous le pseudonyme de Mary Glory 1928 ■ L’argent de Marcel L’Herbier 1928 ■ Monte-Cristo d’Henri Fescourt 1929 ■ Vater und Sohn (Mon copain de papa) 1.[NDLE] Le personnage de Valentine Villefort est interprété par Marie Glory, que M. Marcel L’Herbier, avec qui elle est en contrat, a bien voulu prêter à M. Louis Nalpas. La Cinématographie Française, 29 septembre 1928. 2.[NDLE] Jean-Michel Laurence, Marie Glory “la B.B. des années 30”, Nice-Matin, vendredi 30 août 1996 3.+ > www.lesgensducinema.com/biogr aphie/GLORY.htm de Géza von Bolvary (en Allemagne) MONTE-CRISTO U n jo u r n a l to u r n a g e [d e s jo u r n a u x ] d e Compilation exclusivement réalisée grâce à la revue de presse (1928-30) Collection et archives Famille Bilinsky e qu’on a fait ; ce qu’on va faire – Henri Fescourt s’apprête à partir pour Marseille où seront tournés les extérieurs de Monte-Cristo. Voici l’état-major du metteur en scène [et la distribution] de ce film connu à ce jour : Assistant : Armand Salacrou. Administrateur : DaniauJohnson. Opérateurs : Ringel, Barreyre. Régie : Henri Pauly, Fernand Tanière, Daven. Costumes et décors : maquettes dessinées par Boris Bilinsky. « Bien entendu, nous écrit Henri Fescourt, le film sera réalisé sur pellicule panchromatique. Mais est-il besoin de le dire en 1928 ? »1 Henri Fescourt vient, en effet, de quitter Paris pour Marseille où, à la fin de la semaine, il donnera le premier tour de manivelle du film.2 Les extérieurs seront tournés à Marseille et les intérieurs au studio de Billancourt.3 Le premier tour de manivelle sera donné lundi ou mardi, à Marseille.4 Henry Fescourt et sa troupe tournent les premiers extérieurs à Marseille, au château d’If et sur les points les plus divers de la côte.5 Depuis plusieurs jours, Henri Fescourt et sa troupe sont en notre ville, où se tournent quelques scènes importantes de Monte-Cristo. […] à Marseille, où l’on attend encore Melle Marie Glory (Valentine de Villefort), Jean Toulout (le juge de Villefort), Gaston Modot (Fernand Mondego), Maupin et Pouget (M. Morrel et père Dantès), ainsi que la célèbre star internatio- C nale Lil Dagover, dont ce sera le premier séjour à Marseille. Plusieurs fois déjà, le trois-mâts Le Pharaon (armateur M. Valoussière) est sorti du port toutes voiles dehors : il ira ces jours-ci à l’île d’Elbe pour que soit filmée la fameuse scène de l’entrevue de Dantès et de l’Empereur en exil. Ces scènes maritimes sont remarquablement filmées avec naturellement de véritables marins qui grimpent dans les vergues pour les manœuvres de voiles, ce qui permet des prises vues d’une technique très moderne. Le village des Catalans a été reconstitué, et c’est là que sera tournée la célèbre rencontre d’Edmond Dantès et de Mercédès. Le château d’If a été, cela va de soi, également visité par la troupe cinématographique et des scènes d’une grande intensité dramatique ont été tournées dans le légendaire château. Tout le film est photographié sur la nouvelle pellicule panchromatique avec les objectifs les plus récents (brachyscopes*, diastréphores, etc.).6 Tandis qu’Henri Fescourt tourne à Marseille, au château d’If et dans les sites les plus beaux et les mieux appropriés de la côte… le dessinateur Boris Bilinsky prépare les costumes et les décors des premiers intérieurs qui seront tournés aux studios de Billancourt.7 Les grands raids de Monte Cristo se poursuivent, à Billancourt… à travers les sun-light, la 1.Intransigeant, 2 septembre 1928. 2.Courrier Cinématographique, 8 septembre 1928 3.Ami du Peuple, 16 septembre 1928. 4.O. R., Filma, 1er septembre 1928 5.La France Cinématographique, octobre 1928. 6.Cinéma Spectacles – Marseille, 13 octobre 1928 7.Cinéma, octobre 1928 MONTE-CRISTO ... ... U n jo u r n a l to u r n a g e [d e s jo u r n a u x ] d e ravissante, Miss de Wilford (Marie Glory), laquelle, épanouie dans sa loge, presse contre son visage où émergent des lueurs d’angoisse, un bouquet de roses thé…8 …Nous sommes dans une vaste salle à colonne ouverte sur le plein ciel de Provence… Immanquables guirlandes de papiers fleuris. Alternance de guitares et de mandolines. Cent cinquante beaux gars et belles filles aux profils catalans et provençaux peuplent le décor…. Lil Dagover, elle a été habillée d’après une maquette de Bilinsky, et l’on aime son corsage finement échancré, sa robe de soie bleue qui lui bat doucement les chevilles, elle rayonne la joie… Au fait, n’est-elle pas sûre de son bonheur puisque son mariage, dans un rythme cher au cinéma qui se joue du temps, a été célébré la veille… avant même ses fiançailles. Le Pharaon, il revient comme un leitmotiv et on le cherche derrière les arçaux de ce mas, mais l’on aperçoit que les agrées des portants de ce décor immense. Fescourt, nous confie que trois jours lui seront nécessaires pour mener à bien ces fiançailles : puis, brusquement ce sera l’Opéra avec l’époque des dandies.9 Dans l’ancien studio, des décorateurs et machinistes montent, sous la direction de Bilinsky, les décors de la reconstitution de l’Opéra. Dans le nouveau studio, on prépare d’autres décors de mas provençal. – On tourne ! crie-t-on. … la scène se passe chez l’armateur Morrel – Monsieur Maupin, crie Fescourt. La scène 8.A.P. Barancy, Avenir, 10 novembre 1928 9.Pierret-Marthe, Critique Cinématographique, 10 novembre 1928 10.J. C., Mon Film, 16 novembre 1928 est prise ; on change d’opérateur et d’appareil pour la « faire » à nouveau. – Nous avons déjà tourné une partie des extérieurs, me dit-il. Le château d’If, Marseille et la mer à bord du Pharaon. J’ai eu beaucoup de mal pour tourner en rade, ayant constamment un vapeur ou un remorqueur dans le champ de mes appareils. Je n’ai plus comme extérieurs que Paris. Je ne sais pas encore la date à laquelle je les commencerai d’ailleurs. Pour le studio, j’ai de très grands décors, tels : la salle de l’Opéra, les couloirs, le foyer, la fête provençale, les fiançailles de Monte-Cristo, les mystérieux palais, son terrain de Monte Cristo et, nombre d’autres décors non moins importants. Quai du Point-du-Jour… Billancourt… 6 heures du soir… Novembre Dieu ! qu’il fait froid, sombre et sale.10 Un immense décor emplit tout le grand studio de Billancourt. Il s’agit de la très scrupuleuse reconstruction du théâtre de l’Opéra de la rue Le Peletier qu’un incendie détruisit vers la moitié du dix-neuvième siècle. Une imposante figuration, qui a revêtu les costumes de l’époque, est installée au parterre et dans les loges. Dans une avant-scène brille la séduisante Eliane Tayar. Sur le plateau dansent les jolies danseuses du corps de ballet de l’OpéraComique. Marie Glory passe, si fraîche, si lumineuse, …si féminine. Puis passe Tamara Stezenko, au charme slave dont on se désensorcelle plus. Boris Bilinsky met au point une maquette. Henri Fescourt siffle. Les sun-lights crépitent. Et à dix heures et dix minutes du soir, MONTE-CRISTO ... ... U n jo u r n a l to u r n a g e [d e s jo u r n a u x ] d e ainsi qu’il l’avait solennellement promis, le comte de Monte-Cristo fait son apparition dans une loge. Quelle sensation !11 L’opéra est étincelant de lumières. L’immense lustre éclaire une salle brillante par le satin des épaules nues, paillettes des robes, par l’éclat des bijoux… Et de partout, des loges, de la corbeille, des cintres, même, suspendus, fichés, ou apposés, de gros œils lumineux, œils de verre épais et froid s’ouvrent sur cet ensemble. Il y a même un appareil qui va et vient sur un câble d’acier. Cet appareil a l’air d’une mitrailleuse suspendue dans les airs. Elle balaie les têtes. Et l’appareil fixe, lui, enregistre la scène qui se passe dans une loge, centre des regards, loge où le procureur du roi, M. de Villefort (Jean Toulout), surveille la tenue de sa fille, la charmante Valentine (Marie Glory). Rose au corsage, roses aux cheveux, roses aux lèvres, Valentine de Villefort, ou plutôt Mlle Marie Glory, c’est-à-dire la grâce et la féminité ensemble, joue devant l’objectif. Il faut qu’elle s’émeuve. Elle s ‘émeut, et son jeune corsage est haltant. Les opérateurs Ringel, Barreyre et Kottula s’affairent pour une prise de vue importante. Kottula est surtout chargé des truquages. Ils sont nombreux dans Monte-Cristo. M. Hennebain pendant ce temps arme son appareil, et crie : Stop. Les artistes s’immobilisent. Et la photo est prise…12 …Animés dès l’aube par Fescourt, généraux et dames d’honneur en grand apparat sont sur la brèche, ou plus exactement, dans les loges d’Opéra… Flexible, romantique à souhait, Mlle Spessivtzeva surgit sur la scène, au motif charmant de la troisième valse de Chopin ; un corps de ballet la suit, la cerne avec grâce ; traquée, elle s’échappe parmi les acclamations de l’assistance. Effort, effet prodigieux de tissus fulgurants, gemmes et moires, bouquets serrés au bord des loges, visages pressés parmi les repentirs en boucles, les diadèmes en brillants, les éventails de plume, les uniformes éclatants des maréchaux. Distinguons tout particulièrement dans ce tableau : Monte-Cristo (Angelo) ; Albert de Mortcerf (Pierre Batcheff), Fernand de Mortcerf (Gaston Modot) ; Mmes Lily Dagover, Stezenko, Mary Glory, Michèle Verly, baronne Wrangel, Nadia Kozine, Eliane Tayar, Gueirarot, etc. ; MM. Janvier, Safonoff, Ravitch, Gaïdaroff, etc. À signaler tout particulièrement la maîtrise et la précision de M. Courtois, régisseur, M. Mouquet, administrateur.13 Henri Fescourt règle une scène, un tableau plutôt, et je peux voir dans un bureau encombré de dossiers un homme assis à une table et se penchant sur un registre tout clair, tandis que sa figure reste dans l’ombre. Ça n’a l’air de rien, mais cet éclairage est fort délicat et l’on doit y apporter tous ses soins. L’homme, c’est Volbert, qui silhouette le Gouverneur du Château d’If où Dumas enferme son héros, Edmond Dantès.14 Un détail caractéristique. Tandis que le rideau se baisse sur la scène, suivant le même mouvement les lustres, exactement reconstituées et de 11.Intransigeant, 17 novembre 1928 12.L[ucie] Derain, La Cinématographie Française, novembre 1928 13.A.P. Barancy, Avenir, novembre 1928 14.La Cinématographie Française, novembre 1928 MONTE-CRISTO ... ... U n jo u r n a l to u r n a g e [d e s jo u r n a u x ] d e la même splendeur, s’abaissent doucement sur les spectateurs. L’immense décor de l’Opéra a disparu pour faire place à un autre d’un caractère tout différent, le pittoresque après le somptueux. Ce décor est la reconstitution du café du petit village des Catalans, aux environs de Marseille où Fernand Mondego va retrouver Mercédès. En plus des scènes principales qui s’y déroulent le metteur en scène y fait exécuter des numéros de danses avec accompagnement de guitares et de mandolines du plus bel effet.15 Un autre décor d‘importance : Le Cabinet de l’Empereur… puis encore un magnifique salon 1830…16 Le Cinéma renferme tous les arts par synthèse ou par analyse. Le Cinéma avait besoin d’un artiste tel que Fescourt. Fescourt s’est mis au travail et, depuis septembre, sous sa direction, Rengel, Barreyre, Kottula ont enregistré, à Marseille et ses environs, les scènes les plus pittoresques, les vues les plus grandioses ; une photographie très étudiée et impeccable sera le juste complément de cette œuvre. Puis il s’est installé à Billancourt, où depuis plus de deux mois, il occupe les vastes studios… Mme Brabo et M. Godard sont les collaborateurs du grand artiste.17 *Brachyscope : objectif de précision pour le studio, fabriqué par Optis (Optique et mécanique de précision), “donnant à volonté les effets de rapprochement ou d’éloignement sans déplacer ni le sujet ni l’appareil de prise de vue”. 15.La Griffe Cinématographique, 15 décembre 1928 16.La Cinématographie Française, décembre 1928 17.Éliane Tayar, La Cinématographie Française, 5 janvier 1929 MONTE-CRISTO BORIS BILINSKY oris Konstantinovitch Bilinsky naît le 21 septembre 1900 à Bendery (Russie, près d’Odessa) où son père Konstantin, officier supérieur dans l’armée impériale, est alors en garnison. Il est cadet dans une école militaire puis suit les cours à l’Université. En 1920 les armées Blanches défaites et son père tué, il quitte la Russie pour l’Allemagne. À Berlin, il travaille pour plusieurs « théâtres russes », notamment celui du cabaret Der Blaue Vogel (l’Oiseau bleu). En 1923, il rejoint Paris et s’intègre tout naturellement à la communauté des émigrés russes, parmi lesquels Léon Bakst avec qui il étudie la peinture ; il continue au début de travailler pour le théâtre (la Chauve-Souris de Nikita Balieff, l’Arc en Ciel) et se lie d’amitié avec Georges Annenkov et Simon Lissim mais après avoir rencontré Ivan Mosjoukine il entame une carrière riche et variée (décorateur, costumier, affichiste) pour le cinéma dans l’équipe de Russes émigrés des studios Albatros à Montreuil. Dès 1921 : d’abord dans les journaux de l’émigration russe puis dans la presse française mais aussi allemande et italienne : il travaille en effet alternativement dans ces trois pays. Il publie d’autre part ses propres articles dans lesquels il expose ses conceptions personnelles sur la composition du décor, du costume et de l’affiche cinématographique. Il dessine en 1924 des costumes pleins de fantaisie pour Le Lion des Mogols (Epstein) qui le font remarquer ; l’affiche du film, dont il est également le créateur, remporte une médaille d’or à l’Exposition B Dans l’illustration, les costumes, le placard, Boris Bilinsky s’est taillé rapidement en France une des plus belles places. Cinémagazine, 20 mai 1927. Internationale des Arts Décoratifs à Paris en 1925. Mais ce sont les costumes qu’il dessine pour Casanova (Volkoff, 1927) qui le consacrent et lui apportent une notoriété internationale (René ClémentiBilinsky, « les costumes de Boris Bilinsky pour Casanova », L’Intermédiaire des Casa-novistes, Genève, 2000, p. 1-8).1 En mai 1928, Bilinsky fonde à Paris sa propre société de publicité cinématographique : Alboris. Il avait déjà imaginé des affiches qui étaient entre 1924 et 1927 parmi les toutes premières affiches cinématographiques vraiment modernes. Il est d’ail- 1.[N.D.L.E] Boris Bilinsky a exposé récemment [Galerie de France] aux Champs-Élysées quelques maquettes de décors cinématographiques dont il est l’auteur. On connaît le talent de Boris Bilinsky. Il s’est affirmé avec éclat dans quelques films fameux parmi lesquels nous citerons Casanova, Shéhérazade, Monte-Cristo. « Décors Modernes », Critique Cinématographique, 30 juin 1930 MONTE-CRISTO ... BORIS BILINSKY ... leurs reconnu par la presse de l’époque comme l’un des meilleurs (François Mazeline, « l’Affiche de cinéma – Boris Bilinsky », Cinéma, 1er août 1928) et le plus célèbre des affichistes de cinéma (Lucie Derain, « Les Affiches de cinéma – polychromie pour blancs et noirs », Arts et Métiers Graphiques, n° 22, 15 mars 1931, p. 201-205). Outre les affiches qu’il dessine pour Albatros, il en réalise également beaucoup pour la distribution française de films allemands tels que la Rue sans joie (Pabst, 1925), le Fermier du Texas (Joe May, 1925), Quatre de l’Infanterie (Pabst, 1930), l’Atlantide (Pabst, 1932). C’est lui qui dessine les 4 affiches et compose entièrement le manuel de publicité pour la distribution française de Metropolis. En 1930 débute sa collaboration avec l’Opéra Russe : ses décors et costumes pour Rouslan et Ludmila, opéra de Glinka donné intégralement pour la première fois en France, font sensation, même s’ils sont parfois discutés ; on le trouve alors cité et photographié au côté d’Alexandre Benois et d’Ivan Bilibine dans les programmes souvenirs qu’il illustre avec eux (on les appelait les trois B) et qui sont édités par l’Opéra Russe à Paris. Dès lors Boris Bilinsky ne cessera plus de travailler simultanément pour le cinéma et pour les différents corps de ballets qui ont succédé aux Ballets Russes de Diaghilev (Opéra Russe à Paris, ballets russes de Monte-Carlo, ballets d’Olga Spessivtzeva, de Bronislava Nijinska, etc.) À Paris, il exécute en 1934 la décoration du célèbre cabaret russe Sheherazade, rue de Liège. C’est sur le tournage en Italie de Tredici uomini e un cannone (Giovacchino Forzano, 1936), qu’il rencontre la jeune femme sicilienne qu’il épousera à l’église orthodoxe de Florence le 24 septembre 1936. En mai 1937 à Londres, dans le cadre des festivités organisées pour le couronnement du roi George VI on donne Pelléas et Mélisande (Debussy) au Royal Opera de Covent Garden : ce sont les décors et les costumes proposés par Boris Bilinsky qui sont choisis à cette occasion. La même année il séjourne à Berlin pour participer à l’élaboration des costumes de La Habanera avec Zarah Leander. En 1939, son engagement dans l’Armée française ayant été refusé, il part en Sicile avec son épouse pour attendre la naissance imminente de leur fille dans sa belle famille. Les hostilités ayant débuté il reste en Italie et s’installe à Rome avec sa famille où il loue un appartement au dernier étage du palais de Cesare Zavattini. Il a alors l’actrice Isa Miranda comme voisine de palier ! Là, il recommence à travailler pour le cinéma principalement avec la société de production Titanus Film, ainsi que pour le théâtre et le ballet. Pendant cette période, il collabore à plusieurs reprises avec le danseur et chorégraphe Aurelio Milloss : en 1945 pour le ballet Casse Noisettes, en 1946 pour le film Lo Sconosciuto di San Marino et en 1947 pour un ballet à la Scala de Milan. Alors qu’il séjourne à Paris pour un projet de film, sa maladie se déclare ; il rentre en Italie et meurt à Catane le 3 février 1948. Le 3 février 1956 la commune de Catane, sur l’initiative d’un groupe de ses amis, fait transférer sa tombe dans « l’allée des hommes illustres » de son cimetière ; le sculpteur Pietro Papallardo est l’auteur du buste qui la surmonte. Après sa mort son souvenir resta vif en Italie mais personne ne s’occupant d’entretenir sa mémoire en France, il y est rapidement oublié, sauf de quelques spécialistes : alors qu’un paragraphe est consacré MONTE-CRISTO ... BORIS BILINSKY ... à Bilinsky dans deux importants dictionnaires italiens (l’Enciclopedia dello Spettacolo en 1954 et le Film Lexicon degli autori e delle opere en 1958), il n’est jamais apparu dans aucun ouvrage semblable en France ; cela est d’autant plus paradoxal que la part de sa carrière la plus importante du point de vue esthétique s’est déroulée en France et que ce sont principalement ces travaux qui se trouvent cités dans les encyclopédies italiennes ! Depuis 1993 les travaux de Bilinsky font l’objet d’un inventaire et d’une recherche entreprise par sa famille dans le but de reconstituer le cours de sa carrière et d’en restituer une image aussi complète que possible, ce qui n’avait encore jamais été fait. Toute personne qui posséderait des documents relatif aux travaux de Bilinsky est d’ailleurs invitée à participer à ce projet. [> [email protected]] De nombreuses expositions de ses dessins continueront d’être tenues en Italie (Galerie Capannina di Porfiri, Rome, 1955 ; Galerie Bowinkel, Capri, 1960), aux USA (Leonard Hutton Galleries , NewYork, 1975) et en France (Mairie du 7e arrondissement, Paris, 1999). Beaucoup de ses travaux sont aujourd’hui conservés dans des musées à Paris (Bifi/musée du Cinéma), aux USA (Metropolitan, Harvard Theatre Collection, Fine Arts Museums of San Francisco, McNay Art Museum, etc.), au Canada (University of Calgary), à Jérusalem (Israël Museum). Plus de 880 de ses maquettes de décors et costumes destinées au cinéma, au ballet et à l’opéra sont répertoriées à ce jour ; plus de 500 sont conservées dans la collection familiale (dont deux maquettes de décors pour Monte-Cristo et de nombreuses maquettes de costumes pour Arletty, Danielle Darrieux, Jacqueline Delubac, Edwige Feuillère, Ivan Mosjoukine, etc... Mais toute sa correspondance de travail a disparu en 1953 pendant le retour de sa famille en France, en même temps que beaucoup de maquettes ; malgré des recherches en Italie on n’a encore retrouvé aucune trace de ce matériel. Une autre partie de son œuvre, plus personnelle et très différente de ses commandes commerciales, illustre l'Apocalypse selon saint Jean en une trentaine d’aquarelles peintes durant les années de guerre et toutes fortement imprégnées des sentiments de tragédie et de mort. Boris Bilinsky en destinait la version définitive à une exposition parisienne mais sa mort ne permettra pas la réalisation de ce projet. Si le cinéma était son travail et la peinture un talent, sa passion était la musique ; sa volonté d’allier la peinture, la musique et le cinéma trouvera son achèvement dans ses recherches entreprises dès 1930 et visant à retranscrire certains morceaux de musique classique sous la forme de dessins animés en couleurs ; Walt Disney lui-même aurait manifesté en 1948 de l’intérêt pour ces études mais Bilinsky est mort avant que le rendez-vous convenu ait pu avoir lieu (L’Ora, Catane, Italie, 4 février 1956). René Clémenti-Bilinsky, petit-fils de Boris Bilinsky MONTE-CRISTO ... LOUIS NALPASSeigneur du Ciné-Roman (1884-1948) Louis Nalpas, nom important mais oublié, mérite un hommage. Les historiens futurs du cinéma se montreront injustes ou mal documentés s’ils négligent l’action de cet homme qui flairait de loin les talents, à qui Abel Gance, Louis Delluc et bien d’autres doivent soit le départ de leur durable renommée, soit leur vogue d’alors. Henri Fescourt, La Foi & les Montagnes atin du Levant né à Smyrne en 1884, Louis Nalpas fait une entrée discrète dans l’industrie cinématographique naissante à Paris dès 1909. Son efficacité dans la vente des films français en Europe Orientale, et ses dons de diplomate et d’organisateur suscitent très tôt l‘intérêt du producteur Charles Delac, qui le charge de diriger les ateliers de son Film d’Art. À la déclaration de guerre en 1914, Delac, mobilisé, le nomme directeur artistique des studios Film d’Art à Neuilly. Pendant quatre ans, Nalpas assurera la continui¬té de la production, tout en favorisant les nouveaux talents dont Abel Gance, qui tourne sous son égide ses premiers grands films, tels que Mater Dolorosa et La Dixième Symphonie. Et dans ces années de pénurie, Nalpas trouve le moyen de mener à bien son premier grand film à épisode, en 12 chapitres : Le Comte de Monte Cristo, adapté et réalisé par Henri Pouctal rare réalisation du genre à être citée en bien dans les histoires officielles du cinéma. Quittant le Film d’Art après l’armistice, Nalpas s’installe à Nice avec le grandiose projet d’y créer, en association avec Serge Sandberg, un Hollywood à la française en exploitant la beauté naturelle et le soleil de la Côte d’Azur. En attendant la L fin de la construction des installations du futur Studio de la Victorine, il loue la somptueuse villa Liserb et tourne dans ses parcs et jardins La Sultane de l’Amour, “conte inédit des Mille et une Nuits”, dont le triomphe hisse Nalpas au premier rang de l’industrie cinématographique française du jour au lendemain. Viendra ensuite une série de réalisations avec René Le Somptier, Charles Burguet, Louis Delluc, Germaine Dulac, Marcel Levesque et d’autres. Et son deuxième film à épisode, Mathias Sandorf, d’après Jules Verne, réalisé par le jeune Henri Fescourt, qui, formé dans les studios Gaumont, ne quittera désormais plus son producteur et ami. La rupture avec Serge Sandberg en 1920 oblige Nalpas à se séparer de ses studios flambant neufs.1 Après un voyage d’étude en Amérique, il revient à Paris en 1922 pour diriger la production de la Société des Cinéromans, firme créée par MONTE-CRISTO ... ... LOUIS NALPASSeigneur du Ciné-Roman l’ancien Fantomas de Louis Feuillade, René Navarre, et récemment reprise par Jean Sapène, Citizen Kane à la française. Nalpas voit enfin son rêve se concrétiser. Il constitue des équipes d’artistes, acteurs et techniciens engagée à l’année, à l’américaine, et les installe à Joinville dans le nouveau studio Lewinsky, vite rebaptisé le Studio des Cinéromans. Là Nalpas donne un deuxième souffle à un genre décrié pour ses scénarios indigents et réalisations bâclées. Il s’entoure de scénaristes habiles, tels Arthur Bernède et Pierre Gilles Veber (père du cinéaste Francis Veber). Leurs scénarios sont mieux charpentés, les anciennes divisions en 10 et 12 chapitres qui s’étiraient sur plus de 10 000 mètres, sont ramenées à huit épisodes d’environ 8 000 mètres. Des metteurs en scène chevronnés (Gaston Ravel, René Leprince, Luitz Morat, Henri Desfontaines et le fidèle Fescourt) y apportent un sang neuf et un savoir-faire qui vont vite relancer le film à épisode. De 1922 à 1927, Nalpas réalise une vingtaine de films à épisodes qui confèrent au genre ses lettres de noblesse. Parmi ses plus grandes réussites figurent deux admirables cinéromans d’Henri Fescourt, Rouletabille et les Bohémiens (1922) et Mandrin (1924) ainsi bien que son adaptation tout en finesse (et en 32 bobines) des Misérables (1925), exploité en quatre parties hebdomadaires. Les succès s’enchaînent, pour aboutir à un époustouflant Fanfan la Tulipe (1925) de René Leprince, chef d’œuvre du film à épisode historique. De plus, Nalpas co-produira une quarantaine de long-métrages (sous la filiale Films de France) dont deux super-productions de la colonie russe de Paris, conçues pour un Ivan Mosjoukine au sommet de sa notoriété : Michel Strogoff (1926) de Viatcheslav Tourjansky et Casanova (1927) d’Alexandre Volkoff. En même temps, Nalpas s’enthousiasme pour les films de marionnettes animées d’un autre émigré slave, Ladislas Starewitch.2 En 1927, l’empire de Sapène chancelle. Nalpas, lassé par d’incessants différends avec son patron, reprend sa liberté.3 Réanimant son ancienne société, il produit une nouvelle version en deux époques de son livre fétiche, Monte-Cristo, réalisée par Fescourt, ainsi que l’unique longmétrage du génial Starewich, Le Roman de Renart, qui devra attendre plus d’une décennie avant d’atteindre les salles obscures. Mais le parlant est là et s’avère fatal pour Nalpas. Découragé par l’investissement malchanceux dans la vente d’appareils de films sonores sur disque, il tire sa révérence au cinéma en 1936. Il meurt en 1948 dans l’oubli total. Lenny Borger4 1.+ Anne-Élisabeth Dutheil de la Rochère, Les Studios de la Victorine 1919-1929 © AFRHC & Cinémathèque de Nice, 1998 2.+ Une heure avec Louis Nalpas, Jean Pascal, Cinémagazine, n° 39, 28 septembre 1928 [p. 476-479] 3.+ “Louis Nalpas, ex-directeur du Film d’Art et des Films Louis Nalpas, quitte la direction artistique de la Sté des Cinéromans-Films de France pour fonder une firme indépendante qu’il dirigera. Le premier film qu’il entreprendra sera une nouvelle adaptation du Comte de Monte-Cristo, déjà tourné en 1916 par Léon Mathot et en 1922 par John Gilbert. Qui sera le nouvel Edmond Dantès ?” L’activité cinégraphique/En France, Cinéa-Ciné pour tous, n° 112, 1er juillet 1928, [p. 31] 4.Ce texte initialement publié par La Cinémathèque Française, n° 23, juillet 1987 [p. 10-11] a été revu et amandé par l’auteur qui précise : Nous remercions Mr Claude Nalpas et Mme Jeanne Nalpas pour les précieux renseignements qu’ils nous ont confiés. MONTE-CRISTO ... LOUIS NALPAS te u r Produc FILMS LOUIS NALPAS (Nice - Paris) 1918 ■ La sultane de l’amour de Charles Burguet & René Le Somptier 1919 ■ La croisade de René Le Somptier La fête espagnole de Germaine Dulac Serpentin Série de Jean Durand Un ours de Charles Burguet 1920 ■ Le chevalier de Gaby de Charles Burguet Tristan et Yseult de Maurice Mariaud 1921 ■ Mathias Sandorf de Henri Fescourt 1928 ■ L’horloge magique de Ladislas Starewich (cm) La petite parade de Ladislas Starewich (cm) 1928-29 ■ Monte-Cristo de Henri Fescourt 1929-30 ■ Le roman de Renart de Ladislas Starewitch 1929 ■ Mon béguin de Hans Behrendt Paris qui charme de Joe Francys Le capitaine jaune d’A. W. Sandberg La fantôme du bonheur de Reinhold Schunzel LA SOCIETE DES CINEROMANS (Direction artistique : Louis NALPAS) Films à épisodes : 1922 ■ Rouletabille chez les bohémiens d’Henri Fescourt Vidocq de Jean Kemm Tao de Gaston Ravel MONTE-CRISTO LOUIS NALPAS te u r Produc 1923 ■ L’enfant roi de Jean Kemm Mandrin d’Henri Fescourt L’enfant des Halles de René Leprince Gossette de Germaine Dulac 1924 ■ Fils du soleil de René Le Somptier Le vert galant de René Leprince Surcouf de Luitz Morat Mylord l’arsouille de René Leprince 1925 ■ Fanfan la Tulipe de René Leprince Les misérables d’Henri Fescourt Jean Chouan de Luitz Morat L’espionne aux yeux noirs d’Henri Desfontaines 1926 ■ Titi 1er, roi des gosses de René Leprince Le juif errant de Luitz Morat Belphegor d’Henri Desfontaines Capitaine Rascasse d’Henri Desfontaines 1927 ■ Les cinq sous de Lavarede de Maurice Champreux Poker d’as d’Henri Desfontaines MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO Mémoire(s) pour une restauration N o n -f il m Bibliographie sélective ■ ■ ■ ■ ■ ■ ■ ■ Henri Fescourt, La foi & les montagnes ou le Septième Art au passé © Éditions Paul Montel, Paris, 1959.1 Henri Fescourt et Jean-Louis Bouquet, l’Idée et l’Écran © Impr. G. Haberschill & A. Sergent, Paris, 1925-262 ® HL 1023-24-25/ BiFi. René Jeanne, Charles Ford, Le Centre de Formation du Comédien d’Écran/ Le Livre d’Or du Cinéma Français 1945 © Agence d’Information Cinégraphique, Paris, 1945. Claude Beylie et Francis Lacassin, Henri Fescourt/Anthologie du Cinéma © L’Avant-Scène & C.I.B., 1968. Francis Lacassin, Pour une contre-histoire du cinéma © Institut Lumière / Actes-Sud, 1994. François de la Bretèque, Henri Fescourt / Dictionnaire du cinéma français des années vingt, 1895, n° 33, juin 2001 © AFRHC/ Cineteca Bologna, 2001 [p. 186-188]. Monte Cristo [plaquette de présentation, 1929] ® ICO CIN-14914 / BNF. Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo, édition présentée et annotée par Gilbert Signaux, Bibliothèque de La Pléiade/ NRF © Éditions Gallimard, 1981. 1.Réédition 2006 (annotée par Christophe Gautier) envisagée, avec le soutien d’Arte Editions, par les Editions Ramsay dans la collection “Ramsay Cinéma”, dirigée par Jean-Luc Douin. 2.Réédition 2006 par Institut Jean-Vigo de Perpignan/Archives (dir.° de François de la Bretèque) MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO Mémoire(s) pour une restauration F il m Essai d’inventaire des sources Archives ■ ■ ■ ■ ■ ■ GosFilmoFond de Russie, internégatif 35 mm triacétate, N & B, 4 860 m., issu d’une copie nitrate 35 mm., (12/13 + 11/12 = 23 bob./25 bob., manque la première bob. de chacune des deux époques), version originale française (neg. A), int./t. Fr.3 Národní Filmovy Archiv (Prague), copie 35 mm triacétate, 5 061 m., N & B part.t teintée, int./t. Tch.4, issue de la restauration réalisée, en 1993, à partir de deux copies tchèques (nitrates), l’une (1929) partiellement teintée (bleu-vert et orange), l’autre (193?) N & B mais plus longue, toutes deux issues du même internégatif B (export) de 1929. Cinémathèque française (Paris), copie 35 mm safety, N & B, 996 m. (37 min.)5, s. int./t., issue de l’internégatif, 35 mm (incomplet, manque 1 bob.), version Pathé-Baby (9,5 mm). Archives Françaises du Film / Centre National de la Cinématographie (Paris), internégatif 35 mm, N & B, 2 856 m., issu d’une copie nitrate, 35 mm., version courte (neg. A), int./t. Holl., (10 bob.), partiellement teintée (4 teintes : Orange, violet, bleu et rouge / 973 m.), reçue (en 2004) du FilmMuseum Berlin / Deutsche Kinematek, au titre de “rapatriement-échange”. Collection privée (Raymond Neveu), copie d’exploitation Pathé-Rural6 (17,5 mm), N & B, 1 700 m. env. (195 min. env.), V.O. int./t. fr. Cinémathèque Municipale du Luxembourg et Georges Eastman House (Rochester, USA), copies Pathé-Baby7, N & B, 3 reels, 300 feet. 3.Le GosFilmoFond de Russie aurait aussi récupéré (?/dès 1945) une copie nitrate allemande (neg. B), 35 mm., incomplète (manquerait aussi la 1e bob), int./t. All. 4.Première présentation : 5 septembre 1993, Théâtre National de Prague, puis, XII° Giornate del Cinema Muto, 10 octobre 1993, 20:00, Cinéma Verdi, Pordenone (Musique originale (1993) de Jan Klusák, interprétée par l’Orchestra Sdruzení Ceskych Symfoniku dirigée par Jaroslav Opéla). [Monte-Cristo, Incidental film music, Jan Klusák / Bohemia Music 0029-2031] 5.Première présentation : XVIII° Il Cinema Ritrovato (Henri Fescourt, autore di serial), 5 juillet 2004, 18:30 / Cinema Auguste Lumière (Sala 1), Bologne (accompagné au piano par Donald Sosin). 6.Affiche Monte Cristo, Pathé-Rural (lithogr., coul./120 x 80 cm/Bedos & Cie) ® TBAFF01/BNF (Réf. bibl. : Choko n° 6405) 7.Version (Fr.) commercialisée par Pathéscope UK [SB/775], The Count of Monte-Cristo (3 reels / 300 feet) – Edition VHS © Grapevine Video, 2000. MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO MARC-OLIVIER DUPIN Le compositeur et chef d’orchestre. é en 1954 à Paris, MarcOlivier Dupin a fait des études d'harmonie, contrepoint, fugue, analyse, orchestration, alto et direction d'orchestre au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris. Il écrit régulièrement des musiques pour la scène. Pour la télévision, il a déjà écrit une vingtaine de musiques de films et a obtenu en 1990 au festival de Clermont-Ferrand le prix de la Sacem pour la meilleure musique de film. Depuis 1986, en collaboration avec Brigitte Jaques, il a également composé une quinzaine de musiques de scène. Leurs dernières créations sont le Dom Juan de Molière et Hedda Gabler à la Comédie de Genève (mars 2000). Il a obtenu le prix de la critique 1997 pour la meilleure musique de scène (Angels in America et Sertorius). Marc-Olivier Dupin a également écrit plusieurs opéras (Le Jeu du Narcisse, Pension du Diable, Michael Kohlhaas) et réalisé des orchestrations pour N Le s m u si ci en s d e 1 Ann-Estelle Medouze (Premier violon supersoliste), Stéfan Rodescu, Bernard Le Monnier (Violons solos), Jean-Michel Jalinière, Flore Nicquevert (Chefs d'attaque des seconds violons), Yoko Levy-Kobayashi, Virginie Dupont, Sylviane Touratier, MarieLaure Rodescu, Delphine Douillet, Julie Oddou, Isabelle Durin, Anne-Marie Gamard, Jean-François Marcel, Bernadette Jarry-Guillamot, Pierre-Emmanuel Sombret, Grzegorz Szydlo, Marie Clouet, Justine Zieziulewicz (Violons), Renaud Stahl, Sonia Badets, Inès Karsenty, François Riou, AnneMarie Arduini, Solange Marbotin, Catherine Méron, David Vainsot, Bénachir Boukhatem (Altos), Frédéric Dupuis, Jean-Marie Gabard, Bernard Vandenbroucque, Céline Mondesir, Camilo Peralta (Violoncelles), Robert Pelatan, Jean-Philippe Vo Dinh (Contrebasses), Hélène Giraud (Flûte), Jean-Michel Penot (Hautbois), Marianne Legendre, Christelle Chaizy (Cors anglais), Henri Lescourret, Frédéric Bouteille (Bassons), Tristan Aragau, Benoît de Barsony, Annouck Eudeline (Cors), Nadine Schneider, André Presle (Trompettes), Laurent Madeuf (Trombone), André Gilbert (Tuba), Jacques Deshaulle (Timbales), Pascal Chapelon, Didier Keck (Percussions) et Florence Dumont (Harpe). Gérard Caussé, Lily Laskine, Patrice Fontanarosa, Jean-Pierre Rampal, Marielle Nordmann, Alexandre Lagoya, Sœur Marie Keyrouz, Emmanuel Krivine. Il a obtenu en 1994, le prix Jeune Talent de la SACD. Directeur du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris de 1993 à 2000, puis conseiller pour la musique auprès de Jack Lang, ministre de l'Education nationale, il est actuellement directeur de l’ONDIF-Orchestre Nationale d’Île-de-France. Pour le réalisateur Jérôme Prieur, il a récemment composé les partitions pour deux films documentaires La Galerie d’Apollon (ARTE/Le Louvre, 2004) et Vercingétorix (France 5). Il avait déjà composé et dirigé la musique des films muets de Charles Bryant (1923), Nazimova‘s Salomé et de Jean Renoir (1926), Nana, respectivement diffusés par ARTE les jeudi 16 août 2001 et vendredi 27 septembre 2002. 1.+ > www.orchestre-ile.com/site.php?type=P&id=9 MONTE-CRISTO MARC-OLIVIER DUPIN eur Jo u r n a l d u c o m p o ébut août 2005, trois DVD arrivent par la poste à Pétunia – notre petite maison à Arès, sur le Bassin d’Arcachon -. C’est dans ce lieu que j’aime plus que tout, que je commence dans la chaleur de l’été, la composition de cette partition qui sera la plus longue que je n’ai jamais eu à écrire. Ayant composé pour deux autres films muets, Salomé et Nana, la méthode m’est familière. J’entreprends un premier travail consistant à découper le film plan par plan, en notant sur un fichier Excel kilométrique, différentes indications. Le résultat est un tableau à cinq colonnes ; les temps de début et de fin de chaque plan (heure/minute/seconde/ image1), le texte des cartons2, un résumé de l’action. Le nombre de lignes correspond au nombre de plans, soit 1689 pour la première partie du film et 1122 pour la seconde… Installé sur la terrasse ou dans l’Abri à cochons le chais reconverti de notre maison -, ce travail réalisé à l’aide d’un petit lecteur DVD et de mon ordinateur portable aura pris seulement un peu plus de deux semaines, grâce à l’aide de Jacques Poitrat et de Clélia, son assistante stagiaire. À la fin du séjour arésien, je suis en mesure de commencer à réfléchir à ce que sera la musique. Le tableau Excel imprimé me suit à la plage ou accompagne mes siestes. J’y travaille également tôt le matin avant le réveil de Lila et Elia, avant la ronde des biberons. D s it Je ne sais pourquoi, mais cette phase de travail commence par du coloriage. J’identifie les grandes séquences du film à qui j’attribue une couleur, puis note avec prudence quelques idées de timbre instrumental. Très tôt dans la réflexion, j’abandonne l’idée de thèmes musicaux ; il n’y aura pas le thème de Dantès, ni d’aucun autre personnage. L’un des éléments importants de la préparation est l’identification la plus précise possible du tempo de toutes les danses. Il y a en effet beaucoup de scènes de danse dans ce film : espagnole chez les « Catalans », provençale lors des fiançailles, les nombreuses valses à l’Opéra, etc. Pour repérer ces tempi, je guète les pas des danseurs du film avec mon métronome qui sonne, solitaire, au milieu des jeux de Lila et des commentaires fanfarons qui accompagnent la partie de pétanque des voisins, dans le chemin. La chasse au tempo est un exercice d’autant plus difficile que Fescourt n’a pas toujours exigé de ses comédiens et figurants, une rigueur rythmique à toute épreuve… Pendant la danse « des Catalans » par exemple, certains plans montrent des spectateurs battre des mains, à des vitesses complètement différentes. Il me fallait donc choisir un seul des personnages à suivre musicalement, celui qui attire le plus le regard du spectateur. À notre retour à Paris, commence à proprement parler, la composition. Le petit bureau du nouvel appartement que nous occupons, contiguë à la 1.C'est-à-dire le time-code. 1.Étonnamment, il y en a assez peu dans ce film, en comparaison des autres films muets sur lesquels j’ai travaillé. MONTE-CRISTO ... ... MARC-OLIVIER DUPIN eur Jo u r n a l d u c o m p o chambre des filles, sera pendant cinq mois, ma cellule. Les longs fragments de nuits, cette proximité m’aidera à tenir. Pour chaque séquence, le travail est identique : la préparation du papier à musique d’orchestre de 24 portées (parfois davantage avec les divisions de parties de cordes) comprend le tracé des barres de mesure puis le calcul du time-code pour chaque mesure. Là encore, je gagne un temps extraordinaire avec le tableur Excel qui me permet de faire très rapidement une flopée de règles de trois, me donnant précisément les time-code que je dois reporter sur chaque mesure de la partition, en fonction du tempo choisi.3 Lorsqu’il n’y a pas de contraintes liées à une danse, c’est donc par le choix intuitif d’un tempo que je commence. Puis, je reporte sur la partition le résumé de l’action, plan par plan, parfois plus détaillé lorsqu’il y a une action précise à illustrer dans le film : un baiser, un coup de revolver, la chute du linceul dans la méditerranée, etc. N’écrivant naturellement pas directement pour orchestre, je prépare alors le « monstre » : une partition format italien, me permettant d’écrire l’ébauche de la musique, non instrumentée et souvent incomplète, à partir de laquelle j’orchestrerai. L’un des éléments fastidieux de ce travail est le report des time-code et des résumés de l’action. Tellement nourri du roman et du chef d’œuvre de Fescourt, je décide à me jeter à l’eau et d’écrire 3.La règle de trois est toujours la même : durée = (60 x nombre de temps x nombre de mesures) / tempo. s it dans la chronologie du film. Curieusement, ce principe me convient, alors que pour d’autres travaux, il ne m’est pas toujours arrivé de composer « de gauche à droite ». J’ai souvent composé de façon plus « éclatée » comme un peintre traiterait différents fragments de l’espace de son tableau. Je pense aussi que dérouler ce fil chronologique est d’autant plus évident que Dumas mène son lecteur avec une telle virtuosité, un tel suspens qu’aller de l’avant me semble naturel. Et je dois dire, qu’à aucun moment de ces cinq mois d’écriture je n’ai éprouvé l’angoisse de la page blanche. Parfois mécontent du travail de la veille ou de l’avant-veille, il m’est arrivé de refaire des passages. Mais tellement porté par ce double chef-d’œuvre, littéraire et cinématographique, je n’ai jamais éprouvé la peur du vide. Avant de commencer à proprement parler le travail d’écriture, je me pose de nombreuses questions d’ordre esthétique : faut-il écrire tonal ou atonal ? illustrer ou non l’action ? faut-il résister à l’extraordinaire éventail de sentiments par lesquels nous font passer Dumas et Fescourt ? Dès les premières notes de septembre, plusieurs évidences m’apparaissent. La force de l’intrigue, l’intensité des sentiments doivent être accompagnées au premier degré : il me semble nécessaire d’écrire des musiques heureuses pour les moments de bonheur (par exemple l’idylle entre Valentine et Maximilien), d’accompagner dans les tréfonds de la tristesses les situations MONTE-CRISTO ... ... MARC-OLIVIER DUPIN eur Jo u r n a l d u c o m p o dramatiques (la mort de Faria) ou parfois d’être dans l’ironie d’un personnage (Caderousse, ivre). Par ailleurs, la durée du film (3 heures et 42 minutes) nécessite de véritables contrastes musicaux. C’est pourquoi, je décide d’utiliser librement un langage tonal allant du baroque à des univers dissonants, en passant par des musiques modales – notamment pour les scènes orientales -. Parfois, le glissement du tonal vers l’atonal (ou le contraire) se produit dans une même séquence. Enfin, parce qu’il n’y aura pas de thèmes, je prends le parti de faire correspondre des timbres instrumentaux à chaque personnage principal : Dantès s’incarne par le violoncelle solo, un cor ou trois cors selon les scènes, Fernand par le basson, Caderousse par la clarinette, Morrel par l’alto solo, Julie par la flûte, Mercédès parfois par le violon ou par le violoncelle, etc. Et curieusement, malgré l’absence assumée de thème, au fil de l’écriture, dans l’ivresse de l’urgence, des éléments récurrents émergent : une suite de trois accords4, des mélismes en forme de chromatismes retournés, un certain usage du choral luthérien, etc. Dès l’écriture, je pense au principes de mixages que nous adopterons : souvent la musique doit être présente et « réaliste », mais dans certaines scènes elle se limite à une sorte de toile de fonds, d’élément de décor lointain. Ces mois d’écriture seront à la fois une épreuve et un bonheur. s it Écrire une telle quantité de musique5 est avant tout une épreuve physique à bien des égards : il est difficile de se lever pendant la nuit pour travailler et de lutter contre le manque de sommeil. Parfois la main qui tient le crayon devient douloureuse. Des petits maux surviennent : mal aux fesses de rester assis plus d’une dizaine d’heures, certains jours ; une chute dans la précipitation d’un mouvement entre la table et le piano… La nécessité de rester confiné entre la table à écrire, le piano et l’ordinateur6 a également suscité un sentiment de claustration quasi physique. Le raccourcissement des jours d’hiver devient alors pesant. Comme Dantès ou Faria, je ressens ce qu’exprime un des cartons du film : « les jours succèdent aux jours… ». D’un point de vue psychologique, l’immersion dans une telle histoire est douloureuse. On intériorise des situations terribles : l’injustice envers Dantès, la séparation de Mercédès, la réclusion d’Edmond, la mort du père, celle de Faria et bien d’autres. J’ai énormément pleuré certaines nuits, tellement bouleversé par cette fiction dont je n’arrivais pas à me distancier. Par moment, le détachement est d’autant plus difficile à trouver que cette forme de travail pour l’image, impose de voir et revoir chaque plan des dizaines de fois de suite – parfois par très courtes séquences. Heureusement ces moments difficiles ont été largement compensés par de grandes joies. Tout d’abord, je crois ne m’être jamais habitué à la 4.Probablement issus d’une pièce de Liszt, je n’arrive pas à me souvenir précisément de laquelle… 5.991 pages d’orchestre. J’avais parfois le sentiment d’être dans la situation des illuminés qui traversent l’Atlantique à la rame ou qui réalisent des actes de ce genre, absurdes… 6.À la fois pour visionner le DVD et pour préparer les tableaux Excel m’indiquant le time-code et la pagination. MONTE-CRISTO ... ... MARC-OLIVIER DUPIN eur Jo u r n a l d u c o m p o beauté de ce film, à la force de l’intrigue et à la grandeur des acteurs. Le jeu des comédiens est extraordinaire de modernité et de dépouillement. A l’exception peut-être de la Carconte dont le jeu est parfois exagéré (ainsi que son maquillage…), tous sont d’un naturel confondant et d’une invention réjouissante. Les incessants arrêts sur image sont autant de photographies d’anthologie. En permanence, je ressens le privilège qui m’est donné, d’écrire pour un tel film. De plus, le bonheur d’écrire autant de musique pour orchestre est rare. Même aux heures les plus dures, les plus solitaires de ce travail, la gourmandise des timbres de l’orchestre ne me quitte pas. La formation instrumentale sera la suivante : 1 flûte jouant piccolo, 1 hautbois, 1 cor anglais, 1 clarinette, 1 clarinette basse, 1 basson, 3 cors, 2 trompettes, 1 trombone, 1 tuba, 1 harpe, 1 timbalier, 2 percussionnistes (avec un grand nombre d’instruments), et des cordes. Par ailleurs, pendant toute cette période, bon nombre de mes journées sont consacrées à l’Orchestre national d’Ile de France. J’y retrouve l’énergie de l’action partagée : les concerts, leur préparation, la gamberge sur les projets à venir, les contacts avec les musiciens et les équipes administratives et techniques, avec le flot des agents ou des s it emmerdeurs qui veulent diriger, être joués, briller en soliste, etc. Pendant l’hiver, une courte pose intervint dans mon travail d’écriture pour le film : la composition de la musique du Cid, pour des comédiens du Français mis en scène par Brigitte Jaques. La rencontre avec un autre texte, tout aussi grand et universel, est salutaire. Les répétitions de théâtre demeurent des moments privilégiés en raison de l’acuité et de la profondeur du travail de Brigitte. L’approfondissement d’un tel texte est aussi régénérateur que de travailler des suites de Bach pour violon seul. Pendant ce temps, trois copistes se partagent la mise en forme des partitions pour chaque pupitre de l’orchestre. Par mail ou coursiers, les partitions sillonnent l’Ile de France pour arriver dans le bureau de David Stieltjes, le remarquable bibliothécaire de l’Orchestre national d’Ile de France. Puis, les premières séances d’enregistrement de Monte-Cristo ont lieu fin octobre, avec une quarantaine de musiciens de l’Orchestre national d’Ile de France, dans nos locaux d’Alfortville. J’ai naturellement de l’appréhension à diriger les musiciens de l’orchestre dont je suis le directeur… d’autant plus que je ne suis pas un chef professionnel. L’une des difficultés étant de diriger en étant synchrone à l’image ; cela demande du chef une redoutable MONTE-CRISTO ... ... MARC-OLIVIER DUPIN eur Jo u r n a l d u c o m p o précision. Mais, je dois dire que les séances se déroulèrent à merveille, dans une excellente atmosphère. Mitsou Carré est une extraordinaire directrice artistique, maîtrisant magnifiquement la partition qu’elle découvre pratiquement en séance. Sa douceur et son sens de la psychologie facilitaient singulièrement le processus parfois répétitif et fastidieux de l’enregistrement. Michel Pierre et son assistant Victor Laugier, avec un minimum d’équipement informatique, réalisent la prouesse de rendre tout facile : notamment la synchronisation de l’image et du son. Cette première série d’enregistrement constitua une étape stimulante pour moi ; les nombreuses heures passées trouvaient une concrétisation heureuse. Deux autres périodes d’enregistrements furent consacrées à la suite et fin de ce long feuilleton musical, en décembre puis en février. Il y eut en tout environ une vingtaine de services d’enregistrement. En novembre, le travail de composition pour le film reprend. Entre-temps, pour étudier la faisabilité de réaliser l’été 2006, une avant-première du film en concert au château d’If, Roland David7 et moi, descendons à Marseille. Lors de cette journée de décembre froide mais ensoleillée, nous prenons un bateau pour visiter le château d’If. Je reconnais avec émotion, les nombreux lieux du tournage. Il est décidément difficile de croire que cette histoire n’est qu’une fiction… Nous faisons le constat que malheureusement, il n’est pas envisageable d’en don- s it ner une représentation « live » au château : trop de frais techniques, et un mistral qui, même en juillet, peut rendre impossible le débarquement du public dans l’île et perturber la représentation. Nous envisageons alors une diffusion sur les multiples écrans installés dans la partie musée du château. En janvier/février 2006, je commence à m’attrister de la fin imminente de ce travail… Vers les pages 900, je commence à freiner l’allure dans la seule crainte d’abandonner cette histoire et ces personnages. La dernière séance d’enregistrement passée, nous enchaînons sur le montage. Mistou a fait la sélection des prises ou des fragments de prises ; Michel a réalisé un premier pré-montage. Avec Michel ou Victor commence le travail du montage précis : avec « le ciseau et la colle informatique » nous arrivons à caler la musique, à l’image près en quasi-parfaite synchronisation. Je me réjouis alors d’avoir composé avec ce degré fou de précision ; j’ai le sentiment que cela convient au film. Enfin, le travail s’achève en avril avec le mixage définitif. Ce voyage aura duré six mois. Pétunia, 3 avril 2006 Marc-Olivier Dupin 7.Directeur délégué à l’Orchestre national d’Ile de France. Roland a eu la bonne idée de proposer cette collaboration à Anne Matheron, conservatrice du lieu. Je remercie ma femme Emmanuelle et mes deux filles Lila et Elia qui ont fait preuve de beaucoup de patience pendant cette période parfois difficile pour elles. Je leur dédie cette musique dans laquelle il y a beaucoup d’amour. MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO on Gé né ri qu e de la re stau ra ti Ce film français muet produit en 1928-29 par Films Louis-Nalpas, Paris a été reconstruit en 2006, avec le concours de GosFilmoFond De Russie qui avait sauvegardé une version originale incomplète et la participation de Archives Françaises du Film (Centre National de la Cinématographie) qui a sauvegardé une version courte partiellement teintée, initialement préservée par Stiftung Deutsche Kinemathek & une collection privée qui conserve une copie Pathé-Rural. Cette restauration digital-cinéma a été réalisée par Thierry Delannoy, Christelle Vinchon, Jean-Rémi Morançais, Frédéric Chabbal & Laurent Jégu, sous la direction de Juan Martin Eveno & Angelo Cosimano sous la direction artistique de Jean Michel Ausseil (producteur délégué) avec la collaboration de Lenny Borger (consultant exécutif) & Jacques Poitrat (Unité de Programmes Cinéma) assisté de Clélia Sainton (Université Paris VIII, Paris-St Denis) MONTE-CRISTO MONTE-CRISTO on Gé né ri qu e de la re stau ra ti Musique originale de Marc-Olivier Dupin interprétée par : Ann-Estelle Medouze (Premier violon supersoliste), Stéfan Rodescu, Bernard Le Monnier (Violons solos), Jean-Michel Jalinière, Flore Nicquevert (Chefs d'attaque des seconds violons), Yoko LevyKobayashi, Virginie Dupont, Sylviane Touratier, Marie-Laure Rodescu, Delphine Douillet, Julie Oddou, Isabelle Durin, Anne-Marie Gamard, Jean-François Marcel, Bernadette Jarry-Guillamot, Pierre-Emmanuel Sombret, Grzegorz Szydlo, Marie Clouet, Justine Zieziulewicz (Violons),Renaud Stahl, Sonia Badets, Inès Karsenty, François Riou, Anne-Marie Arduini, Solange Marbottin, Catherine Méron, David Vainsot, Bénachir Boukhatem (Altos), Frédéric Dupuis, Jean-Marie Gabard, Bernard Vandenbroucque, Céline Mondésir, Camilo Peralta (Violoncelles), Robert Pelatan, Jean-Philippe Vo Dinh (Contrebasses), Hélène Giraud (Flûte), Jean-Michel Penot (Hautbois), Marianne Legendre, Christelle Chaizy (Cors anglais), Henri Lescourret, Frédéric Bouteille (Bassons), Tristan Aragau, Benoît de Barsony, Annouck Eudeline (Cors), Nadine Schneider, André Presle (Trompettes), Laurent Madeuf (Trombone), André Gilbert (Tuba), Jacques Deshaulle (Timbales), Pascal Chapelon, Didier Keck (Percussions) et Florence Dumont (Harpe) de sous la direction du compositeur Marc-Olivier Dupin, enregistrée à Alfortville, 25-28 octobre Ingénieur du Son (enregistrement & montage-mixage) : & 15-17 décembre 2005. Michel Pierre (arietec), assisté de : Victor Laugier 9-10 février 2006 sous la direction artistique de Mitsou Carré Gravure musicale : Frédérique Walter, Michel Cossement, Olivier Jeannot. Une re-production Postproduction Natacha Louis (coloriste), Arnaud Belloir, Julien Souchet (finalisation) & Jérémy Le Bris (report son) Adaptation anglaise : Frédéric Dussoubs. en association avec Succession Henri Fescourt avec la participation de & Administration de production : Marie-Pierre Mourne assistée de Valérie Louis. www.zzproductions.fr Remerciements : Philippe Esnault, Alain Resnais, Antoinette Lacorne & Denis Lacorne, Me Henri Choukroun, Claude Nalpas & Jeanne Nalpas, Francis Lacassin, François de la Bretèque, René Clémenti-Bilinski, Mireille Beaulieu, Jean-Louis Milla, Carole Costille, Pierre Triapkine, Laurent Coulon, Nikolaj Borodatchov, Valery I. Bossenko, Sonya (Technovid M), Virginie Devesa, Serge Bromberg & Éric Lange, Denis Auboyer, Catherine Colonna & Véronique Cayla, Boris Todorovitch, Michelle Aubert, Eric Le Roy, Eva Orbanz, Raymond Neveu, Claude Bertemes, Christophe Gauthier, Marc Vernet, Anne-Élisabeth Dutheil de la Rochère-Buxtorf, Mark-Paul Meyer, Marianne Hietbrink, Rob Lambers, Davide Pozzi, Michele Canosa, Roland David, Catherine Delcroix, Catherine Vauchelles, Bernard Chapelle, David Stilejes, Marie-Béatrice Bertrand, Emmanuelle Lucchini-Dupin, Anne-Laure Henry-Tonnerre, Guillaume Sciama, Micheline Martin, Anne Matheron, Apolline Quintrand, Micheline Gardez, Philippe Paquot, Thierry Frémaux, Nancy Nottingham, Philippe Becq, Virginie Regnauld, Claude Carestia, Caroline Levesque, Emmanuel Suard, Jean Rozat, Karen Byot, Dominique Blain, Agnès Buiche-Moréno, Clémence Fléchard & ® 112 049 / ZZ Productions, 2005. MONTE-CRISTO