L`allaitement simplifié des veaux laitiers
Transcription
L`allaitement simplifié des veaux laitiers
VEAU LAITIER l ALLAITEMENT l LAIT ENTIER l LAIT FERMENTÉ l ZOOTECHNIE DOSSIER Par Philippe BRUNSCHWIG1 et Jean-Yves PORHIEL2 1. Institut de l’Elevage - 9 rue André Brouard - BP 70510 - 49 105 Angers cédex 02 2. Pôle Herbivores de Bretagne - 5 avenue de Sully - 29322 Quimper [email protected] L’allaitement simplifié des veaux laitiers Il existe des pratiques d’allaitement qui font gagner du temps, réduisent la pénibilité et sont moins astreignantes. Ces techniques ont été testées en stations expérimentales dans l’ouest de la France. Plusieurs connaissent un développement rapide. L ’alimentation lactée du veau, obligatoire pour un bon démarrage, est souvent vécue comme très contraignante par les éleveurs. De plus, l’agrandissement des ateliers laitiers nécessite d’élever un nombre croissant de veaux, ce qui se traduit souvent par une multiplication du nombre d’intervenants au cours de cette phase lactée. Celle-ci est encore caractérisée par une alimentation majoritairement individualisée, alors que la conduite des animaux adultes s’oriente de plus en plus vers une alimentation collective simplifiée (rations complète ou semicomplète, pâturage). Une évolution vers des pratiques simplifiées pour l’élevage des veaux est aujourd’hui aussi vivement souhaitée par les éleveurs. Des enquêtes ont montré qu’il existait une grande variété de pratiques en élevages, aboutissant à des conditions sanitaires allant de très satisfaisantes (4) à catastrophiques. Dans ce dernier cas, une mortalité bien supérieure à la moyenne (12 à 13 %) est observée. Les pratiques autour de l’allaitement (respect du volume de lait et/ou de sa concentration, conditions de distribution, régularité des pratiques, …) sont déterminantes dans la réussite de cette période. Les conditions d’élevage des génisses de renouvellement ont une influence importante sur la carrière de la vache. Elles doivent viser à optimiser l’âge au premier vêlage de façon à maîtriser au mieux le prix de revient du lait [3]. Quel que soit l’âge au vêlage pour les génisses, l’éleveur a inté- RÉSUMÉ L’allaitement des veaux, souvent individualisé, est exigeant en travail et en surveillance. A ce titre, les éleveurs sont attentifs aux pratiques permettant d’améliorer leurs conditions de travail, tout en maintenant de bons résultats de croissance et de santé sur cette période. De nouvelles pratiques, maintenant éprouvées, permettent à l’éleveur de disposer d’une large gamme de méthodes convenant à sa situation et à ses attentes. Le lait de vache apte à la vente, excédentaire ou non, peut être distribué en l’état, réchauffé et individuellement distribué en 6 repas par semaine. Il peut aussi être utilisé après fermentation lactique de 24 h, à température ambiante, et distribué collectivement en bac à tétines. Le lait non commercialisable issu des 14 premières traites, stocké en continu et réfrigéré, peut aussi être valorisé une fois réchauffé et distribué individuellement en 6 repas par semaine. L’allaitement au distributeur automatique de lait peut aussi être simplifié dans sa programmation en proposant au veau un volume de lait constant à consommer quotidiennement. Ces techniques ont été testées en stations expérimentales dans l’ouest de la France. Plusieurs connaissent un développement rapide. Toutes visent à minimiser et simplifier le travail des intervenants en élevage. Toutefois, leur mise en application ne dispense pas d’une surveillance attentive et régulière des jeunes animaux, seule garante de la réussite de l’atelier veaux. rêt, techniquement et économiquement, à valoriser la forte capacité de croissance des veaux durant les 4 premiers mois de vie. Une croissance de 900 g/j durant cette période ne pénalisera pas la carrière de la vache et mettra le veau dans de bonnes conditions de post-sevrage pour consommer fourrage et concentrés. Par ailleurs, l’objectif d’un poids à l’âge de 6 mois égal à 30 % du poids adulte (5) sera plus facilement accessible. Il s’agit d’un facteur de réussite, en particulier pour la valorisation du pâturage dès la première année de vie. Des pratiques d’allaitement simplifié ont été testées depuis plusieurs années pour ces différentes raisons, mais aussi dans le but de réduire le temps consacré à des tâches peu gratifiantes (portage, vaisselle) et de diminuer l’astreinte et la pénibilité du travail. Cet article présente différentes techniques testées dans les stations expérimentales de l’Ouest et validées par le groupe Interrégional Génisses des Pays de la Loire-Bretagne-Basse Normandie1. Note 1. Le groupe Interrégional Génisses associe les Chambres d’agriculture-Contrôle Laitier et Bovins Croissance des Pays de la Loire-Bretagne et Basse-Normandie, l’Institut de l’Elevage et l’INRA. 13 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers TABLEAU 1.. Volume de lait (TB : 40-42 g/kg) de tank distribué par repas selon l’âge du veau Age (semaines) 1 2 3 4 5 6 7 8 Nombre de jours de distribution/semaine 7 7 6 6 6 6 6 6 Volume par repas en 2 repas/jour (L) 2 3 - - - - - - Volume par repas en 1 repas/jour (L) - - 5 5 5 5 5 5 D’après [1]. TABLEAU 2.. Principaux résultats zootechniques observés chez les veaux recevant du lait entier, une fois par jour six jours par semaine Nombre de veaux 39 Délai naissance - sevrage (j) 57,5 Lait entier (L) 256 Concentré consommé de la naissance au sevrage (kg) 34 Poids au sevrage (kg) 85 Délai sevrage - 6 mois (j) 125,5 Concentré consommé du sevrage à l’âge de 6 mois (kg) 353 Foin distribué du sevrage à l’âge de 6 mois (kg) 266 Poids à l’âge de 6 mois (kg) 201 D’après [1]. La distribution de lait entier en 6 repas par semaine L’utilisation du lait entier peut se justifier pour de multiples raisons : gestion de la référence laitière, simplification de la préparation, intérêt économique… Cette pratique consiste à distribuer du lait de vache prélevé sur l’arrivée du lait au tank si l’on prélève pendant la traite (déjà chaud) ou dans le tank (à réchauffer). Cette technique a été testée pendant quatre années à la ferme expérimentale des Trinottières (49). Après deux semaines d’allaitement à 2 repas par jour, les veaux reçoivent un repas par jour pendant les six semaines suivantes, six jours sur sept. L’enjeu est aussi de se libérer de l’allaitement un jour par semaine. Le prélèvement du lait à l’arrivée au tank ou dans le tank permet de régulariser les taux (protéines et lipides) du lait servi aux veaux et évite les changements brusques de composition d’un jour sur l’autre. Il permet aussi d’éviter les manipulations de bidons dues au prélèvement sur vaches individualisées. Le plan de distribution utilisé aux Trinottières est présenté au Tableau 1, pour un lait ayant 14 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 une teneur en matière grasse (MG) autour de 40 g/kg. Si le lait distribué aux veaux a une teneur supérieure à 40 g/kg, un ajustement est pratiqué pour maintenir l’apport énergétique par le lait : 5 L de lait à 40 g/kg = 4,5 L de lait à 44 g/kg = 4 L de lait à 48 g/kg. Le jour de suppression du repas lacté lors de la 3ème semaine est fixé par l’éleveur, mais doit être régulier pour une bande de veaux ou une campagne de vêlages. Dès la deuxième semaine, les veaux reçoivent de l’eau propre à volonté, du foin (ou de la paille) bien conservé et appètent en râtelier, et du concentré régulièrement renouvelé. Le jour sans repas lacté, les veaux consomment 50 à 60 % de concentrés de plus que les autres jours de la semaine (Figure 1). L’arrêt du plan lacté est toujours effectué le lendemain d’un jour sans lait. En moyenne, au jour du sevrage les veaux consomment 2 kg de concentré par jour. L’objectif de consommation de concentré au sevrage, retenu avec les autres pratiques d’allaitement, est atteint. Au sevrage (à l’âge de 8 semaines), les poids observés sont plus faibles que ceux observés lors d’un plan classique de 2 repas/jour (sevrage à l’âge de 9 à 10 semaines). Cependant, l’objectif de 200 kg ou plus à l’âge de 6 mois est atteint (Tableau 2). Quelques cas de diarrhées alimentaires, fugaces, sont observés dont un lors du dépassement accidentel de volume distribué à un veau lors d’un repas, les autres sont consécutifs à des changements brutaux de conditions météorologiques. Il convient toutefois de noter que ces essais ont été effectués sans animaux témoins. Il est alors difficile de discerner ce qui est vraiment dû au traitement expérimental et ce qui s’explique par les conditions d’élevage. Ce plan nécessite en moyenne 250 L de lait par veau, y compris le colostrum et le lait non commercialisable de la 1ère semaine. Comparativement à un allaitement sur 9 semaines avec 2 repas par jour en permanence (380 L de lait en moyenne), cette technique permet de supprimer 50 repas soit 45 % des distributions et 30 % du portage (135 kg de lait). Elle permet aussi des économies de temps de travail : 3 mn/veau/jour lorsque l’on a moins de DOSSIER Concentré (kg/j) 2,5 2,0 Figure 1. Consommation moyenne journalière de concentré (± écart-type) par les veaux recevant un repas de lait/j, 6 j sur 7 (D’après [1]) 1,5 1,0 0,5 Jours 0,0 1 7 13 19 25 31 37 43 49 55 TABLEAU 3.. Volume de lait (TB : 50-52 g/kg) de 1ère semaine de lactation distribué par repas selon l’âge du veau Age (semaines) 1 2** 3 4 5 6 7 8 Nombre de jours de distribution/semaine 7 7 6 6 6 6 6 6 Volume par repas en 2 repas/jour (L) 2 2,5 - - - - - - Volume par repas en 1 repas/jour (L) - - 4 4 4 4 4 4 ** : un test est en cours sur le passage à 6 repas/semaine dès la 2ème semaine. D’après [2]. 10 veaux à nourrir, 2 mn/veau/jour lorsque l’effectif est supérieur à 10 veaux. Ce temps comptabilise la préparation, la distribution et la vaisselle. La suppression d’une journée de distribution diminue encore la charge de travail et le temps d’astreinte. Le jour choisi pour la suppression du repas lacté dépend de l’organisation de l’atelier veaux. En résumé, la réussite de cette pratique repose principalement sur le respect des volumes de lait distribué, une bonne consommation d’aliment concentré et de fourrage, et une bonne disponibilité d’eau propre (Encadré 1). La distribution de «colostrum» conservé au froid, en 6 repas par semaine Dans cette technique, le colostrum inutilisé et le lait en trop, issu des 14 premières traites, sont stockés au fur et à mesure des vêlages dans un petit tank réfrigéré. Celui-ci est donc approvisionné en continu et le lait est prélevé selon les besoins de l’atelier veaux. Cette pratique est particulièrement adaptée dans les troupeaux connaissant une ou des période(s) de vêlages groupés. Elle est testée depuis deux ans [2] à la ferme expérimentale des Trinottières (49). Le mélange de laits à teneurs très différentes en MG et MP d’un jour sur l’autre, et entre vaches, permet une meilleure homogénéisation de Encadré 1 - Les éléments de réussite de la technique « lait entier en six repas par semaine » t$IBVĊFSMFMBJUË¡$FUMFTFSWJSJNNÏEJBUFNFOU t/FQBTEÏQBTTFSMFTWPMVNFTEFMBJUSFDPNNBOEÏT t"EBQUFSMFWPMVNFEJTUSJCVÏTFMPOMBUFOFVSFO.(EVMBJUEFNÏMBOHF t$POEVJSFMBMMBJUFNFOUËMBTFNBJOFQPVSTJNQMJmFSMPSHBOJTBUJPO par exemple démarrer la semaine le lundi (un veau naissant de jeudi à dimanche démarre sa 1ère semaine le lundi suivant) t4FWSFSMFMFOEFNBJOEVKPVSTBOTSFQBTMBDUÏ t"MMBJUFSVOFTFNBJOFTVQQMÏNFOUBJSFVOWFBVDPOTPNNBOUNPJOTEF 2 kg de concentré la veille du sevrage celui-ci. Lors de l’essai, les teneurs du lait observées ont été de 51 g/kg pour le TB et 49 g/kg pour le TP. Le lait se conserve correctement pendant plusieurs semaines au froid, sans se dégrader. Toutefois, une légère acidité apparaît dans le tank, ce qui participe probablement au maintien de l’état sanitaire satisfaisant. Le lait nécessaire à l’allaitement des veaux est prélevé dans le tank, par une petite pompe en inox (type vide-cave). Comme pour le lait entier précédemment évoqué, le nombre de repas par jour et par semaine est réduit. Dès la deuxième semaine, les veaux reçoivent de l’eau propre à volonté, du foin (ou de la paille) bien conservé et appétant en râtelier, et du concentré 15 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers TABLEAU 4.. Résultats zootechniques observés chez les veaux chez les veaux recevant du «colostrum» conservé, une fois par jour six jours par semaine Nombre de veaux 40 Délai naissance - sevrage (j) 57 Lait non commercialisable 14 premières traites (L) 207 Concentré consommé de la naissance au sevrage (kg) 45 Poids au sevrage (kg) 84 Délai sevrage - 6 mois (j) 126 Concentré consommé du sevrage à l’âge de 6 mois (kg) 373 Foin distribué du sevrage à l’âge de 6 mois (kg) 278 Poids à l’âge de 6 mois (kg) 207 D’après [2]. Encadré 2 - Les éléments de réussite de la technique du «colostrum» réfrigéré t-FTNÐNFTRVFDFVYDJUÏTQPVSMBUFDIOJRVFEVMBJUFOUJFSFOSFQBT par semaine t1SÏMFWFSFUBOBMZTFSMFMBJUBQSÒTTFNBJOFTEFWÐMBHFTQPVSFONFTVrer les taux, afin d’adapter le volume de lait par repas à la teneur en MG du mélange t.BJOUFOJSMFDPVWFSDMFEVUBOLGFSNÏFUGBJSFGPODUJPOOFSMBHJUBUFVS normalement, surtout avant de prélever du lait pour le repas des veaux, t-BWFJMMFBVTPJSQSÏMFWFSMFWPMVNFEFMBJUOÏDFTTBJSFBVSFQBTEV lendemain, (mise en température et donc réchauffage moins important) t1BTTFSVOMJOHFIVNJEFTVSMFTCPSETEVUBOLRVBOEMFOJWFBVEFMBJU conservé a fortement baissé (hygiène) t-FTMBJUTJTTVTEFWBDIFTËNBNNJUFTFODPVSTEFUSBJUFNFOUPVFO délai d’attente sont proscrits TABLEAU 5.. Résultats zootechniques observés sur les veaux à Trévarez avec du lait fermenté Automne 2007 Printemps 2008 Essai Témoin Essai Témoin Nombre de veaux 15 15 9 7 Croissance moyenne (g/j) 832 864 751 779 Diarrhées (cas/nombre de veaux par lot) 2/15 12/15 0/9 3/7 D’après [6]. 16 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 régulièrement renouvelé. Le plan de distribution est conçu pour un lait ayant une teneur en MG autour de 50 g/kg (Tableau 3). En raison du plus faible volume de lait distribué par jour, les veaux consomment plus de concentré que dans la pratique précédente. Globalement, ils ingèrent la même quantité de matière sèche pendant la période d’allaitement qu’avec un lait moins riche en matière utile. Trois cas de diarrhées alimentaires, survenues en période humide et froide, ont à peine ralenti la croissance des veaux concernés. Le poids au sevrage observé est analogue à celui obtenu chez des veaux qui ont reçu 6 repas de lait entier par semaine pendant 8 semaines. L’objectif de poids à l’âge de 6 mois (200 à 205 kg) est atteint (Tableau 4). Tout comme la pratique précédente, celle du «colostrum» réfrigéré repose sur la consommation des concentrés et du fourrage par les veaux. Elle nécessite un petit tank dont la capacité doit être calculée selon la taille du troupeau de vaches et la répartition des vêlages. Le lait utilisé n’étant pas commercialisable, il n’y a pas de coût direct lié à l’achat ou la non-vente de matière première. La consommation électrique est le seul coût, lorsque l’on dispose d’un tank à lait déjà amorti. La distribution de lait fermenté («yogourth») en une fois par jour L’ajout de ferments lactiques, sous forme de yaourts ou de lyophilisat (ferments du commerce), dans du lait entier provoque une fermentation entraînant une « prédigestion » du lait. Ce lait fermenté est distribué aux veaux dès le 3ème jour et pendant toute la phase d’allaitement. Cette pratique a été testée à la station expérimentale des Chambres d’agriculture de Bretagne, à Trévarez dans le Finistère (6). Deux techniques de préparation Deux techniques sont possibles pour la préparation du lait fermenté. La première consiste à mettre 4 yaourts dans 10 litres de lait et à laisser fermenter l’ensemble pendant 24 heures. Ce mélange constitue le fond de cuve, auquel il ne reste plus ensuite qu’à ajouter la quantité de lait nécessaire pour allaiter les veaux. La préparation est laissée à fermenter 24 heures supplémentaires avant sa distribution aux veaux. DOSSIER La seconde technique consiste à utiliser des ferments du commerce, conditionnés en sachets. Ceux-ci sont mélangés au lait, puis le mélange est laissé à fermenter 24 heures avant distribution (cette technique dispense de la gestion d’un fond de cuve). 145,0 Mode de distribution 105,0 kg 148,5 128,6 125,0 Sevrage 111,2 148,0 126,6 102,6 108,9 101,0 Les veaux sont généralement mis en cases 85,0 75,4 collectives dès l’âge de trois jours. Trois 69,5 73,1 semaines d’écart d’âge entre les veaux d’une 65,0 67,8 même case est un maximum, ceci afin de ne 56,5 56,4 pas pénaliser la consommation lactée des 45,0 plus jeunes. La distribution du lait se fait via 20 40 60 80 100 0 un bac à tétines (1 tétine/veau). La quantité Jours de présence Témoin Expé quotidienne distribuée par veau est en moyenne de 8 litres au cours des 3 premières semaines, puis 6 litres lors des semaines 4 à 6 et 4 litres pendant les semaines 7 à 9. Le lait kg est distribué à température ambiante. 142,6 145,0 L’intérêt de distribuer du lait fermenté en un 142,4 repas/jour par rapport à une distribution de lait 128,5 127,4 125,0 entier en 2 repas/jour (plan lacté couramment Sevrage utilisé en Bretagne) a été testé (Tableau 5). 117,2 106,6 Lors des deux essais, les croissances observées 105,0 97,4 99,0 sont identiques entre les lots et le temps de 85,3 travail est réduit de 55 % dans les lots « lait 85,0 83,9 fermenté » par rapport aux lots témoins. La 72,3 réduction des cas de diarrhées est très impor67,4 70,8 65,0 65,2 tante : 2 cas sur 24 veaux dans les lots « lait 54,3 54,4 fermenté » contre 15 cas sur 22 veaux dans les 45,0 lots témoins. Les veaux des lots « lait fermen20 40 60 80 100 0 té » sont aussi plus calmes et se lèchent moins Jours de présence Témoin Expé entre eux. Le coût d’élevage est également réduit de 20 à 30 €, estimation par animal (moins de diarrhées, moins de travail). La qualité de la fermentation du lait, notamFigures 2a et 2b. ment avec l’utilisation de yaourt, est Evolution du poids vif des veaux recevant 3 L/j de lait pendant toute la phase lactée et un aliment à base de maïs grain entier (80 %, a) ou de blé fortement liée à la température ambiante. aplati (72 %, b) -PQUJNVNTFTJUVFFOUSFFU¡$"WFDMFT ferments, la tolérance est plus grande : entre FU ¡$ /ÏBONPJOT TFMPO MFT SÏHJPOT l’isolation du local est nécessaire et peut même nécessiter l’utilisation d’un système de 6ème semaine pour redescendre à 2 litres avant sevrage. climatisation. Ce plan constant a été testé à la station « viande bovine » des Chambres d’agriculture La distribution de lait de Bretagne, à Mauron (56), lors de deux essais consécutifs chez des veaux de type reconstitué en plan constant bovins laitiers mâles. Ces derniers ont été au DAL achetés et livrés âgés de 14 jours en moyenne. L’essai a démarré une semaine plus tard. L’originalité de ce dernier mode d’alimenta- Dans le premier essai, 74 veaux ont suivi ce tion consiste à distribuer 3 L d’un aliment plan d’allaitement constant (3 L de buvée/ d’allaitement contenant 600 g de poudre jour). Ils avaient à disposition un aliment pendant toute la phase lactée. Ceci se fait concentré (composé de 80 % de maïs grain donc indépendamment de l’âge du veau, entier, 15 % de tourteau de soja 48 et 5 % alors que, classiquement, la quantité de lait d’AMV), limité à 2 kg/jour, du foin et de l’eau. distribuée quotidiennement évolue de 3 L la Dans le second essai, 78 veaux ont suivi le 2ème semaine de vie, à 4,5 L de la 4ème à la même plan lacté, mais ils recevaient un aliment 17 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers Photo 1. Simplifier pour obtenir les mêmes résultats sanitaires et techniques, en assurant le même niveau d’observation des veaux concentré composé de 72 % de blé aplati, 23 % de tourteau de soja et 5 % d’AMV. Dans les deux essais, les croissances journalières sont comparables entre les lots (Figures 2a et 2b). La consommation d’aliment d’allaitement est réduite de 9 kg par rapport à un plan d’allaitement classique. La consommation d’aliment concentré est quant à elle majorée de 9 kg dans le 1er essai et de 12 kg dans le second. Cette technique, sans apporter de réel gain de temps de travail par rapport au plan lacté classique (aliment d’allaitement en un repas), permet une réelle simplification dans la conduite de l’allaitement des veaux. La mise en place de plans lactés constants en cours de phase lactée nécessite une grande rigueur dans les volumes distribués, dans la BIBLIOGRAPHIE 1 - BRUNSCHWIG P, PLOUZIN D. Simplification de l’allaitement et du sevrage des veaux d’élevage laitier. Renc. Rech. Ruminants. 2007;14:267. 2 - BRUNSCHWIG P, PLOUZIN D. Simplification de l’allaitement et du sevrage des veaux d’élevage laitier. Renc. Rech. Ruminants, 2009;16:191. 3 - Inra, Institut de l’Elevage, Chambres d’agriculture de Bretagne et des Pays de la Loire, Bovins Croissance. Génisse laitière : de la recherche aux pratiques d’éleveurs. Ed. Chambre d’Agriculture, Laval. 1999:86p. 4 - JEGOU V, PORHIEL, JY, BRUNSCHWIG P, JOUANNE D. Mortalité des veaux d’élevage en Bretagne : facteurs de risque de mortalité dans 80 élevages bretons. Renc. Rech. Ruminants, 2006;13:423-426. 5 - PORHIEL JY, JEGOU V, BERTIN M, PLOUZIN D, BOIS M, BRUNSCHWIG P. Référentiel : élevage du veau. Chambres d’agricultureContrôle Laitier-Bovins Croissance de Bretagne, Pays de la Loire, Basse Normandie, Institut de l’Elevage. Ed. Chambre d’Agriculture du Finistère, Quimper. 2005:51p. 6 - PORHIEL JY. Le “lait yoghourt“ un gain de temps et moins de diarrhées. A la pointe de l’élevage. Ed. Chambre d’Agriculture du Finistère, Quimper. Avril 2005:4p. 18 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 préparation de l’aliment d’allaitement et la température de distribution, comme dans les nombreux autres plans d’allaitement utilisés en élevage. Cette rigueur est aussi valable pour l’alimentation solide (concentré appétant, proche de 1 UFL et de 120 g. de PDI ; bon foin fibreux ou bonne paille) qui, de plus, doit être facilement accessible. Conclusions Les pratiques simplifiées d’allaitement permettent une réelle réduction de temps consacré à l’alimentation et/ou de l’astreinte, rendant plus acceptable ces tâches de soin souvent individuelles. Elles ont toujours pour but d’atteindre les performances souhaitées au cours de cette période et d’obtenir en un temps limité des veaux capables de valoriser au mieux le fourrage et les concentrés, plus faciles à gérer et à distribuer collectivement. La variété de pratiques présentées ici, sans doute non exhaustives, permet à beaucoup d’éleveurs de trouver celle adaptée à leur situation et à leurs attentes. La distribution traditionnelle en seau individuel permet de valoriser du lait entier commercialisable ou d’excédent, ainsi que le lait non commercialisable de début de lactation. Elle n’en demeure pas moins la solution la plus logique lorsque les vêlages ne sont pas groupés. Pour des lots d’animaux plus importants, une modification modeste de l’équipement permet de distribuer du lait collectivement, en bac à tétines, à partir de lait entier fermenté. Là encore, la simplicité se conjugue avec le bon état sanitaire des veaux. Pour les élevages de plus grande taille, le DAL est aussi un outil de simplification du travail qui permet de consacrer plus de temps au suivi. Le plan d’allaitement constant, basé sur le même principe de consommation des concentrés à volonté, est une simplification supplémentaire, au niveau de la programmation. Toutes ces solutions, qui permettent de gagner du temps de préparation-distribution-vaisselle, sont toujours accompagnées du même nombre de visites et du même niveau d’observation des veaux. Cela permet de détecter les problèmes de santé et de soigner les animaux le plus rapidement possible. En effet, les simplifications de volume distribué visent à alléger le travail physique et la charge mentale pour se concentrer sur d’autres tâches sollicitant la mémoire et/ou nécessitant une prise de notes. Il reste ensuite à bien s’organiser entre associés ou intervenants de l’atelier veaux pour transmettre rapidement et sûrement les consignes d’une visite à l’autre. DOSSIER Encadré 3. La technique du lait fermenté à Trévarez Première étape Le lait non livrable (lait des 7 premiers jours et lait à cellules) est acheminé de la laiterie à la nurserie (distante de 40 m) via le taxi à lait après chaque traite. Etape 2A : avec des yaourts Etape 2B avec des ferments lactiques du commerce (utilisés pour la consommation humaine). Le lait est versé dans une cuve de fermentation 24 heures avant la distribution. Dans le taxi à lait, rajouter un sachet de ferments après la traite du matin. Le lait du soir sera rajouté au lait fermenté du matin. Le lait fermenté sera distribué le jour suivant. Il n’y a plus de fond de cuve. Dans cette cuve, il reste un fond de cuve (lait déjà fermenté préalablement) au minimum 10 % du lait distribué au veau. Conditions de réussite - Disposer d’une température entre 15 et 18°C dans le local abritant la cuve de fermentation (local isolé : chaud et froid). - rajouter des yaourts 1 fois/semaine dans la cuve. - si incident (lait caillé) refaire le fond de cuve - la durée de fermentation sera réduite en cas de forte chaleur. Troisième étape - 1 repas par jour - mécaniser la distribution avec une pompe à lait Un tuyau muni d’un pistolet et un chronomètre pour gérer la distribution. Le lait fermenté est distribué dans un bac à tétines. Des veaux : en bonne santé. Une technique qui permet de réduire le temps de travail. 19 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010 ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers Encadré 4. La pratique du « colostrum » conservé à la ferme des Trinottières Première étape Le lait des 7 premiers jours de lactation (colostrum inutilisé et lait non commercialisable de 1ère semaine de traite) est stocké en continu dans un petit tank réfrigéré . Ce tank, en bon état de marche, est placé dans la laiterie. Deuxième étape La veille, en fin de journée, le volume de lait nécessaire à la buvée des veaux est prélevé dans le tank à l’aide à l’aide d’une pompe à lait portable. Le lait est versé dans un récipient de grand volume (rouge) lui même posé dans un autre (noir) qui servira de bain-marie. Durant la nuit le lait prend progressivement la température ambiante de la laiterie. Le lait chaud est transvasé à la pompe dans le taxi à lait. Troisième étape Le matin, de l’eau très chaude est versée dans le récipient noir pour réchauffer le lait. En même temps le réchauffe-lait est plongé dans le lait pour atteindre la température de 40°C. Quatrième étape La distribution individuelle est effectuée à l’aide d’un pichet précisément gradué et à lecture facile. Il est ensuite transféré à la nurserie, distante de 50 m, pour y être immédiatement distribué. Le respect de la quantité prévue sur le plan, affiché audessus de la case, est une clé de réussite. Une pratique économique qui simplifie le travail. Les veaux atteignent les objectifs de croissance et sont en bonne santé. 20 BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010