L`allaitement simplifié des veaux laitiers

Transcription

L`allaitement simplifié des veaux laitiers
VEAU LAITIER l ALLAITEMENT l LAIT ENTIER l LAIT FERMENTÉ l ZOOTECHNIE
DOSSIER
Par Philippe BRUNSCHWIG1 et Jean-Yves PORHIEL2
1. Institut de l’Elevage - 9 rue André Brouard - BP 70510 - 49 105 Angers cédex 02
2. Pôle Herbivores de Bretagne - 5 avenue de Sully - 29322 Quimper
[email protected]
L’allaitement simplifié des veaux
laitiers
Il existe des pratiques
d’allaitement qui font gagner
du temps, réduisent la
pénibilité et sont moins
astreignantes. Ces techniques
ont été testées en stations
expérimentales dans l’ouest
de la France. Plusieurs
connaissent un
développement rapide.
L
’alimentation lactée du veau, obligatoire pour un bon démarrage, est
souvent vécue comme très contraignante par les éleveurs. De plus,
l’agrandissement des ateliers laitiers nécessite
d’élever un nombre croissant de veaux, ce qui
se traduit souvent par une multiplication du
nombre d’intervenants au cours de cette phase
lactée. Celle-ci est encore caractérisée par une
alimentation majoritairement individualisée,
alors que la conduite des animaux adultes
s’oriente de plus en plus vers une alimentation
collective simplifiée (rations complète ou semicomplète, pâturage). Une évolution vers des
pratiques simplifiées pour l’élevage des veaux
est aujourd’hui aussi vivement souhaitée par les
éleveurs.
Des enquêtes ont montré qu’il existait une grande
variété de pratiques en élevages, aboutissant à des
conditions sanitaires allant de très satisfaisantes
(4) à catastrophiques. Dans ce dernier cas, une
mortalité bien supérieure à la moyenne (12 à 13
%) est observée. Les pratiques autour de l’allaitement (respect du volume de lait et/ou de sa
concentration, conditions de distribution, régularité des pratiques, …) sont déterminantes dans la
réussite de cette période.
Les conditions d’élevage des génisses de renouvellement ont une influence importante sur la
carrière de la vache. Elles doivent viser à optimiser l’âge au premier vêlage de façon à maîtriser au
mieux le prix de revient du lait [3]. Quel que soit
l’âge au vêlage pour les génisses, l’éleveur a inté-
RÉSUMÉ
L’allaitement des veaux, souvent individualisé, est exigeant en travail
et en surveillance. A ce titre, les éleveurs sont attentifs aux pratiques
permettant d’améliorer leurs conditions de travail, tout en maintenant de bons résultats de croissance et de santé sur cette période. De
nouvelles pratiques, maintenant éprouvées, permettent à l’éleveur de
disposer d’une large gamme de méthodes convenant à sa situation et
à ses attentes.
Le lait de vache apte à la vente, excédentaire ou non, peut être distribué en l’état, réchauffé et individuellement distribué en 6 repas par
semaine. Il peut aussi être utilisé après fermentation lactique de 24 h,
à température ambiante, et distribué collectivement en bac à tétines.
Le lait non commercialisable issu des 14 premières traites, stocké en
continu et réfrigéré, peut aussi être valorisé une fois réchauffé et distribué individuellement en 6 repas par semaine.
L’allaitement au distributeur automatique de lait peut aussi être
simplifié dans sa programmation en proposant au veau un volume de
lait constant à consommer quotidiennement.
Ces techniques ont été testées en stations expérimentales dans l’ouest
de la France. Plusieurs connaissent un développement rapide. Toutes
visent à minimiser et simplifier le travail des intervenants en élevage.
Toutefois, leur mise en application ne dispense pas d’une surveillance
attentive et régulière des jeunes animaux, seule garante de la réussite
de l’atelier veaux.
rêt, techniquement et économiquement, à
valoriser la forte capacité de croissance des veaux
durant les 4 premiers mois de vie. Une croissance
de 900 g/j durant cette période ne pénalisera pas
la carrière de la vache et mettra le veau dans de
bonnes conditions de post-sevrage pour consommer fourrage et concentrés. Par ailleurs, l’objectif
d’un poids à l’âge de 6 mois égal à 30 % du poids
adulte (5) sera plus facilement accessible. Il s’agit
d’un facteur de réussite, en particulier pour la
valorisation du pâturage dès la première année
de vie.
Des pratiques d’allaitement simplifié ont été
testées depuis plusieurs années pour ces différentes raisons, mais aussi dans le but de réduire
le temps consacré à des tâches peu gratifiantes
(portage, vaisselle) et de diminuer l’astreinte et
la pénibilité du travail. Cet article présente
différentes techniques testées dans les stations
expérimentales de l’Ouest et validées par le
groupe Interrégional Génisses des Pays de la
Loire-Bretagne-Basse Normandie1.
Note
1. Le groupe
Interrégional Génisses
associe les Chambres
d’agriculture-Contrôle
Laitier et Bovins
Croissance des Pays
de la Loire-Bretagne
et Basse-Normandie,
l’Institut de l’Elevage
et l’INRA.
13
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers
TABLEAU 1.. Volume de lait (TB : 40-42 g/kg) de tank distribué par repas selon l’âge du veau
Age (semaines)
1
2
3
4
5
6
7
8
Nombre de jours
de distribution/semaine
7
7
6
6
6
6
6
6
Volume par repas
en 2 repas/jour (L)
2
3
-
-
-
-
-
-
Volume par repas
en 1 repas/jour (L)
-
-
5
5
5
5
5
5
D’après [1].
TABLEAU 2.. Principaux résultats zootechniques observés chez les veaux
recevant du lait entier, une fois par jour six jours par semaine
Nombre de veaux
39
Délai naissance - sevrage (j)
57,5
Lait entier (L)
256
Concentré consommé de la naissance au sevrage (kg)
34
Poids au sevrage (kg)
85
Délai sevrage - 6 mois (j)
125,5
Concentré consommé du sevrage à l’âge de 6 mois (kg)
353
Foin distribué du sevrage à l’âge de 6 mois (kg)
266
Poids à l’âge de 6 mois (kg)
201
D’après [1].
La distribution de lait entier
en 6 repas par semaine
L’utilisation du lait entier peut se justifier pour
de multiples raisons : gestion de la référence
laitière, simplification de la préparation, intérêt
économique… Cette pratique consiste à distribuer du lait de vache prélevé sur l’arrivée du lait
au tank si l’on prélève pendant la traite (déjà
chaud) ou dans le tank (à réchauffer). Cette
technique a été testée pendant quatre années à
la ferme expérimentale des Trinottières (49).
Après deux semaines d’allaitement à 2 repas par
jour, les veaux reçoivent un repas par jour
pendant les six semaines suivantes, six jours sur
sept. L’enjeu est aussi de se libérer de l’allaitement un jour par semaine.
Le prélèvement du lait à l’arrivée au tank ou
dans le tank permet de régulariser les taux
(protéines et lipides) du lait servi aux veaux et
évite les changements brusques de composition
d’un jour sur l’autre. Il permet aussi d’éviter les
manipulations de bidons dues au prélèvement
sur vaches individualisées.
Le plan de distribution utilisé aux Trinottières
est présenté au Tableau 1, pour un lait ayant
14
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
une teneur en matière grasse (MG) autour de
40 g/kg. Si le lait distribué aux veaux a une
teneur supérieure à 40 g/kg, un ajustement est
pratiqué pour maintenir l’apport énergétique
par le lait : 5 L de lait à 40 g/kg = 4,5 L de lait
à 44 g/kg = 4 L de lait à 48 g/kg.
Le jour de suppression du repas lacté lors de la
3ème semaine est fixé par l’éleveur, mais doit
être régulier pour une bande de veaux ou une
campagne de vêlages. Dès la deuxième semaine,
les veaux reçoivent de l’eau propre à volonté, du
foin (ou de la paille) bien conservé et appètent
en râtelier, et du concentré régulièrement
renouvelé.
Le jour sans repas lacté, les veaux consomment
50 à 60 % de concentrés de plus que les autres
jours de la semaine (Figure 1). L’arrêt du plan
lacté est toujours effectué le lendemain d’un
jour sans lait. En moyenne, au jour du sevrage
les veaux consomment 2 kg de concentré par
jour. L’objectif de consommation de concentré
au sevrage, retenu avec les autres pratiques d’allaitement, est atteint.
Au sevrage (à l’âge de 8 semaines), les poids
observés sont plus faibles que ceux observés lors
d’un plan classique de 2 repas/jour (sevrage à
l’âge de 9 à 10 semaines). Cependant, l’objectif
de 200 kg ou plus à l’âge de 6 mois est atteint
(Tableau 2). Quelques cas de diarrhées alimentaires, fugaces, sont observés dont un lors du
dépassement accidentel de volume distribué à
un veau lors d’un repas, les autres sont consécutifs à des changements brutaux de conditions
météorologiques.
Il convient toutefois de noter que ces essais ont
été effectués sans animaux témoins. Il est alors
difficile de discerner ce qui est vraiment dû au
traitement expérimental et ce qui s’explique par
les conditions d’élevage.
Ce plan nécessite en moyenne 250 L de lait par
veau, y compris le colostrum et le lait non
commercialisable de la 1ère semaine.
Comparativement à un allaitement sur 9
semaines avec 2 repas par jour en permanence
(380 L de lait en moyenne), cette technique
permet de supprimer 50 repas soit 45 % des
distributions et 30 % du portage (135 kg de
lait).
Elle permet aussi des économies de temps de
travail : 3 mn/veau/jour lorsque l’on a moins de
DOSSIER
Concentré (kg/j)
2,5
2,0
Figure 1.
Consommation moyenne
journalière de concentré
(± écart-type) par les veaux
recevant un repas de lait/j,
6 j sur 7
(D’après [1])
1,5
1,0
0,5
Jours
0,0
1
7
13
19
25
31
37
43
49
55
TABLEAU 3.. Volume de lait (TB : 50-52 g/kg) de 1ère semaine de lactation distribué par repas selon l’âge du veau
Age (semaines)
1
2**
3
4
5
6
7
8
Nombre de jours
de distribution/semaine
7
7
6
6
6
6
6
6
Volume par repas
en 2 repas/jour (L)
2
2,5
-
-
-
-
-
-
Volume par repas
en 1 repas/jour (L)
-
-
4
4
4
4
4
4
** : un test est en cours sur le passage à 6 repas/semaine dès la 2ème semaine. D’après [2].
10 veaux à nourrir, 2 mn/veau/jour lorsque
l’effectif est supérieur à 10 veaux. Ce temps
comptabilise la préparation, la distribution et la
vaisselle. La suppression d’une journée de
distribution diminue encore la charge de travail
et le temps d’astreinte.
Le jour choisi pour la suppression du repas
lacté dépend de l’organisation de l’atelier veaux.
En résumé, la réussite de cette pratique repose
principalement sur le respect des volumes de
lait distribué, une bonne consommation d’aliment concentré et de fourrage, et une bonne
disponibilité d’eau propre (Encadré 1).
La distribution de
«colostrum» conservé au
froid, en 6 repas par semaine
Dans cette technique, le colostrum inutilisé et
le lait en trop, issu des 14 premières traites, sont
stockés au fur et à mesure des vêlages dans un
petit tank réfrigéré. Celui-ci est donc approvisionné en continu et le lait est prélevé selon les
besoins de l’atelier veaux. Cette pratique est
particulièrement adaptée dans les troupeaux
connaissant une ou des période(s) de vêlages
groupés. Elle est testée depuis deux ans [2] à la
ferme expérimentale des Trinottières (49).
Le mélange de laits à teneurs très différentes en
MG et MP d’un jour sur l’autre, et entre vaches,
permet une meilleure homogénéisation de
Encadré 1 - Les éléments de réussite de la technique « lait entier en six repas par semaine »
t$IBVĊFSMFMBJUË¡$FUMFTFSWJSJNNÏEJBUFNFOU
t/FQBTEÏQBTTFSMFTWPMVNFTEFMBJUSFDPNNBOEÏT
t"EBQUFSMFWPMVNFEJTUSJCVÏTFMPOMBUFOFVSFO.(EVMBJUEFNÏMBOHF
t$POEVJSFMBMMBJUFNFOUËMBTFNBJOFQPVSTJNQMJmFSMPSHBOJTBUJPO
par exemple démarrer la semaine le lundi (un veau naissant de jeudi à
dimanche démarre sa 1ère semaine le lundi suivant)
t4FWSFSMFMFOEFNBJOEVKPVSTBOTSFQBTMBDUÏ
t"MMBJUFSVOFTFNBJOFTVQQMÏNFOUBJSFVOWFBVDPOTPNNBOUNPJOTEF
2 kg de concentré la veille du sevrage
celui-ci. Lors de l’essai, les teneurs du lait observées ont été de 51 g/kg pour le TB et 49 g/kg
pour le TP. Le lait se conserve correctement
pendant plusieurs semaines au froid, sans se
dégrader. Toutefois, une légère acidité apparaît
dans le tank, ce qui participe probablement au
maintien de l’état sanitaire satisfaisant.
Le lait nécessaire à l’allaitement des veaux est
prélevé dans le tank, par une petite pompe en
inox (type vide-cave). Comme pour le lait
entier précédemment évoqué, le nombre de
repas par jour et par semaine est réduit. Dès la
deuxième semaine, les veaux reçoivent de l’eau
propre à volonté, du foin (ou de la paille) bien
conservé et appétant en râtelier, et du concentré
15
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers
TABLEAU 4.. Résultats zootechniques observés chez les veaux chez les veaux
recevant du «colostrum» conservé, une fois par jour six jours par semaine
Nombre de veaux
40
Délai naissance - sevrage (j)
57
Lait non commercialisable 14 premières traites (L)
207
Concentré consommé de la naissance au sevrage (kg)
45
Poids au sevrage (kg)
84
Délai sevrage - 6 mois (j)
126
Concentré consommé du sevrage à l’âge de 6 mois (kg)
373
Foin distribué du sevrage à l’âge de 6 mois (kg)
278
Poids à l’âge de 6 mois (kg)
207
D’après [2].
Encadré 2 - Les éléments de réussite de la
technique du «colostrum» réfrigéré
t-FTNÐNFTRVFDFVYDJUÏTQPVSMBUFDIOJRVFEVMBJUFOUJFSFOSFQBT
par semaine
t1SÏMFWFSFUBOBMZTFSMFMBJUBQSÒTTFNBJOFTEFWÐMBHFTQPVSFONFTVrer les taux, afin d’adapter le volume de lait par repas à la teneur en MG
du mélange
t.BJOUFOJSMFDPVWFSDMFEVUBOLGFSNÏFUGBJSFGPODUJPOOFSMBHJUBUFVS
normalement, surtout avant de prélever du lait pour le repas des veaux,
t-BWFJMMFBVTPJSQSÏMFWFSMFWPMVNFEFMBJUOÏDFTTBJSFBVSFQBTEV
lendemain, (mise en température et donc réchauffage moins important)
t1BTTFSVOMJOHFIVNJEFTVSMFTCPSETEVUBOLRVBOEMFOJWFBVEFMBJU
conservé a fortement baissé (hygiène)
t-FTMBJUTJTTVTEFWBDIFTËNBNNJUFTFODPVSTEFUSBJUFNFOUPVFO
délai d’attente sont proscrits
TABLEAU 5.. Résultats zootechniques observés sur les veaux à Trévarez avec
du lait fermenté
Automne 2007
Printemps 2008
Essai
Témoin
Essai
Témoin
Nombre de veaux
15
15
9
7
Croissance moyenne
(g/j)
832
864
751
779
Diarrhées
(cas/nombre de veaux par lot)
2/15
12/15
0/9
3/7
D’après [6].
16
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
régulièrement renouvelé. Le plan de distribution est conçu pour un lait ayant une teneur en
MG autour de 50 g/kg (Tableau 3).
En raison du plus faible volume de lait distribué par jour, les veaux consomment plus de
concentré que dans la pratique précédente.
Globalement, ils ingèrent la même quantité
de matière sèche pendant la période d’allaitement qu’avec un lait moins riche en matière
utile.
Trois cas de diarrhées alimentaires, survenues
en période humide et froide, ont à peine ralenti
la croissance des veaux concernés.
Le poids au sevrage observé est analogue à celui
obtenu chez des veaux qui ont reçu 6 repas de
lait entier par semaine pendant 8 semaines.
L’objectif de poids à l’âge de 6 mois (200 à
205 kg) est atteint (Tableau 4).
Tout comme la pratique précédente, celle du
«colostrum» réfrigéré repose sur la consommation des concentrés et du fourrage par les veaux.
Elle nécessite un petit tank dont la capacité doit
être calculée selon la taille du troupeau de
vaches et la répartition des vêlages. Le lait utilisé
n’étant pas commercialisable, il n’y a pas de
coût direct lié à l’achat ou la non-vente de
matière première. La consommation électrique
est le seul coût, lorsque l’on dispose d’un tank à
lait déjà amorti.
La distribution de lait
fermenté («yogourth») en
une fois par jour
L’ajout de ferments lactiques, sous forme de
yaourts ou de lyophilisat (ferments du commerce),
dans du lait entier provoque une fermentation
entraînant une « prédigestion » du lait. Ce lait
fermenté est distribué aux veaux dès le 3ème jour
et pendant toute la phase d’allaitement. Cette
pratique a été testée à la station expérimentale des
Chambres d’agriculture de Bretagne, à Trévarez
dans le Finistère (6).
Deux techniques de
préparation
Deux techniques sont possibles pour la
préparation du lait fermenté.
La première consiste à mettre 4 yaourts dans
10 litres de lait et à laisser fermenter l’ensemble pendant 24 heures. Ce mélange
constitue le fond de cuve, auquel il ne reste
plus ensuite qu’à ajouter la quantité de lait
nécessaire pour allaiter les veaux. La préparation est laissée à fermenter 24 heures
supplémentaires avant sa distribution aux
veaux.
DOSSIER
La seconde technique consiste à utiliser des
ferments du commerce, conditionnés en
sachets. Ceux-ci sont mélangés au lait, puis le
mélange est laissé à fermenter 24 heures
avant distribution (cette technique dispense
de la gestion d’un fond de cuve).
145,0
Mode de distribution
105,0
kg
148,5
128,6
125,0
Sevrage 111,2
148,0
126,6
102,6
108,9
101,0
Les veaux sont généralement mis en cases
85,0
75,4
collectives dès l’âge de trois jours. Trois
69,5
73,1
semaines d’écart d’âge entre les veaux d’une
65,0
67,8
même case est un maximum, ceci afin de ne
56,5 56,4
pas pénaliser la consommation lactée des
45,0
plus jeunes. La distribution du lait se fait via
20
40
60
80
100
0
un bac à tétines (1 tétine/veau). La quantité
Jours de présence
Témoin
Expé
quotidienne distribuée par veau est en
moyenne de 8 litres au cours des 3 premières
semaines, puis 6 litres lors des semaines 4 à 6
et 4 litres pendant les semaines 7 à 9. Le lait
kg
est distribué à température ambiante.
142,6
145,0
L’intérêt de distribuer du lait fermenté en un
142,4
repas/jour par rapport à une distribution de lait
128,5
127,4
125,0
entier en 2 repas/jour (plan lacté couramment
Sevrage
utilisé en Bretagne) a été testé (Tableau 5).
117,2
106,6
Lors des deux essais, les croissances observées
105,0
97,4 99,0
sont identiques entre les lots et le temps de
85,3
travail est réduit de 55 % dans les lots « lait
85,0
83,9
fermenté » par rapport aux lots témoins. La
72,3
réduction des cas de diarrhées est très impor67,4
70,8
65,0
65,2
tante : 2 cas sur 24 veaux dans les lots « lait
54,3
54,4
fermenté » contre 15 cas sur 22 veaux dans les
45,0
lots témoins. Les veaux des lots « lait fermen20
40
60
80
100
0
té » sont aussi plus calmes et se lèchent moins
Jours de présence
Témoin
Expé
entre eux. Le coût d’élevage est également
réduit de 20 à 30 €, estimation par animal
(moins de diarrhées, moins de travail).
La qualité de la fermentation du lait, notamFigures 2a et 2b.
ment avec l’utilisation de yaourt, est
Evolution du poids vif des veaux recevant 3 L/j de lait pendant toute la
phase lactée et un aliment à base de maïs grain entier (80 %, a) ou de blé
fortement liée à la température ambiante.
aplati (72 %, b)
-PQUJNVNTFTJUVFFOUSFFU¡$"WFDMFT
ferments, la tolérance est plus grande : entre
FU ¡$ /ÏBONPJOT TFMPO MFT SÏHJPOT
l’isolation du local est nécessaire et peut même
nécessiter l’utilisation d’un système de 6ème semaine pour redescendre à 2 litres
avant sevrage.
climatisation.
Ce plan constant a été testé à la station «
viande bovine » des Chambres d’agriculture
La distribution de lait
de Bretagne, à Mauron (56), lors de deux
essais consécutifs chez des veaux de type
reconstitué en plan constant
bovins laitiers mâles. Ces derniers ont été
au DAL
achetés et livrés âgés de 14 jours en moyenne.
L’essai a démarré une semaine plus tard.
L’originalité de ce dernier mode d’alimenta- Dans le premier essai, 74 veaux ont suivi ce
tion consiste à distribuer 3 L d’un aliment plan d’allaitement constant (3 L de buvée/
d’allaitement contenant 600 g de poudre jour). Ils avaient à disposition un aliment
pendant toute la phase lactée. Ceci se fait concentré (composé de 80 % de maïs grain
donc indépendamment de l’âge du veau, entier, 15 % de tourteau de soja 48 et 5 %
alors que, classiquement, la quantité de lait d’AMV), limité à 2 kg/jour, du foin et de l’eau.
distribuée quotidiennement évolue de 3 L la Dans le second essai, 78 veaux ont suivi le
2ème semaine de vie, à 4,5 L de la 4ème à la même plan lacté, mais ils recevaient un aliment
17
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers
Photo 1.
Simplifier pour obtenir
les mêmes résultats
sanitaires et
techniques, en
assurant le même
niveau d’observation
des veaux
concentré composé de 72 % de blé aplati, 23 %
de tourteau de soja et 5 % d’AMV.
Dans les deux essais, les croissances journalières sont comparables entre les lots (Figures
2a et 2b). La consommation d’aliment d’allaitement est réduite de 9 kg par rapport à un
plan d’allaitement classique. La consommation d’aliment concentré est quant à elle
majorée de 9 kg dans le 1er essai et de 12 kg
dans le second.
Cette technique, sans apporter de réel gain
de temps de travail par rapport au plan lacté
classique (aliment d’allaitement en un repas),
permet une réelle simplification dans la
conduite de l’allaitement des veaux.
La mise en place de plans lactés constants en
cours de phase lactée nécessite une grande
rigueur dans les volumes distribués, dans la
BIBLIOGRAPHIE
1 - BRUNSCHWIG P, PLOUZIN D. Simplification de l’allaitement et du
sevrage des veaux d’élevage laitier. Renc. Rech. Ruminants. 2007;14:267.
2 - BRUNSCHWIG P, PLOUZIN D. Simplification de l’allaitement et du
sevrage des veaux d’élevage laitier. Renc. Rech. Ruminants, 2009;16:191.
3 - Inra, Institut de l’Elevage, Chambres d’agriculture de Bretagne et des Pays
de la Loire, Bovins Croissance. Génisse laitière : de la recherche aux pratiques
d’éleveurs. Ed. Chambre d’Agriculture, Laval. 1999:86p.
4 - JEGOU V, PORHIEL, JY, BRUNSCHWIG P, JOUANNE D. Mortalité des veaux d’élevage en Bretagne : facteurs de risque de mortalité dans 80
élevages bretons. Renc. Rech. Ruminants, 2006;13:423-426.
5 - PORHIEL JY, JEGOU V, BERTIN M, PLOUZIN D, BOIS M,
BRUNSCHWIG P. Référentiel : élevage du veau. Chambres d’agricultureContrôle Laitier-Bovins Croissance de Bretagne, Pays de la Loire, Basse Normandie, Institut de l’Elevage. Ed. Chambre d’Agriculture du Finistère,
Quimper. 2005:51p.
6 - PORHIEL JY. Le “lait yoghourt“ un gain de temps et moins de diarrhées.
A la pointe de l’élevage. Ed. Chambre d’Agriculture du Finistère, Quimper.
Avril 2005:4p.
18
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
préparation de l’aliment d’allaitement et la
température de distribution, comme dans les
nombreux autres plans d’allaitement utilisés
en élevage. Cette rigueur est aussi valable
pour l’alimentation solide (concentré appétant, proche de 1 UFL et de 120 g. de PDI ;
bon foin fibreux ou bonne paille) qui, de
plus, doit être facilement accessible.
Conclusions
Les pratiques simplifiées d’allaitement
permettent une réelle réduction de temps
consacré à l’alimentation et/ou de l’astreinte,
rendant plus acceptable ces tâches de soin
souvent individuelles. Elles ont toujours
pour but d’atteindre les performances
souhaitées au cours de cette période et d’obtenir en un temps limité des veaux capables
de valoriser au mieux le fourrage et les
concentrés, plus faciles à gérer et à distribuer
collectivement.
La variété de pratiques présentées ici, sans
doute non exhaustives, permet à beaucoup
d’éleveurs de trouver celle adaptée à leur
situation et à leurs attentes. La distribution
traditionnelle en seau individuel permet de
valoriser du lait entier commercialisable ou
d’excédent, ainsi que le lait non commercialisable de début de lactation. Elle n’en
demeure pas moins la solution la plus logique
lorsque les vêlages ne sont pas groupés.
Pour des lots d’animaux plus importants,
une modification modeste de l’équipement
permet de distribuer du lait collectivement,
en bac à tétines, à partir de lait entier fermenté. Là encore, la simplicité se conjugue avec
le bon état sanitaire des veaux.
Pour les élevages de plus grande taille, le DAL est
aussi un outil de simplification du travail qui
permet de consacrer plus de temps au suivi. Le
plan d’allaitement constant, basé sur le même
principe de consommation des concentrés à
volonté, est une simplification supplémentaire,
au niveau de la programmation.
Toutes ces solutions, qui permettent de
gagner du temps de préparation-distribution-vaisselle, sont toujours accompagnées
du même nombre de visites et du même
niveau d’observation des veaux. Cela permet
de détecter les problèmes de santé et de
soigner les animaux le plus rapidement
possible. En effet, les simplifications de
volume distribué visent à alléger le travail
physique et la charge mentale pour se
concentrer sur d’autres tâches sollicitant la
mémoire et/ou nécessitant une prise de notes.
Il reste ensuite à bien s’organiser entre associés ou intervenants de l’atelier veaux pour
transmettre rapidement et sûrement les
consignes d’une visite à l’autre.
DOSSIER
Encadré 3.
La technique du lait fermenté à Trévarez
Première étape
Le lait non livrable (lait des 7 premiers jours
et lait à cellules) est acheminé de la laiterie
à la nurserie (distante de 40 m) via le taxi à
lait après chaque traite.
Etape 2A : avec des yaourts
Etape 2B avec des
ferments lactiques du
commerce (utilisés pour la
consommation humaine).
Le lait est versé dans une cuve de
fermentation 24 heures avant la
distribution.
Dans le taxi à lait, rajouter
un sachet de ferments après
la traite du matin. Le lait
du soir sera rajouté au lait
fermenté du matin.
Le lait fermenté sera
distribué le jour suivant.
Il n’y a plus de fond de cuve.
Dans cette cuve, il reste un
fond de cuve (lait déjà fermenté
préalablement) au minimum 10 %
du lait distribué au veau.
Conditions de réussite
- Disposer d’une température entre 15
et 18°C dans le local abritant la cuve de
fermentation (local isolé : chaud et froid).
- rajouter des yaourts 1 fois/semaine
dans la cuve.
- si incident (lait caillé) refaire le fond de
cuve
- la durée de fermentation sera réduite
en cas de forte chaleur.
Troisième étape
- 1 repas par jour
- mécaniser la distribution avec une
pompe à lait
Un tuyau muni d’un pistolet et un
chronomètre pour gérer la distribution.
Le lait fermenté est
distribué dans un
bac à tétines.
Des veaux : en bonne
santé.
Une technique qui permet de réduire le temps de travail.
19
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010
ttttL’allaitement simplifié des veaux laitiers
Encadré 4.
La pratique du « colostrum » conservé à la ferme des
Trinottières
Première étape
Le lait des 7 premiers jours de lactation (colostrum inutilisé
et lait non commercialisable de 1ère semaine de traite) est
stocké en continu dans un petit tank réfrigéré . Ce tank, en
bon état de marche, est placé dans la laiterie.
Deuxième étape
La veille, en fin de journée, le volume
de lait nécessaire à la buvée des veaux
est prélevé dans le tank à l’aide à l’aide
d’une pompe à lait portable.
Le lait est versé dans un récipient de grand volume (rouge) lui
même posé dans un autre (noir) qui servira de bain-marie.
Durant la nuit le lait prend progressivement la température
ambiante de la laiterie.
Le lait chaud est transvasé à la
pompe dans le taxi à lait.
Troisième étape
Le matin, de l’eau très chaude
est versée dans le récipient
noir pour réchauffer le lait. En
même temps le réchauffe-lait
est plongé dans le lait pour
atteindre la température de
40°C.
Quatrième étape
La distribution individuelle est
effectuée à l’aide d’un pichet
précisément gradué et à lecture facile.
Il est ensuite
transféré à la
nurserie, distante
de 50 m, pour y être
immédiatement
distribué.
Le respect de la quantité prévue sur le plan, affiché audessus de la case, est une clé de réussite.
Une pratique économique qui simplifie le travail. Les veaux
atteignent les objectifs de croissance et sont en bonne
santé.
20
BULLETIN DES GTV - N°52 FÉVRIER 2010