Rapport n° 4 La gestion du territoire
Transcription
Rapport n° 4 La gestion du territoire
1 Direction de l’environnement Rapport 4 : La gestion du territoire Programme de recherche RAHUI (CNRS-CRIOBE) Pluralisme culturel et normatif à Teahuupoo Juin 2010 Service du Patrimoine et de la Culture de la Polynésie française B.P 380 586 - 98 718 Tamanu Courriel : [email protected] CENTRE DE RECHERCHES INSULAIRES ET OBSERVATOIRE DE L’ENVIRONNEMENT MOOREA - POLYNESIE FRANCAISE USR 3278 CNRS-EPHE SERVICE D’OBSERVATION INSU 2 SOMMAIRE 1 LES ENJEUX DE LA GESTION DU TERRITOIRE ET DES RESSOURCES 3 2 LES DISPOSITIFS ETATIQUES DE GESTION DES TERRITOIRES ET DES RESSOURCES 5 5 2.1 L’APPROCHE ETATIQUE DU TERRITOIRE REPOSE SUR UNE DUALITE. 2.2 LES DIFFERENTS DISPOSITIFS JURIDIQUES POUR LA PROTECTION DES TERRITOIRES ET DE LEUR ENVIRONNEMENT 5 3 PRESENTATION DES SCENARIOS DE GESTION ENVISAGES 11 3.1 LE PGEM ET LE PGA 3.2 LE TERRITOIRE COUTUMIER DU FENUA AIHERE 3.3 LA GESTION DU LAGON PAR LA CORPORATION DES PECHEURS 3.4 UNE GESTION COMMUNAUTAIRE DE L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE 3.5 UNE APPROCHE FONDEE SUR LE RAHUI 11 15 16 17 19 4 DISCUSSION DES SCENARIOS ENVISAGES 22 4.1 LA PROBLEMATIQUE 4.2 LA METHODE 4.3 LES SCENARIOS A L’EPREUVE DU PLURALISME CULTUREL ET JURIDIQUE 22 23 25 5 CONCLUSION 33 6 ANNEXES 35 ANNEXE 1 : LES SITES CLASSES ANNEXE 2 LES CATEGORIES DU CODE DE L’ENVIRONNEMENT ANNEXE 3 LES ZONES DE PECHES REGLEMENTES EN POLYNESIE FRANÇAISE ANNEXE 4 : LA PYRAMIDE DE KELSEN (UNE VARIANTE) APPLIQUEE A LA POLYNESIE FRANÇAISE ANNEXE 5 : TABLEAU DES SCENARIOS ENVISAGES 35 36 37 38 39 7 BIBLIOGRAPHIE 40 3 1 Les enjeux de la gestion du territoire et des ressources Les enjeux liés à la gestion du territoire et des ressources sont multiples : environnementaux, économiques, humains, culturels, politiques et même religieux. Il convient de rappeler que ce travail de recherche a notamment pour objectif d’identifier des scénarios de gestion à Taiarapu, dans un contexte marqué par le fort pluralisme culturel et juridique de ce territoire. C’est donc dans cette perspective qu’il convient d’aborder les enjeux de la gestion du territoire que d’autres nomment « gouvernance », au sens où une gestion d’un espace fait souvent apparaître une multitude d’acteurs et pas seulement un acteur étatique. Il n’y a pas ou plus, à proprement parlé, de dispositif communautaire de gestion du territoire, de ses espaces et de ses ressources aujourd’hui. Les différentes lois qui reconnaissaient certaines institutions précoloniales, ont toutes été abrogées en 1945 en Polynésie française. Il n’y a plus en Polynésie française de règle générale qui détermine le partage de compétence entre ce qui relève du droit commun et ce qui relève du droit coutumier. Du point de vue du pluralisme juridique, on se pose toutefois la question de l’existence et du maintien éventuel de normes locales, de leur organisation dans le champ local, des conditions de leur coexistence avec les normes sociales et juridiques plus larges, nationales et internationales. Ces questions apparaissent en filigrane à la fois dans la présentation des dispositifs étatique de gestion des espaces et de l’environnement en Polynésie, qu’au travers des scénarios de gestion rencontrés et discutés avec différents acteurs au cours des cinq missions qui ont été réalisés à Teahupoo entre octobre 2008 et décembre 2009. Dans une première partie (chapitre 2), nous détaillons l’ensemble des dispositifs étatiques qui concourent à la gestion des territoires et des ressources, en détaillant ceux qui s’appliquent au cas d’étude. Dans une seconde partie (chapitre 3), nous présentons les différents scénarios de gestion qui ont fait l’objet de nos enquêtes et ont donné lieu à des réunions publiques ou à des entretiens individuels. Enfin, nous discuterons de la pertinence de ces scénarios, notamment à l’égard du pluralisme culturel et normatif rencontré à la presqu’île (chapitre 4). 4 Figure 1 Carte Taiarapu avec en mauve les 2 communes associées objet des enquêtes. 5 2 Les dispositifs étatiques de gestion des territoires et des ressources 2.1 L’approche étatique du territoire repose sur une dualité. - Sur la terre, un régime de propriété privée, d’inspiration libérale et capitaliste, s’est progressivement mis en place en Polynésie française, depuis le XIXème siècle. A Teahupoo en particulier, les revendications de propriétés ont été réalisées en 18901891, sous l’empire du décret du 24 août 1887. Le régime de domanialité publique que nous voyons ci-après, peut également s’appliquer à l’espace terrestre. - Sur l’espace lagonaire, un régime de domanialité publique s’est imposé. Les eaux territoriales et les eaux intérieures font donc l’objet d’une propriété publique : soit pour assurer la liberté d’accès et de circulation, soit pour y réaliser des infrastructures. En principe, les lagons, les rivages, les rades, les baies, les embouchures de rivière, le sol et le sous-sol des eaux territoriales, font l’objet d’une protection juridique contre une appropriation foncière des particuliers. Cela ne veut pas dire qu’il soit interdit d’en faire un usage, mais celui-ci est « non appropriatif ». Il est à noter qu’en Polynésie française, la dualité mentionnée (privé/public) ne recoupe pas une opposition terre (privé)-mer (public). D’abord parce que les terres peuvent être le support d’un domaine public ; ensuite, parce que de nombreuses portions de lagon, récifs, pentes externes ou passes, ont é té revendiquées en Polynésie française sous l’égide de la loi sur les revendications foncières de 1852, édictée par l’assemblée législative tahitienne. Si nous passons à l’échelle en dessous, celle des différents droits qui précisent l’organisation du territoire dans le cadre de la gestion de l’environnement et des ressources, trois principaux dispositifs juridiques étatiques concourent à la gestion des territoires et de leur environnement1. Ces dispositifs sont du ressort du droit des pêches, du droit de l’aménagement et du droit de l’environnement. 2.2 Les différents dispositifs juridiques pour la protection des territoires et de leur environnement 2.2.1 Le droit de la pêche 1 Un travail d’analyse de ces dispositifs a été réalisé dans le cadre du programme de recherche GAUIS (ANR), notamment par François Féral, Bertrand Cazalet. 6 La délibération n° 88-183/AT du 8 décembre 1988 constitue l’acte fondateur portant réglementation de la pêche en Polynésie. Ce texte ne s’intéresse qu’à l’espace lagonaire. La délibération définit les différents types de pêche autorisés (pêche au filet, sous-marine et en eau douce), les conditions de leur exercice, ainsi que les méthodes et matériaux prohibées (explosifs, gaz, poissons, paralysants, électricité…). La pêche au filet est interdite avec un maillage inférieur à 40 mm, pour une longueur cumulée des filets de 50 m maximum (sauf cas autorisés pour la pêche au Ature et pour certaines captures d’alevins). Le temps « de pose des filets ne doit pas excéder 24h, séparé par intervalles de 24h ». En outre, certaines espèces animales font l’objet de réglementations distinctes quant à leurs conditions de pêche, de transport, de détention, de commercialisation et de consommation. La délibération n° 88-184 AT du 8 décembre 1988 donne la liste des espèces marines dont la taille minimale est déterminée : burgaus et trocas (interdiction générale et absolu pour ces deux animaux, sauf dérogation expresse prévue à l’article 13), bénitiers « pahua » (12 cm), langoustes « oura miti » (18 cm), crabes « upai » (12 cm), squilles « varo » (18 cm), cigales de mer « tianee » (14 cm). Pour ces 4 dernières espèces, les femelles ovigères jouissent également d’une protection intégrale. Des restrictions saisonnières complètent ce dispositif. Enfin, la création de zone de pêche règlementée (ZPR) est prévue par arrêté. A l’intérieur de cette zone, des règles peuvent restreindre l’utilisation de certaines techniques, ou la prise de certaines espèces qui sont nominativement listées. A l’heure actuelle, il existe 4 ZPR en Polynésie, toutes à Tahiti dans les communes de Faaa, Pirae, Arue, Mahina (cf annexe 3) 2.2.2 Le droit de l’aménagement Le PGA comme le PGEM sont des outils à la fois juridique et cartographique composés de deux parties : les règlements et les documents graphiques. Le PGA et le PGEM sont inscrits au code de l’aménagement. Règlement et zonage du PGA (Code de l’aménagement) La détermination du zonage est au cœur du PGA. Les articles A111-3 et suivants du Code de l’aménagement donne deux grandes familles de zones : - Les « zones U » que l’on peut qualifier d’urbanisables qui sont ou peuvent être équipées et «permettent d’admettre immédiatement des constructions ». - Les « zones N » ou naturelles, destinées à la protection et « dont la conservation ou l’isolement est nécessaire». Ces deux grandes familles se déclinent à leur tour en une multitude de sous-groupes censés affiner les statuts et l’utilisation des « sous-zones » : - Zone urbaine UA de forte densité (centre ville, immeubles à étages) et UB (habitations individuelles ou collectives « bord de ville », zones d’activité en retrait de l’alignement) - Zone résidentielle UC pour l’habitat pavillonnaire - Zone rurale UD avec habitat diffus très dispersé - Secteur d’équipement UE 7 - Zone d’activité secondaire US (industrie, artisanat, entrepôts…) - Zone touristique protégée UT réservée exclusivement aux hôtels, clubs et autres centres de loisirs, avec tolérance des activités agricoles à titre provisoire mais sans infrastructure ni construction - Zone future d’urbanisation NA ou d’activités secondaires ou industrielles NAS, il s’agit des zones naturelles « à urbaniser » - Zone naturelle ordinaire NB (faiblement urbanisées, à maintenir) - Zone agricole protégée NA, principe de non urbanisation (sauf bâtiments et équipements liés) - Zone d’exploitation forestière NCF idem - Zone de cocoteraie NCC idem - Zone de gisement de matériaux NCM idem - Zone de protection de captage d’eau NCE idem - Zone de site protégé ND, principe de non urbanisation avec dérogations (réglementation très restrictive), articles D122-1 & s. du Code de l’aménagement - Zone de massifs forestiers NDF idem - Zone de risques ou de nuisance NR tels qu’inondations, glissements de terrains, houles, pas d’urbanisation LE PGEM (Cazalet, 2008) « Le PGEM relève du Code de l’aménagement, alors que la règlementation relative aux aires protégées est inscrite dans le Code de l’environnement…surprenant mais pas aberrant. Ainsi, le principe de l’indépendance des législations interdit de considérer a priori les PGEM comme étant des AMP. Pour autant, nous pouvons tenter de rechercher des « ponts » entre ces deux législations, indispensables pour entériner un tel postulat. Les PGEM sont explicités dans le chapitre III du Code de l’aménagement (art. D133-1 à D133-10), Gestion des espaces lagonaires et en façade maritime. Le texte confirme qu’un PGEM ne remplace pas « les règlementations spécialisées en vigueur », mais il les complète, notamment pour les « mesures de protection du milieu marin » et de « maintien des équilibres biologiques », tout en déterminant « la vocation des différentes zones » (aquaculture, ports, loisir, tourisme…) et les « conditions de compatibilité entre les différents usages de l’espace maritime et littoral ». Le développement du secteur fait aussi partie de ses attributions, avec le recensement des « projets d’équipement ou d’aménagement liées à la mer ou au lagon ». L’art. D133-10 rappelle au passage que les « infractions aux dispositions d’un PGEM sont des contraventions de grande voierie ». La création d’AMP n’est pas explicite dans ce chapitre, elle se déduit implicitement du zonage. » 2.2.3 Le droit de l’environnement Le code de l’environnement envisage : o le classement des espaces (art D 111.1 à D 112.2) o le classement des espèces o Prévention des pollutions, des risques et des nuisances; o Les installations classées 8 Les 6 types d’espaces dans le code de l’environnement (article D 111-2) Les espaces naturels protégés sont classés dans les six catégories suivantes selon leurs objectifs de gestion : I – Réserve naturelle intégrale/zone de nature sauvage : la réserve naturelle intégrale est un espace protégé géré principalement à des fins scientifiques et la zone de nature sauvage est un espace protégé géré principalement à des fins de protection des ressources sauvages. II – Parc territorial : espace protégé géré principalement dans le but de protéger les écosystèmes et à des fins récréatives. III – Monument naturel : espace protégé géré principalement dans le but de préserver des éléments naturels particuliers. IV – Aire de gestion des habitats ou des espèces : espace protégé géré principalement à des fins de conservation des habitats et des espèces, avec intervention dirigée au niveau de la gestion. V – Paysage protégé : espace protégé géré principalement dans le but d’assurer la conservation de paysage et /ou à des fins récréatives. VI – Aire protégée de ressources naturelles gérées : espace protégé géré principalement à des fins d’utilisation durable des écosystèmes naturels. En ce qui concerne ces espaces, le code de l’environnement ne dit rien sur le fait qu’il s’agisse ou non d’un espace terrestre ou marin. Les exemples de classement par ailleurs inventoriés laissent penser qu’il peut s’agir de l’un ou l’autre ou des deux à la fois (cf. annexe 1). En outre, si l’article D 111-2 énumère les types de classements avec leurs objectifs, l’article D 111-4 indique simplement que l’acte de classement peut soumettre l’espace à un « régime particulier », ce qui a priori, trace la voie à la mise en œuvre d’un régime de gestion selon le type de classement. Cazalet, 2008 Mentionnons le fait qu’il n’y a pas de statuts juridiques précis et détaillés qui pourraient s’appliquer concrètement sur un territoire donné. Ceci afin de distinguer par exemple une aire protégée terrestre d’une aire marine protégée, ou pour permettre aux spécificités de notre droit romano-germanique (gestion basée d’abord sur des modes d’administration et de répartition des compétences) d’intégrer des catégories d’essence anglo-saxonne (common law basée avant tout sur l’approche pragmatique et finaliste d’une gestion efficace)… Tout en restant laconique, l’article D111-4 du Code de l’environnement apporte quelques éléments de réponse : « l’acte de classement peut soumettre à un régime particulier, et le cas échéant, interdit à l’intérieur de l’espace naturel protégé (…) la chasse et la pêche, la cueillette et la collecte…l’extraction de matériaux…la circulation du public, quel que soit le moyen employé ». 2.2.4 Etat des lieux à Teahupoo et à Tautira Il n’existe aucune ZPR sur ces deux communes associées. Un projet de PGA est en cours d’élaboration dans la commune de Taiarapu ouest, qui comprend la commune associée de Teahupoo, mais pas celle de Tautira qui dépend de la commune de Taiarapu est. 9 Il existe 2 monuments classés à Teahupoo et à Tautira en catégorie III : la grotte de Vaipoiri et la cascade de Vaihi, sans mode de gestion associé. Enfin, il existe également une zone dite du « Pari » classée depuis 1952. On ne sait pas dans quelle catégorie de classement entre ce site, selon la nomenclature de la Direction de l’environnement. Il n’y a pas de dispositif de gestion de la zone classée. Cet état des lieux en ce qui concerne les sites classés est pour l’instant marqué par sa relative pauvreté. Peu de dispositifs de gestion des territoires et des ressources ne sont en vigueur dans les deux communes associés dans lesquelles nous travaillons. 10 Grotte Vaipoiri Monument naturel Ile : Tahiti Commune : Taiarapu Ouest (Teahupoo) Superficie : ND Arrêtés : 865 APA du 23 juin 1952 1225 PR du 14 août 2000 Catégorie : III Grotte Vaipoiri Cette grotte se situe sur l’île de Tahiti, au niveau de la commune associée de Teahupoo, commune de Taiarapu Ouest. On y accède en remontant la rivière Vaipoiri, qui se situe face à la passe de Vaiau. Un sentier avec des marques a été crée il y a quelques années. Il a été entretenu par la mairie de la commune pendant plusieurs années mais ce n’est malheureusement plus le cas aujourd’hui. La grotte est profonde. On y trouve un lac souterrain.Les parois de la grotte ont été taguées, nécessitant une opération de nettoyage. C’est un lieu de légende et on raconte que : « Pour faire pénétrer la lumière, il suffit, dit-on, de battre le sol avec des faniu (tiges de cocotier) en criant très fort. C’est dans la grotte Vaipoiri, que Vei conquit l'amour de Vero, la fille du chef de Taiarapu, d’après la légende racontée par le vieux Haurai de Teahupoo. De grands reptiles vivaient dans la grotte que personne n'osait approcher (inconnus à Tahiti, ces animaux sont une réminiscence du Sud-est Asiatique, originel des maohi). Vei, enfant du peuple, dont le nom signifie "bien fait, hardi", était un teuteu, serviteur-garde du corps de Petea, le chef de Taiarapu. Il concevait un amour profond mais impossible, sacrilège bien que réciproque, pour Vero, la fille de Petea. Pour faire tomber la barrière du rang, Vei décide de faire une action glorieuse qui lui permettra d'accéder à la classe supérieure. Il réussit, par ruse, en utilisant les blocs qui jonchent l'entrée de la grotte, à tuer les monstrueux reptiles et une énorme chenille. Il aménage un lit nuptial sur le rocher émergé au milieu du lac, - rocher qui existe encore, et y invite Vero. Petea, inquiet, part à la recherche de sa fille, découvre les cadavres des monstres, et conquis par le courage et la force de Vei, accepte l'union. » (Source : www.tahitiheritage.pf) Cette grotte ne fait l’objet d’aucune mesure de gestion à l’heure actuelle. (photo: ) Cascade du Vahi Monument naturel Ile : Tahiti Commune : Taiarapu Est (Tautira) Superficie : ND Arrêtés : 865 APA du 23 juin 1952 1225 PR du 14 août 2000 Catégorie : III Direction de l'environnement Cascade du Vahi Cette cascade se situe sur l’île de Tahiti, au niveau de la commune associée de Tautira, commune de Taiarapu Est. Cette cascade ne fait l’objet d’aucune mesure de gestion à l’heure actuelle. (photo: ) Direction de l'environnement (http://www.environnement.pf/IMG/html/Carte_sites_classes_de_Polynesie.html) consulté le 2/06/2010 Le Pari (http://www.environnement.pf/spip.php?rubrique68, consulté le 2/06/2010) Ce site protégé est situé sur l’île de Tahiti. Il est à cheval sur les communes de Taiarapu Est et Ouest, au niveau des communes associées de Tautira et Teahupoo. Il n’est accessible que par voie maritime ou bien pédestre. Il est fréquenté par des randonneurs et des chasseurs. Il a été classé par l’arrêté n° 391 AA du 15 février 1964. Ce site avait été délimité par l’arrêté n°57 AA du 8 janvier 1962 qui a prononcé son inscription sur la liste des sites à 11 conserver et à protéger mais les limites ont été modifiées par l’arrêté de classement : Au nord le cap situé à l’est de la côte 294 (mont Vavahi). Ce cap termine au sud la plaine côtière occupée par différentes exploitations agricoles. Il se trouve juste au Nord des pierres de Vaiote ; Au sud par la marque sur le rocher côtier dite « Te aero a te moo », en face de la passe de Tutataroa. Il existe une volonté locale de préserver ce site encore sauvage qui présente un paysage magnifique avec des falaises tombant à pic dans l’océan. On trouve également au Pari un patrimoine archéologique (pétroglyphes et marae) et culturel (nombreux lieux légendaires). Ce site a été aménagé en partie pour les randonneurs. 3 Présentation des scénarios de gestion envisagés Lors d’entretiens individuels, de réunions de groupes, à l’initiative de la mairie ou de l’équipe de recherche, plusieurs scénarios de gestion ont été proposés/avancés. Certains de ces scénarios ont fait l’objet de réunions de travail, d’autres ont simplement été évoqués. Plusieurs scénarios de gestion qui tiennent compte du pluralisme culturel en vigueur à Teahupoo ont également été évoqués. 3.1 Le PGEM et le PGA Une convention n° 3.0088 relative à la réalisation d’un état des lieux environnemental dans le cadre de la réalisation d’un Plan de Gestion de l’Espace Maritime (P.G.E.M.) de la commune de Taiarapu-Ouest a été passé entre le Ministère de la Pêche, de l’Industrie et des Petites et Moyennes entreprises, via le service de la Pêche, et la S.N.C. Pae Tai - Pae Uta le 2 décembre 2003. Par ailleurs, le P.G.A. de la commune de Taiarapu Ouest a été lancé suite à la délibération n°64/2004 du 26 novembre 2004 du conseil municipal de Taiarapu Ouest. Cette décision a été arrêtée en conseil des ministres et a fait l’objet de l’arrêté n°204/CM du 6 mai 2005. En août 2004, l’étude de faisabilité pour la réalisation d’un PGEM à Taiarapu ouest était réalisée. En février 2005, le service de l’urbanisme commandait au même prestataire (SNC Pae Tai Pae Uta, PTPU) la réalisation d’un diagnostic environnemental dans le cadre de l’élaboration du P.G.A. de la commune de Taiarapu ouest. 12 Procédure d’élaboration du PGA 1. LANCEMENT DU PGA -Délibération municipale -Composition de la commission locale d’aménagement -Arrêté en conseil des ministres 2. DIAGNOSTIC - Constat socio-économique - État initial de l’environnem ent 6 mois Exposition publique Commission locale d’aménagement Réunions thématiques 3. ORIENTATIONS D’AMÉNAGEMENT ET DE DEVELOPPEMENT - 12 mois Développement économique Patrimoine culturel et naturel Cadre de vie, aménagem ents Équipements, transports…etc. Phase d’élaboration 2 ans Ateliers itinérants Exposition publique 4. ÉLABORATION DU ZONAGE ET DU REGLEMENT 5. APPROBATION DU PROJET DE PGA - Commission locale d’aménagement - Conseil municipal - Comité d’aménagement 6 mois 4 mois 6. ENQUETE PUBLIQUE Enquête publique - Arrêté de lancement - Publicité, enquête, rapport - Finalisation du PGA 4 mois 7. APPROBATION FINALE - Conseil municipal - Arrêté en conseil des ministres Phase d’approbation 11 mois Commission locale d’aménagement 3 mois Service de l’urbanisme 2004 Depuis cette époque, il semble que le PGEM de Taiarapu ouest ait été abandonné pour des raisons que nous ne connaissons pas. Quant au PGA, après un certain flottement, il semble avancer et en serait à la phase de pré-approbation (cf. schéma ci-dessus). Lors de nos enquêtes, les populations et en particulier les pêcheurs, ont effectivement indiqué leur réticence concernant les projets de PGEM à Teahupoo, indiquant qu’un tel outil les dépossèderait de leur territoire de pêche et de l’autonomie d’appréciation dont ils disposent pour choisir leurs lieux de pêche. En ce qui concerne le PGA, une relative indifférence apparaît un peu comme si cela était l’affaire des fonctionnaires de Papeete et de la mairie. En revanche, indépendamment des outils étatiques utilisés, nombreux sont ceux qui ont insisté sur le fait qu’un dispositif de gestion des ressources et du territoire, qu’il soit 13 d’origine locale ou étatique, devait prendre en compte les interactions incessantes entre le terrestre et le marin, et tenir compte, sur le plan culturel, des continuités terre-mer. Ainsi, dans le contexte contemporain, et dans des termes imagés, Adrien dénonce les méfaits des populations sur l’environnement lorsque cette continuité terre-mer est ignorée : Te tumu rahi te haere raa mai teie mau taata e o hia te tahora. Tera hinu no te pereoo, a tahe pai e mau ona i te hiti. Aita ato’a hoa, ho’e ahuru mai te taata. Mai te peu e mea rahi te manu patia aita tatou e haere io e faaea ai, hoe a huru tera. Comme pour être sûr que nous avons bien compris, il prend un exemple analogue relatif aux méfaits des barrages dans les vallées convoitées de Teahupoo : Te feia na ratou e tuatapapa ra, aita ratou e taua ra. Parauparau raa matou no te rira mea. Te vai ra te pape io nei, faatano ra tatou te patu raa. Eiaha paa e haapapu tatou. Tae te mahana pape rahi ai e tairi ihoa ona, e vavahi ona. E mea tia ia tarani e e haaputu te pape. Les mêmes méfaits sont ensuite décrits hors de Teahupoo. Lui et sa sœur, Véronique, expliquent : A :Teie nei Papeete ma, Titioro ma, taoa rahi te faaamuraa puaa i uta. V : E tei uta roa to’a te taata, faaa ma. A : I uta i Punaruu, te vai ra mau hinu paapaa, ia haere anae tatou i tai, te vai ra te remu i nia iho te mau ofai. Aita te animara e ora faahou i roto. Compte tenu de ce qui vient d’être indiqué, les Polynésiens se méfient des « progrès » apportés par les fonctionnaires de Papeete, affiche une attitude d’indifférence lorsqu’on leur parle de PGA et de PGEM et insistent sur des principes simples qui ont guidé leur existence jusqu’à présent. 14 Figure 2 Le territoire de Teahupoo : terre et mer 15 3.2 Le territoire coutumier du fenua aihere Un autre scénario de gestion du territoire de Teahupoo a été avancé par une composante de la population de Teahupoo. Le 21 octobre 2008, Annick Paofai, présidente de l’association « Défense du Fenua aihere » nous recevait chez elle à la pension Bonjouïr, sis sur la terre Atitupoa, qui borde la vallée Atihiva au fenua aihere. Elle retrace l’historique de l’association et mentionne quelques membres célèbre de cette association : Daniel Palazc (qui vient d’acquérir un terrain), Cl Dauphin, C. Buillard (représentante à l’APF), et quelques anciens du lieu comme Roselyne, Manea Taupua, Viri Rochette, et Papi Taupua. Elle indique qu’une loi de pays est en préparation pour faire du fenua aihere une zone de gestion coutumière. Le projet a trait avec la mise en place d’un conseil des sages (nommé Toohitu) qui serait chargé de gérer une zone coutumière qui comprend le lagon du fenua aihere. Pour justifier ce projet, deux principaux arguments sont présentés : - Un argument relatif à la légitimité historique de ce lieu. C’est au fenua aihere que se trouve la tête du poisson. C’est donc un haut lieu de la culture polynésienne puisqu’il est l’élément de tête, la queue du poisson se trouvant à Punaauia, à la pointe Tataa. - Un argument a trait avec les enjeux de la modernité. Il y aurait trois nouvelles pensions de famille en projet, en plus de celles qui existent déjà : Bonjouïr, Te Pari Village et ??. En outre, dans l’imaginaire urbain, Teahupoo est le dernier lieu de zone sauvage à Tahiti, en bord de mer. La route n’existe pas. L’essentiel des déplacements se fait en bateau. Le m² en bord de mer se négocierait aujourd’hui aux alentours de 10 000 CFP, ce qui fait du fenua aihere, côté Teahupoo, un des lieux les plus prisés pour ceux qui veulent acquérir une résidence secondaire. Le projet couvre des domaines relativement larges : - La mise en place d’un système d’échanges et de partages. Bien que nos interlocuteurs n’étaient pas explicites sur ce point, on peut supposer qu’il s’agit des relations de solidarité et de bon voisinage qui ont cours aujourd’hui à Teahupoo ; - La mise en œuvre d’un système de surveillance du lagon. Sur ce point également, les interlocuteurs ne sont pas explicites. Au cours des échanges que nous avons eu, Annick le dos face à la montagne, regardait souvent vers le large regardant les bateaux qui passaient, se renseignant sur le propriétaire de tel ou tel bateau lorsqu’elle ne le reconnaissait pas. Au travers des exemples fournis et de son propre comportement, le système de surveillance a sans doute trait au fait que les riverains 16 - du fenua aihere seraient les plus à même d’assurer une surveillance continue et efficace des mouvements sur le lagon. Un véritable projet de société. Là également, la situation n’est pas très explicite et paraît même ambigüe. En effet, figer la situation des résidences au fenua aihere, reviendrait en quelque sorte à assurer une situation de rente à ceux qui y sont déjà installés, excluant les autres, et notamment les personnes du village qui ont pourtant des droits fonciers au fenua aihere et au Pari. 3.3 La gestion du lagon par la corporation des pêcheurs Une autre piste évoquée avec les acteurs à Teahupoo a trait avec le fait que le lagon de Teahupoo puisse être géré par une corporation, celle des pêcheurs de la commune. A l’occasion de la première réunion qui a eu lieu le 7 octobre 2008, Gérard Parker, conseiller municipal à la mairie, habitant au fenua aihere retrace l’historique du projet. Il y avait depuis 1998 la volonté de monter un comité de surveillance du lagon pour répondre plusieurs problèmes d’usage du lagon : - Les invasions de taramea ; La régulation de la pêche au troca ; Réguler les conflits entre pêcheurs/riverains de Teahupoo et les pêcheurs extérieurs. Selon les chiffres approximatifs fournis lors de la réunion, environ 30% des pêcheurs présents sur le lagon de Teahupoo viennent de l’extérieur. Un autre objectif est celui de réguler les activités sur le lagon de Teahupoo à savoir : - Le possible élevage de poisson en cage - Les activités liées au tourisme (pêche, surf, plongée) Dans le cadre de ce scénario de gestion, plusieurs outils ont été évoqués : - La possibilité de mettre en place une ZPR. Cette possibilité a soulevé plusieurs questions : les pêcheurs de Teahupoo pourront-ils gérer cette zone à leur convenance ? A quelles conditions ? La délibération relative à la ZPR ne prévoit en effet pas de comité de gestion par une corporation de pêcheur, mais un suivi via le service de la pêche. - La possibilité pour un groupe considéré comme légitime et représentatif de devenir affectataire du domaine public (le lagon de Teahupoo). Dans cette hypothèse proposée par notre collègue François Féral, cela impliquerait la rédaction d’un cahier des charges, la reconnaissance d’une communauté générale ou particulière issue de la commune associée de Teahupoo. Une variante de cette proposition serait de confier la délégation de gestion du domaine public concerné à la commune associée de Teahupoo. 17 3.4 Une gestion communautaire de l’ensemble du territoire Les rapports 1, 2 et 3 ont largement montré l’importance : - Des continuités terre-mer tant en terme d’appropriation du territoire par les hommes. Les toponymies s’étendent des sommets des montagnes jusqu’aux pentes externes des récifs. Certains lieux sur terre comme sur mer, sont tapu (interdit et sacré), d’autres, peu nombreux, sont propices à certaines pêches, et font l’objet d’une appropriation quasi territoriale. Des pierres à poissons sont dirigés vers ces lieux pour, selon les cas, attirer ou repousser les poissons. - Les savoirs traditionnels sont eux-mêmes liés à la connaissance intime de ces territoires terrestre et marin et sont le monopole d’experts (tahu’a) différent selon leur champ de connaissance (ethnomédecine, pêche, expert de la parole et de l’histoire, etc.). Dans cette hypothèse, les territoires marins et terrestres sont bien appropriés par la communauté des habitants de Teahupoo et c’est l’ensemble du territoire qui fait alors l’objet de discussions quant aux stratégies à développer pour protéger l’environnement de Teahupoo. C’est dans cette perspective qu’à la suite de plusieurs réunions à la mairie, un groupe a été constitué, avec pour mission de préparer la création d’un comité local de gestion de l’environnement, des ressources et du territoire de Teahupoo. Lors des premières réunions, ce groupe était constitué des personnes suivantes : Personne Gérard Parker Baby Maoni Rosine Hoti Joël Paofai Didier Parker Annick Paofai Teva René Rochette Koti Ma’ureva Champ Municipalité Pêche Pêche Agriculture Pêche Pêche haute mer et lagonaire Tourisme, pension de famille Culture, histoire Tourisme, pension de famille Localisation Fenua aihere Village Fenua aihere Fenua aihere Village Fenua aihere Village Village Ce groupe restreint s’est réuni plusieurs fois. La question de la constitution du comité de gestion (preneur de décision) a été soulevée. Serait-il souverain en ce qui concerne les règles de gestion des espaces et des ressources ? 18 Lors de la réunion, il a été envisagé que deux principes devaient s’appliquer au futur comité : représentativité et légitimité. Des exemples de cas de Nouvelle Calédonie ont été présentés par notre collègue Jean-Brice Herrenschmidt. Réunion de travail sur le comité de pilotage Gérard Parker pendant la réunion Annick Paofai, Roselyne et Teva Rochette pendant une réunion Des débats ont eu lieu quant à la possibilité pour l’administration de la Polynésie française de reconnaitre et d’accepter une telle approche fondée sur une large délégation de pouvoir, notamment en ce qui concerne le domaine public et la gestion du lagon de Teahupoo. A l’issu des échanges, il a été convenu que l’administration n’accepterait pas un tel comité si les gens qui le composent ne sont pas légitimes et représentatifs. Il a été demandé des idées de personnes qui pourraient être incluses dans le comité de gestion. Dans cette perspective, la liste de personnes suivantes a été proposée : Un représentant de la mairie ; Un représentant de la coopérative de pêche Hava’e (Président Manix) Un représentant de l’association des pêcheurs lagonaires Te Ava Iti (président Lesta Parker) Un représentant de l’association des pêcheurs lagonaires Hotopu (Teva) Un représentant de l’association de défense du Fenua aihere (Présidente Annick Paofai) 19 Un représentant du Teahupoo surf Club (Josh Humbert président) Un représentant de l’association sportive des piroguiers Un représentant de l’association de défense de l’environnement Des personnes qui ont des savoirs sur la pêche : Baby, Orsmond, Lucien, Tamu, Viri Un représentant de chaque confession religieuse Un représentant de l’école de Teahupoo Timeri Hopuu (SPC) Un représentant de l’association de Valentin (guide de randonnée) Patrick Rochette (culture) Il a ensuite été abordé la question des activités néfastes sur l’environnement qui sont pratiquées à Teahupoo : Elevage de cochon d’Hubert Ferme Aquapac 3.5 Une approche fondée sur le rahui Beaucoup plus à l’occasion d’entretiens individuels que de réunions publiques, une gestion se fondant sur les principes du rahui ancestral, a été évoqué par plusieurs interlocuteurs. Nous explicitons la notion de rahui plus bas. Retenons à ce stage qu’il s’agit d’un dispositif de gestion coutumier des espaces et des ressources qui peuvent être temporairement mis en jachères pendant un temps donné et sur ces ressources plus ou moins spécifiques. Ainsi, Papa Mote, saisit clairement la dimension politique d’un dispositif de gestion de l’environnement. Il l’exprime sans ambages : Mai te mea, o vau te arii i onei, na’u e tatara te maa e reira e horoa hia ai ta oe. Na te arii e opere te maa ; na te arii atoa e tatara te maa noatu na oe e tanu i te maa. (….) Parau tera no te rahui. E io nei Teahupoo nei, te vai ra hoa paha. Mai te mea ua rahui hia hoe tuhaa eaha ia e hauti. Haere atu ia i te tahi tuhaa. Te maoro ? E ono avae i Raiatea e oti e reira e vaiho te tahi. Mea tatuhaa. I Bora Bora atoa. Pauroa te maa i roto i te miti e te fenua mea rahui. Discutant de la situation préoccupante des pêcheurs aujourd’hui, Manarii Teuira met en avant le rahui comme une gestion appropriée d’un espace et des ressources. A ce sujet, s’inscrivant dans une démarche dynamique et politique, analogue à la période préeuropéenne, il explique : 20 Teie mahana e fifi rahi tau e ite ra i roto i te parau no te mau taata taia. Mea varavara roa te ia mea e tera mau tau. Ua opua aena vau no te faaetaeta pai te mau taata taia. Te vai e taia ra te ia neinei, te pae anei no te pahua. Opani noa atu i te opani, teie nei aita pai e taata no te opani ? Eaha te hoe ravea no te faaetaeta ? Te imi ra matou te mau ravea no te faaetaeta raa. Mai ia Tautira mai, e rahui ratou ia ratou, e haere mai ratou io nei e taia ai. (…) Matou, aita ra matou e haere e taia i rapae, te rahi raa no rapae teie e haere mai nei e taia En même temps, Teuira Manarii réduit le champ du rahui, puisqu’il en parle uniquement dans le contexte de la pêche et plus seulement des territoires terrestres et marins. Papa Tamu pendant les enquêtes En ce qui concerne les communes d’aujourd’hui de Teahupoo et de Tautira, nous disposons de témoignages historiques sur l’existence du rahui dans cette localité. Bambridge T., Journal of Polynesian Society, 2010 (extract2010, under press) The notion of rahui cannot be dissociated from Polynesian society structures which existed before the contact with Europeans and it can neither be distingued from the nature of political power which is in fact a way to perform societal sacredness. Rahui, is deeply linked to another concept such as tapu. After describing how Tavi, the chief of Tautira, had vanquished Papara (but not seized it) in a dispute over his wife, Adams (1920:27-30) related that: 21 “(…) Tavi became by his triumph the most powerful chief in all Tahiti, and asserted his power by imposing a rahui, for the benefit of his young son, Tavihauroa. A rahui was a great exercise of authority, and was more that royal in its claims. The rahui which may last a year or more, was a sweeping order that everything produced during that time in the whole territory subject to the influence of the chief should be tabu or sacred to the young prince. Not a pig should be killed; not a tapa cloth or fine mat should be made; not a cock should crow, except for the child; and at the end of the rahui, all was to belong to the infant”. As William Ellis (1829:330) had put it in another context: “… These shells were blown when any procession marched to the temple, at the inauguration of the king, during the worship at the temple, or when a tabu, or restriction (rahui…), was imposed in the name of the gods. …” By the time Tahitian societies entered into contact with Europeans, these principles were profoundly altered in many ways. As far as eastern Polynesian societies are concerned, there are enough indications in the literature to show that one of the primary functions of chiefs at minor or major lineage level was the supervision of the rights of land users, the organization of communal projects and the ceremonial re-distributions of produce. According to D Oliver (1974:632): « (…) among the most important of the secular functions of a congregation’s chief was that of rahui. Rahui (…) where it was shown to be the term applied to the placing of restrictions on fishing activities. Actually, rahui was the general term applied to the placing of restrictions of several kinds: upon productive activities in general or, in term of specific products, upon consumption of specified foods, upon construction works, upon engaging in diversions, and so forth.” One of the chief’s most important sanctions was an interdiction (rahui) on food-gathering and harvesting for fixed periods on a district-wide or lesser scale, as a mean of conservation in time of shortage, or as a preliminary to ceremonies at the lineage marae. Cette évocation historique est intéressante parce qu’elle rappelle que le rahui n’avait pas prioritairement pour objectif de gérer des ressources ou un espace. Le rahui est aussi une notion politique qui s’inscrit dans la hiérarchisation sociale de l’époque. ***** Les différents dispositifs de gestions des espaces et de ressources envisagés relèvent de registres différents : normes locales d’un côté, normes étatiques de l’autre. Il était particulièrement important de les envisager à partir des catégories des acteurs. Il convient maintenant de discuter chacun des scénarios rencontrés au cours de nos enquêtes en tenant compte du pluralisme culturel et juridique en vigueur à Teahupoo. 22 4 Discussion des scénarios envisagés 4.1 La problématique Il convient de rappeler que l’objectif de ce programme de recherche mené par le CRIOBE en collaboration avec le SPC et le programme GERSA du CRISP, est d’identifier les phénomènes de pluralisme culturel et juridique et de discuter des scénarios de gestion susceptibles de prendre en compte les réalités à la fois du point de vue étatique et dans les catégories des acteurs. Notre perspective s'écarte donc d'une approche qui accorderait à l'Etat le monopole de la production normative et juridique. Approche que résume le Professeur N. Rouland (1999), pp. 5-6, à propos de la position doctrinale française quant à la hiérarchisation des normes dans le cadre étatique: "(…) aujourd'hui, la plupart des publicistes français se reconnaissent en une doctrine (…), celle de Kelsen. Ce juriste autrichien entendait fonder une théorie "pure" du droit. Sans nier les réalités sociologiques, il les considérait comme non pertinentes dans l'explication des phénomènes juridiques. Par ailleurs, sa conception de l'assemblage des règles de droit était strictement hiérarchique. Par un effet de cascade, elles dérivent pour lui de la norme supérieure qu'est la Constitution. Une norme inférieure ne peut contredire une norme supérieure: elle doit s'incliner ou disparaître. (…) Cette conception (…) conduit à attribuer à l'Etat le quasi-monopole de la production des normes juridiques, rendant très difficiles, sinon impossibles, les manifestations d'autonomie juridique des groupes, dont l'existence factuelle n'est par ailleurs pas niée. Cela ne signifie pas qu'une même situation ne peut pas recevoir des solutions juridiques différentes selon le choix des acteurs (…) mais la possibilité d'un choix dépend de la décision d'une instance supérieure à ces acteurs. En ce sens, il n'y a pas de pluralisme juridique, mais seulement une diversité juridique autorisée". A l’annexe 4, nous présentons une illustration de la pyramide de Kelsen appliquée au cas de la Polynésie française. A ce sujet, il n’est donc pas inutile de rappeler la définition du pluralisme juridique qui guide notre travail et d’évoquer les principales modalités d’interactions entre normes étatiques et normes locales. Par pluralisme juridique, nous entendons donner une définition qui soit la plus descriptive possible. Nous nous référons ainsi à la définition qu’en donne J. Griffiths (1986, p 8) : « la présence dans un champ social de plus d’un ordre légal ». Cette définition a deux avantages. D’une part, nous permettre d’analyser en quoi la société polynésienne pré européenne à Teahupoo était dominée par une situation de pluralisme juridique consubstantielle à la structure sociale. Cet aspect a été évoqué dans le cadre des trois premiers rapports. D’autre part, poursuivre l’étude du pluralisme juridique de la société polynésienne à Teahupoo dans un contexte où domine l’idéologie du centralisme étatique depuis le XIXe siècle jusqu’à nos jours. 23 En ce qui concerne les modalités d’interaction entre normes locales et normes étatiques, il convient de noter que la question de l’incorporation des coutumes dans le cadre de la loi étatique, a déjà fait l’objet de vives discussions dans les courants de l’anthropologie juridique2. Il est admis, d'une manière générale, que ce processus d'incorporation réalisé par le système étatique et centralisé, ne maintient pas mais transforme et dénature les normes traditionnelles. A partir d'une présentation historique de l'influence coloniale, Morse indique les agencements possibles (Morse, 1988, pp. 101-120) entre droit étatique et droit local : - la séparation: les contacts ne se produisent que par séparation ou conflit de normes; - la coopération: certains critères déterminent le domaine de compétence de l'une ou l'autre de juridictions autochtone ou étatique; - l'incorporation: le droit autochtone est incorporé dans tous les domaines où la contradiction n'est pas trop importante, dénaturant ainsi les normes traditionnelles; De toutes les manières et dans la réalité, quelque soit le modèle impliqué, les normes traditionnelles ont continué à résister. C'est pourquoi Morse (1988, p 114), observe actuellement dans le monde un processus de "reconsidération" des modèles précédents historiquement situés, concluant: "mon opinion est que la loi coutumière a évolué au cours des années et peut continuer à démontrer une adaptabilité et une flexibilité nécessaire pour faire face aux pressions futures si on lui en donne la chance. Si seulement je pouvais être aussi confiant quant à la capacité des nations modernes à en faire autant". [Traduction personnelle TB] 4.2 La méthode Dans le cadre de ce rapport, la méthodologie utilisée consiste à confronter les données de terrain relatifs au cadre normatif étatique et non étatique, aux scénarios de gestion envisagés dans les catégories des acteurs3, avec la définition de l’anthropologie juridique au sens de John Griffith (1986). Cependant, si la définition précédente est utile et opératoire car descriptive et non pas normative, il convient de la décliner selon plusieurs indicateurs qui permettent de cerner à Teahupoo (et ultérieurement à Tautira) les phénomènes de pluralisme culturel ayant trait avec la gestion du territoire. Il convient également d’utiliser des indicateurs qui permettent de qualifier le pluralisme identifié. Est-il de l’ordre de l’incorporation ou de la coopération 2 Voir sur ces questions, Chiba (1986); Le Roy (1987); Morse (1988); Rouland (1988); Cooter (1991); Sack (1992); Ward (1995). 3 Ce qui en soit est la spécificité d’une approche ethnologique. 24 par exemple ? Dans cette perspective, les travaux d’Eleanor Ostrom (1991) sur les commons, apparaissent comme pertinents. Dans un exercice de comparaison de différentes communautés à travers le monde, elle montre en effet que les groupes qui sont capables de s’organiser et maîtriser leur comportement avec succès, sont caractérisés par un certains nombre de principes limités. Ces principes peuvent être repris dans un contexte pluralistique. In comParing the communities, E. Ostrom (1991) found that groups that are able to organize and govern their behavior successfully are marked by the some basic design principles: 1) Group boundaries are clearly defined. 2) Rules governing the use of collective goods are well matched to local needs and conditions. 3) Most individuals affected by these rules can participate in modifying the rules. 4) The rights of community members to devise their own rules is respected by external authorities. 5) A system for monitoring member's behavior exists; the community members themselves undertake this monitoring. 6) A graduated system of sanctions is used. 7) Community members have access to low-cost conflict resolution mechanisms. 8) For CPRs (common property resources) that are parts of larger systems: appropriation, provision, monitoring, enforcement, conflict resolution, and governance activities are organized in multiple layers of nested enterprises. Ce sont ces principes qui nous servirons d’indicateurs pour analyser en quoi les scénarios proposés/évoqués, sont producteur de pluralisme juridique ou non. Il y a deux manières de déployer notre méthodologie. Soit, nous procédons à l’analyse de chaque scénario à partir des indicateurs sus mentionnés ; soit pour chaque indicateur, nous confronter les données de terrain relatives aux scénarios proposés. Cette seconde hypothèse nous semble plus productive pour deux raisons principales. D’une part, les scénarios envisagés peuvent plus facilement faire l’objet de comparaison et évaluer du point du pluralisme culturel fortement marqué à Teahupoo. D’autre part, parce que cette approche permet de discuter des entretiens et des réunions à partir des catégories des acteurs. Enfin, s’il convient de rappeler que cinq scénarios de gestion ont été évoqués (1° PGA/PGEM ; 2°Territoire coutumier ; 3° Une gestion corporatiste du lagon de Teahupoo ; 4° La réinvention du rahui ; 5° Une gestion communautaire du lieu), les scénarios 3 et 4 apparaissent plus comme des modalités différentes du scénario 5 et rejoignent dans leur principe ce dernier schéma. C’est la raison pour laquelle, ils ne seront pas distingués. 25 4.3 Les scénarios à l’épreuve du pluralisme culturel et juridique 4.3.1 Les frontières des groupes sont-elles clairement définies ? Dans l’optique d’une gestion du territoire et de l’environnement à partir d’un dispositif public de type PGA/PGEM, ces outils n’ont pas pour vocation de reconnaître et d’identifier les frontières des groupes. Au contraire, cette approche est fondée sur une approche à la fois juridique et spatiale. Le seul acteur véritablement identifié est la commune qui est à l’origine de la mise en œuvre de cette forme d’organisation des activités sur son territoire. C’est l’arrêté municipal qui enclenche la procédure de mise en place d’une PGA et/ou d’un PGEM. A l’échelle à laquelle nous avons travaillé, ce dispositif ne permet donc pas de distinguer la commune, qu’il s’agisse de Taiarapu ouest ou de Taiarapu est, des communes associés de Teahupoo et de Tautira. Au contraire, ces communes associées sont en quelque sorte englobées dans les autres communes et le poids démographique de chacune des communes associées joue un rôle déterminant dans le nombre de conseillers municipaux pouvant siéger au conseil municipal. En ce qui concerne le scénario relatif au territoire coutumier, les frontières proposées sont fondées essentiellement sur une base territoriale : le fenua aihere à l’exclusion du village. Les échanges n’ont pas permis de cerner si la zone du Pari était ou non englobé dans le projet de territoire coutumier. En outre, les groupes qui résident à Teahupoo sont beaucoup plus nombreux que les seuls résidents du fenua aihere, d’ailleurs souvent liés par des liens familiaux. Enfin, beaucoup de ces groupes qui résident au village possèdent également des droits fonciers au fenua aihere comme au Pari et sont donc directement intéressés par une gestion coutumière de ces lieux. Comme indiqué précédemment, la gestion communautaire du lagon de Teahupoo comme la réinvention du rahui, apparaissent comme des modalités différentes d’un scénario plus large ayant trait à la gestion communautaire du lieu. Dans les rapports 2 et 3, nous avons évoqué le fait que deux principaux groupes sont clairement identifiés mais se superposent. Il s’agit d’une part des familles élargies (les opu) qui détiennent des droits fonciers indivis sur les terres du village, au fenua aihere et au Pari. Certains de ces groupes connaissent, selon les cas, un principe d’organisation en réseau ou sont représenté, au moins en partie, au travers d’associations familiales. Ce sont des groupes plus que des individus qui possèdent des droits fonciers4. 4 Dans la même perspective à Rangiroa, Paul Ottino (1972, pp 441-442) précise que: « la (…) confusion tient à la notion même de propriété (…) correspondant à ce que Goodenough appelle des corporations et non à des individus. De plus ces « droits de propriété » sont avant tout des droits d’accès à des terres inaliénables; dans les meilleurs des cas rien de plus que des droits d’usage. L’on se souvient de ce paradoxe qui, en accord avec 26 D’autre part, l’organisation de la communauté à Teahupoo reconnait un principe de spécialisation. Des experts (les tahu’a) sont reconnus et respectés en fonction de leur spécialité (spécialiste des plantes, de l’histoire et de la culture, de la pêche, de l’ethnomédecine, de la chasse, etc.). Il a en outre été montré (cf. rapport 3) que l’expertise (tahu’araa) était lié à un territoire. Pas d’expertise de l’ethnomédecine sans une connaissance intime des plantes et la pratique des territoires. Pas d’expertise des pêches sans une connaissance approfondies des toponymies marines et la pratique des hauts lieux du territoire marin. A ce titre, on peut effectivement considérer que les frontières des groupes sont clairement identifiées, soit du fait de leur appartenance à un lieu (sur lequel existent des droits fonciers terrestres et marins), soit du fait de leur appartenance à une corporation d’expert. les conceptions polynésiennes profondes, ne reconnaît la propriété qu’à posteriori, au bénéfice des personnes depuis longtemps décédées lesquelles de leur vivant n’avaient jamais connu sans doute l’étendue exacte de leurs droits » 27 Figure 2 Le territoire d’un expert de la culture 28 Figure 3 Le territoire d’un tahua de la pêche au te pari 29 4.3.2 Les règles concernant l’usage des biens collectifs sont-elles adaptées aux conditions et besoins locaux ? Le faisceau de règles étatiques présentes dans le droit de l’aménagement, de l’environnement et de la pêche pourrait être distingué. En ce qui concerne le PGEM, nous avons peu d’exemples mais les travaux scientifiques relatifs à la mise en place des deux seuls PGEM de Polynésie (Fakarava et Moorea) nous incitent à une certaines prudence5. Les règlements sont souvent complexes, peu accessibles aux populations, et dans la pratique, en tout cas pour Moorea, peu respectés. Dans le rapport 1, nous montrons aussi qu’à Teahupoo, les règlementations relatives à l’occupation du domaine public ne sont pas respectées. L’artificialisation du littoral avance rapidement. On peut également se demander dans quelle mesure le principe de domanialité du lagon, imposé au XIXème siècle, a-t-il accélérer ou non les conflits d’usages sur le lagon ? Enfin, l’imposition du code civil en Polynésie a, sur le plan foncier, rendu les indivisions polynésiennes, inextricables et favoriser les spoliations foncières. Cela étant dit, les règlementations de type ZPR (droit des pêches) ou d’espace protégé (droit de l’environnement), plus simples, paraissent sans doute plus adaptés aux conditions et besoins locaux, sous réserve que ces règlementations prévoient les modes de gestion qui correspondent aux objectifs poursuivis. Pour ce qui est du scénario de territoire coutumier, nous n’avons pas connaissance de règles précises déjà édictées. En revanche, il est caractérisé par son caractère limité et exclusif, ce qui rend difficile le fait qu’il apparaisse comme adapté aux « conditions et besoins locaux ». Pour ce qui est de la gestion communautaire du lieu qui n’existe pas à l’heure actuelle, l’analyse des pratiques actuelles, de l’appropriation du foncier terrestre et marin, des sources, des lieux tapu (sacré), du littoral, montrent le fort décalage entre les normes locales et les normes étatiques. Sans qu’on puisse véritablement parler de gestion (car elle n’existe pas plus en matière d’indivision), on peut simplement avancer que les règles générées par la communauté seraient plus proches des réalités, pour peu que les conflits de normes avec le contexte plus large, ne soit pas trop irréconciliable. 4.3.3 Les individus affectés par ces règles peuvent-ils participer à la modification de ces règles ? L’ensemble des règles étatiques existantes susceptibles de réguler l’usage des espaces et des ressources à Teahupoo permet une forme de consultation de la population. Dans un autre programme scientifique, nous avons montré que l’application des règles du 5 Voir les travaux réalisés dans le cadre du programme de recherche GAUIS, ANR 2007. 30 PGA/PGEM en Polynésie, produit une forme de gouvernance très centralisée et verticale (Féral et al., 2009). Par participation des individus, il faut entendre dans ce cas précis, la consultation des populations pour avis, mais en aucun cas ils seraient décisionnaires ou auraient le pouvoir de modifier les règles puisque la décision finale relève dans la procédure du conseil local d’aménagement, puis du conseil des ministres de la Polynésie française. Dans les faits, la procédure est largement pilotée par le service de l’urbanisme et de l’aménagement de la Polynésie française. La consultation de la population pour avis, est, après la manipulation, la forme la plus dépouillée de la participation6. Pour ce qui est du scénario « territoire coutumier », les remarques précédentes s’y appliquent. La plus part des individus de la communauté à Teahupoo ou extérieur à la communauté, ne peuvent participer à la modification des règles lorsqu’ils en sont affectés. Seuls les résidents du fenua aihere seraient susceptibles de participer à la modification des règles. Pour ce qui est de la gestion communautaire du lieu, en principe, l’autonomie des individus pour modifier les règles auxquelles ils sont soumis est grande. Ce critère est discriminant. Il distingue nettement une approche du type PGEM qui prévoit, par exemple à Moorea, que certains usagers du lagon (par exemple les pêcheurs de Ature, les acteurs des activités touristiques) puissent décider d’une chartre interne, mais ne peuvent modifier les règles plus larges qui organisent leurs activités. A l’inverse, dans le scénario présent, les individus 6 La notion de participation est utilisée largement dans les domaines de la science politique (participation politique, démocratie participative), de l’environnement (participation publique aux décisions gouvernementales), plus largement dans les sciences humaines. Cette notion regroupe donc des sens très divers. Divers concepts comme la collaboration, la consultation, l’information, la coopération, la participation sont employés indistinctement et sont perçus comme étant synonymes. Or, cette utilisation répétée et imprécise de ces concepts a complètement vidé de son sens la « participation » qui signifie désormais tellement de choses qu’elle ne veut plus rien dire. R Arnstein (1969) a distingué 8 niveaux d’actions considérées souvent à tort comme une participation des citoyens aux projets les concernant et les a regroupés en 3 grandes catégories. 1 La première est la non-participation qui regroupe la manipulation (information biaisée utilisée pour éduquer les citoyens en leur donnant l’illusion qu’ils sont impliqués dans le processus) et la thérapie (traitement annexe des problèmes rencontrés par les habitants, sans aborder les vrais enjeux). 2 La seconde est la coopération symbolique. Elle regroupe l’information (les citoyens reçoivent une information sur les projets en cours, mais ne peuvent donner leur avis), la consultation (des enquêtes ou des réunions publiques permettent aux habitant d’exprimer leur opinion sur les changements prévus) et la conciliation (quelques habitants sont admis dans les organes de décision et peuvent avoir une influence sur la réalisation des projets) 3 La troisième catégorie se caractérise par l’existence d’un pouvoir effectif des citoyens et recouvre le partenariat (la prise de décision se fait au travers d’une véritable négociation avec les pouvoirs publics et les citoyens), la délégation de pouvoir (le pouvoir central délègue à la communauté locale le pouvoir de décider d’un programme et de le réaliser) et le contrôle citoyen (une communauté locale gère de manière autonome un équipement ou un quartier). Cette échelle de participation permet d’avoir un aperçu des différents sens donnés à la notion. Ces différents éléments sont d’un intérêt particulier pour les peuples autochtones. En effet, pendant des siècles, toute participation leur a été refusée pour des raisons profondément racistes. Désormais, les peuples autochtones revendiquent le droit de participer mais très souvent la participation qui leur est accordée reste embryonnaire. Certains décideurs politiques ou économiques appréhendent la participation des peuples autochtones uniquement comme un droit à l’information ou à la consultation. 31 peuvent étroitement participer à l’élaboration de la règle et à sa transformation. Ces points mériteraient d’être approfondie compte tenu des pratiques différentes selon les portions de territoire (notamment fenua aihere et Pari). En ce qui concerne les scénarios précédents, si les règles étatiques permettent une diversité juridique autorisée, l’approche communautaire quant à elle relève bien du pluralisme juridique. 4.3.4 Les droits des membres de la communauté à concevoir leur propre règle par rapport aux autorités externes sont-ils reconnus ? En ce qui concerne les différents droits étatiques, il faut nuancer le propos en fonction du point de vue adopté. En théorie, le droit étatique actuel n’interdit pas formellement aux communautés de se doter de leurs propres règles, dans le respect de la législation applicable. Les membres des indivisions peuvent agir dans un cadre association, ils peuvent sortir de l’indivision et adopter une forme sociétaire. Les utilisateurs du lagon à Teahupoo peuvent également se réunir sous une forme associative. Ils peuvent donc se doter de leur propre règle. Cependant, et c’est la principale limite, ils en peuvent pas opposer leur règles d’organisation aux tiers : à l’Etat, aux usages extérieurs à la communauté, etc. ce qui limite considérablement leur autonomie vis-à-vis des autorités externes. Il en est de même pour les communes associées de Teahupoo ou de Tautira, qui dépendent étroitement des communes plus larges qui les englobent. En pratique, la mise en œuvre par les membres de la communauté de règles qui seraient respectées par les autorités externes, est compliqué et peu accessible. On peut imaginer que la communauté de Teahupoo puisse demander une concession maritime sur l’ensemble du lagon de Teahupoo. Mais cette stratégie nécessite une plus grande implication des administrations et un effort de réappropriation des mécanismes institutionnels par les communautés locales. Pour ce qui est du scénario du territoire coutumier, il a été fait état d’une loi de pays que nous n’avons pas pu consulter. En tout état de cause, pour ce scénario ci comme pour le suivant – la gestion communautaire du lieu-, la loi organique ne reconnaît pas la réalité coutumière, ce qui, en pratique, rend impossible une relation harmonieuse entre normes étatiques et normes non étatiques. Aujourd’hui, à Teahupoo comme ailleurs en Polynésie française, les réalités coutumières continuent à se développer et à s’adapter au contexte plus large, sans que cette réalité soit reconnue par les autorités externes. 32 4.3.5 Un système de surveillance du comportement des membres existe-t-il ? Les membres de la communauté peuvent-ils eux-mêmes prendre en charge cette surveillance ? Le rapport commandé par le service des pêches pour réaliser une étude de faisabilité relative à la mise en place d’un PGEM à Taiarapu ouest (PTPU, 2004, p 78) concluait de la manière suivante : Il semblerait que les règles de préservation des ressources comme les tailles minimales, les périodes de pêche autorisées et la taille des filets ne soient pas respectées au vu et au su de tous. Ce constat est assez général au niveau des îles de Polynésie française (…). Les travaux menés par ailleurs relatifs à l’efficacité des systèmes de surveillance des règles applicables dans les champs considérés, montre la très faible efficacité de ces dispositifs qu’il s’agisse de la police des pêche ou des contraventions de grande voirie en matière de domanialité publique (voir les différents rapports GAUIS). En ce qui concerne les sites classés à Teahupoo, à Tautira et au Pari, le site internet de l’environnement mentionne l’absence de gestion de ces sites, pour un temps assurée par les communes. Les travaux les plus récents se rapportant à la gestion des sites naturels et culturels, paraissent très sévères quant à l’absence de politique intégrée et cohérente (EGPF, 2009 ; Michelli, 2010). Pour ce qui est de la gestion coutumière des lieux, les même remarques qu’au titre précédent s’appliquent. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de système de surveillance qui relèvent des normes locales plus efficaces (de l’ordre du contrôle social et des sanctions invisibles de nature coutumière), mais leur étude localisée et précise, mériterait un travail en soit, qu’il serait utile d’entreprendre, mais qui est en dehors du champ de la présente étude. 4.3.6 Un système gradué de sanction est-il utilisé ? Les enquêtes réalisées n’ont pas permis de réunir des statistiques sur les sanctions relatives aux infractions de grande voirie ou aux droits des pêches et de l’environnement à Teahupoo. Il semble cependant que les sanctions soient faibles tandis que les écarts à la règle étatique) sont nombreux (remblais illégaux, pêche en bouteille, etc.). En principe, les mêmes remarques précédentes s’appliquent en ce qui concerne la gestion communautaire du lieu. En définitive dans la situation actuelle, ni les règles d’Etat ni les règles coutumières ne sont opérantes à Teahupoo. 33 4.3.7 Les membres de la communauté ont-ils accès à des mécanismes de résolution des conflits peu couteux ? Dans tous les cas de figure envisagé et en l’absence de mécanismes locaux de résolution des conflits, les membres de la communauté n’ont pas accès à des mécanismes de résolution des conflits peu couteux. Dans les derniers grands conflits qui ont opposé pêcheurs de Teahupoo et de Tautira, un mécanisme local de résolution des conflits auraient pu faciliter une sortie de crise moins couteuse à la fois monétairement et psychologiquement. 4.3.8 Concernant les ressources communes, font-ils parti de systèmes plus larges : appropriation, clause, surveillance, sanction, résolution des conflits et les activités de gouvernance sont-elles organisées selon des couches multiples d’entités en réseau ? Les points à développer ici son en relations avec ceux développés au chapitre 5.3.4. Nos enquêtes précédentes (rapports 1, 2 et 3) ont montré l’existence de manières de faire spécifiques se rapportant au territoire et aux ressources à Teahupoo. La permanence des experts (tahu’a), l’appropriation communautaire du territoire et des ressources, sont autant d’éléments qui militent en faveur de la réalité du pluralisme culturel. D’un autre côté, les droits étatiques dans les champs de l’aménagement, des pêches et de l’environnement, sont autant de dispositifs qui, dans la théorie comme dans la pratique, accordent une faible autonomie de gestion en faveur des acteurs locaux. On ne peut donc pas parler sur ce dernier point de système de gestion des ressources organisé selon des couches multiples d’entités en réseau. Pour reprendre la terminologie de Morse, le type de coopération entre droit étatique et norme locale à Teahupoo est plutôt fondé sur le mode de l’indifférence ou du conflit de normes. Il n’y a pas de mécanisme d’incorporation des normes locales dans le droit étatique. Il n’y a pas de mécanisme de coopération entre droit étatique et normes locales, à Teahupoo comme ailleurs en Polynésie française (à l’exception de Rapa). 5 Conclusion Après une présentation des dispositifs étatiques concourant à la gestion des territoires et des ressources, cette étude a fait état des enquêtes concernant les scénarios de gestion envisagés à Teahupoo dans les catégories des acteurs. L’analyse de ces scénarios à partir d’indicateurs empruntés au champ de l’anthropologie et de l’école de l’économie institutionnelle, a montré le caractère pluraliste des normes locales à Teahupoo. A ce titre, discutant du pluralisme juridique, il convient d’insister sur la différence entre diversité 34 juridique autorisée et pluralisme juridique. Dans le premier cas, le principe de la primauté du droit étatique demeure. Dans le second cas, qui est un cas d’école en Polynésie française, normes étatiques et normes locales interagissent de manière harmonieuse. 35 6 Annexes Annexe 1 : les sites classés http://www.environnement.pf/spip.php?rubrique58 (consulté le 2 juin 2010) Dans le tableau ci-dessous on été reportés tous les espaces naturels classés de Polynésie française, selon leur catégorie faisant référence aux outils proposés dans Code de l’environnement de la Polynésie française ou à l’international. Catégorie Nom Localisation commune I Réserve territoriale Atoll de Scilly et Commune de Scilly et Atoll de Maupiti Bellinghausen Bellinghausen Ia Réserve de Vaikivi II Parc Territorial Faaiti II Parc de Vaikivi Domaine territorial district de Vaikivi Vaipaee Naturel de Te Vallée de Te Faaiti Ile 1971 : lagon de Scilly seulement 1992 : 2 atolls + zone de protection de de Ua Huka Hitiaa O Te Ra commune Tahiti associée de Papenoo Domaine territorial district de Vaikivi Vaipaee de Année de classement Ua Huka 1997 1989 1997 III Grotte Pufau Hitiaa O Te Ra commune associée Papenoo III Source* (pointe Hitiaa O Te Ra Narii Domingo) commune associée Mahaena de Tahiti 1952 III Grotte Anapiro Hitiaa O Te Ra commune associée Papenoo de Tahiti 1952 III Grotte Monoihere - Mahina Tahiti 1952 III Grotte de Maraa - Paea Tahiti 1952 III Grotte Pare - Pirae Tahiti 1952 III Grotte de Vaipoiri commune associée Taiarapu ouest de Teahupoo Tahiti 1952 III Grotte Turupo - Afareaitu Moorea 1952 III Grotte Vaitaraa - Afareaitu Moorea 1952 III Cascade du Vahi commune associée Taiarapu Est de Tautira Tahiti 1952 III Cascade Vaipahi Teva I Uta Tahiti 1952 commune de Tahiti 1952 36 Catégorie Nom Localisation commune Ile associée Mataiea Année de classement de III Cascade Atehiti Teva I Uta commune associée Mataiea IV Eiao Ile d’Eiao commune Nuku Hiva de IV Motu One Ilot Motu One commune Nuku Hiva de IV Hatutu Ile de Hatutu commune Nuku Hiva de IV Mohotani Ile de Mohotani commune de Hiva Oa 1971 V Baie des Vierges Hanavave Ile de Fatu Hiva 1952 V Baie de Hohoi Hohoi Ile de Ua Pou 1952 V Pointe Hotuarea V Belvédère Taharaa V de Tahiti 1952 1971 1971 1971 Faaa Tahiti 1952 Mahina Tahiti 1952 Pointe Vénus Mahina Tahiti 1952 V Plateau de Tamanu Punaauia Tahiti 1952 V Pari Taiarapu Ouest et Tahiti Est 1964 V Lac Vahiria Teva I (commune associée Mataiea) 1952 V Motu Tapu du Uta de Ilot Motu Tapu Tahiti Bora Bora 1964 I.a : Réserve naturelle intégrale / b :zone de nature sauvage ; II : Parc territorial ; III : Monument naturel ; IV : Aire de gestion des habitats ou des espèces ; V : Paysage protégé. * monument naturel disparu Annexe 2 Les catégories du code de l’environnement Le Code de l’environnement a prévu, dans la délibération n°95-257 du 14 décembre 1995 relative à la protection de la nature, 6 catégories différentes d’espaces naturels protégés. Proches de celles établies par l’Union Internationale de la Conservation de la Nature (UICN), ces catégories sont classées selon leur(s) objectif(s) de gestion : 37 • Réserve naturelle intégrale (Catégorie I a) C’est un espace protégé géré principalement à des fins scientifiques. • Zone de nature sauvage (Catégorie I b) C’est un espace protégé géré principalement à des fins de protection des ressources sauvages. • Parc territorial (Catégorie II) C’est un espace protégé géré principalement dans le but de protéger les écosystèmes et à des fins récréatives. • Monument naturel (Catégorie III) C’est un espace protégé géré principalement dans le but de préserver des éléments naturels particuliers. • Aire de gestion des habitats ou des espèces (Catégorie IV) C’est un espace protégé géré principalement à des fins de conservation des habitats et des espèces, avec intervention dirigée au niveau de la gestion. • Paysage protégé (Catégorie V) C’est un espace protégé géré principalement dans le but d’assurer la conservation de paysages et /ou à des fins récréatives. • Aire protégée de ressources naturelles gérées (Catégorie VI) C’est un espace protégé géré principalement à des fins d’utilisation durable des écosystèmes naturels. Ces différentes catégories de classement peuvent avoir des objectifs multiples en termes de protection et/ou de gestion. Aussi, le tableau suivant récapitule les objectifs possibles des différentes catégories par ordre de priorité suivant les critères internationaux. Annexe 3 les zones de pêches règlementés en Polynésie française 38 Annexe 4 : La pyramide de Kelsen (une variante) appliquée à la Polynésie française Loi organique de la Polynésie française Droit de Propriété Domanialité Publique Espace Types de droit venant préciser/limiter les deux régimes situés au dessus Territoire Terrestre « la propriété privée est sacrée » Droit de la pêche lagonaire Règles sur les espaces Règles sur les espèces et les variétés Les zones de pêches règlementées Règlementés Espace terrestre et maritime Domaine public « imprescriptibilité » « inaliénabilité » Droit de Droit de l’aménagement l’environnement Le Plan Général d’Aménagement (PGA) Le Plan de gestion de Classement des l’espace maritime espaces (PGEM) Le plan de prévention des risques (PPR) Classement des Selon les espaces espèces 39 Annexe 5 : Tableau des scénarios envisagés Principe/Scénario Une gestion communautaire du lagon de Teahupoo La réinvention du rahui Une gestion communautaire du lieu Oui sur une base professionnelle : les pêcheurs Oui, sur une base territoriale Oui sur le fondement des propriétaires fonciers Oui Oui Oui Non Oui Non Oui potentiellement PGA/PGEM Territoire coutumier Les frontières des groupes sont clairement identifiées Non Sur la base des limites des territoires communaux Mais pose le problème des communes-associés Les règles concernant l’usage des biens collectifs sont adaptées aux conditions et besoins locaux Non, elles n’existent pas ou sont peu respectées lorsqu’elles existent Non, uniquement consulté pour avis Non Les frontières proposées sont fondées sur une base territoriale et non par rapport aux groupes indentifiés Non, uniquement au bénéfice d’une partie des besoins et usages locaux Non, uniquement une composante du groupe Non Oui potentiellement Non Non, mais potentiellement oui Oui potentiellement Oui Oui, potentiellement Police des pêches sur les ressources Contravention de grande voirie pour les occupations illégales du domaine public Indéterminé Indéterminé Oui en principe Oui, potentiellement Non Non Indéterminé Oui en principe Idem AD Oui AD Non Indéterminé La plus part des individus affectés par ces règles peut participer à la modification de ces règles Les droits des membres de la communauté à concevoir leur propre règle par rapport aux autorités externes Un système de surveillance du comportement des membres existe. Les membres de la communauté peuvent eux-mêmes prendre en charge cette surveillance Un système gradué de sanction est utilisé Les membres de la communauté ont accès à des mécanismes de résolution des conflits peu couteux Concernant les ressources communes, ils font parti de systèmes plus larges : appropriation, clause, surveillance, sanction, résolution des conflits et les activités de gouvernance sont organisés selon des couches multiples d’entités en réseau Non, uniquement les pêcheurs Oui potentiellement 40 7 Bibliographie Adams Henry, 1964, Mémoires d’Arii Taimai. Publication de la Société des Océanistes N°12, Musée de l’Homme, Paris. Arnstein, Sherry R. "A Ladder of Citizen Participation," JAIP, Vol. 35, No. 4, July 1969, pp. 216-224. Cazalet Bertrand, « Droit des lagons en Polynésie française », pp 391-407, Revue Juridique de l’Environnement, N°4/2008 CHIBA Masaji (1986) Asian Indigenous Law. London: Routledge and Kegan Paul. 390 p. COOTER Robert (1991) “Kin groups and the common law process.” In Peter LARMOUR: Customary land tenure: registration and decentralisation in Papua New Guinea. P.N.G: National Research Institute. Monograph n°29. 236 p. Ellis William, 1831, Polynesian Researches during a residence of nearly eight years in the Society and Sandwich Islands. 4 vols. Second Edition. London, Fisher, Son and Jackson. Féral François, « L’impossible exploitation durable des ressources halieutique : crise et mondialisation des pêches maritimes », 27 p. En cours de publication, 2010. GRIFFITHS John (1986) “What is legal pluralism ?” Journal of Legal Pluralism Vol. 24, pp. 1-53. LE ROY Etienne (1987) La réforme du droit de la terre dans certains pays d’Afrique francophone. Etudes législatives n°44. Rome, F.A.O, 108 p. Michelli Ludivine, « Patrimoine culturel et Développement économique en Polynésie française ». Mémoire Master 2 Droit des activités économiques, sous la direction de Marc Debène et Tamatoa Bambridge, Université de la Polynésie française, 2010. MORSE B. W. *(1985) Aboriginal peoples and the law: indian, metis and inuit rights in Canada. Carleton Library Series, pp 1-15. (1988) “Indigenous Law and the State”. Foris Publications. Dordrecht, Holland, pp. 101-120. Newbury Colin, 1966, “Aspects of cultural change in French Polynesia: the decline of the Ari’i”. Journal of Polynesian Society, Wellington, Vol. 67, march, pp 7-26. Oliver Douglas, 1974, Ancient Tahitian Society, 3 vols. The University Press of Hawaii, Honolulu, Hawaii. OTTINO Paul (1972) Rangiroa: parenté étendue, résidence et terres dans un atoll polynésien. Paris: Editions Cujas, 530 p. Raybaud Corinne, 2000, De la coutume à la loi dans les archipels de Polynésie orientale de 1767 à 1945. Thèse de doctorat en droit soutenue en octobre 2000. Université de Montesquieu Bordeaux IV. ROULAND Norbert (1988) Anthropologie juridique. Paris: Presses Universitaires de France. 496 p. SACK Peter (1998) « Culture juridique en Océanie », pp. 225-231, dans CAPELLER Wanda et KITAMURA Takanori: Une introduction aux cultures juridiques non occidentales. Autour de Masaji Chiba. Edition Bruyant, Bruxelles. Saura Bruno, 1996, « Les codes missionnaires et la juridiction coutumière des TOOHITU au Iles de la Société et des Australes (1819-1945). » Revue de la recherche juridique de droit prospectif, n° XXI. Presses Universitaires d’Aix-Marseille. WARD G. KINGDOM E. (1995) Land, Custom and Practice in the South Pacific. Cambridge University Press.