sca papergram no › 2005

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sca papergram no › 2005
sca papergram no 4 › 2005
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Papergram. Magazine international des professionnels de
l’industrie graphique et des médias publié par SCA Forest
Products AB – Box 846 – SE-851 23 Sundsvall – Suède.
Téléphone : +46 (0)60-19 40 00
Télécopie : +46 (0)60-19 40 90
18
13
RÉDACTRICE EN CHEF ET DIRECTRICE DE LA PUBLICATION :
Anne-Sofie Cadeskog
CHEF DE PROJET ET CHEF DE LA RÉDACTION :
Luise Steinberger ([email protected])
RÉVISION : Agnès Carbon/Jean-Paul Pouron
MAQUETTE : Mellerstedt Design
REPROGRAPHIE ET IMPRESSION : Prinfo Accidenstryckeriet –
Sundsvall – Suède
PHOTO DE COUVERTURE : Christoph Papsch
Sommaire › 4/2005
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4 La VPC atteint de nouveaux records
Internet n’a fait qu’attiser l’envie de se faire livrer des commandes à domicile. Mais les
catalogues jouent toujours un rôle important en permettant aux clients de choisir. Ceux-ci ne
sont plus des provinciaux comme autrefois, mais des citadins pressés.
11 Tendances
12 L’inspiration au cœur de la forêt
Le dessinateur Neale Thomas a fui la trépidante Londres pour un village silencieux de
Suède. Il vit dans un autre univers, mais ses clients croient qu’il habite toujours Londres.
13 Une idée sans handicap
Deux amies se retrouvent au restaurant et ont une idée de génie. Elles sont maintenant
à la tête de Red Tee, le premier magazine suédois et européen pour les golfeuses.
Une vraie réussite, y compris sur le plan financier.
17 Chronique
Elin af Klintberg, rédactrice en chef du magazine RES, parle du voyage au temps des catastrophes.
18 La maintenance source d’économies
Les imprimeries offset ont tout à gagner à entretenir régulièrement leurs machines.
Les experts du Web Offset Champion Group et de SCA livrent leurs conseils pratiques.
21 Tendances
22 Au début était le Verbe…
Le christianisme, l’islam et d’autres religions ont commencé à rédiger leur message sur
des pierres et sur des os de dromadaire, puis sur du papyrus et du parchemin, mais
c’est grâce au papier que les textes sacrés se sont répandus plus vite.
24 Extra large
Un mensuel pour attirer les « jeunes » lecteurs de moins de 40 ans ? C’est XL, le dernier-né
du grand quotidien italien La Repubblica. Mise en page décoiffante et contenu cool sont les
ingrédients magiques qui doivent inspirer l’acheteur à lire aussi le quotidien.
28 Rudolph et ses amis
Lorsque le père Noël est surmené, il fait appel au renne Rudolph. Dans la vie réelle,
celui-ci habite dans les forêts de SCA…
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Papergram est imprimé sur
GraphoCote 80 g/m2, la couverture
sur Artic Gloss 150 g/m2. Le cahier
intérieur est certifié FSC.
Tous les articles sont commandés, relus et validés par la
rédaction, ce qui ne signifie pas nécessairement que les
opinions qui y sont exprimées reflètent celles de SCA ou de
la rédaction. Toute citation doit faire mention de la source.
Pour recevoir Papergram ou l’offrir à un collègue, envoyez ou
faxez votre nom, éventuellement celui de votre entreprise,
et votre adresse à : Birgitta Ulfsparre - SCA Graphic
Sundsvall AB - Box 846 - SE-851 23 Sundsvall - Suède.
Tél. : + 46 (0)60-19 43 92. Télécopie : + 46 (0)60-15 24 50.
Courriel : [email protected]
SCA FOREST PRODUCTS produit du papier d’impression
(journal, SCA et LWC), de la pâte à papier, des bois sciés
et du bois combustible. Elle gère également l’important
patrimoine forestier de SCA, approvisionne ses usines
suédoises en bois matière première et offre à ses unités
des services de transport d’un bon rapport qualité-prix.
Avec un effectif d’environ 4 000 personnes, SCA
Forest Products réalise un CA d’environ 15 000 M SEK
(1 630 M EUR). L’activité forestière de SCA est certifiée
FSC (Forest Stewardship Council).
SCA › infos
Plus de vieux papiers
récupérés en Europe
LARS LINDGREN
THOMAS
JANSSON
JAN KNUTS
NOUVELLE STRUCTURE
COMMERCIALE
LE SERVICE MARKETING de SCA Graphic Sundsvall a été
S
S
LA RÉCUPÉRATION des vieux papiers continue de progresser en
Europe. Selon les statistiques de la Confédération européenne des
industries du papier, le taux de récupération atteint 54,6 %. Plus de la
moitié du papier fabriqué en Europe est à base de fibres recyclées.
En 2003, le taux de récupération s’élevait à 53,9 % et à 48,9 % en
1998 (année de référence). L’objectif fixé par l’industrie il y a cinq
ans, 56 % fin 2005, semble accessible et se traduirait par la récupération de 10 millions de tonnes supplémentaires de papier et de carton
par rapport à 1998.
On peut aussi noter que la hausse de l’utilisation des fibres recyclées par l’industrie du papier a été plus rapide que l’augmentation
totale de la consommation de papier en Europe ces dernières années.
réorganisé.
Lars Lindgren a été nommé responsable du développement Publication Papers (LWC, SC et papier journal). Il sera
chargé du développement stratégique du marché, de la communication marketing, du développement de la structure et
de la direction des projets de développement stratégique
touchant les segments de Publication Papers.
Jan Knuts prend la direction du segment Papier couché et
Thomas Jansson celle de Papier journal. Tous deux restent
chefs des ventes de leur segment respectif.
Les trois hommes dépendent hiérarchiquement de
Rolf Johannesson, directeur marketing de SCA Graphic
Sundsvall AB.
Comptes annuels distingués
La médaille Ekman
à Hans Höglund
ANCIEN SALARIÉ DE SCA, Hans Höglund va recevoir la mé-
Don aux victimes du tremblement de terre
SCA GRAPHIC LAAKIRCHEN continue sa tradition de Noël observée depuis
S
quelques années. Cette année, la somme réservée aux cadeaux de fin d’année
pour les clients et partenaires sera remise à l’ONG Nachbarn in Not (Voisins en
détresse) pour les victimes du tremblement de terre au Pakistan.
S
S
daille Ekman pour sa contribution scientifique à la recherche
sur la pâte mécanique.
Aujourd’hui professeur au Fibre Science and Communication Network de l’université du Centre, à Sundsvall, en Suède, il a mis
en œuvre en coopération étroite avec des industriels, dont SCA, le programme de recherche le plus ambitieux jusqu’ici dans le domaine de la pâte
mécanique. Ce type de pâte sert principalement à fabriquer du papier impression-écriture grâce à ses propriétés optiques : une opacité élevée évite
le phénomène de transvision.
Le jury a motivé son choix, entre autres, par ces mots : « Sa production
scientifique illustre une capacité d’innovation élevée, une systématique scientifique remarquable, un travail expérimental bien organisé, ainsi qu’un contrôle
critique des résultats obtenus. »
La médaille sera remise en 2006 à Stockholm par l’association suédoise
des ingénieurs du papier et de la cellulose lors de journées Ekman.
SCA A PRIS la troisième place du palmarès Bilan annuel des
bilans annuels organisé par la société de sondage e.com
qui a étudié en collaboration avec un jury d’experts le bilan de
1 100 entreprises. Seules cinq d’entre elles, dont SCA, ont
été notées A+ : produit de niveau mondial, substantiel,
équilibré et bien conçu.
« Naturellement, nous sommes très honorés que le bilan de
SCA reçoive depuis si longtemps des distinctions aussi positives, indique Andreas Koch, responsable des relations avec les investisseurs chez SCA. Mais nous ne nous
reposons pas sur nos lauriers et travaillons intensément pour que le bilan suivant soit encore plus pédagogique et intéressant. »
Deux entreprises canadiennes,
CIBC et Telus, ont pris la première et
la seconde places du palmarès.
SAVIEZ VOUS QUE...
SCA exploite 2,6 millions d'hectares de
forêts, dont deux millions conformément aux
directives du FSC, soit une superficie
comparable à la moitié des Pays-Bas.
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VPC :
le catalogue
est mort, vive le
catalogue !
Lorsque Internet
est apparu au milieu des années 1990, le catalogue
de VPC était condamné à disparaître. Mais il refuse
de passer la main. En fait, il a bien rebondi.
PAR Johan Rapp PHOTOS Christoph Papsch
lariés en Europe. Son chiffre d’affaires
s’est élevé à 68,5 milliards d’euros en
2004, d’après les chiffres de l’AEVPC,
l’association européenne de la vente par
correspondance, qui compte 19 pays
membres.
Achats à distance
Grâce à la VPC, on peut consulter un
catalogue chez soi et commander des
produits qui sont livrés à domicile. Ce
type de commerce a commencé à s’imposer au cours de la seconde moitié du
19e siècle, au moment du développement
des services postaux et des réseaux ferroviaires. La profession a connu une vraie
expansion après la Deuxième Guerre
mondiale. Cependant, elle a dû changer
S
L’INDUSTRIE DE LA VENTE par correspondance (VPC) a beaucoup évolué
depuis 1498, date à laquelle l’imprimeur
italien Alde Manuce a commencé à envoyer une liste des livres dont il faisait
commerce depuis son atelier de Venise.
Ces répertoires sont les plus anciens
catalogues de VPC connus au monde.
Rien à voir naturellement avec les pavés
actuels de plus de 1 000 pages débordantes de couleurs de La Redoute ou d’Otto,
mais ces listes avaient déjà tous les stigmates de la VPC : information attirante
sur le produit, tirage en série et distribution efficace à destination d’un acheteur
que le vendeur ne rencontre jamais.
De nos jours, la VPC est une vraie industrie qui emploie plus de 200 000 sa-
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Le plus gros avantage de la VPC est que les
commandes sont livrées à domicile dans la
plupart des pays.
pas très envie de jouer des coudes dans
les magasins. L’attitude aussi a changé :
autrefois considérée comme rétrograde,
la vente à distance (VAD) est jugée par
beaucoup comme un moyen intelligent
de faire ses achats.
Melanie Howard, co-fondatrice de
l’agence d’analyse du marché Future
Foundation à Londres, fait remarquer
que depuis que les femmes consacrent
plus de temps à leur vie professionnelle,
le besoin de loisirs n’a fait qu’augmenter. « Elles trouvent que c’est plus
confortable de faire leurs courses à domicile. »
« Le catalogue donne une bonne vue
d’ensemble et la reproduction des photos
est de bonne qualité », estime Richard Perks
du cabinet d’études de marché Mintel.
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son fusil d’épaule ces dernières années,
en particulier depuis l’avènement d’Internet. Peut-on encore parler de vente par
correspondance ? « Nous avons cessé
d’employer ce terme, indique Marina
Richard, responsable de la communication à La Redoute. Aujourd’hui, nous
parlons de ‘vente à distance’. »
« La profession est en mutation, renchérit Maitane Olabarria Uzquiano, directrice des affaires européennes de
l’AEVPC. Nous vivons une époque passionnante. »
Deux facteurs à l’origine de ces changements. D’abord, les clients. Avant, ils
habitaient essentiellement en zone rurale et le catalogue était leur seul espace
commerçant autre que les boutiques du
village. Aujourd’hui, il s’agit plus souvent
de citadins pressés par le temps qui n’ont
La poussée du Web
Deuxième facteur, Internet. Otto, La
Redoute et bien d’autres ont lancé leur
site Web au milieu des années 1990.
Depuis, le nombre d’achats en ligne ne
cesse de progresser : l’an dernier, près de
30 % des commandes ont été passées à
La Redoute via le Net ; en 2005, Otto a
célébré sa quinze millionième commande électronique depuis la création du site
www.otto.de il y a dix ans. « Commander
en ligne est de plus en plus prisé, constate Rainer Hillebrand, directeur marketing chez Otto. Nos clients veulent que
les produits soient plus variés et ils veulent comparer. »
Au niveau national, ce sont les Néerlandais, suivis des Autrichiens et des
Français, qui achètent le plus à distance.
Ce sont les Grecs qui montrent le moins
d’intérêt pour cette forme de commerce. Cette disparité s’explique par le niveau de développement du réseau haut
débit, qui est beaucoup moins étendu en
Grèce.
L’avènement d’Internet pousse à s’interroger sur le bien-fondé du catalogue
imprimé. Après tout, ce nouveau canal
est parfait pour la VAD, simple et rapide.
Remiser les catalogues permettrait de
faire des économies considérables en
matière d’impression, de papier et de distribution. Ce débat n’est pas sans rappeler celui du « bureau sans papier ». Mais
nous savons aujourd’hui que ce bureau
n’a jamais été aussi encombré de papiers.
C’est pourquoi le catalogue garde toute
sa prééminence. « Pendant le boom d’Internet, nous croyions que la Toile allait
jouer un rôle plus important, mais nous
avons changé d’avis », avoue Håkan
Sandman, directeur marketing d’IKEA
en Suède.
La stratégie du groupe suédois repose sur les deux médias, mais surtout sur
le catalogue tiré à 160 millions d’exemplaires (!) en 25 langues. Son objectif est
d’attirer les clients dans les magasins en
périphérie des villes. Le catalogue promeut de plus en plus le site Web d’IKEA
pour la VAD et il est si populaire qu’il
n’est pas rare de voir sur certaines boîtes
aux lettres l’étiquette : « Pas de pub svp,
sauf le catalogue IKEA. »
La stratégie d’Otto, premier VPCiste
mondial, illustre aussi la position de force du catalogue. En 2005, il a été diffusé
pour la première fois non pas deux, mais
trois fois.
Plusieurs canaux de vente
Internet a plutôt permis à la profession
d’élargir son concept commercial : le Net
n’annihile pas les autres canaux de vente, il
en crée un nouveau. Plusieurs VPCistes
comme Otto ouvrent de surcroît des boutiques sur certains marchés pour garantir
une vraie distribution multicanaux.
Chaque canal a ses points forts et ses
faiblesses, ainsi que ses propres règles :
les magasins permettent d’avoir un contact physique avec les articles ; Internet
permet de comparer les prix et les marques, et de commander ; le catalogue
peut être lu dans les transports en commun, pendant la pause déjeuner et reste
inégalé pour donner une vue d’ensemble et de l’inspiration.
« Pendant le boom d’Internet, nous croyions que la Toile allait
jouer un rôle plus important, mais nous avons changé d’avis »
HÅKAN SANDMAN
La vente à distance en bref
VPC EN EURO PAR TÊTE D’HABITANT (2004)
VENTES EN LIGNE EN %
376
Autriche
Allemagne
205
France
192
Norvège
186
Pays-Bas
174
Finlande
143
AEVPC
123
Danemark
119
Suède
114
Belgique
64
Rép. tchèque
43
Slovaquie
40
Irlande
26
Espagne
20
Hongrie
17
Slovénie
16
Italie
15
Grèce
9
Russie
4
Roumanie
1
49
46,4
France
246
Suisse
59,4
Pays-Bas
Autriche
251
EN VALEUR, c’est en Grande-Bretagne
que la VAD remporte le plus de succès.
Suivent l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse et la France. Le chiffre d’affaires est
moins élevé dans les pays méditerranéens et en Europe de l’Est. L’infrastructure routière et postière des pays comme la Russie, la Pologne et la Roumanie
est moins développée, mais le potentiel
de croissance y est intéressant.
En Europe du Sud, la situation est
complètement différente. « Le tissu culturel est hétérogène et les services postaux pas toujours fiables, estime Maitane Olabarria Uzquiano, directrice des
affaires européennes de l’AEVPC. En
Espagne, mon pays d’origine, on adore
faire les magasins. Le climat est meilleur
et les boutiques restent ouvertes tard. »
41,5
Royaume-Uni
36
Rép. tchèque
35,4
AEVPC
33
Danemark
32
Suède
25
Allemagne
24
Norvège
20
Finlande
20
Espagne
18
Belgique
15
Suisse
15
Irlande
13
Hongrie
Slovaquie
1
12
8
Italie
6
Roumanie
Russie
2
Grèce
1,5
S
Royaume-Uni
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« Autre point en faveur du catalogue, sa capacité
à reproduire les photos. Il est indispensable d’avoir
de bonnes photos surtout quand on vend des vêtements. Le client veut voir ce qu’il achète »
RICHARD PERKS
Catalogues imprimés sur papier SCA :
Argos, Baur, Bonprix, Biltema, Blanche
Porte, Conrad, Heine, Neckemann
(Thomas Cook), Otto, Quelle, Schwab et
les 3 Suisses.
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Une combinaison réussie
Six cent ans après leur première apparition à Venise, la disparition des catalogues de VPC n’est pas pour demain. Ils
s’accommodent plutôt bien d’Internet et
du commerce de détail. Le spécialiste du
bricolage et de l’outillage suédois Clas
Ohlson a commencé par vendre par correspondance. À l’heure actuelle, 95 % de
ses ventes se font en magasin. Doit-il
cesser d’imprimer son catalogue ? Pas
question car il est devenu le livre de
chevet du bricoleur du dimanche et a sa
place dans presque tous les foyers. Il est
devenu tellement culte que ses anciennes
éditions sont recherchées par les collectionneurs.
S
Autre méthode de plus en plus courue, feuilleter le catalogue et consulter
ensuite le site Web pour voir s’il y a des
offres spéciales, comparer et passer commande.
Richard Perks, spécialiste du développement de la grande distribution au cabinet d’études de marché britannique
Mintel, pense que le catalogue va encore
durer quelques années. « Il y a plein de
bonnes raisons pour cela. C’est important de pouvoir feuilleter un catalogue
et d’avoir une vue d’ensemble. En plus,
en Grande-Bretagne, le haut débit n’est
installé que chez une minorité, à peu près
un tiers des foyers.
– Autre point en faveur du catalogue, sa
capacité à reproduire les photos. Il est
indispensable d’avoir de bonnes photos
surtout quand on vend des
vêtements. Le client veut
voir ce qu’il achète. »
Le spécialiste estime cependant que la
profession n’a pas encore compris comment exploiter Internet et ses fonctionnalités. Elle se contente le plus souvent
de « publier son catalogue sur le Web ».
Au lieu d’ajouter des informations supplémentaires, certains VPCistes proposent même à leurs clients de télécharger
un logiciel qui leur permet de feuilleter
la version électronique du catalogue.
PHOTO Scanpix/EPA
SMOKING
or no smoking ?
représentait la province,
Yves Saint Laurent la capitale, le chic, le
luxe. Sa décision en 1996 de créer un
smoking pour La Redoute a symbolisé
la rencontre de ces deux univers et une
nouvelle ère pour les VPCistes en France. « Les maisons de couture n’avaient
jamais montré le moindre intérêt pour
nous, raconte Marina Richard, responsable à l’époque du recrutement des stylistes au catalogue. Mais au milieu des
années 1990, les couturiers ont commencé à donner signe de vie. »
LA REDOUTE
Plusieurs groupes cibles
Aujourd’hui, La Redoute compte des
filiales dans dix pays, dont l’Espagne,
la Suède et les USA. Deux catalogues
sortent chaque année, plus toute une
série de publications spécialisées. En
France, par exemple, il y en a une pour
les seniors, une pour les grandes tailles
et une sur la décoration intérieure. La
Redoute fait partie de Redcats, le pôle
de vente à distance du groupe PinaultPrintemps-Redoute (PPR). « Dans les
années 1920, la VPC était intimement
liée à la ruralité, explique Marina Richard. C’est là qu’habitaient nos clients
et, en principe, c’était les femmes qui
se chargeaient de tous les achats de la
famille. »
De nos jours, le marché présente une
autre structure sociale. Monoménages
et mères célibataires sont nombreux.
Les femmes travaillent et, souvent,
chaque membre de la famille s’occupe
lui-même de ses achats.
Karin Hervieu-Causse, maman de
deux enfants qui habite à Paris et exerce une profession, confirme cette image. « La Redoute est formidable pour
ceux qui n’ont pas le temps de faire du
shopping. »
Renouvellement de la marque
Le rapprochement des grands couturiers et de leurs cousins provinciaux
annonçait une nouvelle ère. Et dans
leur sillage sont arrivées les top-modèles comme Claudia Schiffer, Linda
Evangelista ou Laetitia Casta. C’est
ainsi que les VPCistes ont précédé les
Un smoking Yves Saint Laurent de la
collection automne-hiver 2005. C’est
justement grâce à un smoking et au
couturier que La Redoute est devenue
présentable dans les capitales.
chaînes vestimentaires comme H&M et
Zara qui demandent désormais à de grands
couturiers de créer des collections.
Le smoking de Yves Saint Laurent
(gilet, pantalon et veste) coûtait près de
500 euros. Tous les exemplaires ont été
vendus et il est introuvable aujourd’hui. Ce
smoking a fait office de billet d’entrée à
une nouvelle identité de marque, qui permet à La Redoute de prétendre qu’elle
représente les dernières tendances de la
mode parisienne. Comme elle l’affirme
dans sa publicité : pas besoin d’aller à Paris
pour acheter des vêtements de Paris.
S
Que s’était-il donc passé ?
La Redoute est le premier VPCiste de
France. Il envoie un catalogue de plus de
1 200 pages deux fois par an à sept millions de foyers. À l’étranger, son nom est
synonyme de vêtements, mais, en France, il vend de l’électroménager, des meubles et d’autres produits.
Pour comprendre cette rupture de tendance, il faut retourner aux origines de
La Redoute, filature familiale créée en
1873 à Roubaix près de la frontière belge. Un jour de 1922, étant resté avec une
grosse quantité de laine sur les bras, quelqu’un a l’idée de la vendre directement
aux particuliers. On passe donc une annonce dans le journal local indiquant que
la laine à tricoter sera bradée à moitié
prix. « Tout s’est vendu en un rien de
temps, reprend Marian Richard. La filature a alors commencé à vendre des pro-
duits à des prix avantageux par correspondance directement aux particuliers. »
Le premier catalogue sort en 1928.
Il cible essentiellement les habitants
des zones rurales, éloignés des boutiques. Il vend des vêtements et des produits lainiers, et remporte un succès
immédiat. Son expansion est fulgurante.
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S
Le couturier français
Yves Saint Laurent a
fait sensation quand il
a accepté de créer un
smoking pour la société de
vente par correspondance
La Redoute.
Comment trouver chaussure à
L’Allemagne était encore en ruines lorsque
Werner Otto a fondé la société qui est devenue
le numéro un mondial de la VPC et a fait de
sa famille l’une des plus riches du monde.
Les photos du premier catalogue d’Otto
étaient collées à la main et les pages
reliées par une ficelle.
« Nous allons miser à fond sur les magasins
et Internet », a annoncé le PDG Michael
Otto, fils de Werner, fondateur du premier
VPCiste mondial.
10
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TOUT A COMMENCÉ en 1949 dans une
banlieue de Hambourg. Werner Otto a
40 ans et se met en tête que la VPC est
un secteur d’avenir. Il embauche trois
personnes, donne son nom à l’entreprise
et fabrique tant bien que mal un catalogue :
les photos de 28 paires de chaussures sont
collées à la main et le catalogue est relié
par une ficelle au bureau. Il sera distribué
à 300 exemplaires.
Près d’un demi siècle plus tard, Otto
diffuse une soixantaine de catalogues et
affiche un tirage total de 109 millions
d’exemplaires dans le monde entier. Près
de 130 000 produits y sont présentés et
l’accent est mis sur les vêtements et les
textiles.
En Allemagne, Otto est depuis longtemps synonyme de gros catalogue. C’est
d’ailleurs la clé de voûte de son activité.
Mais l’arrivée d’Internet dans les années
1990 a modifié la donne pour la profession. Depuis, tous les ans, on se demande si Otto ne devrait pas abandonner, ou
du moins réduire fortement, son activité catalogue.
Augmentation de la périodicité
Cette année, la direction a répondu aux
critiques en faisant passer pour la première fois de l’histoire du VPCiste le nombre
de catalogues de deux à trois par an.
Cette décision a fait l’objet d’une campagne publicitaire époustouflante à la
télévision, dans la presse et dans les grandes villes sous forme de panneaux géants
et lumineux. Le top-modèle Heidi Klum
a servi d’appât.
Cette campagne faisait suite à plusieurs années de faible demande et d’une
TENDANCES
PAR Henrik Emilson
son pied
baisse des commandes. Éditer un troisième catalogue semblait être un moyen
de stimuler le marché. « Nous devons
nous-même faire naître le vent économique qui nous pousse », a déclaré à
l’annonce de la nouvelle le président du
groupe, Michael Otto, qui a pris la succession de son père Werner en 1981.
L’accélération du rythme sur le marché est une autre raison d’augmenter la
périodicité et de chercher de nouveaux
canaux de vente. Le neuf vieillit vite et
un catalogue perd rapidement de son
actualité.
DEPUIS LE MILIEU du 19e siècle,
elles sont source de joie… et
d’angoisse : joie de recevoir une carte de vœux d’un parent éloigné, mais
angoisse d’avoir oublié de lui en envoyer une.
La première carte de vœux connue a
été adressée à Sir Henry Cole, fondateur du Victoria & Albert Museum
de Londres, en 1843.
La plus petite a été reçue par le prince
de Galles en 1929. Il s’agissait d’un
grain de riz sur lequel le destinataire
avait réussi à faire tenir l’adresse, ses
vœux, ainsi qu’un petit dessin.
La plus grande carte pesait deux tonnes et son port a coûté une fortune.
Longue de 9 600 m, elle a été envoyée
en 1968 par des soldats américains de
retour du Vietnam à leurs camarades restés sur place.
Joyeux Noë
et bonne ann l
é
e!
Aujourd’hui, la carte de vœux pour fêtes
et anniversaires est une énorme industrie
mondiale qui pèse 7,5 milliards de dollars.
Sept milliards de cartes sont envoyées
chaque année. Rien qu’en Suède (neuf
millions d’habitants), on a atteint le record de 67 millions d’envois en 1995.
Depuis, avec l’avènement d’Internet et
du SMS, ce chiffre est tombé à environ
45 millions.
❆
S
S
Le Web et les boutiques
Otto est aujourd’hui le deuxième commerçant mondial en ligne derrière
Amazon. Au cours de l’année écoulée,
le VPCiste a collaboré avec Microsoft
pour moderniser son site Internet. Parmi les nouvelles fonctionnalités, on
trouve une « boutique de la mode »
dans laquelle l’internaute peut assortir divers vêtements à la mode sur un
mannequin virtuel dont il peut même
changer la couleur de la peau et des
cheveux.
Parallèlement, Otto mise sur les
boutiques et espère ouvrir par l’intermédiaire d’une co-entreprise avec
Castro Model une cinquantaine de
boutiques en Allemagne au cours des
prochaines années. C’est par le biais des
boutiques, du Net et des catalogues que
le VPCiste espère poursuivre sa course
triomphale.
❄
Une tradition qui perdure
Cher père Noël...
MÊME SI LES FINLANDAIS prétendent le contraire, le père Noël est bel et bien suédois.
S
Preuve est que chaque année, quelque 60 000 lettres qui lui sont adressées arrivent avec
force compliments, dessins et surtout listes de cadeaux. Environ un quart des lettres proviennent de l’étranger, principalement du Japon, d’Italie et d’Angleterre.
Écrire au père Noël est une vieille tradition en Suède. Il y une centaine d’années, ces
lettres parvenaient au magazine Jultomten (père Noël). Depuis sa disparition dans les années 1940, elles sont réceptionnées par l’assistant du père Noël à la poste suédoise. Tous
ceux qui lui écrivent reçoivent une réponse, même ceux qui habitent à l’étranger ou qui ont
choisi la voie électronique ([email protected]). Mais il ne faut pas oublier de préciser sa
propre adresse, sinon le père Noël ne pourra pas répondre…
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Si loin, mais si proche
Le dessinateur Neale Thomas a quitté la vie trépidante
de Londres pour une existence plus calme dans un petit
village suédois.
PAR Alexander Farnsworth ILLUSTRATION Neale Thomas
LORSQUE NEALE THOMAS est arrivé
en Suède en 1998, il a amené avec lui ses
clients de Londres et en a trouvé d’autres
dans son pays d’adoption. Tout cela grâce à Internet. « Des Londoniens me téléphonent sans même savoir où j’habite.
S’ils ne font pas attention au code d’accès international, ils croient probablement qu’ils appellent un portable. Ils ne
savent pas que je me trouve au fin fond
de la forêt suédoise, loin du stress de la
ville. »
Cet illustrateur travaille pour des
magazines professionnels et des titres
suédois et britanniques comme Renault
Revue, Aftonbladet, Management Today,
Veckans Affärer, IT User, The Guardian et
Resumé. Il dessine aussi pour BBC Magazines, VNU Publishing, Rodale Press
and Reed et d’autres groupes de presse
et agences de publicité. « Mon rôle est
de rendre intéressant quelque chose
d’inintéressant. Une photo ne faisant pas
toujours l’affaire. »
son bureau/studio et des piles de magazines illustrés, de livres d’enfants et de
BD vieilles de 50 ans. C’est là qu’il trouve l’inspiration. « Le travail ne représente qu’un quart de mon existence et non
100 % comme à Londres. Là-bas, je connaissais des gens qui dormaient sous leur
table à dessin en se nourrissant de Coca
Cola Light.
– Pour moi, il suffit que le projet soit sympa. Une fois ma journée de travail terminée, je rentre à la maison, je prépare un
bon dîner, bois un verre de vin rouge et
vais me coucher. C’est une existence
plutôt agréable. Mais à 25 ans, j’aurais
trouvé cela assommant. »
« Le travail ne représente qu’un quart
de mon existence et non 100 % comme
à Londres »
à haut débit, un Mac Powerbook et un
scanner. Ses outils naturels sont le papier et le crayon, mais il dessine aussi
directement sur ordinateur. Ses clients
reçoivent leurs commandes par courrier
électronique.
Travail à temps partiel
La famille Thomas possède un petit bout
de terrain avec une maison principale et
deux maisonnettes. Dans l’une se trouve
Neale Thomas a embrassé avec enthousiasme le mode de vie rural suédois.
Il fait des tartes avec les pommes de son
verger. Il va se promener son rejeton en
poussette. Il bricole dans la maison. Mais
il n’a pas encore tout à fait compris pourquoi les piscines municipales et même
les cinémas ferment l’été. Il trouve cela
tellement« typiquement suédois ».
S
Le salon dans le garage
Neale Thomas est un grand Anglais efflanqué et discret au visage bordé de
longs favoris. À Sörfly, un village à proximité de Kilafors dans la province du
Hälsingland, sur la côte est au nord de
Stockholm, ce trentenaire de Liverpool
détonne. En plus de son physique original, sa Jaguar de 1977 attire l’attention.
Il l’a importée d’Angleterre. « Je voulais
un salon anglais sur roues. » Dans le garage, il y a aussi une Austin importée.
L’illustrateur qu’il est ne tranchait pas
dans les milieux créatifs de Londres. À
Sörfly, il profite des avantages du télétravail. « Quand on me confiait un projet il y a 15 ans, j’allais voir le client. Une
fois terminé, j’allais le livrer personnellement. De nos jours, on se rencontre
rarement. Je n’ai vu aucun des mes clients
depuis deux ans. On me demande d’envoyer l’adresse de mon site Web. »
Aucune importance si le dessinateur
travaille en Espagne ou dans une forêt
suédoise. Neal Thomas a une connexion
Neale Thomas, illustrateur originaire du nord de l’Angleterre. A quitté Londres la trépidante pour les forêts suédoises. Pour découvrir son
travail et le personnage représenté par l’autoportrait ci-contre : www.nealethomas.net
12
sca papergram no 4 › 2005
sca papergram no 4 › 2005
13
ENTRE MOTTES ET
DIAMANTS
Vu la popularité croissante du
golf, on aurait pu penser qu’il existait un magazine pour les golfeuses
en Europe. Eh bien, non, personne n’y avait pensé avant que Red Tee
n’arrive dans les kiosques suédois et ne réussisse un hole in one.
PAR Henrik Emilson PHOTOS Red Tee et Scanpix
n’est pas uniquement le premier magazine de golf pour les femmes
en Europe, c’est aussi une « success story ». Tout a commencé par une visite
aux toilettes.
En avril 2004, Bonnie Roupé,
aujourd’hui rédactrice en chef du mensuel, et Sylvia Rönn, directrice générale
de sa maison d’édition, se retrouvent au
restaurant. Pendant que la première
s’éclipse pour aller aux toilettes, son amie
RED TEE
14
sca papergram no 4 › 2005
promène son regard sur les murs et aperçoit une photo de l’équipe de golf de l’établissement. Lorsque Bonnie Roupé retourne à table, son amie lui demande en
montrant la photo si elle voit une femme
parmi eux.
Il n’y en a pas naturellement. Elles
constatent combien le sport est dominé
par les hommes et se demandent pourquoi il n’existe pas de magazines pour les
golfeuses alors que le pays compte le plus
grand nombre d’affiliées par habitant au
monde et deux des plus grandes championnes actuelles, Lotta Neuman et Annika Sörenstam. « C’est alors que nous
avons dit en riant : lançons une revue de
golf pour les femmes ! », se souvient
Bonnie Roupé.
Deux semaines plus tard, on annonce
des suppressions d’emploi chez l’employeur de Bonnie Roupé. Diplômée en
sciences économiques de 28 ans, elle tra-
Annika Sörenstam, numéro un mondiale, est
née à Stockholm mais vit et joue aux USA.
vaille comme conseillère en management
dans le secteur des télécoms. Pour elle,
c’est un signal annonçant qu’il est temps
de changer de voie. Elle prépare alors un
plan de développement pour un magazine et entame la maquette d’un numéro
zéro. Elle n’a aucune expérience de la
presse, aucune connaissance en conception graphique ou en économie de la presse, mais elle se dit que si d’autres y sont
arrivés, il n’y aucune raison qu’elle n’y
arrive pas. Elle parvient à boucler un budget à sa manière : « J’ai étudié comment
assurer la rentabilité d’un magazine et
quel look nous voulions pour notre périodique. Puis j’ai tout simplement compté à rebours pour en arriver à la somme
finale. Nous avons adapté nos méthodes
de travail en fonction. La plupart des
journaux perdent de l’argent les trois premières années. Mais nous, nous ferons des
bénéfices dès la première. »
Il ne reste donc plus qu’à foncer ? Non,
le plus dur reste à faire. « J’ai mis six mois
pour convaincre Sylvia que mon idée était
bonne. Elle était employée dans la même
banque depuis 16 ans, avait une maison
et deux enfants. »
cier sa tenue de golf au bon sac et à la
bonne voiture (sic). Mais la vie à la rédaction n’est pas toujours une partie de
plaisir. Le premier numéro n’est sorti
qu’après des jours et nuits de travail
acharné. Bonnie Roupé n’a pris que deux
jours de vacances la première année.
« Quand on ne connaît pas d’avance le
degré de difficulté, c’est plus facile de
quitter son travail et de se lancer. Si nous
avions eu une expérience de la presse,
nous aurions su quelle somme de travail
était nécessaire. Nous ne nous serions
pas risquées alors. »
Huit numéros et 12 000 abonnés plus
tard, Bonnie Roupé et Sylvia Rönn sont
naturellement très satisfaites. Et leurs
lectrices, de 13 à 86 ans et de 0 à 36 en
handicap, le sont aussi. « Les réactions
ont été incroyablement positives. Nous
pensions que certaines seraient indi-
« Nous n’essayons jamais de surestimer
les connaissances de nos lectrices, mais
nous ne sous-estimons pas leur
intelligence non plus »
BONNIE ROUPÉ
S
Beaucoup d’abonnées
Avant même que le premier numéro ne
soit prêt, le duo crée un site Web où les
internautes peuvent s’abonner. « À la fin,
nous avions environ 3 000 abonnées, suffisamment pour financer l’impression du
premier numéro », indique Bonnie Roupé.
Red Tee est publié par la maison d’édition Anemona Nemorosa et n’est pas
soutenu par un grand groupe de presse
ou des financiers. Les deux amies ont simplement financé leur activité par un prêt
bancaire – choix qui a ses avantages.
« Quand c’est l’argent des collaborateurs
qu’on dépense, le rapport coût/performances devient tout autre. »
Le slogan de Red Tee est « Entre mottes et diamants ». Il sort dix fois par an
et combine sportivité et glamour avec des
conseils pratiques. On y trouve des reportages sur Dubaï, des accessoires de luxe
et des pages mode sur la manière d’assosca papergram no 4 › 2005
15
« Une expansion est possible en Corée du
Sud, en Allemagne, en Chine et en Espagne »
gnées parce que le magazine est plutôt
luxueux, mais nous avons montré qu’on
peut être à la fois sportive et chic. »
Le golf l’hiver
Pays froid et neigeux l’hiver, la Suède ne se prête pas du tout à un
magazine de golf. Néanmoins, Red Tee ne fait
pas l’impasse sur cette
saison. « Nous parlons
de mise en forme pendant
l’hiver. Dans le prochain numéro, nous conseillons sur plusieurs appareils de fitness. Et puis
nous abordons le sujet des voyages pour
jouer au golf », détaille Bonnie Roupé
qui a 27 en handicap et dont le club
favori est le driver. « Nous parlons
aussi d’autres sports, comme le ski.
Beaucoup de joueurs font autre chose
l’hiver. Notre magazine doit être source d’inspiration et quand on ne peut
pas jouer en plein air, on peut aimer lire
sur le sujet. »
Red Tee comprend aussi une rubrique
automobile. « D’une part, c’est parce que
Sylvia et moi nous intéressons aux voitures. D’autre part, nous pensons que
d’autres devraient s’y intéresser. Nous
avons étudié le sondage d’Orvesto sur les
centres d’intérêt des golfeuses et avons
constaté que les voitures faisaient partie
du top 10, bien avant les soins capillaires. On peut être très sportive, s’intéresser aux voitures et néanmoins se prendre pour une princesse », constate Bonnie Roupé en riant.
Les hommes viennent de Mars, les
femmes viennent de
Vénus, c’est bien connu.
C’est l’une des choses
qu’ont retenues Bonnie
Roupé en concevant Red
Tee. « Je crois que hommes
et femmes sont très différents dans au moins un
domaine : la concentration. Celle des femmes
est très diffuse, les
hommes la décriraient
certainement comme
un manque de concentration.
S
CHAQUE PAYS A SES COULEURS et règles concernant le tertre (point de départ).
Parfois golfeurs et golfeuses partent du même endroit, parfois non. Il est bon de se
renseigner à l’avance sur les règles et usages locaux.
En Suède, les tertres de départ ont quatre couleurs différentes. Le jaune est
pour les hommes, le rouge pour les femmes. En Suède, le parcours de 18 trous est
16 % plus court à partir d’un tertre rouge qu’à partir d’un jaune. Cela signifie que
les femmes sont quelques mètres devant les hommes et, pour certains trous, de
30 à 50 mètres.
Les deux autres couleurs sont bleu pour l’élite masculine et blanc pour l’élite
féminine.
sca papergram no 4 › 2005
Belles perspectives
L’avenir semble rose pour ce tandem
déterminé et sa rédaction de cinq personnes. « Nous aurons 15 000 abonnés
fin 2005 et nous voulons en avoir le
double fin 2006. Je veux qu’au moins
Les hommes et les femmes lisent dif
Point de départ rouge pour les Suédoises
16
Pour choisir les articles, elles imaginent que leurs lectrices sont des golfeuses amateurs. « Nous n’essayons jamais
de surestimer les connaissances de nos
lectrices, mais nous ne sous-estimons
pas leur intelligence non plus. »
– Mais, en tant que femme, je dirais plutôt
que nous pouvons nous concentrer sur plusieurs choses à la fois. Le golf est davantage une sortie sociale pour nous. Nous parlons beaucoup pendant que nous jouons.
Mais des enquêtes montrent que nous passons moins de temps que les hommes sur
un parcours de golf. »
C’est cette fameuse capacité multitâche ?
« Oui, en général en ce qui concerne la façon de jouer. Dans le cas d’un magazine,
cela touche la mise en page. Les femmes
ont une autre perception optique que les
hommes. Des études montrent des différences dans la vision périphérique. »
La rédactrice en chef se réfère aux ouvrages Sex differences in mathematical reasoning ability de Camilla Benbow et surtout
Pourquoi les hommes n’écoutent jamais
rien, pourquoi les femmes ne savent pas
lire les cartes routières d’Allan et Barbara
Pease. Ces auteurs affirment que les hommes se repèrent mieux dans l’espace, ce qui
leur permet de comprendre plus facilement
l’interaction entre les objets et, par exemple, de doubler plus facilement une voiture.
Selon les chercheurs, les femmes ont une
meilleure vision périphérique et sont donc
moins victimes de collisions latérales. « Tout
cela explique pourquoi une femme peut aper-
CHRONIQUE
féremment
BRUSQUEMENT, le monde bascule.
Du moins pendant quelques minutes.
Nous nous en sommes cruellement
rendus compte ces derniers temps :
raz-de-marée, ouragans et attaques terroristes ont changé radicalement notre perception des choses.
Après une catastrophe, notre première réaction est le chagrin et la colère. Puis vient l’espérance : ces catastrophes nous font prendre conscience,
certes brutalement, de la fragilité de
notre planète. Prenons l’exemple de
la Thaïlande : chaque année, près de
250 000 Suédois s’y rendent en vacances.
Phuket est devenue une péninsule
« nationale », peut-être pas géographiquement, mais mentalement. Nous
ne pouvons plus ignorer ce qui se passe en dehors de nos frontières puisque
la planète s’est restreinte et agrandie
en même temps.
À la rédaction du magazine RES,
nous continuons de recevoir des coups
de fil et des courriels de lecteurs inquiets qui se demandent : « Est-ce que
j’oserais voyager de nouveau ? Imaginez qu’un 11 septembre, un SRAS ou
un tsunami se reproduise ? »
Ces interrogations sont tout à fait
légitimes. Je me souviens de la première conversation que j’ai eue avec un de
nos reporters sur place après que le razde-marée ait déferlé sur la côte occidentale thaïlandaise. Il me disait que
soudain le paradis était devenu l’enfer
et j’avais du mal à la croire. Lorsque
j’ai commencé à réaliser la terrible vérité, j’ai senti comme une boule dans
l’estomac, j’ai tiré la couette sur ma tête
et me suis dit que si je restais pour toujours bien au chaud dans mon petit lit
à Stockholm, rien ne m’arriverait.
Ce sentiment n’a pas duré longtemps.
C’est une erreur de refuser de voyager parce que l’on croit que la planète
est devenue dangereuse. C’est aussi une
erreur de croire qu’il est plus risqué de
prendre l’avion depuis le 11 septembre :
toutes les études montrent que c’est le
contraire.
À RES, nous poursuivons notre mission qui est de parler du monde que
nous aimons. Nous pensons en effet que
les voyages nous permettent de mieux
comprendre les autres et que ces connaissances combattent les préjugés et
l’étroitesse d’esprit.
Nous n’arriverons jamais à maîtriser
la nature, nous ne sommes pas aussi arrogants. Par chance, l’être humain parvient à oublier ces tourments. Avec le
temps, nous refoulons de plus en plus
loin la mort et les catastrophes pour ne
nous souvenir finalement que des choses et moments agréables. Exemple réconfortant : aujourd’hui, plus de Suédois achètent des voyages vers la
Thaïlande qu’avant la catastrophe.
La volonté et le besoin de voyager
restent plus forts que la peur.
S
S
cevoir un cheveu sur sa veste tout en faisant
marche arrière dans la boîte aux lettres. Quand
elle ouvre un réfrigérateur, elle sait tout de
suite ce qui s’y trouve tandis qu’un homme
cherche le beurre, rayon par rayon. Même principe quand on lit un magazine : la presse
masculine respecte une structure quadrillée
que l’homme lit dans un certain ordre. La presse féminine est plus désorganisée car les femmes se lassent vite des structures quadrillées.
Elles n’ont pas besoin d’un ordre particulier
pour assimiler le contenu. »
Bonnie Roupé et ses collaborateurs ont
donc adapté le format du magazine en fonction de la manière dont lisent les femmes. Elle
s’est aussi inspirée des études sur les méthodes de lecture des femmes. « Nombreuses lisent un magazine trois fois : la première
fois, elles le feuillettent, lisent les titres et regardent les photos ; la deuxième, elles choisissent un article à lire, et la troisième, elles
lisent tout. »
Pour satisfaire à toutes ces étapes, Red
Tee passe beaucoup de temps sur les chapeaux, les légendes, les interlignes, les encadrés et les citations, ainsi que la variation de
la longueur des articles. Et la revue doit être
lisible du début à la fin, de la fin au début et à
partir du milieu. « C’est pour satisfaire les trois
méthodes de lecture. »
Pas de solution sous
la couette
PHOTO RES
S
20 % des golfeuses suédoises lisent Red
Tee. » Bonnie Roupé espère pouvoir conclure un accord avec le distributeur Tidsam pour que la vente au numéro atteigne 30 à 40 000 exemplaires. « C’est
notre rêve. »
Un autre rêve est de lancer Red Tee à
l’étranger. « Une expansion est possible
en Corée du Sud, en Allemagne, en
Chine et en Espagne. »
La réputation du magazine s’est étendue dans le monde entier et il existe un
intérêt pour une version coréenne. Dans
ce cas, le nom et le concept seraient utilisés sous licence.
Pas mal pour une idée née dans un
restaurant.
Elin af Klintberg
ELIN AF KLINTBERG
est rédactrice en chef du magazine RES
sca papergram no 4 › 2005
17
Pour faire facilement des économies, il
suffit que les imprimeries entretiennent
régulièrement leurs équipements. D’après
une étude britannique, beaucoup les
négligent.
PAR Luise Steinberger ILLUSTRATION Tomas Holmström
L’ordre source D’ÉC
LA PLUPART DES AUTOMOBILISTES
font régulièrement réviser leur voiture.
Certains le font même eux-mêmes. Rares
sont ceux qui s’en moquent totalement.
Comparés à ces saines habitudes, les
résultats d’une enquête sur les opérations
d’entretien de petites et moyennes imprimeries offset en Grande-Bretagne sont
plutôt surprenants. Les deux enquêteurs,
Tim Claypole, chercheur au centre gallois de recherche sur l’impression et le
couchage, et Nigel Wells, chef de projet
au Web Offset Champion Group, ont
procédé en deux étapes : d’abord une liste de 60 questions sur Internet, puis 20
entretiens avec des sociétés triées sur le
volet. Leurs interlocuteurs faisaient souvent partie de la direction de l’entreprise. « Il s’avère que la plupart des imprimeries employant 50 à 100 salariés n’ont
pas de programme de maintenance particulier et n’ont pas non plus de collaborateurs spécifiquement embauchés pour
cette mission, indique Tim Claypole. Les
entreprises employant plus d’une centaine de salariés disposent plus souvent d’un
spécialiste, mais ce n’est pas toujours le
cas. »
Gros avantages
L’étude montre aussi que les responsables sont conscients de l’utilité d’avoir un
professionnel à leur disposition. Ceux qui
procèdent à une maintenance systématique ont constaté qu’elle leur apporte de
gros avantages. « Les patrons ont l’impression que les arrêts de production sont
18
sca papergram no 4 › 2005
moins nombreux, poursuit le chercheur.
Leurs employés font plus attention à leur
matériel. Ils connaissent mieux les performances et les capacités des machines.
En plus, on économise des consommables puisqu’on sait mieux comment doser l’encre, par exemple, et on commence avec le temps à avoir une bonne idée
des pièces de rechange à avoir en stock
en permanence. »
Selon l’étude, les imprimeries les
mieux entretenues enregistrent 90 %
d’arrêts de production en moins, 60 à
70 % de production en plus, 60 % de
déchets de papier en moins et 63 % de
qualité en plus.
Bien entretenues, les presses tournent
plus vite et leurs vitesses d’impression et
de finition sont supérieures, conclut
l’étude.
Changements déconseillés
Tim Claypole distingue trois stratégies
de maintenance. La technique de l’arrêt :
on fait tourner les machines jusqu’à ce
qu’elles lâchent. Quand c’est le cas, on
les répare. Deuxième technique, celle de
la restauration : on procède à des améliorations lors des opérations de réparation. Enfin, troisième démarche, la maintenance préventive aux interventions
régulières pour éviter les arrêts.
Tim Claypole souligne que la troisième option n’est pas toujours la meilleure du fait qu’elle est plus onéreuse. Le
risque est de changer trop souvent les
pièces. Et de montrer la courbe de vie
type de la plupart des produits et pièces
de rechange qui révèle un risque supérieur de défaillance peu après la mise en
service d’une pièce. Une fois la période
critique passée, elle remplit son rôle avec
fiabilité pendant longtemps avant que le
risque d’avarie ne recommence à s’intensifier. « Ceux qui changent trop souvent
les pièces ne parviennent jamais à la phase de fiabilité et restent coincés au début
[de la courbe], là où les pièces courent un
risque permanent de lâcher. »
Le chercheur cite l’exemple d’un fabricant d’électronique ayant le sens de la
longévité : « Il laisse tourner ses ordinateurs pendant 48 heures avant de les
CONOMIES
De l’importance des odeurs
Selon les deux chercheurs, une maintenance efficace dépend beaucoup de
l’intervention active des opérateurs de
machine. Tim Claypole énonce cinq
domaines d’observation permanente : les
performances (redoublement de la vigilance dès que la qualité baisse), l’analyse
sensorielle (changement d’odeur, variations thermiques, bruits inhabituels), le
Cinq conseils de maintenance
L’industrie de l’impression est très automatisée : moins de collaborateurs, plus de travaux,
diminution des délais. Les presses sont rarement à l’arrêt. Pourtant, c’était généralement
à ce moment-là que l’opérateur faisait le tour de sa machine avec sa burette d’huile. Nigel
Wells et Tim Claypole recommandent donc les pratiques suivantes :
• Planifier une maintenance régulière ;
• Étudier les avantages de techniciens d’entretien (positif : la maintenance devient une
priorité ; négatif : les autres collaborateurs s’impliquent moins) ;
• Réunir les équipes pour découvrir défaillances et écarts en comparant les observations ;
• Contrôler régulièrement, mais pas trop de choses en même temps sous peine de ne
pas pouvoir évaluer les résultats. Choisir quelques éléments clés ;
• Ne pas utiliser de produits de nettoyage polluants.
S
emballer pour livraison. Pendant cette
période, les exemplaires défectueux cessent de fonctionner alors que les autres
dépassent la première phase critique et
arrivent à la phase de fiabilité. »
sca papergram no 4 › 2005
19
Nigels Wells, chef de projet au Web Offset Champion Froup, et Tim Claypole du centre gallois de
recherche sur l’impression et le couchage.
20
sca papergram no 4 › 2005
SCA a opté depuis longtemps pour la maintenance planifiée et systématique de ses machines à papier. L’expérience accumulée dans ce
domaine peut aussi servir aux imprimeries.
S
Planifier la remise en route : souvent,
une nouvelle équipe arrive lorsque la
machine redémarre. Il est indispensable que ceux qui prennent le relais sachent ce qui a été fait et comment;
S
Le secret de la réussite
Quelques conseils de Hans Pettersson :
Consigner tout : au bout de quelques
mois, personne ne se souvient plus de
ce qui a été fait. Adopter des règles
uniformes que tous les collaborateurs
comprennent ;
S
Investissement rentable
Selon Lennart Thorén, responsable de
la maintenance, la stratégie consiste à
assurer la disponibilité maximale des
équipements de production en pratiquant une maintenance préventive et
corrective. « Tout le monde participe
au processus de décision. » Chacun
assume une tâche, mais veille aussi au
processus dans son ensemble, ajoutet-il. « Nous attachons beaucoup d’importance à la coopération entre la production et la maintenance. L’objectif
est de procéder à des améliorations
permanentes. »
Les analyses des temps d’arrêt, élément clé du travail de maintenance,
sont à la base des changements qui
améliorent les fonctions ou réduisent
les besoins en maintenance d’une machine.
Hans Pettersson ajoute que, grâce
à la maintenance, les machines fonctionnent avec fiabilité et les arrêts intempestifs sont beaucoup moins nombreux. Il estime que le groupe n’a pas
à regretter les sommes élevées qu’en-
gendre l’arrêt d’une machine en bon état.
À la longue, ces arrêts planifiés reviennent
moins cher que les mesures d’urgence non
prévues.
Utiliser volontiers un système d’exploitation et d’information, pas un cahier de maintenance. Avec un système
commun, on peut améliorer les interventions du personnel d’exploitation
et celui de maintenance. On peut aussi voir les écarts de productivité, ce qui
facilite la chasse aux coûts ;
S
près de Sundsvall, en Suède, planifie
des arrêts réguliers au cours desquels
le personnel passe en revue les machines, contrôle et change des pièces selon le programme de maintenance prévu. Si nécessaire, on fait appel aux experts du fournisseur. SCA préfère éviter la sous-traitance : « Cela a un effet négatif sur le contrôle et les connaissances », estime Hans Pettersson,
responsable développement de la papeterie d’Ortviken.
Analyser systématiquement : contrôler toujours l’origine d’une défaillance,
ne pas se contenter de corriger les symptômes. Les rapports sur les défaillances
précédentes peuvent éclairer ;
S
LA PAPETERIE SCA D’ORTVIKEN,
S
S
Entretien conseillé
Le vieil adage « nettoyer, contrôler et
régler » a toujours du bon, estime
Nigels Wells. « Même si le nettoyage
en lui-même n’entre pas dans la maintenance, il est néanmoins essentiel que
la machine soit toujours propre, sinon
on ne détecte pas les changements. De
plus, une lubrification et un contrôle
réguliers sont de bons moyens de bien
connaître les entrailles de la machine
et de découvrir tout de suite si quelque
chose ne va pas. »
Autre condition importante, la direction doit fournir à ses collaborateurs
temps, formation et encouragement
pour qu’ils se consacrent à la maintenance.
Arrêts planifiés
N’adopter pas de codes trop détaillés
car une recherche dans une banque de
données risque d’exclure des informations importantes pour l’analyse ;
S
r
contrôle des vibrations, de la température et de la lubrification. « Il est
essentiel que les opérateurs écoutent,
sentent et touchent si quelque chose
leur paraît insolite. Ce sont eux qui
connaissent le mieux leur presse. »
Ils ont de bons moyens à leur disposition : capteurs infrarouge, scanners à
ultrasons, caméras de thermographie et
outils numériques de surveillance comme les Webcams qui peuvent être connectées au fournisseur de l’équipement
pour lui permettre d’aider à contrôler
les défaillances. Ainsi, un imprimeur
propriétaire d’un tel système demande
un jour au fournisseur de la machine si
celle-ci a besoin d’une maintenance
particulière. La réponse ne s’est pas faite attendre : « Arrêtez immédiatement
la machine ! Le tableau de commande
est en train de griller ! ».
Donner des priorités.
PAR Henrik Emilson
TENDANCES
Les journaux d’affaires
perdent des lecteurs
INFOS ET BILANS
S
Impression
bactériophile
DEPUIS PLUS de 600 ans, on im-
À LA PLAGE, dans le bus, on voit des hommes et femmes qui inscrivent des chiffres compris entre 1 à 9 dans
une grille. Depuis que le Times de Londres a publié des
grilles de sudoku à l’automne 2004, le phénomène s’est
répandu partout et c’est devenu le jeu de l’année 2005.
À l’heure actuelle, tous les quotidiens qui se respectent
publient une grille de sudoku à côté de celle des mots
croisés. Pour ceux pour qui cela ne suffirait pas, il existe
aussi des compilations de grilles qui se vendent particulièrement bien au Danemark. Au palmarès des dix ouvrages spécialisés les plus vendus ne figurent que des livres de sudoku.
Selon l’Universal Press Syndicate qui a commencé
à fournir des grilles aux quotidiens en mai 2005 et compte
déjà 250 clients, les rédacteurs trouvent que l’engouement pour le sudoku est un moyen idéal d’attirer de
nouveaux lecteurs.
Reste à voir s’il s’agit d’une tendance de plus ou si
ce jeu va engendrer la même fidélité que les mots croisés, par exemple.
QUE DU NOUVEAU À L’OUEST
LORS DES PREMIÈRES attaques de l’alliance emmenée par les
USA en Irak, on a beaucoup parlé de journalistes « embedded » (intégrés), seuls habilités par le Pentagone à suivre les troupes au combat.
Un autre terme est né pendant le conflit au cours d’autres engagements : « hotel journalism », le journalisme d’hôtel pratiqué par ceux
étant empêchés ou ayant peur de s’approcher du cœur de l’action. Au
lieu d’être sur le terrain, ils parlent de la situation telle qu’elle leur est
rapportée par leurs contacts au sein de la population locale.
De nouveaux blogs ont aussi fait leur apparition, les milblogs. Comme les autres journaux de bord publiés sur Internet, ils sont aussi écrits
par des particuliers. Mais ceux-ci ne sont pas des civils, ce sont des
militaires. Des milliers de soldats américains, dont 200 stationnés en
Irak, racontent leur quotidien sur le Net. Un événement résumé en quelques lignes par le Pentagone peut faire l’objet d’un long chapitre dans
un milblog rédigé par un soldat qui l’a vécu en première ligne. Ces
écrits sont diffusés au grand dam du ministère de la Défense US qui
préfèrerait contrôler toute l’information
relative à la guerre.
S
S
prime du texte et des illustrations
sur du papier. Maintenant, on y
estampille aussi des bactéries vivantes. Des chercheurs de
l’université de Harvard aux USA
ont mis au point une presse spéciale pour bactéries pour observer comment ces micro-organismes s’influencent mutuellement.
Parfois, ils forment des colonies
poisseuses qui adhèrent sur diverses surfaces. Ainsi groupés, ils
résistent davantage aux antibiotiques.
Grâce à cette presse, on peut
apposer des bactéries sur diverses surfaces et étudier leur regroupement. Le résultat peut contribuer à éviter les nouvelles maladies
et à purifier les matières.
Gymnastique
intellectuelle
S
plus rapides, actualisation des indices et
cours de la bourse toutes les deux minutes
sont quelques-unes des
raisons qui expliquent
la popularité des journaux d’affaires suédois
sur le Net.
Le tout dernier à
faire son apparition sur
la Toile est le quotidien
Svenska Dagbladet (SvD)
qui a transféré sa couverture de l’économie
de son site habituel au
nouveau site N24. Entre mai 2004 et mai 2005, sa fréquentation a
grimpé de 90 %, affirme le magazine Dagens Media.
Le nombre de visiteurs individuels du site de son concurrent
Dagens Industri (DI) a presque doublé ces trois dernières années. Parallèlement, la version papier de ces titres a chuté de 13 % pour DI et
de 6 % pour SvD.
Le temps que les particuliers consacrent aux médias en une journée reste le même, c’est le choix des médias qui change. Le problème,
c’est qu’un lecteur sur papier est plus intéressant au niveau des
recettes qu’un internaute.
Milblogs
www.milblog.org
www.thedonovan.com
www.blogsofwar.com
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C’est grâce à l’écrit que les religions ont diffusé au cours des
siècles leur message dans la pierre, sur la peau d’animaux,
sur le papier et même sur le squelette de dromadaires.
PAR Anne Rentzsch PHOTOS Stockbyte et Pressens Bild
« Heureux celui qui lit » écrit saint Jean
dans l’Apocalypse, à la fin du Nouveau Testament. Le nom du Coran, le livre sacré des
musulmans, dérive de l’arabe al- Qur’an,
qui signifie la lecture, la récitation déclamatoire.
La transmission du message par la lecture joue un rôle central dans bon nombre de religions, en particulier chez les
juifs, les chrétiens et les musulmans. « À
la base de ces trois religions sont des faits
historiques que l’on raconte et transmet
dans l’optique d’atteindre autant de gens
que possible », estime Thomas Söding,
professeur de théologie biblique à l’université de Wuppertal, en Allemagne.
Dans le judaïsme, les textes sacrés
sont, en plus, restés pendant des siècles
le point d’ancrage d’une stratégie de survie destinée à préserver l’identité religieuse du peuple juif. La Torah, qui regroupe les cinq premiers livres de la bible hébraïque, est au cœur de la foi juive.
Ce regroupement systématique des textes a eu probablement lieu au cours du
6e et 7e siècles avant notre ère. La Torah
n’était pas inscrite dans la pierre ou dans
le bois, mais sur des rouleaux de cuir, une
solution adaptée à sa diffusion car facile
à emporter avec soi en voyage.
Cherté du parchemin
À partir du 2e siècle avant notre ère, les
textes sacrés sont consignés sur du parchemin. Cette peau d’animal spécialement préparée était cher, mais résistait
plus longtemps que le papyrus dont se
servaient les Égyptiens depuis le 2e millénaire.
Ce nouveau message révolutionnaire,
prônant l’amour de Dieu et des hommes,
a rapidement fait des émules, en particulier au sein des masses incultes. « Ce
n’est pas un hasard si les premiers chrétiens se sont servis du papyrus au début
du 2e siècle pour propager leurs textes,
indique le professeur Söding. Le format
convivial d’une liasse de feuilles reliées,
le premier exemple de format livre et
brochure que nous connaissions, était
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Le papier sacré
ou l’art de narrer
une religion
certes moins prestigieux que les rouleaux
de parchemin, mais beaucoup plus rentable. Ce n’est que lorsque le christianisme a été bien implanté que les coûteuses
éditions reliées en parchemin se sont popularisées. »
C’est au 6e siècle de notre ère que l’islam s’est imposé. Selon la tradition, Dieu
a transmis son message directement à
Mohammed. Ses révélations ont été inscrites sur l’omoplate de squelettes de dromadaire, sur des peaux d’animaux et des
tablettes en pierre. À la mort du prophète, ces écrits ont été réunis dans le Coran.
À l’inverse de la Bible, le Coran est considéré comme la parole directe et textuelle
de Dieu. Il est interdit d’en faire l’exégèse. Les traductions faites de l’arabe
d’origine sont d’ailleurs traitées avec
méfiance.
Le papier arrive en Europe
Entre le 6e et le 9e siècles sortent les premiers Corans reliés en parchemin. Dès le
8e siècle dans le monde musulman, le papier éclipse le parchemin et le papyrus.
Ce sont les Chinois faits prisonniers
pendant les guerres de conquête des musulmans qui leur enseignent les secrets de
la fabrication du papier. Le spécimen de
papier le plus ancien jamais découvert
est d’ailleurs originaire de la Chine et
date de 180 à 50 ans avant notre ère. Avec
le papier se développe une culture de
l’écrit florissante dans les pays arabes.
Il faudra attendre le 12e siècle avant
que le matériau arrive au Maroc et en
Espagne, postes les plus avancés de l’islam à l’ouest. Le secret de sa fabrication
se propage dans l’Europe chrétienne,
probablement par l’intermédiaire des
juifs ayant fui les persécutions de Xativa, près de Valence, et installés dans le
nord-est de l’Espagne où ils commencent à en fabriquer au 13e siècle. Le nouveau matériau ouvre la voie à l’imprimerie. La découverte de Johann Gutenberg en 1446 révolutionne l’édition.
Grâce à ces deux moyens, on fabrique
en série des livres à un prix abordable et
la Bible remporte un succès triomphal.
Elle est aujourd’hui le livre le plus répandu au monde. « Pour propager un
message religieux, on s’est toujours servi des méthodes les plus modernes de
l’époque, rappelle Thomas Söding. Les
nouveaux médias comme Internet ne
font pas exception. »
Aujourd’hui, lorsque les juifs veulent
laisser un message dans le mur des
« Pour propager un message religieux, on s’est
toujours servi des méthodes les plus modernes
de l’époque. Les nouveaux médias comme
Internet ne font pas exception »
THOMAS SÖDING
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Dans la plupart des religions, on lit les textes sacrés
depuis un endroit bien précis du lieu de culte.
lamentations de Jérusalem, ils envoient
un fax ou un message électronique. Les
chrétiens modernes téléchargent le passage du jour de la Bible et les musulmans
s’envoient mutuellement des prières par
Internet.
Toutefois, le papier a conservé son
rôle de messager. « La Bible, le livre des
livres, doit pouvoir être tenue en main,
précise le professeur Söding. On doit
pouvoir la toucher et la sentir. À l’église, elle doit reposer sur l’autel et sur le
pupitre pour que tous les fidèles voient
dans quel livre lit le prêtre. »
Nouveau
u groupe cible : les jeunes
quadras
Est-il vraiment sage de lancer un
magazine de près de 300 pages à
l’ère d’Internet et de la télévision
par câble ? L’un des grands
quotidiens d’Italie a osé.
Et fait recette.
PAR Kristina Wallin PHOTO Pressens Bild
Les adulescents sont des trentenaires et quadragénaires dont le style de
vie et les goûts sont les mêmes que ceux des adolescents.
temps des hebdomadaires ou des mensuels avec certains quotidiens. Cependant, la diffusion de l’épaisse revue XL
avec La Repubblica a tout d’une nouveauté.
Le groupe cible, par exemple. Les jeunes certes, mais aussi les moins jeunes,
les adulescents (contraction d’adultes et
d’adolescents) en fait. Le magazine est
très glam comme Vanity Fair ou Vogue.
Tous les grands couturiers y passent de
la publicité. Sa maquette aux lignes harmonieuses est presque révolutionnaire
comparée aux vrais magazines pour les
jeunes qui ressemblent à des clips vidéo.
« Naturellement, nous essayons d’attirer les jeunes lecteurs vers La Repubblica
avec XL, reconnaît son rédacteur en chef
Luca Valtorta. Mais ce n’est pas un magazine pour les jeunes traditionnel. »
Le journaliste a été contacté il y a un
an quand l’idée de la revue est née au sein
de la rédaction magazines de La Repubblica. Son brief : faire le mensuel qui l’intéresserait personnellement. « Nous
nous adressons à un public jeune, mais
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EN ITALIE, on distribue depuis long-
Spécial Johnny Depp
Même la mise en pages est conçue pour
attirer les jeunes lecteurs : aérée, directe, faisant la part belle aux photos.
« C’est le résultat de notre quête d’une
maquette ‘simple’ », indique Gianni
Mascolo, directeur artistique de tous les
suppléments de La Repubblica.
Ce choix marque tout le magazine,
mais chaque rubrique a son propre style.
La police de caractères semble toute nouvelle, mais Gianni Mascolo a des révélations à faire à ce sujet : « C’est ce que
disent beaucoup de gens. Le plus amusant, c’est que je suis allé chercher une
vieille police qui me fait presque penser
à d’anciennes revues pour architectes
Un grand magazine
Choisir Johnny Depp a été une idée de
génie, affirme Gianni Mascolo. « Tout
le monde l’aime, les jeunes comme les
vieux, les hommes comme les femmes.
La fascination qu’il exerce fait décoller
tout le magazine. La couverture du
premier numéro était extrêmement importante : c’est pourquoi nous avons
choisi le thème et l’image avec soin. »
Ce numéro s’est vendu à un demi-million d’exemplaires et a même dû être
réimprimé. « Nous ne nous attendions
pas à un tel succès, souligne son rédacteur en chef. Mais même si l’on ne peut
pas espérer le même tirage pour les prochains numéros, celui-ci a montré qu’il
PHOTO La Repubblica
sur un ton adulte, constate Luca Valtorta qui a 41 ans. Au niveau du contenu,
je suis parti de mes propres centres d’intérêt. »
Il parle de « kidadults », terme imaginé par le chercheur américain Ethan
Watters pour désigner la génération actuelle des trentenaires et quadragénaires.
Ces adulescents jouent toujours à
la Playstation et se jettent sur tous les
nouveaux gadgets technologiques (genre iPod).
tellement elle est droite : c’est DIN. »
Le directeur artistique de XL se définit lui-même comme un graphiste journaliste. Pour lui, le plus important n’est
pas que la mise en pages soit esthétique,
mais qu’elle mette en valeur le contenu
journalistique.
Le mensuel est partagé en dix rubriques : Top du mois, Monde, Glam,
Musique, Courants culturels, Techno,
Style, BD, Libre-service et Réactions.
Certaines d’entre elles comme Top du
mois et Libre-service ont beaucoup de
photos et peu de texte. D’autres comme
Glam et Courants culturels sont de longs
reportages de fond. « L’idée, c’est que
chacun trouve chaussure à son pied,
explique Luca Valtorta. C’est pourquoi
on y trouve de tout, du dernier morceau
à télécharger sur Internet à l’approfondissement de certains sujets. »
Le premier numéro avait pour thème
Johnny Depp avec, à la clé, un entretien
privé et un article sur sa compagne
Vanessa Paradis, une petite interview du
metteur en scène Tim Burton qui a travaillé plusieurs fois avec lui, un long
article sur sa carrière, des commentaires
recueillis auprès d’une longue série
de personnalités italiennes, etc. Rien à
voir avec les articles que l’on trouve
normalement sur les stars dans le reste
de la presse.
« C’est un mensuel fait sur mesure
pour moi et par moi »
LUCA VALTORTA
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Avec XL, Luca Valtorta a réalisé son
rêve : un magazine comme il aurait souhaité en lire. « C’est un mensuel fait sur
mesure pour moi et par moi, acquiescet-il en riant. Mais pour ne pas disparaître, nous devons toujours aller de l’avant
et évoluer. C’est pourquoi nous tenons
compte des réactions des lecteurs. Dans
le deuxième numéro, on a quasiment
présenté que des lettres critiques pour
faire comprendre aux lecteurs que nous
sommes vraiment ouverts à leurs opinions et au changement. »
S
existe un créneau pour ce type de magazine. Et que le prix est suffisamment
abordable pour que tout le monde ait les
moyens de l’acheter. »
Le premier numéro coûtait un euro
et les suivants deux à peine. C’est un
prix peu élevé pour un mensuel « extra
large ». Il mesure 24,5 x 31,5 cm, soit
un peu plus qu’une feuille de format A4.
« Concevoir un vrai grand magazine est
un élément de notre stratégie visant à
faire quelque chose de nouveau et de différent, explique Gianni Mascolo. Nous
avons déterminé le format de XL avec
notre service technique pour qu’il soit
imprimable sans trop de problèmes. »
Les photos sont choisies avec le plus
grand soin. C’est l’une des décisions qui
« Je suis allé chercher une vieille
police qui me fait presque penser à
d’anciennes revues pour architectes
tellement elle est droite : c’est DIN »
GIANNI MASCOLO
Faible traitement des photos
« 80 % de nos photos sont numériques
et nous recevons souvent des clichés techniquement très médiocres qui ne sont pas
imprimables. C’est pourquoi nous testons toutes les photos avant de les valider. Le problème, ce n’est pas la qualité
des appareils photos numériques, mais
ceux qui retouchent les photos chez les
agences de presse et qui ne savent pas du
tout s’y prendre. »
PHOTO La Repubblica
prend le plus du temps, d’après le directeur artistique : d’une part, il est parfois
difficile d’obtenir une bonne photo,
d’autre part, la qualité pose problème.
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Rudolph hante les forêts de SCA
PAR Luise Steinberger PHOTO O. Källström/Norrlandia ILLUSTRATION Tomas Holmström
S
LES ENFANTS savent que c’est l’un des plus proches collaborateurs du père Noël. Il s’appelle Rudolph et c’est lui qui tire
le traîneau chargé de cadeaux. Bien sûr qu’il existe... même si
la majeure partie des 230 000 rennes de Suède ne sont pas
concernés par les fêtes de fin d’année et qu’ils sont élevés par
les Sames (Lapons), pas par le père Noël.
L’hiver n’est pas une saison facile pour les rennes. Ils
redescendent des pacages vers les sapinières et grattent
le sol gelé ou inspectent les troncs pour trouver le lichen
terricole et corticole dont ils se nourrissent.
Les rennes ne mangent pas les pousses d’arbre. Mais
parfois le pâturage d’hiver peut être source de conflits
entre éleveurs et propriétaires forestiers car les cervidés en
quête de nourriture piétinent les petits plants sous la neige.
La croûte de neige peut être dure, surtout dans les grandes
coupes claires, et le lichen difficile à trouver.
Pour éviter tout conflit, SCA, qui possède de
nombreux hectares de forêts dans le nord de la Suède,
coordonne ses activités avec les Sames. Les coupes sont
planifiées pour gêner le moins possible les terrains de parcours
des rennes et l’accès aux lichens.
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