1 - L`Enass

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l’Enass
Ecole nationale d’assurances
L’assurance des PME à l’international
Globalisation des PME françaises :
intérêts, enjeux et contraintes pour les
assureurs non vie
RAULINE Pascale
Ecole nationale d'assurances
REMERCIEMENTS
Mener de front plusieurs vies pendant 18 mois ne fut pas un long fleuve tranquille. Ce défi a été possible
grâce à mes proches, que je remercie pour leur patience et leur accompagnement tout au long de cette
aventure.
Je remercie également vivement :
-
mes collègues qui ont assumé le travail quotidien en mon absence et m’ont encouragée.
-
tous les interlocuteurs qui ont accepté de se prêter au jeu des questions-réponses et ont partagé
leur pratique quotidienne des problématiques internationales d’assurance pour me permettre de
réaliser ce travail.
-
mes relecteurs pour leur attention et leurs remarques
-
mon tuteur pour ses critiques toujours positives et ses conseils tout au long de ce travail.
L’assurance des PME à l’international
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SYNTHESE
Des entreprises de plus en plus petites se développent ou s’implantent à l’étranger sous l’effet de la
mondialisation de l’économie. Les Entreprises de taille Moyenne du segment des PME et les entreprises
de Taille Intermédiaires constituent un segment attractif pour les assureurs, celui EMTI.
Les EMTI représentent une part significative de l’économie française (37 % du CA, 41 % des
exportations). Celles qui s’orientent vers l’international se caractérisent par une capacité d’innovation et
de croissance nettement supérieure à leurs pairs domestiques. Elles constituent une cible stratégique
pour le secteur de l’assurance de 27 600 entreprises dont l’encaissement IARD est estimé à 300 M€ en
2009.
Si ces entreprises exportent puis s’implantent à l’étranger comme les grandes entreprises, elles n’ont pas
les mêmes ressources notamment en termes de gestion des risques et d’expérience sinistres. De ce fait,
elles ont besoin de beaucoup plus d’accompagnement et de services que les grandes entreprises.
Comment les assureurs non vie peuvent-ils répondre aux besoins d’assurance des EMTI qui
s’internationalisent ?
Pour accompagner leurs clients à l’étranger, les assureurs français doivent faire face à une triple
contrainte :
- une contrainte réglementaire : un assureur doit avoir un agrément pour effectuer des opérations
d’assurance dans le pays du lieu de risque. A défaut, il s’agit d’assurance non admise.
- une contrainte juridique car les parties doivent respecter les obligations locales.
- une contrainte fiscale dans la mesure où les taxes doivent être calculées en fonction du lieu de
risque.
A défaut de respecter l’une ou l’ensemble de ces contraintes, les parties s’exposent à des sanctions
parfois fort onéreuses.
La mondialisation de l’économie n’a pas entraîné la libéralisation des opérations d’assurance qui reste
limitée géographiquement et parcellaire, même au sein de l’Union Européenne. De ce fait, les assureurs
doivent émettre des polices locales qui font partie d’un programme intégré ou d’un programme coordonné.
Pour cela, les assureurs utilisent leur propre réseau ou passent par l’intermédiaire de partenaires
fronteurs.
Si cette offre est techniquement adaptée aux besoins d’assurance des EMTI, elle requiert de lever les
freins qui existent chez les différents acteurs. Elle requiert également la mise en œuvre d’une solution
permettant une gestion plus standardisée que celle des grandes entreprises grâce à une équipe avec des
compétences tant en matière de PME qu’à l’international. Enfin, la maîtrise de qualité et la fluidité de la
circulation de l’information sont également des éléments clé.
La construction d’une offre adaptée au segment des EMTI implique d’intégrer les attentes de
intermédiaires qui connaissent l’international tout en accompagnant ceux qui maîtrisent moins ou pas du
tout le sujet. Les EMTI attendent des contrats simples et fiables, et sont sensibles à une offre packagée.
Ce marché est un relais de croissance pour les assureurs positionnés sur les grands comptes et une
source de diversification pour les assureurs orientés vers les entreprises purement domestiques. Dans un
marché français de l’assurance non vie très mature, il serait dommage de ne pas répondre aux attentes
d’un segment dynamique.
Mots clé : international – non admis – programme – mondialisation – assurance d’entreprises - PME
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ABSTRACT
Driven by the globalization of the economy, increasingly smaller companies expand their activities or set
up subsidiaries abroad. Middle-Size Enterprises from the SME category and Intermediary Size
enterprises, collectively the “MEIS” (EMTI) are an attractive target for the non-life insurance industry.
The MEIS account for a large share of the French economy (37 % of the overall turnover, 41 % of
exports). Those enterprises which go abroad stand out as having a higher innovation capacity as well as
higher growth rates compared to their domestic peers. These businesses are a strategic target for the
insurance industry with 27,600 enterprises which gross written premium was estimated at 300 M€ in 2009.
Although these enterprises export and set up subsidiaries abroad in the same way as large companies do,
they do not have the same resources, in particular in terms of risk management aspect and claims
experience. Consequently, they require more advice.
How can non-life insurers meet the insurance needs of MEIS going global?
In order to assist their assureds abroad, French insurers face three issues:
-
regulatory limitations: an insurer must be licensed in the country where the risk is located. It will
otherwise have to operate on a non-admitted basis.
a legal framework as stakeholders must abide by compulsory local obligations,
a tax issue as taxes have to be calculated according to the location of the risk exposure.
The failure to fulfill one or several of the above limitations will expose stakeholders to potentially costly
sanctions.
The globalization of the economy has resulted in limited liberalization of insurance operations even within
the European Union. Accordingly, insurers must issue local policies that are part of a controlled program
or a coordinated one. To this effect, insurers use their own network or fronting partners.
Global programs are technically adapted to the insurance needs of the MEIS however stakeholders may
be reluctant to implement them. They also require the implementation of a more standardized policy
administration than that of large enterprises. This can be achieved thanks to a dedicated team with
expertise both in SME and international issues. Finally, quality and timely information are one of the keys
to success.
A condition for an offer to meet the needs of the MEIS is that the expectations of the intermediaries with
international experience and those with little or no such experience are both met. Assureds seek simple
and reliable policies, ideally in the form of packaged policies.
This market offers growth opportunities for insurers who already deal with large international enterprises. It
is also an opportunity for insurers focused on purely domestic enterprises to diversify their business. In a
mature market such as the French one, it would be a shame not to respond to the needs of such a
dynamic segment.
Key words: international – non admitted – global program – globalization – Middle Market P&C insurance
- SME
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SOMMAIRE
SYNTHESE................................................................................................................................................... 3
INTRODUCTION ........................................................................................................................................... 6
1ère partie - La mondialisation des Entreprises Moyennes et de Taille Intermédiaire (EMTI) et son
impact sur le marché de l’assurance......................................................................................................... 8
1.
EMTI et grandes entreprises : y a-t-il une différence d’approche du point de vue de l’assurance ? 9
2.
Quels sont les besoins d’assurance à l’international des EMTI ? .................................................. 21
3.
Les acteurs du marché de l’assurance :......................................................................................... 25
Ce qu'il faut retenir ...................................................................................................................... 30
2ème partie - La mondialisation du marché de l’assurance suit-elle celle de l’économie : les
contraintes rencontrées par les assureurs ?.......................................................................................... 31
1.
Un environnement réglementaire fortement contraignant : ............................................................ 32
2.
Les contraintes fiscales : la taxe sur les polices d’assurance (TPA).............................................. 43
3.
Va-t-on vers une libéralisation des opérations d’assurance ?........................................................ 47
Ce qu'il faut retenir ...................................................................................................................... 55
3ème partie - Comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ? ........................ 56
1.
L’offre existante est-t-elle adaptée aux EMTI ? .............................................................................. 57
2.
L’importance du réseau de l’assureur : les différents modèles de développement. ...................... 66
3.
Comment faire évoluer l’offre de contrats :..................................................................................... 73
Ce qu'il faut retenir ...................................................................................................................... 84
CONCLUSION............................................................................................................................................ 85
TABLE DES MATIERES ............................................................................................................................ 87
LEXIQUE .................................................................................................................................................... 90
BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................... 91
ANNEXES................................................................................................................................................... 97
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INTRODUCTION
La mondialisation, c'est-à-dire le développement des liens d’interdépendance entre les activités
humaines, a profondément transformé l’économie.
Embryonnaire dans les années soixante, la mondialisation parfois aussi appelée globalisation, s’est
accélérée sous l’effet conjugué :
-
de réformes économiques : en particulier l’Uruguay round, achevé en 1993, qui a donné
naissance à l’OMC1. Les différents accords internationaux et la réduction des barrières
douanières ont été un formidable accélérateur des échanges mondiaux ;
-
de réformes politiques : chute du mur de Berlin (1989) et disparition du bloc soviétique,
élargissement de l’Union Européenne (1986 et 2004). Très peu de pays sont aujourd’hui
hermétiquement fermés aux autres, comme la Corée du Nord ;
-
du développement… des conteneurs. La standardisation du conditionnement des biens
transportés et des infrastructures de logistiques a également joué un rôle de facilitateur dans les
échanges. Aujourd’hui, 90 % des exportations hors vrac sont conditionnées en conteneurs2 ;
-
enfin, la croissance exponentielle des outils de communication, en premier lieu internet, est un
autre vecteur de développement des échanges internationaux.
Dans les années soixante-dix, seules les très grandes entreprises s’internationalisaient. A la recherche
d’économies d’échelle et/ou de nouveaux marchés, elles ont investi en dehors de leur marché
domestique. La réduction des barrières à l’entrée d’un nouveau marché a permis à des entreprises de
taille de plus en plus petite de suivre le mouvement.
Ce travail ne porte pas sur les grandes entreprises. Ces dernières sont mondialisées depuis plusieurs
décennies et leur stratégie d’achat d’assurances l’est tout autant. Les entreprises qui nous intéressent
sont les PME*, et plus précisément une partie d’entre elles que nous allons définir.
Il existe plusieurs critères de segmentation des entreprises, notamment l’effectif, le chiffre d’affaires, la
valeur ajoutée, le total du bilan ou le montant des exportations. L’approche peut également se faire par
unité de production ou par groupe.
La Directive Européenne 2003/361/CE définit les PME sur la base de deux critères :
-
le chiffre d’affaires : compris entre 2 M€ et 100 M€,
-
l’effectif : compris entre 20 et 500 salariés.
La définition de la Directive Européenne laisse encore tout un champ d’entreprises hors du segment. Il
s’agit notamment des entreprises dont le chiffre d’affaires excède 100 M€ mais qui sont pas considérées
comme des grandes entreprises du fait de leur effectif ou de la taille de leur bilan. De même, cette
approche comprend d’autres entreprises, les plus petites, qui n’ont pas encore nécessairement atteint la
taille critique pour se développer à l’international. Aussi, les critères de la Loi de Modernisation de
l’Economie (LME, d’août 2008) sont-ils plus pertinents.
1
L’OMC compte aujourd’hui 153 membres.
Lloyd’s 360° Insight, « Globalisation and risks for business », 2010.
* voir lexique.
2
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Les entreprises sont classées en fonction du chiffre d’affaires, du total de bilan et de l’effectif :
-
micro entreprises (moins de 10 salariés et chiffre d'affaires ou total de bilan inférieurs
à 2 M€),
-
petites et moyennes (moins de 250 salariés et chiffre d’affaires inférieur à 50 M€ ou
total de bilan inférieur à 43 M€).
-
entreprises de taille intermédiaire (non-PME, de moins de 5000 salariés et dont le
chiffre d’affaires inférieur à 1,5 milliard d’euros ou le total de bilan inférieur à 2
milliards d’euros),
-
grandes (les autres).
Le segment objet de ce travail comprend les Entreprises Moyennes et de Taille Intermédiaire ou EMTI. Il
s’agit des entreprises de 50 à 4 999 salariés dont le chiffre d’affaires est compris entre 10 M€ et 1 500 M€
et le total du bilan de 10 M€ à 2 000 M€.
L’intérêt de cette segmentation est également de permettre de trouver des données statistiques
exploitables. L’une des difficultés de l’analyse de ce segment est effectivement d’obtenir des informations
adéquates alors que les données traitent souvent soit des plus petites entreprises, soit de l’ensemble des
entreprises.
Quel rôle le secteur de l’assurance peut-il et doit-il jouer pour accompagner le développement des
entreprises françaises à l’international ?
Au préalable, il convient de comprendre les spécificités des entreprises qui composent ce segment : les
EMTI ont-elles les mêmes besoins que les grandes entreprises en matière d’assurance ? En matière
d’assurance à l’international ? Quelle est l’attractivité de ce marché pour les assureurs ? Quels sont les
acteurs de ce marché ? Quelles sont les contraintes rencontrées par les assureurs pour accompagner ces
entreprises à l’international ? Sont-elles identiques dans l’Union Européenne et dans le reste du monde ?
Comment le marché de l’assurance répond-il aux besoins des EMTI ? Quelles sont les attentes des
réseaux de distribution ? Quels sont les facteurs de succès pour un assureur sur ce segment ?
La problématique est vaste, aussi ce travail se limitera-t-il à l’assurance directe non vie, sans les branches
santé/accidents, ni crédit/caution. Toutes les questions relatives aux captives* d’assurance ou de
réassurance n’entrent pas non plus dans ce périmètre car elles concernent essentiellement les grandes
entreprises, elles-mêmes hors segment.
Une première partie traitera de la mondialisation des EMTI et de son impact sur le marché de l’assurance
non vie. Il conviendra d’abord de comprendre les éléments qui caractérisent les entreprises de ce
segment, puis de l’analyser sur le plan qualitatif et quantitatif afin de définir son attractivité pour le secteur
de l’assurance non vie. Ensuite, nous déterminerons les besoins de ces entreprises en termes
géographiques et en fonction des modèles de développement. Un aperçu des différents acteurs
concernés dans le secteur de l’assurance complétera cette partie.
Une deuxième partie posera la question de la mondialisation du marché de l’assurance par rapport à celle
de l’économie : quelles sont les contraintes rencontrées par les assureurs ? Ceux-ci sont confrontés à un
environnement réglementaire fortement contraignant, comportant des risques pour les différentes parties
prenantes au contrat. Il existe également de fortes contraintes fiscales. Enfin, se pose la question de la
libéralisation des opérations d’assurance : mythe ou réalité.
La dernière partie détaillera la manière dont les assureurs peuvent répondre aux besoins des EMTI.
L’offre existante sera le point de départ de l’analyse, avec une interrogation sur son adéquation par
rapport au segment des entreprises concernées. Ensuite, les différents modèles de réseau des assureurs
seront analysés. Enfin, il s’agira de déterminer les facteurs de succès pour faire évoluer l’offre de contrats.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
1ère partie
La mondialisation des Entreprises Moyennes et
de Taille Intermédiaire (EMTI) et son impact sur le
marché de l’assurance.
Les Entreprises Moyennes et de Taille Intermédiaire ont-elles les mêmes
besoins à l’international que les grandes entreprises ? Y a-t-il une
différence d’approche du point de vue de l’assurance ? Quelle est
l’attractivité de ce marché pour un assureur ? Quels en sont les acteurs ?
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
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1. EMTI et grandes entreprises : y a-t-il une différence d’approche du
point de vue de l’assurance ?
Les assureurs maîtrisent depuis longtemps les besoins d’assurance des grandes entreprises qui
mettent en œuvre une stratégie mondiale. Certains d’entre eux y répondent par des unités de
souscription spécialisées où un petit nombre d’intervenants travaillent sur des solutions sur
mesure, distribuées généralement via les grands courtiers mondiaux.
Ce modèle ne s’applique pas nécessairement aux EMTI dont la nature est plus hétérogène. La
première question à se poser, au-delà de la définition purement statistique est : qu’est-ce qui
caractérise une EMTI ? Ce segment de clientèle présente des particularités certaines et fait l’objet
de toutes les attentions des pouvoirs publics.
Le terme « globalisation » est fortement lié à la notion de grande, voire très grande entreprise
mondiale. Il peut paraître étonnant de l’associer aux EMTI. Pourtant, ces entreprises suivent le
mouvement de mondialisation de l’économie.
Après avoir défini les particularités des EMTI, il conviendra de déterminer la taille du segment et
l’attractivité du marché pour les assureurs. En dernier lieu, il convient de déterminer les besoins
des EMTI à l’international.
1.1
1.1.1
Qu’est-ce qu’une EMTI ?
Les particularités des EMTI :
Au-delà de la simple approche quantitative par la taille (nombre de salariés, chiffre d’affaires ou
total du bilan), les EMTI se distinguent des grandes entreprises par des aspects qualitatifs :
-
ce sont généralement des entreprises centrées sur un secteur d’activité ou un type de
produits, par opposition aux grandes entreprises comme Véolia qui relèvent plus du
conglomérat.
-
leur management reste centralisé et français, souvent familial, alors qu’une grande
entreprise n’est plus française que par origine historique ou intérêt (Total) dont le siège
pourrait être installé n’importe où dans le monde.
-
un attachement capitalistique national, voire local. La source des capitaux est largement
privée (famille, banques). Elle provient beaucoup plus rarement des marchés de capitaux
où Alternext3 permet à certaines d’entre elles de lever des fonds. Les grandes entreprises
n’ont plus d’attachement capitalistique national (Chanel a déplacé son centre de
décisions à New York) et lèvent leurs capitaux sur les marchés internationaux.
-
le chiffre d’affaires d’une EMTI est inférieur 500 M€4, avec une moyenne de 19,1 millions
d’Euros pour les entreprises de taille moyenne et de 198,4 millions d’Euros pour les ETI*5
-
les capitaux assurés en dommages aux biens hors pertes pécuniaires n’excèdent pas
150 millions d’Euros.
3
Marché pour les PME* internationales, qui se caractérise par un accès simplifié tout en maintenant des règles de transparence
pour l’information des investisseurs. Seuil d’accès : CA de 8 M€ et 2 années de comptes.
4
Le seuil de 500 M €/$ est communément retenus par les assureurs pour considérer une entreprise comme un « grand compte ».
D’après les entretiens réalisés entre mai et décembre 2010. Le segment des ETI* va jusqu’à 1,5 Md€ de CA mais la quasi-totalité
des entreprises sont dans la tranche de 50 M€ à 500 M€ de CA.
5
Source : INSEE, « Principaux indicateurs sur l’exercice 2007 selon la taille des entreprises ». Calcul de l’auteur.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
1.1.2
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-
ce sont souvent des clients complets pour un assureur : les EMTI achètent de manière
moins dispersée qu’une grande entreprise, en privilégiant les offres packagées
lorsqu’elles en ont la possibilité.
-
ces entreprises ont peu recours à la création de captives* contrairement aux grandes
entreprises qui utilisent quasiment toutes ce type de montage, voire s’auto-assurent
complètement sur certains risques comme BP.
-
les EMTI n’ont pas, sauf exception, de Risk Manager à plein temps6. Selon une étude
Deloitte réalisée en 2009 pour l’AMRAE, seulement 11 % des Risk Managers interrogés
travaillaient dans des entreprises générant 50 à 500 M€ de chiffre d’affaires qui
correspond au segment des ETI*.
-
l’absence de service d’implantation expérimenté à l’étranger : bureau d’études, suivi de
chantiers, informations sur le risque pays, etc. Lorsque Carrefour ouvre un hypermarché
en Chine, le modèle est bien rodé, l’équipe de Risk Management diffuse les informations
ad hoc quant aux risques locaux : risques sanitaires, risques naturels… L’EMTI va
découvrir les contraintes du marché local et résoudre les difficultés au fur et à mesure de
l’avancement de son projet.
Zoom sur la fonction de Risk Manager :
De manière synthétique, un Risk Manager a pour fonction :
- d’identifier les risques auxquels l’entreprise peut se trouver confrontée et de les évaluer,
en élaborant une cartographie des risques,
- de réduire ceux qui peuvent l’être par la prévention et la protection,
- de décider quels sont les risques dont l’entreprise va conserver la charge,
- de transférer ceux que l’entreprise ne peut ou ne veut pas conserver, généralement vers
un assureur.
La fonction de risk management est un élément clé de l’approche des grands risques où, selon la
taille de l’entreprise, il y n’a pas un Risk Manager seul mais une équipe de Risk Management. Le
Risk Manager a une maîtrise des questions d’assurance aussi approfondie que ses interlocuteurs
tant chez l’intermédiaire que chez l’assureur. La discussion se fait alors entre professionnels
ayant la même compréhension des termes techniques de l’assurance et des montages de
garantie possibles.
Dans les EMTI, la fonction de Risk Manager est très souvent remplie par le dirigeant ou par le
directeur financier, éventuellement par le contrôleur de gestion. Elle peut être également répartie
sur plusieurs fonctions, l’une s’occupant de l’achat d’assurance, une autre des risques
opérationnels et une troisième de la sûreté et de la prévention.
Ceci ne signifie pas que les EMTI maîtrisent moins bien leurs risques propres, ou que les
collaborateurs soient moins compétents. En revanche, elles n’ont pas le même degré de
connaissance en ce qui concerne :
- les conséquences de décisions stratégiques : exportations vers les USA, développement
sur un nouveau marché, implantation d’un site de production…
- les conséquences des choix en matière de prévention et de protection,
- les solutions d’assurance.
En outre, leur base d’expérience en gestion de sinistres est plus restreinte.
6
Ce sujet a fait l’objet d’un atelier lors de l’AMRAE 2007, partant de l’idée que le « Chef d’Entreprise en PME/PMI [est un] Risk
Manager et Ingénieur Sécurité », pour aboutir à la conclusion que l’activité de « Gestionnaire de risques externalisé pour les PME,
[est] une offre à développer ».
* voir lexique.
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Le besoin de conseil des EMTI est donc bien plus important que celui des grandes entreprises.
Un assureur s’intéressant à ce segment doit pouvoir offrir un service d’ingénierie et de prévention
complet, au-delà de la simple visite technique du risque.
Une piste de réflexion peut être d’intégrer un nombre de jours de conseil visant à l’identification et
à la maîtrise des risques. Le fait de piloter la prestation permet à l’assureur d’être certain qu’elle
sera orientée sur la maîtrise des risques, par opposition aux prestations de certains consultants
indépendants orientées sur la réduction des coûts (dits cost-killers).
1.2
Analyse qualitative du segment des EMTI :
L’analyse qualitative du segment des EMTI prend en compte le dynamisme particulier dont font
preuve ces entreprises, accentué par les politiques de développement ciblées des pouvoirs
publics.
1.2.1
Les entreprises qui s’internationalisent sont plus dynamiques que la moyenne :
« La capacité à investir à l’international est un des éléments-clefs qui permet d’identifier l’esprit
entrepreneurial. »7
L’étude réalisée par le SESSI* en 20088 met l’accent sur deux éléments qui marquent le
dynamisme des entreprises qui s’internationalisent :
-
ces entreprises sont plutôt plus profitables que la moyenne : un profit plus élevé traduit
une meilleure productivité donc un atout pour pénétrer d’autres marchés. Par ailleurs, une
meilleure profitabilité peut améliorer la capacité d’autofinancement et donner les moyens
à l’entreprise d’implanter une filiale à l’étranger.
-
Une corrélation entre innovation et implantation à l’étranger.
Il existe également un lien fort entre innovation et exportations9 : 89 % des entreprises
exportatrices ont investi en recherches & développement au cours des 3 dernières années, 61 %
ont déposé un brevet, une marque ou un modèle et 51 % ont commercialisé un nouveau produit
ou utilisé un nouveau procédé.
Selon une enquête récente sur une population d’entreprises exportatrices de moins de 250
salariés, dans les secteurs de l’industrie et des services10 , 35 % ont au moins une filiale locale.
Ce sont souvent des entreprises qui ont déjà une très large part de leur chiffre d’affaires à
l’export.
Enfin, une enquête KPMG conclut que les entreprises tournées vers l’international ont une
croissance plus forte que les entreprises domestiques.11. L’analyse de cette dynamique est l’objet
du rapport « Investissement direct étranger et performance des entreprises »12, qui met en
lumière le lien entre «les performances des entreprises et leur caractère multinational »13. Au-delà
de l’aspect international, les entreprises concernées sont également plus dynamiques en France.
7
Ernst & Young, « Grandir en Europe, hasard ou état d’esprit ? », 2008.
SESSI, Le 4 Pages n° 246, « Les implantations à l’étranger des entreprises industrielles françaises », mai 2008.
9
OSEO-UBIFRANCE, « Le lien innovation-exportation », 2010.
10
OSEO-UBIFRANCE, « Le lien innovation-exportation », 2010.
11
KPMG, « Les PME qui grandissent. Qui sont-elles ? Pourquoi sont-elles si performantes ? ». Enquête sur 1 831 PME de 10 M€ à
300 M€ de CA, avec une croissance 4 fois supérieure à celle de leur secteur sur 5 ans
12
; La Documentation Françaises, rapport Fontagné-Toubal, « Investissement direct étranger et performances des entreprises »,
2010.
13
Le rapport Fontagné-Toubal définit une entreprise multinationale comme une entreprise ayant au moins une filiale à l’étranger.
8
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Sur un plan qualitatif, le segment des entreprises qui s’internationalisent regroupe des entreprises
plus performantes que la moyenne.
N’est-il pas plus intéressant pour un assureur d’avoir un portefeuille d’entreprises en croissance ?
Le développement des entreprises assurées entraîne l’élargissement de l’assiette de prime, donc
l’augmentation mécanique, toutes choses égales par ailleurs, de l’encaissement de l’assureur.
Encore faut-il que l’assureur sache répondre à leurs besoins.
1.2.2
Une politique de développement active des pouvoirs publics :
Tant les pouvoirs publics que les analystes économiques considèrent que la France est en retard
par rapport à ses voisins, notamment l’Allemagne, en nombre d’EMTI14. Ce segment est donc
l’objet d’une politique de développement active de la part des pouvoirs publics, tant pour les EMTI
domestiques que pour celles qui s’internationalisent.
Début 200815, l’Etat a lancé une série de mesures particulièrement ciblées vers les petites et
moyennes entreprises afin de les inciter à exporter et à se développer davantage à l’étranger.
Parmi ces mesures, se trouvent :
-
le développement des opérations de portage. Le portage consiste, pour une grande
entreprise, à faire bénéficier une PME* de son expérience, de son carnet d’adresses et
éventuellement d’une partie de ses infrastructures dans le pays concerné (voir encadré
1). Il est raisonnable de penser que le porteur orientera la PME* vers son intermédiaire
d’assurance pour les questions relatives aux garanties locales.
Celui-ci est-il prêt à capter cette nouvelle clientèle d’une taille différente ? Comment
l’assureur de la grande entreprise peut-il attirer ce nouveau client ? Est-il d’ailleurs
intéressé par ce profil ? La question n’est pas anodine car l’objectif annoncé en 2008 par
l’association Partenariat France16 est d’atteindre 10.000 PME* portées à l’horizon 2010.
Les données publiées ne permettent pas de confirmer la réalisation de cet objectif.
Encadré 1 : le portage d’entreprise ou le parrainage
d’une PME par une grande entreprise
La société Arpège Master K est une petite entreprise de 100 personnes spécialisée dans la
production de matériel de pesage industriel.
Désireuse de s’implanter au Moyen-Orient, elle a reçu l’appui du groupe Schneider Electric qui
a conclu avec elle un contrat de portage en 2005. Ce qui signifie que la grande firme
grenobloise a autorisé les équipes de cette PME à utiliser, pendant quelques mois, et en
contrepartie d’une participation modique de 12 000 € par trimestre, un certain nombre des
moyens dont Schneider dispose à Istanbul – un bureau, de la documentation… – ainsi que
son réseau de correspondants dans les pays voisins.
Source : Cahier Industries n° 130.
14
La documentation française, rapport Betbèze-St Etienne, « Une stratégie PME pour la France », 2006.
Cahier Industries n° 130, « Mobiliser pour l’exportation », mars 2008.
16
www.partenariat-france.org association d’une trentaine de grandes entreprises qui proposent des opérations de portage (site
consulté en septembre 2010).
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L’assureur présent sur le segment des grandes entreprises pourrait mettre en place un
système de coordinateurs permettant soit d’orienter la demande de garantie vers le
service Middle Market17 compétent, soit de faire remonter les compétences nécessaires
(contrat type par exemple) du service Middle Market vers le service grandes entreprises
pour que ce dernier puisse répondre à la demande.
-
la réforme des services d’UBIFRANCE, l’Agence française pour le développement
international des entreprises. UBIFRANCE offre ses services aux grandes entreprises
comme aux EMTI, mais avec plus de 19 500 entreprises accompagnées en 200918,
l’essentiel de l’accompagnement concerne les entreprises de notre segment.
Entre autres actions, UBIFRANCE publie 330 ouvrages d’information sur les marchés.
Ces ouvrages détaillent notamment les particularités fiscales, douanières, le droit du
travail et les conditions pour créer une société. En revanche, ils ne mentionnent ni les
obligations d’assurance locales, ni les autres contraintes relatives à l’assurance.
Dès lors, ne pourrait-il être envisagé une forme de partenariat entre UBIFRANCE et les
assureurs, via la FFSA, pour aborder ce sujet ?
Un chapitre sur les particularités de l’assurance locale serait sans aucun doute un travail
conséquent, aussi l’établissement d’une brochure d’information attirant l’attention des
entreprises sur les risques d’une absence d’assurance ou d’un contrat non admis* serait
une solution efficace. UBIFRANCE et OSEO19 pourraient mettre cette brochure en ligne
sur leur site internet, de même que la FFSA.
L’attractivité du marché de l’assurance des EMTI françaises à
l’international :
1.3
L’appréciation quantitative du segment des EMTI qui s’internationalisent est un exercice difficile.
Les données publiées restent parcellaires et hétérogènes. Les données concernant les EMTI ne
sont pas toujours identifiées et, lorsqu’elles le sont, la plupart concerne l’activité industrielle.
La Direction Générale du Trésor et de la Politique Economique (DGTPE) réalise une enquête
« filiales » non obligatoire tous les deux ans. D’une part, toutes les entreprises ne répondent pas
à l’enquête, d’autre part, les données sont collectées dans le cadre d’un accord de confidentialité.
Les résultats publiés20 ne donnent que les grandes lignes des implantations françaises à
l’étranger.
Les données utilisées dans le cadre de ce travail proviennent de l’INSEE et la Banque de France.
Les investissements directs à l’étranger (IDE)21 ne sont pas retenus pour cette analyse car les
données publiées par la Banque de France dans la balance des paiements ne permettent pas
d’identifier la part concernant les EMTI.
17
Dans la segmentation de la plupart des assureurs, le « Middle Market » ou secteur PME/PMI comprend les entreprises de 50 M$ à
500 M$ de chiffre d’affaires.
18
Source : Ubifrance, « Rapport d’activité 2009 ».
19
OSEO, établissement public pour le financement de l’innovation, la garantie des financements bancaires, le financement des
investissements. OSEO intervient pour accompagner les PME à l’international, notamment avec une aide pour la création ou le
développement d’une filiale étrangère.
20
Trésor-Eco n° 46 (2008).
21
Banque de France, « Balance des paiements et position extérieure », rapport annuel 2008 : les IDE* incluent notamment les
fusions-acquisitions, les « greenfied investments » ou créations pures et les bénéfices réinvestis.
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Pascale Rauline
1
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14/99
partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
L’approche quantitative du segment passera donc par une première phase relative à l’ensemble
des EMTI. Dans un deuxième temps, les données relatives aux entreprises qui s’internationalisent
seront estimées à partir de cette base. Enfin, il sera proposé une estimation des cotisations
dommages aux biens et responsabilité civile de ce segment.
1.3.1
Approche quantitative du segment des EMTI dans son ensemble :
L’approche par l’effectif n’est pas la plus pertinente pour le secteur de l’assurance où les primes
sont généralement assises sur le chiffre d’affaires ou la valeur des existants. Néanmoins c’est la
segmentation retenue pour l’essentiel des statistiques publiées et ce critère est donc conservé
pour les approches quantitatives.
La matière assurable est large : les EMTI représentent près de 37 % du chiffre d’affaires total des
entreprises (biens intermédiaires, produits finis et services) et près de 41 % des exportations.
Elles totalisent près de 25 000 entreprises tout secteur d’activité confondu (voir encadré 2).
Encadré 2 : les chiffres clé des EMTI françaises au
01/01/2008.
2,8 M
14,5 M
3 585 mds€
596 mds€
100%
90%
22%
14%
10%
= 41 %
11,2%
80%
70%
17,6%
10,8%
12,8%
26%
= 36,8 %
31%
MIC
60%
50%
94,1%
40%
PE
ME
ETI
21%
GE
30%
53%
20%
39%
27%
10%
0%
Nbr
Effectif
CA
Exportations
D’après les données INSEE, SUSE, LIFI et Diane, hors entreprises financières et entreprises
agricoles, IAA incluse, 01/01/2008.
MIC : micro entreprises (moins de 10 pers. et CA ou total bilan < 2 M€)
PME : petites et moyennes entreprises (moins de 250 pers. et CA < 50 M€ ou total de bilan < 43 M€)
ETI : entreprises de taille intermédiaire (non PME occupant moins de 5 000 pers. et CA < 1,5 Md€ ou
total de bilan < 2 Md€.
GE : toutes les autres
Le segment des EMTI est constitué par :
-
22
les entreprises de taille moyenne du segment des PME* (c’est-à-dire celles occupant
entre 50 et 249 personnes) sont au nombre de 20 20022. Elles génèrent un chiffre
d’affaires de 386,3 milliards d’Euros et un volume d’exportations de près de 58 milliards
d’Euros.
INSEE, « Entreprises selon le nombre de salariés et l'activité », données 2008.
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1
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15/99
partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
-
Les ETI*, c'est-à-dire les entreprises entre 250 et 5 000 salariés. Ces dernières sont au
nombre de 4 614. Elles génèrent un chiffre d’affaires de 915 milliards d’Euros et un
volume d’exportations de 186 milliards d’Euros.
Elles se répartissent pour près de la moitié dans le secteur tertiaire marchand et près d’1/3 dans
le secteur de l’industrie (voir encadré 3) où elles sont plus présentes que la moyenne des
entreprises.
Encadré 3 : les EMTI françaises par secteurs,
prédominance des services/commerce et de l’industrie.
35,0%
28,9%
30,0%
23,8%
25,0%
21,0%
20,0%
Ensemble
EMTI
15,0%
8,4%
10,0%
5,0%
7,4%
5,4%
5,0%
Au
tre
ce
s
Se
rv
i
er
ce
Co
m
m
Tr
an
sp
or
t
P
BT
rie
In
du
st
IA
A
0,0%
D’après les données du Ministère de l’Economie est des finances (INSSE, DGI, DGCIS), données
2007, hors entreprises financières et entreprises agricoles, IAA incluse. Calcul en fonction de l’effectif
par secteur.
1.3.2
Evaluation du nombre des EMTI internationalisées :
La première phase de l’internationalisation consiste à vendre à l’étranger. L’implantation de
l’entreprise à l’étranger signe le début de la deuxième phase du processus d’internationalisation.
Si les chiffres des exportations sont facilement accessibles, les éléments précis concernant les
implantations à l’étranger des EMTI doivent faire l’objet d’hypothèses.
Les entreprises sont considérées comme exportatrices dès lors qu’elles réalisent au moins 5 %
de leur chiffre d’affaires à l’export.
Toutes activités confondues, la part des entreprises qui exportent au moins 5 % de leur chiffre
d’affaires s’échelonne de 20 % du total des entreprises pour les entreprises de taille moyenne à
57 % pour les plus grandes du segment. Pour les seules entreprises industrielles, la part des
entreprises exportatrices est encore plus importante (encadré 4).
Encadré 4 : phase 1, part des EMTI qui exportent plus de
5 % du CA par rapport au total des EMTI.
Nombre de
salariés
20-249
250-499
500-1 999
Toutes activités
20 %
57 %
57 %
Industrie seule
44%
72%
75%
D’après les données du rapport CPCI 2008 pour l’industrie et les données des Douanes.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Le nombre d’entreprises ayant au moins une filiale à l’étranger reste plus difficile à évaluer en
l’absence de publication de données précises (voir encadré 5). En 1993, les PME* avaient 1 900
implantations à l’étranger23, aujourd’hui, l’estimation pour les EMTI est d’environ 14 800
implantations. L’internationalisation des EMTI est une tendance de fond depuis près de 20 ans.
Encadré 5 : estimation du nombre des implantations des
EMTI à l’étranger.
Nombre total d’implantation à l’étranger des entreprises françaises(a) en 2008 : 27 600.
En 2000, les PME* représentaient 32 % des implantations(b) soit plus de 6 000
implantations sur un total de 19 000.
Compte tenu de la croissance du nombre des implantations entre 2000 et 2006 (63
%(c)), les seules PME* représenteraient plus de 9 000 implantations aujourd’hui. En
ajoutant le segment des ETI*, dont le nombre peut être estimé à 5 800 implantations
pour ce segment(d), le résultat est un total de :
14 800 implantations à l’étranger pour le segment EMTI.
D’après les données :
Trésor Eco n° 45 (10 2008) : nombre total d’implantations (30 000).
Bulletin de la banque de France n° 178, 4ème trimestre 2009 : poids économique des nouvelles entreprises
non financières, non agricole
(a) hors institutions financières dont le nombre d’implantation est estimé à 5 à 8 % du total (Trésor Eco n°
4). Pour le calcul, il a été retenu 8 %.
(b) Rapport CPCI 2001.
(c) Hypothèse : distribution homogène.
(d) Pondération des implantations (27 600) par la part de l’effectif des ETI* dans le total (21 %) = 5 800.
Sur la période 2003 à 2005, 8,4 % des PME* industrielles et 33,8% des entreprises industrielles
de 250 à 1 999 salariés ont au moins une implantation à l’étranger24 (encadré 6). Ces chiffres
recoupent les indications du poids des EMTI internationales dans le portefeuille des
intermédiaires d’assurance rencontrés : en moyenne, 10 à 15 % des clients ont des implantations
à l’étranger, selon les profils d’activité des assurés. Ces entreprises peuvent représenter jusqu’à
30 % du chiffre d’affaires de l’intermédiaire25.
L’activité des implantations hors France se répartit essentiellement entre les services* (56 %) et
l’industrie (39 %)26, le solde concernant la construction et dans une moindre mesure le secteur
agriculture, sylviculture, pêche.
La totalité des implantations françaises à l’étranger emploie 6 millions de salariés, dont 60 000
expatriés. Elles génèrent un chiffre d’affaires de 850 milliards d’Euros27 soit, 315 milliards d’Euros
pour les seules EMTI qui représentent 37 % du CA total (voir encadré 2).
23
B. Duchéneaut, « Enquête sur les PME françaises ».
SESSI, Le 4 Pages n° 246, « Les implantations à l’étranger des entreprises industrielles françaises », mai 2008.
25
Source : entretiens réalisés entre mai 2010 et décembre 2010 d’intermédiaires membres d’un réseau international.
26
Trésor-Eco n° 45, « La présence des entreprises françaises dans le monde », octobre 2008.
27
Trésor-Eco n° 45, « La présence des entreprises françaises dans le monde », octobre 2008.
24
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 6 : nombre d’entreprises EMTI avec au moins
une implantation à l’étranger.
Le nombre d’entreprises formant le segment des EMTI est de 4.576 ETI* et 22.207
moyennes entreprises, soit un total de 24.821 entreprises.
D’après les données de la Direction Générale du Commerce, de l’Industrie et des
Services 37,6 % (1 600) des ETI* et 8 % (1 800)(a) des entreprises de taille moyenne
ont au moins une implantation à l’étranger.
Nombre d’entreprises
Tous secteurs (%) du total
Industrie seule
PME*
Non
disponible
8,4 %
ETI*
37,60 %
33,8 %
Donc, un total de 3 400 entreprises sur 24 821 ont au moins une implantation à
l’étranger, autrement dit :
14 % des EMTI ont au moins une implantation à l’étranger.
D’après les données du 4 pages de la DGCIS n° 8 et du 4 Pages SESSI n° 246, « Les implantations à
l’étranger des entreprises industrielles françaises », mai 2008.
(a) hypothèse retenue : 8 % de 22 207.
1.3.3
Quelle est la tendance pour le futur ?
« Exporter sans implantation devient une gageure et le sera de plus en plus si la mondialisation
se stabilise. »28
L’enquête OSEO-UBIFRANCE29 fait ressortir que 40 % des PME* interrogées ont en projet le
développement ou la création d’au moins une filiale à l’étranger.
Ces résultats corroborent la tendance dessinée par l’enquête de l’INSEE en 200830, centrée sur
l’activité industrielle (encadré 7) :
-
22 % des entreprises industrielles prévoient de développer de nouvelles activités de
production. Ce pourcentage est à comparer avec la création effective d’activité de
production hors France : 12 % des entreprises sur la période 2002/2007,
-
16 % des entreprises industrielles envisagent de déplacer des activités de production
hors France (12 % l’ont fait sur la période 2002/2007),
Malgré les effets de la crise, l’orientation vers l’international demeure un élément pris en compte
dans la stratégie des EMTI : c’est le cas pour 60 % des entreprises interrogées par KPMG en
février 201031.
28
Rapport Retailleau, « Les ETI au cœur d’une nouvelle dynamique de croissance », février 2010.
OSEO-UBIFRANCE, « Le lien innovation-exportation », 2010.
INSEE Première n° 1188, mai 2008 : « Mondialisation et compétitivité des entreprises françaises, l’opinion des chefs d’entreprises
de l’industrie ». Enquête réalisée auprès de 4.000 entreprises de 20 salariés ou plus, en février 2008.
29
30
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 7 : intention de création et de déplacement
d’activités de production à l’étranger.
Dé p la c e me n t d 'a c tiv ité d e p r o d u c tio n 2 0 0 2 / 2 00 7
Dé p la c e me n t d 'a c tiv ité d e p r od u c tio n ( in ten tio ns )
D’après les données
INSEE, CNCCEF,
enquête
compétitivité, 2008.
No u v e lle( s ) ac tiv ité ( s ) - 2 0 0 2 / 2 00 7
No u v elle ( s ) a c tiv ité( s ) (in ten tio ns )
0%
5%
10%
15%
20%
25 %
En conclusion, la tendance est à l’accroissement des implantations à l’étranger pour l’avenir,
même si la crise économique a pu freiner les intentions annoncées. Les assureurs qui se
positionnent maintenant sur ce segment de clientèle auront donc un atout compétitif par rapport à
leurs concurrents.
1.3.4
Estimation du montant des cotisations dommages aux biens et responsabilité
civile :
« L’assurance des entreprises est un marché stratégique […] tout particulièrement en ce qui
concerne les petites et moyennes entreprises »32. Cet intérêt est toujours d’actualité, une réflexion
stratégique sur ce segment étant en cours chez l’un des principaux assureurs du marché33.
L’estimation de l’encaissement du segment des EMTI qui s’internationalisent est encore plus
délicate que celui de leur nombre. Il repose nécessairement sur des hypothèses.
Dans le cadre de ce travail, les hypothèses retenues sont les suivantes :
-
assurance dommages aux biens hors catastrophes naturelles : segmentation selon
le montant des capitaux assurés en dommages, en retenant une fourchette de 20 M€34 à
150 M€ (encadré 8).
Pour la tranche au-delà de 150 M€, le marché admet qu’environ 2/3 de l’encaissement
concerne les grandes entreprises. A contrario, 1/3 concerne le segment des EMTI.
Le pourcentage des cotisations correspondant à ce segment est appliqué au total des
cotisations des risques industriels (1.880 millions d’Euros pour les risques d’entreprises
relevant du TRE35 en 200536).
31
KPMG, « Les PME européennes confiantes dans la sortie de crise », étude menée auprès de 3 200 entreprises de 50 à 999
salariés en Europe de l’Ouest.
32
Revue Risques, n° 41 « L’assurance des entreprises : un marché d’intérêt stratégique », http://www.procamex.org/actionsprogrammes/reunions/reunions-thematiques/portage-international-d-entreprise.htmlJean-Luc Besson.
33
Source : interview Yves de Mestier, Axa Corporate Solutions.
34
Pour la cession au GAREAT, les affaires en-deçà de 20 M€ sont considérées comme des risques de masse.
35
TRE : Tarif des Risques d’Entreprises, applicable aux entreprises dont la valeur du contenu excède 1.500 fois l’indice des risques
industriels, soit environ 5 M€.
36
FFSA, mai 2007, « Assurance dommages aux biens des professionnels - Résultats 2005 »
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 8 : estimation de l’encaissement dommages aux
biens des EMTI qui s’internationalisent.
Répartition des cotisations par tranche des capitaux
assurés (en M€).
38,60%
28,4 %
18,60%
6,80%
14,10%
14,30%
7,60%
12,8 %
<3
3à6
6 à 20
20 à 50
50 à 150
Total des cotisations dommages aux biens
Part des EMTI
Estimation de l’encaissement des EMTI
> 150
1 880 M€
41,2 %
775 M€
D’après les données FFSA, « Assurance dommages aux biens des professionnels - Résultats 2005 », 20007
et l’estimation du montant des cotisations par branche publiée en septembre 2010. Chiffres hors catastrophes
naturelles.
-
responsabilité civile : l’assiette des cotisations étant le chiffre d’affaires des entreprises,
la part des EMTI dans le chiffre d’affaires total (42 %)37 est projetée sur le montant total
des cotisations de la branche responsabilité civile générale.
L’encaissement total en responsabilité est de 3.500 millions d’Euros en 200938. Le
marché admet communément que la part concernant les entreprises entrant dans le
champ du TRE est de 2 000 millions d’Euros. Corrigé des variations de taux en fonction
du chiffre d’affaires, l’assiette de calcul est de 1.700 millions d’Euros.
Le total des cotisations pour les EMTI est donc estimé à 714 millions d’Euros.
La part des EMTI qui ont une implantation à l’étranger est calculée sur la base
d’hypothèses :
-
Une hypothèse prudente, soit 7,5 % des primes,
-
Une hypothèse moyenne 15 %,
-
Une hypothèse haute 30 %.
Ces approches correspondent à l’encaissement total du segment tant pour leurs risques en
France que pour leurs risques à l’étranger.
Les hypothèses moyenne et haute résultent des entretiens avec différents courtiers entre mai et
décembre 2010. Elles sont fonction des profils d’activités et d’entreprises de leur portefeuille.
37
38
Source INSEE, calcul de l’auteur. Voir détail en annexe.
FFSA, estimation du montant des cotisations par branche publiée en septembre 2010.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 9 : estimation de l’encaissement total des EMTI
qui s’internationalisent.
Estimation
des
cotisations
des EMTI
Dom. aux biens
Resp. civile
EMTI internationalisées
Est.
Prudente
Est.
Moyenne
7,5%
Est.
Haute
15%
30%
771 M€
714 M€
58 M€
54 M€
116 M€
107 M€
231 M€
214 M€
1 485 M€
112 M€
223 M€
445 M€
En ajoutant les autres branches, notamment le transport, l’assurance crédit, l’assistance
et l’automobile, le total de l’encaissement des EMTI qui s’internationalisent peut être
estimé à près de 300 M€.
D’après les données FFSA, « Assurance dommages aux biens des professionnels - Résultats 2005 »,
2007 et l’estimation du montant des cotisations par branche publiée en septembre 2010.
Les EMTI qui s’internationalisent représentent une masse assurable significative. Ce segment est
d’autant plus intéressant sur un plan stratégique qu’il est composé d’entreprises plus dynamiques
et innovantes que la moyenne.
Les PME* avaient 1 900 implantations à l’étranger en 1993, 6 000 en 2000, environ 15 000
aujourd’hui. Si elles suivent le même rythme, elles en auront près de 20 000 en 2015.
Aujourd’hui, l’encaissement du segment est estimé à plus de 300 M€. Les exportations puis
l’implantation locale sont le moteur de ce segment. Sachant que la croissance des exportations
dans le monde est trois fois plus rapide que celle du PIB mondial39, ces entreprises vont croître
fois plus vite que les entreprises domestiques.
Par ailleurs, compte tenu de la corrélation entre croissance du PIB et croissance du chiffre
d’affaires de l’assurance, l’encaissement de ce segment peut évoluer en 5 ans :
- de 16 % (croissance du PIB de 1 % par an, croissance du segment de 3 %),
- à 34 % (croissance du PIB de 2 % par an, croissance du segment de 6 % par an),
pour atteindre plus de 400 M€ en fonction de la conjoncture économique.
C’est un segment qui a un poids économique important (aujourd’hui, 5 % de l’encaissement des
Professionnels40) qui peut progresser dans l’hypothèse retenue à 7 % de l’encaissement des
Professionnels. Un assureur ne peut ignorer ce marché au risque de laisser ses concurrents
prendre des positions qu’il sera difficile et coûteux de reconquérir.
39
CNUCED, à partir des données de l’OMC, tableau A1, Statistiques Commerciales 2008.
FFSA, Tableau de bord de l’assurance, décembre 2010 : cotisations des professionnels (entreprises) hors RCG et construction
5,9 milliards d’Euros.
40
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
2. Quels sont les besoins d’assurance à l’international des EMTI ?
« Lorsqu’un chef d’entreprise décide de se lancer sur les marchés internationaux, le contenu de
sa demande est généralement très simple. Ce qu’il souhaite avant tout, ce sont des informations
pertinentes, fiables et personnalisées sur les pays visés, un accompagnement et un suivi des
démarches qu’il doit accomplir ».41
Avant d’identifier les besoins des EMTI à l’international, un regard sur la territorialité des
implantations s’impose. Il convient également de prendre en compte le business modèle retenu.
En dernier lieu, ces entreprises peuvent être confrontées à des risques particuliers.
2.1
Les besoins géographiques :
Où s’implantent les EMTI ? Elles choisissent en priorité les pays développés :
-
l’Union Européenne où la circulation des biens et des personnes a été particulièrement
facilitée avec les différents traités. Cette zone concentre près de la moitié des
implantations toutes tailles d’entreprises confondues42
-
l’Amérique du Nord,
Les implantations dans les pays émergents sont plus limitées mais ce sont les zones où leur
croissance est la plus forte (voir encadré 10).
La prédominance de l’espace économique européen dans les implantations étrangères
s’explique, outre l’absence de barrière douanière, par :
-
la tendance des entrepreneurs à s’internationaliser de manière concentrique à partir de
leur pays d’origine43, d’abord dans les pays à proximité puis dans les zones plus
lointaines.
-
par un « phénomène d’agglomération géographique »44, lorsque l’impact de la
concurrence est faible : les entreprises s’implantent alors dans des zones qui constituent
des bassins de main d’œuvre adaptée et/ou se trouvent des ressources ou infrastructures
spécifiques.
Les cinq pays européens accueillant le plus d’implantations françaises sont : l’Allemagne, la
Belgique, l’Espagne, l’Italie et le Royaume Uni45.
La majorité des EMTI s’implantent donc dans des pays développés où l’environnement juridique
(réglementation, fréquence des réclamations devant les tribunaux, obligations locales) est au
moins équivalent à la France.
Quels sont les principales zones destinataires des exportations ? Elles recoupent naturellement
les zones d’implantation et s’étendent46, par nombre d’exportateurs :
-
aux pays développés dits lointains : Japon, Canada, Hong Kong, Australie…
au Maghreb : Algérie, Maroc et Tunisie,
au reste du monde : Chine, Russie, Inde, Brésil…
41
Cahier Industries n° 88, août 2003.
Trésor-Eco n° 45, « La présence des entreprises françaises dans le monde », octobre 2008.
JE Muchielli et F. Puech, « Internationalisation et localisation des firmes multinationales : l’exemple des entreprises françaises en
Europe ».
44
Notes Bleues de Bercy n° 241, « Implantation des entreprises françaises en Europe ».
45
Notes Bleues de Bercy n° 241, « Implantation des entreprises françaises en Europe ».
46
Ministère des finances, « Les opérateurs du commerce extérieur », résultats 2009 révisés au 06/08/2010
42
43
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 10 : implantations françaises à l’étranger (en %
du total et en taux de croissance).
Am. du Nord
15 %
Europe
48 %
Maghreb 3 %
Am. Latine
12 %
M.O.
3%
Afrique
5%
Asie
émergente
10 %
Japon
Corée
Taiwan
Hong Kong
Singapour
Australie
N. Zélande
5%
Croissance 2004-2006 :
D’après les données du Trésor Eco n° 45, octobre 2008.
2.2
Les modèles
l’implantation.
économiques :
de
la
commercialisation
à
La Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) a identifié
quatre principales motivations pour qu’une entreprise réalise un investissement à l’étranger47. Si
la « recherche de ressources naturelles » et la « recherche d’actifs créés », via les fusionsacquisitions, sont plutôt le fait des grandes entreprises, les deux dernières motivations concernent
aussi les EMTI :
47
-
La recherche de marché : l’entreprise commence par exporter, puis elle peut négocier
des accords de licence, de sous-traitance… avant d’implanter un bureau de
commercialisation et/ou un site de production. Pour les entreprises de services, malgré le
développement des technologies de l’information, la présence locale est souvent
indispensable.
-
La recherche d’efficacité : il s’agit généralement de produire à moindre coût, ou de
s’affranchir de certaines réglementations contraignantes du marché domestique.
CNUCED, « Rapport sur l’investissement dans le monde », 2006
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Pascale Rauline
1
ère
23/99
partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Pour les PME*, les deux motivations48 principales de l’internationalisation sont :
-
en 1ère position : accroître le chiffre d’affaires (92 %),
-
en 2ème position : se développer sur les marchés de niche de taille internationale (72 %),
Le goût du dirigeant pour l’international est également cité dans 19 % des cas.
2.3
Internationalisation :
confrontées ?
à
quels
risques
les
EMTI
sont-elles
L’internationalisation d’une EMTI domestique suit deux étapes logiques : dans un premier temps
l’entreprise va découvrir un marché étranger via l’exportation (phase 1), dans un deuxième temps,
elle décidera de s’implanter pour optimiser son activité sur ce marché (phase 2).
2.3.1
Phase 1 : la découverte d’un marché.
Dans la première étape de l’internationalisation, les entreprises peuvent se focaliser sur le défaut
de paiement et ignorer les autres risques pourtant bien réels. Les collaborateurs des services
exportations concentreront leur attention sur les aspects douaniers et le transport. Une EMTI n’a
souvent pas de service juridique. Lorsqu’il existe, il est orienté sur les questions domestiques.
En l’absence d’implantations locales, les risques encourus concernent :
-
le transport des marchandises : l’entreprise peut s’estimer suffisamment bien garantie par
sa police d’assurance française or, même pour les transports internationaux, il peut
exister des contraintes de réglementation locale comme au Brésil49,
-
la prospection à l’étranger, les déplacements professionnels : les dommages occasionnés
par un collaborateur en déplacement à l’étranger vont-ils être couverts par le contrat de
responsabilité civile ? Lorsqu’un collaborateur rend visite à un client polonais et a un
accident de voiture : comment l’indemnisation va-t-elle s’effectuer ? Il n’y a pas de
garantie illimitée des corporels en Pologne. L’entreprise est-elle couverte pour les
dommages subis par son préposé ? Par quel contrat ?
-
la vente par internet : l’entreprise crée un site en français et se retrouve avec des
commandes provenant du Québec, de Suisse et d’autres zones francophones. Si le site a
une version anglaise, le potentiel des ventes augmente, de même que les risques de
réclamation des tiers. Le contrat responsabilité civile est-il adapté ? L’entreprise a-t-elle
pris en compte la protection des données personnelles de ses clients ? A-t-elle pris en
compte le risque de cyber criminalité (voir encadré 11),
-
les dommages causés par les produits ou services vendus : la territorialité du contrat de
responsabilité civile est-elle adaptée à la zone d’activité de l’entreprise ? L’entreprise a-telle conscience des risques et des coûts de litige, accrus lorsqu’il y a des exportations
aux Etats-Unis ?
-
l’innovation et le développement des activités : l’EMTI qui développe un nouveau produit
ou un nouveau concept a-t-elle intégré, dans sa phase de conception, l’information à
l’assureur. Par exemple une entreprise qui produit des biens d’équipements et qui a
l’opportunité de se diversifier dans le secteur aérien. La défaillance d’une petite pièce
peut causer le crash d’un avion. Son contrat de responsabilité civile est-il adapté ?
48
Sondage effectué en juin-juillet 2009, complété par une enquête qualitative en février 2010. OSEO et UBIFRANCE, « Le lien
innovation-exportation, l’expérience d’OSEO et d’UBIFRANCE ». Plusieurs réponses à la question étaient possibles.
49
Les importations, si elles sont assurées, doivent l’être par une police souscrite localement, même si l’importateur est détenu par
une société étrangère. Les importations CIF(Cost insurance and freight) ne sont donc pas autorisées.
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Pascale Rauline
1
ère
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 11 : cyber risk, un risque global et complexe.
« Parce qu’Internet est global, le risque est global »(a). Les systèmes informatiques des
entreprises sont vulnérables aux intrusions de tiers mal intentionnés (phishing,
malware…) ou de collaborateurs indélicats. Par méconnaissance, parce que le sujet
n’est pas en tête sur la liste des priorités, les EMTI peuvent être plus vulnérables : 7
PME* sur 10 ont un site Internet mais 40 % ne font qu’une mise à jour annuelle et 1/3
de ces entreprises n’ont pas de responsable des systèmes d’information(a).
L’ouverture d’un site internet fait peser de facto sur ces entreprises un risque d’image.
Autre risques : l’application des réglementations locales en matière de protection des
données personnelles. Aux Etats-Unis, 44 états imposent aux entreprises qui ont subi
une fuite de ces données d’informer chaque personne concernée individuellement par
écrit. Dans l’Union Européenne, la protection de ces données est réglementée par la
Directive de 1995 (Directive 95/46/EC).
En 2008, le coût moyen par client d’un cyber dommage s’échelonnait de 98 $ dans
certains pays d’Europe à 202 $ aux USA(b). Ce montant inclut les frais de détection de
la fuite de données (négligence humaine, erreur de système) ou de l’attaque, les coûts
d’information des clients de l’entreprise, le coût de l’amélioration du système
d’information et les coûts liés à la perte de clients.
Lorsque les données personnelles de plusieurs dizaines de milliers de clients sont en
jeu, le coût total s’envole vite.
(a)
(b)
2.3.2
Bulletin de la Banque de France n° 165, 09 2007.
Etude Ponemon Institute.
Phase 2 : l’implantation locale.
Lorsqu’une EMTI passe à la seconde phase de son internationalisation, l’absence d’expérience
du primo-investisseur est particulièrement critique pour la pérennité de l’entreprise. Dès la
première installation, l’entreprise est soumise à la règlementation du pays. Et cela vaut également
pour les assurances.
L’entreprise s’est implantée, elle a ouvert des bureaux de représentation, un centre logistique ou
une unité de production, et les risques augmentent.
Dès lors qu’elle a des effectifs en local, l’entreprise est confrontée aux questions de Workers’
Compensation, c'est-à-dire la garantie des accidents du travail. Le régime particulier qui
s’applique en France est loin de se retrouver ailleurs dans le monde où ce type de garantie relève
plus souvent du secteur privé, comme aux Etats-Unis.
Les obligations d’assurance locales diffèrent également d’un pays à l’autre. Par exemple,
l’obligation d’assurance en responsabilité civile automobile se développe mais n’existe pas encore
partout dans le monde50.
50
L’Ethiopie, le Mozambique, le Laos et le Mexique ont institué une obligation d’assurance qui reste inappliquée ; Cuba, le
Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Cambodge ne prévoient pas d’obligation d’assurance en RC automobile.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
25/99
En matière d’assurance des dommages aux biens et de la perte d’exploitation, les contrats
souscrits en France peuvent-ils garantir ces risques ? Qu’en est-il pour l’assurance de la
responsabilité de l’entreprise du fait de ses activités locales, de la responsabilité civiles des
dirigeants ?
Les risques augmentent également en matière d’environnement, domaine où le durcissement de
la réglementation n’est pas du seul fait des pays développés. Début 2009, la Chine a prononcé
une obligation d’assurance en matière environnementale (« Green Insurance System »).
Selon François Cabrol, Directeur Général de DP Assurance, le premier besoin d’une EMTI à
l’international est de « maîtriser les risques, d’avoir la certitude que tout est garanti ». La maîtrise
des coûts ne vient qu’en deuxième position. Plus le pays d’implantation est loin, plus le besoin de
conseils, d’information et d’accompagnement sera grand.
En conclusion, les besoins d’assurance des EMTI à l’international ne diffèrent guère de ceux des
grandes entreprises. En revanche, les besoins en matière d’information sont inversement
proportionnels à la taille de l’entreprise et à son degré d’internationalisation. L’aspect sécurité
juridique est fondamental.
Compte tenu de la taille de son bilan une EMTI est beaucoup plus vulnérable qu’une grande
entreprise à une mauvaise qualification des besoins, donc à l’inexistence de garanties ou à
l’inadéquation des solutions mises en place.
L’intermédiaire, premier interlocuteur de l’entreprise a un rôle clé. Les assureurs peuvent
également participer à la diffusion de l’information :
- brochure d’informations sur le site de la FFSA,
- fiches pratiquent sur leur propre site Internet.
L’assuré qui hésite entre plusieurs projets d’assurance pourra être conforté dans son choix par la
compétence à l’international de l’assureur. De même, l’intermédiaire qui a peu d’expérience à
l’international sera conforté dans son conseil par les informations procurées par l’assureur.
3. Les acteurs du marché de l’assurance :
Le marché de l’assurance non vie à l’international voit se rencontrer trois groupes d’acteurs :
- les assureurs
- les intermédiaires : l’assurance directe sur ce segment est l’exception,
- les autres prestataires : les cabinets de consultants, les sociétés d’ingénierie, les experts
en gestion de sinistres et les avocats.
3.1
Les assureurs :
L’assureur offre trois prestations aux entreprises assurées :
- le transfert de risques,
- le service après vente : la prévention et la gestion de sinistres,
- enfin, la fourniture d’informations pour accompagner l’assuré qui se développe sur un
nouveau marché, domestique ou non.
Un assureur peut-il accompagner un assuré hors des frontières en émettant une seule police
depuis la France ? Parfois, oui, souvent non. Cette question est complexe et fera l’objet de la
deuxième partie de ce travail.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
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En pratique, les assureurs ont suivi le mouvement de mondialisation. Dans le sillage de leurs
clients du segment des grandes entreprises et/ou dans une stratégie de diversification, ils ont
établi des réseaux plus ou moins développés ou conclu des accords de partenariats avec d’autres
assureurs (opération de fronting).
Les premières entreprises à s’internationaliser étaient originaires des pays développés. Il n’est
donc pas surprenant que la majorité des assureurs à la tête d’un large réseau soient américains
ou européens.
Quelle est la typologie des assureurs qui accompagnent leurs assurés à l’international ? Il existe
deux types d’acteurs :
-
1er groupe : les assureurs déjà positionnés sur le segment. Il y a d’une part les
généralistes (Axa, Gan, Generali…) et d’autres part les spécialistes du risques
d’entreprises à l’international (Ace, Chartis, XL Insurance…). Certains opérateurs ont plus
de facilités que d’autres à accompagner le segment qui nous intéresse.
-
2ème groupe : les nouveaux entrants qui peuvent être des assureurs spécialisés ou de
grands groupes d’assurance étrangers comme Mitsui. Ces acteurs ont la volonté de
conquérir une part de marché et les EMTI constituent une cible stratégique : c’est un
vecteur d’entrée sur un marché, avec moins de barrière que le marché des particuliers ou
des professionnels*.
Mitsui Sumitomo, aujourd’hui MS&AD Insurance Group après sa fusion avec AIOI
Insurance et Nissay Dowa, ne fait pas mystère de son appétit pour l’Europe en général, et
la France en particulier. M. Toshiaki Egashira, PDG de MS&AD annonce la stratégie51 :
« We would like to grow in these businesses but at the same time we would also like to
grow or improve our businesses on the continent, especially in Germany and France. This
includes ‘local’ business, not just Japanese-related business52.”
Les facteurs clé du succès en matière d’assurance internationale font l’objet d’une étude détaillée
dans la 3ème partie de ce travail.
L’enjeu est de taille : si les assureurs domestiques ne se positionnent pas sur le segment, le vide
sera comblé par les challengers. Il ne serait pas surprenant que les assureurs japonais cherchent
à accroître leurs parts de marché : le marché japonais est saturé et les acteurs sont de facto
poussés à l’internationalisation. Ils ne font donc pas mystère de leur appétit pour d’autres
marchés, dont la France.
3.2
Les canaux de distribution :
Si les assureurs s’organisent en réseau, est-ce à dire que les intermédiaires doivent l’être
également ? Existe-t-il différents types de réseaux ? Et l’intermédiaire indépendant, n’a-t-il d’autre
choix que de voir son client partir chez un concurrent ?
51
Insurance Day, 23/07/2010.
Traduction libre : “nous souhaitons nous développer sur ces segments mais également développer notre activité sur le continent,
en particulier en Allemagne et en France. Ceci s’entend pour les entreprises domestiques et non uniquement les filiales
japonaises ».
52
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
3.2.1
27/99
Un intermédiaire peut-il suivre son client à l’international ?
La profession d’intermédiaire en assurance est réglementée dans la plupart des pays.
Indépendamment du statut (courtier, agent…), l’intermédiaire doit demander une autorisation
administrative en justifiant de son expérience, d’une garantie de responsabilité civile
professionnelle, voire d’une garantie financière53. Au sein de l’Union Européenne, cette profession
est soumise à la directive du 9 décembre 2002 sur l’intermédiation en matière d’assurance.
Dans le cadre de la libre prestation de service, la directive prévoit qu’un intermédiaire titulaire
d’une licence dans un pays pourra exercer dans un ou plusieurs autres pays de l’Union via un
Passeport Européen. L’autorité de contrôle du pays d’origine notifie à l’autorité de contrôle du
pays destinataire l’intention de l’intermédiaire d’opérer en libre prestation de service. Sauf réaction
dans le délai d’un mois, l’intermédiaire est alors titulaire d’un passeport lui permettant d’exercer
son activité sans établissement dans le pays de destination.
En dehors de l’Union Européenne, la réglementation applicable est particulière à chaque pays. En
résumé, l’intermédiaire doit être dûment enregistré. Dans certains pays, l’assureur a l’obligation
de vérifier qu’il travaille avec un intermédiaire titulaire d’un agrément.
Un réseau est incontournable pour suivre un client à l’international. Hormis la particularité du
Passeport Européen, soit l’intermédiaire est implanté dans le pays de son client, soit il doit
rechercher un partenaire local. Comment peuvent s’organiser les intermédiaires indépendants :
petites structures de courtage ou agents généraux ?
Avant même la question du « comment », se pose celle du « quoi ». En effet, si la maîtrise des
problématiques d’assurance à l’international n’est pas homogène parmi les courtiers membres
d’un réseau, elle est faible voire inexistante chez les intermédiaires indépendants.
L’enjeu est d’autant plus important que ces intermédiaires ont comme clients des EMTI qui sont
elles-mêmes peu au fait de ces questions et demandeuses d’informations.
Le premier réflexe sera de contacter un courtier membre d’un réseau pour travailler en cocourtage. Cette solution n’est applicable que pour les affaires d’une certaine taille : le seuil de
rémunération demandé par le courtier qui mettra en place la solution internationale constitue vite
une limite. Et pour les affaires les plus importantes, le courtier qui a accès à un réseau pourra
avoir comme stratégie de ne pas travailler en co-courtage afin de bénéficier de cet avantage
concurrentiel.
3.2.2
Les différents types de réseaux :
L’intermédiaire peut être un courtier avec un réseau intégré. Ce type de réseau peut se définir
comme : un acteur de taille mondiale, capable d’apporter un service aux assurés avec une
procédure standardisée, quelque soit le lieu d’exécution de la prestation.
Ces réseaux sont relativement peu nombreux. Ceux qui opèrent en France se comptent sur les
doigts de la main54 : Gras Savoye, Marsh, Aon et Siaci St Honoré55.
L’intermédiaire peut également être membre d’un réseau non intégré. Il s’agit de courtiers sans
lien capitalistique entre eux. Certains réseaux choisissent de n’avoir qu’un représentant exclusif
53
International Association of Insurance Supervisors (IAIS), “Report on insurance laws, regulations and practices in IAIS member
jurisdictions”, decembre 2007.
54
Classement dans l’ordre du palmarès des courtiers français 2010 publié par L’Argus de l’assurance, n° 7172. Respectivement n°
1, 2, 3 et 5 (Verspieren est n° 4).
55
Jardine Lloyd’s Thompson est un réseau intégré avec un accord de partenariat conclu historiquement avec Siaci, puis Siaci-St
Honoré, pour la France.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
pour chaque pays (Brokers Link), d’autres peuvent avoir plusieurs adhérents (UNIBA Partners).
Inversement, un courtier peut adhérer à un ou plusieurs réseaux, comme Filhet Allard.
Le choix des membres est effectué sur des critères similaires56 d’un réseau à l’autre. Le principal
élément est la taille du courtier et son profil, afin de constituer un groupe relativement homogène.
Une équipe de collaborateurs maîtrisant l’anglais est un pré requis.
Encadré 12 : les 10 premiers courtiers mondiaux et leur
réseau (classement par chiffre d’affaires).
Courtier
1
2
Marsh & McLennan
Aon
3
Willis Group
4
Arthur J. Gallagher & Co
5
Wells Fargo Insurance Serv.
6
7
BB&T Insurance Services
Brown & Brown
Jardine Lloyd's Thompson
Group
Lockton
Gras Savoye
8
9
10
Origine
USA
USA
Royaume
Uni
USA
USA
USA
USA
Royaume
Uni
USA
France
Réseau
international
intégré
intégré
Présence en
France
oui
oui
intégré
Gras Savoye
non intégré
n/c
LSN /
Concordia
non
non
Siaci St
Honoré
Diot
oui
non intégré
néant
néant
intégré
non intégré
intégré
D’après : Business Insurance, classement 2010 des 100 1ers courtiers mondiaux et sites internet
des entreprises consultés en septembre 2010.
A quelques variantes près, les réseaux non intégrés fonctionnent de manière similaire. Le partage
de rémunération est fixé par le réseau (60 à 70 % pour le courtier producteur s’il a effectué le
placement ; 30 à 40 % pour le courtier local pour le seul service). La commission de courtage
reste acquise en totalité au courtier local pour garantir une bonne qualité de service en-deçà d’un
certain seuil (1 000 € pour Brokers Link).
Il n’y a pas d’obligation de passer par le réseau pour le courtier producteur. Lorsque plusieurs
courtiers adhèrent dans le pays de destination, le choix se fait selon la proximité géographique
avec le client local et/ou selon les affinités.
Les réseaux fonctionnent sur le principe du double flux :
-
des contrats à l’export à partir de la France à destination des autres pays,
-
des contrats à l’import depuis le reste du monde vers la France.
Le coût d’accès au réseau peut varier. Certains réseaux, comme Trust Risk Control, prévoient
plusieurs niveaux d’adhésion : de l’exclusivité au seul traitement des affaires à l’import.
Les différents intermédiaires et assureurs rencontrés s’accordent sur le fait que le niveau de
maîtrise des problématiques d’assurance à l’international varie d’un intermédiaire à l’autre, voire
au sein d’un même cabinet de courtage.
56
Sources : entretiens réalisés entre mai et décembre 2010.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Encadré 13
10 : les principaux réseaux non intégrés opérant
en France (classement : volume de primes géré).
Réseau
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Assurex
WBN
Brokerslink
Trust Risk Control
AESIS
Euribron
Wells Fargo Global
Broker Network
Wing
(a)
Uniba Partners
EOS Risq
Date de Nombre de Volume de
création
pays
prime (b)
Représentant en
France
1954
1989
2002
n/c
2000
1994
81
56
50
75
35
40
28 Md$ Verspieren
25 Md$ Verlingue
10,5 Md$ DP Assurance
5 Md$ Filhet Allard
4,5 Md$ Filhet Allard
2,5 Md$ Rambaud Labrosse
n/c
132
n/c LSN
n/c
1987
2000
50
120
135
n/c Servyr
France Courtage
n/c Diot
(c)
/ Concordia
D’après : entretiens entre mai et décembre 2010 et sites internet des entreprises consultés en
septembre 2010.
(a) UNIBA est jumelé avec le 3ème réseau nord américain, RPNI (Risk Pro Net International)
(b) Encaissement 2008 ou 2009, un seul publie des données de 2006.
(c) LSN a été racheté par Diot en 2010. L’impact en termes de réseau n’est pas encore connu.
Au-delà des efforts de formation réalisés par les intermédiaires ainsi que par les réseaux57, un
assureur qui organiserait des ateliers pratiques pourrait d’une part renforcer ses liens avec ses
apporteurs d’affaires ou amorcer de nouvelles relations, et d’autre part améliorer la qualité des
informations reçues, l’intermédiaire ayant alors une meilleure connaissance des enjeux.
Les EMTI peuvent choisir leur intermédiaire en fonction de différents critères mais il existe une
certaine corrélation entre la taille de l’entreprise et celle de l’intermédiaire :
- pour des raisons de proximité : les plus petites EMTI sont souvent assurées via un
intermédiaire intégré dans le tissu économique local par opposition à un grand courtier
international.
- pour des raisons de coût : plus la structure du courtier est internationalisée, plus il
recherchera un revenu minimum par client pour la financer.
L’assureur qui s’intéresse aux EMTI qui s’internationalisent devra intégrer dans sa réflexion la
capacité ou non de l’intermédiaire à accompagner son client. Certains groupes européens ont
déjà amorcé la mise en œuvre de solutions dans ce sens :
- Axa avec le réseau NEAR (Nearby Expertise Axa Relationship),
- Allianz avec le projet « Cross Border Business »,
L’assureur qui mettra en place un accompagnement pour ces intermédiaires élargira sa base
d’apporteurs, y compris pour les affaires domestiques : l’intermédiaire interrogera naturellement
l’assureur qui l’aura aidé sur un dossier complexe pour lui.
57
Brokers Link organise des sessions de formation internationale deux fois par an pour les gestionnaires et les chargés de
clientèles. EOS Risq organisent des échanges de collaborateurs sur plusieurs semaines ou plusieurs mois.
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partie : la mondialisation des EMTI et son impact sur le marché de l’assurance
Ce qu’il faut retenir :
Les problématiques d’assurance concernant les EMTI ne diffèrent guère de celles rencontrées
par les grandes entreprises. En revanche, les moyens dont disposent les EMTI face au
risque sont différents (base d’expérience sinistre et ressources internes plus faibles). Ces
entreprises ont donc des besoins en termes d’accompagnement et de conseils beaucoup
plus importants qu’une grande entreprise.
Le nombre des EMTI qui s’internationalisent est en croissance. Malgré l’effet de la crise
sur la période 2008/2010, la tendance suit la globalisation de l’économie. Elle est soutenue par
les politiques économiques ciblées sur les deux sous segments que sont les PME* et les ETI*.
Pour le secteur de l’assurance d’entreprises, le segment des EMTI est essentiel. Il est
plus stable que celui des grandes entreprises qui peuvent mettre en œuvre d’autres solutions
de transfert de risques que l’assurance, et dont les achats d’assurance sont déjà très
mondialisés.
Au sein des EMTI, les entreprises qui s’internationalisent représentent un sous-segment
attractif. En termes qualitatifs, il s’agit d’entreprises plus innovatrices et dynamiques que leurs
pairs. En termes quantitatifs, le nombre d’implantations à l’étranger est estimé à 14 800 ;
l’encaissement global, toutes branches, y compris primes françaises est estimé à 300 M€ en
2009 et pourrait atteindre 400 M€ à l’horizon 2015 dans un contexte de sortie de crise.
Ce marché est :
-
un relais de croissance pour les assureurs positionnés grands comptes.
-
une source de diversification pour les assureurs orientés vers les entreprises
domestiques.
-
un moyen de différenciation par rapport à la concurrence pour attirer un flux
d’affaires et établir ou développer une relation plus large avec l’intermédiaire dont
l’objectif est de trouver une solution pertinente pour son client. L’assureur qui saura se
positionner sur un dossier a priori plus complexe bénéficiera d’un avantage compétitif
pour étudier des affaires purement domestiques.
Il est important de se positionner sur ce marché même s’il ne représente que 14 % des
EMTI car ce marché croit plus vite que celui des EMTI domestiques et il s’agit d’un vecteur
stratégique d’attaque pour les nouveaux entrants.
Faute de se donner les moyens de se positionner sur ce segment, les acteurs actuels
prennent le risque de laisser la porte ouverte à leurs concurrents, et pas uniquement sur
ce segment.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
2ème partie
La mondialisation du marché de l’assurance suitelle celle de l’économie : les contraintes
rencontrées par les assureurs ?
Un assureur peut-il accorder une garantie hors France sans autre
considération ? Quelles sont les contraintes rencontrées hors des
frontières ? Sont-elles identiques dans l’Union Européenne et endehors ? Quels sont les risques qui pèsent sur l’assureur, l’assuré et
l’intermédiaire ? Allons-nous vers une libéralisation des opérations
internationales d’assurance ?
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
1. Un environnement réglementaire fortement contraignant :
Le premier défi que doivent relever les assureurs qui souhaitent accompagner leurs clients audelà des frontières, c’est la mosaïque de réglementations différentes avec laquelle ils vont devoir
composer. Des principes de la Common Law des pays anglo-saxons au droit codifié des pays
latin, l’environnement juridique dans lequel opèrent les entreprises qui s’internationalisent est pour
le moins varié. A cela, s’ajoute la diversité des réglementations propres à l’assurance.
Les parties à un contrat international peuvent choisir le droit applicable d’un commun accord58.
Néanmoins, cette pratique du droit international privé ne les affranchit pas des dispositions
locales de droit public.
En particulier, « sont régies par le droit local de l’Etat de la prestation la capacité de l’assureur à
souscrire localement un risque, la fiscalité de la police ou encore les rétrocessions obligatoires en
assurance et en réassurance ».59
De nombreux pays ne permettent pas à un assureur de pratiquer des opérations d’assurance sur
leur territoire sans agrément. Certains pays le permettent dans un cadre spécifique.
Après avoir rappelé la raison d’être d’un agrément pour l’assureur, une première partie dressera
une cartographie des différentes situations. Une seconde partie précisera les risques de
l’assurance non admise pour les acteurs du marché de l’assurance.
1.1
1.1.1
De l’importance de l’agrément d’assurance.
A quoi sert l’autorisation de pratiquer des opérations d’assurance ?
Pourquoi le secteur de l’assurance est-il aussi fortement réglementé (encadré 14) ? La première
réponse de toutes les autorités de contrôle du monde est : pour protéger les intérêts de l’assuré.
En corollaire, la réglementation a également pour objet de contrôler la solvabilité des différents
assureurs qui opèrent sur un territoire, donc de veiller à leur capacité à remplir leurs obligations
vis-à-vis des assurés.
Les règles édictées par l’International Association of Insurance Supervisors (IAIS) précisent
qu’aucun assureur, qu’il soit domestique ou qu’il s’agisse de l’établissement d’un assureur
étranger, ne doit échapper au contrôle.60
A l’évidence, aucun de ces objectifs ne peut être atteint lorsque l’assureur opère depuis
l’étranger : l’autorité de contrôle locale n’a aucun moyen d’action contre l’assureur qui n’a ni
établissement, ni actifs sur son territoire61.
Si ces motifs sont parfaitement légitimes, certains pays ont également une motivation
protectionniste plus ou moins avouée :
-
permettre au marché d’assurance local d’atteindre une taille critique avant l’ouverture à la
concurrence. Par exemple le Brésil où le monopole d’Etat en matière de réassurance a
été aboli le 17 avril 2008. Jusqu’à cette date, la filiale d’un assureur étranger établie au
58
La Tribune de l’Assurance, “Polices Internationales et droit local”, Me Rostan d’Ancezunes, n° 127, 09/2008.
La Tribune de l’Assurance, “Polices Internationales et droit local”, Me Rostan d’Ancezunes, n° 127, 09/2008.
IAIS, « Insurance core principles », principe n° 6, 2003.
61
Le cas particulier de l’Union Européenne fait l’objet du paragraphe 2.2 ci-après.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Brésil ne pouvait céder ses primes vers sa maison mère ; cette filiale avait l’obligation de
de traiter avec le réassureur d’Etat.
-
soutenir le développement de l’économie locale en conservant les flux collectés pour
l’investissement dans le pays. Encore faut-il qu’il y ait des opportunités adaptées aux
profils d’investissements recherchés par les compagnies d’assurance.
-
Créer une barrière à l’entrée par l’application de tarifs réglementés (Inde62), en interdisant
certaines branches aux assureurs non domestiques, même établis dans le pays
(assurance responsabilité civile automobile en Chine63) ou en soumettant les documents
remis aux assurés à une autorisation préalable ou à un dépôt auprès des autorités de
contrôle (USA64).
Encadré
14 :
les
principaux
réglementation de l’assurance.
objectifs
de
la
Source : IAIS, « Report on insurance laws, regulations and practice in IAIS member jurisdictions », 2005.
1.1.2
La notion de lieu de risque pour une entreprise :
La définition du lieu de risque est un élément clé d’où découlent les obligations légales,
réglementaires et fiscales qui seront applicables au contrat. Afin de déterminer si l’agrément de
l’assureur lui permet de porter le risque, il convient en préalable de définir le lieu de risque.
C’est chose aisée en matière d’assurance dommages aux bâtiments : il s’agit du pays où se situe
le bien et, par extension, son contenu. Cela peut être plus complexe pour d’autres branches. Le
premier réflexe doit être de se reporter à la législation du pays ou des pays concernés.
62
The International Association for the Study of Insurance Economics, Veena Raman, ”Regulatory dissonance and challenges to
globalization, a comparative study of the US and Indian non life insurance regulatory frameworks”, 2004.
63
Willis International Alert, « New compulsory rules on auto insurance in China », 07/2006.
64
The International Association for the Study of Insurance Economics, Veena Raman, ”Regulatory dissonance and challenges to
globalization, a comparative study of the US and Indian non life insurance regulatory frameworks”, 2004..
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Il existe bien entendu des particularités locales, mais il est généralement admis que :
-
-
-
1.1.3
en automobile : dans l’Espace Economique Européen, EEE, et en Suisse, le risque est
situé dans le pays d’immatriculation du véhicule. Ailleurs, il est situé dans le pays où est
habituellement basé le véhicule.
pour les corps de navire : le risque est situé dans le pays d’immatriculation du navire, à
l’exception de certains Etats comme le Panama ou le Liberia (le risque est considéré
comme situé dans le pays lorsque le navire navigue uniquement dans les eaux
territoriales),
pour les bâtiments et leur contenu garantis par un même contrat : le risque est situé dans
le pays où se trouve le bien.
pour les marchandises en cours de transport : le risque est situé dans le pays où se
trouve l’entreprise assurée à la prise d’effet des garanties.
pour les autres branches non vie : le risque se situe dans le pays où se trouve
l’établissement65 de l’assuré auquel se rapporte le contrat.
Définition de l’assurance admise / non admise :
Les termes d’assurance admise et non admise proviennent directement de l’anglais « admitted /
non admitted paper ». Par commodité de langage, et pour rester proche de la pratique
quotidienne, nous conserverons les expressions assurance admise et non admise par la suite.
Hormis aux Etats-Unis où la notion d’assurance admise et non admise recouvre une réalité
différente, un contrat d’assurance admis (ou admitted insurance policy ou licensed insurance
policy) se définit comme un contrat d’assurance émis par un assureur qui a l’agrément
(« license » en anglais) pour pratiquer des opérations d’assurance dans le pays où se situe le
risque ou dans le pays où est établie l’entreprise assurée.
A contrario, un contrat d’assurance non admis (ou non admitted insurance policy ou unlicensed
insurance policy) fait référence à un contrat d’assurance émis par un assureur depuis un pays
tiers, sans que l’assureur ait un agrément pour pratiquer des opérations d’assurance dans le pays
où se situe le risque ou dans le pays où réside l’assuré.
Aux Etats-Unis, un « admitted insurance carrier » ou assureur autorisé est une compagnie
d’assurance membre du Fonds de Garantie des Assurances (« Insurance Guaranty Fund ») dans
chaque état où l’opérateur propose des contrats.
Un « non admitted insurance carrier » ou assureur non autorisé, fait référence au « Excess &
Surplus lines ». Il s’agit d’une compagnie d’assurance enregistrée sur la liste blanche (« White
list ») qui recense les assureurs américains agréés pour proposer des contrats d’assurance dans
les Etats où les assureurs admis n’offrent pas ces produits et/ou limites. Les assureurs « Excess
& Surplus lines » ne sont pas membres du fond de garantie.
Toujours aux Etats-Unis, l’assureur non admis tel que définit pour le reste du monde est appelé
« Unauthorised Alien » ou assureur étranger non autorisé.
65
L’établissement doit avoir un caractère permanent et peut être : une filiale, une succursale, un bureau de représentation, un
agent… La notion est généralement comprise dans un sens large, même si en droit français il y a débat sur la question de la
succursale (porte-t-elle un risque ?). En droit européen, la notion d’établissement est plus large et une succursale peut être
constitutive d’un risque.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
1.1.4
Un assureur peut-il pratiquer des opérations d’assurance sans agrément ?
De la Chine ou l’Argentine qui interdisent strictement toute forme d’assurance non admise, à
Hong Kong où les conditions sont peu contraignantes, tous les degrés entre admis et non admis
existent (encadré 15).
Néanmoins aucun pays ne l’autorise expressément : cela reviendrait à accepter de ne pas
protéger du tout l’assuré. Les zones en vert de la carte ci-dessous correspondent donc à des
pays où, sous certaines conditions, un assureur peut opérer sans avoir d’établissement.
Encadré 15 : carte des pays « admis », « non admis » et
des zones grises (Axa Corporate Solutions).
Source : Axa Corporate Solutions
Espace Economique
Européen : non admis hors
E.E.E. strictement interdit en
France, en Italie, en Espagne
et en Irlande. LPS et liberté
d’établissement pour les opérateurs des pays membres.
Au sein de l’Espace Economique Européen (EEE), un assureur autorisé dans un Etat membre
peut pratiquer des opérations d’assurance dans les autres Etats membres en vertu de la liberté
d’établissement et de la liberté de prestation de services (LPS). Cette particularité fait l’objet d’un
développement dans le paragraphe 2.2.
L’objet de ce travail n’est pas de recenser de manière exhaustive toutes les nuances des
différentes réglementations. Le lecteur qui souhaite approfondir ses connaissances sur un pays
en particulier peut consulter le site du Lloyd’s de Londres, www.crystal.lloyds.com, dont une large
partie est accessible au public.
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En revanche, il est intéressant de définir les grandes catégories de réglementation, un même
pays pouvant être concerné par plusieurs d’entre elles selon les branches66 :
-
1ère catégorie : les pays où les assureurs doivent avoir un agrément local mais où
aucune stipulation n’empêche l’assuré de souscrire en non admis : l’Autriche et une
large part des membres de l’EEE, le Canada (encadré 16), les Etats-Unis…
Encadré 16 : différence de traitement de l’assureur non
admis, l’exemple du Canada.
La loi prévoit qu’un assureur ne peut pratiquer des opérations d’assurance au Canada
sans agrément. Aucune disposition n’interdit à un particulier ou une entreprise de
souscrire un contrat auprès d’un assureur non admis. Enfin, la loi prévoit des taxes
spécifiques sur les contrats non admis, ce qui revient à accepter la pratique.
En conséquence, hormis certaines assurances obligatoires avec un régime particulier,
une entreprise établie au Canada peut s’adresser à un assureur non admis pour
garantir ses risques.
La différence de traitement consiste à :
- l’application de l’« Excise Tax » de 10 % à la charge de l’assureur non admis.
Cette taxe n’est toutefois pas due si l’assuré s’est adressé à un assureur non
admis parce que la garantie souhaitée n’était pas disponible sur le marché
canadien.
- L’application d’une taxe sur le contrat non admis, payée par l’assuré, plus
élevée : jusqu’à 50 % de la prime alors que les taxes sur les contrats
d’assurance sont inférieures à 5 %, hormis pour certaines branches en Ontario
et au Québec où elles n’excèdent pas 9%.
Aucune taxe ne sera appliquée sur l’indemnité en cas de sinistre dans la mesure où le
contrat non admis aura été déclaré auprès de l’administration fiscale et les taxes cidessus réglées.
Il convient alors d’étudier les sanctions pour définir l’intention du législateur et les risques
encourus. L’assureur non admis peut être sanctionné s’il a recherché la transaction. En
revanche, dès lors que la loi n’oblige pas l’assuré à souscrire auprès d’un assureur ayant
un agrément local, l’assuré est libre de conclure un contrat non admis à ses risques et
périls (encadré 17).
Dans certains cas, le droit local oblige à souscrire un contrat avec un assureur ayant un
agrément uniquement pour les garanties obligatoires (responsabilité civile automobile et
accidents du travail aux Etats-Unis). L’interprétation à contrario est que l’assuré peut
souscrire une garantie non obligatoire auprès d’un assureur non admis.
66
Sauf note de bas de page spécifique, les informations pays ont été vérifiées sur le site Axco en septembre 2010 (accès sur
abonnement).
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Encadré 17 : le paradoxe de l’assurance non admise aux
USA.
En matière d’assurance aux Etats-Unis, il existe autant de réglementations que d’Etats. Le
point commun est l’interdiction de l’assurance non admise (l’assureur et le courtier sont
sanctionnés). Néanmoins, au niveau fédéral, la législation prévoit que lorsqu’une
opération d’assurance s’effectue entièrement en dehors d’un Etat, la réglementation de
l’Etat ne peut s’appliquer(a).
En pratique, pour ne pas s’exposer aux sanctions applicables à un assureur opérant en
non admis, l’ensemble de la transaction doit se dérouler en dehors de l’Etat où se trouve
le risque. L’assuré doit alors quitter l’Etat pour se procurer directement la garantie auprès
d’un assureur étranger (notion de « direct procurement »).
A priori, la filiale d’une entreprise française dont le contrat est négocié en France, par la
maison mère, entre dans cette catégorie. Ceci ne dispense pas l’assuré local de régler les
taxes locales. L’assureur non admis devra régler la Federal Excise Tax (FET) sauf s’il
existe un traité fiscal entre les Etats-Unis et le pays tiers.
(a) Jugement de la Cour Suprême Allgeyer v/ Louisiana (1897), renforcé par le jugement State Board of
Insurance v Todd Shipyards Corp (1962)
-
2ème catégorie : les pays dans lesquels une garantie n’est pas disponible sur le
marché ou pour laquelle la capacité du marché local est insuffisante. Il s’agit
souvent de marchés d’assurance émergents où les acteurs locaux n’ont pas encore
acquis les compétences nécessaires pour proposer certains contrats (responsabilité civile
des mandataires sociaux, risques environnementaux…).
L’assuré doit alors justifier d’un nombre suffisant de refus pour pouvoir s’adresser à un
assureur non admis. Dans certains pays, il incombe à l’assureur non admis de vérifier
que l’assuré a bien effectué ces recherches avant de l’approcher.
L’implantation d’entreprises habituées aux contrats des marchés d’assurance occidentaux
génère alors une demande qui ne peut être satisfaite par les opérateurs locaux. Elles
peuvent demander un montant de garantie auxquels elles sont habituées dans leur pays
d’origine, par exemple un contrat de responsabilité civile avec une limite assurée de 50
M$. Si ce montant est adapté aux profils des réclamations dans certains pays, il est
totalement surdimensionné pour d’autres et il pourra être difficile de trouver la capacité
correspondante en local.
-
3ème catégorie : les pays interdisant strictement l’assurance non admise : les BRIC
(Brésil, Russie, Inde, Chine), la France, l’Irlande, l’Italie, l’Espagne, la Suisse, la Turquie,
le Maroc, le Mexique, le Japon, les Philippines, l’Indonésie, la Malaisie... Il est clairement
stipulé que l’assuré doit souscrire son contrat auprès d’un assureur ayant un agrément
local.
Il peut toutefois y avoir des exceptions limitativement énumérées par la loi, sur des
domaines étroits. L’assurance des risques Maritime, Aviation et Transport (MAT) fait
l’objet d’exceptions dans quasiment tous les pays67.
67
Exceptions : l’Inde et la Malaisie, notamment, où un navire immatriculé localement ne peut être assuré auprès d’un assureur
n’ayant pas l’agrément local (www.crystal.com – septembre 2010).
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
1.2
Les risques de l’assurance non admise :
2
1.2.1
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Pour l’assuré
Bien souvent, l’assuré ignore tout des risques qu’il encourt dans l’hypothèse où le contrat souscrit
est non admis : plus l’entreprise est petite, moins sa connaissance des problématiques d’assurance
hors France sera étendue. Parfois, l’assuré peut être plus ou moins conscient que le contrat est
souscrit en non admis mais penser qu’il s’agit là d’une histoire d’assureurs qui ne le concerne pas
directement. Il commet là une erreur dont les conséquences pourront être lourdes.
Un contrat souscrit en non admis n’a pas, par essence, la qualité de contrat d’assurance dans le
pays où la garantie doit jouer.
Lorsqu’une assurance est obligatoire localement (encadré 18), l’assuré devra justifier qu’il répond
bien à cette obligation par la production d’un justificatif, généralement sous la forme d’une
attestation d’assurance dans la langue locale. En l’absence d’un contrat émis par un assureur agréé
localement, l’assuré sera dans l’incapacité de produire ce document et s’exposera à des sanctions
pour non respect de l’obligation concernée.
Encadré 18 : bref aperçu des principales catégories
d’assurances obligatoires non vie à travers le monde.
Très rares sont les pays qui ne prévoient aucune obligation d’assurance. La plupart des
assurances obligatoires concernent les assurances de responsabilité civile. Les
grandes familles d’assurances obligatoires sont :
1. L’assurance des conséquences pécuniaires des accidents de la circulation :
moins de 10 pays n’ont pas d’obligation ou n’appliquent pas la loi lorsqu’elle existe(a).
C’est l’obligation la plus communément rencontrée.
2. Les assurances relatives aux relations de travail : garantie des accidents du
travail (USA…)
3. Les assurances relatives aux activités industrielles : responsabilité civile
produits, garanties des risques environnementaux en Chine (création d’un système
d’assurance obligatoire en 2009) ou en Argentine (publication en 2008 du décret
d’application de la loi sur l’environnement de 2002).
4. Les assurances relatives aux professions réglementées : avocats, intermédiaires
en assurances, experts comptables…
5. L’assurance de la responsabilité civile médicale (ou Medical Malpractice,
MedMal).
6. Certaines assurances de dommages, l’assurance obligatoire des risques relatifs
aux actes de terrorisme et/ou aux conséquences des événements naturels dès lors
qu’il existe un contrat de dommages aux biens, l’assurance construction…
(a) L’Ethiopie, le Mozambique, le Laos et le Mexique qui ont institué une obligation d’assurance qui reste
inappliquée ; Cuba, le Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Cambodge ne prévoient pas d’obligation
d’assurance en RC automobile.
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Comme le souligne Me Rostan d’Ancezunes, les assurances obligatoires sont édictées par les Etats
tant pour protéger les assurés que pour protéger les intérêts des tiers et « rentrent dans la catégorie
juridique des lois de police » ; « l’assuré engage sa responsabilité civile et pénale »68.
Outre la sanction pour le non respect d’une obligation d’assurance, l’assuré reste passible d’un
certain nombre de sanctions à différents niveaux.
Au niveau fiscal69 :
-
la prime n’a pas la qualification fiscale de prime d’assurance, l’assuré ne peut donc la
considérer comme une charge d’exploitation.
-
de même, le versement en cas de sinistre n’a pas la qualification d’indemnité. Il est donc
fiscalisable.
Comment va réagir l’administration fiscale d’un pays où une filiale a un capital social de
50 000 $ mais reçoit tout à coup une indemnité de plusieurs dizaines de millions de dollars ?
En responsabilité civile des mandataires sociaux, comment expliquer qu’un cadre qui gagne
150 K$ reçoive tout à coup 2 M$ pour des frais de procédure ? Est-ce un salaire ? Y a-t-il des
charges sociales ? Les autorités peuvent considérer qu’il y a fraude ou blanchiment.
Au niveau civil70 : le contrat peut être frappé de nullité, mettant alors l’assuré dans l’impossibilité
de percevoir une indemnité.
Au niveau pénal :
-
l’assuré peut se voir appliquer une amende dont le montant n’est pas toujours symbolique. En
Argentine, l’amende peut aller jusqu’à 25 fois le montant de la prime, même si l’assuré est de
bonne foi et n’a pas cherché à faire de l’évasion fiscale. Ces sanctions sont régulièrement
appliquées ainsi qu’en témoignent deux cas récents71.
-
outre l’amende, il existe des pays où l’assuré encourt une peine de prison, comme au
Mexique72.
Pour régler sa prime émise en Euros à l’assureur non admis, si la transaction n’est pas réalisée de
manière centralisée par la maison mère (ou à sa maison mère s’il s’agit d’une refacturation interne),
l’assuré local devra convertir la monnaie locale en devises. Dans les pays pratiquant un strict
contrôle des changes comme le Venezuela, cela n’ira pas sans poser des difficultés.73
Enfin, même si l’assuré ne s’expose pas à tout ou partie des sanctions ci-dessus, il est important
qu’il ait conscience qu’en souscrivant un contrat non admis, il se prive de la protection offerte par la
réglementation locale, notamment en matière de protection des intérêts de l’assuré, droit du
consommateur, etc. lorsque ces dispositions ne sont pas d’intérêt public.
68
La Tribune de l’Assurance, « Polices internationales et droit local », n° 127, septembre 2008.
Entretien avec Me Rostan d’Ancezunes, HMN & Partners, mai 2010
70
Entretien avec Me Ghueldre, Gide Loyrette Nouel, juillet 2010.
71
Sanction du 15/05/2009, décret n° 560/2009 du Ministère de l’Economie et des Finances Argentin : amende égale à 8 fois la prime
pour l’assuré et à 15 fois le montant de la prime pour le courtier. Sanction du 26/05/2010, décret n° 726/2010 : amende égale à une
fois le montant des primes réglées soit un totale de 20 210 $. Dans ce cas, l’assuré avait souscrit un contrat d’assurance vie
directement auprès d’un assureur non admis.
72
Article 141 de la « Ley General de Instituciones de Seguros y Sociedad Mutualistas », punissant une personne résidant sur le
territoire mexicain qui a souscrit un contrat à l’étranger de 3 à 10 ans de prison, ainsi qu’à une amende de 200 à 2 000 jours de
salaire.
73
Au Vénézuela, les documents suivants doivent être présentés à la Commission d’Administration des Devises (CADIVI) : le
justificatif du paiement en monnaie locales, le certificat de réassurance produit par le réassureur international, l’original de la police
locale signée avec le cachet de l’assureur, la facture.
69
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Il assume également le risque de travailler avec un assureur qui ne répond pas aux normes
édictées par les autorités de contrôle, en particulier en matière de solvabilité. Si le risque est minime
lorsque le contrat est souscrit auprès de groupes internationaux d’assurance dont les sièges sont
sous une autorité de contrôle d’un marché mature, il peut ne pas en être de même pour un assureur
dont le siège est dans un pays émergent.
1.2.2
Pour l’intermédiaire :
L’enjeu majeur pour l’intermédiaire, c’est de voir sa responsabilité recherchée par l’assuré devant
les tribunaux pour défaut de conseil. Pour Jérôme Flach, Directeur Adjoint de l’International chez
Verspieren, la conformité au droit local «est un sujet que personne, assureur ou courtier, ne
maîtrise complètement mais qui est très important. Dans la mesure où nous participons à la
conception des produits, notre responsabilité peut être engagée si nous mettons en place une
solution qui ne permet pas de verser une indemnité en local».
Outre cette sanction, l’intermédiaire s’expose également :
1.2.3
-
au niveau pénal : il peut avoir à payer une amende plus ou moins élevée. Dans les cas où
l’assuré est également sanctionné par une amende74, celle que supporte l’intermédiaire est
toujours plus onéreuse compte tenu de son statut de professionnel de l’assurance75.
-
au niveau administratif : il peut être frappé d’une interdiction d’exercer. Me Ghueldre précise
que la « seule présence du nom de l’intermédiaire sur le contrat peut suffire à qualifier
l’opération d’intermédiation dans certains pays ». Dans d’autres pays, il y a intermédiation dès
lors que l’intermédiaire vient rencontrer le client dans le cadre d’une démarche active. Le fait
de réaliser l’acte d’intermédiation sur place ou depuis l’étranger, entraîne une grande
différence dans la qualification de l’opération par l’autorité de contrôle.
Pour l’assureur :
Les sanctions pour l’assureur varient selon les pays et dépendent bien entendu d’un éventuel
agrément local ou non (encadré 19). Elles sont de plusieurs ordres :
-
au niveau civil : s’il y a nullité du contrat, l’assureur ne peut conserver les primes. S’il n’y a
pas nullité du contrat, l’assureur se retrouve en situation de ne pouvoir opposer à l’assuré les
clauses qui sont contraires aux intérêts de ce dernier. En outre, les textes d’ordres publics
locaux sont de facto applicables, même si le contrat prévoyait une exclusion ou une limitation
de la garantie.
-
au niveau pénal : les autorités locales peuvent prendre des sanctions contre les dirigeants
de la société et/ou contre la personne morale (amendes). En pratique, il n’existe aucune
jurisprudence sur le sujet, les cas avérés faisant l’objet de négociations confidentielles, ou
d’arbitrage76.
-
au niveau administratif : si l’assureur a un agrément dans le pays mais a travaillé en non
admis depuis l’étranger, la sanction peut aller jusqu’au retrait d’agrément.
S’il n’a pas d’agrément dans le pays, l’assureur se ferme le marché dans l’hypothèse d’une
demande future d’agrément. Il pourra avoir des difficultés à trouver un fronteur pour opérer en
fonction du poids de l’autorité de contrôle auprès du fronteur pressenti. Enfin, il n’est pas
74
Un courtier allemand qui place ou assure le service d’un contrat souscrit auprès d’un assureur non admis s’expose à une amende
pouvant atteindre 100.000 € (§ 144 de la loi sur le contrôle des opérations d’assurance).
75
La Tribune de l’Assurance, « Polices internationales et droit local », n° 127, septembre 2008.
76
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exclu qu’un Etat étranger engage une action en France se traduisant par une action
disciplinaire de l’autorité de contrôle française vis-à-vis de l’assureur concerné.
-
Accès aux pools de réassurance : à l’évidence, un assureur non admis se prive de l’accès
aux pools locaux permettant de mutualiser les risques en matière d’actes de terrorisme ou
d’événements naturels77.
Cette protection peut lui être accordée par ses propres traités mais lorsqu’il s’agit de garantir
un risque conformément à une obligation locale, la protection du pool instituée à l’initiative de
l’Etat local pourra être plus large que celle du traité de l’assureur.
Encadré 19 : D’ouest en est, et du nord au sud, petit
inventaire des sanctions qui peuvent frapper un assureur
effectuant des opérations d’assurance en non admis.
- Etats-Unis (Caroline du Nord) : 5.000 $ (1ère infraction) ou 10.000 $ par jour où
l’assureur est en infraction avec l’article 58-28-13, alinéa a- de la réglementation sur
l’assurance de l’Etat. Sans préjuger d’éventuelles sanctions pénales, ni du
remboursement des frais extraordinaires engagés par l’administration de l’Etat dans ses
investigations.
- Brésil : amende égale à la somme assurée ou réassurée (article 113 de la loi n° 73 du
21/11/1966). En outre, il est illégal de transférer des fonds à l’étranger pour payer un
contrat non admis ; inversement, les éventuelles indemnités ne peuvent être transférées
depuis l’étranger.
- Suisse : la loi fédérale sur la surveillance des entreprises d’assurance (LSA –
17/12/2004) prévoit, si l’intermédiaire ou l’assureur agit par négligence, une amende de
250.000 CHF (art. 87) ; si l’auteur agit intentionnellement, la loi prévoit une sanction
pécuniaire sans préciser de plafond ou une peine de prison pouvant aller jusqu’à 3 ans.
- Malaisie : la loi prévoit jusqu’à 10 de prison pour l’assureur et/ou 2,8 M$ d’amende ;
jusqu’à 3 ans de prison et/ou 850.000 $ d’amende pour le courtier (loi sur l’assurance de
1996).
- Indonésie : l’article 21 de la loi 2/1992 relative à l’assurance prévoit une peine de
prison pour les personnes procédant à des transactions d’assurance non admises
pouvant atteindre 15 ans de prison et une amende au maximum de IDR 2.5 bn (soit
241,500 $).
1.2.4
Les sanctions sont-elles réellement appliquées ?
La distance aidant, il peut être tentant de considérer les sanctions comme théoriques ou comme le
fait de pays émergents où il sera aisé de les esquiver.
L’interdiction de l’assurance non admise n’est pas limitée à un nombre restreint de pays lointains.
Sous estimer les pouvoirs des autorités de contrôle locales serait également une erreur. La
77
Par exemple : le Consorcio en Espagne, Terrorism Reinsurance and Insurance Pool (TRIP) pour les actes de terrorisme en
Belgique.
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globalisation des échanges les concerne aussi. Pour preuve : les échanges entre membres de
l’IAIS et la base de données « pays » mise en place depuis octobre 200578.
Les différents exemples ci-dessus mettent en évidence que les sanctions sont effectivement
appliquées même si les autorités locales n’ont pas les moyens d’effectuer des contrôles
systématiques. Les différents acteurs du marché s’accordent sur le fait que les autorités de contrôle
et les autorités fiscales sont de plus en plus attentives aux infractions possibles79. La crise de 2008
et sa propagation à travers le système bancaire ne peuvent que renforcer cette attention.
Les contrats non admis peuvent être révélés à l’occasion de :
-
la survenance d’un sinistre : le transfert de l’indemnité à l’entité locale ne passera pas
inaperçu,
-
en cas de contrôle comptable ou fiscal. Le risque peut apparaître moindre dans une grande
entreprise, le contrat étant noyé dans une masse de données. En revanche, le contrat sera
plus facilement identifié dans les comptes d’une PME*,
-
au moment du paiement des taxes. L’autorité fiscale peut demander des justificatifs à
l’assuré.
-
en cas de procédure devant les tribunaux (en particulier pour les contrats de Responsabilité
Civile et de Responsabilité Civile des Mandataires Sociaux). Pour les pays soumis à la
procédure de discovery80, le contrat peut se trouver communiqué aux parties du litige,
induisant un risque de contrôle.
-
en cas d’obligation d’assurance, légale ou contractuelle, l’assuré doit produire une attestation
d’assurance,
-
par des concurrents de l’assureur (ceux-ci peuvent se plaindre d’une distorsion de
concurrence du fait du non paiement des taxes) ou de l’assuré.
L’assurance en non admis n’est donc pas exempte de risques. Si elle a été pratiquée – et
continue de l’être dans certains cas – par ignorance ou facilité, les enjeux pour les parties sont
importants.
En pratique, c’est souvent l’assuré qui sera le plus pénalisé dès lors qu’il est implanté localement :
il a des actifs sur le territoire, une image à protéger vis-à-vis de son marché. Immédiatement
après, vient l’intermédiaire local qui sera sanctionné par son autorité de contrôle. L’intermédiaire
étranger devra a minima répondre à l’assuré au titre du défaut de conseil.
L’assureur qui n’a pas d’implantation locale pourrait s’estimer moins directement concerné. S’il
échappe à la sanction immédiate, que dire de l’image écornée que l’assuré gardera de lui ? Une
marque et une image se construisent dans la durée mais peuvent se retrouver mises à mal en
l’espace de quelques clics, et ce d’autant plus que la marque est mondiale.
Chez les assureurs, certains souscripteurs peuvent voir la conformité aux normes locales comme
une case à cocher sur la liste de leur guide de souscription et la vivre comme une barrière à la
réalisation des affaires.
78
IAIS, “Insurance laws, regulations and practice in IAIS member jurisdictions”, rapport 2007. Soit 28 pays des 5 continents
représentant 40 à 45 % des primes émises en 2006.
79
Willis International Alert, “Non admitted coverage: many issues, varied solutions”, août 2005. International Network of Insurance
(INI), INI News n ° 27, 2010 ; ACE Progress Report, “Beyond non admitted, a closer look at trends affecting today’s multinational
insurance programs”, 2010.
80 Régime de communication des éléments de preuve en droit anglo-saxon, que les éléments soient favorables ou défavorables à la
partie qui doit les communiquer.
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Pascale Rauline
2
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
43/99
Plutôt que de la voir uniquement comme contrainte d’exploitation, il serait plus positif de la
considérer comme une opportunité d’offrir une solution locale garantissant la sécurité juridique de
l’assuré. Et ce d’autant plus que l’assuré qui s’implante à l’étranger doit affronter toutes les
problématiques liées à son développement (création de filiale, droit social local, etc.) et appréciera
un accompagnement de qualité si celui-ci lui est expliqué.
Ce changement de regard implique deux choses :
- que tous les opérateurs jouent le jeu, dans toutes les branches (la tentation de flirter
avec la zone grise peut être plus grande pour l’assurance des biens meubles),
- que le message passe chez les intermédiaires afin de valoriser la qualité de la signature
locale de l’assureur auprès de l’assuré. Il incombe donc aux assureurs de réaliser un effort de
communication et d’information vers les intermédiaires moins sensibilisés aux problématiques
internationales.
En conclusion, les assureurs opèrent dans une diversité de cadres réglementaires qui représente
une contrainte forte, ainsi qu’une barrière à l’entrée d’un marché. Mais ce n’est pas la seule
contrainte.
2. Les contraintes fiscales : la taxe sur les polices d’assurance (TPA).
La maîtrise de l’environnement fiscal est complexe pour les assureurs qui accompagnent leurs
assurés à l’étranger. L’assureur qui a mis en œuvre la solution adaptée pour résoudre la question
de l’agrément local, puis qui a intégré les particularités juridiques des pays où travaillent ses
clients, doit encore maîtriser les subtilités de la TPA.
Quasiment partout dans le monde, avec des modalités variables, la TPA existe. L’assureur joue
un rôle de collecteur fiscal pour les fiscs nationaux. Les enjeux sont d’autant plus élevés que le
taux de TPA est important et l’encaissement de la branche concernée significatif (branche
automobile par exemple).
En Australie, pays fédéral, la fiscalité est très complexe et varie par branche, par comté, selon
que le risque est en ville (et en fonction de la taille de l’agglomération) ou dans le bush.
Les opérations internationales supposent donc que l’assureur maîtrise la fiscalité à ses différentes
étapes :
2.1
2.1.1
-
au niveau de la souscription : établir une allocation de prime cohérente et calculer les taxes
adéquates.
-
Au niveau de la gestion : collecter et régler les taxes dans les délais. Et l’assureur n’est pas
nécessairement le seul responsable de ces opérations.
A la souscription : comment calculer la taxe sur les polices
d’assurance ?
Quelle(s) taxe(s) ?
Ce travail n’a pas pour objet de faire un recensement détaillé de la fiscalité applicable aux
contrats d’assurance. Celle-ci change régulièrement, parfois d’une année sur l’autre. Le lecteur
qui souhaite plus de détail sur une partie du monde pourra consulter :
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Pascale Rauline
2
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44/99
partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
-
pour l’Europe : le « Guide de la taxation indirecte des contrats d’assurance en Europe »
publié chaque année par le Comité Européen des Assurances (CEA),
pour le monde entier : site internet du Lloyd’s de Londres, www.crystal.lloyds.com.
Il est néanmoins utile d’apprécier la variété des taxes qui se cache sous l’acronyme TPA :
-
-
la taxe sur les polices d’assurance proprement dite, qui s’ajoute à la prime hors taxes.
Son taux varie de 0 % (Hongrie) à plus de 30 % (Suède),
les taxes parafiscales qui peuvent être à la charge de l’assuré, de l’assureur ou partagées
entre eux selon les pays.
Se trouvent dans cette catégorie : la taxe pompiers (ou « Fire Brigade Tax »)
fréquemment rencontrée, les contributions aux différents Fonds de Garantie (automobile,
accident, catastrophes diverses…) mais également des contributions plus spécifiques
telle la contribution à la Croix Rouge (Belgique) ou à la Caisse de Retraite des Employés
de l’Assurance (Grèce)…
le timbre fiscal (ou « Stamp Duty »), seule taxe applicable en Suisse par exemple.
Le contrat pourra se voir grevé de taxes plus élevées lorsqu’il est souscrit en non admis
(Canada). L’assureur pourra se voir appliquer une taxe supplémentaire lorsqu’il cède des primes
d’une entité locale vers une entité à l’étranger par le biais d’un contrat de réassurance (Excise
Tax aux Etats-Unis par exemple). L’assureur pourra être exempté de la taxe sur la réassurance
en cas d’accord de non-double taxation entre le pays et la France.
2.1.2
Les conséquences de la mauvaise allocation des primes par l’assureur : exemple
de l’Union Européenne avec l’arrêt Kvaerner.
Lorsque les taxes ont été identifiées et les taux vérifiés, encore faut-il les appliquer à la prime
avec cohérence, c'est-à-dire en fonction du lieu de risque. Sauf règlementation particulière, c’est
à l’assureur de répartir la prime par lieu de risque.
Si un contrat garantit des risques dans plusieurs pays, deux écueils guettent l’assureur au niveau
fiscal. Tout d’abord, par méconnaissance des règles ou des enjeux, l’assureur peut ne pas
appliquer les taxes de manière adéquate.
L’autre écueil consiste en une demande de l’entreprise assurée qui, pour des raisons qui lui sont
propres, souhaite affecter la prime selon des critères de répartition personnels. Cela peut être
pour des raisons purement fiscales : réduire au strict minimum le poids des taxes. Il s’agit alors
d’évasion fiscale et cette demande n’est pas acceptable.
Ce peut être également parce que l’entreprise a mis en place un système de « bonus / malus »
interne où elle allège la charge d’assurance des filiales qui ont peu ou pas de sinistres pour
pénaliser celles qui en ont d’avantage. Dans ce cas, l’assuré et l’assureur doivent convenir d’une
clé de répartition qui soit parfaitement justifiable en cas de contrôle fiscal.
S’il existe des règles écrites pour déterminer la localisation d’un risque, le calcul de prime relève
de la technique pure de l’assureur. La clé de répartition entre les pays doit néanmoins être
logique et justifiable.
Il est d’usage d’utiliser :
- la valeur des capitaux assurés en dommages aux biens. Cela pourrait être le nombre de
mètres carrés,
- le chiffre d’affaires en matière de responsabilité civile (cela pourrait être l’effectif, ou la
masse salariale) et de marchandises transportées,
- le parc automobile pour les flottes.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
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Les autorités fiscales font preuves d’une vigilance certaine pour faire rentrer les taxes dans les
caisses de l’Etat, quel qu’il soit. En cette période de faible croissance économique, donc de
moindres rentrées fiscales, cette attention ne peut que se développer. A noter la position prise par
l’Australie qui chaque année publie un programme de conformité fiscale. Pour l’année 2010/2011,
sont notamment dans la ligne de mire : les transactions transfrontalières ainsi que les EMTI entre
100 et 250 m AUD de chiffre d’affaires81.
Pour autant, il existe peu de jurisprudence en la matière hormis l’arrêt Kvaerner (voir encadré 20).
Encadré 20 : l’arrêt Kvaerner. Administration fiscale 1 –
Assureur 0
Les faits : Kvaerner plc est une société anglaise. Elle souscrit un contrat Responsabilité
Civile des Mandataires Sociaux auprès d’un assureur au Royaume-Uni. Le contrat
prévoit une « broad form clause », c'est-à-dire qu’il assure le souscripteur mais
également ses filiales directes ou indirectes.
Kvaerner règle la prime totale et la refacture à ses filiales, dont une société basée aux
Pays-Bas (filiale indirecte).
Aspect réglementaire : la garantie s’exerce en LPS.
Aspect fiscal : il n’y a eu aucune allocation de prime. Donc pas de règlement des taxes
locales, du 01/07/1990 au 31/05/1994.
Révélation du problème fiscal : la filiale hollandaise subit un contrôle fiscal. Le fisc
effectue un redressement fiscal pour les taxes non réglées au titre de la part de prime
refacturée localement.
Jugement de la Cour Européenne de Justice (CEJ) : 14/01/2001, affaire C-191/99.
Kvaerner est condamné à régler les taxes au fisc.
Motivation de la décision : la 2ème Directive non vie (art. 25) stipule que « tout contrat
conclu en régime de prestation de services est exclusivement soumis aux impôts
indirects et taxes parafiscales grevant les primes d’assurance dans l’Etat membre où le
risque est situé au sens de l’article 2 d). ».
La notion de situation du risque est donc l’élément clé. En l’espèce, il s’agit du « lieu où
est exercée l’activité dont le risque est couvert par le contrat »(a), quel que soit l’Etat
membre où la prime est payée et les modes de refacturation interne au sein d’un groupe
de sociétés, qui pourrait « conduire à de l’évasion fiscale »(a).
A retenir :
-
-
-
C’est la filiale locale qui a été condamnée à régler les taxes aux autorités
fiscales. En cas de litige, c’est l’assuré qui est dans le pays qui sera recherché
en première intention.
La notion de lieu de risque et l’allocation des primes qui en découle est donc
cruciale : ni l’assuré, ni l’assureur ne peuvent jouer à l’évasion fiscale en
émettant un contrat dans un pays fiscalement plus attractif.
Qu’il y ait ou non refacturation interne, les taxes doivent être calculées et
réglées en fonction du lieu de risque, que le contrat soit souscrit par la holding
du groupe ou par une autre société pour le compte des différentes filiales
directes ou indirectes.
(a) Arrêt de la CEJ du 14/06/2001, Kvaerner plc / Staatssecretaris Van Financiën.
81
Price Waterhouse Coopers, « Tax Talk Alert : Sharper, meaner and leaner describes this year’s ATO, compliance program for
2010/2011), juillet 2010.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
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Cette décision de la Cour Européenne de Justice a néanmoins eu un effet très fort. Elle pose
clairement l’obligation de régler les taxes correspondant au lieu de risque, quelle que soit la
manière dont le contrat est émis (LPS ou non), et quel que soit le payeur de la prime (siège de
l’assuré de manière centrale ou refacturation).
Cet arrêt a mis en évidence que l’assureur ne peut ignorer la réglementation locale en matière de
fiscalité, même s’il n’a pas d’établissement dans le pays.
2.2
2.2.1
La collecte et le paiement des taxes sur les contrats d’assurance :
A qui incombent la collecte et le paiement des taxes ?
Dans le cas de l’arrêt Kvaerner, c’est l’assuré qui a été sanctionné car nul n’est censé ignorer la
loi. Néanmoins la collecte des taxes ne lui incombe pas toujours. L’assureur qui veut
accompagner ses clients à l’international, en Europe ou plus loin, doit connaître précisément ses
obligations en matière de fiscalité :
Dans la majorité des pays, l’assureur est responsable de la collecte et du paiement des taxes.
Toutefois, il existe des pays où l’allocation des primes, la collecte et le paiement des taxes
incombe au courtier (USA, Canada). L’assureur peut donc émettre une prime hors taxes et se
désintéresser de l’aspect TPA.
Par ailleurs, dans les pays n’interdisant pas formellement l’assurance non admise, lorsque
l’assureur n’est pas établi dans le pays, c’est l’assuré qui devient responsable du paiement des
taxes.
Dans certains cas, les taxes doivent être réglées dans un délai précis après émission de la prime,
quelle soit réglée ou non. Dans la plupart des cas, les taxes doivent être reversées après
encaissement de la prime, selon des modalités propres à chaque pays.
Pour un assureur, s’acquitter correctement de ses obligations fiscales n’est pas possible sans un
représentant fiscal local (avocat, partenaire, établissement local…). La situation est
paradoxalement plus complexe en Europe, malgré le marché unique de l’assurance, car
l’harmonisation de la fiscalité n’a pas suivi.
2.2.2
La complexité de la situation dans l’Union Européenne.
L’apparente simplicité de la LPS peut être un miroir aux alouettes pour l’assureur qui n’a pas
anticipé la complexité de la mosaïque fiscale dans l’Union Européenne.
Encadré 21 : gestion de la fiscalité indirecte, quelles
options pour l’assureur ?
Ignorer le
sujet
Enjeux
Conclusion
Amendes
Sanctions éventuelle de l’autorité
de contrôle
Réputation dégradée
Ignorer la loi n’est pas une option. La
Directive d’Assistance Mutuelle
77/799/CEE de 1977 prévoit l’échange
d’informations sur les taxes indirectes
pour éviter l’évasion fiscale. Depuis
2001, l’arrêt Kvaerner a donné un outil
de plus aux fiscs.
…/…
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ème
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Enjeux
Conclusion
Avoir un
représentant
fiscal local
Avoir une information fiscale à
jour.
Maîtriser les procédures pour
éviter les pénalités
Choisir un représentant fiscal qui a un
réseau européen.
ère
Permet d’externaliser les coûts : 1
étape pour un assureur qui
s’internationalise
Traiter en
interne
Créer ou développer une équipe
fiscale performante qui maîtrise les
procédures et la mise à jour des
informations.
Nécessite une taille critique pour avoir
suffisamment de flux permettant
d’amortir le coût.
ème
2
étape.
Les opérations internationales supposent que l’assureur maîtrise parfaitement la question fiscale.
Ceci peut être vu comme une barrière à l’entrée pour des compagnies qui ne sont pas ou peu
internationalisées.
Ce sujet demande une rigueur certaine :
- dans l’approche : certains pays offrent la possibilité d’un paiement libératoire via
l’intermédiaire qu’un assureur non averti pourrait confondre avec la possibilité de travailler en non
admis. Or il n’en est rien.
- sur un plan opérationnel : qui doit payer ? Quelles taxes ? A quelle administration ?
Dans quel délai ?
- dans la conception des systèmes d’informations : collecter une taxe sans prévoir le
processus ad hoc pour la reverser peut exposer l’assureur à de sévères sanctions. Cela semble
anecdotique mais l’assureur néophyte en matière de LPS peut s’y trouver confronté.
3. Va-t-on vers une libéralisation des opérations d’assurance ?
Libéraliser, c’est « donner plus de liberté, en particulier en diminuant les interventions de
l'État »82. En corollaire, cela simplifie le travail des opérateurs et permet de gagner en productivité
en mettant en œuvre les mêmes processus dans un périmètre géographique plus large.
Au vu des contraintes développées ci-dessus, il est légitime de se poser la question, la
globalisation de l’économie entraîne-t-elle la libéralisation des opérations d’assurance ?
Les cadres juridiques restent essentiellement nationaux. La réglementation relative à l’assurance
peut être basée sur des textes assez anciens83, dont les dispositions ont été prises à une époque
où les échanges étaient peu ou pas internationalisés. En outre, il existe des pays où cette
réglementation est peu développée parce que le recours à l’assurance ne va pas de soi84.
Quelles ont été les mesures prises pour libéraliser les opérations d’assurance ? Permettent-elles
aux assureurs de suivre l’internationalisation de leurs clients ? Suffisent-elles à faciliter les
82
Définition Larousse, édition 2010.
Par exemple, l’obligation d’assurance en automobile, dans de nombreux pays, date des années 1950.
Dans les pays émergents, les populations n’ont pas les ressources pour s’assurer. Il peut aussi s’agir de freins culturels ou
religieux : ne pas aller à l’encontre de la volonté divine.
83
84
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
48/99
échanges alors qu’un contrat d’assurance peut aussi relever du droit civil, du droit du travail ou du
droit du consommateur ?
Pour répondre à ces questions, il convient d’abord de préciser les étapes de la libéralisation des
opérations d’assurance. Dans un deuxième temps, l’accent sera mis sur le cas de la Libre
Prestation de Services (LPS) au sein de l’Union Européenne : succès ou échec ?
3.1
3.1.1
Les passages obligés de la libéralisation des opérations
d’assurance :
Faciliter les transactions transfrontalières :
La première étape de la libéralisation des opérations d’assurance consiste à faciliter les
transactions transfrontalières. Un pays qui bloque la sortie des primes (contrôle des changes
strict, taxation particulièrement dissuasive, absence d’avantage fiscaux pour l’assuré lorsque la
prime est versée à l’étranger) protège son marché mais le laisse vivre en circuit fermé. De même,
si une éventuelle indemnité versée de l’extérieur est lourdement taxée.
L’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) a édicté le Code de la
libération des opérations invisibles courantes dont les dispositions ont force obligatoire entre ses
membres85 : Ce code n’est pas spécifique au secteur de l’assurance et concerne également,
entre autres secteurs, les banques et institutions financières.
Le code fixe les conditions dans lesquelles ont lieu les transferts relatifs aux opérations
d’assurance qu’il s’agisse des « primes entre les preneurs d’assurances et les assureurs de deux
Etats membres », ou « des règlements ou prestations […] à effectuer dans un autre Etat
membre » par un assureur d’un Etat membre.
Il s’applique aux opérations concernant :
-
les transactions entre un preneur d’assurance d’un Etat Membre et un assureur d’un
autre Etat Membre, c'est-à-dire la souscription directe d’un contrat,
toutes les branches d’assurance, « à l’exclusion de la sécurité sociale et des assurances
sociales ».
Les transactions sont donc libres à l’exclusion, pour les assurances non vie, des assurances
obligatoires. Toutefois, le code stipule que cette liberté s’exerce « sous réserve du droit des Etats
Membres de réglementer l’activité déployée par l’assureur lui-même ou par un tiers, en vue de
rechercher la souscription de contrats d’assurances ».
Il est également stipulé que, dès lors qu’un risque ne peut être couvert dans un pays membre, les
transactions et transferts sont libres.
En conclusion, ces dispositions ne créent une zone de liberté que pour autant que les droits
locaux n’en disposent pas différemment, et uniquement entre les 30 pays membres. Sont donc
exclus du dispositif, tous les pays émergents ainsi que les transactions concernant un preneur
d’assurance dont le pays à une réglementation stricte, or ces pays sont nombreux.
85
Les membres de l’OCDE sont : l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Canada, la Corée du Sud, le Danemark,
l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Islande, l’Irlande, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège,
la Nouvelle Zélande, les Pays Bas, la Pologne, le Portugal, la République Slovaque, la République Tchèque, le Royaume Uni, la
Suède, la Suisse, la Turquie, les USA.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Certes, l’application du code ne permet pas d’ignorer les dispositions du droit local. En revanche,
lorsque de telles dispositions sont inexistantes, en particulier dans les pays qui imposent un
agrément aux assureurs locaux mais n’interdisent pas au preneur d’assurance d’effectuer une
transaction à l’extérieur du pays, l’application du code permettrait de libéraliser les échanges.
Le concept proposé par le Code de la libération des opérations invisibles courantes est
intéressant mais en pratique limité. Le code concerne les échanges internationaux, y compris les
« services associés au commerce, à l’industrie et au commerce extérieur, aux transports, aux
assurances, à la banque et à la finance… ».
Le champ d’action est vaste et peut freiner l’adhésion de nouveaux pays. Ne pourrait-on
envisager de détacher le volet assurance ? Un pays pourrait en effet accepter le volet assurance
mais ne pas souhaiter adhérer aux mesures pour les autres secteurs. Il y a là matière à faire du
lobbying pour les compagnies d’assurance.
Une telle évolution nécessite du temps et un consensus fort entre les assureurs pour avoir une
chance d’aboutir.
3.1.2
Harmoniser le contrôle prudentiel :
Un autre élément de la libéralisation des opérations d’assurance dépend de la qualité du contrôle
exercé par les autorités locales.
L’objet de l’agrément est, nous l’avons vu, de protéger l’assuré. Dans cette optique, chaque Etat
entend vérifier que les assureurs qui opèrent sur son territoire sont solvables et opèrent de
manière à ne pas léser les assurés.
Un nouveau pas vers la libéralisation des opérations d’assurance ne pourra se faire que si les
autorités de contrôle d’un pays ont confiance dans la qualité du contrôle exercé par un autre pays.
La confiance réciproque pourrait permettre de dispenser un assureur établi dans le pays A de
suivre une procédure complète de demande d’agrément dans le pays B, selon le principe
appliqué au sein de l’Union Européenne.
Cet idéal – dont nous sommes encore loin – suppose que les autorités de contrôle des différents
pays aient le même degré de maturité or dans les pays émergents, il s’agit d’institutions
relativement récentes qui montent en compétences au fur et à mesure du développement de leur
marché. Concomitamment, il suppose que ces mêmes autorités reconnaissent le contrôle
effectué par leurs pairs mais surtout acceptent de ne pas exercer elles-mêmes ce pouvoir.
Les travaux de l’IAIS constituent une première étape dans ce sens, encore insuffisante :
-
86
87
d’une part l’IAIS publie un guide des bonnes pratiques en matière de contrôle et
d’exigences prudentielles86,
d’autre part, elle a mis en place un cadre facilitant les échanges d’informations entre les
différentes autorités de contrôle adhérentes87. Cet accord qui concerne encore peu de
IAIS, « Insurance core principles and methodology », octobre 2003.
IAIS, « Multilateral Memorandum of Understanding and Information» ou MMoU, février 2007.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
membres88 dispose des modalités d’échanges d’informations réciproques et comprend
des accords de confidentialités.
Il reste néanmoins un très long chemin à parcourir pour atteindre une reconnaissance réciproque
des contrôles. Ceci est illustré par deux exemples opposés :
-
aux Etats-Unis, il existe autant de réglementations que d’Etats ; les autorités de contrôles
de chaque Etats ne sont pas disposées à céder cette prérogative au niveau fédéral.
-
en Afrique, la Confédération Interafricaine des Marchés d’Assurance (CIMA)89 s’est vue
déléguer les pouvoirs de contrôle des sociétés d’assurance des pays membres. Les pays
membres ont adopté un code des assurances unique. Il n’en demeure pas moins un
certain nombre de difficultés à résoudre, certains Etats membres pouvant être tentés de
peser sur les décisions de la CIMA.
L’exemple le plus abouti de libéralisation des opérations d’assurance dans un large marché en
termes de primes reste celui de l’Espace Economique Européen. Peut-on pour autant considérer
que ce marché est libéralisé ?
3.1.3
L’exemple de l’Espace Economique Européen : objectif du législateur
L’objectif des institutions européennes était de réaliser un marché unique de l’assurance. La mise
en œuvre a suivi un processus long, par étapes, qui a théoriquement démarré dès le traité de
Rome en 1957. Le traité posait les principes de :
-
la liberté d’établissement,
la liberté de prestation de service,
la liberté de mouvement des capitaux90.
Théoriquement parce que si le cadre juridique existe depuis le traité de Rome, il a fallu attendre
1964 pour une première Directive qui ne concernait que la réassurance, activité déjà largement
internationale, puis l’adhésion du Royaume Uni en 1973 pour faire évoluer les choses en matière
d’assurance directe.
Il y avait un manque flagrant de volonté politique, qui s’explique aisément. En France, les grands
acteurs de l’assurance en dehors des mutuelles appartenaient à l’Etat (les AGF, le GAN, l’UAP),
qui était peu soucieux d’ouvrir son marché à la concurrence.
Par ailleurs, de nombreux pays pratiquaient le contrôle préalable des tarifs et/ou la validation
préalable des documents remis au public (Allemagne, Italie…), et ne souhaitaient pas y renoncer.
Officiellement pour protéger le consommateur, mais cela équivalait à une forme de
protectionnisme.
A partir de 1973, une série de Directives met en place le marché unique de l’assurance pour
aboutir au principe de l’agrément unique avec la 3ème directive non vie de 1992, appliquée depuis
le 1er juillet 1994 (encadré 22).
88
En 2010, Australia Prudential Regulation Authority, Australie, Bermuda Monetary Authority, Bermudes, Financial Supervisory
Commission, Chinese Taipei, Autorité de Contrôle des Assurances et des Mutuelles France, Bundesanstalt für
Finanzdienstleistungsaufsicht (BaFin), Allemagne, et De Nederlandsche Bank, Pays Bas.
89
La CIMA compte 14 Etats membres.
90
Respectivement les articles 52 et suivants, 59 et suivants, 67 et suivants.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Encadré 22 : les étapes de la libéralisation
opérations d’assurance dans l’Union Européenne.
des
Uniquement pour les entreprises
répondant à au mois 2 des
critères :
- total bilan > 12,4 m ECU (6,2
m€ en 2010)
- CA > 24 m ECU (12,5 m€ en
2010)
- effectif > 500 (250 en 2010)
1957
Traité
de
Rome.
1973
1ère Directive
non vie :
Liberté
d’établissement.
1978
Directive sur
la coassurance
communautaire
et les grands
risques.
L’assureur reste
soumis au contrôle
local pour ses
activités locales et
doit respecter la
législation locale
3.1.4
Un assureur
implanté dans
l’Union Européenne
peut opérer sur tout
le territoire, sous le
seul contrôle de
l’autorité du pays de
son siège.
1988
2e Directive
Non vie :
1992
3e Directive
Non vie :
Liberté partielle de prestation de ser-vice.
Principe de
l’agrément
unique et de la
libre prestation de
service.
. les grands risques
en Dommages et
RC,
. le transport.
. le Crédit-Caution lié
à l’activité
professionnelle.
. Liberté pour un
assuré de souscrire
auprès d’un assureur
installé dans l’EEE,
. Liberté pour un
assureur installé
dans l’EEE d’opérer
dans l’EEE.
Conditions d’exercice de la LPS :
Avec la 3ème Directive non vie, les assureurs de l’EEE sont libres d’ouvrir une succursale ou de
pratiquer des opérations d’assurance en libre prestation de service (LPS), sous le contrôle de
l’autorité du pays du siège, dans n’importe quel pays membre.
Ceci concerne tant les assureurs dont le siège se situe dans un Etat membre que les assureurs
dont le siège se situe en dehors de l’EEE mais qui ont une filiale (et non une succursale)
implantée dans la zone.
En pratique, l’assureur qui souhaite s’implanter dans un autre Etat membre adresse une demande
d’établissement à l’autorité de contrôle dont il dépend, qui communique le dossier à son
homologue du pays d’établissement. L’autorité de contrôle du pays d’établissement indique sous
2 mois, s’il y a lieu, les dispositions d’intérêt général à respecter sur son territoire.
Ces dispositions ne peuvent porter que sur des questions qui n’ont pas fait l’objet d’une
harmonisation au niveau européen. Elles doivent être non discriminantes par rapport aux
assureurs locaux. Enfin, elles doivent être prises dans l’intérêt public (et non par protectionnisme).
En matière d’assurance, elles concernent la protection du consommateur et l’application des
régimes fiscaux.
L’autorité de contrôle du pays d’établissement dispose de deux mois pour valider le dossier.
L’absence de réponse dans les délais vaut acceptation et l’assureur peut alors s’implanter.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
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Aucun agrément préalable des tarifs et des conditions contractuelles n’est plus nécessaire hormis
dans deux cas :
-
-
si le pays d’implantation pratique un contrôle général des prix et, à ce titre, peut
demander à valider les tarifs au préalable. Ce n’est pas le cas aujourd’hui dans l’Union
Européenne,
les pays membres qui imposent des assurances obligatoires peuvent demander la
communication des documents contractuels avant la mise sur le marché.
Outre l’établissement dans un ou plusieurs pays membres, un assureur peut choisir de pratiquer
des opérations d’assurance en LPS. Il serait faux de croire que la LPS permet à un assureur
d’opérer sans autre formalité. Une pratique sauvage de la LPS peut conduire jusqu’au retrait
d’agrément dans le pays hôte ou motiver un refus lors d’une demande d’établissement ultérieure.
En pratique, la procédure suit une logique similaire à celle de la demande d’établissement, à la
différence près que l’autorité du pays hôte doit notifier un éventuel refus motivé sous un mois.
Néanmoins, l’assureur peut commencer à opérer en LPS dès qu’il a confirmation que sa
demande a été transmise au pays hôte. Le contrôle prudentiel des entreprises qui opèrent en LPS
est assuré par l’autorité du pays du siège.
Dans le cadre de la LPS, certains Etats membres demandent que l’assureur désigne un
représentant fiscal dans leur pays. Cette mesure peut être vue comme une forme de
discrimination alors que l’objet de la 3ème Directive non vie est justement de faciliter les échanges.
3.1.5
Droit applicable au contrat en matière de risques d’entreprises.
Dans le cadre du libre établissement ou de la LPS, le droit applicable au contrat peut être choisi
librement par les grands risques, soit toute une partie du segment objet de cette étude, même si
en pratique peu d’assurés s’intéressent à cette question.
Par défaut, le droit applicable est celui de l’Etat où se situe le risque (mais pas nécessairement
les périls encourus). Lorsqu’une entreprise assurée est implantée dans plusieurs pays, les parties
peuvent convenir d’appliquer le droit de l’Etat où se situent les risques assurés ou celui du pays
où est situé le siège de l’assuré.
Néanmoins, la liberté de choix des parties n’opère plus dès lors qu’un Etat impose le choix de la
loi applicable au titre d’une mesure d’intérêt public ou qu’il existe une obligation locale
d’assurance (même si les parties en disposent autrement, le droit local prévaut toujours).
3.2
3.2.1
Les limites de la LPS
Un succès très relatif :
La LPS est la forme la plus aboutie de la libéralisation des opérations d’assurance. On peut alors
s’étonner de la très faible part qu’elle représente dans l’encaissement des assureurs français non
vie, toutes branches confondues : 0,2 % des primes en 200791, dont les trois quarts se
concentrent sur 5 pays92.
Pour quelles raisons la LPS ne rencontre-t-elle pas le succès escomptée par les institutions
européennes ?
91
92
FFSA, « Statistiques internationales de l’assurance française en 2007 », étude publiée en février 2009.
Par ordre d’importance : Royaume-Uni, Espagne, Pays-Bas, Allemagne, Belgique.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Les raisons sont multiples (voir encadré 23) mais tiennent essentiellement aux points suivants :
-
il n’existe pas un droit de l’assurance harmonisé au sein de l’Union Européennes, encore
moins dans l’EEE. Chaque Etat a ses particularités, sa typologie d’assurances
obligatoires ou non et sa réglementation fiscale. Il y a là de quoi freiner bien des ardeurs,
-
la langue reste une barrière souvent infranchissable : si les services de Risk Management
des très grandes entreprises ne reculent pas devant un contrat en anglais, les dirigeants
des EMTI préfèreront un contrat établi dans leur langue. En outre, il est toujours délicat
de gérer des sinistres à distance, avec des interlocuteurs qui ne parlent pas
nécessairement la même langue que l’assuré.
Encadré 23 : forces et faiblesses de la LPS.
+
Pour l’assuré
Pour l’assureur
-
Un contrat unique dans la
langue du souscripteur :
simplicité.
Pas d’émission d’attestation
d’assurance dans les différentes
langues locales.
Conserve sa relation avec son
intermédiaire français (si celui
est autorisé à exercer en LPS).
Pas d’interlocuteur local pour le
règlement des sinistres.
Emission d’un seul contrat :
coût de gestion moindre.
Complexité du traitement de la
fiscalité / Obligation d’avoir un
représentant fiscal dans certains
pays.
Pas besoin d’établissement
dans d’autres pays : coûts
administratifs moindre.
Contrôle réglementaire par le
pays du siège : un seul
interlocuteur : pas de reporting
et documents à remettre en
plusieurs langues (jusqu’à 23),
selon différents formulaires.
L’assuré déplacera plus
facilement un seul contrat, en
France, que plusieurs dans
différents pays.
Risque de ne pas maîtriser les
subtilités juridiques locales et les
usages de marché.
Yves de Mestier, Network & Development Manager au sein d’Axa Corporate Solutions, considère
que la LPS est « un outil merveilleux mais complexe à mettre en œuvre », et ce encore plus dans
la branche automobile.
3.2.2
Les régimes dérogatoires : exemple de l’automobile.
Outre le cadre général d’exercice de la LPS, il existe des régimes dérogatoires dont le principal,
pour le segment des EMTI, est celui de l’assurance automobile.
La branche automobile est nettement plus complexe à mettre en œuvre dans le cadre de la LPS
pour les raisons suivantes :
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
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-
Il est nécessaire d’avoir un contrat libellé dans la langue locale même pour les grands
comptes93. Les contrats sont généralement bilingues anglais / langue locale.
-
l’assureur a l’obligation d’adhérer aux fonds de garantie dans chaque pays, ainsi qu’au
bureau des cartes vertes. Aux Pays-Bas, il doit en outre adhérer au bureau des
immatriculations
-
enfin, l’assureur doit avoir un représentant local pour gérer les sinistres, ce qui est
d’ailleurs préférable compte tenu de la grande disparité des droits nationaux en matière
de réparation des dommages. Qui plus est, les gestionnaires doivent avoir la capacité de
communiquer avec les différentes parties dans la langue du pays.94
La LPS peut sembler la solution idéale pour qu’un assureur opère à moindre coût au sein de
l’EEE. Elle peut l’être pour la souscription d’un contrat dommages aux biens. Elle est plus délicate
en matière de responsabilité civile et quasiment impraticable en automobile.
En matière de gestion, l’émission des attestations d’assurance et l’aspect fiscal peuvent vite se
révéler complexes et longs à gérer. En l’absence totale d’établissement dans les autres pays ou
de lien avec des partenaires locaux, l’assureur français se heurtera rapidement aux barrières
culturelles, linguistiques et juridiques.
En conséquence, la LPS est à privilégier pour des branches nécessitant peu ou pas de gestion
locales (dommages aux biens), ou dès lors que l’assuré pratique une activité avec une faible
fréquence de sinistres et/ou une franchise importante (peu de sinistres à gérer hors des
frontières).
Pour conclure, la seule harmonisation des procédures d’agrément et de contrôle prudentiel est
une condition nécessaire mais loin d’être suffisante pour aboutir à une libéralisation optimale des
opérations d’assurance. Il manque un travail de fond sur l’harmonisation juridique au sein de
l’EEE, à minima au niveau du droit de l’assurance, ainsi qu’un travail sur la fiscalité.
La libéralisation des opérations d’assurance en général a encore une grande marge de
progression avant de devenir une réalité. Le secteur de l’assurance opère dans un environnement
contraignant et qui le restera encore longtemps. L’assureur qui souhaite accompagner les EMTI à
l’étranger doit donc être en mesure de traiter efficacement et à un coût économiquement rentable
les différents aspects réglementaires, légaux et fiscaux.
93
94
Entretien avec Yves de Mestier, Axa Corporate Solutions.
Entretien avec Thierry Dubois, Responsable Flottes Auto, cabinet Diot.
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partie : mondialisation du marché de l’assurance & contraintes pour les assureurs
Ce qu’il faut retenir :
Un assureur ne peut pas garantir une entreprise qui s’internationalise sans prendre en
considération les contraintes :
- réglementaires,
- légales,
- et fiscales
du pays où s’implante l’assuré.
Si la mise en place de la licence unique au sein de l’Union Européenne règle la question
réglementaire (l’assureur peut opérer en liberté d’établissement et/ou en LPS), le niveau
d’harmonisation en droit des assurances est largement insuffisant et l’harmonisation fiscale
inexistante.
Partout dans le monde, quel que soit le pays où l’assuré s’implante, l’enjeu est de
taille :
-
toutes les parties concernées peuvent être sanctionnées,
-
les sanctions peuvent être civiles, pénales, fiscales ou règlementaires, et s’avérer
fort onéreuses.
-
les sanctions sont effectivement appliquées lorsqu’il y a révélation d’un contrat non
admis.
Outre les sanctions, l’assureur court un risque significatif en termes de réputation, et ce
d’autant plus que l’assuré aura recherché la sécurité juridique, ce qui est le cas d’une EMTI,
plutôt qu’un montage d’assurance sophistiqué.
La libéralisation des opérations d’assurance reste limitée. Elle s’effectue par étapes, au
sein des pays membres de l’OCDE, de la zone CIMA ou de l’Union Européenne. Néanmoins,
il n’existe pas de mouvement global. Les initiatives sont limitées à une zone géographique ou
à un aspect des contraintes.
En matière de contrôle, la tendance est plutôt au durcissement, notamment en matière
fiscale. Les Etats voient se contracter leurs ressources du fait de la crise économique et sont
particulièrement attentifs à toute tentative d’évasion fiscale.
Il est totalement erroné de croire que l’assurance non admise ne pose pas de problème à
partir du moment où l’opérateur paye les taxes.
L’environnement réglementaire, légal et fiscal est un fait que l’assureur ne peut ignorer
sous peine de sanctions. Plutôt que de subir ces contraintes passivement, l’assureur qui
souhaite se développer sur le segment des EMTI qui s’internationalisent a tout intérêt à
capitaliser sur sa maîtrise des différents sujets pour apporter des solutions pertinentes à ses
assurés.
La dimension économique devra également être prise en compte.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
3ème partie
Comment les assureurs peuvent-ils répondre aux
besoins des EMTI ?
Quelles sont les solutions d’assurance offertes par les assureurs à
l’international ? Quel est l’enjeu d’un bon réseau pour l’assureur ? Quels
sont les éléments qui peuvent freiner la mise en place d’un contrat à
l’international ? Quels sont les facteurs de succès ? Comment l’offre
peut-elle être structurée ? Quelles sont les attentes du marché ?
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
1. L’offre existante est-t-elle adaptée aux EMTI ?
Afin de prendre en compte les contraintes réglementaires, légales et fiscales auxquelles ils sont
confrontés, les assureurs ont développé les programmes d’assurance internationaux. Cette solution
consiste en une articulation de polices locales autour d’une police mère souscrite dans le pays du
siège de l’entreprise assurée.
A l’origine, ce type de montage a été conçu pour les grandes entreprises, les premières à
s’internationaliser. Les assureurs ont isolé les compétences techniques de leurs équipes dans des
services de type grands comptes internationaux, voire au sein de filiales spécifiques (Axa Corporate
Solutions, Allianz Global Corporate & Specialty).
Cette offre est-elle adaptée aux besoins des EMTI qui s’internationalisent ?
Pour répondre à cette question, la première étape consiste à comprendre comment s’articule un
programme international et pourquoi il est mis en place. Ensuite, il convient d’en identifier les limites
et enfin, de faire un point sur l’assurance des pertes financières de la maison mère, dite aussi
clause d’intérêt financier, parfois vue comme la panacée.
Une large part de l’analyse effectuée ci-après repose sur les entretiens réalisés entre mai et
décembre 2010 (annexe 1). Certains interlocuteurs n’ont pas souhaité voir leurs propos publiés in
extenso. Par conséquent, aucun compte rendu d’entretien ne figure en annexe.
1.1
1.1.1
Quelle est l’offre existante : les programmes internationaux.
Les différents types de programmes :
Le principe du programme international est le pilotage centralisé des instructions et des garanties
par la maison mère de l’entreprise assurée et son assureur. Cette solution fonctionne avec une
entreprise où toutes les décisions se prennent au siège. Les différentes filiales ne font qu’exécuter
la stratégie définie centralement, y compris en matière de gestion des risques et d’assurance.
Historiquement, cette solution s’entendait « fat mother, lean daugther » : l’essentiel des garanties
et des primes étaient concentrées au sein du contrat de la société mère (d’où le terme « gras »).
Les contrats locaux pour les sociétés filles étaient réduits à leur plus simple expression (d’où le
terme « mince »), lorsqu’ils n’étaient pas inexistants. En effet, le contrat souscrit par la mère
comportait souvent une « broad form clause »95, ce qui revenait à faire de l’assurance non
admise.
Aujourd’hui, les assureurs proposent des programmes centralisés avec réassurance partielle ou
totale des polices locales par l’assureur master*. Ces programmes sont aussi appelés
programmes intégrés (encadré 24).
Compte tenu des enjeux de conformité de plus en plus forts, la tendance est plutôt « lean mother,
fat daughter » : l’étendue des garanties locales doit refléter la réalité des risques encourus.
95
ACE, “Beyond "non admitted": a closer look at trends affecting today's multinational insurance programs”. La clause dite « broad
form named endorsement » concerne surtout les contrats de responsabilité civile. Elle a pour objet de couvrir toutes les entités dont
l’entreprise assurée est responsable : filiales, entreprises associées ou affiliées…
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
Encadré 24: structure d’un programme international
intégré.
Police mère en France
Pays A
EEE
Pays B
EEE
LPS
LPS
Instructions
Pays F
Police Pays G
Pays E
locale Police
Police
locale
Pays D
locale
Police
locale
Réassurance par la police mère
A l’opposé, il existe des programmes totalement décentralisés (encadré 25) dans lesquels les
différentes polices émises localement n’ont aucun lien de réassurance avec la police mère. Leur
seul point commun est d’être souscrites auprès du même assureur, voire dans certains cas
seulement par l’intermédiaire du même courtier. Ce n’est plus, sur le plan technique, un
programme. L’appellation souvent utilisée de programme coordonné est plus un outil de
communication vis-à-vis de l’assuré.
Encadré 25 : structure d’un programme international
coordonné.
Police mère en France
Pays A
EEE
Pays B
EEE
LPS
LPS
Pays F
Police Pays G
Pays E
locale Police
Police
locale
Pays D
locale
Police
locale
Instructions
Dans la pratique, entre le programme centralisé et le programme décentralisé, il y a bien entendu
des solutions intermédiaires qui peuvent être mise en place soit à la demande de l’assuré, soit du
fait de contraintes propres à l’assureur.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
1.1.2
La clause « Différence de conditions, différence de limites » (DIC/DIL) :
Cette clause est le liant d’un programme international, intégré ou non. Toutes les polices mères
intègrent une clause de DIC/DIL. A cela plusieurs raisons :
-
la capacité de l’assureur local peut ne pas suffire aux besoins de l’assuré : la police mère
interviendra alors en excédent de la limite de garantie de la police locale,
-
la police locale peut ne pas accorder la totalité des garanties demandées, en particulier
lorsqu’il s’agit d’un marché moins mature. Les polices locales sont établies sur une base
de « best local practice » ou meilleur standard local,
C’est ainsi qu’un programme « globale joaillier », de forme Tous Risques Sauf
comprenant une garantie des pertes d’exploitation après vol, peut avoir des polices
locales de dommages classiques, en périls dénommés,
Dans ce cas, la clause de DIC interviendra pour compléter la garantie de la police locale
afin d’offrir le même niveau de garantie à l’assuré partout dans le monde.
Néanmoins, cette clause n’a pas vocation à pallier aux carences volontaires ou légales de
garanties. En particulier, elle n’est pas applicable :
-
si l’assuré n’a pas souscrit de garanties locales volontairement, en a limité la portée, ou a
résilié la police locale sans l’accord préalable de l’assureur master*,
si le contrat local est résilié ou n’a pas pris effet du fait du non paiement de la prime,
s’il existe des limitations, des franchises ou des exclusions locales légales,
pour compenser l’application d’une règle proportionnelle ou l’application d’une franchise
au niveau de la police locale,
pour permettre à la police locale de bénéficier d’une garantie obligatoire dans le pays de
la police master mais non souscrite en local.
La clause de DIC/DIL reviendrait-elle à faire de l’assurance non admise ? Lorsque le pays où est
souscrite la police locale interdit strictement l’assurance non admise, oui. La clause DIC/DIL est
alors une garantie non admise avec tous les risques que cela comporte.
Outre l’aspect réglementaire, l’autre écueil de la clause de DIC/DIL est fiscal. En fonction de
l’étendue de la clause, il faudra répartir la prime et régler des taxes locales (encadré 26).
Encadré 26 : DIC/DIL et allocation verticale de la prime
Limite de garantie
Master = limite locale
Limite Master > limite locale
+ limite locale = SMP/valeur
des existants.
Limite Master > limite locale
+ limite locale < SMP/valeur
des existants.
Pas de DIL significative
= ni prime, ni taxes
Pas de DIL significative
= ni prime, ni taxes
Garantie DIL
= prime DIL et taxes
Conditions Master
= conditions locales
Conditions Master
> conditions locales
Police locale souscrite
auprès d’un autre assureur
Pas de DIC significative
= ni prime, ni taxes
Garantie DIC
= prime DIC et taxes
Garantie DIC
= prime DIC et taxes
DIL
DIC
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3
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
60/99
La taxation s’opère là où se situe le risque. Dans le cadre d’une police mère avec une clause
DIC/DIL, comment verser les taxes en local… lorsqu’il n’y a pas de police locale ou que celle-ci
dispose d’une garantie limitée en étendue et/ou en montant ?
Pour l’application des taxes au titre de la police mère, Maître Rostan d’Ancezunes, HMN &
Partners, souligne qu’il « n’y a pas lieu de percevoir les taxes françaises sur la part de la prime
DIC/DIL qui, par nature ne concerne pas de risques en France. En cas de contrôle fiscal, le
contrôleur français vérifiera que la prime affectée à l’exposition de risque en France soit
cohérente et taxée de manière adéquate ».
Il reste à répartir correctement la prime DIC/DIL entre les différents pays couverts par cette
garantie et à appliquer la taxation requise localement. Les enjeux et les risques pesant sur les
parties aux contrats sont toujours ceux de l’assurance non admise96. Le fait de payer les taxes ne
dispense pas l’assureur d’être en conformité avec la réglementation locale.
Le deuxième point délicat de la clause DIC/DIL concerne le règlement de l’indemnité en cas de
sinistre.
1.1.3
La gestion des sinistres :
En matière de programmes internationaux, le montage du programme commande le règlement du
sinistre (encadré 27).
Sur un plan pratique, la plupart des opérateurs internationaux travaillent de la manière suivante :
-
Les sinistres simples sont gérés en local. Selon les assureurs et le montage du
programme, ils font l’objet de flux financier de réassurance, avec une remontée vers
l’assureur master dont le rythme dépendra de la fréquence des sinistres.
Le bureau local de l’assureur prend position sur le sinistre (garantie acquise ou non)
et procède au règlement au titre de la police locale. L’assuré master* fait ensuite
jouer la clause de DIC/DIL de la police mère si besoin.
-
Les sinistres graves sont généralement pilotés par l’assureur master*, qui in fine
portera le risque via la réassurance de la police locale. La gestion peut néanmoins
rester locale.
L’intérêt de privilégier la gestion en local, chaque fois que possible, est de pouvoir
appliquer le droit local, en particulier en responsabilité civile. Cela rejoint un principe
de droit international : lex loci delictis ou la loi du lieu du délit, c'est-à-dire du lieu de
survenance du dommage.
Quelque soit le montage d’un programme, le fait de régler tout ou partie d’un sinistre localement
sans agrément revient à opérer en non admis. Or nous avons vu que les conséquences ne sont
pas neutres pour les parties. Elles le sont d’autant moins que l’indemnité versée est importante.
Comment une filiale locale va-t-elle justifier le versement d’une indemnité de plusieurs millions
d’Euros, ou l’équivalent en devises, dans ses comptes lorsque les limites des contrats locaux sont
bien en-deçà ? Un flux financier important ne manquera pas d’attirer l’attention des autorités
locales. L’assuré encourt un risque de contrôle fiscal et de requalification de l’indemnité qui de ce
fait sera soumise à la taxation, parfois lourdement.
96
Voir 2
ème
partie de ce travail.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
Encadré 27 : la gestion des sinistres dans le cadre d’un
programme international
Programme intégré
Programme coordonné
DIC / DIL
La DIC / DIL intervient
comme une ligne
d’excess
Police locale :
oui
Police locale :
non
Règlement en
complément de
la garantie
locale
Règlement
au 1er Euro.
Le montant de la rétention prévu
par la police mère est une
franchise absolue, qu’il y ait
paiement au titre d’une police
locale ou non.
Gestion locale : si
cela présente un
intérêt.
Règlement local par
le correspondant
local de l’assureur.
Règlement par
l’assureur master à
l’assuré master.
Gestion directe : si
pas besoin d’un
soutien local.
Règlement par l’assureur master à l’assuré master.
Une problématique commune : comment faire parvenir l’indemnité à l’assuré local dès lors qu’elle n’est pas
entièrement versée au titre de la police locale ?
Lorsque l’assurance non admise n’est pas autorisée, l’indemnité DIC/DIL sera versée à la maison
mère en France. Il appartient à celle-ci de la transmettre à sa filiale : sous forme de
recapitalisation ou en mettant en place un système de délégation et d’apport en compte courant.
Toutes ces modalités de règlement ont des implications fiscales. Existe-t-il une solution idéale ?
1.2
1.2.1
L’assurance des pertes financières de la maison mère : la
panacée ?
En quoi consiste la garantie ?
Dans le cadre de réflexions sur l’innovation de produits, certains assureurs ont travaillé sur le
concept d’un seul contrat garantissant le préjudice financier de la maison mère du fait d’un
dommage assurable mais non assuré subi par l’une de ses filiales.
C’est le mythe du contrat universel ou « La tête sans les jambes »97.
97
La Tribune de l’Assurance « La couverture des groupes internationaux : la tête sans les jambes ? », Richard Ghueldre et Alban
Fréneau, Gide-Loyrette-Nouel. Octobre 2009.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
En pratique, cela ne fonctionne pas dès lors
-
qu’il y a un actif immobilier en local : le risque est forcément local,
de même, lorsqu’il y a une obligation d’assurance locale : la filiale doit être en mesure de
justifier qu’elle s’est soumise à cette obligation en produisant une attestation d’assurance.
Si aucune de ces deux conditions n’est réunie, il peut être envisagé d’assurer uniquement le
risque financier au niveau de la maison mère. Comme le souligne Me Ghueldre « encore faut-il
qu’elle ait un intérêt assurable ».
C’est plus complexe lorsque l’assuré ne détient pas la filiale à 100 % : seule la participation de
l’assuré master sera assurée. Imaginons un accord de joint-venture dans lequel l’assuré master a
une participation de 50 % : comment va être garantie l’autre moitié de l’exposition de risque ?
La clause d’intérêt financier ne fait qu’officialiser la pratique (règlement de la société mère par
l’assureur master au titre d’une clause de DIC/DIL). Certains opérateurs l’incluent dans leur
programme en association à la clause de DIC/DIL.
Si elle peut être un outil pour Risk Managers avisés, il convient de s’interroger sur l’opportunité de
la proposer à des EMTI qui pourront en percevoir les avantages sans avoir suffisamment
conscience des risques associés. Une EMTI a besoin d’une solution simple et fiable. Ce segment
de clients ne dispose pas de l’expertise juridique et fiscale interne suffisante pour apprécier les
enjeux d’une telle clause.
1.2.2
Quels sont les enjeux et les risques pour les parties ?
La clause d’intérêt financier présente des avantages apparents. Mais, revers de la médaille, la
solution n’est pas sans risque (encadré 28).
Encadré 28 : les enjeux de la clause d’intérêt financier
Attractivité de la solution
Contraintes & risques
Fiscale
Pas de prime locale =
pas de taxes locales
Requalification de l’indemnité en
cas de sinistre et taxation.
Coût
Pas de police locale =
moindre coût
Pas de refacturation interne aux filiales
qui, par définition, ne sont pas assurées.
Juridique
Défaut de conformité aux obligations
d’assurance locales.
Pas d’attestation d’assurance locale.
Réglementaire
Selon les conditions de l’engagement de la
mère d’indemniser sa filiale : peut caractériser
une opération d’assurance non admise du
fait de l’assuré.
Gestion des
risques
Difficile d’imposer des mesures de
prévention aux filiales non assurées.
Service
Aucun service local.
Pas d’interlocuteur pour la filiale.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
La clause d’intérêt financier ne résout pas la question de l’assurance non admise. L’assureur la
réserve soit à des cas où les expositions de risque locales sont très faibles, soit à des contraintes
techniques particulières. Si elle permet à l’assureur de s’acquitter de ses obligations (le paiement
de l’indemnité entre les mains de la société mère, seule assurée), elle laisse l’assuré seul face à
la question : comment transférer cette indemnité en local ?
Cette solution est trop récente pour qu’il y ait eu jurisprudence. La validation ou l’invalidation de
cette clause ne manquera pas d’être suivie avec beaucoup d’attention.
D’ici là, est-il pertinent de proposer une solution de cette nature à une EMTI qui a une base
d’expérience en matière de sinistres beaucoup plus restreinte qu’une grande entreprise ? Le
sinistre important constitue déjà en lui-même un événement exceptionnel qu’il va falloir gérer
dans toute sa dimension. Y ajouter la complexité des questions fiscales liées au transfert de
l’indemnité en local peut être perçu par l’assuré comme une source d’insécurité juridique. Même
si le sinistre est techniquement bien réglé, le ressenti de l’assuré sera nécessairement différent.
La clause d’intérêt financier – tout comme une clause de DIC/DIL trop large – est donc délicate à
mettre en œuvre. Il est important que son fonctionnement soit expliqué avec précision à l’assuré
afin qu’il soit pleinement conscient que le traitement de l’indemnité versée lui incombe, et à lui
seul.
C’est bien entendu à l’intermédiaire qu’il revient de conseiller son client. Néanmoins, l’assureur
peut et doit jouer un rôle en particulier vis-à-vis des intermédiaires peu familiers avec cette
problématique pour être certain que l’information soit bien comprise et transmise.
1.3
1.3.1
Pourquoi mettre en place un programme international ?
Les avantages d’un programme international :
En l’absence de programme, les EMTI peuvent avoir des contrats dispersés auprès de différents
opérateurs et de différents intermédiaires, chaque filiale ayant souscrit localement les garanties
qu’elle estimait nécessaire. Dans ce cas, il n’y a aucune vision globale, avec le risque, pour
l’entreprise, d’être insuffisamment et/ou doublement garantie.
Pour l’assuré, un programme international est la certitude d’acheter la sécurité juridique dans
chaque pays où il opère (encadré 29). L’assuré gère alors l’achat d’assurance de manière
centrale, auprès d’un intermédiaire et d’un assureur qui se chargeront ensuite de mettre en place
les polices locales.
Les deux clés de l’achat d’un programme pour l’assuré sont :
-
le contrôle : gestion des risques, maîtrise du budget total, contrôle de l’étendue des
garanties, continuité de service offerte tant par l’intermédiaire que par l’assureur,
-
la sécurité juridique : conformité des contrats au droit local, règlement des taxes, la
certitude que l’assureur sera solvable le jour du sinistre.
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Pascale Rauline
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ème
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
Encadré 29 : avantages et inconvénients d’un programme
international.
Police locale
indépendante
+
-
1.3.2
. Contrat conforme au droit
local.
. Contrat et attestation en
langue locale.
. Déductibilité des primes.
. Risque de trou ou de dupliContrat non conforme
cation de garanties.
au droit local.
. Morcellement du pouvoir
Pas de service local.
de négociation.
Primes non déductibles.
. Aucun contrôle global.
Risque de sanctions.
. Pas de mesure du risque de
Risque de requalification
défaut de solvabilité de
de l’indemnité.
l’assureur local.
Programme
Idem que la police locale
indépendante.
+ Contrôle des conditions de
garantie.
+ solvabilité de l’assureur
local vérifiée par l’assureur
Master (réseau/fronteurs)
. Minimum de prime en local.
. Nombre limité d’assureurs
pour mettre en œuvre un
programme.
Quelles en sont les limites ?
Un programme intégré suppose la réassurance des polices locales par la police mère, à moins
que ces polices soient souscrites dans le réseau propre de l’assureur et que la politique soit de
laisser les primes en local.
La première limite à la mise en place d’un programme est qu’il soit économiquement viable de
lancer des opérations de réassurance. La réglementation locale peut imposer des conditions
d’agrément spécifiques pour l’activité de réassurance : à défaut d’agrément spécifique, certains
pays peuvent imposer à l’assureur master de consigner la limite du contrat en capitaux,
notamment en Amérique Latine.
Qu’il y ait ou non réassurance, la maintenance du réseau de l’assureur a un coût. Il y a donc un
coût d’entrée minimum pour une police locale qui varie de 1 500 $ à 2 500 $ selon les
opérateurs98. Certains opérateurs pratiquent une prime minimum de 7.000 € par police locale,
avec un budget minimum pour l’ensemble du programme de 100.000 à 150.000 € hors tout99.
A cette prime minimale, il convient d’ajouter les honoraires ou la commission de l’intermédiaire. La
pratique des grands réseaux de courtage est de l’ordre de 2 500 $ par police locale. Le budget
d’entrée peut facilement atteindre 5 000 $, même pour un simple bureau de représentation.
La seconde limite à la mise en place d’un programme international tient à l’historique des
acteurs : les solutions ont été conçues pour des grands comptes et gérées par des équipes
spécialisées sur ces profils de clients. Certains opérateurs ne s’intéressent qu’aux entreprises
dont le chiffre d’affaires excède 500 à 600 millions d’Euros, voire 1 milliard d’Euros.
Comment répondre aux besoins des EMTI dont le chiffre d’affaires, à de rares exceptions près,
est inférieur à 500 millions d’Euros ?
98
99
Entretiens réalisés entre mai et décembre 2010.
Hors tout : hors catastrophes naturelles, GAREAT pour la France et courtage.
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3
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
1.3.3
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Cette solution est-elle adaptée aux EMTI ?
Les EMTI ont besoin de maîtriser les différentes problématiques d’assurance comme les grandes
entreprises. Ce segment d’entreprises a moins de ressources internes que les grandes pour une
analyse critique des solutions proposées, En outre, l’assurance est rarement la principale
préoccupation d’une EMTI qui la perçoit comme une charge plutôt que comme une protection.
Pour ces différentes raisons, les EMTI ont besoin de beaucoup plus d’accompagnement qu’une
grande entreprise.
La question n’est pas tant de savoir si la mise en place d’un programme international est adaptée
à une EMTI. C’est une opération qui peut s’avérer complexe, mais indispensable. Il s’agit plutôt
de savoir comment un programme international peut être mis en place de manière
économiquement viable pour répondre aux besoins des EMTI.
Les risques changent d’un pays à l’autre : ici la criminalité ou les événements naturels, là le
niveau de la prévention incendie, ailleurs l’état des routes qui ralentira les secours. Les EMTI qui
n’ont pas la base d’expérience de gestion des risques et de sinistres des grandes entreprises, ont
d’autant plus besoin du savoir faire de l’assureur.
Pour l’assureur, l’enjeu est de pouvoir offrir une solution garantissant la sécurité juridique de
l’assuré à un prix en adéquation économique avec le coût de production, c'est-à-dire qui intègre,
entre autres facteurs, le coût du réseau ainsi que le temps d’analyse et de mise en œuvre de la
solution.
Si elle n’est pas conseillée, une EMTI peut vivre avec des contrats morcelés et inadaptés…
jusqu’au sinistre. Elle peut également mettre en place un programme viable et bénéficier
d’économies d’échelle (voir encadré 30 : étude de cas).
Encadré 30 : étude de cas. La mise en place d’un
programme international dommages pour une société
d’équipement informatique.
Activité : commerce de gros d’équipements informatiques
Chiffre d’affaires : 380 M€
Effectif : 300 personnes – 3 sites en France
Présence à l’étranger : des filiales de distribution dans 9 pays de l’Union Européenne
et aux Etats-Unis, une filiale de fabrication en Asie du Sud-Est.
Panorama des contrats d’assurance jusqu’en 2010 :
En France : l’entreprise est assurée via un agent général qui a mis en place des
contrats dommages (un par site) avec, pour certains sites, un contrat pertes
d’exploitation séparé. Il existe un contrat Tous Risques Informatique couvrant les trois
sites français. La souscription s’est faite au fur et à mesure des besoins, sans cohésion
ni vision globale. Il y a des doublons de garantie et une sous assurance notoire (les
stocks sont garantis pour moins de 50 % de la valeur des existants). Les contrats
dommages incluent la règle proportionnelle.
Hors France : chaque filiale a géré son analyse de risque, et choisi les contrats
souscrits. Certaines filiales sont bien protégées, d’autres le sont insuffisamment. Il n’y
a aucune remontée d’information au siège, aucun contrôle sur l’adéquation des
garanties locales aux besoins.
…/…
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
…/…
Globalement : il n’existe aucun lien entre les assureurs de la maison mère et ceux
des filiales. Aucune garantie n’est prévue en cas de sinistre sur un site ou une filiale
ayant des répercussions sur le chiffre d’affaires d’un autre site ou d’une autre filiale.
L’entreprise a une dizaine de fournisseurs, dont un qui représente 40 % du chiffre
d’affaires. Il n’existe aucune garantie de carence des fournisseurs.
En 2010 :
L’entreprise fait réaliser une analyse de ses contrats français par un courtier
indépendant, non membre d’un réseau. Parmi plusieurs solutions proposées par son
nouvel intermédiaire, après avoir rencontré l'assureur, l’entreprise souscrit un
programme international pour maîtriser l’ensemble de ses garanties. Le programme
est mis en place via les implantations en propre de l’assureur et ses partenaires
fronteurs. Cette solution permet à chaque directeur de filiale de conserver un contrat
local dans sa langue et conforme aux usages locaux tout en centralisant la remontée
d’informations et le pilotage auprès de la police mère en France.
L’assureur met en relation le courtier avec un courtier adhérent à un réseau
international pour l’émission des polices locales.
Bilan de l’opération :
L’entreprise est aujourd’hui assurée pour les justes valeurs, avec une garantie de
carence des fournisseurs adaptée. En dépoussiérant sérieusement ses contrats
d’assurance, elle a obtenu une meilleure couverture globale en termes de garanties
et de limites (2 fois plus pour les stocks) pour un budget 35 % plus élevé que le
cumul des différentes primes. L’interdépendance des sites entre eux et de la maison
– mère et des filiales est couverte.
En conclusion, elle dispose d’un contrat moins cher, couvrant mieux ses besoins.
2. L’importance du réseau de l’assureur : les différents modèles de
développement.
Pour accompagner un assuré à l’international, un assureur ne peut s’affranchir d’être présent
dans les différents pays où opère son client. Le réseau d’implantations de l’assureur à l’étranger
est donc l’outil clé.
Sans réseau, il ne peut y avoir ni assurance admise100, ni de service local.
L’assureur peut s’appuyer sur ses implantations à l’étranger lorsque l’entreprise a développé une
stratégie d’internationalisation. Il peut également négocier des accords avec des opérateurs
locaux qui interviendront à titre de fronteurs pour les polices locales.
Pour comprendre comment fonctionne cet élément clé, il convient d’abord de détailler les
différents types de réseaux et leur articulation par rapport à la politique d’internationalisation de
100
Hormis dans le cadre de la LPS dans l’EEE.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
l’assureur. Ensuite, sera abordé l’élément essentiel des critères de choix des partenaires ou
fronteurs. Enfin, il est légitime de se demander si les réseaux bancaires peuvent concurrencer les
réseaux d’assurance.
2.1
2.1.1
Les différents types de réseaux :
Les réseaux intégrés :
Il s’agit d’un réseau d’entités locales composé d’implantations appartenant en propre à l’assureur
(filiales ou succursales), sous marque unique ou non, complété par des accords de fronting avec
d’autres assureurs selon le maillage géographique souhaité.
L’intérêt du réseau intégré est de permettre à l’assureur :
-
d’avoir la connaissance du marché local : obligations d’assurance, contrats types,
usages, niveau de prévention des risques…
-
et d’offrir un même niveau de service partout dans le monde et en limitant le risque de
contre partie pour l’assuré le jour du sinistre.
Les assureurs avec une large expérience en matière de programmes internationaux fonctionnent
avec des pôles d’expertise par zones géographiques. Ces pôles ont en charge la diffusion des
instructions vers les bureaux locaux et la remontée des informations vers l’assureur master. La
circulation de l’information au sein du réseau est cruciale pour le bon fonctionnement d’un
programme.
Un réseau d’assurance travaille en double flux, chaque pays est théoriquement :
-
émetteur d’instructions au titre des contrats master qu’il a souscrit : l’équipe programmes
internationaux travaille alors à l’export,
-
et receveur des instructions émises par les autres pays : l’équipe travaille alors à l’import
pour émettre les polices locales.
En pratique, certaines destinations tendent à travailler plus à l’import (la Pologne par exemple, ou
de nombreuses entreprises ont établi des filiales de production) qu’à l’export.
Lorsque l’assureur local appartient au même groupe que l’assureur master, il suivra les
instructions données, même si elles s’avèrent en décalage avec certaines pratiques locales,
notamment en termes tarifaires.
Si le risque est en dehors de sa politique de souscription locale (activité en principe refusée, par
exemple), un contrat de réassurance pourra être mis en place afin que le risque financier soit
effectivement porté par l’assureur master, même si les deux entités appartiennent au même
groupe.
Ce type de situation peut être plus délicat à gérer avec un fronteur qui peut refuser d’émettre une
police qui ne correspond pas à sa pratique sur son marché domestique. C’est le cas d’AIOI au
Japon qui tarifie le risque selon ses critères. L’émission de la police locale se fait alors après
négociations ou aux conditions du fronteur.
Lorsque l’assureur a une large base d’expérience en matière de programmes internationaux, il
anticipera ces problèmes de manière à communiquer d’emblée des conditions de garantie
réalistes ou communiquera une première indication sous réserve.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
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L’intermédiaire peu au fait des problématiques internationales pourra être surpris par ces
contraintes non anticipées ou sous-estimées. De même pour l’entreprise assurée, et ce d’autant
plus que c’est sa première implantation à l’étranger.
A nouveau, la qualité de l’information, voire de la pédagogie, qui accompagnent l’offre de contrat
sont cruciales pour permettre aux parties concernées une bonne compréhension des enjeux et
des contraintes.
Le risque, pour l’assureur habitué à traiter avec des grandes entreprises et qui s’intéresse au
segment des EMTI, est d’oublier de regarder son métier du point de vue d’une EMTI. Il peut ne
pas savoir se mettre à sa portée en matière de communication.
2.1.2
Existe-t-il un autre modèle que le réseau intégré ?
Le réseau intégré n’est pas le seul modèle, même s’il domine largement. Il existe quelques
réseaux non intégrés101, c’est-à-dire composé d’entreprises d’assurance indépendantes.
International Network of Insurance (INI) est le plus important. C’est un réseau de compagnies
d’assurance de taille moyenne : aucune d’entre elles n’est numéro 1 ou numéro 2 sur son marché
domestique. L’atout de ce type de réseau pour une EMTI est le profil même de ses adhérents. Il
s’agit d’opérateurs dont l’activité est orientée sur les EMTI et les professionnels* et qui en
maîtrisent les besoins.
En principe, il n’y a qu’une compagnie membre par pays. Sous réserve de l’accord de l’assureur
membre, un deuxième assureur peut éventuellement adhérer. Dans ce cas, il pourra utiliser le
réseau uniquement pour ses flux à l’export et ne bénéficiera pas des flux à l’import.
Les assureurs adhérant au réseau signent un engagement contractuel ou Statement of Service
Commitment. Ils s’obligent à réaliser la prestation de service, à l’import comme à l’export, dans un
certain délai. La prestation inclut les aspects de gestion (émission des polices locales) mais
également les visites de risques ou un avis juridique sur les pratiques locales. En revanche,
contrairement au réseau intégré, ils n’ont pas l’obligation d’utiliser le réseau.
Ce réseau fonctionne avec une structure internationale de quelques personnes. Un ancien
coordinateur précise que « les frais de fonctionnement de la structure internationale sont très
faibles, ce qui permet un coût d’adhésion peu élevé ». Les membres proposent un contrat
« basique, simple et standardisé ».
Le réseau fonctionne avec une prime de base plutôt forfaitaire à laquelle s’ajoute une commission
de fronting acquise localement pour le coût du service si la police est réassurée par la police
master. Si le risque local reste totalement porté par l’assureur local, celui-ci n’est pas obligé de
l’accepter dès lors qu’il n’entre pas dans ses critères de souscription.
2.1.3
Réseaux d’assurance et internationalisation de l’assureur :
La quasi-totalité des réseaux d’assurance sont des réseaux intégrés (encadré 31) mais le nombre
d’implantations appartenant en propre à l’assureur varie sensiblement d’un opérateur à l’autre.
101
Outre INI, il existe d’autres réseaux mais actifs dans le secteur vie, notamment Insurope.
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Il est intéressant de noter que parmi les 25 premiers assureurs mondiaux non vie (classement
Swiss Re)102 se trouvent 13 groupes également classés parmi les 20 plus important réseaux
internationaux d’assurance en nombre de pays desservis.
Encadré 31 : les 20 premiers réseaux
internationaux, en nombre de pays servis.
Assureur
ACE
ALLIANZ
AXA
CHARTIS
CHUBB
CNA
COVEA
FM
GAN
GENERALI
HDI - Gerling
INI
LIBERTY
MAPFRE
MITSUI SUMITOMO
QBE
RSA
TOKIO Marine
XL INSURANCE
ZURICH
Pays
intégrés
60
75
35
94
27
14
0
35
13
50
28
0
24
19
35
49
25
36
23
51
d’assureurs
Accord
de
fronting
100
75
75
82
100
94
86
80
réseau INI
n/c
n/c
86
112
n/c
n/c
réseau INI
n/c
n/c
80
138
Total
160
150
110
176
127
108
86
115
98
50
28
86
136
19
35
136
25
36
103
189
Marché
d'origine
Bermudes
Allemagne
France
USA
USA
USA
France
USA
France
Italie
Allemagne
sans objet
USA
Espagne
Japon
Australie
Royaume Uni
Japon
Bermudes
Suisse
D’après : Willis : Market place realities 2010 – Swiss Re « Top 25 non life insurers 2008»,
Entretiens réalisés entre mai et décembre 2010 et sites internet des entreprises.
En italique et en gras, les entreprises classées dans le top 25 des assureurs non vie établi par
Swiss Re.
Les assureurs qui ont développé les plus larges réseaux internationaux sont majoritairement
européens, anglo-saxons et japonais. Historiquement, ils ont suivi leurs clients grandes
entreprises à l’international, pour certains dès les années soixante. La globalisation de l’économie
amorcée dans les années quatre-vingt et son accélération dans les années quatre-vingt-dix a
amplifié le phénomène.
Pour quelle raison les réseaux intégrés dominent-ils l’offre ? Pour deux raisons, de nature
différentes. Premièrement, sur un plan capitalistique, l’assurance des grandes entreprises est plus
gourmande en capitaux propres que celle des entreprises plus petites. Elle s’est donc concentrée
sur les plus grands opérateurs du secteur.
Deuxièmement, sur un plan technique, les grandes entreprises ont fréquemment recours à la
création de sociétés captives* d’assurance ainsi qu’à la mise en place de contrats sur mesure.
Cette activité demande une technicité particulière qui ne peut être profitable que pour des
opérateurs qui arrivent à constituer un portefeuille d’une certaine taille, donc qui ont une capacité
financière importante.
102
Swiss Re, « Top 25 non life insurance companies in the world », 2008
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
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En parallèle à l’internationalisation des grandes entreprises et de leurs assureurs, les marchés
d’assurance occidentaux et japonais sont devenus extrêmement matures voire saturés. Les
assureurs ont mis en œuvre des stratégies de développement dans d’autres pays, notamment les
pays émergents, qui leur ont permis de développer un réseau intégré. Ces réseaux profitent
certes aux grandes entreprises tout en s’appuyant sur les marchés domestiques locaux. Ils
peuvent alors acquérir des compétences dont profiteront les EMTI.
Néanmoins, aucun opérateur ne fonctionne avec son seul réseau propre. En effet, il n’est pas
économiquement rentable d’être présent partout. Un réseau de fronteurs complète le réseau en
propre. Les critères de choix des partenaires sont alors fondamentaux.
2.2
2.2.1
La mise en place d’un réseau de partenaires :
La qualité financière du fronteur :
Tous les acteurs du marché sont unanimes : la solidité financière du fronteur est le premier
élément à prendre en compte.
Le premier réflexe sera de s’intéresser à la notation financière de son futur partenaire. Toutefois, il
n’y a pas ou peu de notations financières dans les marchés émergents. Il est aussi important de
savoir que la notation d’une entreprise locale ne peut jamais être supérieure au risque souverain.
L’assureur qui envisage de signer un accord de fronting devra donc procéder ou faire procéder à
une véritable analyse financière de l’entreprise partenaire :
- quelle est sa capitalisation ? La structure de celle-ci ?
- quel est le niveau des provisions techniques ?
- quels sont ses actifs ? Sa politique de placement ?
La structure de l’actionnariat est également un point clé : il convient d’être particulièrement vigilant
en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux.
L’analyse financière complète du futur partenaire permettra de déterminer le risque de crédit pour
l’assureur master.
Lorsque ce point est réglé, il reste à valider la compétence technique.
2.2.2
La compétence technique :
La capacité de service, y compris en gestion de sinistres, et la réputation du partenaire sur son
marché constituent le deuxième élément clé dans le choix d’un fronteur.
Pour déterminer la capacité de service au sens large, il convient d’effectuer une véritable enquête
d’environnement :
- entretiens avec les principaux intermédiaires présents sur le marché domestique pour
connaître leur expérience en tant qu’utilisateurs des services du partenaire,
- entretiens avec les experts après sinistres présents sur le marché,
- retour d’expérience des réassureurs,
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- le futur partenaire effectue-t-il déjà des opérations de fronting pour d’autres opérateurs ?
Est-il possible d’avoir leur retour d’expérience ?
Ce travail sera complété par des entretiens avec les équipes du partenaire afin de déterminer :
- leur degré de compréhension des affaires qui leur seront envoyées : un partenaire qui
traite généralement des contrats de particuliers et de professionnels n’aura pas nécessairement
les compétences pour mettre en place les contrats locaux demandés par une EMTI.
Le partenaire sait-il gérer un sinistre de pertes d’exploitation suite à une carence des
fournisseurs ? Un sinistre lié à un contrat de responsabilité civile des mandataires sociaux ?
- les compétences techniques : les critères d’évaluation sont la vitesse d’émission des
contrats, la vitesse de paiement des sinistres, la qualité de la gestion des sinistres.
- si les équipes locales parlent anglais : la maîtrise de l’anglais n’est pas évidente partout
dans le monde. Dans certains pays, seuls quelques rares collaborateurs parleront anglais.
Comment assurer la continuité de service tant pour la gestion des contrats que pour le règlement
des sinistres s’ils s’absentent ou quittent l’entreprise ?
Enfin, il faudra prendre en compte le coût du service :
- quel est le pourcentage de frais de fronting appliqué ? En pratique, il est fréquemment
d’au moins 10 % du montant de la prime locale. Y a-t-il un minimum ? Ces frais augmentent le
coût de la prime pour l’assuré.
- quel est le taux de rétention appliqué ? Généralement, l’assureur local retient un
minimum de 10 % mais certains pays imposent une rétention beaucoup plus élevée. Plus le
partenaire conservera une part élevée du risque, plus le chiffre d’affaires réalisé par l’assureur
master sur le programme sera réduit.
Ces différentes étapes peuvent avoir été suivies lors du choix des partenaires pour les
programmes des grandes entreprises, si le segment existe chez l’opérateur. Il n’en demeure pas
moins qu’elles devront être reconsidérées sous l’angle des EMTI, en particulier en ce qui
concerne la capacité du partenaire à gérer des volumes de contrats dont la prime unitaire peut
être relativement faible.
La flexibilité du partenaire sur la mise en œuvre de solutions différentes de ses habitudes de
marché, le partage de ses connaissances sont également des éléments à prendre en compte.
L’évaluation des partenaires devra faire l’objet d’une mise à jour annuelle.
2.2.3
Le règlement des sinistres :
« Nous sommes particulièrement vigilants sur la manière dont le sinistre est réglé : le fronteur ne
veut généralement pas faire l’avance des fonds et nous, nous ne voulons pas prendre de risque
de crédit » précise William Corbassière, Network Manager chez ACE.
Il est souhaitable d’anticiper les solutions permettant de transférer les fonds en cas de sinistre
majeur afin de ne pas retarder le règlement entre les mains du client pour des questions de
procédure.
Plusieurs options sont possibles comme le versement au fronteur le jour où lui-même verse les
fonds à l’assuré, ou le paiement échelonné entre les mains du fronteur, au fur et à mesure qu’il
verse les fonds localement.
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Une autre solution consiste, pour l’assureur master, à effectuer le paiement entre les mains d’un
tiers séquestre. Enfin, lorsque qu’il est permis par la législation locale, le « cut through » ou
paiement directement entre les mains de l’assuré peut être mis en oeuvre.
Toutefois, cela revient à régler en non admis. Cette solution nécessite une étude juridique car elle
peut avoir des implications fiscales lourdes. Par exemple en Indonésie, un sinistre réglé sur une
base non admise est taxé comme un investissement étranger, soit un taux de 30 %.
2.3
Les réseaux bancaires peuvent-ils concurrencer les réseaux
d’assurance ?
La banque est le premier interlocuteur de l’entreprise qui va réaliser un investissement à
l’étranger parce qu’elle le finance.
Elle peut avoir déjà mis en place des garanties pour les opérations de prospection dans le cadre
des mesures annoncées en février 2008 pour accompagner le développement des entreprises
françaises sur les marchés étrangers, notamment pour les PME*.
Ces mesures prévoient, entre autres, « un dispositif de préfinancement des dépenses de
prospection par le réseau bancaire traditionnel » 103. Il est prévu que les banques qui mettent en
place des produits d’assurance-prospection soient assurées par la Coface pour ce risque.
Les grandes banques comme la Société Générale et BNP-Paribas disposent d’implantations à
l’étranger. Pourquoi n’utiliseraient-elles pas leur réseau pour offrir des produits d’assurance aux
entreprises ?
Un bancassureur a besoin de trois éléments pour fonctionner :
- un réseau de distribution : la banque. Si la bancassurance fonctionne bien en France
et en Espagne, la distribution de produits d’assurance non vie ne rencontre pas le même succès
dans d’autres pays européens. Dans les marchés émergents, le réseau bancaire est encore
souvent à l’étape de la banque debout104. Les opérateurs sont loin de pouvoir proposer des
produits d’assurance.
- une structure locale pour gérer les contrats et les sinistres,
- un produit très standardisé.
« La banque sait faire de la bancassurance de masse mais pas nécessairement du risque de
professionnel qu’elle perçoit comme beaucoup plus technique » confirme Marie-France DanielChestier, Directrice de la Stratégie Internationale de Sogecap. Si les banques ne sont pas prêtes
à s’intéresser aux professionnels*, elles le sont d’autant moins à s’intéresser aux EMTI.
Une offre packagée et standardisée de contrats « entreprises simples » pourrait être un vecteur
de différenciation vis-à-vis de la concurrence. Néanmoins, les banques ne sont pas aujourd’hui
une menace pour les assureurs sur ce segment.
En conclusion, un réseau constitue l’outil indispensable pour l’assureur qui s’intéresse aux
entreprises qui s’internationalisent or il s’agit d’un investissement très onéreux. Pour être attractif,
un réseau doit atteindre une taille critique minimale en nombre de pays et une masse critique en
103
104
Cahier Industries n° 130, « Mobilisation pour l’exportation », mars 2008.
Banque debout ou banque de caisse : réseau bancaire qui traite essentiellement des opérations de dépôts et de retraits.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
nombre de contrats gérés. Seuls les assureurs qui opèrent dans un grand nombre de pays
peuvent se positionner en apériteurs. Les autres interviendront en apporteurs de capacité105 or
nous avons vu que les besoins de capacité des EMTI sont nettement plus faibles que ceux des
grandes entreprises, un montage en coassurance n’est pas toujours nécessaire.
Les assureurs qui disposent d’un réseau étendu ont donc un avantage stratégique certain vis-àvis des autres pour lesquels la capacité à constituer un réseau de qualité représente une barrière
à l’entrée sur ce marché.
3. Mise en œuvre opérationnelle : quels sont les facteurs de succès ?
Après la pierre angulaire que constitue le réseau, il convient de prendre en compte les autres
facteurs de succès qui permettront de répondre aux besoins des EMTI à l’international. Il s’agit de
concevoir une offre qui soit adaptée aux assurés mais également aux intermédiaires qui seront
chargés de la distribuer.
L’environnement légal, réglementaire et fiscal complexe de l’assurance n’est pas toujours perçu
par l’ensemble des opérateurs. Avant de mettre en place une offre, il est important de comprendre
où se situent les freins chez les différents acteurs.
Dans un deuxième temps, il convient de s’interroger sur la manière dont les assureurs peuvent
dépasser ces freins en professionnalisant leur approche.
Enfin, il sera proposé un projet d’offre pour répondre au mieux aux besoins du segment des
EMTI.
3.1
3.1.1
Existe-t-il des freins
internationales ?
à
la
mise
en
place
de
solutions
Les points de blocage à lever chez les EMTI :
Pour l’entreprise qui s’internationalise, le premier frein vient de l’absence de Risk Manager. Le
Directeur Financier, lorsque le poste existe, peut faire office de Risk Manager. Son le rôle est
alors souvent cantonné à l’achat d’assurances.
Le corollaire de l’absence de Risk Manager est qu’il n’existe pas de cartographie des risques. Il
en résulte que les EMTI manquent de connaissance sur leurs propres besoins, et les
conséquences d’une couverture d’assurance non admise ne sont pas identifiées.
Le second frein vient de l’organisation de l’entreprise. Il y existe deux familles de sociétés :
105
-
les sociétés centralisatrices où les filiales suivent la société de tête. Serge Djochgounian,
Directeur, Filhet Allard Paris, constate une différence culturelle certaine entre les pays :
« les anglo-saxons et les allemands, en particulier, sont très dirigistes vis-à-vis de leurs
filiales : c’est tel courtier et le programme est comme çà, point final. Les français sont plus
dans l’adhésion : il manque une volonté de la holding d’imposer un programme à ses
filiales ».
-
les sociétés où la culture est beaucoup plus décentralisée, à tout point de vue, avec une
large autonomie laissée en local. Il n’y a pas toujours de lien hiérarchique entre le ou les
L’apériteur émet les polices locales qu’il porte à 100 % puis rétrocède une partie du risque en co-réassurance.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
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dirigeants ou directeurs financiers des filiales et le Directeur Financier de la société mère,
ce qui n’aide pas à la mise en place d’une approche d’assurance globale. Hervé Houdard,
Directeur Général de Siaci St Honoré, confirme qu’une « PME* a souvent laissé
beaucoup d’autonomie à sa filiale lors de la création et n’a pas forcément envie de la
reprendre ».
Quel serait l’élément clé de la réussite de la mise en place d’une solution internationale en
matière d’assurance (programme intégré ou non) ?
Il s’agit de la validation de la structure proposée au plus haut niveau de l’entreprise. Ceci implique
d’avoir le bon interlocuteur chez l’assuré : pas seulement l’acheteur d’assurance, qui réfléchira
d’abord en termes de budget, mais le vrai décisionnaire. Dans une EMTI, il s’agit généralement
du chef d’entreprise.
Les freins de l’assuré peuvent être d’autant plus forts que l’entreprise découvre les
problématiques internationales pour la première fois. Dans ce cas, il est souhaitable que
l’assureur et l’intermédiaire travaillent de concert pour « décomplexer le chef d’entreprise qui a
peur de mettre en place une hydre à huit têtes » selon l’un des courtiers rencontrés,
L’intermédiaire a donc un rôle clé pour aider l’entreprise à dépasser ses freins. Encore faut-il qu’il
ait lui-même dépassé les siens.
3.1.2
Les problématiques des intermédiaires :
Le premier frein est la combinaison des facteurs suivants :
-
le niveau de maîtrise des problématiques internationales chez les intermédiaires :
certains courtiers maîtrisent très bien les programmes, d’autres pas du tout. Au sein du
même cabinet, il peut y avoir des compétences hétérogènes. Chez les agents, la
connaissance de ces problématiques est quasi inexistante, hormis pour les agents
transfrontaliers.
-
la crainte de perdre le client en France du fait d’un sinistre qui pourrait être mal réglé au
titre d’une police locale ou du fait d’un mauvais service de l’intermédiaire local.
-
la maîtrise de l’anglais ou d’une autre langue étrangère (Espagnol…).
Selon Anthony Fienberg, Directeur Général de Nassau, les ¾ des courtiers qui ont des clients
dans le segment des EMTI « n’osent pas ou n’ont pas envie d’aller au-delà de leurs habitudes ».
S’il n’y a pas d’obligation d’assurance locale et que l’intermédiaire n’amorce pas la réflexion, cela
crée une zone grise : tout va bien tant qu’il n’y a pas de sinistre, ou de contrôle fiscal.
Un grand acteur du marché confirme que « tous les agents ou les courtiers de proximité ne font
pas remonter les besoins de leurs clients. Ils préfèrent se focaliser sur ce qu’ils savent faire (la
France) et laisser le client travailler avec un autre intermédiaire pour l’international. Jusqu’à ce
que celui-ci propose au client de reprendre la police française et là, nous devons intervenir dans
l’urgence. »
Lorsque l’intermédiaire maîtrise les problématiques d’assurance à l’international, l’absence de
partenaires dans certains pays peut constituer un frein en matière de service aux clients.
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Mais le frein majeur est lié au modèle économique de l’activité : lorsqu’un client s’adresse à son
intermédiaire, celui-ci va réaliser une étude et proposer des solutions avant que le client
n’achète… ou pas.
Jérôme Flach, Directeur Adjoint de l’International chez Verspieren, confirme que « les PME* ont
indéniablement besoin de plus de conseil, d’aide à l’analyse de risques. La difficulté pour le
courtier, c’est de se faire rémunérer à la hauteur de la prestation réalisée : une journée de
consultant coûte de 800 à 1 000 €. Les entreprises en général et les PME* en particulier payent
volontiers leur avocat sur cette base mais pas leur courtier».
Le calcul de l’adéquation économique peut freiner l’intérêt de l’intermédiaire pour certains profils
de clients : l’effort pour mettre en place une police locale n’est pas suffisamment rémunéré.
L’intermédiaire peut alors conseiller à son client de laisser les filiales autonomes dans la gestion
de leurs contrats locaux et chercher à négocier une clause de DIC/DIL large sur la police master
en France.
Or cette solution comporte des risques non négligeables pour les parties, mêmes si elle a été
pratique courante jusqu’au début des années 2000. Les différents opérateurs rencontrés
confirment qu’ils reçoivent régulièrement des demandes de cette nature, surtout d’intermédiaires
qui ne prennent pas toute la mesure des risques ainsi créés pour leurs clients. L’intermédiaire
cherche une solution simple et qui lui permette de conserver la totalité de la rémunération.
Quelle solution mettre en œuvre ?
Il n’existe pas de solution clé en main. Néanmoins, l’assureur qui dispose d’un large réseau avec
une bonne base d’expérience locale en matière d’assurance des EMTI pourra offrir une gamme
de solutions allant d’un contrat local standard type Multirisques Bureaux, au prix du marché local,
à un programme d’assurance intégré.
Toute la difficulté est ensuite de travailler sur les modalités de communication assuré /
intermédiaire / assureur : si la réglementation locale n’impose pas de passer par un intermédiaire,
l’assureur peut traiter directement avec l’assuré localement. Cette relation correspond-elle au
modèle économique de l’assureur ? L’intermédiaire français accepte-t-il cette solution qui, si elle
peut satisfaire l’assuré, ne lui procurera aucune rémunération ?
L’assureur qui ne dispose pas du double avantage d’un réseau et de compétences locales en
matière d’EMTI ne pourra apporter cette solution.
Existe-t-il d’autres freins au niveau des assureurs ?
3.1.3
Assureurs : quel modèle choisir ?
La question clé est le modèle économique de l’assureur, sa définition des centres de profits.
L’assureur peut avoir mis en place un réseau intégré mais chaque pays, voire chaque bureau,
peut raisonner en centre de profits. Le premier frein chez un assureur, c’est la mentalité « silos* »
des éléments de l’organisation.
La souscription et la gestion des contrats sont organisées par branches (responsabilité civile,
dommages, environnement, transport, responsabilité civile des mandataires sociaux, risques
techniques…). En outre, la segmentation, généralement en fonction du chiffre d’affaires, amplifie
l’effet silos*.
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L’assureur a rarement une vision globale de l’assuré mais plutôt une vision morcelée, branche par
branche. Un assuré dont la prime en dommages aux biens est relativement peu élevée peut être
un compte important pour une autre branche. Un mauvais service en dommages, ou l’incapacité à
répondre à une demande à l’international, peut mettre en péril le ou les autres contrats.
Prenons l’exemple d’une police émise en LPS : un client français demande une attestation
d’assurance en allemand ou en espagnol pour une filiale. Qui établit le texte en langage local ? Si
l’organisation n’a pas été pensée en amont, l’interaction entre les différents services ou les
différentes entités ne sera pas fluide et la qualité du service s’en ressentira.
Les difficultés continuent avec la gestion des sinistres. L’assureur reçoit une réclamation d’un tiers
en Allemagne, en allemand. Il faut alors transférer le dossier en Allemagne, auprès d’une filiale ou
d’une succursale qui n’a pas perçu de prime. Le dossier va-t-il être traité avec le même soin que
celui d’un client local ?
En termes d’implantation géographique, les besoins de l’entrepreneur ne recoupent pas toujours
l’offre d’assurance. Il peut y avoir du sens pour une entreprise à s’implanter dans un pays mais
pas pour l’assureur. Par exemple, lorsque le marché est instable financièrement ou
réglementation des opérations d’assurance peu évoluée.
Il existe aussi des pays où l’assureur ne pourra délivrer un bon service du fait de sanctions
internationales qui restreignent les possibilités de transactions financières (Iran, Irak… Cuba,
Syrie pour les sociétés cotées à New York).
Quelles sont les approches possibles pour l’assureur ?
S’il s’agit d’un spécialiste des programmes internationaux : le réseau et les compétences
techniques internationales mis en place pour les grandes entreprises, existent déjà. Selon la
stratégie développée, l’assureur peut avoir ou non des entités domestiques qui souscrivent des
contrats pour les EMTI dans un certain nombre de pays.
Les équipes rodées à l’international travaillent généralement sur les grands comptes et ne savent
pas gérer les petites entreprises et/ou les contrats de petite taille.
Les équipes qui travaillent avec les EMTI connaissent leurs problématiques mais ne maîtrisent
pas les contraintes de l’assurance à l’international y compris la maîtrise d’une autre langue. Ce
dernier point est un problème récurrent souligné par tous les interlocuteurs rencontrés
L’enjeu est de coordonner des savoir-faire dans différents silos* pour arriver à une organisation
qui fonctionne. Le processus passe par :
- la formation,
- la mise en place d’objectifs communs,
- la mise en place d’une organisation fluide. Le modèle retenu dépendra des volumes
d’affaires.
S’il s’agit d’un assureur généraliste des risques d’entreprises : il connaît les besoins des
EMTI mais ne sait pas nécessairement les accompagner à l’international. S’il ne se donne pas les
moyens de le faire, le risque est de voir une partie de sa clientèle lui échapper : l’assureur qui a
fourni une solution internationale proposera de travailler sur l’ensemble du client ou d’autres
parties du portefeuille de l’intermédiaire.
L’enjeu est de constituer un réseau économiquement viable :
- à travers des entités du groupe si l’entreprise est implantée hors France : les
équipes locales ont-elles les compétences techniques pour traiter les EMTI ? Et
toujours la problématique de la maîtrise d’une autre langue,
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- en constituant un réseau de fronteurs,
- en adhérant à un réseau constitué : les possibilités sont limitées en France.
L’alternative peut être de se positionner uniquement sur les EMTI qui s’implantent dans l’Espace
Economique Européen. C’est la stratégie choisie par Tokio Marine en Europe qui offre
uniquement des contrats en LPS.
Quels sont les défis à relever sont pour offrir un service de qualité aux EMTI ? Il s’agit de
déterminer le prix minimum d’accès au réseau. Ce point n’est pas l’objet de ce travail, il revient à
chaque opérateur de le calculer. Il existe également des facteurs de succès qualitatifs que nous
allons détailler.
3.2
Professionnaliser l’approche :
« Le professionnalisme n’est rien d’autre qu’une approche systématique et l’application d’un
savoir spécifique à une tâche »106.
3.2.1
La formation et l’information des acteurs :
Les formations initiales en assurance ont peu à peu intégré des éléments relatifs aux
problématiques internationales mais cela reste très ciblé soit sur l’Europe (BTS, licence), soit vers
un public très particulier. Par exemple, le Certificat « Assurance des Risques Internationaux »,
dans le cadre d’un mastère spécialisé d’HEC pour le management des risques internationaux.
L’essentiel de la formation se fait donc à l’intérieur de l’entreprise. Encore faut-il que l’opérateur
ait une compétence à transmettre. Là encore, il y a une prime au spécialiste dont les équipes
pourront former de nouveaux collaborateurs.
Plusieurs pistes de réflexion peuvent être envisagées. Tout d’abord, les collaborateurs des
équipes « international » pourraient sensibiliser ceux des équipes « entreprises » aux
particularités de leur métier, et vice versa. Ensuite, des échanges de collaborateurs entre les deux
équipes pourraient être organisés pour monter en compétence.
Néanmoins, en pratique, force est de constater qu’il se pratique très peu d’échanges de cette
nature. L’organisation même des services ne facilite pas cette approche (entités juridiques
différentes, implantation sur des sites différents).
Mettre en place des sessions de formation interne de cette nature permet une certaine flexibilité
dans l’organisation qui peut être pilotée au niveau des responsables d’équipe. Ceci participerait à
casser l’effet silos* et pourrait être un vecteur de motivation pour les collaborateurs qui souhaitent
élargir leur horizon.
Au-delà de la formation des équipes de l’assureur, les interlocuteurs rencontrés s’accordent sur le
caractère très hétérogène des compétences à l’international des intermédiaires. Hormis les
courtiers spécialisés en risques d’entreprises, souvent membres d’un réseau international, le
recrutement chez les intermédiaires est souvent orienté sur des profils commerciaux plutôt que
techniques.
106
A. Bergmann, B. Uwamungu, « Encadrement et comportement », Edition Eska.
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Il y a donc un effort pédagogique à faire vis-à-vis des intermédiaires qui peut prendre plusieurs
formes :
- des fiches-conseil généralistes pour attirer l’attention sur les risques du non admis et
les solutions possibles. Ces fiches peuvent être accessibles au public sur le site Internet
de l’assureur. Elles devront être synthétique et ne pas nécessiter de mise à jour régulière.
Elles atteindront deux publics, l’intermédiaire et l’assuré, et les inciteront à prendre
contact avec l’assureur pour plus d’informations.
- des fiches de retour d’expérience ou d’intelligence marché sur un pays afin de
permettre une bonne compréhension des contraintes locales et des pratiques de marché.
Elles pourront être plutôt destinées aux intermédiaires et accessibles avec un code
d’accès : il s’agit d’offrir un outil pédagogique à l’intermédiaire afin qu’il explique certaines
problématiques à son client en donnant des exemples.
Ces fiches n’ont pas vocation à donner une vue complète sur l’ensemble des pays (la
maintenance serait trop onéreuse). Elles doivent se focaliser sur les pays où les
entreprises françaises s’implantent le plus.
- des ateliers d’informations vis-à-vis des intermédiaires, dans lesquels l’aspect
assurance à l’international peut n’en constituer qu’une partie. L’objet est alors de
sensibiliser l’intermédiaire qui reviendra vers l’assureur lorsqu’il aura une problématique
de cette nature avec un client.
Quelque soit le support et le mode de communication, il est important de faire comprendre à
l’intermédiaire et à l’assuré qu’il existe des différences culturelles et des pratiques de marché
autres. L’idée d’avoir des garanties miroir absolu de la police master n’a pas forcément de sens
partout dans le monde, notamment en responsabilité civile dans les pays émergents où les
réclamations seront à une autre échelle,
De même, l’assurance ne se pratique pas partout de manière identique : chaque organisation est
légitime et peut induire des contraintes particulières qu’il faudra prendre en compte.
3.2.2
L’organisation des services :
Nous avons vu que le réseau est le socle qui permet à l’assureur d’accompagner ses clients à
l’international, d’une part, et que le frein majeur est l’organisation en silos*, d’autre part.
Il est donc important d’utiliser les ressources internes de l’entreprise pour tirer le meilleur parti
d’un bon réseau. L’organisation devra tenir compte des deux types de flux : import et export.
Un premier axe de réflexion pour améliorer l’organisation peut être, lorsque des équipes séparées
existent, la mise en place de coordinateurs internationaux dans les équipes PME/PMI et de
coordinateurs PME/PMI dans les équipes internationales. Il nous semble qu’il s’agit là d’une
configuration minimale à mettre en œuvre.
Au-delà de cette organisation minimale, dès que le portefeuille d’entreprises s’accroît, la proximité
des équipes est la clé d’un bon service. Lorsque l’organisation est très segmentée, chaque unité
prend en considération ses propres objectifs. En outre, il y a un risque de perte d’informations lors
de leur transmission d’un service à l’autre, voire d’une absence de communication.
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La souscription, la gestion des contrats, la comptabilité des primes et la gestion des sinistres
pourraient être réunis au sein d’une même équipe PME/PMI formée à l’international. Celle-ci
pourrait offrir :
- l’expérience technique des souscripteurs. Une équipe internationale composée de
souscripteurs maîtrisant différentes branches permettrait une approche clients, par opposition à
une approche produits.
- la maîtrise des problématiques internationales : mise en place des contrats, gestion au
quotidien, y compris la gestion transfrontalière des sinistres,
- des gestionnaires de contrat qui suivent des clients tant à l’export qu’à l’import. Les
intermédiaires rencontrés constatent souvent que les services traitant les dossiers à l’import sont
plus administratifs, plus passifs, que ceux qui traitent les dossiers à l’export.
Gérer les dossiers dans une même équipe, en spécialisant ou non les intervenants, permettrait
d’offrir la même dynamique de traitement pour les contrats à l’import.
- la proximité entre l’équipe de souscription/gestion et l’équipe de gestion des sinistres
afin de faire remonter rapidement les informations en cas de difficultés.
- la proximité entre le souscripteur avec lequel l’intermédiaire négocie les conditions de
garantie et le gestionnaire qui donne les instructions au réseau. En effet, la qualité et la fluidité de
l’information sont le liant permettant d’optimiser un bon réseau.
3.2.3
La qualité et la fluidité de circulation de l’information :
Dès le stade de la négociation des conditions de garanties, plus le client donne d’informations,
meilleur sera le service. Ceci semble une évidence, quelle que soit la nature du contrat souscrit et
sa territorialité. Néanmoins les interlocuteurs rencontrés s’accordent sur le fait que la qualité des
informations est d’autant plus importante dans le cadre d’un programme. En effet, la chaîne des
acteurs (encadré 32) amplifiera tout dysfonctionnement en termes de délai ou de qualité des
informations transmises.
Encadré 32 : les flux de circulation de l’information.
Client
Master
Courtier
Master
Assureur
Master
Client
local
Courtier
local
Bureau local /
fronteur
L’information ne circule pas partout à la même vitesse : il arrive que l’un des acteurs locaux
(assuré, intermédiaire ou assureur) ait reçu les instructions mais pas les autres.
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Une mauvaise communication ou un manque d’anticipation est une perte de temps et ajoute des
coûts. Aussi, il est important d’anticiper l’envoi des instructions pour éviter d’éventuelles difficultés
dues à la règlementation locale telles que :
-
garantie réservée à des opérateurs d’Etat. Par exemple, la responsabilité civile employeur
(worker’s compensation) en Australie, ou certains appels d’offres au Qatar ou à Abu Dhabi
pour des investissements publics qui sont réservés à quelques intervenants locaux.
-
capacité du marché local insuffisante. Par exemple une garantie fraude de plusieurs
dizaines de millions d’euros en Moldavie. L’assureur local n’a pas la capacité suffisante
même s’il se réassure à 100 %. Cela déséquilibre son bilan et sa marge de solvabilité car il
ne peut pas nécessairement bénéficier de la cession à 100 % pour le calcul de celle-ci.
-
garantie inexistante en local et que la compagnie locale ne sait pas gérer en cas de sinistre
même si elle fait partie d’un réseau intégré. Il y a lieu de tenir compte de la moindre
maturité des marchés d’assurance dans les pays émergents et les pays de l’ancien bloc
soviétique.
La remontée des informations et leur circulation en transversal sont cruciales pour la réussite d’un
programme. Si une seule relation manque, il y a un risque de perte d’informations. Il importe de
pouvoir consolider les informations dans les délais, en particulier avec les fronteurs.
Ceci suppose une solution informatique mondiale qui puisse être pilotée depuis le point
d’émission de la police master. Le suivi des EMTI demande une approche qui soit aussi
automatisée que possible et qui évite la multiplicité des saisies.
Le système d’information devra pouvoir consolider les capitaux assurés et les primes, en Euros et
en devises. Il devra également permettre de consolider les sinistres. Pour tenir compte de
l’ensemble des contrats souscrits, le système devra privilégier une approche « client » et non pas
une approche « produit ».
Ce n’est pas forcément le cas chez tous les opérateurs où il est fréquent que plusieurs couches
d’applications informatiques existent, obligeant les collaborateurs à passer d’un système à l’autre
pour avoir une vue d’ensemble ou pouvoir répondre à la demande de l’assuré.
3.3
3.3.1
Comment construire une offre adaptée ?
Quels sont les critères du choix d’un assureur pour l’intermédiaire :
Au-delà de l’aspect tarification qui n’entre pas dans l’objet de ce travail, les intermédiaires
recherchent des assureurs fiables, qui répondent vite, que la décision soit positive ou non. Trois
critères clé reviennent chez tous les intermédiaires rencontrés (encadré 33).
Le critère de l’implantation en propre a son importance : certains courtiers ont eu des
déconvenues avec les services de fronteurs (par exemple en Russie où l’un des courtiers
rencontrés a vu s’écouler près de deux ans entre l’envoi des instructions et l’émission du contrat).
Il est primordial que le service puisse être délivré dans les temps.
L’assureur qui dispose d’un large réseau avec ses propres implantations aura indéniablement un
atout pour mettre en œuvre une même qualité de service partout à travers le monde avec les
mêmes procédures au moyen, idéalement, d’un système d’information global.
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Encadré 33: les 3 critères clé pour choisir un assureur.
N° 1
La maîtrise de l’international :
- taille du réseau, nombre d’implantations en propre,
- capacité à régler une indemnité en local en conformité avec la réglementation.
N° 2
La compétence technique de l’assureur par rapport à l’activité
de l’assuré :
- savoir faire des équipes,
- la capacité de souscription : garanties et limites.
N°3
La qualité de service :
- capacité à délivrer le service à l’international dans les temps,
- un fonctionnement fluide,
- la qualité de la gestion des sinistres.
D’après les entretiens réalisés entre mai et décembre 2010 auprès de 7 courtiers membres de réseaux
internationaux.
Néanmoins, faut-il encore offrir des contrats d’assurance dimensionnés pour les EMTI. La
difficulté s’accentue lorsque les intermédiaires n’ont pas accès à un réseau international ou ne
savent pas l’utiliser.
3.3.2
Accompagner les intermédiaires :
Comment aider les intermédiaires non familiers avec l’assurance à l’international à surmonter
leurs freins ?
Après la phase d’information, l’assureur peut aider l’intermédiaire qui n’a pas d’alter ego dans le
pays où s’implante son client en le mettant en relation avec un correspondant local.
Certains assureurs indiquent plusieurs contacts locaux, de manière informelle, à l’intermédiaire
qui en fait la demande. D’autres ont élaboré des solutions plus structurées en intégrant dans leur
outil informatique un répertoire des intermédiaires intéressés, y compris leurs compétences
linguistiques.
La mise en relation des deux intermédiaires ne résout pas nécessairement tous les problèmes.
Deux questions demeurent :
-
les problèmes de coordination entre les intermédiaires de deux pays qui n’ont pas
l’habitude de travailler ensemble. Il peut y avoir des différences de compréhension ou
d’interprétation.
A priori, l’intermédiaire du pays destinataire figurera sur la liste des contacts possibles
parce qu’il connaît les problématiques de l’assurance à l’international. Ce n’est pas le cas
pour l’intermédiaire du pays d’origine.
-
les problèmes de communication : quelle langue vont-ils utiliser ? Axa, dans le cadre
du réseau NEAR, a mis en œuvre une solution intéressante : les agents peuvent utiliser
Truck Assistance International107, une plateforme d’assistance.
Néanmoins, si ce service peut résoudre la question de la langue, le prestataire n’est pas
un professionnel des questions d’assurance et le risque de la transmission d’une
107
TAI est une plateforme d’assistance et de traduction pour les transporteurs routiers internationaux.
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partie : comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ?
mauvaise information demeure. La plateforme pourra intervenir pour un appel
téléphonique mais pas pour de la gestion au quotidien.
En pratique, le rôle de coordinateur peut revenir à l’assureur, et ce à deux niveaux :
- en matière de partage de la rémunération : certains intermédiaires, généralement les
agents, découvrent à l’occasion de la mise en place d’un contrat à l’international, qu’ils vont devoir
partager la rémunération avec un ou plusieurs autres intermédiaires. Ceci explique d’ailleurs le
succès des contrats en LPS auprès de certains intermédiaires car ils conservent toute la
rémunération.
Il revient aux intermédiaires de convenir des conditions de partage de gré à gré. Néanmoins,
l’assureur peut informer l’intermédiaire français des usages locaux afin d’éviter les quiproquos.
- si la barrière de la langue est trop importante, l’intermédiaire du pays d’origine peut
revenir vers l’assureur pour lui demander de transmettre les instructions localement. Se pose
alors la question du rôle de chacun : où commence celui de porteur du risque, où s’achève celui
de conseil ?
L’accompagnement de l’intermédiaire peut parfois s’assimiler à de l’assistance, ce qui pose la
question suivante : l’assureur peut-il et doit-il accompagner tous les profils d’intermédiaires ?
La réponse dépend du réseau de distribution de l’assureur. Les compagnies d’assurance qui ont
un large réseau d’agents ne peuvent ignorer ce canal de distribution. Axa et Allianz ont mis en
place des solutions pour leurs agents dont peuvent également bénéficier les courtiers. Pour les
autres, il s’agit d’un choix de modèle économique. Néanmoins, les EMTI ont souvent un
intermédiaire « à leur taille ». Cibler ce segment implique d’intégrer la dimension
d’accompagnement de l’intermédiaire.
3.3.3
Une offre packagée et évolutive :
Les garanties proposées aux grandes entreprises font l’objet de montages sur mesure, souvent
complexes. Cette conception ne peut être utilisée avec les EMTI car elle ne serait pas
économiquement viable.
Comment construire une offre adaptée ?
Les intercalaires108 conçus par les courtiers : la plupart des intermédiaires présents sur le
segment des entreprises ont leurs propres intercalaires, validés par les assureurs. Or ces
intercalaires sont conçus pour le marché domestique et nécessiteront une adaptation plus ou
moins importante pour l’international ne serait-ce qu’en Europe (par exemple, la responsabilité
patronale en Espagne requiert des clauses spécifiques).
Les contrats domestiques des assureurs: ils sont par définition conçus pour le marché
domestique. Ils devront être adaptés pour l’international, en particulier dans le cadre de la LPS.
Une même charte graphique ainsi qu’une présentation selon une même logique peuvent faciliter
la compréhension d’un pays à l’autre. Une bibliothèque de clauses spécifiques peut être créée,
avec leur traduction en anglais. Il s’agit néanmoins d’un travail qui peut s’avérer particulièrement
conséquent.
108
Un intercalaire courtier est un texte de contrat élaboré par un courtier, dans le but d’offrir un produit lui permettant de se
différencier, et accepté par un assureur en lieu et place du texte de contrat habituel de l’assureur.
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Une offre adaptée doit être simple et évolutive. Les EMTI achètent plus de contrats packagés
que les grandes entreprises. En outre, ce type de contrat est également apprécié par
l’intermédiaire car il demande moins de gestion. C’est l’opportunité pour l’assureur de proposer
deux packages, correspondant aux deux phases de l’internationalisation :
- pour la phase 1 (exportation) : un contrat packagé qui inclut les garanties nécessaires
pour protéger l’entreprise et ses collaborateurs dans la période de prospection, de ventes
jusqu’à la livraison. Il comprendra :
- la garantie de la responsabilité civile de l’entreprise,
- l’assistance rapatriement pour les collaborateurs,
- la garantie du transport des marchandises,
- la garantie des outils de communication en déplacement ou au domicile des
collaborateurs (ordinateurs portables, périphériques portables, téléphones…).
- la possibilité de souscrire un contrat local indépendant pour un bureau de représentation. Ce contrat sera purement local mais apparaîtra en remontée d’informations
pour que l’assuré ait une vision globale des garanties.
- pour la phase 2 (implantation) : les montages suivants pourront s’articuler autour du
package « export » :
- programme coordonné en responsabilité civile et dommages : lorsque le montage
en réassurance n’a pas de sens économique,
- programme intégré en responsabilité civile et dommages,
La garantie automobile restera traitée de manière séparée compte tenu des contraintes
spécifiques à ce produit. Elle pourra faire l’objet d’une remontée globale d’informations.
L’assureur pourra prévoir les garanties environnementales et responsabilité civile des
mandataires sociaux en contrats séparés ou rattachés au package.
Dans ce cadre, l’assureur qui est capable d’accompagner les EMTI sur toute la gamme de
produits d’assurance aura un avantage indéniable. De même, une marque mondiale et une même
charte graphique seront des atouts : l’entreprise sera rassurée de voir le même logo sur
l’ensemble des documents contractuels, même si le texte est en langue locale.
Cette approche implique que l’assureur travaille avec une vision « client » et non pas une vision
« produit » faute de quoi le concept même de package sera impossible à mettre en œuvre.
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Ce qu’il faut retenir :
Pour répondre aux contraintes légales, réglementaires et fiscales, il est nécessaire
d’émettre des polices locales dans les pays où l’assuré est implanté. Ceci se fait soit dans
le cadre d’un programme international intégré, soit dans le cadre d’un programme
international coordonné. Ces solutions constituent la base de l’offre existante.
Un programme permet d’offrir des contrats conformes au droit local, dans la langue du
pays avec un service local. Il permet à l’assuré de contrôler l’ensemble de l’approche
assurance et la certitude de travailler avec des opérateurs locaux dont la solvabilité aura été
vérifiée par l’assureur master.
Néanmoins, le ticket d’entrée est plus élevé que pour des contrats domestiques non
coordonnés et il n’existe qu’un petit nombre d’acteurs vraiment globaux.
La solution est adaptée aux EMTI. Ce sont les modalités de mise en œuvre qui doivent
être standardisées ou automatisées pour maîtriser les coûts. Qui dit accompagnement à
l’international d’un assuré dit réseau, ce qui engendre des coûts fixes, notamment pour les
réseaux intégrés. Les réseaux non intégrés peuvent avoir un coût d’accès bien plus bas, mais
moins de flexibilité dans le suivi des instructions.
Dans tous les cas, la qualité des partenaires du réseau est primordiale. Il importe de bien
choisir les fronteurs : solidité financière, compétences techniques, qualité de service et
maîtrise des langues étrangères sont les critères clé.
Les réseaux de bancassureurs ne sont pas assez matures aujourd’hui pour concurrencer les
assureurs.
Comment mettre en place une offre adaptée aux EMTI ?
1. en tenant compte des freins rencontrés par les acteurs :
- les EMTI ont besoin de beaucoup de conseils et d’accompagnement,
- les intermédiaires ne maîtrisent pas tous les problématiques internationales et la
langue constitue souvent une barrière.
- le raisonnement en centre de profits ou la mentalité « silos » de certains
d’assureurs.
2. en professionnalisant l’approche :
- former les équipes, créer des outils d’information à destination des intermédiaires
et de leurs clients,
- organiser les services de l’assureur de manière à créer des synergies,
idéalement une équipe PME* internationale.
- être attentif à la qualité et à la fluidité de la circulation de l’information pour
donner un bon service et limiter les coûts.
3. En construisant une offre adaptée
- intégrer les attentes des intermédiaires qui connaissent l’international,
- accompagner ceux qui maîtrisent moins ou pas du tout le sujet,
- offrir des contrats d’assurance simples, packagés, garantissant la sécurité
juridique de l’assuré partout dans le monde. Cette offre devra être évolutive pour
grandir avec l’entreprise assurée.
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Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
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CONCLUSION
Le secteur de l’assurance a un rôle à jouer dans le développement des EMTI à l’international. Ce rôle va
au-delà du simple transfert de risques. Ces entreprises ont un besoin d’accompagnement et de protection
de leur bilan bien plus important que les grandes entreprises – même si les EMTI n’ont que fort rarement
cette perception de l’assurance. Cette dimension de conseil et de relais d’informations existe également
vis-à-vis de l’intermédiaire d’assurance qui ne mesure pas toujours tous les enjeux en matière
d’assurance dans les pays où son client s’implante.
Le segment des EMTI qui s’orientent vers l’international présente un intérêt stratégique pour les assureurs
car il s’agit d’entreprises plus innovatrices et dynamiques que leurs pairs domestiques. Leur croissance
plus forte permet d’augurer d’une évolution positive de l’encaissement global de primes.
L’enjeu majeur pour les assureurs est de réussir à construire une offre attractive, conjuguant la qualité de
service avec la maîtrise des coûts. Ceci passe par la mise en place ou le développement d’un réseau
d’équipes sachant traiter les risques des EMTI dans un contexte international. Cela passe également par
une standardisation des processus de gestion permettant des gains de productivité.
Ce segment est attractif en lui-même. Dans le cadre d’une réflexion stratégique, il soulève également des
questions plus larges en matière de recherches & développement. Du fait de la mondialisation, le secteur
de l’assurance aussi s’orientera de plus en plus vers l’international. Un travail sur le segment des EMTI
peut servir de laboratoire pour préparer les défis de demain : quels produits proposer compte tenu des
contraintes juridiques, fiscales et économiques ? Comment les distribuer ?
Les défis à relever sont nombreux, et se croisent avec d’autres réflexions stratégiques. Pour n’en citer que
deux :
-
les acteurs spécialisés disposant d’un réseau et de systèmes d’information dont le coût est amorti
ont un avantage sur les autres opérateurs. Ces derniers devront ouvrir le débat de
l’internationalisation, si ce n’est déjà fait. Aujourd’hui, seules 31 sociétés d’assurances françaises
sur 460, toutes branches confondues, ont des intérêts économiques hors de France109. Un tout
petit nombre génère l’essentiel de l’encaissement à l’étranger.
Le choix pourra être de rester uniquement sur le marché domestique mais alors, il sera
nécessaire de trouver d’autres relais de croissance, car le marché français est particulièrement
mature.
-
Les assureurs des risques d’entreprises sont eux confrontés à la question de la rentabilité des
grands comptes. Ce secteur fait l’objet d’une concurrence féroce, avec des prix bas, voire très
bas et une grande volatilité des résultats, tout en en étant fortement consommateur de capitaux
propres.
Avec l’entrée en vigueur de Solvabilité 2 la question de la réallocation des capitaux propres sur
d’autres branches ou d’autres segments de clientèle ne manquera pas de se poser.
109
Alain Négraud, thèse de MBA sur l’internationalisation des sociétés d’assurance.
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Certains assureurs sont d’ailleurs structurés de manière à pouvoir céder l’activité « grands
comptes » sans incidence sur leur activité de généraliste. Il restera à déterminer ce que devient le
réseau, également indispensable pour accompagner les EMTI.
Les problématiques liées à l’internationalisation des entreprises ne concernent pas que l’assurance non
vie, loin de là. Des questions similaires vont se poser pour les branches santé/accidents et prévoyance :
comment harmoniser les couvertures offertes en tenant compte de la mosaïque des droits locaux ? Des
différents systèmes de santé nationaux ?
La mondialisation a une incidence à plusieurs niveaux : économiques, culturels, sociaux. La mobilité des
personnes évolue. Les chantiers « assurance et international » sont donc nombreux, complexes et
doivent prendre en considération les aspects réglementaires, légaux et fiscaux. L’international ne peut
plus être considéré comme une niche réservée à quelques initiés.
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TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS ...................................................................................................................................... 2
SYNTHESE................................................................................................................................................... 3
SOMMAIRE .................................................................................................................................................. 5
INTRODUCTION ........................................................................................................................................... 6
1ère partie - La mondialisation des Entreprises Moyennes et de Taille Intermédiaire (EMTI) et son
impact sur le marché de l’assurance......................................................................................................... 8
1.
EMTI et grandes entreprises : y a-t-il une différence d’approche du point de vue de
l’assurance ? ................................................................................................................................................ 9
1.1 Qu’est-ce qu’une EMTI ? .................................................................................................................. 9
1.1.1
Les particularités des EMTI...................................................................................................... 9
1.1.2
Zoom sur la fonction de Risk Manager .................................................................................. 10
1.2 Analyse qualitative du segment des EMTI ..................................................................................... 11
1.2.1
Les entreprises qui s’internationalisent sont plus dynamiques que la moyenne ................... 11
1.2.2
Une politique de développement active des pouvoirs publics ............................................... 12
1.3 L’attractivité du marché de l’assurance des EMTI françaises à l’international ............................... 13
1.3.1
Approche quantitative du segment des EMTI dans son ensemble....................................... 14
1.3.2
Evaluation du nombre des EMTI internationalisées .............................................................. 15
1.3.3
Quelle est la tendance pour le futur ? .................................................................................... 17
1.3.4
Estimation du montant des cotisations dommages aux biens et responsabilité civile........... 18
2.
Quels sont les besoins d’assurance à l’international des EMTI ?........................................... 21
2.1
Les besoins géographiques............................................................................................................ 21
2.2
Les modèles économiques : de la commercialisation à l’implantation. .......................................... 22
2.3 Internationalisation : à quels risques les EMTI sont-elles confrontées ?........................................ 23
2.3.1
Phase 1 : la découverte d’un marché. ................................................................................... 23
2.3.2
Phase 2 : l’implantation locale................................................................................................ 24
3.
Les acteurs du marché de l’assurance ...................................................................................... 25
3.1
Les assureurs ................................................................................................................................. 25
3.2 Les canaux de distribution .............................................................................................................. 26
3.2.1
Un intermédiaire peut-il suivre son client à l’international ?................................................... 27
3.2.2
Les différents types de réseaux ............................................................................................. 27
Ce qu'il faut retenir ................................................................................................................................... 30
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2ème partie - La mondialisation du marché de l’assurance suit-elle celle de l’économie : les
contraintes rencontrées par les assureurs ?.......................................................................................... 31
1.
Un environnement réglementaire fortement contraignant ...................................................... 32
1.1
De l’importance de l’agrément d’assurance. .................................................................................. 32
1.1.1
1.1.2
1.1.3
1.1.4
A quoi sert l’autorisation de pratiquer des opérations d’assurance ? .................................... 32
La notion de lieu de risque pour une entreprise..................................................................... 33
Définition de l’assurance admise / non admise...................................................................... 34
Un assureur peut-il pratiquer des opérations d’assurance sans agrément ? ........................ 35
1.2 Les risques de l’assurance non admise.......................................................................................... 38
1.2.1
Pour l’assuré .......................................................................................................................... 38
1.2.2
Pour l’intermédiaire ................................................................................................................ 40
1.2.3
Pour l’assureur ....................................................................................................................... 40
1.2.4
Les sanctions sont-elles réellement appliquées ? ................................................................. 41
2.
Les contraintes fiscales : la taxe sur les polices d’assurance (TPA)...................................... 43
2.1 A la souscription : comment calculer la taxe sur les polices d’assurance ? ................................... 43
2.1.1
Quelle(s) taxe(s) ?.................................................................................................................. 43
2.1.2
Les conséquences de la mauvaise allocation des primes par l’assureur : exemple de l’Union
Européenne avec l’arrêt Kvaerner........................................................................................................ 44
2.2 La collecte et le paiement des taxes sur les contrats d’assurance ................................................ 46
2.2.1
A qui incombent la collecte et le paiement des taxes ? ......................................................... 46
2.2.2
La complexité de la situation dans l’Union Européenne. ....................................................... 46
3.
Va-t-on vers une libéralisation des opérations d’assurance ? ................................................ 47
3.1 Les passages obligés de la libéralisation des opérations d’assurance .......................................... 48
3.1.1
Faciliter les transactions transfrontalières.............................................................................. 48
3.1.2
Harmoniser le contrôle prudentiel .......................................................................................... 49
3.1.3
L’exemple de l’Espace Economique Européen : objectif du législateur ................................ 50
3.1.4
Conditions d’exercice de la LPS ............................................................................................ 51
3.1.5
Droit applicable au contrat en matière de risques d’entreprises............................................ 52
3.2 Les limites de la LPS ...................................................................................................................... 52
3.2.1
Un succès très relatif :............................................................................................................ 52
3.2.2
Les régimes dérogatoires : exemple de l’automobile. ........................................................... 53
Ce qu'il faut retenir ................................................................................................................................... 55
3ème partie - Comment les assureurs peuvent-ils répondre aux besoins des EMTI ? ........................ 56
1.
L’offre existante est-t-elle adaptée aux EMTI ? ......................................................................... 57
1.1 Quelle est l’offre existante : les programmes internationaux.......................................................... 57
1.1.1
Les différents types de programmes...................................................................................... 57
1.1.2
La clause « Différence de conditions, différence de limites » (DIC/DIL) ............................... 59
1.1.3
La gestion des sinistres.......................................................................................................... 60
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1.2 L’assurance des pertes financières de la maison mère : la panacée ?.......................................... 61
1.2.1
En quoi consiste la garantie ? ................................................................................................ 61
1.2.2
Quels sont les enjeux et les risques pour les parties ?.......................................................... 62
1.3 Pourquoi mettre en place un programme international ? ............................................................... 63
1.3.1
Les avantages d’un programme international :...................................................................... 63
1.3.2
Quelles en sont les limites ? .................................................................................................. 64
1.3.3
Cette solution est-elle adaptée aux EMTI ? ........................................................................... 65
2.
L’importance du réseau de l’assureur : les différents modèles de développement ............. 66
2.1 Les différents types de réseaux...................................................................................................... 67
2.1.1
Les réseaux intégrés.............................................................................................................. 67
2.1.2
Existe-t-il un autre modèle que le réseau intégré ? ............................................................... 68
2.1.3
Réseaux d’assurance et internationalisation de l’assureur.................................................... 68
2.2 La mise en place d’un réseau de partenaires................................................................................. 70
2.2.1
La qualité financière du fronteur ............................................................................................ 70
2.2.2
La compétence technique ...................................................................................................... 70
2.2.3
Le règlement des sinistres ..................................................................................................... 71
2.3
3.
Les réseaux bancaires peuvent-ils concurrencer les réseaux d’assurance ? ................................ 72
Mise en œuvre opérationnelle : quels sont les facteurs de succès ?..................................... 73
3.1 Existe-t-il des freins à la mise en place de solutions internationales ? .......................................... 73
3.1.1
Les points de blocage à lever chez les EMTI ........................................................................ 73
3.1.2
Les problématiques des intermédiaires ................................................................................. 74
3.1.3
Assureurs : quel modèle choisir ?.......................................................................................... 75
3.2 Professionnaliser l’approche........................................................................................................... 77
3.2.1
La formation et l’information des acteurs ............................................................................... 77
3.2.2
L’organisation des services.................................................................................................... 78
3.2.3
La qualité et la fluidité de circulation de l’information ............................................................ 79
3.3 Comment construire une offre adaptée ? ....................................................................................... 80
3.3.1
Quels sont les critères du choix d’un assureur pour l’intermédiaire ...................................... 80
3.3.2
Accompagner les intermédiaires............................................................................................ 81
3.3.3
Une offre packagée et évolutive ............................................................................................ 82
Ce qu'il faut retenir ................................................................................................................................... 84
CONCLUSION............................................................................................................................................. 85
LEXIQUE .................................................................................................................................................... 90
BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................... 91
ANNEXES................................................................................................................................................... 97
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LEXIQUE
Assureur master
Assureur de la police mère souscrite par l’entreprise assurée et qui pilote la mise en
place et la gestion d’un programme international.
Captive
d’assurance
Compagnie d’assurance ou de réassurance créée par une société industrielle ou
commerciale pour y transférer une partie de ses risques afin de réduire son budget
d’assurance ou de trouver une solution pour des risques inassurables.
ETI
Entreprises de taille intermédiaire (250 à 4 999 salariés), définition INSEE.
Middle Market
Segmentation du secteur assurance pour les entreprises qui n’entrent pas dans la
catégorie micro-entreprises (voire petites entreprises), ni dans celles des grandes
entreprises. Plafond : généralement 500 M€ de chiffre d’affaires.
PME
Petites et moyennes entreprises (10 à 249 salariés), définition INSEE
Professionnels
Segment des artisans, commerçants et des entreprises de moins de 10 salariés.
SESSI
Service des Etudes des Stratégies et des Statistiques Industrielles.
Organisation en
silos
Organisation structurée en entités ou services hermétiquement isolés les uns des
autres, fonctionnant selon leurs propres objectifs sans prendre en compte les
besoins ou intérêts du tout.
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Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
91/99
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Manuel International d’Assurance,
Jérôme Jérôme, Editions Economica, 2005
Etudes, thèses et rapports
Rapport sur l’investissement dans le monde
CNUCED – 1996, 2006, 2007, 2009
The non life single insurance market, single licence vademecum
CEA, 1997
What issues face a risk manager when arranging multinational insurance ?
Helen Hayden, MBA dissertation, 2007
La Chine et l’Inde sous les feux de la rampe
Etude Sigma, Swiss Re, 2004
Le marché de l’assurance en Inde et en Asie du Sud
Fiche de synthèse, Ubifrance, 2009
Insurance regulation and licence issue
OCDE, rapport 2001
Libéraliser les opérations internationales d’assurance : les échanges transfrontières et
l’établissement de succursales étrangères.
OCDE, rapport 1999
Code of liberalization of current invisible operations
OCDE, OMC, rapport 2009
Globalization in services: from measurement to analysis
OCDE, Isabelle Bensidoun, Deniz Ünal-Kesenci, 2007
Principles applicable to the supervision of international insurers and insurance groups and their
cross-border business operations
IAIS, 12/1999
Insurance core principles and methodology
IAIS, 10/2003
Assessing the IAIS’s requirements on cross-border and cross-sector cooperation and information
exchange
IAIS, 05/2005
IAIS Multilateral Memorandum of Understanding on cooperation and Information Exchange (IAIS
MMoU)
IAIS, 02/2007
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
92/99
Essor des importations européennes de biens intermédiaires depuis les pays à bas salaires
Banque de France, bulletin d’informations, 2008
Globalization and risks for business
Lloyd’s de Londres, 08/2010
Localisation des firmes et développement local
Philippe Moati, Annie Perraud, CREDOC 2001
Les entreprises de taille intermédiaire
DGCIS, 03/2010
Les ETI nationales
DGCIS, le 4 Pages, 05/2010
Internationalisation et localisation des firmes multinationales : l’exemple des entreprises
françaises en Europe
Jean-Louis Mucchielli, Florence Puech, INSEE, 2003
Mondialisation et compétitivité des entreprises françaises, l’opinion des chefs d’entreprises de
l’industrie
INSEE, Lettre n° 1188, 05/2008
Les PME qui grandissent. Qui sont-elles ? Pourquoi sont-elles si performantes ?
KPMG, 2008
Les PME européennes confiantes dans la sortie de crise
KPMG, 2010
Les PME qui grandissent : comment ces virtuoses de la croissance se sont adaptées pour
traverser la crise
KPMG, 2010
Désindustrialisation et délocalisation
Lionel Fontagné, Jean-Hervé Lorenzi, rapport, La Documentation Française, 2005
Une stratégie PME pour la France
Jean-Paul Betbèze, Christian St Etienne, rapport, La Documentation Française, 2006
Investissement direct étranger et performances des entreprises
Lionel Fontagné, Farid Toubal, rapport, La Documentation Française, 2010
Le développement des entreprises de taille intermédiaire
Françoise Vilain, rapport, La Documentation Française, 10/2008
Les ETI au cœur d’une nouvelle dynamique de croissance
Bruno Retailleau, sénateur de Vendée, rapport, La Documentation Française, 02/210
Le commerce extérieur 2008/2009, bilan et perspectives
Ministère de l’Economie, 2009
Les implantations françaises à l’étranger
DREE, 2001
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
93/99
L’implantation des entreprises françaises en Europe
Les notes bleues de Bercy, n° 241, 2002
Ministère des Finances et de l’Economie
Les implantations à l’étranger des entreprises industrielles françaises
SESSI, Le 4 Pages, n° 246, 2008
Recensement des implantations d’entreprises françaises à l’étranger
Trésor-Eco, Lettre n° 4, 11/2006
La France s’est-elle adaptée aux tendances récentes du commerce mondial ?
Trésor-Eco, Lettre n° 17, 2007
La présence des entreprises françaises dans le monde
Trésor-Eco, Lettre n° 45, 10/2008
Comment investir à l’étranger ?
Cahier Industrie n° 71, 10/2001
Ministère de l’Industrie
Conquérir les marchés étrangers
Cahier Industrie n° 88, 08/2003
Ministère de l’Industrie
Mobilisation pour l’exportation
Cahier Industrie n° 130, 03/2008
Ministère de l’Industrie
Lien innovation-exportation, l’expérience d’Oséo et d’Ubifrance
Oséo, Ubifrance, 2010
Des groupes de la taille d’une PME, un phénomène en plein essor
Hervé Loiseau, INSEE, 2001
Caractéristiques des entreprises industrielles de 20 salariés et plus
INSEE, 2007
Principaux indicateurs sur l'exercice 2007 selon la taille des entreprises (décret 2008-1354)
INSEE, 2008
Entreprises selon le nombre de salariés et l'activité
INSEE, 2008
Le marché des risques d’entreprises, synthèse des résultats sur l’année 2005
FFSA, étude 07/2006
L’assurance dommages aux biens des professionnels en 2005
FFSA, étude 05/2007
Le marché des risques particuliers et professionnels – Analyses des résultats 2009
FFSA, 07/2010
Assurances dommages, montants des cotisations par branche
FFSA, statistiques 05/2010
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
94/99
Statistiques Internationales de l’assurance française en 2008
FFSA, étude 01/2010
Statistiques vie et non vie de l’assurance en Europe en 2008
FFSA, enquête, 12/2009
Les risques et les assurances de l’entreprise
FFSA, Centre de Documentation et d’Information de l’Assurance, 02/2010
Jurisprudence, décrets, textes de loi :
Placement of insurance business,
General Status, State of North Carolina, USA
Decreto 560-2009
Ministerio de Economia y Finanzas Publicas, Argentina
Decreto 726-2010
Ministerio de Economia y Finanzas Publicas, Argentina
Ley General de Instituciones y Sociedades Mutualistas de Seguros Publicación
Mexique
Arrêt Kvaerner c/ Staatssecretaris van Financiën
Court Européenne de Justice, 14/06/2001
Articles et dossiers :
How internationalization drives high performance for insurers in uncertain times
Accenture, 04/2009
Beyond “non admitted”: a closer look at trends affecting today’s multinational insurance
programs
Suresh Krishnan, ACE, 04/2010
Global Insurance Trap
Andrew Strain, Zurich Financial Services, 2009
Guide to global programs
Business Insurance, 2009
The danger of ignoring liability overseas
Kathleen Ellis, Commercial Insurance Magazine, printemps 2006
Lost in translation
Kathleen Ellis, Insurance Journal, 11/12/2006
Cyber security : global risk and rising complexity
Kathleen Ellis, Insurance Journal, 06/072009
Small US businesses face bigger risks abroad
Caroline McDonald, P&C National Underwriter, 05/05/2008
Global opportunities need local answers
Mark E. Ruquet, P&C National Underwriter, 16/01/2008
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
95/99
Insurance market anything but global, as both cultural, legal obstacles remain
Mattew Brady, P&C National Underwriter, 10/03/2008.
Selling without border
Thomas J. Slattery, Risk & Insurance Online, 08/2006
The global gap is spreading,
Jon Farber, Risk & Insurance Online, 15/04/2008
The Canadian difference
Risk Management, 09/2009
Overseas insurers
John D. Dearie, Michael Griffin, Risk Management, 07/2005
The growing role of the coordinating office
Carla D’Andre, Dennis Jenner, Risk Management 07/2005
Global implication of admitted, non admitted and self insurance
Donna Pflugger-Murray, Jason Taylon, Risk Management 09/2005
Going global with wholly owned network
Carla D’Andre, Denise Berger, Risk Management 07/2005
Optimizing local service for global corporations
Collectif, Risk Management, 08/2005
International
Willis - 2010-11-20
Crossing the cultural divide
Hans Mazenauer, Uwe Schoberth, INsight, XL Insurance, 2008
Avoiding the global insurance trap
Jonathan Post, XL Insurance, 2009
Why a global D&O Program is the Right Choice, Right Now
Aon, 2008
Global firms consider additional cover for overseas execs
Business Insurance, 2009
A new direction for directors and officers coverage
Kathleen Ellis, Insurance Journal, 26/02/2007
Briefing – Directors and officers Insurance
Norton Rose, 2009
Cracking the toughest of risks
Dan Reynold, Erin Gazica, Risk & Insurance Online, 15/04/2008
Investment News
OCDE, bulletin d’informations, 2008
INI News n° 24
Bulletin d’informations, INI, 2008
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
96/99
INI News n° 25
Bulletin d’informations, INI, 2009
INI News n° 26
Bulletin d’informations, INI, 2009
INI News n° 27
Bulletin d’informations, INI, 2010
L’assurance des entreprises, un marché d’intérêt stratégique
Risques, n° 41
Remous persistants dans les réseaux internationaux
L’Argus de l’Assurance, 04/06/2010
Les programmes internationaux d’assurance à l’épreuve du non admis
Vladimir Rostan d’Ancezune, La Tribune de l’Assurance n° 111, 04/2007
La couverture des groupes internationaux : la tête sans les jambes ?
Richard Ghueldre, Alban Fréneau, La Tribune de l’Assurance n° 140, 10/2009
Sites Internet (principaux sites consultés) :
www.ceassur.fr
www.curia.europa.eu
www.exporter.gouv.fr
www.iaisweb.org
www.industrie.gouv.fr
www.insee.fr
www.itdweb.org
www.ladocumentationfrançaise.fr
www.pme.service-public.fr
www.oecd.org
www.oseo.fr
www.tresor.economie.gouv.fr
www.unctad.org
www.dev.bieurope.com
www.insuranceejournal.com
www.property-casualty.com
www.riskandinsurance.com
www.rmmagazine.com
www.axco.com
www.crystal.lloyds.com
www.isn-inc.com
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L’assurance des PME à l’international
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ANNEXE 1
Liste des entretiens réalisés entre mai et décembre 2010.
-
Paul-Henri Begeot, Souscripteur, Munich Re
Béatrice Blanchard Duhayon, Axa Entreprises, réseau NEAR, Axa France,
François Cabrol, Directeur Général, DP Assurances
Sophie Charlot, Commercial Cross Border Business, Département Innovation et Développements
Techniques, Allianz,
Bruno Chopin, Property Underwriter Manager Middle Market France, XL Insurance,
Bernard Claudinon, Directeur France,Tokio Marine,
William Corbassière, Network Manager - Europe, Middle East & Africa ACE,
Marie-France Daniel-Chestier, Directeur de la Stratégie Internationale, Sogecap,
Yves de Mestier, Network & Development Manager, Axa Corporate Solutions,
Nicolas Dieux, Souscripteur – Chargé d’Affaires, FM Affiliated,
Serge Djochgounian, Directeur, Filhet Allard,
Thierry Dubois, Responsable Département Flotte Automobile, Diot
Isabelle Enriquez, Claims Manager France, XL Insurance,
Antony Fienberg, Directeur Général, Nassau,
Jérôme Flach, Directeur Adjoint, Direction Internationale, Verspieren,
Richard Ghueldre, Avocat associé, Responsable du Département Assurance, Gide
Loyrette Nouel,
Hervé Houdard, Directeur Général, Siaci St Honoré,
Gérard Latté, Chief Underwriting Officer, Zurich Assurances,
Monique Lévy, Responsable Département International GAN Eurocourtage,
Daniel Maurer, Chief Underwriting Officer, International P&C Middle Market XL Insurance,
Laurence Norindr, Commercial Cross Border Business, Département Innovation et
Développements Techniques Allianz,
Jonathan Post, General Counsel for Global Programs - Europe/Asia, XL Insurance
Vladimir Rostan d’Ancezunes, Avocat, HMN Partner,
Maurice Truffert, Chargé d’enseignement à l’Université Panthéon-Assas
Jean-Luc Trupin, Groupe France Courtage,
Valérie Turpin,Regional Manager,Corporate Segment Property, Chartis
Michel Villard, Director Department International, Diot,
Certains interlocuteurs n’ont pas souhaités voir leurs propos publiés in extenso. Par conséquent, aucun
compte rendu d’entretien ne figure dans les annexes.
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
98/99
ANNEXE 2
Principaux indicateurs INSEE selon la taille des entreprises (exercice 2007)
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
L’assurance des PME à l’international
99/99
ANNEXE
Les différentes catégories d’entreprises.
MBA Enass 2009/2011
Pascale Rauline
Thèse soutenue en 2011
pour l’obtention du MBA
Manager d’entreprise
d’assurances
Sous la direction de :
Guy LALLOUR
Président du Jury :
François EWALD
Une école est un lieu de production et de diffusion de connaissances.
L’Ecole nationale d’assurances s’organise pour répondre le mieux possible à cette mission en
direction de ses élèves d’abord, mais aussi de la profession de l’assurance et de ses partenaires :
• les « séminaires innovation » animés par les auditeurs du Centre des Hautes Etudes
d’Assurance (CHEA), permettent aux professionnels de suivre les grandes innovations en assurance telles
qu’on peut les observer à l’étranger ;
• les « dialogues de l’Enass » éclairent l’actualité par le débat avec une personnalité remarquable ;
• « les travaux de l’Enass », que nous lançons aujourd’hui, sont destinés à faire bénéficier la
profession des travaux menés au sein de l’Enass par ses professeurs et ses élèves, à tous les
niveaux, dans la mesure où les jurys qui les ont évalués ont noté leur qualité et leur originalité. Ces
travaux vous seront adressés par Internet, certains d’entre eux pouvant faire l’objet d’un tirage sur
papier ou même, être édités.
Nous souhaitons que toutes ces initiatives vous soient profitables.
François Ewald
Directeur de l’Ecole nationale d’assurances