Pontonews 27 BAT.ppp - Lycée International des Pontonniers
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Pontonews 27 BAT.ppp - Lycée International des Pontonniers
PONTOnews Le journal des Pontonniens NUMERO 27 − MARS 2010 1 2 EDITO Voyage électoral Oui, on nous l’a dit : c’est la vague, la déferlante socialiste qui a dévasté la France entière dimanche 21 mars dernier. Le rose est partout. Du siège des présidents de région au sweatshirt du présentateur télé, le socialisme s’est immiscé dans tous les recoins de la France. Ah non, j’oubliais : notre petite Alsace chérie résiste encore et toujours à l’envahisseur rose, le gendarme bleu de la majorité présidentielle reste droit dans ses bottes et n’est pas prêt à quitter son poste. Mais ne nous cachons rien, l’UMP est à la peine tandis que la très large alliance entre socialistes, écologistes et Front de gauche est en position de force. Alors, dans un pays soi-disant garant des droits de l’homme et du citoyen, qu’est-ce-qui fait que le peuple ne se déplace même plus pour s’exprimer ? La France, un pays de moutons de Panurge ? Certainement. Et cela n’est pas prêt de s’arranger, avec une réforme des lycées qui va produire des élèves hyperspécialisés dans certains domaines et qui ne s’intéresseront plus aux autres. Peu à peu, c’est le libre-arbitre qui disparaît avec une école qui ne forme plus ses élèves à la réflexion. Plus loin encore, c’est l’éducation citoyenne à la base qui manque : il ne s’agit pas de mettre la constitution entre les mains d’un bambin de trois ans, mais de former dès le plus jeune âge et de façon appropriée les enfants aux droits et aux devoirs du citoyen qu’ils deviendront. Des heures sont déjà prévues à cet effet me dira-t-on. Blagounette, mesdames, messieurs, quel professeur de CE1 apprend à ses élèves ce que représente le droit de vote ? Mais dans un pays où un inscrit sur deux seulement se déplace pour aller voter, quel modèle donne-t-on à ceux qui représentent notre avenir ? Il est trop tard, le cercle vicieux de la décitoyennisation est bel et bien là. Et il n’est pas prêt de se retirer, surtout quand on supprime l’histoiregéographie en terminale S ou lorsqu’on remplace les Pensées de Pascal en terminale L par les Mémoires du général de Gaulle, qui rappelons-le, est un véritable monument, si ce n’est la septième merveille du monde de la littérature. En dépit des appels à la mobilisation lancés de tous côtés durant une semaine, l’abstention record du premier tour (53,6 %) est restée très forte au second avec à peine un électeur sur deux s’étant déplacé. La question que tous les intellectuels, politiques et journalistes se posent actuellement est : « mais pourquoi donc un tel abstentionnisme ? ». Les explications de ce non-vote font légion : « les politiques sont si loin de nous », « le discours n’est plus que du vent », « ma seule arme c‘est l’abstention », « nous ne nous sentons représentés par aucun des partis en lice » ou encore « je ne suis plus inscrit ». Toutes ces justifications sont vraisemblables et fondées pour la plupart. Mais éloignons-nous un court instant de nos contrées françaises pour voyager un peu dans les paysages électoraux du monde entier. Première destination : l’Irak. Il y a quelques temps avaient lieu les élections législatives dans ce pays que personne n’envie : si je ne m’abuse, les gens qui osaient fouler le sol d’un bureau de vote étaient les potentielles victimes d’attentats terroristes. Bien sûr, ce qui devait arriver arriva : on a compté par dizaines les morts en ce jour d’élections irakiennes. Ils ont été tués pour avoir placé un petit bout de papier plié en quatre dans une enveloppe. Ils ont été exterminés d’une des façons les plus barbares qui soit pour avoir accompli le droit (et le devoir) le plus élémentaire du citoyen, à savoir de s’exprimer librement. Partons à présent vers un endroit plus attrayant encore, la Thaïlande : depuis quelques semaines les Chemises rouges manifestent dans tout le pays. Pour se faire entendre, ils remplissent des quantités incommensurables de bouteilles de leur propre sang qu’ils déversent par la suite dans les rues. Savez-vous ce qu’ils demandent ? Vous allez rire : ils demandent le droit de s’exprimer. Ils demandent le droit de voter, en se vidant de leur sang. Les seules choses naturelles, ce sont les rêves. Même la nature ne peut pas les désintégrer. Elle ne peut pas non plus désintégrer le fait que 8,7 % de la population vote pour le Front National. La citoyenneté n’existe plus. Elle est déjà morte. Elle est pleine de mystères et de contradictions pour certains, de chaos, d’horloges et de pastèques pour les autres. La seule chose vraie, c’est que les Français se sentent très seuls, abandonnés par la politique, trop irréelle pour les protéger. Mais comme tout ce qui est rare, il est certain que les Français, au fond d’eux-mêmes, veulent se la réapproprier. Il y a de la pureté dans tout cela. Aujourd’hui, l’insignifiant est sacré. Seulement, pour ceux qui n’ont pas encore l’âge, n’attendez pas pour vous engager, et préparez votre avenir. Peut-être simplement pour déterrer cette chose pourrie qu’est la citoyenneté. Ou peut-être encore pour rendre hommage au sang innocent qui coule encore dans les rigoles de Bangkok. Robin Ormond, 1L1 3 DOSSIER VOYAGES Sahara Algérien : les immensités de la Tadrart « Bonjour, il est deux heures du matin, notre appareil vient d’atterrir à Djanet. La température extérieure est actuellement de douze degrés. Notre compagnie vous souhaite un agréable séjour en Algérie. » Première réaction : mais il y a de la végétation ! (Non, en fait, la première réaction, c’a été de m’exclamer, en manque d’inspiration lyrique : « Waow ! ») Eh oui. Ce n’est pas vraiment la jungle, mais il y a effectivement des plantes, chose étonnante compte tenu qu’il n’a pas plu depuis deux ans dans la Tadrart. Roses de Jéricho-ces choses toutes desséchées qui fleurissent si on les plonge dans l’eau-, buissons décharnés aux épines traîtresses (on se dit : « Tiens, ce sable a l’air doux, et si j’y courais pieds nus ? ». Mauvaise idée, sauf dans les dunes), coloquintes aux fruits ronds comme des boules de pétanques, et puis surtout acacias, de toutes sortes, rabougris, verdoyants, voire en fleurs. Epais et râpeux ou au contraire fin comme de la farine et infiniment doux, de toutes les couleurs (du noir au rouge de Tin Merzouga, en passant par toutes les nuances d’orange et d’ocre), le sable est partout : on s’habitue à voir sable, respirer sable, manger sable. Les dunes fascinent par leur aspect : le sable paraît soyeux, lisse comme de la crème caramel, et l’on a envie de dévaler la pente en courant (par contre, penser à vider ses chaussures en arrivant en bas !). Mais le plus étrange reste le chant de la dune : lorsque plusieurs personnes remuent simultanément une grande quantité de sable (en descendant la dune, par exemple), l’énorme masse de sable entre en vibration et émet un son sourd, fort et continu, semblable au passage d’un avion dans le ciel, percevable à un kilomètre de distance. Le rituel des trois thés est une tradition touareg que nos guides nous font l’honneur de partager. Il faut d’abord allumer un feu, afin de produire des braises. Lorsqu’il y en a suffisamment, on met la bouilloire dans les braises pour faire chauffer l’eau. Celle-ci est ajoutée au thé et au sucre (mieux vaut ne pas être diabétique, la quantité de sucre est hallucinante), puis on transvase inlassablement le mélange d’un verre à la théière, pour créer de la mousse. Ensuite, on peut boire les trois thés, dans l’ordre suivant : « Amer comme la vie, fort comme l’amour, doux et suave comme la mort » Traduisez : le premier thé contient beaucoup de thé et peu de sucre, et au fur et à mesure, on rajoute de l’eau et du sucre, ce qui fait que le deuxième thé est plus sucré, et le troisième devient carrément du sirop. Le voyage au Sahara en hiver a ses avantages. Primo, il ne fait pas trop chaud (nous avons plutôt eu froid, surtout en dormant à la belle étoile la nuit, les 4 DOSSIER VOYAGES températures étant descendues jusqu’à 4-5°C). Deuzio, on évite scorpions, serpents et autres bestioles sympathiques qui hibernent à cette période de l’année. Mieux vaut cependant ne pas dormir trop près des rochers : un scorpion frigorifié pourrait pendant la nuit venir rechercher la chaleur après de vous. Sous votre oreiller, par exemple (véridique, mon père a testé). Le Sahara, ce n’est pas seulement un immense champ de dunes : il y a les canyons sculptés par d’anciennes rivières, des plaines d’argiles sèches, des arches rocheuses monumentales, mais aussi des oued : caché au milieu d’un amas de pierre, une cuvette d’eau plus ou moins sablonneuse aux bords marqués par des traces de pattes d’animaux. Car la faune, bien que discrète, est également présente, même si l’on ne voit d’elle que ses traces : gerboises, chacals craintifs venant rôder autour du bivouac la nuit, et même gazelles. Moins farouches, moula-moula (petits oiseaux noirs et blancs), scarabées et lézards de toutes sortes vivent à l’ombre des rochers. Ce qui rend les immensités de la Tadrart particulières, ce sont ses gravures rupestres. De nombreux hommes vivaient vers -12 000 dans cette région autrefois verdoyante, et ont laissé leurs traces dans les rochers. Hommes d’un autre temps, troupeaux de dromadaires, gazelles, éléphants et girafes sont restés figés durant 14 000 ans sur les parois abritées du vent. Ainsi, le voyageur revenant du Sahara ramène heures de sommeil en moins (dues aux liaisons Djanet-Paris exclusivement entre 2 et 5 heures du matin), sable dans ses chaussures (et il y restera longtemps) et l’envie d’y retourner… Texte et photos : Elise Weissenbacher, 2de7 5 DOSSIER VOYAGES Voyage à Rome-Naples du 31 janvier au 5 février 2010 Pendant que certains s’acharnaient sur leur bac blanc, les latinistes de Seconde et de Première partaient en Italie. Les 37 élèves étaient accompagnés de leurs professeurs de latin (M. Auclair, M. Hontabat) et de Mme Gyss. Dimanche 31 janvier A 16 heures, nous sommes tous - ou presque, pour les retardataires - place Brandt, à attendre l’arrivée du car en piaffant d’impatience. Le trajet est long, très long : l’arrivée est prévue vers 7h00 à Rome, soit toute la nuit à passer dans le bus. Lundi 1er février Au terme de cette courte « nuit » (traduisez : cinq heures passées à essayer plus ou moins vainement de dormir), nous arrivons sous un temps radieux à Rome. Après un petit déjeuner sur l’autoroute, nous attaquons la visite du Forum romain : l’Arc de Septime Sévère, la Curie (qui abritait le Sénat), la basilique Aemilia, le Temple de Saturne…Tous ces monuments quasi légendaires que nous voyons – pour certains pour la première fois - « en vrai ». Et évidemment, le Palatin, une des sept collines de la Rome antique, qui surplombe le Forum. Nous faisons une halte au restaurant pour manger de la viande et des patates sautées. Ensuite, nous retournons au Forum pour visiter le Colisée, dont la construction débuta en -72 sous les ordres de Vespasien ; devant le gigantesque amphithéâtre, des hordes de touristes, des vendeurs de boissons, des gens déguisés en gladiateurs (si, si.), et derrière, l’avenue et ses chauffards (ah, la conduite italienne …). Curieux mélange que Rome : monde moderne et ruines antiques se mêlent sans Naples (Naples, sa baie magnifique, ses ruelles sombres encombrées de linge pendant aux fenêtres, son nouveau code de la route-le but étant de klaxonner le plus longtemps et le plus fort possible. Bonus : donner des crises cardiaques aux piétons). Puis nous reprenons le car, direction Sorrente (sur le trajet, nous admirons un superbe coucher de soleil sur la mer), où nous dormirons après avoir Mardi 2 février mangé – suspense - de la viande et Nous partons pour Pompéi/Naples (2-3 des patates sautées. heures de car), toujours sous un ciel bleu. Au-dessus de la magnifique baie Mercredi 3 février de Naples se dresse le Vésuve, ce Le matin, visite du musée monstre endormi au sommet couvert archéologique de Naples, réputé pour de neige. Le site est impressionnant : être un des plus beaux d’Europe. les rues de Pompéi ont été longtemps Effectivement, combien de statues de conservées, ensevelies sous les divinités gréco-romaines, d’empereurs cendres lors de l’éruption du Vésuve le romains avec leur coiffure à bouclettes 24 août 79. On voit une ville romaine (non, plus sérieusement, le musée est avec ses villas recouvertes de véritablement impressionnant). Nous fresques, son amphithéâtre, ses admirons tout particulièrement les thermes, mais aussi ses tavernes et mosaïques diverses, très colorées – la ses lupanars ; en bref, ce ne sont pas plupart proviennent d’ailleurs de les exploits d’illustres généraux ou Pompéi. empereurs mais la vie quotidienne de En retournant sur Rome, nous nous gens ordinaires que l’on découvre. Le arrêtons à Tivoli pour une excursion à plus marquant reste cependant les la Villa d’Hadrien, commandée en 117 moulages des corps retrouvés dans les par l’empereur du même nom. décombres ; hommes, femmes-parfois Gigantesque lieu de villégiature (120 enceintes-, enfants, dont les traits sont hectares !), la Villa comprenait quantité encore figés dans un rictus de de bâtiments comme un palais impérial, des thermes, un hippodrome, souffrance. L’après-midi, nous étions supposés un théâtre, une bibliothèque, etc. ; elle visiter le musée archéologique de sera malheureusement pillée à partir Naples, auprès duquel nous avions de 138, date de la mort d’Hadrien, ce d’ailleurs réservé ; seulement, son jour qui explique son mauvais état de de fermeture est…le mardi. A la place, conservation. nous nous promenons dans les rues de Jeudi 4 février aucune transition, là où d’autres villes auraient mis leur passé derrière des grilles et des vitres de musées. Nous enchaînons avec la visite guidée des forums impériaux, aboutissons à la place de Venise (petit temps libre), puis départ vers l’hôtel (à environ une heure de bus de Rome), où nous pourrons enfin dormir après avoir mangé de la viande et des patates sautées. 6 DOSSIER VOYAGES Nous retournons à Rome afin de visiter les Musées du Capitole ; outre une terrasse d’où l’on a une vue imprenable sur le Forum, le musée abrite notamment la Louve étrusque (allaitant Romulus et Remus), le Galate mourant (un guerrier gaulois à l’agonie), l’Aphrodite du Capitole. Après un pique-nique au Circus Maximus, nous nous dirigeons vers les restes imposants des thermes de Caracalla (les plus grands thermes de Rome à cette époque), puis nous nous séparons en petits groupes pour passer l’après-midi à notre guise dans la ville (le rendez-vous étant fixé devant le Vatican). Sur notre chemin : le Panthéon, la fontaine de Trévi, mais aussi la place d’Espagne et la basilique Saint-Pierre. Nous achevons notre séjour en Italie par un dernier repas de viande-patates sautées au restaurant avant de remonter, à regret, dans le car qui nous ramènera pendant la nuit et la matinée suivante vers Strasbourg. Elise Weissenbacher, 2de 7 Voyage à Cologne « Nous pensions vraiment que c’était fini, que nous allions rentrer » s’exclamaient les élèves de toutes parts lorsque nous fûmes (enfin) arrivés à Cologne. C’est vrai que le voyage commença en plein dans l’action lorsque le train que nous devions prendre arriva en gare avec huit wagons lui manquant, dont le notre bien sûr. Moment de panique: monter dans le train tout de même au risque d’y être écrasé durant une heure trente, ou rester sur le quai pour trouver une méthode alternative? Nous sommes restés sur le quai, et ce fut assez ironique lorsqu’on nous annonça alors que notre voyage n’avait pas encore réellement débuté: «Soit on trouve un autre train dans lequel il y a assez de places pour nous tous, soit on retourne à Strasbourg…» Super! Et ce ne fut pas la dernière de nos aventures! … L'emblême de la ville de Cologne" Nous étions une trentaine d’élèves de première du lycée apprenant l’allemand ayant eu la chance de participer à ce voyage à Köln durant la semaine du bac blanc, du 1er au 4 février plus précisément. Entre courses folles après le train, tempêtes de neiges, chocolats chauds et cinéma, nous avons en outre pu visiter le centre ville, quelques musées et le studio de la radio-télé Allemagne la WDR… Journée n°1: Arrivés vers 14h à Cologne quelque peu essoufflés déjà, nous avons déposé nos affaires à l’auberge de jeunesse où on logerait les quatre jours avant de profiter d’une visite guidée du centre ville et surtout la cathédrale de Cologne dans une atmosphère plutôt apocalyptique due à la tempête de neigepluie-grêle ayant décidée de s’abattre sur nous ! La cathédrale, très impressionnante par sa taille et ses vitraux, nous servit de refuge contre le vent et la neige quelques instants, puis nous avons visité les ruelles du centre ville ainsi que 7 DOSSIER VOYAGES le quartier médiéval. Une heure de quartier libre nous trouva tous devant un chocolat chaud bien chocolaté : jamais un chocolat chaud ne m’a paru si bon ! Dans les studios de la WDR Journée n°2 : Après un difficile lever à huit heures du matin, nous avons pris un bon petit déjeuner à l'auberge de jeunesse. Nous nous sommes ensuite rendus au centreville pour aller au Wallraf-Richartz-Museum, une galerie de peintures du Moyen-Age au XIXe siècle. Après une visite libre, nous sommes allés déjeuner en ville. L'après-midi, nous avons pu entrer dans les studios de la WDR (Westdeustcher Rundfunk), une célèbre chaîne de télévision et radio allemande ! Là, une animatrice nous a montré les plateaux de télévision et nous a parlé des techniques vidéos utilisées, ce qui nous a parut très impressionnant. Enfin, après un quartier libre, nous sommes retournés à l'auberge de jeunesse où nous avons dîné et passé la soirée. Journée n°3 : Le mercredi, nous sommes partis de l'auberge à 9h30 pour aller visiter le Museum Ludwig, une galerie de peintures modernes et contemporaines. Nous avons pu y voir de grandes oeuvres d'Art, parfois très .. spéciales ! Et après un bon déjeuner, nous nous sommes rendus dans un musée consacré à Käthe Kollwitz, une dessinatrice et sculptrice allemande de la première moitié du XXe siècle. L'exposition était très émouvante, car elle était en rapport avec la première et la seconde guerre mondiale, ainsi que les autres maux allemands de cette partie du siècle. Après ce moment, nous avons à nouveau eu un quartier libre avant de rentrer à l'auberge. Le soir, nous avions décidé d'aller au cinéma. Nous y avons donc vu Sherlock Holmes, en Allemand, evidemment ! Il faut d'ailleurs bien avouer que la plupart d'entre nous n'avons compris que la moitié ! Nous avons cependant passé une très bonne soirée, avant de rentrer nous coucher. Journée n° 4 : Jeudi fut le jour du départ. Un peu tristes de quitter si vite Cologne, nous avons refait nos bagages et rendu nos chambres. Nous avons profité une dernière fois de la ville en allant nous promener et visiter, pour certains, la maison de fabrication de l'eau de Cologne, au numéro 4711. Après avoir acheté à manger, nous avons cherché nos affaires à l'auberge et nous sommes rendus à la gare pour passer l'autre partie de la journée dans le train, avant d'arriver à 16h à Kehl. De la part de tous les élèves présents, nous remercions Mr Deronne et Mme Audouard d'avoir organisé ce voyage et de nous avoir permis de vivre tous ces bons moments ! "Une ancienne croyance Allemande disait que de toucher le nez du personnage de gauche portait chance, ce personnage représentant l'homme bon, celui de gauche étant une personne plus vicieuse." 8 DOSSIER VOYAGES Quelques anecdotessur le voyage: Allemagne la semaine avant le carnaval, et certains Allemands gambadaient déjà déguisés dans les rues. Lorsque nous avons croisé un de ces groupes : Un certain élève, aux Allemands : « Schöne Verkleidung ! » Le pire, c’est qu’ils n’ont même pas compris sans que nous le leur répétions trois fois… * Lors du quartier libre un midi, nous nous sommes retrouvés un groupe de six à manger dans une pizzeria (en Allemagne…), attirés par le panneau « toutes les pâtes et les pizzas à 4,90 euros ». Nous nous somme installés, fiers de notre choix. Nous avons commandé nos repas, puis avons tenté de faire comprendre par les faibles moyens que nous avions que nous voulions une carafe d’eau : -Eine Karafe Wasser bitter. -Visage passif, puis : Eine Flasche Wasser , okay -Nein, eine Karafe bitte ! -Toujours pas compris -Tentative d’explication se basant sur l’Anglais : Wasser von der Tappe…die Tüppe…keine Flasche ! Le serveur semblait enfin nous avoir compris, mais nous expliqua qu’il ne pouvait pas servir de l’eau en carafe et qu’on devait acheter une bouteille. Epuisés par ce discours complexe, nous avons cédé. Or horreurs et miséricorde lors de la réception de l’addition : la bouteille d’eau, de seulement 75 cl en plus, coutait 6,50 euros ! C’est là que Margaux décida de prendre les choses en main et exprimer sa vision de la situation. Ca donna environ ceci : « Ich finde, dass es nicht normal ist, dass diese Falsche so viel kostet – Wir sind Jugendliche und seine Flasche kostet sechs euros, wir können das nicht zahlen ! » Vous auriez dû voir la tête du serveur, c’était excellent ! Nous avons ensuite dû faire les comptes pour se départager tout ça, et ce ne fut pas si facile que ça en avait l’air : nous avons dû poser les calculs à l’arrière de l’addition, que nous avons gardée comme précieux souvenir de "Cologne, c'est cette escoquerie ! vraiment super !" *Margaux voulait signaler qu’elle a perdu sa boucle d’oreille devant la célèbre cathédrale de Cologne. Elle en a retrouvé la boucle, mais pas le fermoir ! Avis de recherche : la récompense sera élevée! *« La visite du centre ville à notre arrivée était vraiment effroyable, explique Pauline. On avait les neurones paralysés par le froid, donc toute une partie de la ville nous est restée inconnue, mais sinon c’était drôle ! On s’est refugié au Starbucks pour prendre un bon chocolat chaud avec de la crème, de la noisette et/ou du caramel : ça faisait du bien ! » *Le premier soir, on était réunis à une dizaine dans notre chambre, ce qui était une fausse bonne idée puisque celle de Madame Audouard se trouvait juste à côté. Justement, on parlait, riait, et vers minuit, on entend quelqu’un toquer très fort à notre mur. Persuadés que c’était Madame Audouard qui allait enter dans notre chambre, nous avons éteint les lumières en toute urgence et avons fait semblant de dormir…à environ trois par lit ! On resta ainsi bien quelques minutes, avant de pouffer de rire et de se décider à aller se coucher. Le lendemain matin, il se révéla que c’était les filles d’à côté qui étaient fatiguées qui avaient toqué à notre mur – toute cette « peur » pour rien ! On devait vraiment avoir l’air intelligent couchés et silencieux à dix dans notre petite chambre pour quatre ! Camilla Zerr, 1S3 Anouk Heili, 1L2 Avec la participation de certains camarades du voyage – merci ! * Nous avons eu la chance de nous trouver en 9 DOSSIER VOYAGES INDIANAPOLIS Suite à leur voyage à Indianapolis, Caroline Reisacher et Kim Zolty de 2nde10 ont accepté de partager leurs expériences. Résumez nous votre voyage en quelques mots. Caroline : C’est impossible de le décrire juste avec quelques mots. Kim : Moi je dirais que cette nouvelle expérience a été très enrichissante et intéressante. Justement, pourquoi considérezvous ce voyage comme enrichissant ? Avez-vous également rencontré des problèmes ? Kim : Ce voyage à Indianapolis a été super intéressant ! C’est impressionnant comme les gens font beaucoup de sport là-bas, ils ont d’autres idées et mangent tout le temps ! D’ailleurs, je les ai trouvés très ouverts et on s’est beaucoup attachés les uns aux autres. Caroline : Question problèmes, nous n’en avons pas vraiment rencontré mise à part que nous avions dû attendre plus de deux heures dans l’avion avant qu’il décolle parce qu’il y avait des problèmes de communication ! Qu’est-ce qui vous a le plus impressionné làbas ? Le plus plu ? Et le moins apprécié? Kim : Le plus impressionnant c’est de voir la différence entre ce qu’ils appellent une « petite ville » et une « grande ville ».Et là-bas, les élèves ne sont même pas une vingtaine en classe et ont tous des ordinateurs. J’ai également adoré Chicago et le match des Lakers mais on a visité certains musées qui, pour moi, sont sans grand intérêt. Caroline : Moi je trouve que le plus impressionnant c’est que tout est vraiment plus grand là-bas, même les mouchoirs ! Sinon j’ai bien aimé visiter Chicago. Là-bas, il faut tout le temps lever la tête pour voir tous les buildings. Qu’avez-vous fait pendant ce voyage ? Caroline : Le jour où l’on est arrivé, leur équipe les Colts ont été qualifiés en demifinale, donc tout le monde était dans la rue avec les maillots bleus de leur équipe, les magasins avaient des drapeaux 10 « Go Colts » dans leur vitrines. C’est impressionnant de voir comme cette équipe unis les gens d’Indianapolis. Et quand on est entré dans le Conseco fieldhouse, il y avait une banderole « Welcome International School » accrochée, j’ai trouvé ça super sympa. On a également regardé Star Trek et on est allé voir la pièce de Roméo et Juliette, moi j’ai adoré ! Kim : Moi j’ai détesté cette pièce. C’était horrible ! Tout le monde autour de moi s’endormait ! On a aussi fait du shopping à Chicago, naturellement. On a visité des musées, on était dans une école maternelle pour apprendre le français aux enfants, on a joué au basket sur un terrain et après on a vu un match des Lakers. On a aussi eu un cours sur la guerre civile. Vous pouvez finir cette interview comme vous le souhaitez. Caroline : Moi je trouve que ça a été une super expérience, j’aimerais bien la renouveler. Kim : Pareil. Je me suis aussi très attachée aux gens là-bas, on s’est tous bien entendu. C’était un bon groupe ! Camille Grosse, 2nde10 DOSSIER VOYAGES «Voyage» à Pontonniers Pourquoi attendre les Journées du Patrimoine* pour mieux connaître son lycée, surtout quand il est inscrit monument historique ? On a beau s'y rendre (presque) chaque jour, dans les escaliers, dans les couloirs ou en allant au casier, plusieurs détails nous échappent. Visite guidée express pour y remédier... Commençons par le commencement, avec un peu d'Histoire. Le nom du bâtiment vient des constructeurs de ponts. En effet, une caserne de 'pontonniers' se trouvait à son emplacement avant le lycée. L'école construite à cet endroit était un établissement secondaire de jeune fille qui contenait 18 salles pour 650 étudiantes avec 1000 élèves en 2010, on comprend la nécessité de faire des travaux. Ce bâtiment a donc gardé plus de cent ans la même fonction ! Suite à la guerre franco-prussienne de 1870, l'Alsace était allemande à l'époque de la construction de l'école, en 1901. Elle faisait partie du chantier de la «Neue Stadt» (la nouvelle ville), qui devait sensibiliser les jeunes filles scolarisées à l'art local. Aviez vous remarqué... La céramique au dos du portail des professeurs ? Elle représente une maison construite en 1578 au coin de la rue des Pucelles : le Katzeroller. Les boiseries de cette maison, détruite pour élargir la rue, ont été réemployées pour la maison directoriale. Les deux médaillons à l'entrée de la maison du proviseur ? Ce sont les portraits de deux pédagogues, un suisse, Pestalozzi, et un allemand, Fröbel. Le sondage dans le mur des escaliers d'honneurs, avant le premier étage ? La peinture a été 'sondée' (grattée), ce qui permet de voir sur quelques centimètres la peinture d'origine. Les motifs floraux, jugés 'trop germaniques' ont été recouverts en 1960 par souci d'uniformisation. 11 DOSSIER VOYAGES L'horloge à poids à droite de la salle 102 ? Protégée par les Monuments historiques, elle a été réalisée par la famille Ungerer (Oui, celle de l'illustrateur Tomi). La chouette de l'escalier d'honneur ? Symbole de sagesse et attribut de la déesse Athéna (Minerve), elle n'est pas tournée vers la fenêtre mais vers les professeurs qui descendent les escaliers. Ainsi, elle veille et rappelle la fonction pédagogique du lycée. Elle est recouverte de feuilles d'or. L'écusson de Strasbourg sur la rambarde du troisième étage ? La banderole rouge est orientée à l'envers... Il s'agit certainement d'une erreur. Les trois animaux sculptés dans l'arcade au troisième étage ? Il y a une hirondelle, un lézard et un papillon. L'arcade montrait aussi des anges musiciens qui précédaient la salle de musique. Le carrelage d'origine ? Des poissons qui symbolisent l'eau (1er étage) Des lions pour la terre et la force (rc et 2e étage) Des aigles pour l'air et la puissance (3e étage) Il y aurait encore d'autres choses à dire, à propos du style pittoresque conforme au XVe siècle, des multiples décrochements, des bulbes, des pignons, des tourelles ou de l'oriel. Et surtout, si vous en avez l'occasion, arrangez-vous pour rattraper un contrôle dans la bibliothèque des professeurs. Travailler au milieu de ces livres anciens, de ces moulages et de ce mobilier en partie d'origine en vaut la peine. * Cette année, les journées du patrimoine auraient lieu le 19 et 20 septembre. Sources : cours de formation aux élèves d'Histoire des Arts pour les Journées du Patrimoine. Eline Roane de Mathuisieulx, 1L2 12 DOSSIER VOYAGES Interviews sur le voyage Différentes personnalités du lycée (parce que, prenons soin de le préciser, le Pontonews se veut désormais être le journal du lycée, et non seulement des lycéens) ont été interviewées sur leur rapport au voyage. Puissent ces interviews (r)éveiller votre désir de voyage (intérieur ou extérieur, cérébral ou physique, inerte ou dynamique); puissent-ils vous faire rêver de mont Fuji en 4D, d'eucalyptus géant, et de friselis d'écume dans la brise d'un soir de juillet, dans un lieu indéterminé... Interview de Barbara Haberstroh- Pensez-vous que, si on fantasme Chanut, documentaliste longtemps sur un pays, on peut être déçu quand on y va vraiment? Si on sait que le voyage reste une Aimez-vous les voyages? Oui, j'aime les voyages... que ce soit à surprise, et qu'il y a toujours une marge de manoeuvre entre une chose et la l'intérieur ou à l'extérieur... Que pensez-vous qu'un voyage peut représentation qu'on se fait de cette chose; on sait alors tirer profit d'un apporter? La surprise, l'exotisme, la rencontre avec voyage. Il faut savoir qu'il y a toujours d'autres cultures. Je ramène des objets quelque chose d'inattendu. du quotidien. Une phrase de Pierre Quelles sont vos prochaines Soulages me vient également à l'esprit: destinations? "C'est ce que je fais qui m'apprend ce L'Inde et la Chine. que je cherche." Vous êtes libre de conclure cet Êtes-vous d'accord avec la phrase entretien comme vous le souhaitez. "Ce ne sont pas les hommes qui font * les voyages, ce sont les voyages qui " Il y a quelquefois des livres des livres qui s'éternisent sur les tables de chevet font les hommes"? C'est un point de vue philosophique. Oui, comme autant d'appels silencieux mais je suis dans cet état-là quand je voyage. instants vers de grands espaces. Des Avez-vous un moyen de locomotion lectures chéries, absorbées enfant dans l'insouciance, mais qui gravent à jamais préféré? Longtemps j'ai regardé l'émission "Des la mémoire, et que l'on garde en soit trains pas comme les autres". Il y a un comme un refuge. Des instants lus et train qui va du Sud de la Chine jusqu'au des aventures de papier qui moutonnent Tibet: j'aimerai bien faire cette ligne-là un comme le ressac et qui finissent par jour (Barbara Chanut nous renvoie à ouvrir une brèche dans les remparts du un blog: http:// quotidien.Puis, un jour, on a envie d'aller voir, de sentir, de toucher. On envie angelicounette.spaces.live.com). Voyagez-vous également de façon d'être soit même une part du récit, comme si on était prêt. L'écriture a plus abstraite? J'ai voyagé avec les livres (Barbara dessiné en nous des personnages Chanut nous fait découvrir un extrait familiers qui nous attendent quelque part du livre d'Éric Millet, Sahara, sur les et qu'il nous tarde de rencontrer." traces de Frisson Roche, voir *). J'ai également beaucoup voyagé avec Eric MILLET, dans "Sahara, sur les Traces de Frison Roche" ARTE. Interview de Marie-Antoinette Spiecker, membre du personnel de la "Vie Scolaire" Aimez-vous voyager? Ouais. Qu'est-ce que vous pensez qu'un voyage peut apporter? Rencontrer de nouveaux modes de vie... Voir comment les gens se comportent, vivent, ailleurs... voir la nature... d'autres pensées... de nouveaux rêves à apporter chez soi, de nouvelles odeurs... Êtes-vous d'accord avec la phrase "Ce ne sont pas les hommes qui font les voyages, ce sont les voyages qui font les hommes"? Oui. Comment préférez-vous voyager? A pied et en avion. Le train: non. Les livres, les films, l'art vous font-ils également voyager? Les livres, oui. Est-ce que vous pensez que, si on fantasme longtemps sur un pays avant d'y aller, on peut être déçu quand on y va vraiment? Oui, on peut être déçu. Quelles sont vos prochaines destinations? La Grèce, Cordoue et le Japon. Vous pouvez terminer cette interview comme vous le souhaitez. J'aimerais encore beaucoup voyager. 13 DOSSIER VOYAGES Interview de Didier professeur de lettres Hontabat, Aimez-vous les voyages? J'adore les voyages: j'ai beaucoup vécu à l'étranger. Par contre, je suis assez inadapté pour le voyage "de touriste" - je ne suis pas du genre à dire: "Je vais aller une semaine là-bas". J'aime moins le voyage dit "touristique". Qu'est-ce que vous pensez qu'un voyage peut apporter? Découvrir d'autres mentalités. On se rend compte qu'on n'est pas le centre du monde. Êtes-vous d'accord avec la phrase: "Ce ne sont pas les hommes qui font les voyages, ce sont les voyages qui font les hommes"? Je suis d'accord, c'est vrai: on se construit par rapport aux autres. On se construit par le regard de l'Autre. Comment préférez-vous voyager? J'aime beaucoup les trains - qui ne soient pas les TGV (rires). Non mais j'aime prendre le temps en voyage. Que pensez-vous du voyage par l'imaginaire? Oui, c'est sûr: le plus beau voyage qu'on peut faire est le "voyage autour de sa chambre" comme disait quelqu'un. Mais cet imaginaire ne peut être nourri que par soit des livres soit de vrais voyages. Interview de Florian Le Coz, élève en Quels sont les livres qui vous ont fait 1ère ES, sur son voyage dans le cadre le plus voyagé, au sens figuré comme de la section russe et sur le voyage en général au sens propre? Cendrars, La Prose du Transsibérien: c'est une succession d'images très Sur le voyage en Russie fortes. Il y a aussi Cent ans de solitude de Marquez - c'est d'ailleurs son seul Combien de temps es-tu parti? bon livre: Cent ans de solitude est un Le voyage a duré dix jours (en comptant livre très foisonnant et riche, qui m'a fait deux jours d'avion et de train). voyager dans le sens concret (ça se passe en Amérique du Sud) comme au Quelles étaient tes attentes vis-à-vis sens abstrait (c'est un voyage mental). de la Russie? N'ayant jamais quitté les frontières Pensez-vous qu'à force de trop européennes et considérant la Russie fantasmer sur un pays, on peut être comme hors de l'Europe, je m'attendais à une culture eurasienne. Je m'attendais déçu quand on y va vraiment? Oui, d'ailleurs il ne faut pas trop attendre, à quitter les rites "européens". il ne faut pas trop rêver dessus, il faut y aller. Par exemple l'Irlande c'est un pays Tes attentes ont-elles été satisfaites? dans lequel je ne suis jamais encore allé, Non, mais j'ai trouvé d'autres centres mais sur lequel j'ai lu tellement de d'intérêt. Finalement, mes attentes ont changé: découvrir plutôt les gens, au lieu choses que j'ai peur d'être déçu. Non, il faut partir, tout de suite. D'ailleurs de découvrir la société en soi. De la j'ai eu beaucoup d'élèves anglo-saxons société pour aller aux gens: en fait j'ai fait qui sont partis tout un an, juste après le un zoom. bac et avant leurs études. Avais-tu des préjugés vis-à-vis de la Quelles sont vos prochaines Russie? Oui, un peu comme tout le monde. Le destinations? La montagne: les Alpes... Après père de ma correspondante m'avait d'ailleurs demandé si j'avais ces Prague... préjugés-là, et j'ai répondu oui. Je Vous pouvez conclure cette interview m'explique: quand on dit Russie, c'est "communisme", et après "vodka". Ca me comme vous le souhaitez. Une phrase de Rimbaud: "La vraie vie fait penser: à la gare j'avais vu un T-shirt est ailleurs." avec marqué dessus: "Here there are no beers" et on voyait un ours titubant avec une bouteille de Vodka à la main. Également, on dit souvent que c'est très militarisé, très strict. Ces préjugés ont-ils été démentis? Évidemment, l'histoire de l'ours est fausse. Les Russes chez qui j'étais ont souvent joué avec ce préjugé (le père me demandant souvent: "Tu as goûté la vodka?"). Et alors, finalement, cette vodka, tu l'as goûté? Oui. Sinon, dans le cas de cet aspect 14 DOSSIER VOYAGES militarisé, je pensais que ce préjugé était faux. Mais, là, dès qu'on arrive dans le pays, on se dit qu'il y a beaucoup de militaires. Tu te dis: "C'est plus de notre époque!", mais en fait, là-bas, il y a 18 mois de service militaire - c'est également dû à l'insécurité en Russie. Tu as été hébergé par une famille russe. Penses-tu que cela permet d'avoir une vision plus authentique du pays? Bah oui. C'était une famille assez honnête: ils parlaient de tout, ils ne cachaient rien, même de la situation politique. La famille m'a bien dit que ça ne la gênait pas de parler de politique. Qu'as-tu mangé? Le premier soir ils me proposent du vin: ils ne voulaient pas trop mettre en avant leur gastronomie. Ils faisaient vraiment des plats "sophistiqués". Mais à la fin, quand ils ont compris que je voulais voir comment ça "fonctionne" réellement, ils m'ont montré ce qu'ils mangent vraiment: du thé au lieu d'eau par exemple, mais sinon il n'y a pas vraiment de règles. Le soir, deux possibilités: soupe et après quelque chose de froid du pain noir avec ce qu'on trouve dans le frigo, du caviar rouge un peu plus gros que celui qu'on connaît; sinon quelque chose de chaud et de lourd. Sinon, en ce qui concerne le sucré, il n'y a pas vraiment de différence: beignets, gâteaux, blinis. D'ailleurs, pendant que j'étais là-bas, il y avait une fête, l'équivalent de Carnaval, où c'était l'usage de manger des blinis. D'ailleurs la mère qui m'accueillait m'avait, à cette occasion, préparé toute une assiette de blinis. Et le midi je n'ai pas mangé là-bas. Y a-t-il des monuments qui t'ont particulièrement impressionné? Déjà, ça va paraître banal, mais le Kremlin. Quand on est devant, c'est vraiment différent de ce qu'on pouvait imaginer: les véritables proportions, les couleurs très vives. Les murs des églises sont très vifs, les coupoles sont recouvertes de feuilles dorées. L'église Saint Basile est un bon exemple pour illustrer cela. Malgré le fait qu'il y avait de la neige, les couleurs ressortaient bien. Je pensais que cela allait être trop, mais en fait c'était beau, tout simplement beau. sont pas les hommes qui font les voyages, ce sont les voyages qui font les hommes"? Oui et non. Je vais commencer par le non. Non pourquoi, parce que, en fait... Non, je vais commencer par le oui en fait (rires). Oui, parce que tu découvres, ça te fait des connaissances, ça te donne de l'expérience de vie, et ainsi ça permet de te déployer. Dans ce sens-là ça te forme, ça te forge, ça te marque. Dans ce senslà on est d'accord. Après un Non pourquoi - un "Jein" en fait - parce que si tu vas quelque part, c'est toi qui choisis. C'est toi qui choisis la destination. C'est toi qui choisis comment tu veux évoluer. Les stations de métro à Moscou... Y en a beaucoup: plus de 200, beaucoup de lignes. C'est vraiment grand et beau: en comparaison à Paris c'est triste. A Moscou ils font des efforts pour que ça soit beau: du marbre et des feuilles d'or sur le mur. C'est très haut en plus: les fondations de toutes les maisons sont très profondes dans la terre (la maison la plus connue: 20 mètres de profondeur). Donc le métro c'est vraiment sous terre. Mais attention ce ne sont que les stations de métro les plus fréquentées Quel est ton moyen de locomotion qui sont si belles. Les stations moins préféré? fréquentées sont beaucoup plus sobres. Je n'ai pas de moyen de locomotion préféré. J'aime bien les voyages longs, surtout la voiture. As-tu enrichi ton vocabulaire? J'ai enrichi mon vocabulaire, mais pas autant que je ne l'aurais pensé. C'étaient Voyages-tu également avec ton plus des expressions que des mots que imaginaire? J'aime bien voyager de nuit, parce que j'ai appris. Finalement je n'étais pas tellement dans ça permet de mieux sortir de la réalité. Je la famille: je partais à 7 heures du matin, suis plutôt du type rêveur: quand j'ai rien je revenais à 23 heures. Du coup j'ai à faire, je me mets à rêver. Mais ce ne quand même beaucoup parlé français. sont pas forcément de paysages dont je Mais le soir on allait au café avec les rêve: je rêve sans voir d'images, ce sont correspondants et quelques français: plutôt des sensations. mais c'était plus pour faciliter l'échange, que pour apprendre de nouveaux mots. Les livres, les films t'ont-ils fait voyagé? Les livres plutôt que les films. Avec les Sur le voyage en général films je décroche vite, alors que je peux rester pendant cinq heures à lire - si Aimes-tu les voyages? Oui, en général, j'aime bien voyager. j'aime bien l'atmosphère... J'aime bien sortir de ce que je connais. Quels livres, particulièrement? Que penses-tu qu'un voyage peut J'aime bien tout ce qui est fantastique (par exemple Le Chevalier d'Émeraude, apporter? Ca permet de voir la vie qu'ont d'autres dont j'ai lu les cinq premiers tomes) ou gens dans d'autres environnements. Ca des livres qui mêlent réalisme et univers fantastique (par exemple Artemis Fowl). permet de comparer... La deuxième raison c'est simplement la Quand tu sors du livre t'es amené à te découverte, le plaisir de la découverte. poser la question: Ce que je crois réel, Et voir quelque chose en vrai ce n'est est-ce vraiment réel? A un moment, dans pas la même chose que le voir en photo. Artemis Fowl, l'un des lutins sous terre dit que les hommes essaient de Es-tu d'accord avec la phrase "Ce ne comprendre ce qu'ils ne comprennent 15 DOSSIER VOYAGES pas par la science. La science existe pour interpréter les choses qu'on ne connaît pas. Ainsi on se pose la question, quand on vit sa vie réelle, après être sorti d'un livre comme ça: Est-ce que je vis vraiment ce que je crois vivre? Quelles sont tes prochaines destinations? Vu que j'aimerai bien quitter l'Europe et vraiment voir un autre continent, j'aimerai bien aller en Amérique latine. Sinon - je ne sais pas si ça se fera ou pas, mais... - j'aimerais bien aller avec un ami faire une mission humanitaire en Afrique. Tu peux conclure cette interview comme tu le souhaites. Chacun devrait faire un grand voyage dans sa vie: sortir de son monde, sortir de sa coquille. Voyager c'est vraiment LA chose à faire dans sa vie, rien que pour se dire "Je ne suis pas seul au monde", qu'il y a d'autres vies, d'autres modes de vie, et cetera. Et surtout pas voyager pour dire qu'on a voyagé, mais pour que ça nous apporte vraiment quelque chose. Et au final - quand on y pense - la vie c'est un voyage, et il faut toujours en avoir un deuxième dans la poche. Merci à Barbara Haberstroh-Chanut, Didier Hontabat, Florian Le Coz et MarieAntoinette Spiecker. Paroles recueillies, questions choisies, article présenté par Matthias Turcaud, TL2. QUIZ 1 Quelle est la capitale du Bangladesh ? a. Hanoï b. Bakou c. Dacca 2. Dans quel pays se trouve le désert de Simpson ? a. Mexique b. Australie c. Nigéria 3. a. b. c. Quelle est l’altitude du Mont McKinley ? 7154 m 6715 m 6194 m 4. a. b. c. Lequel de ces pays n’a pas de frontière avec le Guatemala ? Nicaragua Salvador Belize 5. a. b. c. Dans quel pays se trouve le lac Athabasca ? Pérou Canada Mexique 6. a. b. c. Quelle est la capitale du Groenland ? Nuuk Reykjavik Copenhague 16 Léna Burgard, 2nde 6 ACTUALITE Xynthia la terrible Après Haïti et le Chili, c’est au tour de l’Europe d’être atteinte par une catastrophe naturelle. Après avoir remonté les régions subtropicales et frappé le Portugal et l’Espagne, la tempête Xynthia arrive au large des côtes françaises le 27 février 2010 ; quatre départements sont placés en alerte rouge, soixante-neuf autres en vigilance orange. Tout de suite, on se rappelle la terrible tempête de 1999, et on frémit. Au matin du 28 février, c’est la Vendée et la Charente-Maritime, où les marées poussées par le vent ont brisé les digues provoquant des inondations, qui apparaissent comme les plus touchées par ces conditions extrêmes. Quant au bilan humain, les victimes auraient surtout péri dans ces inondations liées à Xynthia. On dénombre au moins 53 victimes, dont 35 dans le seul département de la Vendée. Environ un million de foyers auraient été privés d’électricité. s’est instaurée entre habitants fait chaud au cœur : une femme venue en aide aux sinistrés s’est expliquée sur Europe 1 : « J’ai apporté des couvertures et des vêtements chauds, des pulls. Ca vient du cœur, on ne peut pas rester insensible à tant de détresse (…) nous sommes tous des êtres humains. Il ne faut pas l’oublier, on doit tous se porter secours. ». Mais l’aide vient également des associations qui sont désormais sur place, comme le Secours Populaire ou la Croix Rouge qui distribuent de l’eau, des aliments ou encore des produits d’hygiène. La Fondation de France, comme lors du séisme à Haïti, organise une collecte d’argent dont les dons seront distribués aux familles et aux petites entreprises ainsi qu’aux associations locales qui permettront une « reconstruction d’une vie sociale » dans les régions dévastées. Les murmures se sont au fil des jours transformés en accusations cinglantes. Plusieurs permis de construire Très vite, le président de la République, Nicolas auraient été accordés alors que les digues n’étaient pas Sarkozy promet aux départements touchés des mesures de suffisamment consolidées. A qui la faute ? solidarité nationale tandis que Christine Lagarde, ministre de l’économie, annonce sa décision de placer certaines Ariane Kupferman-Sutthavong, 1L2 régions en état de catastrophe naturelle. La solidarité qui « Chatel, si tu savais, ta réforme, ta réforme… » Une journée d’action syndicale était prévue le mardi 23 mars pour s’opposer aux réformes diverses et variées du gouvernement-réforme des retraites, suppressions de postes…et réforme des lycées. Les principaux syndicats (CGT, CFDT etc.) appelaient à faire grève et à manifester dans les rues de la ville ; le SGL, syndicat de lycéens, leur a emboîté le pas. C’est ainsi que certains élèves de Pontonniers se sont retrouvés dans le cortège de la manifestation. 14h30 : RDV devant le lycée pour rejoindre la place de la Bourse, point de départ de la manif-oups, pardon, du « mouvement social ». Des élèves rabrouer par la CGT et le syndicat de retraités-« mais c’est notre place, là, faut aller ailleurs » (à leur décharge, la présence de lycéens n’était d’abord pas prévue dans la manifestation). Qu’à cela ne tienne, nous piquons un petit sprint (bannière comprise) pour 14h45 : Arrivée place de la Bourse, où rejoindre le cortège lycéen, où nous de nombreux groupes de manifestants nous faufilons parmi le groupe Fustel. sont déjà rassemblés. Nous retrouvons des élèves d’autres lycées, venus en La manifestation s’est poursuivie plus grand nombre (Fustel, Couffignal, jusqu’à 16h aux cris de « lycéens en Marie Curie…) colère, y’en a marre de la galère ! » et autres slogans hurlés à pleins 15h et des poussières (vous avez déjà poumons (côté lycéen en tout cas), en vu une manif commencer à l’heure, passant par la place Broglie. Elle s’est vous ?) : Départ du cortège. Nous terminée place de la République. tentons de suivre le groupe de Fustel, Elise Weissenbacher, 2de 7 mais nous nous faisons vertement avaient confectionné une bannière portant l’inscription « Pontonniers mobilisés » : Pontonniers, certainement, mais pour le mobilisés, on repassera, nous n’étions que 3540… 17 VIE DU LYCEE UNSS VOLLEY-BALL : Championnat départemental Mercredi 3 mars 2010 dans le gymnase du lycée Marc Bloch à Bischheim, l'équipe de volley cadettes du lycée des Pontonniers a rencontré l'équipe de Wissembourg en phase finale du Championnat Départemental. Après une série de matches à leur avantage durant les phases éliminatoires dans le cadre du district de Strasbourg, elles se sont finalement inclinées sur un score de 3-0 après avoir inquiété l'équipe adverse au deuxième set (25-23). L'équipe composée de: Lauriane Dessert (capitaine) Term S1, Julie Deutschmann 1èreS2, Franziska Wellezohn 1ère S1, Laura Groff 1ère S2 et Ekatarina Gafarova 2°8 s'est comportée très honorablement face à des filles techniquement plus expérimentées puisqu'elles jouent ensemble dans le même club plusieurs fois par semaine. A mentionner également la participation de Clément Grémillet Term S5 dans le rôle d'arbitre de la rencontre. Félicitations aux vice-championnes du Bas-Rhin pour leur qualité de jeu. Jacques Otto, professeur d'EPS De gauche à droite: Clément, Lauriane, Julie, Laura, Katia et Franziska. La section volley-ball du lycée s’entrâine le mercredi entre 12h et 14h dans le cadre de l'UNSS. Lieu de pratique : le gymnase du lycée. Encadrement : M. Otto prof. d'EPS. Les inscriptions peuvent se faire tout au long de l'année ! 18 VIE DU LYCEE CHAMPIONNATS DE FRANCE DE CROSS-COUNTRY : ELLES L’ONT FAIT ! Qualifiées à Sélestat le 16 décembre 2009 pour les championnats de France de Cross, les six cadettes de l’équipe du lycée (Emilie Tissot, Claire Hager, Camilla Zerr, Hélène et Léa Martin et Bérénice Vasak) entreprirent leur voyage destination Calvi le 8 mars dernier. Au bout d’un trajet en car de près de 14h pour arriver jusqu’à Toulon, les filles et leur professeur accompagnateur M.Beuve embarquèrent sur un énorme paquebot Corsica Ferries nommé «Méga Sméralda» qui accueillait les 1742 sportifs et entraineurs venus de la France entière (et Outre-Mer) pour participer à ce championnat! Elles participèrent ainsi au plus grand déplacement sportif ayant jamais eu lieu au monde. Une fois installées dans nos cabines qui allaient nous servir de chambre durant les trois jours du trajet, nous avons visité l’énorme bateau, attendant son départ prévu pour 21h30 … ou du moins, c’est ce que nous pensions… Il fut annoncé que le bateau ne pourrait pas réaliser sa traversée la nuit du lundi 8 mars comme prévu car des cars venant de l’ouest de la France avaient beaucoup de retard dû à la neige. Mais il fut ajouté plus tard dans la soirée que le port de Calvi – notre destination – était fermé jusqu’au lendemain 17h pour cause de vents très forts et donc des vagues turbulentes bloquant l’accès au petit port. Un peu frustrées, nous commencions déjà à nous demander si le championnat aurait bien lieu ! Le lendemain, nous avons donc dû nous satisfaire d’un petit tour dans les rues et le centre 19 VIE DU LYCEE trompées d’endroit ? En vrai, nous n’avons pas eu le temps d’émettre ce genre de pensées et nous nous concentrions comme nous le pouvions dans notre échauffement. commerciale de Toulon au lieu des visites et animations prévues à Calvi, une ville bien plus intéressante. Le départ était prévu pour mardi 18h pour éviter une traversée de jour qui pourrait accentuer le mal de mer. Eh bien, ce n’est pas pour autant qu’il n’y a pas eu de vagues ! Nous avons passé une nuit quelque peu agitée, notre ferry chevauchant des vagues hautes d’entre quatre et cinq mètres. Certaines découvrirent que le bateau n’était pas leur moyen de transport préféré, pendant que d’autres trouvaient que ces vagues berçaient presque lorsque nous étions couchées ! La traversée dura 13h au lieu de 8h : nous sommes arrivés à Calvi à 7h du matin – et quelle Calvi !! Calvi, la petite ville du soleil, était grise et détrempée ; nous apercevions même de la neige sur les villages un peu plus en hauteur…de la neige !? Mais cela devait être une blague, où alors nous étions arrivées sur la mauvaise île ! Eh non, nous avons dû nous résoudre au fait que la neige existait bien en Corse aussi et nous résoudre à Calvi entre pluie et vent, neige et froid. La course confrontant les cadettes, c'est-à-dire nous-mêmes, était la première du championnat : le départ serait donné à 14h (le mercredi). Nous sommes arrivées sur les pistes pour 12h30 au lieu de 9h30, à cause de la pluie torrentielle et du froid voulant dire qu’il n’y avait plus aucun sens à passer la journée sur les pistes de course. Nous sommes arrivés dans un champ - ou plus précisément, un marécage de plantes vertes et boue – sous un déluge gelé et nous nous sommes dirigés vers de grandes tentes qui nous ont servi d’abris et de vestiaires (petite précision : les tentes n’avaient pas de bâches au sol, donc bienvenue le vestiaire « pleine nature » avec la boue, les plantes et tout le tralala ! Nous avions tout de même des palettes en bois pour poser nos affaires – le luxe !). Nous nous reposions la question de savoir ce que, en vrai, nous faisions là ! Nous avons pris notre courage entre nos deux pieds et avons entamé notre échauffement, nous disant que de toute façon nous n’étions pas venues ici avec des espérances très élevées, et que le tout était de profiter de cette petite escapade (-tu parles !). Au bout de deux minutes, nos chaussures étaient des éponges aspirant l’eau boueuse de cette pataugeoire d’endroit, et la boue recouvrait nos pantalons jusqu'aux genoux… Vive le cross, c’est vraiment joyeux ! Ou alors c’est l’épreuve de natation et nous nous sommes 20 Sur la ligne de départ, chaque ville avait son box, un espace large d’environ un mètre, séparé des autres box pas une barrière. C’était le moment tac-tic : nous devions nous mettre les unes derrières les autres deux par deux de manière stratégique : devant, Emilie et Claire, ensuite Hélène et moi-même, enfin, Léa et Bérénice. Et le coup de pistolet détonna après la parole très rassurante du coach « départ dans dix secondes » qui nous laissa même pas le temps de réfléchir à si nous stressions ou pas, si nous allions bien ou pas, si nous allions mourir sur ce terrain de bataille ou pas, si nous allions nous revoir, vous revoir ou pas ? Et « PAN », trop tard, il fallait y aller, c’était maintenant ou jamais. La course fut très, comment dire… intéressante ! Le départ était une ligne droite de presque un kilomètre dans les fameux marécages auxquels nous nous étions tellement attachées, donc il ne fallait pas se laisser distancer, mais il ne fallait pas non plus sprinter tout le long, sinon c’était fini pour le deux kilomètres deux cent cinquante restants ! Cette ligne droite fut suivie d’un chemin caillouteux qui montait légèrement au milieu duquel s’écoulait un cours d’eau tellement il avait plu ! Ce chemin longea ensuite le sommet de la petite colline que nous avions gravi. Le sol était parsemé de flaques d’eau de profondeurs et tailles plus ou moins conséquentes, les plus profondes éclaboussant de l’eau jusqu'à nos genoux lorsqu’on courait à travers : pas question de perdre des places en les contournant ! Une sensation originale VIE DU LYCEE qui, nous avons ensuite conclu, nous a en fait plutôt plu – c’est vrai que c’était rafraichissant. Une « descente pour mieux remonter » s’ensuivit, le chemin se transformant en cascade de boue épaisse et gélatineuse : encore des sensations hors du commun entre « glissades » et « substance molle collée aux mollets ». L’arrivée fut aussi une longue ligne droite d’environ cinq cents mètres, au bout de laquelle tout s’arrêta – ou plutôt recommença ? – une fois que nous avions été « bipées » par des sondes repérant les puces intégrées à nos dossards. C’était fait, fini, passé – tout ce chmilbique incroyable pour quatorze minutes de course époustouflantes. – coupes, médailles, sourires, applaudissement, cris, musique et flashs d’appareils photos : un moment mémorable. De retour au bateau, du plastique recouvrait le sol et les escaliers de l’entrée ce qui nous fit bien rire – que nous étions sales, vraiment ! Après une bonne douche bien méritée, nous avons profité du fait qu’il n’était que 16h et que le bateau partait seulement à 19h pour faire un petit tour de Calvi (quand même !). Vu que je connais très bien cette petite ville, j’ai pu montrer le port, les petites rues commerçantes intéressantes et surtout la superbe citadelle de Calvi à mes camarades, et nous en avons profité pour prendre de belles photos face à la mer qui s’entend de toute part autour de la citadelle : magnifique. M.Beuve proposa de prendre une boisson dans un petit café sur le port – nous nous sommes installées, ravies de partager ce petit moment paisible après la course. Le retour fut tranquille, nous étions à vrai dire un peu fatiguées. Nous sommes arrivées à Strasbourg à 22h après un voyage interminable et avons pu nous enfouir sous la couette de nos lits bien douillets. Mais cette expérience inoubliable, déjà qu’un souvenir, flottait devant nos yeux, remplissait notre esprit endormi…Comment retourner sur Terre, se lever lorsque le réveil sonne, prendre le tram, aller en cours etc. après avoir vécu pleinement un tel événement ? En tout cas, une chose était certaine : cette aventure était à refaire! Après le diner, nous avons pu profiter d’une grande fête dans la discothèque du bateau. C’était « la soirée de notre dernière chance » comme nous répétait M.Beuve, tant pour lui que pour nous ! Ce fut encore une expérience assez remarquable que de danser sur un bateau chevauchant les vagues de tailles non-négligeables, nous faisant tituber d’un coté de la salle à l’autre « en cadence ». Une discothèque 3D – du jamais vu ! L’annonce et la remise des prix prit place sur le bateau à 19h : nous étions arrivées 16e sur 36 équipes cadettes de la France entière. Nous étions heureuses de nos résultats, étant donné que nous étions venues « en touristes » et que nous ne sommes pas vraiment entrainées. Emotion pour les équipes sur le podium 21 Camilla Zerr, 1S3 (Avec la participation des autres filles de l’équipe.) VIE DU LYCEE Soutenons MmeWoods p our le marathon deL ondres ! Race Day : 25 April Mme Woods s'apprête à courir la 30e édition du marathon de Londres le 25 avril prochain pour lever des fonds en vue de procurer des ordinateurs portables, consoles de jeu et autres jeux pour essayer d’améliorer le quotidien difficile des enfants malades de l'unité des grands enfants de l'Hôpital de Hautepierre ainsi que celle des enfants malades de l'hôpital de Haguenau. Le marathon de Londres est le seul où 100% de l'argent est reversé aux organisations caritatives et où il n'y a pas de limite de temps pour terminer. Dans le cadre de ce projet, nous aurions besoin: • De toutes les idées qui vous passent par la tête, en vue de récolter des fonds ou du matériel d’occasion. • D’initiatives pour organiser des activités au sein du lycée pour récolter de l'argent. • De personnes qui connaissent des entreprises ou autres organismes qui seraient donateurs d'ordinateurs portables ou d'argent. Faites vos dons en ligne: http://www.justgiving.com/josiane-woods http://www.virginlondonmarathon.com/ http://www.chru-strasbourg.fr/Hus/ http://www.cftrust.org.uk/ Tenez-vous informés du projet sur Facebook “Soutenons Mme Woods” et sur le site du lycée ! NOUS COMPTONS SUR VOUS ! D’après Deborah Ruch. 22 VIE DU LYCEE Rencontre avec Annie Saumont Le 26 janvier 2010, Annie Saumont a été accueillie au lycée des Pontonniers dans le cas d’une interview avec les élèves de la 2de 6 : en voici un bref compte rendu. La rencontre a été très enrichissante. Annie Saumont nous a d’abord expliqué en quoi consistait son métier : écrivaine, ou plutôt nouvelliste. Elle nous a expliqué comment elle créait ses intrigues, toutes plus insolites les unes que les autres : « Les idées me viennent seules, je n’y réfléchis pas, par exemple une fois en jetant ma poubelle de tri, une idée m’est apparu. Mais, il est clair que parfois je peux rester devant une feuille blanche pendant plusieurs jours, ou jeter plusieurs débuts. La poubelle à papiers est indispensable aux écrivains. » Mais aussi son parcours, elle, partie de traductrice, spécialisée dans l’anglais et qui avait traduit The Catcher in the Rye, L’Attrape Cœur de J-D Salinger. C’est plus tard qu’elle s’est ensuite consacrée à l’écriture de nouvelles. « Écrire une nouvelle, ce n’est pas que raconter une histoire, c’est aussi mettre en valeurs des principes, et même des objets qui nous sont chers. » nous a t-elle confié avant de nous faire le récit d’une anecdote : « Il y a longtemps, j’avais un ami photographe qui prenait des photos d’objets. Un jour, je lui ai rendu visite alors qu’il prenait en photo un fauteuil rouge. Je me suis promis de faire de ce fauteuil un objet important d’une de mes prochaines nouvelles et je l’ai fait. La présence de certains objets n'est parfois aucunement due au hasard, tout est prémédité. ». Elle a aussi apprécié le bureau que nous avions créé, censé être une réplique du sien. Elle a alors ajouté : « C’est mon fils qui m’a forcée à prendre un ordinateur. Dès le premier essai, je l’ai supplié de la garder ! » Cependant, sa plus grande surprise a été sans aucun doute, notre réécriture de sa nouvelle Allah est grand . Les idées, différentes mais toutes intéressantes, lui ont plu, malgré la lecture parfois trop rapide : « C’est superbe, a-t-elle affirmé, je devais justement écrire une nouvelle à la demande de mon éditeur ! » Et c’est ainsi que nous avons appris que nos nouvelles seront peut-être publiées dans un de ses futurs recueils ! L’interview s’est sinon très bien déroulée, même s’il est dommage que les questions en anglais n’aient pas remporté un bien grand succès, et que certaines questions n’aient pas trouvé de réponses…Annie Saumont a toutefois capté toute l’attention de la classe, durant l’heure qui lui été accordée, grâce aussi à toutes ses historiettes. Mais la surprise des élèves a été sans aucun doute l’histoire inédite ( non publiée pour le moment ) que l’écrivaine nous a lue à la fin : « Astéroïde ». Le récit, à la troisième personne, raconte comment un astrophysicien, qui prédisait sans cesse la venue d’une astéroïde, va décider de tuer ses collègues, par vengeance - ils ne le croyaient jamais, et se moquaient de lui - , invités à une grande réception de scientifiques, en plaçant une bombe. La nouvelle était intéressante quoiqu’un peu courte pour décrire en détail la progression de la folie chez ce scientifique trop incompris. Bien sûr, la chute ne révèle rien, comme à l’habitude d’Annie Saumont qui avoue aimer laisser le choix de la fin au lecteur ; comme pour la nouvelle « Mais Moi » ou encore d’autres. En somme, la rencontre avec Annie Saumont a vraiment été intéressante et utile, en particulier pour certains élèves qui avaient un petit penchant pour l’écriture. L’interview nous a permis de voir et de comprendre le mode de vie d’une écrivaine, et surtout de voir que ce métier est compliqué et fastidieux, mais peut se révéler passionnant quand on y prend du plaisir. En tout cas, il semblerait qu’Annie Saumont, malgré son âge avancé, nous réserve encore bien des surprises, et ses idées semblent loin d’être épuisées ! Salima Poumbga, 2nde 6 23 CULTURE & LOISIRS CINEMA A SERIOUS MAN "Receive with simplicity everything that happens to you." Rashi En vingt-cinq ans de carrière et quatorze long-métrages (dont un quinzième, Hail Ceasar, en préproduction), les frères Coen ont su imposer leur marque définitivement inimitable au sein du paysage cinématographique international. Depuis 1984 avec Blood Simple ils poursuivent une oeuvre d'une admirable cohérence, où se côtoient humour noir, préoccupations métaphysiques, critique féroce de l'Amérique contemporaine, personnages insaisissables, étranges ou délirants, récits intrigants en forme de points d'interrogations et d'énigmes, images et dialogues au diapason,... Si avec leur quatorzième long-métrage dénommé A serious man et sorti en janvier 2010 sur nos écrans ils ont, comme l'a d'ailleurs bien souligné une bonne partie de la presse américaine et française, réalisé leur film le plus personnel - évoquant ainsi leur enfance au sein de la communauté juive dans le Minneapolis des années 60, ils n'ont heureusement rien perdu de ces caractéristiques évoquées qui font toute la pulpe et la saveur de leur cinéma. Après une phrase de Rashi ("Receive with simplicity everything that happens to you") et un prologue pour le moins mystérieux qui donnent le la, les frères Coen surprennent par leur habilité à faire immerger le spectateur de façon immédiate dans leur univers. Dès la fin du générique les rebondissements peuvent bien s'enchaîner (Larry apprend de sa femme Judith que celle- ci le trompe depuis longtemps avec Sy et prévoit le divorce, les amants chassent en quelque sorte Larry de chez lui, son frère Arthur se fait de plus en plus envahissant, et cetera), les histoires secondaires s'accumuler (David Dutton, du Columbia Record Club l'appelle plusieurs fois pour lui demander de payer des disques qu'il n'aurait pas commandé, le père d'un japonais de ses étudiants le pousse à la corruption sous peine de le "diffamer", et cetera), le spectateur est dedans en un certain sens (il est captivé, fasciné, aux aguets du moindre détail). Les informations narratives, même celles qui paraissent le plus anecdotiques à premier égard le fait que ce professeur de physique enseigne à ses élèves l'histoire du chat de Schrödinger et le principe di'ncertitude, ou que le disque qu'il est censé avoir commandé est Abraxas de Santana - sont enregistrées par le spectateur. Il y a cette opération immédiate et prodigieuse: les Coen distillent une information narrative quelle qu'elle soit, et celle-ci est réceptionnée sur-le-champ par le spectateur. Par l'image et les moyens du film, les Coen décuplent l'effet et la force de l'histoire qu'ils ont choisi de raconter. Chez eux il n'y a pas de pirouettes stylistiques vaines, d'ornementations gratuites: tout se met au service du récit, et c'est cela qui est si puissant, si génial. bar-mitzvah de Danny, la caméra se veut flottante et cadre l'image en diagonale, nous n'avons pas affaire à un artefact complétement anodin, mais il s'agit d'aller dans la direction de ce que le scénario s'efforçait déjà de montrer: le jeune Danny est complétement shooté, vient d'abuser un peu trop sur la consommation d'herbe & de drogue. Dans d'autres films, c'est un dialogue qui fait comprendre une telle information genre le personnage qui dit: "Je me suis shooté à l'herbe et y a ma barmitzvah aujourd'hui: c'est la merde, je comprends rien à rien" et on sombre dans ce cas automatiquement dans un bavardage des plus lassants. Ici, avec une imparable efficacité, c'est l'image qui parle (le directeur de la photographie Roger Deakins, qui en est avec ce film à sa dixième collaboration avec les Coen a d'ailleurs déclaré qu'il choisit toujours ses films en fonction de l'histoire et des personnages, si ça lui parle ou non, et jamais d'un potentiel intérêt au niveau visuel). Le fait que l'image parle également et se fait vecteur d'un message narratif rend chaque intervention narrative très efficace: le verbe n'est jamais anodin et chacune de ses interventions fait de l'effet. D'autant plus d'effet que, comme souvent chez les Coen, mais particulièrement ici, les dialogues sont réglés avec une précision d'horloger. Ainsi la composition du cadre, le choix des plans ou des mouvements de caméra ne vaut pas pour lui-même, et sert l'histoire. De fait, lorsque lors de la Et puis A Serious Man est d'autant plus fascinant qu'il sollicite le spectateur, sa curiosité, son imagination. Contrairement à bien de "films" où tout 24 CULTURE & LOISIRS est servi sur un plateau au spectateur, où les séquences se succèdent selon un schéma strictement préconçu, où la rupture finale cède au coutumier happy end, ici il s'agit d'impliquer le spectateur, de le titiller. Après l'avoir profondément immergé dans le récit, dans la situation (Minneapolis, années sixties) il faut à présent qu'il se frotte aux mêmes questions que celles qui n'en finissent pas de tarauder et de turlupiner le protagoniste Larry Gopnik, sorte de réplique contemporaine du Job biblique, sur lequel les malheurs ne finissent pas de s'acharner. Pari réussi. Tout comme ce professeur de physique mis à rude épreuve par le destin, nous sommes amenés - et ce à maintes épreuves - à nous écrier tout comme lui: "What? What? What?". Nous ne pouvons comprendre comment les malheurs coïncident à se succéder tous à peu près au même moment sur la tête de ce pauvre Larry. Et puis l'Inconnu, the "Unknown" nous effraie, nous angoisse, inévitablement. Nous n'arrivons pas à suivre, autant que le protagoniste, le conseil du père japonais de Clive qui, dans une séquence exquise, déclare de son délicieux accent dans un anglais fantaisiste: "Keep the mystery". Il nous faut une explication rationnelle, quelque chose qui nous explique, qui nous rassure, qui nous apaise, qui exorcise nos peurs les plus profondes. Mais il n'y a rien, les vérités sont multiples et à double-tranchant, la réalité peut s'avérer être un rêve, et... Les questions n'en finissent pas de tarauder Gopnik, et même Dieu ne lui est d'aucun secours. Sans compter les trois fameux rabbins (le film est d'ailleurs structuré en trois parties: "The First Rabbi", "The Second Rabbi" et "Marshak"). Peut-on accepter que la vie n'ait pas de sens? Les Coen exploitent avec une sidérante habileté cet incessant questionnement existentiel dont nous sommes tous la proie. Peut-être le meilleur est-il encore de savoir "Keep the Mystery". Ou bien, comme nous le conseille donc la phrase de Rashi citée au début, d'accepter tout ce qui nous tombe sur la tête avec simplicité. Ce grand bordel qu'est le monde a quand même quelque chose de stimulant. Matthias Turcaud, TL2 25 CULTURE & LOISIRS CINEMA Chicas: premier film de la dramaturge Yasmina Reza Pilar est espagnole et veuve. Elle a élevé ses trois filles en France. Amoureuse de Fernand, le gérant de son immeuble, elle organise chez elle un déjeuner de présentation. Une réunion improbable où la folie familiale l'emporte. Après Michel Houellebecq avec La Possibilité d'une Île, Philippe Claudel avec Il y a longtemps que je t'aime, Bernard Werber avec Nos Amis les Terriens, Jean-Michel Ribes avec Musée Haut, Musée Bas ou encore Marc Dugain avec Une Exécution Ordinaire, voilà à nouveau, en la personne de Yasmina Reza, un écrivain qui décide d'adapter au cinéma un de ses propres écrits. Mais Yasmina Reza se soucie-t-elle de prolonger un phénomène de mode, et s'inscrire mollement à la suite des Werber, Claudel & Co? Il semblerait plutôt que sa démarche ait un vrai mobile: "J'ai toujours cherché des formes différentes pour m'exprimer, car la vérité est fuyante" a-t-elle ainsi déclaré lors d'une avant-première de son film à l'UGC Ciné Cité Strasbourg. Le film vient ainsi continuer cette exploration des formes d'expression possibles, après notamment le théâtre ("Art", Trois Versions de la Vie, Le Dieu de l'Orage), le récit (Une désolation, Nulle Part), l'essai (Dans la Luge d'Arthur Schopenhauer), le jeu (un rôle important dans Loin d'André Téchiné, en 2001) ou encore la campagne électorale... Autant de formes différentes, pour lesquelles Yasmina Reza s'est tour à tour intéressées, et qui prouvent son insatiable curiosité... Ici la voilà donc à la tête d'un long-métrage du nom de Chicas, adapté de sa Pièce Espagnole, avec un budget de 6 000 000 €. Principalement tourné à Malaga et à Toulouse, Chicas propose les préoccupations habituelles de Yasmina Reza, se focalise en l'occurrence sur les thèmes de prédilection de son théâtre: le déracinement, le désir d'ailleurs, la fratrie, la famille, la mère envahissante,... On y retrouve aussi son écriture incisive, précise et attentive, son sens du comique et de l'observation des moeurs de son temps. De même, elle n'abandonne pas sa fascination pour le Mal - elle dit ainsi: "Depuis que j'écris, je n'écris que sur le Mal. (...) Des gens qui s'aiment benoîtement en courant dans un champ de pâquerettes, ça ne m'intéresse pas." Mais si la dramaturge adulée dans le monde entier et lauréate de deux Molières de l'auteur (la 26 CULTURE & LOISIRS première fois en 1987 pour Conversations après un enterrement, la deuxième fois en 1995 pour "Art") reprend les ficelles et les ingrédients qui ont fait le succès de ses pièces, ce n'est pas pour autant que, à l'occasion de son passage à l'écran, elle sombre dans le piège éculé du théâtre filmé. Elle le disait bien également elle-même: le choix du cinéma n'était pas anodin, c'était vraiment la dimension cinématographique qui l'intéressait, la dimension "picturale, silencieuse, musicale". Ce qui est avant tout saisissant devant ce premier long-métrage, c'est que, malgré sa relative brève durée d'1h24, il se présente d'une grande densité, d'une grande richesse. Portrait de famille déséquillibrée (le scénario paraît centré sur le moment que cette famille passe ensemble), film expérimental (les scènes de la pièce bulgare que répète Aurélia), réflexion sur les couples et les générations (Carmen Maura et Emmanuelle Seigner qui se confrontent), comédie burlesque ("-Vous tremblez. Vous tremblez. - Il le dit deux fois? - Non, mais tu réponds pas!"), drame (le moment où l'actrice Nuria, qui vient pourtant d'être auréolée d'un prix aux BAFTA décerné par Stephen Frears, ingurgite tristement des chocolats, toute seule, dans sa grande chambre d'hôtel) et journal intime (Reza a concédé le caractère parfois autobiographique du film, de plus les souvenirs d'enfances renvoient à une certaine magnifique, s'enlacent sur un fauteuil, pleins d'affection forme de journal intime filmé). Chicas parvient donc à être bourrue. tout cela, à évoquer tout cela. Évidemment le mélange ne Les plaisirs sont nombreux en fin de compte devant va pas sans maladresse, mais il a un tel charme que le ce Chicas. Celui de voir Emmanuelle Seigner, décidément spectateur se laisse facilement emporter. sublime dans ce rôle d'actrice en phase d'instabilité, et Reza capte avec magie des moments qu'on a trop l'habitude de ne pas voir justement, puisque exceptionnellement beaux dans leur évanescence dans l'ombre de son mari Roman Polanski. Celui douloureuse: les seins de Nuria rapidement révélés d'apprécier les dialogues ciselés de Yasmina Reza ("Je lorsqu'elle met une des deux robes assez "modernes" veux me comporter en tourtereau si l'envie m'en vient" dit qu'elle compte initialement mettre pour la cérémonie des Fernand) prononcé par des acteurs particulièrement BAFTA (avant d'opter, sur le conseil de sa mère Pilar, pour délicieux (notamment André Dussollier et Bouli Lanners). la robe mauve qu'elle portait déjà au Festival de Cannes); Ou encore celui de constater la structure finalement Christal qui, dans un bref moment d'épanouissement, originale du film, qui propose autant de tranches de vie, ou danse tout en courant dans la rue, totalement décomplexée; de visions à la Christian Bobin ou à la Rimbaud. Une belle Fernand et Pilar qui, dans un plan large particulièrement manière de prouver qu'il existe une équivalence admirable, demeurent à deux mètres de distance, indécis, cinématographique à l'écriture de la poésie ou à celle du dans un jardin public, alors que Fernand vient de faire sa fragment. demande de mariage ("Veux-tu m'épouser?"); ou encore Matthias Turcaud, TL2 Maurice et Aurélia qui, dans un moment absolument 27 CULTURE & LOISIRS Soul Kitchen : comédie gastronomique de Fatih Akin sortie le 17 mars en France "Sicher ist nur dass nichts sicher ist und selbst das ist nicht sicher". Ilias (Moritz Bleibtreu) "Il n'y a qu'une chose qui soit sûre c'est que rien n'est sûr et même ça c'est pas sûr. Nombreux sont les journalistes, cinéphiles et autres spectateurs avertis à s'être étonnés de voir Fatih Akin, réalisateur du sombre Head-On, histoire très noire d'un mariage blanc entre deux écorchés vifs s'enlisant dans la drogue et l'alcool et de Auf der anderen Seite (De l'autre côté), véritable tragédie moderne sur l'incommunicabilité dans un monde globalisé, à la tête de cette comédie pétrie de bonne humeur communicative et d'optimisme pétillant. "I need to laugh" fut la réponse la plus récurrente. Le cinéaste germanoturc éprouvait en effet le besoin urgent de rire, après la mort de son producteur précédant six lourds mois de deuil. A cela s'ajoute aussi l'envie de ne pas être catégorisé dans la case "auteuriste", être rangé sous l'étiquette "caviar, cannes & co" à cause d'un tas de récompenses (des Lolas à foison, un Ours d'or à Berlin, un Prix du Scénario à Cannes,...) et une presse à ses pieds: "I was getting the slave of the success". Et parce que justement, selon lui, un grand réalisateur est avant tout un réalisateur libre : "I want to be a great director and a great director should be able to do everything". C'est là qu'on ne peut que l'approuver. Nous vient donc Soul Kitchen, comédie, sortie le 25 décembre 2009 en Allemagne, en salles le 17 mars 2010 en France, et qui s'impose, de la première à la dernière image, comme une revigorante bouffée d'oxygène. Le film parle de Zinos, un jeune restaurateur qui tient un restaurant nommé "Soul Kitchen" à Hambourg. Pour l'instant ça va: la cuisine ne vaut certes pas celle de Paul Bocuse (pizzas dans le micro-onde, frites hâtivement jetées dans la friteuse, poissons pânés rapidement réchauffés problèmes semblent coïncider à tomber sur sa tête: on lui rappelle qu'il doit payer, on l'engueule et on le menace à cause de l'état de sa cuisine; un agent du FISC vient lui enlever ses disques; ses clients partent tous en voyant leurs Wiener Schnitzel et leurs Burgers troqués contre les plats élitistes et raffinés de l'irascible Shayn, le nouveau chef cuisinier de "Soul Kitchen"; un requin immobilier, un ancien ami d'école, le harcèle sans pause et s'obstine à vouloir racheter le restaurant... En plus les problèmes ne s'arrêtent pas à l'aspect professionnel: la copine de Zinos, Nadine, le quitte pour aller à Shanghai; Ilias, sorti de prison temporellement, envahit quelque peu la vie de son frère... Et puis, cerise sur le gâteau, Zinos a d'affreux problèmes de dos! Pendant l'absence de son frère, Ilias perd tout le restaurant au jeu dans une partie qui n'est contre personne d'autre que... Thomas Neumann, ce fameux ancien ami d'école et requin d'immobilier hambourgeois qui ne finissait pas de convoiter avidement le fameux restaurant! Les deux frères se retrouvent dans une chambre qui... brûle et il s'avère que Nadine s'est amouraché à Shanghai d'un Chinois et notre pauvre héros se rend chez un chiropraticien aux manières pour le moins radicales... et... et... dans une mauvaise poêle, aliments nonchalamment achetés dans le supermarché du coin, ketchup et mayonnaise automatiquement rajoutés à chaque plat), mais le jeune homme d'origine grecque a ses clients, et qui Au simple relevé des faits narrés se satisfont pleinement de ce qui est proposé. Mais c'est là que tous les par le film, on pourrait croire que 28 CULTURE & LOISIRS justement le spectateur est à bout de souffle devant cet enchaînement inlassable de rebondissements rocambolesques, et que justement ce septième longmétrage du cinéaste germanoturc Fatih Akin est tout sauf une bouffée d'oxygène. Et pourtant, si, Soul Kitchen est une bouffée d'oxygène et d'air frais. Loin de paraître grotesque, superflu ou artificiel, le film, son histoire, ses personnages, ce dont il parle nous parviennent avec une fluidité et une qualité qui tiennent de l'évidence. La VIE qui y est contenue (cette VIE dont rares sont les réalisateurs qui sont parvenus à la restituer sur une pellicule de film: on peut citer Jean-Luc et Pierre Dardenne avec L'Enfant, Abdellatif Kechiche avec La Graine et le Mulet, Laurent Cantet avec Entre les murs,...) nous éclabousse littéralement. Tout respire dans ce merveilleux film de Fatih Akin; tout vit et bondit. Une fabuleuse mise en scène nous amène à être au plus près des personnages; notre battement de coeur devient similaire à celui des personnages. Un superbe travelling en plongée sur des plateaux de repas portés à bout de bras par un serveur et dont les plats disparaissent comme des petits pains nous amène dans cette ambiance d'euphorie qui règne à ce moment-là dans un "Soul Kitchen" qui a enfin trouvé son public de clients, où la musique triomphe, et où toutes et tous finissent par céder à la Volupté et à entrer dans une sorte de festival du coït après avoir dégusté les desserts particulièrement aphrodisiaques concoctés par Maître Shayn. Dans tous les cas, le spectateur est dedans. Car en fait Soul Kitchen, Prix du Jury au dernier Festival de Venise (eh! oui même quand Fatih Akin fait une comédie, il reçoit des prix!), sert aussi à redire la nécessité d'un spectateur qui soit dedans. Un spectateur qui jubile, frémit, pleure, rit; se laissant emporter par le flot des images et des sons, à des milles du regard détaché et élitiste devant un morceau de cinéma inaccessible et à forte gamme auteurisante. C'est un tel spectateur qui se retrouve devant ce film de Fatih Akin: les pupilles transcendées par une mise en scène dont la remarquable fluidité n'a de pair que la géniale inventivité, les papilles enchantées par un merveilleux festival de saveurs et de délices gastroniques, les oreilles comblées par une bandeson particulièrement ébouriffante qui swingue, groove, gère et déchire à loisir (Kool & The Gang, Quincy Jones, Curtis Mayfield...) , coeur passionné par l'amour et l'humanité bouleversante dont sont empreints le film, le cortex aux aguets par un scénario riche et dense. Soul Kitchen est bienvenu pour mille raisons: 1) il réhabilite la comédie, genre injustement décrié et tout aussi injustement considéré comme moins noble que le drame 2) il réconcilie tout le monde: cinéphiles, grand public, ennemis de l'inctellectualisme comme cérébraux, box-office (3 millions déjà atteints en Allemagne depuis sa sortie, le 25 décembre 2009) et critiques 3) il est un film de divertissement comme de réflexion 4) il conjugue Amour avec Humour 5) il nous laisse avec autant de grelots au coeur et de larmes à l'oeil (ah! cette déclaration d'amour à Hambourg; ah! cette belle histoire de frères) que de zygomatiques épuisés et de sourires béats (ah! cette scène finale du bouton; ah! ce personnage du cuisinier psychopathe) Bref courez-y! Matthias Turcaud, TL2 Source des photos : Soul Kitchen. In: Allociné [en ligne]. Allociné.fr, 2010. [Consulté le 18 mars 2010]. Disponible à l'adresse: www.allociné.fr 29 CULTURE & LOISIRS Fatih Akin Né le 25 août 1973 à Hambourg, Fatih Akin est le fils d'immigrés turcs qui se sont installés en Allemagne au milieu des années 60. Son père travaille dans une entreprise de nettoyage de tapis, sa mère est institutrice dans une école primaire. Dès son adolescence, sa passion se fait jour: il fait jouer des pièces à l'école, puis dans un groupe de théâtre "off" au Thalia Theater, écrit des nouvelles et des scénarios, et tourne ses premiers films amateurs avec une caméra Super 8. En 1993 il entre comme stagiaire à la maison de production hambourgeoise Wüste. De 1994 à la 2000 il suit une formation d'art audiovisuel à la réputée Hamburger Hochschule für bildende Künste, où il tourne deux courtsmétrages: Sensin - du bist es! (1995) et Getürkt (1996), plusieurs fois récompensés lors de festivals internationaux. Puis dès son premier long-métrage, Kurz und schmerzlos (L'Engrenage), en 1998, il accède à une reconnaissance de la critique: le film reçoit plusieurs nominations aux Lolas, il est comparé au Mean Streets de Scorsese. Dès cette étape de sa carrière, Fatih Akin se montre éclectique: après un thriller sombre il réalise un road-movie délibérément léger et romantique, Im Juli (Julie en Juillet), en 2000. Après Solino en 2002, l'histoire de deux frères italiens immigrés à Duisburg, c'est la consécration totale pour le jeune cinéaste germano-turc, internationalement reconnu et plébiscité par une presse mondiale aux anges: Ours d'Or à Berlin en 2004 pour Head-On, Prix du Scénario à Cannes en 2007 pour Auf der anderen Seite (De l'autre côté). Désirant ne pas être enfermé dans la case "auteuriste" ou dans la case "Cannes, Caviar & Co", Fatih Akin signe une comédie culinaire et musicale avec Soul Kitchen. Mais le succès vient une nouvelle fois: Prix du Jury au Festival de Venise en 2009. pour un monde globalisé: les personnages de De l'autre côté sont entre l'Allemagne et la Turquie, dans Solino les deux frères sont des Italiens qui immigrent en Allemagne, dans son court-métrage tiré de New York, I love you il fait se rencontrer un peintre turc et une marchande chinoise. On voit aussi comme la culture turque l'a influencé tout autant que la culture allemande: il livre une déclaration d'amour à sa ville natale, Hambourg dans Soul Kitchen tout comme il déclare haut et fort sa flamme pour la musique turque dans le documentaire Crossing the Bridge - The Sound of Istanbul, 2005 (Baba Zula, Mercan Dede, Sertab Erener...); c'est aussi très touchant dans De l'autre côté où il offre un grand rôle à Hanna Schygulla, actrice allemande, égérie de Fassbinder, et un autre grand rôle à Nursel Koese, légende en Turquie. Fatih Akin= cinéaste du métissage, cinéaste de la globalisation, et constructeur de passerelles (Crossing the Bridge: comme le dit explicitement le titre de son documentaire sur la musique d'Istanbul). Je pense que le cinéma de Fatih Akin correspond très bien à notre époque. C'est un cinéma globalisé 30 Matthias Turcaud, TL2 CULTURE & LOISIRS Paroles de Jean Ferrat Morceaux de chanson et extraits d'interview. Paroles d'un homme engagé, d'un rebelle acharné, d'un poète convaincu féru d'Aragon qu'il a mis en chanson, d'un chantre de la beauté du monde. On aimerait s'écrier avec lui: Que c'est beau la vie... "Le XXIème siècle a inauguré et laisse envisager le pire pour l'avenir, je veux dire, la montée dans ce nouveau siècle des fanatismes religieux de tous ordres qui amènent inévitablement des positions racistes, qu'il faut absolument combattre." "Le poète a toujours raison/Qui voit plus haut que l'horizon/Et le futur est son royaume/Face à notre génération/Je déclare avec Aragon/La femme est l'avenir de l'homme" "Où est-ce qu'on va avec une civilisation qui sait aller sur la Lune mais qui ne sait plus comment faire la soupe?" "De plaines en forêts de vallons en collines/Du printemps qui va naître à tes mortes saisons/De ce que j'ai vécu à ce que j'imagine/Je n'en finirais pas d'écrire ta chanson Ma France" "Aimer à perdre la raison/Aimer à n'en savoir que dire/A n'avoir que toi d'horizon/Et ne connaître de saisons/Que par la douleur du partir/Aimer à perdre la raison" "Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre/Que serais-je sans toi qu'un coeur au bois dormant/Que cette heure arrêtée au cadran de la montre/Que serais-je sans toi que ce balbutiement" (texte d'Aragon) "Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres/Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés/Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre/Ils ne devaient jamais plus revoir un été" "Il se peut que je vous déplaise/En peignant la réalité/Mais si j'en prends trop à mon aise/Je n'ai pas à m'en excuser/Le monde ouvert à ma fenêtre/Que je referme ou non l'auvent/S'il continue de m'apparaître/Comment puis-je faire autrement/ Je ne chante pas pour passer le temps" "Au-dessus des eaux et des plaines/Au-dessus des toits des collines/Un plain-chant monte à gorge pleine/Est-ce vers l'étoile Hölderlin/Est-ce vers l'étoile Verlaine" "Il y a deux types de chansons: la chanson d'expression et de consommation." "Ils quittent un à un le pays/Pour s'en aller gagner leur vie/Loin de la terre où ils sont nés/Depuis longtemps ils en rêvaient/De la ville et de ses secrets/Du formica et du ciné/Les vieux ça n'était pas original/Quand ils s'essuyaient machinal/D'un revers de manche les lèvres/Mais ils savaient tous à propos/Tuer la caille ou le perdreau/Et manger la tomme de chèvre" Paroles de Jean Ferrat recueillies et choisies par Matthias Turcaud, TL2 31 CREATIONS Le cancre Non mais, avec les résultats que vous avez, mon petit monsieur, il ne vous reste plus que la prostitution Le verdict était tombé comme un cheveu sur la soupe. Il ne s’y était pas du tout attendu. Que faire maintenant ? Il se sentit désorienté, perdu, égaré. Il n’avait plus de boussole, plus de repère, aucun repère ; il déambulait comme un somnambule ivre dans des sphères indéterminées. Il s’assit à un banc, avala plusieurs bonbons contre la toux alors qu’il n’avait pas de toux. Il lui semblait ne plus voir clair. Tout se brouillait devant lui, il pouvait à peine dire si les personnes qui se trouvaient devant lui étaient de sexe masculin ou féminin. Faute de patience, il croqua un des bonbons contre la toux qui se promenait actuellement dans sa mâchoire. Et crac. Le bruit déchira l’espace de sa dentition. Il reprit une dizaine de bonbons qu’il jeta nonchalamment dans le gosier, toujours assis sur ce banc, là. Il ne savait plus où, quoi, comment, qui, pourquoi. Aucune motivation, aucune, rien, ne le portait. Il se sentait mou, raplati, raplapla. Et hop encore une poignée de bonbons contre la toux dans sa bouche jetée, alors qu’il n’avait même pas de toux. Le verdict implacable lui revenait à l’esprit : Non mais, avec les résultats que vous avez, mon petit monsieur, il ne vous reste plus que la prostitution Il prit son courage à deux mains, et jeta à nouveau un coup d’œil sur son bulletin trimestriel de notes. 3 en philosophie, 2 en géographie, 0.5 en mathématiques, 1 en français. C’est vrai que ce n’était pas très glorieux. Mais de là à tomber dans la prostitution… Il pourrait toujours, peut-être, pourquoi pas, se débrouiller autrement… Il essaya de penser à autre chose ; le début du printemps par exemple. Il s’empara d’un journal et essaya de s’intéresser successivement à « Fillon à la reconquête de l’Ouest », au « Siège des Hôpitaux de Paris occupé depuis jeudi », « Pour Martine Aubry, le PS doit être ‘au plus haut’ », « Michel Charasse prête serment au Conseil constitutionnel », « Sarkozy à Londres pour rencontrer Brown ». Mais en vain. Lui revenait cette phrase terrible, où il n’y avait pas la place pour la moindre réserve : Non mais, avec les résultats que vous avez, mon petit monsieur, il ne vous reste plus que la prostitution. Il commença à angoisser. Et si, vraiment, il devenait un prostitué ? Condamné à errer dans la nuit, au merci du premier client qui… Il se leva, l’idée lui vint de fumer une cigarette. Mais il n’avait pas de cigarette, pas de briquet, pas de quoi acheter une cigarette ou un briquet, et pas envie de mendier de l’argent. Donc… Alors il ne fuma pas de cigarette. De toute façon ce n’était pas du tout indispensable. Il ne savait plus comment ça lui était venu, cette idée de fumer une cigarette ; quelle idée saugrenue, c’est vrai, franchement. Bon. Il fallait entreprendre quelque chose. On ne pouvait pas rester les bras croisés pour un temps aussi long. L’homme était fait pour agir. Pas pour blablater ou remplir son cortex de tergiversations futiles. Il marcha dans une rue, sans savoir exactement où il allait, les idées un peu nulle part. Il repensa à ses notes du bulletin trimestriel : 3 en philosophie, 2 en géographie, 0.5 en mathématiques, 1 en français. C’est vrai que ce n’était très glorieux. Il alla dans un magasin, et puis en ressortit. Il longea un Kebab, une pharmacie, un cabinet de dentiste. Et si il allait se refaire les dents ? C’était peut-être le bon plan pour se changer les idées, non ? Mais il n’avait pas d’argent. Sans argent, pas de propriété privée, sans propriété privée pas de swimming-pool, sans swimming-pool pas de midinettes sexy aux gros seins siliconés, sans midinettes sexy aux gros seins siliconés pas de coït, sans coït pas de plaisir, sans plaisir pas de joie, sans joie pas de vie, sans vie… Non, il ne fallait pas raisonner comme ça, il ne fallait pas raisonner comme ça, nom d’un chien ! Pourquoi raisonnait-il comme ça, tout d’un coup ? Quelle mouche tsé-tsé l’avait-elle donc piqué ? Pourquoi tant de considérations pessimistes et apocalyptiques comme ça d’un coup ? C’était peut-être à cause de ce bouquin de Shopenhauer qu’il avait entamé la veille parce qu’il n’arrivait pas à s’endormir. Alors maintenant que faire ? Allez, prendre une décision, allez ! Trouver quelque part la force, le courage, la hardiesse pour prendre une décision, fût-elle infinitésimale et insignifiante ! - Excuse-moi… Il se retourna. C’était… oh ! bon dieu ! était-ce possible ?! - Excuse-moi de t’aborder comme ça, à brûle-pourpoint, mais j’avais une furieuse envie de t’inviter pour aller boire un café. Il dit oui. Et ils partirent boire un café. Ils allaient donc boire un café – quelle heureuse initiative ! Pour les sous pas de problème, puisqu’elle l’invitait. Ils allaient donc boire un café. Ils allaient s’asseoir quelque part, commander, attendre que le café arrive, papoter, se faire des petites œillades sympathiques, et une fois le café arriver le siroter lentement en le dégustant et en prenant son temps. Et après ? Après, ce serait terminé. Le café, envolé, parti en fumée ! La vie continuerait. Et il verrait ce qu’il ferait. Matthias Turcaud, TL2 32 CREATIONS la nuit quand tous les chats sont gris Il était sorti à tout hasard, sans rien attendre de particulier de cette nuit qui semblait pareille à toutes les autres. Dehors les lampions des bars se confondaient avec les phares des bagnoles. Par terre la neige recouvrait tout de son grand tapis, seules des bouts de cigarettes et des capsules de bière 1664 dépassaient quelques fois du tapis de neige par terre. Il se dirigea d'un pas lent sur l'avenue principale. Devant lui un feu rouge devenait vert. Derrière lui un feu vert devenait rouge. Dans l'air nocturne des pétards résonnaient - ce n'était pourtant pas le Nouvel An. Dans un bosquet ombrageux, sperme, sang, larmes et urine semblaient se déverser en égale quantité. Sur le trottoir voisin un clochard esquissait les gestes et les mimiques de la mendicité. D'un lieu incertain lui parvenait une rengaine familière, qu'il n'avait cependant pas le temps de déchiffrer, car le vent l'emportait. Et lui continua son chemin sur cette avenue principale où il s'était engagé. Derrière lui un feu vert devenait rouge. Devant lui un feu rouge devenait vert. Il faisait vraiment un froid de canard en cette nuit de février et en plus - cerise sur le gâteau - il avait oublié son manteau. Comme un égaré, il regardait se succéder devant ses yeux fatigués les sex-shops et les döner kebabs. Bientôt les strings se mélangeaient inextricablement aux yufkas et aux oignons. Il voyait des godes remplis de viande de poulet, des soutiens-gorge à la sauce blanche, et Pamela Anderson baragouinait quelques mots de turc. Qu'était-il venu faire déjà? Sortir... ah! oui. Sortir. Il décida de traverser la rue. A cause de la neige il y avaient des passages cloutés partout. Une Toyota visiblement pressée fut à deux doigts de l'écrabouiller. Mais il survécut. Dans le ciel un disque opale conférait à la ville un aspect fantomatique. Ca s'appelle la lune je crois. Il passa devant un bar illuminé aux néons bleus. Il décida de continuer son chemin. Tout à coup il s'arrêta. Il ne savait pas au juste ce dont il voulait, ou ce qu'il voulait. Avait-il soif, faim? Voulait-il baiser, danser, oublier quelque chose - son chagrin, son désespoir? Il scrutait l'horizon d'un air morne, vide. Un couple passa devant lui, très près, à quelques centimètres, le frôlant presque. Apparemment ils batifolaient, affichant une euphorie réciproque. L'élément masculin du couple se précipita sur l'élément féminin du couple, lui déboutonnant hâtivement tout ce qu'elle pouvait bien avoir de boutons. L'élément se laissa faire, s'apprêtant visiblement à la fornication. Était-ce le festival du coït ce soir? Il continua son chemin. Plusieurs restaurants avaient déjà fermé. On était au mois de février, et pourtant il y avait encore un arrière-goût de Nöel dans la ville. Un Noël périmé. Tout à coup il eut un pressentiment: il avait peut-être reçu un message de... Il sortit en vitesse son portable de la poche de son pantalon, l'alluma, composa son code secret, alla sur... Peut-être lui avait-elle envoyé un SMS... peut-être et non. La boîte de réception affichait 0. Rangeant son portable à sa place, il eut l'idée de traverser une rue supplémentaire. Des tohus-bohus confus lui parvenaient des tavernes et des bars qui brillaient comme des cavernes d'Ali Baba. Il rentra quelque part. Dans un bar, dont il ne prit pas le temps de regarder le nom. Il faisait sombre ici. Ce bar-ci n'était pas une caverne d'Ali Baba; on n'y voyait goutte. Il voulut s'asseoir sur un tabouret, mais il n'y en avait plus. Il resta donc debout. A côté de lui des minettes se pavanaient en exhibant leurs décolletés. Sur l'estrade des gens paraissaient danser. Dans les verres la bière coulait. Elle se laissait confondre avec la vodka. On ne distinguait plus la nuance de couleur; il faisait tellement sombre. Sur l'estrade par contre il y avait plus de lumière. Il commanda un verre, mais le barman ne l'entendit pas. Sa parole fut avalée par l'espace. Sur la piste de danse - l'estrade - les membres des danseurs s'envolaient dans tous les sens. Le déhanchement significatif d'une jeune femme attisa sa soif de désir. Il réussit à commander finalement un verre de cognac, qu'il se mit à siroter mystiquement, debout, près du comptoir. Dehors il neigeait encore probablement. Sur un tube de techno les membres des danseurs se tortillèrent frénétiquement. 33 CREATIONS Il ne savait plus quoi faire. Il sentait qu'il n'avait pas trop envie de danser. Il finit le reste de son verre de cognac cul-sec, puis ses regards retournèrent à la piste de danse. Il lui vint l'idée de regarder à nouveau s'il avait reçu des SMS sur son portable, mais il s'avéra bientôt qu'il en avait reçu 0. Dans tout le bar se déployait une énergie sexuelle effrénée. Et que je te colle la main aux fesses, et que je te tâte les tétons, et qu'on va dans un p'tit coin! C'était le Sabbat des Orgiaques, l'Eden des Dégénérés. Même lui se sentait attiré. Il avait de la peine à réfréner ses désirs. Finalement il sortit. Ce n'était pas sa place. Qu'était-il venu faire de nouveau? Sortir... ah! oui. Sortir. Il avait fait quelques pas sur le trottoir, lorsqu'il sentit quelque chose derrière lui. Il se retourna. C'était une... mais il n'eut pas même pas le temps de... car elle... aussi vite que... à une vitesse... ça elle... et elle... mais il... et elle... puis il... et elle... ah!il... oh!elle... il voulut... et... mais... oui... et... c'était... tout à coup... et... la douceur de... il ne la... et ses... puis ses... et surtout ses... ah!... oh!... la chaleur de... sa... ses... qui... et se confondant à lui... il... et... mais... et il voulut... Mais il s'aperçut qu'elle était partie. Trop tard. Trop vite. Il s'engagea sur l'avenue principale, sur laquelle il s'était déjà engagé, avant. A cause de la neige il y avaient des passages cloutés partout. Une Toyota visiblement pressée fut à deux doigts de l'écrabouiller. Mais il survécut. Dans le ciel un disque opale conférait à la ville un aspect fantomatique. Ca s'appelle la lune je crois. matthiasturcaud 34 JEUX SOLUTION - MOTS-CROISES N°2 (Pontonews N°26, février 2010) Horizontalement : I Morceau de texte II lisière des bois, partie de l’être humain qui pense et qui éprouve des sentiments III Raccourci de l’école élémentaire, période IV salée quand elle est de sodium V Institut de chimie organique et analytique, allure à cheval VI début d’un arrêt de tram et d’un quartier VII brouter, 5ème lettre de l’alphabet VIII a le courage de le faire, marque de biscuit, bruit de klaxon IX grande quantité d’animaux ou de personnes formant un nuage, sans habits X famille qui n’est pas pauvre, Vénus de Prosper Mérimée Verticalement : 1 Forme d’écriture, grand-mère allemande 2 unité de mesure de superficies, chiffres significatifs 3 Note, Professeur de sciences physiques 4 a halé, Union Européenne 5 de Arabe, avec des ailes 6 bavardage malveillant, assassine 7 atterir sur l’eau 8 petit sans fin, conjonction servant à relier deux mots ou groupes de mots 9 Chaine de télévision franco-allemande, Unité Nationale Lycéenne 10 auxilliaire, comme une mule 35 Pontonews Rédaction et Administration : Lycée International des Pontonniers 1 rue des Pontonniers 67 081 Strasbourg Cédex Mail : [email protected] Directrices de publication : Mesdames Corbin, Martineau, Rouve Maquette, mise en page , corrections : Madame Corbin, Madame Martineau, Madame Rouve Illustrations de couverture : Eline Roane de Mathuisieulx Ont réalisé ce numéro : Lena Burgard, Anouk Heili, Robin Ormond, Eline Roane de Mathuisieulx, Matthias Turcaud, Elise Weissenbacher, Camilla Zerr. Avec les contributions de : Ariane Kupferman-Sutthavong, Salima Poumbga, M. Jacques Otto. Retrouvez le Pontonews et son supplément littéraire Le Pont à l’Encre en téléchargement gratuit (et en couleurs !) sur le site Web du C.D.I. à l’adresse : http://www.lyc-sections-internationales-strasbourg.ac-strasbourg.fr/cdi . 36